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Chapitre 1 Sémiotique, Sémiologie Et Signe

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Léopold Ngodji, Tel.

699182573 Master 1 Sémiotique et Stratégies

Séquence1 : Sémiologie, sémiotique et signe


Si la sémiotique est encore considérée comme un champ de recherche nouveau dans le
contexte qui est le nôtre, il n’en n’est pas dans les sphères scientifiques occidentales et latino-
américaines où elle a bénéficié des recherches au point de se spécialiser en branches et écoles
à la fois diversifiées et complémentaires.
1. La sémiologie de l’École européenne de Ferdinand de Saussure
S’il y a quelqu’un sur a véritablement porté le développement de la sémiologie dans le
contexte européen, c’est bien le linguiste genevois Ferdinand de Saussure (1857-1913).
Considéré comme le père fondateur de la sémiologie européenne (notamment italienne,
carienne et latino-américaine) Ferdinand de Saussure, linguiste de formation a eu le mérite de
positionner la sémiologie comme la « science qui étudie la vie des signes au sein de la vie
sociale ». Ses études ont permis de donner les bases théoriques qui peuvent permettre
d’identifier le signe dans son approche linguistique.
Pour Ferdinand de Saussure en l’occurrence,
On peut concevoir une science qui étudie la vie des signes au sein de la vie sociale ;
elle formerait une partie de la psychologie sociale, et par conséquent de la
psychologie générale ; nous la nommerons sémiologie. Elle nous apprendrait en quoi
consistent les signes, quelles lois les régissent. Puisqu’elle n’existe pas encore, on ne
peut dire ce qu’elle sera ; mais elle a droit à l’existence, sa place est déterminée
d’avance. La linguistique n’est qu’une partie de cette science générale, les lois que
découvrira la sémiologie seront applicables à la linguistique (…) La tâche du
linguiste est de définir ce qui fait de la langue un système spécial dans l’ensemble
des faits sémiologiques1.
L’approche définitionnelle de la sémiologie de Ferdinand de Saussure permet retenir des
précisions sur au moins trois leçons. La première avance que la langue est le plus important de
tous les systèmes de communication, notamment paralinguistique, gestuel, posturo-spatial,
etc. C’est justement parce qu’avec la langue, l’on peut « parler » et interpréter tous les signes
gestuels, mimiques, posturo-kinésique, etc. Alors que si le langage gestuel, par exemple,
envisagerait de « parler » la langue, cela serait un véritable travail complexe et même
impossible. La deuxième leçon est qu’il désigne déjà une science générale des signes qu’il
appelle sémiologie qui n’existait pas encore à son époque, mais sur laquelle il prédit qu’elle «
étudie la vie des signes au sein de la vie sociale ».
C’est dans cette optique que Éric Buyssens souligne que « la sémiologie peut se définir
comme l’étude des procédés de communication, c’est-à-dire des moyens utilisés pour
influencer autrui et reconnus comme tels par celui qu’on veut influencer »2.
Ces perspectives nées des travaux de Ferdinand de Saussure rassurent sur le fait qu’après les
travaux empiriques, les orientations nouvelles et nombreuses se sont structurées. C’est ainsi
que l’on peut parler distinguer, entre autres,
- la sémiologie de la mode qui étudie les discours produits et émis par les phénomènes
de mode (fashion & mode) ;
- la sémiologie médicale qui est la sémiologie médicale est la partie de la médecine qui
étudie les symptômes et signes et la façon de les relever et de les présenter afin de
poser un diagnostic ;

1
F. de Saussure, Cours de linguistique générale, op. cit., p. 33-34.
2
E. Buyssens, « La communication et l’articulation linguistique », cité par Georges Mounin, Introduction à la
sémiologie, Paris, Éditions de Minuit, 1970, p. 13

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Léopold Ngodji, Tel. 699182573 Master 1 Sémiotique et Stratégies

- la sémiologie kinésique qui se sert des codes gestuels et mimiques pour lire le sens des
postures et des gestes des hommes et des objets pris dans leur univers de texte, de
paratexte et de péri-texte ;
- la sémiologie visuelle particulièrement développée dans les travaux du Groupe µ qui
observe comment le sens investit les objets visuels dans ses dimensions de signes
iconiques (ou icônes) renvoyant aux objets du monde, et les signes plastiques, qui
produisent des significations dans ses trois types de manifestation que sont : la
couleur, la texture et la forme.
- la sémiologie graphique qui trace les possibilités de lecture du graphème à côté des
images et formes géo-topologiques diverses ;
- la sémiologie de la photographie qui analyse les différents plans et les angles de prise
de vue dans un contexte de leur mise en scène dans un contexte donné ;
- la sémiologie de la musique qui analyse les lignes de la sonorité et des différents rimes
et rythmes qui permettent de dire comment un son articulé pour contribuer à s’inscrire
dans une socialité de la mode, du plaisir et de l’émotion sensible en termes de
réception et de circulation dans la société ;
- la sémiologie du cinéma qui décrypte envisage de lire les représentations socio-
scéniques qui font du cinéma un ensemble de discours construits autour de la réalité et
de la virtualité irréelle et imaginaire, etc.
2. La sémiotique de l’École américaine de Charles Sanders Peirce
À peu près à la même période que Ferdinand de Saussure, Charles Sanders Peirce (1839-
1914) menait outre-Atlantique des études sur le signe. La particularité de son étude est qu’elle
est très influencée (comme Ferdinand de Saussure avec la linguistique) par la logique et la
philosophie dans sa dimension de « pragmatism ».
Pour Charles Sanders Peirce, la sémiotique est très liée au domaine de la logique dont il avait
contribué au développement (méthode des tables de vérité du calcul des propositions
notamment). Selon son approche, la sémiotique est envisagée comme une philosophie de la
représentation : « (…) je suis, autant que je sache, un pionnier ou plutôt un défricheur de
forêts, dont la tâche de dégager et d’ouvrir des chemins dans ce que j’appelle la sémiotique,
c’est-à-dire la doctrine de la nature essentielle et des variétés fondamentales de semiosis [le
procès du signe] possible »3.
En lisant Peirce dans sa totalité, l’on comprend que la sémiotique (de l’anglais semiotics) est
la science qui étudie les signes dans toutes les formes de leur manifestation et leur expression.
Bref tous les objets de qui nous entourent sont en fait porteurs de sens et véhiculent d’une
manière ou d’une autre des signes.
4. Qu’est-ce que le signe ?
4.1. Le signe selon Ferdinand de Saussure
Tout d’abord, l’on considère le « signe linguistique » de Ferdinand de Saussure comme la
représentation de deux constituants : un « signifiant » que renvoie à un « signifié ». Ce
modèle dyadique du signe permet de comprendre qu’un signe c’est la désignation de deux
choses. D’abord, l’objet tel que nous le percevons et voyons dans sa substance, à savoir son «
signifiant », puis ce que cet objet signifie ou désigne : son « signifié ».

3
C. Sanders Peirce, Écrits sur le signe, Paris, Seuil, [vers 1906]1978, p. 135.

2
Léopold Ngodji, Tel. 699182573 Master 1 Sémiotique et Stratégies

Une chose est perçue qui renvoie à une autre chose qui n'est pas là : tel est d'abord le signe.
Pour lui, un signe est donc une entité à deux faces.

Pour Ferdinand de Saussure, le « signe linguistique » désigne l’unité du système que constitue
le langage. Il s’agit donc de l’assimilation du signe au morphème, c’est à dire à la plus petite
unité porteuse de sens. Cette unité se compose de deux facettes indissociables, que Saussure a
comparées aux deux côtés d’une feuille de papier, le « signifiant » et le « signifié ». Le signe
est alors une « entité psychique à deux faces » qui « unit un concept et une image acoustique
»4.
Pour lui, comme pour la plupart des linguistes modernes, seule la forme orale du langage est
probante, l’écrit n’étant qu’un codage secondaire. Par exemple, le terme « gombo », en
contexte camerounais peut vouloir dire deux choses : un oléagineux et/ou un « dessous de
table » ou un « bakchich » qu’une personne donnerait à son vis-à-vis dans l’optique de le
motiver ou de le corrompre. Ces deux significations du terme « gombo » en contexte
camerounais sont donc des « signifiés » du « signifiant » « gombo ». De même, il décrit le
signifié comme « image acoustique », c’est-à-dire l’empreinte que laisse un son (ou une
séquence de sons) dans notre esprit. Ainsi, la séquence sonore anglaise « father » évoque dans
l’esprit de celui qui l’entend (et qui parle anglais) le concept « père ».
D’autres chercheurs ont prolongé et complété la définition du signe linguistique de Ferdinand
de Saussure. C’est notamment le cas de Charles Kay Ogden et Ivor K. Richards qui ajoutent
au signifiant et au signifié de Ferdinand de Saussure un troisième constituant appelé « référent
». D’où le modèle triadique du signe.

4
F. de Saussure, Cours de linguistique générale, op. cit.

3
Léopold Ngodji, Tel. 699182573 Master 1 Sémiotique et Stratégies

Le mot chien est un signe parce que c’est une forme composée de lettres (le chien, etc.) et
parce qu’il est doté d’une signification (un animal domestiqué par l’homme).
En somme, un signe est une association de lettres pourvue d’une signification. Raison pour
laquelle ce modèle de signe est dit dyadique, puisqu'il comprend deux éléments
4.1. Le signe selon Charles Sanders Peirce
À côté de la définition du signe linguistique de Ferdinand de Saussure, Charles Sanders Peirce
a fait du signe le thème central de toute sa sémiotique. Il travaille d’ailleurs sous une approche
mécanique et logique qui lui permet de trouver le signer sous le prisme d’un calcul minutieux
et construit de manière logique et mathématique.
À ce sujet il écrit sous le prisme de la logique ceci :
Un signe, ou representamen, est quelque chose qui tient lieu pour quelqu’un de
quelque chose sous quelque rapport ou à quelque titre. Il s’adresse à quelqu’un,
c’est-à-dire crée dans l’esprit de cette personne un signe équivalent ou peut-être un
signe plus développé. Ce signe qu’il crée, je l’appelle l’interpretant du premier
signe. Ce signe tient lieu de quelque chose : de son objet. Il tient lieu de cet objet,
non sous tous rapports, mais par rapport à une sorte d’idée que j’ai quelquefois
appelée le fondement du representamen5.
En fait, la sémiotique de Peirce a ceci d’intéressant qu’il définit ce qu’il entend par signe tout
en mettant immédiatement le processus qui permettrait de trouver ce que représente ce signe.
Pour le faire, il procède par une trilogie relationnelle qui part du « signe chose ». Pour lui, un
signe est une chose qui n’est pas lui-même, mais quelque chose d’autre qui tient lieu d’autre
chose à quelqu’un, et ainsi de suite. Un signe, en d’autres termes, est le « representamen » qui
désigne une autre chose, l’objet » qui, à son tour est mis en exergue par un « interprétant ». Ce
processus construit que Peirce met sur pied pour comprendre le signe est au cœur du
processus de sa sémiotique.

Pour sortir du signe chez Peirce, il convient de dire que sa phanéroscopie est tellement vaste
et largement décrite dans ses écrits. Certains considèrent ses démonstrations phanéroscopique
comme étant plutôt indigeste. Ainsi dit, la classification la plus connue est celle en Icône,
Indice, Symbole.
« Le symbole entretient avec ce qu'il représente une relation arbitraire, conventionnelle.
Entrent dans cette catégorie les symboles au sens usuel du terme tels que les anneaux
olympiques, différents drapeaux ».

5
C. Sanders Peirce, Collected Papers, Cambridge, Harvard University Press, Vol. 2, paragraphe 228.

4
Léopold Ngodji, Tel. 699182573 Master 1 Sémiotique et Stratégies

« L'indice est un signe qui entretient un lien physique avec l'objet qu'il indique; c'est le cas
lorsqu'un doigt est pointé sur un objet, lorsqu'une girouette indique la direction du vent, ou
une fumée la présence du feu ».
L’icone « Correspond à la classe de signes dont le signifiant entre en relation d'analogie avec
ce qu'il représente, c'est à dire, avec son référent : un dessin figuratif, une image de synthèse
représentant un arbre ou une maison sont des icônes dans la mesure où ils "ressemblent" à un
arbre ou à une maison »

5. Les dimensions de la sémiotique


On distinguerait trois "dimensions" de la sémiotique :
a) la sémantique : la relation entre les signes et ce qu'ils signifient (relations internes
entre signifiant et signifié ou relation externe entre le signe global et le référent). Travaux du
logicien Alfred Tarski, de Roland Barthes.
b) la syntaxe : les relations entre signes.
c) la pragmatique : la relation entre les signes et leurs utilisateurs. Travaux de Charles
Peirce, William James, George Herbert Mead, John Dewey, Charles W. Morris.
6. Tableau comparatif
|Sémiologie Sémiotique
Filiation saussurienne Filiation peircienne
Europe - 1916 Etats-Unis - 1903
appartient à la linguistique (Ronald Barth appartient à la métaphysique (branche de la
soutient le contraire) philosophie qui a pour objet la recherche
signe dyadique (binaire) (exclusion du signe triadique - inclusion du référent
référent)
Obsession du chiffre 2 Obsession du chiffre 3
Etudes des convergences, divergences et Etudes de la semiosis (C'est un processus qui
périphéries se déroule dans l'esprit de l'interprète
Prend en charge l’étude des Prend en charge l’étude de
signes ayant un aspect tous les signes y compris le
particuliers, non linguistiques signe linguistique

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