Vanina Vanini
Vanina Vanini
Vanina Vanini
Stendhal
Livret pédagogique
Établi par Isabelle de LISLE,
agrégée de Lettres modernes,
professeur en collège et en lycée.
HACHETTE
Éducation
Conception graphique
Couverture et intérieur : Médiamax
Mise en page
Médiamax
Illustration
Harvey Stevenson
RÉPONSES AU X Q U E S T I O N S 4
I re p a r t i e . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
IIe partie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
IIIe partie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
IVe partie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
Ve partie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
PISTES D E R E C H E R C H E S D O C U M E N TA I R E S 35
BIBLIOGRAPHIE C O M P L É M E N TA I R E 37
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RÉPONSES AUX QUESTIONS
I R E PA R T I E ( p p. 7 à 1 1 )
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I re p a r t i e
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RÉPONSES AUX QUESTIONS
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I re p a r t i e
◆ É TUDIER UN INCIPIT
13. L’incipit de Vanina Vanini répond aux questions que le lecteur est en droit
de se poser au début de toute fiction.
– « Où ? » : l’histoire se déroule à Rome dans un milieu social élevé.
– « Quand ? » : la première phrase inscrit la fiction dans une décennie (« 182* »,
l. 1) et l’anecdote du jeune carbonaro pose un cadre historique.
– « Qui ? » : le personnage éponyme apparaît dès que le cadre est posé et son
apparition fait se tourner la tête des invités. Bien que l’héroïne ne soit
désignée que par l’expression « une jeune fille » (l. 11), le lecteur a compris
qu’il s’agissait du personnage principal. On la découvre singulière et passion-
née et l’on devine que la nouvelle racontera une histoire d’amour. Le jeune
carbonaro est présenté comme un homme d’action, faisant preuve d’une
« audace romanesque » (l. 43).
14. Les hyperboles, lors de l’évocation du bal ou lors de la description
fragmentaire de Vanina, signalent la fiction. Mais cette fiction s’inscrit dans un
cadre historique défini. Il s’agit tout d’abord du contexte italien des carbo-
nari mais aussi, en arrière-plan, d’une représentation de l’aristocratie et des
valeurs révolutionnaires (l’allusion au Mariage de Figaro). C’est pourquoi l’on
peut dire que la nouvelle appartient au genre de la chronique. On rappellera
que Vanina Vanini est souvent publié dans un recueil posthume intitulé
Chroniques italiennes.
15. L’histoire du jeune carbonaro sera déterminante dans la nouvelle puis-
qu’il s’agit du point de départ de la passion fatale de Vanina. Pourtant,
Stendhal la qualifie d’« anecdote » (l. 48). C’est qu’ici l’auteur adopte le point
de vue des invités du bal ; le substantif « anecdote » est d’ailleurs le COD
d’un verbe introduit par un indéfini qui représente le collectif du bal (« on
racontait », l. 48). Pour les nobles invités du duc de B***, cette histoire est
secondaire car loin de leurs préoccupations. En revanche, Vanina, en opposi-
tion à son milieu et attirée par le romanesque, accorde de l’importance à cette
« anecdote ». On peut aussi sentir le regard critique de Stendhal qui applique
un terme léger à une histoire dans laquelle des vies sont en jeu.
En outre, cette « anecdote » constitue un second élément déclencheur dans le
récit, le premier étant l’apparition de Vanina.
16. L’incipit, qui croise discours narratif, descriptif et explicatif, a recours au
dialogue et les deux répliques prononcées se détachent nettement. « Le jeune
7
RÉPONSES AUX QUESTIONS
homme le plus brillant de Rome » (l. 35), « ébloui des grâces et des succès de Vanina »
(l. 49) est « presque fou d’amour » (l. 51). Le « qui donc pourrait vous plaire ? »
(l. 52) laisse présager les efforts du jeune homme pour gagner la main de
Vanina. La réponse de la jeune fille a également une fonction d’annonce : le
lecteur, en effet, suppose que Vanina va aimer le jeune carbonaro. L’incipit de
la nouvelle – c’est la loi des courts récits – a une fonction programmatique.
Stendhal, jouant sur les habitudes du lecteur, annonce ce qui va se passer de
façon implicite.
◆ L IRE L’ IMAGE
17. Le luxe se devine tout d’abord dans le décor même de la salle où se
déroule le bal. L’arrière-plan est constitué de lustres et de rideaux luxueux.
Le bal réunit de nombreux danseurs et le nombre est une indication quant à
l’importance de l’événement mondain. Les robes des femmes, les coiffures et
les bijoux sont aussi, bien entendu, des indices à retenir.
18. Stendhal situe la première scène de sa nouvelle chez le duc de B***,
à l’occasion d’un bal. « Le concours était immense » (l. 7) : la scène filmée par
Luchino Visconti exprime aussi le luxe par le biais du nombre de danseurs. La
beauté des femmes et de leurs toilettes est mise en avant dans la description
de Stendhal comme dans le film. Le bal sert de cadre à une intrigue amou-
reuse qui n’évoluera pas comme on pourrait s’y attendre, mais se finira tout
de même par un mariage : celui de Vanina Vanini et de Livio Savelli. Dans la
nouvelle de Stendhal, la jeune fille est remarquée pour la couleur ébène de ses
cheveux et elle est désignée comme la reine du bal. Le prince Livio Savelli est
présenté comme « le jeune homme le plus brillant de Rome » (l. 35). Dans le film
Le Guépard, dans une démarche qui rappelle celle de Stendhal, le cadrage place
au centre le couple formé par Claudia Cardinale et Alain Delon.
◆ À VOS PLUMES
19. On attend des élèves qu’ils prennent en compte les contraintes du sujet :
situation d’énonciation, éléments donnés dans la nouvelle. On valorisera les
copies qui sauront exprimer le regard aristocratique (un des invités du bal)
sur l’aventure du carbonaro et qui donneront des détails pertinents éclairant
les pistes esquissées par Stendhal (« à l’aide d’un déguisement », l. 42-43,
« audace romanesque », l. 43…).
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IIe partie
20. Il s’agit d’un sujet d’imitation qui suppose que la composition de l’inci-
pit de Vanina Vanini ait été soigneusement observée. On veillera à ce que les
élèves aient bien noté les caractéristiques de la chronique et l’on valorisera
les copies qui donneront une image intéressante de la société de leur temps.
I I E PA R T I E ( p p. 1 5 à 2 5 )
9
RÉPONSES AUX QUESTIONS
10
IIe partie
de baïonnette, perdant déjà mes forces, je monte dans une maison » : proposition
principale ;
– « dont la porte était ouverte » : proposition subordonnée relative ;
– « j’entends les soldats » : proposition principale ;
– « qui montent après moi » : proposition subordonnée relative ;
– « je saute dans un jardin » : proposition indépendante ;
– « je tombe à quelques pas d’une femme » : proposition principale ;
– « qui se promenait » : proposition subordonnée relative.
12. S’il existe des liens de subordination dans la dernière phrase, on remarque
cependant que les trois principales et l’indépendante ne sont pas cordonnées
entre elles. Cette asyndète donne un rythme rapide à l’action ; le présent de
narration qui est employé à ce moment-là concourt à donner à la scène
racontée son rythme enlevé.
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RÉPONSES AUX QUESTIONS
◆ L IRE L’ IMAGE
18. Tiziano Vecellio ou Vecelli, dit Titien, est un peintre italien du XVIe siècle
(1490-1576).
19. Les cheveux de la jeune fille sont laissés libres et le geste de la main met
en valeur la chevelure. L’inclinaison de la tête et le regard rêveur contribuent
à donner un air alangui au personnage. L’éclairage met en lumière le buste
qui est en partie dénudé et l’on note que le vêtement a glissé, dégageant ainsi
une épaule. Les lignes courbes dominent, qu’il s’agisse du visage, des épaules,
du bras ou de la robe.
12
IIIe partie
20. L’Homme au gant est un homme du XVIe siècle et son costume ne saurait
être celui de Pietro. Mais l’on peut imaginer que le personnage de Stendhal
ressemble au jeune homme de Titien en raison de la finesse de ses traits. Il ne
faut pas oublier que le carbonaro parvient, au début de l’histoire, à se faire
passer pour une jeune fille…
◆ À VOS PLUMES !
21. Le sujet demande aux élèves de composer un monologue intérieur qui
prenne en compte les données du texte : l’aveu de Missirilli, la différence de
condition sociale. Le monologue doit montrer un personnage amoureux et
conscient de l’impossibilité de son amour. On valorisera les copies qui sau-
ront alterner réflexion et évocation de Vanina.
22. Le monologue délibératif suppose que le personnage soit déchiré entre
deux tentations : l’exigence du rang social et la passion. Il s’agira, d’une part,
d’exprimer cette contradiction douloureuse et tragique, et, d’autre part,
d’envisager une attitude à adopter : ne plus voir le carbonaro, s’adresser à son
père, voir le carbonaro sans accepter d’entendre son éventuel aveu, avouer son
amour et y renoncer…
23. On attend que les élèves réinvestissent les connaissances acquises en com-
posant eux-mêmes une situation tragique. On valorisera les copies qui auront
su exprimer de différentes manières (dialogue, monologue intérieur…) le
caractère insoluble de la contradiction et la fatalité qui pèse sur le destin du
personnage.
I I I E PA R T I E ( p p. 2 9 à 4 4 )
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RÉPONSES AUX QUESTIONS
e) À Rome, Vanina pense que si Pietro devait choisir entre elle et sa patrie,
cette dernière (sa patrie) aurait sa préférence.
f) En Romagne, les carbonari se réunissent dans un ermitage au milieu des
bois.
g) Missirilli est élu chef d’une vente.
h) Alors que la conspiration se prépare, Vanina propose à Missirilli de passer
vingt-quatre heures au château de San Nicolò.
i) En utilisant les services d’une de ses anciennes femmes de chambre, Vanina
dénonce la vente au cardinal-légat.
j) Dans le mot qu’il laisse à Vanina, Pietro annonce qu’il va se constituer
prisonnier et demande à Vanina de le venger.
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IIIe partie
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RÉPONSES AUX QUESTIONS
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IIIe partie
◆ L IRE L’ IMAGE
14. Deux caractéristiques importantes sont communes aux histoires de
Roméo et Juliette et de Vanina Vanini : l’amour passion et l’interdiction. En
effet, dans les deux cas, les jeunes gens s’aiment de manière absolue, ce qui
pourra aller jusqu’à la mort dans le cas des amants de Vérone et jusqu’à la
trahison chez Stendhal. L’amour passion est, dans la tradition littéraire, voué
à l’échec : dans les deux histoires, un interdit pèse, la haine qui divise les deux
familles ou la distance sociale.
15. La gravure exprime l’interdiction qui pèse sur l’amour des deux jeunes
gens. En effet, Roméo n’est pas autorisé à approcher Juliette et il a dû
emprunter une échelle de corde pour parvenir jusqu’à son balcon. Son atti-
tude (assis sur la balustrade) rappelle la distance qui sépare les deux amants,
comme celle qui sépare Vanina de Pietro.
◆ À VOS PLUMES !
16. On attend des élèves qu’ils tiennent compte des contraintes formelles du
genre épistolaire mais aussi des données du récit de Stendhal : un personnage,
à ce moment-là, déchiré entre sa cause patriotique et son amour pour Vanina.
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RÉPONSES AUX QUESTIONS
17. Ce sujet présente plusieurs contraintes, tant sur le plan de la forme que
sur celui du contenu.
En ce qui concerne le contenu, on demande aux élèves de croiser discours
narratif et discours explicatif (analyse des événements et des sentiments).
En ce qui concerne la forme, le récit est un compte rendu oral destiné à
Vanina. Il doit être inséré dans le cadre d’un dialogue. Le langage familier est
proscrit, mais on valorisera les devoirs qui auront su exprimer l’oralité du
discours et la condition sociale du narrateur.
I V E PA R T I E ( p p. 4 8 à 6 0 )
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IVe partie
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RÉPONSES AUX QUESTIONS
encourager ainsi Missirilli. Cette femme peut aussi être Vanina elle-même.
On sait que le déguisement est un procédé courant chez Stendhal, à com-
mencer par le choix d’un pseudonyme. Missirilli se déguise en jeune fille au
début du récit,Vanina se fait passer pour un valet afin d’entrer dans le bureau
du ministre de la police ; elle peut tout aussi bien se déguiser en « vieille femme »
pour approcher son amant sans être reconnue. Un garçon en fille, une
aristocrate en valet, une jeune fille en vieille femme : le jeu des contraires
accrédite notre hypothèse concernant l’identité de la femme au bouquet de
violettes. Mais il ne s’agit surtout pas de donner une réponse définitive, de
traduire, en somme.
Ce qui est caractéristique de l’écriture stendhalienne, ce sont justement ces
touches légères, ces pistes esquissées, ce retrait du narrateur qui laisse au lec-
teur un rôle important. La part de l’implicite, déjà relevée dans la question
précédente, est également une des caractéristiques de la nouvelle.
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IVe partie
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RÉPONSES AUX QUESTIONS
protégé de mon amie, je vous donnerai un baiser » (l. 785 à 787). Et plus loin :
« Notre marché est fait ! s’écria Vanina, et la preuve, c’est qu’en voici la récompense,
dit-elle en l’embrassant » (l. 812 à 814).
Mais si monseigneur Catanzara accepte d’aider Vanina, ce n’est pas seulement
pour des raisons sociales et familiales ou parce qu’il succombe au charme de
la jeune fille, c’est aussi parce qu’il y trouve son intérêt : « D’ailleurs, je suis
jeune encore quoique peut-être je vous paraisse bien vieux, et je puis vivre à une
époque où le sang versé aujourd’hui fera tache » (l. 816 à 819). Le gouverneur
montre ici qu’il agit dans son propre intérêt ; en effet, si l’Histoire donne
raison à la cause défendue par les carbonari, il ne souhaite pas être de ceux
qui ont fait couler le sang des partisans de la liberté italienne.
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IVe partie
M. l’abbé Cari, c’est parce qu’elle sait qu’il se mettra à son service si néces-
saire. Elle le fait nommer « aumônier du château Saint-Ange » (l. 703), ce qui
lui permettra de protéger Missirilli d’un éventuel empoisonnement lorsqu’il
sera emprisonné dans la forteresse : « Dès la veille, Missirilli avait reçu de l’abbé
Cari, son confesseur, quelques petits paquets de biscuits de mer, avec l’avis de ne pas
toucher aux aliments fournis par l’État » (l. 833 à 835). Et c’est encore l’abbé
Cari qui obtiendra du geôlier l’autorisation de laisser quelques instants seuls
Vanina et Missirilli.
12. Certes, Vanina est un personnage calculateur et réfléchi. Elle est capable
de développer toute une stratégie pour parvenir à ses fins en utilisant notam-
ment son pouvoir de séduction. Mais cette attitude froide est entièrement au
service de la passion qui la gouverne et c’est ce que l’on comprend à
plusieurs reprises. D’abord, lorsqu’elle découvre simplement le nom de
Missirilli sur une feuille, elle est « sur le point de se trouver mal » (l. 651).
Ensuite, elle a du mal à accepter que ses efforts pour sauver son amant ne
soient pas immédiatement suivis d’effet : « La lenteur des événements la tuait »
(l. 677-678). Et un peu plus loin, lorsqu’il est question d’une tentative roma-
nesque d’évasion, on lit : « Quelque déraisonnable que fût cette idée, elle était sur
le point de la mettre à exécution, lorsque le hasard eut pitié d’elle » (l. 681 à 683).
Dans cette dernière phrase, le mot « hasard » suggère toute la souffrance de
la jeune fille en proie à sa passion.
◆ L IRE L’ IMAGE
13. La profondeur de champ, donnée par l’ouverture lumineuse sur une
seconde pièce, donne de l’ampleur à l’espace. Le nombre de personnes
réunies autour de la table s’ajoute à cette impression pour nous montrer qu’il
s’agit d’un dîner dans une famille aisée. Le mobilier et les rideaux dénotent
ce luxe ainsi que les costumes des personnages et les mets présentés sur
la table en abondance.
14. Les personnages représentés sourient et semblent passer une soirée
agréable. Les plaisirs sont ceux de la table, au premier plan, mais aussi de la
conversation et de la galanterie, comme semblent l’indiquer les regards croi-
sés des hommes et des femmes ainsi que l’inclinaison sensuelle des visages
féminins.
23
RÉPONSES AUX QUESTIONS
◆ À VOS PLUMES !
15. Le sujet proposé suppose, d’une part, que l’élève prenne en compte les
données du texte, notamment le caractère autoritaire et calculateur de la
jeune fille, et, d’autre part, qu’il sache construire une scène en alternant récit
et paroles rapportées. On valorisera les copies qui auront su varier les types
de discours rapportés et bâtir une réelle progression.
16. Cet autre sujet est un exercice de transposition. La passion amoureuse
devient ici passion pour un sport. Il s’agit de mettre en relief le double aspect
de la personnalité du personnage principal en s’appuyant sur ce qui a été vu
à propos de Vanina Vanini. Comme chez Stendhal, un point de vue neutre
est attendu.
17. Cet exercice, à mener conjointement avec le sujet précédent, permet de
souligner l’importance du point de vue dans un récit. Il invite aussi les élèves
à adopter une attitude critique vis-à-vis d’un comportement (la passion et
la manipulation) dangereux.
V E PA R T I E ( p p. 6 4 à 6 9 )
24
Ve partie
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RÉPONSES AUX QUESTIONS
26
Ve partie
qu’elle est venue avec des diamants et des limes destinés à permettre à son
amant de s’évader. À plusieurs reprises, au cours de la nouvelle, elle offre de
l’argent à Missirilli et semble de cette manière acheter le jeune homme. Lors
de la scène finale, l’attitude de Vanina n’a pas changé : c’est par orgueil qu’elle
tend sa fortune à son amant et il est important de noter qu’à ce moment-là
l’argent se substitue à la parole (« sans répondre à Missirilli, elle les lui offrit »,
l. 945-946), comme si le pouvoir que lui conférait sa fortune la dispensait de
communiquer d’une autre manière.
◆ É TUDIER LE DÉNOUEMENT
13. Stendhal ne donne pas explicitement les raisons qui poussent Vanina à
raconter à Pietro sa dénonciation. Au début du passage, lorsque Vanina se
demande si son amant pourra lui pardonner, on peut penser qu’elle a
l’intention de lui révéler la vérité. Un peu plus loin, Vanina est incapable de
parler : « évidemment Vanina ne pouvait parler : elle l’essayait enfin » (l. 925-926) ;
on se demande si cette incapacité ne porte pas aussi sur le projet de révéla-
tion. Mais à la fin du passage, c’est sous la colère que Vanina agit ; il s’agit
pour elle de montrer la puissance de sa passion : « Non, reprit Vanina furieuse,
je veux que tu saches ce que j’ai fait, guidée par l’amour que j’avais pour toi » (l. 953-
954).
14. L’accueil glacé de Missirilli qui témoigne de la disparition de la passion
du jeune homme (l’amour est évoqué au passé) l’amène, après le récit de la
dénonciation, à rejeter violemment la jeune fille. Il cherche à l’assommer et
jette au loin les limes et les diamants qu’elle venait de lui offrir pour per-
mettre son évasion. La répétition de l’apostrophe « monstre » (l. 962 et 966)
ainsi que la proposition finale « je ne veux rien te devoir » (l. 966) expriment
ce refus inéluctable de Missirilli. « Il s’éloigna rapidement » (l. 968) : cette pro-
position se charge d’une signification qui dépasse le simple fait de quitter la
chapelle ; le lecteur comprend que le jeune carbonaro quitte définitivement
Vanina Vanini.
15. Le récit de la dénonciation précipite le dénouement, mais le lecteur avait
compris dès l’arrivée du jeune homme dans la chapelle que l’histoire
d’amour était terminée. D’abord,Vanina est frappée par l’accueil glacé que lui
réserve Missirilli et elle comprend qu’il ne s’agit ni des chaînes ni du
mauvais traitement subi en prison. Les paroles du jeune homme sont claires :
« oublions les illusions qui jadis nous ont égarés » (l. 893-894), « si j’aimais quelque
27
RÉPONSES AUX QUESTIONS
chose sur la terre, ce serait vous, Vanina » (l. 921-922), « je suis mort pour vous :
adieu » (l. 951-952). L’amour est soit considéré comme une illusion, soit
comme une hypothèse irréalisable ; il est rejeté dans le passé et le présent
s’exprime en terme de mort.
16. Dans le dernier paragraphe, on relève deux temps différents, le passé
simple et le présent. Le passé simple est le temps de la narration ; le présent
est, ici, un temps de l’énonciation ; on a l’impression que le temps de la
nouvelle rejoint le temps de l’écriture, ce qui garantit la vérité historique (le
journal) du récit.
17. Dans la deuxième phrase du dernier paragraphe, le « et » (l. 969) qui suit
le point-virgule voile une ellipse temporelle qui marque l’anéantissement de
Vanina. La jeune fille, qui se résumait à sa passion pour Missirilli, n’est plus
rien, et l’effacement que constitue l’ellipse le suggère. Ce saut marque aussi
le retour au temps de l’écriture ; cette esquisse d’épilogue est fréquente dans
la nouvelle ; on la retrouve par exemple dans La Vénus d’Ille de Mérimée avec
l’emploi d’un passé composé (« ont gelé », dans la dernière phrase de cette
œuvre) et d’une phrase également brève et chargée d’implicite.
18. Nature des propositions utilisées dans le dernier paragraphe de la
nouvelle (l. 969-970).
– « Vanina resta anéantie » : proposition indépendante ;
– « Elle revint à Rome » : proposition indépendante ;
– « et le journal annonce » : proposition principale ;
– « qu’elle vient d’épouser le prince don Livio Savelli » : proposition subordonnée
conjonctive complétive.
La syntaxe est simple ; la parataxe est suivie par une coordination lourde de
sous-entendus (le « et » revêt presque une valeur consécutive) et, comme
souvent, l’implicite caractérise le style de Stendhal.
19. L’impression de neutralité qui garantit la vérité du récit repose sur
l’absence de termes modalisateurs. Stendhal ne nous donne pas son opinion
sur l’issue des événements et renonce au point de vue omniscient, ce qui
souligne l’anéantissement de Vanina : la jeune fille est tellement anéantie qu’il
est inutile d’entrer dans sa conscience.
Par ailleurs, l’emploi du mot « journal » (l. 969) et le fait que Stendhal donne
au jeune Livio son titre complet (« le prince don Livio Savelli », l. 970) accen-
tuent cette impression de distanciation et de neutralité finales. La mise à
distance repose aussi sur le recours au discours indirect à la toute fin du récit.
28
Ve partie
20. Le jeu sur l’implicite sollicite le lecteur et le texte lui-même induit une
question personnelle après plusieurs questions d’analyse objective. On attirera
l’attention des élèves sur le fait que la question est double : elle porte sur
l’histoire d’amour mais aussi sur la manière d’écrire de Stendhal. Plusieurs
pistes de réflexion pourront être approfondies :
– l’importance de l’implicite ; Stendhal fait appel au lecteur (voir questions 16
à 19) ;
– l’impression de vérité et le naturel ;
– une histoire d’amour qui se termine mal et dont l’échec était inscrit dès
le départ ;
– l’anéantissement de Vanina : le quotidien (le mariage arrangé avec Livio
Savelli) peut remplacer la mort.
◆ L IRE L’ IMAGE
21. De nombreux éléments, dans cette eau-forte de Piranèse, expriment la
souffrance des prisonniers. En premier lieu, le ciel apparaît comme un loin-
tain lumineux et inaccessible : c’est l’ombre qui domine en prison. En second
lieu, l’aspect dégagé du ciel contraste également avec l’impression de confu-
sion qui provient notamment de l’abondance de détails et de personnages.
Différentes tortures sont évoquées : roue, cordes, dents acérées… Les prison-
niers sont très nombreux et la promiscuité est un aspect de leur souffrance ;
leurs bras tendus expriment d’ailleurs cette douleur.
◆ À VOS PLUMES !
22. Le sujet suppose que l’élève réinvestisse ce qu’il a observé dans le texte
en matière de technique narrative et qu’il modifie l’enchaînement des évé-
nements qui aboutissent au dénouement. Le pardon de Missirilli n’entraîne
pas nécessairement un dénouement heureux. On peut aussi considérer, dans
la tradition de l’amour passion, que l’histoire ne peut s’achever par un
mariage comme dans les contes. Mais il est aussi possible de développer le
rêve de Vanina : s’enfuir hors d’Italie avec Missirilli.
23. « Vanina resta anéantie. Elle revint à Rome » (l. 969). Ayant perdu tout espoir
de regagner l’amour de Missirilli qui était sa seule raison de vivre,Vanina n’est
plus rien. Le monologue doit bien évidemment prendre en compte cette
réduction à néant de la jeune fille, et sans doute la réflexion porte-t-elle sur
29
RÉPONSES AUX QUESTIONS
R E TO U R S U R L’ Œ U V R E
1. Les propositions exactes sont : c) – d) – e) – f) – h) – i) – j) – l) – n) – q) –
s) – t).
2. Dans l’ordre : a) don Asdrubale Vanini – b) don Livio Savelli – c) comtesse
Vitteleschi – d) abbé Cari – e) monsignor Catanzara.
3. Dans l’ordre : a) – h) – c) – i) – d) – f) – e) – g) – j).
4. Dans l’ordre chronologique, les réponses sont : a2 – c4 – d1 – b5 – e3.
30
PROPOSITION
DE SÉQUENCE DIDACTIQUE
31
PROPOSITION DE SÉQUENCE DIDACTIQUE
32
E X P LO I TAT I O N
DU GROUPEMENT DE TEXTES
33
E X P LO I TAT I O N DU GROUPEMENT DE TEXTES
annoncée avant même de naître. C’est le cas dans Vanina Vanini lors du bal et
du récit de l’anecdote de l’évasion du carbonaro. Le lecteur devine que la
jeune fille va aimer ce carbonaro en fuite.
• La présence de la société : le bal est un cadre courant pour la scène de pre-
mière rencontre, comme si l’amour naissait sous les yeux des autres et que la
société – ses règles et ses interdits – était une donnée importante de l’intrigue
amoureuse.
• Le triangle : il est fréquent que la passion soit posée dès le début comme
interdite car la femme aimée est mariée. L’amour se décline souvent à trois ;
c’est le cas, par exemple, dans La Princesse de Clèves ou dans Vanina Vanini.
Et c’est aussi ce qui fait l’originalité de la scène du bal dans le roman de
Marguerite Duras, Le Ravissement de Lol V. Stein (1964).
34
PISTESDE RECHERCHES
COMPLÉMENTAIRES
◆ U NE PERSPECTIVE HISTORIQUE
Souvent classée dans les Chroniques italiennes malgré sa date d’écriture (1829),
Vanina Vanini est un récit qui s’inscrit dans l’histoire de son époque. On
pourra inviter les élèves, dans une perspective interdisciplinaire, à mener des
recherches historiques.
• La légende napoléonienne
Il est possible, toujours dans une perspective décloisonnée de l’enseignement
au collège, de mener une recherche historique sur la période de l’Empire.
En association avec le professeur d’arts plastiques, il est intéressant d’étudier
les représentations de Napoléon dans la peinture et dans la sculpture. On peut
se tourner aussi vers la littérature.
• Le romantisme
Le mal-être de Vanina qui s’ennuie et son aspiration à un idéal sont deux traits
de la génération romantique. On pourra proposer aux élèves des recherches
sur le mal du siècle et sur l’aspiration à l’idéal dans les œuvres romantiques.
On se tournera vers la littérature, bien entendu, mais aussi vers la peinture.
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PISTES DE RECHERCHES COMPLÉMENTAIRES
36
BIBLIOGRAPHIE
COMPLÉMENTAIRE
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