Paradis Fiscaux
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Résumé
Avec l’ouverture croissante des frontières des différents pays et la recherche continue des
entreprises d’une meilleure rentabilité, tous les moyens sont autorisés pour réduire les coûts et
améliorer la compétitivité. C’est dans ce sens que les entreprises essaient de diminuer leurs
charges fiscales en mettant en place des montages financiers assez complexes en collaboration
avec les grands cabinets de conseils afin d’échapper à l’impôt sous ses différentes formes.
Notre communication sera l’occasion de mettre l’accent sur les différentes pratiques utilisées
au niveau mondial afin d’échapper à l’impôt soit d’une manière légale (Evasion fiscale) ou
illégale (Fraude fiscale).
Abstract
With the increasing opening of the borders of the various countries and the search continues
companies of a better profitability, all the ways are authorized to reduce the costs and improve
the competitiveness. It is in this sense that companies try to decrease their tax burdens by
setting up rather complex financial plans in association with the big consulting firms to evade
taxes under his various forms. Our communication will be the opportunity to put the accent on
the various practices used at the world level to evade taxes or in a legal way (Tax evasion) or
illegal (Tax fraud).
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Introduction
La recherche continue de l’augmentation de la marge bénéficiaire aussi bien par les grandes
multinationales que par les PME mène la plupart d’entre elle à la recherche d’un certain
nombre de solutions qui peuvent être légale ou illégales. Ainsi, elles y en a parmi ces
entreprises qui optent pour une panacée licite sous la forme de l’évasion fiscale en essayant
d’exploiter les lacunes existant dans les législations fiscales des différents pays
d’implantation. A l’opposé, on trouve d’autres entités qui utilisant des pratiques plutôt illicites
pour échapper ou réduire le montant des impôts. Ceci étant donné, cette situation donne
naissance à une concurrence déloyale car les entreprises qui paient moins d’impôts peuvent se
permettre de vendre des produits avec des prix plus bas et par ricochet mettre la pérennité
d’autres sociétés en danger.
Dans ce contexte, nous nous attèlerons au niveau de cet article de mettre l’accent sur les deux
concepts de l’évasion et la fraude fiscale tout en analysant les pratiques utilisées au niveau
international en la matière et notamment la création de sociétés dans des paradis fiscaux qui
utilisent soit la confidentialité où l’imposition modérée comme outil d’attrait des
multinationales et de l’argent émanant d’activités illicites (Drogue, Trafic d’armes,….).
1. La Fraude fiscale
Selon l’IFAC (Norme ISA 240 – IFAC (International Federation of Accountants), la fraude fiscale
peut être définie comme « un acte intentionnel commis par un ou plusieurs dirigeants, par des
personnes constituant le gouvernement d’entreprise, par des employés ou par des tiers,
impliquant des manœuvres dolosives ans le but d’obtenir un avantage indu ou illégal. » ainsi,
l’existence de la fraude nécessite le regroupement de trois éléments essentiels à savoir :
- La manœuvre dolosive qui exprime le volontariat dans la commission de l’acte
- La commission effective de l’acte
- Le bénéfice d’un avantage illégal qui peut être matériel ou immatériel
De ce fait, la fraude est l’initiative prise pour s’échapper partiellement ou totalement à l’impôt
en utilisant des moyens illégaux (Eric 2014 « Fraude fiscale et paradis fiscaux)
2. Évasion fiscale
L’évasion fiscale ne peut être assimilée à la fraude fiscale car elle vise à réduire l’impôt mais
sans l’existence d’une manœuvre dolosive. C’est cet élément clé qui permet aux grandes
multinationales de s’échapper au paiement de grandes sommes en essayant d’exploiter soir les
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vides juridiques existants au niveau des codes généraux d’impôts soit en combinat les
avantages fiscaux octroyés par chacun des pays à part.
La pratique de la fraude fiscale est un phénomène mondial qui touche tous les pays mais avec
des dimensions différentes. Toutefois, les outils utilisés restent en quelque sorte les mêmes et
ils changent en fonction du contexte, de la gravité et l’objet et du degré de sanction appliqué
au niveau du pays concerné.
Pour réduire l’impôt dû à l’Etat, les entreprises essaient avec tous les moyens disponibles
d’augmenter les charges pour réduire le résultat fiscal. Pour atteindre cet objectif, on peut
recenser plusieurs procédés en l’occurrence:
La surfacturation par des sociétés complices : il s’agit de collaboration entre deux ou
plusieurs entreprises où chacune facture les prestations avec une valeur bien
supérieure à sa valeur réelle ;
L’enregistrement de notes de frais injustifiés ou exorbitants : A ce niveau, les
entreprises soit remboursent des notes de frais personnels comme des notes de frais
professionnels où utilisent des notes de frais exorbitants avec des montants trop élevés
et non justifiés par la nature de la mission effectuée ;
Déclaration de salaires fictifs : il s’agit d’accorder des salaires à des personnes qui ne
réalisent de travail effectif au sein de l’entreprise soit parce qu’il a un lien familial
avec l’un des dirigeants où elles effectuent un travail illégal à l’extérieur de
l’entreprise (Inspecteur d’impôts,….). Le but est d’augmenter la masse salariale et de
réduire l’impôt à payer à l’Etat.
A l’opposé et toujours pour réduire le résultat fiscal, les entreprises tentent de diminuer
également les produits réalisés avec différentes manières.
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Il existe plusieurs procédés utilisés par les sociétés multinationales pour détourner les
différentes législations comme la création des SPV ( Special purpose vehicle) qui consiste à
transférer les bénéfices vers des entreprises crées et implantées dans des paradis fiscaux pour
bénéficier d’une imposition allégée.
On peut également citer la pratique du sandwich hollandais qui consiste à profiter des
législations privilégiées de l’Irlande et les Pays bas.
« Imaginons une société française A réalisant un bénéfice de 100 M € , soit un impôt sur les
sociétés (IS) de plus de 33 M € . Elle crée une holding B aux Pays- Bas et rapatrie les
bénéfices de A vers B grâce aux accords de double imposition entre les deux pays. Elle crée
une holding Chapeau de B, dans les Antilles néerlandaises. Elle va remonter à nouveau les
bénéfices vers les Antilles néerlandaises pour lesquelles un accord de défiscalisation a été
signé avec les Pays- Bas. Compte tenu du taux d’imposition antillais, l’entreprise payera au
final entre 2 et 7,5 M € d’impôt au lieu de 33 M € en France » (Eric 2014 « Fraude fiscale et
paradis fiscaux).
Ceci étant dit, l’entreprise qui arrive à économiser autant d’impôts pourra prétendre vendre
son produit avec des prix plus bas et être compétitif au niveau du marché international tout en
maximisant sa marge bénéficiaire.
Cette technique est utilisée par la société « Google » qui déteint deux filiales en Irlande
(Google Ireland Ltd et Google Ireland Holdings).
La société Google US vend les brevets à Google Ireland Holdings, qui les revend de sa part à
Google Ireland Ltd. Ceci est valable pour la filiale de Google créée aux Pays-Bas (Google
Netherlands Holdings BV). Il s’agit en effet d’une société miroir, qui reçoit les redevances
payées par Google Ireland Ltd à Google Ireland Holdings en profitant de l’exonération
d’impôts sur les droits intellectuels. Google Netherlands Holdings BV transfére par la suite
les gains à la société mère (Google Bermuda) aux Bermudes. Avec ce schéma, Google ne
déversera aucun paiement quel que soit le montant de son bénéfice. Au retour de l’argent aux
États- Unis, il ne sera taxé qu’à 4 %.
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Selon le réseau Tax Justice Network, en 2012, l’évasion fiscale mondiale a été estimée à un
montant qui variait entre 20.000 et 30.000 Md$ (Tax Justice Network, The price of offshore
revisited, juillet 2012). Presque la moitié de cette somme est détenu par approximativement
100.000 Personnes qui représentent à peu prés 0.0015% de la population mondiale. Si on
place le montant de 30.000 Md$ à seulement un taux moyen de 4%, le gain non déclaré sera à
l’ordre de 1200 Md$ annuellement soit l’équivalent de 360 Md$ (30% de l’impôt sur les
sociétés au Maroc).
Concernant la fraude fiscale, plusieurs études ont été menées à savoir :
L’enquête mondiale Ernst & Young 2014 sur la corruption et la fraude en entreprise,
auprès de 2 719 dirigeants dans 59 pays.
L’enquête mondiale Price water house Coopers 2014 repose sur des questionnaires
collectés auprès de plus de 5000 entreprises réparties à 95 pays dont 131 en France.
L’étude KPMG 2013, intitulé « profil du fraudeur»
Dans le même ordre d’idées, l’OCDE a procédé à une estimation de la fraude fiscale qui sera
présentée dans le tableau suivant :
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Pour mettre en place les pratiques les plus poussées en matière de fraude fiscale, les
entreprises préfèrent créer dans la majorité des cas des sociétés dans ce qu’on appelle les
paradis fiscaux.
Les paradis fiscaux se caractérisent essentiellement par une imposition des personnes
indigènes et une taxation faible voire modérée de personnes extérieures aux pays ce qui
entraine une inégalité au niveau du traitement fiscal.
A cet effet, l’OCDE a essayé de définir ces paradis fiscaux comme des territoires répondant à
trois critères :
Dans ce cadre, l’OCDE a déclaré le 2 Avril 2009 trois listes en procédant aux classements de
différents pays considérés comme des paradis fiscaux avec des degrés de gravité différents :
- La 1ère liste a été intitulée la liste noire. Elle a été composée de pays s’abstenant de
respecter les règles fiscales internationales à savoir (les Philippines, l’Uruguay, le territoire
malaisien de Labuan, le Costa Rica)
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- Une 2ème liste appelée la liste grise constituée de 38 pays ayant donné des promesses de
conformité graduellement aux normes internationales à savoir (Gibraltar, Grenade
Autriche, Andorre, Anguilla, Antigua et Barbuda, Aruba, Bahamas, Bahreïn, Belgique,
Belize, Bermudes, Brunei, îles Caïmans, Chili, îles Cook, République dominicaine, Sainte-
Lucie, Vanuatu, îles Vierges, Liechtenstein, îles Marshall, Luxembourg, Monaco,
Montserrat, Nauru, Antilles néerlandaises, Niue, Panama, Saint- Kitts et Nevis, , Saint-
Vincent et les Grenadines, Samoa, Guatemala, Liberia, Saint-Marin, Singapour, Suisse,
îles Turks et Caïques,) ;
- La 3ème liste appelée la liste blanche composée essentiellement de pays qui ont entamé le
processus de conformité aux règles internationales en l’occurrence l’Irlande, la Barbade les
Seychelles, l’île de Man, l’île de Jersey et la Chine.
Par ailleurs, voici la liste des paradis fiscaux existants actuellement à travers le monde
(http://ccfd-terresolidaire.org/infos/partage-des-richesses/paradisfiscaux/aux-paradis-des-
impôts)
Conclusion
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En guise de conclusion, il semble opportun de signaler que la fraude et l’évasion fiscale sont
des phénomènes d’ordre général qui ne touchent pas un secteur donné ou un pays donné mais
affectent tous les pays avec des degrés différents en fonction du contexte et de la législation
fiscale en vigueur.
Ce fléau qui ne cesse de se développer découle principalement des pratiques des grandes
multinationales qui l’exploitent en leur faveur afin de réduire leurs charges.
Ainsi, elles peuvent proposer des prix de plus en plus compétitif ce qui entraine une
destruction totale des PME constituant l’essentiel du tissu économique des pays en voie de
développement.
Pour endiguer l’avancée de ce problème dont le traitement sera étalé certainement sur le
moyen et long terme, une collaboration entre les différents pays est obligatoire surtout ceux
classés dans la liste noire des paradis fiscaux.
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Bibliographie
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PALAN R., MURPHYR. et CHAVAGNEUX C., « Les paradis fiscaux : entre évasion
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HAREL X., La Grande Évasion : Le vrai scandale des paradis fiscaux, LLL Les liens
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V ERNIER E., Techniques de blanchiment et moyens de lutte, Ed Dunod, 3ème édition, 2013.
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