Logement Social
Logement Social
Logement Social
000DH
et 250.000DH
L’absence d’une offre quantitativement suffisante et élastique pour répondre aux demandes
diversifiées en logement ont eu pour conséquence le déséquilibre du marché immobilier au
Maroc. Cette situation a donné lieu au développement de l’habitat insalubre, accentuant le lourd
déficit en logement que connait le secteur, auquel s’ajoutent les besoins additionnels, dont le
rythme de production de logements n’arrivait pas à satisfaire.
L'acuité des contraintes d'une part, et l'ampleur des besoins en logements d'autre part, ont amené
les pouvoirs publics à définir de nouvelles orientations, dont notamment le développement de
dispositifs dédiés au logement social (140.000DH et 250.000DH). Ces dispositifs s’inscrivent
dans le cadre de la stratégie du département chargé de l’habitat (DCH) qui vise la réduction du
déficit à 400.000 logements d’ici 2020.
En fait, les interventions de l’Etat dans le secteur de l’habitat ne sont pas récentes. Depuis plus de
vingt ans, des programmes et des dispositifs d’action ont apparu dans le champ des politiques
gouvernementales dédiées au logement, accentuant ainsi son caractère social.
Tout d’abord de façon directe, au début des années quatre-vingt à travers la production par les
établissements publics sous tutelle du département chargé de l’habitat des lots économiques sur
le foncier public, pour la promotion de l’auto-construction. Ensuite de façon indirecte, avec la loi
des finances de 1999-2000 qui a pour la première fois évoqué le concept de logement social,
comme étant un logement subventionné1.
Depuis lors, des dispositifs se sont succédés, et ont connu au fil des années des aménagements
marquant l’inflexion de l’action publique en faveur de la promotion de l’offre de logement social.
Ainsi, un dispositif de logement social pour la promotion d’un produit à140.000 DH TTC a été
mis en place sur une période allant de 2008 à 2012. Par la suite, en 2010 un autre dispositif à
250.000DH HT a été instauré à l’horizon 2020, l’accent a été davantage mis sur l’augmentation
de la production de logements sociaux selon des caractéristiques techniques spécifiques. Des
ajustements et des aménagements ont été par la suite opérés dans différentes lois des finances en
termes de spécifications techniques, de conditions d’exonérations fiscales, etc.
Pendant la dernière décennie, ces deux dispositifs demeurent le fer de lance de l’action publique
en matière de promotion de logement en faveur des populations à revenu faible et irrégulier. Ils
constituent l’un des instruments d’adaptation de l’offre aux besoins de cette catégorie. En effet,
en adoptant des incitations fiscales en faveur des promoteurs parallèlement à d’autres mesures,
les stratégies publiques visaient à stimuler la production pour disposer d’une offre massive de
logement à coût économiquement accessible. Conjointement, d’autres mesures
d’accompagnement ont porté sur la solvabilité des ménages destinataires, dont notamment
l’instauration des fonds de garantie et l’exonération de la TVA en faveur des acquéreurs du
produit à 250.000DH HT.
Dans ce cadre, la Cour des comptes a réalisé une mission de contrôle visant l’évaluation de la
conception et la mise en place des deux dispositifs présentés ci-dessus.
1
selon l’article 19 de la loi des finances 1999-2000 tel qu’il a été modifié et complété conformément aux dispositions
de l’article 16 bis de la LF 2001 relatif à la construction de logements sociaux, ce logement social est définit par l’article
8, 13° de la loi n° 30-85 relative à la TVA, comme toute unité d’habitation dont la superficie couverte et la valeur
immobilière totale n’excédant pas, respectivement, 100 m² et 200.000 DH
1
I. Observations et recommandations de la Cour des comptes
Les principales observations et recommandations de la Cour des comptes concernant la
conception et la mise en place de ces dispositifs de logement social sont présentés comme suit :
A. Pertinence et cohérence des dispositifs des dispositifs de logement
social
➢ Logement social : un produit qui n’est défini que par des dispositions fiscales
Depuis l’émergence du logement social, les politiques gouvernementales l’ont souvent conçu
dans le cadre des dispositions fiscales comme étant un produit devant bénéficier des avantages
fiscaux, et ce en fonction de sa valeur immobilière, de son prix de vente et/ou de ses surfaces.
Cette façon d’appréhender le logement social (LS) dans le cadre de lois des finances conjuguée à
l’absence d’une réglementation précise et des dispositions juridiques adaptées devant permettre
de définir de manière précise le logement social, est source d’ambiguïtés, mais aussi peut
engendrer à long terme des problèmes d’offre en ce logement.
En fait, le caractère conjoncturel a toujours marqué l’état dans lequel ont souvent évolué les
dispositifs dédiés au LS. En effet, depuis son lancement dans le cadre de l’article 19 de la loi des
finances 1999-2000, plusieurs réajustements et changements se sont succédés, dans le cadre des
différentes lois de finances. Des changements qui ont touché ses différents aspects (la nature des
incitations fiscales, le nombre d’unités à produire ou les superficies, etc.). Ces changements
perpétuels ont donné lieu au fil des années à des dispositifs instables et souvent incohérents.
En effet, l’article 19 de la loi de finances 1999/2000 qui a instauré le premier dispositif en matière
de logement social a connu en 2008 un réaménagement dans le sens de la réduction des
exonérations fiscales réorientant ainsi l’effort des pouvoirs publics vers le logement à 140.000
DH créé par la loi des finances 2008. Cette approche a rapidement montré ses limites puisque les
années 2008 et 2009 ont connu le désengagement des promoteurs immobiliers de la production
des logements sociaux à 200.000 DH et, de ce fait, peu de logements sociaux ont été produits
durant ces deux années dans ce segment2.
La réponse à l’insuffisance de l’offre constatée est venue à travers la mise en place du dispositif
de logement à 250.000DH. En fait, ce dispositif a renoué avec la même logique de conception de
l’article 19 sus indiqué, en réinstaurant le principe de l’exonération totale des principaux impôts
au lieu de l’exonération partielle instituée en 2008.
Or, la mise en place du dispositif à 250.000DH a eu des répercussions sur celui de 140.000 DH,
qui depuis son lancement en 2008, son rythme de réalisation a connu, une ascension notable avec
plus de 53% des réalisations du dispositif dans les trois premières années, puis un essoufflement
manifeste dans les différentes villes du Royaume, depuis 2010, l’année de lancement du dispositif
à 250.000DH.
Prises comme le principal mode d’intervention sur l’offre des pouvoirs publics pour le
développement du LS, les incitations fiscales sont ainsi devenues si intégrées au système de
production de LS et aux attentes des promoteurs. Il en découle que la production de logement
social dans ses différents segments est devenue alors tributaire des avantages fiscaux, ceci se
manifeste par la réorientation des promoteurs, sous l’effet des incitations fiscales, vers la
production des segments les plus rentables et avantageux en termes de fiscalité, dont spécialement
celui de 250.000DH.
2
Suite à la baisse des avantages fiscaux due en partie à la modification de l’article 19, la production de
logement social à 200.000DH a connu une baisse de près de 30%, comparativement à l’année 2008.
2
➢ Absence d’études préalables à la mise en place des dispositifs
Lancés respectivement en 2008 et 2010, au profit des ménages ne pouvant pas se loger via le
marché immobilier, la mise en place aussi bien du dispositif de logement à faible valeur
immobilière (FVI) que pour celui à 250.000 DH n’a fait l’objet d’aucune étude préalable de
conception, de définition des besoins et des déficits en logement, tant quantitatif que sa nature, et
les spécifications de ce logement.
En fait, ces deux dispositifs ont été conçus pour répondre à un déficit en logements estimé par le
DCH en 2008 à 900.000 unités, ce déficit a été déterminé de manière sommaire et abrégé. En
effet, le modèle retenu pour son estimation reposait sur le croisement d’une part des données
démographiques et urbanistiques notamment le recensement de la population et de l’habitat de
2004 en ce qui concerne la proportion des ménages occupant des habitations insalubres en milieu
urbain, le taux d’accroissement de la population et d’autre part la production annuelle en logement
qui a été estimée à 90.000 unités.
Ce n’est qu’en 2012 qu’une étude a été lancée (Enquête logement 2012) qui dans sa phase IV a
porté sur la détermination du déficit en logements à l’échelle du territoire national et sur
l’élaboration d’une méthodologie d’évaluation des besoins en logement.
Cette étude a permis de caractériser les aspects multiformes de ce déficit en introduisant en plus
des logements sommaires, les habitations en dur qui menacent ruine dans les anciennes médinas,
les logements insalubres situés dans les villes et les logements sur densifiés par le nombre de
ménages. Elle a ainsi permis de quantifier le déficit à 585 088 unités et de le cerner selon ses
différentes composantes3 et sa répartition au niveau des différentes régions.
➢ Finalités mal définies et insuffisance de cohérence avec les autres
programmes d’habitat
La pertinence de toute approche d’intervention pour répondre à la problématique de logement
destiné aux personnes à revenu faible et irrégulier, et la réussite de la politique gouvernementale
dans ce domaine dépendent des finalités sur lesquelles repose son action. Toutefois, et à défaut
d’une précision par les autorités gouvernementales des finalités assignées aux dispositifs de LS,
il est difficile de les situer dans la politique gouvernementale en matière d’habitat et de déterminer
la vocation que les acteurs ont cherché à leur donner.
Comme déjà évoqué, l’absence d’études préalables à la conception des dispositifs de LS, a rendu
délicat de retracer avec précision leur genèse et encore moins les finalités qui leur ont été
assignées. S’agit-il des dispositifs de correction visant à absorber le déficit en logement déjà
constaté (bidonvilles, habitat menaçant ruine, logement occupé en cohabitation) ou des dispositifs
de prévention conçus pour faire face aux besoins futurs en logements.
Selon le département chargé de l’habitat, les raisons qui ont dicté le lancement de ces dispositifs
sont le déficit accumulé et son importante évolution au fil des années. Vue sous cet angle, les
dispositifs de LS placent l’absorption du déficit en logements au cœur de leur finalité ; Il s’agit
plutôt de dispositifs de correction et moins de prévention. D’ailleurs, la circulaire4 de
commercialisation du produit à 140.000DH, précise que ce produit est destiné prioritairement aux
ménages résidant dans les bidonvilles.
Certes, l’apport des dispositifs de LS est significatif, il a permis, au cours de ces dernières années,
d’accélérer le rythme de production de logements et le développement en termes quantitatif du
parc immobilier, par la production jusqu’à fin 2016 de 283.879 unités à 250.000DH, et
21.006 unités à 140.000DH. Cependant, cette importante production n’a profité que partiellement
3
Le tableau en annexe n°1 : déficit en logement urbains au Maroc selon la région et la ville, donne le détail
du déficit selon les composantes le constituant.
4
Circulaire n° 10247 du ministre de l’Habitat de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire du 8 juin
2009.
3
aux ménages considérés dans la détermination du déficit, dont notamment les ménages habitant
dans les bidonvilles et les habitats menaçant ruine.
En effet, les réalisations enregistrées par ces dispositifs en termes de contribution à la résorption
des déficits ne semblent pas à la hauteur des efforts déployés. S’agissant du dispositif 140.000
DH, à fin décembre 2016, sur une production de 21.006 unités, seules 6.020 unités ont été
affectées au programme VSB soit 27% et 1113 unités à l’habitat menaçant ruine soit 5%. Alors
que la contribution de celui à 250.000 DH à ces programmes reste dérisoire, elle n’a guère dépassé
un taux de 3.8% de la production totale avec 494 unités au profit du programme VSB (soit 0,8%)
et 3.678 unités au profit du programme de l’HMR (soit 3%).
➢ Dispositifs qui peinent à coexister
L’analyse des différents dispositifs initiés par l’Etat en matière de logement social permet de
soulever leurs ressemblances en termes de nature de produits, de modes d’intervention et de leurs
caractéristiques techniques. Des dispositifs qui coexistent sans rapports logiques entre eux en
termes de complémentarité ou d’homogénéité.
Sur le plan des exonérations des impôts et taxes, les deux produits adoptent le même mécanisme
d’exonération des impôts et taxes au profit des promoteurs. La seule nouveauté pour le segment
à 250.000 est l’instauration de l’exonération totale de la TVA au profit de l’acquéreur.
Sur la plan technique, les caractéristiques techniques et architecturales des deux produits 140.000
DH et 250.000 DH, définies dans des cahiers de charges, lesquelles dans leurs contenus ne
présentent pas de grandes différences, voire des chevauchements en termes de superficie.
De ce fait, la richesse créée et la marge la brute5 de l’opérateur hors le coût du foncier sur le
segment à 140.000 DH, sont nettement inférieure à celle dégagée par le segment 250.000 DH. Le
tableau suivant récapitule la répartition de la richesse créée et la marge brute de l’opérateur pour
chaque produit :
Répartition de la richesse créée (hors coût du foncier)
Logement à 250.000 DH Logement à 140.000 DH
(En DH) (En DH)
Richesse créée 157.620,00 63.467,00
Salaires 33.500,00 18.760,00
Impôts sur la production 1.270,00 847,00
Marge brute de l’opérateur 122.850,00 43.860,00
Source : Données issues de l’étude sur l’évaluation du programme de logements sociaux réalisée par
le DCH
Cet état de fait explique le manque d’enthousiasme des promoteurs pour adhérer au dispositif à
140.000, malgré les avantages autres que fiscaux notamment fonciers consacrés dans le cadre des
conventions de partenariat entre les sociétes Al Omrane (SAO) et les promoteurs privés et qui
visaient à intéresser davantage le secteur privé pour ce produit (cession au coût de revient par les
SAO des terrains à des promoteurs privés dans le cadre des conventions de partenariat).
Il en découle que, dans une logique purement économique, les promoteurs se sont orientés vers
la production de logement à 250.000 DH qui connait un fort engouement, dont le nombre de
conventionnement a totalisé à fin 2016 plus de 1.550.004 unités, et ce au détriment de celui à
140.000DH, dont les réalisations sont restées en deçà des objectifs escomptés.
Ce constat se confirme également par les intentions futures d’investissement des promoteurs pour
la production des logements sociaux. En effet, « sur les 1.030 projets identifiés, 93.6% prévoient
5
Il s’agit de la valeur ajoutée dégagée, diminuée des salaires et des impôts sur la production.
4
la réalisation uniquement du produit de 250.000 DH, 1.7% comptent mettre sur le marché un
produit à faible valeur immobilière (140.000 DH), alors que le reste concerne d’autres types de
produits ».
➢ Déphasage entre les objectifs et la nature des besoins, et modulation
inadaptée des incitations fiscales
Lancés respectivement en 2008 et 2010, des objectifs de production ont été définis pour les
dispositifs de LS à 140.000 DH et 250.000DH. Il s’agit respectivement de produire 130.000
logements sur la période 2008-2012 pour le premier et 300.000 logements à l’horizon 2020 pour
le second. Ces objectifs semblent aujourd’hui consensuels et constituent la référence de la
politique gouvernementale en matière de LS.
Toutefois, Il est délicat de retracer avec précision sur quelle base ces objectifs ont été fixés. Des
objectifs qui ne concordent pas avec la nature et le volume des besoins identifiés, tels qu’ils
ressortent des résultats de « l’enquête logement 2012 ». Cette enquête a montré que l’essentiel
des besoins en logements se situe au niveau du segment à140.000 DH. Quel que soit le scénario
retenu6, la région ou la ville, c’est le besoin pour cette catégorie qui prédomine avec « 49% pour
le scénario 3 à 64% pour le scénario 1 des besoins globaux au niveau national », alors que le
produit à 250.000 ne représentait que 10 à 15% en fonction des scénarii précédents. Le tableau
ci-après en donne une illustration :
Ventilation des besoins par composants d’habitat
Scénario Besoins
Logement Logement Habitat Habitat
selon les Habitat cumulés
à 140.000 Part à 250.000 Part Part moyen Part haut Part
horizons économique en
DH DH standing standing
temporels logements
2020 866 000 64% 139 718 10% 154 061 11% 121 735 9% 70 072 5% 1 351 586
2025 1 146 233 54% 283 226 13% 313 765 15% 248 050 12% 144 362 7% 2 135 635
2030 1 415 930 49% 424 078 15% 472 118 16% 373 498 13% 219 770 8% 2 905 395
Source : données issues de l’enquête logement 2012
Si les dispositifs de logements sociaux ont été institués pour encourager la production de
logements pour l’accès des ménages considérés dans le besoin en logements, les objectifs et les
efforts de l’Etat dans ce domaine devaient être conçus en fonction de la nature et le volume de ce
besoin. Il va de soi que selon la nature des besoins tels qu’il est illustré dans le tableau ci-dessus,
l’essentiel des efforts d’encouragement de logement social devait être consacré au segment à
140.000 DH, là où le besoin est avéré.
Or, modulées de façon déséquilibrée entre les dispositifs et en déconnexion avec la réalité des
besoins, en termes de nature de logements à encourager, les mesures d’incitations fiscales ont
abouti à l’orientation des efforts de production de logements vers le segment à 250.000 DH, avec
un conventionnement de plus de 1,5 million d’unités et une production de plus de 283.000 unités
à fin 2016 contre respectivement 30.665 et 21.006 unités pour celui à 140.000DH.
En termes de dépenses fiscales de l’Etat, collectivités locales et établissements publics, à fin juin
2015, le volume global des dépenses afférentes au dispositif à 250.000 DH est estimé à près de
14,9 Milliards de dirhams, alors que celui consacré au dispositif à 140.000DH ne dépasse guère
574,80 millions de dirhams. Le tableau ci-après en donne une illustration :
6
L’enquête a proposé trois scénarii selon des horizons variés (2020 ; 2025 et 2030) de résorption du stock
insalubre, disparition de la cohabitation des ménages, remplacement des logements vétustes appelés à
disparaitre et réponse aux besoins des nouveaux ménages.
5
Estimation des dépenses fiscales totales des dispositifs de logement social
Logement à 250.000DH Logement à 140.000DH
Estimation des dépenses fiscales
14.900,00 574,80
(En Millions de DH)
7
Données issues de l’étude d’évaluation des programmes de logements sociaux réalisée par le DCH en
2016.
6
Vu ce qui précède, la Cour des comptes recommande de :
- recadrer les objectifs des dispositifs du logement social en fonction des besoins
identifiés émanant des études ;
- moduler les dispositifs de logement social de telle sorte qu’ils puissent être adaptés
à la nature et au volume des différents compartiments des besoins.
➢ Absence de mécanismes de régulation de l’offre cause des déséquilibres dans
la production de LS
Les dernières données disponibles sur le secteur immobilier en général en termes de déficits et de
besoins en logements (enquête logement 2012), de demandes en logement (études sur la demande
2016) et les données issues du recensement national de la population et de l’habitat 2014
permettent de préciser et d’anticiper les situations urbanistiques, la taille et la nature des
logements nécessaires pour répondre à la demande potentielle des ménages.
Cependant, ces données n’ont pas été exploitées et l’analyse des besoins locaux à travers le
croisement des données des études et enquêtes précitées n’a pas été réalisée afin de caractériser
la nature et l’emplacement desdits besoins, à même d’aboutir à un meilleur pilotage de la politique
publique de logement social au niveau local et régional.
Appliqués à toutes les régions sans différenciation des besoins et des spécificités de chaque
région, et en l’absence d’instruments de régulation, la mise en pratique des dispositifs de LS a
conduit à des déséquilibres dans leur production.
Ainsi, dans certaines régions qui connaissent une forte pression immobilière, à titre d’illustration
le Grand Casablanca, la production de LS à 250 000 DH a atteint 80.751 unités (ayant reçu le
certificat de conformité), et ce en dépassant largement les besoins estimés à seulement 22.688
unités, donnant lieu à une surproduction estimée à plus de 250%. Le tableau suivant donne une
comparaison entre les besoins et la production de logements au niveau de six régions retenues
comme échantillon :
Comparaison entre les besoins et la production de logements des deux segments
Taux de couverture des
Besoins cumulés (1)8 Production (2)
besoins (2)/(1)
Marrakech
75.124 11.332 2.187 9.677 2,91% 85,40%
Tensift Al Haouz
Sous Massa Drâa 67.385 14.990 4.726 13.649 7,01% 91,05%
Grand
172 054 22.688 1.091 80.751 0,63% 355,92%
Casablanca
Rabat salé
118.656 15.046 575 20.536 0,48% 136,49%
zemmour Zaêr
Fès Meknès 81.063 12.287 3.848 14.451 4,75% 117,61%
Oriental 44.087 8.159 1.894 11.118 4,30% 136,27%
8
Scénario 1 : résorption du stock insalubre, disparition de la cohabitation des ménages, remplacement des
logements vétustes appelés à disparaitre et répondre aux besoins des nouveaux ménages dans cinq ans à
l’horizon 2010.
7
D’après le tableau ci-dessus, la surproduction en logement à 250.000DH a concerné pratiquement
toutes les régions, avec des taux variant entre 17,61% au niveau de la région Fès-Meknès, et
255,9% au niveau de la région du grand Casablanca.
Cette surproduction, conjuguée à l’insuffisance des conditions de ciblage et d’attribution aux
bénéficiaires est à l’origine des phénomènes de « glissement9 » et de vacance de logements dans
ce segment. Ces phénomènes sont réels selon les responsables du DCH, du Holding Al Omrane
(HAO) et de tous les professionnels du secteur, pourtant faute de données fiables sur les catégories
socio-professionnelles des bénéficiaires et sur les logements vacants, il est très difficile de les
caractériser. Cette surproduction a entrainé une augmentation en termes de dépenses fiscales de
5,79 Milliards de dirhams comme illustré sur Le tableau suivant :
Estimation des dépenses fiscales engendrées par la surproduction
de logements à 250.000DH
Besoins Estimation des dépenses
cumulés Production Surproduction fiscales engendrées
(scénario1) (en DH)
Grand Casablanca 22 688 80 751 58 063 4 898 665 964,54
Rabat salé zemmour
15 046 20 536 5 490 463 180 961,12
Zaêr
Fès Meknès 12 287 14 451 2 164 182 572 604,71
Oriental 8 159 11 118 2 959 249 645 257,55
Total 58 180 126 856 68 676 5 794 064 787,92
Il s’agit bien évidement d’un effort financier considérable qu’il aurait été judicieux de le réorienter
vers d’autres régions ou vers le segment à 140.000 DH, si des mécanismes de régulation de
conventionnement inter dispositifs et inter-régions ont été instaurés, et ce dans l’optique de donner
plus d’efficience à l’effort public de logement des couches sociales destinataires.
Malgré cela, le DCH continue de conclure des conventions avec des promoteurs pour la
production d’unités à 250.000DH. Le nombre de logements conventionnés à fin 2016 est de plus
1.5 million unités, un engagement qui aura sûrement des répercutions sur la charge fiscale de
l’Etat, et qui contraste largement avec le chiffre de 300.000 logements fixé comme objectif de la
totalité de la période du dispositif.
En outre, sur le segment à 140.000 DH, et malgré les efforts consentis, des situations de
déséquilibre semblent s’être durablement installées. En effet, ce segment souffre d’une forte
insuffisance d’offre pouvant atténuer l’importance des besoins recensés à ce niveau. La
production dans ce segment, de 21.006 unités, n’a pas pu répondre aux besoins identifiés dans les
différentes régions. Dans les meilleures situations, cette production ne représente que 7,01%
(Sous Massa Drâa) du besoin, tandis que dans certaines régions la production est de moins 1% de
celui-ci.
La mise en place de mécanismes de régulation pour l’adaptation de l’offre dans ses différents
composants (140.000DH et 250.000DH) à la localisation des besoins est d’autant plus importante
que le produit à 250.000DH montre des signes de difficultés de commercialisation (seuls 42% des
logements créés achevés ou en cours de construction ont été vendus à fin juin 2015) et que la
faible production de logements à 140.000DH n’a pu résorber les besoins importants dans ce
segment.
9
Le glissement désigne le bénéfice d’une population autre que celle ciblée initialement par le dispositif de
logement social mis en place.
8
Pour ce, la Cour recommande la mise en place de mécanismes de pilotage des dispositifs de
logement social basé sur la reconstitution des informations sur le marché immobilier au niveau
régional et local à travers, l’exploitation des informations des différentes études réalisées sur
le secteur.
➢ Insuffisance des mesures de ciblage et d’attribution
L’Etat consacre des efforts financiers importants, sous forme d’aide directe aux acquéreurs
(notamment pour le produit à 250.000DH) et avantages fiscaux aux promoteurs afin de
subventionner le LS. Néanmoins, les mesures de ciblage et d’attribution manquent de verrouillage
susceptible de faire bénéficier ces efforts financiers à la véritable cible pour laquelle le logement
social est instauré.
L’analyse des conditions d’éligibilité dictées par les différents dispositifs de LS, prévues dans les
lois de finances ayant instauré successivement les produits de 140.000 DH et 250.000 DH montre
une insuffisance dans les dispositions qui conditionnent l’attribution de ces produits. En effet, si
ces conditions sont définies pour le produit 140.000 DH, elles le sont moins en ce qui concerne
le logement à 250.000 DH, spécifiant uniquement que l’acquéreur ne doit pas être propriétaire.
La loi de finances de 2008 a stipulé que le produit de logement à 140.000 est destiné à une
population dont les conditions d’éligibilité ont été déterminées par un salaire mensuel ne
dépassant pas une fois et demi le SMIG (relevé à deux fois le SMIG en 2010) et la non propriété
d’un logement dans la commune considérée. Ces dispositions ont été clarifiées par la circulaire
du ministre de l’Habitat de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire du 8 juin 2009 qui avait
prévu la commercialisation de ce produit au profit de quatre catégories de bénéficiaires10:
- les habitants des bidonvilles objet de relogement, des quartiers menaçant ruines selon les
listes de recensement prédéfinies par les autorités locales ;
- Les porteurs d’uniformes à basse échelle des collectivités locales, des administrations et
des établissements publics ;
- les employés des entreprises publiques et privées, les petits artisans adhérents à la chambre
professionnelle ou aux coopératives.
- les salariés et commerçants et artisans n’appartenant pas à la troisième catégorie.
Alors que, les destinataires du produit à 250.000DH n’ont été définis que par l’unique critère de
ne pas être propriétaire. Ainsi, l’article 7 de la loi de finances de 2010 précise que « l’acquéreur
est tenu de fournir au promoteur immobilier concerné une attestation délivrée par l’administration
fiscale attestant qu’il n’est pas assujetti à l’impôt sur le revenu au titre des revenus fonciers, la
taxe d’habitation et la taxe de services communaux assise sur les immeubles soumis à la taxe
d’habitation ».
Destiné a priori aux ménages à revenus faibles et irréguliers, le bénéfice de ce logement et de
l’aide fiscale de l’Etat n’est conditionné par d’autres critères d’attribution et de définition de la
population cible ne soient établis, soit selon les tranches de revenu soit la catégorie socio-
professionnelle à l’instar du dispositif de 140.000DH (revenu inférieur à deux fois le SMIG).
La Cour recommande de mettre en place des mécanismes rigoureux devant permettre un
meilleur ciblage de la population bénéficiaire et la mise en place de conditions claires
d’attribution.
10
Les trois dernières catégories font obligatoirement l’objet d’une sélection de la part d’une commission
constituée à cet effet.
9
➢ Franges de population exclues du champ du logement social
Les réalisations des dispositifs de LS n’ont pas permis d’absorber de manière significative le
déficit et le besoin en logements sociaux. Ce besoin est étroitement lié à la capacité de
financement de la population cible. Toutefois, la disparité des revenus de celle-ci implique
l’exclusion –de fait- d’une frange de cette population, ne pouvant pas accéder au logement social
par manque de financement approprié.
D’après le DCH, 40% des bénéficiaires du logement à 140.000DH se situent dans la tranche de
revenus entre 3.800DH et 4.700DH. Or, l’analyse des caractéristiques socioéconomiques des
demandeurs de biens immobiliers, au regard de leurs revenus, issues de l’enquête sur la demande
réalisée par le DCH, a révélé que sur une demande globale de près de 1,5 million unités (tout
produit confondu), la part de ceux dont les revenus sont inférieurs à 2.000 DH par mois est de
21% (18% en milieu urbain).
Sur le plan géographique, la part des demandeurs aux revenus inférieurs à 2.000 DH est
relativement plus importante et constatée dans les régions de Béni Mellal Khénifra (32%), Drâa
Tafilalt (29%), Souss Massa (28%), Fès Meknès (28%) et l’Oriental (26%).
Cette catégorie de la population dont le niveau de revenus limite sa capacité d’épargne et de
financement via le crédit bancaire se trouve ainsi exclue de fait du champ d’acquisition de toute
catégorie de logement social. Pour le produit à 140.000DH, les fonds propres et l’emprunt
bancaire ont constitué, selon l’étude d’évaluation précitée, les principaux modes de financement
des acquisitions de ce type de logement, avec respectivement plus de la moitié pour les fonds
propres et 46% en moyenne pour les crédits bancaires.
Actuellement, l’accès au crédit bancaire pour les bénéficiaires du logement social est assuré
exclusivement grâce aux fonds de garantie Fogarime et Fogaloge, réunis dans un seul fonds
Damane Essakane. Les réticences des banques, les exigences hypothécaires et le niveau des taux
d’intérêt réduisent la contribution de ces fonds dans l’accès aux crédits bancaires en général, et
encore plus pour la population à revenus inférieurs à 2.000DH.
Outre les considérations liées à la qualité spatiale du produit à 140.000 DH et la complexité des
procédures d’attribution, l’insolvabilité des ménages dont les revenus sont très faibles et
irréguliers est l’une des principales raisons évoquées par les responsables des SAO entrainant des
difficultés d’écoulement de ce produit.
D’importantes demandes de ladite tranche de population auprès des SAO restent insatisfaites en
raison de son insolvabilité et des difficultés d’accéder au système bancaire qui ne prévoit pas, à
l’instar des autres modèles dans certains pays, de circuits spécifiques pour le prêt logement social.
La Cour recommande d’intégrer les franges de population exclues de fait de l’accès au
logement social dans des dispositifs spécifiques qui prévoient des financements adaptés en
fonction de leur classification sociale (pauvres et vulnérables et modestes).
B. Efficacité et dysfonctionnements des dispositifs de LS
Concernant ce vôlet, il a été constaté ce qui suit :
➢ Objectifs non atteints et récession du conventionnement du Logement à FVI
En date du 29 Mars 2008, il a été procédé à la signature d’une convention, entre le HAO et l’Etat
par laquelle les SAO se sont engagées à réaliser, en maitrise d’ouvrage ou en partenariat avec des
opérateurs privés au cours de la période 2008-2012, un programme de construction de logements
à FVI, dans le cadre du dispositif à 140.000DH, d’une consistance de 129.138 unités.
Selon les données communiquées par le DCH à fin 2016, Il a été conclu 71 conventions avec des
opérateurs publics et privés, pour la réalisation de 29.596 unités à l’urbain et 5.140 unités au rural.
Ainsi, 27conventions ont été conclues avec les SAO et ce pour la réalisation de 11.867 à l’urbain
et 827 unités au rural, totalisant un nombre de logements de 12.694.
10
Prévu pour une période allant 2008 à 2012, et après un rythme de conventionnement soutenu
pendant les années 2009 et 2010, ce rythme a enregistré une chute en 2011 suivie d’une légère
reprise en 2012 et 2013, mais s’est complètement affaibli en 2015. En effet, le nombre de
conventions est passé de 28 conventions en 2009 pour près de 12.000 unités à seulement une
convention en 2015 ayant pour objet 56 unités.
Au-delà de la non-concordance des périodes du dispositif et celle du conventionnement, les
réalisations affichées n’ont constitué que près de 17% de l’objectif retracé de production de
130.000 unités.
A l’origine de la récession de conventionnement et par conséquent la régression de la production
de ce logement, sont évoqués les facteurs de la rareté du foncier (à 88%) et son prix élevé (83%).
Ceci étant, il y a lieu de préciser que la majorité des réalisations de ce produit ont bénéficié du
foncier public mobilisé (FPM) cédé à travers des partenariats aux promoteurs et ce dans des
conditions avantageuses et à un prix préférentiel, par rapport au prix du marché11.
➢ Limites de commercialisation du logement à FVI
Contrairement aux dispositions de la loi des finances de 2008 n’ayant prévu comme conditions
d’attribution du produit de logement à 140.000DH que la limite d’un revenu inférieur à une fois
et demi le SMIG (devenu deux fois le SMIG), la circulaire relative à sa commercialisation12 a
cependant, restreint le champ des bénéficiaires de ce produit, en spécifiant les catégories éligibles
sur la base d’autres critères, comme évoqué ci-haut.
Ce type de logement est produit en grande partie par les SAO. Ces dernières connaissent des
difficultés de commercialisation qui se sont traduites par d’importants stocks non vendus, et ce
pour différentes raisons. Les cas des sociétés ci-après, illustrent cette situation :
- la SAO de Fès Meknès dispose d’un stock de 623 logements à FVI, dont 262 logements
situés au nouveau pôle urbain de Rass el Ma- Fès ;
- la SAO de Rabat Salé a enregistré à fin 2016, un stock de 741 unités ;
- La SAO de l’Oriental disposait d’un stock qui s’élevait à fin 2015 à 360 unités.
La commercialisation de ce produit se heurte essentiellement, lorsqu’il ne s’agit pas d’un retard
d’affectation préalable aux catégories prédéfinies par la circulaire y afférente, à l’insolvabilité des
populations destinataires, à défaut de mesures d’accomplissement d’un lieu d’habitat commode
et intéressant (éloignement, défaut d’équipement publics, etc.), à l’inadaptation du produit aux
besoins et parfois au défaut de la demande de ce produit.
Eu égard aux besoins importants, issus des différentes enquêtes et études, qui restent non
encore satisfaits, la faible production et sa faible attractivité à la fois pour les promoteurs et les
bénéficiaires, la Cour des comptes recommande de recadrer ce dispositif, dans sa conception,
ses objectifs et ses conditions de commercialisation.
➢ Produit à 250.000DH : un conventionnement au-delà des objectifs
L’objectif assigné par le DCH au dispositif du logement à 250.000DH est de construire un nombre
de 300.000 logements à l’horizon 2020. A cet effet, il a été conclu jusqu’à fin 2016, 999
conventions avec le secteur public et privé.
Le nombre des unités conventionnées a atteint à fin 2016, 1.546.929 unités, soit plus de cinq fois
de l’objectif attendu de 300.000 à l’horizon de 2020. 283.880 unités, soit 97%, de cet objectif,
ont reçu le certificat de conformité. A ce chiffre s’ajoutent 176.000 unités démarrées en cours de
11
Cf,
12
Circulaire n° 10247 du ministère de l’habitat, de l’urbanisme et développement spatial, en date du 08
Juin 2009.
11
construction, donnant lieu à 459.880 unités mises sur le marché ou en cours de construction
dépassant ainsi largement l’objectif à quatre ans de la fin de période consacrée à ce dispositif.
Cette situation suscite un intérêt particulier à s’interroger d’une part sur l’utilité d’avoir arrêté en
amont l’objectif de la production dudit dispositif à 300.000 unités. Cette surproduction mettra,
inéluctablement, en porte-à-faux l’équilibre du scénario de base (modulation des exonérations
fiscales pour l’objectif de 300.000 unités) et engendra des impacts à court et à moyens terme sur
les principaux agrégats (économique, social et urbanistique) de ce scénario qu’il faut analyser les
effets de cette surproduction additionnelle par rapport au scénario de référence.
Eu égard aux besoins en logements dans ce segment, issus des études et enquêtes, et de la
surproduction enregistrée, la Cour recommande de revoir ce dispositif en vue de recadrer sa
conception et ses objectifs, pour remplir les finalités pour lesquelles il a été instauré.
➢ Difficulté d’intégration urbaine des opérations de logement social
En termes de situation des projets des logements sociaux de 250.000 DH sur le plan national, 83%
sont localisés en périphérie de communes13. Ce taux varie d’une région à une autre, il est de 71%
à Casablanca Settat et 31% à Beni Mellal-Khénifra.
Ce constat est dû, selon les responsables du DCH, à une planification urbaine dans le cadre des
documents d’urbanisme qui prévoient des zonages pouvant accueillir ce type de logement à la
périphérie des villes ou à des contraintes urbanistiques n’offrant la possibilité de réalisation de ce
type de logements qu’à la périphérie, parfois en dérogation, là où l’opportunité foncière permet
l’équilibre financier des opérations.
En effet, les opérations de logement social constituent une part importante du paysage urbain des
villes. Cependant, ces opérations autorisées souvent en dérogations (40% entre 2010 et juin 2015),
se développent en grande partie sur des terrains non couverts par des documents d’urbanisme
homologués.
Cet état de fait, interpelle sur la gestion dans le cadre de la procédure dérogatoire, d’une
composante aussi importante des villes, en marge des prévisions claires des documents
d’urbanisme, sachant que seul 62% des projets au niveau national sont réalisés sur des terrains
couverts par des documents d’urbanisme. Les conséquences liées à ces autorisations en dérogation
se font ressentir à plusieurs égards, dont souvent :
- une discontinuité spatiale et manque d’harmonisation dans le processus d’urbanisation des
villes soit le paysage urbanistique qui pâti de l’étalement des projets au niveau de la
périphérie des villes,
- des concentrations de population et de groupement de projets, souvent non desservis par
les équipements, de moyens de transport et souvent éloignés éloignées des bassins
d’emplois,
- un développement des projets de logement social en « tache d’huile » sans aucune vision
d’ensemble ni maitrise de son évolution.
L’absence d’une vision commune de tous les intervenants dans le processus de planification et de
gestion urbaine seraient une manifestation de la défaillance dans l’harmonisation des espaces
urbains permettant une meilleure intégration des opérations de logements social, et par conséquent
de la mise en œuvre des documents d’urbanisme et de la planification des infrastructures au
service de la problématique du logement social particulièrement.
13
Selon les données de l’Etude sur l’évaluation du programme de logements sociaux à 250.000 DH et du programme
de logements à faible valeur immobilière de 140.000DH, réalisée par le DCH.
12
La Cour recommande de mener une réflexion pour prévoir un document de planification
urbain pouvant constituer un cadre de référence pour toute opération de logement social à
l’échelle des agglomérations.
➢ Villes nouvelles et pôles urbains : nouvelles opportunités pour promouvoir
de logement social
Le décongestionnement des grandes agglomérations, le développement d’un nouveau mode
d’urbanisation maîtrisé et surtout la volonté d’assurer l’accès au logement aux différentes
catégories de la population, dont notamment celle à revenu faible et irrégulier, constituent les
principaux arguments qui plaident en faveur de la création des villes nouvelles et des nouveaux
pôles urbains.
Cependant, ces nouvelles créations urbaines n’ont pas été entourées par des conditions juridiques,
économiques, et de gouvernance permettant leur essor. En effet, faute d’harmonisation et de
coordination des actions des différents partenaires et d’un cadre juridique approprié, les villes
nouvelles et nouveaux pôles urbains se heurtent à des problèmes d’insuffisances des
infrastructures de base, de connexion aux réseaux routiers à même de compromettre leur
valorisation future.
Le choix de la situation géographique de ces nouvelles créations urbaines devrait constituer un
facteur déterminant de leur vocation et de leur développement futur. En revanche, cette logique
est moins visible dans les villes nouvelles et les nouveaux pôles urbains. En effet, les situations
géographiques des villes nouvelles et pôles urbains visités (Tamesna, Tamensourt et Ras El Ma)
n’ont pas été dictées par leur vocation économique et leur proximité aux bassins d’emplois, en
corrélation avec les stratégies sectorielles, mais plutôt pour les opportunités foncières qu’ils
présentaient14 pour répondre aux besoins des demandes croissantes en logements, et à permettre
la production de logement avec un coût modéré économiquement et l’accès pour les ménages à
revenu faible et irrégulier.
En déconnexion avec les pôles d’activités économiques, ces nouvelles localités n’ont d’autre que
la vocation d’habiter. Le schéma général actuel laisse apparaitre des créations urbaines dédiées
exclusivement, sinon en grande partie aux logements sociaux et aux lots de recasement qui se
réduisent souvent à des cités dortoirs.
La Cour des comptes recommande d’impliquer d’avantage les départements concernés par les
équipements de base, en vue d’accompagner obligatoirement les villes nouvelles et les
nouveaux pôles urbains depuis leur démarrage, à même de garantir aux habitants de ces villes
principalement de logement social une cadre de vie décent.
➢ Logement social : une conception se référant à des cahiers de charges à portée
standard et statique
Dans le but de définir les caractéristiques, les prescriptions et les performances auxquelles doit
répondre le logement social, des cahiers des charges définissant les prescriptions minimales
urbanistiques, architecturales et techniques ont été mis en place et que les promoteurs immobiliers
s’engagent à respecter pour tirer parti de l’exonération fiscale prévue à cet effet.
Cependant, une lecture de ces derniers permet de constater le caractère sommaire des
prescriptions minimales et le manque de spécification et de précision des caractéristiques
techniques des prestations du logement social, laissant une grande marge de manœuvre aux
promoteurs immobiliers qui, même s’ils se conforment aux exigences desdits cahiers de charges,
ils peuvent diverger des règles, et des bonnes normes de la qualité. A ce titre, des remarques ont
été soulevées :
Il s’agit des terrains domaniaux cédés par l’Etat dans le cadre de la mobilisation du foncier public au profit
14
de l’habitat.
13
▪ Non prise en compte des dispositions urbanistiques supplémentaires
Le cahier des charges des prescriptions minimales rappelle que les autorisations délivrées pour la
réalisation des projets de logement social, doivent se conformer aux exigences des documents
d’urbanisme et des règlements et circulaires en vigueur. Etant donné que le représentant du DCH
n’est pas un membre de droit dans les commissions d’autorisation des projets de logement social,
certaines dispositions urbanistiques supplémentaires ne sont pas automatiquement prises en
compte lors de l’instruction des dossiers d’autorisation. Il s’agit des dispositions suivantes :
Dispositions urbanistiques supplémentaires prévues par le cahier
de charges du logement à 250.000DH
Densité urbanistique 230 logements par 10.000 m²
Place de parking une place pour cinq logements
un bureau par groupement d'habitation en lieu et en place des
Bureau de syndic
conciergeries
un arbre (hauteur minimale de 3m) à planter pour chaque
Espaces verts
logement réalisé
▪ Prescriptions architecturales insuffisantes et souvent inappliquées
Les superficies du logement social et des pièces le composant sont définies dans les cahiers des
prescriptions techniques et architecturales pour chacun des produits à 140.000DH et à
250.000DH.
Le cahier des charges reprend les dispositions du Code général des impôts (Article 93-I) qui
stipule que la superficie couverte du logement social est comprise entre 50 m² et 80 m², cette
superficie comprend outre la superficie des locaux d’habitation, une fraction des parties
communes comptée au minimum à 10%. La superficie couverte minimale de l’appartement est
alors inférieure à 50 m². La prise en compte de la superficie couverte avec des corrections donne
lieu à confusion, le tableau suivant précise les surfaces minimales des pièces relatives au logement
à 250.000DH :
Surface minimale des pièces du logement à 250.000DH
Pièce Superficie Minimale (m²)
Salon 12
Chambre 1 9
Chambre 2 7
Cuisine 5
Salle d'eau 2
Surface Habitable 35
En ce qui concerne le logement à 140 000 DH, la superficie, étant considérée la moyenne des
logements produits s’établit à 52, sachant qu’il y a également pour ce produit à hauteur de 20%
des logements à moins de 50m².
En matière d’accessibilité, une rampe est prévue pour les personnes à mobilité réduite au moins
dans un immeuble sur dix. Quoique cette disposition reste insuffisante, elle n’est pas respectée
tout le temps, ce qui prive une catégorie de personnes à besoins spécifiques du droit d’accès au
logement social.
14
▪ Prescriptions techniques imprécises
En matière de quelques corps de métiers, les cahiers des charges des prescriptions minimales ne
spécifient les référentiels normatifs sur lesquels le promoteur s’engage afin de produire un
logement social de qualité. Ils renvoient sommairement aux normes en vigueur en ce qui
concerne les secondes œuvres sans pour autant préciser celles à respecter, leurs caractéristiques,
leur provenance et les qualités définies pour chaque matériau (étanchéité, menuiserie, peinture,
plomberie, lustrerie, revêtement, etc.).
Dans l’ensemble, cette base normative est censée comprendre tous les volets techniques non
seulement ceux développés dans les cahiers de charges : les gros œuvres, l’étanchéité, le
revêtement, la menuiserie, la quincaillerie et ferronnerie, l’électricité-lustrerie, plomberie
sanitaire, et la peinture vitrerie, mais encore, l’acoustique, la sécurité incendie, la thermique du
bâtiment, etc.
▪ Absence de classification des entreprises opérant dans le secteur et recours
accru à la soustraitance
Le promoteur immobilier fait souvent recours à des professionnels de travaux pour la construction
du logement social, aucune clause des cahiers des charges des prescriptions minimales
urbanistiques, architecturales et technique ne prévoit une classification minimale des entreprises
de travaux en fonction de l’envergure du projet de logement pour garantir une qualité minimale,
ajouter à cela le recours à la sous-traitance en cascade, qui réduit les marges de bénéfice et par
suite impacte la qualité du produit social.
La Cour recommande de revoir les cahiers des charges des prescriptions minimales
urbanistiques, architecturales et techniques relatives au logement social, et ce notamment par :
- l’adoption d’une approche basée sur la surface habitable qui présente plus de
visibilité pour les parties prenantes du logement social ;
- la spécification des référentiels normatifs à appliquer pour tous les corps de métiers,
sur lesquels le promoteur s’engage afin de produire un logement social de qualité
et mettre en place un processus de contrôle de la qualité des logements sociaux
tenant compte des particularités du secteur ;
- le verrouillage de la classification des entreprises agissant dans le secteur du
logement social soit dans le cadre d’un contrat avec le promoteur, ou dans le cadre
de la sous-traitance est nécessaire pour relever le défi de la qualité.
C. Efficience des dispositifs de LS
Oncernant ce volet, la Cour des comptes a enregistré ce qui suit :
➢ Importante mobilisation du foncier public au profit de l’habitat profitant peu
au logement social
Depuis 2003, l’Etat a entrepris des efforts importants par la mobilisation du foncier public au
profit du secteur de l’habitat. En effet, selon les données de la DDE, il a été procédé, à la
mobilisation d’un foncier public d’une superficie de 150.790.024,5 m², soit plus de 15.000 Ha.
Ce foncier a été cédé soit dans le cadre de conventionnement, notamment, avec le HAO ou dans
le cadre déconcentré via des cessions de gré à gré au profit des opérateurs immobiliers, à des prix
préférentiels en vue de réaliser des logements sociaux. Néanmoins, la DDE, ne dispose pas de
données concernant l’affectation effective de ce foncier ainsi que le respect par ces opérateurs de
leur engagement quant à son usage.
Ainsi, le total du foncier conventionné avec le HAO et les autres opérateurs publics s’élève à
7.664Ha, faisant l’objet de deux conventions (la première en 2003 et la seconde en 2009) entre
l’Etat d’autres opérateurs publics.
15
A travers les données recueillies auprès du HAO, il s’avère que ce dernier a procédé, jusqu’au 30
septembre 2015, à l’exploitation de 4.706Ha. Sur cette superficie, il a achevé la construction en
tant que maitre d’ouvrage et via la conclusion de 404 partenariats, pour un foncier de 823Ha, un
nombre de 101 517 unités de logement social.
Lesdits partenaires ayant bénéficié à la fois de prix préférentiels ainsi que de conditions favorables
de péréquation ont convenu la construction de 184.061 logements dont 69.954 sont à 250.000 DH
et 31.542 sont des logements à FVI. Ceci étant analysé, il révèle que 45% des logements à
construire sur le foncier public mobilisé cédé aux partenaires, sont des logements autres que
sociaux.
En tant que maitre d’ouvrage, le HAO aurait réalisé sur 3.883 Ha du foncier public mobilisé,
33.469 unités dont 21.288 à FVI et 12.181 logements à 250.000DH. Ainsi, compte tenu des
superficies exploitées du foncier public mobilisé (4.706 Ha) et le nombre des logements sociaux
produits (101.517 unités), pour chaque vingtaine de logements produits, l’Etat a mobilisé, avec
des prix préférentiels parfois symboliques, un hectare du foncier. Le tableau suivant en donne une
indication :
Foncier public Unités produites
Unités produites
exploité (en Ha) à l’hectare
HAO 3.883 33.469 9
Promoteurs immobiliers
823 68.048 83
dans le cadre de "PPP"
Total 4.706 101.517 22
Les données de ce tableau montrent que le nombre des unités produites dans chaque hectare
oscille entre 9 et 83. La question se pose sur la nature des unités réalisées par HAO étant donné
la faiblesse des unités produites dont le nombre est de 9 par hectare.
➢ Difficultés liées à l’exploitation du foncier mobilisé
Comme déjà évoqué, le foncier public mobilisé dans le cadre de conventionnement n’a été
exploité qu’à hauteur de 59%. Ainsi, 3.547Ha demeurent non exploités du fait qu’ils recèlent,
différentes situations dans la majorité des cas problématiques, et dont l’apurement risquerait de
durer dans le temps tout en exigeant l’implication de plusieurs intervenants. Ce FPM non exploité
se répartit comme suit :
- 634 Ha en cours d’études ;
- 1.898 Ha en cours d’ouverture à l’urbanisation, soit près de 22%, dont 923 Ha se situent à
la ville nouvelle de Lakhyayta et le reliquat dans les nouveaux pôles d’urbanisation cas
d’Isly, Boussekoura, etc ;
- 715 Ha non ouverts à l’urbanisation par un document d’urbanisme qui se situent également
dans les nouveaux pôles d’urbanisation cas de Bouknadel, Dar Bouazza, etc ;
- 56 Ha occupés illégalement par des tiers ;
- et 244 Ha abandonnés par le HAO pour cause de contraintes physique liées à son
exploitation. Il s’agit notamment de179 Ha issus de la convention de 2003 abandonnés en
raison de la cession de 84 Ha à Idmaj Sakane et la CGI se situant à Dar Bouazza, à Ain
Harrouda ainsi que pour le fait que ce foncier est inexploitable en raison de sa proximité
d’aéroport à Casablanca 85 Ha.
Eu égard à ce qui précède, ce foncier public non encore exploitée se situe en majorité dans des
villes nouvelles et des nouveaux pôles urbains. Sachant que, comme déjà évoqué, ces villes et
16
pôles peinent à constituer de véritables agglomérations urbaines qui réunissent toutes les
conditions d’un cadre de vie intéressant.
Ainsi, et étant donné que le FPM se situe dans sa majorité dans les nouveaux pôles urbain et
compte tenu du quasi- épuisement du foncier public au sein des villes, selon l’affirmation de la
DDE, il apparait que la composante foncière a atteint ses limites comme moyen d’incitation à
l’investissement dans le logement social. Elle ne peut dorénavant constituer une variable sur
laquelle peuvent reposer les stratégies futures de promotion du logement social.
➢ Dysfonctionnement des « Partenariats Public-Privé (PPP)15 »
Ce mode de « PPP » consiste d’une part, à la cession par la SAO au promoteur d’un ou plusieurs
lots équipés en infrastructures primaires hors site, assorti de conditions avantageuses16, d’une
hypothèque de premier rang lui permet d’accéder facilement au marché financier et prêt bancaire,
et d’autre part la conclusion d’une convention qui définit les engagements réciproques des deux
parties dont notamment la consistance du programme en logements à réaliser.
Ce mode de conventionnement a été adopté dans le cadre de la valorisation des villes nouvelles17
et des nouvelles zones urbaines pour accélérer le rythme de production des logements. La gestion
des conventions conclues comme mode de réalisation de logements sociaux suscite plusieurs
observations.
Sur le plan règlementaire, les conventions de PPP ne font référence à aucun cadre normatif et
légal, seules deux circulaires en la matière ont été adoptées pour les encadrer. Il s’agit en
l’occurrence de la circulaire n°2748/DP/PPP en date du 21 novembre 2008 et la circulaire
n°378/PIDS/DP/PPP en date du 12 mars 2012. L’absence de ce cadre est à l’origine de plusieurs
défaillances soulevées dans les différents rapports de la Cour des comptes relatifs au contrôle de
la gestion des SAO. Il s’agit à titre d’indication de :
- La cession des terrains aux promoteurs selon le mode de gré à gré sans pour autant procéder
à l’appel à la concurrence par appel à manifestation d’intérêt (AMI) dans la plupart des
opérations de cession de terrains aux promoteurs.
- Les conventions de partenariat sont passées avec des prix préférentiels et des facilités de
paiement, en contrepartie, les promoteurs privés s’engagent à réaliser la consistance des
opérations conventionnées dans les délais impartis. Néanmoins, des déficiences liées au
transfert des propriétés avant le paiement par les promoteurs de la totalité des prix de
cession et la souscription des hypothèques sur ces terrains. Cette situation met en porte-à-
faux les SAO en cas de défaillance des promoteurs
En outre, au lieu d’être fondées sur une vision qui concilie à la fois la logique économique et
sociale, (procurer un avantage foncier aux promoteurs en vue de contribuer à la réalisation des
objectifs de l’Etat en matière de production de logements sociaux et des équipements publics), les
conventions de PPP se réduisent à des délégations d’objectifs de construction de logement
sociaux, qui se focalisent principalement sur la générosité foncière offerte sur des terrains cédés
à des prix préférentiels.
15
Il ne s’agit pas de PPP tel que défini par la loi 86-12 mais plutôt d’une appellation générique utilisée par
le HAO pour désigner les conventions conclues avec des promoteurs immobiliers pour la réalisation des
opérations dont fait partie le logement social.
16
Selon les données du HAO, le prix moyen de cession est de 639DH/m².
17
L’exemple de la ville nouvelle de Tamesna est édifiant, le mode opératoire relatif à la valorisation de
cette ville, reposait essentiellement sur le partenariat public Privé à hauteur de 80%
17
A ce sujet, il a été relevé par la Cour des comptes18 que les terrains cédés aux promoteurs dans le
cadre conventionnel sont utilisés à des fins autres que la réalisation des engagements pris, en
l’occurrence la réalisation de logements sociaux et des équipements publics.
En effet, des conventions de partenariat prévoient la réservation de 20% de la consistance du
programme conventionné à la réalisation de logement sociaux à 140.000 destinés au relogement
des bidonvillois. La Cour avait souligné à l’occasion de ses missions de contrôle de gestion des
SAO l’irrespect par les promoteurs de leurs engagements quant à la réalisation des logements
sociaux et des équipements publics conventionnés conjugué au manque de cadrage des
conventions de partenariat des conditions juridiques, techniques et de suivi.
Ainsi, la Cour des comptes recommande de :
- repenser d’autres mécanismes permettant à la réalisation de logement social d’être
économiquement attrayante, en agissant sur des variables autres que le foncier
public.
- mettre en place un cadre règlementaire propre aux conventions de « partenariat »
faisant référence à un cadre normatif et légal
- concilier dans le cadre des conventions de « partenariat » à la fois la logique
économique et sociale, selon une approche gagnant-gagnant.
➢ Insuffisances dans la gestion, le suivi et le contrôle des opérations
L’analyse des mesures, notamment, réglementaires, visant le pilotage au niveau central et local
des opérations de logement social, a permis d’examiner le contenu des circulaires adressées aux
services chargés du suivi de l’exécution des opérations à l’échelle régional et local. Celles-ci ont
prévu essentiellement :
- l’instauration d’une commission centrale ayant pour mission d’assurer le pilotage et le suivi
desdites opérations ;
- un nombre d’instructions adressées aux agences urbaines les incitant à localiser le foncier,
à la célérité dans l’actualisation des documents d’urbanisme, à élaboration des études
préalables et à veiller à l’instruction des dossier d’autorisations de construire dans un délai
de 21 jours, ainsi qu’au respect des prescriptions des cahiers de charge relatifs à ces
opérations.
Cependant, dans la réalité, l’ensemble desdites mesures ne sont que peu accomplies, étant donné
que ladite commission n’a été que peu opérante. Quant aux autres aspects, il a été relevé que
parmi les motifs ayant souvent entravé la réalisation des opérations du logement social, figure le
retard accusé dans l’octroi des autorisations de construire.
Par ailleurs, dans les faits, les DRDCH ne sont pas membres des commissions d’autorisation des
projets, elles ne peuvent nullement exiger au moment de l’autorisation, le respect des prescriptions
techniques et architecturales spécifiques au logement social prévues dans les cahiers de charge.
En outre, le suivi à l’échelle régionale et local des projets incombe aux DRDCH. Les Directions
régionales du DCH sont, essentiellement compétentes pour exiger du promoteur des documents
avant le lancement des travaux et à la réception des projets pour délivrer le certificat de conformité
donnant droit aux avantages fiscaux.
Selon les termes des conventions, les DRDCH doivent se faire communiquer, au cours de
l’exécution des projets de logements sociaux, un document relatant l’état d’avancement des
travaux de construction. Cependant, les promoteurs ne produisent pas périodiquement ces
documents. Par conséquent, les DRDCH se trouvent dans l’incapacité à la fois juridique et
18
Voir à ce titre les rapports particuliers de la Cour des comptes, relatifs au contrôle de la gestion des SAO
Casablanca, Tamesna, Oujda.
18
pratique d’assurer le suivi de l’état d’avancement des travaux des projets de LS, des ventes, des
stocks en LS pour défaut de communication desdits documents par les promoteurs.
A cela, s’ajoute l’insuffisance des moyens logistiques et humains insuffisants souvent incapable
d’assurer le suivi vu le nombre important des projets et éparpillés sur leur ressort territorial. Selon
les responsables de certaines directions régionales, parfois celles-ci ne sont même pas informée
que des projets sociaux conventionnés sont en cours d’exécution sur leur territoire régional,
jusqu’à ce que s’y présente à ladite direction pour demander le certificat de conformité.
Ainsi, il y lieu de souligner que la délivrance du certificat de conformité par les DRDCH est
précédé par le permis d’habiter délivré après recollement des travaux par la commune afin
d’attester de la conformité aux projets autorisés. Les DRDCH n’en sont pas membres et sont
chargées après réception provisoire des projets de veiller sur le respect par le promoteur de ses
engagements, pendant une période d’une année quant à la maintenance et la réparation dans
certains cas de défaillance et d’usures précisés dans les cahiers de charge entre autres.
Par ailleurs, l’existence de deux procédures en l’occurrence celle relative au permis d’habiter et
celle donnant lieu au certificat de conformité, délivré par le DCH, qui s’interfèrent dans plusieurs
aspects, interpelle sur l’opportunité de fusion des deux procédures, en vue d’impliquer, dans les
différentes phases depuis l’instruction jusqu’à la réception, des tous les intervenants dans le
respect de la réglementation relative à l’urbanisme et des prescriptions du cahier de charges.
Dans la pratique, les contrôles effectués par les DRDCH interviennent après l’achèvement des
travaux, et se réduisent au contrôle de certains aspects apparents, à titre d’exemple ; le nombre
d’arbres devant correspondre au nombre de logements réalisés, les locaux techniques, les
installations sur les terrasses ou supports, les terminaisons des canalisations et autres.
Dans les fait, le certificat de conformité n’est qu’un récapitulatif, des différents documents de
contrôles techniques opérés sur les projets et atteste en se basant principalement sur ces pièces,
de leurs conformités aux prescriptions des cahiers de charges.
A ce titre, il est recommandé d’instaurer une procédure rigoureuse de suivi, contrôle et
réception des opérations du logement social en vue de consolider les efforts et les moyens
déployés par les différents intervenants dans l’objectif d’aboutir à une meilleure maitrise et
une plus grande efficience.
19
II. Réponse du Ministre de l’aménagement du territoire national,
de l’urbanisme, de l’habitat et de la politique de la ville
(Texte intégral)
Dans un premier temps, il serait judicieux de rappeler que ce département a été confronté à
plusieurs défis sociaux de taille, principalement la problématique de l’Habitat, en effet la
croissance démographique soutenu, ainsi que l’accroissement de la population urbaine, ont eu
pour conséquence le chamboulement des infrastructures de logement, et donc une capacité
d’absorption limitée pour satisfaire les besoins croissants des habitants, de telle manière à
obliger les ménages à faible revenu à s’installer dans un habitat insalubre.
Ces facteurs ont accentué la demande en Habitat, ce qui est à l’origine du déficit de logement
cumulé, mais également des quartiers non équipés, ce déficit est expliqué également par le
déséquilibre entre l’offre et la demande en habitat ainsi que les contraintes qui empêchent
d’assurer une offre diversifiée.
Dans ce contexte, et afin de promouvoir ce département, des programmes gouvernementaux
dans le domaine de l’habitat, en particulier celui de l’habitat social, ont été mis en place ; dans
le cadre de partenariat avec le secteur privé, conformément aux orientations de Sa Majesté le
Roi Mohammed VI que Dieu L’assiste.
En ce qui concerne l’évaluation des programmes de l’habitat social, et tel qu’évoqué dans le
rapport de la Cour des Comptes, ce ministère a réalisé en 2004, d’une étude " d’évaluation
du programme national de 200.000 logements sociaux et des dispositions de l’article 19 de la
Loi de Finances 1999-2000 " ; cette étude a fait ressortir les recommandations essentielles pour
la conception des fondements du nouveau dispositif, à savoir celui du LS 250.000DH (la baisse
du seuil du Logement Social à produire pour bénéficier des avantages fiscaux de 1500 à 500
logements sociaux, l’augmentation du seuil relatif à la valeur immobilière maximale
(200.000DH) qui doit accompagner l’évolution des prix de revient des composantes des
logements (foncier, matériaux de construction, du SMIG, …).
Aussi, et tel que recommandé dans le rapport de la Cour des Comptes, et dans sa logique
d’évaluation et de recadrage permanent de ses programmes, ce ministère a procédé en 2015 à
la réalisation d’une étude d’évaluation du dispositif de LS à 250.000DH et du programme à
140.000DH ; cette dernière a permis de mettre an avant un investissement au profit de
l’économie nationale de 100,6 MMDH et une valeur ajoutée de 86,5 MMDH contre des
exonérations fiscales de prés de 15,6 MMDH.
Au-delà de l’aspect quantitatif, ces programmes ont leurs acquis et ont permis l’amélioration
des conditions de confort, d’équipement et l’amélioration des statuts d’occupation des ménages
acquéreurs.
En termes de bilan, et depuis le lancement des deux produits à ce jour, pour le logement à faible
valeur immobilière 140.000 DH : sur les 36 173 unités, objet de conventionnement, 22.865 ont
été réalisées soit 63%.
En ce qui concerne l’habitat social à 250.000 DH, 1114 conventions ont été signées pour la
réalisation de 476.979 unités dont 350.310 unités ont été effectivement réalisées.
Ce dynamisme de production a permis de participer à résorber le déficit en logements qui est
passé de 800.000 unités en 2012 à 400.000 unités actuellement.
Pour la question du ciblage, l’accès au logement social à 250.000 DH, conformément aux
dispositions de la loi des finances 2010, est conditionné par la non propriété. En ce qui concerne
le logement social à Faible Valeur Immobilière (140.000DH), l’accès est conditionné par le
20
niveau de revenu (inférieur ou égal à deux SMIG), ainsi que la non propriété. Par conséquent,
le glissement est apprécié par le revenu et par le statut de non propriétaire du ménage concerné.
Dans le sens des recommandations du rapport, ce ministère pousse la réflexion sur un éventuel
recadrage de ces dispositifs qui permettra de dissocier les deux programmes du point de vue
superficie, spécificités architecturales et urbanistiques, et aussi de répondre à une demande
toujours persistante en logements sociaux (40% de la demande en logements concerne les
logements à prix de vente compris entre 140.000 DH et 250.000 DH, selon l’étude relative à
l’enquête national sur la demande en Habitat réalisée en 2016 par ce ministère) et ce, dans le
cadre de programmes intégrés incluant les équipements de base et de proximité ainsi que les
conditions de vie aidant à l’épanouissement des ménages.
Certes, davantage d’effort pourrait être déployé pour aboutir à une meilleure maîtrise et une
plus grande efficience de ces deux produits au point de vue qualité d’exécution ; toutefois, il
est nécessaire de rappeler que cette question a été abordée par l’instauration des moyens de
suivi et de contrôle suivants :
- Le cahier de charges : document traçant les obligations du promoteur désirant réaliser ce
type d’habitat et qui se voit obligé, de par ses clauses, de recourir, en plus des exigences
techniques spécifiques au logement social, aux règlements d’urbanisme et de
construction en vigueur, d’avoir recours aux produits normalisés, faute de quoi, ce
dernier ne pourra pas obtenir le certificat de conformité.
- le certificat de conformité(CC): tel qu’évoqué dans le rapport, ce ministère conforte la
possibilité de reconsidérer le mécanisme d’octroi du certificat de conformité en
concomitance avec le permis d’habiter ou alors l’octroi d’un certificat de conformité
global basé sur des CC partiels délivrés tout au long du chantier en vue d’assurer un suivi
effectif des réalisations.
Concernant le suivi, l’implication des services locaux du ministère est également de mise. En
effet, et selon l’article 9 de la convention, le promoteur est tenu de produire périodiquement au
département chargé de l'Habitat un document relatant l'état d'avancement des travaux de
construction réalisés et les indications relatives aux conditions et aux prix de commercialisation
des logements sociaux, ce qui permettra un suivi rigoureux.
Aussi, et en vue d’appuyer cette action de suivi, la circulaire N° 682 du 2 février 2017 a été
adressée aux services locaux pour, qu’au cours de la phase de réalisation des travaux, et dès
l’ouverture du chantier, ces derniers sont tenus de :
- Relancer les promoteurs pour la production de documents périodiques relatant l’état
d’avancement des travaux et ce, selon les dispositions de la convention en soulignant
que ces rapports constitueront une condition pour l’obtention du certificat de
conformité ;
- Effectuer des visites périodiques et inopinées aux chantiers pour mieux appréhender les
travaux réalisés.
Dans le même volet, il est à rappeler qu’au moment de la demande d’autorisation de construire,
la convention et le cahier des charges relatifs à la réalisation des logements sociaux sont des
pièces constitutives du dossier déposé et les Agences Urbaines veillent à leur respect.
Selon les remontées du terrain, ces programmes connaissent certains dysfonctionnements
notamment, en ce qui concerne, la densité de certains projets construits en masse, manque
d’équipement de base et de proximité ; à cet effet, ces programmes gagneraient à être révisés
tout en impliquant les départements concernés afin de pousser une réflexion commune capable
de proposer des solutions adaptées aux dysfonctionnements recensés.
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Le rapport a également abordé la question de la commercialisation et des méventes des
logements à faible valeur immobilière (LFVI), des difficultés ont été enregistrées au niveau de
la commercialisation de certaines unités, notamment en raison de la faiblesse des revenus des
ménages, mais également de leur non adhésion aux programmes de logements proposés,
préférant ainsi bénéficier de lots de terrains.
En effet, ce ministère, admet qu’une politique d’accompagnement adaptée des pôles urbains
devrait permettre l’amélioration de l’attractivité de ces zones dans un cadre de cohérence des
programmes et de concertation avec les départements impliqués dans le développement urbain
et ce par la mise en place des équipements publics et des réseaux routiers et autres.
La conception de base du programme des villes nouvelles a été faite en tenant compte de
l’ensemble des composantes d’une ville (habitation, loisirs, équipements, activités…).
Dans ce volet, le rapport évoque certains dysfonctionnements qu’il y a lieu de corriger, sachant
que le démarrage de ces villes nouvelles s’est fait en l’absence d’un cadre juridique précis,
permettant d’encadrer leur création.
Toutefois, Le Ministère de l’aménagement du territoire national, de l’urbanisme, de l’habitat et
de la politique de la ville, conscient de cette problématique a élaboré un projet de loi relatif à
ces villes nouvelles, qui, est actuellement au niveau du Secrétariat Général du Gouvernement.
Des plans de relance, concernant les villes nouvelles de Tamesna et de Tamansourt ont été
établis, ceux de Chrafat et de Lakhyayta sont en cours et impliquent un ensemble de partenaires
concernés.
Sur le plan du partenariat, l’objectif principal est de contribuer à l’intensification de l’offre,
tout en la diversifiant, en logements pour les différentes catégories sociales et de réduire ainsi
le déficit en logement au niveau national.
Il y’a lieu de préciser, que le dispositif de partenariat avec les promoteurs privés du Groupe Al
Omrane est décliné à travers une vente conditionnée et des engagements réciproques,
notamment sur le foncier public pour lequel une convention de partenariat précisant les
engagements de chaque partie est signée.
En conclusion, ce ministère considère les recommandations de la Cour des Comptes comme
une plateforme pour amélioration et un meilleur recadrage des dispositifs des logements
sociaux et des conditions de leurs exécutions.
Il est à signaler que dans le même sens, le Département Chargé d’Habitat œuvre à une
meilleure réorientation de ces programmes pour redonner un nouveau souffle au secteur
immobilier et ce, en menant la reflexion sur d’autres segments à savoir le logement de la
classe moyenne « inférieure », ce qui permettra d’éviter à ces derniers d’acquérir des
logements sociaux.
D’autres mesures d’ordre qualitatif sont également abordées avec les concernés, notamment
les aspects touchant à la territorialisation des approches pour répondre aux besoins
spécifiques des régions (certaines régions ne présentent pas d’intérêt pour les promoteurs)
et à la mixité sociale.
Aussi, la mise en œuvre de toutes ces mesures correctives du logement social, et de par la
nature de ce programme, impliquant plusieurs départements, requiert davantage
d’implication des concernés et un engagement de la part de tous ; et ce afin de promouvoir
la dynamique de ce secteur, et faciliter l’accès à un logement décent, conformément aux
dispositions de la constitution.
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