Devoir S2 Xelka Leguil
Devoir S2 Xelka Leguil
Devoir S2 Xelka Leguil
Département de Psychanalyse
Le mythe d’Aristophane
La demande féminine de sa sur-moitié
2019 – 2020
Introduction
Au cours du premier semestre nous avons abordé la question de l’indicible de la féminité,
c’est-à-dire, nous avons approfondi sur la question : « qu’est- ce que c’est d’être une
femme ? » et plus encore, « qu’est-ce que nous pouvons dire de la féminité et comment ? » Le
psychanalyste Jaques Lacan avait bien remarqué que c’est qui se disait des femmes était
souvent fondée sur des préjugés ou des stéréotypes qui n’arrivaient jamais à vraiment dire
quelque chose sur la femme et la féminité. C’est bien cela que l’a amené à apercevoir qu’il y
avait un « non-dit », un « indicible » sur la féminité, autrement dit il n’y a pas de
« signifiant » pour parler de la féminité. Lacan a dédié beaucoup de ses séminaires à parler sur
cet indicible en insistant sur le fait qu’il faut essayer de dire quelque chose sur ce qu’on ne
peut pas dire, en suivant la logique de la psychanalyse où il faut parler sur ce qu’on ne peut
pas nommer. Il s’agît ici donc d’un thème très intéressant et dont l’importance est rapportée
jusqu’à l’actualité, car actuellement les mouvements féministes et la science essaient de dire
beaucoup sur ce « non-dit » comme si en enlevant cette indicible la femme pourrait être inclue
et ne plus être à côté.
Dans mon Devoir précédent, au cours du premier semestre, j’avais donc décidé d’aborder
cette thématique en parlant de l’énigme de la jouissance féminine en commençant par les
premières études que Freud a fait sur l’hystérie en l’amenant à donner la parole à la femme là
où elle ne l’avait pas et ensuite en analysant les commentaires de Lacan sur l’analyse de Dora
qui avait fait Freud, une des premières pistes à l’indicible. Cette fois j’aimerais aborder
l’indicible de la féminité à partir d’une perspective différente, à savoir, la perspective de « la
demande d’amour » ou « la demande de l’autre » de la part féminine. J’ai choisi cette
perspective car elle est en lien direct avec mon thème de mémoire où j’aborde « Qu’est-ce que
c’est l’amour » à partir d’une perspective Lacanienne.
Pour parvenir à parler de la demande d’amour féminine je vais me focaliser sur « le Mythe
d’Aristophane » qui apparaît dans un dialogue de Platon qui s’intitule Le banquet. Ce
dialogue est une série des discours sur l’amour où les personnages discutent ce qui est
l’amour et ce qu’il n’est pas. Ce dialogue est d’une grande importance car Freud et Lacan ont
souvent y fait référence pour illustrer ces propos par rapport au concept d’amour. Le mythe
d’Aristophane nous permettra donc de comprendre qu’est ce qui Lacan veut dire par « le
surmoi féminin » et « la demande féminin » qui seront deux concepts très importants dans ce
devoir.
Le surmoi Féminin
Comme vu auparavant, il y a un « non-dit » quand il s’agît de parler de la féminité. Personne
ne sait vraiment répondre à la question « Qu’est-ce que c’est d’être femme ? » ou « comment
devient-on des femmes ? ». Ce qui est clair c’est que la transformation anatomique de la
femme au moment de l’adolescence ne dit rien de ce qu’est une femme, au contraire, ce
moment de transformation anatomique renforce le questionnement chez la jeune fille sur
« Qu’est-ce qu’être une femme ». Pour aborder la difficulté de donner une réponse à cette
question, Lacan nous dit qu’il y a une forme de surmoi qui s’articule à la position féminine,
c’est-à-dire qu’il propose l’existence d’un « surmoi féminin ». Pour comprendre ce que Lacan
veut dire par là il faut d’abord se rappeler de ce qu’on en entend par « surmoi ». Chez Freud,
« le surmoi est le résultat de l’introjection des interdits à la fin de l’Œdipe, il est une instance
régulatrice du ça qui lui-même est le réservoir des pulsions. Ce surmoi est connecté à la
jouissance phallique. » (Langelez. 2012). Dans le cas de la femme, Lacan nous dit que le
surmoi féminin renvoie à la demande féminine. Il dit que ce surmoi n’est pas moindre chez la
femme mais qu’il est d’autre ordre car il ne porte pas sur la même exigence. Lacan joue avec
les mots « surmoi » et « sur-moitié » et il propose que le surmoi féminin serait activé par
rapport à l’exigence de faire un avec sa moitié. Cela veut dire que ce surmoi pousserait le
sujet féminin à fusionner dans l’amour avec l’autre.
Ce qui est très important à comprendre par rapport à ce « surmoi féminin » et à l’indicible
est : « (…) cela revient à corréler le surmoi féminin au langage lui-même, à son incomplétude.
Le surmoi féminin est constitué d’un trou, il a affaire à la forclusion du signifiant La
Femme. » (Langelez.2012). C’est-à-dire que ce surmoi tire sa force de son propre « vide » et
du fait d’être « incomplet ». Quand nous parlons de ce « trou », nous parlons justement de cet
« indicible », cette espace vide dans le langage du symbolique auquel se voit confronté la
féminité. Quand nous suivons ce sens, nous comprenons alors mieux ce que Lacan voulait
dire par rapport à l’exigence du surmoi féminin pour fusionner avec l’autre car il tire sa force
d’un manque plus fondamentale. Nous allons voir ça mieux illustré dans le Mythe
d’Aristophane que nous allons aborder à continuation.
Le Mythe d’Aristophane
Dans le dialogue du Platon qui s’intitule « Le banquet », les personnages discutent autour
d’un banquet en faisant l’éloge de l’amour. Un des discours le plus connu sur ce dialogue est
celui d’Aristophane. Ce discours explique qu’à l’origine, il y a très longtemps, les hommes
étaient des êtres « complets », c’est-à-dire qu’ils étaient composés d’un homme et une femme.
Ils avaient quatre bras et quatre jambes ainsi que deux têtes et les deux sexes. Ces hommes
avaient beaucoup de force et ils étaient d’un grand courage. Ils étaient presque parfaits et c’est
pourquoi ils ont décidé d’attaquer les dieux en essayant d’escaler au ciel. Les dieux n’ont pas
pu supporter une chose pareille. Zeus, pour punir les hommes de leur arrogance devait trouver
une solution, mais cela n’était pas évident car s’ils détruisaient la race humaine, cela mettrait
fin aux hommages et au culte que les hommes leur rendaient. Alors Zeus a décidé, non sans
difficulté, que la solution était de couper les hommes en deux. Cela voulait dire qu’il coupa
les hommes de telle forme que maintenant en étant divisés ils avaient seulement une tête,
deux bras, deux jambes et un seul sexe masculin ou féminin. Zeus a tourné la tête des
hommes du côté où ils avaient été coupés pour qu’ils puissent voir cet énorme vide, il a fermé
le grand trou et il a affiné leur figure mais en laissant un petit trou au milieu de leur ventre
pour leur rappeler du jour où ils avaient été complets. Ce petit trou qu’on appelle le nombril.
À partir de ce jour-là, les hommes se sentaient incomplets et regrettaient leur moitié. Par
conséquence, quand ils trouvaient une autre moitié ils s’enlaçaient les uns avec les autres avec
le désir de se fondre ensemble. Mais en faisant cela, l’un d’eux mourait de faim, alors celui
qui vivait encore partait encore à essayer de fondre avec une autre moitié. Mais Zeus a
remarqué qu’il avait laissé les organes sexuels derrière leur corps, alors il décida de les mettre
devant. De cette façon, même s’ils ne pouvaient pas se fondre l’un avec l’autre, au moins ils
pouvaient engendrer un nouvel être humain. C’est alors à ce moment-là qui s’est créé l’amour
inné des êtres humains les uns pour les autres.
L’amour est alors une façon de recomposer l’ancienne nature, effondre deux êtres en un seul.
L’homme garde alors un désir de complétude et un désir amoureux de rencontrer sa moitié.