Revue des Études Amazighes, 8, 2021, p. 9-23
La théorie minimaliste forte et les cycles dérivationnels des
questions OUI/NON et des questions explicatives
Rachid ISEKSIOUI
Université Cadi Ayyad,
Faculté des Sciences Juridiques, Économiques et sociales-Marrakech
L’explication des mécanismes dérivationnels des phrases
interrogatives en amazighe1 est l’objet cardinal de cette étude. Même
en ayant une structure superficielle différente, au niveau des items
surtout fonctionnels et lexicaux définissant le matériel dérivationnel et
aussi le recours aux mécanismes suprasegmentaux, de celle des
constructions déclaratives, nous supposons que la formation des
interrogatives est prise en charge par les mêmes opérations
computationnelles. La vérification de cette supposition sera orientée
par les objectifs suivants :
i. déterminer l’architecture interne des interrogatives en
amazighe ;
ii. préciser ses phases dérivationnelles.
1
Les abréviations utilisées sont les suivantes : A = adjectif ; D = déterminant ; PSC
= proposition subordonnée complétive ; CP = projection de complémenteur ; COMP
= complémenteur ; forme logique = F-L ; forme phonologique = F-P ; N =
numération ; GG = grammaire générative ; L-E = langue externe ; PM = Programme
Minimaliste ; SS = structure de surface ; SI = structure interne ; IP = projection
d’Inflexion ; [-L] = tête fonctionnelle ; [+L] = tête lexicale ; AgrsP = projection
d’accord sujet ; AgroP = projection d’accord objet ; vP = leight verb « petit verbe » ;
SClh = système computationnel ; T = temps ; TP = projection de temps ; timing zéro
= T0 ; V = verbe ; VP = projection du verbe ; NegP = projection de négation ; [uV] ;
le trait ininterprétable de la tête V ; MaxP = projection maximale ; Spec =
spécifieur ; PF = projection fonctionnelle ; ÉA = état d’annexion ; ÉL = état libre ;
Part.Préd = particule prédicative.
9
Bien que le parler d’Imi N Tanoute soit le parler de base adopté
pour notre étude, vu la progression des études linguistiques sur
l’amazighe, nous analysons notre objet d’étude d’une part dans
l'ensemble des dialectes amazighes marocains et, d’autre part, le
confrontons avec les données d’autres langues, notamment le français,
l’anglais, l’arabe standard et l’arabe marocain pour en détecter les
principes en commun. Dans le même ordre d’idées, les études
consacrées strictement aux structures interrogatives sont, à notre
connaissance, d’une denrée rare. Justinard (1926), Renisio (1932) les
présentent sous forme de dialogue et d’énoncés isolés. Étant donné
que ces études étaient pour apprendre les parlers étudiés, ils
n’examinaient pas les aspects dérivationnels des interrogations. En
effet, les études faites dans le cadre fonctionnaliste Penchoen (1973),
Bary (1983) et Bouyelmani (1998) ont étudié les particules et les
structures interrogatives. En gros, ces études approvisionnent des
descriptions éclaircissant la grammaire des dialectes étudiés. Pour les
recherches à tendance explicative, elles sont réalisées dans le cadre de
la Grammaire Générative. Dans ce sens, les interrogatives en
amazighe ont été soulevées dans Ennaji (1982), Ennaji (1989),
Boukhris (1998, 2013) et Iseksioui (2019a). Ces derniers ont signalé
des ressemblances au niveau de la structure interne, de la syntaxe des
verbes et de la position initiale des éléments-Wh, pourtant d’autres
points doivent être revus pour plus d’explications en ce sens que les
résultats d’analyses ne peuvent pas dépasser les limites
épistémologiques du modèle théorique appliqué.
Pour atteindre les objectifs signalés ci-haut, nous adoptons la
théorie minimaliste forte « the strong minimalist theses », élaborée
dans Chomsky (1999, 2000, 2001, 2003 et 2008). Ce choix émane de
l’efficacité des mécanises que propose la TMF et son exigence de la
comparaison entre les langues. En se servant donc de cette théorie,
nous comptons définir l’architecture interne des structures
interrogatives en amazighe et déterminer ses cycles dérivationnels.
Notre article s’organisera en fonction de trois sections ; la première
sera consacrée à la présentation de l’architecture interne des
interrogatives en amazighe ; la deuxième aura comme objet d’analyser
les mécanismes dérivationnels des questions OUI / NON en amazighe.
La dernière section, elle, sera dédiée à l’analyse des étapes
dérivationnelles des questions explicatives en amazighe.
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1. L’architecture interne des interrogatives
Conformément à la théorie X-barre2, la structure de base des
phrases est présentée en (1). La phrase dans la conception minimaliste
est la projection maximale de la IP (Chomsky (1993, 1995), Boukhris
(1998, 2013) et Iseksioui (2019a)). En effet, le type des phrases est
précisé au niveau de la position C de la phase CP et déterminé par la
nature de son trait. Considérons les structures suivantes :
1 a. [Spec, I, IP [Spec, V, VP]]
b. [Spec, C, CP [Spec, I, IP [Spec, V, VP]]]
Nous remarquons que la tête des structures en (1) est occupée par
différentes projections fonctionnelles ; IP et CP. Chacune de ces
projections s’active suivant des conditions morphosyntaxiques
prédéterminées au niveau de la numération ; (1a) est donc
l’architecture d’une structure minimale alors que (1b) est celle des
structures syntaxiques dont le matériel dérivationnel comporte des
têtes fonctionnelles ayant le trait catégoriel [C]. Pour saisir le
fonctionnement des moules en (1), considérons les exemples suivants :
2 a. is ifta babak s ssuq?
Est-ce que 3ps+partir+acc père ton au souk.
« Ton père, est-il parti au souk ? » (Iseksioui, 2019a : 174)
b. ign ɣ luqt.
3ps+dormer+acc pré EL+temps
« Il a dormi à temps. »
La structure de surface3 de (2b) montre que l’entrée lexicale V gn
« dormir » est générée en tête de la phrase. Ce verbe portant le trait
catégoriel [V] occupe la position syntaxique [V, VP], celle-ci est
structuralement le complément de la IP. Vu que gn « dormir » est
spécifié par le trait ininterprétable [uV], il se déplace de sa position de
base vers la [I, IP] pour le vérifier et l’interpréter afin de ne pas
apparaitre vers la forme logique et la forme phonologique. (2a), elle,
est la projection supérieure de la phase CP. Cette dernière ccommande structuralement la IP. En respectant le trait de la
compatibilité catégorielle (Iseksioui, 2019a) qui stipule à ce que le
2
Cette théorie est élaborée à partir de l’hypothèse lexicaliste proposée par Chomsky
(1970). Ladite théorie tend à homogénéiser la structure interne des différentes têtes
de la langue.
3
Ce concept n’est pas utilisé comme niveau d’analyse. Il est utilisé pour faire la
différence entre la langue interne et la langue externe.
11
trait catégoriel d’une tête fonctionnelle ou lexicale soit compatible
avec le trait de la position syntaxique, la tête COMP qui apparait en
tête de (2a) est générée au niveau de la position [C, CP]. Ajoutons à
cela que la différence entre les structures en (2) est marquée par le
trait [+ /- Wh], c’est-à-dire que la phrase interrogative (2a) porte le
trait [+Wh], cependant que la construction déclarative (2b) est
spécifiée par la propriété [- Wh]. L’architecture interne d’une structure
interrogative se présente ainsi :
3.
Comme nous l’avons signalé auparavant, la projection IP est
structuralement gouvernée par la phase CP. Cette dernière porte le
trait [+/- Wh] qui détermine si la structure syntaxique en dérivation est
déclarative ou interrogative. (3) s’étend aux différents items lexicaux
ou fonctionnels définissant le matériel dérivationnel des énoncés. Il est
à préciser que le schéma en (3) explique également le processus
structural des interrogatives des autres langues, comme en témoignent
les structures interrogatives infra :
4 a. ˀa racidan ḍarabta ?
Est-ce que Rachid acc+frapper+2ps.
« Est-ce que c’est Rachid que tu as frappé ? » (Iseksioui,
2019a : 175)
b. wac klitu lɣda ?
12
Est-ce que-manger+2pp le déjeuner.
« Est-ce que vous avez mangé le déjeuner ? » (Iseksioui, ibid. :
176)
c. Que veux-tu ?
Nous observons que les exemples relevant de l’arabe standard (4a),
de l’arabe marocain (4b) et du français (4c) sont la projection
maximale de la phase CP. Les têtes COMP ˀa « Est-ce que », wac
« Est-ce que » et Que qui sont spécifiées dès le lexique par le trait
catégoriel [C] exige l’activation de la CP où elles seront générées.
Autrement dit, la dérivation de ces exemples converge vers les deux
niveaux d’interfaces ; Forme logique et forme phonologique. Nous
disons donc que l’activation de la phase CP est un principe
architectural que partage l’amazighe avec les autres langues,
notamment celles illustrées en (4).
2. Les questions OUI / NON
Quatre mécanismes sont sollicités dans la plupart des langues pour
la dérivation des questions OUI / NON (désormais QON). Ces
mécanismes relèvent de différents types ; morphologique,
phonologique, syntaxique, entre autres. Considérons les exemples
suivants :
5 a. Tu manges le pain.
b. mangues-tu le pain ?
6 a. Pierre is sad.
b. is Pierre sad?
(5) et (6) illustrent la possibilité de la dérivation des constructions
interrogatives (5b) et (6b) à partir des phrases déclaratives (5a) et (6a),
respectivement. Le processus adopté pour la dérivation de (5b) et de
(6b) est syntaxique en ce sens qu’un COMP interrogatif n’est pas
intégré dans le système computationnel. Leur formation est due
uniquement à l’opération de l’inversion de sujet, laquelle légitime
l’activation de la phase CP au niveau de l’architecture interne pour
qu’elle soit marquée par la propriété [+Wh]. Précisons que l’amazighe
ne permet pas la dérivation des interrogatives par le biais de
l’inversion de sujet vu qu’elle est une langue à sujet nul. Cela veut
dire que la formation Wh-Question via le procédé de l’inversion de
sujet n’est pas un principe que partage l’amazighe avec le français et
l’anglais. Par ailleurs, l’amazighe fait appel à la phonologie et à
13
l’insertion des COMPs interrogatifs pour la dérivation des questions,
comme en témoignent les exemples suivants :
7 a. askka ?
« Demain ? »
b. ifta s tgmmi ?
3ps+partir+acc prep EA+maison
« Il est parti à la maison ? »
8 a. ma ira ?
Qu’est-ce que 3ps+vouloir+acc
« Qu’est-ce qu’il veut ? »
b. is iɣṛa ?
COMP 3ps+instruire+acc
« Est-ce qu’il est instruit ? »
Comme nous le constatons dans les exemples en (7), les phrases ne
sont pas à la base des constructions interrogatives mais elles servent
pour exprimer une interrogation. Par exemple, le matériel
dérivationnel de (7b) ne contient pas de tête COMP mais il exprime
une interrogation par le truchement de l’intonation qui est une
propriété phonologique. Grâce à l’intonation sa structure interne
comporte la phase CP, laquelle c-commande structuralement la
projection IP position d’accueil du verbe ftu « partir ». En effet, la
marque [+Wh] de l’interrogation est signalée au niveau de la [C, CP].
D’autres contextes permettent la sélection d’une tête fonctionnelle qui
porte le [C] et [+Wh] du lexique pour la formation des QONs, comme
illustré en (8). Pour former ces interrogatives, les éléments-Wh is
« est-ce que » et ma « que » sont sélectionnés suivant le principe de la
compatibilité catégorielle. Leur présence parmi les éléments du
matériel dérivationnel exige l’activation de la CP au niveau de
l’architecture dérivationnelle d’une part pour porter le trait [+Wh] et,
d’autre part, pour accueillir les têtes COMPs ; is et ma. Une phrase
donc comme (8b) aura la structure (9) :
14
La phase C dans (9) est spécifiée par les traits [EF] et [+Wh] : le
premier explique l’attraction qu’exercent les têtes COMPs
interrogatifs sur les pronoms clitiques alors que le second précise qu’il
s’agit d’une phrase interrogative. Étant donné que le verbe est à la
troisième personne de singulier marqué par l’explétif i- « il », la
position [Spec, VP] héberge le [Pro], celui-ci permet la vérification
des traits-phi dans un rapport de localité stricte. Le déplacement de la
sonde verbale ɣṛ « instruire » est une exigence du principe de pleine
interprétation qui ne tolère pas l’existence de trait ininterprétable [uV]
vers les deux niveaux d’interface. Il est important de signaler que les
QONs peuvent être à la forme négative :
10 a. is ur as inna walu ?
15
Est-ce que Neg cl.dat 3ps+dire+acc rien
« Est-ce qu’il ne lui a rien dit ? »
b. is ur ifti s suq ?
est-ce que Neg 3ps+pertir+acc prépo EL+souk
« Est-ce qu’il n’est pas parti au souk ? »
Ces structures nous suggèrent les remarques suivantes : i) la phase
CP c-commande structuralement la projection de négation hébergeant
la tête du morphème discontinu de négation ur ….. walu « ne… rien »,
c’est-à-dire que ur est gouverné par le complémenteur is « est-ce
que ». ii) Les deux têtes fonctionnelles ur et is ont la qualité d’attirer
les pronoms clitiques mais dans le cas de la présence des deux,
comme dans (10a), la propriété d’attraction est réservée à la tête la
plus proche de l’entrée lexicale V, (Boukhris, 2013 ; Iseksioui,
2019a). Nous retenons donc que les QONs sont formées par
l’intonation, qui est un procédé phonologique, ou par l’insertion des
têtes COMPs is et ma. Ces têtes sont générées au niveau de la C de la
phase CP et ont la caractéristique d’attirer les pronoms clitiques.
3. Les questions explicatives
À la différence des QONs, les questions explicatives nécessitent
des réponses explicatives. Ces constructions dans toutes les langues
sont dérivées par l’intermédiaire d’un morphème interrogatif. Ces
morphèmes n’appartiennent pas à la même catégorie, c’est-à-dire
qu’ils sont spécifiés par une hétérogénéité catégorielle puisqu’ils sont
à cheval sur plusieurs catégories, notamment les pronoms
interrogatifs, les adverbes interrogatifs, les verbes interrogatifs, entre
autres. En constituant un paramètre spécifique aux langues, ces
morphèmes interrogatifs peuvent être générés soit en position initiale
soit en position finale. Considérons les structures interrogatives
suivantes :
11 a. Where is it?
b. ˀayna huwa?
Où est-il ?
c. Kore wa ikura desu ka ?
ce est combien est-ce+que Inter.
« Combien ça coûte ? »
Ces exemples présentent les différentes positions où les têtes
interrogatives peuvent être générées. Pour l’anglais (11a) et l’arabe
standard (11b) les items interrogatifs where et ˀayna « Où », qui
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portent dès le lexique le trait catégoriel [C], sont générée en tête de la
phrase sous la position C de la phase CP, qui est une position initiale.
Par contre, l’interrogative (11c) relevant du japonais montre que le
morphème interrogatif ka « combien » peut également occuper la
position finale. Par la présence de l’interrogatif ka « combien » la
phase CP est projection maximale de (11c) et sa position C porte le
trait [+Wh]. Comme l’arabe standard et l’anglais, le morphème
interrogatif en amazighe est généré au niveau de C de la phase CP,
laquelle est une position initiale, comme illustré par les constructions
interrogatives suivantes :
12 a. ma iccan aɣrum ?
Qui 3ps+manger+acc pain
« Qui a mangé le pain ? »
b. mnnack ad iskar srwal ?
Combien 3ps+couter+acc pantalon
« Combien coute le pantalon ? »
c. matta lkswa trit?
Laquelle jupe 2ps+vouloir+acc
« Laquelle des jupes veux-tu ? »
La structure superficielle de ces exemples montre que les têtes
interrogatives ma « qui », mnnack « Combien » et matta « laquelle »
sont en position initiale. Ces têtes sont spécifiées à partir du lexique
par les traits [+Wh] et [C] ; le deuxième trait légitime l’activation de
la phase CP au niveau de l’architecture structurale et le premier
détermine qu’il s’agit de la dérivation d’une phrase interrogative.
Précisons que ces morphèmes appartiennent à différentes catégories ;
ma « Qui » est un pronom, mnnack « Combien » est un adverbe et
matta est un adjectif. Malgré l’appartenance à des catégories
différentes, ces morphèmes interrogatifs ont un impact identique sur
les pronoms clitiques :
13 a. * ma iccan t ?
b. ma t iccan ?
Qui cl.ac 3ps+manger+FP
« Qui l’a mangé ? »
14 a. * mnnack ad s tsɣit as tigmmi ?
b. mnnack ad s as tsɣit tigmmi?
Combien cl.dat 2ps+acheter+acc EL+maison
« Combien lui as-tu acheté la maison ? »
17
Le processus dérivationnel des interrogatives (13a) et (14a) ne
converge pas vers les deux niveaux d’interfaces. Leur agrammaticalité
est due au non-déplacement de l’accusatif t « le » et du datif as « lui »
en position [spec, vP] en ce sens que les morphèmes interrogatifs
portent normalement le trait [EF] qui sollicite le déplacement des têtes
fonctionnelles faibles pour assurer la bonne dérivation. En revanche,
les structures interrogatives (13b) et (14b) remplissent les conditions
de la bonne formation. Autrement dit, lesdits clitiques sont à la base
générés en position d’argument interne des verbes ic « manger » et sɣ
« acheter » mais la présence des morphèmes interrogatifs ma « Qui »
et mnnack « combien » au niveau de la position C de la phase CP et à
cause également du trait [EF] de ladite phase, les clitiques en question
doivent obligatoirement se déplacer. Cette opération de mouvement
s’avère complexe puisqu’elle met en œuvre d’autres mécanismes ; la
formation de la copie, la fusion4. Une phrase comme (13b) aura la
structure dérivationnelle (15) :
15.
4
Pour plus de détail, voir Chomsky (1998, 2000, 2001), Iseksioui (2019a), entre
autres.
18
Comme représenté dans (15), l’existence du pronom clitique a
déclenché l’activation de projection vP. Elle est structuralement ccommandée par la phase CP et elle gouverne la VP. vP est la position
cible de deux items ; le premier déplacement s’effectue par le clitique
t vers Spec de la vP. La nécessité de vérifier et d’interpréter le tait
ininterprétable [uaccus] est la raison justifiant son déplacement. Le
deuxième mouvement, lui, est celui que l’entrée verbale ic « manger »
effectué de la sonde V de la VP vers la cible [v, vP]. Les traits-phi,
quant à eux, sont vérifiés dans un rapport de stricte localité entre la
tête lexicale V ic « manger » et l’élément [Pro] généré au niveau de la
position [Spec, VP]. Nous disons donc que les questions explicatives
sont dérivées par l’insertion des morphèmes interrogatifs, lesquels
appartiennent à différentes catégories : i) les pronoms interrogatifs, ii)
19
les verbes interrogatifs, iii) les adjectifs interrogatifs et iv) les
adverbes interrogatifs.
Conclusion
Nous nous sommes focalisé dans cet article sur la présentation des
mécanismes dérivationnels des phrases interrogatives en amazighe. À
partir de cette contribution, nous gardons les points suivants :
i. à la différence de l’architecture interne des phrases
déclaratives, les interrogatives en amazighe, comme le cas
des impératives (Iseksioui, 2019), sont la projection
maximale de la phase CP ;
ii. la C de la phase CP porte les traits [C] et [EF] ; le premier
légitime l’accueil des têtes COMPs alors que le deuxième
explique l’attraction qu’exercent les complémenteurs sur les
têtes faibles comme les pronoms clitiques ;
iii. le trait [+ /- Wh] distingue entre les interrogatives et les
constructions déclaratives ;
iv. la phase CP c-commande structuralement les autres projections
fonctionnelles notamment la projection de négation ;
v. l’intonation et l’insertion des têtes COMPs is et ma sont les
mécanismes dérivationnels des QONs. Ces têtes sont
générées au niveau de la [C, CP] ;
vi. la catégorie des morphèmes interrogatifs introduisant les
questions explicatives est hétérogène.
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