LES RAPPORTS CENTRE-RÉGIONS EN RUSSIE
Rééquilibrage et continuité
Jean-Robert Raviot
La Documentation française | « Le Courrier des pays de l'Est »
2003/3 n° 1033 | pages 4 à 15
ISSN 0590-0239
DOI 10.3917/cpe.033.0004
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Le dossier du mois
le courrier des pays de l’Est
Jean-Robert Raviot
Maître de conférences, Université Paris X-Nanterre.
Manuscrit clos en avril 2003.
Mars 2003
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n° 1033
Les rapports
centre-régions
en Russie
Dès le lendemain de son élection,
le 26 mars 2000, le président
Poutine inscrit la réforme des
rapports entre le Centre fédéral
et les 89 sujets de la Fédération
de Russie au tout premier rang
des priorités politiques. La
rhétorique officielle qui accompagne l’annonce des changements, illustrée par les mots
d’ordre de «dictature de la loi»
R é équilibrage et continuité
et de «rétablissement de la
verticale du pouvoir», laisse
présager une rupture radicale
avec la période précédente, l’ère Poutine semblant
A quelques mois d’un nouveau cycle électoral
s’ouvrir sur une «mise au pas» des régions
en Russie (2), quel bilan peut-on dresser des
(1)
russes . Faute de disposer d’une majorité claire
réformes intervenues depuis trois ans dans le
à la Douma d’Etat, Boris Eltsine s’appuyait sur
domaine du fédéralisme ?
les chefs des administrations régionales pour
gouverner et il leur a peu à peu concédé une large
Une réforme limitée
autonomie dans de nombreux domaines. En 2000,
chacun des 89 sujets de la Fédération disposait
Les observateurs russes sont unanimes à recond’un champ de compétences propre, négocié de
naître que le seul succès tangible remporté par
gré à gré avec le Kremlin, et souvent consacré
Vladimir Poutine sur le terrain du fédéralisme
par un traité bilatéral. Ce fédéralisme à géométrie
consiste dans la mise en conformité des constituvariable a eu pour conséquence la prolifération
tions, des statuts et de l’ensemble des actes des
d’actes régionaux contraires à la Constitution et
sujets de la Fédération avec la Constitution et les
aux lois fédérales. De plus, l’emprise des admilois fédérales. «Il a pratiquement été mis fin au
nistrations régionales sur les organes territoriaux
chaos juridique de l’ère Eltsine», déclare Nikolaï
des administrations fédérales (Impôts,
Petrov(3). Envisagé sous l’angle politique, cet
Procurature, Intérieur et Sécurité, etc.) mettait
aggiornamento du droit, salué par tous les
sans cesse en question l’exercice, par l’Etat
commentateurs, fait l’objet d’analyses diamétracentral, de ses prérogatives et de son autorité. Les
lement opposées. Certains y voient le signe que
gouverneurs et présidents des régions et répu«Vladimir Poutine a réussi à (...) reconstruire ce
bliques de la Fédération de Russie ont instauré
que Eltsine avait sciemment et délibérément
des régimes politiques qui reposent sur de
détruit, c’est-à-dire la structure de l’Etat», tandis
précaires jeux d’équilibre entre clans régionaux,
que d’autres soulignent que «rien n’est venu
lorsque ce n’est pas sur la domination arbitraire
limiter le renforcement du pouvoir des oligarchies»
et sans partage d’un «parti du pouvoir» local.
et que «les réformes (fédérales) n’ont en rien
C’est dans ce contexte que Vladimir Poutine, dès
diminué la puissance politique des gouverson accession au pouvoir, cherche à inverser au
neurs»(4). C’est pourtant cette puissance des chefs
profit du Kremlin le rapport de forces avec les
des administrations régionales(5), ainsi que leur
chefs des administrations régionales (rétablissement
capacité de nuisance, que le Président russe tente
de la verticale du pouvoir) en imposant un
de circonscrire lorsqu’il signe, le 13 mai 2000,
nouveau cadre institutionnel et juridique (dictaun décret instituant des représentants plénipotenture de la loi).
tiaires du Président dans sept grands districts
fédéraux, des «super-relais» du Kremlin chargés
de superviser et de contrôler l’action des gouverneurs et des présidents des républiques. En
prenant une mesure d’ordre administratif qui vise
à déconcentrer l’administration fédérale, le
Président russe tente également d’intervenir plus
directement dans les jeux politiques régionaux.
Les émissaires du Kremlin exercent-ils une réelle
influence dans leurs districts ? Par la suite, les
autorités fédérales n’ont eu de cesse d’imposer
aux chefs des administrations régionales de
nouvelles règles, toujours plus contraignantes. La
dernière étape de ce programme d’endiguement
par le droit est aujourd’hui en discussion. Le
projet de loi Kozak, dont l’adoption définitive
pourrait intervenir en mai 2003, finalise la
construction de la verticale du pouvoir en délimitant les compétences des niveaux fédéral,
régional, local et en soumettant les différents
responsables à une stricte discipline hiérarchique,
ainsi qu’à un code de bonne conduite en matière
budgétaire(6). C’est également dans cette logique
de dissuasion à l’égard des autorités des sujets
de la Fédération qu’un débat sur les contours et
les modalités de la Fédération est orchestré depuis
le courrier des pays de l’Est
bientôt trois ans. Compte tenu des asymétries (de
statut, de poids économique, démographique,
politique...) entre les sujets de la Fédération, des
voix s’élèvent pour réclamer une refonte complète
de la division du territoire. Ce débat entretient un
climat d’incertitude sur l’avenir du fédéralisme
que le locataire du Kremlin et son équipe de
conseillers mettent à profit pour freiner la
concentration des ressources politiques entre les
mains des gouverneurs. Cette tactique porte-t-elle
ses fruits ? Vladimir Poutine a-t-il vraiment rompu
avec la méthode de Boris Eltsine, qui consistait à
entretenir le dialogue avec les gouverneurs jugés
particulièrement ombrageux ? Le poids des
barons régionaux dans l’économie générale du
système politique a-t-il diminué ? L’administration du président Poutine parvient-elle à mieux
contrôler le déroulement (et accessoirement le
résultat) des élections régionales et locales que
précédemment ? Qu’en est-il de l’influence des
oligarchies économiques dans les processus
politiques et électoraux ? Enfin, l’éviction des
gouverneurs des rangs du Conseil de la Fédération, où ils siégeaient de droit jusqu’en 2000, a-telle permis d’atténuer l’influence de ces derniers
dans le processus législatif ?
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Le Conseil de la Fédération
Conformément à la Constitution du 12 décembre 1993 qui l’institue, la Chambre haute
de l’Assemblée fédérale est composée de deux représentants par sujet de la Fédération
(au nombre de 89) : un représentant de l’assemblée de la région (ou de la république) et
un représentant de l’exécutif. Toutefois, de 1993 à 1995, conformément aux dispositions
transitoires, deux représentants de chaque sujet de la fédération ont été élus au suffrage
universel direct pour un mandat de deux ans. La loi du 5 décembre 1995, supprime
l’élection des membres du Conseil de la Fédération. Désormais ce sont le chef de
l’organe représentatif et celui de l’organe exécutif de chaque sujet de la Fédération qui
y siègent de droit. Pour limiter les pouvoirs des responsables régionaux, la loi du 5 août
2000, voulue par Vladimir Poutine, dispose que le représentant de l’assemblée régionale
est élu par cette dernière pour la durée de sa législature alors que celui de l’exécutif
régional est nommé et révoqué de manière discrétionnaire par le chef de l’administration
régionale (ou gouverneur). Les nouveaux membres du Conseil de la Fédération sont
donc dépourvus de légitimité populaire. Avec la nouvelle loi, les gouverneurs et les chefs
des assemblées régionales ont perdu leur immunité parlementaire.
Le Conseil de la Fédération intervient obligatoirement dans l’élaboration des lois
organiques et des lois portant sur les questions ayant une portée financière (adoption
du budget fédéral, impôts et taxes) ou internationale (déclaration de guerre, modification
des frontières, ratification et dénonciation des traités internationaux). Pour les lois
ordinaires, la Chambre haute n’intervient qu’à titre facultatif : une procédure d’approbation
tacite des lois votées par la Douma est prévue par la Constitution. Outre qu’il dispose
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Les rapports centre-régions en Russie
Le dossier du mois
le courrier des pays de l’Est
d’un pouvoir important de blocage dont il a fait usage dans le domaine du fédéralisme
notamment, le Conseil de la Fédération procède à la nomination aux principales fonctions
judiciaires de la Russie (juges à la Cour constitutionnelle fédérale, à la Cour suprême, à
la Cour supérieure d’arbitrage) ainsi qu’à la nomination (et révocation) du procureur
général de la Fédération de Russie
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Emissaires du Kremlin dans les «capitales» des
sept districts fédéraux − qui correspondent peu
ou prou aux districts militaires −, les représentants plénipotentiaires du Président ne sont pas
devenus des acteurs politiques de poids au niveau
régional. Le profil de ces hommes (7), majoritairement des anciens responsables dans les
ministères de force (Armée, Sécurité, Intérieur),
ainsi que leur étroite dépendance statutaire à
l’égard du Président − qui les nomme et les
révoque à sa discrétion − permettaient sans doute
de le prédire. En revanche, et tous les observateurs s’accordent à le souligner, les émissaires
du Kremlin jouent un rôle essentiel dans la
coordination de l’ «opération de normalisation du
droit»(8). Ils constituent en effet aujourd’hui un
rouage indispensable dans le déploiement de
l’action du pouvoir central, ne serait-ce qu’en
raison de l’ampleur des ressources administratives et des informations qu’ils sont susceptibles
de mobiliser. Au-delà de la tâche de coordination des diverses branches de l’action publique
fédérale qui leur est impartie, les représentants
plénipotentiaires ont forgé dans leur district des
réseaux d’influence et d’information. Ainsi, sans
pour autant devenir des personnalités politiques
dotées d’une réelle autonomie et d’un véritable
pouvoir de décision, ils ont réussi à se rendre
indispensables. Rouages administratifs, vecteurs
d’influence, mais surtout canaux d’information
qui ont amené le Kremlin à plus de «lucidité sur
les intentions» des élites régionales, ainsi que sur
les stratégies qu’elles déploient. Dotés, pour la
plupart d’entre eux, d’une expérience professionnelle du renseignement, les émissaires fédéraux
auraient permis à Vladimir Poutine de «contrer
la désinformation de couloir» et d’éviter «de
perdre la face à maintes occasions»(9), notamment
lorsqu’il doit se prononcer sur un candidat lors
d’élections régionales.
● Statu quo
L’institution des représentants plénipotentiaires
du Président est périodiquement remise en
question dans le débat public. Ainsi, en décembre
2002, certains sénateurs annoncent la prochaine
disparition des émissaires du Kremlin, au motif
que le projet de loi Kozak ne les mentionne même
pas dans son schéma d’organisation fédérale,
contrairement à ce qui avait d’abord été
annoncé(10). Pour étayer cette rumeur, les parlementaires expliquent que les émissaires ont
terminé la seule mission pour laquelle ils avaient
été nommés, mettre en conformité les législations
des sujets de la Fédération avec le droit fédéral.
En outre, le Président aurait déclaré qu’en dépit
de quelques succès, ses représentants «ont échoué
à devenir des actionnaires de la compagnie
appelée “élections régionales”»(11). Pourtant,
certains d’entre eux n’ont pas ménagé leurs efforts
pour tenter de se positionner sur l’échiquier politique des grandes régions faisant partie de leur
district. Ainsi, dans l’Oural, Piotr Latychev, est
entré en conflit ouvert avec le gouverneur de la
région la plus importante du district, celle de
Sverdlovsk. Or, ce dernier, Edouard Rossel, se
trouve être l’un des leaders régionaux les plus
influents de Russie. Signe de sa puissance, il est
l’un des seuls chefs d’administration régionale à
s’être maintenu en poste sans interruption depuis
1991. Soucieux de sa longévité politique et
sachant qu’il ne serait pas autorisé à briguer pour
la troisième fois le fauteuil de chef de l’exécutif
de la région après 2003, il avait accueilli favorablement l’institution des représentants plénipotentiaires du Président, espérant que Vladimir
Poutine le nommerait à ce poste. La désignation
de Piotr Latychev, un ancien responsable du
ministère de l’Intérieur ayant le grade de général
et pourvu d’une expérience parlementaire dans
l’ancien Soviet suprême de Russie (1990-1993),
suscite l’ire du gouverneur de Sverdlovsk, qui
accuse l’émissaire d’incompétence et d’ingérence
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● Les émissaires du Kremlin :
un rouage indispensable
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dans les affaires régionales. De son côté,
P. Latychev se donne pour priorité de former son
réseau d’information et d’influence auprès des
élites industrielles et financières de l’Oural,
cherchant à circonscrire l’influence de E. Rossel.
Proclamant haut et fort son dessein de «restaurer
l’autorité de l’Etat sur ce que les petits seigneurs
considèrent comme leur domaine» (12), il est
intervenu avec succès dans de nombreuses
affaires financières, usant de son influence auprès
des instances fédérales au bénéfice d’oligarques
de la région. Dès lors, le représentant du Président
acquiert rapidement une solide réputation d’efficacité auprès des élites du district, et plus particulièrement à Ekaterinbourg, chef-lieu du district
fédéral de l’Oural et capitale de la région de
Sverdlovsk, le fief de E. Rossel. Gagnant en
assurance, il est allé jusqu’à lancer, en décembre
2001, un audit des finances de l’administration
régionale de Sverdlovsk, cherchant ainsi à
reprendre le contrôle d’une administration fiscale
qui relève du centre mais qui, en réalité, dépend
du gouverneur. La rivalité entre les deux hommes
atteint son point culminant à la veille de l’élection de l’assemblée régionale, en avril 2002, ce
qui pousse E. Rossel à proposer à P. Latychev
une «trêve» et un «règlement pacifique du
conflit». Les résultats de cette consultation électorale, marqués par une avance importante de la
liste soutenue par le gouverneur de Sverdlovsk,
«Notre Maison l’Oural», sur celle des candidats
appuyés par l’émissaire du Kremlin, baptisée
«Unité et Patrie» (13) , mettent un terme aux
manœuvres de P. Latychev. A dix-huit mois des
élections législatives de décembre 2003, le
gouverneur de Sverdlovsk a fait suffisamment
état, sinon de sa force, du moins de sa capacité
de nuisance et de sa supériorité tactique sur
l’émissaire du Président. La conclusion de cet
épisode, semblable à d’autres qui se déroulent
ailleurs − notamment dans le district du NordOuest dont Saint-Pétersbourg, dont est originaire
Vladimir Poutine, est la capitale − laisse à penser
que le Président optera pour le statu quo : ni abolition, ni institutionnalisation de ses représentants
plénipotentiaires dans les districts. La nomination,
en mars 2003, de Valentina Matvienko − une
proche du chef de l’Etat, ancienne vice-Premier
ministre − à la tête du district fédéral du NordOuest indique que le Président souhaite que ses
émissaires s’en tiennent à leur tâche d’ «inspecteur
général» et, sur le plan politique, à un strict rôle
d’ambassadeur du Kremlin, aussi informé et
«diplomate» que possible.
le courrier des pays de l’Est
Une première étape ?
Pour certains commentateurs, l’instauration des
sept districts fédéraux en 2000 a représenté la
première étape d’une refonte complète des structures fédérales, le Kremlin attendant pour la lancer
de disposer, après 2004, de la majorité des deux
tiers à la Douma d’Etat, quota nécessaire pour
entreprendre des réformes constitutionnelles.
Eclipsé par l’actualité des deux guerres menées
en Tchétchénie, le débat sur le découpage territorial «idéal» de la Russie, toujours latent, resurgit
périodiquement. Il est évident que la division
administrative du territoire héritée de l’URSS
comporte de nombreux défauts. Tout d’abord les
89 sujets de la Fédération relèvent de six statuts
différents. Ensuite, à cette asymétrie institutionnelle s’ajoute une forte asymétrie socio-économique(14), avec pour résultat que certains sujets
de la Fédération sont «plus égaux que d’autres»
en dépit du principe d’égalité entre eux consacré
par la Loi fondamentale. Ainsi, un cinquième de
la population de la Russie réside dans huit entités ;
six sujets de la Fédération prélèvent à eux seuls
l’essentiel des recettes fiscales réalisées sur
l’exploitation des matières premières ; les neuf
dixièmes des capitaux sont concentrés dans quatre
régions (les quatre cinquièmes à Moscou), etc.
L’asymétrie des entités fédérées conduit à un
traitement différencié de chacune d’entre elles par
le centre.
Force est de constater que les attaques lancées au
cours des trois dernières années par certains
hommes politiques, pour la plupart des proches
du Kremlin, contre le cadre fédéral actuel ne sont
pas dénuées de tout fondement. Le gouverneur
de Novgorod, Mikhaïl Proussak, est une des
figures de proue des partisans, assez nombreux
au sein de la classe politique, de la refonte intégrale du fédéralisme. Il préconise la mise en adéquation du découpage territorial du pays avec les
réalités économiques et démographiques. Ainsi,
selon lui, il conviendrait de diviser le territoire
en 50-60 régions − correspondant peu ou prou
aux anciens gouvernorats (goubernia) de
l’Empire russe − dotées d’un statut unique(15)
(M. Proussak prône la suppression pure et simple
des républiques, «où les nationalités dites titulaires sont presque partout minoritaires»), de
supprimer le Conseil de la Fédération, de
dissoudre les sept districts fédéraux(16)...
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Les rapports centre-régions en Russie
● Redessiner la carte
administrative
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Sans jamais approuver ni désapprouver clairement
ces projets de transformation radicale du cadre
fédéral, le Président russe a cependant ouvert la
voie à une réforme. Vladimir Poutine veut-il
redessiner la carte administrative de la Russie ?
Certains analystes en sont persuadés. Pour
Danielle Lussier, universitaire américaine,
spécialiste de la Russie, le vote, en décembre
2001, d’une loi fédérale instituant une procédure
qui permet la fusion volontaire d’entités voisines
constitue la première étape d’un vaste programme
de réformes. En attendant de pouvoir obtenir un
amendement de la Constitution − les 89 sujets de
la Fédération étant énumérés dans son article 65 −
l’administration présidentielle aurait suscité
l’adoption de ce texte afin d’établir le constat
«grandeur nature» de tous les obstacles qui se
dressent sur la voie d’une refonte du cadre fédéral(17). Les autorités centrales se contentent pour
l’instant d’observer d’un oeil favorable les projets
de fusion, qui doivent être approuvés par référendum dans chacune des entités formant le projet
de s’unir, avant d’être entérinés in fine par une
loi fédérale. Parmi ces projets, un seul − le rattachement de l’arrondissement des KomisPermiaks à la région voisine de Perm − semble
être en mesure d’aboutir en 2003. Tous les autres
soulèvent l’opposition des dirigeants des régions
et arrondissements voués à une éventuelle absorption. Si les populations peuvent parfois gagner,
en termes de services publics ou de prestations
sociales, à devenir citoyens d’une région plus
riche, les élites politiques ont tout à perdre de
réformes qui les priveront de leurs postes dans
les administrations ou les assemblées régionales.
En réalité, seuls les gouverneurs des grandes
régions ayant vocation à absorber de plus petites
entités semblent appeler de leurs vœux une
«vague d’agrandissement»(18). De plus, là où de
grandes holdings contrôlent les institutions politiques − arrondissements autonomes «pétroliers»
de Taïmyr, des Nenets de Iamal ou des Khantys
et des Mansis − les responsables ne souhaitent
pas être privés de la possibilité d’occuper des
postes (députés dans les assemblées régionales,
représentants au Conseil de la Fédération, sénateurs, etc.) qui leur assurent une précieuse
immunité parlementaire. Il ne paraît pas déraisonnable de parier que Vladimir Poutine dissimulera toute velléité réformatrice et émettra de
vives réticences à l’égard de ces fusions − et de
Le dossier du mois
toute réforme du cadre fédéral − au cours de
l’année 2003, ne serait-ce que pour ne pas
mécontenter les élites régionales à la veille des
élections. En mars 2003, Vladimir Poutine
s’employait à rassurer sur ce point les dirigeants
des petites entités sibériennes : «aucun changement
territorial ne peut intervenir en dehors d’une
réforme constitutionnelle, à laquelle vous
prendrez part (...) par le biais de votre voix au
Conseil de la Fédération»(19).
Le poids des gouverneurs
Formant la véritable ossature du système politique sous la présidence Eltsine, les gouverneurs
sont appelés par son successeur à jouer un rôle
plus modeste dans la nouvelle architecture institutionnelle de la Russie. Contraints de respecter
un moule juridique plus rigide, les chefs des
administrations régionales se voient en outre
privés du siège qui, depuis 1995, leur revenait de
droit au Conseil de la Fédération. Le Président et
son administration exercent une pression
constante sur les barons régionaux. Par sa rudesse,
son volontarisme et sa fermeté, la nouvelle
rhétorique présidentielle rompt avec les atermoiements et les changements de cap de Boris
Eltsine. Recourant volontiers au vocabulaire
médiéval couramment employé par les analystes
et les journalistes russes pour évoquer les
pouvoirs régionaux et locaux, Vladimir Poutine
a manifesté à maintes reprises son intention de
venir à bout des «fiefs» et des «seigneurs» régionaux, allant même jusqu’à citer, à l’appui de ce
discours, «l’exemple» de la guerre menée par les
forces russes en Tchétchénie depuis l’automne
1999. L’harmonisation des institutions régionales
constitue l’un des axes majeurs de la politique du
Kremlin ; une première loi les concernant fut
adoptée dès octobre 1999 à l’instigation du
Premier ministre d’alors, Vladimir Poutine.
Depuis lors, le Président s’est constamment
efforcé de consolider le cadre qu’il souhaite
imposer aux gouverneurs lesquels ont pris
l’habitude, pendant presque une décennie, de se
tailler des institutions «sur mesure». Le projet de
loi Kozak vient parfaire un dispositif législatif
dont la mise en oeuvre se heurte à de nombreux
obstacles. Par exemple, une loi fédérale adoptée
en 2002 stipule que l’élection des assemblées des
sujets de la Fédération doit être à deux tours et,
pour une moitié des sièges au moins, se dérouler
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selon le scrutin proportionnel de liste (20) .
Combinée à la loi sur les partis de 2001, qui
interdit de facto les formations politiques régionales(21), cette disposition, officiellement légitimée
par la nécessité d’aligner les modalités des élections de toutes les assemblées des sujets de la
Fédération sur celles de la Douma d’Etat, vise à
donner aux autorités fédérales les moyens de
mieux contrôler la composition des parlements
régionaux. Peu pressés de voir des députés de
«Russie unie», le parti officieux du pouvoir,
investir des assemblées qu’ils ont jusqu’ici plus
ou moins dirigées, les gouverneurs manifestent
ouvertement leur opposition à une loi fédérale qui
doit, d’ici juillet 2003, être obligatoirement transposée dans les législations régionales. Aussi peu
de sujets de la Fédération ont-ils à ce jour adopté
les amendements nécessaires. Le 18 février 2003,
lors d’une réunion du Conseil des législateurs,
un nouvel organe composé des présidents des
assemblées des sujets de la Fédération, Vladimir
Poutine les exhortait à y procéder, en soulignant
que «ces changements ne sont pas destinés à
servir les intérêts de quiconque (...) mais à
s’assurer que lorsque notre peuple va voter, il ne
se prononce pas seulement pour une personne,
mais pour quelqu’un ayant des convictions
politiques clairement affichées»(22). Le Président
réussira-t-il à emporter la conviction des élites
politiques régionales ? Rien n’est moins sûr.
L’assemblée régionale d’Orel − une région
dirigée par Egor Stroïev, l’ancien président du
Conseil de la Fédération, entré dans l’opposition
au Kremlin − a, d’ores et déjà, demandé à la Cour
constitutionnelle fédérale de se prononcer sur la
portée régionale des dispositions de la loi fédérale concernant les élections...
● Un pouvoir renforcé
Tout indique que les gouverneurs, loin d’avoir
perdu leur influence, demeurent très puissants.
Les rapports de forces entre le Président et les
chefs des administrations régionales constituent
donc toujours l’axe central de la politique en
Russie. Souvent accusé de se plier à toutes les
suggestions émanant du Kremlin, le juge constitutionnel s’est d’ailleurs prononcé pour une
interprétation stricte des lois fédérales encadrant
les institutions régionales. Mais, à l’inverse, le
4 avril 2002, la Cour constitutionnelle fédérale a
le courrier des pays de l’Est
rendu un arrêt qui, s’il confirme le droit du chef
de l’Etat de mettre fin aux fonctions d’un
gouverneur, en définit les conditions d’une
manière très restrictive. En outre, en juillet 2002,
la même juridiction a levé les obstacles juridiques
qui empêchaient 43 gouverneurs d’entrer dans la
course pour un troisième mandat. Pour le politologue Vladimir Pribylovski, le Président russe est
toujours étroitement dépendant des gouverneurs.
Ces derniers «continuent de contrôler les budgets
et les médias régionaux, ainsi qu’une part non
négligeable des flux économiques», sans compter
qu’ils gardent la haute main sur «l’attribution de
toute une série de licences». Finalement, ils
auraient même renforcé leur pouvoir «en passant
des accords avec le monde des affaires, ce qui
contribue à les émanciper du contrôle fédéral »(23).
En effet, les propos de certains gouverneurs
laissent penser qu’ils ne cessent de consolider leur
assise. Ainsi, Mikhaïl Proussak et le mairegouverneur de Moscou, Iouri Loujkov, ont
déclaré à l’occasion de l’une des réunions élargies
de la commission Kozak qu’il convient désormais
«d’abolir l’élection des maires», les édiles municipaux ayant vocation à être «des managers plutôt
que des politiciens» (24). S’il tente de limiter
l’étendue de leur pouvoir, Vladimir Poutine n’en
continue pas moins d’associer les gouverneurs,
au moins symboliquement, aux grandes orientations de la politique fédérale. C’est à cet effet qu’a
été créé en 2000 le Conseil d’Etat, organe
consultatif qui rassemble les 89 chefs des exécutifs régionaux. Cette institution est invitée à se
prononcer sur des projets de loi jugés de son
ressort par le Président, tel celui qui porte le nom
de D. Kozak. En outre, à la veille des échéances
électorales de 2003-2004, le chef de l’Etat a
souhaité flatter l’amour-propre et accroître le
prestige des gouverneurs en les associant à la
conduite de la politique étrangère du pays.
Soucieux de faire bénéficier ces derniers du crédit
dont il jouit sur la scène internationale depuis le
11 septembre 2001, Vladimir Poutine a institué,
le 22 janvier 2003, un «Conseil des gouverneurs
sur la politique étrangère». Chargé des problèmes
− aussi concrets que brûlants − de coopération
transfrontalière, le nouveau Conseil ne serait, pour
certains observateurs, qu’une manœuvre de
diversion destinée «à permettre aux chefs des
administrations régionales de se donner des
allures d’hommes d’Etat» dans le but de détourner
leur attention des enjeux électoraux(25).
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Les rapports centre-régions en Russie
Les jeux régionaux
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De l’avis général des observateurs, ni les représentants plénipotentiaires, ni les branches régionales du parti « Russie unie » ne constituent des
rouages suffisamment solides pour garantir la
victoire des candidats du Kremlin lors des
prochaines élections législatives. Le Président
devra donc s’appuyer sur les seuls canaux dont
la fiabilité est assurée : les administrations régionales. En dépit de nombreuses tentatives, les
interventions du Kremlin dans les élections
régionales et locales ont rarement été couronnées
de succès. En 2000, seuls 8 candidats officiellement soutenus par l’administration présidentielle l’ont emporté dans des élections d’exécutifs régionaux (sur 44). Si le chiffre augmente
sensiblement en 2001 (6 victoires sur 14 scrutins)
et en 2002 (9 sur 14)(26), c’est que les erreurs
commises en 2000 ont été analysées et corrigées.
Toutefois, le pouvoir central n’a pas trouvé la
recette de la victoire assurée. L’échec, au
printemps 2001, du candidat du Kremlin à
Vladivostok qui, pourtant, disposait de toutes les
ressources nécessaires, puisqu’il s’agissait de
l’adjoint du représentant plénipotentiaire du
Président dans le district fédéral de l’ExtrêmeOrient - Guennadi Apanassenko (27) − a été
longuement médité. Un constat semble se
dégager : plus l’intervention de Moscou est
voyante, moins elle produit de résultats. C’est la
raison pour laquelle, à partir de 2001, le Kremlin,
rompant avec la tactique retenue jusqu’alors,
décide d’apporter son appui à des gouverneurs
sortants qui ne lui sont pas inféodés, tandis que
l’administration Poutine perfectionne et affine ses
stratégies d’intervention. Ainsi, lors de l’élection
présidentielle dans la république des Komis, en
décembre 2002, le Kremlin soutenait deux personnalités : l’une officiellement − le Président
sortant, Iouri Spiridonov − l’autre en coulisse −
Viktor Torlopov, son principal concurrent. Ce
dernier, qui a remporté l’élection, n’avait pas reçu
l’investiture du parti «Russie unie», mais il avait
été invité à se joindre à une délégation gouvernementale qui se rendait à Bruxelles une semaine
avant l’échéance électorale(28). En réalité, les jeux
politiques dans les régions obéissent à des
logiques locales imprévisibles plus qu’à des
normes permettant d’anticiper les réactions de
leurs acteurs. Ainsi, l’élection de Viktor Maslov,
ancien responsable régional du FSB, au poste de
gouverneur de Smolensk avec l’appui du Kremlin
(printemps 2002) a été suivie de l’assassinat, en
Le dossier du mois
six mois, de huit personnalités de la région, dont
le vice-gouverneur. Interprétée comme la réaction
du crime organisé à l’opération «mains propres»
conduite par V. Maslov, cette série de meurtres
− un meurtre en entraînant un autre en représailles −
a instauré dans la région un climat de terreur qui
met en péril la tenue même des élections législatives en décembre 2003. Selon un observateur
local, peu de candidats auront le courage de
s’inscrire sur les listes(29)...
● La guerre des kompromaty
Dans tous les sujets de la Fédération de Russie,
c’est l’élection du gouverneur (ou du président
de la république) qui, tous les quatre ans, rythme
la vie politique en cristallisant l’ensemble des
enjeux de pouvoir. Tous les acteurs politiques et
économiques de poids cherchent à peser sur ses
résultats : l’administration présidentielle, l’administration régionale sortante, les directeurs des
grandes entreprises locales, les «parrains»
(avtoritety) du crime organisé, les patrons des
grandes holdings, les oligarques moscovites... Par
conséquent, ce scrutin suscite l’organisation de
campagnes électorales qui s’illustrent par la
malveillance des candidats et de leurs équipes à
l’encontre de leurs adversaires ainsi que par des
dépenses somptuaires, en augmentation constante(30). Selon un observateur moscovite, les frais
engagés par l’ensemble des candidats à l’élection du gouverneur de Krasnoïarsk en 2002 équivalent au budget annuel de ce territoire(31). Ici,
comme c’est devenu la règle dans bien des régions
russes, la campagne électorale a été précédée
d’une guerre des kompromaty. La pratique des
révélations compromettant l’adversaire, dont les
fuites sont orchestrées dans les médias par les
attachés de relations publiques qualifiés de
«noirs»(32) − leur rôle consistant principalement à
salir la réputation des concurrents − est devenue
monnaie courante. Outre qu’elles surenchérissent
les dépenses occasionnées par les scrutins et
conduisent à la multiplication des «caisses noires»
et autres financements occultes, ces méthodes ont
pour conséquence une forte désaffection des électeurs à l’égard des consultations électorales de
tous niveaux. Même s’ils demeurent plus faibles
que dans le cas des élections locales, les taux
d’abstention aux scrutins régionaux sont régulièrement supérieurs à la moitié des inscrits.
D’ailleurs, de façon générale, tous scrutins
confondus, ils augmentent régulièrement(33). En
outre, le «vote contre tous»(34) atteint des scores
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le courrier des pays de l’Est
Les rapports centre-régions en Russie
de plus en plus élevés, dépassant fréquemment
le quart des suffrages exprimés. Dans ce contexte,
les contentieux électoraux se multiplient, ce qui
permet aux protagonistes de prolonger leurs
conflits pour le pouvoir sur le terrain judiciaire
et, du même coup, dans les médias. Comme le
souligne un vétéran du métier de consultant politique à Moscou, «les contentieux électoraux
permettent de porter un conflit régional mineur
au rang d’affaire politique d’ampleur nationale,
pour peu que le litige trouve un écho à
Moscou»(35). Ainsi, l’élection du gouverneur de
Krasnoïarsk, le 22 septembre 2002, a fait l’objet
d’un contentieux retentissant opposant les deux
principaux candidats à la succession du général
Alexandre Lebed, candidat à la présidentielle de
1996 et décédé au printemps 2002. La victoire,
électorale comme judiciaire, est revenue à
Alexandre Khloponine. Discrètement soutenu par
le courrier des pays de l’Est
l’entourage de Vladimir Poutine, le nouveau gouverneur, qui dirigeait jusqu’alors l’arrondissement
autonome de Taïmyr (rattaché au territoire de
Krasnoïarsk), est aussi l’ancien patron du
combinat géant d’extraction du nickel de Norilsk
(dont la contribution représenterait 60 % des
recettes fiscales du territoire de Krasnoïarsk dans
son ensemble) et le bras droit de l’oligarque
moscovite Vladimir Potanine, qui préside la
holding Interros. Son principal concurrent,
Alexandre Ouss, qui était à la tête de l’assemblée
régionale du territoire de Krasnoïarsk, avait
l’appui de la holding de l’aluminium RousAl,
dirigée par un autre oligarque, Oleg Deripaska,
ainsi que de certains membres de la «famille»,
c’est-à-dire l’entourage de l’ancien président
Eltsine(36). Le récent scrutin sibérien est emblématique de l’ «oligarchisation» croissante de la
vie politique et électorale de la Russie.
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Ce terme désigne de manière générique les chefs de l’administration des 89 sujets
de la Fédération de Russie − régions, territoires, villes d’importance fédérale (Moscou
et Saint-Pétersbourg), républiques, régions et districts autonomes − bien que les
républiques (21), qui ont le rang constitutionnel d’Etat, soient dirigées par des présidents.
Nommés par le président de la Fédération de Russie entre 1993 et 1995, tous les
gouverneurs (présidents des républiques inclus) sont élus à partir de 1995 au suffrage
universel direct, au scrutin majoritaire à deux tours, et ce pour un mandat de quatre ans.
Depuis le vote des lois du 6 octobre 1999 et du 8 février 2001, leur mandat n’est
renouvelable qu’une seule fois sauf pour ceux qui ont été élus avant le 6 octobre 1999.
Cela permettra à certains «barons régionaux» (I. Loujkov, M. Chaïmiev, etc.) d’effectuer
un troisième, voire un quatrième mandat.
Les élections n’ont pas lieu en même temps sur l’ensemble du territoire : des scrutins se
déroulent chaque année. De 1996 à 2000, les gouverneurs ont siégé de droit au Conseil
de la Fédération au titre de représentants de l’exécutif régional. Cette disposition ayant
été abolie en août 2000 au nom du principe de la séparation des pouvoirs, ils se
contentent désormais de nommer leur représentant à la Chambre haute. En outre,
la loi du 29 juillet 2000 octroie au Président de la Fédération de Russie le droit de les
destituer sous certaines conditions.
A l’instar des anciens secrétaires des comités régionaux du parti communiste, les
gouverneurs ne sont pas seulement les chefs de l’administration régionale mais ils
constituent également des courroies de transmission incontournables entre les divers
responsables politiques, économiques et administratifs d’un sujet de la Fédération et
les diverses instances du pouvoir fédéral. L’institution d’un nouvel échelon administratif
intermédiaire − les sept districts fédéraux − dirigé par des émissaires du Kremlin n’a pas
bouleversé cette donnée du pouvoir en Russie. Dans bien des régions et républiques,
les chefs de l’exécutif contrôlent les principales ressources politiques et administratives.
Aussi influent-ils fortement − souvent de manière décisive − sur la composition des
assemblées régionales ainsi que sur la désignation des maires des principaux centres
urbains.
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Les gouverneurs
Le dossier du mois
le courrier des pays de l’Est
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Bien davantage que les démonstrations d’autorité du Kremlin, c’est l’emprise croissante des
dirigeants de l’économie sur les institutions électives qui caractérise l’évolution politique de la
Russie de V. Poutine. Les slogans présidentiels
de «dictature de la loi» et de «restauration de la
verticale du pouvoir», traduisent moins fidèlement la réalité présente que le terme
de «oligarchisation», à savoir la domination
grandissante des oligarques et de leurs réseaux
dans les jeux politiques régionaux. Pour Rostislav
Tourovski, auteur de plusieurs travaux portant sur
la géographie électorale de la Russie, les grands
hommes d’affaires et les groupes industriels et
financiers jouent un rôle croissant, qu’il considère comme générant une dynamique «de plus
en plus favorable aux gouverneurs sortants»(37).
Dans toute la Russie, on assiste à la consolidation d’alliances entre des holdings et des équipes
dirigeantes régionales. Il faut préciser que, dans
bien des sujets de la Fédération, l’économie
dépend fortement d’une seule branche, dominée
par un grand groupe industriel et financier. Ainsi,
la société Sibneft soutient Leonid Polejaïev, le
gouverneur d’Omsk ; une autre grande holding
pétrolière, Yukos, appuie le gouverneur de
Tomsk, Viktor Kress. De ce fait, les deux hommes
devraient être facilement réélus en 2003. Bien
entendu, ces ententes se retournent parfois contre
le candidat sortant, notamment lorsque celui-ci
ne fait pas preuve d’une allégeance suffisante aux
intérêts des grandes compagnies. Par exemple,
le gouverneur de Novossibirsk, Viktor
Tolokonski, pourrait ne pas être réélu, certains
oligarques régionaux s’étant retournés contre lui.
A Iaroslavl, le sort d’Anatoli Lissitsyne serait
entièrement suspendu à la décision des patrons
de RousAl et de Sibneft de reconduire leur
soutien... Il faut préciser que, dans certaines
régions, les groupes industriels et financiers
suppléent aux défaillances de l’Etat. A ce titre, le
groupe Yukos, présent dans 42 sujets de la Fédération (sur 89), joue peut-être un rôle pionnier. Il
emploie 115 000 personnes et se targue de s’être
acquitté de près de 4 milliards de dollars d’impôts
en 2001. Son patron, Mikhaïl Khodorkovski,
souhaite se placer à l’avant-garde des oligarques
russes de demain en jouant la carte du «business
civilisé» et de la «responsabilité sociale» des
grandes sociétés. Dans l’arrondissement des
Khantys et des Mansis, siège de la compagnie, et
dans toute la Sibérie occidentale en général,
Yukos finance presque intégralement la construction des logements et des installations sportives
et a mis en oeuvre un système de bourses et de
stages pour les étudiants, par ailleurs invités à
participer à des camps d’été organisés par le
mouvement de jeunesse de la holding, baptisé
Nouvelle civilisation. A Tomsk, grande ville universitaire de Sibérie occidentale, Yukos est le
principal mécène de la faculté de médecine. Dans
la petite ville pétrolière sibérienne de
Nefteïougansk, la température avait subitement
grimpé de - 40°C à - 12°C le jour d’une visite de
Mikhaïl Khodorkovski : mêlant l’ironie à la
superstition, des habitants déclaraient avoir déjà
observé que «lorsqu’ «il» arrive en ville, le climat s’améliore »(38)...
● Lobbies
Dans cette logique, de nombreux représentants
des magnats de l’industrie et de la finance,
lorsqu’il ne s’agit pas des oligarques eux-mêmes,
siègent désormais, à la place des gouverneurs, au
Conseil de la Fédération. Les chefs des administrations régionales, conformément à la procédure
décidée par le Kremlin qui leur accorde le pouvoir
discrétionnaire de nommer le représentant de
l’exécutif régional à la Chambre haute, ont
principalement opté − quand ils n’ont pas désigné
leur prédécesseur à la tête de la région(39) − pour
des personnalités susceptibles de mener un
lobbying efficace en leur faveur plutôt que pour
des hommes liges locaux dénués de toute expérience et de tout poids dans les bureaux et les
couloirs des administrations moscovites. Dans
certains cas, les barons régionaux ont remercié
leurs «mécènes» − ou fourni les gages d’une
alliance en voie de formation − en leur offrant un
poste qui leur garantit l’immunité parlementaire.
La « chambre des régions » est appelée à devenir
la «chambre des lobbies», comme le reconnaît
Leonid Nevzline, nouveau sénateur représentant
la république de Mordovie, qui est aussi à la tête
du Congrès juif de Russie − présidé jusqu’en 2001
par Vladimir Goussinski, ancien dirigeant du
groupe Most-Media − et est membre du conseil
d’administration de Yukos(40). Ainsi, la plupart
des grands groupes industriels et financiers
disposent de leur représentant au Parlement russe.
Les sénateurs-oligarques les plus célèbres
− Sergueï Pougatchev, président du conseil de
surveillance de Mejprombank (Touva), Vladimir
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Vers «l’oligarchisation»
de la politique ?
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Sloutsker (Tchouvachie), ancien patron du groupe
Fininvest, ou encore Alexandre Matveev, premier
vice-président de la compagnie d’exploitation du
diamant Alrosa (Iakoutie-Sakha) − côtoient des
oligarques régionaux ou encore les jeunes
conseillers des présidents de grands groupes, tels
Alexeï Lissiakov, sénateur de Stavropol, venu de
la direction de MDM (groupe bancaire et financier), ou Magomed Magomedov (région de
Smolensk), ancien conseiller du directeur d’une
branche régionale du géant gazier Gazprom. Les
nouveaux sénateurs auraient renouvelé les moeurs
au sein du cénacle parlementaire. Un éditorial du
quotidien moscovite à grand tirage Komsomolskaïa Pravda a fustigé «l’absence de discipline»
et «l’«absentéisme systématique» de certains
parlementaires qui préfèrent «les voyages
d’études sur la Côte d’Azur ou à Las Vegas»,
autant d’obstacles au bon fonctionnement des
commissions (41). Pour Egor Stroïev, l’ancien
président du Conseil de la Fédération, la Chambre
haute est devenue «totalement administrable»
− c’est-à-dire susceptible d’être manipulée par le
pouvoir exécutif − dans la mesure où, selon lui,
«les gouverneurs ne choisissent pas eux-mêmes
les sénateurs qu’ils nomment, puisqu’on leur
recommande de désigner tel ou tel». Egor Stroïev
voit dans ce changement au sein du Conseil de la
Fédération l’un des nombreux signes de l’impuissance de l’Etat et de ses institutions face à des
holdings qui, à elles seules, «concentrent la
propriété et les richesses, alimentent le budget et
ne laissent que les miettes aux élus du peuple»(42).
Un autoritarisme
en quête d’autorité
La politique fédérale de Vladimir Poutine a
permis d’instaurer des règles plus cohérentes et
plus claires dans la délimitation des compétences
entre le centre fédéral et les sujets de la Fédération. Mais bien des questions, notamment
budgétaires et financières, demeurent en suspens.
En outre, rien ne garantit la pérennité du découpage administratif actuel, unanimement critiqué
par la classe politique et les dirigeants régionaux,
à l’exception notable des présidents des républiques, auxquels il fait la part belle. Si le parti
présidentiel «Russie unie» réussissait à coaliser
les deux tiers des députés de la Douma à l’issue
de la consultation de décembre 2003, le chef de
l’Etat, au cas où il serait réélu, ne manquerait pas
le courrier des pays de l’Est
de remettre sur le métier la construction du fédéralisme russe, ne serait-ce que pour tenter une
nouvelle fois de déstabiliser les chefs des administrations régionales. Car malgré ses coups de
menton, Vladimir Poutine n’a pas réussi à inverser
la logique du rapport de forces qui l’oppose aux
gouverneurs et qui constitue toujours l’axe majeur
de la décision politique en Russie. Un ancien
député, aujourd’hui observateur politique, résume
ainsi la situation: «les leaders des régions ont
compris que Poutine était un calme et un modéré
(...) et n’ont plus peur de lui. Ainsi, son influence
et son autorité diminuent, car il est évident qu’un
coup de fil du Kremlin ne suffit plus aujourd’hui
à résoudre les problèmes»(43).
En dépit de l’instauration progressive d’un cadre
juridique plus cohérent dans lequel s’inscrivent
les divers échelons du pouvoir d’Etat, l’autorité
de la puissance publique n’a cessé de décliner.
Le politologue britannique Peter Reddaway
constate que «l’Etat russe est de moins en moins
capable d’exercer ses fonctions les plus élémentaires» (44) . La «verticale du pouvoir», que
V. Poutine appelle de ses voeux, serait encore loin
d’être réalisée, ni le FSB, ni le parti «Russie unie»
ne pouvant sérieusement constituer les colonnes
vertébrales du nouveau système politique. «La
bureaucratie de tous niveaux est puissante, mais
atomisée et phagocytée par les groupes industriels
et financiers qui, seuls, assurent à ses responsables
un salaire convenable», poursuit Reddaway.
L’asymétrie des situations selon les sujets de la
Fédération ne fait que se creuser − seules six
régions seraient vraiment préparées à une entrée
prochaine de la Russie dans l’OMC(45) − avec pour
corollaire l’inégalité des moyens d’action de la
puissance publique et de traitement des citoyens.
Dans ce contexte, le rôle du Kremlin est d’abord
de contraindre les élites des régions riches − celles
des 14 sujets de la Fédération reconnus comme
«donateurs»(46) en 2002 − à verser leur obole au
budget fédéral.
La puissance publique et l’autorité politique
découlent, plus que jamais, des ressources financières. Au-delà de «l’oligarchisation» de la vie
politique des régions russes, on constate que des
alliances se nouent, au sommet de l’Etat, entre
les dirigeants politiques et économiques. Ainsi,
une entente «tripartite» existe entre le Président
de la Fédération et son équipe, le géant Gazprom
et le parti «Russie unie» : ces trois pôles de
pouvoir pouvant aller jusqu’à se partager le
personnel d’encadrement. Ainsi, le président de
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Les rapports centre-régions en Russie
le courrier des pays de l’Est
ce parti, Alexandre Bespalov, a été nommé, le
26 février 2003, à la tête du département Information de Gazprom, ce qui lui permet de contrôler
l’important budget publicitaire de la holding à la
veille des élections législatives(47). Douze ans
après la dissolution du Parti communiste et après
une décennie de réformes axées sur les privatisations, l’Etat russe n’a toujours pas reconstitué de
colonne vertébrale, et notamment n’a toujours pas
Le dossier du mois
reconstruit les bases financières indispensables à
l’exercice de la puissance publique. Aussi faut-il
se garder de toute conclusion péremptoire, qu’elle
soit favorable ou défavorable, sur la présidence
Poutine : certains parlent de «réaction thermidorienne», d’autres encore de «dictature
rampante»(48). Quitte à sacrifier l’exercice des
raccourcis, il serait plus exact de parler d’autoritarisme en quête d’autorité.
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(1) Anne Gazier, « La mise au pas des régions russes ? La réforme institutionnelle de Vladimir Poutine », Le courrier
des pays de l’Est, n° 1015, mai 2001, pp. 4-14.
(2) Les élections des 450 députés à la Douma d’Etat sont prévues pour le 17 décembre 2003. L’élection présidentielle aura lieu fin mars-début avril 2004.
(3) Politologue, chercheur au Centre moscovite de la Fondation Carnegie, cité par Nezavissimaïa Gazeta, 17 février
2003.
(4) Sergueï Markov et Dmitri Choucharine (respectivement) cités par Mikhaïl Vinogradov, «Poutine prochol tri
tchetverti pouti » (Poutine a fait les trois quarts du chemin), Rousskaïa Mysl, n° 4450, 3-9 avril 2003.
(5) Appelés «gouverneurs» ci-après.
(6) Le projet de loi émane de la commission du même nom - présidée par Dmitri Kozak, chef-adjoint de l’Administration du Président - constituée en 2001. Approuvé par le Conseil d’Etat en octobre 2002, ce texte a été adopté par
la Douma en première lecture le 21 février 2003. Il est actuellement bloqué par l’opposition de certains chefs
d’administration régionale du fait de dispositions autorisant le Premier ministre à relever un gouverneur de ses
fonctions (avec l’approbation du Conseil de la Fédération) dans trois cas. Indiquons que le projet de loi enterre de
facto le principe d’autonomie des organes d’auto-administration locale vis-à-vis du pouvoir d’Etat. Cf. Viktor
Grichine, «Partniorstvo tsentra i regionov doljno byt’ ravnopravnym» (Le partenariat entre le centre fédéral et les
régions doit être fondé sur l’égalité en droit), Rossiïskaïa Federatsiïa sevodnia, n° 3, 2003, pp. 24-29.
(7) Pour un portrait biographique des sept représentants plénipotentiaires du Président dans les districts fédéraux,
cf. Obchtchaïa Gazeta, n° 21, 26 mai 2000.
(8) Selon l’expression évocatrice employée par le représentant plénipotentiaire du Président dans le district de
l’Oural, Piotr Latychev, cité par Izvestia, 17 janvier 2003.
(9) Mikhaïl Vinogradov, «Tchiornoe voskresenie rossiïskikh vyborov» (Le dimanche noir des élections russes),
Rousskaïa Mysl, n° 4425, 3-9 octobre 2002.
(10) Nezavissimaïa Gazeta, 3 décembre 2002.
(11) Cité par Alexander Nudelman, «The Presidential Envoys : Limited Success and Limited Future ?», RFE/RL
Russian Political Weekly, 13 février 2003.
(12) Portrait et interview de Piotr Latychev par Larissa Aïdinova, Vek, 16 mars 2001.
(13) La liste «Unité et Patrie» obtient 18,4 % des voix, alors que «Notre Maison l’Oural» recueille 29,5 % des
suffrages. Sur la rivalité Rossel-Latychev, cf. Vladimir Terletski, «Dva goda voïny iz za triokh kourits» (Deux ans
de guerre picrocholine), Nezavissimaïa Gazeta, 5 novembre 2002.
(14) Cf. Jean Radvanyi, La nouvelle Russie, Paris, Armand Colin/HER, 2000. Cf. également Jean Radvanyi (dir.),
Les Etats postsoviétiques, Paris, Armand Colin/VUEF, 2003.
(15) Dans l’espace public russe, il est devenu courant de parler à cet égard de goubernizatsiïa (retour au système des
gouvernorats) de la Russie.
(16) Interview de Mikhaïl Proussak, Itogi, n° 17, 2001.
(17) Danielle Lussier, «Putin Continues Extending Vertical of Power», Russian Regional Report, vol. 8, n° 2, 3 février
2003.
(18) Selon les termes employés par Anatoli Lissitsyne, gouverneur de la région de Iaroslavl, cité par Rousskaïa
Mysl, n° 4438, 9-15 janvier 2003. Ce dernier forme le projet d’ «agrandir» sa région en «annexant» les deux régions
voisines d’Ivanovo et de Kostroma. Les gouverneurs d’Ivanovo et de Kostroma ont réagi négativement à un projet
dont ils ont appris l’existence par la télévision... Sur ce point, cf. Ilya Malyakin, «Reforming the Russian Federation :
from 89 to 89», RFE/RL Russian Political Weekly, 30 janvier 2003.
(19) Cf. dépêche Interfax citée par Izvestia, 1er avril 2003.
(20) Pour une analyse du texte législatif, cf. Grigori Belonoutchkine et Vladimir Pribylovski, «Novye vybory po
novym pravilam » (De nouvelles élections suivant de nouvelles règles), Rousskaïa Mysl, n° 4411, 30 mai-5 juin
2002. Cf. également Ekaterina Mikhaïlovskaïa, «Protsenty i milliony» (Les pourcentages et les millions), Rousskaïa
Mysl, n° 4429, 31 octobre-6 novembre 2002.
(21) Cf. Jean-Robert Raviot, «Une nouvelle classe politique en Russie?», Le courrier des pays de l’Est, n° 1015,
mai 2001, pp. 25-35.
(22) Cité par Rossiïskaïa Federatsiïa sevodnia, n° 4, 2003.
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Notes :
le courrier des pays de l’Est
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(23) Vladimir Pribylovski, «Itogi triokhletnevo pravleniïa V.V.P» (Les résultats de trois ans de pouvoir de Vladimir
Vladimirovitch Poutine), Rousskaïa Mysl, n° 4438, 9-15 janvier 2003.
(24) Cités par Pavel Isaev, «Putin Backs Away from Kozak Plans to Restructure State Financial Flows», Russian
Regional Report, vol. 7, n° 28, 27 septembre 2002.
(25) Cf. Arbakhan Magomedov, «President Creates Governors’ Council on Foreign Policy», Russian Regional
Report, vol. 8, n° 3, 18 février 2003.
(26) Pour des chiffres voisins et une analyse convergente, cf. Julie Corwin, «Putin to Governors : Take as many
Terms as You Can Swallow», RFE/RL Russian Political Weekly, 3 janvier 2003.
(27) Sur ce scrutin, cf. RFE/RL Russian Federation Report, 20 juin 2001.
(28) Sur ce scrutin, cf. Julie Corwin, op. cit.
(29) Cf. Arsenti Ledovskoï, «Criminals Conduct Terror Campaign Against Smolensk», Russian Regional Report,
vol. 7, n° 30, 12 décembre 2002.
(30) Une évaluation récente du coût des campagnes avançait les chiffres suivants : entre 500 000 et 1 000 000 dollars pour
un siège de député à la Douma d’Etat ; entre 750 000 et 4 500 000 dollars pour un siège de gouverneur. Cf. Finansovaïa
Rossiaïa, n° 24, 2002, cité par Julie Corwin, «The Business of Elections», RFE/RL Russian Political Weekly,
11 septembre 2002.
(31) Cf. Mikhaïl Vinogradov, «Tchiornoe voskresenie rossiïskikh vyborov» (Le dimanche noir des élections russes),
Rousskaïa Mysl, n° 4425, 3-9 octobre 2002.
(32) En russe: tchiorny PR (Public Relations).
(33) Cf. Alexandre Chtcherbakov et Denis Tcherepanov, «Elektorat oustal ?» (L’électorat est-il fatigué ?), Rossiïskaïa
Federatsiïa sevodnia, n° 2, 2002.
(34) Possibilité offerte aux électeurs de se prononcer «contre tous les candidats» (ou «contre toutes les listes»). Plus
qu’un vote blanc comptabilisé, le «vote contre tous» peut obliger − s’il arrive en tête − à reconduire le scrutin.
(35) Sergueï Makarenko interviewé dans Nezavissimaïa Gazeta, 17 novembre 2002.
(36) Cf. Mikhaïl Vinogradov, op. cit., et Robert Orttung, «Corporations and Politics Mingle in Krasnoyarsk Elections»,
Russian Regional Report, vol. 7, n° 26, 3 septembre 2002.
(37) Cf. Rostislav Tourovski, «Reguionalnye lidery v 2003 godu» (Les leaders des régions en 2003), publié sur le
site politcom.ru (http://www.politcom.ru/2003/reiting4.php), janvier 2003.
(38) Cf. l’enquête de Mikhaïl Vinogradov, «Protiv tetcheniïa» (A contre-courant), Izvestia, 16 janvier 2003.
(39) Une vingtaine de sénateurs sont d’anciens gouverneurs. Cf. Pavel Isaev, «Regional Lobby Increases Gubernatorial
Power in State Duma», Russian Regional Report, vol. 7, n° 30, 12 décembre 2002.
(40) Interviewé le 20 janvier 2002 dans l’émission télévisée hebdomadaire «Vesti» (http://www.vesti7.ru/
news?id=505). Leonid Nevzline est vice-président de la commission des affaires étrangères du Conseil de la
Fédération. Pour une biographie complète des 178 sénateurs, cf. Rossiïskaïa Federatsiïa sevodnia, n° 4, 2003.
(41) Cf. Komsomolskaïa Pravda, 17 décembre 2001.
(42) Interview d’Egor Stroïev par Elena Afanassieva, «Novye senatory iarostno zachtchichtchaïout sebia, a ne svoi
regiony» (Les nouveaux sénateurs se défendent violemment eux-mêmes, et non pas leurs régions), Novaïa Gazeta,
5 novembre 2001.
(43) Interview de Viatchislav Igrounov par Vassili Filippov, Russian Regional Report, vol. 7, n° 6, 2002.
(44) Peter Reddaway, «Why has Putin Failed To Tame the Bureaucracy ?», RFE/RL Russian Political Weekly,
vol. 3, n° 13, 2003.
(45) Les régions de Moscou et de Saint-Pétersbourg, de Sverdlovsk et de Perm, ainsi que les républiques du Tatarstan
et du Bachkortostan. Cf. Vladimir Goussev, vice-président de la commission économique du Conseil de la Fédération,
cité par Russian Regional Report, vol. 7, n° 30, 12 décembre 2002.
(46) Régions qui contribuent davantage au budget fédéral qu’ils ne reçoivent de subsides de Moscou.
(47) Cf. RFE/RL Newsline, 28 février 2003.
(48) Viatchislav Igrounov qualifie l’ère Poutine de «réaction thermidorienne», Vladimir Pribylovski parle de «dictature
rampante», dans les articles précités.
n° 1033
Mars 2003
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Les rapports centre-régions en Russie