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Le Son Au Cinéma

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Cours Son/ Image Proposée par Mme Réfka Beltifa Azzouz

Le son au cinéma
« Un son évoque toujours une image,

une image n’évoque jamais un son »

Robert Bresson.

Introduction

Historique du son au cinéma : le cinéma n’a jamais été muet


Aux premiers temps du cinéma (la première projection publique d’un film
des frères Lumière date de 1895) les films sont muets. La musique que l’on
entend est jouée « en direct » par un pianiste ou un orchestre « de salon ».
Les morceaux sont déjà existants, puisés dans le répertoire classique ou
populaire et arrangés pour l’occasion.
Cette musique a surtout deux fonctions : rassurer les spectateurs plongés
dans le noir, et surtout couvrir le bruit de l’appareil de projection, placé alors
dans la salle.
Très vite, on s’est rendu compte que la musique pouvait accompagner
l’image et soutenir l’action (poursuites, chutes, rôle du « méchant »,
ambiances…) et des compositeurs vont commencer à écrire des morceaux
originaux pour les films.
En 1927 « Le chanteur de jazz » est le premier film parlant et les films
sonores vont se généraliser à partir des années 30. La musique de film va donc
trouver sa place et devenir un genre à part entière.
En effet, on ne peut pas réfléchir sur le cinéma sans se poser la question du
son. Depuis les débuts du cinéma la reproduction du son dans les salles obscures
s'est toujours attachée à rester le plus fidèle au mixage afin de reproduire le plus
fidèlement possible les intentions du metteur en scène et des ingénieurs du son.

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Cours Son/ Image Proposée par Mme Réfka Beltifa Azzouz

Ce défi a été relevé avec difficulté au début du cinéma sonore. Mais,


aujourd'hui, cela est beaucoup plus aisé grâce aux procédés numériques.

Les débuts
Bref historique : du muet au parlant et sonore
On peut se poser la question: Pourquoi y’a t’il du son au cinéma?
On peut alors apporter deux réponses à cela :
La première coule de source; c’est pour combler le vide crée par ce qui bouge
sans faire de bruit. La seconde tient un peu plus de la "légende"; ça serait pour
couvrir le bruit dérangeant du projecteur que l’on aurai pensé à introduire des
musiciens dans les salles de cinéma.

Un riche univers sonore existait déjà dans les salles au temps du muet; pianos,
orchestres phonographes et orgues produisaient déjà du son. Il y avait des
troupes d'acteurs qui doublaient derrière l'écran les acteurs du film, mais aussi
des bruiteurs: pour la pluie ils utilisaient par exemple un cylindre avec pois secs,
pour la grêle, une grenaille de plomb sur une plaque de zinc, pour les chevaux,
une noix de coco coupé en deux et appliqués en cadence sur un corps dur.

En fait le cinéma sonore est à peu près contemporain au cinéma tout court. En
1894 la compagnie Edison charge W.K.L. Dikson de faire des expériences en ce
sens et en 1895 le kinétophone d'Edison est au point (le spectateur doit placer un
tube de caoutchouc contre son oreille).

Le kinétophone

Au début du 20e siècle, le cinémacrophonographe, le phonorama, le cinéphone


et autre trouvailles voient le jour. Les problèmes techniques ne permettaient de

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voir que des petits films car au delà de 3 minutes, phonographe et projecteur se
désynchronisaient.
C'est un problème qui devient obsédant dans les années 1920 et on a donc fait
des projecteurs à vitesse variable pour rattraper ou attendre la musique.
Il y avait des problèmes d'amplification en particulier pour les grandes salles, et
il fallut attendre l'invention de l'ampli à tube pour y remédier.
Dès 1924, des actualités sonores parlantes sont diffusées à New York et un an
plus tard, 80 salles peuvent en bénéficier.
La fin des années 1920 et le début 1930 sont marqués par les premiers 100%
parlant ; Les lumières de New York (lancé par la Warner) en 1928 et les trois
masques (ces 2 films ressemblent d'ailleurs plus a des pièces filmées).

2. Le son optique.
Le premier moyen de mettre du son sur une pellicule fut l’utilisation du son
photographique (ou son optique). De nos jours, le son optique reste la norme en
matière de son analogique et de son numérique. Le son est donc inscrit sur une
zone opaque située à côté de l’image. La piste sonore optique est la
représentation photographique des variations électriques du son en fonction du
temps. Aujourd’hui, cette « image sonore » est une piste à double élongation et à
densité constante.

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1931 le début du son multi-canal.

Le brevet du son deux pistes que l’on appellera plus tard stéréophonie a été
déposé par Alan Blumlein en 1931. Il présente, en 1935 de petits films où l’on
voit un train qui passe ou un homme qui traverse en entendant le son passer lui
aussi latéralement.

La Warner qui depuis la sortie de the jazz singer est l’affût des nouveautés sort
en 1940 La piste de Santa Fe en deux pistes (procédé Vitasound), la seconde
piste ajoutant une sorte “d’épaisseur sonore” pour donner une autre dimension
au film par le biais d’amplificateurs et de haut-parleurs supplémentaires.

Walt Disney réalise cinq ans plus tard Fantasia avec le système Fantasound.
Ce système a été conçu pour les besoins du film car Walt Disney n’était pas
satisfait de la qualité des systèmes d'enregistrement et de la restitution sonore
des films de l’époque. Le procédé était le suivant:
Plusieurs microphones étaient utilisés pour enregistrer différentes parties d'un
environnement sonore sur plusieurs pistes. Ensuite, le son était enregistré sur
huit pistes optiques de largeur variables dont six de sections individuelles, une
septième qui était un mélange des six précédentes et la huitième pour l'orchestre
complet.
Le son magnétique et le son multi-canal.
Après le développement du film, de fines bandes d’oxyde métallique sont
couchées sur la copie. Le son était ensuite enregistré en temps réel sur la
pellicule. Le son magnétique offrait une qualité supérieure au son optique et
c’est en partie grâce à lui que le son est devenu multi-canal.
1967 : Arrivée du dolby.

1977 : Dolby stéréo.

1990 : Arrivée du numérique.

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La BanDe son

1. Introduction
1.1. Quelles sont les différentes composantes d’une bande son ?
1.1.1. Voix
La voix représente l’ensemble des sons qui donnent un sens articulé et
précis au discours sonore. Elle fait partie d’un système totalement codé que l’on
appelle langage. Au cinéma, elle englobe l’ensemble des paroles qui donnent un
sens précis à la scène (dialogue, monologues, commentaires).
1.1.2. Musique
La musique peut être comprise selon différentes règles qui régissent les
rapports entre les sons. L’harmonie ordonne les sons de manière simultanée. La
mélodie les organise de manière successive. Et le rythme, sans qui la mélodie ne
peut exister, fait se succéder des temps forts et des temps faibles. Au cinéma, la
musique, qu’elle soit une création originale ou une partition existante, agit en
complément de l’image.
1.1.3. Bruitage/bruits
Le bruitage est un ensemble de « sons créés artificiellement en
postproduction par un bruiteur. Ils sont obtenus à l’aide d’un matériel
hétéroclite : pas des personnages, bruits d’étoffes, chocs de verres, débouchage
2
d’une bouteille ». (MAGNY, J., 2004) Les bruits, par contre, sont un ensemble
de sons enregistrés en prise directe. Le bruiteur est plus un artiste qu’un simple
technicien.
Les limites entre le bruitage et la musique ne sont pas toujours claires au
cinéma. Par exemple, la fameuse séquence de la douche dans « Psychose », où
la musique se transforme au moment ultime du meurtre en un bruit strident.
Pour introduire la plupart de ses scènes de comédie musicale, « Dancer in
the dark » utilise le bruit, qui tend à se confondre à un certain moment avec la
musique.
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1.1.4. Silence
Le silence est défini par le Petit Robert comme « l’état d’un lieu où aucun
son n’est perceptible ». Mais cette notion est relative puisque la perception des
sons et, a fortiori, du silence, varie d’un individu, voire d’une espèce à l’autre,
en fonction de ses capacités auditives. Le silence se définit donc toujours de
manière relative, en fonction de celui qui le recherche.
1.2. Quelles sont les fonctions générales de la bande son et de chaque
composante ?
La bande son remplit quatre fonctions de base. Premièrement, elle engage
une qualité perceptive spécifique : un travail d’écoute couplé à un travail de
regard. « Le travail d’écoute rendait possible ce que Serguei Eisenstein a appelé
une “synchronisation des sens” : la concordance de l’image et du son sous un
seul rythme ou une seule qualité expressive ». (BORDWELL, D. et
THOMPSON, K., 2002)
Deuxièmement, elle influence notre perception et notre interprétation des
images. Nous pouvons faire l’expérience de mettre sur la même série d’images
une bande son différente : notre interprétation va varier en fonction de chaque
commentaire.
Troisièmement, elle peut diriger notre attention de façon relativement
précise à l’intérieur de l’image. Elle nous indique ainsi ce qu’il faut regarder. Si
le héros du film décrit en voix off certains magasins dans un plan, par exemple,
notre attention se portera sur ces magasins plutôt que sur d’autres.
Quatrièmement, elle fournit des indications conduisant le spectateur à
certaines attentes. Quand nous entendons un grincement de porte, nous en
déduisons forcément que nous allons voir une personne entrer dans la pièce. Or,
ce n’est pas toujours le cas. Dans un film d’horreur, par exemple, nous n’allons
pas voir un personnage entrer dans le champ, nous allons plutôt rester sur le
personnage effrayé par ce bruit.

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Chaque composante de la bande son a une fonction générale.


►La parole/le dialogue représente le principal vecteur de l’information. Elle
donne en général le sens premier du film.
►Les bruits, beaucoup moins déterminants, donnent une impression globale
de réalisme au film. Ils sont nécessaires au film pour donner une ambiance, un
environnement, une atmosphère aux images. S’ils venaient à manquer, ils
laisseraient place à un silence dérangeant.
►La musique est, en général, subordonnée au dialogue. Elle intervient dans
les moments où les personnages ne parlent pas ou dans ceux qui sont dénués
d’autres effets sonores. Elle peut cependant accompagner aussi des scènes
dansées, des séquences de transition ou des moments émotionnels forts.

1.3. Spécificité du son au cinéma : typologie applicable aux différents


éléments de la bande son
La spécificité du son au cinéma tient à la localisation de la source du son.
D’où le son provient-il ? A quel endroit apparait-il (dans le cadre ou hors du
cadre) ? Appartient-il au temps et à l’espace de la narration ? Comme le dit
Michel Chion (CHION, M. 1994), le son se définit par le lieu d’où il provient, il
est « ce qui cherche son lieu ». Le cinéma définit le son IN, le son HORS-
CHAMP et le son OFF. Cette typologie sert de base au langage
cinématographique, elle correspond à une grille d’analyse du son au cinéma.
Chaque élément de la bande son (voix, musique, bruit, silence) peut donc être
analysé sous ces angles.
1.3.1. Son IN
Le son IN correspond à la localisation de la source du son dans le champ.
Par exemple, si un téléphone sonne et que l’on peut repérer physiquement le
téléphone dans le cadre, on parlera de son IN.
1.3.2. Son HORS-CHAMP
Le son HORS-CHAMP ne localise pas la source du son dans le champ.
Cependant, le son n’est pas pour autant absent. Il appartient imaginairement à un

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temps et à un espace contigus à ceux de l’action montrée dans l’image. Par


exemple, si un téléphone sonne et qu’il n’est pas présent à l’image mais que
quelqu’un y répond dans la pièce à côté, c’est un son HORS-CHAMP. Un son
HORS-CHAMP est donc un son qui n’est pas localisable dans le cadre de
l’image, mais qui appartient au présent de l’action montrée selon des lois
narratives. Le téléphone, même si on ne le voit pas physiquement sonner dans le
« champ », participe à la narration. Le spectateur, en suivant la suite de
l’histoire, imagine qu’une personne téléphone dans la pièce à côté.
1.3.3. Son OFF
Le son OFF ne localise pas non plus la source du son dans le champ. Mais à
la différence du son HORS-CHAMP, le son OFF émane d’un endroit tout autre,
différent du temps et de l’espace de la narration : « le lieux des lieux », selon
5
Michel CHION (CHION, M. 1994) , le lieux de l’intervention omnisciente du
réalisateur. Le son OFF correspond donc, par exemple, à la musique de film ou à
la voix du narrateur.

Les matières de l’expression sonore


On désigne par le terme de «matière de l’expression» les types de matériaux
expressifs propres à un langage. Habituellement, les matières sonores de
l’expression audiovisuelle sont tenues pour être au nombre de trois: bruits,
langage articulé et musique. Cependant, il nous paraît nécessaire de distinguer
les bruits qui évoquent une source ou une situation connue de ceux qui ne
représentent pas le monde sensible, réel ou imaginaire, et ne renvoient qu’à eux
même, c’est-à-dire les sons abstraits. C’est pourquoi nous proposons d’ajouter
une catégorie pour rendre compte de tous les sons qui ne renvoient pas à l’image
de leur source (son «iconique», c’est-à-dire qui ressemble à ce qu’il désigne)
sans pour autant être considérés comme une forme d’expression musicale. Ce
sont les bruits qui constituent la trame sonore de tout espace et qui
accompagnent les actions. Ces bruits peuvent être enregistrés en même temps

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que les images (son direct) ou non (postsonorisation) et reconstitués en studio


(bruitage).

●Bruit figuratif
(«Iconique») Ce sont tous les «objets sonores» de nature abstraite qui ne
peuvent pas être attribués à une source connue et qui échappent aux catégories
de la musique.
●Bruit non figuratif
(Non «iconique») parole Le langage articulé. Musique Toutes les formes de
combinaisons sonores qui s’organisent dans la durée.

●EXEMPLES●
Ambiance d’aéroport, de gare, de la forêt, bruit du vent, de la pluie, bruits de
moteur, d’une porte qui claque, bruits de voix (brouhaha, cri). Eléments sonores
destinés à susciter l’angoisse et le suspens dans les films d’action, objets sonores
servant de gimmick1 dans les messages publicitaires et l’environnement sonore
des programmes de radio. Dialogues, commentaire, voix narrative. Scène
représentant des musiciens en train de jouer, musique d’accompagnement.

La localisation des sources sonores et de leur point d’écoute


Lors de l’analyse d’un film, il est important de se demander comment le
spectateur accède à un certain savoir sur le monde représenté à l’écran.
L’observation de la localisation de la source sonore par rapport à l’espace figuré
ainsi que de la situation du point d’écoute permettent de collecter de précieux
renseignements.

1
Gimmick: procédé, truc, destiné à provoquer un effet marquant.

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1. Situation de la source sonore par rapport à l’espace figuré (espace


diégétique)
On peut distinguer trois cas selon que la source sonore est respectivement dans
le champ, hors-champ ou encore dans un espace qui l’enveloppe ou le
surplombe, tel un commentaire ou un accompagnement musical de l’action.
Il est à noter que les sons «over», qu’il s’agisse de paroles, de musique ou de
bruits, dès lors qu’ils n’appartiennent pas à la diégèse, apparaissent comme des
sons «commentatifs».
2. Situation du point d’écoute
Par analogie avec la notion de point de vue, on peut parler de «point d’écoute».
L’analyste se posera les questions suivantes:
– D’où entend-on ?
Quelle est la localisation dans l’espace de l’appareil de prise de son ?
– Qui écoute ?
A qui la perception sonore est-elle attribuée ? Directement au spectateur ou à un
personnage du monde représenté ? Qu’entend-t-on et, aussi important, que
n’entend-t-on pas ?
– Le point d’écoute est-il cohérent avec le point de vue ?
En somme, ces questions permettent de déterminer comment le spectateur
accède à un certain savoir sur l’univers suggéré par le film, en distinguant les
informations qui lui parviennent par le canal visuel, respectivement le canal
sonore et amènent à se poser la question des fonctions que les composantes
sonores du message sont susceptibles d’accomplir. Cette démarche prenant en
compte les composantes sonores du message permet de mieux révéler le point
de vue, forcément orienté, de toute production filmique.

◘ La source du son (bruits, parole, musique) est dans l’image (champ).


Son «in»
La source du son n’est pas visible dans l’image mais peut être de manière
imaginaire située dans l’espace situé hors du cadre (hors-champ).

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Son «off»
La source du son provient d’un espace qui n’appartient pas à celui qui est
représenté à l’écran et qui l’enveloppe ou le surplombe (commentaire, musique
d’accompagnement, voix narrative).
Son «over»
Extra-diégétique diégétique1

Dans son rapport avec l’image, quelles sont les fonctions principales que la
bande-sonore est susceptible d’accomplir ?

Les relations entre éléments visuels et sonores sur l’axe temporel


L’observation des combinaisons entre éléments sonores et visuels relativement
au déroulement du film permet de mieux comprendre comment la composition
audiovisuelle produit ses effets. On peut distinguer trois cas selon que les
éléments visuels et sonores apparaissent simultanément (synchronisme), en
décalage (asynchronisme) ou qu’un élément de la bande image ou de la bande-
son se prolonge pendant qu’apparaissent plusieurs éléments sur l’autre canal
(chevauchement).

Synchronisme/ asynchronisme/ chevauchement


Notons que les rapports de synchronisme, d’asynchronisme et de
chevauchement entre éléments peuvent être observés aussi sur le même canal et
renvoient à l’ensemble des procédés de montage propres à la bande-image
(incrustation d’image, surimpression, fondu enchaîné) et au mixage de la bande-
son (superposition pondérée de sons de différente nature provenant de sources
variées).

1
Le terme «diégèse» désigne le monde que le spectateur construit à partir des données filmiques, c’est-à-dire
l’univers suggéré par le film.

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Le son permet de ponctuer le texte filmique et, se faisant, participe à


l’intelligibilité de l’ensemble. C’est sa fonction de ponctuation, laquelle se
décline en fonction de liaison et fonction de segmentation. Le chevauchement de
la bande sonore sur plusieurs plans de la bande-image est un des moyens utilisés
(avec les raccords purement visuels: dans l’axe, dans le mouvement, etc.) pour
atténuer les effets de rupture dûs à la discontinuité foncière de la bande-image
qui résulte de la mise bout à bout de vues différentes. C’est ce que l’on peut
nommer sa fonction de liaison.
Le son permet d’indiquer les subdivisions du texte filmique par des effets
sonores localisés (marquage) et, surtout, par l’utilisation de plages sonores
continues (chevauchement) qui ont notamment pour rôle de lier plusieurs plans
et donc de les différencier par rapport à ceux qui précèdent ou qui suivent (effet
de liaison dû à la continuité d’un élément sonore et effet de séparation par la
transition plus ou moins brutale entre types de sons): fonction de segmentation.
D’autre part, le son permet d’accentuer un point du texte filmique pour
mobiliser l’attention du spectateur sur un fait, un événement, une chose en
l’utilisant comme signal sonore. On pourrait nommer cet effet fonction d’appel.
Il est à noter qu’une modification de la qualité du son, de même qu’une grande
variation dans le volume de celui-ci voire le silence peuvent être utilisés pour
produire une liaison aussi bien qu’une segmentation ou encore servir à attirer
l’attention du spectateur sur l’image.
L’asynchronisme ou le chevauchement entre éléments de la bande image et de la
bande-son permet la réalisation de la fonction d’annonce. Un procédé très
fréquent consiste, à la fin d’une scène, à faire entendre la bande-sonore
(ambiance, dialogue) de la scène que l’image dévoilera peu après. Lorsque un
même motif musical, une ambiance sonore, un gimmick est répété, on parle de
fonction de rappel qui se définit par l’asynchronisme entre éléments de la
bande-image et de la bande-son.
Les correspondances entre les composantes plastiques de l’image et les
caractéristiques des éléments sonores, c’est-à-dire la constatation d’une

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correspondance entre les rythmes, ou de leur divergence, voire l’attente frustrée


d’une concordance attendue, déterminent la fonction esthétique de la
composition audiovisuelle. Ce qui est alors mis en évidence, c’est la relation
entre ces composantes formelles hétérogènes valant pour elle-même. La
fonction esthétique repose sur les liens originaux qui résultent des relations
formelles tissées entre des matières de l’expression différentes et met en
évidence le côté palpable des signes, c’est-à-dire leur forme. C’est ainsi qu’une
concordance entre le rythme des éléments visuels et sonores pourra susciter un
sentiment d’harmonie.
Les relations sémantiques1 entre éléments visuels et sonores
L’assemblage d’éléments visuels et sonores peut s’apprécier par rapport à leur
ressemblance (similitude) ou au contraire leur différence (contraste) sémantique.
Les relations entre le contenu thématique des éléments sonores et visuels peut
être équivalent, similaire ou encore dissemblable. Nous mettrons ici l’accent sur
les fonctions principales que la bande sonore est susceptible d’accomplir dans sa
visée vers le référent, c’est-à-dire la réalité décrite. Lorsque ce qui est donné à
voir et à entendre est équivalent, le fait d’apporter une information sous une
autre forme est à l’origine de la fonction de renforcement. Cette fonction a pour
effet d’augmenter la crédibilité de ce qui est donné à voir et à entendre. Par
exemple: le claquement d’un coup de feu accompagnant l’image d’un canon de
fusil d’où s’échappe de la fumée renforce la prégnance de l’action, son effet de
réalité. Une ressemblance des éléments appartenant à la bande son et à la bande-
image pourront avoir pour rôle de préciser, de souligner, d’illustrer le contenu
apporté par l’image. Dans la mesure où cela aide à lutter contre la polysémie de
l’image, on peut alors parler de fonction d’explicitation. La fonction de
renforcement est un cas particulier de cette fonction primordiale dans tous les
discours qui vise à limiter le quiproquo (malentendu) et la prolifération du sens
en désignant le bon niveau de lecture, donc en cherchant à imposer un sens par

1
Étude (et théorie) d'un système de signification quel qu'il soit. Sémantique linguistique, musicale,
cinématographique.
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une certaine redondance des signes. Par exemple, la musique


d’accompagnement qui, en synergie avec l’image, souligne la tristesse, la joie,
l’angoisse de telle ou telle scène.
Lorsque le son ne s’inscrit pas en complémentarité de l’image, mais que le
contenu de la bande-sonore a sa réalité propre et se développe en parallèle, de
nombreux effets peuvent résulter de cette interaction. Nous en retenons deux.
Quand les éléments de la bande sonore sont donnés en contrepoint avec l’image
et se superposent à elle, le rapport ouvre sur la relation entre le discours
(l’assemblage audiovisuel) et la réalité auquel il renvoie. Le choix des images et
des sons incite le spectateur à s’interroger sur le rapport entre ce qui est donné à
voir et la réalité à laquelle renvoient ces images et ces sons (exagération ou
atténuation, paradoxe, ironie ou humour), aussi on peut parler de fonction de
distanciation. Pour saisir l’intention sous-jacente, le spectateur doit pouvoir
interpréter les informations contextuelles qui sous-tendent l’énoncé. La
perception d’un écart entre les informations sonores et visuelles ouvre un espace
pour les interprétations du spectateur.
Une autre fonction a rapport à la gestion du temps. Le son, la musique en
particulier, permet de réaliser des effets de dilatation ou de contraction du
temps. On pourrait nommer cette fonction, la fonction durative. Ces effets
rappellent que le cinéma met en œuvre une double temporalité: celle de ce qui
est donné à voir et à entendre et celle de l’instance qui montre (respectivement
dans le cinéma narratif: l’histoire et la narration).

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La musique De FiLm
« Quand on entre dans un film, la musique frappe à la porte, elle doit préparer le spectateur
et sortir sans faire claquer la porte, sur la pointe des pieds » (Ennio Morricone)

Le rôle de la musique de film


La musique a rarement le rôle principal mais elle est essentielle dans la bande-
son d’un film. Elle accompagne les moments forts de l’action, elle peut évoquer
(et provoquer) des émotions, suggérer des idées, donner parfois un autre sens à
l’image ou au récit… Souvent les bruitages et les dialogues se superposent à la
musique.
La provenance
On distingue deux types de provenance sonore :
Le son diégétique fait partie de l’action, il est entendu par les personnages du
film (radio, télé, musicien visible à l’image, …).
Le son extra-diégétique ne fait pas partie du récit, il est entendu seulement par
le spectateur.
Un procédé essentiel : le leitmotiv
Le leitmotiv est un motif, un thème, une « idée » musicale directement associé à
un élément du film : personnage, lieu, sentiment, idée,… il peut être transformé,
varié, en fonction des circonstances du récit, mais souvent facilement
reconnaissable.
Ce procédé a été largement utilisé dans les opéras de Wagner (compositeur
allemand du 19e siècle) bien avant la naissance du cinéma. Ce que l’on appelle
le « thème principal » d’un film un synonyme de leitmotiv. le thème à
l’harmonica d’Il était une fois dans l’Ouest, le suspense et l’action suggérés
par Mission impossible ou James Bond, le romantisme d’Autant en emporte le
vent, de Titanic, les thèmes héroïques de Star Wars, Superman ou Pirates des
Caraïbes…

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En voici quelques astuces


Pour faire peur
Notes longues (très aiguës ou très graves), chromatismes (déplacement par
demi-tons), dissonances (notes qui « sonnent faux »), clusters (« grappes » de
notes), sons grinçants, stridents, voix étranges… On en trouve de nombreux
exemples dans les films d’Hitchcock (la scène de la douche dans Psychose!) et
dans les films d’horreur et de suspense ( Shining, L’exorciste, Scream, Sixième
sens…) .
Pour faire monter la tension
Crescendo (de plus en plus fort), ostinato (cellule rythmique ou mélodique qui
se répète obstinément), superposition progressive de plusieurs plans sonores…
Le duel d’Il était une fois dans l’Ouest, la scène de la gare dans Les
incorruptibles, les poursuites de La mort aux trousses…
Les scènes d’actions
Le « mickey-mousing » : dans les scènes d’action, la musique ponctue et
accompagne l’action, un peu comme dans un dessin animé.
Indiana Jones, Retour vers le futur, le duel dans la forge de Pirates des
Caraïbes, Robin des bois… et n’importe quelle scène d’action « classique »…
Utilisation de certains instruments :
Violons, flûtes, piano, harpe… pour le romantisme et l’amour. Caisse claire,
tambour, trompette… pour les films militaires. Guitare, banjo, guimbarde,
imitation du galop du cheval… dans les westerns. Cornemuse, flûte irlandaise,
tambours africains, instruments traditionnels… pour évoquer différents pays ou
paysages. Clavecin, « vieux » instruments… pour une époque ancienne.
Synthétiseur, instruments électroniques… pour la science fiction.

Traitements particuliers
Réverbération exagérées pour suggérer les grands espaces : Le grand bleu
Mélange originaux : tambours indiens + orchestre autour du feu Danse avec les

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loups, hautbois, clavecin, voix et percussions dans Mission, voix d’opéra


transformée avec boite à rythme dans Le 5ème élément…
Absence de son : certains cris que l’on « voit » sans entendre dans Le seigneur
des anneaux, Les incorruptibles…
Bruitages exagérés : souffle, épée qui sort du fourreau, arc qui se tend.1

1
Sources : « Le son au cinéma » (M.Chion), « Guide pratique de la musique de film » (V.Villanni), site
académique de Caen (Education musicale).

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