Deuil
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Deuil
Le deuil est certainement l’une des épreuves les plus difficiles à traverser au cours d’une vie1. Il
s’agit d’un « état affectif douloureux provoqué par la mort d’un être aimé » et de « la période de
douleur et de chagrin qui suit cette disparition »1. Cependant, bien que cette définition désigne
la réaction au décès d’un proche, toute perte ou transition marquant la vie d’une personne peut
représenter un deuil2. Il faut beaucoup de temps pour se remettre d’une telle épreuve et le
processus de guérison peut s’étaler sur des mois, voire des années2. Se montrer proactif quant à
sa guérison contribue néanmoins à accélérer le processus et à faire du deuil une occasion de
croissance, et ce, malgré le défi qu’il représente3.
Le processus du deuil
Le deuil est un processus adaptatif que l’on doit traverser pour apaiser la douleur éprouvée à la
suite d’un décès2,4. Outre la perte à la suite d’un décès, les pertes physiques liées au
vieillissement ou à une maladie grave, la perte d’un emploi, la fin d’une relation amoureuse ou
amicale, la perte de ses illusions d’enfant, la perte d’un rêve d’adolescent ou encore le départ de
la maison familiale pour entamer sa vie d’adulte provoquent tous des périodes de deuil plus ou
moins longues3. Il s’agit d’un long processus dont la finalité est de laisser aller celui ou ce qui a
été perdu. C’est un processus de détachement5.
La colère
La personne qui expérimente la perte peut ressentir une grande trahison, un ressentiment
envers la vie et l’univers entier6,8. De la colère peut aussi être ressentie contre la personne
disparue : son départ provoque un vide douloureux. Il arrive cependant que certaines personnes
ne se permettent pas de ressentir ce type d’émotions contre une personne décédée. C’est
pourquoi elles peuvent déplacer leur colère contre une personne de l’entourage ou contre des
éléments de l’environnement6,7,8. Cette étape peut donc se révéler difficile pour les proches de
l’endeuillé6. Si cette étape n’est pas surmontée, la colère peut éventuellement se transformer
en amertume8.
Le marchandage
À cette étape, qui ne se produit pas dans tous les cas, la personne espère un retour en arrière
pour éviter la perte. Voyant que la colère n’a pas changé la situation, la personne tente de
conclure des accords avec une instance plus grande qu’elle (Dieu, l’Univers ou autre, selon ses
croyances). Elle peut se dire, par exemple : « Si mon grand-père guérit, je vais être une meilleure
personne. »6,8. Elle cultive alors l’espoir que son désir le plus cher se réalisera peut-être si elle
adopte une bonne conduite6. L’espoir que la personne perdue revienne est une expérience
normale qui persiste souvent jusqu’à ce que le deuil soit complété8. Cette phase peut aussi être
caractérisée par le regret et la culpabilité6,7 : la personne pense au passé, ce qui met en lumière
tous les « si » : « si je l’avais accompagnée ce soir-là, elle n’aurait pas eu d’accident de voiture et
elle serait encore là ». Elle en arrive alors à se rendre responsable de la situation et s’imagine
tout ce qu’elle aurait pu faire pour changer les choses7.
La grande tristesse
Comme l’étape de la colère, la grande tristesse est une phase importante dans laquelle la peine
a besoin d’être vécue et exprimée8. L’intensité de la tristesse ressentie à cette étape est tout à
fait normale7,8. Or, la réaction des gens est souvent de tenter de remonter le moral de la
personne attristée, ce qui indique leur inconfort par rapport à la souffrance de l’endeuillé6. Les
émotions ressenties durant cette période peuvent générer une certaine confusion. Une peur
peut aussi apparaitre : celle d’avoir de la difficulté à continuer d’avancer dans la vie avec toute
cette peine7,8.
L’acceptation
Le deuil se complète avec cette dernière étape, si la personne a pu
traverser son deuil comme elle en ressentait le besoin, et si elle a obtenu
le soutien nécessaire à cet effet6. La personne n’est plus habitée par des
émotions vives lorsqu’elle songe à la personne disparue. Elle ressent
plutôt du soulagement en ce qui concerne cette situation. Elle est
finalement en paix avec son deuil8.
Voici une description plus détaillée de certaines expériences émotives vécues durant le deuil :
Tout d’abord, la tristesse, émotion typique du deuil, se présente par des pleurs et une grande
peine. La souffrance éprouvée est directement liée à la prise de conscience de la perte vécue.
Certains vivent la perte comme un châtiment ou une punition13. La perte de la maîtrise de sa vie
et l’impuissance éprouvée envers la situation peuvent amener la personne à ressentir de
l’angoisse13. Cette angoisse peut provenir de la peur de vivre une nouvelle perte, de la prise de
conscience de sa propre mort ou de ses limites en tant qu’être humain. Il est normal de ressentir
le besoin d’exprimer son angoisse et ses peurs à une personne de confiance. L’absence physique
de la personne disparue peut nous amener à vivre une grande solitude et un sentiment de vide.
Les souvenirs du défunt sont nombreux et il est normal d’avoir l’impression que tout ce qui nous
entoure nous le rappelle3. La mort d’un proche peut aussi raviver les peurs d’abandon de
l’enfance et l’angoisse liée au fait d’être vulnérable et seul5.
Dans les circonstances d’un deuil, la colère, l’agressivité et la révolte sont des émotions
couramment éprouvées. Celles-ci peuvent être dirigées vers diverses cibles comme la personne
décédée, l’entourage, la vie en général ou envers soi-même10. De ce fait, il est important que
l’entourage comprenne que la colère de la personne en deuil n’est pas réellement dirigée vers
eux et que l’expression de celle-ci est le signe d’un fort lien de confiance ressenti par l’endeuillé
à leur égard10.
Lorsque l’agressivité est dirigée vers soi-même, elle se transforme souvent en culpabilité. La
personne peut se sentir coupable de ne pas avoir été présente au moment du décès, de paroles
prononcées ou de choses qui n’ont pas été nommées au défunt avant son départ. La
culpabilité peut aussi être ressentie lorsqu’un sentiment de liberté survient à la suite du décès.
Cette expérience se produit essentiellement lorsque le défunt était souffrant, à la suite d’une
maladie, par exemple. Sa mort se vit donc comme un soulagement, ce qui peut amener
l’endeuillé à se sentir coupable d’avoir de telles pensées et parfois d’avoir espéré le décès de la
personne. Toutefois, après avoir vu une personne souffrir, il est normal de vivre une certaine
libération lors de sa mort. Après tout, cette personne est aussi libérée de sa souffrance13. La
culpabilité peut parfois être excessive et devenir destructrice lorsque les attentes de la personne
envers elle-même sont irréalistes10. Par exemple, croire que l’on aurait dû être au chevet de la
personne 24 heures par jour ou croire qu'il aurait fallu ne jamais avoir blessé l’autre de son
vivant sont des attentes irréalistes. Prendre conscience de celles-ci et les exprimer à quelqu’un
peut aider la personne à s’apaiser et à diminuer son sentiment de culpabilité.
Monbourquette parle d’une dernière étape dans le vécu du
deuil : la « grande braille »3. Cette étape est importante, car
c’est à ce moment que la personne endeuillée prend conscience
de la perte définitive du défunt. Elle réalise alors qu’il est
impossible que ce dernier revienne et qu’elle doit continuer à
vivre sans lui. Lors de la « grande braille », la peine envahit la
personne avant de la mener à une acceptation profonde de la
perte. Ensuite, l’endeuillé ressent un profond sentiment de paix
marquant ainsi la fin de son cheminement de deuil13. Même si
le deuil est traversé, les dates anniversaires et significatives
pourront être encore sensibles pendant longtemps.
Bien qu’une perte provoque son lot d’émotions, les pensées peuvent également être affectées.
Il peut en effet devenir difficile de penser clairement ou encore de rester concentré, surtout au
début d’un deuil alors que les émotions sont intenses. Certaines personnes éprouvent aussi de
la confusion par moments14. Pour ces motifs, il peut être prudent de remettre à plus tard la prise
de décisions importantes 10.
Le décès d’un proche peut également venir bousculer notre vision de la vie et de la mort. En
effet, la mort devient une réalité plus concrète que jamais. Nos croyances peuvent être
ébranlées et demandent parfois à être redéfinies15.
Réactions physiques
Le corps réagit aussi au deuil. Ainsi, des symptômes physiques peuvent apparaître, tels qu’une
grande fatigue ou des douleurs. Cela peut rendre les activités quotidiennes plus éprouvantes
qu’à l’habitude. La sécrétion d’hormones du stress peut aussi affaiblir le système immunitaire. Il
est donc important de ne pas être trop exigeant envers soi-même, de prendre du temps pour
soi, de s’assurer de dormir suffisamment et de bien manger14.
Différences hommes/femmes
Bien que notre sexe ne détermine pas la façon dont nous vivons un deuil, il peut tout de même
l’influencer16. Ainsi, en raison des stéréotypes nord-américains, les femmes sont généralement
plus à l’aise d’exprimer leurs émotions et de demander de l’aide, alors que les hommes sont
moins encouragés à le faire. Il peut donc être plus difficile pour un homme de traverser le
processus du deuil. Pour eux, l’agressivité et la colère sont des émotions plus facilement
acceptées. Pour les femmes, la tristesse est l’émotion attendue17. Il en découle que les
stratégies utilisées par les deux sexes peuvent être différentes. Effectivement, alors que les
femmes ont tendance à être plus émotives, les hommes vivent davantage leur deuil par les
pensées et par des stratégies en lien avec l’action. Cela ne veut toutefois pas dire qu’il existe de
meilleures façons de traverser cette période, mais bien qu’il existe différentes façons de le
faire18.
Si vous avez besoin d’aide pour traverser un deuil difficile, vous pouvez vous
adresser à un professionnel en contactant le Service de psychologie et
d’orientation de l’Université de Sherbrooke (SPO@USherbrooke.ca,
819-821-7666), l’Ordre des psychologues du Québec (ordrepsy.qc.ca) ou en
contactant la ligne d’écoute de la Maison Monbourquette au 1 888 533-3845
(1 888 LE DEUIL).