Daniel Tokateloff
Daniel Tokateloff
Daniel Tokateloff
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MÉMOIRE PERSONNEL PRÉSENTÉ AU BAPE
CONCERNANT LE PROJET DE MINE À CIEL OUVERT MATAWINIE
Par Daniel Tokatéloff, ingénieur à la retraite
Date : 17 février 2020
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Présentation personnelle
Je m’appelle Daniel Tokatéloff, je suis résident de St-Michel-des-Saints depuis 40 ans, et je suis ingénieur à la retraite
(membre de l’Ordre des ingénieurs du Québec No. 21470).
Durant mes 45 ans de vie professionnelle, j’ai travaillé pour des firmes de génie-conseil sur des projets industriels et de
centrales hydro-électriques et thermiques. J’ai aussi donné des cours en Algérie à des ingénieurs de la Sonelgaz
(l’Hydro-Québec algérien) sur les études de faisabilité pour centrales thermiques.
Je veux aussi mentionner que, parallèlement à ma profession, j’ai été très impliqué dans le développement du tourisme
de la région de St-Michel-des-Saints puisqu’en 1979, j’ai créé la 1ère compagnie de tourisme d’aventure au Québec, du
nom de « Expéditions Nord-Québec Inc.», qui organisait des voyages en canot entre les villages de Manawan et de St-
Michel-des-Saints. Pendant 24 ans, nous avons fait parcourir les magnifiques lacs et rivières de la région à des milliers
de touristes essentiellement européens, et ceci sans aucun impact sur l’environnement. Et je suis fier de déclarer que la
1ère fois que le nom de St-Michel-des-Saints est apparu dans des catalogues de voyagistes en Europe (en Allemagne et en
France) en 1980, c’était pour nos voyages en canot au départ du village de St-Michel-des-Saints.
Cette introduction était nécessaire pour démontrer la passion que je porte à cette région magnifique, cette région que
j’essaie de protéger de la destruction, pour nos enfants et petits-enfants à tous.
Je suis aussi le secrétaire de l’Association pour la protection du lac Taureau (APLT), mais je présente ce mémoire en mon
nom personnel.
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RÉSUMÉ DU MÉMOIRE
En conclusion : Tout ce que cette controverse autour de cette mine pourrait nous laisser, c’est des montagnes de
résidus plus ou moins acides et contaminés pour les siècles à venir (comme toutes les autres mines l’on fait), le tout
accompagné d’une grande division entre les citoyens de notre communauté. Ce n’est pas de l’acceptabilité sociale, mais
plutôt de la division sociale.
Donc au total, un bilan extrêmement négatif, qui ne peut aucunement se justifier par la création de quelques emplois
temporaires.
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PROJET MINIER MATAWINIE
MÉMOIRE PERSONNEL PRÉSENTÉ AU BAPE
Par Daniel Tokatéloff, ingénieur à la retraite
17 février 2020
Terminologie :
« Art. 7.2.1 » - réfère aux articles et paragraphes du Vol. 1 de l’Étude « ÉIES » du promoteur.
« QC 32 » - réfère aux questions émises par le MELCC dans son document du 8 juillet 2019.
« Rép. à QC-20 » - réfère aux réponses soumises par NMG le 1er octobre 2019 aux questions du MELCC.
« Plan de réaménagement et de restauration » - réfère au plan final soumis par NMG le 5 novembre 2019.
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Préambule
Dans ce mémoire présenté en mon nom personnel, j’essaie d’utiliser mon expérience professionnelle d’ingénieur à la
retraite pour effectuer une revue technique (partielle bien sûr, considérant les 6000 pages de l’étude d’impact du
promoteur) des aspects qui m’inquiètent le plus sur ce projet, en complément des analyses effectuées par le MELCC et
les autres ministères, et ceci dans les limites de mes compétences. De plus, sur la base de mon expérience en études de
faisabilité pour différents projets, je me permets aussi de commenter l’étude de faisabilité du promoteur.
Je sollicite l’indulgence de la Commission pour la longueur de ce mémoire, mais considérant que l’étude d’impact du
promoteur comporte 6000 pages tout en étant extrêmement mal structurée, il ne m’était pas possible d’en faire une
revue technique de quelques pages seulement.
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coûts de financement, droits de douanes et taxes. De plus, les coûts de restauration étaient prévus à 12,5 M$ en 2018
alors qu’ils sont maintenant évalués à 25 M$ (selon le Plan de restauration final, doc. PR5.5), et une modification
majeure a été annoncée par le promoteur dans ses réponses aux questions du MELCC puisque le convoyeur électrique
est maintenant remplacé par des camions diesel de 63 tonnes (réf. doc. PR5.3, Annexe 1).
Autre incertitude importante : les coûts de la nouvelle ligne électrique à 120 kV et de son raccordement au réseau sont
basés sur un chiffre très préliminaire fourni par Hydro-Québec et devront être confirmés, ce qui peut donner de grosses
surprises !
Ces dépassements majeurs de coûts sont d’autant plus probables que le projet ne sera pas réalisé selon un mode « Prix
fixe - Clé en main » (ou « IAC » pour « Ingénierie-Approvisionnement-Construction ») par un entrepreneur général, mais
selon le mode classique « IAGC – Ingénierie-Approvisionnement-Gestion de la construction », dans lequel le Promoteur
prend lui-même tous les risques de dépassements de coûts. En conséquence, la probabilité est très élevée pour que le
CAPEX augmente de façon importante (+ 30 % et plus) lors de la construction.
Et en plus, il ne faut pas négliger la part très importante du graphite synthétique chez plusieurs fabricants de batteries
dont Tesla en est un exemple principal. Le graphite synthétique (ou « artificiel » comme l’appelle Tesla) est donc un des
plus grands concurrents du graphite naturel au niveau mondial.
Donc à l’échelle mondiale, non seulement l’offre a suivi la demande, mais de plus, la bulle du graphite commence à se
dégonfler ! Cette situation est très problématique pour ce Promoteur qui devra faire face à la concurrence
internationale pour vendre son produit, d’autant plus que son gisement de St-Michel-des-Saints présente une
concentration en graphite parmi les plus basses au monde (4 % en moyenne).
D’ailleurs au Québec même, il existe trois projets en cours de développement qui annoncent des concentrations 5 à 6
fois supérieures : il s’agit des projets de Mason Graphite, de Focus Graphite et de Berkwood Resources, tous trois situés
sur le gisement du lac Guéret dans la région de Manicouagan. Ces projets ont accès à des concentrations de graphite
entre 17 % et 25 %, ce qui signifie des volumes d’extraction de minerai et de gestion de résidus miniers 5 à 6 fois
inférieurs au projet de NMG. De plus, ces projets se trouvent dans une région non habitée et n’auront pas les mêmes
impacts négatifs graves sur une population que le projet de St-Michel-des-Saints, ce qui facilitera leur acceptation et leur
développement.
Signalons malgré cela que le projet de Mason Graphite, qui possède 3 ans d’avance sur le projet de NMG (incluant les
permis, la construction du concentrateur et une usine-pilote de sphéronisation), rencontre les mêmes problèmes de
vente sur les marchés internationaux et n’a toujours pas d’entente de vente de ses produits.
Rappelons de plus que le promoteur NMG n’a présentement aucune garantie qu’il parviendra à vendre toute sa
production, et la preuve en est qu’à l’heure actuelle (début 2020), il n’a pas été capable d’obtenir des ententes fermes
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de vente pour son concentré de graphite avec de vrais clients (fabricants de batteries), malgré tous ses efforts depuis
trois ans, et malgré ses annonces que son usine de démonstration (en exploitation depuis octobre 2018) allait lui
permettre de convaincre des acheteurs potentiels. Cela est d’autant plus surprenant que depuis 1 an ½ il prétendait
produire au moins 1 000 tonnes de concentré de graphite par an pour distribuer à des clients potentiels grâce à son
usine de démonstration, dans le but précisément de conclure des ententes de vente. À noter que, selon l’article du
journal L’Action de Joliette (1er janvier 2020), on apprend que cette usine de démonstration n’en a en fait produit que
200 tonnes en 1 an.
Cette faible production de l’usine de démonstration est vraisemblablement liée à ses difficultés pour maitriser son
procédé, tel que le promoteur le révèle lui-même dans sa lettre d’engagement au MELCC du 25 novembre 2019 (doc.
PR5.7).
Pour dissimuler cet échec dans ses efforts de vente, ce promoteur annonce avoir une entente avec la société Traxys
(basée au Luxembourg), alors que cette entente n’est que pour une aide de marketing puisque cette société Traxys n’est
qu’un courtier en minéraux et non pas un client réel.
Il faut aussi noter que le promoteur lui-même a des doutes sérieux sur ses volumes de vente puisque dans un article du
magazine CIM (Canadian Institute of Mining, Metallurgy and Petroleum) le 14 février 2019, le président de NMG, Éric
Désaulniers, fait quelques révélations surprenantes sur son projet : (voir le lien http://magazine.cim.org/en/projects/all-
in-for-electric-en/). En effet, il annonce lui-même la possibilité de diminuer sa production à 52 000 tonnes au milieu des
années 2020 si le marché du graphite ne répond pas à ses prédictions. Il semble donc que NMG se rende bien compte
que le marché du graphite risque de chuter à court terme.
En fonction de ce qui précède, il est tout à fait irréaliste de penser que le promoteur pourra vendre 100 000 tonnes par
an de concentré de graphite, sans interruption ou diminution durant les 26 années de son exploitation.
1.3.2 - Évolution du marché des véhicules électriques (VE)
En addition au surplus prévisible dans l’offre de graphite venant des nombreuses mines concurrentes à travers le
monde, les observateurs remarquent de plus en plus que le marché même des véhicules électriques a beaucoup de mal
à décoller. En effet, malgré toutes les subventions accordées aux acheteurs de VE dans beaucoup de pays occidentaux
et malgré les menaces de pénalités aux fabricants et aux utilisateurs qui ne se convertissent pas aux autos électriques, la
part de marché des VE reste famélique dans tous ces pays (oscillant entre 1 et 3 %, avec peu d’amélioration d’une année
à l’autre).
Il est souvent mentionné que ce marché ne décollera pas tant que les batteries disponibles seront de la 1ère génération,
c’est-à-dire de la technologie Lithium-Ion-Graphite qui se révèle de plus en plus dépassée. C’est uniquement l’arrivée
des nouvelles technologies (dont plusieurs sans graphite, voir la section ci-dessous à ce sujet) qui permettront à ce
marché des VE de se développer, tout en restant limité aux clients aisés des pays occidentaux.
En conclusion, les annonces des gouvernements occidentaux selon lesquelles les VE vont remplacer les véhicules à
combustion d’ici 20 ans apparaissent de plus en plus comme des vœux pieux et surtout comme des prétextes politiques
pour ne pas agir contre les véritables producteurs de GES (les industries et les centrales électriques à énergie fossile –
charbon, mazout, gaz naturel).
Cet état de fait est un facteur supplémentaire majeur dans la stagnation prévisible de la demande en graphite pour les
années à venir : la bulle du graphite est déjà en train de se dégonfler !
1.3.3 - La spirale du promoteur : vers une 2ème usine pour acheter son graphite
Le promoteur réalise bien ce cul-de-sac qu’il va rencontrer dans la vente de son concentré de graphite puisqu’il a changé
récemment sa stratégie de vente : comme il ne peut pas vendre son produit à des fabricants de batteries, il va se vendre
sa production à lui-même !! (voir ses communiqués du 12 novembre et du 20 décembre 2019).
En effet, depuis l’été 2019, le promoteur a annoncé qu’il allait investir dans une autre entreprise, une usine de
sphéronisation du graphite qui serait implantée à Bécancour et qui achèterait la production de sa mine de St-Michel-
des-Saints pour répondre à la demande de l’industrie des batteries. On retrouve ici la spirale habituelle de fuite en
avant des entreprises en difficultés financières : une 1ère entreprise a des problèmes de rentabilité, donc on investit dans
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une 2ème entreprise qui devrait rentabiliser la 1ère. L’expérience a montré que dans la majorité des cas, tout ce que ce
scénario pouvait produire était une plus grosse faillite.
Il est d’ailleurs tout à fait illusoire de penser qu’il pourra vendre son graphite à son prix de 1730 USD/t (prix requis pour
rentabiliser son 1er projet) à sa 2ème usine si le prix du marché est inférieur à ces chiffres. Ce serait couper tout potentiel
de vente de la production de sa 2ème usine sur les marchés, ce qui entrainerait une faillite assurée.
1.3.4 - Le potentiel de vente de sa production
Le promoteur abandonne donc ses prétentions exprimées depuis trois ans selon lesquelles il allait être le plus gros
fournisseur de graphite pour batteries en Amérique du Nord, allant même jusqu’à prétendre qu’il allait devenir le
fournisseur exclusif de Tesla (voir son communiqué de juillet 2017). D’ailleurs, on sait maintenant que les batteries de
Tesla ont beaucoup évolué depuis 2017. La nouvelle batterie annoncée par Tesla en automne 2019 (« Million Mile
Battery ») utilise un graphite exclusivement synthétique.
Par ailleurs, le promoteur introduit aussi dans sa propagande le potentiel nouveau des centrales de stockage d’énergie
dans les réseaux électriques. Et effectivement, c’est un nouveau créneau qui se développe dans le monde, mais pas
forcément en faveur des batteries Li-Ion-Graphite puisque plusieurs de ces centrales de stockage utilisant ces batterie
ont eu des problèmes d’incendie et d’explosion (en Arizona et en Corée), au point où l’État de l’Arizona a récemment
interdit l’utilisation de ces batteries dans de telles centrales.
En conséquence, pour compenser ce retour à la réalité, le promoteur annonce maintenant qu’une partie de sa
production de concentré de graphite sera destinée non plus aux batteries, mais aux marchés traditionnels (réfractaires,
électronique, lubrifiants). Cependant ces marchés sont déjà saturés et couverts par des fournisseurs chinois et hindous.
Donc c’est un autre marché que ce promoteur aura beaucoup du mal à pénétrer.
Le promoteur, en désespoir de cause, va même jusqu’à mentionner dans son étude d’impact, la fabrication de mines de
crayons !!!!! … Quel potentiel à l’époque de l’informatique !!!
1.3.5 - Évolution de la technologie des batteries
● Avènement des nouvelles technologies de batteries sans graphite pour véhicules électriques.
En effet, tous les grands fabricants travaillent sur les nouvelles générations de batteries (surtout les batteries solides,
soit sans graphite, soit utilisant une faible quantité de graphite souvent d’origine synthétique) dont la mise en service
commerciale est annoncée dès 2025. D’ailleurs au Québec même, le Centre d’excellence d’Hydro-Québec et son
directeur le Dr Karim Zaghib annoncent la disponibilité commerciale de batteries « Tout solide » sans graphite pour
2025-2026 (réf. entrevue de Radio-Canada/Téléjournal du 6 novembre 2019). Et tout récemment en janvier 2020, le Dr
Zaghib a conclu deux ententes : l’une pour l’achat des brevets pour un électrolyte solide pour sa technologie de batterie
« Tout solide », et l’autre avec Mercedes-Benz pour une usine pilote de batteries solides à anodes métalliques, donc
sans graphite.
Parmi toutes les nouvelles technologies de batteries de 2ème, 3ème et même 4ème génération en développement à
travers le monde, un récent communiqué de la société californienne ENEVATE attire l’attention (12 février 2020). Cette
société, financée par le groupe Peugeot-Nissan-Mitsubishi, annonce une batterie dont l’anode sera constituée d’une
feuille de silicium et donc entièrement sans graphite, et qui serait commercialisée dès 2024-2025 (voir le lien
https://www.businesswire.com/news/home/20200114005046/fr/ )
De plus, tel que mentionné plus haut, la nouvelle batterie annoncée par Tesla en automne 2019 (« Million Mile
Battery ») utilise un graphite exclusivement synthétique fourni par un producteur chinois particulier et sélectionné.
● Construction de « Gigafactories » de batteries
De nombreuses annonces de projets de nouvelles « Gigafactories » de fabrication de batteries ont été faites à travers le
monde ces deux dernières années afin de répondre à la demande. Mais il faut signaler que très peu de ces projets ont
dépassé le stade des annonces politiques.
Un exemple important est le projet surnommé « l’Airbus des batteries » qui a été annoncé en mai 2019 et qui vient
d’obtenir la promesse d’un financement de 3,2 milliards d’Euros par plusieurs pays européens. Mais ce projet se dirige
vers la fabrication de batteries de nouvelles génération puisqu’il a été identifié par ses promoteurs (plusieurs grosses
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sociétés européennes, dont Total) qu’il était préférable de laisser le marché des batteries de 1ère génération aux sociétés
asiatiques qui dominent déjà ce marché, et d’investir plutôt directement dans les nouvelles technologies.
Le résultat sera que les batteries asiatiques de 1ère génération Lithium-Ion-Graphite seront considérées comme des
batteries « bon marché » qui continueront de propulser les petits véhicules électriques chinois et coréens, tout en
dépannant pour quelques années les constructeurs automobiles européens dans l’attente des nouvelles batteries de
2ème génération (qui seront essentiellement du type « Solid State » sans graphite).
● Développement des nouvelles technologies basées sur l’hydrogène : des technologies très prometteuses, sur
lesquelles de grands manufacturiers travaillent actuellement (Toyota, Honda, Hyundai…). La technologie des
« piles à combustible » utilisant l’hydrogène est en concurrence avec celle des batteries Li-Ion-Graphite
conventionnelles et avec celles de type « Solid State ». À noter que pour les équipements industriels (gros
camions, autobus, tracteur), l’hydrogène semble être la solution la plus efficace techniquement et
économiquement et plusieurs pays (dont la Chine) se dirigent vers cette filière.
● En conséquence, les batteries Li-Ion-Graphite de 1ère génération vont devenir dépassées dans les 5-6 années à
venir et la « bulle du graphite » va continuer de se dégonfler.
Donc les prétentions du Promoteur selon lesquelles il pourrait vendre 100 000 tonnes /an de son graphite naturel au
prix de 1730 USD/tonne pendant 26 ans apparaissent comme non fondées et hautement spéculatives.
1.4 - Prix de vente du graphite irréalistes
Suite à l’évolution du marché telle que décrite ci-dessus, le résultat constaté de nos jours (fin 2019) est qu’il y a un
surplus de graphite sur les marchés, ce qui a entrainé une chute des prix du concentré de graphite naturel.
Selon son étude de faisabilité publiée en décembre 2018, le promoteur prétendait que les prix de vente du produit final
de concentré de graphite serait de 1 532 $US/tonne pendant les 1ers cinq ans et de 1 730 $US/t pour les 20 années
suivantes, un prix tout à fait irréaliste et spéculatif. La base de ces prix serait des prévisions de l’agence Benchmark
Minerals datant d’octobre 2018 (voir le document DA20.1 dans la documentation au BAPE).
Quelques commentaires sur ces prix :
-Sur la même base des prévisions de Benchmark Minerals, l’étude de préfaisabilité de décembre 2017 annonçait un prix
sur 25 ans de 1 429 $US/t. Le même prix de 1 429 $US/t figurait encore dans le rapport de mise à jour de cette étude,
rapport publié le 10 août 2018;
- Entretemps, le promoteur avait annoncé le 27 juin 2018 qu’il prévoyait vendre son produit au prix de 1 124
$US/t moins les coûts de transport, soit un prix final d’environ 1 077 $US/t, sur la vie complète de son projet (25 ans).
(Réf. communiqué de NMG du 27 juin 2018).
- D’abord, ceci confirme que le marché du graphite est très volatil, et ensuite que les prévisions de Benchmark
Minerals vont dans tous les sens et manquent complètement de fiabilité. Mentionnons qu’en fait, cette agence soi-
disant indépendante n’existe que par les sociétés minières dans le but de promouvoir les investissements dans
l’industrie minière. Et cette agence a démontré récemment une fiabilité déficiente en se trompant complètement sur
les prix du lithium. Ceci montre que le promoteur regarde ce marché à travers des lunettes roses en basant la
rentabilité de son projet pour 26 ans sur la valeur la plus élevée des prévisions très volatiles des dernières années.
- La même agence Benchmark Minerals, la référence du promoteur pour l’établissement de ses prix, annonçait
déjà des prix à la baisse en mai 2019 (entre 650 et 750 USD/t pour une répartition de grosseurs de flocons entre gros et
moyens, donc similaire à celle de NMG), selon la lettre aux investisseurs « Graphite Miners News – Dec. 2019 » publiée
mensuellement.
- Pour de gros flocons de graphite qui se vendent à un prix plus élevé, la récente courbe de prix annoncée par la
société Northern Graphite montre que même ces flocons se vendent entre 800 et 900 USD/tonne à l’automne 2019 (voir
la courbe ci-dessous).
- Notons de plus que très récemment (octobre 2019) la minière Syrah Resources a été obligée de couper sa
production et de vendre sa production de graphite à 400 USD/t depuis sa mine du Mozambique (pour des flocons de
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taille moyenne), alors que des cas de « dumping » de surplus de graphite étaient révélés de la part de mines de
Madagascar.
- Dans tous les cas, ces prix sont très inférieurs aux prévisions de prix du Promoteur de 1730 US/tonne, un tel
prix élevé sur 26 ans étant nécessaire pour assurer la rentabilité de sa mine.
- On peut donc prévoir que les prix de vente du concentré de graphite, sur une vie de 26 ans de la mine, seront
en moyenne bien inférieurs au prix espéré : la différence pourrait être de 30 % (si on est optimiste) et pourrait même
aller jusqu’à 50 %.
17US
1730
Source: -graphite/graph
-pricing
http://www.northerngraphite.com/about
ite /
1.5 - L’analyse économique de l’Étude de faisabilité de décembre 2018 n’est plus à jour
Le Promoteur déclare maintenant que sa mine sera exploitée avec de l’équipement minier diesel pendant 5 ans,
et non plus avec de l’équipement 100 % électrique,
Selon l’Annexe 1 des réponses du Promoteur « Actualisation du projet Matawinie », il n’y aura plus de
convoyeur électrique et les camions de transport du minerai seront plus gros (63 tonnes au lieu de 40 tonnes),
et le concasseur sera fixe et installé à l’intérieur d’un nouveau bâtiment qui se rajoutera aux bâtiments prévus
jusqu’alors;
La ligne électrique à 120 kV sera développée et construite selon un tracé encore inconnu (voir Rép. NMG à QC-
16) et pour lequel des droits de passage restent à négocier. Notons que lors des audiences du BAPE du 28 au 30
janvier, le promoteur a révélé que cette ligne électrique redevenait la responsabilité d’Hydro-Québec, mais
aucun estimé de prix n’a encore été établi.
Les augmentations de coûts (« escalation ») entre la date de préparation des estimés (été 2018) et le début
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espéré de la construction (été 2020) n’ont pas été prises en compte: nouveaux coûts d’investissement (CAPEX),
nouveaux coûts d’exploitation (OPEX);
Les intérêts pendant la construction (terme consacré « IDC ») et les frais de financement ne sont pas pris en
compte.
Les coûts d’exploitation (OPEX) sont sous-estimés puisqu’ils n’incluent pas le paiement de crédits de carbone qui
seront vraisemblablement requis puisque le convoyeur électrique est supprimé et remplacé par des camions
diesel de 63 tonnes, au moins pendant les cinq premières années, et avec de grandes probabilités que ceci reste
tel quel pendant les 26 années d’exploitation. Sachant que les crédits de carbone se négocient en 2019 à
environ 30 CAD/tonne et qu’il est attendu qu’ils augmentent jusqu’à 100 et même 150 CAD/tonne dans les
années à venir, ces coûts supplémentaires d’exploitation ne seront pas négligeables et devront être pris en
compte dans la rentabilité du projet.
Note importante : suite à la 1ère audience du BAPE, le promoteur a fourni le document DA29 qui illustre la sensibilité
financière du projet aux paramètres principaux et qui confirme les écarts ci-dessous;
- La courbe de sensibilité au coût capital CAPEX montre que, s’il y a une augmentation de coûts de 30 % (une
probabilité très élevée si on regarde les autres projets mentionnés ci-dessus), cela entraine une chute du TRI de 5,4 %
(confirmée dans la note DA29). Juste une telle chute rendrait ce projet à la limite de la rentabilité.
- Une seule courbe couvre les variations du prix de vente du graphite, alors qu’en fait elle représente deux (2)
paramètres séparés : le « Prix de vente à la tonne » d’une part et le « Volume de vente » d’autre part, qui se combinent
pour former le Revenu. Il faut donc dédoubler cette courbe et l’appliquer à chacun de ces deux paramètres. Notons
que cette courbe de sensibilité a la plus forte pente de toutes les courbes, ce qui illustre que les paramètres de revenus
(volume et prix de vente) ont la plus forte influence sur le TRI.
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- D’après cette courbe, si le volume annuel de vente diminue de 30 % (en moyenne sur 26 ans d’exploitation),
le TRI subit une chute de 10,6 % (confirmée par la note DA29). À nouveau, juste une telle chute rendrait le projet à la
limite de la rentabilité. Et à plus forte raison, si le projet devait fonctionner à la moitié de sa capacité (une possibilité
mentionnée par le promoteur lui-même), le TRI subirait une chute de 14,2 %.
- Selon la même courbe, si le prix de vente diminue de 20 % (par rapport au prix annoncé de 1730 USD/t), soit à
1384 USD/t, le TRI subirait une chute de 6,9 % (confirmée par la note DA29). Et si ce prix diminuait de 30 % (soit 1211
USD/t), le TRI subirait une chute de 10,6 %. Rappelons que de telles diminutions de prix de vente sont tout à fait
plausibles selon les commentaires précédents (voir le paragraphe 1.4 - Prix de vente irréalistes, détaillé ci-haut).
- Une 3ème courbe illustre la sensibilité au taux de change CAD/USD. Ici encore, le promoteur a considéré un
scénario optimiste selon lequel le taux de change demeurerait inchangé pendant 26 ans au taux actuel de 0,76
CAD/USD, alors que les statistiques de la Banque du Canada montrent que de 2007 à 2019, ce taux a oscillé autour d’une
moyenne de 0,80. Si on utilise ce taux moyen au lieu de 0,76, la courbe de sensibilité introduit une autre chute du TRI
assez faible (1,2 %), mais qui s’additionne aux autres chutes de TRI mentionnées ci-dessus.
1.7 - Conclusion sur la rentabilité du projet
Il apparait que la rentabilité de ce projet est très marginale et il présente des risques élevés de s’écrouler tout
simplement.
En effet, une combinaison des chutes de TRI annoncées ci-dessus est très probable, ce qui ferait chuter le TRI à des
valeurs entre 5 % et 11 %, donc tout à fait en dehors de la rentabilité. Ce projet apparait donc très fragile sur le plan
économique.
Mentionnons que la même conclusion a aussi été atteinte par l’expert indépendant Jim Kuipers, P.Eng dans son rapport
d’expertise sur la rentabilité de ce projet (voir document DC5 déposé à la Commission). Ce rapport conclut que ce projet
est hautement spéculatif.
1.8 - Conclusion sur la « Raison d’être du projet »:
À l’heure actuelle, sans marché confirmé pour son graphite et sans rentabilité démontrée, ce projet a une viabilité
très douteuse et n’a donc que très peu de « Raisons d’être ». Car s’il n’y a pas de rentabilité, il n’y a pas de projet.
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Chapitre 2 – Le gestion des résidus miniers
(Réf. Art. 4.6 et QC-23 à 27)
2.1 - La co-disposition
Dans ses diverses présentations au public et dans son étude de faisabilité, le Promoteur a répété qu’il utiliserait un
« nouveau concept de gestion des résidus miniers », soit la co-disposition. Le Promoteur présente à nouveau ce
« concept de co-disposition » à l’art. 4.6.2 (p. 4-101 et suivantes) de l’étude ÉIES. Cette procédure apparait donc
nouvelle, non éprouvée et très expérimentale. Elle est issue de recherches multiples en laboratoire puisque toutes les
minières essaient de résoudre ce problème majeur de drainage minier acide (appelé DMA). Le Promoteur a recours à
plusieurs modélisations numériques pour essayer de prévoir le comportement de ces cellules dans toutes les conditions
atmosphériques (voir pages 4-101, à 4-104 et 4-129). On est vraiment au niveau de l’expérimentation.
- Plan de restauration final – Réf. 3211-16-019-17 – Doc. PR5.5 : Annexe E – Note technique par SNC-Lavalin -
Simulation numérique … pour la gestion des résidus et stériles miniers – (page 33) : « Des essais sur les résidus miniers
produits au projet de démonstration et des cellules expérimentales prévues en 2019 et 2020 serviront à étudier le
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comportement hydrogéologique et géochimique du concept de cellules de co-disposition. »
- Art. 4.5.4 – Cellules expérimentales de terrain : (page 4-1) : D’abord, très discrètement, la date de mise en place de ces
cellules, qui était le printemps 2019 dans l’étude soumise en avril 2019, a été changée pour 2020. Il est aussi confirmé
que « les résidus miniers PGA et les résidus miniers désulfurés en place sur le site ou disponibles par le projet de
démonstration serviront de planche d’essais pour l’élaboration des critères de conception en lien avec le potentiel de
génération d’acide, la compaction, la saturation et les caractères géotechniques requis pour l’ingénierie détaillée et le
plan de déposition. » Donc ces données venant des cellules expérimentales sont considérées comme essentielles pour
finaliser la méthode de stockage des résidus miniers acides.
(page 4-16) : Plus essentiel encore ! « Le retour des résidus miniers PGA dans la fosse est conditionnel au fait de valider
les résultats des simulations numériques limitant l’oxydation des résidus miniers PGA par des essais sur le terrain tels que
la cellule expérimentale et les planches d’essais. »
2.2.2 - Conclusions à tirer de ces articles de l’ÉIES
Le promoteur et ses consultants déclaraient clairement que l’usine de démonstration comportait 3 cellules
expérimentales depuis le printemps 2019 et qu’un programme d’essais et de recherche était en cours. C’est donc sur la
base de ces informations que le MELCC a effectué son analyse de l’ÉIES. De plus, l’importance de ces essais est affirmée
par le promoteur lui-même, non seulement pour confirmer les critères applicables, mais aussi pour confirmer qu’un
remblaiement partiel de la fosse est possible.
Mais ces informations sur l’existence de cellules expérimentales étaient fausses dès l’origine puisqu’il s’est avéré dès le
mois de décembre 2018, lors de la Journée Portes Ouvertes organisée par NMG à son usine de démonstration, que ces
cellules n’étaient pas mises en place et ne le seraient pas, ceci par manque de matériaux stériles de résidus miniers.
2.2.3 – Analyse du dossier par le MELCC
2.2.3.1 - Une situation non révélée au MELCC
Tout au cours de la période d’analyse par le MELCC, le promoteur et ses consultants n’ont pas révélé cette fausse
information. Or ils en auraient eu l’occasion lors des réponses aux questions du MELCC (fournies le 1er octobre 2019).
La conséquence a été que le MELCC a déclaré l’étude d’impact recevable le 25 novembre 2019 à la seule condition que
le promoteur s’engage à fournir les résultats de ces essais avant la fin de l’évaluation environnementale. Ceci est précisé
dans le document PR5.6 du MELCC du 15 novembre 2019 « Demande d’engagements et commentaires », qui énonce
ceci au par. 11 : « L’Initiateur doit réaliser une mise à jour de l’étude de modélisation du transport de contaminants en
utilisant les résultats des essais réalisés dans les cellules expérimentales de terrain qui seront disponibles à la fin de 2019.
….. Les résultats doivent être déposés au plus tard à l’étape de l’analyse environnementale car ils sont nécessaires pour
évaluer le concept d’entreposage des résidus acidogènes dans la fosse …… ».
2.2.3.2 - Les révélations du promoteur : ces cellules expérimentales n’existent pas !
Dans sa lettre d’engagement du 25 novembre 2019 (ré. doc. PR5.7), le promoteur révèle enfin qu’il n’a pas mis en place
ces cellules expérimentales de co-disposition, et donc qu’aucune donnée ni expérience pratique n’ont pu être obtenues
durant l’année 2019 de ce projet de démonstration. Il annonce aussi que ces cellules expérimentales seront mises en
place au printemps 2020, ce qui laissait entrevoir que des résultats d’essais probants ne seraient pas disponibles avant
plusieurs mois et possiblement pas avant 2021.
b)- Dans une lettre de réponse envoyée à l’APLT datée du 10 janvier, la directrice des évaluations
environnementales du MELCC a essayé de justifier cette décision en disant que « … les premiers résultats sont
plutôt attendus au printemps 2020. » (voir le paragraphe 2a de sa lettre à l’APLT, document DC1 déposé au
15
BAPE), ce qui est contraire à la réalité puisqu’ils ne seront pas disponibles avant plusieurs mois, sinon plusieurs
années. Cette affirmation témoigne d’une incompréhension complète de ce dossier majeur au sein du MELCC.
c)- Lors des audiences publiques du BAPE le 28 Janvier 2020, la représentante du MELCC a de plus fait une
déclaration surprenante en affirmant que « finalement ces résultats d’essais n’étaient pas vraiment
nécessaires », ce qui est en contradiction avec ses propres demandes précédentes au promoteur et même avec
les déclarations du promoteur lui-même qui affirmait que ces résultats d’essais étaient essentiels. De plus, elle a
prétendu que ce procédé de co-disposition n’était pas expérimental, une déclaration non fondée et non
documentée, et encore une fois en contradiction avec sa propre lettre de demande d’engagements du 15
novembre 2019 (doc. PR5.6).
d)- Cette déclaration est d’autant plus inacceptable que dans le document DA13 soumis par le promoteur, celui-
ci révèle qu’il n’a pas pu identifier une seule mine à travers le monde où ce procédé de co-disposition est en
exploitation. En effet, pour confirmer cette interprétation erronée du dossier par la représentante du MELCC,
le document DA13 soumis au BAPE le 30 janvier par le promoteur confirme ceci :
1- le procédé de co-disposition n’a jamais encore été utilisé dans une exploitation commerciale et est
uniquement théorique ;
2- le procédé de CEBC (couverture à effet de barrière capillaire) est aussi un procédé expérimental en
cours d’essais dans plusieurs sites miniers et n’a pas été éprouvé à long terme dans une exploitation
commerciale. (Voir aussi plus de détails dans le par. 2.3.4 ci-dessous).
b)- Pour confirmer encore plus l’importance de ces résultats de cellules expérimentales, le rapport
Norda-Stelo (document DC7, déposé à la Commission) commandité par le comité d’accompagnement du
promoteur lui-même, insiste sur les points suivants (voir par. 3.1.6 du rapport) :
« Ce concept a été élaboré à partir d’essais en laboratoire et de modélisations basées sur ces mêmes
essais. Par conséquent, l’aménagement de cellules expérimentales de gestion des résidus dans le cadre du projet
de démonstration permettra d’évaluer l’efficacité réelle du mode de gestion proposé ». ….. « il sera donc
primordial de suivre les résultats qui seront obtenus à partir des cellules expérimentales puisque les
modélisations devront être mises à jour en fonction de ces nouveaux résultats. » ……. « Rappelons que les
données des cellules expérimentales ne pourront pas être disponibles à l’étape de l’analyse environnementale
puisque la cellule est prévue être construite au printemps 2020. »
c)- Rappelons de plus que le promoteur a annoncé que « Un projet de recherche d’une durée de 3 ans en
partenariat avec l’UQAT, SNC-Lavalin et le MERN a été mis sur pied afin de valider et d’améliorer le mode de
gestion des résidus retenu… » (réf. PR3.3, Vol. 3, art. 4.5.2.1, ainsi que le document DA10 soumis au BAPE). Il est
donc bien évident qu’on ne peut pas attendre de résultats probants sur ces essais avant plusieurs mois et même
plusieurs années.
a)- Il est surprenant de constater l’incompréhension qui apparait maintenant au sein du MELCC sur ce dossier
majeur. Comment peut-on juger que ce procédé de co-disposition est éprouvé et n’a pas besoin d’essais alors que le
16
promoteur confirme dans sa note DA13 qu’aucune telle installation dans le monde n’existe encore ? Comment peut-on
déclarer que ce procédé n’a pas besoin de vérifications par des cellules expérimentales alors que le promoteur lui-même
annonce avoir besoin de ces résultats d’essais qu’il déclare essentiels, ce qui est en plus confirmé par le rapport Norda-
Stelo commandité par le promoteur ? Comment un dossier aussi majeur a-t-il pu être traité de façon aussi déficiente au
sein de la direction des évaluations environnementales du MELCC ?
De plus, tel que mentionné au par. 2.2.3.4 b) ci-dessus, le rapport Norda-Stelo (document DC7, déposé à la Commission)
commandité par le promoteur, insiste sur le caractère expérimental de ce procédé de gestion des résidus miniers et sur
la nécessité d’obtenir des résultats des cellules expérimentales pour en confirmer son efficacité réelle.
b)- IMPORTANCE MAJEURE : Les références soumises par le promoteur : Le document DA13 –« Références en
lien avec le concept de co-disposition de NMG » a été fourni à la Commission du BAPE le 30 janvier 2020.
- Dans ce document, sur les 4 chapitres présentés, le 1er parle du retour de résidus dans la fosse et les 2 suivants
parlent abondamment du principe de barrière capillaire (concept CEBC). À ce sujet, toutes ces références sur la CEBC
consistent en des essais effectués à différents sites dans des conditions expérimentales afin de d’évaluer l’efficacité de
17
ce concept. La plus ancienne de ces installations de CEBC a seulement 25 ans d’existence et est celle de la mine de
Lorraine, un site expérimental utilisé par les étudiants de l’UQAT (voir plus de détails au par. 2.4.2 plus bas).
- Mais au sujet d’installations de co-disposition, le dernier chapitre de ce document mentionne uniquement des
études de modélisation numérique et des essais de comparaison théorique dans la halde Doyon (Cambior). Et les seules
références données sont celles de rapports d’études selon les termes suivants : « Les références ci-dessous décrivent les
phénomènes d’oxydation ayant eu lieu dans la halde Dorion (qui n’avait pas de co-disposition) et de simulations
numériques pour un cas hypothétique de la même halde, mais avec de la co-disposition ». Donc aucune mine utilisant la
co-disposition n’est mentionnée dans ce document et aucun rapport d’exploitation sur plusieurs années n’est fourni.
c)- En conclusion : il apparait que le promoteur est incapable de fournir des références de mines qui utilisent le
procédé de co-disposition en exploitation commerciale.
- La déclaration faite par le promoteur devant les commissaires lors des audiences du 28-30 janvier, déclaration
selon laquelle une « dizaine de mines à travers le monde utilisent ce procédé de co-disposition », s’avère fausse. Tout ce
que ce document de références DA13 prouve, c’est que ces deux procédés (co-disposition et CEBC) ne sont toujours qu’à
une étape expérimentale et qu’aucune mine commerciale n’utilise actuellement la co-disposition.
-En conclusion, il s’avère que le procédé de cellules de co-disposition, s’il était installé à la mine de NMG, serait
le premier à être utilisé à l’échelle commerciale. La mine de St-Michel-des-Saints serait donc une mine expérimentale !
Et ceci dans une zone habitée, au-dessus de la tête de 5000 résidents et au centre d’une région touristique et de
villégiature renommée. Ce qui est absolument inacceptable.
o Il est à noter que ce projet de recherche ne porte que sur la barrière capillaire et ne comporte aucune
co-disposition.
18
o Mentionnons de plus que ce projet expérimental de restauration d’un site minier a fait l’objet d’au
moins un autre rapport d’étude intitulé « Restauration du site minier Lorraine, Latulipe, Québec :
Résultats de 10 ans de suivi », publié en 2009. Ce rapport reprend en détail tous les travaux
expérimentaux sur ce site, et mentionne en introduction « il existe relativement peu de cas de suivi à
long terme (10 ans et plus) de tels sites restaurés avec des méthodes éprouvées de réhabilitation ».
o De plus, la fiche technique sur ce projet expérimental de Lorraine émise par le Ministère de l’Énergie et
des Ressources Naturelles, mentionne que ce site minier servira de banc d’études et d’essais pour les
universités, ce qui confirme le caractère expérimental de ce projet de restauration de la mine de
Lorraine.
En conclusion, le procédé de CEBC est tout aussi expérimental que celui de co-disposition, tel que cela est confirmé dans
le document DA13 déposé par le promoteur et cité ci-haut.
Notons que lors des audiences du BAPE le 30 janvier, le promoteur a eu du mal à justifier cette utilisation de chaux et de
bicarbonate en prétendant que, contrairement à ses déclarations contenues dans l’ÉIES, ce n’était pas continu, mais
seulement en cas de nécessité. Cependant, même dans ses tableaux de transport par camion, le nombre de camions et
les tonnages de chaux et de bicarbonate sont prévus à chaque année (total de 21 camions de 24 tonnes par an, réf.
Chap. 10, tableau 10-6). Cela prouve que, même pour le promoteur, le concept de co-disposition est très loin d’être
fiable et sécuritaire puisqu’il prévoit une neutralisation continue des drainages acides. Ceci est cohérent avec les
révélations de sa liste de références (Doc. DA13) qui confirme qu’aucune mine utilisant la co-disposition n’est en
exploitation à l’heure actuelle.
19
En conséquence, la question se pose : lorsque la mine ne sera plus en exploitation, soit temporairement, soit
définitivement, qui sera responsable de ces opérations de neutralisation des drainages acides au-delà de la période de
10 ans de suivi ? Cette charge reviendra-t-elle à la municipalité, ou au gouvernement ?
a)- Les changements climatiques introduisent des risques supplémentaires puisque, selon les mots mêmes du
promoteur (voir le « Plan de réaménagement de NMG » dans l’ÉIES, pages 4-3 à 4-5), ils vont se manifester par
«l’augmentation de la fréquence et de l’intensité des évènements de précipitations extrêmes » et « les principales
vulnérabilités du secteur minier se retrouvent au niveau de la restauration des sites »..…. « Les infrastructures présentant
le plus grand risque de défaillance sont les infrastructures de gestion des eaux et de gestion des résidus …. » …… « Le site
minier restauré représente un risque plus élevé face aux changements climatiques de par sa nature permanente et des
suivis moins fréquents que durant l’exploitation ».
b)- Nous sommes en effet devant un procédé d’accumulation en hauteur de résidus miniers hétérogènes, de
différentes caractéristiques et avec des taux d’humidité différents qui, malgré des compactions annoncées mais difficiles
à contrôler par tous les temps, comportent un grand risque de bris de stabilité à long terme à cause des conditions
climatiques extrêmes attendues et des possibilités de secousses sismiques. Sachant que de tels amoncellements en
hauteur de résidus non-homogènes n’ont jamais été encore réalisés dans des mines en exploitation (voir l’absence
d’exemples telle que confirmée dans le document DA13 déposé par le promoteur), le risque lié à la non-stabilité de ces
haldes de co-disposition est réel.
D’ailleurs ce risque a été identifié dans plusieurs rapports d’experts : le rapport du Dr Philippe Marion (document DC2
déposé à la Commission, par. 3.5.2.2 et 3.7.3.2), celui de l’ingénieur Jim Kuipers (document DC3).
De plus, le rapport de Norda-Stelo (document DC7) mentionne même le risque de liquéfaction des résidus humides lors
de secousses sismiques, ceci à cause du taux élevé d’humidité maintenu dans certains des résidus ainsi empilés sur
plusieurs couches en hauteur. Des doutes sont aussi exprimés sur le type de compactage qui sera employé et sur
l’importance primordiale des contrôles à effectuer à ce sujet. Ceci apparait très inquiétant, sachant que ces
empilements de résidus seront laissés surplace à perpétuité.
c)- Des risques de catastrophe environnementale : aucune simulation numérique ne peut prédire avec certitude
que la stabilité de ces collines est garantie pour les années et les siècles à venir. Aucune telle installation n’a été mise en
place ni exploitée pendant plusieurs années dans d’autres mines dans le monde. Considérant les incertitudes liées aux
changements climatiques, le risque est réel pour qu’un effondrement de cette colline de résidus acides et toxiques se
produise dans les siècles à venir. Cette colline sera une véritable bombe à retardement environnementale, au-dessus de
la tête de plus de 5000 habitants, et au-dessus des rivières et des lacs qui font la beauté de cette région.
Si on se réfère au « Principe légal de précaution » (voir le Chapitre 11 de ce mémoire), il est clair qu’une telle
installation ne devrait jamais être mise en place.
2.5.6 – Conclusion
En conclusion de tout ce qui précède, il est évident que ce concept théorique de co-disposition, avec ou sans barrière
capillaire, n’est rendu qu’à un stade de concept expérimental. D’ailleurs c’est ce que le promoteur annonce lui-même
en plusieurs endroits dans son étude. De plus, même après la restauration du site (restauration qui sera très
incomplète), les changements climatiques introduisent des risques élevés et imprévisibles de défaillance, à moyen et à
long terme, au niveau des écoulements d’eau et de la stabilité des haldes de résidus, incluant la possibilité de
liquéfaction des parties humides (comme cela est mentionné dans le rapport de Norda-Stelo commandité par le comité
d’accompagnement de NMG, voir le Doc. DC7 soumis au BAPE).
En conséquence, il est irresponsable de vouloir appliquer ces concepts expérimentaux de co-disposition avec barrière
capillaire au cas présent, soit à des haldes de résidus miniers totalisant plus de 100 millions de tonnes (voir page 4-62 et
21
tableau 4-19) qui seront empilées au-dessus de la tête de plus de 5000 résidents et qui se draineront dans la rivière
Matawin et le lac Taureau, et ceci à perpétuité.
Ceci n’est pas acceptable : le concept de co-disposition doit être démontré et éprouvé sur d’autres sites miniers et son
efficacité documentée sur une durée d’exploitation suffisante (20 ans, 50 ans) avant d’être mis en application dans une
mine en milieu habité et dans une région touristique reconnue.
Or il s’avère que le promoteur n’est même pas capable de faire fonctionner ce procédé à l’échelle très réduite de son
usine de démonstration. Ceci a été révélé dans sa lettre d’engagement au MELCC (doc. PR5.7) dans laquelle il annonce
avoir dû remplacer le séparateur magnétique de basse intensité (600 Gauss) par un autre à haute intensité (7000 Gauss,
donc 12 fois plus puissant). Ce dernier séparateur serait encore à l’essai. Il semble que l’équipe du promoteur ne
possède pas l’expérience requise pour traiter des différences de propriétés magnétiques entre la pyrrhotite et la pyrite,
tel que cela est mentionné dans le rapport d’expert du Dr Philippe Marion (voir document DC2 déposé à la Commission,
par. 3.6.2.1).
b)- Il est important de noter que ces essais à l’usine de démonstration se font à très petite échelle, pour une
production annoncée de 1000 tonnes de concentré par an, alors que l’usine commerciale annonce une production de
100 000 tonnes par an, donc 100 fois plus ! Il est utile de rappeler que, selon les standards normalement suivis dans le
développement de nouvelles technologies, un tel multiple de 100 serait considéré comme exagéré et mènerait à la
catastrophe pour l’usine commerciale.
c)- En conséquence, il existe de grands doutes sur la capacité de ce promoteur de faire fonctionner de façon
efficace un procédé de séparation magnétique de 100 000 tonnes/an alors qu’il ne parvient pas à maitriser le même
procédé de 1000 tonnes.
d)- D’où la question : quelle garantie existe-t-il pour que les résidus NGA de l’usine commerciale soient
effectivement non-acidogènes, ce qui est essentiel pour songer à utiliser la co-disposition comme moyen de gestion des
résidus miniers acides ?
À noter de plus que les caractéristiques sur les résidus désulfurés, telles que données aux pages 4-94 à 4-96 de l’étude
ÉIES, sont basées sur des essais en laboratoire et nécessitent des essais de validation à pleine échelle, tel que mentionné
en note 26 page 4-96. Ces essais à pleine échelle, ainsi que les validations recommandées, n’ont pas été effectués
puisqu’aucune cellule expérimentale de co-disposition n’a été mise en place, ni aucune « planche d’essais » annoncées
par le promoteur. Comment la conception du procédé de désulfuration peut-elle se faire sans ces résultats de validation
et quelles garanties d’efficacité a-t-on dans ce cas ?
22
Chapitre 3 – Risques de pollution des eaux
3.1 – Drainages miniers acides
3.1.1 – Durant l’exploitation de la mine
Tel que mentionné plus haut, le problème de drainage minier acide (DMA) constitue l’un des défis (environnementaux,
techniques et économiques) les plus sérieux pour l’industrie minière. Le promoteur prétend prévenir les DMA grâce à
ses cellules de co-disposition des résidus miniers qui encapsuleraient les résidus acidogènes dans des cellules
constituées de résidus non-acidogènes, selon un procédé expérimental et non éprouvé comme cela est décrit dans le
chapitre 2 ci-dessus.
Il y a donc de grands risques à moyen et à long terme pour que du drainage acide se fasse malgré la méthode de co-
disposition et selon les impacts des ruissellements d’eau, et ceci non seulement au cours de l’exploitation de la mine,
mais aussi après sa fermeture. Le promoteur prévoit d’ailleurs injecter de la chaux de façon continue dans ses bassins
de collecte, ce qui prouve bien que sa confiance en son procédé expérimental est limitée, d’autant plus qu’il a reconnu
qu’aucune telle installation n’existe encore dans le monde (voir le document DA13 déposé à la Commission).
3.1.2 – Après la fermeture de la mine
Même après la fermeture de la mine, il faudra faire face à ces risques de drainage acide et de pollution des eaux de rejet
par les différents produits chimiques utilisés pendant des années et même des siècles. Cela signifie qu’un suivi des
rejets et les traitements appropriés devront être appliqués au-delà des 10 années que le promoteur annonce dans son
programme de suivi. Cela est aussi confirmé dans les deux rapports d’experts (rapport du Dr Philippe Marion, document
DC2 déposé à la Commission, et rapport de l’ingénieur Jim Kuipers, document DC3). Ces deux experts annoncent aussi
que les coûts liés à ces suivis et interventions sont généralement sous-estimés par les minières, ce qui fait ressortit le
risque financier qui devra être assumé par les communautés ou les gouvernements, et ceci à très long terme.
3.2.1 - Le Ruisseau à l’eau morte coule en de multiples méandres qui constituent un important milieu humide qui joue
un rôle essentiel pour la qualité de l’eau de la rivière Matawin et pour l’environnement de la région en général. Tel que
mentionné au paragraphe 7.4.2.3 de l’ÉIES, l’impact sur les milieux humides sera considérable dans le secteur du
Ruisseau à l’eau morte puisque pendant l’exploitation, son bassin sera complètement détruit et submergé par les rejets
liquides dont le débit moyen est évalué par le Promoteur à 3,200 m3/jr, alors que les débits extrêmes sont inconnus
(non mentionnés dans les tableaux 4-16 à 4-18).
De plus, ce ruisseau se déverse dans la rivière Matawin qui, après avoir traversé le village de St-Michel-des-Saints de
bord en bord, se déverse à son tour dans le lac Taureau, le joyau de la région et le centre du Parc régional du même
nom. Notons que le rapport Norda-Stelo (document DC7, par. 3.1.9) émet des inquiétudes sérieuses sur la qualité des
eaux de rejet vers le Ruisseau à l’eau morte : « Malgré toutes ces bonnes intentions, il sera primordial de valider la
performance réelle des systèmes de traitement des eaux usées minières lors des suivis environnementaux qui seront
effectués… »……. « Rappelons que le Ruisseau à l’eau morte est un affluent de la rivière Matawin qui se jette dans le
réservoir Taureau qui est considéré comme préoccupant ….»
b)- De plus, au paragraphe 7.3.2.2 – ‘Description des impacts’, toutes les explications concernant l’impact des
23
produits chimiques sont exprimées au conditionnel et avec des termes approximatifs : … devraient ….pourraient ….si……
principalement. Ceci est inacceptable puisque c’est la preuve que le promoteur ne sait pas réellement où tous ces
produits chimiques vont aboutir. On retrouve ces mêmes approximations dans le tableau 3.12 « Contaminants
probables et potentiels … » (p. 3-42) du « Plan de réaménagement et de restauration ». Ici encore, on parle de
« dégradation naturelle …. absorbés par les particules de graphite puis presqu’entièrement brûlés …. Volatilisation et
dégradation naturelle et/ou biologique … ». Le promoteur semble donc s’en remettre uniquement aux procédés très
approximatifs et non documentés qu’il décrit pour enlever les molécules de tous ces produits chimiques. C’est d’autant
plus surprenant que dans le domaine de l’ingénierie, les termes « presque » et « environ » sont normalement bannis !
Une ingénierie digne de ce nom devrait donner les détails en pourcentages pour chaque destination de chacun de ces
produits chimiques. De plus, ceci n’est pas convaincant puisqu’en page 5 de la même étude, on mentionne que le
concentré final de graphite aura une pureté de 97 %, ce qui laisse peu de place à ces produits chimiques dans le produit
final.
c)- Et de plus, on retrouve dans ce tableau la constatation que des métaux lourds (Zn, Fe, Ni) vont probablement
se retrouver dans les eaux de rejet à cause de « la lixiviation potentielle des résidus à partir des haldes de co-
disposition ». Et on annonce que la mesure d’atténuation prévue sera « la précipitation à un pH alcalin et/ou
précipitation par coagulant organique ». C’est encore très approximatif, et il reste à prouver que les procédés utilisés
dans l’usine de traitement des eaux de rejet seront appropriés.
d)- En conséquence, considérant les grandes quantités de produits chimiques qui seront introduits sur le site de
la mine (entre 1900 et 2000 tonnes par an), le promoteur doit expliquer en détail où et sous quelle forme chacun de ces
produits chimiques va aboutir, notamment :
● à quelle étape précise du procédé chacun des produits sera-t-il enlevé et comment ?
● démontrer selon quelles réactions physiques, biologiques ou chimiques ceci se produira, en se basant sur les
propriétés de chacun de ces produits, et quels sous-produits seront créés;
● expliquer et justifier la relâche des sous-produits issus de ces transformations et les traitements appropriés qu’il
entend mettre en place afin d’éliminer leurs impacts, d’abord sur la population (notamment sur les rejets gazeux
à l’atmosphère) et ensuite sur l’environnement (notamment sur les rejets liquides au Ruisseau à l’eau morte).
Ce qui précède s’applique aussi aux rejets de nitrate d’ammonium et d’ammoniaque dus aux explosifs, tel que
mentionné à la page 7.12, pour lesquels aucune disposition n’est prévue pour les éliminer des rejets liquides, sinon des
« peut-être », des « pourraient » et des « si ».
o Cette note confirme les grandes quantités de produits chimiques utilisés : entre 1944 et 2000 tonnes
par an (la précision dépendant des masses volumiques des produits).
o Les explications d’élimination de ces produits sont tirées de la littérature et d’un seul essai en
laboratoire pour le xanthate, et non pas sur des mesures de terrain dans des mines existantes;
o Les dégradations annoncées de la plupart de ces produits chimiques se font sur plusieurs jours, selon
des essais de laboratoire cités dans la littérature. Les produits dérivés ont presque tous des toxicités
individuelles annoncées inférieures aux normes, mais aucune référence n’est donnée sur la toxicité
cumulée de plusieurs de ces produits sur de longues périodes;
o Chacun de ces produits est annoncé comme ayant une faible bioaccumulation, mais ici encore, aucune
référence n’est donnée sur l’accumulation provoquée par plusieurs de ces produits en même temps, ni
sur de longues périodes;
24
o On annonce que le MIBC va se retrouver dans le concentré de graphite et le concentré de sulfure. Or le
rapport d’expert du Dr Philippe Marion (Document DC2, par. 3.6.1) fait remarquer que ce produit se lie
mal aux particules de graphite et peut donc se retrouver dans les eaux de rejet;
o Le xanthate donne des problèmes d’élimination puisque sa dégradation peut prendre plus de temps
qu’espéré et qu’il peut se retrouver dans les eaux de rejet. C’est d’ailleurs le problème que semble
rencontrer le promoteur dans son usine de démonstration (voir la lettre d’engagements de NMG,
document PR5.7). La note technique mentionne aussi la possibilité de devoir introduire un traitement
supplémentaire pour éliminer le xanthate. Ce problème est mentionné dans le rapport d’expert du Dr
Philippe Marion (Document DC2, par. 3.6.3). Rappelons aussi que ce risque a été clairement identifié
par le consultant de l’Étude de faisabilité de NMG (voir l’Étude de faisabilité de décembre 2018, ainsi
que le Chapitre 11 du présent mémoire);
o Encore pour le xanthate, le consultant de NMG mentionne que l’un des produits de dégradation, le
disulfure de carbone, est « toxique et représente un risque sur la santé, la sécurité et l’environnement »
(voir par. 3,3 de la note de service);
o La toxicité sur les organismes aquatiques de tous ces produits et produits dérivés de leur transformation
est traitée individuellement et est déclarée inférieure aux normes pour chaque produit. Mais encore
une fois, ces conclusions sont tirées de la littérature et non pas d’expériences réelles. Quelle sera la
toxicité sur la vie aquatique de ce cocktail de produits chimiques de toutes sortes, déversés en grandes
quantités pendant 26 ans ? Quelle sera l’effet réel de l’accumulation de ces produits sur une aussi
longue période ?
o En conclusion, on peut dire que toutes ces explications ne reposent que sur la théorie d’essais effectués
en laboratoire sur des produits chimiques individuels. Le promoteur est bien incapable de garantir
qu’effectivement il n’y aura aucun impact sur la vie aquatique, sur la qualité des eaux et sur
l’environnement en général. Les quantités sont énormes : 2000 tonnes par an, c’est l’équivalent de 1
camion de 36 tonnes par semaine qui viendrait déverser des produits chimiques à l’entrée du Ruisseau à
l’eau morte ! La seule garantie que l’on peut imaginer, c’est que la vie aquatique sera détruite dans tous
les ruisseaux, rivières et lacs situés en aval de cette mine.
3.2.5 – En conclusion, il est inacceptable que presque 2000 tonnes par an de produits chimiques soient apportés dans
cette installation et disparaissent comme par magie dans la nature, alors que les justifications avancées par le
promoteur n’offrent aucune garantie sur leurs impacts.
De plus, s’il y a évaporation de certains de ces produits, leur toxicité devra être évaluée et une étude de dispersion doit
être faite sur les retombées de ces gaz, sachant que l’extrémité nord du site minier se trouve à seulement 3,5 km de
l’entrée du village (magasin Provigo) et non pas à 6 km comme annoncé par le promoteur, et à seulement 1 km d’un
secteur résidentiel (Domaine Lagrange).
25
3.3.1 - En règle générale, tout le chapitre sur la gestion des eaux et les débits d’effluents est caractérisé par un manque
de clarté, ainsi que par de multiples imprécisions et contradictions, ce qui laisse planer un gros doute sur son exactitude.
Ceci est un défaut majeur puisque cet aspect de gestion et de rejet des eaux des installations minières est primordial
dans l’analyse des impacts d’un tel projet. Notons plusieurs points imprécis ou contradictoires.
a)- Fig. 4-16, p. 4-63 : le bilan d’eau montre des chiffres de drainage des piles de résidus incohérents (342 m3/jr,
comparé aux quantités d’eau rejetées avec les résidus miniers PAG+NAG de 216 + 1060 = 1276 m3/jr). Où s’en va la
différence (importante) de 934 m3/jr ? Évaporée ? Encore faut-il le prouver, chiffres à l’appui. De plus, aucun chiffre de
débits d’eau de pluie et de ruissellement arrivant au bassin de collecte n’est montré, et aucun débit n’est montré ni
chiffré vers le Ruisseau à l’eau morte. Ce diagramme est donc très incomplet et donc faux.
b)- Fig. 4-19, p. 4-115 : on retrouve ici le même bilan d’eau, encore sans rejet au Ruisseau à l’eau morte, mais
avec les commentaires selon lesquels tout cela ne serait qu’estimé et préliminaire, en attendant l’ingénierie détaillée. Ce
qui est inacceptable puisque la gestion des eaux et les débits à l’effluent final sont des éléments majeurs à considérer
dans toute étude d’impact environnemental, d’autant plus que les débits rejetés au Ruisseau à l’eau morte sont très
importants (3200 m3/jr et plus lors des périodes de crues).
c)- Fig. 4-16, 4-17, 4-18, p. 4-107 à 4-109 : ces schémas plus détaillés de circulation d’eau montrent des chiffres
incohérents avec les bilans d’eau ci-dessus, principalement en ce qui concerne les débits de drainage des haldes de
résidus, ainsi que sur les débits d’eau venant des puits. De plus, les débits de rejet au Ruisseau à l’eau morte sont
identifiés en moyennes annuelles seulement : les valeurs extrêmes en périodes de crues sont manquantes.
d)- Par ailleurs, dans son Étude de faisabilité (« ÉF ») de décembre 2018, le promoteur annonçait les éléments
importants suivants :
- art. 25.1.2, p. 322 de l’ÉF : la recirculation de l’eau du procédé risque d’augmenter le contenu en
sulfures/sulfates dans le concentré final de graphite;
- art. 25.1.7.2, p. 325 de l’ÉF : « …. l’addition du xanthate (PAX) dans l’eau recirculée peut entrainer un taux
résiduel de xanthate élevé qui pourrait amener des taux élevés de sulfures dans le circuit de purification du graphite et
possiblement dans le produit final de concentré de graphite ». Cela signifie que le taux de recirculation sera revu à la
baisse lors de l’ingénierie finale afin de ne pas pénaliser la pureté du produit fini. Donc il y aura moins de recirculation,
plus d’eau contaminée qui sera rejetée, plus d’apport d’eau de l’extérieur pour compenser ces rejets, et
conséquemment plus de rejets vers le Ruisseau à l’eau morte. La capacité de l’usine de traitement d’eau devra aussi
être augmentée pour en tenir compte.
D’ailleurs ce problème a déjà été mis en évidence dans l’usine de démonstration puisque, dans sa lettre
d’engagements au MELCC (doc. PR5.7), le promoteur a révélé le 25 novembre 2019 que le système de recirculation des
eaux de procédé ne permettait pas l’élimination complète du PAX (Potassium Amyl Xanthate). Donc il ne maitrise pas
encore ce procédé à l’échelle de 1000 tonnes par année alors qu’il veut l’appliquer à une usine commerciale 100 fois
plus grosse.
e)- Le promoteur n’a fait aucune mention de ces faits dans l’étude ÉIES. Les débits d’eau annoncés dans les
diverses figures de bilans d’eau ne sont donc que très préliminaires et sont sujets à des modifications importantes tel
qu’il a été annoncé dans l’Étude de faisabilité de décembre 2018. Ces chiffres ne permettent donc pas de juger des
quantités réelles qui seront rejetées au Ruisseau à l’eau morte et qui seront supérieures aux quantités annoncées dans
l’étude ÉIES.
f)- Mentionnons que le promoteur avait annoncé à maintes reprises, lors de ses présentations à la population,
que l’usine fonctionnerait en circuit fermé. Il est évident maintenant que cette annonce est fausse. La seule
recirculation des eaux se fait en une boucle à l’intérieur des procédés (désulfuration et concentrateur), mais il y a
constamment un débit important d’eau d’appoint à cette boucle (venant des puits et surtout des eaux de ruissellement
et de drainage rassemblées dans le bassin de collecte), et naturellement un rejet constant équivalent en grande quantité
26
vers le Ruisseau à l’eau morte. Ces annonces de recirculation complète faites par le promoteur au cours des années
passées constituent un autre exemple de la désinformation utilisée par le promoteur à maintes reprises pour apaiser les
craintes des citoyens.
g)- Réponse de NMG à QC-9 : Le promoteur justifie ses rejets en se référant aux taux de dilution des effluents
dans la Ruisseau à l’eau morte. Ceci est contraire au principe de non-dilution explicitement décrit dans la Directive 019,
art. 2.1.5;
h)- Conclusion : les incohérences dans les bilans d’eau, les approximations dans l’évaluation des ruissellements,
ainsi que les précautions annoncées dans l’Étude de faisabilité du promoteur, introduisent un grand doute sur
l’exactitude des débits d’eau présentés dans l’ÉIES et rejetés au Ruisseau à l’eau morte, donc vers la rivière Matawin et
le lac Taureau.
b)- De plus, le bassin de collecte surdimensionné pour recevoir les débits de crues, tel que décrit au chapitre 4.8
(p. 4-127 et 4-128) comportera des digues (appelées « bermes » par le promoteur), ce qui réintroduit des risques élevés
de bris en cas de fortes précipitations, surtout après plusieurs hivers, et donc des risques de déversements importants et
potentiellement catastrophiques des eaux de rejet contaminées dans le Ruisseau à l’eau morte et la rivière Matawin,
donc à travers le village de St-Michel-des-Saints et vers le lac Taureau. Ce risque de débordement et de déversement
est d’ailleurs identifié à la page 4-125 de l’étude ÉIES.
Rappelons que tout au cours du développement de son projet, le promoteur avait annoncé un projet sans bassin et sans
digue, donc sans risque de déversement accidentel. Ceci est un autre exemple de désinformation en face des citoyens.
c)- Réponse de NMG à QC-27b sur le ruissellement : Le promoteur a évalué le taux d’évapotranspiration en
utilisant l’équation de Thornthwaite, ce qui lui donne un coefficient de ruissellement de 50,3 %. Autrement dit, il
prétend que 50 % des précipitations sur son site vont partir en évaporation. Cependant l’utilisation de cette équation a
été souvent sujette à controverse puisqu’elle est très simplifiée (tenant compte uniquement des températures, et sans
référence aux autres facteurs tels que la nature et le relief du terrain, la végétation, la latitude, l’influence de la neige et
des crues de printemps). D’autre part elle est dépassée (datant de 1948 et ne tenant pas compte des nouvelles
conditions de précipitations dues aux changements climatiques). Il est surprenant de voir le promoteur utiliser une telle
formule aussi simplifiée et dépassée, alors que dans toutes ses autres études, il utilise des modélisations mathématiques
très sophistiquées.
En conséquence, l’évaluation de l’évapotranspiration et du ruissellement aurait dû utiliser des équations plus récentes
(par exemple celles de Penman-Monteith, ou autres formules plus précises), mais surtout en incluant des corrections
pour tenir compte des précipitations des récentes années qui provoquent des ruissellements importants, d’autant plus
que tout le site minier (et surtout les haldes de résidus) sera complètement déboisé, ce qui favorisera les ruissellements.
Les taux de ruissellement annoncés apparaissent donc non fiables et sous-estimés.
d)- Tous les impacts reliés aux dépôts des matières en suspension (ou MES) dans les eaux de rejet sont déclarés
faibles. Cependant l’effet cumulatif de ces dépôts de matières en suspension pendant la vie de la mine (26 ans) est
complètement négligé, ce qui n’est pas acceptable.
e)- L’utilisation d’explosifs en quantités importantes (au moins 2 sautages par semaine) va libérer du nitrate
d’ammonium « … qui pourrait se retrouver dans les eaux de ruissellement … et former de l’ammoniaque toxique pour le
27
milieu aquatique». Ici encore l’étude se fie à « la dégradation naturelle dans les bassins de collecte », ce qui est encore
très approximatif et douteux.
a)- Les OER imposés par le MELCC (réf. doc. PR5.2 – Questions et commentaires – Compléments) ne couvrent
pas les contaminants chimiques utilisés dans le complexe minier. En effet, dans le document en référence, on annonce
ceci (à l’article 4.1 –Sélection des contaminants) : « Les composés des intrants utilisés pour le traitement du minerai
(MIBC, Flomin et PAX) et ceux pour le traitement des eaux (Chemflox CMX 123 et Metalsorb FZ) ne font pas directement
l’objet d’OER. Toutefois, les essais de toxicité à l’effluent permettent de compléter l’information sur leur toxicité
potentielle. »
Pourtant le même document identifie bien (voir par. 4.2 – Éléments de calcul des OER) que la rivière Matawin et le lac
Taureau sont fréquentés par les amateurs de canot, de kayak, de camping, de baignade, de pêche, d’activités nautiques,
et que « ce lieu est une destination touristique reconnue pour sa villégiature. » En conséquence, on peut considérer que
cette absence d’OER sur les produits chimiques et leurs dérivés de transformation est très regrettable et non adaptée au
caractère très sensible de cette région.
Or dans le schéma d’écoulement présenté, une dilution importante se fait dans le bassin de collecte grâce à l’apport des
eaux de ruissellement, et il est clair que ceci n’est pas conforme. Cependant, selon la même Directive 019, ceci n’est
permis qu’avec l’autorisation du ministère, qui doit donc spécialement délivrer une telle autorisation, alors que ce
schéma est contraire à la Directive. Et selon les questions du MELCC au promoteur, il semble qu’une telle dérogation ait
été tacitement accordée puisqu’aucun commentaire à ce sujet n’a été exprimé par le ministère.
Il est très regrettable que cette dérogation au principe de non-dilution soit accordée puisqu’elle va à l’encontre des
objectifs de contrôle de la pollution des cours d’eau, à plus forte raison dans un milieu naturel très sensible et très axé
sur les activités nautiques.
De plus, selon le même principe de non-dilution, toutes les justifications sur le faible impact sur le Ruisseau à l’eau
morte, sur la rivière Matawin et sur le lac Taureau, ne sont pas acceptables puisque les taux de dilution n’empêcheront
aucunement l’accumulation des éléments nocifs par sédimentation au cours des 26 années d’exploitation de la mine.
En conséquence, nous estimons que des OER très stricts devraient être établis sur les molécules de ces produits et sur
les éléments issus de leur décomposition, transformation ou dégradation. Rappelons que la rivière Matawin, qui va
recevoir les rejets liquides, traverse le village de St-Michel-des-Saints de part en part et alimente le lac Taureau, joyau du
Parc régional du même nom. Des essais de toxicité une fois par mois seulement ne seront pas suffisants pour garantir
la non-contamination chimique des eaux. Ceci est primordial, non seulement pour la survie des ombles de fontaine qui
ont été identifiés dans le Ruisseau à l’eau morte (voir art. 7.4.3.3), mais aussi et surtout pour la santé des habitants du
village, des villégiateurs et des usagers du Parc régional.
29
Chapitre 4 – Niveaux de bruit
4.1 – Modélisation de la propagation des bruits engendrés par la mine
4.1.1 - Remarques générales
a)- Rappelons encore une fois qu’une modélisation informatique ou mathématique est toujours une
approximation puisqu’elle essaie de prévoir des résultats d’un phénomène physique trop complexe pour être traité avec
quelques formules mathématiques simples et éprouvées. Toute modélisation a donc besoin d’une validation sur le
terrain de son logiciel et de ses paramètres afin d’en confirmer l’application et la précision.
Dans le cas présent, le promoteur n’a jamais pris le soin de faire des validations sur le terrain et qui auraient pu se faire
lors des travaux liés à son usine de démonstration : opérations d’excavation, de transport de matériaux et même et
surtout de dynamitage. Ces validations auraient tenu compte de la topographie réelle des lieus, de la présence ou non
de végétation, de l’effet d’écho sur les montagnes avoisinantes et sur l’effet de canyon des cours d’eau et des lacs. En
conséquence, les niveaux de bruit annoncés par le promoteur ne sont que théoriques.
b)- Il faut rappeler de plus que les échelles de niveaux de bruits ne sont pas linéaires, mais logarithmiques, ce qui
signifie que la différence entre 40 dBA et 50 dBA correspond non pas à une augmentation d’intensité de bruit de 25 %,
mais à une multiplication par 10.
4.1.2 – Niveaux de bruit proposés par le promoteur
a)- Dans ses questions Qc-47 à Qc-52, le MELCC a demandé au Promoteur de respecter les normes de bruit de
40 dBA la nuit et 45 dBA le jour, notamment pour le secteur du Domaine Lagrange. Ces normes sont des maxima qui
protègent les citoyens, indépendamment des estimations effectuées par modélisation. Dans ses réponses, le Promoteur
refuse de se conformer à ces normes et prétend conserver ses limites de 55/50 dBA en se basant sur les normes
municipales. Selon ses mots et selon ses modélisations approximatives, « la gêne anticipée sera faible » (p. 110 de sa
réponse), ce qui illustre un désintéressement complet des impacts sonores sur les citoyens
b)- Les niveaux de bruit de 50/55 dBA annoncées par le Promoteur aux milieux récepteurs considérés (soient les
résidences du Domaine Lagrange et les premières résidences du village) ne sont pas conformes aux normes contenues
dans la Directive 019, une directive s’appliquant spécifiquement aux mines et à laquelle le promoteur se réfère
constamment dans son étude d’impact.
31
Chapitre 5 – Dispersion atmosphérique des poussières
(Réf. réponses à QC-102 à 106 et Annexe 6)
Le promoteur reconnait que les données météos utilisées ne sont pas celles de St-Michel-des-Saints, mais
celles de Mirabel et/ou de St Faustin, sur lesquelles il a effectué des corrections à plusieurs niveaux
(directions, fréquence et forces des vents, corrigés en fonction du relief).
Ces corrections ne sont donc que des approximations, sur la base de raisonnements intuitifs et
approximatifs, et les données ainsi générées ne sont qu’approximatives et non prouvées.
b)- Les critères du MELCC auxquels se réfère le consultant sont ceux qui s’appliquent aux projets miniers
nordiques, au nord du 51ème parallèle (chapitre 4.4 de l’Annexe 6, p. 21). Le consultant justifie ce choix en
mentionnant que, même si le projet se trouve à des latitudes plus au sud, les critères qui devraient s’appliquer « établis
pour des régions fortement urbanisées, ne sont pas réalistes pour la région ». Ceci est inacceptable, considérant que ce
projet est dans une zone urbanisée et non pas dans une région inhabitée au nord du 51 ème parallèle.
a)- Remarquons notamment les affirmations suivantes, page 50 de l’Annexe 6 : « L’aspect de l’étude de
dispersion qui comporte le plus haut degré d’incertitude est certainement l’estimation des émissions fugitives de
poussières…….. Ces méthodes approximatives sont basées sur des relations empiriques établissant une corrélation
moyenne …… Toutes ces méthodes d’estimation des émissions fugitives peuvent être qualifiées d’approximatives et
représentent ainsi l’ordre de grandeur des émissions, plutôt qu’une estimation précise. …… les facteurs d’émission AP42
demeurent approximatives ….. ce qui introduit une incertitude supplémentaire aux émissions de matières particulaires
dans l’air ambiant et dont le niveau de surestimation ou de sous-estimation demeure inconnu. »
b)- Toutes ces mentions viennent en addition à l’avertissement habituel du consultant en début de son rapport
« Avis au lecteur » qui dit notamment : « ….les conclusions, les recommandations et les résultats cités au présent rapport
ne font l’objet d’aucune garantie, explicite ou implicite. »
c)- En conséquence, il apparait inacceptable que le consultant puisse annoncer des retombées faibles à certains
endroits critiques (tels que le Domaine Lagrange et le Petit lac aux Pierres, p. 38 de l’Annexe 6 pour les retombées de
silice cristalline, ainsi que le village de St-Michel-des-Saints, p. 51), alors qu’il répète en plusieurs endroits dans son
rapport que ses conclusions ne sont qu’approximatives. Il semble ignorer que des personnes habitent dans ces zones.
5.3 – Les déclarations du consultant lors des audiences du BAPE (28-30 janvier 2019)
a)- En réponse à des questions sur la dispersion des poussières en fonction des vents, le consultant a montré
plusieurs roses des vents qui identifiaient clairement que les vents dominants étaient en direction du Domaine Lagrange
et du village, et il a insisté sur ce point. Mais ce fut surprenant de l’entendre affirmer « qu’il n’y aurait aucun problème
au village » !!
b)- Il est inacceptable que le promoteur et son consultant puissent ignorer que ces retombées de poussières se
feront sur des êtres humains, occupant des chalets et résidences du Domaine Lagrange et du village de St-Michel-des-
Saints, et il est donc inacceptable que le promoteur se permette de jouer ainsi avec la santé des gens sur la base de
32
résultats d’études théoriques très approximatifs et non garantis.
De plus, le rapport Norda-Stelo (document DC7 déposé à la Commission) émet une critique importante sur les teneurs
en silice cristalline annoncées par le promoteur (voir l’analyse de la réponse du promoteur à la question Qc101 du
MELCC : « La réponse de l’Initiateur fait état du fait que du matériel à faible teneur en silice cristalline sera utilisé pour
recouvrir les surfaces de roulement, mais l’explication fournie n’est pas convaincante. Le taux de silice cristalline utilisé,
soit 2,5 %, est particulièrement faible en comparaison des teneurs normalement trouvées dans les matériaux granulaires
qui sont de l’ordre de 15 à 20 %. »
Ces risques sont graves et doivent être pris en considération, surtout qu’il s’agit de la santé des habitants du village et
des résidents des alentours. Le promoteur a choisi de négliger complètement ces risques en se fiant à une seule source
dans la littérature (Sanexen 2016), mentionnée au par. 5.1.6 (page 39 de l’Annexe 6).
De plus, en ce qui concerne la santé des travailleurs, dans la même Annexe 6, il est reconnu que « les impacts du projet
sur la qualité de l’air demeurent essentiellement sur le site du projet … ». Ceci confirme bien que les risques pour les
travailleurs de la mine sont très élevés de développer des maladies pulmonaires (silicose et pneumoconiose du
graphite), comme l’expérience l’a prouvé dans de nombreuse mines.
5.5 – Conclusion
Le promoteur du projet, représenté par son consultant, annonce que les diverses retombées de poussières
(essentiellement de silice cristalline) seront faibles ou négligeables à tous les points sensibles identifiés (Domaine
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Lagrange, village). Cependant il reconnait que toutes ses modélisations ne sont qu’approximatives et qu’aucune
garantie d’exactitude des résultats ne peut être fournie. Il est donc évident que le promoteur prend à la légère les
risques pour la santé des travailleurs de la mine, mais aussi et surtout pour la population du village de St-Michel-des-
Saints et des résidents du Domaine Lagrange. Ceci est irresponsable et absolument inacceptable.
Et rappelons ici un principe que notre ministre de l’économie Pierre Fitzgibbon a énoncé récemment : « La santé passe
avant les jobs ».
34
Chapitre 6 – Équipement minier électrique
(Réf. Art. 4.3.5 et réponse à Qc-12)
Nous remarquons que le promoteur cite constamment son projet « Tout électrique » dans ses promotions, mais sans
jamais montrer d’image ni de détail sur ces équipements électriques fantômes. Ces annonces lui ont ouvert les portes
des médias et lui ont permis d’obtenir des subventions de fonds publics très importantes.
En conséquence, pour donner de la crédibilité à ses annonces, il serait temps que le promoteur soumette un dossier
complet décrivant l’état d’avancement actuel de tous ces équipements électriques : présentation de chacun des
fabricants et de leur expérience dans ce domaine, description technique des équipements, description des batteries
utilisées et de leur mise en œuvre (autonomie, temps de recharge, durée de vie, coût et fréquence des remplacements,
risques d’incendie, fiabilité et disponibilité attendue des équipements), calendrier de développement, de fabrication et
d’essais de prototypes, programme de livraison des prototypes, programme de fabrication en série des versions
commerciales, garanties fournies par le fabricant sur les performances techniques, sur la fiabilité et la disponibilité, et
les délais de livraison.
Ces dossiers techniques doivent tenir compte de la nouvelle capacité des camions de minerai (63 tonnes au lieu de 40
tonnes), tel qu’annoncé par le promoteur dans l’Annexe 1 de ses réponses aux questions du MELCC, si des camions de
cette capacités sont choisis pour l’exploitation électrique.
6.3 – Réponse de NMG : Liste des équipements électriques disponibles sur le marché (Doc. DA28 fourni au BAPE le 4
février 2020)
Dans cette liste, dont une partie est simplement recopiée du magazine Electrek, les 2/3 sont des équipements pour
galeries de mines souterraines, soit à batteries soit à trolleys, et dont les caractéristiques, dimensions et capacités ne
s’appliquent pas à des mines à ciel ouvert.
Dans les autres équipements cités, certains sont soit de petite capacité, soit destinés à des usages particuliers (par
exemple le camion Komatsu de 63 tonnes à batteries est fait pour descendre ses chargements vers le bas d’une colline
en rechargeant ses batteries, et non pas pour transporter un chargement vers le haut !).
En consultant cette liste en détail, il apparait que certains équipements électriques divers (à batteries ou à câble)
paraissent effectivement disponibles sur le marché. On peut donc se poser la question : pourquoi NMG doit-il attendre
7 ans pour équiper sa mine électrique ? On peut donc supposer que les capacités disponibles parmi ces équipements ne
correspondent pas à ses besoins, et en particulier pour des camions-bennes de grande capacité alimentés avec des
batteries qui seront plus pesantes que le camion lui-même.
Le promoteur annonce aussi que certains équipements sont encore confidentiels. Mais aucun détail n’est fourni sur leur
nature, leur capacité, leur mode de propulsion (batteries ou câbles), leur degré de développement, leur fiabilité et les
garanties associées.
35
Il restera à voir : quand ces équipements fantômes vont-ils apparaitre sur un chantier et en combien de prototypes ? Et
comment les investisseurs vont-ils apprécier un tel projet qui fonctionnerait avec des équipements majeurs qui seraient
des prototypes, avec des disponibilités, fiabilités et longévités inconnues ?
a)- Si le promoteur ne fournit pas de tels dossiers plus précis dans les plus brefs délais, ou si ces dossiers ne sont
pas probants ou ne présentent pas de garanties suffisantes de disponibilité de ces équipements électriques en 2027, le
projet devrait être analysé comme fonctionnant avec des équipements mobiles au diesel pendant toute son
exploitation. En particulier la production de gaz à effet de serre (GES) devra être évaluée et prise en compte sur 26 ans.
Dans ce dernier cas, on pourra considérer que les annonces du promoteur sur sa mine « Tout électrique » n’étaient que
de la fausse publicité.
b)- Décret gouvernemental : dans le texte de sa question QC-12, le MELCC rappelle au promoteur que, puisqu’il
déclare utiliser des équipements mobiles au diesel pendant 5 ans seulement, il devra obtenir une modification du
décret gouvernemental d’autorisation si cette utilisation du diesel était prolongée. Ceci a été confirmé par la
représentante du MELCC lors des audiences publiques du BAPE (28-30 janvier).
Notre commentaire à ce sujet : il apparait que ceci n’est qu’un vœu pieux puisqu’il est bien évident qu’une fois
que la mine sera en exploitation, si on regarde les évènements récents dans d’autres projets (Malartic, Rouyn), aucun
ministre ni aucun gouvernement ne voudra prendre la décision de l’interrompre, ceci pour des raisons politiques
évidentes, et qu’en conséquence, la modification du décret sera accordée sans examen approfondi.
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Chapitre 7 - Circulation des camions et sécurité des usagers
7.1 – Les annonces du promoteur
Le promoteur annonce dans plusieurs sections de son étude que pendant l’exploitation, le projet causera une
augmentation moyenne du camionnage de 15 à 20 camions par jour alors que le volume actuel sur la route 131 serait
d’environ 378 camions. Il a même annoncé à son comité d’accompagnement le 22 janvier 2019 que « On dénombre 400
camions circulant chaque jour sur la route 131. Avec la mine, 10 à 15 camions seront ajoutés à tous les jours ». Cette
évaluation des camions actuels serait basée sur des données du ministère des transports (MTQ).
Mais ce chiffre de 378 à 400 camions par jour est apparu comme très exagéré pour plusieurs résidents, alors que les
chiffres de camions rajoutés par la mine paraissaient au contraire très faibles.
En conséquence, ces deux séries de chiffres nécessitaient une vérification.
7.2 - Débits de circulation actuels (réf. Art. 8.5.4.2)
a)- Aux articles 8.5.4.2, 5.5.7.1, 7.5.2.2, l’étude ÉIES se réfère aux données du ministère des transports (MTQ)
pour déclarer que le débit journalier moyen annuel (ou « DJMA ») des véhicules sur la route 131 entre St Zénon et St-
Michel-des-Saints serait actuellement de :
- 2700 véhicules par jour (d’après des mesures de 2017 extrapolées pour 2019);
- 14 % étant des camions (d’après l’interprétation de mesures faites en 2014), ce qui donnerait 378 camions par jour !
Ce chiffre est apparu immédiatement très exagéré aux yeux des résidents de la région, d’autant plus que le promoteur
l’arrondit allègrement à 400 camions par jour (page 7-130). Notons qu’un tel chiffre de 378 camions par jour signifierait
1 camion à toutes les 2 minutes ½ à l’entrée du village de St-Michel-des-Saints, et il est évident pour tous les résidents
consultés que ce n’est pas réel. La route 131 n’est pas l’autoroute 20 entre Montréal et Québec !
b)- Nos vérifications : Après des communications directes avec les spécialistes du MTQ (M. Yannick Prémont,
spécialiste en géomatique, et M. Jean Laplante, ingénieur, responsable du secteur Données de circulation, entre le 29
sept. et le 3 oct. 2019), des explications, des tableaux de relevés et des commentaires ont été obtenus du MTQ selon ce
qui suit :
- les comptages ont été faits sur quelques jours seulement avec des tubes pneumatiques et un algorithme de
traitement des impulsions afin d’essayer de classifier les véhicules. En conséquence, selon l’ingénieur du MTQ,
l’identification des camions est très imprécise principalement dans la catégorie intermédiaire Classe 5 (2 essieux) selon
les normes de la FHWA (« Federal Highway Administration » américaine). Voir l’illustration des classes FHWA sur la
figure ci-après.
En conséquence, aucune précision des résultats sur la quantité de camions ne peut être avancée;
- les pourcentages de camions ne sont valides que pour la période de comptage et il ne s’agit en aucun cas d’une
estimation annuelle;
- les rapports détaillés des campagnes de mesure faites en mai et aout 2014 montrent que la Classe 5 constitue
la plus grosse partie de ce qui est considéré comme un camion, ce qui influence beaucoup le résultat total;
- or, selon les précisions de l’ingénieur du MTQ, la Classe 5 est constituée de véhicules longs à 2 essieux (genre
camion de livraison), mais il est possible que dans certains cas les « gros pick-up » soient comptés dans cette catégorie,
alors qu’ils ne sont pas des camions. De plus, les véhicules récréatifs (VR) sont aussi souvent comptabilisés dans cette
catégorie;
- en conséquence, sachant que dans notre région une grande partie de la population roule en « pick-up », et
qu’en plus au mois d’août les VR sont très nombreux dans cette région touristique, on peut en conclure que le
pourcentage moyen de camions (14 %) annoncé et repris sans discernement par le promoteur est trompeur et exagéré,
et donc qu’il ne peut pas être utilisé pour évaluer le débit journalier de camions sur la route 131.
- De plus, ce sont surtout les camions lourds que nous voulons comptabiliser afin de comparer à l’augmentation
due à la mine qui sera constituée de camions lourds uniquement.
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c)- La confirmation du MTQ sur les données de circulation – Document déposé DB69
Dans le document DB69 daté du 12 février 2020 et déposé à la Commission, les mêmes commentaires sont confirmés
par un autre ingénieur du MTQ concernant l’évaluation du nombre de camions, à savoir (textuellement):
« Un véhicule est considéré camion à partir de la classe 4 (bus0. On peut voir dans ce rapport que la classe 5
constitue la plus grosse partie de ce qui est considéré comme un camion. La casse 5 est constituée de véhicules
longs à 2 essieux genre camion de livraison. Toutefois il est possible que, dans certains cas les gros pick-up soient
dans cette catégorie (F350 ou autre). Les véhicules récréatifs sont souvent aussi inclus dans cette
catégorie. »……. « Le pourcentage de camions n’est valable que pour la durée du comptage. Il ne s’agit en aucun
cas d’une estimation annuelle. » …… « Il est à noter que la proportion des véhicules lourds varie avec l’activité
économique d’une région, donc elle varie avec les saisons et les années. »
d)- En 1ère conclusion, selon les explications des deux ingénieurs du MTQ, la méthode du 14 % ne doit pas être
utilisée pour comptabiliser les camions lourds. Donc les prétentions du promoteur selon lesquelles la circulation
actuelle de camions serait entre 378 et 400 camions apparaissent non fondées.
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e)- La réalité : un comptage visuel effectué
Devant l’absence de données fiables sur la quantité actuelle de camions lourds et afin de corriger ces
informations erronées, des bénévoles de l’APLT ont décidé de faire un comptage visuel des camions. Donc 5 bénévoles
ont monté la garde pendant une journée complète de semaine (de 7h à 23h) le 10 octobre 2019, sur la route 131 à
l’entrée de St Michel-des-Saints. Bien que ce comptage n’ait été effectué que sur une seule journée, cette journée de
semaine du 10 octobre peut être considérée comme assez représentative d’une journée moyenne annuelle. En
l’absence de données plus fiables, on peut considérer que ce comptage visuel offre une plus grande précision de
résultats que tous les mesurages et corrections approximatives disponibles jusqu’alors.
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7.3 – Débits de circulation additionnelle amenée par la mine
(Réf. Art. 7.5.2.2 et Art. 10.2.8 et p. 7-130 et 7-139)
a)- Durant l’exploitation de la mine, le Promoteur déclare que « L’exploitation du projet causera une
augmentation du camionnage de 15 à 20 camions par jour en moyenne, principalement pour des livraisons diverses sur
le site et l’expédition du concentré de graphite ». Ces chiffres de 15 à 20 camions par jour sont répétés à l’article 8.5.4.2
(p. 8-35) et à l’article 8.5.4.4 (p. 8-37). Il avait aussi déclaré à son comité d’accompagnement le 22 janvier 2019 : « Avec
la mine, 10 à 15 camions seront ajoutés à tous les jours ».
b)- Par contre, l’article 10.2.8– « Transport des produits » de l’Étude ÉIES, donne le détail de ces transports par
les tableaux 10-6 et 10-7 : produits chimiques divers incluant les explosifs, livraison du concentré de graphite, tonnage
des camions et fréquence des transports (camions/an). Et il s’avère que ces tableaux donnent des résultats très
différents des 15 à 20 camions par jour annoncés.
- En effet, d’après le tableau 10-6, après vérification du nombre de camions requis pour chaque quantité de
produit livré, le total de camions par année annoncé est exact (4533 par an), soit environ 20 camions par jour (sur 11
mois ½ et 20 jours/mois). Mais on a oublié que ces camions font des allers-retours car ils doivent revenir à leur point de
départ. Donc le débit journalier futur de ces camions lourds sur la route 131 sera le double, soit 40 camions par jour.
c)- Lors de l’audience du BAPE (28-30 janvier), ce chiffre a d’ailleurs été confirmé par le promoteur qui a reconnu
avoir donné une fausse information à ce sujet dans son étude. Ce qui signifie aussi qu’il a fait de fausses déclarations à
son propre comité d’accompagnement le 22 janvier 2019 en déclarant « 10 à 15 camions supplémentaires, ce qui est
négligeable par rapport aux 400 camions actuels ».
d)- Enfin, pendant les premiers 5 ans où la mine utilisera des équipements mobiles au diesel, l’article 10.2.7.1
mentionne une consommation de carburant diesel de 2800 m3/an, soit environ 2400 tonnes/an qui seront transportés
par 61,5 camions-citernes de 39 tonnes, ce qui signifie une circulation de 123 camions par an (en comptant le retour),
donc 1 camion tous les 2 jours (sur 250 jrs/an), soit ½ camion par jour. (Notons de plus qu’on ne peut pas négliger la
grande possibilité que ces équipements diesel soient utilisés sur toute la durée de l’exploitation, soit 26 ans).
f)- Par ailleurs, dans ses réponses aux questions du MELCC, le promoteur annonce, dans son Annexe 1 -
« Actualisation du projet Matawinie », que le convoyeur électrique initialement annoncé pour le transport du minerai au
concasseur serait supprimé et remplacé par des camions de 63 tonnes. Ceci augmente donc beaucoup la consommation
de diesel (au moins pour les 5 premières années, et vraisemblablement pour toute la durée de la mine), et donc cela
augmentera le nombre de camions citernes devant alimenter cette flotte de camions diesel. On peut logiquement
supposer que cette circulation de camions citernes sera doublée et deviendra 1 camion-citerne par jour.
g)- En conclusion, au total, c’est donc une circulation additionnelle de 41 camions par jour que le projet de mine va
provoquer, et non pas 15 à 20 comme le prétendait le promoteur.
a)- À l’article 8.5.4.2 (p. 8-35), l’étude ÉIES introduit discrètement l’impact additionnel sur la circulation sur la
même route 131 qu’amènera le projet « La Granaudière ». Cette usine de granules de bois, en construction depuis
l’automne 2019 et qui sera mise en exploitation au printemps 2021, annonce une production de 185 000 tonnes de
granules par an. L’étude ÉIES mentionne 200 000 tonnes par an (p. 8-35) et cela nécessitera « qu’un camion bi-train
partira à toutes les 2 heures, 24 heures par jour, 7 jours par semaine vers Joliette (en traversant St-Michel-des-Saints).
Chaque camion peut prendre 44 tonnes de granules ».
b)- Ce qui signifie que 24 camions par jour (12 vers le sud plus 12 en retour vers le nord) seront ajoutés dès le
40
printemps 2021 aux débits de camions sur la route 131 par l’usine La Granaudière, et ceci bien avant que la mine de
graphite ne commence son exploitation et ne rajoute un autre 41 camions par jour.
c)- Donc au total, c’est 65 camions lourds par jour qui vont se rajouter à la circulation actuelle sur la route 131 si
la mine est en exploitation.
a)- Total combiné et pourcentage d’augmentation : D’après le comptage visuel décrit ci-dessus, la circulation
actuelle de camions sur la route 131 entre St-Michel-des-Saints et St Zénon est d’environ 260 par jour (Classe 5 et plus)
incluant 146 camions lourds (4 essieux et plus). Or les camions qui seront rajoutés par les deux projets (usine de granule
et mine de graphite) sont tous supérieurs à 20 tonnes et correspondent à des camions lourds de 4 essieux et plus (Classe
7 et au-delà, selon les normes FHWA). Ce qui veut dire que l’augmentation relative de camions lourds (4 essieux et
plus) sera de : 65 ajoutés par rapport à 146 actuels = + 44,5 %
b)-De plus, augmentation des quantités en période de dégel : il ne faut pas négliger qu’en période de dégel, la
charge de beaucoup de ces camions devra être diminuée, ce qui va encore augmenter la quantité de camions sur la
route. On peut dire que le réseau routier de la région entre St-Michel-des-Saints et Joliette ne se prête pas à un tel trafic
typique d’une région minière.
c)- Impact très grave : Considérant que la route 131 est une route secondaire qui traverse plusieurs villages tels
que St-Félix-de-Valois, St-Jean-de-Matha, Ste-Émélie-de-l’Énergie, St-Zénon et St-Michel-des-Saints, et ceci parfois avec
des chaussées très étroites, sur des rues commerciales en plein centre des villages et devant des écoles, il est évident
que l’impact sur la circulation et sur la sécurité des usagers et des citoyens sera très grave et préoccupant.
D’ailleurs, l’étude EIES le reconnait explicitement en déclarant (page 8-37) : « L’augmentation à venir du transport lourd
sur la route 131 constitue un enjeu pour la sécurité des usagers, incluant la population locale, les villégiateurs et les
touristes, qui doivent partager la route. Des intervenants consultés craignent même que l’achalandage accru et les
enjeux de sécurité de la route 131 ne deviennent un frein à l’attractivité économique sur le territoire de la Haute-
Matawinie ». Et aussi, « Lorsque l’on considère la contribution de l’ensemble des futurs projets, en considérant les enjeux
déjà identifiés par le milieu (dont la vitesse à l’intérieur des noyaux villageois et les difficultés d’effectuer des
dépassements sécuritaires), les impacts cumulatifs totaux associés à la circulation des camions et la sécurité des usagers
sont considérés importants. »
d)- Dégradation des routes : En plus des impacts sur la circulation et la sécurité, une telle augmentation du
nombre de camions provoquera une dégradation accélérée de l’état des routes, ce qui entrainera des coûts
supplémentaires pour le MTQ et des dérangements importants pour toute la communauté.
7.6 - Conclusion
a)- Ceci confirme que l’implantation d’un tel projet de mine à ciel ouvert de grande dimension n’est pas
acceptable dans une région rurale dont le réseau routier a été développé pour accommoder une industrie forestière
modérée et une économie de tourisme et de villégiature.
b)- Et il est extrêmement regrettable que le promoteur, dans son étude ÉIES, n’accorde à cet aspect qu’une
importance mineure, ses quelques commentaires étant noyés au milieu de toutes ses démonstrations techniques très
détaillées et très spécialisées, alors qu’il s’agit d’un élément de 1ère importance dans l’acceptabilité de son projet à
l’intérieur de cette région.
c)- Notons qu’il est aussi très regrettable que le Ministère des Transports (MTQ) n’ait pas utilisé son expertise
dans ce domaine lors de sa revue de l’étude ÉIES, puisqu’il a déclaré cette étude recevable sans faire de commentaire et
sans émettre d’inquiétude, alors qu’il est évident que ce projet va avoir des impacts négatifs majeurs sur la circulation
41
sur le route 131, sur la sécurité de la population et sur l’entretien du réseau routier.
d)- Il est aussi très surprenant et regrettable que la représentante du MELCC ait confirmé, lors des premières
audiences publiques, n’avoir fait aucune analyse à ce sujet et donc n’avoir accordé aucune importance à ce dossier. Le
MELCC a donc accepté sans aucune vérification tous les chiffres avancés par le promoteur, chiffres qui se sont révélés
faux.
42
Chapitre 8 – Gaz à effet de serre (GES)
(Réf. Art. 4.2.8, Art.7.6.1.2, Qc-12, Addenda 1)
Notons qu’il est surprenant que la Variante C – Tout diesel sur 26 ans, soit étudiée. Il se pourrait que le promoteur se
laisse la porte ouverte pour fonctionner au diesel pendant toute la durée de la mine (26 ans).
b)- La quantité de GES des équipements mobiles pré-projet a été enlevée, sans raison ni explication;
c)- La quantité de GES liée au déboisement pré-projet a été enlevée, sans raison ni explication;
d)- Conclusion : ce nouveau tableau semble avoir été ajusté à la baisse sans raison valable, ce qui laisse un grand
doute sur l’exactitude de tous ces chiffres avancés par le promoteur. La raison semble être son objectif de rester en-
dessous du seuil de 10 000 tonnes par année à partir duquel des achats de droit d’émission sont exigés (« taxe sur le
carbone », voir par. 8.4 ci-dessous).
e)- Puisqu’aucune justification n’est donnée pour ces diminutions annoncées qui, de plus, paraissent erronées,
nous considérons ci-après que les chiffres originaux fournis par le consultant Globerpro sont les seuls valables.
b)- Même une mine « Tout électrique » pendant 26 ans produirait l’équivalent de 4000 nouvelles autos sur la
route.
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c)- Enfin, si la mine « Tout électrique » se révélait un rêve impossible et que les équipements mobiles soient au
diesel sur 26 ans, ce serait l’équivalent de 5600 nouvelles autos sur la route.
d)- De plus, suite à la suppression du convoyeur électrique remplacé par des camions diesel de 63 tonnes, les
quantités de GES vont beaucoup augmenter. Donc toutes ces évaluations sont à revoir, ce que n’a pas fait le promoteur
dans son document DA38. Le nombre d’autos équivalentes va vraisemblablement passer à 6000 nouvelles autos,
tournant en rond à St-Michel-des-Saints pendant 26 ans.
Ceci apparait comme une grossière interprétation d’une entreprise carboneutre. C’est vraiment transformer la vérité,
car selon ce principe avancé par le promoteur, toute entreprise qui achèterait des compensations pourrait se déclarer
carboneutre, ce qui est ridicule. Par exemple, peut-on supposer que Air Canada, qui crache des millions de tonnes de
GES, pourrait se déclarer carboneutre parce qu’elle achèterait des compensations ?
En conclusion, cette déclaration fausse de projet carboneutre que le promoteur utilise depuis 4 ans pour promouvoir
son projet supposément « tout électrique » et attirer l’attention des médias n’est que de la désinformation.
En conséquence, le promoteur devra modifier son étude économique pour inclure le paiement des crédits de carbone
dans ses coûts d’exploitation, et ceci en se basant non seulement sur les taux des crédits GES actuels (environ 30
CAD/tonne), mais aussi en prévision des taux futurs (annoncés jusqu’à 50 et 100 CAD/tonne).
44
Chapitre 9 - Plan de réaménagement et de restauration du site
(Réf. Annexe 4-3 et Plan final doc. PR5.5)
Considérant l’importance de l’intégrité de la nature et de la beauté des paysages pour cette région touristique, il est
primordial que ce site retrouve un aspect le plus proche possible de son aspect initial.
9.2.1 - Un élément inquiétant et inadmissible : selon les plans du promoteur pour un remblaiement partiel, dans
l’Étude ÉIES et son Annexe 4-3, aucunes descriptions ni dimensions ne sont données sur la partie de la fosse qui ne sera
pas remblayée et qui restera un trou béant à perpétuité. Cette lacune n’a pas été comblée dans le dernier « Plan de
réaménagement et de restauration », soumis au MELCC le 5 novembre 2019 dans lequel on trouve seulement, à la page
4-16, que, « À l’année 26, la fosse aura une superficie de 352 000 m2 ouverte en surface ». Aucune dimension n’est
donnée là encore.
9.2.2 – Étude de faisabilité : Il faut se référer à l’Étude de faisabilité (« ÉF ») du promoteur publiée en décembre 2018
pour trouver les paramètres principaux du remblayage de la fosse. Selon l’article 18.12.1 (p. 230) de cette étude,
seulement 40 % du volume total des résidus seront remblayés dans la fosse et 60 % resteront empilés dans des
montagnes de résidus. Dans cette même étude, la figure 16.8 (p. 172) montre la fosse résiduelle après 25 ans
d’exploitation. Selon des mesures prises à l’échelle sur cette carte, ce trou aura une longueur approximative de 1,2 à 1,3
km, une largeur d’environ 400 m et sa profondeur sera celle de la fosse, soit 235 m. Et la « restauration » finale de ce
trou consistera simplement en l’installation d’une clôture de sécurité (art. 21.1.12 de l’étude ÉF).
9.2.3 - Les seules dimensions physiques données sur cette fosse résiduelle apparaissent dans l’Annexe 4-3 de l’étude
ÉIES, à la figure 4.6 – « Site dans son état post-restauration », une carte dessinée sans échelle. On retrouve aussi la
même illustration dans l’étude ÉIES elle-même, à la carte 4-44 – « Empreinte finale du projet » (p. 4-23). Sur ces deux
cartes, en mesurant à l’échelle les dimensions de la fosse résiduelle, on retrouve des dimensions similaires à celles de
l’Étude de faisabilité « ÉF », soient : longueur d’environ 1,3 à 1,4 km, largeur entre 300 à 360 m. On retrouve la même
carte dans le dernier « Plan de réaménagement et de restauration ».
Nous considérons qu’il est inadmissible que le promoteur s’abstienne de donner clairement ces dimensions : pourquoi
veut-il cacher les dimensions de sa fosse résiduelle ? Pour ne pas effrayer la population et les partisans du projet ? Pour
ne pas avouer que sa dite-restauration sera incomplète ?
De plus, le risque existe qu’un remblaiement partiel de la fosse ne puisse pas se faire, selon les résultats des essais sur
les cellules expérimentales de co-disposition (voir l’article 2.2.1 plus haut). Dans ce cas, la fosse résiduelle aurait les
dimensions de la fosse d’exploitation, soit 2,7 à 3 km de long, 400 m de large et 235 m de profondeur. Une destruction
majeure de la région, que nous laisserons en héritage à nos enfants et petits-enfants, pour des siècles à venir !
La région restera ainsi défigurée à perpétuité. Le promoteur justifie cette restauration incomplète en se référant au
« Guide de réaménagement et de restauration des sites miniers au Québec ». Mais les critères de ce guide semblent
avoir été conçus essentiellement et traditionnellement pour des sites miniers nordiques dans des régions inhabitées,
malgré la réponse de la représentante du MERN lors des audiences du BAPE (28-30 janvier) qui signale qu’aucun autre
guide n’existe pour des régions habitées.
Il apparait donc ici une nécessité de changer cet état de fait puisque de plus en plus de mines s’annoncent dans la
couronne sud du Québec, dans des milieux habités. Il est évident qu’un tel guide ne peut pas s’appliquer à une mine
située dans une région touristique et de villégiature, à courte distance d’un village et de secteurs résidentiels, et située
entre le Parc national du Mont-Tremblant et le Parc régional du lac Taureau. Une telle « restauration » bâclée n’est tout
simplement pas acceptable.
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Chapitre 10 – L’usine de démonstration : un fiasco
10.1 – Mise en service de l’usine de démonstration de NMG
Le promoteur a construit une « Usine de démonstration » à l’intérieur d’un bâtiment industriel existant à environ 1 km
du village. Cette usine a été déclarée en fonctionnement en octobre 2018. Depuis ce temps, cette usine a été
constamment citée par le promoteur dans ses relations publiques, dans les articles de journaux, dans ses communiqués,
en plus d’être plusieurs fois utilisée pour des visites organisées pour les citoyens ou les médias. Donc cette usine de
démonstration est devenue l’image que le promoteur a utilisée pour la promotion de son projet et pour l’obtention de
subventions et autres crédits de fonds publics.
Par ailleurs, cette installation est en fait un projet-pilote puisque sa capacité de production (1000 tonnes/an, donc 100
fois inférieure à l’usine commerciale) est bien trop faible pour en faire une usine de démonstration. En effet, dans le
développement de nouvelles technologies, il est reconnu que plus le multiplicateur de capacité est élevé, plus le risque
d’échec à l’échelon commercial est élevé, ce qui a mené à de nombreuses faillites dans le passé.
Qu’en est-il devenu de cette usine maintenant en février 2020, soit presque 1 an ½ après sa mise en service ? En effet, il
est édifiant de comparer ses objectifs initiaux et ses résultats réels.
10.2 – Les objectifs initiaux
Objectifs tels que déclarés par le promoteur en 2018 :
a)- Produire 1000 tonnes par an de concentré de graphite sur une période de 2 ans;
b)- Utiliser ces 2000 tonnes pour qualifier son produit auprès de clients potentiels;
c)- Conclure des ententes avec des clients pour vendre sa future production commerciale de 100 000
tonnes/an ;
d)- Mettre au point et maitriser le procédé de séparation magnétique et de concentration du graphite ;
e)- Construire des cellules expérimentales de co-disposition des résidus et effectuer des essais pour vérifier leur
faisabilité et confirmer les paramètres des modélisations de laboratoire.
10.3 – Les résultats constatés en février 2020
a)- Au lieu de 1000 tonnes de concentré, on apprend que cette usine de démonstration n’en a en fait produit
que 200 tonnes en 1 an et 4 mois (selon l’article du journal L’Action de Joliette du 1 er janvier 2020) : donc résultat
négatif.
b)- Aucun rapport positif de qualification de son produit auprès de laboratoires d’analyse ni d’acheteurs
potentiels n’ont été annoncés par le promoteur : donc résultat négatif.
c)- Aucune entente de vente à court ou à long terme n’a été établie avec de vrais clients, la seule entente
survenue étant avec la firme Traxys qui n’est pas un client-utilisateur de graphite, mais seulement un courtier en
minéraux : donc résultat négatif.
d)- De gros problèmes sur le procédé de séparation magnétique des résidus acidogènes/non-acidogènes, ainsi
que des problèmes d’élimination du PAX des rejets liquides ont été rencontrés. Ces problèmes ont été révélés par le
promoteur dans sa lettre d’engagement au MELCC du 25 novembre 2019. Donc l’équipe du promoteur semble ne pas
avoir la maitrise de son procédé : donc résultat négatif.
e)- Les cellules expérimentales de co-disposition n’ont pas été installées et n’ont pas pu être testées : donc
résultat négatif.
10.4 – Conclusion : un fiasco
L’usine de démonstration n’a en rien rencontré ses objectifs : à l’heure actuelle, c’est un fiasco.
Sa seule réussite a été d’obtenir des subventions. On peut donc en conclure que cette usine fut un gaspillage de fonds
publics.
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Chapitre 11 – Études de risques
11.1 - Présentation
Même si cet aspect ne figure pas dans l’étude d’impact «ÉIES » de ce projet, il est intéressant de faire ressortir l’étude de
risques présentée dans l’étude de faisabilité «ÉF» sur ce projet, étude émise en décembre 2018. En effet, une telle
étude des risques de réussite aide à évaluer la viabilité du projet, aussi bien du côté technique que du côté économique.
11.2 - Les risques identifiés pour l’avenir du projet
L’étude ÉF contient une série d’avertissements, très sérieux et importants, sur les risques pour la viabilité de ce projet
(art. 25.1.7, p. 324). Il est aussi intéressant de noter que les mêmes risques sont aussi identifiés dans le « Prospectus
pour financement » que le promoteur a publié le 13 décembre 2018 et mis à jour le 10 janvier 2019, dans sa recherche
de financement pour 300 M$ à la bourse de Toronto (ce Prospectus est disponible sur le site SEDAR.com).
Voici le résumé des principaux risques et incertitudes du projet tels qu’identifiés par les consultants de NMG :
- Risques liés à l’évaluation de la réserve minérale, à la qualité du minerai et au manque d’informations sur
l’hydrogéologie et la géotechnique du site;
- Manque de référence sur la disponibilité et la productivité des équipements de mine électriques, sur les
intervalles et coûts d’entretien et sur les temps de recharge;
- Risques liés à l’utilisation des xanthates et au recyclage des eaux de procédé qui augmenteraient les taux de
sulfates/sulfures dans le concentré de graphite;
- Les coûts de la ligne électrique 120 kV et le programme de son installation par HQ sont inconnus;
- Des dépassements de coûts ou des retards peuvent rendre le projet non rentable;
- Difficultés à prévoir pour obtenir le financement du projet car NMG est un petit promoteur sans expérience et
il y a beaucoup de concurrence d’autres promoteurs miniers sur le marché (sous-entendu, au Québec et dans le monde);
- La viabilité du projet est très dépendante du taux de change et de l’avenir incertain des prix du graphite car le
marché des minéraux est très volatil : aucune garantie que ce marché soit rentable pour le graphite, les prix ont
beaucoup fluctué et une diminution des prix pourrait bloquer le développement de ce projet;
- Aucune garantie que NMG obtiendra les permis requis, ni dans les délais requis;
- Tout retard risque d’augmenter les coûts initiaux, tout en laissant la place à des concurrents pour s’emparer
d’une partie du marché;
- L’attitude des communautés vis-à-vis des impacts environnementaux et sociaux pourrait nécessiter des études
supplémentaires et des changements dans la conception du projet, et ainsi provoquer d’autres retards et augmentations
de coûts.
11.3 – Le principe légal de « Précaution en cas d’incertitude »
À signaler un article très pertinent au projet Matawinie, publié dans la revue « Les cahiers de droit » le 12 avril 2005 :
« La précaution en cas d'incertitude scientifique : une des interprétations possibles de l'article 20 in fine de la Loi sur
la qualité de l'environnement ? » - Article par Hélène Trudeau, professeur, Faculté de Droit, Université de Montréal
Résumé de l’article : L'article 20 in fine de la Loi sur la qualité de l'environnement est sûrement l'article le plus important
de tout le droit de l'environnement québécois. En prohibant l'émission de contaminants qui sont « susceptibles » de
porter atteinte à l'environnement, cette disposition concerne tant les situations où un dommage effectif à
l'environnement a été constaté que les situations de risques de dommages pour l'environnement. Par le présent texte,
l'auteure veut démontrer que, en raison de sa formulation et du but qu'il vise, l'article 20 in fine pourrait être interprété
comme s'appliquant non seulement aux situations de risques connus ou prouvés pour l'environnement, mais aussi aux
situations de risques incertains pour l'environnement, c'est-à-dire de risques qui font l'objet d'un début de preuve
49
scientifique mais dont l'existence ne peut être démontrée de façon certaine compte tenu de l'état actuel des
connaissances scientifiques. Ainsi, l'article 20 in fine pourrait comporter en lui-même certains des préceptes du principe
de précaution qui impose, en cas d'incertitude scientifique quant aux risques que fait courir à l'environnement l'utilisation
d'une substance ou d'un procédé, une obligation de tenir compte de ces risques, même s'ils ne sont pas prouvés.
Voir cet article en entier au lien suivant : https://www.erudit.org/fr/revues/cd1/2002-v43-n1-cd3829/043704ar/
11.4 – Autre risque important : un promoteur inexpérimenté
En addition à tous les risques énumérés ci-dessus, ce projet et la communauté de St-Michel-des-Saints fait face à un
autre risque majeur, celui lié au développement d’un tel projet par un promoteur inexpérimenté.
En effet, malgré ses déclarations que son équipe « accumule plus de 60 années d’expérience », ce promoteur ne peut
compter que sur des personnes n’ayant aucune expérience réelle de construction et d’exploitation de mines à ciel
ouvert. Toutes leurs expériences et références ne sont que théoriques et se limitent à quelques années de pratique en
ingénierie ou en études environnementales. Rappelons que 10 juniors mis ensemble ne font pas un sénior, mais
seulement une équipe junior.
Quant à la déclaration de 60 années d’expérience cumulée par cette équipe, si on applique cette prétention à une
grande société d’ingénierie dont on a beaucoup parlé récemment et qui annonce 9000 employés au Québec (et à qui on
peut attribuer une expérience moyenne de 10 années chacun), ce serait comme si cette société déclarait avoir une
expérience cumulée de 90 000 années ! Ce qui serait absolument ridicule.
En conséquence, il existe un grand risque pour la société de laisser une telle équipe sans expérience réelle se lancer dans
un projet majeur comportant de grandes et graves incertitudes : un procédé de gestion des résidus miniers non éprouvé
et expérimental qu’ils n’ont même pas essayé de prouver à petite échelle, des risques d’effondrement de la colline de
résidus miniers acides et toxiques, une technologie de désulfuration et de concentration qu’ils ne maitrisent même pas à
l’échelle de démonstration, des risques importants de drainages miniers acides dûs à ce procédé de co-disposition qui
serait le 1er au monde à être mis en place, ainsi que des risques de contamination des eaux par des tonnes de produits
chimiques, et ceci pendant des décennies et des siècles à venir, des dangers de dispersion de poussières toxiques sur la
population avoisinante.
Le principe légal de précaution devrait donc s’appliquer : il ne faut pas permettre à une telle équipe sans expérience
développer et mettre en place ce qui serait une bombe environnementale à retardement au-dessus des 5000 habitants
de la région, une région de surcroit parmi les plus belles pour l’écotourisme et la villégiature à 2 heures seulement de
Montréal.
11.5 - En conclusion
Au-delà du petit projet de démonstration encore en opération et qui peine à justifier son existence, on constate que ce
projet minier a beaucoup de chemin à parcourir avant de devenir une réalité, et il montre beaucoup de signes de
fragilité sur le plan économique et des risques environnementaux importants.
Tel que démontré tout au long de ce mémoire, les risques environnementaux sont majeurs, ce qui logiquement
devrait mener à l’application des principes de « Précautions en cas d’incertitude scientifique » tel que cela est prévu
dans l’article 20 de la Loi sur la qualité de l’environnement (voir l’article au par. 10.3 ci-dessus).
Le risque que cela présente pour la région et la population de St Michel-des-Saints, c’est que cette entreprise puisse
continuer de faire de belles promesses tout en saccageant notre région pendant quelques mois ou quelques années
encore, et ensuite qu’elle disparaisse comme elle est venue.
Elle laissera à la population locale des cicatrices énormes, physiquement d’abord sur notre territoire dévasté que nous
laisserons aux générations futures, mais aussi mentalement au niveau de la division entre les citoyens et de la
cohésion détruite de notre communauté.
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