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2001-05

Management de projet et gestion des ressources humaines


Gilles Garel1, Vincent Giard2, & Christophe Midler3
1 Professeur lUniversit Marne la Valle
2 Professeur lIAE de Paris (Universit Paris I Panthon Sorbonne)
3 Directeur de recherche au Centre de Recherche en Gestion (CNRS cole Polytechnique)

Rsum : Lintroduction des projets dans lorganisation pose de multiples problmes de


gestion des ressources humaines la fois dans les projets et au niveau de lorganisation. Ceux-
ci varient en raison dun certain nombre de facteurs de contingence.

Mots cls : management de projet, gestion de projet, gestion des ressources humaines,
contingence, organisation.

Abstract: The projects introduction in organization triggers many human resources


problems both at project and organization level. Those issues varies depending on contengency
factors.

Keywords: project management, project control, management of human resources, contin-


gency, organization.
De plus en plus dentreprises font appel, de manire plus ou moins intensive et plus ou moins
rgulire, au mode dorganisation des projets pour maintenir ou amliorer leurs positions
comptitives. Cette transformation est lourde de consquences sur le plan organisationnel et
pose des problmes spcifiques aux Directions des Ressources Humaines (DRH). Ce dvelop-
pement des organisations projets peut sapprhender au travers de la contribution classique de
Lawrence et Lorsch (1967, [52]). Selon eux, la structure de chaque sous-systme de lentreprise
(recherche, production, marketing) varie en fonction de lincertitude de son environnement
(plus lenvironnement est incertain, moins la structure est formalise) et si lorganisation a des
sous-systmes diffrencis, elle doit utiliser des moyens pour les intgrer. Leurs travaux tendent
montrer que les entreprises les plus performantes sont celles qui ont la meilleure intgration
pour des diffrenciations cohrentes avec leurs environnements. Pour ces auteurs, la hirarchie
nest pas un mcanisme de coordination suffisamment efficace et ils se livrent une analyse fine
des mcanismes dintgration ou de coordination: ajustement mutuel, comits et services de
liaison, rgles interdpartementales, structure matricielle et dfinissent des rles intgrateurs
qui prfigurent largement les fonctions de chef ou de directeur de projet qui apparatront plus
tard (Lawrence et Lorsch, 1967, [53]).
Cette problmatique diffrenciation - intgration peut se mobiliser de deux manires sur le
management de projet:
- Du point de vue de lentreprise, il sagit dintgrer une activit spcifique, le projet, des
modes de fonctionnement plus routiniss, comme les activits dopration. Lentreprise
qui gre simultanment plusieurs projets doit entretenir la diffrence entre ses projets tout
en recherchant lintgration de chacun, la fois dans la stratgie de lentreprise et au travers
du partage de certaines ressources.
- Du point de vue du projet, le management relve de lintgration de professionnalismes dif-
frents. La gestion de projet organise la convergence dexpertises professionnelles diffren-
tes et complmentaires les unes des autres en construisant la relation entre des mtiers
pointus et non en recherchant une illusoire mobilisation dexpertises individuelles spectre
1. Courriel: garel@mail.univ-mlv.fr; adresse: Universit Marne la Valle, UFR dconomie et de gestion,
PRISM OEP, 5 Bd Descartes Cit Descartes Champs sur Marne F 77454 Marne la Valle Cedex 2.
2. Courriel: Giard.IAE@univ-paris1.fr; adresse: IAE de Paris, 21 rue Broca, F 75005 Paris.
3. Courriel: midler@poly.polytechnique.fr; adresse: CRG, 1 rue Descartes, F 75005 Paris.
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multidisciplinaire.
Cela tant, lappellation de projet recouvre une grande varit de situations qui correspon-
dent des rponses spcifiques des problmes conomiques et industriels diffrents, nimpli-
quant pas la mme gestion du personnel. Une bonne gestion des ressources humaines (GRH)
suppose une comprhension des enjeux conomiques, des mcanismes mis en place et des rles
tenir. Cest dans cette perspective que se situe ce texte, pour permettre au lecteur de mieux
comprendre la porte et la contingence de certaines rponses spcifiques et de mieux adapter
certains outils classiquement utiliss en GRH, sachant que lon peut noter la relative ignorance
mutuelle dans laquelle se trouvent les crits acadmiques de GRH et ceux concernant le mana-
gement de projets. Nous ne traiterons pas ici des dveloppements nombreux mais parses,
locaux et souvent inscrits dans le monde de la presse spcialise qui valorise les expriences de
projets dans toutes leurs dimensions.
- La performance des projets passe par une implication trs exigeante des acteurs, gnrale-
ment trs qualifis, quelles que soient la forme dorganisation et les procdures de gestion
en place. Pourtant, les travaux de gestion de projets ne sintressent que marginalement la
GRH. Les crits professionnels de normalisation et certification1 (PMBoK, [76], 1996 &
2000, norme X50-107 de lAfnor (1992) rvise dictionnaire de lAFITEP, 2000, [2], et IP-
MA, 1998, [46]) abordent ces problmes du point de vue du projet, par le biais de description
de profil de poste et de procdures utilisables dans le projet (sur cette approche trs proc-
durale, voir galement, Kliem & Lundin, 1992, [50]). Ce qui se passe avant et aprs le projet,
tout comme les incidences des interactions entre projets et services sont hors champ. Ce-
pendant quelques rares ouvrages acadmiques centrs sur la gestion franchissent la frontire
et abordent le problme de la gestion de projet du point de vue de la GRH. Si on laisse de
ct les contributions sur les effets humains de lorganisation matricielle (Reeser, 1969,
[79]), dont nous verrons quelle ne recoupe pas forcment lorganisation projet, la contribu-
tion de P. Leclair (1993, [56]) dans louvrage dECOSIP (Giard et Midler, 1993, [30]), est
lune des premires notables du genre en France (voir galement les premires synthses
problmatises de Baron et Couvreur, 1992, [11], et Baron, 1993, [12]). Les productions
plus rcentes se caractrisent par la diversit des approches. Le plus souvent, langle retenu
est organisationnel (comme louvrage collectif de lAFITEP et de lANACT coordonn par
Bossard, Chanchevrier, Leclair, 1997, [1] ou Dinsmore, 1990 [29], ainsi que les travaux du
rseau de recherche IRNOP coordonns par Lundin et Midler, 1998, [61]), socio-organisa-
tionnel (comme la synthse de Trpo et Zannad, 1997, [83] et la thse de Zannad, 1999, [86])
ou orient management des quipes-projets (Picq, 1999, [74]) rejoignant en cela un courant
de travaux propres aux projets de R & D (Badawy, 1995, [10]). On peut galement citer les
actes de la Convention AFITEP 2000, [7], consacr aux problmes de gestion des quipes-
projets et des crits portant sur la dimension humaine du management de projets, partir de
rcits prtention gnralisante (Sizemore House, 1988, [80]), des approches spcifiques
comme le facteur humain et lchec des projets informatiques (Thomsett, 1980, [82]) ou
lenqute statistique du PMI sur des pratiques salariales en management de projet (PMI,
2000, [77])
- De la mme faon, les productions de GRH ne se sont pas encore rellement intresses
ce champ non encore stabilis du management de projets, o les pratiques continuent se
transformer et o les exprimentations des entreprises sont en avance sur la production aca-
dmique. Quelques travaux rcents laissent poindre une rflexion spcifique (par exemple,
Paraponaris, 2000, [73]). Des contributions sur les aspects psycho-affectifs lis limplica-
tion dans les activits projets et ses consquences en termes de stress, de burn out, voire
de consommation de produits dopants sont galement souligner (par exemple Flannes &
Levin, 2001, [31]).
Si les productions ne sont pas encore trs nombreuses lintersection du champ du manage-
ment de projet et de la GRH, de nombreuses problmatiques se superposent sur ce champ:
- Comment adapter les politiques et les outils de GRH qui se sont historiquement dvelopps

1. Une analyse des diffrences de perspectives de ces trois rfrentiels est propose par Lebissonnais (2001, [55]).
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dans et pour les organisations fonctionnelles, quil sagisse de recrutement, dintgration, de


mobilit, de rmunration, de formation, dvaluation des rsultats ? Dans cette perspec-
tive fonctionnelle, ce sont davantage les savoirs formels qui sont valoriss et non la capacit
les diffuser et les capitaliser.
- Les missions de la fonction RH sont directement interroges voire remises en cause par le
dveloppement des logiques projet. La fonction RH peut-elle rester une fonction centra-
lise, part entire de lentreprise, et prendre en charge les demandes contradictoires des
activits doprations et de projets et jusquo? Doit-elle au contraire se dcentraliser dans
certains gros projets, par exemple avec la mise en place dun chef de projet RH autonome,
pour prendre en compte leurs spcificits? En clatant la cohrence de lorganisation fonc-
tionnelle, la gestion de projet interroge la fois les missions de la fonction GRH mais aussi
lexistence mme de cette fonction.
- La gestion mme des principaux responsables des projets, dscuriss par rapport des
fonctions fonctionnelles, pose de nombreux problmes spcifiques:
en formation, puisquil sagit dexercer un mtier nouveau auquel ces personnes nont pas
t prpares;
en recrutement, puisquil sagit pour des individus fort potentiel de sloigner de struc-
tures o leur avenir semble assur;
en valuation des performances, en particulier en cas de conflits appuys entre les struc-
tures fonctionnelles et les projets;
en constitution des quipes-projets, en raffectation des hommes en fin de projet et en
diffusion des apprentissages de gestion de projets dans lentreprise.
- Ds quune identit projet se constitue, se dveloppe et saffiche, comment grer les in-
vitables tensions entre les mtiers et les projets? Cette confrontation vcue comme un jeu
somme nulle est terme une perspective sans issue. Les directions mtiers, au moins dans
les grandes entreprises, ont vcu lmergence des grands projets comme une concurrence de
leur propre zone dinfluence. Dun autre ct, casser les mtiers, reviendrait dissoudre la
matire premire des projets.
- Les transformations des pratiques professionnelles face au dveloppement de la gestion de
projet se traduisent en particulier par une remise en cause de la coupure traditionnelle entre
la conception et lexcution, lapparition de nouvelles fonctions transversales, la ngocia-
tion permanente entre des professionnels diffrents, la mobilisation sur les rsultats du pro-
jet plutt que sur lapplication de savoir-faire mtiers.
Ces questions se dmultiplient lorsquon les envisage de faon contingente. Ainsi, la question
de la place de la fonction RH ne sera videmment pas la mme selon que lon se trouve dans
une start-up de 10 mois en pleine croissance de ses effectifs ou au dans une grande entreprise
automobile.
Lambition de cet article est desquisser un cadre danalyse, un ensemble de principes et
doutils permettant dlaborer des systmes de gestion performants tenant compte de lidentit
singulire des projets et de leur varit et des impacts forts de cette contingence sur les rles et
principes de fonctionnement de la DRH. Le point de vue privilgi ici sera plutt celui de la
GRH vue du projet que celui de la DRH comme mtier institu confront de nouvelles ques-
tions. Aprs avoir caractris les projets ( 1), on examinera les structures de projet, la gestion
et leur mise en place en terme de GRH ( 2, page 9). Enfin, nous prsenterons quelques proc-
dures mobilisables dans la gestion interne dun projet pour en assurer la performance et qui, au
travers des comptences qui leur sont associes, ont un impact sur la gestion des ressources
humaines ( 3, page 21).

1 Caractrisation des projets


Comprendre les problmes de management de projet implique la fois didentifier
lensemble des caractristiques partages par les projets qui les distinguent des activits
rcurrentes ( 1-1) et de reprer la grande varit dutilisations possibles de lorganisation
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projet ( 1-2). Cette varit est lie celle des problmes rencontrs et se traduit par une
pluralit des structures et des procdures. Il sensuit que les approches et instrumentations mobi-
lisables par les responsables de GRH sont varies et que leurs performances sont contingentes,
ce que sefforcera de souligner cet article.

1-1 Dfinition
Le projet est une forme dorganisation productive trs ancienne: quand un pharaon dcidait
de faire construire la pyramide sous laquelle il serait enterr, il fallait excuter un ouvrage de
spcifications techniques prcises, en un laps de temps court, avec des ressources matrielles et
humaines limites. Dans tout projet, on retrouve cette prise en compte simultane de ces trois
catgories de contraintes (temps, ressources et spcifications techniques) pour raliser un objet
ou une prestation de service, qui na jamais t encore excut dans ces conditions prcises et
qui est dune certaine complexit. La norme X50-105 de lAfnor1 met dabord laccent sur le
projet considr comme un processus en le dfinissant comme une dmarche spcifique qui permet
de structurer mthodiquement et progressivement une ralit venir avant de sattacher au rsultat et aux
moyens mobiliss, en ajoutant quun projet est dfini et mis en uvre pour laborer une rponse au besoin
dun utilisateur, dun client ou dune clientle et il implique un objectif et des actions entreprendre avec des
ressources donnes.
Une certaine substituabilit existe entre ces trois catgories de contraintes: il est plus facile
de respecter des spcifications techniques, si le dlai imparti est grand que sil est court, ou de
tenir un dlai avec des ressources importantes quavec des ressources rduites. La cohrence
entre ces contraintes, dont le poids relatif varie dun projet lautre, est essentielle la russite
du projet, mais il faut souligner quil ny a aucune raison pour quil en soit ainsi la gense du
projet, la premire difficult tant de converger rapidement sur une dfinition cohrente du
problme pos2. Chaque type de contrainte fait lobjet dune instrumentation spcifique pour
sassurer que le projet respectera son cahier des charges, mais les possibilits de substituabilit
voques ci-dessus obligent une coordination rigoureuse des pilotages techniques, temporels
et conomiques.
- Les spcifications techniques, qui incluent celles de qualit, peuvent consister en une des-
cription dtaille dun produit ou dune prestation de service excuter, ce qui est le cas
lorsque le projet fait lobjet dun contrat entre un client et un fournisseur. Elles peuvent aussi
porter sur des spcifications fonctionnelles (besoins satisfaire) et techniques (fiabilit,
maintenabilit, facilit dusage), ce qui est souvent le cas pour des avant-projets dont
lobjet est de fournir une description dtaille dun produit ou dune prestation de service
ainsi que la dfinition dun budget et dun dlai, et que lon rencontre chaque fois que lon
vise satisfaire une clientle potentielle. Lorsque le projet porte sur llaboration dun pro-
duit nouveau, les hypothses relatives limportance du march potentiel font partie des
spcifications techniques car elles conditionnent fortement certains choix. Ce pilotage tech-
nique reste fondamentalement une affaire dingnieur.
- Tout projet doit tre achev avant une certaine date. Le dlai dont on dispose est une con-
trainte importante car, en gnral, les contrats dexcution de projet comportent des clauses
de pnalit de retard et, pour les projets de lancement de produits nouveaux, un retard peut
compromettre irrmdiablement lintrt oprationnel du projet ou sa viabilit conomique.
Le pilotage temporel du projet seffectue en faisant appel aux techniques dordonnancement

1. Cette norme (1992, [2]) a t cre linstigation de lAFITEP, association francophone de management de
projet, (http://www.afitep.fr). Cette norme doit tre remplace en 2002 par la norme X50-115, [4], qui retient,
dans sa version 9, la dfinition de lISO 10006 : 1997 qui dfinit le projet comme tant un ensemble dacti-
vits coordonnes et matrises comportant des dates de dbut et de fin, entrepris dans le but datteindre un
objectif conforme des exigences spcifiques .
2. Labsence de cohrence conduit les acteurs qui grent et excutent le projet sacrifier les objectifs qui, selon
eux, les pnaliseront le moins dans lvaluation qui sera faite de leur travail. Cela tant, une bonne gestion
dun projet conduit une mise sous tension des quipes pour obtenir des comportements moins routiniers
et donc plus innovateurs, ce qui permet datteindre des objectifs considrs initialement comme difficiles
tenir simultanment.
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Potentiel-Tches ou PERT1.
- La contrainte de ressources mobilises peut se traduire par un budget global mais cette va-
lorisation ne transcrit pas toujours correctement la marge de manuvre dont disposera le di-
recteur du projet qui aura composer avec les ressources qui lui auront t affectes, cest-
-dire des hommes de comptence et motivation parfois loignes de celles souhaites et des
quipements de caractristiques techniques parfois insuffisantes. Le pilotage conomique
seffectue en faisant appel des techniques de contrle de gestion spcifiques2.
La spcificit de ces caractristiques ne sapprhende bien quen les opposant celles de la
production rcurrente et stabilise de biens ou de prestations de service (stabilit des spcifica-
tions techniques, du temps disponible et des ressources mobilises), qui correspond ce que
lon appelle souvent une activit opration, par opposition lactivit projet. Declerck,
Debourse et Navarre (1983, [27]) ont propos un positionnement de la gestion de projet fonde
sur la mise en vidence de quelques diffrences essentielles entre lactivit projet et lactivit
opration, ce quillustre le tableau 1.

Tableau 1 : Comparaison des activits projets et oprations


Activit projet Activit opration
non rptitive (one shot) rptitive
dcisions irrversibles rversible
incertitude forte incertitude faible
influence forte des variables exognes influence forte des variables endognes
processus historiques processus stabiliss, grables en statistiques a-historiques
cashs flows ngatifs cash flow positifs

Quelques autres spcificits peuvent tre soulignes3. Le projet mobilise des experts de diff-
rents services de lentreprise, ou dautres entreprises, selon un primtre variable au cours du
temps. On observe une forte htrognit initiale de points de vue sappuyant sur des logiques
diffrentes et renforce par lincertitude pesant sur des spcifications dtailles. Lvaluation de
la validit et de limportance relative des argumentaires en prsence, et leur intgration, repose
sur un processus dapprentissage collectif et darbitrage trs spcifique qui doit tenir compte de
ce quau dbut du projet la connaissance que lon a est faible mais les degrs de libert sont
grands, contrairement ce qui se passe en fin de projet. Se posent enfin pour les projets, des
problmes spcifiques de capitalisation dexprience que lon ne retrouve pas dans les services
fonctionnels dont la prennit permet de mettre au point des solutions-types en rponse des
problmes-types.

1-2 Typologie des projets


Les caractristiques communes aux projets, introduites ci-dessus, ne doivent pas conduire
les considrer comme tant homognes. Pour comprendre la varit des problmatiques rencon-
tres4, et donc celle des instrumentations et organisations mobilisables, il est utile de faire appel
trois typologies fondes respectivement sur lobjet du projet, la place conomique du projet
dans lentreprise et le client du projet.

1. Pour une prsentation dtailles, voir Giard (1991, [39], et 2002, [40], chap. IV).
2. Une prsentation synthtique est fournie dans Giard (1991, [39]); pour approfondir, voir Joly, Le Bissonnais
& Muller (1993, [49]).
3. Pour plus de dtails, voir Giard et Midler (1996, [43]).
4. Pour mieux apprcier cette diversit et comprendre pourquoi la transposition sans prcaution de structures et
outils marchant bien pour une entreprise peut savrer dsastreuse pour une autre, le lecteur est invit se re-
porter louvrage dECOSIP (1993, [30]).
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1-2.1 Typologie des projets selon leur objet


Historiquement, le projet a t cr pour rsoudre des problmes de production unitaire. Il a
vu ensuite son champ dapplication stendre la conception de produits nouveaux dans les
industries de production de masse. Il est maintenant utilis dans toute sorte dentreprises pour
grer des oprations exceptionnelles, complexes, dune certaine envergure et mobilisant
plusieurs services.
1-2.1.1 Les projets de production unitaire
La gestion de projet est ancienne mais cest aux tats-Unis quelle va se formaliser en corps
de doctrine autonome loccasion des grands programmes militaires ou spatiaux et des grands
travaux de dveloppement des annes soixante, sous limpulsion des milieux professionnels
amricains, runis dans le Project Management Institute. Ce modle standard de lingnierie
des grands projets unitaires, comporte une dimension organisationnelle et instrumentale. Sur le
plan organisationnel, il dfinit un cadre de responsabilits fond sur le triptyque matre
douvrage, matre duvre et responsable de lots de travaux . Le matre douvrage est le
propritaire de louvrage futur. Il a la responsabilit de la dfinition des objectifs (dans les
termes de lingnierie, il dfinit le programme ou le cahier des charges). Le matre duvre
assume deux rles: un rle darchitecte, densemblier (responsabilit des choix de conception
globaux et de dcomposition en lots de travaux) et un rle de coordination de la ralisation de
louvrage (organisation des appels doffres sur les lots, choix des contractants, planification,
suivi et contrle de la ralisation des lots). Les responsables de lots assurent la ralisation des
tches lmentaires de lensemble ; le modle peut fonctionner, pour les grands projets, de
manire embote: chaque lot pouvant tre considr en cascade comme un sous-projet.
Sur le plan des mthodes, le modle standard de lingnierie runit une gamme doutils
visant la dcomposition du projet, sa planification et le contrle de cots. Ce modle va
saffirmer dans lingnierie des grands projets unitaires jusqu la fin des annes 1970, qui
marque le dbut dune crise grave pour le secteur marqu par une monte de la concurrence
internationale et une mise en cause de certains excs dans lusage de ce modle standard (en
particulier dans le niveau de dtail retenu pour le pilotage et le contrle des projets). On
commence alors chercher complter cette approche en adaptant la dmarche dingnierie
concourante (voir ci-aprs), qui sest dveloppe dans les entreprises industrielles, sur une
problmatique de dveloppement de nouveaux produits.
titre dexemple, cette production unitaire se retrouve dans les grands programmes mili-
taires, aronautiques ou spatiaux, dans le secteur de lingnierie civile avec aussi bien les grands
ouvrages dart (tunnel sous la manche, grands ponts) que les projets plus modestes
(programmes immobiliers, construction de maisons particulires) ou dans le secteur de ling-
nierie lectrique (construction de centrales).
1-2.1.2 Les projets de conception de produits nouveaux
Lmergence et le dveloppement de la notion de gestion de projet dans les industries de
grande srie soprent partir des annes soixante-dix, lorsque le nombre et la complexit des
projets imposent une meilleure coordination et intgration des diffrentes logiques. On voit
alors se crer des rles de chefs de projet, des revues formalises et, plus gnralement, ladop-
tion, au sein des entreprises de production de grandes sries, de certains outils du modle
standard. Mais ce modle va connatre, la fin des annes 1980, une nouvelle rupture, lorsquil
apparat clairement que la performance des entreprises occidentales en matire de conception
de nouveaux produits nest pas la hauteur des comptiteurs japonais, en particulier dans une
bataille conomique qui, de plus en plus, se joue sur la varit, la qualit et le renouvellement
rapide des catalogues (Clark & Wheelwright, 1992, [23]). De nouvelles dmarches de gestion
des projets mergent, qui donnent un poids plus important au chef de projet, maintenant
dnomm directeur de projet (Clark et Fujimoto, 1991, [22], Midler, 1993, [65]), et visent
assurer une coopration plus efficace des diffrents contributeurs au sein du processus de
conception (cf. infra). Par ailleurs, lattention se focalise de plus en plus sur le cycle de vie dun
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produit qui, en gestion de projet, se dfinit comme lintervalle de temps qui spare le dbut de
la conception dun produit, de larrt de sa fabrication, et par tous les vnements et dcisions
qui affectent ce produit durant cette priode. Cette mise en perspective permet de montrer que
des dcisions prises trs tt ont des consquences importantes sur des cots rcurrents qui sont,
de fait, engags par ces dcisions, mme si leur dcaissement est tal dans le temps. Il sensuit
une volont de matrise des cots engags lors des projets de conception des produits nouveaux
qui se traduit par la mise au point dune instrumentation complmentaire (conception cot
objectif) utilise dans le pilotage conomique de cette catgorie de projets (voir Giard, 2002,
[40], chap. II & III et Gautier & Giard, 2000, [38]).
Pour terminer, on insistera sur lavant - projet, qui est ddi une dfinition prliminaire
parce quil traite de manire un peu particulire le triptyque spcifications-dlai-cot, ce qui
a une incidence sur le pilotage de ce type de projets. On se trouve alors en prsence dune
absence de spcifications, mme grossires, de lobjet dun projet. Il sagit alors, en un temps
dtermin et avec un budget donn, de dfinir quelques scnarios dots dun minimum dattrac-
tivit fonctionnelle et de cohrence technique. Dans ce cas, le contrle intermdiaire est dun
intrt et efficacit limits et la gestion des ressources humaines assez particulire. On assiste
aujourdhui une attention croissante de ces phases dexploration amont dans le contexte dune
stratgie dinnovation intensive et rpte (Chapel, 1996, [19], Hatchuel & Weil, 1999, [45]). Il
sen suit une redfinition des modles de pilotage de ces explorations-amont (Lenfle, 2000, [58],
Lenfle & Midler, 2001, [59]), qui met laccent sur le management des connaissances produites
et des trajectoires dinnovation (Lemasson & Weil, 1999, [57]).
1-2.1.3 Gestion doprations exceptionnelles, complexes et dune certaine envergure
Lapproche projet est de plus en plus utilise dans les organisations pour grer des opra-
tions exceptionnelles, cest--dire non-rcurrentes, dune certaine complexit, en particulier
parce quelles mobilisent des acteurs de diffrents services de lentreprise et, ventuellement,
dautres entreprises, et dune certaine envergure. Bien entendu, on doit retrouver pour ces opra-
tions les contraintes de spcifications techniques, de ressources et de dlai qui caractrisent tout
projet. Lorganisation dune participation importante un salon professionnel ou un change-
ment de systme de gestion informatis illustrent ce type de possibilit. Pour France Tlcom,
entreprise typiquement oriente vers une production de type opration, le passage la num-
rotation 10 chiffres ou la couverture des transmissions de la coupe mondiale de football 1998
constituent deux autres exemples de gestion de projet.
1-2.2 Typologie des projets en fonction de leur importance conomique dans lentre-
prise
Cette typologie, propose par Midler dans ECOSIP (1993, [30]) et complte ultrieurement
par lui, repose sur le poids conomique du projet dans lentreprise. Quatre catgories sont rete-
nues et illustre par la figure 1.
Figure 1 : Typologie des projets en fonction de leur importance conomique dans lentreprise

Type A Type B Type C Type D

Entreprise Projet
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- Le type A correspond une configuration o une entreprise dominante, pouvant mobiliser


dautres entreprises, est implique dans quelques trs gros projets vitaux pour sa survie,
qui feront lobjet dune dcomposition en sous-projets. Cest typiquement le cas de lindus-
trie automobile. Les rgulations en place dans lentreprise vont alors structurer de manire
forte lorganisation du projet. Le problme cl est la question de lautonomie et de la spci-
ficit de lorganisation du projet par rapport ces rgulations.
- Avec le type B, cest le projet qui est au centre de la rgulation: cest lidentit la plus forte,
dote dune personnalit juridique et financire. Les entreprises impliques rendent compte
la direction gnrale du projet alors que, dans la configuration prcdente, cest plutt le
projet qui rend compte la direction gnrale de lentreprise dominante. Les entreprises et
les acteurs que le projet coordonne nont pas lhabitude de travailler ensemble. Le projet est
loccasion, parfois unique, de cette coopration. Cest dans ce deuxime type que le modle
standard de lingnierie est le plus prgnant: aucune organisation ni culture dentreprise ne
simposant aux autres, toutes doivent adopter les spcifications managriales du projet
pour pouvoir se coordonner correctement. Les relations contractuelles sont beaucoup plus
dveloppes, pour rguler linteraction dagents conomiques appartenant des entreprises
aux intrts souvent divergents.
- Dans le type C, qui peut tre illustr par le cas de la pharmacie ou celui de la chimie fine, on
a affaire une entreprise qui gre un nombre lev de petits projets, relativement ind-
pendants les uns des autres, et dont aucun ne met en cause, lui seul, sa prennit. Dans ce
cas, les projets sinscrivent dans les procdures en usage dans lentreprise, lautonomie du
projet est plus rduite que dans le premier type. Il ny a pas forcment dorganisation spci-
fique, la fonction de chef de projet pouvant se cumuler avec une autre. Lun des problmes
importants est ici de grer le portefeuille des projets, den arrter certains pour en acclrer
dautres ou en introduire de nouveaux. Dans certains cas (fabriquant de machines
spcialises, par exemple), les projets rsultent de commandes passes par un nombre res-
treint de clients ce qui peut conduire, en cas dchec dun projet, la perte du client, avec
des consquences similaires celles voqus pour le type A.
- Le type D correspond au cas particulier de la start-up cest--dire un cas de figure dans
lequel lentreprise se confond avec le projet lorigine de sa cration et ce tant que la p-
rennit de lentreprise, lie la conqute dun march, ne semble pas assure. Encore plus
que dans le projet de type A, la mort du projet est synonyme de mort de lentreprise: celle-
ci est condamne russir, avec des ressources limites et en un temps compt, simposer,
par des produits ou des prestations de spcifications prsentant quelques originalits, sur un
march. Il est vident que le moment o la start-up change de statut pour devenir une entre-
prise banale est difficile dfinir et que les instrumentations mobiliser proviennent de
la gestion de projet et de la gestion classique.
1-2.3 Typologie des projets en fonction de leurs clients
Le pilotage dun projet est ncessairement influenc par la manire dont sont ngocies ses
contraintes et les possibilits dune rengociation ultrieure, ce qui nest pas sans incidence sur
les profils de poste, lorganisation et la gestion des projets. De ce point de vue, les projets cots
contrls se distinguent des projets rentabilit contrle.
Un projet cots contrls se caractrise par lexistence dun client parfaitement connu avec
lequel les spcifications techniques, le budget et le dlai sont ngocis. Lorsque lensemble est
verrouill contractuellement, la marge bnficiaire du matre duvre dpendra avant tout de sa
bonne matrise des cots (et donc du temps) et les raisons de remise en cause par lun des parte-
naires des conditions du contrat se limitent en gnral des difficults techniques qui ont t
mal apprcies initialement et qui peuvent obliger une rvision de certaines spcifications.
Deux types de contrats sont classiquement utiliss. Le march prix forfaitaire correspond
une obligation de rsultats un prix non rvisable. Le march en rgie correspondant une obli-
gation de moyens: les dcaissements sont facturs au client au fur et mesure de lavancement
du travail et le bnfice du prestataire est dtermin indpendamment du cot final; un contrle
est exerc par le client sur la ralit de la dpense et la ralisation des objectifs ngocis de
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productivit; dans ce type de contrats, le client a la possibilit de faire voluer plus facilement
les spcifications. Ds lors, mais pour des raisons diffrentes, les gestionnaires de ces projets
sattachent tout particulirement au suivi des cots. Reste le problme de la dfinition du rf-
rentiel de base.
Gnralement, le projet cots contrls se dfinit dans le cadre dun appel doffre, o les
contraintes de spcifications techniques et souvent de dlai sont assez fixes, une certaine marge
de manuvre tant gnralement laisse au niveau des processus utilisables. Pour avoir intrt
rpondre cet appel doffre, il faut que les estimations de cots1 conduisent un budget inf-
rieur loffre de prix, qui est jug comme tant acceptable par le client, compte tenu de la
concurrence dans cette opration. Cette phase repose sur le savoir-faire des estimateurs, sur une
apprciation des risques du contrat2, sur une bonne connaissance de la concurrence et du client
et, enfin, sur la capacit de lentreprise se diffrencier positivement de ses concurrents,
lorsquelle nest pas trs bien place sur le plan du prix.
Un projet rentabilit contrle, que lon rencontre principalement pour le dveloppement
de produits nouveaux devant tre vendus sur un march concurrentiel (comme par exemple, le
dveloppement dune automobile), se caractrise par lexistence de clients potentiels. Dans ce
cas de figure, la dfinition des spcifications techniques, du cot et des dlais suppose quil
existe dans lentreprise des acteurs jouant le rle de porte-parole de ces clients inconnus. Ce
travail de reprsentation du client est difficile parce que limportance du march potentiel varie
en fonction des spcifications techniques retenues, du prix de vente final et de la date de lance-
ment sur le march dun produit qui sintgrera dans une offre o dautres industriels intervien-
nent. Les arbitrages entre spcifications, cots et dlais sont alors plus dlicats, parce quils se
fondent sur des opinions pas toujours faciles tayer et parce quau fur et mesure de lavan-
cement du projet, le contexte concurrentiel peut se transformer au point de remettre en cause les
arbitrages initiaux. Dans cette catgorie de projets, on distingue le pilotage en drive lorsque
lon sait, ds le dpart, que le projet a de trs bonnes chances daboutir (par exemple, mise au
point du vhicule de remplacement dune gamme dans lindustrie automobile), la question tant
de savoir o et quand, du pilotage en stop or go que lon rencontre lorsque le projet peut tre
abandonn en cours dexcution (par exemple, mise au point dune molcule nouvelle dans
lindustrie pharmaceutique).
Cette distinction, qui implique des approches diffrentes des problmes de gestion et lappel
des comptences particulires, nest pas toujours aussi tranche. Tout dabord, des accords
contractuels cherchant intgrer les logiques cots contrls et rentabilit contrle
commencent se diffuser; par exemple, on observe des pratiques de ngociation dun budget
initial plus large, en contrepartie dun partage des gains de productivit entre les deux parties
ainsi que des pratiques faisant appel aux comptences dune matrise duvre dans la dfinition
du cahier des charges de la matrise douvrage. Ensuite, de trs nombreux avant - projets
sinscrivent dans une approche rentabilit contrle, avant de passer, une fois lensemble
des contraintes dfinies, une approche cots contrls.
On peut noter enfin que les deux typologies retenues ne sont pas indpendantes. Dune
manire gnrale, les projets de type B sont cots contrls et ceux de type A sont rentabilit
contrle. Les projets de start-up (type D) relvent plutt de la rentabilit contrle et, pour ceux
de type C, on peut trouver tous les cas de figure.

2 Les structures de projet et leur gestion


On commencera par dcrire les quipes-projets et les acteurs quelles mobilisent ( 2-1),
avant de sintresser la gestion de ces acteurs ( 2-2), la gestion du projet tant renvoye au
3.
1. Voir louvrage de la Commission Estimation de lAFITEP (1995, [5]).
2. Pour une analyse dtaille de la gestion des risques dans les projets (en particulier ceux lis lorganisation
et aux acteurs), voir Courtot (1998, [25]).
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2-1 quipes-projets et acteurs-projets


Les configurations possibles des quipes de projet sont nombreuses ( 2-1.1) et mobilisent
des acteurs-projets caractriss par des comptences spcifiques ( 2-1.2, page 13).
2-1.1 Les diffrentes configurations possibles des projets
Lintroduction du projet dans les organisations modifie les mcanismes de commandement
et de coordination. Lorganisation matricielle est classiquement associe lintroduction des
projets, mais confondre la structure matricielle et lorganisation projet est une gnralisation
htive et non contingente puisque la structure matricielle est seulement dfinie par la coexis-
tence de deux critres de dcoupage des tches, classiquement des mtiers et des zones
gographiques (Galbraith, 1971) sans quapparaissent forcment les projets. Si tel est le cas,
cette qualification est imprcise sur la distribution des rles entre acteurs (et donc le rle des
mtiers dans les projets) ainsi quentre projets et services fonctionnels. Cette explicitation est
propose par Clark, Hayes et Wheelwright (1992, [22]) par le biais dune typologie de quatre
configurations diffrentes de la place du projet par rapport aux services fonctionnels et passant
par une explicitation des rles des acteurs1, ce quillustre la figure 2. La terminologie utilise ici
pour reprer ces diffrents rles est gnrique; on trouve en pratique une assez grande varit
dappellations entre les entreprises pour reprer un mme rle, ce qui implique quune mme
appellation peut correspondre deux rles diffrents dans deux entreprises diffrentes et ne
facilite pas la communication sur ce thme. Par exemple, le terme de chef de projet renvoie
en pratique une grande varit de situations.
Avant de prsenter ces configurations, il importe de souligner quil ny a pas de modle
prfrable aux autres dans tous les cas et quil est normal de faire coexister plusieurs de ces
structures. Le choix de la configuration dun nouveau projet doit rsulter dune comparaison
entre les cots de fonctionnement induits et les avantages retirs, ce qui implique la prise en
compte de la contingence de la forme organisationnelle la nature du projet et du contexte, en
particulier de sa taille, des risques encourus et de son degr de singularit par rapport lexp-
rience de lentreprise. Il faut ajouter quil peut tre judicieux, pour les projets dune certaine
ampleur, de ne pas conserver la mme structure au cours des principales phases du projet.
- Dans le projet en structure fonctionnelle, aucun individu na la responsabilit du processus
global; ce sont les responsables hirarchiques mtiers qui assurent lallocation et la coordi-
nation des diffrentes ressources mobilises dans le projet, notamment celle des acteurs
mtiers travaillant pour le projet.
- Le coordinateur de projet (lightweight project manager) est un acteur responsable de la
coordination des activits qui na pas daccs direct aux acteurs-mtiers intervenant sur le
projet. Il consolide les informations fournies par les hirarchies mtiers ou, parfois, par les
correspondants chargs dassurer la coordination des acteurs impliqus sur un mme projet
au sein de chaque mtier (notion de chef de projet - mtier). Son rle est danimer des
instances de coordination collective, la dcision restant clairement de la responsabilit des
hirarchies mtiers. LAfnor propose de rserver la dnomination de gestion de projet cette
fonction dappui, de soutien mthodologique concernant le suivi du respect des spcifica-
tions techniques, des cots et des dlais.
- Le directeur de projet (heavyweight project manager) a un statut comparable celui des
directeurs de mtier: la dlgation quil a de la direction gnrale est large, il dispose dune
quipe de chefs de projet - mtier et jouit dune grande autonomie danimation et dorgani-
sation. Cest pour ce type de mission que lAfnor rserve le terme de direction ou de mana-
gement de projet.
- Dans le projet sorti (tiger team organization), les acteurs qui travaillent sur le projet sont
physiquement et institutionnellement sortis des structures mtiers pour tre rassembls sous
lautorit du directeur de projet pendant la dure de leur intervention. Ils reviennent ensuite,
soit dans leur mtier dorigine, soit sur un autre projet.

1. Le PMBoK (1996, [76]) propose une autre typologie, moins clairante que celle retenue ici.
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Figure 2 : Organisations-type de projets (Clark, Hayes et Wheelwright (1992, [22])

LA COORDINATION DE PROJET

STRUCTURE FONCTIONNELLE Direction mtier


acteurs-mtiers
Direction mtier sur le projet
Chefs de
acteurs-mtiers projet-mtier
sur le projet
Coordinateur Liaison non
de projet hirarchique

LE PROJET SORTI
LA DIRECTION DE PROJET Direction mtier
Direction mtier
acteurs-mtiers acteurs-mtiers
sur le projet sur le projet
Chefs de Chefs de
projet-mtier projet-mtier

Directeur Capacit dintervention Directeur Capacit dintervention


de projet du directeur de projet de projet du directeur de projet
Intervenants nappartenant pas lentreprise Intervenants nappartenant pas lentreprise
(partenaires industriels, marchs) (partenaires industriels, marchs)

Dun point de vue historique, on constate qu la fin des annes quatre-vingt, dans les projets
rentabilit contrle des industries de production de masse, on est pass dune structure fonc-
tionnelle une coordination de projet une direction de projet forte. Dans dautres cas, lvolu-
tion est faible dun point de vue organisationnel mais pas dun point de vue instrumental. Ainsi
dans les grands projets dingnierie, le plus souvent de type B, le modle du projet sorti prdo-
mine tandis que celui de la direction de projets savre pertinent pour des projets de moindre
importance. On peut noter enfin que le projet de type D ne fait appel aucun de ces archtypes:
lentreprise et le projet ne font quun et le directeur du projet est normalement le directeur de la
start-up.
Ces reprages sur les organisations types de projets permettent de dfinir et de situer
lquipe-projet. Quest ce quune quipe-projet? Peut-on en reprer les limites dans lespace
de lorganisation? Quels sont les critres dappartenance une quipe-projet? Qui sont les
membres qui la composent ? etc. Les critres de dfinition peuvent tre gographiques (par
exemple, tre prsent sur le plateau du projet), contractuels (tre mandat pour intervenir dans
un projet) lis lactivit (ceux qui sont sur le projet et ceux qui nen sont pas). En outre la
composition de lquipe peut fluctuer au fur et mesure des tapes du projet. Il faut souligner
que, dans de nombreux cas, une quipe-projet ne fait pas le projet mais le fait faire. Sur un petit
projet, dans une start-up, cest la somme des individus appartenant lquipe-projet qui fait le
projet. Sur un projet de dveloppement dun nouveau vhicule automobile, lquipe-projet a
essentiellement une fonction de dcision, dinterface et de mobilisation des acteurs-mtiers.
Dans ces conditions, il sagit de mettre en vidence la diversit des acteurs travaillant sur un
projet et la varit de leurs rles.
- Les acteurs-mtiers sont rattachs des services fonctionnels et mobiliss temporairement
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(sauf pour les projets sortis) sur un projet. La russite de leur mission se juge laune du
primtre de leur intervention, celui dune fraction du projet.
- Les acteurs-projets (chefs de projet-mtier, dune part, et coordinateurs ou directeurs de
projet, de lautre) sont rattachs durablement au projet. Les acteurs-projets incarnent liden-
tit du projet l o les intervenants mtiers nont quune contribution particulire et ponc-
tuelle, celle pour laquelle ils sont mobiliss. Les acteurs - projets quant eux sont
responsables de la performance globale, rsultat du compromis de toutes les interventions
des mtiers.
Finalement, cest forcment un regroupement htroclite que ncessite la russite de lacti-
vit projet. En pratique, on est loin de limage de lquipe fusionnelle et indiffrencie, parfois
associe aux quipes - projets dans la littrature sur le team building ou le coaching .
Lquipe-projet, dans le cas dorganisation de type coordination ou direction de projet, peut se
dfinir, de manire restrictive et stable, comme lensemble des acteurs-projets ou, de manire
extensive et variable au cours du temps, comme la runion de tous les contributeurs impliqus
sur le projet un instant donn, quils soient acteurs-projets ou acteurs-mtiers, tant entendu
que lexistence ventuelle de relations de co-traitance peut conduire tendre encore le pri-
mtre du projet1. Par ailleurs, les acteurs-mtiers impliqus et / ou les reprsentants des parte-
naires ntant pas ncessairement les mmes selon la temporalit du projet, des coupes
longitudinales des moments diffrents du projet peuvent conduire des profils dquipe diff-
rents. Dans le cas de projets sortis, le primtre de lquipe-projet comporte, a minima, les
acteurs-projets et les acteurs-mtiers dtachs durablement sur le projet et peut comporter un
ensemble plus ou moins consquent dacteurs appartenant des entreprises contractantes. Du
point de vue de la DRH, lquipe-projet sera plutt vue dans son acception restrictive dans la
mesure o les acteurs-mtiers travaillant sur le projet relvent dune gestion conventionnelle.
Ces diffrentes conceptions sont illustres au tableau 2.

Tableau 2 : dfinitions dune quipe-projet


Organisation de type
Coordination ou Direction de projet Projet sorti
A minima les acteurs-projets et les
Dfinition restrictive et stable
Ensemble des acteurs-projets. acteurs-mtiers dtachs durablement
dans le temps
sur le projet.
Dfinition extensive et Runion de tous les contributeurs impliqus sur le projet, quils soient acteurs-
variable au cours du temps projets ou acteurs-mtiers ou acteurs dentreprises partenaires.

Les typologies prsentes au 1-2.3 expliquent certaines diffrences observes entre les
acteurs-projets de projets diffrents quant au cadre temporel de leurs missions, leurs responsa-
bilits conomiques et leurs relations avec les acteurs-mtiers.
- Si les limites temporelles dune responsabilit de projet sont relativement claires dans les
projets cots contrls, puisquun contrat constitue lacte de naissance officiel du projet et
en prvoit explicitement la fin, il nen est pas de mme dans les projets rentabilit contr-
le. Le cadre temporel est alors gnralement dlimit par un jalon-amont terminant une
phase dite davant-projet et par une rception situe peu aprs le dbut dexploitation de
louvrage. Mais le contenu prcis de ces jalons est loin dtre homogne. Le jalon initial est
parfois un point de non-retour sur la ralisation effective du projet (pilotage en drive) mais
cest parfois aussi une simple autorisation de passer ltape suivante, sans assurance que

1. Par exemple, sur le plateau dun projet automobile dun constructeur franais, un salari dun sous-traitant de
second rang dun fournisseur espagnol peut travailler avec un salari temps partiel du client, les deux tant
sous la coordination dun acteur-projet, ingnieur rsident dun fournisseur de premier rang allemand. Cette
logique de rseau, lourde de consquences (Giard, 2000, [42]), peut poser de multiples problmes de gestion
du personnel si les relations contractuelles liant les entreprises et celles liant les salaris et leurs employeurs
sont insuffisamment imprcises et, mme dans ce cas, des problmes dinterprtation peuvent survenir sur le
lien de dpendance hirarchique entre le salari et les entreprises dont il dpend.
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le projet aboutira (pilotage en stop or go). Les avant-projets, que lon retrouve aussi bien
pour laborer la rponse un appel doffre dans les entreprises dingnierie que dans les
phases dexploration prliminaire dans la cration de produits manufacturs, posent des pro-
blmes spcifiques dans la mesure o la date de dbut de lavant-projet est souvent trs dif-
ficile dterminer, contrairement celle du jalon final (Midler, 1993, [65], et Garel, 1999,
[36]).
- La diffrence entre projets cots contrls et rentabilit contrle explique des diffren-
ces de responsabilit conomique des acteurs-projets.
En rgle gnrale, dans le premier cas, les spcifications techniques sont contractuelle-
ment dfinies par le matre douvrage du projet qui assume les risques susceptibles de
survenir au moment de lexploitation. Lquipe - projet, qui se voit confier la matrise
duvre, peut difficilement rengocier ces spcifications et la rentabilit de cette affaire
implique une bonne matrise des dlais et des cots, facilite par une mobilisation
dinstrumentations relativement connues et prouves.
Dans le cas des projets rentabilit contrle, la mme entreprise assume le risque de
dveloppement et dexploitation et limpact conomique du projet nest mesurable quune
fois achev le cycle de vie du produit (Gautier et Giard, 2000, [38]). Lquipe - projet
nintervient quen phase de conception et peut intervenir simultanment sur les dlais, les
ressources et les spcifications qui dtermineront la clientle potentielle et la rentabilit
du projet. Pour dfinir les contours de cette clientle potentielle, il lui faut mobiliser les
diffrents experts de lentreprise qui produisent des thories sur ce client virtuel : le
marketing amont, mais aussi les fonctions design, commerciale ou la qualit. Ces thories
ne sont en gnral pas totalement concordantes, dabord du fait du regard que ces diff-
rents experts posent sur les clients. Le commerant sintresse au client dans son acte
dachat. Il en a une vision concrte et instantane. Le marketing est plus focalis sur
lusage qui sera fait du produit. Il anticipe les volutions de loffre et de la demande
partir danalyses rationnelles du march et des clients actuels. La dmarche du designer
est diffrente. Elle ne part pas proprement parler du client mais de lobjet, et intgre plus
ou moins explicitement une vision du client de demain, souvent en rupture avec ce qui est
perceptible aujourdhui. Limage du client virtuel est aussi ambigu car cette notion est
plus complexe que certains slogans ne le laissent supposer. Quel est, par exemple, le client
dun nouveau mdicament: le patient qui il est administr, le mdecin qui le prescritou
la scurit sociale qui le paye? Quel est le client dun constructeur dobjets de grande
srie: lutilisateur final ou le rseau de distribution?
Lidentit et la varit des acteurs-projets tant dsormais repres, quelles sont les comp-
tences requises pour exercer de telles fonctions?
2-1.2 Les comptences des acteurs-projets
Le succs dun projet repose sur les comptences techniques et comportementales des
acteurs-projets qui laniment. Lidentification de ces comptences ncessairement prsentes
dans une quipe-projet est donc un pralable la GRH de ce personnel.
Le droulement dun projet rentabilit contrl dune certaine ampleur apparat comme un
concentr de tout ce quune entreprise vit sur quelques dcennies: il faut recruter des collabo-
rateurs, former et structurer une quipe, grer sa croissance puis sa dcroissance, mobiliser et
stabiliser des rseaux extrieurs, grer des priodes de crises, passer dune phase o le marke-
ting et la recherche dominent une phase o lindustriel dtient la cl de la russite, ngocier
avec ceux qui seront les producteurs de demain Ds lors, tous les savoirs gestionnaires
doivent logiquement tre bien employs chez un manager de projet. Dans ce contexte, lacteur-
projet mobilise quatre types de comptences (Bouds, Charue-Duboc et Midler, 1997, [17]).
a) Matrise de la dimension instrumentale du pilotage de projet. Les organismes profession-
nels de normalisation et certification (PMI, AFITEP, IPMA) associent la gestion de projet
(project control) la capacit mobiliser efficacement les instrumentations danalyse dun projet
et de matrise de ses dlais et de ses cots (voques au 1-1) alors que le management de projet
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(project management) se situe un niveau plus stratgique. Cette comptence instrumentale est
ncessaire, mme si les outils disponibles pour le pilotage conomique des projets rentabilit
contrle restent partiels, contingents et largement amliorables (contrairement ceux des
projets cots contrls). Ce type de comptences instrumentales est habituellement exig
dacteurs-projets qui ne sont, ni chefs de projet mtier ni directeur ou coordinateur de projet.
b) Matrise des champs techniques impliqus dans le projet. Une matrise minimale des prin-
cipales techniques mises en uvre dans la ralisation du projet est galement ncessaire. Un
acteur-projet purement gestionnaire ne saurait exister bien longtemps sil ne peut dbattre sur
le fond avec les intervenants mtiers quil coordonne. Le chef de projet nest videmment pas
un expert de tous les problmes techniques dbattus, mais il construit une partie de sa lgitimit
sur sa capacit trancher et faire trancher les questions techniques. Les projets modernes se
dveloppant dans des rseaux dorganisations complexes, la capacit sociale coordonner et
influencer des acteurs de profils professionnels et de rattachements institutionnels varis, dans
un contexte dincertitude et dirrversibilit fortes constitue un point capital pour le succs des
projets. Un chef de projet doit parvenir mobiliser des acteurs par rapport auxquels il na pas
forcment de pouvoir formel. Animer des quipes, organiser des rseaux, affronter les invita-
bles conflits dintrts, requiert des comptences particulires, diffrentes de celles lies la
matrise des outils de contrle de projet. Nous nous rallions P. Leclair (1993, [56]) lorsquil
crit: Les gestionnaires de projets peuvent-ils tre strictement des gestionnaires professionnels capables de grer
nimporte quel projet, quil soit de systme dinformation, dingnierie ou de construction? Nous plaiderons que
non, les situations dentreprises configuration organisationnelle et particularits de lentreprise considre
semblant trop prgnantes pour permettre la conception de chefs de projet tous-terrains.
c) Comprhension des spcificits du projet et adhsion ses objectifs. Les thories sur le
management de projet mettent laccent sur limportance du traitement des singularits des
projets: le chef de projet, et plus gnralement lquipe, a pour rle dexpliquer aux multiples
intervenants le contexte spcifique de cette intervention, le sens quil faut lui donner, les prio-
rits quil convient de privilgier La comptence sur le projet se construit ainsi dans son
droulement mme, mesure que les diffrents aspects sont explors, que les compromis sont
analyss et que la mmoire collective sur laventure singulire se constitue. On est ici bien au-
del dune dmarche dapplication dinstrumentations standards puisque la comptence
sexprime dans la capacit slectionner et adapter les dmarches en fonction de la cible et du
contexte spcifiques du projet. Au del mme dune comprhension fine du projet, il est clair
que ladhsion sa vise constitue, pour les membres dune quipe-projet, une condition nces-
saire pour avoir leffet dentranement auprs des protagonistes plus lointains.
d) Comptence sociale de lentrepreneur. Dans sa dfinition mme, les missions projet ne se
dfinissent pas par lapplication de mthodes mais dabord par une responsabilit de rsultat.
Cette dimension entrepreneuriale de la comptence projet dsigne une capacit formuler
les problmes, mobiliser les hommes et les mthodes en fonction dune comprhension et
dune adhsion aux objectifs et au contexte singulier du projet. Les ouvrages sur le management
de projet insistent tous sur limportance des comptences de communication et de leadership
pour tenir un rle qui ne peut gure se reposer sur une autorit formelle a priori (Briner, Geddes
& Asting, 1993, [18]). Le carnet dadresses que le chef de projet a constitu au cours de sa
carrire, ses dons spcifiques pour vendre son projet et ngocier avec des acteurs cls leurs
contributions constituent des ressources indispensables.
Les projets cots contrls prsentent de nombreuses similitudes avec ce qui vient dtre
prsent. Les comptences instrumentales sont toutefois particulirement importantes pour la
russite dun pilotage du projet rentabilit contrle, comme lillustre le tableau 3.
Ltendue et la diversit de ces comptences rendent trs improbable leur runion chez un
seul individu. Il faut donc viter la recherche du chef de projet providentiel omni-comptent et
passer la comptence collective de lquipe-projet. La constitution des quipes projets exige
un dosage subtil de profils complmentaires, ce qui conduit sintresser la gestion des
ressources humaines dun projet.
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Tableau 3 : Comptences du chef de projet et types de projets


Projets
Projets cots
Les comptences de lacteur-projet rentabilit
contrls
contrle
Matrise de la dimension instrumentale du pilotage de projet +++ ++
Matrise des champs techniques impliqus dans le projet ++ +++
Comprhension des spcificits du projet et ladhsion ses objectifs. ++ +++
Comptence sociale de lentrepreneur +++ +++
. +++ comptence indispensable; ++ comptence ncessaire

2-2 Gestion des ressources humaines dun projet


On examinera successivement le processus de constitution de lquipe ( 2-2.1), son anima-
tion ( 2-2.2), son valuation / rmunration ( 2-2.3) et sa dissolution ( 2-2.4), avant de faire
quelques remarques sur la formation de ces acteurs ( 2-2.5).
2-2.1 Recrutement des chefs de projets et constitution des quipes projets
Le recrutement doit porter sur des individus dots de quelques-unes des comptences listes
ci-dessus et motivs, ce qui implique de dtecter les raisons qui peuvent pousser quelquun de
talent travailler dans un projet. Ces raisons sont multiples et non exclusives : attrait de la
nouveaut, esprit daventure, envie dappartenance une petite communaut emblmatique,
envie de prise de risques, attrait dune exprience professionnelle large spectre, enrichisse-
ment personnel li la multiplicit des contacts de cultures diffrentes, visibilit accrue dans
lentreprise, prise plus directe avec les enjeux stratgiques de lentreprise, recherche de respon-
sabilits plus que dautorit, attrait pcuniaire et dvolution de carrire.
Le choix du directeur (ou le coordinateur) de projet conditionne fortement le succs du
projet. Cest un personnage trs expos. Sil est responsable dun chec du projet, cest lquipe
qui en assume la russite. Son profil affectif est plutt marginal: capacit didentification au destin du projet,
quilibre indpendance / dpendance vis--vis des autres, efficacit dans les situations ambigus. De son exp-
rience personnelle dpend beaucoup son efficacit: il doit connatre lentreprise, ses mtiers, ses hommes, disposer
si possible de modles culturels multiples, souvent acquis en dehors de lentreprise actuelle [], voire dans
dautres lieux de la socit (Leclair, 1997, [1]). Le chef de projet RH du projet Twingo (Midler,
1993, [65]) prcise que le profil du bon chef de projet est plus facile dcrire qu trouver: il doit tre la
fois lgitime dans son mtier dorigine et iconoclaste. Lgitime pour ne pas se faire rouler dans la farine dans
les dbats techniques, parce quil faut bien connatre le milieu des experts, pour savoir ceux qui peuvent aider
rsoudre un problme, et ceux, il y en a hlas toujours, quil faut surtout viter pour ne pas perdre son temps. Parce
quenfin, il doit pouvoir tre en situation dengager, par ses choix, sa direction mtier dorigine. Mais il doit tre
aussi iconoclaste, car il doit pouvoir, en cas de conflit entre la stratgie mtier et les impratifs du projet, jouer
contre le camp de ses pairs techniques. LAFITEP dcrit le profil idal-typique du directeur de projet
comme la fois planificateur, ngociateur, technicien expert, psychologue, vendeur, financier,
insr dans des rseaux pour trouver les compromis indispensables la convergence du
projet etc. Dautres critres peuvent sajouter cette liste et chaque critre peut se dcliner: la
capacit rsister au stress, charisme, disponibilit, etc. Il faut galement que le profil du direc-
teur de projet se modifie au fur et mesure du droulement du projet: de stratge cratif, il
devient gestionnaire raliste puis pompier (ECOSIP, 1993, [30]). Les attributions du directeur
de projet et son primtre de responsabilit sont classiquement dfinis par une lettre de mission.
Selon le degr de maturit du management de projet dans lentreprise, cette lettre de mission
peut tre dfinie par des procdures bien tablies ou par le directeur de projet pressenti lissue
dune ngociation avec la direction gnrale ou la direction des ressources humaines. Dans ces
derniers cas, il se peut que la cohrence entre objectifs et moyens ne soit pas bien assure, ce
qui est une source de risque pour le projet.
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Dans ces conditions, ce qui va compter le plus pour leur recrutement chappe largement la
vigilance de la fonction Personnel (Leclair, 1997, [1]).La dtection et le recrutement des acteurs-
projet poussent parfois la fonction Personnel la frontire de problmes dontologiques. Les
grandes entreprises peuvent entretenir un vivier ou march interne de cadres haut potentiel,
voire des filires de carrire spcifiques pour leurs acteurs-projets. Un parcours multi-mtiers
les met lpreuve. La question de la dtection des acteurs-projets nest pas pour autant rgle
pour les entreprises de taille plus rduite. La DRH doit intervenir dans le recrutement dacteurs-
projet avec une instrumentation assez peu adapte la dtection des comptences listes ci-
dessus, dautant quil sagit de parvenir un dosage dlicat entre la comptence collective et
lexpertise individuelle. Choisir les meilleurs experts ne veut rien dire en soi. Une telle slection
est centre sur lindividu et non sur contexte dans lequel il va sinsrer. On sait bien quil ne
suffit pas de runir un groupe de stars pour gagner un championnat. Il convient mme de ne pas
slectionner certaines vedettes pour mieux optimiser les finalits collectives. Le processus de
recrutement remplit alors une fonction cohsive capitale. Par exemple, la dcision de recrute-
ment des quipes projets peut appartenir la fois au responsable du groupe, aux autres membres
de lquipe, la DRH et aux anciens salaris qui peuvent dire quelle est la compatibilit entre
les personnes convoites et la culture de lentreprise. En tout tat de cause, la DRH intervient le
plus souvent pour adapter les relations contractuelles des acteurs - projet, si le projet a une
certaine dure.
2-2.2 Animation de lquipe-projet
On ne peut comprendre les spcificits de lanimation de lquipe-projet si lon ne prend pas
en considration le fait que les connaissances initiales dont on dispose sur un nouveau projet
sont insuffisantes pour pouvoir appliquer les approches classiques dorganisation et de contrle
et que lobjectif implicite est de matriser le processus dacquisition de connaissances. On ne
sattachera pas ici prciser les modalits de lanimation de lquipe proprement dite sur
laquelle il existe de nombreuses publications1 mais dfinir trois impratifs qui doivent tre
respects pour une telle animation (Midler, 1993,[65]).
- Il sagit dabord, malgr la diversit des profils des membres de lquipe, des tempraments
et des comptences de chacun, de constituer un groupe cohrent porteur dune mme vision
du projet, capable de rsister aux puissantes forces centrifuges que subit un projet dans les
moments difficiles. La construction dune vision partage implique souvent des procdures
concentriques centres sur le directeur de projet qui permettent de faire circuler trs rapi-
dement des informations dans lquipe ou, dun autre ct, dlaborer collectivement une
politique de rponse face un problme important.
Cette construction dune vision partage, qui peut sappuyer sur lusage de mta-rgles (cf.
3-2, page 25), repose fondamentalement sur des relations de confiance mutuelle des
acteurs-projets, de transparence et de droit lerreur, les procdures de contrle tant rduite
au sein de lquipe-projet. Les conflits ne sont pas pour autant exclus; ils portent principa-
lement sur les alternatives dcisionnelles des problmes que les procdures sont charges
de rvler au plus tt.
- Le deuxime impratif est larticulation sur le milieu plus vaste des intervenants sur le pro-
jet. On a ici faire des procdures de type rayonnantes, centres sur un mtier donn et
qui mettent en relation le ple projet (par le Directeur de projet parfois, mais surtout le
chef de projet-mtier) et le ple mtier (par la hirarchie du mtier, lentreprise responsable
du lot de travaux).
Dans ce cadre, le chef de projet-mtier a un double rle: il doit tre en mesure didentifier le
besoin dune expertise pointue quil ne possderait pas et tre capable de la mobiliser; il joue
aussi un rle de veille et fait remonter dans son service-mtier, les volutions de besoins quil
dtecte par le biais du projet.
- Le troisime impratif est de grer la dynamique de lquipe-projet elle-mme. Une quipe-
projet vit, en quelques mois ou annes, ce que vit une entreprise gnralement en plusieurs
dcennies: naissance, structuration, croissance, dispersion. Les quipes-projets consacrent
1. Voir, par exemple, Le Bissonnais ([55], 1996), Picq [74] et Maders ([62], 2000).
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rgulirement des sminaires dconnects des contraintes du temps rel pour penser leur de-
venir face aux tapes venir ; en fin de projet lincertitude sur les reclassements peut per-
turber gravement le fonctionnement du projet.
2-2.3 valuation et la rmunration des acteurs-projets
Lune des difficults rsoudre pour la fonction RH est de mettre en cohrence le systme
de rmunration et dvaluation de lentreprise avec celui des projets. Des travaux sur lorgani-
sation qualifiante ont montr que la question des rmunrations est rarement voque comme
lment essentiel par ceux qui sintressent au dveloppement de nouvelles organisations du
travail (Amadieu et Cadin, 1996, [9]). La principale diffrence entre les types de projets tiendra
au degr de formalisation des procdures dvaluation. La question de lvaluation et de la
rmunration en management de projets peut se dcliner en quatre problmatiques.
a) Pondration de la reconnaissance entre le collectif et lindividuel. Le principe est de faire
primer lquipe-projet sur les performances individuelles mais la difficult individualiser la
contribution de chacun est forte. Outre cet aspect, se pose, toujours au niveau collectif, la ques-
tion de limplication des acteurs de laval. Cette implication reprsente un cot. Par exemple,
dans lindustrie automobile, la participation des techniciens dusine au plateau du projet
dgrade le ratio de productivit de leur unit de production, ce qui conduit mesurer la contri-
bution des acteurs-mtiers aux projets et mettre en place des systmes de facturation inter-
mtiers. Lautre aspect est la rmunration individuelle. Elle ne concerne, comme contrepartie
de ses responsabilits et de son exposition aux risques, que les directeurs ou chefs de projet.
b) Responsables de lvaluation. Lvaluation des acteurs est complexe dans une structure
gomtrie variable qui rend impossible le seul entretien annuel avec le responsable hirar-
chique. Plusieurs acteurs peuvent valuer, ensemble ou sparment. Dabord, la hirarchie peut
valuer; selon les cas, il sagira du commanditaire du projet, du comit de pilotage, de la hirar-
chie mtiers, de la fonction DRH. En gnral, les entreprises prfrent mnager, en vitant de
la froisser, la susceptibilit des hirarchies, jalouses de leurs prrogatives dans le domaine de
lvaluation. Lvaluation peut galement tre matricielle. Dans ce cas, les responsables du
projet participent lvaluation avec les hirarchies mtiers. Les mtiers valuent alors les
comptences techniques dployes sur les projets et la hirarchie projet value la participation
au projet et la qualit du travail dquipe.
c) Critres dvaluation. Lvaluation des acteurs-projets est ncessairement multicritres.
Classiquement, trois types de critres sont envisageables.
- Des critres lis aux rsultats: la qualit, les cots et les dlais traditionnellement. Cette ap-
proche tlologique convient aux projets dcomposables ou configurables que lon rencon-
trera dans le type B. Lexistence dun client et dunits duvre reprables permet de
mesurer lcart par rapport des objectifs fixs initialement. Les critres de march comme
la satisfaction du client sont quant eux trs dlicats manier. Ainsi dans le cas dun projet
rentabilit contrle est mis sur le march son terme, le chef de projet qui tient ses ob-
jectifs est reconnu en interne alors mme que le projet peut chouer en tant que produit pour
des raisons qui sont indpendantes du management du projet (un concurrent first mover oc-
cupe dj le march, la mode se retourne). Il sagit bien dans ce cas de limiter lvaluation
des critres internes.
- Des critres lis aux actions et aux comportements des individus (travail en quipe, coop-
ration inter-mtiers, capacit grer des situations imprvues, prise de risque);
- Des critres hors performance (anciennet, nature du travail, niveau hirarchique).
Les entreprises cherchent structurer des critres dvaluation des quipes-projets qui enrichis-
sent et dpassent les critres classiques : valuer des comptences transversales ; valuer
lapprentissage collectif; valuer des objectifs prcis mais aussi des cibles mouvantes qui se
redfinissent en fonction de lvolution du projet ; contrler le comportement des acteurs -
projets autant que leurs rsultats; dvelopper lauto-contrle partir de mta-rgles (cf. 3-2,
page 25); valuer la capacit donner lalerte avant tout drapage sur le projet; la capacit
proposer des solutions, contester, remettre en cause, arbitrer des conflits
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d) Nature de la reconnaissance. La reconnaissance peut tre financire (intressement,


primes) ou plus symbolique (cadeaux, dners collectifs, reconnaissance verbale, la gestion
des carrires future), mais les deux sont galement importantes. Hormis les fonctions de chef
de projet BTP et de chef de projet informatique, il ne semble pas exister de grille de salaire
conventionnelle pour les acteurs-projets. Les systmes de primes lis des procdures internes
dvaluation sont instaurs au cas par cas et demeurent relativement occultes. Le moment de
lvaluation est galement important. Rserver lvaluation seulement la fin du projet ne
permet pas dinfluencer la dynamique du projet. Chaque grand rendez-vous du projet peut tre
une occasion dvaluation des acteurs.
2-2.4 Raffectation des acteurs-projets
En management de projets la DRH est directement confronte la question de la
raffectation des acteurs-projets: comment lorganisation peut-elle, la fin du projet, rinsrer
ceux quelle a (sur)sollicits? comment trouver de nouvelles ressources pour passer dun projet
lautre et donc assurer continuit des missions de lentreprise? La question se pose dans des
termes proches pour les diffrents types de projet:
- pour des productions unitaires rcurrentes, comme dans le type B (ex. les grands projets in-
ternationaux de BTP o il sagit la fin du projet de dmobiliser les quipes puis de remo-
biliser, parfois dans un temps trs court, de nouvelles ressources);
- pour des dveloppements de produits nouveaux ou projets de type A (ex. lindustrie auto-
mobile renouvelle en permanence ses gammes de produits par le lancement rcurrent de
projets);
- pour des projets de type C o le problme est surtout de grer des quipes multi-projets et
darrter des dveloppements pour bifurquer et rallouer aussitt des ressources humaines;
- pour des projets de type D o il faut grer la transition entre la phase de montage de la start-
up et une phase de fonctionnement plus routinise. Dailleurs cest souvent lembauche
dun DRH qui marque cette transition, relayant le (ou les) fondateur(s) du projet dans la
fonction de recrutement, de GRH et de mise en place dun systme de gestion.
Grer la fin du projet pour ses acteurs, cest non seulement les aider traverser une priode
qui peut tre de dprime, souvent pour ceux qui ont t les plus impliqus, mais il est aussi
essentiel pour lentreprise de capitaliser lexprience acquise sur un projet. Pour Nonaka (1994,
[72]), les projets sont les principaux vecteurs de la cration de nouveaux savoirs dans les orga-
nisations parce quils mettent en relation des personnes qui restaient auparavant dans leur
mtier. Il sagit de diffuser synchroniquement et diachroniquement dans lorganisation les
connaissances nouvelles gnres par les projets. La rintgration au sein dun nouveau projet
aprs la fin dun projet est une capitalisation interprojets. Elle reste toutefois prouvante pour
les acteurs concerns. Demander aux personnes concernes leurs desiderata plutt que
dimposer des raffectations vite bien des frustrations et dsillusions. Dans les grandes entre-
prises, pour les projets de type A ou B, des systmes de gestion comme les comits des carrires,
invents lorigine pour la gestion des salaris expatris de lindustrie ptrolire, grent ces
priodes charnires. Toutefois, il peut tre difficile pour les heavy-weight project managers qui
ont t autonomes, puissants et envis, de se rinsrer directement dans des structures perma-
nentes. Les mtiers restent dailleurs rservs quant laccueil des poids lourds des projets.
Leffet mdiatique externe et interne pendant le projet peut renforcer le risque de transition diffi-
cile en fin de projet. Le retour au mtier est encore plus risqu dans le cas des projets sortis.
Pourtant, petit petit, par effet de turn-over, la capacit participer un projet devient une
composante du mtier.
2-2.5 Formation des acteurs-projets
Aprs avoir situ la notion de formation en gestion de projets par rapport aux situations de
formation en management en gnral, nous insisterons sur les principes pdagogiques de la
formation au management de projet. Ils valent videmment pour les acteurs - projets, mais
galement pour ceux qui vont le devenir, pour les acteurs-mtiers qui vont travailler avec eux,
pour les partenaires extrieurs.
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2-2.5.1 Une typologie des situations de formation en entreprise


La notion de formation est en effet trs polysmique dans le domaine de la gestion, allant de
processus trs individualiss et centrs sur des contenus prcis (exemple, une formation sur
catalogue lordonnancement de projet) des programmes lourds, dclinant un nouveau
concept de gestion sur lensemble dune entreprise (par exemple les programmes qualit
totale); des formes plus individuelles sappuyant sur lusage de CD-Rom et du e-learning se
dveloppent de manire significative mais il est un peu tt pour en valuer la performance. Deux
variables apparaissent importantes pour caractriser le contexte: ltat des savoirs sur lobjet et
lenjeu de lobjet pour lentreprise, ce quillustre le tableau 4 (tir de Bouds, Charue & Midler,
1997, [17]) qui permet de dfinir une typologie en quatre groupes.
Tableau 4 : typologie des contextes de formation en entreprise
Statut de lobjet de la formation: politique
Enjeux faibles Enjeux forts
Problme mergeant I IV
Statut de lobjet de la
formation: cognitif Corpus de connaissances
II III
explicites et stabiliss

- Dans la situation I, on retrouverait les stages inter-entreprises de sensibilisation, bass sur


des prsentations synthtiques mais aussi trs schmatiques dexpriences. Ce sont des op-
rations ponctuelles, peu interactives. Les participants sy inscrivent titre individuel, sur ca-
talogues. Ils en retirent des messages globaux, lide quil faut poursuivre
lapprofondissement de la dmarche ou, au contraire, que cela nen vaut pas la peine. Ce
sont gnralement des points de dpart des apprentissages plus lourds et plus collectifs.
- La situation II correspond aussi des dmarches individuelles, mais dans des stages inter-
entreprise plus longs et plus instruments. Il sagit ici dacqurir des techniques opratoires
individuelles. Cest une approche qui sinscrit dans des trajectoires de spcialisation profes-
sionnelle. Dans le domaine du projet, on trouve ici communment deux orientations sap-
puyant sur des corpus thoriques aujourdhui bien connus, lun plutt instrumental (les
outils de classiques du contrle de projet en planification, estimation et cotenance qui font
lobjet de certifications1), lautre plutt comportemental (animation dquipe, leadership).
- La situation III correspond une volont de changement rapide et massif des pratiques, sur
la base dun transfert et dune dclinaison dun corpus de mthodes dont la validit a t
prouve ou du moins lgitime. Lapprentissage des entreprises passe certes par lintgra-
tion dobjets provenant de lenvironnement managrial externe, mais aussi par une interro-
gation sur lopportunit de tels transferts, par un travail indispensable dadaptation et
dintgration dans une activit et une tradition dentreprise spcifique (Midler, 1986, [64];
David, 1998, [26]). Les enjeux et les politiques dentreprise sont suffisamment volutifs et
multi-critres pour troubler rapidement la cohrence et la pertinence des programmes lourds
fonds sur la diffusion de corpus dtaills et stabiliss. Le domaine de la formation au ma-
nagement de projet illustre dailleurs lui-mme de telles dconvenues (Leroy, 1995, [60]).
- La situation IV correspond une situation o, dun ct, lentreprise a conscience que la
comptence en matire de management de ses projets devient un enjeu cl pour sa stratgie
mais quil nest pas possible de mobiliser directement un corpus de connaissances prcis im-
mdiatement applicable la nature de lactivit comme aux pratiques professionnelles exis-
tantes. Historiquement, cette situation a prcd la situation III dans quelques grands
groupes qui ont mis en place des processus de formation sappuyant sur des tudes de cas
rels du groupe, co-animes avec des acteurs-projets ayant un rle dans le projet tudi; il
est intressant de noter que de nombreux cas tudis correspondent des checs, ce qui cor-
respond une pdagogie particulire. Aprs stabilisation dune doctrine, on est alors pass
en situation II.

1. Comme celles de lAFITEP, de lIPMA, de lICEC ou du PMI.


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2-2.5.2 Principes pdagogiques de la formation au management de projet


Les dispositifs de formation en management de projet cherchent intgrer en six principes
les spcificits de la comptence projet (Bouds, Charue-Duboc et Midler, 1997, [17]).
- Formation intgre. Le paysage de loffre de formation au management de projet en France
est la fois particulirement foisonnant et vari. ct dune offre banalise de confrences
ou de stages de tous ordres, sortant les participants du contexte de leur entreprise pendant la
dure de la formation, existent des formations intgres, dispenses lintrieur de lentre-
prise. Ces dernires correspondent une dmarche collective et volontariste permettant
dapprofondir la spcificit du champ professionnel et des procdures institues.
- Confrontation des pratiques internes aux apports des thories et des expriences exter-
nes. La participation de chercheurs et de tmoins externes permet dapporter dans le dispo-
sitif pdagogique un regard sur des expriences extrieures aux entreprises considres,
quil sagisse de recherches menes dans dautres entreprises ou de rsultats publis dans la
littrature sur le management de projet. Les dispositifs mentionns reposent ainsi sur la con-
frontation systmatique des pratiques internes et de dmarches externes. Linterrogation sur
lopportunit de transferts, ladaptation et/ou le mtissage de concepts gnraux dans les
contextes particuliers des participants sont au cur du dispositif.
- Dispositif de formation-action. Lun des problmes classiques de la formation profession-
nelle est la coupure entre la situation du participant au sein du dispositif de formation et sa
situation de travail relle. Dans les dmarches traditionnelles, cest le formateur qui impose
son terrain (exposs thoriques, discussions de cas, jeux de rle). En matire de projet, nous
avons vu que cette coupure est particulirement pnalisante. La question de lapplication
dun principe ou dune mthode gnrale un contexte particulier est en effet aussi essen-
tielle que la comprhension du dit principe ou la matrise dcontextualise de la dite mtho-
de. Pour rsoudre ce problme, les dispositifs ont adopt un principe de formation-action,
o les projets des participants constituent le support concret sur lequel sactualiseront la r-
flexion thorique et lchange sur le management de projet. Il sagit alors dexplorer, sur les
situations relles des stagiaires, ce que peut apporter une mthode ou ce que peut clairer un
concept, quelles sont les conditions et les limites de leur application.
- Intgration des composantes instrumentales et organisationnelles du management de
projet. Lun des effets classiques des formations fondes sur des corpus thoriques est
dexacerber les oppositions de dmarches. Typiquement, dans le champ du management de
projet, on aura lopposition entre une vision instrumentale (la technique du planning et du
contrle conomique par exemple) et la vision comportementale ou politique (leadership,
communication, stratgies dacteurs). Partir de situations de projet relles oblige au con-
traire dpasser ces oppositions en posant la question des rapports et de larticulation de ces
champs dans la pratique. On dcouvre alors que la valeur instrumentale des outils dpend
des relations dans lesquelles ils sont mobiliss. Loutil planning nest quune surcharge inef-
ficace sil sinscrit dans un reporting tatillon. Il peut-tre, au contraire, un moyen de coh-
sion et de solidarit dans lquipe, sil est mobilis dans une dmarche de communication,
de ngociation et de responsabilisation authentique des acteurs. Symtriquement, on saper-
oit que le charisme dun chef de projet nest rien sil ne sappuie pas sur une explicitation
des enjeux et des risques associs sa mission, explicitation qui va passer par des formes
dinstrumentation varies. Une telle ambition trs pluridisciplinaire pose immdiatement le
problme de la slection des contenus. Au-del dun noyau conceptuel gnral, cest le ter-
rain des participants qui est ici le principe de slection. Ainsi, dun stage lautre, certains
concepts ou champs thoriques sont plus ou moins explicits, parce que la nature du projet
en donne ou non lopportunit. Les projets des participants font ainsi office de rvlateurs
du corpus gnral des connaissances en management de projet: chaque projet particulier
permet dchanger sur le management de projet en gnral (Schn, 1987, [81]).
- Articulation du thorique et du politique. La professionnalisation des responsables de
projets nest pas isolable de lvolution densemble des processus de fonctionnement de
lentreprise. Do limportance de linstitutionnalisation du dispositif dans lentreprise, de
son articulation sur le systme politique de management de la firme. Ce lien prend diffren-
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tes formes: prsence dans les stages de reprsentants de la direction de lentreprise lors de
tables rondes, existence dun comit directeur du dispositif permettant de dbattre de son
fonctionnement et de son volution.
- Dispositif inscrit dans la dure, lieu de capitalisation et de dbat sur les dynamiques
organisationnelles. La cration des fonctions de projet institue une marge dautonomie
nouvelle par rapport au management traditionnel. Seule la constitution dune culture com-
mune peut assurer une cohrence et une mmoire minimum autour de mta-rgles parta-
ges (Jolivet et Navarre, 1993, [47]; voir 3-2, page 25). Or, la capitalisation inter-projets
est difficile et non spontane. Les projets se prsentent tous comme diffrents. Les chefs de
projet sont mobiliss sur leur mission et ne simpliquent gnralement que peu dans la trans-
mission de leurs pratiques. En outre, une fois les projets termins, les quipes se dissolvent.
Dans ce contexte, le dispositif de formation est une instance essentielle pour capitaliser et
transfrer les expriences, faire le lien entre les enseignements des quipes qui terminent et
les questions de celles qui dmarrent, mesurer les volutions accomplies, identifier les blo-
cages rcurrents. Cette vision de la formation-observatoire implique dinscrire le dispo-
sitif dans la dure et den assurer, par le biais des animateurs et/ou de comits de pilotage,
la continuit et lvolution en mme temps que sopre la dynamique de la professionnali-
sation projet dans lentreprise.

3 Les procdures danimation dun projet


Llaboration du modle standard de lingnierie, dans les annes soixante, a constitu une
innovation importante dans lorganisation et la gestion des projets cots contrls. Sous la
pression internationale conduisant la recherche dune rduction des dlais de conception de
produits nouveaux et de leurs cots, les entreprises manufacturires ont cherch importer les
techniques de gestion de projet. Cette transposition dans les projets rentabilit contrle a rapi-
dement montr ses limites, principalement en raison dune incertitude plus forte sur les spcifi-
cations invalidant une partie des instrumentations disponibles. Il a donc fallu imaginer des
organisations alternatives sappuyant sur la concourance ( 3-1). Par ailleurs, le contrle dtaill
dun projet cots contrls sappuie sur une instrumentation prouve qui implique une
certaine distribution des rles, somme toute assez classique. Mais un usage tatillon de ces proc-
dures a conduit lmergence de formes alternatives de contrle pouvant sappuyer sur des
comptences nouvelles ( 3-2, page 25).

3-1 Introduction de la concourance dans les projets rentabilit contrle


On examinera successivement le passage de la squentialit la concourance ( 3-1.1),
lorganisation en plateau ( 3-1.2, page 23) et les processus de coordination ( 3-1.3, page 24).
3-1.1 Le passage de la squentialit la concourance
Dans le modle traditionnel, les projets apparaissent comme une squence dtapes succes-
sives confies des experts diffrents (mtaphore de la course de relais de Nonaka et
Takeuchi, 1986, [71]). Dans ce contexte, la solution trouve lissue dune phase du projet
devenait une contrainte pour les acteurs de la phase suivante (par exemple, le dessin dun produit
par le bureau dtudes devient une contrainte pour la dfinition des gammes opratoires pour le
bureau des mthodes). Les dmarches modernes, dnommes ingnierie simultane ou, mieux,
ingnierie concourante, introduisent deux ruptures importantes par rapport ce modle.
- Elles organisent, ds le dpart, la mobilisation de toutes les expertises pour amliorer la prise
de dcision des diffrentes tapes dans une perspective plus large (mtaphore de la ligne
de rugby). Pour reprendre notre exemple, si deux pices doivent tre rendues solidaires et
que, pour ce faire, il revient strictement au mme dutiliser des rivets ou une soudure, lavis
du bureau des mthodes permettra de choisir lalternative la moins pnalisante pour eux.
Elle sappuie sur la constitution dquipes pluridisciplinaires.
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- Elles organisent le chevauchement entre les diffrentes phases du projet: spcification du


produit, spcification du process, choix des fournisseurs, choix industriels Ceci afin,
dune part, de mieux traiter les interdpendances entre ces variables et, dautre part, de r-
duire le dlai global du dveloppement.
Lapplication de ces principes permet danticiper les problmes avant que lirrversibilit du
projet ne les rende trop pnalisants. Elle se traduit par des allongements de phases mais leurs
chevauchements permettent de raccourcir le dlai du projet (voir figure 3, page 22).
Figure 3 : comparaison entre le dveloppement concourant et le dveloppement squentiel

Dveloppement Dveloppement
squentiel concourant

Phases Phases

Spcification

Spcification
Spcification

Spcification

commercial
Dmarrage
commercial

Lancement
Dmarrage

Lancement

du produit

du process
du produit

du process

usine
usine

Bureau des Bureau des


tudes tudes
Bureau des Bureau des
mthodes
Acteurs

mthodes
Acteurs


Usine Usine
Service Service
commercial commercial

Responsable principal
Contributeur pour validation

PHASES Dure du projet Dure du projet


PHASES
Spc. produit Spc. produit
.

Spc. process Spc. process


.

Dm. usine Dm. usine


.

Lanc. com. Lanc. com.


Temps Temps
Phases chevauchantes et allonges

Les mthodologies de lingnierie concourante mettent donc laccent sur lintgration orga-
nisationnelle et physique des diffrents acteurs dun projet (organisation en plateau voque ci-
aprs) mais aussi des informations changes. La gestion documentaire, au sens large, et la
matrise des outils de communication deviennent un enjeu majeur quaccentue la tendance la
spcialisation et donc la multiplication des partenaires. Des efforts importants doivent
galement tre consentis tout au cours du projet pour structurer, archiver les informations et en
faciliter laccs. Lhtrognit des structures de reprsentations des objets, des nomenclatures
et des gammes, constate dune entreprise une autre, mais aussi souvent dun service un
autre, constitue un frein aux changes et gnre des dysfonctionnements et cots importants.
Les nouveaux outils tlmatiques (outils de groupware, internet, etc.), facilitant la
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dsynchronisation temporelle et spatiale des changes, permettent de nouvelles formes de


coopration dans certains projets.
3-1.2 Lorganisation en plateau
Cette mobilisation des expertises est facilite par la mise en place de plateaux qui runissent
physiquement dans un mme lieu, de manire permanente et non occasionnelle, les responsa-
bles internes ou externes (sous-traitants et co-traitants) de la conception du produit et du
processus, ceux de la fabrication et parfois, ceux de la vente et de laprs-vente de ce produit,
au moment de la conception dun produit manufactur complexe ou dun sous-ensemble tech-
niquement cohrent de ce produit. Les commodits de communication directe et lusage de
maquettes de lobjet en cours dlaboration facilitent lintgration de points de vue, une
meilleure ngociation des contraintes et la recherche de solution globalement plus efficientes,
condition toutefois que ces acteurs jouissent dune certaine dlgation dcisionnelle de la part
de leurs services dorigine et quune dynamique de groupe se cre autour du projet. La
recherche systmatique de la concourance pour rduire les cots et dlais de conception peut
conduire repenser radicalement lagencement de lespace. Le Technocentre de Renault, inau-
gur fin 1997 et accueillant 7 500 personnes, majoritairement des ingnieurs, constitue un
exemple remarquable de ce type de mutation1. Les fonctions danticipation et dapprentissage
du plateau peuvent se dcrire au travers de quatre processus (Garel, 1996, [35]).
a) Les acteurs transversaux. Les acteurs transversaux comme les chefs de projets alertent
les acteurs-mtiers sur les risques de la non-anticipation, portent lvaluation conomique dans
les dbats techniques des acteurs-mtiers, tranchent ventuellement des diffrends ou les reca-
drent, aident dfinir et valuer des alternatives.
b) Les instruments de gestion. Les instruments de gestion (contrats, jalons, abaques, indi-
cateurs) ont pour fonction essentielle de fixer des jalons contraignants aux acteurs-mtiers et
donc de construire des chances pour des acteurs aux logiques diffrentes. Sous certaines
conditions lexistence dune chance pousse lexpression des demandes, des suggestions,
remonter les crises en amont, en un mot mobilise. Il ne suffit pas de rendre les acteurs du projet
responsables dune chance, il faut aussi leur fournir les moyens dassumer cette responsabi-
lit. Le plateau crdibilise et oprationnalise la contrainte de lchance. Plus gnralement
on voit ici que la rgulation conomique est lie au contexte organisationnel dans lequel elle
opre. Grce au plateau, les acteurs peuvent se coordonner. Ils ne peuvent plus, comme dans une
organisation squentielle sabriter derrire la dfaillance de ceux qui nont pas ou ont mal
ralis le travail avant eux.
c) Le contact direct. Des recherches montrent que la communication est dautant plus
frquente que les acteurs sont proches les uns des autres. Nonaka (1994, [72]) ajoute une autre
condition: la taille du groupe. Au-del de dix trente personnes les quipes de conception ne
pourraient plus interagir. En pratique, les plateaux sont constitus de petits groupes spars les
uns des autres mais qui peuvent communiquer entre eux ou, dans le cas de grands projets de type
A notamment, on trouvera plusieurs plateaux. Le plateau cre une familiarit entre ceux qui y
participent. En mme temps, sous le regard des autres, chaque participant se sent jug. Si le
contact direct nest pas toujours possible entre les experts idoines, lactivit du plateau nest pas
pour autant bloque. Elle est en effet indispensable pour dployer la rsolution des problmes
aux experts qui ne peuvent tre colocaliss et, ensuite, intgrer de manire pertinente, les
rponses dans le cadre du projet. Les traditionnelles questions en sciences de gestion de
dlgation et de gestion par exception resurgissent avec acuit dans les activits de projet.
Lorsquun acteur est prsent sur le plateau, limportant nest pas seulement ce quil sait techni-
quement, mais aussi sa capacit aller chercher dans son mtier les solutions (cest--dire
parfois ceux qui les dtiennent) aux problmes poss.
d) Les objets physiques. Sur les plateaux, les objets physiques remplissent une double fonc-
tion.

1. Bonnafous (1998, [15]).


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- Ils permettent dexpliciter des savoirs tacites ncessaires lactivit. Sur le plateau, les sa-
voirs techniques doivent sexprimer, exister socialement et ne pas rester confins au monde
parfois symbolique de leurs dtenteurs. Ils sexpriment non seulement par la parole, mais
aussi par le figuratif ou laction. Les objets physiques sont un mode privilgi dexpression
du savoir technique: sur le plateau, des dessins sont croqus, des photos sont prises, des
bouts de pte modeler (afin de modifier les maquettes en temps rel), des morceaux de pa-
pier ou de bois des pices de vhicules de srie, des maquettes sont utiliss. Le rle des
objets physiques est donc daider la verbalisation ou de faire comprendre lautre en lui
montrant, en lui faisant couter, en lui faisant prouver. Nonaka (1994, [72]) appelle
externalisation le processus par lequel le savoir (technique) tacite des acteurs de lentre-
prise se transforme en savoir explicite. Les objets physiques ont galement un pouvoir de
convergence fort en mettant fin des altercations parfois violentes: la matire rend lvi-
dence.
- Ensuite, les objets physiques portent une partie de la mmoire du projet et des projets ant-
rieurs. Une maquette porte en elle les savoirs de ses concepteurs. Lobjet physique peut
se lire et se dcoder. Le raisonnement est analogique selon Nonaka (1994, [72]) qui consi-
dre que les objets physiques et plus particulirement les prototypes agissent comme des
mtaphores dans lexplicitation des savoirs tacites.
3-1.3 Processus de coordination et relations interfirmes
Lune des tendances actuelles de lorganisation des projets est dlaborer un double
processus de coordination: une coordination procdurale et une coordination par des contrats
sur objectifs de rsultat. La mise en uvre de cette tendance se traduit par une volution duale.
lintrieur de lentreprise, on formalise des contrats internes avec les contributeurs mtiers de
lentreprise. Entre les entreprises, on favorise une intgration organisationnelle des contribu-
teurs en les obligeant participer aux plateaux, aux groupes de suivi des projets, etc. Le monde
de lingnierie des grands travaux avait exacerb la rgulation contractuelle entre les acteurs, en
supposant implicitement que le sens des responsabilits et le poids des pnalits pouvaient
garantir chacun contre lincertitude de lengagement des autres; force est aujourdhui de cons-
tater que cet outil de coordination se rvle plus efficace pour augmenter le chiffre daffaires des
spcialistes en contentieux que pour diminuer les drives des projets. On sachemine donc vers
la mise au point de compromis entre deux formes de coordination qui se compltent plus
quelles ne sopposent. Ce compromis, qui peut voluer en fonction de lavancement du projet,
est forcment conditionn par le positionnement du projet au regard des diverses grilles
danalyse qui ont t prsentes.
Cest ainsi que le dveloppement de lingnierie concourante a conduit les entreprises (de
type A dans un premier temps) rviser leurs modes de relations avec leurs fournisseurs et
partenaires (Midler, Garel et Kesseler, 1997 [67]; Garel, 1999, [37]). Benghozi, Charue-Duboc,
Midler, 2000, [14]). De nouveaux modles de relations interfirmes se mettent en place, sous les
dnominations de partenariat ou de codveloppement. Ici encore, limportance dune vision
contingente et diversifie de ces dynamiques est ncessaire. Midler (2001, [68]) propose une
typologie de ces situations de coopration interfirmes au sein des projets en fonction des varia-
bles suivantes:
- Les niveaux dincertitudes et les enjeux associs la coopration. Les modalits et les con-
traintes de la coopration diffrent selon quil sagit de recherches sur des comptences g-
nriques, loignes de dbouchs immdiats (grande incertitude, faibles enjeux de march
direct), de dveloppement de produit (fort enjeux de march, plus faible incertitude) ou de
co-conception en avance de phase des projets de produits (fort enjeux, forte incertitude), ce
quillustre le tableau 5.
- La nature de lobjet de la coopration. Le produit dvelopp est-il ou non facilement d-
composable en composants ou sous-systmes? Si cest le cas, il est possible de dfinir assez
clairement les primtres dintervention des diffrents partenaires. Dans le cas o les inter-
faces sont difficiles distinguer, nous nous trouverons au contraire dans une situation din-
teraction continue qui suppose une autre organisation. Le modle de co-dveloppement
IAE de Paris (Universit Paris 1 Panthon - Sorbonne) - GREGOR - 2001-05 - 25

Tableau 5 : Diffrentes situations de relation entre intgrateur final et fournisseur de 1er


rang en conception.
Incertitudes et risques
Faibles Forts
Relation de sous-traitance traditionnelle dans Cooprations pour la constitution et le dve-
Faibles le cadre du dveloppement de produits loppement de comptences gnriques, peu
Enjeux

associes des dbouchs marchs directs


Co-dveloppement ou black-box sourcing Co-dfinition des stratgies technologiques et
Forts
des cibles fonctionnelles des produits futurs

entre constructeurs automobiles et grands quipementiers sest construit ainsi sur cette par-
tition du produit auto en composants, systmes, fonction, modules Mais beaucoup de re-
lations inter-entreprises en conception ne peuvent rentrer dans ce schma. Cest en
particulier le cas des relations avec les entreprises cratrices dun nouveau produit et les
fournisseurs de process.
- Le type de contribution des partenaires. Sagit-il dune conception en alliance dite
complmentaire entre client et fournisseur ou au contraire dune alliance additive en-
tre deux entreprises concurrentes? Dans ce second cas on imagine aisment les tensions qui
peuvent apparatre et donc limportance de la rgulation contractuelle, la difficult cons-
truire la cohsion dune quipe-projet partir dentreprises par ailleurs concurrentes
- Le caractre pouss ou tir du processus de conception. Dans une alliance
complmentaire, lobjectif recherch et les problmes rencontrs sont trs diffrents sui-
vant que linitiative de la coopration vient du client ou du fournisseur. Dans le premier cas,
il sagit de trouver des rponses techniques une cible march, dans le second, il sagit dex-
plorer les dbouchs intressants dune technologie. Dans le premier cas, linitiateur du par-
tenariat dispose dun pouvoir de prescription important sur les mthodes de conception
conjointe; dans le deuxime, il doit convaincre ses clients de travailler sur ses ides.
- Le contexte professionnel du partenariat. Sagit-il dun secteur ferm et stable dans lequel
les acteurs sont connus et interagissent frquemment (automobiles, industries manufacturi-
res), dun milieu trs htrogne, instable et ouvert (BTP)? Dans le premier cas, les r-
gulations mises en uvre sinscrivent dans une philosophie de coopration long terme, de
jeu rpt o les rputations et les rtributions peuvent se compenser sur le long terme.
Dans le second cas on mettra beaucoup plus demphase sur les formes contractuelles, afin,
dune part, de construire un cadre de travail en commun et, dautre part, de dissuader, mais
aussi de prparer les contentieux ventuels.
Ce rfrentiel permet de caractriser la grande varit des situations que lon trouve derrires
la dnomination de partenariat de conception: co-dveloppement, co-apprentissage en
avant-projet (Midler, 2001, [68]), co-conception en alliances additives (Piron, 2000, [75]).

3-2 Introduction de nouvelles formes de contrle dans les projets cots


contrls
Les procdures formelles de contrle ont conduit, avec le dveloppement de linformatique,
une culture du reporting conduisant, dans de nombreux cas, une focalisation excessive sur
la production de chiffres au dtriment de leur analyse (voir Giard, in [30]). Ce manque de perti-
nence nest quen partie imputable une granularit trop fine des informations traites, cest la
technique de contrle qui peut savrer inefficace en cas de projet complexe soumis de fortes
contraintes. Dune manire plus gnrale, on sait que les choix organisationnels et
mthodologiques influent sur les comportements des acteurs. La cause premire des checs et
drives majeures de projet est donc plus rechercher dans la pertinence de ces choix que dans
lincomptence des acteurs.
Cest sur la base de ce constat que cest dvelopp en management de projet, partir des
annes quatre-vingt, lapproche dune auto-organisation fonde sur des mta-rgles, substituant
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au contrle dtaill du ralis, un contrle a priori sur les procdures1 dorganisation et de pilo-
tage du projet. Les mta-rgles sont un ensemble de principes trs gnraux non contradictoires
do lon va pouvoir tirer, pour faire face un problme donn (ici un nouveau projet), un
ensemble cohrent de rgles spcifiques2. Les mta-rgles ont t labores chez Spie Bati-
gnolles pour formaliser, partir de lexprience acquise, les principes daction communs aux
grands projets de lentreprise (Jolivet & Navarre, 1993, [47] et Jolivet, 1998 & 2001, [48]).
partir de lanalyse de cent projets, dix-sept mta-rgles ont t rdiges et consignes dans un
petit livre vert; aux antipodes du manuel de procdure, la mta-rgle sert baliser lauto-
nomie de lacteur-projet, le responsabiliser sur le rsultat. (la responsabilit du chef de projet,
dcoupage du projet, explicitation des objectifs, revue de projet, dialogue plutt que contrle,
travailler avec un chef de projet chez les fournisseurs).
Cette approche par mta-rgles se diffuse dans certains grands projets rentabilit contrle
pour permettre une quipe-projet dlaborer ses rgles de fonctionnement interne, et viter
lusage de procdures prdtermines, lourdes, peu compatibles avec les relations de confiance
a priori qui caractrisent le fonctionnement de ce type dquipe.
Jolivet (1998 & 2001, [48]) propose 22 mta-rgles applicables bon nombre de projets
parmi lesquelles on trouve:
- Le chef de projet sorganise partir des mta-rgles; il dfinit lorganisation et les mthodes
de gestion.
- La tutelle est intgre et prend les dcisions stratgiques: ces dcisions peuvent tre pr-
identifies.
- Le processus de dveloppement est adapt au projet: il est arrt par la tutelle aprs consul-
tation du chef de projet.
- Le dveloppement se fait par focalisation successives: lanalyse globale est de plus en
plus nette.
- Les objectifs sont arrts aprs un dveloppement suffisant du projet.
- Le chef de projet est responsable devant la tutelle; il reoit une dlgation de type tout
sauf.
- Le chef de projet se consacre uniquement au projet; si les projets sont petits, il dirige un por-
tefeuille de projets.
- Lorganisation est spcifique au projet, elle est volutive et intgre chaque fois que nces-
saire.
- Le chef de projet a la matrise des ressources humaines: il a le choix des participants au pro-
jet (avec, au minimum, le droit de rcuser).
- Le chef de projet dfinit les prestations des services internes: dtachement de personnel,
quipes ddies, expertise, etc.
- Le chef de projet choisit et gre les fournisseurs, il dcide galement du dcoupage contrac-
tuel.
- Les responsabilits sont dcoupes par sous-ensembles.
- La qualit, les cots et les dlais sont grs de faon intgre.
- Le chef de projet assure une gestion pro active: projection terminaison, adaptation des
processus.
-

1. Cette volution est rattacher celle observe en matrise de la qualit o le contrle sest progressivement
dplac du contrle de qualit sur les produits, au contrle de qualit sur les processus.
2. Jolivet (1988, [48]) dfinit les mta-rgles comme des rgles produire les rgles du projet. En fait, comme
en ordonnancement, lensemble des rgles imaginables est fini et il sagit plutt de rgles pour slectionner
des rgles. Contrairement ce que pensent certains spcialistes de management de projet, cette approche nest
pas nouvelle en gestion. Par exemple, elle a souvent t utilise, partir des annes soixante, pour rsoudre
des problmes complexes dordonnancement (y compris de projet) pour grer dynamiquement la slection
densembles performants dheuristiques en fonction de caractristiques contextuelles volutives et, depuis les
annes quatre-vingt, elle est dun usage frquent dans les approches simulatoires utilises en aide la dcision
pour le pilotage et la conception de processus complexes.
IAE de Paris (Universit Paris 1 Panthon - Sorbonne) - GREGOR - 2001-05 - 27

Jolivet souligne que ces mta-rgles, qui semblent relever du bon sens, sont en ralit subver-
sives parce quelles remettent en cause un certain nombre de principes dorganisation bien
tablis.

4 Conclusion
Dans les dcennies 80 et 90, on a assist un dveloppement spectaculaire et gnral de la
notion de projet dans le monde conomique mais aussi lapparition de modles de manage-
ment de projet varis et adapts la diversit des contextes. Cette dynamique a entran des
transformations profondes dans les organisations internes des firmes comme dans les relations
entre les entreprises. Il en a dcoul une srie de nouvelles questions dans pratiquement tous les
compartiments du management des ressources humaines que nous avons cherch analyser
dans cet article.
Les quelques principes et grilles danalyse qui viennent dtre proposes ne peuvent
prtendre tre valables partout, au moins pour deux raisons. Les facteurs de contingence mis en
avant dans cet article ne sont sans doute pas suffisant et ils ne sont exploits que partiellement;
un certain nombre dadaptations sont triviales mais il peut ne pas en tre toujours ainsi. Une
seconde raison est lie au fait que certaines entreprises dclarent vouloir rapidement se grer
compltement par projets alors que trs peu dexpriences de ce type ont t menes leurs
termes. Il semble raliste de penser que cette tendance, si elle se confirme, conduira de
nouveaux problmes de gestion des ressources humaines et la mise au point de nouvelles
instrumentations.

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sur INTERNET ladresse suivante :
http://panoramix.univ-paris1.fr/GREGOR/
Site de lIAE de Paris : http://www.iae-paris.com

2001-05
Management de projet et gestion des ressources
humaines
Gilles Garel1, Vincent Giard2, & Christophe Midler3
1 Professeur lUniversit Marne la Valle
2
Professeur lIAE de Paris (Universit Paris I Panthon
Sorbonne)
IAE de Paris (Universit Paris 1 Panthon - Sorbonne) - GREGOR - 2001-05 - 33
3 Directeur de recherche au Centre de Recherche en Gestion (CNRS cole Polytechnique)
IAE de Paris (Universit Paris 1 Panthon - Sorbonne) - GREGOR - 2001-05 - 34

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