Qualité de L'audit: Enjeux de L'audit Interne Et Externe Pour La Gouvernance Des Organisations, Sous La Direction de Benoît
Qualité de L'audit: Enjeux de L'audit Interne Et Externe Pour La Gouvernance Des Organisations, Sous La Direction de Benoît
Qualité de L'audit: Enjeux de L'audit Interne Et Externe Pour La Gouvernance Des Organisations, Sous La Direction de Benoît
2021 12:57
Télescope
Revue d’analyse comparée en administration publique
URI : https://id.erudit.org/iderudit/1013782ar
DOI : https://doi.org/10.7202/1013782ar
Éditeur(s)
L’Observatoire de l’administration publique
ISSN
1203-3294 (imprimé)
1929-3348 (numérique)
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1
Sur les 17 chapitres composant le volume, seulement 3 traitent d’audit interne.
2
Le chapitre 2 insiste sur la normalisation du contrôle interne comme base du processus d’audit et le
chapitre 5 présente la démarche de contrôle de la qualité adoptée par le Haut Conseil du Commissa-
riat aux Comptes (H3C).
181
Un besoin de réintroduire une certaine souplesse dans le processus d’audit se
fait toutefois sentir. Bien que l’audit soit un processus bien défini, il doit pouvoir
prendre en compte les singularités de l’organisation auditée. L’approche par les
risques d’affaires discutée au chapitre 3 en est un exemple, puisqu’elle permet de
réintroduire un certain jugement professionnel dans le processus en exigeant de
l’auditeur qu’il comprenne bien la stratégie de gestion de l’entreprise ainsi que les
risques auxquels elle fait face. Quoique cette méthodologie entraîne certaines in-
quiétudes en matière d’indépendance de l’auditeur, elle a le mérite de permettre
une adaptabilité aux conditions réelles vécues par l’entreprise. Au chapitre 4,
Chemangui et ses collègues proposent un modèle d’évaluation de la qualité de
l’audit axé sur l’adaptabilité du processus aux caractéristiques de l’organisation.
Ils suggèrent de s’appuyer sur la théorie d’agence afin de déterminer les relations
qui présentent les plus hauts risques pour l’entreprise.
Le besoin de souplesse dans l’établissement du processus d’audit et dans l’éva-
luation de sa qualité peut provenir de différentes sources, notamment de la com-
plexité des phénomènes à auditer 3, du contexte culturel particulier dans lequel
s’inscrit l’audit 4 ou des intérêts envisagés 5. Ce besoin de s’écarter d’un formalisme
excessif ramène à l’avant-scène la notion de jugement professionnel. Miledi et Pigé
s’appuient, dans le chapitre 14, sur l’approche cognitive pour attirer l’attention sur
les dangers des outils standardisés d’aide à la décision dans le processus d’audit.
Ils estiment que leur utilisation systématique par les cabinets, si elle augmente la
standardisation, facilite le contrôle de la qualité et réduit les coûts, pourrait égale-
ment sérieusement compromettre le développement du jugement professionnel.
Finalement, Noël et Chemangui (chapitre 15) s’intéressent au rôle du genre
dans la perception des questions éthiques 6. Utilisant le modèle des cartes concep-
tuelles, l’étude ne démontre pas que les hommes ont une sensibilité plus ou moins
grande que les femmes à l’égard des questions éthiques. Elle tend toutefois à mon-
trer qu’ils définissent l’éthique et son importance de manière différente. Alors que
les femmes semblent attacher une grande importance au développement et au
maintien d’un climat de travail pacifique et collaboratif, les hommes insistent da-
vantage sur le respect des règles et des procédures.
L’audit interne
Trois chapitres portent plus spécifiquement sur l’audit interne. Dans le cha-
pitre 9, Thiéry-Dubuisson s’intéresse aux caractéristiques de la qualité de l’audit
interne au sein des grands groupes. Selon elle, l’audit interne contribue à la qualité
de l’audit externe par sa nature – il évalue le contrôle interne et lutte contre la
3
Par exemple, l’audit des actifs immatériels, traité au chapitre 6, ou les International Financial
Reporting Standards discutés au chapitre 13.
4
Les chapitres 11 et 12 traitent du cas particulier des pays africains.
5
Dans une perspective nettement plus juridique, Tchotourian plaide pour une responsabilité accrue
des auditeurs externes en matière de responsabilité sociale des entreprises (chapitre 7).
6
À noter que le chapitre 16 s’intéresse également à la place de l’éthique dans la formation du juge-
ment professionnel de l’auditeur externe, mais sans égard au genre.
fraude – ainsi que par son positionnement – et notamment son accès aux plus
hautes sphères de la gouvernance corporative. L’audit interne est maintenant vu
comme un collaborateur actif de l’audit externe ; ensemble, ils augmentent la
couverture globale de l’audit, ce qui ne peut que contribuer à l’amélioration de
la qualité de l’audit. L’auteure insiste toutefois sur la formalisation importante des
travaux de l’auditeur interne. Cette formalisation est demandée par les parties im-
pliquées dans le processus de gouvernance, et notamment par le comité d’audit,
afin d’accentuer l’image d’une entreprise « sous contrôle ». Les administrateurs
sont rassurés par le fait que les auditeurs internes suivent une procédure établie,
sanctionnée par les instances de la profession. Les auditeurs internes eux-mêmes
sont complices de cette formalisation, puisqu’elle les aide à asseoir leur nouvelle
légitimité. Malgré cette formalisation du processus d’audit interne, qui pourrait
nuire à l’usage du jugement professionnel pourtant essentiel au travail des audi-
teurs internes, l’auteure conclut que l’audit interne participe incontestablement à
la qualité de l’audit des grands groupes.
Bon-Michel, quant à elle, attire l’attention sur le fait que même si la démar-
che d’audit interne tend vers une certaine uniformité, elle demeure nécessaire-
ment subordonnée à l’organisation auditée et à son secteur d’activité. Elle fournit
l’exemple de l’audit bancaire en exposant sommairement les principaux risques
auxquels sont exposées les banques (risques de crédit, risques de marchés et ris-
ques opérationnels) ainsi que l’encadrement législatif auquel elles doivent se sou-
mettre. Le Comité de réglementation bancaire et financière réglemente le contrôle
interne au sein des banques et sert donc de base de travail aux auditeurs internes.
Il prévoit trois niveaux de gestion de contrôle : la gestion des opérations (auto-
contrôle), le contrôle permanent (généralement assuré par des fonctions précises
telles que la Direction de la gestion des risques ou la Direction de la conformité) et
finalement le contrôle périodique (où se situe l’audit interne). L’auditeur interne,
qui se trouve donc au troisième niveau de contrôle, devra s’assurer non seulement
de la conformité réglementaire, mais également de l’efficacité des dispositifs de
contrôle.
Finalement, dans le chapitre 17, Bon-Michel présente une très intéressante
réflexion sur le rôle de l’audit interne dans le processus d’apprentissage organi-
sationnel. Prenant appui sur l’approche comportementale, elle souligne que
l’audit interne joue un rôle important de stimulus dans le processus de gestion et
de contrôle des risques. En effet, il permet de mettre en lumière certains risques,
notamment lors de la préparation du plan annuel d’audit ou lors de la présenta-
tion des constats. L’audit interne aide également à cerner les meilleurs moyens à
mettre en place pour contrôler ces risques. Toutefois, l’apprentissage est miné par
le déploiement de routines défensives comme les jeux de pouvoir, la protection
de l’image ou le désengagement face à la perception de conflits d’objectifs. Pour
faciliter l’apprentissage, il importe que l’auditeur interne prenne en compte ces
mécanismes de défense dans son approche. L’auteure insiste aussi sur l’impor-
tance du dialogue et l’implication du management afin d’améliorer la coopération
et l’intégration des apprentissages.
Recensions 183
En résumé, cet ouvrage couvre un vaste éventail de préoccupations entourant
la notion de qualité de l’audit. Si son côté éclectique séduit, il engendre également
une certaine déception puisque les sujets sont souvent effleurés et le lecteur reste
un peu sur son appétit. Relativement à l’audit interne, les textes présentés sont
intéressants, quoique peu nombreux.
1
INTOSAI (2004), ISSAI 3000: Implementation Guidelines for Performance Auditing.