Location via proxy:   [ UP ]  
[Report a bug]   [Manage cookies]                

Phénol (composé)

composé chimique
(Redirigé depuis Phénol (molécule))

Le phénol, appelé aussi hydroxybenzène, acide phénique, ou encore acide carbolique, est un hydrocarbure aromatique composé d'un noyau phényle et d'une fonction hydroxyle. C'est la plus simple molécule de la famille des phénols.

Phénol
Image illustrative de l’article Phénol (composé)
Structure du phénol.
Identification
Nom UICPA phénol
Synonymes

Acide phénique
Acide carbolique

No CAS 108-95-2
No ECHA 100.003.303
No CE 203-632-7
DrugBank DB03255
PubChem 996
FEMA 3223
SMILES
InChI
Apparence cristaux incolores à jaunes ou rose clair, d'odeur caractéristique[1]
Propriétés chimiques
Formule C6H6O  [Isomères]
Masse molaire[4] 94,111 2 ± 0,005 5 g/mol
C 76,57 %, H 6,43 %, O 17 %,
pKa pKa(PhOH2+/PhOH) = -6,4
pKa(PhOH/PhO) = 9,95
Moment dipolaire 1,224 ± 0,008 D[2]
Diamètre moléculaire 0,557 nm[3]
Propriétés physiques
fusion 43 °C[1]
ébullition 182 °C[1]
Solubilité 76,04 g·l-1 d'eau
Paramètre de solubilité δ 25,1 J1/2·cm-3/2 (40 °C)[3] ;

11,4 cal1/2·cm-3/2[5]

Masse volumique 1,073 g·cm-3[6]
d'auto-inflammation 715 °C[1]
Point d’éclair 79 °C (coupelle fermée)[1]
Limites d’explosivité dans l’air 1,3610 %vol[1]
Pression de vapeur saturante à 20 °C : 47 Pa[1]
Point critique 61,3 bar, 694,2 K[8]
Thermochimie
Cp
PCS 3 053,5 kJ·mol-1 (25 °C, solide)[10]
Cristallographie
Classe cristalline ou groupe d’espace P1121[11]
Paramètres de maille a = 6,050 Å

b = 8,925 Å
c = 14,594 Å
α = 90,00°
β = 90,00°
γ = 90,36°
Z = 6[11]

Volume 788,01 Å3[11]
Propriétés optiques
Indice de réfraction 1,5427[3]
Précautions
SGH[13]
SGH05 : CorrosifSGH06 : ToxiqueSGH08 : Sensibilisant, mutagène, cancérogène, reprotoxique
Danger
H301, H311, H314, H331, H341 et H373
SIMDUT[14]
D1A : Matière très toxique ayant des effets immédiats gravesE : Matière corrosive
D1A, E,
NFPA 704
Transport[15]
   1671   

   2312   

   2821   
Classification du CIRC
Groupe 3 : Inclassable quant à sa cancérogénicité pour l'Homme[12]
Écotoxicologie
LogP 1,46[1]
Seuil de l’odorat bas : 0,004 5 ppm
haut : 1 ppm[16]

Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire.

Représentations

modifier

Histoire

modifier

Le phénol est découvert à l'état impur par le chimiste allemand Johann Rudolf Glauber au milieu du xviie siècle, à partir de la distillation du goudron de houille. Glauber décrit le composé comme « une huile vive et rouge sang qui assèche et guérit tous les ulcères humides »[17].

En 1834, Friedrich Ferdinand Runge parvient à l'isoler et le nomme alors acide carbolique.

En 1836, Auguste Laurent invente le terme « phène » pour benzène[18] ; ceci est la racine des termes « phénol » et « phényl ».

En 1841, le chimiste français Auguste Laurent l'obtient dans une forme pure[19].

De 1865 aux années 1880, le phénol est utilisé comme antiseptique sous l'impulsion de Joseph Lister, permettant de réduire le taux de mortalité lors des opérations chirurgicales de 65 % à 20 %.

Le phénol est synthétisé et manufacturé, en 1889, par la firme BASF.

Le phénol est aussi un énol (dérivé alcoolique dont la fonction alcool est portée par un atome de carbone hybridé sp2). Il est la forme tautomère de la cyclohexa-2,4-diènone. Mais contrairement à la majorité des énols, il est la forme la plus stable comparé à sa cétone tautomère, stabilité due en majorité à la présence d'un cycle aromatique non présent dans la cétone correspondante.

 

Propriétés physiques

modifier
 
Phénol.

Le phénol a une constante molale cryoscopique de 6,84 °C∙kg/mol et une constante molale ébullioscopique de 3,54 °C∙kg/mol.

De couleur blanche à l'état pur, il a tendance à s'oxyder légèrement au contact de l'air pour donner des traces de quinones qui le colorent en rose, puis en rouge.

Production

modifier

En 2005, le phénol a été produit à hauteur de 8,8 millions de tonnes dans le monde, dont environ 26 % aux États-Unis et 2 % en France. Le principal producteur est Ineos Phenol[20] (Royaume-Uni) avec une capacité de production de 1,6 million de tonnes[21].

Le phénol est produit aujourd'hui à plus de 85 % par le procédé au cumène. Ce procédé, mis au point en 1944 par Hock[22] et Lang[23], est utilisé depuis les années 1950[21]. Son avantage réside dans la simplicité de sa mise en œuvre, son bon rendement (90 %) et le fait d'obtenir phénol et acétone à partir du cumène, disponible en grande quantité par pétrochimie. Il consiste en une oxydation du cumène par l'air fournissant l'hydroperoxyde de cumène en tant qu'intermédiaire qui, en milieu aqueux acide, donne du phénol et de l'acétone.

Utilisation

modifier

Sécurité

modifier

Le phénol est fortement corrosif pour les organismes vivants. Une solution aqueuse à 1 % suffit à provoquer des irritations sévères.

Les brûlures au phénol sont très douloureuses et longues à guérir. De plus, elles peuvent être suivies de complications graves pouvant mener à la mort par la toxicité de ce composé et sa capacité à pénétrer dans l’organisme en traversant la peau.

Ces propriétés font du phénol un agent de mutilations génitales féminines. En effet, le Dr Kellogg préconisait la brûlure au phénol du clitoris comme « remède » contre la masturbation[27].

Durant la Seconde Guerre mondiale, des prisonniers d'Auschwitz et d'autres camps ont été exécutés par une piqûre de phénol dans le cœur. Maximilien Kolbe a été tué par une injection de phénol dans le bras après quatorze jours de détention sans nourriture. Le médecin SS Karl Babor officiant dans le camp de Gross-Rosen était spécialiste de l'assassinat à la seringue de phénol.

Articles connexes

modifier

Les substances suivantes sont des composés organiques simples dérivés du phénol :

Notes et références

modifier
  1. a b c d e f g et h PHENOL, Fiches internationales de sécurité chimique .
  2. (en) David R. Lide, Handbook of chemistry and physics, Boca Raton, CRC, , 89e éd., 2736 p. (ISBN 978-1-4200-6679-1 et 1-4200-6679-X), p. 9-50.
  3. a b et c (en) Yitzhak Marcus, The Properties of Solvents, vol. 4, Royaume-Uni, John Wiley & Sons Ltd, , 239 p. (ISBN 0-471-98369-1).
  4. Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  5. (en) Șerban Moldoveanu, Sample preparation in chromatography, Elsevier, , 930 p. (ISBN 0-444-50394-3), p. 258.
  6. (en) J. G. Speight, Norbert Adolph Lange, Lange's handbook of chemistry, McGraw-Hill, , 16e éd., 1623 p. (ISBN 0-07-143220-5), p. 2.289.
  7. a b et c (en) Robert H. Perry et Donald W. Green, Perry's Chemical Engineers' Handbook, USA, McGraw-Hill, , 7e éd., 2400 p. (ISBN 0-07-049841-5), p. 2-50.
  8. « Properties of Various Gases »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur flexwareinc.com (consulté le ).
  9. (en) Carl L. Yaws, Handbook of Thermodynamic Diagrams : Organic Compounds C8 to C28, vol. 2, Huston, Texas, Gulf Pub. Co., , 396 p. (ISBN 0-88415-858-6).
  10. (en) David R. Lide, CRC Handbook of Chemistry and Physics, Boca Raton, CRC Press, , 83e éd., 2664 p. (ISBN 0849304830, présentation en ligne), p. 5-89.
  11. a b et c (en) « Phenol », sur reciprocalnet.org (consulté le ).
  12. IARC Working Group on the Evaluation of Carcinogenic Risks to Humans, « Évaluations Globales de la Cancérogénicité pour l'Homme, Groupe 3 : Inclassables quant à leur cancérogénicité pour l'Homme »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur monographs.iarc.fr, CIRC, (consulté le ).
  13. Numéro index 604-001-00-2 (en) dans le tableau 3.1 de l'annexe VI du règlement CE no 1272/2008 ().
  14. « Phénol » dans la base de données de produits chimiques Reptox de la CSST (organisme québécois responsable de la sécurité et de la santé au travail), consulté le 25 avril 2009.
  15. Entrée « Phenol » dans la base de données de produits chimiques GESTIS de la IFA (organisme allemand responsable de la sécurité et de la santé au travail) (allemand, anglais), accès le 25 août 2009 (JavaScript nécessaire).
  16. (en) « Phenol », sur hazmap.nlm.nih.gov (consulté le ).
  17. Johann Rudolph Glauber, Opera Chymica, t. II, Götze, (lire en ligne), partie II, chap. 44
  18. Auguste Laurent, Sur la chlorophénise et les acides chlorophénisique et chlorophénèsique, , Je donne le nom de phène au radical fondamental des acides précédens (φαινω, j'éclaire), puisque la benzine se trouve dans le gaz de l'éclairage.
  19. Annales de chimie et de physique, V. Masson (Paris), 1816-1913 (lire en ligne).
  20. (en) Site institutionnel.
  21. a et b Données sur la production industrielle de phénol, Société chimique de France, 8e éd., 2009.
  22. Heinrich Hock (1887-1971) est un chimiste allemand, formé à l'université technique de Munich par Karl Andreas Hofmann. Il enseigna de 1927 à 1958 à l'Institut des Charbonnages de Mülheim, puis la chimie des explosifs à l'École des Mines de Clausthal.
  23. Shon Lang était le collègue de Heinrich Hock à Clausthal.
  24. « Ongle incarné traitement par phénolisation de l'ongle incarné avec e-sante.fr », sur e-sante.fr (consulté le ).
  25. (en) Michel. DuBois, K. A. Gilles, J. K. Hamilton et P. A. Rebers, « Colorimetric Method for Determination of Sugars and Related Substances », Analytical Chemistry, vol. 28, no 3,‎ , p. 350–356 (ISSN 0003-2700 et 1520-6882, DOI 10.1021/ac60111a017, lire en ligne, consulté le ).
  26. S. Suzanne Nielsen, « Phenol-Sulfuric Acid Method for Total Carbohydrates », dans Food Analysis Laboratory Manual, Springer US, (ISBN 9781441914620, DOI 10.1007/978-1-4419-1463-7_6, lire en ligne), p. 47–53.
  27. (en) John Harvey Kellogg, Plain Facts for Old and Young, , 644 p. (ISBN 978-0-405-05808-0).