La Croissance Économique
La Croissance Économique
La Croissance Économique
Les dterminants du taux de croissance 2.1 La fonction de production macroconomique . . 2.2 La croissance du produit national . . . . . . . . . 2.3 Le rle des diffrents facteurs . . . . . . . . . . . 2.4 Lvolution irrgulire de la productivit globale . 2.5 Lhypothse de convergence . . . . . . . . . . . 2.6 Croissance xogne ou croissance endogne . . .
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Introduction
La croissance conomique peut tre dnie comme lvolution moyen et long terme du produit total et surtout du produit par tte dans une conomie donne. Cest un concept troit et exclusivement quantitatif, auquel on prfre parfois le concept beaucoup plus tendu de dveloppement qui prend en compte les aspects qualitatifs (humains, culturels, environnementaux,etc.) que lapproche quantitative nglige par nature. La croissance conomique nest pas un fait naturel ; cest au contraire un vnement historique exceptionnel, dont le dbut est rcent : le dix-huitme sicle pour la Grande-Bretagne ; le dix-neuvime pour quelques autres pays occidentaux : la France, lAllemagne, les tats-Unis, lItalie ; le vingtime sicle pous beaucoup dautres, mais pas tous.
LA CROISSANCE CONOMIQUE
Lanalyse de ce phnomne implique deux grands types de problmes : celui du dclenchement de la croissance dune part, et celui du rythme ultrieur de la croissance dautre part. Le dclenchement de la croissance correspond un ensemble de modications structurelles de lconomie qui permettent de passer dune conomie essentiellement statique se reproduisant quasiment lidentique danne en anne, et centre sur la production agricole, une conomie progressive dont lindustrie se dveloppe et attire une proportion de plus en plus large des ressources productives. Cest la phase de la rvolution industrielle ou "dcollage" (take-off). Cette phase stend sur plusieurs dcennies. Pour la Grande-Bretagne, elle se situe, selon les auteurs, de 1770 1870 (Abbott P. Usher) ou de 1760 1830 (T. S. Ashton). En France on peut la situer entre la Restauration (1814) et la Rvolution de 1848 (ou la guerre de 1870). Le rythme de la croissance, aprs ce premier pisode, correspond au taux de croissance de la production et du revenu sur une priode plus ou moins longue ; il sagit dexpliquer le taux de croissance moyen en laissant de ct les variations conjoncturelles qui au regard du long terme ne sont que des accidents. Pourquoi certaines priodes ce taux a-t-il t trs lev (entre 3 et 5% annuels pendant les "trente glorieuses" de 1945 1975), alors qu dautres priodes il reste aux alentours de 1,5 2% ? lanalyse ici doit ncessairement tre statistique et reposer sur des chiffres et des modles prcis. Ces deux aspects, qualitatif ou structurel, et quantitatif, font lobjet de traitements trs diffrents ; mais tous deux ressortent de la thorie de la croissance conomique, et de nombreux mcanismes peuvent avoir une valeur explicative dans ces deux champs. On les prsentera successivement aprs avoir voqu quelques lments chiffrs. Le tableau 1 indique les tapes de la croissance conomique de quelques pays occidentaux depuis la premire rvolution industrielle1 . Les disparits dans la vitesse de lvolution sont frappantes. Mais si on prend un chantillon de pays plus large, les disparits apparaissent encore plus fortes ; certains pays ou rgions du monde nont pas, au dbut du XXIme sicle, connu de rvolution industrielle, et connaissent des taux de croissance trs faibles et mme parfois ngatifs. Le graphique 1 permet la comparaison du produit par tte en France et au Bangladesh.
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LA CROISSANCE CONOMIQUE
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1830 240 280 240 275 180 250 370 1860 345 405 325 550 380 175 290 600 1913 775 1110 400 1350 670 310 335 1070 1929 900 1220 520 1775 890 425 380 1160 1950 995 1785 430 2415 1055 405 440 1400 1960 1790 2205 604 2800 1500 855 550 1780 1970 2705 3005 1400 3605 2535 2130 985 2225
La rvolution industrielle
Un ensemble dvolutions structurelles, dont certaines se sont produites sur une dure de plusieurs sicles, permettent de rendre compte de la rvolution industrielle. Certaines dentre elles ont un rle causal ou dclencheur alors que dautres constituent simplement un environnement favorable. Vu le grand nombre de ces mutations, il est peut-tre futile de chercher identier une cause unique de la rvolution industrielle. On regroupe ici ces diffrents lments dans les rubriques suivantes : lments moraux, institutionnels, techniques, conomiques.
1.1
Lvolution des lments religieux et moraux ayant contribu la rvolution industrielle, volution dont le dbut peut tre situ grossirement la Renaissance, est lie la Rforme, avec une emprise affaiblie du catholicisme dans les mentalits. Le protestantisme, comme la montr Max Weber, est moins enclin condamner certaines activits comme le prt dargent contre intrt. Au XVIe sicle les scolastiques de lcole de Salamanque2 ont eux-mmes admis que certaines circonstances justient le paiement dun intrt. Des crits mettent en vidence les bienfaits de la recherche du prot, comme par exemple le trs inuent ouvrage de Bernard Mandeville (mdecin hollandais), publi pour la premire fois en 1714, intitul "La Fable des Abeilles", dont le sous-titre signicatif est "Vices privs, bnces publics". Dautre part, dun point de vue sociologique, la recherche du gain devient une activit avouable, mme sil nest pas prn par les autorits morales ; les expditions maritimes et les exploitations des colonies (Amrique, Asie) sont diriges
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LA CROISSANCE CONOMIQUE par des hommes aventureux et attirs par la fortune rapide.
1.2
lments institutionnels
Les institutions ont videmment jou un rle important dans la rvolution industrielle. La Grande-Bretagne est un des pays dans lesquels le statut de lindividu a t le plus rapidement dgag des carcans de la socit fodale. Lcole des droits de proprit, mene par Douglass North, considre que cest le dveloppement de la proprit qui est le facteur principal de la rvolution industrielle. Le droit de proprit qui apparat comme un droit abstrait et universel est accessible tous, et la socit anglaise peroit linefcacit de la proprit collective, relativement la proprit individuelle : dans lpisode des "enclosures", les ptures collectives ou commons, o chaque leveur pouvait amener ses btes, sont reconnues comme une forme insatisfaisante de proprit parce quaucun des usagers nest incit entretenir correctement les lieux quil utilise, sachant que ce serait son successeur qui proterait de ses efforts. De plus en plus les commons qui restaient en friche sont clturs et transforms en proprits prives au cours du XVIIIme sicle. Les enclosures permettent la constitution de grandes exploitations o lagriculture scientique peut tre pratique. Une autre innovation dans la pratique de la proprit est importante : linvention ou plutt la mise en place progressive du brevet (patent) et plus gnralement de la proprit intellectuelle. Grce elle, les inventeurs savent que leurs dcouvertes sont protges et quils en tireront une rmunration. Ils sont incits dvelopper les ides quils conoivent.
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de lacier Bessemer (1856). Dans lindustrie textile, la lature et le tissage ont fait lobjet dinventions permettant un accroissement rapide de la productivit du travail : pour la lature, les tapes sont les suivantes : lutilisation dune pdale sur les rouets ou les machines tisser libre une des mains du travailleur ; la machine ler ("jenny") de Hargreaves vers 1766 ; le mtier eau dArkwright (1769) ; la "mule" ou "mule-jenny" de Crompton, qui mle les deux inventions prcdentes (1779) Le tissage dut alors samliorer en mettant au point de nouveaux mtiers tisser mcaniques permettant de suivre le rythme de la lature. Ces volutions techniques ont pour consquence, outre lenrichissement et la croissance, la mise en place dun systme de production nouveau, le "factorysystem". Alors que le rouet traditionnel se trouvait chez la leuse qui travaillait faon la matire premire que lui fournissait le patron (ctait le "putting-out"), les nouveaux instruments sont trop coteux pour appartenir au travailleur : cest le patron qui les achte et les installe dans une factory ou usine ; les travailleurs se dplacent pour pratiquer leur mtier. Les usines se concentrent dans les bourgs et les villes et les travailleurs suivent.
1.4
lments conomiques
Certaines conditions strictement conomiques sont ncessaires pour que la rvolution industrielle puisse se produire ; laccumulation de capital technique, la production et lachat de nouvelles machines puissantes, la cration dusines de grande taille, ne peuvent avoir lieu sans une pargne pralable. Il faut que la socit, ou du moins certains de ses membres, dispose de moyens sufsants. Si la production est tout entire tourne vers la subsistance, il est impossible de dtourner des ressources pour linnovation et linvestissement. Cest la thse de Rostow, dans les annes 60, quil faut une accumulation pralable pour que la croissance conomique puisse se mettre en place ; mais cette thse ne fait que reprendre les ides gnrales quAdam Smith avait lui-mme avances : cest grce lpargne, au comportement parcimonieux des individus, que la croissance est possible. Dans une conomie o les agents ne se soucient que de la satisfaction de leurs besoins immdiats, la croissance serait impossible. Une multiplicit de facteurs explicatifs Il est facile de concevoir que ces diffrentes causalits se renforcent mutuellement. Le progrs technique est possible grce lessor de la proprit ; lpargne est rendue plus attractive par les pers-
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pectives de prot cres par linnovation, mais aussi par lvolution de la morale qui admet lenrichissement, etc. la suite de la premire rvolution industrielle, quon associe facilement la machine vapeur puis au chemin de fer, on verra la croissance due llectricit, celle de lautomobile, celle des "nouvelles technologies" : le facteur innovation est bien primordial.
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2.1
La croissance est le rsultat de laugmentation de la production totale dune conomie, aussi la fonction de production macroconomique est au centre de son analyse. Une fonction de production macroconomique est une reprsentation de lactivit de production au niveau agrg, cest donc un rsum de lensemble des fonctions de production des rmes. Les fonctions de productions individuelles (celles des rmes) sont videmment les seules ayant une relle existence, la fonction agrge ne peut tre quune construction analytique. De nombreux dbats ont port sur la possibilit dune telle construction dans les annes 60 en particulier. On montre facilement, en particulier, que la fonction de production macroconomique ne peut tre obtenue par simple addition des fonctions individuelles (la nature des rendements des fonctions individuelles ne serait pas conserve). La fonction de production macroconomique, quelle que soit sa mthode dlaboration, ne peut tre quune approximation, qui doit tre sufsamment dle, des conditions de production effective de lconomie. La fonction de production sera note Yr = F (K, L) o Yr est le revenu national rel (en volume), K est le stock total de capital et L la main duvre (population active). Cette fonction a les mmes proprits que celles quon a dnies pour les fonctions des rmes ; en particulier elle peut connatre divers types de rendements : dcroissants, constants ou croissants ; le capital et le travail peuvent tre complmentaires ou substituables, etc.
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constants) ; laugmentation du revenu par tte, quant elle, nest possible que si la productivit des facteurs est croissante, ce qui implique des rendements croissants. Cependant, on a pu montrer que lquilibre macroconomique ncessite une fonction de production rendements constants : cest la "loi de lpuisement du produit" : les revenus sont gaux la production (cest--dire quil peuvent lacheter, mais ne pourraient pas acheter plus) sil y a des rendements constants. Il apparat donc ncessaire dintroduire un facteur particulier pour expliquer la croissance du produit par tte, tout en conservant des rendements constants. Cest ce que permet la formulation due Solow, dans laquelle la fonction de production a la forme suivante : Yr = AF (K, L) La variable A dsigne un facteur de glissement technologique, qui rsume linuence du changement technologique, explication de lvolution de la productivit ; elle est appele productivit globale des facteurs. chaque fois que le progrs technique se manifeste, le facteur A subit une augmentation. Soit une variation du revenu national, Yr ; elle peut se dcomposer de la manire suivante : Yr = AF (K, L) + A Yr Yr F F K + A L K L Yr Yr Yr K + L = A + A K L Yr = A + P mK K + P mL L A
Yr On passe de la premire la seconde ligne en remplaant F () par , et de la A seconde la troisime en notant P mK et P mL les productivits marginales du capital et du travail. lquilibre, ces productivits marginales sont gales au rmunrations des facteurs (cest--dire aux prix rels du capital et du travail), r et w ; on a donc : A Yr = Yr + rK + wL A En divisant cette expression par Yr , on obtient le taux de croissance de lconomie g: Yr A Yr rK K wL L = + + Yr A Yr Yr K Yr L A K rK L wL g = + + A K Yr L Yr g = A + K + L
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Dans cette dernire expression, connue comme la dcomposition de Solow, les variables sont A : le taux de croissance de la productivit globale des facteurs A, soit A A= A K : le taux de croissance du capital L : le taux de croissance du travail employ : la part de la rmunration du capital (en %) dans le revenu national (part des prots) : la part de la rmunration du travail (en %) dans le revenu national (part des salaires) ( + = 1 quand la fonction de production est rendements constants). Cette dcomposition a t souvent utilise dans le cadre dune fonction de production de type Cobb-Douglas : Yr = AK L1 On montre facilement qualors et (1 ) sont les parts respectives des prots et des salaires dans le revenu national. Dans les modles de croissance no-classiques, comme celui de Solow, le taux de croissance de la population active est une donne xogne, qui nest pas explique par le modle ; en revanche, lvolution du capital peut tre mise en quation moyennant quelques hypothses. On doit se donner tout dabord le taux dusure du capital , cest--dire la proportion du capital dtruite chaque anne, et quil faudra videmment reconstituer intgralement avant toute croissance ; puis il faut prciser par quel mcanisme laccroissement du capital productif est ralis ; on retient gnralement un taux dpargne constant s, part du revenu national qui sera affecte laugmentation brute du capital (reconstitution comprise). On aura ainsi : K = sYr K Quant au progrs technique, il peut tre modlis de diverses manires (voir plus bas).
2.3
Il est possible grce ce modle gnral mais trs succinct de rechercher la part de chaque facteur de la croissance ; mais A nest pas directement mesu rable. Ainsi les statisticiens, qui peuvent mesurer les variables g, K, L, et , obtiennent-ils la valeur de A comme un rsultat de leurs calculs, rsultat qui est appel le rsidu de Solow (ou parfois de Denison). On peut supposer que ce rsultat mesure effectivement la variation de la productivit globale des facteurs, mais
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France 2,8 1,2 1,6 Allemagne 3,0 1,4 1,6 Japon 5,1 3,3 1,8 Pays-Bas 3,0 1,9 1,1
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Royaume Uni 2,0 1,2 0,8 tats-Unis 3,0 2,2 0,8
TAB . 2 Dcomposition de Solow, 1913-87 (taux de croissance moyen annuel) il contient en plus du progrs technique dautres lments, tels que lamlioration de la qualit des facteurs qui peut rsulter de causes trs diverses. Si on prend la qualit du facteur travail, son amlioration peut rsulter par exemple de llvation du niveau dinstruction, mais aussi de labaissement de la dure du travail, si on suppose que le rendement dun travailleur diminue la n de la journe (ce qi nest pas une hypothse trs forte...). En ce qui concerne le capital, sa mesure au niveau macroconomique pose de nombreuses questions ; en particulier, doit-on le mesurer : son cot historique (cot subi lors de son accumulation) ? son cot de remplacement ? selon sa rentabilit ? Dautre part, la qualit du capital nest pas constante, elle samliore parce le progrs technique est pour une part non ngligeable incorpor au capital, cest-dire que les nouveaux biens de capital sont diffrents des anciens, du fait des innovations ; lvolution du capital nest donc pas exclusivement quantitative, et les tentatives de mesurer dun ct les variations du capital et de lautre le progrs technique sont en partie vaines. Il peut tre cependant interessant de se rfrer aux rsultats statistiques de la dcomposition de Solow. Le tableau 2 donne des chiffres 3 relatifs quelques pays industrialiss :
2.4
Lvolution de la productivit globale est cependant loin dtre rgulire ; elle a connu, en particulier, un ralentissement marqu dans le dernier quart du vingtime sicle (particulirement dans les annes 70). Selon des calculs classiques de Maddison, le taux de croissance de la productivit globale ( A) a pris les valeurs suivantes dans trois priodes du vingtime sicle (tableau 3) Cette volution contraste de la productivit globale nest pas explique de manire totalement satisfaisante. Plusieurs thories en particulier se concurrencent pour rendre compte de la baisse de la productivit globale aprs 1973. Laugmentation du prix du ptrole dans les chocs ptroliers des annes 70 est
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1913-50 0,17 0,83 0,57 0,14 0,35 1950-73 2,14 0,77 1,79 1,20 0,73 1973-87 0,50 0,10 0,61 0,20 0,73
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TAB . 3 Variations de la productivit globale des facteurs (taux de croissance moyen annuel) une explication peu convaincante, car ses effets nauraient pas d se prolonger dans les annes 80, quand le prix rel du ptrole a repris un cours "normal". Le rle des services est un meilleur candidat : la transition dune production essentiellement industrielle une production de plus en plus axe sur les services, secteur dans lequel le taux de progrs technique est moins rapide, peut constituer une bonne explication de lvolution du rythme de progrs technique global ; la productivit de lindustrie a dailleurs continu crotre plus rapidement que dans le reste de lconomie. La baisse des dpenses de recherche-dveloppement quon a constate la n des annes 70 constitue certainement un autre lment dexplication. le caractre exceptionnel du rythme de progrs des trente glorieuses peut lui aussi expliquer, comme un retour une situation plus normale, le tassement des annes qui ont suivi ; les annes 1945-73 sont des annes de reconstruction et de rattrapage provoques par le choc de la seconde guerre mondiale ; cette thorie nexplique cependant pas le retour une croissance trs forte de la productivit globale dans les annes 90. Les nouvelles technologies (informatique et communication) sont parfois paradoxalement dsignes comme responsables du ralentissement ; leur adoption aurait ralenti la croissance, mais pour mieux lacclrer par la suite.
2.5
Lhypothse de convergence
La croissance est souvent explique par lhypothse de rattrapage ou convergence (Gerschenkron, Abramowitz). Selon cette hypothse, partir du moment o une conomie devient industrielle, plus lcart avec les pays les plus avancs est grand, plus la croissance est rapide. Il sagit au dpart plus dun constat que dune thorie causale , constat qui dailleurs nest valide que pour certains groupes de pays, mais pas au niveau mondial (tous pays confondus).
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On a tent dexpliquer la convergence, en considrant que les pays concerns ont un mme sentier de croissance quilibre. Un sentier de croissance quilibre correspond au plus fort taux de croissance rgulier de long terme que lconomie peut soutenir. Il dpend essentiellement de son niveau technique, de son taux dpargne, et de divers autres facteurs comme par exemple la croissance dmographique. Si un groupe de pays ont un mme sentier, cela signie quils doivent tous connatre des conditions quivalentes, quand ils ont atteint ce sentier dquilibre, mais sont videmment diffrents hors de ce sentier. Si un des pays de ce groupe a atteint ce sentier avant les autres, pour telle ou telle raison historique, les autres pays ne vont pas moins atteindre ce sentier tt ou tard, et dans la priode transitoire, pendant laquelle ils ne produisent pas encore pleine performance parce que leurs ressources ne sont pas encore pleinement utilises, ils connatront une croissance plus forte que celle du pays dj mature (exactement comme des enfants rattrapent en taille les adultes).
2.6
Dans les thories de la croissance jusquaux annes 70, la croissance du progrs technique est considre comme un phnomne xogne, cest--dire que son origine nest pas analyse dans le cadre de ces modles. Le modle de Solow (1956) comporte ainsi lhypothse dun taux de croissance constant du progrs technique, qui intervient comme un cadeau tombant du ciel. Dans la n des annes 80 et les annes 90, essentiellement sous limpulsion de Paul Romer, la thorie de la croissance endogne sest dveloppe. Elle prend comme point de dpart que le progrs technique doit sexpliquer en tant que phnomne conomique. Les connaissances sont des biens conomiques, qui sont produits et consomms, mais dans des conditions particulires. En effet, la consommation de connaissances par un agent nentame pas la quantit de connaissances disponibles pour les autres (non-exclusion). Ce ne sont pourtant pas ncessairement des biens publics, parce quon peut trs bien (pour les ides nouvelles, non encore diffuses) mettre au point des mcanismes institutionnels permettant dinterdire ceux qui ne veulent pas payer ces biens de les connatre ou de les utiliser : le brevet industriel est lexemple type de ces mcanismes ; le droit dauteur est un autre exemple. Dautre part, la production de connaissances implique des cots importants, mais leur diffusion se fait cot quasiment nul ; cela signie que le cot marginal de la connaissance est nul dans le sens suivant : faire partager des connaissances donnes un agent conomique supplmentaire, quand dautres les possdent dj, ne cote quasiment rien ; cela signie des rendements croissants.
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Chez Romer, la productivit globale des facteurs A est appele "stock dides" et la fonction de production est formule ainsi : Yr = K (ALY )1 Cette fonction a des rendements constants si on ne considre que les facteurs traditionnels, mais en incluant lvolution du stock dides, les rendements deviennent croissants4 . La production dides dpend du nombre de personnes LA travaillant la recherche-dveloppement : A = LA est le taux de dcouverte de nouvelles ides - pas ncessairement une constante - et la population active est divise entre ceux qui produisent des biens et services LY et ceux qui produisent des ides LA : L = LY + LA . La thorie de la croissance endogne a alors comme tche essentielle de comprendre les dterminants de Dpend-il du stock dj accumul de connaissances, et dans quel sens ? Une hypothse plausible est que plus les connaissances se sont accumules, plus il est facile den laborer de nouvelles, mais lhypothse inverse se justie elle aussi, parce que les dcouvertes les plus faciles sont faites en premier. Une autre variable considrer est le nombre de chercheurs ; si plusieurs chercheurs ou groupes de chercheurs sont en concurrence en vue dune mme dcouverte, cette concurrence pourra acclrer le taux de dcouvertes. partir dhypothses concernant ces points on peut donc laborer de trs nombreux modles de croissance endogne. Une caractristique interessante de ces modles (dune majorit dentre eux en tous cas) est quils montrent que, contrairement la croissance xogne, la croissance endogne peut tre aide ou acclre par des politiques conomiques adaptes, comme des subventions la recherche-dveloppement (Romer dmontre par exemple que le march ne fournit pas des incitations sufsantes pour que le volume de recherche-dveloppement soit optimal). En effet, si chaque dcouverte supplmentaire rend plus facile les dcouvertes suivantes, alors que chaque dcouvreur nvalue la rentabilit de son travail quen fonction des consquences immdiates de son invention, il y a une externalit positive ; cela signie que les chercheurs doivent tre incits produire plus dinventions quils ne font normalement. Il faut crer plus dincitations que ne le fait le march, do le besoin de subventions.
Augmentons K et LY de x%, le produit sera multipli par un facteur 1 + x, cest--dire une augmentation proportionnelle ou des rendements constants ; mais augmentons K, LY et A de x%, le produit sera multipli par un facteur (1 + x)(1 + x)1 , ce qui est plus que proportionnel, impliquant des rendements croissants.
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Dautre part il y a une externalit ngative du fait de la duplication des recherches : deux quipes recherchant le mme rsultat ne font que multiplier le "cot social" par deux, puisquil ny aura quune seule ide larrive, quand une des quipes aura russi. Ici le march produirait trop de recherche-dveloppement ! La troisime distorsion proviendrait de l"effet de surplus des consommateurs", le dtenteur dun brevet ne jugeant de la rentabilit qu travers ses prots et non travers les gains du consommateur ; en intgrant ce dernier lanalyse, on obtiendrait un bnce plus grand. Ce dernier effet implique comme le premier la ncessit de relever le niveau spontan de recherchedveloppement. Comme on le voit, cette argumentation semble plaider en faveur dun soutien public la recherche-dveloppement, surtout si les subventions sont conditionnelles lattnuation de la concurrence entre quipes de recherches5 . Cependant, elle ne permet pas rellement dapprcier quel devrait tre le niveau de ce soutien, et continue dailleurs susciter des dbats. Conclusion On na expos aucun modle de croissance dans ce chapitre, on a essentiellement prsent les thories quillustrent et testent les modles. On peut pour conclure voquer rapidement le fonctionnement des modles de croissance. partir dhypothses de comportement (comportement dinvestissement, de recherche-dveloppement...) ou de structure (croissance dmographique...), on calcule pour une conomie son rgime permanent, cest--dire le niveau de revenu et de croissance du revenu maximum de longue priode ("soutenable"). On regarde ensuite comment cette conomie peut se diriger vers ce rgime permanent si elle en est loigne (en particulier comment elle ralise son dcollage ou rvolution industrielle). On tudie encore les proprits doptimalit du rgime de croissance ; la "rgle dor" de la plupart des modles en la matire est que le taux de croissance optimal est gal la rmunration du capital (en %), cest--dire le taux dintrt. Tout ceci implique lutilisation doutils mathmatiques parfois complexes...
Cest ce que fait par exemple la Commission Europenne en distribuant des aides de recherche-dveloppement cherche promouvoir la coopration des quipes.