Bernard Palissy
Bernard Palissy
Bernard Palissy
argiles kaoliniques des Charentes). Il manipule plusieurs argiles dans un mme moule en
fonction de la finesse du dcor.
Sa technique a galement consist perfectionner une mthode de moulage particulire
quil appelle linsculpture . Le moulage se droule en deux temps : dabord Palissy
moule des animaux vivants dont il tire un positif en terre cuite (reptiles, batraciens,
poissons, oiseaux, lapins ; des coquillages, des vgtaux, des cailloux pour le dcor de
rocaille, des parties du corps humain) puis il assemble, selon son gr, les lments en
terre cuite et labore ainsi des scnes complexes pour des pices exceptionnelles, tout
particulirement pour les plats dit aux rustiques figulines . Ses recherches se
concentrent sur les glaures quil veut fines, transparentes pour ne pas empter le relief
des motifs mouls. Les bases de ses glaures plombifres sont habituelles (le cuivre pour
le vert, le cobalt pour le bleu, le fer pour le jaune et certaines glaures opacifies par
ltain) ; ses mlanges novateurs sont essays sur des petits albarelles (certains retrouvs
dans les fouilles du Louvre). Ses glaures jaspes sont les plus apprcies.
Il porte toute son attention la cuisson des cramiques. Comme il travaille volontiers
dans diffrents ateliers de potiers et de verriers, il peut essayer de nombreux types de
fours ; le four du verrier le sduit car cest le seul qui lui permet dobtenir un mail blanc.
Palissy a t lui-mme lorigine dune lgende solidement ancre au XIXe sicle, celle qui
le dcrit en train dalimenter son four, avec ses propres meubles : les estapes qui
soustenoyent les tailles de mon jardin, [] les tables et plancher de la maison . Cette
scne fameuse a t peinte, entre autres, par Alexandre-Evariste Fragonard (conserv
Svres - Cit de la Cramique).
MNC 965.2
MNC 965.1
MNC 3145
install dans un ancien atelier de tuiliers, nombreux dans ce secteur depuis le XIII e sicle,
pour y entreposer ses moules pris sur le vif, rapatris de Saintes. Il a indniablement
lintention de concevoir la grotte des Tuileries, comme il labore les dcors fantastiques
de ses plats partir des moules. Les fouilleurs dgagent des grands moules en pltre
reproduisant des parties du corps humain (sur les jambes se voient les rides de la peau,
les poils) ; comme ceux-ci sont trs fragiles, des tirages en terre cuite sont excuts et
quatre dentre eux entrent Svres en 1878.
En 1879, le Louvre et Svres se partagent les fragments retrouvs en 1865. Mais avant ces
fouilles officielles, plusieurs dcouvertes fortuites avaient t ralises ds 1845, dont
un chapiteau au dcor de rocaille (MNC 3544), provenant probablement de latelier de
Palissy. Dautres fragments sont mis au jour en 1855 lors du creusement dun bassin dans
les jardins ; seul le plat fragmentaire au Baptme du Christ (MNC 5055) est achet par
Svres en 1856. On ignore ce qu'il est advenu des autres pices. Dautres fragments de
grotte sont retrouvs lors du creusement dune tranche, pour installer le ballon Giffart de
lExposition universelle de 1878. Puis de nouvelles fouilles officielles sont pratiques par
Vacquer en 1883. A la mme date, un lieutenant de gendarmerie Mandres, en poste au
Pavillon de Flore du Louvre semble avoir dcouvert fortuitement quelques fragments
supplmentaires, en partie donns au muse de Svres. Toutes ces trouvailles du XIXe
sicle sont rparties, aprs de dures ngociations, entre les muses Carnavalet, de Svres
et du Louvre.
Enfin, de nouvelles fouilles archologiques ont t menes avant la construction de la
Pyramide du Louvre, entre 1983 et 1990. Latelier de Palissy a t ainsi redcouvert dans
sa totalit et les pices archologiques ont t confies exclusivement au muse national
de la Renaissance dEcouen.
Ses suiveurs :
Il semble que le matre-cramiste ait fascin ds les dernires annes de son existence. De
nombreux ateliers se sont appropris ses dcouvertes et liconographie de ses pices. Dans
la mouvance de la Renaissance, ils ont, comme Palissy, imit les plats en mtal et tir leur
inspiration de gravures qui circulaient dans les milieux artistiques. Ils ont produit des
pices au revers jasp et aux motifs mouls. Ses suiveurs immdiats ont cr dans un
style palissen jusque vers 1640 (pour certains chercheurs jusquau XVIIIe sicle).
Les premiers suiveurs la fin du XVIe sicle et au dbut du XVIIe sicle
Les ateliers de Fontainebleau, ou dAvon :
Fontainebleau, joyau de la Renaissance, dcor en partie par Rosso (LAllgorie de la
Fcondit) est une source dinspiration importante pour tous les crateurs et en
particulier pour les cramistes des ateliers voisins. De Palissy, ils ont retenu les revers
jasps de ses premires cramiques et certains thmes mythologiques et religieux pour les
grands plats. Claude Berthlmy, mailleur sur terre de Fontainebleau, a produit un
grand nombre de pices jaspes de terre au dbut du XVIIe sicle. Cet atelier fut actif
entre 1570 et 1620. Deux pices des collections de Svres pourraient lui tre attribues :
La Nourrice (MNC 1165), Saint Paul (MNC 6565).
Latelier du Pr dAuge (Normandie) :
La Normandie a t, depuis le Moyen-ge, une des rgions possdant un savoir-faire
remarquable en matire de cramique vernisse. Les potiers matrisent les terres et
dveloppent une large gamme de glaures ; ils savent crer la matire jaspe chre
Palissy. Un cramiste se distingue parmi eux, celui qui a t surnomm ultrieurement le
Matre au pied ocre , actif la fin du XVIe sicle et au dbut du XVIIe sicle (MNC
1041). L'atelier du Pr d'Auge fut actif entre 1590 et 1620.
Plusieurs auteurs supposent quun atelier de cramistes existait la frontire nord de la
France-Flandres ; certaines scnes directement inspires dune iconographie flamande le
laissent supposer.
Le got palissen perdure aux XVIIe et XVIIIe sicles chez certains faenciers comme
Corado Nevers (plat MNC 12575, expos dans la salle des faences du rez-de-chausse).
Des fabriques anglaises copient en faence la production franaise, notamment prs de
Londres (Southmark). La manufacture anglaise de Minton emploie le mot de Palissy
ware pour les pices glaure plombifre comme le trs beau plat conserv au muse de
Svres (MNC 6284).
Quelques thmes de prdilection, repris par ses suiveurs ou continuateurs,
illustrs par les pices de Svres :
Les plats dits aux rustiques figulines (MNC 965.1, MNC 965.2, MNC
3145)
MNC 4407
MNC 1168
MNC 5055
MNC 4903
MNC 4406
MNC 4773
MNC 6565
MNC 8404
MNC 9184
MNC 1041
MNC 5690
MNC 6017
MNC 5559
MNC 9908
Pr dAuge
Au XVIIIe sicle, Palissy est quasiment oubli lexception de quelques savants comme
Voltaire, Buffon Son art est redcouvert par des collectionneurs dans les premires
annes du XIXe sicle ; lengouement est tel que de nombreuses cramiques vernisses ou
mailles lui sont attribues.
Lcole de Tours :
La famille Avisseau : Charles-Jean Avisseau (1795-1861), dabord tailleur de pierre, a
la rvlation de lart cramique en voyant deux uvres de Palissy chez un collectionneur.
Il naura de cesse pendant plusieurs annes de retrouver les secrets du Matre ; il aboutit
vers 1843. A partir de 1836, il est dit peintre en faence et acquiert une solide
rputation ; les critiques font volontiers le paralllisme entre Palissy et lui. Le second
cramiste important de cette cole est Joseph Landais (1800-1883). Ami et beau-frre
dAvisseau, il partage sa passion des inventions en matire de cramique mais trs vite les
deux hommes saccusent mutuellement dexploiter les dcouvertes de lautre. Avisseau
travaille plus sur les formes, la manire dun sculpteur, Landais est plus naturaliste
et sans doute un grand dcouvreur de subtiles glaures, mais rapidement ils se fchent
dfinitivement. Les deux ateliers dAvisseau et de Landais demeurent des entreprises
familiales.
Dautres noms mritent dtre signals, celui dAuguste Chauvign (1829 1904),
peintre et cramiste, cherchant copier la nature dans toutes ses nuances, ou encore, de
Lon Brard (1830- 1902) dont la cration sloigne considrablement des uvres
palissennes.
Lcole de Paris :
Les uvres de lcole de Paris apparaissent plus tardivement que celles de lcole de
Tours. Le chef de file de lcole de Paris est sans conteste Georges Pull (1810-1889),
musicien, naturaliste et antiquaire dont la production cramique dbute aprs 1855 (son
atelier est situ rue de Vaugirard). Techniquement, ses uvres sont trs proches des
originaux, par lexcellente qualit des moulages ; il fait aussi des copies de statuettes et de
pices jaspes quil ne signe pas. Certains lui reprocheront de vouloir produire des faux.
Par la suite, il imprime sa signature sur le revers des pices.
Le deuxime artiste parisien important est Victor Barbizet (1805 -1870), actif entre
1850 et 1890. Il pratique un grand art du moulage sur les poissons en particulier.
Les autres cramistes comme Thomas Sergent (1830-1890) ne travaillent que dans un
lointain souvenir des pices palissennes.
Il faut signaler aussi les imitateurs (des faussaires pour certains) du XIXe sicle : vers
1884, les imitations de plats revers jasp se trouvent foison sur le march parisien.
Certains artistes ou restaurateurs, comme Pull, Pierrat sont souvent la limite entre la
cration et la contrefaon.
MNC 10480
Avisseau
MNC 10481
La redcouverte de lart de Palissy est due des collectionneurs tels que Du Sommerard,
Sauvageot (collection de 88 pices dites de Palissy), Brunet-Denon, le baron Durand (60
pices du matre) qui commencent sintresser ses pices ds le dbut du XIXe sicle.
Le Louvre prsente onze vases attribus Palissy ds 1817 ; de mme en 1830, le muse
de Svres exhibe au public un choix reprsentatif des productions de type Palissy.
De nombreux ouvrages sont dits sur le grand homme et son art, ds 1830, date
laquelle les ventes duvres de Palissy se multiplient, encourageant les imitateurs
faire de grossires contrefaons. Brongniart est trs prudent dans ses achats : les deux
premiers plats aux rustiques figulines sont acquis en 1827, achat prcoce garantissant
quasiment leur authenticit, mme sil sagit l de pices de ses suiveurs de la fin du XVI e
sicle. La mode Palissy est telle que la Manufacture de Svres cre un Vase dans le style
de Palissy (Chenavard, 1830), une coupe Palissy en 1840. Peu de cramiques sont
reconnues, lheure actuelle, comme de vraies uvres de Palissy.
Etat de la collection avant et aprs guerre
- Photographie de la vitrine dite Bernard Palissy et son cole, XVIe XVIIe sicles ,
publie dans le guide illustr du Muse Cramique de Georges Papillon, en 1909.
- Photographie des salles du muse telles quelle ont t retrouves en mars 1942 au
moment o le muse a t en partie dtruit par deux bombes.
1909
1942
Avant
Aprs
Sculpteur, Barrias
Bernard Palissy n vers 1510 Agen acquit sa rputation dinventeur de gnie grce aux crations
cramiques quil fit la fin du XVIe sicle ; on ne connat pas de manire certaine ses traits. Le
sculpteur Barrias limagine pourvu des attributs reprsentatifs de ses talents : il lui fait tenir dune
main l'un de ses fameux plats dits aux rustiques figulines (serpent, poissons, coquillages,
crevisses) et de lautre, lune de ses publications ; il lhabille dun tablier de potier couvrant son
vtement de gentilhomme du XVIe sicle, lentoure dun petit cabinet de curiosits (fossiles) et
dun petit four, caractristique dune de ses proccupations, la cuisson des cramiques.
Louis-Ernest Barrias (1841- 1905), sculpteur rput dans la deuxime moiti du XIXe sicle,
gagna toutes les rcompenses et les honneurs ; il prsenta le modle en pltre de la statue de
Palissy au Salon de 1880 (conserv au muse du Petit Palais, Paris). Lexemplaire en bronze le
plus clbre est rig dans le square de Saint-Germain-des-Prs ; deux autres sont placs
Boulogne et Villeneuve-sur-Lot. Les fondeurs de la pice sont les Frres Thiebaut.