AUX PORTES DU PARADIS - Rapport Banque Mondiale Cote D'ivoire 2018
AUX PORTES DU PARADIS - Rapport Banque Mondiale Cote D'ivoire 2018
AUX PORTES DU PARADIS - Rapport Banque Mondiale Cote D'ivoire 2018
AUX
Public Disclosure Authorized
PORTES DU
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Comment
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la Côte
Côôte d’Ivoire
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peut
peut rattraper
rattraper
son
son retard
retard
technologique
teechnologique ?
J A NV IER 2 0 1 8 / S IX IÈM E ÉD I T I ON
Table des matières
Avant-propos 5
Liste des abréviations 6
Remerciements 7
Messages-clés 9
Annexes statistiques 55
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
4
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Avant-propos
En 2003, le célèbre économiste Jeffrey Sachs écrivait que le développement économique est d’abord
et surtout un « phénomène de rattrapage technologique ».1Par cette simple phrase, il résumait
plusieurs courants de la pensée économique. Il retraçait également l’expérience historique des
pays d’Asie de l’Est qui ont réussi leur émergence en incorporant et en adaptant les innovations
technologiques découvertes dans les pays les plus avancés.
Ce sixième rapport sur la situation économique en Côte d’Ivoire s’interroge sur comment le pays
pourrait rattraper son retard technologique. En effet, malgré les progrès réalisés depuis la sortie de
crise en 2011, la majorité des entreprises ivoiriennes restent aujourd’hui moins productives que leurs
concurrentes dans les pays émergents tels que le Maroc, la Chine, ou l’Indonésie. Pour la plupart,
elles n’utilisent pas des technologies modernes et n’investissent pratiquement pas dans la recherche
et l’innovation, moitié moins que la moyenne observée dans les autres pays africains selon la Banque
mondiale.
Dans la tradition des précédents rapports, plusieurs propositions sont avancées pour motiver le
débat et, espérons-le, la prise d’actions par les décideurs politiques ivoiriens. L’idée repose sur trois
actions complémentaires qui se renforceront au cours du temps. La première action est d’encourager
la diffusion des nouvelles technologies avec une ouverture vers l’extérieur, notamment à travers
des partenariats « intelligents » avec des entreprises étrangères. La deuxième action porte sur le
renforcement des capacités locales car l’adoption, et surtout l’adaptation des nouvelles technologies,
va nécessiter encore plus de compétences de la part des entrepreneurs et de la main d’œuvre dans
le pays. Enfin, la troisième et dernière action est de renforcer la connectivité tant physique que
virtuelle car l’innovation s’accélère avec l’échange de biens, de services, de personnes et surtout
d’idées.
Cette triple stratégie n’est pas nouvelle—elle se retrouve derrière le succès de la technologie des
transferts d’argent (M-PESA) par la téléphonie mobile qui a été importée par Vodafone au Kenya, puis
développée par les talents locaux et la qualité du réseau de connectivité pour aujourd’hui s’étendre
à presque l’ensemble du continent africain. Pour la Côte d’Ivoire, cette stratégie s’impose avec un
sentiment d’urgence car le pays souffre d’un retard tant dans son ouverture vers l’extérieur (les
poids des flux commerciaux et d’investissements étrangers sont restés les mêmes dans le revenu
national depuis la sortie de crise) que dans le développement de son capital humain et de son réseau
logistique.
Cette urgence est sans nul doute accentuée par le besoin pour le pays d’infléchir sa stratégie de
développement économique, qui se doit de reposer davantage sur son secteur privé. Si la Côte d’Ivoire
a encore enregistré un taux de croissance parmi les plus élevés du monde en 2017, cette performance
s’explique en grande partie par l’efficacité de sa politique budgétaire, y compris son programme
d’investissement et ses grands travaux en infrastructure, et des facteurs exogènes comme des termes
de l’échange et des conditions climatiques favorables. Pour conforter cette rapide croissance tout
en la rendant plus inclusive, le pays aura besoin d’entreprises plus performantes, produisant plus et
mieux, et qui vont créer les emplois productifs dont la jeunesse ivoirienne a tant besoin.
Pierre Laporte
Directeur des Opérations pour
la Côte d’Ivoire, le Bénin, le Burkina Faso et le Togo
1 Jeffrey Sachs, The New Urban Planning, in Development Outreach, World Bank Institute, November 2003.
5
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
6
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Remerciements
Ce rapport a été préparé par Jacques Morisset, avec des contributions d’Amina
Coulibaly et d’Andréa Coppola. Camilo Amezquita de IFC a préparé la note sur
le marché du cacao (Cocoa Prices Perspectives and Related Challenges in the
Global Value Chain (GVC)) qui a servi aux analyses présentées dans ce rapport.
Gertrude Tah et Joseph Anoh ont aidé au formatage du rapport. Ont également
contribué aux préparatifs de dissémination Marie-Ange Memel, Elena Queyranne,
Erick Rabemananoro, respectivement des unités de communication des bureaux
d’Abidjan et de Washington.
L’équipe remercie Fiseha Haile pour son étude « Structural Change in West Africa: A
Tale of Gain and Loss », qui a inspiré plusieurs résultats présentés dans la seconde
partie de ce rapport.
7
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Messages principaux
Tous ceux qui ont visité un pays d’Asie de l’Est monde. Les effets de rattrapage qui avaient
ont vite compris que l’émergence économique joué à la sortie de crise s’étant dissipés, cette
est avant tout un phénomène technologique. bonne performance s’explique par le rebond
Le visiteur ne peut être qu’impressionné de l’agriculture aidée par une pluviométrie
par la capacité des entreprises de ces pays favorable et des prix à la hausse. Elle démontre
à assimiler, puis adapter les nouveaux outils aussi la résilience de la Côte d’Ivoire aux chocs
technologiques aux activités aussi diverses que internes et externes. Le climat politique et
le transport, la communication, ou les industries social qui s’était détérioré au premier semestre
manufacturières. Ces pays ne sont sans doute de l’année, suite aux revendications de certains
pas encore à la pointe de la recherche et de militaires et fonctionnaires, s’est apaisé et la
l’innovation, mais ils ont réussi à mettre en place forte chute des cours du cacao a été compensée
une dynamique de rattrapage technologique. par une excellente récolte.
Après avoir analysé les développements récents Si le déficit du compte courant s’est stabilisé à
de l’économie ivoirienne ainsi que ses perspec- environ 1 % du PIB, cela masque des évolutions
tives pour le court et moyen termes, ce sixième significatives. La hausse de 20 % des exportations
rapport sur la situation économique en Côte reflète l’augmentation des prix agricoles et les
d’Ivoire s’intéresse aux moyens qui lui permet- bonnes récoltes. Les importations sont restées
trait de rattraper son retard technologique. Si le relativement stables, même si la hausse des
pays a retrouvé une trajectoire de forte crois- achats de pétrole a été compensée par la baisse
sance après plus d’une décennie d’instabilité des biens d’équipement et intermédiaires.
politique, son objectif de devenir un pays émer- L’afflux des capitaux extérieurs a financé le
gent ne pourra être atteint sans des entreprises déficit du compte courant, notamment les
plus performantes, puisqu’elles sont le principal emprunts de l’État sur le marché international,
employeur du pays et génèrent l’essentiel de ses si bien que les réserves internationales se sont
revenus. sensiblement accrues.
9
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
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Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
11
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Afin de rattraper son retard, la Côte d’Ivoire n’a pas encore décollé. Le poids des IDE et des
doit améliorer son cadre économique et exportations dans le PIB est resté stable au cours
institutionnel. Selon l’économiste D. Rodrik, une des dernières années. Seules 3 % des entreprises
telle amélioration du cadre d’ensemble dans ivoiriennes utilisent des licences technologiques
lequel les entreprises opèrent peut accélérer importées contre plus de 15 % dans le reste de
la vitesse de convergence du pays en direction l’Afrique selon la Banque mondiale. En outre,
des économies pays plus avancées en rendant le les entreprises ivoiriennes dépensent moitié
secteur privé plus efficient. Ce mouvement est moins en recherche et innovation que leurs
déjà en marche en Côte d’Ivoire puisque son score homologues africaines.
dans l’exercice de l’évaluation des politiques et
Pour réussir, la Côte d’Ivoire doit non seulement
institutions nationales (CPIA -Country Policies
s’ouvrir vers l’extérieur mais aussi renforcer
and Institutional Assessment) a augmenté de 2,7
les compétences de sa main-d’œuvre ainsi que
en 2010 à 3,4 en 2017 – la plus forte progression
la connectivité au sein de son économie. Ces
des pays en développement telle que mesurée
deux derniers facteurs jouent un rôle essentiel
par la Banque mondiale au cours des 10 dernières
dans la diffusion et l’adaptation des nouvelles
années. Cette progression traduit les efforts
technologies importées au sein du tissu
entrepris par les autorités ivoiriennes pour
économique local. Ce modèle de diffusion de la
améliorer les conditions macroéconomiques,
technologie a d’ailleurs été suivi par de nombreux
structurelles, institutionnelles et juridiques dans
pays en Asie et plus récemment en Afrique,
le pays. Mais ces progrès n’auront qu’un impact
comme le Rwanda et l’Éthiopie. Au risque de
à moyen terme car l’effet sur la productivité des
paraphraser un haut fonctionnaire malaysien,
entreprises est généralement lent.
« l’apport des investissements étrangers et des
La vitesse de convergence de la Côte d’Ivoire exportations est proportionnel à leur capacité à
peut s’accélérer si elle adopte et adapte former des travailleurs et entrepreneurs locaux,
les nouvelles technologies, par le biais d’un qui vont à leur tour former d’autres travailleurs
rattrapage technologique ou d’une convergence et entrepreneurs ». Une bonne connectivité
non-conditionnelle, à savoir qui n’est pas est aussi essentielle aux échanges de produits,
forcément liée aux conditions qui prévalent dans services, personnes et idées.
le pays. Peu de pays ont réussi ce rattrapage
Ce rapport propose une stratégie autour de
sans avoir privilégié l’ouverture vers l’extérieur
trois axes complémentaires qui contribueront à
à travers les investissements étrangers et les
générer un cercle vertueux permettant à la Côte
exportations. Ces deux vecteurs favorisent
d’Ivoire de rattraper son retard technologique
en effet les transferts de technologie et de
et de converger plus rapidement vers les pays
compétences car la vaste majorité des nouvelles
les plus avancés :
technologies, y compris celles qui peuvent
façonner l’Afrique de demain, sont souvent •• Premier axe : une politique d’ouverture
développées par la propriété d’entreprises de doit être définie sur la base des avan-
pays avancés. La recherche de partenariat doit tages comparatifs du pays. Une liste
donc devenir une priorité. indicative de produits potentiels est
proposée sur la base de la théorie des
Le Plan National de Développement (PND) de
avantages comparatifs révélés et celle
la Côte d’Ivoire a pour priorité d’accroître les
de l’espace-produits. Ces industries
Investissements Directs Etrangers (IDE) et les
peuvent potentiellement attirer des in-
exportations. Si quelques initiatives concrètes
vestisseurs étrangers et se tourner vers
ont été lancées, notamment dans le secteur de la
l’exportation afin de bénéficier de trans-
transformation agro-alimentaire, cette stratégie
12
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
13
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
• L’économie ivoirienne a continué de croître à 7,6% en 2017 - un taux proche de celui observé lors de ces dernières
années, et l’un des plus rapides du continent voire même du monde, grâce au rebond de son agriculture et la bonne
gestion de plusieurs chocs.
• Si les principaux signaux sont au vert, la situation budgétaire s’est toutefois dégradée avec un accroissement
du déficit budgétaire en partie provoqué par une hausse des dépenses sécuritaires et l’adoption de mesures de
politique économique qui ont cherché à atténuer l’impact des variations du prix du cacao et du pétrole sur la
population locale.
• Les perspectives restent favorables avec un taux de croissance du PIB qui devrait se situer autour de 7% et le
maintien des équilibres tant externe que budgétaire au cours des deux ou trois prochaines années.
• Afin que le pays puisse rester sur un sentier de croissance équilibrée et soutenable, le Gouvernement devra procéder
à un ajustement budgétaire de l’ordre de 1,5% du PIB en deux ans, ce qui lui imposera une plus forte mobilisation
de ses recettes et une maîtrise accrue de ses dépenses pendant une période qui précèdera les prochaines élections
présidentielles en 2020.
• En raison de l’ajustement budgétaire, le Gouvernement devra améliorer l’efficience de ses dépenses et, surtout,
mettre en place les conditions qui devraient permettre au secteur privé d’accroitre sa contribution à la croissance
économique en Côte d’Ivoire.
L’année 2017 a été bonne pour l’économie ivoirienne qui a continué à s’accroitre à un rythme
d’environ 7,6%. Cette performance a été réussie grâce à la maitrise des politiques économiques
mais aussi par le rebond du secteur agricole aidé par la hausse des prix internationaux de la plupart
des produits d’exportation du pays (à la notable exception du cacao) et une bonne pluviométrie.
Toutefois, la situation budgétaire de l’Etat s’est quelque peu dégradée, notamment en raison des
dépenses nécessaires pour apaiser les revendications monétaires de plusieurs groupes sociaux qui
avaient éclaté lors du premier semestre 2017. L’Etat a dû accroitre ses emprunts sur les marchés
extérieurs, réduisant ainsi son espace budgétaire.
En regardant de l’avant, les perspectives restent favorables mais les évènements récents
indiquent qu’un changement de stratégie devra s’opérer. La réduction de l’espace budgétaire
de l’Etat impose un ajustement des comptes de l’Etat afin préserver la soutenabilité du cadre
macroéconomique et budgétaire du pays. Cet ajustement, de l’ordre de 1,5% du PIB en deux ans,
empêchera l’Etat de poursuivre une politique expansive, qui devra alors percevoir plus de recettes et
dépenser moins. Surtout, elle met en évidence que l’avenir de l’économie ivoirienne dépendra de la
performance de son secteur privé, qui devra devenir le principal moteur de croissance économique.
C’est dans cet esprit que la seconde partie de ce rapport s’intéressera à la question de comment
accélérer la transformation économique du pays, notamment en améliorant la productivité des
entreprises par le rattrapage technologique.
Cette première partie est organisée de la manière suivante : elle commence par un rappel des
développements récents puis poursuit par une analyse des perspectives à court et moyen termes
de l’économie ivoirienne. Elle conclut en mettant en évidence le rôle accru que devra jouer le
secteur privé dans les prochaines années.
15
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
1.1.1. Une croissance toujours robuste, aidée par la bonne performance de l’agriculture
La croissance du PIB en Côte d’Ivoire est estimée atteindre 7,6% en 2017, ce qui est légèrement
au-dessous de sa moyenne historique depuis 2012.1 Ce taux reste remarquable dans une
perspective tant régionale que mondiale. La Côte d’Ivoire est en effet deuxième et quatrième dans
le classement des pays avec un taux de croissance du PIB les plus rapides, respectivement en Afrique
sub-saharienne et dans le monde. Ce classement est légèrement moins flatteur lorsqu’est considéré
le taux de croissance du revenu par habitant, en raison de la croissance démographique élevée
du pays (environ 2,5% par an). Toutefois, avec une expansion rapide de son économie pendant au
moins 5 ans, la Côte d’Ivoire se rapproche des critères proposés dans la littérature économique
pour définir un épisode prolongé de croissance économique accélérée. Ces épisodes n’ont pas été si
nombreux en Afrique sub-Saharienne au cours des dernières décennies.2
12
10
8
% du PIB par an
6
4
2
0
-2 2004-8 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017
-4
-6
Si les facteurs de croissance sont restés approximativement les mêmes qu’au cours des dernières
années, il y a deux phénomènes qu’il convient de faire ressortir d’emblée. Le premier est le
rôle joué par l’agriculture. En 2017, la croissance du secteur agricole a atteint presque 10% (avec
une forte progression des produits d’exportation estimée à 14%), tirant par conséquent le taux de
croissance de l’économie vers le haut en raison du poids de ce secteur (comptant pour environ ¼
du PIB). Sa contribution à la croissance totale du pays a été environ égale à 1,7%, alors qu’elle avait
été négative (-0,2%) en 2016.
Cette bonne performance est surtout liée à la bonne pluviométrie qui a engendré une récolte
exceptionnelle en 2017 (cf. tableau 1). Par exemple, la production de coton s’est redressée en
2016/17, en hausse de 5,3% par rapport à la campagne précédente (2015/16). Cette performance a
porté le pays à la 4ème place parmi les pays africains producteurs de coton. La production de noix
de cajou a également augmenté d’environ 3%, avec une production totale de 666 800 tonnes, ce
1 L’examen du PIB trimestriel fait ressortir une croissance de 5,6% pendant le premier semestre de 2017.
2 R. Hausmann, L. Pritchett, D. Rodrik, Growth Accelerations, NBER Working Paper No. 10566, June 2004
16
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
qui a permis au pays de conserver sa position de premier producteur mondial avec près d’un quart
de la production mondiale. En ce qui concerne les cultures vivrières, la production de tubercules
et de céréales a augmenté de 8,6% et 5,3%, grâce aux bonnes précipitations et à la fourniture de
semences améliorées, alors que la production de riz s’est réduite de 5% par rapport à 2016, même
si elle reste supérieure aux valeurs enregistrées pendant la période 2012-15.
Variation par
Produits Moyenne 2012-15 2016 2017 (e) rapport à 2016
(%)
Le deuxième phénomène a été l’influence réduite des chocs sur la marche de l’économie
ivoirienne par rapport à ce qui avait été prévu il y a quelques mois. Au début de l’année, la Côte
d’Ivoire était au milieu de deux chocs majeurs : les incertitudes politiques dues aux revendications
financières de certains militaires et d’une partie de la Fonction publique, et la baisse brutale du
prix du cacao. Ces deux chocs se sont avérés moins graves que prévu. Sur un plan intérieur, les
autorités sont parvenues à des accords avec les mutins et les syndicats de la Fonction publique ; ce
qui a contribué à apaiser le climat social (même si les coûts budgétaires ne sont pas anodins comme
décrits dans la prochaine section). Au niveau du cacao, la baisse du prix a été compensée par une
récolte exceptionnelle en 2016/2017, ce qui a permis une hausse des ventes de 21% par rapport à
2016 (encadré). En résumé, la maitrise de ces deux chocs a fortement contribué au maintien de la
croissance en 2017.
17
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Le secteur cacao pèse de tout son poids sur l’économie ivoirienne, comptant pour environ 10% de son
PIB, environ 1/3 de ses exportations et touchant directement et indirectement plus de 4 millions de
personnes. Par conséquent, toute variation dans les prix de ce produit ou dans les volumes de production
a des conséquences majeures pour l’ensemble du pays.
4
Depuis le début de l’année 2016, le prix du cacao3,5 a souffert d’une chute brutale sur les marchés
internationaux. En fait, cette baisse a surtout pris place en 2016 (-33.6%) pour se stabiliser en 2017
3
(+4.1%). Dans une perspective historique, les prix actuels sont plus bas que pendant la période 2012-15
2,5
mais plus élevés que ceux qui prévalaient pendant la majeure partie des années 2000 (graphique). Il
faut aussi comprendre que la baisse des prix enregistrée2 en 2016 s’explique en grande partie par les
prévisions de production qui anticipaient une forte hausse
1,5 des récoltes lors de la campagne 2016/17 en
Afrique de l’Ouest. En fait, cette hausse s’est réalisée1
avec une augmentation de production mondiale
de 18%.
0,5
0
L‘examen des causes derrière la hausse de la production indique la prépondérance des bonnes conditions
1961
1963
1965
1969
1971
1973
1975
1977
1979
1981
1983
1985
1989
1991
1993
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2001
2003
2005
2009
2011
2013
2015
1967
1987
1997
2007
2017
climatiques, suivie par une extension de la production (graphiques).
Cocoa, $/kg, nominal$ Linéaire (Cocoa, $/kg, nominal$)
4 40 3000
3,5 30
2500
3 20
2,5 10 2000
en Livre Sterling
variation. en %
2 0
1500
1,5 -10
1 -20 1000
0,5 -30
500
Production Broyage
0 -40 Stocks Niño Indice
1961
1963
1965
1969
1971
1973
1975
1977
1979
1981
1983
1985
1989
1991
1993
1995
1999
2001
2003
2005
2009
2011
2013
2015
1967
1987
1997
2007
2017
La combinaison du choc négatif sur les prix et du choc positif sur les volumes de production – qui sont
30
en fait en grande partie reliés explique que l’économie 2500 de la Côte d’Ivoire n’a été que finalement peu
affectée. En effet, la baisse des prix a été plus que compensée par la hausse de la production, ce qui s’est
20
traduit
10 par une hausse des exportations (en valeur) 2000de cacao d’environ 20% au cours des 9 premiers mois
de 2017. Une précision est cependant utile, si l’impact moyen a été certainement faible sur l’économie
en Livre Sterling
variation. en %
0
ivoirienne, cela ne veut pas dire que tous les acteurs 1500 de la filière ont été épargnés. Par exemple, le
-10
prix aux producteurs a été baissé de 1100 FCF/kg à 700 FCFA/kg en mars 2017 ce qui a évidemment
provoqué
-20 des pertes pour ceux qui n’ont pas pu augmenter 1000 leurs récoltes. La marge des intermédiaires
s’est-30aussi réduite au cours des mois, forçant certains à rompre leurs contrats (ce qui a été exacerbé par
le comportement spéculatif de certains
Production Broyage
opérateurs). 500 Les coûts budgétaires de certaines actions menées
-40
par l’Etat seront discutés dans la section
Stocks
USD Indice
Niño Indice
de ce rapport consacrée à la politique budgétaire.
Prix des matieres premieres
Autres Prix (Desaisonnalise)
-50 0
2012M01 2012M11 2013M09 2014M07 2015M05 2016M03 2017M01
Source : note IFC.
18
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Au-delà de ces deux phénomènes, les facteurs explicatifs de la croissance ivoirienne sont restés
approximativement les mêmes que lors des années précédentes. Du côté de l’offre, les secteurs
secondaire et tertiaire ont continué d’être dynamiques en 2017. Dans le secteur secondaire, l’indice
de la production industrielle a été tiré par la bonne performance du secteur manufacturier (+ 7%) et
la reprise des activités de construction portée par les investissements publics alors que l’industrie
extractive a subi une légère baisse. Le secteur des services
9,5
demeure dynamique grâce à la croissance
soutenue du secteur des transports, des finances et du commerce. Le dynamisme de la téléphonie
7,5 0,3
mobile a soutenu la performance du secteur des télécommunications. 0,3
0,7
5,5 3,9
3,2
Du côté de la demande, la performance combinée du secteur 3,1
privé, public et externe ont
3,5
soutenu la croissance en 2017. Toutefois, la contribution du secteur privé s’est affaiblie au cours
1,7
du temps (notamment de l’investissement privé), alors 1,5
que celle
1,9 du secteur public
3,5 a augmenté sous
1,7
l’impulsion du programme ambitieux d’investissements publics. 0,6 La contribution nette du secteur
-0,2
-0,5
extérieur est estimée plus importante en 2017 que pendant les 2015années précédentes
2016 en raison2017 de la
hausse plus rapide des exportations que celles des importations. Cette combinaison
Secteur primaire semble suggérer
Secteur secondaire
que les investisseurs privés pourraient commencer à s’essouffler alors que le Gouvernement
Secteur tertiaire continue
PIB non marchand
d’être engagé dans sa politique de grands travaux. Droits et taxes PIB Reel
Graphique 2 : Les facteurs explicatifs de la
croissance de l’offre et de la demande
9,5
12,0 10,5
10,0 9,3
7,5 0,3
Contributon à la croissance %
0,3 8,0
0,7
5,5 3,9 5,3
3,2 6,0
3,1 4,0
3,5
1,9
1,7 2,0 1,2 1,6
0,4
1,5 1,9 3,5
0,0
1,7
0,6
-0,2 -2,0
-0,5 2015 2016 2017
-4,0 -2,9 -2,6
Secteur primaire Secteur secondaire Secteur privé Secteur public Secteur externe
Secteur tertiaire PIB non marchand
2015 2016 2017
Droits et taxes PIB Reel
Source : Banque mondiale
1.1.2 Le secteur externe : une stabilité qui n’est qu’apparente
12,0 10,5
10,0 9,3
La situation extérieure de la Côte d’Ivoire est restée approximativement la même en 2017
Contributon à la croissance %
19
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
la sortie de crise en 2012. Cette amélioration a pris place malgré la baisse du prix du cacao (-27%)
car pratiquement tous les prix des autres produits d’exportations de la Côte d’Ivoire ont augmenté
y compris le coton (+10%), l’huile de palme (+7%), et l’anacarde (+25%). Simultanément, les prix
des importations sont restés approximativement à leur même niveau (+2%). Cette amélioration des
termes de l’échange rappelle que la Côte d’Ivoire a été un des rares pays africains épargnés par un
choc négatif sur sa balance commerciale pendant ces dernières années. A titre de comparaison, le
Ghana a été percuté par une baisse de 25% de ses termes de l’échange entre 2012 et 2017.
3000
2000
US $ Million
1000
-2000
2014 2015 2016 2017
Le deuxième mouvement, en partie lié au premier, est que les exportations agricoles ont
augmenté d’environ 20% en valeur pendant les 10 premiers mois de l’année par rapport à la
même période en 2016 (Tableau 2). Cette forte hausse est l’effet conjoint de l’augmentation
des prix sur les marchés internationaux et des récoltes excellentes dues aux bonnes conditions
climatiques. Tous les produits agricoles, à l’exception du café et du bois en grumes, ont vu leurs
ventes à l’étranger augmenter. La progression de la valeur des exportations de fèves de cacao
mérite d’être soulignée (+22%) car elle montre bien que la baisse des prix a été plus que compensée
par la croissance des volumes, même si la valeur du cacao transformé a faiblement baissé (-3.6%).
Le troisième mouvement est que si la valeur des importations est restée relativement stable,
leur composition s’est modifiée (tableau 3). Les importations de biens de consommation ont
fortement augmenté (+17.2%), sous l’impulsion des produits pétroliers (+228.1%) et certains
produits alimentaires (+9.8%). Par contre, les importations de biens intermédiaires et de biens
d’équipements ont chuté de 10% et de 19.7%. Si cette chute se prolongeait, elle laisserait présager
une baisse de l’investissement, dans la mesure où les biens d’équipements importés comptent pour
une grande partie des efforts de modernisation des entreprises. Cette baisse reflèterait le manque
de dynamisme du secteur, qui après le rebond de 2012, n’a pas augmenté son taux d’investissement
(en % du PIB) au cours des dernières années (cette question est examinée avec plus de détail dans
la conclusion de cette première partie).
20
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
10 mois
2013 2014 2015 2016
2017
10 mois
2013 2014 2015 2016
2017
21
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
1.1.3 Prix, monnaie et crédits sont restés sur leur trajectoire historique récente
En 2017, l’inflation est restée faible à environ 1% (graphique 4). Toutes ses composantes ont été
maitrisées, y compris les prix des denrées alimentaires, grâce aux bonnes conditions climatiques et
au programme de relance agricole qui ont stimulé la production et ainsi limité le risque de hausse
des prix alimentaires. Il est à noter que le Gouvernement est intervenu à travers une politique
de plafonnement des prix et marges en imposant des prix maximums pour un certain nombre de
produits de première nécessité (le riz, l’huile, le ciment, etc.). 3 La hausse du prix du pétrole
importé n’a aussi été que faiblement répercutée sur le prix local du carburant en ne procédant qu’à
des ajustements minimes en octobre et décembre 2017.
10,0%
8,0%
6,0%
4,0%
2,0%
0,0%
-2,0%
-4,0%
-6,0%
févr-17
mai-17
juil-17
févr-16
mai-16
juil-16
avr-17
juin-17
oct-17
avr-16
juin-16
août-17
oct-16
août-16
mars-17
déc-16
mars-16
nov-16
janv-17
sept-17
janv-16
sept-16
La politique monétaire, menée au niveau régional par la BCEAO, est restée prudente de manière
à garder l’inflation en ligne de celle de la zone Euro, et ainsi éviter des pressions sur le taux
de change réel. La masse monétaire s’est accrue d’environ 10%, légèrement au-dessus du taux de
croissance de l’économie ce qui a permis de préserver la stabilité des prix. La croissance monétaire
a été portée par l’expansion du crédit et par une légère augmentation des avoirs extérieurs au sein
du système financier entre 2016 et 2017.
Le crédit à l’économie a augmenté de 14%, ce qui est rapide mais pas autant qu’en 2014-15 quand
cette expansion avait dépassé 30%. La demande de la part du secteur privé reste solide, alors que
le crédit accordé au secteur public s’est ralenti suite au changement de la politique monétaire en
décembre 2016 qui a resserré les conditions de refinancement pour les banques commerciales. Une
forte augmentation des crédits à l’exportation dans le secteur primaire ainsi qu’à la consommation
a contribué à la performance du crédit à l’économie. En effet, les crédits à la consommation ont
augmenté de plus de 16% en 2017 bénéficiant de la hausse de consommation des ménages.
3 Décret n°2017-467 du 12 juillet 2017 portant plafonnement des prix et marges de certains produits.
22
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
L’état de santé du système financier est relativement solide. Le ratio de fonds propres s’est
amélioré à 9,8%. Cependant, le taux de prêts non productifs reste encore élevé à 9,2% ce qui
est supérieur à la moyenne au sein de l’UEMOA. Le Gouvernement a fait des progrès dans la
restructuration de certaines banques publiques en adoptant un plan de restructuration et de
recapitalisation de la Caisse Nationale des Caisses d’Epargne (CNCE) qui a permis la levée de son
administration provisoire en octobre 2017. Le Gouvernement a privatisé la Banque de l’Habitat de
Côte d’Ivoire (BHCI) compte tenu de ses pertes significatives.
5,0 4,5 51
4,0 50
4,0 49
2,9 48
3,0 50,1
2,2 47
47,1 46
2,0 47,8
45
1,0 44,8 44
43
0,0 42
2014 2015 2016 2017
La stagnation des revenus budgétaires se retrouve tant au niveau des recettes fiscales, non
fiscales que des dons reçus par l’Etat. L’incapacité du Gouvernement à augmenter ses recettes
fiscales tranche avec sa volonté déclarée d’atteindre la cible de 20% du PIB établie par l’UEMOA ou
même de rattraper le Sénégal qui est le pays de la sous-région le plus performant dans ce domaine.
En fait, le Gouvernement a réalisé certains progrès en améliorant le recouvrement de plusieurs
impôts comme l’Impôt sur les bénéfices (+14% en valeur nominale), la TVA (+16%), les patentes
(+151%) et les droits d’accises sur alcool et tabac (+33%) (cf. tableau 4). Cette amélioration traduit
la mise en œuvre de réformes administratives comme l’ouverture de centres de traitement pour les
moyennes entreprises, les télé-déclarations et paiements en ligne et une meilleure identification
des contribuables.
23
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Variation
Recettes en milliards de FCFA
annuelle
2016 2017
Patentes et licences 11.2 28.2 151.8%
Taxes sur boissons et tabacs 29.8 36.6 22.8%
TVA / ASDI 323.1 376.9 16.7%
Impôts sur bénéfices 334.8 382.8 14.3%
Taxes d'exploitation pétrolière 23.6 25.9 9.7%
Taxes à l'exportation 392.3 425.9 8.6%
Taxe spéciale sur les communications téléphoniques 23.4 24.5 4.7%
Taxes importations sur produits pétroliers 343.3 347.1 1.1%
Taxes sur les télécommunications 53 51.6 -2.6%
Taxes importations hors produits pétroliers 820.5 766.6 -6.6%
Accises et autres taxes indirectes 82.6 68.1 -17.6%
Droit enregistrement café-cacao 128.5 80.1 -37.7%
Cet effort sur la mobilisation de recettes en provenance de certains impôts a été en partie neutralisé
par les choix de politiques économiques du Gouvernement dans deux secteur clés de l’économie.
Le premier a été de suspendre le droit d’enregistrement de 5% sur les exportations de cacao afin de
préserver les marges des intermédiaires dans ce secteur. Cette mesure est estimée avoir coûté autour de
US$ 80 millions au Trésor en 2017. Toutefois, la décision de transmettre une partie de la baisse des prix
internationaux sur les prix producteurs (de 1100 FCFA/kg à 700 FCFA/kg) a permis de limiter les pertes
budgétaires tout en assurant que le prix au producteur reste au moins équivalent à 60% du prix mondial,
en ligne avec le cadre réglementaire adopté à la fin 2011.4 Le deuxième choix a été de ne transmettre
la hausse du coût du pétrole importé sur le prix local du carburant que de manière marginale, isolant
les automobilistes de ce choc. Le coût de cette mesure est évalué à environ US $ 250 millions (en
comparaison des recettes si la hausse avait été totalement reportée sur les utilisateurs). Autrement dit,
si le Gouvernement n’avait pas fait ces deux choix de politiques économiques, les recettes de l’Etat
auraient pu potentiellement augmenter de 0,6-0,7% du PIB en 2017.
Les dépenses publiques ont augmenté de 0,7% du PIB en 2016 pour atteindre 24% du PIB. Cette hausse
inclut les dépenses sociales et sécuritaires (+0,6% du PIB), comme le paiement de bonus aux soldats,
pour répondre aux revendications financières de plusieurs groupes au sein de la société ivoirienne.
Elle reflète également la poursuite de la politique d’investissement ambitieuse des autorités avec des
dépenses d’investissement qui ont atteint 6,9% du PIB en 2017, soit le plus haut taux de ces dernières
années. Toutefois, les autorités ont ralenti ces dépenses en cours d’année afin de préserver les équilibres
budgétaires suite à l’augmentation des dépenses courantes. Cet ajustement a surtout porté sur les
dépenses en direction du secteur de l’agriculture, ce qui a contribué à réduire les dépenses envers les
pauvres. Par contre, le Gouvernement a tenu à maintenir ses engagements dans les secteurs sociaux tels
que la santé et l’éducation.
4 Cette politique d’ajustement du prix accordé aux producteurs n’a pas été suivie par le Ghana, qui a choisi de garder ce prix un
niveau relativement élevé – environ 950 FCF/kg. Non seulement l’impact budgétaire est plus élevé au Ghana mais la différence de
prix entre les deux pays a engendré une vague d’exportations illégales de fèves de cacao en direction du Ghana.
24
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Le déficit budgétaire a été financé principalement par le recours au financement extérieur et des
emprunts de l’Etat sur le marché intérieur et régional. Contrairement à 2016, le Gouvernement
s’est tourné vers le marché financier international pour financer son déficit ; à travers notamment
l’émission d’un Euro bond. Le Gouvernement a émis avec succès au mois de juin 2017 environ
1,2 milliard de dollars américains, un Euro bond à long terme libellé en dollars américains avec
remboursement du principal étalé sur trois ans et un Euro bond à moyen terme libellé en Euros.
L’émission en Euros représente une première pour les 90 pays frontières. Les souscriptions ont atteint
près de 4 milliards de dollars US et le rendement (5,625%)
80 s’est amélioré par rapport à l’émission Euro
bond 2015 (6,625%). Cette excellente performance reflète70
en partie la confiance des investisseurs
dans le pays. Ce changement de politique de financement 60
est aussi la conséquence de la politique
monétaire restrictive mise en place par la BCEAO en décembre 2016. Le financement régional a
% du PIB
50
donc baissé de 1 point du PIB alors que le financement extérieur a augmenté de 3,6% du PIB. Le
40
Gouvernement a continué d’utiliser une combinaison de fonds concessionnels et non concessionnels.
30
50 25
40 20
30 15
10
20
5
10
0
0 2017 2020 2023 2026 2029 2032 2035
2017 2020 2023 2026 2029 2032 2035
Scénario de Base
Scénario de Base
Solde Primaire constant
Solde Primaire constant
Scénario extrême sur le taux de croissance
Scénario extrême sur le taux de croissance
Source : FMI et Banque mondiale, 2017
Note : le stock de dette exclut le montant du C2D
45
40
35 Enfin, au-delà de la gestion des comptes de l’administration centrale, les autorités ivoiriennes ont
30
pris un certain nombre d’initiatives visant à réduire les risques budgétaires et à encourager les
25
investissements privés dans plusieurs secteurs stratégiques de l’économie. Ces initiatives incluent
20
15
la restructuration de plusieurs banques publiques et l’évaluation des projets de partenariats privés-
10 publics qui ont été réalisés ces dernières années, en particulier leurs possibles conséquences sur le
5 budget de l’Etat. Une de leurs initiatives a été de reconnaitre que l’Etat ne paie qu’imparfaitement
0 ses factures d’électricité, contribuant ainsi au déséquilibre de la situation financière du secteur de
2017 2020 2023 2026 2029 2032 2035
l’énergie. Le Gouvernement a déjà payé une partie de ses factures accumulées, en espèces et en
Scénario de Base
titrisation, en décembre
Solde 2017 et s’est engagé non seulement à régler le solde de ses factures impayées
Primaire constant
Scénario extrême sur le taux de croissance
en 2018 mais aussi à ne plus accumuler de retards dans ses futurs paiements. La deuxième initiative
25
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
qui mérite d’être soulignée a été la réalisation d’un audit sur les transactions financières qui ont
pris place sur le Programme de Ventes Anticipées à la Moyenne (PVAM) au sein de la filière du cacao.
Cet audit a montré des irrégularités, précipitant la cessation de contrats par des intermédiaires
qui ne pouvaient plus acheter leur production aux paysans. Le Conseil Café-Cacao a dû intervenir
en utilisant ses fonds de stabilisation jusqu’à hauteur de US$ 250-300 millions pour assurer le bon
fonctionnement de ce marché. L’audit a identifié plusieurs recommandations qui devraient être
mises en œuvre lors de la prochaine campagne.
Les perspectives pour les deux ou trois prochaines années sont bonnes tant que le pays
sera épargné par des chocs et que les autorités resteront engagées à respecter leur cadre
macroéconomique et budgétaire. Les défis ne sont pas négligeables, dont le principal est sans
nul doute de passer d’une croissance économique quantitative à qualitative ce qui nécessitera une
amélioration de l’efficience de la dépense publique et un engagement plus fort du secteur privé.
Autrement dit, l’économie devra mieux dépenser car les montants de ressources disponibles ne
vont pas augmenter aussi vite que lors des dernières années.
La croissance de l’économie devrait continuer à être forte, pour se stabiliser autour de 7% dans
les prochaines années. Ce léger ralentissement par rapport aux dernières années se base sur un
retour « à la normale » pour le secteur de l’agriculture, qui a bénéficié de conditions exceptionnelles
en 2017. Si la contribution de ce secteur à la croissance du PIB revient à sa moyenne entre 2012 et
2016, le taux de croissance diminuerait automatiquement de presque 1% par rapport à 2017.
Projections
2015 2016 2017 (e) 2018 2019 2020
Croissance du PIB (%) 9,2 8,3 7,6 7,2 7,0 6,8
Inflation (IPC, %) 1,2 0,7 1,0 2,0 2,0 2,0
En % du PIB
Les secteurs porteurs de la croissance devraient rester approximativement les mêmes que
pendant la période récente, à savoir les services modernes et la construction. Ces secteurs
devraient continuer à bénéficier des effets d’entrainement associés à l’urbanisation et au progrès
économique, favorisant une expansion de la demande. Le secteur industriel devrait bénéficier de la
politique du Gouvernement en faveur de la transformation des produits agricoles (anacarde, cacao,
huile) et de l’établissement de plusieurs zones spéciales à Abidjan et dans les villes secondaires
du pays. Bien entendu, le Gouvernement devra continuer ses efforts pour améliorer le climat des
affaires, qui reste contraignant comme le révèle le classement modeste du pays dans l’indicateur
de compétitivité du World Economic Forum (99ème sur 138 pays) ou de Doing Business de la Banque
mondiale (138ème sur 190 pays).
26
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Peu de changements sont anticipés sur le marché monétaire et financier. La politique prudente
menée par la BCEAO devrait assurer le maintien de l’inflation en dessous de 3% et la stabilité des
institutions financières.
Sur un plan externe, la situation du pays va surtout dépendre de facteurs exogènes, comme
l’évolution des termes de l’échange et des conditions climatiques. Le déficit de la balance
en compte courant est susceptible d’osciller entre 1 et 3% du PIB avec les exportations et les
importations s’accroissant approximativement au même rythme que l’économie.
Le principal changement qui devrait prendre place dans les prochaines années porte sur la
conduite de la politique budgétaire. Contrairement à l’expansion budgétaire qui a pris place
depuis la sortie de crise en 2012, les autorités se trouvent dans l’obligation d’ajuster leurs
dépenses, qui devront s’accroitre moins rapidement que le PIB. A titre de rappel, les dépenses
totales de l’administration centrale ivoirienne ont augmenté de 3% du PIB entre 2014 et 2017
alors que celles-ci devront diminuer de presque 1% du PIB entre 2017 et 2019 pour atteindre
le déficit budgétaire fixé dans le programme soutenu par le FMI et les critères de convergence
accordés au sein de l’UEMOA. Le contrôle des dépenses publiques devrait épargner celles en
capital pour se concentrer sur la masse salariale à travers une politique de recrutement prudente.
En parallèle, la mobilisation des revenus intérieurs est prévue augmenter de 0,6% du PIB pendant
cette période à travers une combinaison de mesures de politiques (comme la réduction des
exonérations) et administratives (telles que la simplification des procédures et leur mise en ligne
sur une plateforme électronique). Au-delà des risques associés à cette stratégie qui sont discutés
ci-dessous, l’économie perd un de ses poumons car l’expansion budgétaire contribue à la fois à
une expansion de la demande et de l’offre globales. L’impact sur la demande globale est bien
connu, il s’agit de l’effet multiplicateur de la politique keynésienne. La contribution sur l’offre
globale s’inscrit plus dans la durée à travers l’augmentation du stock de capital humain et en
infrastructures qu’engendrent les dépenses de l’Etat et qui permettent d’influencer positivement
le comportement d’investissement et le bien-être des entreprises et des ménages.
Afin de montrer les possibles gains d’efficience que l’Etat ivoirien pourrait réaliser dans ses
dépenses d’éducation et de santé (qui comptent pour près de 1/3 du budget), une analyse
comparative a été réalisée avec un échantillon d’une vingtaine de pays à la fois de la sous-
région et de pays qui pourraient représenter des cibles pour la Côte d’Ivoire (graphique 8).
Cette analyse fait ressortir que si le Gouvernement ivoirien dépense relativement beaucoup dans
le domaine de l’éducation, les résultats sont décevants en termes d’inscription à l’école primaire.
Par exemple, le Bénin dépense proportionnellement moins que la Côte d’Ivoire mais le taux
d’élèves inscrits au primaire y est supérieur. Dans le secteur de la santé, la Côte d’Ivoire dépense
relativement peu, ce qui explique ses résultats modestes en termes de mortalité maternelle.
Seuls le Mali et la Guinée Bissau consacrent moins de ressources à la santé que la Côte d’Ivoire.
5 Banque mondiale et FMI, Côte d’Ivoire : Evaluation du système de gestion des investissement publics, Décembre 2016.
27
-2,5 -1,5 -0,5 0,5 1,5 2,5
Dépense
-0,5 CÔTE D'IVOIRE
BURKINA SÉNÉGAL
-1,0
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
-1,5
NIGER
MALI
-2,0 Les dépenses
d'education sont
-2,5 inefficaces
Graphique 8 : La faible efficience des dépenses publiques dans lesTaux d'incription au primaire
secteurs de l’éducation et
de la santé
Les dépenses d’éducation 2,5
sont efficaces CÔTE D'IVOIRE Les dépenses de santé
2,5
sont inefficaces
MALI 2,0
2,0
CORE
BENIN 1,5
RWANDA 1,5 BENIN NIGER
TOGO
GUINEE BISSAU BURKINA
1,0
1,0
Dépenses en éducation % PIB
VIETNAM
ILE MAURICE
THAILANDE
0,0
0,0
-2,5 -1,5 -0,5 0,5 1,5 2,5
-2,5 -1,5 -0,5 0,5 1,5 2,5
CÔTE D'IVOIRE -0,5 RWANDA
-0,5
SÉNÉGAL VIETNAM
-1,5 -1,5
NIGER THAILAND
MALI
-2,0 Les dépenses -2,0
Les dépenses de santé
d'education sont
inefficaces sont efficaces
-2,5 -2,5
Taux de mortalité maternelle
Taux d'incription au primaire
Banque mondiale
Source :
Note : Chaque variable est mesurée2,5
en termes de déviation par rapport à la moyenne de l’échantillon.
Les points en bleu représentent
CÔTE D'IVOIRE Les dépenses de sant
les pays é
membres de l’UEMOA
sont inefficaces
MALI 2,0
Cette comparaison est indicative. D’une part, la performance des systèmes d’éducation et de
BENIN 1,5
santé n’est pas seulement influencée par les montants de ressources mis à disposition et elle dépend
NIGER
aussi de facteurs comme la structure démographique, le niveau de pauvreté, et la géographie de
BURKINA
GUINEE BISSAU
1,0
chaque pays. D’autre part, leur performance ne peut pas non plus être mesurée à travers un
seul indicateur, surtout que celui-ci ne
KENY prend pas en compte la qualité de l’enseignement ou des
Dépenses en santé % PIB
TOGO
0,5
A
soins de santé. Toutefois, elle montre qu’il existe sans nul doute une marge de manœuvre non
négligeable pour le Gouvernement 0,0 de la Côte d’Ivoire pour améliorer l’efficience de ses dépenses.
-2,5 -1,5 -0,5 0,5 1,5 2,5
Ce thème avait d’ailleurs été discuté en détails pour le secteur de l’éducation dans le quatrième
rapport sur la situation économique -0,5 en Côte d’Ivoire.6
RWANDA
SÉNÉGAL VIETNAM
MAROC
-1,0 CORE
1.2.2 Les risques
ILE MAURICE
d’un dérapage budgétaire ?
E
-1,5
THAILAND
Les risques sont relativement bien connus pour une économie comme celle de la Côte d’Ivoire.
Les risques exogènes à savoir,
-2,0 qui ne sont pas sous le contrôle du pays, sont nombreux à commencer
Les dépenses de santé
par lessont efficaces
fluctuations des prix des produits d’exportation et d’importation. Le cacao et le pétrole
-2,5
comptent pour près de 60% du commerce de marchandises et la moindre variation de leurs prix sur
Taux de mortalité maternelle
les marchés internationaux produit des ondes de chocs, non seulement sur la balance en compte
courant mais aussi sur la situation budgétaire de l’Etat et sur les prix locaux et donc sur le bien-
être des consommateurs et producteurs. La Côte d’Ivoire, comme cela avait été mis en évidence
dans les précédents rapports sur la situation économique, est exposée au possible resserrement
6 Banque mondiale, Situation économique en Côte d’Ivoire : Le défi des compétences, quatrième édition, janvier 2017.
28
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
des marchés financiers ce qui rendrait plus coûteux les emprunts extérieurs du pays. Les risques
politiques et sécuritaires globaux et régionaux ne sont pas à négliger comme l’ont rappelé les
attentats au Mali et au Burkina Faso de ces derniers mois (et les attaques de Grand Bassam en
mars 2016). Enfin, l’économie du pays reste tributaire des conditions climatiques, en particulier
son agriculture en raison des insuffisances en termes d’irrigation qui la rendent extrêmement
dépendante de la pluviométrie. De plus en plus, les centres urbains sont aussi exposés aux risques
d’inondations et à la détérioration des habitations et des infrastructures publiques.
Le risque qui est peut-être le plus important pour la Côte d’Ivoire est celui lié à la conduite
de la politique budgétaire, surtout si le rythme de croissance de l’économie se ralentissait.
Celle-ci se doit d’être restrictive avec une hausse de la mobilisation des recettes et un contrôle
des dépenses pour garder l’économie sur une trajectoire de croissance soutenable dans le plus
long terme. Or, les tentations d’écarts à cette conduite existent en premier lieu à cause du cycle
politique. La préparation des prochaines élections présidentielles et/ou les revendications de
certains groupes sociaux peuvent augmenter la pression sur le Gouvernement en lui demandant de
dépenser davantage, à l’instar de ce qui s’est passé lors du premier semestre 2017. La paix sociale
est nécessaire mais elle peut s’avérer coûteuse pour le Budget de l’Etat. Le risque, plus grave,
serait une détérioration du climat politique qui mènerait à un ralentissement de l’économie et qui
raviverait les blessures d’un passé pas si ancien.
Même sans le risque politique, la conduite d’une politique budgétaire restrictive représente
un changement de comportement par rapport aux années récentes. Le Gouvernement devra
mobiliser davantage de ressources et mieux contrôler ses dépenses. Simultanément, il devra
résister à la tentation de s’endetter au rythme qui a été le sien au cours de ces dernières années.
En effet, pour réussir son ajustement, le stock de dette publique devra diminuer de 50% du PIB en
2017 à environ 47% du PIB en 2020, alors que celui-ci avait augmenté considérablement (+ 5,5% du
PIB) depuis l’atteinte du point d’achèvement Pays Pauvres Très Endettés (PPTE) à la fin 2012. Le
ralentissement de l’endettement sera aussi nécessaire pour que le service de la dette publique ne
pèse pas trop sur les comptes de l’Etat car celle-ci absorbera environ 15% des revenus entre 2018
et 2023 pour atteindre presque 20% pendant les années 2024-26.
Le risque de surendettement est accru si la dette des entreprises publiques, qui est partiellement
estimée autour de 3,5% du PIB en 2017, est prise en compte.7 De même, il existe des risques
contingents associés aux projets de partenariats privés-publics car le Gouvernement est souvent
exposé à des garanties de demande ou de revenus. Si ces derniers risques ne sont pas encore trop
importants (le stock de capital immobilisé par ces projets est environ 2 000 milliards FCFA), ils
pourraient grimper rapidement si le Gouvernement parvenait à mettre en œuvre l’ensemble des
projets prévus dans son Plan National de Développement – le stock de capital immobilisé par les
projets Partenariat Public-Privés (PPP) pourrait atteindre plus de 10 000 milliards FCFA lors de ces
prochaines années.8
7 Ce montant est calculé en additionnant le montant qui a été reporté par le Gouvernement, environ 3% du PIB, et la dette
accumulée par le secteur de l’électricité avec ses fournisseurs et les banques locales estimée à environ FCFA 200 milliards.
Il reste approximatif car il ne prend pas en compte toutes les entreprises et agences de l’Etat, comme par exemple le
Fonds d’Entretien Routier, le Conseil Café-Cacao et d’autres agences. Les autorités sont en train de chercher à identifier
l’ensemble de ces dettes.
8 Pour plus de détails, sur les risques contingents associés aux PPP en Côte d’Ivoire, cf. FMI, Côte d’Ivoire : Gestion des
risques budgétaires liés aux partenariats publics-privés : M. Queyranne, B. Wiest, J.Y. Gacon et V. Piron, Rapport d’assistance
technique, Mars 2017
29
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
1.3 CONCLUSION : UNE CROISSANCE QUI DOIT COMPTER SUR SON SECTEUR PRIVÉ
La Côte d’Ivoire a continué sa course vers l’émergence en 2017. Non seulement son économie
a continué de croitre à un taux parmi les plus rapides du continent africain mais la plupart des
indicateurs économiques et financiers sont au vert, avec une inflation maitrisée et une stabilité de
ses comptes extérieurs. Un élément majeur de cette bonne performance a été le rebond du secteur
de l’agriculture, aidé par des prix de vente en hausse sur les marchés internationaux et de bonnes
conditions climatiques. Le pays a su aussi gérer la chute du prix du cacao, largement compensée
par la récolte exceptionnelle, et les revendications de certains militaires et de la fonction publique
lors du premier semestre de l’année.
Le principal changement de politique économique n’est pas en cours mais à venir. L’économie
ivoirienne va devoir compter davantage sur la contribution du secteur privé pour se maintenir sur
une trajectoire de croissance accélérée et davantage inclusive. Avec l’ajustement de la politique
budgétaire qui devra prendre place lors des prochaines années, un des moteurs de croissance va
s’estomper – sauf si des gains d’efficience sont réalisés par le Gouvernement, ce qui va nécessiter
une expansion du secteur privé.
La Côte d’Ivoire n’a pas non plus réussi à attirer un afflux significatif d’investissements directs
étrangers. Si ces derniers ont augmenté en valeur absolue, leur poids dans l’économie ivoirienne est
resté pratiquement au même niveau que pendant la décennie, comptant pour environ 1,5-2% du PIB.
Ce taux est éloigné de ceux observés par l’Ethiopie voire le Mozambique. Le manque de dynamisme
du secteur privé est aussi visible dans la faible croissance des exportations qui elles-aussi demeurent
approximativement au même niveau, mesuré en pourcentage du PIB, que pendant les années de crise.
30,0
25,0
20,0
% du PIB
15,0 11,2
10,0
5,0
0,0
Central African …
Hong Kong SAR, …
Philippines
Zimbabwe
Romania
Mexico
Uruguay
Brazil
Honduras
Liberia
Malaysia
Serbia
Cote d'Ivoire
Nicaragua
Uganda
Armenia
Rwanda
Bolivia
IDA only
Low income
Croatia
Russian Federation
Madagascar
Guinea
Pakistan
Botswana
Bangladesh
Swaziland
Senegal
Paraguay
Georgia
Uzbekistan
Cameroon
Peru
Benin
Guyana
Sub-Saharan Africa
South Africa
Thailand
Sierra Leone
Iraq
Japan
Ecuador
Cabo Verde
Equatorial Guinea
Macedonia, FYR
United States
Togo
Malawi
Ghana
Nepal
Burkina Faso
Mali
Gabon
Chad
El Salvador
Congo, Rep.
Fiji
Source : Banque mondiale
30
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Le développement du secteur privé est aussi central pour assurer une meilleure distribution
des fruits de la croissance économique à l’ensemble de la population. En effet, si le taux de
pauvreté a baissé de 51 à 46,3% entre 2011 et 2015 et, par extrapolation, jusqu’à environ 44,5% en
2017, cette baisse n’a pas été aussi rapide que l’augmentation du PIB pendant cette période. A titre
de comparaison, elle a été 3 à 4 fois moins rapide que dans les pays qui ont réussi une croissance
inclusive. Le partage incomplet des fruits de la croissance en Côte d’Ivoire a sans nul doute de
nombreuses causes, mais il est certain que le manque de création d’entreprises et d’emplois de
qualité est un facteur d’explication. Tant la théorie économique que l’expérience internationale ont
montré l’existence d’une forte corrélation positive entre la création d’emplois et l’allègement de
la pauvreté ; et le secteur privé est le pourvoyeur de près de 90% des emplois dans une économie
telle que celle de la Côte d’Ivoire.
31
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
1. La croissance du revenu par habitant a été modeste en Côte d’Ivoire au cours des deux dernières décennies, en
dépit d’une embellie depuis 2012, car si les Ivoiriens ont travaillé plus, ils n’ont pas forcément travaillé mieux.
2. Cette performance se reflète également au sein des entreprises ivoiriennes qui restent aujourd’hui 3 à 4 fois
moins productives que leurs homologues dans les pays émergents.
3. Afin de rattraper son retard, tant la théorie économique que l’évidence historique suggèrent que la Côte d’Ivoire
doit non seulement améliorer son cadre de politique économique et institutionnelle mais aussi favoriser les
investissements directs étrangers ainsi que les exportations qui sont les vecteurs privilégiés pour les transferts
technologiques et de compétences.
4. Si le cadre économique et institutionnel s’améliore en Côte d’Ivoire, avec une forte progression de son score
CPIA entre 2011 et 2017, celui-ci reste encore comparativement bas et les progrès en termes d’ouverture aux
investissements étrangers et aux exportations restent timides ; ce qui nuit à son rattrapage technologique.
5. Toutefois, cette stratégie d‘ouverture doit s’accompagner par un renforcement des compétences et des réseaux
de connectivités dans le pays car eux-seuls permettent d’optimiser les synergies avec les entreprises locales et
d’engendrer des gains de productivité élargis et durables au cours du temps.
En cette fin de matinée d’octobre à Washington DC, au cœur des Assemblées annuelles du
FMI et de la Banque mondiale, une réunion a lieu rassemblant les Ministres des Finances de
la Côte d’Ivoire et du Ghana. Après les mots de bienvenue, le Ministre d’Etat du Ghana prend la
parole. De sa voix posée, il martèle qu’il est temps pour ces deux pays de se réveiller. Il poursuit
en rappelant que la Côte d’Ivoire et son pays comptent pour environ 60% des exportations de
cacao de la planète, ce qui leur rapporte des recettes annuelles estimées à environ 6 milliards de
dollars EU. Or, ce montant ne représente que 5% du chiffre d’affaires enregistré chaque année par
l’industrie chocolatière. Sa solution est simple : les pays producteurs doivent s’allier et accroître
leur part dans le revenu global, notamment en développant des activités de transformation.
Cet exemple souligne que transformation est devenu le mot magique pour ceux qui croient au
développement économique de l’Afrique.9 Ce défi se trouve au centre de la stratégie soutenue
par la Côte d’Ivoire. En effet, ce pays est riche en matières premières et agricoles mais ne parvient
qu’à récolter les miettes de ses richesses car son industrie de transformation, malgré quelques
réussites, reste embryonnaire. La question pour les décideurs économiques de la Côte d’Ivoire
n’est pas tant de déterminer si la transformation de matières naturelles peut représenter un
tremplin pour leur pays mais plutôt de s’interroger pourquoi elle n’est pas encore parvenue à le
faire, en tout cas à une échelle suffisante.
33
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Cette seconde partie de ce rapport économique est organisée de la manière suivante. Elle
commence par rappeler la situation de la Côte d’Ivoire dans sa course vers la transformation
économique, à savoir l’augmentation de son revenu par travailleur au cours du temps. Après avoir
posé le diagnostic, qui restera somme toute mitigé malgré l’embellie de ces dernières années, elle
s’interrogera sur comment accélérer cette transformation en mettant l’accent sur le rattrapage
technologique. Enfin, la troisième et dernière partie mettra l’accent sur les politiques économiques
que pourraient envisager les décideurs politiques ivoiriens pour réussir à engendrer le progrès
technologique et amener les entreprises qui opèrent dans le pays à se rapprocher de la frontière
de production qui existe dans les pays émergents et a fortiori dans les pays les plus développés de
la planète.
34
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Après une traversée du désert, cette théorie de la transformation économique est redevenue à la
mode, notamment grâce aux chercheurs de l’Université de Harvard tels que D. Rodrik.11 En fait,
elle a été surtout utilisée pour évaluer dans quelle mesure les pays africains étaient en train de réussir
ou non leur quête vers le développement économique. Leur réponse, presque unanime, a été que la
vaste majorité des pays du continent n’avait entamé que timidement leur transformation économique
car ceux-ci restaient majoritairement à vocation agricole avec un secteur industriel marginal.12 Certains
auteurs ont même invoqué une de-industrialisation,13 alors que d’autres se sont posés la question si
le processus de transformation pouvait aller directement vers le secteur des services (passant outre
l’étape d’industrialisation), à la lumière de l’expérience de pays comme l’Inde.14
En fait, ce débat sur les étapes de la transformation économique est quelque peu tronqué. En
effet, il ne faut pas perdre de vue que la question initiale était de déterminer comment un pays peut
augmenter la valeur ajoutée dans ses processus de production pour accroitre son revenu et donc
le bien-être de sa population. Si le passage d’une économie agricole à industrielle et de services
pouvait être un élément de réponse, il n’était pas la seule option comme l’illustrent les deux
exemples suivants. Premièrement, l’augmentation de la valeur ajoutée peut aussi être engendrée
par une meilleure productivité au sein d’un même secteur. Par exemple, un fermier n’a pas besoin
de devenir un ouvrier pour gagner plus, il peut aussi utiliser des engrais ou des tracteurs pour
augmenter sa récolte et donc ses revenus.15 Deuxièmement, le passage d’une occupation agricole
à un emploi industriel ou dans les services n’entraine pas forcément une augmentation du revenu.
C’est ainsi que de nombreux emplois de services, y compris en Côte d’Ivoire, sont concentrés dans
le secteur informel où les perspectives de gains sont dérisoires. Nombre de ces emplois sont plus
des occupations de survie que le résultat de choix délibérés de la part des travailleurs – qui ont été
d’ailleurs labélisés comme des « entrepreneurs réfractaires » par l’économiste du Massachussetts
Technology Institute (MIT), E. Duflo. 16
10 Pour un survol de cette littérature et des expériences historiques, cf. B. Herrendorf, R. Rogerson, Á. Valentinyi.
2013.“Growth and Structural Transformation.” NBER Working Paper No. 18996. National Bureau of Economic Research,
Cambridge, MA. http://www.nber.org/papers/w18996.
11 Voir par exemple, D. Rodrik, “The Past, Present, and Future of Economic Growth.” In Franklin Allen and others, eds.,
Towards a Better Global Economy: Policy Implications for Citizens Worldwide in the 21st Century. Oxford and New York:
Oxford University Press, 2014.
12 P. Paci, Making Transformation work for the African Poor, World Bank., 2017. De Vries et al., Structural transformation
in Africa: Static Gains, Dynamic Losses, the Journal of development Studies, 51, 2015. X. Diao, M. Mc Millan and D. Rodrik,
the recent growth boom in developing economies; a structural change perspective, NBER, N. 23132, 2017
13 D. Rodrik, Premature Deindustrialization, NBER, working paper, n. 20935, 2015.
14 E. Ghani and S.D. O Connell, Can Service be a growth escalator in low income countries, Policy Research paper, World
Bank, 2014. Pour l’Inde cf. H. Jacoby et B. Dasgupta, Changing Wage Structure in India in the Post reform Era: 1993-2011,
World Bank working paper, 7426, 2015.
15 Pour des arguments allant dans ce sens, cf. L. Christiansen et al., The (evolving) role of Agriculture in poverty reduction
– an empirical perspective, Journal of Development Economics, 96, 2011.
16 A. Banerjee et E. Duflo, Poor Economics, Public Affairs (ed), 2011.
35
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
1400,0
Namibia
Eritrea 1,60 1300,0
Zambia
Angola 1200,0
Senegal 1138,7
Mauritania 1100,0
South Africa 0,19
Cote d'Ivoire 1000,0
Togo
Congo, Rep. 900,0
Niger
Comoros 800,0
Madagascar
1990
1992
1994
1996
1998
2000
2002
2004
2006
2008
2010
2012
2014
2016
36 1400,0
1300,0
1200,0
1138,7
1100,0
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Les résultats obtenus sur la période allant de 2002 à 2014 montrent que la croissance économique
en Côte d’Ivoire a presque été exclusivement portée par une augmentation de l’emploi, alors
que la transformation économique ainsi que les gains de productivité du travail au sein des
secteurs d’activités économiques ont eu une contribution marginale (Graphique 12). En d’autres
termes, les Ivoiriens ont pu trouver du travail, mais pas forcément dans des emplois productifs qui
leur auraient permis d’accroitre leur revenu.
•• La transformation économique n’a joué qu’un faible rôle dans la croissance du revenu par
habitant en Côte d’Ivoire, comptant pour uniquement 0,5% par an. A titre de comparaison,
sa contribution a été supérieure à 2% par an tant au Burkina Faso qu’en Ethiopie et a
dépassé 2,5% dans la majorité des pays émergents de l’Asie du Sud Est.
•• La productivité du travail au sein des secteurs d’activités a diminué, avec une perte
annuelle de 1,2% entre 2002 et 2014. A nouveau, le contraste est saisissant avec les pays
émergents de l’Asie de l’Est qui ont atteint des gains de productivité supérieurs à 5% par an
en Indonésie ou jusqu’à 20% en Chine.
•• La croissance du revenu par habitant en Côte d’Ivoire a surtout été la conséquence de ce
que les Ivoiriens ont travaillé plus pendant cette période (la contribution de la hausse de
l’emploi a été égale à 1,5% par an).
•• La contribution démographique a été faible, 0,2% par an, car la fertilité élevée (autour de
5 enfants par femme) a empêché une forte augmentation de la proportion de la population
en âge de travailler dans la population totale.
Graphique 12 : Les facteurs explicatifs de la croissance du revenu par habitant en Côte d’Ivoire
et dans des pays comparateurs
8,5
0,9
6,5 2,5
1,6
4,5
% par an
0,2 0,6
2,5 2,9 5,1
0,2 2,2 2,5
1,5
0,5 0,8 1,2
0,5 0,5
-0,1 -0,6 -0,1 -0,4
-1,2
-1,5
Cote d'Ivoire Ethiopie (1990- Burkina Faso Thaillande Indonesie
(2002-14) 2010) (1998-14) (1990-2010) (1990-2010)
17 Pour une explication détaillée de cette méthodologie, cf. par exemple, http://intresources.worldbank.org/INTDTEA/
Resources/368965-42639957160/PRMED_GrowthDecompositionTool_Shapley.pdf
37
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Avant d’examiner les conséquences de ces pertes de productivité pour l’économie ivoirienne,
ces résultats, qui reflètent la tendance à relativement long terme, doivent être qualifiés sur
deux plans. Premièrement, ils captent des moyennes sectorielles qui peuvent masquer des variations
profondes selon les types d’activités, leur localisation et le type d’entreprises. Par exemple, une
étude récente de la Banque mondiale montre que la productivité agricole varie énormément
selon la saison et suivant le type de récoltes.19 Deuxièmement, comme suggéré auparavant, la
performance de l’économie ivoirienne a été fortement influencée par l’environnement politique,
et les résultats ci-dessus couvrent une période qui a été marquée par une forte instabilité. Ainsi,
il est vraisemblable que les productivités sectorielles aient fortement augmenté depuis 2012,
contribuant à la reprise économique et à la forte croissance du revenu par habitant. Ce rebond est
toutefois difficile à quantifier car il n’existe pas de statistiques précises sur le marché du travail
qui permettraient de mesurer l’évolution de l’emploi et de la productivité du travail par secteur
d’activités depuis la sortie de crise en 2011.20
Cette faiblesse de la productivité observée sur la période 2002-2014, si elle n’est pas durablement
inversée par la reprise récente, ne sera pas sans conséquences pour le futur de l’économie
ivoirienne. La baisse ou la hausse relativement faible de la productivité moyenne agricole peut
engendrer un problème de sécurité alimentaire dans l’avenir. En effet, la production agricole
18 Il est à noter que le plus faible différentiel de productivité peut aussi expliquer les mouvements plus faibles des travailleurs
d’un secteur à l’autre en suivant l’approche de Todaro-Harris qui postule que les mouvements d’emploi intersectoriel sont
influencés par les revenus espérés dans chaque secteur. Les flux migratoires s’arrêtent lorsque les différences de revenus
deviennent égales à zéro.
19 Banque mondiale, Côte d’Ivoire: Toward Better Employment and Productive Inclusion: A Jobs Diagnostic for Côte d’Ivoire
February 8, 2017.
20 Ce rebond peut être extrapolé en supposant que l’augmentation de la croissance du revenu par habitant sur la période
2012-16, équivalente à 6,5% par an, a été provoquée uniquement par la hausse de la productivité du travail qui aurait donc
augmenté à 4,3% par an contre une baisse moyenne de 1,5% par an sur l’ensemble de la période. Cette estimation suppose
que les contributions respectives de la transformation économique, de l’emploi et de la démographie sont restées les
mêmes que sur toute la période. En utilisant, une autre décomposition de la croissance, le FMI avait estimé que les gains
de productivité pourraient atteindre 4-5% par an pendant la période 2012-15 (http://www.imf.org/en/Publications/CR/
Issues/2016/12/31/Cte-dIvoire-Selected-Issues-43954 ) Si cette hausse est significative, il faudrait encore déterminer si
elle est soutenable au cours du temps et qu’elle ne reflète pas une augmentation des capacités au sein des entreprises, qui
étaient loin de fonctionner à plein régime pendant les périodes d’instabilité politique.
38
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
pourrait se réduire ou augmenter lentement (sauf si elle est compensée par une extension des
cultures) alors que l’urbanisation est projetée de continuer à augmenter à un rythme relativement
rapide. En d’autres termes, la demande pour la nourriture va s’accroitre à un rythme plus rapide
que l’offre nationale. Dans les pays émergents, les gains de productivité agricole ont dépassé les
taux d’urbanisation, aidant ces pays à subvenir aux besoins de leur population et même à devenir
des exportateurs (net) de produits alimentaires. 21
Cette analyse montre que l’économie ivoirienne n’a pas fonctionné à plein régime, à l’inverse
des pays émergents de l’Asie du Sud Est ou même un pays voisin comme le Burkina Faso. La
contribution de la transformation économique, si elle a été positive, n’a pas été à la hauteur de
celle observée dans les pays émergents.
Le véritable défi de la Côte d’Ivoire est d’accroitre la productivité au sein de son économie
dans la durée. Cela suppose une accélération de la transformation économique mais aussi des
gains importants de productivité de travail dans chacun des secteurs d’activités. L’expérience
internationale a montré que pour réussir un pays doit compter sur ces deux moteurs. Autrement,
son développement restera non seulement en deçà de son potentiel mais deviendra déséquilibré,
notamment s’il existe une grande différence entre le secteur agricole et non agricole.
Or, force est de constater que l’économie ivoirienne ne demeure guère productive, en dépit
d’une embellie au cours des dernières années, car une grande majorité de ses entreprises
reste éloignée de la frontière de production observée dans les pays les plus performants. Le
manque de transformation économique, qui aurait dû se traduire par la création de nouveaux
emplois productifs, par exemple à travers l’expansion des secteurs industriels et de services,
pourrait s’expliquer par le manque de maitrise technologique par la plupart des entreprises. Si
certains secteurs, comme ceux de la communication et de la finance, ont vu une progression
technologique au cours de ces dernières années, celle-ci reste en retrait par rapport à celle
observée dans les pays industrialisés.
21 Une des différences majeures entre les pays émergents de l’Asie de l’Est et la plupart des pays de l’Afrique sub-
saharienne est que les gains de productivité annuels dans le secteur agricole ont été en moyenne supérieurs que le taux
d’urbanisation dans les premiers pays. Par exemple, en Chine, les gains de productivité agricoles ont atteint environ 10%
par an, alors que le taux d’urbanisation a été égal à 3,9% pendant le période 1990-2010. Le résultat inverse est trouvé en
Afrique sub-saharienne, y compris en Côte d’Ivoire mais aussi au Bénin et au Burkina Faso, par exemple.
22 Voir par exemple, L. Fox and D. Filmer, Youth employment in Sub-Saharan Africa, The World Bank, 2014.
39
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
La distance de productivité entre les entreprises ivoiriennes et celles opérant dans les pays
émergents et industrialisés peut être mise en évidence en utilisant les données de l’enquête
auprès des entreprises conduite par la Banque mondiale en 2016.23 Le graphique ci-dessous
est source d’enseignement sur au moins trois plans. Premièrement, une entreprise type en Côte
d’Ivoire a une productivité du capital et du travail moindre que celle observée au Maroc, Brésil ou
Indonésie – comme cela est capté par l’éloignement de la Côte d’Ivoire par rapport à la diagonale.
Deuxièmement, les entreprises en Côte d’Ivoire n’ont pas vraiment la possibilité de substituer
un facteur de production à l’autre, comme par exemple en Indonésie, car tant la productivité du
travail que du capital sont relativement faibles. Troisièmement, la productivité de l’entreprise
standard a évolué entre 2009 et 2016, avec une relative forte progression de la productivité du
travail mais une légère baisse de la productivité du capital, confirmant donc l’amélioration qui
avait été pressentie dans la section précédente.
5
Indonesie
4,5
Productivité du capial, (% des ventes)
Nigeria
4 Kazakhstan
3,5 Maroc
3
CIV 2009 Chine Brésil
2,5
Sénégal
2
1,5 Vietnam
1 CIV 2016
0,5 Ethiopie
0
0 5000 10000 15000 20000 25000 30000
Réduire la distance de productivité entre les entreprises ivoiriennes et celles dans les pays
émergents peut être compris grâce au concept de convergence. Celui-ci explique que le
développement économique consiste en le rattrapage des pays les moins développés par rapport aux
pays riches. Selon D. Rodrik, la convergence peut être conditionnelle, à savoir qu’elle dépend des
politiques et institutions en vigueur dans chaque pays.24 Si un pays possède de meilleures politiques
et institutions, les entreprises vont opérer plus efficacement, grâce à une meilleure utilisation et
allocation des facteurs de production, et le pays va rattraper son retard de productivité.
23 Source : https://www.enterprisesurveys.org/data.
24 Cf. D. Rodrik, Has Sustained Growth Decoupled from Industrialization, in How economies grow? D. Leipziger and S. Yusuf
(eds), the Growth Dialogue, 2014
40
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
La convergence peut aussi être non-conditionnelle dans le sens qu’elle peut exister
indépendamment des conditions de politiques économiques et institutionnelles dans le pays.
Par exemple, une usine d’aluminium ou un port pourrait être en principe aussi efficient en Côte
d’Ivoire qu’en Chine si la technologie en vigueur est partagée par l’opérateur. Cette idée est
séduisante car elle permet d’accélérer le rattrapage de productivité en plus des changements
qui seraient induits par une amélioration de l’environnement économique du pays. Elle a suscité
l’intérêt de plusieurs chercheurs qui ont montré son existence dans plusieurs secteurs d’activités.
Le résultat le plus connu est sans nul doute celui obtenu par D. Rodrik qui a montré que la vitesse de
convergence non-conditionnelle a été relativement rapide dans le secteur manufacturier au cours
des dernières décennies.25 De son côté, E. Ghani a porté l’attention sur le secteur des services
où une convergence semble exister dans des activités modernes telles que la communication, la
finance ou le transport.26 Enfin, I. Diwan a procédé à la même analyse pour le secteur agricole pour
conclure qu’une convergence non-conditionnelle existait pour certains produits, en particulier
d’exportations, même si pour leur grande majorité cette vitesse de convergence demeurait
relativement faible.27 Ce rapide survol met en évidence que la convergence non-conditionnelle
peut exister dans tous les secteurs mais pas nécessairement pour toutes les activités au sein de
ces secteurs.
La vitesse de convergence d’un pays peut donc être conditionnelle et non conditionnelle.
La convergence conditionnelle est largement déterminée par les conditions économiques,
institutionnelles et structurelles d’un pays comme cela a été mis en évidence par de nombreuses
études empiriques portant à la fois sur les pays avancés au cours du XXème siècle et les pays
émergents au cours des dernières décennies.28 Ces études ont mis en évidence les contributions
positives des politiques budgétaires ainsi que de la gouvernance et des progrès en termes de
développement humain et en infrastructures. Ce résultat, somme toute très intuitif, peut être
raisonnablement capté par le score de chaque pays dans l’exercice de l’évaluation des politiques
et institutions nationales (CPIA) mené chaque année par la Banque mondiale (voir encadré pour
une explication). Il suggère que plus le score CPIA est élevé, meilleur est le cadre de politiques
économiques et institutionnelles ce qui devrait accroitre la vitesse de convergence du pays.
25 D. Rodrik, Unconditional convergence in manufacturing, The Quarterly Journal of Economics, 126, 2012.
26 E. Ghani, op.cit.
27 I. Diwan et al. (2016), Looking like an Industry: Supporting Commercial Agriculture in Africa, CID working Paper 266,
Harvard University, 2013.
28 Le point de départ de cette littérature empirique est certainement R. Barro, Economic growth in a cross section of
countries, Quarterly Journal of Economics, 106, 1991. Il a été suivi par de nombreux travaux. Pour un résumé pour les
pays avancés, cf. M. Rivas, Testing the Convergence Hypothesis for OECD countries : A Reppraisal, OECD discussion paper,
novembre 2016. Pour les pays en développement, cf. F. Bourguignon, The Globalization of Inequality, Princeton University
Press, 2015 ou pour un blog non-technique, H. Kharas, Let’s Talk Convergence, 2014.
41
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
L’Evaluation des Politiques et Institutions Nationales (plus connue sous son acronyme anglais « CPIA ») est
un outil de diagnostic développé et utilisé par la Banque mondiale depuis 1979. C’est un exercice annuel
qui permet de mesurer les progrès accomplis par les pays en matière de la qualité de leurs politiques et
de leurs institutions.
Le CPIA couvre 16 critères réunis en quatre composantes représentant les différentes dimensions
institutionnelles et politiques d’un pays: (i) gestion économique, (ii) commerce, environnement des
affaires et secteur financier ; (iii) politiques structurelles, politiques de lutte contre l’exclusion sociale et
de promotion de l’équité, et (iv) gestion et institutions du secteur public. Pour chaque critère, l’échelle
de notation des pays va de 1 (faible) à 6 (fort). Les notes du CPIA sont utilisées à plusieurs fins par la
Banque mondiale, y compris pour définir l’allocation des ressources de l’Association International de
Développement (IDA) et identifier les Etats Fragiles.
Le score CPIA incorpore donc plusieurs dimensions de la qualité des politiques économiques, structurelles,
humaines, environnementales et institutionnelles d’un pays. Dans ce sens, il semble parfaitement indiqué
pour capter les facteurs influençant la vitesse de convergence conditionnelle telle que définie par Rodrik.
Non seulement la vitesse de convergence d’un pays apparait influencée par son CPIA dans une série de
tests économétriques sur un échantillon de 53 pays pendant la période 2000-2016 (les résultats sont
disponibles sur requête) mais le score CPIA est aussi fortement corrélé à d’autres indicateurs mesurant la
qualité et l’efficience des politiques publiques. Par exemple, il existe une forte corrélation positive entre
le CPIA et l’indice de développement humain des Nations-Unies ainsi que l’indice de la Banque mondiale
mesurant la qualité des institutions publiques. Cette corrélation positive entre le CPIA et différents
indicateurs internationaux est encore plus visible au niveau de ses composantes ; ainsi la deuxième
composante reflète les indicateurs de compétitivité du WEF ou de Doing Business de la Banque mondiale ;
la troisième composante est alignée sur l’indice de développement des Nations Unies, et la quatrième
composante est proche de l’indice de gouvernance de la Banque mondiale. Les liens entre le score CPIA
et plusieurs indices internationaux sont illustrés pour la Côte d’Ivoire dans le graphique ci-dessous.
140
130
120
110
100
90
2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016
CPIA
Indice de Governance
Indice de compétitivité
Indice de developpement humain
Source : Banque mondiale
42
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Toutefois, et cela mérite d’être rappelé, cette même littérature souligne que le rôle positif
associé aux IDE et aux exportations n’est pas automatique pour le pays-hôte car il va aussi
dépendre du niveau de son capital humain et la qualité de son réseau logistique. Afin de faire
fructifier ses transferts technologiques et de compétences, le pays doit offrir une main-d’œuvre
qualifiée et un accès aux marchés par une connectivité physique et/ou virtuelle adéquate. Ces
effets croisés ont été mis en évidence par de nombreux chercheurs. Par exemple, la propension
des entreprises multinationales à transférer des technologies et à tisser des relations en amont
et en aval avec les entreprises domestiques est fortement liée aux compétences au sein de
ces dernières.31 Une des meilleures illustrations de ce mécanisme de diffusion est celle de la
technologie utilisée pour les transferts d’argent à travers la téléphonie mobile (M-Pesa), qui a
été importée au Kenya par Vodafone pour Safaricom et Vodacom puis fructifiée par le savoir-faire
local et la flexibilité des régulations pour finalement se propager dans presque la totalité du
continent.32 Plus globalement, il existe une double causalité entre la qualité de la main d’œuvre
et le progrès technologique dans la mesure où il faut des travailleurs qualifiés pour utiliser des
machines sophistiquées mais aussi des machines pour aider à promouvoir les compétences des
travailleurs.33 Le rôle primordial du réseau logistique a été souligné depuis longtemps car il facilite
non seulement les échanges de biens, de services et de personnes mais aussi d’idées.
La prépondérance du rôle joué par la connectivité aux marchés et par la qualité du marché
du travail est d’ailleurs confirmée par les entreprises multinationales elles-mêmes. Après la
stabilité du cadre politique, légal et macroéconomique du pays hôte, ces deux facteurs sont
considérés comme les plus importants ou très importants par 80% et 73% d’entre elles dans leur
décision de localisation (Graphique 14).
29 Pour une revue, cf. The World Bank, Leapfrogging: the key to Africa’s development? From constraints to investment
opportunities, 2017.
30 Pour une étude empirique prouvant l’importance de ces deux canaux de transmission dans les pays industrialisés
pendant le XX eme siècle, cf. D. Comina, B. Hobijn, Cross-country technology adoption : making the theories face the facts,
Journal of Monetary Economics, 2003. Pour les pays africains pendant les deux dernières décennies, cf. S. Aboagye and F.
Turkson, An empirical investigation of per capital income convergence hypothesis in Sub-Saharan Africa, CSAE Conference,.
Oxford, 2014.
31 H. Gorg and E. Strobl, Multinational companies and Productivity spillovers: A meta-Analysis, Economic Journal, 2001.
32 Pour plus de détails sur cet exemple, cf. The World Bank, Leapfrogging: the key to Africa’s development? From
constraints to investment opportunities, 2017.
33 D. Acemoglu et F. Zillibotti, Productivity Differences, Quarterly Journal of Economics, 2001.,
43
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Ces résultats sont d’abord une bonne nouvelle car ils confirment les orientations de politiques
économiques poursuivies par le Gouvernement ivoirien au cours des dernières années, notamment
dans le Plan National de Développement. En effet, l’amélioration du cadre de politiques économique et
institutionnelle a été un des éléments centraux de la politique suivie par les autorités ivoiriennes comme
cela a été rappelé dans la première partie de ce rapport. Cet effort peut être raisonnablement capté
par le score du CPIA qui a progressé de 2,6 en 2010 à 3,4 en 2017. L’attrait des IDE et la promotion de
l’exportation sont aussi des choix stratégiques de la Côte d’Ivoire.
Cet enthousiasme doit cependant être tempéré à la lumière de la comparaison présentée dans
le tableau ci-dessous. Elle montre que la vitesse de convergence de la Côte d‘Ivoire a été moindre
que celle de la moyenne des pays de notre échantillon et largement inférieure, par exemple, à celle
du Burkina Faso. Cette faible vitesse s’explique par le score relativement moyen du CPIA et par le
manque d’ouverture aux IDE et cela même si la propension à exporter des entreprises ivoiriennes a été
relativement forte. Les entreprises ivoiriennes reportent une ouverture vers l’extérieur, avec une plus
grande diversité de produits et de marchés que leurs concurrentes dans les autres pays de l’UEMOA mais
encore éloignée de celle observée dans les pays les plus performants de notre échantillon.
44
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Cette comparaison révèle non seulement que les IDE et les exportations ont été des canaux
relativement peu utilisés par la Côte d’Ivoire mais aussi que leurs retombées positives ont
été sans nul doute faibles pour l’économie locale en raison du manque de capital humain et
du sous-développement du réseau logistique dans le pays. Ces deux faiblesses expliquent la
présence d’un cercle vicieux où, d’une part, le pays n’est pas capable d’attirer des investissements
étrangers et, d’autre part, de créer suffisamment de synergies avec le tissu économique local
quand ces investissements prennent place. De même, les entreprises exportatrices souffrent du
manque de connectivité qui rendent plus difficile leur ouverture et l’échange de biens ainsi que
de technologies.
Vitesse de
CPIA Exportations Indice de Indice de
convergence IDE (en %
(Score de 1 (en % du développement développement
du revenu par du PIB)
à 6) PIB) logistique humain
habitant
La ligne de conduite à tenir pour la Côte d’Ivoire semble relativement claire. Elle doit continuer
à améliorer son cadre économique et institutionnel car le lien entre le score CPIA et la vitesse
de convergence est non seulement positif mais fort. Toutefois, il faut reconnaitre que les progrès
vont prendre du temps car si l’impact positif de l’amélioration du cadre sur la productivité des
entreprises et du travail est indéniable, il n’est pas instantané.
Parce que la question est surtout comment accélérer la transition du pays vers l’émergence,
l’action doit aussi se concentrer sur la convergence non conditionnelle, à savoir celle qui
prend place à travers une ouverture aux investissements directs étrangers et aux exportations
car ces canaux favorisent les transferts technologiques indispensables au développement
durable des entreprises. Pour réussir, cette ouverture doit s’accompagner par une amélioration
des compétences et du réseau logistique. Or, malgré certains efforts, la Côte d’Ivoire n’a pas
encore réussi à attirer davantage d’investissements étrangers et à promouvoir une augmentation
significative de ses exportations depuis le retour de la stabilité politique en 2012. Ses indicateurs
de développement humain et de logistique sont aussi restés autour des scores moyens obtenus
pendant la période 2000-16.
Cette stratégie a été utilisée avec succès par la plupart des pays qui ont réussi leur émergence
et, plus récemment, par deux pays africains : le Rwanda et l’Ethiopie. L’exemple de l’Ethiopie
est intéressant car le recours aux IDE a accéléré la mise à niveau des entreprises locales grâce à
leurs interactions avec les entreprises multinationales. Ainsi, non seulement ces investissements
ont créé des emplois directs et indirects mais aussi près d’un quart des entreprises locales localisées
45
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
dans les mêmes districts que les entreprises multinationales déclarent bénéficier de programmes
de formation et de licences d’utilisations.34 Dans le même temps, l’attractivité de l’Ethiopie pour
les multinationales s’est surtout construite autour d’un coût unitaire de la main d’œuvre attractif
et des opportunités de réaliser des économies d’échelle grâce à un marché domestique urbain en
rapide expansion et un accès facilité aux marchés globaux à travers le port de Djibouti.
Ce cercle vertueux entre l’ouverture vers les marchés extérieurs, les transferts technologiques
et le développement des compétences et du réseau logistique local peut s’illustrer dans le
graphique ci-dessous. Il montre que si les investissements étrangers et les exportations peuvent
apporter des transferts de compétences et de technologies, ceux-ci dépendent en grande partie
de la qualité du stock de capital humain et de la connectivité. Bref, l’ouverture de la Côte d’Ivoire
doit s’accompagner par une amélioration de ces deux dernières variables.
Renforcer la connectivite
physique et virtuelle
La stratégie pourrait se dessiner autour de trois axes qui sont brièvement discutés ci-dessous.
L’ambition d’aider les entreprises nationales à devenir plus compétitives est une longue
tradition parmi les décideurs de politiques économiques dans le monde. Elle a suscité
des approches divergentes, souvent extrêmes, qui se sont soldées par des échecs comme les
politiques protectionnistes ou celles qui ont brutalement exposé leurs entreprises à la concurrence
internationale sans ou avec peu de préparation.
L’expérience historique suggère qu’un pays doit suivre une approche séquentielle pour réussir,
en comptant d’abord sur ses avantages comparatifs pour ensuite tisser des liens avec les
opérateurs sur les marchés internationaux. Cette approche doit s’effectuer en respectant un
34 M. Mc Millan, Strategies for raising labor productivity in Sub-Saharan Africa, March 22, 2017
46
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
certain degré de concurrence qui elle-seule permet de préserver une dynamique d’innovation
technologique dans la durée.35 Sans concurrence il y a de fortes chances que les entreprises
oublient de s’adapter et de progresser. La concurrence peut être établie dans le marché entre des
entreprises qui opèrent dans le même secteur (comme par des compagnies téléphoniques ou des
banques) mais aussi entre marchés (comme par exemple entre les compagnies téléphoniques et les
banques pour les transferts d’argent). Cette logique a prévalu dans la plupart de pays émergents
et devrait être, dans la mesure du possible, poursuivie par le Gouvernement de la Côte d’Ivoire.
Sur la base de la théorie économique, les secteurs les plus prometteurs pour une ouverture
à la concurrence internationale peuvent être identifiés. La première théorie est celle de
Bela Balassa (les « avantages comparatifs révélés »)36 qui préconise qu’un pays doit pousser ce
qu’il sait déjà faire, alors que la deuxième approche, intitulée « product space »,37 reprend le
même principe mais en argumentant que le pays peut aussi chercher à encourager des activités
proches de celles qu’il sait déjà faire. L’application de ces deux théories à la Côte d’Ivoire met en
évidence une cinquantaine de produits, en particulier dans l’agriculture, à laquelle se rajoutent
des produits dérivés ou associés tels que la transformation des produits agricoles ou la production
de produits manufacturés à simple technologie et avec une forte demande sur le marché local et
régional (tableau 7). Cette liste est uniquement indicative car elle devrait être complétée par
des études sectorielles qui examinent non seulement les avantages de la Côte d’Ivoire mais aussi
les conditions et perspectives sur les marchés globaux. Elle est aussi incomplète car elle omet un
certain nombre de potentialités dans le secteur des services comme le transport et la logistique,
des centres d’excellences en éducation ou encore de cliniques spécialisées.38
Note : Ces produits sont dérivés de l’approche des avantages révélés et celle de l’espace produits.
Pour la première approche le lecteur peut trouver son application à www.wits.worldbank.org et pour
la seconde sur le site https://atlas.media.mit.edu/en/profile/country/civ/
35 Cf. P. Aghion et al., “Industrial Policy and Competition,” NBER Working Paper No. 18048, 2012.
36 B. Balassa, Revealed comparative advantage revisited: an analysis of relative export shares on the industrial countries,
1953-71, The Manchester School, 45, 1977
37 C.A. Hidalgo, B. Klinger, A.L. Barabási, R Hausmann, The product space conditions the development of nations,
Science 317 (5837), 482. Pour son application à la Côte d‘Ivoire, cf. https://atlas.media.mit.edu/en/profile/country/civ/
38 Une approche complémentaire serait d’identifier les industries où la Côte d’Ivoire possède un avantage comparatif sur
le marché régional car la concurrence y serait certainement moindre que sur les marchés globaux.
47
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Une fois que les secteurs avec les plus fortes potentialités ont été identifiés, la stratégie
devient celle qui a été proposée, à savoir une ouverture vers l’extérieur en favorisant les
investissements directs étrangers et les exportations. Presque toutes les technologies qui
peuvent façonner l’Afrique de demain sont la propriété d’entreprises multinationales ou opérant
dans les pays industrialisés : panneaux solaires, machines portables pour diagnostiques de santé,
drones, fibres optiques, équipements WI-FI, et les imprimantes 3D.39 L’importation de ces nouvelles
technologies puis leur adaptation au contexte africain avec leur diffusion au sein de partenariats
avec des entreprises locales devrait guider la stratégie du Gouvernement. Or, aujourd’hui, les
transferts technologiques semblent relativement rares en Côte d’Ivoire puisque seulement 3,4% des
entreprises déclarent utiliser une technologie qui a été transmise par une entreprise étrangère,
alors que ce pourcentage atteint 15% sur l’ensemble de l’Afrique sub-saharienne ou même 23% en
Malaisie ou au Maroc. En plus, les entreprises ivoiriennes dépensent en recherche et innovation
presque 3 fois moins que leurs homologues dans le reste de l’Afrique sub-saharienne (6,8 contre
17,8%).40
39 Pour une revue des technologies qui pourraient façonner l’Afrique dans un proche futur, cf. The Economist, Novembre
9, 2017
40 Toutes ces données proviennent de l’enquête auprès des entreprises collectées par la Banque mondiale à travers de
nombreux pays, y compris la Côte d’Ivoire. Pour plus de détails, cf. https://www.enterprisesurveys.org/data.
48
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
La Côte d’Ivoire est le premier producteur mondial de cacao, représentant environ 40% de la production
mondiale. Il est cependant moins connu que le pays compte pour 20% de la première transformation des
fèves de cacao en pâte (et liqueur) industrielle, juste derrière la Hollande (graphiques).
Source : IFC
Les autorités ont l’ambition de conforter cette deuxième place, voire de dépasser la Hollande, avec une
augmentation des capacités de transformation dans le pays. Toutefois, cette première transformation
n’amène que peu d’emplois et de valeur ajoutée (seulement 8%).
Le véritable enjeu pour la Côte d’Ivoire serait d’accroitre ses capacités au niveau de la deuxième
transformation -de la pâte au chocolat- qui capte environ 35% de la valeur ajoutée le long de la chaine
de valeur et qui a le potentiel de créer de nombreux emplois. Or, les barrières à l’entrée de ce marché
lucratif sont nombreuses. Elles se trouvent d’abord dans le manque de compétitivité de l’industrie
ivoirienne qui souffre du coût élevé de l’électricité, du manque de productivité de la main d’œuvre et
de la sécurisation foncière. Ensuite, le chocolat est un produit qui n’est guère facile à transporter ce
qui est problématique en raison de l’éloignement des principaux marchés de consommateurs. Enfin, ce
marché est dominé par quelques entreprises multinationales (cf. graphique) qui sont non seulement
capables de réaliser des économies d’échelle mais qui détiennent aussi le savoir-faire.
Source : IFC
49
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Cet exercice de conviction auprès des investisseurs étrangers se doit d’être au centre de
la stratégie de promotion de la Côte d’Ivoire, qui peut mettre en avant ses atouts comme
la disponibilité de matières premières agricoles et certains avantages comparatifs dans les
secteurs pré-identifiés dans l’encadré ci-dessus. Cette stratégie doit aussi remédier aux faiblesses
de l’économie ivoirienne car celle-ci se doit d’offrir une main d’œuvre qualifiée et un réseau de
connectivité performant qui étaient apparus comme deux des facteurs les plus déterminants dans la
décision de localisations des investisseurs internationaux. En reprenant l’exemple du chocolat, les
fabricants pourraient envisager à se délocaliser uniquement s’ils peuvent trouver des compétences
locales capables d’assurer une transformation de qualité ainsi que des facilités de distribution car
les centres principaux de consommation sont situés relativement loin de la Côte d’Ivoire. En plus,
les synergies avec le tissu industriel local ne pourront se greffer durablement que s’il existe un
certain degré de compétences et d’échange dans le pays.
Si l’innovation technique est le plus souvent importée, son adaptation dépend en grande partie
des compétences de la part des travailleurs locaux. De plus en plus, de nouvelles starts up
émergent en Afrique, notamment dans le secteur de la communication, bâtissant sur les idées d’une
nouvelle génération de jeunes Africains – celle qui fréquente l’Université et échange sur le Web, y
compris des expatriés qui s’intéressent à leur continent. La Côte d’Ivoire ne fait pas exception à
cette mutation et de nombreux projets sont en train de modifier le paysage économique du pays
avec, par exemple, l’apparition du e-commerce (Jumia), de l’internet sans fil (Lifi Led), les taxi
Uber locaux (Africab), et des plateformes d’information et d’outils de gestion.
41 Source : Résultats des enquêtes PASEC. Moins de la moitié des élèves ivoiriens atteignaient le niveau minimal de
compétences en français en 2014, et seulement 25% parvenaient à ce minima en mathématiques.
42 Banque mondiale, Note technique sur la qualité de l’enseignement supérieur en Côte d’Ivoire, version préliminaire,
août 2017.
43 Banque mondiale, Situation économique en Côte d’Ivoire, Le défi des compétences : pourquoi la Côte d’Ivoire doit
réformer son système éducatif ? quatrième édition, janvier 2017.
50
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Gouvernement encourage le montage d’une Université virtuelle, qui pourrait améliorer la qualité
de l’enseignement et réduire le problème de sur-occupation des amphithéâtres. En mars 2016, la
Fondation Jeunesse Numérique, a été créée avec le but de former des étudiants Bac+2 aux bases
des outils de gestion, de financement et de communication.
A plus court terme, les autorités peuvent accélérer la formation de compétences à travers les
investisseurs étrangers ou les exportations. L’argument est que le développement de compétences
locales est gagnant-gagnant tant pour les entreprises étrangères ou exportatrices que pour la main
d’œuvre locale. Les entreprises peuvent accroitre leur productivité avec une main d’œuvre plus
qualifiée (et certainement moins coûteuse que les expatriés) alors que les travailleurs locaux vont
augmenter leurs revenus ou avoir des opportunités supplémentaires d’utiliser leurs compétences
dans leurs propres activités ou au sein d’autres entreprises.44 Ces mécanismes de partage sont sans
nul doute un des secrets derrière la réussite de pays comme la Malaisie ou la Tunisie qui ont mis en
avant les programmes de formation de leurs travailleurs par les opérateurs privés, en particulier
étrangers car ceux-ci peuvent amener de nouvelles connaissances et des méthodes de travail plus
modernes. 45 Les partenariats entre les entreprises exportatrices et leurs intermédiaires sont aussi
utiles pour mieux comprendre les attentes en termes de qualité tant de la part des entreprises que
des consommateurs (cf. encadré pour un exemple d’un tel programme en Côte d’Ivoire).
Partenariat entre une entreprise multinationale et les travailleurs locaux dans le secteur du cacao
Le projet Vision pour le changement (V4C) initié par l’entreprise MARS en coopération avec le
Gouvernement et des agences ivoiriennes, fournit un appui aux (jeunes) entrepreneurs agricoles pour
mettre en place des services agricoles dans le secteur du cacao. Les entrepreneurs reçoivent une
formation dans les techniques modernes agricoles ainsi que des compétences entrepreneuriales, et
bénéficient d’un financement pour démarrer leur entreprise dans les zones rurales locales (projet pilote
dans la région de Soubré). Le projet vise à atteindre 150 000 agriculteurs d’ici 2020, qui bénéficieront
d’un meilleur accès aux intrants et aux techniques agricoles, afin d’accroitre la productivité des
agriculteurs locaux
44 Pour une évidence quantitative du rôle joué par la formation continue dans les entreprises, cf. L. Dearden, H. Reed,
et J. Van Reenen, The Impact of training on Productivity and Wages: Evidence from British Panel Data, Oxford Bulletin of
Economics and Statistics, N. 68, 2006.
45 Il peut être montré que parce que les coûts d’entrée sont relativement élevés pour les entreprises étrangères en
comparaison des entreprises locales, elles doivent être initialement plus productives et payer des salaires plus élevés pour
attirer des travailleurs qualifiés. A terme, il existe des externalités pour l’économie locale car ces travailleurs peuvent
transmettre leur savoir-faire et leurs connaissances technologiques et de gestion à d’autres entreprises ou les appuyer dans
leurs initiatives de s’établir à leur propre compte. Pour une approche théorique et évidence empirique de ces effets dans
le cas du Danemark, cf. Nikolaj Malchow-Møller, James R. Markusen, and Bertel Schjerning, Foreign Firms, Domestic Wages,
NBER Working paper, N. 13001, March 2007.
51
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Les Ivoiriens de l’extérieur peuvent aussi aider au développement des compétences. Il ne s’agit
pas de freiner le départ des travailleurs vers les pays industrialisés, car ils peuvent ainsi accumuler
des connaissances et des compétences qu’ils ne pourraient acquérir dans le pays, mais de s’assurer
qu’en retour ils participent au développement de leur pays. Cette participation peut se faire en
finançant des programmes de formation ou de recherche (par exemple des concours) mais aussi en
revenant investir au pays ou en promotionnant des partenariats avec des entrepreneurs locaux. Ce
message a été bien compris par plusieurs pays qui ont aussi une forte diaspora à l’étranger dont la
Côte d’Ivoire pourrait s’inspirer. A l’exemple de Taiwan, les autorités ivoiriennes pourraient mettre
en place une politique incitative qui chercherait à inciter ces jeunes diplômés ou professionnels à
revenir. En parallèle, elles peuvent développer des stratégies d’information à travers des réseaux
et des campagnes ciblées dans les pays-hôtes, notamment dans les centres d’enseignements
supérieurs et techniques. Cet effort a commencé, mais il a encore besoin d’être renforcé et surtout
coordonné car aujourd’hui il répond plus à des initiatives ponctuelles portées par des Ministères
individuels qu’à une stratégie d’ensemble et concertée du Gouvernement ivoirien.
3. Optimiser la connectivité
Un élément essentiel pour attirer les investisseurs étrangers ainsi que faciliter l’essor des
exportations est la fluidité des échanges. Une bonne connectivité physique et virtuelle permet
de réduire les distances entre les entreprises et leurs fournisseurs ainsi que les consommateurs.
Ce rapprochement peut aussi aider à générer des économies d’échelle qui sont tant importantes
pour la compétitivité des activités de transformation et de services car leurs coûts fixes sont
compensés uniquement si les entreprises ont la perspective d’un volume d’affaires suffisant.46
Enfin, la proximité favorise les échanges d’idées et de technologie.
Comme pour le développement humain, mais pas avec autant d’acuité, la Côte d’Ivoire ne jouit
pas encore pleinement d’une bonne connectivité, en dépit de son accès à l’océan et aux marchés
globaux. Son classement dans l’indice de performance logistique de la Banque mondiale rappelle que le
pays n’était qu’au 95ème rang mondial, derrière le Ghana (88 ème) et encore plus loin de pays comme
le Vietnam (64ème) et l’Afrique du Sud (20ème). Si la Côte d’Ivoire apparait relativement performante
en ce qui concerne son administration douanière, elle souffre d’insuffisance en infrastructures et dans
les délais pour acheminer des marchandises en provenance et en direction de l’extérieur.
Graphique 17 : Une logistique qui n’est pas encore au niveau des espérances, 2016
140 128
120
105 101
95 98
100 93
88 86 89 85 87 89
82
Rang mondial
75
80 70 70
64 64 62
56
60 50
40
20 21 23 22 24
18 17
20
0
Indice Douanes Infrastructure Transactions Competences Suivi Delais
inenationales logistiques
Source : https://lpi.worldbank.org/
46 Le rôle des économies d’échelle pour la localisation des entreprises et leur compétitivité a une longue tradition dans la
littérature économique. Voir par exemple, J. Bain, Economies of Scale, Concentration, and the Condition of Entry in Twenty
Manufacturing Industries, The American Economic Review, Vol. 44, 1954
52
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Pour la Côte d’Ivoire, trois efforts simultanés pourraient améliorer la connectivité et donc la
compétitivité de ses entreprises. Les deux premiers reposent sur l’idée que la distance entre les
marchés peut être réduite par une baisse des coûts de transport physique et virtuel. Le troisième
effort est conceptuellement différent car il met en avant que les marchés peuvent se rapprocher
par le déplacement des personnes et des activités économiques vers les centres urbains. Ces trois
efforts sont passés brièvement en revue ci-dessous.
L’essentiel des échanges commerciaux ivoiriens sont concentrés dans le port d’Abidjan tant en volume
qu’en valeur. Le terminal pétrolier d’Abidjan et les autres ports de l’agglomération ont représenté
85% des importations de marchandises en valeur, au premier rang desquelles le pétrole et ses produits
dérivés, suivis par les machines et les équipements puis les produits plastiques et pharmaceutiques. En
volume, les premiers produits sont le clinker et le riz. Côté exportations, le principal poste frontière
d’Abidjan arrive en tête des expéditions, suivi par le terminal pétrolier de Vridi et le port de transit :
ensemble, ils ont représenté 73% des exportations en valeur, devant le port de San-Pédro, avec 20% des
marchandises en valeur (cacao notamment). Les deux principaux produits d’exportation sont le cacao
et le pétrole.
Les coûts pour l’export et l’import de conteneurs sont dans la moyenne des ports dans l’Afrique
subsaharienne mais deux à trois fois au-dessus de ceux des ports en Asie. Comparé à son rival au Ghana,
le coût à Abidjan est 59% plus élevé à l’export (environ 1 400 dollars) et 44% plus élevé à l’import d’un
conteneur. Même si ce niveau de coûts ne pénalise pas le port d’Abidjan par rapport à ses rivaux en Afrique
de l’Ouest il se répercute néanmoins sur la compétitivité de l’économie ivoirienne plus globalement.
Parce que la modernisation des infrastructures de transports, y compris le port, a déjà fait
l’objet de multiples études au cours des dernières années,47 le propos est plutôt ici de rappeler
le poids démesuré des barrières qui trouvent leur origine dans les politiques économiques et le
comportement des acteurs. Il est révélateur que 45% des entreprises ivoiriennes interrogées par
l’enquête de la Banque mondiale en 2016 considéraient les régulations douanières et commerciales
comme un obstacle majeur à leurs activités – contre uniquement 26% en moyenne en Afrique sub-
saharienne. En outre, le Port d’Abidjan souffre du manque de concurrence dans l’exploitation
de ses terminaux ainsi que le niveau élevé d’intégration verticale de certains opérateurs-
concurrentiels, y compris dans les activités de transit et d’entrée et de sortie du port. Plusieurs
observateurs soulignent que les plus importants délais dans le port d’Abidjan ne se trouvent pas
dans le chargement et le déchargement des marchandises, le nombre de mouvement par quai est
environ de 35 par heure ce qui est meilleur que Mombassa mais environ 20% inférieur que Djibouti,
53
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
mais plutôt dans l’entrée et surtout la sortie du port.48 Un effort visant à promouvoir une meilleure
fluidité, notamment à travers une concurrence accrue et de meilleurs contrôles (et de sanctions en
cas de non-respect des règles) au sein des transporteurs est certainement une priorité.
Comme le reste de l’Afrique, la Côte d’Ivoire est en train de vivre sa révolution technologique
depuis l’arrivée de nouveaux outils de communication. L’usage du téléphone portable est
maintenant bien établi sur presque tout l’ensemble du territoire et à quelques exceptions, la
couverture en fibre optique sera finalisée dans un proche avenir. Or, malgré des progrès récents, les
entreprises ivoiriennes restent en retrait dans l’usage de ces nouvelles technologies car uniquement
18% d’entre elles utilisent leur propre site web contre 33% dans le reste de l’Afrique. Si la moitié
des entreprises ivoiriennes ont recours à des messages électroniques pour inter réagir avec leurs
fournisseurs/clients, cette proportion dépasse 60% dans le reste de l’Afrique et même 70% dans le
monde
Les barrières à l’usage des outils TIC par les entreprises sont nombreuses, en particulier pour
les PME, mais la principale est certainement liée au rapport qualité-prix de ces services.
Parce qu’une comparaison internationale peut être trompeuse car le prix peut varier suivant la
taille du marché et le développement de l’infrastructure, il suffit de souligner que le prix moyen
d’une minute de conversation téléphonique sur un portable est 3 fois plus cher en Côte d’Ivoire
qu’au Ghana et que le prix d’un abonnement à l’internet y est environ 1,5 fois plus cher, sans
doute à cause du manque de concurrence.49 Au-delà de réduire les coûts d’usage, les opérateurs
économiques sont encouragés à utiliser davantage d‘outils virtuels s’ils peuvent en tirer des
bénéfices supplémentaires. Le marché des applications est en train d’exploser en Afrique, et les
téléphones mobiles servent de plus en plus de comptes en banque, d’achats en ligne, d’outils
pédagogiques, de GPS, etc. Toutes ces nouvelles utilisations offrent des perspectives nouvelles
pour de nombreux opérateurs en Côte d’Ivoire car elles réduisent non seulement leurs coûts de
transport mais aussi d’information et de transactions.
Enfin pour conclure, l’urbanisation de la Côte d’Ivoire permet de rapprocher le marché des
producteurs et distributeurs ce qui permet aussi de favoriser les économies d’échelle ainsi que
d’encourager les transferts technologiques et de connaissance. Ce n’est pas un hasard que les
centres technologiques se trouvent presque toujours dans les centres urbains ou à leur proximité. A
nouveau, l’objet de ce rapport n’est pas d’approfondir ce sujet, qui a déjà fait l’objet de plusieurs
études y compris de la Banque mondiale, mais surtout de rappeler que si la Côte d’Ivoire est
déjà majoritairement urbaine (avec environ 55% de sa population localisée dans les villes), ce
phénomène n’est pas encore efficient d’un point de vue économique.50 Au risque de schématiser, il
y a deux directions que les autorités ivoiriennes pourraient poursuivre pour rendre leur villes plus
efficientes. La première est d’augmenter, comme argumenté par un rapport récent de la Banque
mondiale, la densité économique au sein d’Abidjan car le nombre d’entreprises « formelles » par
habitant y est environ 10 à 20 fois inférieur à celui observé dans une ville asiatique.51 Cet effort
devra se réaliser tout en réduisant les risques de congestion. La deuxième direction, déjà en
marche en Côte d’Ivoire, est de développer les villes secondaires qui apparaissent de plus en
plus comme des charnières indispensables entre le monde rural et urbain.52 Dans cette vision, le
développement de villes comme San Pedro et Bouaké devient une priorité.
48 Source : Port Performance Indicators, SSATP, Africa Port Policy Program, 2017.
49 Source : http://www.combien-coute.net/
50 Voir par exemple, Banque mondiale, M. Fall et S. Coulibaly, l’Urbanisation diversifiée : le cas de la Côte d’Ivoire, 2016.
51 Banque mondiale, Opening the Gates to the World, 2016.
52 Pour des arguments allant dans ce sens, cf. L. Christiansen, J. de Weerdt, R. Kanbur, Where to create Jobs to reduce
poverty ; Cities or Town ? World Bank Policy Research Working Paper, 2017.
54
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
ANNEXES STATISTIQUES
55
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Secteur extérieur
Balance commerciale 11.4 9.6 10.9 9.7 9.2 6.9
Exportations de marchandises (f.o.b) 45.2 38.5 36.7 35.8 29.8 27.9
Importations de marchandises (f.o.b) 33.8 29.0 25.7 26.1 20.6 21.0
Compte de services (Net) -7.3 -7.3 -6.1 -6.2 -6.6 -6.7
Autres (Net) -5.4 -4.3 -3.4 -4.1 -3.7 -3.1
Solde du Compte Courant 0.3 0.3 1.4 -0.6 -1.1 -2.7
Memo
PIB (prix courant en milliards de FCFA) 13677.0 15446.0 17461.0 19595.0 21562.0 23436.0
PIB (prix constant 2009 en milliards de FCFA) 12335.5 13479.3 14661.6 15961.4 17291.9 18606.0
Taux de change (FCFA:US$-moyenne annuelle) 510.0 494.0 494.0 591.0 593.0
Population (million) 22.0 22.5 23.1 23.7 24.3 25.0
Source: Fonds Monetaire International, Banque mondiale, Institut National de Statistique
56
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Facteurs de production
PIB au coût des facteurs 89.8 77.2 80.1 79.8 80.4 80.6
Agriculture 22.2 21.0 21.1 22.7 20.9 20.1
Industrie 24.0 26.0 27.4 25.8 27.5 27.8
Services 31.0 30.3 31.6 31.3 31.9 32.7
Droits et Taxes Net 10.2 10.2 10.5 10.9 10.7 10.7
Facteurs de production
PIB au coût des facteurs 76.8 78.1 80.9 79.5 80.0 80.4
Agriculture 19.8 18.8 20.1 19.0 17.3 17.6
Industrie 21.1 24.0 23.0 22.9 24.4 24.2
Services 36.0 35.3 37.8 37.6 38.3 38.7
Droits et Taxes Net 10.9 10.3 10.2 11.7 11.6 11.5
Sources: Institut National de Statistique, FMI et Banque mondiale
57
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
58
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
59
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Comptes de Capital et d'Opérations Financières -1.5 2.4 1.1 2.8 0.0 4.3
Compte du Capital 0.0 0.0 0.8 0.8 0.6 0.5
Compte des Opérations Financières -1.5 2.4 0.3 2.0 -0.6 3.8
Investissements Directs Etrangers 1.2 1.3 1.2 1.5 1.7 1.8
Investissements de portefeuille (net) 0.5 0.6 2.6 3.0 0.3 2.9
Autres investissements (net) -3.2 0.6 -3.5 -2.5 -2.5 -0.9
Officiel, net -1.9 0.5 1.3 0.7 -0.1 1.2
Prêts projets 0.4 1.4 1.4 1.7 1.2 2.5
Autres prêts 0.0 0.0 -1.3 -1.2 -1.3 -1.3
Amortissement 2.3 0.9 0.0 0.0 -0.1 -0.1
Non-officiel, net -1.3 0.1 -4.8 -3.2 -2.4 -2.1
Erreurs et omissions 0.0 0.0 -0.3 -0.2 0.0 0.0
Solde Global -2.7 0.4 2.3 2.0 -1.1 1.4
Source: Fonds Monétaire International et Banque mondiale
60
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
61
Situation économique en Côte d’Ivoire - Janvier 2018
Résultats et rentabilité
Rendement net d'impôt des actifs moyens (ROA) 0.5 1.2
Rendement net d'impôt des fonds propres moyens (ROE) 7.1 17.4
Traitements et salaires/revenus bancaire net 29.8 28.9
2017 : les indicateurs de solidité financière de 2017
sont celle de Juin 2017
Liquidités
Actifs liquides/total des actifs 35.3 48.7 49.8 52.0 50.8 52.9
Actifs liquides/total des depôts 46.1 65.5 67.5 71.0 73.8 76.3
Total des crédits/total des depôts 77.6 80.0 72.8 76.1 81.7 77.9
Source: Fonds Monétaire International
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