These Archivage Buis Camille 2013
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These Archivage Buis Camille 2013
Doctorat
CAMILLE BUIS
Jury :
Sommaire
INTRODUCTION ................................................................................................................................................ 8
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0 SOMMAIRE
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0 SOMMAIRE
4.4.1. Répartition des dislocations dans des cristaux produits en THM par différents
fournisseurs .................................................................................................................................................................... 119
4.4.2. Répartition des dislocations dans des cristaux produits à haute température ............. 120
4.5. CONCLUSION ..................................................................................................................................................123
4.6. REFERENCES ..................................................................................................................................................125
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0 SOMMAIRE
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0 SOMMAIRE
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0 INTRODUCTION
Introduction
L’imagerie médicale a beaucoup évolué depuis la première radiographie réalisée par Wilhelm
Röntgen en 1895. A cette époque, le concept de « dose au patient » n’existait pas et la dose
nécessaire pour obtenir des clichés de qualité était largement supérieure aux normes en vigueur
aujourd’hui. La radiologie est l’examen d’imagerie médicale le plus courant actuellement et
contribue donc largement à l’augmentation de notre exposition aux rayonnements ionisants. La
recherche dans ce domaine vise ainsi à concevoir des systèmes d’imagerie de plus en plus précis,
rapides et moins irradiants. Dans le but d’atteindre ces objectifs, une solution est envisageable
par le développement d’une nouvelle technologie de détecteurs à base de matériaux semi-
conducteurs Cd(Zn)Te. La détection de rayons X avec le tellurure de cadmium (CdTe) permet
une bonne résolution spatiale et une bonne résolution en énergie. De plus la conversion photon-
électron se fait de manière directe contrairement aux systèmes à base de scintillateur
(conversion indirecte des photons en lumière puis en électrons), ces nouveaux détecteurs sont
donc plus sensibles et plus résolus. Les premiers prototypes réalisés ont permis de montrer tout
leur intérêt du point de vue de l’amélioration de la qualité de l’image et de la diminution de la
dose absorbée par les patients.
Dans le cadre de ses activités en imagerie médicale, le Leti développe depuis plusieurs années
des détecteurs à base de tellurure de cadmium dans le but de proposer de nouvelles
performances en imagerie pour des applications en radiologie et scanner X (détection X), et
gamma caméra (détection gamma). Il y a actuellement deux principaux verrous à l’utilisation de
ce type de détecteur pour les différents modes d’imagerie utilisés, que ce soit en intégration de
charge (mesure du photocourant), en comptage de photons ou en spectrométrie (mesure de
l’énergie individuelle de chaque photon).
- D’une part, pour les applications de détection de rayons X, le flux de photons peut être
très élevé (jusqu’à 109 photons/mm²/s) : sous une telle irradiation, les charges piégées
dans le volume du matériau détecteur s’accumulent, affectant ainsi sa stabilité. Une
dérive sous fort flux est observée.
- D’autre part, des inhomogénéités spatiales peuvent apparaître lors de l’utilisation de ces
capteurs. Or de petits pixels sont nécessaires, par exemple en mammographie, pour la
détection de microcalcifications ; ces inhomogénéités peuvent fausser l’interprétation
médicale et le diagnostique en application clinique.
Nous proposons dans cette thèse d’apporter une contribution à l’identification et à la
compréhension des phénomènes limitant les performances de détecteurs développés pour la
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0 INTRODUCTION
Cette étude porte sur des détecteurs de rayons X à base de tellurure de cadmium dopé au chlore
(CdTe:Cl) monocristallin. Elle se fera par la corrélation empirique des inhomogénéités des
capteurs avec les défauts du cristal et par l’évaluation de leur influence sur le transport des
charges et sur le positionnement des niveaux énergétiques dans le gap du semi-conducteur.
L’étude de la répartition des défauts se fera grâce à des techniques de cartographie diverses, les
niveaux pièges du matériau seront déterminés par le biais de mesures de spectroscopie optique,
tandis que l’influence des défauts cristallins sur le transport des charges sera mise en évidence
par l’étude du courant induit par un faisceau d’ions (IBIC).
Le premier chapitre permet de présenter les principes de base de la détection de rayons X. Nous
comparons la détection indirecte et la détection directe qui entrent en jeu dans le
fonctionnement des détecteurs utilisés au cours de cette thèse. Ce chapitre nous permet
également d’exposer en détails la problématique de cette thèse par la description des
inhomogénéités spatiales et des dérives temporelles qui sont observées dans la littérature et au
sein du laboratoire détecteurs (LDET) du LETI pour ces nouveaux types de détecteurs
développés.
Nous présentons, dans le deuxième chapitre, les propriétés cristallographiques du cristal semi-
conducteur utilisé pour la détection des rayons X. Nous introduirons également les dislocations
car nous aurons alors montré que ce sont les défauts d’intérêt pour répondre à la problématique
de la dérive de ces détecteurs. Nous verrons leurs caractéristiques cristallographiques générales,
ainsi que celles propres aux dislocations dans les cristaux de CdTe, leur origine et leur
dynamique au cours de la croissance du cristal.
Le troisième chapitre expose les techniques de caractérisation que nous souhaitons appliquer
aux cristaux de CdTe au vu des problèmes d’inhomogénéité du système de détection présentés
au chapitre 1. Sont notamment présentées, des méthodes de microscopie qui permettent
d’observer les défauts cristallins présents dans le CdTe:Cl, des techniques de caractérisation : de
la chimie de surface du matériau, des niveaux pièges dans le gap du semi-conducteur et des
propriétés de transport des électrons et des trous dans le CdTe. L’utilisation des techniques
envisagées y est justifiée et leurs résultats seront présentés dans les chapitres suivants.
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0 INTRODUCTION
Le chapitre quatre a pour objectif d’étudier la répartition des murs de dislocations et des
inclusions de tellure à la surface et dans le volume du CdTe. La distribution des dislocations est
expliquée en se basant sur la théorie exposée au deuxième chapitre. Nous la comparons avec
celle que nous observons dans des cristaux de Cd(Zn)Te obtenus par des techniques de
croissance différentes et par différents fournisseurs.
Le chapitre cinq met en évidence les corrélations observées entre les défauts qui apparaissent
sur les images de stabilité du détecteur sous irradiation et les défauts structuraux du cristal.
Nous réalisons également une étude dynamique sur les lignes de photocourant. Puis, dans une
dernière partie, nous présentons un modèle dont le but est de proposer une explication aux
comportements des lignes de courant perturbées.
Le chapitre six met en relation l’ensemble des résultats issus de différentes techniques de
caractérisation dans le but de mieux comprendre l’influence des défauts cristallins sur le
fonctionnement des détecteurs. Nous étudions la répartition des impuretés dans notre matériau
par SIMS. Nous exposons les résultats des méthodes de spectroscopie optique à basse
température utilisées pour étudier les niveaux pièges dans le gap des semi-conducteurs. De plus,
l’influence des défauts sur les propriétés de transport des porteurs de charge est étudiée par la
méthode IBIC.
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0 INTRODUCTION
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CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Chapitre 1. La détection de
rayonnements X en imagerie médicale
12
CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Les examens d’imagerie médicale, scanner et radiographie, sont très couramment utilisés pour
le diagnostique médical. Cependant ils ne sont pas sans risque pour le patient car ils augmentent
fortement son exposition individuelle aux rayonnements ionisants. Il est alors primordial de
travailler sur le développement de détecteurs de rayons X plus performants afin d’optimiser
l’irradiation subie par le patient. C’est dans ce contexte de diminution de dose tout en améliorant
la qualité des clichés en imagerie médicale, que se positionne ce travail.
Afin d’introduire le contexte de la thèse, ce chapitre aura pour premier objectif de présenter les
bases de la détection de rayons X pour l’imagerie médicale. Nous parlerons notamment des
dispositifs pour la radiologie à base de scintillateurs pour les comparer à ceux à base de semi-
conducteurs. Le choix du semi-conducteur pour cette étude, en l’occurrence le tellurure de
cadmium, sera justifié. Puis, après avoir introduit le principe de fonctionnement des prototypes
de capteurs de rayons X développés au laboratoire pour des applications en mammographie,
nous exposerons un état de l’art des inhomogénéités spatiales et des dérives de ces nouveaux
types de détecteurs.
Dans cette partie, nous rappellerons les bases des interactions rayonnement-matière. Puis, après
avoir présenté le principe de l’image radiologique et du fonctionnement des dispositifs
numériques les plus couramment utilisés en radiologie actuelle, nous présenterons l’intérêt des
semi-conducteurs comme matériaux pour l’imagerie médicale.
Les trois modes d’interaction des photons avec la matière sont l’absorption complète, la
diffusion élastique et la diffusion inélastique. Cette interaction s’effectue suivant différents
processus, présentés sur la Figure 1, qui dépendent de l’énergie du photon incident comme nous
pouvons le voir sur la Figure 2. Les trois processus dominants, aux énergies pour les applications
en imagerie médicale comprises entre 20 et 150 keV, sont les suivants :
- L’absorption photo-électrique
- La diffusion Compton
- La diffusion Rayleigh
La création de paire ne sera pas traitée dans cette partie car elle a lieu à plus haute énergie, à
partir de 1.022 MeV.
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CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Figure 1. Schéma de principe des différentes interactions entre un photon et la matière [Seibert, 2005].
Figure 2. Section efficace d’interaction dans le CdTe pour l’effet photoélectrique (en noir), la diffusion Rayleigh (en
rouge) et la diffusion Compton (en bleu) [Internet @1].
Dans ce processus, le photon incident est totalement absorbé : il cède toute son énergie à un
électron des couches profondes qui est alors éjecté de l’atome, ce qui entraine une ionisation de
l’atome comme le montre la Figure 1. L’énergie cinétique de l’électron est égale à l’énergie du
photon incident moins son énergie atomique de liaison avec la couche qu’il occupait.
Après l’éjection de l’électron, plusieurs processus sont susceptibles de se produire :
- La place vacante est comblée par un électron d’une couche externe avec émission d’un
rayonnement de fluorescence X.
- La place vacante est remplie par un électron venant d’une couche plus interne que celle
de l’électron éjecté. L’énergie disponible est alors suffisante pour émettre un électron
d’une couche extérieure : c’est l’émission d’un électron Auger.
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CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Il s’agit de la diffusion inélastique du photon par un électron d’un atome. Le photon cède une
partie de son énergie à un électron des couches périphériques qui est alors éjecté de l’atome. Un
photon est diffusé avec une énergie inférieure à celle du photon incident car l’énergie est
répartie entre l’énergie cinétique apportée à l’électron et l’énergie du photon diffusé.
L’effet Compton est très important en radiologie : il contribue à céder aux tissus une partie de
l’énergie du photon incident et change sa direction. Le photon ne semble donc plus provenir du
foyer du tube de rayons X, il ne contient alors pas d’information précise sur les tissus traversés
pour former l’image : il diminue ainsi le contraste en créant une image flou. Une grille anti-
diffusé placée derrière le patient permet en général de stopper les photons résultant de cette
interaction.
Le photon interagit avec les électrons des couches profondes et est réémis dans une autre
direction sans perte d’énergie. La diffusion Rayleigh est négligeable en diagnostique
conventionnel (< 5%), en effet ce processus devient négligeable à haute énergie comme nous
pouvons l’observer sur la Figure 2. Cependant elle est d’environ 12 % à 30 keV, donc non-
négligeable en mammographie car cet examen est réalisé à une énergie d’environ 20 keV.
Dans le milieu médical, la radiographie est l’un des examens de base pour l’investigation de
symptômes chez un patient. Nous introduirons dans cette partie les principes de fonctionnement
des détecteurs couramment utilisés ainsi que le principe de formation d’une image radiologique.
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CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Le système de radiologie se compose d’une source radiogène, d’un objet, d’un capteur de rayons
X (film radiographique, écran photo-stimulable, scintillateur …) sur lequel va se former l’image
de l’objet radiographié.
Le tube de rayons X émet ponctuellement en son foyer des photons qui vont traverser les tissus
du corps humain et être plus ou moins absorbés suivant leur nature comme présenté sur la
Figure 3 (a). Le contraste de l’image radiologique existe simplement parce que les tissus
n’absorbent pas de la même manière les photons comme le montre la Figure 3 (b). En radiologie,
il faut trouver le contraste optimal entre les tissus à examiner en limitant le mieux la quantité
d’énergie déposée (la dose) dans ces tissus. Une cassure de la chaine ADN à forte dose peut
entrainer la formation de cancers radio-induits.
(a) (b)
Figure 3. (a)Schéma de principe de la transmission de rayons X, émis par une source ponctuelle, à travers des tissus,
l’air et de l’os. (b) Courbe de coefficients massiques d’atténuation pour différents matériaux rencontrés en imagerie
X diagnostique [Seibert, 2005].
L’énergie du faisceau de rayons X est donc choisie en fonction du type d’examen diagnostique à
réaliser. Une radiographie standard est réalisée avec des énergies comprises entre 30 et 60 keV.
Tandis qu’une mammographie doit être faite avec une énergie d’environ 20 keV pour observer
les microcalcifications présentes dans les tissus mous. En revanche, une radiographie des
poumons doit être faite à haute énergie (supérieure à 100 keV) afin de traverser la structure
osseuse de la cage thoracique et voir les poumons remplis d’air.
La taille des pixels du capteur détermine la résolution spatiale de l’image radiographique. Elle
est comprise entre 50 et 150 µm avec une résolution maximale nécessaire en mammographie
pour visualiser les microcalcifications.
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CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Le rendement final réalisé au cours de ce type de détection est limité par les étapes de
conversions successives (rendement de fluorescence du scintillateur, rendement de la
photodiode) et d’atténuation dans le scintillateur (limitation de la quantité de photons arrivant
sur le photoconducteur et donc de la quantité de porteurs générés), réduisant ainsi l’efficacité
quantique du détecteur. Pour remédier à ce problème de sensibilité, il faut accroitre la quantité
de photons pour réaliser une bonne image diagnostique ce qui exige d’augmenter la dose
absorbée par le patient. D’autre part les photons créés dans le scintillateur ont tendance à
diffuser de manière isotrope ce qui diminue la résolution spatiale du détecteur.
Malgré des innovations apportées pour optimiser le fonctionnement de ces capteurs de rayons X
(par exemple : la croissance sous forme d’aiguilles du scintillateur à base de CsI:Tl pour guider
d’avantage les photons et augmenter la résolution spatiale), certaines propriétés intrinsèques,
comme le rendement de conversion, n’ont pu être améliorées ce qui a conduit à s’intéresser aux
matériaux semi-conducteurs pour la détection de rayonnement X en imagerie médicale.
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CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Les semi-conducteurs possèdent certaines propriétés qui permettent de dépasser les limites des
détecteurs à base de scintillateur et peuvent ainsi gratifier les capteurs de rayons X d’un gain en
sensibilité et d’une meilleure résolution spatiale.
Plusieurs critères influent sur le choix du semi-conducteur pour créer un détecteur de rayons X
performant pour la radiologie :
- Le numéro atomique du ou des éléments constituant le matériau doit être élevé et le
semi-conducteur doit posséder une densité élevée. Ces deux propriétés confèrent au
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CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Tableau 1. Comparaison qualitative des différents semi-conducteurs utilisés pour la détection de rayons X [Sakai,
1982], [Verger, 2004] et [Internet @1].
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CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Certains de ces matériaux ont des caractéristiques intéressantes, mais seul le CdTe et le CdZnTe
donnent le meilleur compromis pour la détection de rayons X de haute énergie : bonne capacité
d’absorption, bonne résistivité, bonnes propriétés de transport et une qualité cristalline
suffisante. Nous remarquons par exemple que le silicium, dont la maîtrise technologique permet
l’obtention d’une très bonne qualité cristalline, possède un faible pouvoir d’arrêt des photons du
fait de son faible numéro atomique. D’autre part, le Germanium possède de bonnes propriétés de
transport mais sa faible résistivité, l’empêche d’être utilisé à température ambiante car le
courant de fuite serait trop élevé.
Ce n’est que récemment que des cristaux larges de CdTe:Cl monocristallin, mesurant plusieurs
centimètres carrés de surface et possédant des bonnes propriétés de transport, ont commencé à
être produits. Cette avancée technologique permet le développement de nouveaux types de
détecteurs de rayons X ayant une bonne résolution spatiale, une bonne sensibilité et un bon
rapport signal sur bruit, tout en fonctionnant à température ambiante [Funaki, 1999].
Dans la suite de ce manuscrit, nous ferons l’hypothèse que le champ électrique appliqué aux
bornes du détecteur reste constant et vaut V/d [Barrett, 1995] où V est la différence de
potentiel et d est la distance entre les deux électrodes. Cette hypothèse n’est pas tout à fait
justifiée, comme l’ont montré les travaux réalisés par Olivier Alirol [Alirol, 2009].
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CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Les électrons se déplacent vers l’anode avec une mobilité µ n et les trous vers la cathode avec une
mobilité µ p . La charge non signée des porteurs de charge est notée q. E est le module du champ
électrique engendré par les deux électrodes distantes de d, la quantité µ.E représente la vitesse v
d’une charge. Dans le cas où le piégeage des charges est considéré comme homogène, n(t) est
proportionnel à exp(-t/τ n ) où τ n est la durée de vie des électrons et t est la variable temps, et
p(t) est proportionnel à exp(-t/τ p ) avec τ p la durée de vie des trous. Les valeurs de mobilité et de
durée de vie sont récapitulées dans le Tableau 2.
µn µp τn τp
Matériau
cm2/V.s cm2/V.s µs µs
Tableau 2. Propriétés de transport des électrons et des trous des détecteurs étudiés mesurées au laboratoire [Gros
d’aillon, 2005, p. 43].
Le courant induit est donc lié à la durée de vie et à la mobilité des porteurs de charge. Nous
remarquons que le produit entre la mobilité et le temps de vie des trous est environ 10 fois plus
petit que celui des électrons : le courant induit par les trous sera donc inférieur à celui induit par
les électrons et leur collecte sera plus longue, car ils auront tendance à être piégés dans le
volume du détecteur.
La charge finale collectée correspond à l’intégrale du courant induit au cours du déplacement
des porteurs (Q = ∫Idt) dans le volume du semi-conducteur. En considérant que la durée de vie
des porteurs est supérieure au temps de migration des porteurs jusqu’aux électrodes, le courant
et la charge induite peuvent être représentés comme le montre la Figure 6. L’induction des
charges dans le semi-conducteur est la somme de la contribution des électrons et des trous.
Figure 6. Courant et charge induits dans un détecteur avec des électrodes pleine face.
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CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Dans un détecteur à base de CdTe de 1 mm d’épaisseur, sur lequel est appliquée une tension de
100 V (soit un champ électrique E de 1000 V/cm), la mobilité des électrons étant de
1000 cm2/V.s, le temps de transit des électrons dans le détecteur est de
t tr = d/v = 0.1/(1000x1000) = 0.1 µs. La durée de vie des électrons étant de 2 µs, elle est donc 20
fois plus longue que leur temps de transit dans le matériau. Leur collecte est donc possible.
En revanche, pour les trous, le temps de transit dans le matériau est de 1 µs. Leur durée de vie
étant de 1 µs, le libre parcours moyen des trous (la distance moyenne parcourue par un trou
avant d’être piégé) est donc égale à l’épaisseur du matériau. Ils vont donc être moins bien
collectés à la cathode.
La charge collectée par les électrodes est donc majoritairement induite par les électrons. Elle
devient proportionnelle à la longueur du parcours des électrons, c’est à dire à la profondeur
d’interaction du photon dans le détecteur comme le montre la Figure 7. Les électrons créés près
de la cathode, en position 3, vont induire un signal d’amplitude plus grande qu’un électron créé
près de l’anode, en position 1. Le détecteur est donc irradié du coté de la cathode, afin que la
majorité des électrons parcoure une grande distance dans le cristal.
Le système peut être rendu moins sensible à la position d’interaction par effet géométrique,
notamment par pixellisation de l’anode [Barrett, 1995]. Un détecteur pixellisé est un détecteur
dont l’anode est segmentée en une matrice d’électrodes.
Cette géométrie est associée à un « effet pixel » schématisé sur la Figure 8.
Dans le premier schéma, les d’électrons créés près de la cathode induisent une charge sur
l’ensemble des électrodes. Quand les électrons se rapprochent des anodes, le courant sur l’anode
collectante (courbe rouge) augmente tandis que celui sur les anodes qui ne collectent plus
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CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
(courbe bleue) diminue car, du point de vue électrostatique, la charge s’éloigne de ces anodes. A
la fin de leur trajet, les électrons ont induit toute leur charge sur l’anode collectante pendant que
les autres reviennent à zéro. Pour un pixel de surface S=e x e, tout se passe comme si la dérive
d’un électron induisait une majorité de son signal à partir d’une distance e de l’anode collectante
[Barrett, 1995].
Dans le deuxième schéma, les d’électrons sont créés loin de la cathode, ils induisent une charge
totale (courbe noire) plus faible que dans le cas précédent. En effet les électrons s’éloignent du
point de vue électrostatique des anodes voisines donc la charge induite est négative (courbe
bleue). De plus, la valeur de la charge induite sur l’anode collectante rouge est inférieure dans ce
deuxième cas, car les trous (créés loin de la cathode) sont piégés au cours de leur parcours.
Figure 8. Charge induite dans un détecteur pixellisé dans le cas 1 où le photon interagit près de la cathode et le cas 2
où le photon interagit au milieu du détecteur [Gros d’aillon, 2005, p 45].
- Intégration
Dans le cas de la radiographie, la mesure par intégration est principalement utilisée. Au cours de
la mesure du flux de photons, la charge collectée sur chacune des électrodes est intégrée
pendant une certaine durée comme présenté sur la Figure 9.
23
CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Cette approche permet une meilleure sensibilité, une meilleure résolution spatiale et un meilleur
rapport signal sur bruit par rapport au mode de détection indirecte. Elle a l’avantage d’assurer
un bon fonctionnement du détecteur à haut flux car l’électronique mesure l’amplitude moyenne
du courant en sortie des pixels. L’intégration du signal permet également d’utiliser des pixels de
petite taille ce qui est indispensable pour une application en mammographie.
Les inconvénients de cette méthode sont d’une part, la non-différenciation entre les photons de
basse énergie et ceux de haute énergie. Or les photons de basses énergies sont les plus
importants en imagerie médicale car ils sont à l’origine du contraste dans l’image. D’autre part,
le courant de fuite est intégré avec le photocourant ce qui entraine un bruit à faible dose.
L’intégration du bruit d’obscurité entraine une dégradation du rapport signal sur bruit et donc
une diminution du contraste dans l’image. Ceci implique nécessairement une augmentation de la
dose au patient pour améliorer le contraste. Le mode comptage décrit ci-dessous permet de
remédier à ces deux problèmes.
- Comptage
Dans ce cas, on cherche à compter les photons par rapport à un ou plusieurs seuils. Ce mode
permet de donner autant de poids aux photons de basse et de haute énergie. Le contraste est
donc meilleur pour une dose au patient plus faible.
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CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Le matériau de détection utilisé est du tellurure de cadmium monocristallin dopé au chlore. Il est
produit par le fournisseur Acrorad (Japon, [Internet @2]) par la méthode THM (Travelling
Heater Method) qui sera décrite au chapitre suivant. Les dimensions du cristal sont 16×16 mm
avec une épaisseur de 1 mm.
Nous verrons au chapitre suivant que le cristal de CdTe possède deux faces bien distinctes : une
face est entièrement composée d’atomes de cadmium, l’autre ne comporte que des atomes de
tellure. Sur la face cadmium, le fournisseur dépose une anode pixellisée composée de
200×200 pixels. Chaque électrode mesure 35 µm et est déposée au pas de 75 µm, tandis que sur
la face tellure, Acrorad dépose une cathode pleine face. Les deux électrodes sont composées de
platine electroless : Pt/CdTe/Pt. Le système est ensuite hybridé du côté de son anode pixellisée
sur un circuit de lecture CMOS grâce à des billes d’indium. Ce circuit fonctionne en mode
intégration de courant. La Figure 11 (a) est une photographie d’un des prototypes développés.
Les caractéristiques de ces prototypes sont présentées dans la publication de Marc Arques et al.
[Arques, 2011]. Les courbes du courant en fonction de la tension tracées au laboratoire avec ces
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CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
(a) (b)
Figure 11. (a) Photographie d’un prototype d’imageur à base de CdTe monocristallin couplé à un circuit de lecture
CMOS [Arques, 2011]. (b) Caractéristique I(V) typique d’un détecteur en intégration développé au LDET pour la
radiographie [Arques, 2011].
Le principe de fonctionnement du circuit de lecture est donné par la Figure 12 (a). Le détecteur à
base de CdTe est irradié côté cathode avec un tube à rayons X. Les photons interagissent dans le
matériau pour former un nuage de paires électrons-trous comme expliqué dans la partie 1.1.3.1.
Sous l’influence du champ électrique appliqué aux électrodes, les charges migrent de la cathode
vers l’anode et induisent un courant tout au long de leur parcours comme présenté sur le
schéma de la Figure 12 (b). Les électrons sont stockés dans la capacité C 0 (une capacité
additionnelle sert à forte dose, pour continuer le stockage des charges).
(a) (b)
Figure 12. (a) Schéma du principe de fonctionnement d’un pixel du circuit de lecture IRIS [Arques, 2011]. (b) Schéma
de principe de fonctionnement d’un détecteur semi-conducteur, avec une cathode pleine face et une anode pixellisée,
hybridé sur un circuit de lecture.
Chaque image d’un objet réalisée avec ces prototypes est ensuite corrigée d’offset et de gain.
L’image d’offset est l’image du courant de fuite acquise en polarisant le détecteur placé dans le
noir et en absence d’irradiation. Cette mesure permet d’obtenir en chaque pixel la valeur du
courant induit par les charges générées thermiquement par le matériau semi-conducteur.
26
CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Le détecteur est ensuite irradié, sans objet, avec des rayons X. Ceci permet d’obtenir une image
du photocourant en chaque pixel et de ses éventuelles inhomogénéités, elle est acquise à la
même tension de polarisation que précédemment.
L’image du courant de fuite est ensuite soustraite à l’image du photocourant. L’image finale de
l’objet est divisée par l’image de photocourant, corrigée par soustraction du courant d’obscurité.
Les performances sans irradiation et sous X de ces détecteurs seront présentées dans la section
suivante 1.2.2.
Un exemple d’image corrigée d’offset et de gain est montré sur la Figure 13. Cette image d’un os
de poulet présente avec un bon contraste les structures fines de l’objet.
Figure 13. Image d’un os de poulet acquise avec un prototype développé au laboratoire [Arques, 2011].
Dans cette partie, nous présentons les inhomogénéités de courant de fuite et de photocourant
observées sur les détecteurs développés au laboratoire et décrits dans la partie précédente. Ces
mesures ont été réalisées avant le début de cette thèse sur un banc de mesures dédié.
Les réponses d’un détecteur à base de CdTe, que nous appellerons I1 dans tout le manuscrit,
avec ou sans irradiation sont présentées sur la Figure 14. L’image de photocourant (cf. Figure 14
(a)) est réalisée grâce à l’irradiation du détecteur par un tube à rayons X dont la tension
d’accélération est 70 kVp et le courant de 10 mA. La tension de polarisation appliquée aux
bornes du détecteur est de 100 V. La réponse du système permet de cartographier l’efficacité de
collection de charges en chaque pixel de 75 µm et ainsi d’observer les possibles non-uniformités
de détection.
Les mesures de courant de fuite (cf. Figure 14 (b)) ont été réalisées dans les mêmes conditions
de polarisation que précédemment mais en l’absence d’irradiation.
27
CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
(a) (b)
Figure 14. (a) Image du photocourant du détecteur de rayons X à base de CdTe:Cl. (b) Image du courant de fuite du
même détecteur.
La Figure 14 (a) représente le nombre de charges collectées en chaque pixel de l’anode avec une
échelle arbitraire. Cette image est la moyenne de 96 images acquises à la fréquence de 16 Hz
pendant 6 secondes. Nous observons des défauts linéaires de un à quatre pixels de large.
La présence de ces inhomogénéités spatiales en photocourant corrobore les observations faites
par Cecilia et al. [Cecilia, 2011] sur des images de sensibilité d’un détecteur de rayons X à base
de CdTe fonctionnant en mode comptage de photons (cf. partie 1.3.3). Ces images mettent en
évidence des défauts linéaires avec une sensibilité plus élevée comme nous le montrons plus loin
sur la Figure 21.
Le courant de fuite de ce détecteur varie entre 7 pA et 11 pA par pixel de 75×75 µm², comme
nous pouvons le voir sur la Figure 14 (b). Les valeurs de courant d’obscurité ne sont pas
homogènes sur l’ensemble du détecteur car nous observons des microstructures linéaires, qui
correspondent exactement, de part leur position dans l’image, aux défauts observés sur l’image
de photocourant du détecteur.
Ces inhomogénéités spatiales représentent un problème récurrent pour ces prototypes comme
en témoignent les images de photocourant et de courant d’obscurité acquises avec un deuxième
détecteur aux caractéristiques identiques, présentées sur la Figure 15. Nous remarquons la
présence du même type de réseau de lignes de courant perturbées que pour le détecteur I1.
(a) (b)
Figure 15. (a) Image du photocourant et (b) image du courant de fuite d’un détecteur de rayons X à base de CdTe:Cl.
28
CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Afin d’évaluer l’influence de ces inhomogénéités sur les images radiographiques, nous avons
acquis des images d’un coquillage avec un autre détecteur de caractéristiques de
fonctionnement similaires. Le détecteur est irradié avec le même tube à rayons X que pour
l’expérience précédente (70 kVp). La tension de polarisation appliquée aux bornes du détecteur
pour collecter les charges est de 50 V car le cristal mesure ici seulement 500 µm d’épaisseur.
L’image du photocourant, corrigée par soustraction du courant d’obscurité, de ce troisième
détecteur est présentée sur la Figure 16 (a) et montre le même type de lignes que celles
observées sur les Figure 14 (a) et Figure 15 (a). Avec ce prototype, nous acquérons la
radiographie d’un coquillage : la Figure 16 (b) est l’image sans correction de gain et la Figure 16
(c) représente la même acquisition après division par l’image (a).
Sur Figure 16 (c), nous remarquons que la majorité des lignes ont été éliminées par cette
correction. Cependant certaines sont encore visibles au centre du coquillage. La présence de ces
défauts peut s’expliquer par la différence entre leur comportement réel, non-linéaire, et le
modèle linéaire utilisé pour les corriger.
Le détecteur a ensuite été irradié pendant quelques minutes avant d’acquérir une nouvelle
image : la Figure 16 (d). Pour cette nouvelle acquisition, le courant est intégré pendant 6
secondes comme pour l’image (c) et la même correction est appliquée. L’acquisition montre que
de nombreux défauts étendus de la Figure 16 (a) commencent à réapparaitre sur la Figure 16 (d)
et les lignes visibles sur la Figure 16 (c) sont mieux contrastées dans cette nouvelle acquisition.
Ce phénomène dénote de la nature instable dans le temps de ces défauts.
Nous en déduisons que la correction de gain n’est pas suffisante pour corriger l’effet de ces
défauts étendus sur l’image de radiographie.
Figure 16. (a) Image du photocourant du détecteur de rayons X à base de CdTe:Cl, (b) acquisition sans correction
d’un coquillage, (c) même acquisition après correction par l’image de photocourant, (d) image du coquillage après
quelques minutes d’irradiation avec correction.
29
CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Finalement, étant donné que les modèles classiques linéaires de correction utilisés en
radiographie ne sont pas suffisants pour remédier aux effets de ces défauts étendus sur l’image
de l’objet, une identification exacte de la nature de ces défauts créant des artéfacts et une
meilleure compréhension de leurs comportements non-linéaires et non-stables dans le temps
est nécessaire. En effet, en persistant sur l’image finale, ces artefacts peuvent fausser un
diagnostique si par exemple ils sont du même ordre de grandeur que les microcalcifications à
dépister en examen mammographique.
Plusieurs laboratoires dans le monde travaillent sur le développement de ces nouveaux types de
capteurs de rayons X pour l’application médicale. Ils observent pour la plupart des
inhomogénéités spatiales similaires à celles que nous venons de décrire précédemment. Par
ailleurs, certains décrivent en plus des phénomènes de polarisation et de dérives temporelles de
leurs détecteurs. Cette partie a pour but de donner un état de l’art des dérives et des
inhomogénéités spatiales de la réponse sous irradiation des détecteurs à base de Cd(Zn)Te.
La polarisation est le phénomène d’apparition d’une charge d’espace due au piégeage des
charges, à très fort flux, dans le volume actif d’un détecteur de rayons X. Il y a alors création
d’une zone de charge d’espace qui entraine une réponse spatiale non-uniforme du détecteur et
donc limite ses performances [Alirol, 2009]. Elle a lieu quand la génération des paires
électrons-trous par les photons excède le taux d’effacement de cette charge par diffusion ou
recombinaison [Szeles, 2007] ou dérive des porteurs de charge. Ce phénomène a été étudié par
Soldner sur un détecteur 16×16 pixels à base de CdZnTe [Soldner, 2007].
Le détecteur est irradié avec un tube à rayons X, d’énergie maximale : 120 keV et un courant
compris entre 0 et 400 µA, à travers un collimateur circulaire. Dans le cas d’un détecteur ne
présentant pas de phénomène de polarisation dans le volume, le nombre de coups par pixel
augmente de manière linéaire avec le flux. Pour le détecteur dans lequel une zone de charge
d’espace a tendance à se créer (sa réponse est présentée Figure 17), le comptage est uniforme
pour l’ensemble des pixels irradiés à bas flux. En revanche, à haut flux, la réponse de ce même
détecteur, suite à une augmentation linéaire de flux, n’est plus linéaire. En effet, le taux de
30
CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
comptage des pixels du centre augmente au détriment de ceux aux frontières du collimateur qui
comptent de moins en moins pour finir par s’arrêter de compter (cf. image n°4 de la Figure 17).
Quand le flux est maintenu longtemps, la charge d’espace augmente et certains électrons ne sont
plus assez attirés par la cathode et les pixels directement sous la zone polarisée arrêtent de
compter. Les pixels qui continuent de compter forment un « donuts » comme nous pouvons
l’observer sur image n°5 de la Figure 17. Quand le flux est baissé à nouveau, tous les pixels
recommencent à compter quasi-instantanément comme dans les conditions initiales.
Figure 17. Cartographie du taux de comptage par pixel pour le détecteur polarisé à différents stades d’irradiation
[Soldner, 2007].
Lensing electric
field lines
X-ray flux
Figure 18. Schéma des lignes du champ électrique, dans le volume du matériau, déformées par la charge d’espace.
31
CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Ce phénomène a également été observé, par l’équipe de Xiao en Chine, pour un détecteur CZT de
rayons gamma [Li, 2010]. Le détecteur est irradié avec une source de césium à travers un
collimateur circulaire : après une irradiation prolongée les pixels des bords arrêtent de compter
comme dans le cas de l’étude précédente. Ce phénomène de polarisation entraîne une
dégradation sévère des performances du détecteur qui compte trois fois moins qu’un détecteur
non-polarisé.
Le flux limite à partir duquel le phénomène de polarisation devient dominant a été modélisé par
Szeles et Bales grâce au développement d’un modèle mathématique permettant de simuler les
propriétés de transport des charges dans un détecteur de rayons X [Bale, 2008]. Le détecteur
simulé est à base du matériau CdZnTe sur lequel sont déposées des électrodes planaires. Il
mesure 3mm d’épaisseur, et comporte un niveau donneur superficiel, un niveau donneur
profond, un niveau accepteur superficiel, et un niveau accepteur profond. Les résultats de la
simulation d’irradiation de ce détecteur par la cathode avec un haut flux de photons
(I = [1040 ; 1280] µA) sont présentés Figure 19.
Figure 19. (a) Distribution idéalisée de la densité de charges créée dans le volume du détecteur. (b) Distribution du
champ électrique interne résultant de la distribution de charge. (c) Variation du temps de transit des électrons dans
ce détecteur pour différentes valeurs de flux. (d) Durée de vie des électrons dans le détecteur. (e) Efficacité
d’induction de charges. (f) Décalage résultant du spectre en énergie du détecteur.
32
CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Sur la Figure 19 (a), nous pouvons observer qu’un grand nombre de charges positives
s’accumulent près de la cathode au cours de l’irradiation. Ils expliquent ce phénomène par le fait
que les photons sont absorbés côté cathode et que les trous ont une vitesse de déplacement plus
réduite que les électrons. Ils sont donc piégés facilement et rapidement. Les électrons, plus
rapides, sont au contraire faiblement et uniformément piégés. La Figure 19 (b) montre les effets
de ces piégeages sur la forme du champ électrique : près de la cathode il est élevé (il peut être
multiplié par un facteur 4 ou 5 fois par rapport à la valeur du champ appliqué représentée en
pointillés sur le graphique), il diminue ensuite pour atteindre une valeur minimum à la
profondeur, notée z*, puis augmente jusqu’à l’anode. Ce profil s’explique par le fait qu’un
électron libre généré près de la cathode est accéléré en direction de l’anode à la fois par la force
électrostatique de la charge positive de l’anode et de la charge d’espace positive créée devant lui
près de la cathode : le champ qu’il ressent est très élevé. Plus l’électron libre est généré loin de la
cathode plus la force électrostatique de la zone de charge d’espace derrière lui grandit et
l’empêche d’avancer vers l’anode. Les deux forces opposées se compensent à la profondeur z* ce
qui entraine un effondrement du champ. Pour des profondeurs au-delà de z*, la force
électrostatique de l’anode sur l’électron devient à nouveau supérieure à celle de la charge
d’espace. Sur la Figure 19 (c), la simulation montre que le temps de transit des électrons
augmente considérablement quand le flux d’irradiation augmente (cf. ligne pleine sur le
graphique). Cette augmentation entraine une diminution de la durée de vie des électrons
(cf. Figure 19 (d)) car ils ont tendance à se recombiner avec les trous de la zone de charge
d’espace en bougeant lentement. Le temps de transit plus long et la durée de vie réduite
entrainent une diminution de l’efficacité de collection de charges à haut flux comme sur la Figure
19 (e) pour les évènements qui ont lieu près de la cathode (z < z*). Les amplitudes de ces signaux
sont donc supprimées et le spectre se décale vers les basses énergies comme nous pouvons le
remarquer sur la Figure 19 (f).
Les inhomogénéités spatiales des réponses des détecteurs de rayons X sous irradiation sont
observées depuis de nombreuses années. En 2004, une étude menée par Chmeissani et al. a mis
en évidence la présence de « filaments » dans les images d’efficacité de collection de charges de
détecteurs à base de CdTe hybridés sur des puces fonctionnant en comptage [Chmeissani,
2004]. Le détecteur est polarisé à -70 V et irradié avec une source de rayonnement gamma de
122 keV. La réponse du détecteur obtenue est présentée sur la Figure 20, des lignes claires avec
un plus haut taux de comptage que les autres pixels du détecteur sont visibles.
33
CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Figure 20. Réponse sous irradiation gamma d’un détecteur de rayons X à base de CdTe hybridé sur une puce
Medipix2.
Une étude a été menée en 2011 par le FMF (Freiburger Material Forschungszentrum) sur un
détecteur de rayons X, à base de CdTe, fonctionnant également en comptage grâce à une puce
Timepix. Le détecteur est polarisé à -500 V et irradié avec un tube à rayons X dont la tension
d’accélération utilisée est de 20 kV. La réponse sous flux du prototype est présentée sur la Figure
21 (a) et montre un réseau de lignes claires possédant un taux de comptage supérieur aux autres
pixels du détecteur comme pour le détecteur de la Figure 20. Afin de déterminer l’origine de ces
lignes, une topographie en mode réflexion, par diffraction d’un faisceau synchrotron, a été
réalisée à ANKA (synchrotron de l’institut des technologies de Karlsruhe). La Figure 21 (b)
représente la reconstruction de l’ensemble des projections dans la direction de diffraction (004)
du cristal. Les lignes noires de la topographie sont corrélées au réseau possédant une meilleure
efficacité de collection de charges sur la Figure 21 (a). En effet, les charges s’accumulent au
niveau des sous-joints de grains, tel que, dans les régions autour des dislocations, des barrières
de potentiel se forment et affectent le champ électrique local [Cecilia, 2011].
(a) (b)
Figure 21. (a) Réponse sous X d’un détecteur à base de CdTe fonctionnant en comptage. (b) Topographie en réflexion
par diffraction d’un faisceau blanc synchrotron [Cecilia, 2011].
Ces inhomogénéités sont étudiées par plusieurs laboratoires dans le monde depuis quelques
dizaines d’années. Des études récentes ont notamment permis de corréler des problèmes de
collection de charges avec les défauts cristallins du CdTe.
34
CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Par exemple, en 2010, le laboratoire national de Brookhaven (BNL aux USA) [Marchini, 2010] a
réalisé une topographie X en mode réflexion, par diffraction d’un faisceau blanc synchrotron,
d’un cristal de CdZnTe, présentant des sous-joints de grain (cf. Figure 22 (a)). Pour évaluer l’effet
de ces défauts étendus sur le transport des charges, une cartographie de collection de charges a
été réalisée au pas de 20 µm avec ce cristal. La réponse obtenue, par irradiation sur la cathode
avec un faisceau synchrotron, est présentée sur la Figure 22 (b). La bonne corrélation entre les
deux acquisitions montre que les défauts étendus agissent comme des pièges de charges,
limitant ainsi fortement les performances des détecteurs.
(a) (b)
Figure 22. (a) Topographie en diffraction, réalisée avec un faisceau synchrotron d’un cristal de CZT. (b) Réponse sous
X de ce même cristal connecté à un circuit de lecture pixellisé [Marchini, 2010].
Une seconde étude menée par BNL [Bolotnikov, 2011] sur des cristaux de CdZnTe a montré
que la perte de charge induite par des sous-joints de grains, décorés par des inclusions de
tellure, est d’environ 1 % pour des détecteurs fins (à priori 1 mm d’épaisseur). En effet, comme
nous pouvons l’observer sur la Figure 23, la cartographie met en évidence des bandes sombres
indiquant un plus fort taux de piégeage des charges. Ces fluctuations sont suffisantes pour
affecter les performances du capteur. Bolotnikov et son équipe expliquent que les dislocations
peuvent être considérées comme des tuyaux de cristal distordu électriquement chargés. Elles
attirent les impuretés et accumulent les phases secondaires le long de leur cœur. Quand les
dislocations s’arrangent en sous-joint ou en structures cellulaires, elles agissent comme des
barrières de potentiel et des pièges de charges pour le nuage d’électrons.
Figure 23. Cartographie de la réponse sous irradiation d’un capteur CZT mesurée sur une petite surface (0.5×0.5 mm)
avec un pas de 5 µm [Bolotnikov, 2011].
35
CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
1.4. Conclusion
Ce chapitre nous a permis d’introduire les bases de la détection de rayons X pour l’imagerie
médicale. Nous avons présenté les dispositifs couramment utilisés en diagnostique, à base de
scintillateurs, évoqué leur limites de fonctionnement et les avons comparés aux détecteurs à
base de semi-conducteurs. Nous avons ainsi pu mettre en évidence l’intérêt du développement
de ce nouveau type de détecteur de rayons X dans le but d’améliorer la qualité des images
diagnostiques en radiologie et en tomographie, tout en diminuant la dose absorbée par le
patient.
Nous avons décrit les prototypes développés au CEA en réponse à cette problématique. Nous
avons notamment montré les avantages de l’utilisation du CdTe pour ces applications qui
apporte une meilleure résolution en énergie et une meilleure résolution spatiale grâce à la
conversion directe des photons en paires électron-trou.
Finalement, il nous paraît évident qu’une identification exacte de la nature de ces défauts créant
des artéfacts et une meilleure compréhension de leurs comportements non linéaires et non-
stables dans le temps est nécessaire. Leurs effets sur les performances des détecteurs sont
rédhibitoires et ne peuvent pas être corrigés par des modèles linéaires classiques (correction
d’offset et de gain). Ceci rend l’utilisation de ce détecteur impossible en mammographie où
certaines microcalcifications sont du même ordre de grandeur que les lignes visibles sur les
cartographies de réponse des capteurs.
36
CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
Dans le chapitre suivant, nous décrirons les propriétés cristallographiques des cristaux de
tellurure de cadmium. Nous parlerons des dislocations en général et, de manière approfondie,
des dislocations dans le CdTe ainsi que leur influence possible sur le transport des charges.
37
CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
1.5. Références
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(or CdTe) detector under high X-ray flux for medical imaging, IEEE Nuclear Science Symposium
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[Barrett, 1995] Barrett, H.H., J.D. Eskin, and H.B. Barber, Charge transport in arrays of
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[Gros d’Aillon, 2005] Thèse de Gros d’Aillon, E., Etude des performances spectrométriques des
détecteurs gamma CdZnTe / CdTe monolithiques, 2005.
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CdTe et CdZnTe en spectrométrie gamma, 2000.
38
CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
[Ramo, 1939] Ramo, S., Current Induced by Electron Motion, Proceedings of the I.R.E., 1939,
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[Seibert, 2005] Seibert, J.A. and Boone, J.M., X-Ray Imaging Physics for Nuclear Medicine
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[Shockley,1938] Shockley, W., Currents to conductors induced by a moving point charge,
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[Soldner, 2007] Soldner, S.A., D.S. Bale, and C. Szeles, Dynamic lateral polarization in CdZnTe
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[Szeles, 2007] Szeles, C., et al., Ultra high flux 2-D CdZnTe monolithic detector arrays for X-ray
imaging applications, IEEE Transactions on Nuclear Science, 2007, 54(4), p. 1350-1358.
[Verger, 2004] Verger L., Gentet M.C., Gerfault L., Guillemaud R., et al., Performance and
perspectives of a CdZnTe–based gamma camera for medical imaging, IEEE Transactions on
Nuclear Science, 51(6), p. 3111–3117.
Sites Internet :
@1 National Institute of Standards and Technology,
http://www.physics.nist.gov/cgibin/Xcom/xcom3_3
@2 Acrorad : http://www.acrorad.co.jp/us/
39
CHAPITRE 1 LA détection de rayonnements X en imagerie médicale
40
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
41
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
utilisés dans cette thèse pour la détection des rayons X, ainsi que leurs défauts cristallins
caractéristiques.
Nous présenterons, dans un premier temps, le tellurure de cadmium monocristallin. Nous
décrirons sa structure cristalline, les défauts intrinsèques présents dans ce matériau, et la
technique utilisée pour la croissance des échantillons qui seront au cœur de notre étude.
Puis, dans un deuxième temps, nous décrirons les dislocations de manière générale pour
approfondir, dans une troisième partie, les caractéristiques des dislocations dans le CdTe. Nous
détaillerons leurs propriétés cristallographiques, les causes de leur création et multiplication,
ainsi que leur dynamique dans le cristal.
Nous avons montré au chapitre 1 en quoi le CdTe possède des propriétés physiques adaptées
pour produire de nouveaux prototypes de détecteurs de rayons ionisants pour l’imagerie
médicale. Nous allons à présent décrire ses caractéristiques cristallographiques.
Le CdTe est un semi-conducteur appartenant à la famille II-VI formé à partir d’atomes du groupe
II (cadmium) et d’atomes du groupe VI (tellure) de la classification périodique des éléments
chimiques. Les atomes s’agencent usuellement sous la structure dite zinc-blende (aussi appelée
sphalérite) comme présenté sur la Figure 24 (a). Ce type de maille cristalline est formé de deux
réseaux cubiques faces centrées, l’un aux nœuds duquel ne se trouvent que des atomes de
cadmium, l’autre que des atomes de tellure, décalés l’un de l’autre d’un quart de diagonale du
cube (
42
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
les atomes de la surface sont liés par trois liaisons au reste du cristal. L’environnement de
chacun de ces atomes étant tétraédrique, l’ajout d’un atome supplémentaire à la maille se fera
par la création d’une liaison simple, il sera donc moins stable que ceux liés par trois liaisons.
Finalement chaque surface reste constituée par un seul type d’atome : la face (111) ou A est la
face cadmium, la face (-1-1-1) ou B est la face tellure.
(a) (b)
Figure 24. (a) Modèle de la maille cristalline du CdTe, type cubique face centrée. (b) Modèle de la face {111} de la
structure Zinc Blende du CdTe [Durose, 2010].
Quelle que soit la technique de croissance utilisée, il subsiste toujours un certain nombre de
défauts dans le cristal de tellurure de cadmium, en voici une liste non exhaustive :
Ces défauts sans dimension peuvent être des lacunes, des interstitiels (par exemple un
atome de tellure en site interstitiel) ou des anti-sites (par exemple un atome de tellure en
site cadmium). Le défaut intrinsèque majoritaire présent dans le cristal de CdTe, formé
en milieu riche tellure, est la lacune de cadmium, notée V Cd [Berding, 2009].
Les dislocations sont des défauts linéaires qui apparaissent sous l’effet de contraintes
appliquées au matériau. Ces contraintes sont de l’ordre de la limite d’élasticité théorique
du cristal et ont souvent pour origine : la différence de contraction thermique entre le
réseau du cristal et les défauts qu’il contient (atomes d’impuretés, lacunes, atomes
interstitiels), ou la présence de gradients de température dans des cristaux peu
conducteurs de chaleur, ou le mode de croissance.
43
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
Les inclusions et les précipités sont des défauts créés par l’accumulation de tellure ou de
cadmium dans le cristal. La dimension d’une inclusion varie de quelques micromètres à
quelques centaines de micromètres et celle d’un précipité est de quelques nanomètres
[Rudolph, 1995].
Au cours de cette thèse, le matériau étudié est le CdTe monocristallin produit par Acrorad par la
méthode THM décrite dans la partie suivante de ce chapitre. Les joints de grains ne font donc par
partie de cette étude, de même que les macles car le matériau est certifié non-maclé par le
fournisseur (cette caractéristique du cristal sera vérifiée au cours des mesures effectuées et
présentées dans le chapitre 4). La méthode de croissance pratiquée par le fournisseur (THM)
utilise le solvant tellure, elle engendre donc des inclusions de tellure [Szeles, 2001]. Les défauts
cristallins au centre de nos investigations sont donc les inclusions de tellure, les dislocations et
les sous-joints de grains.
Le diagramme de phase du CdTe (présenté dans la partie suivante sur la Figure 25 (b)) montre
qu’il est difficile d’obtenir directement du CdTe stœchiométrique par solidification d’un bain.
44
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
Notamment, des lacunes de cadmium (1016 à 1018 cm-3) sont obtenues suite au déplacement
d’atomes de cadmium aux sites interstitiels. Ces défauts créent des niveaux accepteurs dans la
bande interdite et induisent une faible résistivité au matériau. Pour remédier à ce problème, il
est possible de procéder à la compensation des sites accepteurs par des impuretés donatrices. Il
a été constaté que l’introduction d’une telle impureté, électriquement active, entraîne la
formation de nouveaux défauts natifs ayant pour rôle de compenser l’activité électrique des
impuretés : c’est le principe de la compensation [Verger, 1992].
Pour le CdTe, l’impureté donatrice choisie est le chlore. Il est introduit sous forme de chlorure de
cadmium (CdCl 2 ) et en quantité supérieure au nombre de lacunes déjà présentes dans le
matériau ([Cl] ~ 1017 à 1018 cm-3). Le chlore se place préférentiellement sur des sites de tellure
(Cl Te ) vacants car ses propriétés électroniques sont proches de celles du tellure. Le niveau créé
dans le gap est superficiel et proche de la bande de conduction, il est donc vite ionisé :
Cl Te Cl Te + + e-. Le chlore ionisé peut alors s’associer avec les lacunes de cadmium V Cd 2- pour
former soit un doublet accepteur négatif (Cl+ ; V Cd 2-), soit un doublet neutre (2Cl+ ; V Cd 2-).
Il existe plusieurs techniques pour faire croître du CdTe monocristallin. Les méthodes
couramment utilisées seront brièvement exposées mais ne seront pas développées dans ce
rapport (« Bridgman », PBSE, et VGF). Nous détaillerons seulement la méthode
«THM » (Travelling Heater Method en anglais) car c’est celle utilisée par Acrorad pour produire
les échantillons utilisés dans le laboratoire pour la radiographie.
Cette technique consiste à déplacer, à vitesse lente, une ampoule scellée en quartz graphité
contenant une solution de cadmium et de tellure dans un gradient de température. La
solidification a lieu quand la température devient inférieure à la température d’équilibre de la
solution.
Il existe plusieurs variantes de cette méthode suivant la forme du gradient de
température utilisé : la Méthode Bridgman Verticale (VB) [Triboulet, 1973], la Méthode
Bridgman Verticale Modifiée (MVBM) [Saucedo, 2008], la méthode Bridgman Horizontale
[Kröger, 1955]. La méthode Bridgman Haute Pression (HPBM) [Szeles, 1998] utilise un creuset
45
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
en graphite ouvert, d’où la nécessité d’une haute pression pour limiter l’évaporation des
constituants.
Cette méthode [Pelliciari, 2005] est basée sur l’évaporation du solvant tellure provenant d’une
solution composée de cadmium et de tellure (et optionnellement de Zinc pour obtenir du
CdZnTe) riche en tellure. Elle s’opère dans un creuset maintenu à la température constante de
1000°C et à une pression comprise entre 1 et 0.5 atm. A la fin de la croissance un disque de
65 mm de diamètre et d’épaisseur comprise entre 1 et 10 mm est obtenu.
Dans cette méthode, un germe de CdTe monocristallin (extrait d’un précédent cristal
monocristallin) est chargé dans une ampoule en quartz scellée sous vide, en présence d’un
alliage riche en tellure et d’un barreau de CdTe polycristallin (obtenu par l’une des méthodes
citées plus haut, par exemple Bridgman) comme l’illustre la Figure 25 (a). Pour augmenter la
résistivité du cristal et améliorer les propriétés de transport des porteurs de charges, du CdCl 2
est mélangé à l’alliage afin de doper le matériau avec du chlore.
L’ampoule contenant l’empilement germe/alliage/barreau polycristallin est placé dans un four
annulaire. La montée en température et le profil thermique appliqué permettent de faire fondre
l’alliage riche en tellure et de créer une zone fondue en contact d’une part avec le germe et
d’autre part avec le barreau polycristallin. L’ampoule est ensuite descendue lentement à travers
le four, ce qui permet simultanément de dissoudre une quantité du barreau de CdTe
polycristallin et de recristalliser la même quantité sur le germe. Comme le montre la Figure 25
(b), plus le pourcentage de tellure dans la zone liquide est élevé plus il est possible de faire
fondre le cristal à une température bien en dessous du point de fusion du CdTe
stœchiométrique. Lorsque tout le CdTe polycristallin est dissout et est recristallisé sur le germe
de CdTe, la croissance est terminée [Funaki, 2007].
46
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
(a) (b)
Figure 25. (a) Schéma de la méthode de croissance THM [Funaki, 2007]. (b) Diagramme de phase du CdTe [Scheel,
2003].
C’est une technique de croissance dite à basse température car fonctionnant entre 850 et 900°C,
par rapport à d’autres techniques comme celle de « Bridgman modifiée » qui est réalisée entre
1104 et 1109°C [Saucedo, 2008]. La vitesse de croissance est de 15 mm par jour pour obtenir
un cristal monocristallin de bonne qualité et de diamètre 75 mm. La concentration en chlore
obtenue est de 2 à 3 ppm, ce qui permet d’obtenir des cristaux de haute résistivité (>109 Ω.cm)
[Shiraki, 2010].
Une dislocation est un défaut linéaire qui permet de relâcher une contrainte élastique affectant
la structure d’un cristal. Le cœur d’une dislocation comprend la ligne de dislocation et son
environnement, de quelques dizaines de distances interatomiques, dans lequel la configuration
des liaisons chimiques est fortement modifiée par rapport à la configuration de référence du
cristal parfait. Au-delà du cœur, bien que déformé, le cristal est considéré comme un cristal de
bonne qualité cristalline.
Il existe deux types de dislocation simple : la dislocation coin et la dislocation vis. De manière
générale dans un cristal, les dislocations présentes réellement sont souvent mixtes : avec à la fois
une partie coin et une partie vis. Chaque type de dislocation possède un vecteur de déplacement
différent, appelé vecteur de Burgers que nous allons introduire dans cette partie.
47
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
Une dislocation est caractérisée par son vecteur de déplacement, appelé vecteur de Burgers et
noté b. La norme de ce vecteur représente l’amplitude de la déformation créée par le défaut et la
direction dépend du type de dislocation considéré. Par exemple il est perpendiculaire à la ligne
de dislocation dans le cas d’une dislocation coin, parallèle dans le cas d’une dislocation vis.
L’orientation de la ligne de la dislocation est définie par un vecteur unité ξ tangent, et son sens
est considéré comme positif si elle se dirige dans le même sens que ξ. Cette orientation permet
de définir le sens de parcours d’un circuit fermé, appelé circuit de Burgers, entourant la
dislocation. Sur la Figure 26, ξ se dirigeant vers l’intérieur de la feuille, le sens positif de parcours
du circuit est anti-trigonométrique. Deux circuits ont été dessinés : celui du haut entoure une
dislocation coin et celui du bas entoure une zone parfaite du cristal. Les atomes de départ et
d’arrivée (en noirs sur l’image) sont confondus dans le cas de la zone sans défaut et disjoints
pour le circuit entourant la dislocation : le vecteur b est défini comme étant le vecteur assurant
la fermeture du circuit incomplet.
Figure 26. Circuit de Burgers autour d’une dislocation coin. La direction positive de la ligne de dislocation, ξ, se dirige
vers l’intérieur de la page [Weertman, 1970].
En général, le vecteur de Burgers est défini à partir d’un vecteur du réseau de la maille primitive.
Les dislocations possédant un tel vecteur de déplacement sont appelées dislocations parfaites
[Hirth, 1982, p. 267].
Le modèle de la dislocation coin fut proposé pour la première fois en 1934 par Orowan, Polanyi,
et Taylor [Hirth, 1982, p. 8]. Une dislocation coin peut être comprise comme l’insertion (ou la
suppression) d’un plan d’atomes dans la maille cristalline comme le montre la Figure 27. Le
symbole ┴ marque l’emplacement de la ligne de dislocation, elle constitue la limite entre le
48
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
demi-plan supplémentaire et le reste du cristal. La maille est donc compressée au niveau du plan
d’insertion et dilatée dans la deuxième moitié du cristal.
C’est en 1939 que Burgers donna la première description de la dislocation vis [Burgers, 1939].
Une façon simple de visualiser la formation d’une dislocation vis est : de couper une partie du
cristal en deux et de les recoller en les décalant l’une de l’autre d’une longueur interatomique
comme sur la Figure 28 (a). La ligne de dislocation est alors parallèle à la direction de
déplacement de la maille et donc au vecteur de Burgers. Comme le montre la Figure 28 (b), les
plans atomiques qui se rejoignent au niveau de la dislocation forment une spirale autour du
défaut, ce qui donne son nom à la dislocation vis.
(a) (b)
Figure 28. (a) et (b) Modèles en 3 dimensions de la dislocation vis [Prasad, 2006].
49
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
Figure 29. Mur de dislocations formé par une succession de dislocations coin parallèles entre elles. ┴ représente
l’endroit où est approximativement située la dislocation [Prasad, 2006].
Il existe deux types de sous-joints de grains : les sous-joints de flexion constitués de dislocations
de type coins et les sous-joints de torsion composés de dislocations vis.
Les effets des dislocations sur les détecteurs sont largement étudiés dans la littérature, nous
présentons dans cette partie leurs effets sur l’évolution du courant de fuite dans un détecteur et
sur la durée de vie des porteurs de charges.
Des analyses ont montré que les dislocations et les sous-joints de grains induisent une
augmentation du courant de fuite limitant les performances des diodes à base de CdHgTe. En
effet, une étude [List, 1993] met en évidence que le courant de fuite augmente avec les densités
de dislocations créées au cours de la croissance du cristal ou induites par le procédé de
fabrication de la diode. Par ailleurs, les dislocations localisées à la périphérie produisent dix fois
plus de courant que celles du centre. L’augmentation du courant de fuite est linéaire avec la
densité de dislocations (8 pA/mV/dislocation à 77 K) jusqu’à atteindre une saturation pour une
densité supérieure 107 cm-2 à partir de laquelle les champs piézoélectriques présents autour des
dislocations isolées commencent à se superposer. Les joints de grains et les sous-joints de grains
augmentent également le courant de fuite dans la diode ; la quantité de courant ainsi créée est
proportionnelle à l’angle de désorientation, ce qui est cohérent avec la description de ces deux
types de défaut comme étant des alignements de dislocations avec une densité proportionnelle à
la désorientation.
Les dislocations traversant une jonction p-n dans le silicium entrainent aussi une augmentation
du courant. En effet du côté de type n du matériau, la dislocation agit comme un défaut accepteur
et du côté p, elle agit comme un défaut donneur, ce mécanisme crée une fuite de courant le long
du défaut [Siegelin, 2005].
50
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
Il a également été montré que les dislocations agissent comme des centres recombinants non-
radiatifs qui réduisent ainsi la durée de vie et donc la longueur de diffusion des porteurs
[Figielski, 2002], [Mahajan, 2000].
Comme nous pouvons l’observer sur la Figure 30, le temps de vie des porteurs de charges est
inversement proportionnel à la densité de dislocations dans les systèmes à base de Si, Ge, GaAs
et GaP [Mataré, 1971].
Notamment l’influence des dislocations sur le temps de vie des porteurs de charges dans les
semiconducteurs silicium et germanium a été étudiée dans [Kurtz, 1956]. Les « etch pits »
révélés à la surface de ces cristaux sont soit uniformément répartis, soit agrégés pour former des
joints de faibles angles. Le temps de vie des porteurs minoritaires a été calculé à partir de
l’analyse de la décroissance de la photoconductivité des détecteurs à base de Si et de Ge. Les
données expérimentales montrent que les dislocations coins augmentent le taux de
recombinaison des électrons et des trous dans ces cristaux tel que la durée de vie diminue de
700 µs pour une densité de 5×104 cm-2 jusqu’à 10 µs pour une densité de 107 cm-2. Les
dislocations peuvent aider à la recombinaison de différente façon : par le décalage des positions
des bandes de valence et de conduction au niveau du défaut, par la ségrégation d’impuretés à
leur voisinage et par l’introduction de liaisons covalentes insaturées le long de la ligne de
dislocation.
Figure 30. Temps de vie des porteurs de charges minoritaires en fonction de la densité de dislocations pour des
systèmes de Si, Ge, GaAs et GaP.
Finalement, cette étude bibliographique montre que les dislocations et les sous-joints et joints
de grain agissent comme des centres recombinants non radiatifs, ce qui entraine une diminution
51
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
de la durée de vie des porteurs de charges. Ces défauts induisent également une augmentation
du courant de fuite.
Actuellement le germanium et le silicium sont les seuls cristaux que nous savons faire croître
sans dislocation ; dans le cas des composés comme le CdTe la situation est plus compliquée. En
effet, au cours d’une déformation plastique, les dislocations s’y forment facilement à cause des
défauts ponctuels intrinsèques fréquents dans ce matériau, de sa faible énergie de faute
d’empilement (elle est de 10.10-7 J.cm-2 pour le CdTe contre 100.10-7 J.cm-2 pour le silicium) et de
sa faible valeur CRSS (Critical-Resolved Shear Stress : la contrainte nécessaire pour passer d’une
déformation élastique à une déformation inélastique) qui est de 0.2 MPa pour le CdTe contre
10 MPa pour le silicium. Ces trois caractéristiques facilitent la mobilité et la multiplication des
dislocations [Rudolph, 1, 2010]. Les caractéristiques cristallographiques des dislocations dans
le CdTe sont généralisables aux autres cristaux possédant une structure cristallographique de
type zinc blende.
De manière générale dans la maille cubique face centrée, les plans de faible énergie de faute
d’empilement dans lesquels les dislocations vont avoir tendance à se former, sont les plans les
plus compacts de la maille, donc les plans {111} [Hirth, 1982, p 272].
Dans le tellurure de cadmium, les dislocations sont de deux natures différentes à cause de la
polarité du cristal évoquée dans la partie 2.1. Il y a les dislocations de type cadmium (la
dislocation est formée par une ligne de liaisons pendantes issues d’atomes de cadmium),
également appelées dislocations négatives ou alpha et les dislocations de type tellure, également
appelées dislocations positives ou beta (cf. Figure 31).
Figure 31. Modèle atomique des dislocations cadmium (α) et tellure (β) [Inoue, 1962].
52
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
Dans les deux cas, ces dislocations sont majoritairement de type 60°, c'est-à-dire que le vecteur
[110].
La structure cristallographique des dislocations dans un plan (111) peut être soit de type
de Burgers et la ligne de dislocation forment un angle de 60°. Le vecteur de Burgers est de type
« shuffle » soit « glide ». Comme le montrent la Figure 32 (a) et la Figure 32 (b), ces deux
désignations décrivent la position à laquelle se termine le plan supplémentaire créant la
dislocation. En général, c’est le type « glide » qui est le plus souvent rencontré (cf. Figure 32 (b)),
car il est énergétiquement plus favorable en considérant la reconstruction du réseau (décrite
dans la partie suivante 2.3.2) après insertion du plan supplémentaire créant la ligne de
dislocation [Inoue, 1962].
(a) (b)
Figure 32. Structure cristallographique des deux types de dislocations observables dans la maille cristalline CFC 60° :
(a) shuffle et (b) glide [Rabier, 2008].
Cependant les dislocations ne sont presque jamais présentes sous les formes présentées dans les
modèles des Figure 31 et Figure 32. En effet, une dislocation parfaite b 1 peut se dissocier en
deux dislocations partielles b 2 et b 3 ; la dissociation, d’après le critère de Frank, a lieu si
b 1 ²>b 2 ²+b 3 ² car l’énergie d’une dislocation est proportionnelle au carré de la norme du vecteur
de Burgers.
D’après l’équation 2, la dissociation d’une dislocation 60° en une dislocation 30° et une 90°,
entraine une diminution de l’énergie du cristal car b 60 ²>b 30 ²+b 90 ².
équation 2.
53
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
que dans le cas où l’atome bouge vers la position (b) puis (c). La Figure 33 (c) suivante présente
la projection normale au plan (111) de la maille cubique face centrée et les directions des
vecteurs de Burgers des dislocations parfaites et imparfaites dans cette maille.
(a)
(b) (c)
Figure 33. (a) Schéma d’une dislocation « 60° » dans la maille diamant dissociée en deux dislocation partielles
Shockley : « 30° type » et « 90° type » [Figielski, 1982]. (b) Modèle boule montrant les directions d’une dislocation
parfaite
54
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
(a) (b)
Figure 34. (a) Projection dans le plan {111} de la reconstruction des liaisons pour une dislocation 60° dissociée. Sur le
schéma chacune des dislocations possède un soliton [Louchet, 1987]. (b) Densité de charges autour d’une dislocation
type 60° dans le semi-conducteur CdTe. Le signe du lobe correspond à la charge induite par l’effet piézoélectrique
[Boyeens, 1984].
Les dislocations ont tendance à s’auto-organiser spatialement afin de relaxer les contraintes
élastiques et donc de minimiser l’énergie du cristal. Dans l’étude de la dynamique des
dislocations, il existe deux types de dislocation : les mobiles et les immobiles. Les dislocations
immobiles, ainsi que d’autres défauts tels que les inclusions, constituent des obstacles aux
mouvements des dislocations mobiles.
Les interactions entre dislocations existantes sont actionnées par la recherche d’un écrantage
mutuel de leur champ énergétique individuel : deux dislocations proches se voient l’une l’autre
par l’intermédiaire de leur champ de contrainte, et elles vont chercher à se compenser. Deux
dislocations coin parallèles de vecteur de Burgers de direction opposée vont avoir tendance à se
rapprocher et soit à créer un dipôle, si elles ne sont pas dans le même plan de glissement, soit à
s’annihiler si elles sont dans le même plan de glissement comme nous pouvons le voir sur la
Figure 35 (a). D’autre part, deux dislocations coin parallèles, situées dans des plans de
glissement différents, possédant un vecteur de Burgers de même sens, vont se rapprocher et
s’aligner comme sur la Figure 35 (b). En interagissant ensemble, les dislocations sont moins
55
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
(a) (b)
Figure 35. Mécanisme d’interaction entre deux dislocations (a) de vecteurs opposés (b) de même vecteur de Burgers
[Rudolph, 2012].
A basse température, la dynamique des dislocations est dominée par le glissement simple des
dislocations dans des plans préférentiels appelés plans de glissement. L’intersection de ces plans
avec les surfaces est appelée bande de glissement. Les glissements se font dans la direction du
vecteur de Burgers pour les dislocations coin, dans une direction perpendiculaire pour les
dislocations vis et avec un angle pour les dislocations 30° et 60°.
La force de frottement du réseau qui s’oppose au glissement des dislocations est appelée force
de Peierls. Elle est faible dans les plans {111} de la structure cubique face centrée (cfc) car ce
sont les plans les plus compacts de cette maille cristalline. Les plans de glissement sont donc les
4 plans de la famille {111} et le déplacement d’une dislocation se fait selon les directions les plus
compactes de ces plans : <110>. La structure cfc possède 3 directions par plans et 4 plans de
glissement par direction, ce qui crée donc 12 systèmes de glissement notés <110>{111} [Hurle,
2004] comme présentés sur le modèle Figure 36 (a). Ce système de glissement est
conventionnellement représenté par un tétraèdre comme le montre la Figure 36 (b). Les faces
56
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
du tétraèdre dessinées en bleue sont les plans possibles de glissement et les arêtes
correspondent aux directions de glissement dans la maille cfc [Chu, 2011].
Dans les cristaux de CdTe, la désorientation moyenne entre deux sous-joints de grain est
comprise entre 60 et 120 arcsecondes [Rudolph, 1, 2010].
Les inclusions engendrent une contrainte dans la maille cristalline d’où l’apparition d’un réseau
de dislocations qui permettent de relâcher ces contraintes élastiques. Les dislocations peuvent
donc également être arrangées en forme d’étoile quand elles sont générées autour d’une
inclusion de tellure comme sur la Figure 37 ci-dessous [Yang, 2009]. Les six branches de l’étoile
correspondent à la vue dans le plan (111) du système de glissement.
Figure 37. Surface d’un échantillon de CZT attaquée chimiquement par une solution de Nakagawa, observation
réalisée au microscope [Yang, 2009].
(a) (b)
Figure 36. (a) Modèle en 3 dimensions du système de glissement [Schreiber, 1999]. (b) Les faces du tétraèdre
dessinées en bleue sont les plans possibles de glissement et les arêtes correspondent aux directions de glissement
dans la maille cfc [Chu, 2011].
Les sous-joints de grains formés par des dislocations de vecteur de Burgers de norme b sont
désorientés d’un angle θ donné en radian par l’équation 3, où h est l’espacement entre deux
dislocations.
équation 3. θ=
57
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
D’autres mécanismes sont activés à plus haute température : les glissements déviés (« cross
slip » en anglais) pour les dislocations vis qui peuvent alors passer d’un plan de glissement à
l’autre et la montée des dislocations coins (« Climb » en anglais), la dislocation se déplace alors
perpendiculairement au plan de glissement pour franchir un obstacle : ces mouvements sont
reliés à la présence de défauts ponctuels dans le cristal et donc à l’écart de stœchiométrie. Ces
mécanismes permettent aux dislocations de sortir de leur plan de glissement et donc de
s’arranger en trois dimensions dans la maille du cristal.
Rudolph [Rudolph, 2005] décrit notamment que l’arrangement des dislocations, lors de la
relaxation du cristal après l’application de contraintes internes ou externes, se fait sous la forme
de cellules par polygonisation dans le CdTe Vertical Bridgman. Ces cellules mesurent en
moyenne entre 100 et 200 µm de diamètre comme l’illustre la Figure 38 (d), mais leur taille
diminue avec l’augmentation de la densité de dislocations. Leur paroi est fine, formée par des
murs de dislocations d’une seule colonne de dislocations et à l’intérieur les cellules contiennent
de nombreuses dislocations isolées. Les dislocations qui forment ces sous-joints sont toutes
parallèles entre elles et possèdent le même vecteur de Burgers pour la plupart. La formation des
cellules est donc une combinaison de glissements, glissements déviés et montées des
dislocations. Ces arrangements de dislocations peuvent être observés dans d’autres cristaux de
structures cristallographiques similaires comme nous pouvons le remarquer sur la Figure 38.
Par exemple, dans le cas du GaAs les parois des cellules sont larges et floues, formées de
plusieurs dislocations emmêlées entre elles comme sur la Figure 38 (c).
58
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
Figure 38. Arrangement des dislocations formées dans un cristal : (a) Mo 12% déformé à 493 K, (b) Cu-Mn déformé à
68.2 MPa, (c) GaAs (technique de croissance LEC), (d) CdTe (technique de croissance Vertical Bridgman (VB)), (e)
PbTe (technique de croissance VB), (f) SiC technique de croissance sublimation, (g) Cd 0.96 Zn 0.04 Te (technique de
croissance VB), (h) NaCl déformé par une contrainte de 150 MPa, (i) CaF 2 (technique de croissance Czochralski)
[Rudolph, 2005].
La partie suivante est une synthèse des publications écrites par Peter Rudolph, étayée par sa
présentation et des échanges d’informations lors de sa venue à Grenoble en novembre 2012
dans le cadre de la thèse [Hurle, 2004], [Rudolph, 2003], [Rudolph, 2005], [Rudolph, 2007],
[Rudolph, 2010], [Rudolph, 2012].
Théoriquement, une contrainte très élevée est nécessaire pour la génération de dislocations
dans un cristal parfait : entre 10-2 G et 10-1 G, où G, le module de cisaillement, est compris entre
10 et 50 GPa pour le CdTe. Une contrainte bien plus faible est requise pour le mouvement et la
multiplication des dislocations : 0.2 MPa pour le CdTe. Cependant la génération de dislocations
peut avoir lieu :
- par condensation de défauts ponctuels intrinsèques (lacunes et défauts interstitiels),
- sur une inclusion ou un précipité,
- à la surface du cristal en cas de fortes contraintes locales.
Quelque soit la technique de croissance utilisée, la densité et l’arrangement des dislocations sont
principalement déterminés par la relaxation thermoplastique d’une contrainte induite
59
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
Figure 39. Divergence de la courbure de l’isotherme par rapport à une dépendance linéaire idéale (la FTB « Free
Temperature Bending ») [Rudolph, 2010].
60
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
Figure 40. Réseau de dislocations révélées à la surface d’un monocristal de (Hg,Cd)Te et observé au microscope
[Rudolph, 2012].
Nous pouvons observer que les dislocations, révélées chimiquement, sont arrangées en murs. De
plus, ces sous-joints de grains semblent se propager dans des directions privilégiées car un
certain nombre de murs sont parallèles entre eux. D’autre part la densité de dislocations n’est
pas uniforme sur l’ensemble du wafer. Cette différence de répartition en fonction de la position
sur le wafer a été modélisée comme présenté sur la Figure 41.
(a) (b)
Figure 41. (a) Distribution radiale des contraintes dans un lingot au cours de la croissance. (b) Distribution radiale
des densités de dislocations [Rudolph, 2012].
2.4. Conclusion
61
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
échantillons à étudier (THM). Cette méthode, employée par Acrorad, permet d’obtenir des
échantillons épais, monocristallins, certifiés non maclés.
Nous avons également introduit les dislocations dans les cristaux en général puis de manière
plus approfondie dans les cristaux de CdTe. Ces défauts étendus semblent être les défauts
limitant les performances des détecteurs de rayons X développés pour des applications
médicales.
Nous avons essayé de présenter de manière simple l’origine des dislocations lors de la
croissance des cristaux et leur dynamique dans le matériau CdTe. Nous voulons en effet mieux
comprendre leur répartition dans nos échantillons et l’influence de leur arrangement sur les
comportements des détecteurs de rayons X. Dans ce but, nous avons également fait une étude
bibliographique sur les effets électriques des dislocations dans les semi-conducteurs. Celle-ci
nous permettra de mettre en place, dans les chapitres suivants, un modèle permettant
d’expliquer l’influence des dislocations sur le transport des porteurs de charges dans nos
capteurs.
Nous verrons au chapitre suivant les méthodes de caractérisation pour déterminer la répartition
spatiale en surface et dans le volume de ces défauts.
62
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
2.5. Références
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63
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64
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
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65
CHAPITRE 2 LE CdTe monocristallin et les dislocations dans ce matériau
66
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
Chapitre 3. Méthodes de
caractérisation pertinentes pour le
système de détection
67
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
Pour comprendre les phénomènes limitant les performances des détecteurs à base de CdTe:Cl,
et pour expliquer les non-uniformités de leurs réponses, il est nécessaire de caractériser
finement les défauts du matériau.
Dans ce but, nous avons choisi des techniques de caractérisation adaptées pour le CdTe :Cl et
privilégions les méthodes permettant de faire des cartographies afin de les corréler aux
cartographies de courant de fuite et de photocourant présentées à la partie : 1.2.2.
Dans un premier temps, nous présentons les techniques de caractérisation des défauts cristallins
susceptibles d’être à l’origine de la baisse des performances des détecteurs de rayons X : les
dislocations et les inclusions de tellure.
Nous décrivons ensuite des techniques de spectroscopie optique permettant de déterminer les
spectres de niveaux pièges superficiels dans le gap. Nous énumèrerons les principaux types de
recombinaisons radiatives susceptibles d’apparaître dans les spectres de cathodoluminescence
et de photoluminescence du CdTe :Cl et nous présenterons les méthodes pour indexer les raies
de ces spectres.
Nous présenterons l’étude de la technique du courant induit par un faisceau d’ions qui permet
d’évaluer les propriétés de transport des porteurs électrons et trous.
Nous terminons par les méthodes de caractérisation de la chimie de surface du CdTe.
Nous verrons dans cette première partie comment observer et caractériser les inclusions de
tellure et les dislocations à la surface et dans le volume du CdTe.
L’attaque chimique est une des méthodes de révélation des dislocations. En effet, l’énergie de
contrainte autour de la dislocation entraine une vitesse de gravure des atomes plus rapide au
point d’émergence de la dislocation à la surface libre du CdTe par rapport à une zone où le cristal
est parfait. La forme de la gravure, appelée « etch pit », est corrélée à l’orientation du cristal
comme nous le verrons dans cette partie. Ces « etch pits » permettent de repérer les dislocations
sortantes à la surface d’un cristal. La mise en évidence d’une dislocation individuelle a été
68
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
réalisée pour la première fois par F.L. Vogel sur du germanium en 1953 [Vogel, 1953], puis par
parallèles aux directions <110> du cristal.
(ACD) comme indiqué sur la Figure 42. Les côtés des « etch pit » triangulaires sont donc
cristal étudié est <111>, le plan {111} coupe donc le tétraèdre de la maille cristalline par leplan
Dans notre cas, la forme des « etch pits » est une pyramide triangulaire car l’orientation du
- l’énergie élastique de la dislocation.
- la position de la dislocation par rapport à la surface,
- les changements de composition chimique autour de la dislocation et dans la maille,
- la composition de la solution d’attaque chimique,
- l’orientation cristallographique et la polarité de la surface,
La morphologie de la figure d’attaque est influencée par plusieurs paramètres[Inoue, 1962]:
- La solution Nakagawa
Une étude bibliographique a été menée dans le but de trouver les solutions appropriées pour le
tellurure de cadmium. Deux mélanges sont particulièrement intéressants pour des échantillons
d’orientation principale <111> : la solution Everson et la solution Nakagawa. La correspondance
exacte entre un « etch pit » créé par une de ces deux solutions et une dislocation sortante au
niveau de la surface gravée a été mise en évidence pour les cristaux de Cd(Zn)Te en 1995 par
Everson [Everson, 95].
- La solution « Everson »
69
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
Figure 42. Schéma des configurations des « etch pits » en fonction de l’orientation du plan attaqué chimiquement
[Inoue, 1962].
70
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
six types d’« etch pits », présentés sur la Figure 43, révélés grâce à la solution Everson sur la face
tellure d’un cristal de CdZnTe. Les différentes configurations des figures d’attaque
correspondent à des orientations différentes des dislocations dans le volume du cristal comme
nous le verrons au chapitre 4.
Figure 43. Image MEB de six « etch pits » révélés sur la face tellure [Cui, 2011].
Principe de la mesure
équation 4. 2d h k l sinθ=λ.
Dans cette loi, (hkl) est l’indice du plan diffractant dans la direction θ, d hkl est la distance entre
deux plans diffractants, et λ est la longueur d’onde du faisceau incident.
Chaque longueur d’onde va rencontrer la famille de plans qui lui correspond pour diffracter dans
différentes directions : ainsi plusieurs taches de diffraction apparaissent, elles sont appelées
topographes ou spots de Laue. Des changements locaux dans l’orientation et la taille de la maille
cristalline donnent lieu à des différences locales de direction de diffraction du faisceau et donc à
des différences d’intensité sur les taches [Raghothamachar, 2006]. La Figure 44 présente un
schéma du dispositif expérimental mis en place pour réaliser une topographie avec un faisceau
blanc synchrotron.
71
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
Figure 44. Schéma du dispositif expérimental à mettre en place pour réaliser une topographie avec un faisceau blanc
synchrotron. Pour un cristal parfait, les topographes sont de la même taille que le faisceau incident [Egan ,2012].
Nous avons vu à la partie 2.3.4 que les dislocations sont créées au cours de la croissance du
cristal pour relâcher les contraintes thermomécaniques. Cependant, à la fin de la croissance, ces
défauts restent présents dans le cristal ; ainsi, à faible distance autour des dislocations ou des
sous-joints de grains, la maille cristalline est légèrement désorientée.
Le faisceau de rayons X est alors diffracté selon la théorie cinématique. Cette théorie est celle du
cristal idéalement imparfait : dans les régions déformées, les rayons X rencontrent rarement les
conditions de Bragg pour diffracter, ainsi l’intensité du flux de photons qui arrive sur le film
radiographique est grande. Au contraire, les régions du cristal sans défaut diffractent selon la
théorie dynamique (cristal idéalement parfait) : les rayons X rencontrent souvent les conditions
de Bragg pour diffracter, le nombre de photons sur le film radiographique est donc plus faible
[Palosz, 1997].
Un autre phénomène physique peut entrer en jeu dans le contraste obtenu pour ces défauts
étendus dans une topographie. En effet, les sous-joints de grain, entraînant une désorientation
de la maille, peuvent apparaître en blanc sur l’acquisition du fait que le faisceau est diffracté loin
du capteur [Egan, 2012].
Ces différences de comportement entre le cristal parfait et déformé rendent visibles les champs
de contraintes associés aux dislocations uniques et aux murs de dislocations (ou sous-joints de
grain) : soit dans le volume du cristal quand la technique est utilisée en mode transmission, soit
à la surface de l’échantillon quand la topographie est réalisée en réflexion (le faisceau pénètre
alors sur quelques dizaines de micromètres [Marchini, 2010]). Cette technique est donc
couramment utilisée par les laboratoires travaillant sur la caractérisation de ce type de défauts.
La Figure 45 permet d’illustrer différents contrastes possibles pour les images des sous-joints de
grain présents dans les cristaux de Cd(Zn)Te sur une topographie. Les trois types d’images ont
72
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
été réalisés grâce à un faisceau blanc synchrotron. Sur la Figure 45 (a), réalisée au laboratoire
national de Brookhaven, des fissures et des murs de dislocations sont visibles [Bolotnikov,
2009]. Sur la Figure 45 (b), la lettre G désigne l’emplacement des grains d’orientations
cristallographiques différentes dont la condition de diffraction se situe ailleurs que sur le plan
du film, H indique la présence de sous-joints de grains [Marchini, 2010]. La Figure 45 (c)
permet d’observer la répartition des défauts et distorsions à la surface du cristal (1ère image),
tandis que la topographie en transmission permet de voir comment ces défauts se propagent
dans le volume du substrat (2ème image) [Carini, 2006].
Figure 45. (a) Topographie aux énergies comprises entre 4 et 50keV d’un échantillon de CdZnTe(VB) de 2 mm
d’épaisseur (croissance: low pressure Bridgman technique) [Egan ,2012]. (b) Topographie en transmission à haute
énergie (≥50 keV) d’un échantillon de Cd 1-x Zn x Te (produit avec la technique de croissance MTPVT: Multi-Tube
Physical Vapour Transport) [Marchini, 2010]. (c)Topographies réalisées sur du CZT de 1mm d’épaisseur, la
première image est en réflexion (énergie comprise entre 6 et 50 keV), la deuxième en transmission (énergie
comprise entre 50 et 200 keV) [Carini, 2006].
73
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
Les inclusions de tellure piègent les porteurs de charges. Il est donc important de pouvoir les
observer et les compter afin de déterminer la qualité d’un échantillon avant hybridation sur un
circuit de lecture.
L’imagerie infrarouge est une technique efficace pour détecter ces défauts. Ils sont effectivement
opaques à ces longueurs d’onde, tandis que le CdTe est transparent aux longueurs d’onde au
dessus de 850 nm grâce à son gap de 1.47 eV à température ambiante. Les inclusions sont de
taille micrométrique et sont donc facilement observables, par opposition aux précipités
invisibles en microcopie optique car de taille nanométrique.
Une étude sur la caractérisation des inclusions de tellure dans du CdTe (THM), produit par
Eurorad, a montré une répartition uniforme dans le volume, comme le montre la Figure 46 (a)
[Raulo, 2011]. Nous pouvons faire la même observation pour le CdTe(THM) produit par
Acrorad sur la Figure 46 (b), bien que ce ne soit pas souligné dans la publication [Shiraki,
2009].
(a) (b)
Figure 46. (a) Image en transmission infrarouge de wafer de CdTe (THM) Eurorad [Raulo, 2011] (b) Image de la
répartition des inclusions de tellure dans un cristal de CdTe (THM) Acrorad de 100 mm de diamètre [Shiraki, 2009].
Plusieurs techniques sont utilisées pour l’étude des niveaux pièges dans le gap du CdTe : la
spectroscopie transitoire des niveaux profonds (DLTS), l’étude du courant transitoire photo-
induit dans le cristal (PICTS), l’étude du courant limité par la charge d’espace (SCLC), ou encore
les mesures de spectroscopie optique de photoluminescence et de cathodoluminescence.
La DLTS (Deep Level Transient Spectroscopy), qui permet notamment l’identification des
énergies d’activation des niveaux profonds dans le gap [Gul, 2011]. La PICTS (Photo-Induced
Current Transient Spectroscopy) est l’étude du courant transitoire photo-induit dans le cristal.
Elle permet de calculer les énergies d’activation, les sections efficaces, et d’accéder aux
74
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
paramètres des niveaux profonds en énergie dans les matériaux de haute résistivité [Castaldini,
1996]. Tandis que la SCLC (Space Charge Limited Current) est une méthode appropriée au
milieu de la bande interdite c'est-à-dire aux énergies comprises entre 0.1 et 0.7 eV [Ayoub,
2002].
Nous avons donc choisi d’effectuer des mesures de cathodoluminescence sur nos échantillons de
CdTe, afin d’étudier les propriétés de luminescence des dislocations grâce à la réalisation de
cartographies résolues spatialement. Puis avec des mesures de photoluminescence, plus résolue
en énergie, nous identifierons précisément les niveaux énergétiques présents dans le gap du
semi-conducteur.
Nous présentons dans cette partie le principe de la spectroscopie à basse température, les
différents processus de recombinaisons radiatives possibles, et l’indexation des raies sur un
spectre de luminescence.
L’échantillon est refroidi avec de l’azote ou de l’hélium liquide. Il est ensuite excité par un
faisceau de photons d’énergie supérieure au gap du semi-conducteur ou avec un faisceau
d’électrons. Une partie du faisceau est réfléchie sur la surface, tandis que l’autre partie est
absorbée. L’énergie absorbée permet le passage des électrons de la bande de valence vers la
bande de conduction et les porteurs les moins énergétiques atteignent des niveaux pièges situés
dans le gap. Il se forme alors une paire électron-trou formée d’un électron excité et d’un trou
laissé par cet électron dans la bande de valence. En se désexcitant, ils se recombinent en
émettant des photons de longueurs d’ondes caractéristiques des niveaux énergétiques
superficiels, si la recombinaison est radiative.
Le spectre d’émission des transitions radiatives est enregistré et son analyse permet d’identifier
les niveaux d’énergie correspondants à des impuretés ou des défauts présents dans le semi-
conducteur. En effet, la position d’une raie d’émission dans le spectre obtenu est caractéristique
d’un niveau piège. L’intensité du pic est quant à elle reliée à la concentration du défaut
correspondant.
L’étude se fait généralement à basse température (4 à 77 K) pour geler les porteurs car, à
température ambiante, les défauts sont majoritairement ionisés et ne peuvent pas donner lieu à
un spectre.
75
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
Figure 47. Micrographie de cathodoluminescence réalisé à 72 K avec dislocations de type cadmium et de type tellure
[Schreiber, 1999].
Cette technique permet donc d’étudier la répartition spatiale des défauts et d’accéder au spectre
des niveaux pièges correspondant à l’image obtenue.
Pour cette technique, l’échantillon est éclairé avec un faisceau monochromatique de photons. La
76
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
Au dessus de 1.56 eV [Consonni, 1, 2009], ont lieu les transitions de type excitonique
présentées sur le schéma de la Figure 48.
Lorsqu’un photon d’énergie supérieure à l’énergie du gap est absorbé, il transmet son énergie à
un électron présent dans la bande de valence et lui permet de passer dans la bande de
conduction. L’électron laisse un état vacant dans la bande de valence assimilé à un trou et sa
charge électrique négative est en interaction coulombienne attractive avec le trou. Cet état lié,
appelé exciton, noté X, possède une énergie légèrement inférieure à l’énergie du gap tel que
E X = E gap - E liaison . E liaison est l’énergie de liaison de l’exciton, elle vaut 10.6 meV dans le cas du
CdTe [Johnson, 1967].
L’exciton peut se lier à une impureté donneuse, il y a alors apparition d’une transition notée
(D0 X) (cf. Figure 48). Si il est lié à une impureté acceptrice, la transition est notée (A0 X)
(cf. Figure 48). Son énergie sera alors inférieure à celle de l’exciton libre, E X = E gap - E liaison - E loc
où E loc est l’énergie de localisation de l’exciton sur l’impureté.
En dessous de 1.56 eV [Consonni, 1, 2009], les transitions notées (e A0) et (D0 h) se font entre
un électron libre de la bande de conduction et un niveau accepteur ou entre un trou libre de la
bande de valence et un niveau donneur du gap.
Il existe également des transitions entre un électron d’un niveau donneur et un trou issu d’un
niveau accepteur du gap, appelées recombinaisons de paires et notées DAP.
77
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
Une méthode basique pour indexer les raies d’un spectre de photoluminescence est l’étude de la
position en énergie et de la forme de chaque pic. En effet, la position en énergie des raies est
caractéristique d’un défaut. De plus, une raie fine peut être associée à une recombinaison de
nature excitonique et une raie plus large est associée à des transitions du type DAP ou (e A0) et
(D0 h).
D’autre part, l’ensemble des recombinaisons radiatives décrites précédemment sont en général
suivies par des répliques phonons. Elles proviennent du fait que l’énergie de recombinaison est
en partie transmise au cristal. Les raies de luminescence observées sont alors plus faibles en
énergie, la kième réplique possède une énergie abaissée de k fois l’énergie du phonon. Dans le
CdTe dopé au chlore, l’énergie du phonon est de 21.5 meV [Kunz, 1998].
Figure 49. Spectre de photoluminescence typique du CdTe monocristallin dopé au chlore [Kunz, 1998].
De plus, le spectre de photoluminescence du CdTe :Cl monocristallin est souvent dominé par les
recombinaisons radiatives du centre A impliquant le complexe (V Cd -Cl Te ). Ce centre A contribue
à la fois aux recombinaisons radiatives entre le complexe et l’exciton, notées (A0 X) γ et situées à
78
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
1.586 eV, et aux transitions donneur-accepteur DAP γ dont la raie principale est située à 1.478 eV
[Hofmann, 1992]. Les recombinaisons de paires sont clairement identifiables sur le spectre de
la Figure 49 : la raie principal est notée ZPL pour « Zero phonon Line » et elle est suivie de
plusieurs répliques phonon.
Au vue du dopage au chlore, décrit dans la partie 2.1.3, les défauts et les complexes susceptibles
d’être rencontrés dans notre matériau et leurs niveaux énergétiques associés sont résumés dans
le Tableau 3.
Défaut impliqué
Niveaux énergétiques (eV) Types de transitions Références
dans la transition
1.596 Exciton libre X [Consonni, 2006]
1.593 (Cl Te X) (D0 X) [Consonni, 2007]
1.592 (Cl Te X) (D0 X) α [Shin, 1998]
1.590/1.591 (V Cd -2Cl Te ) (A0 X) β [Shin, 1998]
1.586 (V Cd -Cl Te ) (A0 X) γ [Shin, 1998]
1.557 (V Cd -2Cl Te ) (e A0) β [Consonni, 2006]
1.552 (V Cd -2Cl Te ) DAP β [Consonni, 2006]
1.478 (V Cd -Cl Te ) DAP γ [Hofmann, 1992]
1.474 Dislocations Y luminescence [Babentsov, 2010]
L’influence des dislocations sur les spectres de luminescence dans le CdTe a été largement
étudiée ces dernières années. En effet, la génération et le mouvement des dislocations induisent
des changements importants dans le spectre de recombinaisons radiatives en
photoluminescence.
Toutes les mesures présentées ci-dessous sont faites après indentation (induction de
dislocations par contrainte dans un échantillon) du CdTe et jamais sur des dislocations natives.
Notamment, Guergouri et al. [Guergouri, 2000] ont mis évidence sur les spectres de
luminescence, après indentation sur les faces Te et Cd : a) un décalage en énergie du pic
excitonique vers les hautes énergies d’environ 1 meV ; b) une diminution de l’intensité de la
transition D°X ; c) l’apparition de nouvelles transitions de faible intensité et d’un pic de plus
forte intensité à 1.563 eV ; d) l’apparition d’une transition à 1.474 eV.
D’autre part, Tarbaev et al. [Tarbaev, 2006] ont montré l’apparition de deux bandes de
luminescence après indentation. La première, possédant une réplique phonon principale à
841 nm (1.480 eV), correspond aux niveaux énergétiques des dislocations Te(g) de type 60°. La
79
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
deuxième, centrée à 806 nm (1.538 eV), correspond aux niveaux énergétiques des dislocations
Cd(g).
Babentsov et al. ont également étudié l’apparition d’une bande comprise entre 1.474 et 1.476 eV,
appelée bande Y, après induction de dislocations par indentation d’un échantillon de CdTe
[Babentsov, 1987].
Ils notent également l’apparition de 6 pics fins entre 1.46 et 1.54 eV [Babentsov, 2010]. La
formation de dislocations et leur mouvement semblent augmenter l’intensité des niveaux
profonds, et diminuer celles des pics excitoniques entre 1.55 et 1.6 eV d’un facteur 10.
L’émission des centres A reste inchangée.
Cette méthode d’indexation utilise le modèle développé par Schmidt et al. [Schmidt, 1992] : les
variations de l’intensité maximale des raies de photoluminescence, I PL , avec la puissance
d’excitation du faisceau laser, L, suivent la loi donnée dans l’équation 5.
équation 5. I PL = Lk
Tableau 4. Les valeurs de k pour les raies de luminescence du CdTe ont été obtenues par ajustement des variations de
l’intensité des pics en fonction de la puissance avec la loi de l’équation 5.
80
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
L’étude de l’intensité des répliques phonons associées à une raie permet d’étudier le couplage du
défaut mis en jeu avec le réseau cristallin. L’intensité du couplage peut être quantifiée par la
constante de Huang-Rhys, notée S, qui représente l’interaction entre le phonon optique et le
porteur de charge lié à l’impureté. Expérimentalement les intensités de la raie principale, I 0 , et
des répliques suivent une distribution de Poisson, telle que la nième réplique possède une
intensité I PL (n) donnée par l’équation 6.
équation 6. I PL (n) = I 0 ×
81
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
avoir une plus grande probabilité d’interaction avec les électrons du cortègeatomique. A chaque
atome, l’interaction de Rutherford a une faible probabilité d’intervenir. Les protons vont donc
noyaux de la matière. La dimension d’un noyau étant d’environ 10-15 m contre 10-10 m pour un
coulombienne. La diffusion Rutherford est la répulsion électrostatique des protons par les
principaux modes d’interaction avec la matière : la diffusion Rutherford et la diffusion
L’échantillon est irradié avec un faisceau de protons de 4 MeV. Ces particules massives ont deux
82
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
interaction, une petite partie de l’énergie cinétique perdue par les protons est transférée aux
électrons qui laissent l’atome dans un état excité. Lors de la désexcitation de la matière, des
photons de fluorescence sont émis : si suffisamment d’énergie est transféré à un électron, ce
dernier quitte le cortège électronique de l’atome et forme une paire électron-ion.
Le profil des interactions des protons peut être déterminé dans le CdTe grâce à une simulation
Monte-Carlo proposée par le logiciel SRIM [Biersack, 80]. Grâce à ce programme, nous pouvons
notamment accéder à l’énergie déposée par unité de longueur par les protons. Le résultat de la
simulation réalisée avec un million de protons de 4 MeV est présenté Figure 51.
Le graphique montre que la particule dépose son énergie tout au long de son parcours (ici sur
100 µm) jusqu’à ce qu’elle n’en ait plus assez pour continuer à avancer : elle s’arrête et dépose le
reste de son énergie (pic de Bragg). Chaque proton génère donc des paires électrons-trous sur
tout le trajet. Le nombre total de paires créées par un proton de 4 MeV correspond au rapport
entre son énergie et l’énergie de création de paire du CdTe, ce qui représente 9×105 paires
électrons-trous.
Dans le cadre de la mesure IBIC, nous nous intéressons au nuage de charges créé par un seul
proton à la fois. Les charges migrent sous l’influence du champ électrique E, considéré comme
constant, appliqué aux bornes de l’échantillon et induisent un courant dont l’expression est
donnée par l’équation 1.
83
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
Soit N le nombre de charges créées, soit n(t) et p(t) respectivement les nombres instantanés
d’électrons et de trous présents dans le cristal, n(t) = N.exp(-t/τ e ) et p(t) = N.exp(-t/τ p ) en
=
84
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
en irradiant le détecteur par l’anode, nous ne considèrerons que le courant induit par les trous,
ce qui permettra de déterminer les propriétés de transport des trous.
La composition chimique d’une surface peut être investiguée par spectrométrie de masse des
ions secondaires (SIMS) à temps de vol (ToF-SIMS) [Consonni, 2007], par l’analyse dispersive
en énergie (EDX) [Bliss, 2007]. L’EDX est souvent utilisée pour la caractérisation des éléments
lourds car les éléments légers, comme le chlore, vont émettre des photons de faible énergie qui
sont absorbés par les autres atomes et la fenêtre en béryllium qui protège le détecteur.
Finalement, nous privilégions l’analyse par ToF-SIMS pour notre étude car elle permet de
réaliser des cartographies et des déterminations simultanées de concentrations de plusieurs
dopants.
Cette analyse est réalisée grâce aux ions secondaires éjectés lors du bombardement de
l’échantillon par un faisceau d’ions primaires. C’est une méthode d’analyse destructive.
La surface de l’échantillon à analyser est bombardée par un faisceau d’ions primaires de
quelques dizaines de kilo-électronvolt. Ce bombardement entraine la pulvérisation ionique de la
surface et donc l’émission d’ions secondaires. Ces ions sont ensuite collectés par un
spectromètre de masse qui les filtre en fonction du rapport entre leur masse moléculaire et leur
charge.
Le choix de la nature chimique des ions du faisceau incident dépend de l’espèce dont nous
voulons suivre l’évolution : le césium améliore le rendement en ions négatifs (Te- majoritaire
dans le cas du CdTe), tandis que l’oxygène permet de suivre le profil des espèces qui donnent
naturellement des ions positifs (Cd+ majoritaire dans le cas du CdTe).
La mesure du temps de vol de ces ions permet de séparer des ions secondaires d’énergie
identique. En effet, des ions de masses moléculaires différentes se déplacent à des vitesses
différentes.
85
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
Cette méthode a notamment été utilisée par Consonni [Consonni, 2007] dans le but d’analyser
la répartition des atomes de chlore autour des joints de grains d’un cristal de CdTe:Cl
polycristallin. Cette expérience a mis en évidence la ségrégation des atomes de chlore autour des
joints comme nous pouvons l’observer sur la Figure 52. Le profil du signal du chlore est 4 fois
plus élevé au niveau d’un joint que par rapport à l’intérieur du joint [Consonni, 2009].
Figure 52. Signal chlore acquis en ToF-SIMS sur une couche épaisse de CdTe:Cl polycristallin. Les dimensions de
l’image sont de 45×45 µm² [Consonni, 2009].
86
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
3.5. Conclusion
Dans ce chapitre, nous avons présenté les techniques de caractérisation que nous appliquerons
sur nos échantillons de CdTe:Cl. Le but de ces expériences est de mieux comprendre les
phénomènes limitant les performances des détecteurs de rayons X développés au laboratoire.
Nous avons choisi de privilégier dans le cadre de ces travaux des techniques permettant de
réaliser des cartographies de nos échantillons. Les résultats obtenus seront ainsi comparables
aux défauts de fonctionnement décrits au chapitre 1.
Grâce aux méthodes décrites dans ce chapitre, nous déterminerons la répartition spatiale des
dislocations et des inclusions de tellure, tant en surface qu’en volume des cristaux.
Les méthodes d’attaques chimiques et de topographie sont complémentaires. Les « etch pits »
permettent d’observer la répartition des dislocations uniques et des sous-joints de grain à la
surface d’un cristal, tandis que la topographie permet de voir l’étendue des murs de dislocations
dans le volume du cristal et leur champ de contrainte associé. Les analyses MEB nous
permettront d’étudier la morphologie des « etch pits » obtenus par attaque chimique.
Les cartographies de la répartition des défauts cristallins seront ensuite comparées aux
inhomogénéités de courant de fuite et de photocourant des détecteurs.
Nous réaliserons des analyses IBIC afin d’étudier les effets des défauts cristallins sur les
propriétés de transport des porteurs de charges. Ces propriétés sont effectivement des
caractéristiques importantes qui témoignent de la qualité du détecteur. De plus, des
cartographies d’induction de charges permettront de faire le lien entre le piégeage des électrons,
des trous, et la distribution des défauts.
Nous analyserons également la répartition des atomes de chlore par analyse de la chimie de
surface en ToF-SIMS. En effet, nous avons vu au chapitre 2 que le sous-joint de grain est un cas
particulier du joint de grain, nous voulons donc étudier si leur effet sur la ségrégation du chlore
est similaire.
Nous réaliserons des spectres, résolus spatialement, des niveaux présents dans le gap par
cathodoluminescence dans des zones avec dislocations, et sans dislocations, et par
photoluminescence pour obtenir des spectres plus résolus en énergie. Ces mesures permettront
de déterminer les niveaux énergétiques éventuellement associés à ces défauts dans nos
échantillons.
87
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
3.6. Références
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CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
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90
CHAPITRE 3 METHODES de caractérisation pertinentes pour le système de détection
91
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
4.4.1. Répartition des dislocations dans des cristaux produits en THM par différents
fournisseurs .................................................................................................................................................................... 119
4.4.2. Répartition des dislocations dans des cristaux produits à haute température ............. 120
4.5. CONCLUSION ..................................................................................................................................................123
4.6. REFERENCES ..................................................................................................................................................125
92
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
Ce chapitre a pour objectif de mieux comprendre quels sont les défauts cristallins pouvant être à
l’origine des inhomogénéités de courant de fuite et de photocourant, présentées à la Figure 14
(au chapitre 1), dans nos détecteurs de rayons X. Pour cela, nous avons étudié la répartition des
inclusions de tellure et des dislocations dans les cristaux composant nos prototypes.
Dans les trois premières parties, nous présentons la répartition des dislocations, des sous-joints
de grains et des inclusions en surface et dans le volume de cristaux de CdTe :Cl (THM) produits
par Acrorad. La répartition des dislocations en surface est obtenue par attaques chimiques
Everson et Nakagawa. La propagation de ces défauts dans le volume des cristaux est investiguée
par topographies réalisées en faisceau blanc, et par attaques chimiques et polissages successifs.
Nous exposerons notamment les résultats obtenus pour l’échantillon I1, dont nous avons
présenté les performances de fonctionnement au chapitre 1.
D’autre part, pour d’approfondir les spécificités et les originalités des cristaux de Cd(Zn)Te, nous
avons réalisé des attaques chimiques sur des échantillons de CdTe et de CdZnTe produits par
d’autres techniques de croissance et par d’autres fournisseurs. Nous avons également comparé
la répartition des murs de dislocations entre différents échantillons issus de la méthode THM,
mais produits par différents fournisseurs.
Nous expliquons l’ensemble des résultats observés dans ce chapitre grâce aux propriétés
dynamiques, de formation et de propagation des dislocations exposées au chapitre 2.
Les connaissances cristallographiques acquises grâce à nos observations nous permettront, dans
les chapitres suivants, d’identifier les défauts à l’origine des inhomogénéités de fonctionnement
de nos capteurs et de mettre en place un modèle sur le principe de fonctionnement des défauts
étendus dans le CdTe.
Nous avons introduit au chapitre 3 l’attaque chimique comme étant une technique efficace de
révélation d’une dislocation unique sortante à la surface du cristal gravé. Nous présentons dans
cette partie les gravures obtenues sur nos échantillons de CdTe:Cl produits par le fournisseur
Acrorad et dont la méthode de croissance est : « travelling heater method » décrite au chapitre 2.
L’analyse est approfondie sur l’échantillon I1 et les résultats obtenus sur d’autres cristaux sont
ensuite brièvement exposés.
93
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
L’échantillon I1 est attaqué par une solution Everson décrite dans la section 3.1.1.1. Cette
technique étant utilisée par un autre laboratoire au CEA, le protocole expérimental est mis en
place et le temps d’attaque optimal de 2 min 30 s est bien établi. Les dislocations sortantes sont
ainsi révélées par la présence de figures d’attaque sur la surface tellure du cristal. Nous avons
étudié leur répartition par microscopie électronique à balayage et par microscopie optique.
Nous avons étudié en détails les figures d’attaque révélées sur la face tellure de nos échantillons
de CdTe :Cl, grâce à un microscope électronique à balayage (en mode électrons secondaires,
comme vu au chapitre 3). La Figure 53 ci-dessous présente une image et un agrandissement que
nous avons acquis pendant l’expérience.
Figure 53. Observation de la figure d’attaque obtenue avec la solution Everson sur la face tellure avec un microscope
électronique à balayage.
Nous observons que les figures d’attaque ont des formes régulières pyramidales en adéquation
avec l’orientation <111> de ces cristaux de structure zinc blende comme nous le présentions sur
la Figure 42 au chapitre 3. Les côtés des pyramides et leur centre, que nous appellerons pointe,
sont clairement visibles.
D’après Cui [Cui, 2011], il existe quatre sortes d’etch pit différentes pouvant être révélées par la
solution Everson sur la face tellure (111) du CdZnTe :
1/ des figures d’attaque en forme de pyramides triangulaires régulières,
2/ des figures d’attaque de forme triangulaire avec une extrémité plate,
3/ des figures d’attaque en forme de pyramides triangulaires irrégulières,
4/ des figures d’attaque en forme de comète.
Ces différentes formes, à l’exception de celle triangulaire avec une extrémité plate, sont issues de
dislocations dans le matériau. De plus, selon Cui [Cui, 2011], il existe cinq types différents d’etch
pit en forme de pyramide triangulaire correspondant à des directions de propagation différentes
94
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
des dislocations comme le montre la Figure 54. L’angle Φ de la ligne de dislocation avec la
normale est déterminé par la relation tan(Φ)=a/d, où a est la distance entre le centre de la figure
d’attaque et le centre d’une pyramide parfaite et d est la profondeur du « etch pit » [Amelinckx,
1956].
Figure 54. Schémas présentant la relation entre la forme d’un « etch pit » et l’orientation de la ligne de dislocation :
(a) les dislocations sont parallèles et perpendiculaires à la surface, (b) les dislocations sont parallèles et obliques
par rapport à la surface, (c) les dislocations forment un réseau hexagonal [Amelinckx, 1956].
Dans nos échantillons, nous avons observé trois des quatre formes listées ci-dessus, la première
et la deuxième, sont présentées sur la Figure 55 (a), la troisième est présentée sur la Figure 55
(b). D’autre part, nous avons observé une cinquième forme, non-décrite à notre connaissance
dans la littérature, et présentée sur la Figure 55 (c). Pour cette dernière figure, l’attaque
chimique semble s’être faite en deux temps : elle aurait commencé dès le début du bain
chimique, puis elle se serait arrêtée pour reprendre quelques secondes plus tard. Nous pensons
qu’elle peut également être associée à une dislocation car la gravure reprend, comme si le défaut
continuait à se propager dans le volume du cristal et dans la même direction, telle qu’au final la
figure est similaire à une pyramide triangulaire irrégulière d’orientation différente que celle de
la Figure 55 (b).
Figure 55. Différentes configurations de « etch pits » révélés par la solution Everson sur la face tellure (111) des
échantillons CdTe :Cl : (a) en forme de pyramide triangulaire régulière en haut, et de forme triangulaire avec une
extrémité plate en bas, (b) en forme de pyramide triangulaire irrégulière, (c) non-décrite à notre connaissance dans
la littérature.
D’autre part, les observations faites au MEB nous amènent à penser que les figures d’attaque de
forme triangulaire avec une extrémité plate peuvent également être associées à des dislocations
dans le matériau. En effet, nous avons observé plusieurs murs de dislocations formés en partie
par cette sorte de « etch pit » comme le montre la Figure 56.
95
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
Figure 56. Images réalisées au MEB d’arrangement en mur de « etch pits » avec une extrémité plate.
La Figure 57 est un bestiaire des différentes orientations des pyramides que nous avons observé
à la surface de nos échantillons. Les différentes positions de leur centre traduisent des directions
d’expansion dans le volume différentes car la trace que laisse la pointe suit la ligne de dislocation
durant l’attaque chimique. Ces « etch pits » sont donc issus de dislocations qui s’étendent dans le
volume du matériau et qui n’ont pas toutes la même orientation. Nous vérifierons ce fait dans les
parties suivantes.
Figure 57. Différentes figures d’attaque (par gravure Everson sur la face tellure) observées au MEB.
96
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
une direction donnée. Ceci n’a pas été réalisé dans le cadre de cette expérience qui consistait au
les deux orientations possibles pour les « etch pits » et la flèche représente la direction <
) pour l’orientation du cristal avec les indices de Miller, les deux triangles représentent
97
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
(a) (b)
Figure 59. (a) Répartitions des « etch pits » sur la surface tellure de l’échantillon I1. (b) Observation des murs de
dislocations sous différents grossissements grâce au microscope Olympus en mode réflexion. Dans l’acquisition avec
le plus fort grossissement une image acquise avec un microscope électronique à balayage est insérée.
D’autre part, la Figure 59 (a) montre que la majorité de ces défauts est arrangée en murs de
dislocations : chaque ligne est en fait une fine paroi formée par une unique colonne de
dislocations alignées les unes à côté des autres. Cette description rejoint celle des sous-joints de
grains dans le CdTe donné par [Rudolph, 2005]. Cet arrangement en mur concorde avec le fait
que la technique utilisée pour la croissance de ce cristal (la méthode THM) est une technique
dite à basse température. Au cours de la croissance du lingot, les dislocations ont donc
seulement accès au mouvement de glissement dans les plans et dans les directions les plus
compactes de la maille cristalline. Elles ne peuvent pas bouger en trois dimensions par
glissements déviés ou montés. D’autre part, les dislocations s’alignent pour former des sous-
joints afin de diminuer l’énergie globale du réseau [Rudolph, 1, 2010].
De plus, nous remarquons que la forme du réseau de dislocations est cohérente avec ce qui est
observé dans la littérature pour les cristaux issus de la technique THM, comme la surface du
wafer de CdHgTe (THM) présentée sur la Figure 40 au chapitre 2. Nous observons dans les deux
cas des longs murs traversants et d’autres plus petits qui coupent les premiers pour former des
sortes de cellules. Pour ces échantillons, les murs peuvent être regroupés en plusieurs groupes
de murs parallèles entre eux et mettant ainsi en évidence des directions privilégiées sur la
surface (111). Néanmoins, ces gravures montrent que les lignes de « etch pits » observées ne
sont ni parfaitement rectilignes, ni seulement alignées dans les trois directions de type [110] du
plan (111).
98
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
En effet, sur la Figure 59 (a), une majorité de dislocations forment des murs traversant toute la
dislocations.
De plus, nous observons des dislocations isolées et uniformément réparties entre les murs de
soient également des directions de glissement privilégiées pour les murs de dislocations.
pas parfaitement rectilignes, et le fait que d’autres directions que les trois les pluscompactes
Nous n’avons pas à ce stade une interprétation claire concernant le fait que les murs ne soient
certains des murs du groupe n°2 forment un angle de 60° avec ce grand mur.
noires) et constituent ainsi une direction privilégiée supplémentaire dans le cristal. De plus,
l’échantillon, trois murs sont parallèles avec ce dernier (ils sont indiqués par trois flèches
traverse le cristal au milieu et dessine un angle de 20° avec le bord gauche. A gauche de
D’autre part, un seul mur est presque parfaitement rectiligneindiqué par une flèche noire : il
99
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
Les observations réalisées avec ce microscope ont également révélé que certains groupements
de « etch pits » forment des étoiles comme sur la Figure 60. En transmission infrarouge, une
inclusion apparait systématiquement au centre de ces amas. C’est probablement une inclusion
de tellure car la croissance du cristal est faite en solvant riche tellure.
Cet arrangement en étoile peut être dû soit au relâchement des contraintes, induites par la
présence de l’inclusion, dans les directions compactes de la maille cristalline, soit à l’arrêt des
dislocations dans leur mouvement au cours de la croissance du cristal car cette inclusion
représente un obstacle à leur glissement.
Figure 60. Observation au microscope de regroupements de dislocations en forme d’étoile en réflexion puis en
transmission infrarouge.
Pour réaliser cette expérience, il a fallu d’abord tester plusieurs temps de gravure de la solution
Nakagawa afin de trouver celui qui donne une figure d’attaque comparable à celle obtenue avec
la solution Everson. Au vu des résultats présentés sur la Figure 61, le temps qui nous semble être
le plus approprié, pour le dosage choisi, est 1 minute car les « etch pits » obtenus mesurent 17
µm de large en moyenne. Après 3 minutes de gravure, les pyramides se chevauchent toutes et
rendent l’interprétation de la répartition des dislocations à la surface de l’échantillon difficile,
tandis qu’après 30 secondes dans la solution elles n’ont pas toutes commencé à apparaître.
Figure 61. Figures d’attaque révélées sur la face cadmium, observées avec un agrandissement d’un facteur 50, après
(a) 30 s dans la solution de gravure, (b) 1 minute, (c) 2 minutes, (d) 3 minutes.
100
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
La Figure 62 (a) est le résultat obtenu après attaque chimique durant une minute de
l’échantillon I1 dans la solution Nakagawa. La taille de la figure d’attaque étant de 17 µm, les
défauts révélés sur cette face sont donc mieux contrastés par rapport à la face tellure, où ils
mesuraient 7 µm. D’autre part, la forme des « etch pits » est différente par rapport aux
pyramides formées par la solution Everson. Ces différentes morphologies peuvent provenir des
changements de polarité entre les deux surfaces attaquées ou de la composition de la solution de
gravure : la solution Nakagawa est peut être moins sélective que la solution Everson.
Nous remarquons que sur la face cadmium les dislocations sont également arrangées en murs
avec des directions privilégiées dans le plan (111). Nous observons aussi des défauts en forme
d’étoile comme celui encadré sur la Figure 62 (a) dont un agrandissement est présenté sur la
Figure 62 (b). L’angle entre deux branches de l’étoile est de 60°. La Figure 62 (c) est un
agrandissement d’un mur de dislocations, nous remarquons que les murs sont beaucoup plus
denses que sur la face tellure ce qui est du au fait que la figure d’attaque est trois fois plus
grande sur la face cadmium.
Figure 62. (a) Dislocations révélées sur la face cadmium par la solution de gravure Nakagawa. En pointillés rouges,
oranges et verts sont indiquées les directions de glissement privilégiées dans le plan {111}. (b) Agrandissement d’un
défaut en forme étoile encadré en noir sur la figure (a). (c) Agrandissement d’un mur de dislocations.
Les directions privilégiées de glissement dans le plan (111) sont données par les six branches de
l’arrangement en étoile comme nous l’avons indiqué en vert, rouge et orange dans l’encadré de
la Figure 62 (a). En effet les directions dans lesquelles se relâchent les contraintes créées par la
présence d’une inclusion correspondent aux directions les plus compactes du plan considéré.
Comme sur la face tellure, de nombreux sous-joints de grains se propagent selon ces trois
directions, et d’autres non et définissent ainsi des directions privilégiées supplémentaires.
101
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
Plusieurs échantillons de tellurure de cadmium produits par Acrorad avec la méthode THM ont
été révélés. La densité de murs de dislocations varie beaucoup d’un échantillon à un autre
comme le montre la Figure 63. Cependant, pour l’ensemble des cristaux que nous avons étudiés,
nous avons observé la présence de murs de dislocations se propageant dans des directions
privilégiées, ainsi que des dislocations isolées uniformément réparties dans le matériau.
1 mm 1 mm
(a) (b)
Figure 63. (a) et (b) Gravures Nakagawa des faces cadmium de deux échantillons de CdTe (THM) produits par
Acrorad.
Dans le but d’étudier la propagation des dislocations dans le volume des cristaux de CdTe:Cl
(THM) d’orientation principale <111>, nous avons effectué des gravures chimiques sur les
échantillons et réalisé des topographies en faisceau blanc au synchrotron de Grenoble.
- Etude de l’échantillon S1
L’étude de la propagation des dislocations dans le volume d’un cristal de CdTe:Cl produit par
Acrorad a été réalisée sur un échantillon, appelé S1, de 1,4 mm d’épaisseur.
Les deux faces, tellure et cadmium, ont été gravées successivement par les solutions Everson et
Nakagawa. Puis l’échantillon a été poli sur 100 µm et révélé à nouveau sur la face tellure avec la
solution Everson. Les différentes figures d’attaques obtenues sont présentées sur la Figure 64.
Pour comparer les résultats, nous avons modifié l’image de la répartition des murs sur la face
cadmium (Figure 64 (a)) par effet miroir.
102
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
1 mm 1 mm
1 mm
(a) (b) (c)
Figure 64. Gravure chimique pour analyse de la propagation des murs de dislocations dans le volume du cristal, (a)
Gravure Nakagawa sur la face cadmium (z = 0 µm). (b) Gravure Everson sur la face tellure après avoir poli la
surface sur 100 µm (z = 1300 µm). (c) Gravure Everson sur la face tellure (z=1400 µm).
Pour cet échantillon Acrorad, nous remarquons également la présence de nombreux sous-joints
de grains formés par des dislocations alignées. De plus, ces sous-joints de grains peuvent être
regroupés en différents groupes de murs parallèles entre eux comme nous l’avons fait dans la
partie 4.1 pour l’échantillon I1. Il existe donc des directions privilégiées dans les plans {111} de
cet échantillon S1.
La répartition de ces sous-joints aux différentes profondeurs est similaire, comme dans le cas de
l’échantillon I1 présenté dans la partie précédente. Cette similitude montre que l’ensemble des
murs de dislocations de ces échantillons de CdTe :Cl (THM) se propagent dans le volume de
l’échantillon.
A notre échelle, il est impossible de suivre le parcours d’une dislocation unique. En effet, il
faudrait pour cela sélectionner un seul « etch pit » dans un mur correspondant à une dislocation
et retrouver aux différentes profondeurs à quelle nouvelle figure de gravure correspondrait la
dislocation sélectionnée. Nous avons donc étudié le mouvement global des murs de dislocations
dans le volume du cristal. Pour cela, nous avons traité les images avec le logiciel de traitement
« ImageJ » [Internet @2]. Nous avons extrait les contours des murs de dislocations sur la face
tellure à la profondeur z = 1300 µm (cf. Figure 64 (b)), puis nous avons superposé cette image
extraite à celle de la Figure 64 (a).
La superposition des deux images est présentée sur la Figure 65. Ce traitement permet d’extraire
des ordres de grandeur du mouvement des murs de dislocations dans le volume du CdTe. Si
nous considérons que la face cadmium correspond à la profondeur z = 0 µm, alors les traits
rouges représentent la répartition des murs sur la surface à la profondeur de 1300 µm.
103
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
Figure 65. Soustraction du réseau de dislocations sur la face cadmium (lignes noires) avec celle de la face tellure à
z = 1300 µm (lignes rouges).
Dans un premier temps, nous observons que les directions privilégiées dans la répartition des
murs de dislocations sur la surface à z = 0, sont identiques à celles que nous retrouvons à la
profondeur de 1300 µm. De même, leurs formes, c'est-à-dire l’arrangement des « etch pits » au
sein d’un mur, restent similaires. En effet, une ligne noire à z = 0 µm est parallèle à la ligne rouge
correspondant au même mur à la profondeur z = 1300 µm. Les dislocations au sein d’un même
mur possèdent donc le même vecteur de Burgers et se propagent donc dans le même plan de
glissement.
D’autre part, nous remarquons que, de la surface à z = 0 jusqu’à la profondeur de 1300 µm, les
murs se sont majoritairement déplacés dans le même sens. Ils se dirigent effectivement vers le
bas de l’image. Ces similitudes montrent que l’ensemble des murs de dislocations de cet
échantillon se propagent dans le volume principalement selon un des trois plans équivalents
{111} sécants : (-1 -1 1), (-1 11) ou (1 -1 1) présentés sur la Figure 66.
Figure 66. Schéma des trois plans équivalents sécants (-1 -1 1), (-1 11) et (1 -1 1), appartenant à la famille {111}.
104
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
Les différences observées entre les trois images sont dues à l’angle, noté θ, de ces plans
équivalents entre eux, qui est de 70,53°. L’angle d’un plan avec la surface (111) entraine un
décalage en X, Y des défauts : par exemple quand l’échantillon est creusé sur 100 µm, un mur de
dislocations devrait se décaler de 100×tan(70,53) = 283 µm par rapport à sa position sur la
surface.
A partir de la Figure 65, nous pouvons extraire le déplacement global de chaque mur. Il est
compris entre 660 et 700 µm sur 1300 µm d’épaisseur comme nous le représentons sur le
schéma de la Figure 67.
Les mesures ayant été réalisées à la règle sur un agrandissement de l’image, nous considérons
que les résultats mesurés sont justes au millimètre près donc avec 10 % d’erreur. Finalement,
l’angle de propagation des murs avec la surface {111} est de 62 ± 6 °. D’autre part, l’appareil de
mesure de l’épaisseur de l’échantillon donne la valeur en un point seulement, avec une précision
de 2 microns, et le polissage de la surface entraine de grandes irrégularités à la surface de
l’échantillon. L’erreur sur l’angle est donc certainement sous-estimée. Au vue de ces mesures, de
leurs incertitudes, et de la théorie exposée au chapitre 2, nous pouvons conclure que les valeurs
des angles calculées sont compatibles avec une propagation des sous-joints de grains de cet
échantillon dans un des plans équivalents {111}.
Par ailleurs, nous remarquons en bas de la Figure 65 que la forme des murs n’est pas conservée
d’une profondeur à l’autre. Des observations réalisées au MEB sur ces murs, présentées sur la
Figure 68, montrent des changements de morphologie des « etch pits » d’un mur à l’autre, ce qui
pourrait expliquer nos observations par des changements de plans de glissement au niveau des
croisements de murs de dislocations dans cette zone.
105
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
- Etude de l’échantillon I1
(a) (b)
Figure 69. (a) Image inversée des dislocations révélées sur la face tellure par la solution de gravure Everson. (b)
Dislocations révélées sur la face cadmium par la solution de gravure Nakagawa.
Le même traitement d’image a été réalisé sur l’échantillon I1, le résultat obtenu est présenté sur
la Figure 70 (a). Les traits rouges représentent les murs de dislocations sur la face cadmium et
les traits noirs sont ceux de la face tellure. Le mouvement global des murs de dislocations est
moins évident que pour S1 et rend donc la lecture de la Figure 70 (a) difficile. En effet, par
exemple à gauche de l’échantillon, où la densité de murs est importante, la forme des sous-joints
de grain est différente entre les deux profondeurs révélées. Nous avons donc isolé certains des
106
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
murs pour permettre une meilleure visibilité sur la Figure 70 (b) : les murs de la face cadmium
sont en rouge et ceux de la face tellure sont en vert.
(a) (b)
Figure 70. Soustraction du réseau de dislocations sur la face cadmium (lignes noires) avec celle de la face tellure
(lignes rouges) (a) réalisée avec le logiciel ImageJ, (b) à la main, en rouge sont représentés certains murs de la face
cadmium (z =0 µm) et en vert sont représentés certains murs de la face tellure (z =1000 µm).
Pour certains des sous-joints de grain la direction de propagation dans le volume est claire
comme pour les deux murs entourés en pointillés noirs sur la Figure 70 (b). Les murs se décalent
vers la gauche de l’échantillon quand nous suivons leur propagation depuis la surface cadmium
(murs rouges) vert la surface tellure (murs verts). L’angle que forment ces murs avec la surface
est estimé et vaut entre 60° et 70°, ce qui est inférieur ou égal à l’angle des plans équivalents
{111} avec la surface.
Par ailleurs, si nous comparons les défauts entourés en pointillés avec ceux entourés en traits
pleins, nous observons que les murs se sont déplacés dans des directions opposées dans le
volume. Dans le cas des murs entourés en traits pleins, ils se décalent vers la droite de
l’échantillon quand nous suivons leur propagation depuis la surface cadmium (murs rouges)
vert la surface tellure (murs verts).
D’autres, comme ceux encadrés en noir sur la Figure 70 (b), semblent se propager dans une
direction orthogonale à la surface, donc dans la direction de croissance, car les traits rouges et
verts sont superposés.
Nous tenons à souligner que les deux échantillons proviennent de lingots différents.
Les directions de propagation des murs de dislocations dans le volume ne sont pas les mêmes
entre les échantillons I1 et S1. Ces différences peuvent provenir de comportements dynamiques
différents des dislocations au cours de la croissance, qui pourraient être induits par des
107
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
positions différentes de ces deux échantillons par rapport aux bords de leur lingot. La
distribution des contraintes dans ces deux échantillons au cours de l’étape de croissance
[110], sa norme vaut
Pour l’échantillon S1, nous avons montré que les dislocations au sein d’un mur possèdent le
même vecteur de Burgers dans la partie 4.2.1. De plus, les dislocations s’arrangent en mur sur la
surface (111) dans les directions les plus compactes <110>, leur vecteur de burger est donc de
type
D=b/θ
108
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
Nous avons ainsi trouvé des désorientations comprises entre 22 et 130 arcsecondes. Ces valeurs
sont en accord avec la littérature car la désorientation moyenne entre deux sous-joints de grain
dans le CdTe est comprise entre 60 et 120 arcsecondes d’après [Rudolph, 1, 2010].
(a) (b)
Figure 72. (a) Observation avec un microscope électronique à balayage de murs de dislocations obtenus par gravure
avec la solution Everson sur la face tellure. (b) Observation avec un microscope optique de murs de dislocations
obtenus par gravure avec la solution Everson sur la face tellure.
Au chapitre 2, nous avons vu que les dislocations sont créées lors de la croissance du cristal.
D’autre part, certains des échantillons commandés à Acrorad sont fournis après dépôt
d’électrodes, c’est pourquoi nous avons également utilisé l’imagerie par diffraction en
transmission au synchrotron pour visualiser les défauts dans le volume du matériau. C’est une
technique de caractérisation non destructive (contrairement à la gravure chimique), qui ne
nécessite pas la suppression des électrodes.
Nous présentons le dispositif expérimental, puis les topographies obtenues pour différents
échantillons produits par le fournisseur Acrorad avec la même technique de croissance.
Cette expérience permet d’étudier la propagation des murs de dislocations dans le volume du
CdTe. L’influence de l’étape d’hybridation du détecteur sur un circuit de lecture, sur la variation
du nombre de murs de dislocations a aussi été investiguée.
Cette expérience a été menée en collaboration avec Tamzin Lafford de la ligne BM05 de l’ESRF
(Grenoble). Elle consiste à irradier le cristal avec un faisceau blanc synchrotron de haute
intensité. Cette méthode et cette ligne de lumière ont été retenues pour plusieurs raisons
énoncées ci-dessous.
Les défauts d’intérêt dans nos détecteurs sont les murs de dislocations, or tels que décrits au
chapitre 2, ils sont à l’origine de faibles variations du paramètre de maille à une courte distance
109
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
autour du défaut. Les directions de diffraction sont donc légèrement modifiées par rapport aux
zones où le cristal est parfait. En irradiant l’échantillon avec un faisceau blanc direct, nous
obtenons la diffraction de l’ensemble des régions désorientées. En effet, malgré les différentes
directions de distorsions du paramètre de maille, le large spectre de valeur de longueur d’onde
permet de satisfaire les conditions de la loi de Bragg.
La ligne BM05 a été choisie après une étude préliminaire sur l’énergie du faisceau nécessaire
pour obtenir un contraste suffisant sur un film radiographique. Nous avons calculé l’intensité du
faisceau transmis par un cristal de CdTe de 1.4 mm d’épaisseur en fonction de l’énergie du
faisceau incident, présentée sur la courbe verte de la Figure 73. Le flux de photons incident
choisi est de 1012 photons par seconde.
Dans ces calculs, nous avons négligé l’atténuation du faisceau dans l'air avant d'arriver à
l'échantillon. Les valeurs des coefficients d’atténuation en fonction de l’énergie sont déterminées
grâce à la base de données XCOM [Internet @3]. Les photons subissent une atténuation dans le
CdTe avec un coefficient d’atténuation total, noté µ att tot , prenant en compte les interactions
rayonnement-matière décrites au chapitre 1. La fraction de photons primaires transmise est
donnée par la loi de Beer-Lambert : Φ = Φ 0 ×exp(-µ att tot ×d) avec d l’épaisseur de l’échantillon, Φ
le flux transmis et Φ 0 le flux incident.
La probabilité que le faisceau incident interagisse par effet Rayleigh dans le CdTe est donnée par
l’expression suivante : µ R /µ att tot ×(1-exp(-µ att tot ×d)) où µ R /µ att tot représente la fraction de
photons qui interagissent par effet Rayleigh et (1-exp(-µ att tot ×d)) est la probabilité d’interaction
d’un photon dans le CdTe. Finalement la proportion du flux incident transmis et diffusé est
donnée par l’équation 8.
équation 8. Φ=Φ 0 ×
110
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
4e+10 1e+09
6e+08
(Ph/s/mm2)
2e+10
4e+08
1e+10
2e+08
0 0
0 100 200 300 400
Energie (keV)
Les topographies sont acquises sur des films radiographiques de dimensions 17.6×12.6 cm et de
taille de grain égale à 3µm. La distance entre l’échantillon et le film est de 70 cm. Nous avons
évalué cette distance au cours de la préparation de l’expérience grâce à la base de données ICDD
(The International Centre for Diffraction Data) [Internet @4]. Nous avons ainsi pu avoir accès à
plusieurs familles (hkl) de plans susceptibles de diffracter les rayons X dans le CdTe
monocristallin et à la distance interatomique correspondante aux plans. Grâce à la loi de Bragg
(équation 4 donnée au chapitre 3), nous pouvons donc calculer l’angle θ de la direction de
diffraction en fonction de l’énergie (ou de la longueur d’onde du faisceau incident). La distance
optimale entre le film et l’échantillon, permettant de réceptionner les spots de Laue, est ainsi
évaluée à 70 cm à partir des dimensions du film qui sont connues.
Le faisceau direct est arrêté par un élément appelé « beam stop » pour ne pas surexposer le film.
Le montage expérimental est présenté sur le schéma de la Figure 74.
111
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
Au cours de cette expérience, quatre échantillons différents de CdTe:Cl produits par Acrorad ont
été irradiés. Ils possèdent l’axe (111) comme orientation principale. Grâce à une figure de pôle
(111) adaptée pour ce type d’orientation et au logiciel « Orientexpress » [Internet @5], nous
avons pu indexer les différentes taches de diffraction et ainsi accéder à l’indice du plan de
diffraction correspondant à chaque topographie obtenue.
Deux échantillons sont sans électrode (I1 et S1, décrits à la partie 4.2.1), un avec électrodes,
appelé S2, et le dernier est hybridé sur un circuit de lecture, appelé S3. Plusieurs tests ont été
réalisés avant de trouver les conditions expérimentales donnant des contrastes satisfaisants sur
les topographies. Elles sont présentées dans le Tableau 5 pour les différents échantillons.
Echantillons I1 S1 S2 S3
Tableau 5. Conditions expérimentales des topographies en transmission réalisées pour différents échantillons de
CdTe:Cl.
La Figure 75 ci-dessous présente l’allure typique des taches de diffraction que nous avons
obtenues sur nos films radiographiques. Chaque tache obtenue sur le film radiographique est
une topographie liée au vecteur de diffraction [hkl] orthogonal aux plans (hkl). Ces images sont
des négatifs : les zones de forte intensité apparaissent en noires.
Les échantillons étant trop larges par rapport à la taille du faisceau (taille maximale : 40×8 mm),
plusieurs champs de vue ont été réalisés pour obtenir les topographies complètes.
112
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
Figure 75. Film radiographique obtenu pour l’échantillon I1 lors de l’expérience à l’ESRF. Chaque tache noire
représente un spot de Laue. Le rectangle blanc (en bas à droite) est dû au « beam stop » qui engendre un faible
nombre de photons qui interagissent sur le film radiographique.
- Etude de l’échantillon I1
L’ensemble des défauts visibles sur les topographies dessinent un réseau qui correspond bien à
la répartition des « etch pits » sur les faces cadmium et tellure (cf. Figure 69). Nous observons
effectivement de longs défauts linéaires qui traversent toute la longueur du cristal et qui
correspondent au groupe de murs numéro 1 décrit à la partie 4.1.1.2. D’autres plus petits
s’emmêlent aux autres et correspondent au groupe de murs numéro 2 décrit à la partie 4.1.1.2.
De plus, les lignes sont parallèles entre elles et forment ainsi des directions privilégiées.
113
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
A gauche de l’image, nous observons trois zones sombres, pointées par les flèches rouges, dues à
des contraintes sur le bord de l’échantillon. La présence de cette zone de contrainte est
cohérente avec le fait que l’échantillon possède une forte densité de sous-joints de grains à cet
endroit, comme le montre les gravures chimiques de la Figure 69.
La largeur de l’image du défaut dans ces topographies provient d’une part de la projection, dans
le plan de diffraction, du mur qui s’étend dans le volume du cristal, en supposant son épaisseur
négligeable, et d’autre part de l’étendue du champ de contraintes associé au défaut. Les largeurs
différentes des lignes de la Figure 76, représentant des murs de dislocations entièrement
traversants, confirment donc que leurs directions de propagation dans le volume ne sont pas les
mêmes, comme nous le montrons également dans la partie 4.2.1, avec la Figure 69.
Figure 76. Topographie, obtenue par la diffraction des plans (1-13), en faisceau blanc de l’échantillon I1 réalisée avec
un faisceau synchrotron.
- Etude de l’échantillon S1
La Figure 77 présente la reconstruction des topographies obtenues pour l’échantillon S1. Quatre
champs de vue ont été réalisés pour imager la totalité de l’échantillon.
Nous remarquons que la répartition des images associées aux sous-joints de grains sur ces
topographies est similaire à la répartition des dislocations révélées par attaque chimique sur la
Figure 64. Nous soulignons que l’échantillon a été irradié avec le faisceau synchrotron par la face
Cadmium, le dessin du réseau de défauts est donc inversé entre la Figure 64 et la Figure 77.
Comme nous l’avons déjà souligné dans la partie 4.2.1, les sous-joints de grains sont parallèles
entre eux et ils se propagent dans les directions compactes des plans {111}.
114
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
D’autre part, l’image des défauts apparaît dans plusieurs tâches de diffraction à la fois, l’effet des
dislocations n’est donc pas limité à un seul plan d’atomes. De plus, elle n’est pas constante car les
largeurs des défauts diffèrent d’une topographie à l’autre sur la Figure 77.
Si nous regardons ensuite ces topographies une à une, nous remarquons que la majorité des
lignes possèdent un contraste et une épaisseur similaires au sein d’une même image, ce qui
n’était pas le cas pour I1. Cette observation indique que les murs de dislocations se propagent
dans la même direction dans le volume du cristal. Cette observation rejoint celle mise en
évidence par la Figure 65.
Nous observons également un mur blanc à gauche des taches indexées (-111), (-113) et (002),
qui apparait ensuite noir sur les taches (1-13) et (1-11). Cette différence de contraste peut être
due au fait que le mur de dislocations ne se propage pas dans le même plan que les autres.
Figure 77. Reconstruction des taches de diffraction obtenues pour l’échantillon S1.
Cette expérience permet de confirmer le caractère monocristallin des cristaux I1 et S1, malgré la
présence d’un grand nombre de murs de dislocations. En effet, contrairement à ce que nous
avions montré dans la Figure 45 (b), nous n’observons pas de grain d’orientation cristalline
différente qui diffracte les rayons hors du film. Les défauts révélés par les etch pits par attaque
chimique sont donc bien des sous-joints de grains.
115
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
Lors de la mise en place d’un prototype pour la détection de rayons X, l’hybridation est l’étape
d’assemblage entre le cristal de CdTe et le circuit de lecture. Des contraintes peuvent être
induites dans le CdTe, car le cristal est notamment aspiré et chauffé au cours de cette étape. Afin
de mieux comprendre l’influence de l’hybridation sur la création de murs de dislocations dans le
cristal, nous avons réalisé les topographies au synchrotron de trois échantillons à trois stades
différents : un échantillon sans électrode, un échantillon avec pixels déposés, et un échantillon
assemblé avec le circuit de lecture. Quatre champs de vues différents ont été réalisés pour
imager la totalité des échantillons S1, S2 et S3.
La Figure 78 est la reconstruction des topographies obtenues par diffraction du plan (-113) pour
ces échantillons. Comme nous le voyons sur ces images, l’échantillon nu possède un plus grand
nombre de murs de dislocations que l’échantillon avec pixels déposés, qui contient lui-même
plus de sous-joints de grains que le cristal hybridé. Sur la Figure 78 (c), une zone sombre est
visible en bas à droite du détecteur, qui n’est pas présente sur les topographies des deux autres
échantillons. Elle est certainement due aux champs de contraintes engendrés lors de
l’assemblage entre le cristal et le circuit de lecture.
Il existe une grande disparité de densité de murs de dislocations entre les trois échantillons. Si
l’hybridation engendre des dislocations, elle joue probablement un rôle secondaire dans la
création des murs de dislocations. Les dislocations et les murs de dislocations sont a priori
majoritairement générés au cours de la croissance.
Figure 78. Topographies obtenue par la diffraction des plans (-202), en faisceau blanc de 3 échantillons de CdTe:Cl :
(a) sans électrode, (b) avec électrodes, (c) hybridé sur un circuit de lecture.
Une étude plus poussée basée sur des comparaisons entre les topographies d’un même
échantillon, avec électrodes, avant et après son hybridation serait utile pour apporter à notre
116
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
conclusion plus de certitude. Mais nous n’avons malheureusement qu’un accès limité au faisceau
synchrotron.
Les inclusions de tellure piègent les porteurs de charges, nous pouvons donc penser qu’elles ont
un effet sur les images de photocourant et de courant de fuite de nos détecteurs.
Une cartographie complète en transmission infrarouge du cristal I1 a été acquise et révèle une
répartition homogène des inclusions de tellure à la surface et dans le volume. En particulier, la
Figure 79 montre un champ de vue typique de notre échantillon réalisé en transmission
infrarouge avec le microscope. La taille des inclusions n’excède pas quelques dizaines de
microns de diamètre.
(a) (b)
Figure 79. (a) et (b) Répartition des inclusions de tellure en transmission infrarouge dans deux zones distinctes de
l’échantillon I1.
Nous avons observé successivement une même zone (proche de la grande rayure visible sur la
cartographie complète Figure 59 (a)) en mode transmission IR, puis en mode réflexion du
microscope après gravure dans une solution Everson. Sur ce même champ de vue, nous pouvons
donc comparer la répartition des « etch pits » révélés sur la Figure 80 (b) avec celle des
inclusions de tellure sur la Figure 80 (a). Nous observons un arrangement particulier des
dislocations dans ce champ de vue du cristal I1 sur l’image (b) : elles forment trois murs. L’image
en transmission infrarouge montre au contraire une répartition homogène des inclusions de
tellure. Les deux repères, orange et rouge, marquent l’emplacement de deux des trois murs de
dislocations et nous permettent de conclure que les sous-joints de grains du cristal ne sont pas
décorés par des inclusions de tellure.
117
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
(a) (b)
Figure 80. Observation au microscope : (a) en mode transmission infrarouge des inclusions de tellure au voisinage
d’une rayure en surface, (b) en mode réflexion de la même zone, après révélation chimique des « etch pits » à la
surface de I1.
Nous avons vérifié cette observation autour d’autres sous-joints de grain du cristal I1. La Figure
81 (a) montre un mur de dislocations observé en lumière infrarouge sur la face tellure de I1 :
nous n’observons aucune inclusion. Tandis que la Figure 81 (b) présente ce même mur à une
profondeur de 217 µm : nous pouvons voir une seule inclusion de tellure. Ces acquisitions
suggèrent également que les murs de dislocations ne sont pas systématiquement décorés par
des inclusions de tellure, qui sont uniformément réparties dans le volume du CdTe Acrorad.
(a) (b)
Figure 81. (a) Observation d’un mur de dislocation en surface de l’échantillon I1 au microscope en lumière infrarouge
avec un grandissement d’un facteur 10. (b) Observation du même défaut en transmission IR à la profondeur
z = 217 µm.
De plus, nous observons des inclusions isolées dans le cristal : non associées à une dislocation ou
à un mur. En effet, les positions des dislocations isolées sur la Figure 80 (b) ne correspondent
pas à celles des inclusions sur la Figure 80 (a).
Au chapitre 2, nous avons introduit les différents types de mouvement accessibles aux
dislocations au cours de la croissance du cristal : glissement dans le système {111}<110> à basse
température, et glissement dévié et monté à plus haute température. Afin d’illustrer cette
118
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
théorie nous avons révélé la répartition des dislocations à la surface de plusieurs échantillons
THM produits par différents fournisseurs, et à la surface d’échantillons issus des techniques VGF
et MVBM. L’orientation principale de l’ensemble des échantillons est l’axe <111>.
Nous avons gravé avec la solution Nakagawa un échantillon de CdTe THM produit par Eurorad
[Internet @6], les résultats sont présentés sur la Figure 83, et un échantillon de CdZnTe THM
produit par Redlen [Internet @7], les résultats sont présentés sur la Figure 82.
Nous observons des arrangements en mur de dislocations pour les deux échantillons THM
produits par Eurorad et Redlen. Cette répartition est due au mouvement de glissement des
dislocations au cours de la croissance pour relaxer les contraintes. De plus, les murs semblent
également se propager selon des directions privilégiées comme nous le soulignons dans la partie
4.1 pour les cristaux fournis par Acrorad.
En effet, la Figure 82 (a) montre que la majorité des murs de dislocations forment différents
groupes de murs parallèles entre eux sur la face {111}. Sur la Figure 82 (b), nous présentons un
agrandissement d’un défaut en forme d’étoile révélé sur la surface de cet échantillon et similaire
à ceux que nous avons observés sur nos échantillons produits par Acrorad.
(a) (b)
Figure 82. (a) Echantillon de CdZnTe produit par Redlen par la méthode THM. (b) Agrandissement des murs de
dislocations.
Pour l’échantillon produit par Eurorad, l’agrandissement sur la Figure 83 (b) montre nettement
que les sous-joints sont également parallèles entre eux et qu’ils se propagent dans différentes
directions privilégiées. Cependant, nous observons des angles proches de 90° entre les différents
murs de cette image. De plus, la Figure 83 (a) montrant le wafer complet, confirme que les
directions les plus compactes <110> ne sont pas clairement identifiables dans ce cristal.
119
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
(a) (b)
Figure 83. (a) Echantillon de CdTe produit par Eurorad par la méthode THM, le wafer a un diamètre de 32 mm. (b)
Agrandissement des murs de dislocations.
Nous avons également étudié la répartition des dislocations dans des cristaux de Cd(Zn)Te
produits par d’autres techniques utilisant de plus hautes températures de croissance.
Dans ce but, nous avons gravé les faces cadmium de différents échantillons. Le premier, présenté
sur la Figure 84 (a), est un échantillon de CdZnTe produit par Acrotec [Internet @8] avec la
technique VGF. Le deuxième, présenté sur la Figure 84 (b), est un échantillon de CdZnTe produit
par un laboratoire du CEA avec la technique VGF. Le dernier, présenté sur la Figure 84 (c), est un
cristal de CdZnTe produit par Yinnel avec la méthode MVBM. Nous avons comparé les résultats
obtenus à ceux présentés par Saucedo et al. sur du CdTe MVBM [Saucedo, 2008] (cf. Figure 84
(d)).
120
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
Figure 84. Gravure chimique, type Nakagawa, sur des échantillons produits par différents fournisseurs : (a) CdZnTe
produit par Acrotec (VGF), (b) CdZnTe du CEA (VGF), (c) CZT- Yinnel (MVBM), (d) cristal de CdTe (MVBM) [Saucedo,
2008].
Nous remarquons la présence de cellules dans ces échantillons, ce qui est en accord avec le fait
que les dislocations ont accès aux mouvements dans les trois dimensions par montée et
glissement déviés à ces températures de croissance.
La taille des cellules dépend de la densité moyenne de dislocations. Selon Rudolph [Rudolph,
2003] plus la densité est élevée plus la taille des cellules est faible : inférieure à 500 µm pour
une densité supérieur à 105 cm-2 et 1 à 2 mm de diamètre pour une densité inférieur à 104 cm-2.
Les diamètres différents de ces cellules sont listés dans le Tableau 6.
Dans ce tableau, nous avons également répertoriés les températures de croissance référencées
dans la littérature et associées aux techniques de croissance des cristaux étudiés dans cette
partie. Ces températures ne sont donc pas celles réellement utilisées pour nos échantillons.
121
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
Ces expériences d’attaque chimique soulignent le fait que l’arrangement de ces défauts dépend
de la technique de croissance utilisée. En effet, nous n’avons pas observé de différences
significatives entre les échantillons de CdTe et de CdZnTe produits par différents fournisseurs
mais avec une même technique de croissance : s’il y a une influence de la présence de zinc sur la
création et l’arrangement de ces défauts, elle reste secondaire.
122
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
I1 montrent que les murs ne se propagent pas tous dans les plans {111}. Ils semblent en effet
Les résultats obtenus par attaque chimique et par topographie en transmission sur l’échantillon
cadmium des échantillons étudiés sont très similaires.
de la maille zinc blende. En effet, les réseaux de sous-joints de grains entre les faces tellure et
l’échantillon S1, que les murs révélés en surface se propagent dans les plans les plus compactes
chimique et par topographie X au synchrotron. Nous remarquons, de manière évidente pour
Nous avons aussi étudié la propagation des sous-joints de grains dans le volume par attaque
) du cristal.
4.5. Conclusion
Dans ce chapitre, nous avons présenté en détails l’arrangement en surface et dans le volume des
dislocations pour des cristaux de Cd(Zn)Te.
Nous avons montré que l’attaque chimique et la topographie X sont des techniques appropriées
et efficaces pour l’étude de leur arrangement dans le CdTe. Nous avons notamment mis en place
un protocole expérimental pour l’attaque chimique de type Nakagawa.
A la surface de nos échantillons de CdTe :Cl, nous montrons la présence de six figures d’attaque
différentes, révélées par la solution Everson, correspondant à différentes orientations des
dislocations dans le volume du cristal.
Une étude approfondie de ces figures d’attaque chimique en microscopie électronique à
balayage serait intéressante afin de mettre en évidence une corrélation claire entre leur forme et
la direction de propagation des murs de dislocations dans le volume des cristaux de CdTe. De
plus, en calculant la profondeur des « etch pits », nous serions alors en mesure de déterminer le
vecteur de Burgers des dislocations formant un mur.
Pour répondre à cette dernière question, nous sommes à ce jour en cours de réalisation d’une
coupe TEM autour d’un sous-joint de grain dans le but de déterminer les vecteurs de Burgers
des dislocations le formant. Ces résultats ne seront donc pas présentés dans ce manuscrit.
A la surface des cristaux de CdTe (THM) fournis par Acrorad, nous observons la présence
systématique de murs de dislocations et de dislocations isolées entre ces murs. D’autre part, les
révélations chimiques montrent que les échantillons ne sont pas maclés. Dans le cas contraire,
nous aurions observé des lignes droites sur leur surface.
Les dislocations des sous-joints de grains s’alignent globalement selon des directions
privilégiées Les résultats obtenus sur l’échantillon I1 montrent notamment l’existence de plus de
trois directions de glissement privilégiées dans les plans (111) et (
123
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
changer de direction de propagation dans le volume du cristal, ce qui peut signifier l’activation
de mouvements de montées et de glissements déviés des dislocations dans ce cristal.
D’autre part, la désorientation moyenne autour des sous-joints de grains est comprise entre 22
et 130 Arcsecondes, ce qui est en accord avec la théorie.
Nous avons montré que l’hybridation ne semble pas jouer de rôle dans la création des murs de
dislocations, qui sont a priori majoritairement générés au cours de la croissance du cristal.
Nous observons que les inclusions de tellure sont uniformément réparties dans les cristaux de
CdTe THM Acrorad. De plus, les murs de dislocations ne sont pas systématiquement décorés par
des inclusions.
Nous avons observé que les dislocations s’arrangent en sous-joint de grains dans les cristaux
produits avec la technique THM par Acrorad, Redlen et Eurorad, ce qui est en accord avec le fait
que cette méthode est dite à basse température.
D’autre part, nous avons vu que pour des cristaux produits à plus haute température (VGF, BM)
que les dislocations s’arrangent en cellules de différents diamètres car elles bougent alors par
montée et glissement dévié.
Ce chapitre nous a permis de mieux comprendre les défauts cristallins pouvant être à l’origine
des inhomogénéités spatiales des détecteurs de rayons X à base de Cd(Zn)Te. Les connaissances
cristallographiques acquises grâce à nos observations nous permettront de mettre en place un
modèle sur le principe de fonctionnement des défauts étendus dans le CdTe au chapitre suivant.
124
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
4.6. Références
[Amelinckx, 1956] Amelinckx, S., XXV, The direct observation of dislocation nets in rock salt
single crystals, The philosophical magazine : structure and properties of condensed matter, 1956,
1(3), p.260-290.
[Asahi, 1996] Asahi, T., et al., Growth and characterization of 100 mm diameter CdZnTe single
crystals by the vertical gradient freezing method, Journal of Crystal Growth, 1996, 161(1-4), p.
20-27.
[Cui, 2011] Cui, X.P., et al., Characteristics of the dislocations in CdZnTe crystals revealed by etch
pits, Journal of Crystal Growth, 2011, 321(1), p. 40-44.
[Funaki, 2007] M. Funaki, Y. Ando, R. Jinnai, A. Tachibana, and R. Ohno, Development of CdTe
detectors in Acrorad, International Workshop on Semiconductor PET, 2007, unpublished.
[Read, 1953] W. T. Read, Dislocations in crystals, MCG Raw-Hill Book Company, 1953.
[Rudolph, 2003] Rudolph, P., Non-stoichiometry related defects at the melt growth of
semiconductor compound crystals - A review, Crystal Research and Technology, 2003, 38(7-8), p.
542-554.
[Rudolph, 2005] Rudolph, P., Dislocation cell structures in melt-grown semiconductor
compound crystals, Crystal Research and Technology, 2005, 40(1-2), p. 7-20.
[Rudolph, 1, 2010] Rudolph, P., Chap. 6. Defect Formation During Crystal Growth from the Melt,
Springer Handbook of Crystal Growth, 1st Edition, Dhanaraj, G., Byrappa, K., Prasad, V., Dudley,
M., 2010.
[Saucedo, 2008] Saucedo, E., Rudolph, P., Dieguez, E, Modified Bridgman growth of CdTe
crystals, Journal of Crystal Growth, 2008, 310(7-9), p. 2067-2071.
Sites Internet :
@1 http://www.olympus-
europa.com/microscopy/en/microscopy/components/component_details/component_detail_1
9841.jsp
@2 http://rsb.info.nih.gov/ij/
@3 National Institute of Standards and Technology,
http://physics.nist.gov/PhysRefData/Xcom/html/xcom1.html
@4 http://www.icdd.com/
@5 http://www.ccp14.ac.uk/ccp/web-mirrors/lmgp-laugier-bochu/orientex.zip
@6 http://www.eurorad.com/
@7 http://redlen.ca/
@8 http://www.nikkometals.com/products.html
125
CHAPITRE 4REPARTITION des défauts cristallins sur la surface et dans le volume de cristaux de
CdTe
126
CHAPITRE 5ORIGINE des inhomogénéités spatiales dans la réponse des détecteurs à base de
CdTe:Cl
127
CHAPITRE 5ORIGINE des inhomogénéités spatiales dans la réponse des détecteurs à base de
CdTe:Cl
Dans ce chapitre, nous présentons tout d’abord les réponses en courant de fuite et en
photocourant du détecteur de rayon X nommé I1. Nous étudions notamment en détails les
inhomogénéités observées dans les images introduites au chapitre 1 (cf. Figure 14).
Une étude dynamique de ces inhomogénéités spatiales a été menée afin d’évaluer l’évolution des
valeurs de photocourant au cours du temps et de comprendre l’origine de la rémanence des
lignes sur les images de radiographie après corrections.
Puis, nous comparons la répartition des défauts cristallins présents dans l’échantillon I1 avec ses
caractéristiques en courant. Pour cela, nous juxtaposons les cartographies des « etch pits »
révélées chimiquement par les solutions Nakagawa et Everson au chapitre 4 avec les
cartographies de courant de fuite et de photocourant du détecteur.
Dans une dernière partie, nous proposons un modèle possible pour expliquer les différents
comportements des lignes de courant perturbées
Dans cette partie, nous allons présenter en détails les inhomogénéités de performance des
détecteurs à base de CdTe introduites au chapitre 1.
Les réponses du détecteur I1 en photocourant et en courant de fuite sont acquises avec une
tension de polarisation appliquée aux bornes du détecteur de 100 V.
Nous rappelons ici que la taille de pixel de nos détecteurs est de 75 µm.
Les images de photocourant sont acquises grâce à l’irradiation du détecteur par un tube à rayons
X dont la tension d’accélération est 70 kVp et le courant de 10 mA. La réponse du système
représente l’efficacité de collection de charges pour chaque pixel.
Nous observons des lignes de un à quatre pixels de large, qui se distinguent par trois
comportements différents mis en évidence sur la Figure 85. Nous soulignons que le contraste
change entre la Figure 85 et la Figure 14 car les échelles de couleur sont inversées et ne sont pas
présentées dans la même unité.
128
CHAPITRE 5ORIGINE des inhomogénéités spatiales dans la réponse des détecteurs à base de
CdTe:Cl
Figure 85. Image du photocourant acquise à 100 V pour le détecteur I1 de rayons X à base de CdTe:Cl .
Figure 86. Inhomogénéités de réponse sous éclairement du détecteur I1 : (a) image d’un « défaut + » (ligne avec une
sensibilité plus forte), (b) image d’un « défaut -» (ligne avec une sensibilité plus faible), (c) image des « défauts +-».
Des mesures de courant de fuite ont été réalisées dans les mêmes conditions de polarisation
(100 V) que précédemment mais en l’absence d’irradiation.
129
CHAPITRE 5ORIGINE des inhomogénéités spatiales dans la réponse des détecteurs à base de
CdTe:Cl
Les valeurs de courant de fuite de I1 varient entre 7 pA et 11 pA par pixel de 75×75 µm², comme
nous pouvons le voir sur la Figure 87. Les valeurs de courant d’obscurité ne sont pas homogènes
sur l’ensemble du détecteur.
- Nous observons des microstructures linéaires avec un courant plus élevé. De plus sur la
Figure 88 (a), nous remarquons que la ligne avec plus de courant de fuite correspond à la ligne
avec plus de photocourant présentée sur la Figure 86 (a).
- Nous mettons en évidence sur la Figure 88 (c) des microstructures divisées selon leur
longueur en une ligne avec un courant de fuite plus élevé et une avec un courant de fuite plus
faible. De même, ces défauts dédoublés correspondent aux lignes présentées sur la Figure 86 (c).
Ces deux types de défauts correspondent donc exactement, de part leur forme et leur position
dans l’image, aux défauts « + » et « +- » observés sur l’image de photocourant du détecteur (cf.
Figure 85).
- Cependant sur la Figure 88 (b), correspondant à la zone représentée sur la Figure 86
(b), nous mettons en évidence que les lignes avec moins de photocourant semblent
correspondre à une répartition homogène de courant de fuite.
Figure 88. Inhomogénéités de réponse du détecteur I1 placé dans le noir : (a) image d’une ligne avec plus de courant
de fuite, (b) zone sans inhomogénéité apparente de courant de fuite, (c) image des défauts dédoublés en une ligne
avec plus et une ligne avec moins de courant de fuite.
130
CHAPITRE 5ORIGINE des inhomogénéités spatiales dans la réponse des détecteurs à base de
CdTe:Cl
Pour ce type détecteur, nous mettons en évidence une correspondance exacte de ses
inhomogénéités de photocourant avec celles observées en courant de fuite quand il est placé
dans le noir et non irradié.
Au chapitre 1, nous avons mis en évidence le caractère non-linéaire et instable dans le temps de
ces lignes étant donné le fait que les corrections d’offset et de gain appliquées sur le détecteur ne
sont pas efficaces pour supprimer définitivement les effets de ces défauts dans les images de
radiographie. En effet, certaines lignes sont encore visibles après correction puis réapparaissent
plus nettement au bout d’un certain temps de fonctionnement du détecteur, ce qui provient de
l’écart entre la correction linéaire appliquée et le comportement non-linéaire et instable des
inhomogénéités de photocourant.
Comme nous l’avons expliqué au chapitre 1, les images de photocourant (cf. Figure 14 (a) et
Figure 15 (a)) sont la moyenne de 96 images acquises à la fréquence de 16 Hz pendant 6
secondes. Grâce à l’acquisition de ces données, nous avons pu suivre l’évolution temporelle du
nombre de charges collectées en chaque pixel de l’anode.
Cette étude met en évidence une augmentation globale du courant au cours du temps quand le
détecteur est irradié avec un flux constant. Elle est en accord avec l’évolution de photocourant
observée par Nicolas Baier pour un détecteur à base de CdTe fonctionnant en intégration, avec
une polarisation de 100 V [Baier, 2007, p154].
En appliquant une régression linéaire en chaque pixel, nous pouvons extraire des valeurs de
pente donnant des indications sur la rapidité de cette croissance. La pente moyenne calculée
pour les 200×200 pixels est de +8.14×10-13 A/s.
La Figure 89 représente les pentes extraites pour chaque pixel.
131
CHAPITRE 5ORIGINE des inhomogénéités spatiales dans la réponse des détecteurs à base de
CdTe:Cl
Figure 89. Image des pentes en ampère par seconde, représentant la variation du photocourant au cours du temps en
chaque pixel.
Cette image montre des lignes de contrastes différents : des lignes rouges de pente moyenne
2.92×10-13 A/s, des lignes jaune de pente moyenne 9.28×10-13 A/s, et un troisième type de ligne
qui est la juxtaposition d’une rouge et d’une jaune. L’augmentation du photocourant n’est donc
pas homogène dans le détecteur: certains pixels, arrangés en ligne, ont une croissance plus forte
que la moyenne et d’autres une croissance moins importante que la moyenne.
En comparant la Figure 89 avec l’image du photocourant moyen (cf. Figure 85), nous
remarquons que les trois types de lignes correspondent spatialement aux trois défauts
introduits dans la partie précédente.
En effet, nous observons que les « défauts - » sont des lignes pour lesquelles l’augmentation du
photocourant au cours du temps est plus lente que pour les zones sans défauts. De même, les
« défauts + » sont des lignes sur lesquelles le photocourant augmente au contraire plus vite.
Enfin, les « défauts +- » possèdent une ligne sur laquelle le photocourant augmente plus vite que
la moyenne et une ligne sur laquelle il augmente moins vite.
Nous précisons que les trois types de défauts de la Figure 85 sont présents dès la première
image de photocourant acquise avec le détecteur I1. Les lignes sont donc déjà apparues au bout
de 63 ms d’irradiation. Nous développons un modèle à la partie 5.4 dont le but est de proposer
une explication à l’apparition des lignes de courant perturbées dès la première image.
Au chapitre 4, nous avons étudié les défauts cristallins (inclusions de tellure et dislocations)
présents dans ce détecteur après l’avoir poli pour éliminer les électrodes. Nous soulignons que
132
CHAPITRE 5ORIGINE des inhomogénéités spatiales dans la réponse des détecteurs à base de
CdTe:Cl
les inclusions sont uniformément réparties à la surface et dans le volume de l’échantillon I1.
Contrairement aux dislocations, pour lesquelles nous montrons qu’elles sont organisées en murs
traversants dans le volume du cristal, par topographie en transmission et par attaques
chimiques sur les faces tellure et cadmium.
Sur la Figure 90 (a) ci-dessous, nous présentons un agrandissement des lignes observées sur les
images de photocourant du capteur I1. Nous pouvons y observer les trois types de défauts
introduits précédemment. Nous comparons cette image avec des agrandissements, réalisés sur
la même zone, montrant la répartition des murs de dislocations sur la face cadmium et sur la
face tellure. Cette comparaison, met en évidence une correspondance exacte des inhomogénéités
de photocourant avec la forme du réseau de sous-joints de grains sur la face cadmium.
En effet, les cercles rouges sur la Figure 90 (a) montrent deux « défauts +- ». Si nous reportons
ces deux cercles sur la Figure 90 (b), qui représente la répartition des murs de dislocations à
l’aplomb des pixels du détecteur, nous remarquons la présence de murs de dislocations aux
mêmes positions et de mêmes formes que les lignes de courant perturbé.
De plus, nous observons une corrélation exacte, de forme et de position, entre les « défauts - »
encadrés en pointillés rouges sur la Figure 90 (a) et les sous-joints de grains encadrés sur la
Figure 90 (b).
De même, nous observons que le long « défaut + » qui traverse toute la longueur de la Figure 90
(a) correspond à un long mur de dislocations traversant toute la longueur du champ de vue de la
Figure 90 (b).
D’autre part, nous avons également inséré ces cercles et rectangles aux mêmes endroits sur
l’image de la répartition des dislocations sur la face tellure présentée sur la Figure 90 (c). Ces
inserts pointent le fait que nous retrouvons des murs de dislocations de formes similaires mais
non identiques dans les cercles rouges, et qu’il n’y a aucun sous-joint de grains dans les encadrés
rouges.
Figure 90. (a) Agrandissement de l’image du photocourant du détecteur I1. (b) Répartition des dislocations sur la
face cadmium sur la même zone de l’échantillon I1. (c) Répartition des dislocations sur la face tellure sur la même
zone.
133
CHAPITRE 5ORIGINE des inhomogénéités spatiales dans la réponse des détecteurs à base de
CdTe:Cl
Une comparaison détaillée de ces trois images montre que les inhomogénéités (avec trois
comportements différents décrits à la section 5.1) correspondent systématiquement aux sous-
joints de grain révélés sur la face cadmium (la face sur laquelle est déposée l’anode pixellisée).
La Figure 91 présente l’exacte corrélation entre les défauts observés sur les images de courant
de fuite et de photocourant avec la répartition des murs de dislocations sur la surface cadmium
de l’échantillon. Nous pouvons en déduire que les murs de dislocations entrainent des
inhomogénéités de courant de fuite et de photocourant.
Figure 91. (a) Dislocations révélées sur la face cadmium par la solution de gravure Nakagawa. (b) Image du
photocourant du détecteur de rayons X à base de CdTe:Cl. (c) Image du courant de fuite du même détecteur.
Cette corrélation peut être expliquée par des variations du champ électrique local dans le
volume du cristal induites par la présence de murs de dislocations. En effet, le cristal de CdTe est
piézoélectrique, c’est pourquoi la présence de sous-joints de grains, induisant des déformations
dans la maille cristalline, peut entraîner des distorsions électriques. Ces variations pourraient
induire un décalage des électrons d’un pixel vers le pixel voisin lors de leur collecte sur l’anode,
ce qui expliquerait pourquoi certains des défauts sont divisés dans leur longueur en une ligne
avec plus et une avec moins de photocourant.
Le but du modèle décrit dans cette partie est de proposer une explication aux trois
comportements différents des lignes de courant perturbées.
En effet, certains des murs de dislocations créent des « défauts + » avec plus de photocourant et
de courant de fuite, d’autres induisent des « défauts - » avec seulement moins de photocourant,
et le troisième défaut est une ligne dédoublée avec d’un côté plus et de l’autre moins de
photocourant correspondant au même type de dédoublement en courant de fuite, notée
« défaut +- ».
134
CHAPITRE 5ORIGINE des inhomogénéités spatiales dans la réponse des détecteurs à base de
CdTe:Cl
Par ailleurs, grâce à la Figure 86, nous remarquons que le dédoublement de ces lignes de courant
est unilatéral et ne se fait pas toujours du même côté. Or, nous avons mis en évidence, sur les
images (a) et (b) de la Figure 70 au chapitre 4, que les murs de dislocations dans l’échantillon I1
ne se propagent pas tous dans la même direction dans le volume du cristal. En effet, certains
sont perpendiculaires aux faces Cd et Te, d’autres sont dans les plans équivalents {111} et
forment un angle avec ces surfaces : ils se décalent alors soit vers le centre, soit vers un des
bords de l’échantillon.
Figure 92. Corrélation entre l’angle du mur de dislocations avec la surface cadmium et la réponse en photocourant du
détecteur.
En comparant le sens du dédoublement sur l’image de photocourant avec l’angle que fait le mur
entre la surface cadmium (sur laquelle est déposée l’anode pixélisée) et la surface tellure, nous
remarquons que la ligne rouge avec moins de photocourant se situe du côté opposé à la position
de la ligne verte représentant le mur sur la face tellure. Les cercles en pointillés mettent en
évidence la correspondance entre les « défauts +- » et la présence de murs qui se propagent avec
un angle dans le volume du cristal.
Les encadrés en pointillés noirs sur les deux schémas de droite et de gauche de la Figure 92
soulignent la correspondance entre des « défauts + » et la présence de sous-joints de grains qui
se propagent perpendiculairement à la surface.
135
CHAPITRE 5ORIGINE des inhomogénéités spatiales dans la réponse des détecteurs à base de
CdTe:Cl
Les deux encadrés rouges à gauche de la Figure 92 mettent en évidence la corrélation entre la
présence d’un mur de dislocations orthogonal à la surface (111) et un « défaut + » (à gauche du
cadre), et un mur se propageant avec un angle et un « défaut +- » (à droite du cadre).
D’après la Figure 90, les « défauts - » semblent correspondre à des murs de dislocations non
traversant dans le volume du cristal car ils ne sont pas présents sur la face tellure.
Pour expliquer ces comportements, nous faisons l’hypothèse que le mur de dislocations
perturbe le trajet d’une partie des charges qui passent dans son voisinage en déformant les
lignes de champ par effet piézoélectrique. Au final, le nombre de charges collectées est supérieur
à la moyenne à l’endroit où il débouche à la surface.
Cette hypothèse est cohérente avec les corrélations introduites au chapitre 1 entre la présence
de sous-joints de grains et l’apparition de lignes qui comptent plus de photons sur les détecteurs
fonctionnant en comptage avec une puce Timepix [Cecilia, 2011].
Nous pensons que les trois défauts (« + », « - » et « +- ») sont dus à des positions différentes
possibles du mur par rapport aux électrodes et à son orientation dans le volume du cristal (et
donc de l’angle avec lequel il entre en contact avec la surface).
Sur le schéma de la Figure 93, les lignes courbées noires représentent des murs de dislocations,
vus de profil, traversant de la face tellure (sur laquelle est déposée la cathode) vers la face
cadmium. Nous avons représenté l’électrode planaire et l’anode pixélisée, les couleurs rouge,
orange et jaune sous les pixels représentent les valeurs de sensibilité des pixels présentées sur la
Figure 86.
Nous rappelons que les électrodes de l’anode mesurent 35 µm et sont déposées au pas de
75 µm.
Figure 93. Schéma de l’influence de l’angle d’arrivée du mur sur la réponse du détecteur en photocourant.
136
CHAPITRE 5ORIGINE des inhomogénéités spatiales dans la réponse des détecteurs à base de
CdTe:Cl
- Cas n°1 a) et b) : Le mur débouche sur des électrodes de l’anode et se propage dans un
plan équivalent {111}, il forme donc un angle de 20° avec la surface. Ce cas correspond aux
défauts entourés en pointillés pour lesquelles les électrodes du défaut collectent plus de charges
et apparaissent en jaune, que les pixels voisins qui apparaissent en rouge.
Avec ces cas a) et b), nous illustrons le fait que le sens du dédoublement des lignes de courant
dépend de l’angle du mur traversant.
Par ailleurs, nous avons vu au chapitre 1 que pour un pixel de surface S = e x e, le nuage de
charges induit une majorité du courant à partir d’une distance e de l’anode collectante [Barrett,
1995]. Les murs influencent donc majoritairement la valeur du courant induit sur les électrodes
à partir de la distance de 75 µm.
Dans le cas a), l’électrode α, située à gauche de la ligne avec plus de photocourant, subit
l’influence du mur en amont qui induit plus de courant à partir d’une certaine distance du pixel.
Puis, quand les charges se rapprochent des électrodes de collecte, les électrons sont attirés par le
mur tel que le courant induit sur ce pixel α diminue. Au final, la valeur moyenne du courant
induit sur le pixel α est similaire à la moyenne et il apparait donc en orange. Tandis que pour
l’électrode β, qui n’est pas à l’aplomb du mur, le courant induit y est plus faible sans
compensation, donc elle apparait rouge.
- Cas n°2 : Le mur débouche au niveau d’une électrode et il est orthogonal à la surface. Il
y a alors formation d’une ligne jaune avec plus de courant sur la Figure 86.
- Cas n°3 : Le mur débouche dans une zone inter-pixel et il est orthogonal à la surface. Il
n’y a pas apparition de ligne de courant perturbée sur la Figure 86.
Dans le cas des « défauts - », moins nombreux et associés aux murs non-traversants, nous faisons
l’hypothèse qu’ils agissent sur le transport des charges en piégeant une partie des électrons dans
le volume du détecteur.
137
CHAPITRE 5ORIGINE des inhomogénéités spatiales dans la réponse des détecteurs à base de
CdTe:Cl
5.5. Conclusion
Dans ce chapitre, nous avons décrit dans un premier temps les inhomogénéités de
fonctionnement des détecteurs de rayons X à base de CdTe :Cl (THM), fonctionnant en
intégration, développés au laboratoire. Nous avons mis en évidence les trois comportements
différents des lignes observées sur les images de courant de fuite et de photocourant.
L’étude dynamique menée sur le capteur I1 montre que les lignes dans l’image moyenne des 96
acquisitions de photocourant proviennent d’une part du fait que ces défauts sont déjà apparus
au bout de 63 ms, et d’autre part des différentes vitesses d’augmentation dans le temps du
nombre de charges collectées en chaque pixel. Cette augmentation est supérieure à la valeur
moyenne pour les défauts avec plus de photocourant et inférieure à la moyenne pour les défauts
avec moins de photocourant.
Nous avons montré que les inhomogénéités de fonctionnement du détecteur I1 sont exactement
corrélées, de part leur forme et leur position, avec le réseau de murs de dislocations révélé sur la
face cadmium du cristal. Cette face est celle sur laquelle est déposée l’anode pixellisée. Nous
pouvons donc en déduire que les murs de dislocations entrainent des perturbations du courant,
en terme de photocourant et de courant d’obscurité, au niveau des pixels sous-jacents.
Nous avons également présenté un modèle possible du fonctionnement des murs de dislocations
dans nos cristaux de CdTe :Cl afin d’expliquer leur effet sur la collecte des charges et les
réponses en courant dans nos détecteurs.
A ce stade de nos investigations, nous avons répondu à l’une des problématiques de la thèse à
savoir : l’identification des défauts limitant les performances de détecteurs développés pour la
radiographie. Cependant, nous ne comprenons pas exactement comment les murs de
dislocations peuvent induire les trois comportements différents présentés sur les images de
réponse sous X de I1.
Nous avons vu au chapitre 2 que les dislocations sont des défauts électriquement actifs, à cause
des liaisons pendantes avec une charge spécifique et leurs niveaux pièges associés, et que le
138
CHAPITRE 5ORIGINE des inhomogénéités spatiales dans la réponse des détecteurs à base de
CdTe:Cl
cœur des dislocations dans le CdTe présente des effets piézoélectriques, à cause des champs de
contraintes présents autour des dislocations. Les murs de dislocations peuvent donc influencer
le transport des charges par deux phénomènes différents : par recombinaison et piégeage ou par
perturbation locale du champ électrique.
Pour comprendre les mécanismes de fonctionnement de ces défauts, nous avons appliqué
différentes techniques de caractérisation sur nos cristaux de CdTe. C’est l’objet du chapitre
suivant.
Grâce à des mesures de SIMS, nous souhaitons vérifier si des impuretés ont ségrégé autour des
murs de dislocations dans le but d’identifier si ce sont les murs ou bien les impuretés qui
entrainent effectivement les perturbations de la réponse du détecteur.
Afin d’étudier l’influence de ces défauts sur les propriétés optiques du cristal, et notamment sur
la création de niveaux pièges dans le gap, des spectres seront réalisés par cathodoluminescence
d’une part, pour obtenir l’image associée à chaque spectre, et par photoluminescence d’autre
part.
Enfin, des mesures IBIC nous permettrons aussi d’étudier l’influence des sous-joints de grains
sur le transport des porteurs de charges dans le matériau.
139
CHAPITRE 5ORIGINE des inhomogénéités spatiales dans la réponse des détecteurs à base de
CdTe:Cl
5.6. Références
[Baier, 2007] Thèse de Baier, N., Mécanisme de transport de charges dans le tellurure de
cadmium polycristallin, application à la détection de rayons X et gamma, 2007.
[Barrett, 1995] Barrett, H.H., J.D. Eskin, and H.B. Barber, Charge transport in arrays of
semiconductor gamma-ray detectors, Physical Review Letters, 1995, 75(1), p. 156-159.
[Cecilia, 2011] Cecilia, A., Hamann, E., Haas, C., Greiffenberg, D., Danilewsky, A., Haenscke,
D., Fauler, A., Zwerger, A., Buth, G., Vagovic, P., Baumbach, T., Fiederle, M., Investigation of
crystallographic and detection properties of CdTe at the ANKA synchrotron light source, Journal
of Instrumentation, 2011, 6(10), p. 10016.
140
CHAPITRE 5ORIGINE des inhomogénéités spatiales dans la réponse des détecteurs à base de
CdTe:Cl
141
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
142
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
6.3.3.3. Cartographies de la réponse en TOF-IBIC..............................................................................................................173
6.4. CONCLUSION ..................................................................................................................................................176
6.5. REFERENCES ..................................................................................................................................................178
143
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
Dans ce chapitre, nous présenterons tout d’abord les résultats des mesures de spectrométrie de
masse des ions secondaires (SIMS) qui ont été menées dans le but d’étudier la ségrégation des
impuretés autour des murs de dislocations.
D’autre part, afin d’élucider quels sont les niveaux pièges associés aux murs de dislocations dans
notre matériau, nous avons évalué leur effet sur les spectres de luminescence par spectroscopie
optique à basse température. Pour cela, des images de cathodoluminescence combinées à des
spectres de photoluminescence ont été acquis.
Dans le but d’évaluer les propriétés de transport des porteurs de charges dans le volume du
CdTe et donc d’évaluer l’influence des défauts cristallins sur ces propriétés, nous avons effectué
des analyses du courant induit par irradiation avec un faisceau d’ions (analyses IBIC) dans le
détecteur I1.
Afin d’analyser la composition chimique de la surface du cristal I1, nous réalisons des mesures
de spectrométrie de masse des ions secondaires (SIMS). Cette expérience a pour but de vérifier
si des impuretés présentes dans cet échantillon ont ségrégé autour des sous-joints de grains
comme cela a déjà été observé pour les atomes de chlore autour des joints de grain dans des
cristaux de CdTe polycristallin [Consonni, 2007].
Les principes de mesures SIMS et ToF-SIMS ont été introduits au chapitre 3.
Pour cette expérience, l’échantillon est sans électrode. Il a été poli pour éliminer les figures
d’attaques révélées avec les solutions Everson et Nakagawa dans le but d’obtenir une surface
parfaitement plane afin de s’assurer que les variations de contraste dans les images SIMS
proviennent des différences de nature chimique des éléments détectés et non de la topologie de
la surface investiguée.
Avant la réalisation de ces mesures, les positions des zones avec une forte densité de murs de
dislocations ont été repérées par rapport aux bords de l’échantillon sur la cartographie
présentée au chapitre 4 (cf. Figure 59 (a)). Ces repères constituent un point de départ pour
scanner la surface et réaliser les images SIMS car la position du faisceau peut être connue à
0.1 mm près.
Avant l’acquisition d’une image, la surface est abrasée sur une dizaine de nanomètres pour
éliminer la couche d’oxyde qui se forme au contact de l’air et qui diminue le contraste en
144
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
augmentant le nombre de pics dans le spectre de masse. Le suivi des spectres d’intensité de
chaque isotope permet de stopper l’abrasion quand les concentrations de ces espèces se
stabilisent.
Au cours de cette expérience, nous avons acquis plusieurs champs de vue de taille maximale
500×500 µm² et avec des résolutions spatiales comprises entre 1 µm et 0.2 µm.
Les cartographies de la répartition des atomes de chlore n’ont pas montré de ségrégation autour
des sous-joints de grains pour l’échantillon I1 comme nous le montrons sur la Figure 94.
Figure 94. Signal chlore acquis en SIMS sur l’échantillon I1 durant 4 minutes : le champ de vue mesure 90×90 µm, et
comprend 512×512 pixels.
Consonni et al. ont montré que les joints de grains ont tendance à attirer les impuretés telles que
la concentration en chlore y est 4 fois plus élevée qu’à l’intérieur du grain, la ségrégation s’étend
jusqu’à 1 µm de chaque côté du défaut [Consonni, 2009].
La répartition homogène des atomes de chlore dans notre matériau peut donc être due au fait
que les murs de dislocations sont de largeur atomique (quelques Angströms) de sorte que la
résolution des images SIMS n’est pas suffisante pour voir une éventuelle diffusion des atomes de
chlore autour des murs de dislocations.
D’autre part, les sous-joints de grains perturbent le cristal sur une distance moins grande que les
joints de grains et ont donc certainement moins tendance à attirer les atomes de chlore dans
leur voisinage. Si la concentration atomique en chlore est plus élevée autour des sous-joints de
grains, l’augmentation reste inférieure à la limite de détection de l’appareil.
Les champs de vue étant petits, nous ne pouvons pas exclure l’hypothèse qu’ils aient pu être
réalisés dans une zone de l’échantillon sans murs de dislocations. Cependant, nous avons
déplacé le faisceau à plusieurs reprises pour diminuer ce risque.
145
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
Le couplage du SIMS avec des mesures de temps de vol permet de déterminer la concentration
en chlore.
En effet, nous pouvons suivre l’évolution de l’intensité (en nombre de coups par seconde) de
chaque isotope présent dans l’échantillon.
Par ailleurs, un échantillon témoin, de CdTe polycristallin dont la dose en chlore implantée est
connue, C Cl,ref = 1015 atomes/cm3, avec une précision de 1 %, est analysé dans les mêmes
conditions que I1. Nous pouvons ainsi calculer le facteur de sensibilité relative noté RSF
(Relative Sensitive Factor) du chlore par rapport à un autre isotope présent dans l’échantillon,
par exemple le tellure. Ce facteur est donné par l’équation 9 dans laquelle
146
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
S’il y a une ségrégation sur une distance similaire à celle induite par un joint de grain, donc sur
une ligne de 10 pixels de large, soit 2 µm [Consonni, 2009], alors la simulation montre que la
ligne commence à se voir à l’œil si elle possède 50 % de chlore en plus. Ce qui correspond à une
concentration de 5 ppm autour du défaut.
Si l’influence du défaut se fait sur une plus faible distance, par exemple 1 pixel, alors la
simulation montre que la ligne commence à se voir s’il y a 4 fois plus de chlore dans cette zone
soit une concentration de 13.2 ppm de chlore.
Si l’influence du défaut se fait sur une très faible distance plus petite que le pixel : par exemple
sur 20 Å de large dans un pixel de 0.2 µm, il faudrait donc une concentration de 1320 ppm
autour du défaut pour qu’il soit détecté.
Afin d’étudier les spectres des niveaux pièges présents dans le gap de nos cristaux de CdTe :Cl,
des mesures de spectroscopie optique à basse température ont été faites sur les échantillons I1
et S1.
Des mesures de cathodoluminescence ont été réalisées dans un premier temps afin d’obtenir des
images des murs de dislocations et de réaliser des spectres autour de ces défauts étendus afin
d’étudier leur influence sur les spectres de luminescence et notamment sur l’apparition de
niveaux pièges créés dans le gap par leur présence.
Puis, des mesures de photoluminescence ont été entreprises par la suite sur l’échantillon S1 afin
d’obtenir des spectres plus résolus en énergie que ceux obtenus en cathodoluminescence.
Ces deux types de mesures sont donc complémentaires car la cathodoluminescence est résolue
spatialement et la photoluminescence est résolue énergétiquement.
Ces expériences ont été réalisées en collaboration avec Vincent Consonni, chercheur au
laboratoire des Matériaux et du Génie Physique (Grenoble).
L’échantillon est poli avec des solutions diamantées puis nettoyé et dégraissé dans un bain de
trichloréthylène, suivi d’un bain de trichloroéthylène chauffé à 80°C, et d’un bain d'isopropanol.
Puis la surface est attaquée chimiquement avec du Br-méthanol à 1 %.
Cette préparation doit être réalisée peu de temps avant l’expérience pour éviter une oxydation
de la surface trop importante.
147
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
Les images panchromatiques réalisées en cathodoluminescence sont présentées sur la Figure 95.
Nous observons que la luminescence n’est pas homogène à la surface de nos monocristaux de
CdTe :Cl. Il y a en effet plusieurs zones de recombinaisons non-radiatives visibles sur ces trois
images correspondant à trois murs de dislocations, pour les lignes sombres au centre des
champs de vue, et à des dislocations uniques, représentées par les points noirs uniformément
répartis. Nous remarquons également que les lignes sont en fait la composition de plusieurs
points non-radiatifs, arrangés en mur, ce qui correspond à la description d’un mur de
dislocations.
Les artefacts circulaires sont dus à la défocalisation du faisceau d’électrons.
Figure 95. Images panchromatiques en cathodoluminescence acquises sur l’échantillon I1 dans trois champs de vue
différents.
Ces trois images révèlent que les dislocations isolées et les sous-joints de grains agissent comme
des centres recombinants non-radiatifs dans le CdTe :Cl monocristallin. Ce comportement peut
148
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
s’expliquer par la présence de liaisons pendantes sur les dislocations qui piègent les électrons et
diminuent ainsi l’efficacité de radiation totale.
Sur ces acquisitions la largeur des défauts est comprise entre 6 et 8 µm ce qui correspond à la
taille du faisceau utilisé. Des images réalisées avec une meilleure résolution spatiale (cf. Figure
98) montrent que la zone d’influence des murs de dislocations sur la luminescence du cristal est
en fait d’environ 5 µm de large.
Par ailleurs, au vue des observations faites par Schreiber [Schreiber, 1999] présentées dans la
partie 3.2.1.1, nous pourrions également supposer que les dislocations observées dans les
champs de vue investigués sont majoritairement des dislocations de type « glide » formées par
des lignes de liaisons pendantes issues d’atomes de cadmium.
La Figure 96 présente deux spectres typiques que nous avons obtenus au cours des expériences
de cathodoluminescence, en bleu sur l’échantillon S1 et en rouge sur I1. Leurs longueurs d’onde
sont comprises entre 750 et 930 nm.
Nous remarquons que les deux spectres sont similaires d’un échantillon à l’autre et qu’ils sont
peu résolus en énergie.
La région des recombinaisons de type excitonique est très intense ce qui est en adéquation avec
la bonne qualité monocristalline de nos échantillons, vérifiée en topographie X au chapitre 4. Elle
est dominée par le pic, que nous appelons pic n°2, centré à 1.583 eV dans les deux cas. Le léger
épaulement à la base du pic dans la partie basse énergie laisse supposer la présence d’un second
pic vers 1.57 eV. Le pic n°1 est systématiquement dissymétrique : il y une forte trainée vers les
hautes énergies pouvant indiquer la présence d’autres raies au-delà de 1.592 eV non résolues
énergétiquement.
Dans la partie basse énergie se situe un pic large, compris entre 1.33 et 1.53 eV, avec une
intensité maximale située à 1.46 eV.
149
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
Figure 96. Spectres de cathodoluminescence obtenus pour les échantillons de CdTe :Cl, monocristallin, I1 et S1.
Les positions en énergie des cinq pics sont récapitulées dans le Tableau 7. Elles ont été extraites
à partir de la détermination de la position de l’intensité maximale de chaque pic, excepté pour le
pic n°3 dont nous déterminons la position en énergie grâce au logiciel d’ajustement Qtiplot
[Internet @1]. L’ajustement des pics excitoniques est présenté sur la Figure 97.
Figure 97. Ajustement dans Qtiplot du spectre de cathodoluminescence compris entre 1,56 et 1,62 eV.
L’interprétation de la nature des pics n’est pas évidente étant donnée la faible résolution en
énergie des spectres obtenus.
De part sa forme et sa position en énergie, le pic n°1 peut être attribué à une recombinaison de
type excitonique. Etant donné le fort dopage au chlore du cristal calculé dans la partie
150
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
précédente et la position du niveau en énergie (cf. Tableau 3 au chapitre 3), nous pensons que
c’est une recombinaison de type (D° X) entre l’exciton et le chlore en site tellure [Consonni,
2007]. La dissymétrie de ce pic, avec une trainée vers les hautes énergies, peut provenir d’un
couplage avec le pic excitonique non résolu dans la Figure 96 et normalement situé autour de
1.596 eV. Un ajustement réalisé avec le logiciel Qtiplot, présenté sur la Figure 97, illustre cette
hypothèse avec la présence d’un pic à 1.5971 eV.
Aux vues de la concentration classique de chlore calculée en SIMS pour nos échantillons et des
explications données dans le chapitre 3 sur l’allure typique d’un spectre de luminescence pour
un monocristal de CdTe :Cl, nous savons que le pic dominant est associé aux recombinaisons
radiatives entre le centre A (V Cd -Cl Te ) et l’exciton ; cette bande, classiquement située à 1.586 eV
[Shin, 1998], est localisée à 1.583 eV dans notre cas (cf. position du pic n°2). Ce complexe
contribue aussi aux transitions DAP de raie principale à 1.478 eV [Hofmann, 1992] qui
pourraient correspondre au pic n°5 ; cependant elles ne sont pas résolues en énergie car nous ne
pouvons pas séparer les différentes répliques phonons habituellement bien visibles pour ce type
de matériau.
D’autre part, dans la partie basse énergie de ce pic n°2 apparaît une asymétrie qui pourrait
provenir de la réplique phonon de l’exciton. En effet, la position théorique de la raie X est située
à 1.596 eV et donc la position en énergie de sa première réplique phonon est vers 1.575 eV.
A 1.550 eV, nous notons la présence du pic n°4 de faible intensité dont la position en énergie
nous permet de supposer qu’il provient d’une transition (e V Cd -Cl Te ) [Consonni, 2006].
Pics 1 2 3 4 5
Position en
1.592 1.583 1.5763 1.550 1.464
énergie
Interprétation (Cl Te X) (V Cd -Cl Te X) X-1LO (e V Cd -Cl Te )+DAP DAP VCd-ClTe
[Consonni, [Shin, [Kunz, [Consonni,
référence [Hofmann, 1992]
2007] 1998] 1998] 2006]
Tableau 7. Position en énergie des pics observés sur les spectres de luminescence des échantillons I1 et S1.
A ce stade de l’étude, la nature des raies de cathodoluminescence est purement spéculative. Des
données supplémentaires ont été acquises en photoluminescence et notamment une étude en
puissance a été réalisée dans le but de déterminer la nature exacte de l’ensemble des pics
présents dans les spectres de luminescence de nos échantillons de CdTe :Cl.
151
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
Pour y parvenir, nous scannons un mur de dislocations sur l’échantillon S1 au pas de 1 µm afin
d’acquérir 11 points compris entre -5 et +5 µm autour du défaut. La tension d’accélération
utilisée pour cette acquisition est de 15 kV.
Les résultats obtenus sont présentés sur la Figure 98. La zone d’étude est illustrée par l’image
panchromatique insérée à droite du graphique de la Figure 98. Nous y avons représenté les
points investigués par des croix dont les couleurs correspondent à celles des spectres présentés
dans le graphique à gauche. La même couleur d’affichage a été choisie pour représenter les
acquisitions à des distances similaires du mur.
Figure 98. Evolution des spectres de cathodoluminescence en fonction de la distance au mur de dislocations.
Nous tenons à souligner ici que les variations relatives des spectres doivent être nuancées par le
fait que la taille du faisceau pour cette investigation est de 3 µm et que la poire d’interaction en
cathodoluminescence est grande, ce qui implique que les spectres réalisés à une certaine
152
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
distance du défaut sont aussi impactés par sa présence. En effet, le logiciel de simulation SRIM
[Biersack, 1980] montre une largeur de poire d’interaction de 5 µm.
Par ailleurs, si nous regardons l’évolution de la position en énergie du pic n°2, attribué au
complexe V Cd -Cl Te, en fonction de la distance au mur de dislocations à 10-4 eV près, la courbe
présentée sur la Figure 99 montre des variations. En effet, il semblerait que la position de ce pic
se décale vers les hautes énergies près du défaut. La même modification est observée sur le
deuxième mur étudié dans S1. Elle peut résulter de la présence d’effets piézoélectriques au
voisinage du sous-joint de grain provenant de la contrainte qu’il crée dans la maille cristalline.
Cependant, la signification et la validité de ce résultat doivent être extrapolées avec prudence
car le décalage est inférieur à 0.8 meV d’une part, et d’autre part la largeur du pic étudié est
certainement due à la convolution entre plusieurs raies dont les intensités peuvent varier en
fonction de la distance au défaut, créant ainsi l’impression d’un décalage de l’intensité maximale
de la somme de ces raies. Cette variation peut donc également être liée à une différence de
concentration d’un type de défaut au voisinage du mur de dislocations.
L’étude de la position en énergie du pic 1, attribué au défaut Cl Te , en fonction de la distance au
mur ne montre pas de variation notable.
153
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
Figure 99. Evolution de la position en énergie du pic n°2 en fonction de la distance au mur de dislocations.
Un exemple de spectre obtenu au cours de cette expérience est présenté sur la Figure 100.
L’intensité détectée au niveau des basses énergies a été multipliée par un facteur 10 pour une
meilleure lisibilité. Un agrandissement de la zone située au niveau des bandes excitoniques est
présenté sur cette même figure dans l’encadré rouge. La nature de chacune des raies est
déterminée par une étude en puissance et présentée dans les deux paragraphes suivants. Elle est
menée dans le but de déterminer la valeur du coefficient de puissance k qui relit l’intensité de
154
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
chaque pic à la puissance d’excitation par la loi I ~ Pk comme nous l’avons expliqué au chapitre 3.
La puissance du laser varie entre 0.003 et 1 W/cm².
Figure 100. Spectre de photoluminescence acquis sur l’échantillon S1 à 5.5 K avec un agrandissement entouré en
rouge de la zone du spectre de la bande excitonique.
La Figure 101 présente l’intensité du pic situé autour de 1.594 eV en fonction de la puissance
d’excitation. Les données expérimentales sont représentées par les disques noirs et les droites
rouge et bleue représentent les ajustements avec la fonction de puissance introduite dans
l’équation 5.
Les données montrent clairement une déviation par rapport à la loi I ~ Pk. En effet, la pente de la
droite rouge, qui ajuste les points acquis aux valeurs de puissance comprises entre 0.003 et
0.05 W/cm², est plus élevée (k = 1.36) que celle de la droite bleue, calculée entre 0.05 et
1 W/cm². Ce résultat est cohérent avec la théorie et les résultats expérimentaux trouvés par
Schmidt et al. (cf. Tableau 4 du chapitre 3) [Schmidt, 1992].
155
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
Dans le Tableau 8, nous récapitulons les positions en énergies des raies identifiées, les valeurs
de k ajustées pour toutes les valeurs de puissance et pour les puissances comprises entre 0.003
et 0.05 W/cm², ainsi que la nature des transitions associées.
Dans la partie des énergies supérieures à 1.595 eV, nous relevons la présence de trois pics dont
un très intense à 1.5959 eV et deux de très faible intensité à plus haute énergie. Les valeurs des
coefficients de puissance déterminées (cf. Tableau 8) dans cette zone, nous permettent
d’attribuer le pic le plus intense à la recombinaison radiative classique X de l’exciton libre à la
position 1.5959 eV. Les deux autres pics pourraient correspondre à son premier état excité à
1.5993 eV et à son deuxième à 1.6006 eV.
Les différents niveaux d’énergie de l’exciton libre peuvent être calculés en décrivant l’exciton
selon un modèle hydrogénoïde [Balkanski, 1961]. En effet, le mouvement relatif de l’électron et
du trou dans l’exciton peut être assimilé à celui de l’électron et du proton dans un atome
156
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
de puissance et le dopage élevé de cet échantillon en chlore, nous permettent d’attribuer ce pic à
la transition (D° X) entre un atome de chlore en site tellure et l’exciton [Consonni, 2006].
Les autres pics observés dans cette région sont moins intenses. Grâce à la position en énergie du
pic situé à 1.5855 eV, et aux valeurs de k déterminées, nous pouvons assigner cette raie au
défaut (V Cd -Cl Te ) typiquement reporté à 1.586 eV dans la littérature [Shin, 1998]. Cette
indexation est confirmée par les valeurs en énergie des DAP présentées plus loin.
Pour l’indexation de la raie située à 1.5895 eV, les valeurs de k calculées nous permettent de
l’attribuer à une transition de type (A° X) et sa position en énergie pourrait le rapprocher du
complexe accepteur (V Cd -2Cl Te ) répertorié autour de 1.590 eV dans la littérature [Consonni,
2007].
Aux énergies 1.5785 eV et 1.5723 eV, nous observons les premières répliques phonons des deux
raies les plus intenses, à savoir celle de l’exciton à 1.5785 eV et celle de la transition (Cl Te X) à
1.5723 eV.
Pour les énergies plus faibles du spectre, nous distinguons une première raie à 1.4775 eV pour
laquelle le coefficient de puissance est inférieur à 1. Cette raie est suivie par quatre pics situés à
1.4562 eV, 1.4363 eV, 1.4149 eV et 1.3928 eV. Leurs formes et leurs valeurs de k récapitulées
dans le Tableau 8, nous permettent d’attribuer ces pics à des transitions de type donneur-
accepteur (DAP) avec une raie principale (ZPL = Zero phonon line) à 1.4775 eV typique du
défaut (V Cd -Cl Te ) [Hofmann, 1992]. La distance moyenne entre chaque pic est de 21.2 meV
(valeur attendue 21.5 meV [Kunz, 1998]), les quatre pics correspondent donc bien aux quatre
premières répliques phonons de la DAP à 1.4775 eV.
L’identification de la nature de ces raies peut être confirmée par le calcul du couplage entre elles,
quantifié par la constante de Huang-Rhys, S, introduite au chapitre 3 dans l’équation 6. Cette
constante est en effet de 2.2 ± 0.1 dans le cas de DAP associé au défaut (V Cd -Cl Te ) [Hofmann,
1992], tandis qu’elle vaut entre 0.16 et 0.4 dans le cas de la bande de luminescence Y
[Hildebrandt, 1997].
Pour calculer S, nous avons ajusté les raies dans Qtiplot avec des fonctions gaussiennes comme
nous le présentons dans la Figure 102. Elles donnent un écart entre les répliques phonon de
20.7 meV. Nous soulignons que cet ajustement est correct aux vues des courbes vertes
présentées sur la Figure 102. La valeur de la constante de couplage, ajustée sur l’ensemble des
13 spectres acquis pour l’étude en puissance, donne systématiquement une valeur de S de
2.2 ± 0.1. L’intensité du couplage est donc élevée ce qui confirme que ces pics sont associés à la
157
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
recombinaison radiative entre un électron d’un niveau donneur et un trou localisé sur un niveau
accepteur.
S = 2,2 ± 0.1
E0 = 1,4755 eV
ELO = 20,6758 ± 0,0009 meV
Figure 102. Ajustement par une distribution de fonctions gaussiennes des bandes situées entre 1.39 et 1.48 eV.
Le Tableau 8 récapitule les positions en énergies des raies identifiées dans les spectres de
photoluminescence ainsi que la nature des transitions associées.
Tableau 8. Niveaux énergétiques identifiés dans les spectres de photoluminescence et natures des raies proposées
Ces données ont été acquises avec un faisceau large. Au vue de la répartition des dislocations
isolées et des murs de dislocations révélée à la surface de l’échantillon S1 au chapitre 4, nous
158
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
pouvons raisonnablement penser que les dislocations ont été investiguées au cours de
l’expérience.
Les résultats présentés dans le Tableau 8 montrent donc que les défauts associés au dopage au
chlore ont un effet dominant, par rapport aux défauts étendus tels que les dislocations, sur les
recombinaisons radiatives observées dans ces spectres.
Signal PL sur S1
10000 signal CL sur S1
Intensité de luminescence (u.a)
1000
100
10
1
1,36 1,38 1,4 1,42 1,44 1,46 1,48 1,5 1,52 1,54 1,56 1,58 1,6
Energie (eV)
Figure 103. Comparaison des spectres acquis par photoluminescence et par cathodoluminescence sur l’échantillon de
CdTe :Cl S1.
La comparaison des deux courbes, nous permet de mieux comprendre les spectres obtenus au
cours des expériences de cathodoluminescence.
Nous pouvons confirmer la nature des transitions radiatives que nous avions associées aux DAP
dans la partie 6.2.2.3. D’après les données de photoluminescence ces DAP sont reliées au centre
A.
159
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
La raie à 1.592 eV, que nous avions identifiée comme étant une transition D°X, peut être associée
à la transition (Cl Te X) mise en évidence en photoluminescence et l’asymétrie de son pied dans la
partie hautes énergies est effectivement due à la présence du pic excitonique.
Par ailleurs, elle met également en évidence que le pic le plus intense en CL est certainement une
convolution de plusieurs raies comprises entre 1.565 et 1.585 eV dont les composantes
principales sont des transitions (A° X).
Le décalage du pic n°2 en CL, que nous observons en fonction de la distance à un mur de
dislocations, provient donc peut être soit d’une augmentation de l’intensité de la raie 1.5895 eV,
attribuée à V Cd -2Cl Te , quand le faisceau d’électrons se rapproche du mur, soit à une diminution
plus rapide du pic associé au défaut V Cd -Cl Te par rapport à celui associé à V Cd -2Cl Te .
Nous ne savons pas expliquer pourquoi la raie (D° X) (très intense en PL par rapport à la raie
(A°X)) est moins intense que la transition (A° X) dans le spectre de CL. Cela pourrait être dû au
fait que le spectre de PL est moyenné sur une zone beaucoup plus grande que celui de CL. Il
pourrait donc exister des inhomogénéités locales de la répartition des défauts, par exemple des
lacunes de cadmium en plus grande concentration au voisinage des murs de dislocations.
Cependant, les spectres de cathodoluminescence montrent systématiquement une raie (A° X)
dominante près et loin des défauts.
La question de la disparité des propriétés de transport dans notre échantillon I1 se pose étant
donnée sa structure cristalline observée précédemment au chapitre 4 par topographie en
transmission et par révélation chimique des dislocations. Ces expériences ont en effet révélé la
présence de murs de dislocations entièrement traversants dans le volume du cristal.
Afin d’évaluer l’influence de ces défauts cristallins sur les propriétés de transport des porteurs
de charges, électrons et trous, nous étudions le courant induit par irradiation avec un faisceau
d’ion (Ion Beam Induced Current : IBIC) dans l’échantillon I1. Nous cherchons ainsi à mesurer les
éventuelles disparités entre les zones avec et sans mur de dislocations.
Dans un premier temps, nous présentons l’évolution de l’Efficacité d’Induction de Charges (CIE :
Charge Induction Efficiency) des deux types de porteurs en fonction de la tension appliquée aux
bornes du détecteur. Cette analyse donne accès au produit mobilité-temps de vie, noté μτ, de
chaque porteur de charges.
160
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
Dans un deuxième temps, nous exposons des cartographies IBIC, c'est-à-dire représentant
l’efficacité d’induction de charge des électrons ou des trous sur les électrodes. Ces cartographies
révèlent les disparités d’induction avec une résolution spatiale meilleure que celle obtenue lors
des acquisitions par intégration du courant induit avec le circuit de lecture IRIS.
Des mesures préliminaires de durée de vol (Time of Flight) en IBIC (ToF-IBIC) permettront
d’évaluer les éventuels effets des défauts cristallins sur les valeurs de mobilité des électrons et
des trous.
Cette expérience a été réalisée en collaboration avec Annika Lohstroh et Christofer Jeynes de
l’université de Guildford dans le Surrey en Grande-Bretagne. L’équipe de physique possède un
accélérateur de particules de type Tandetron qui permet de produire des protons de haute
énergie allant jusqu’à 4 MeV.
Pour mesurer la réponse en courant suite à l’irradiation par un faisceau d’ions, des électrodes
métalliques ont été déposées sur les deux faces de l’échantillon I1. En effet, les électrodes platine
déposées par Acrorad avaient été supprimées afin de réaliser les attaques chimiques présentées
au chapitre 4.
Dans un premier temps, la surface est polie pour éliminer les « etch pits » créés par les attaques
Everson et Nakagawa. Lors de cette étape des solutions de suspension diamantée comportant
des tailles de grains dégressives (comprises entre 3 et 0,1 µm) sont utilisées. Puis la surface est
nettoyée par bains chimiques successifs : un premier bain de brome-méthanol élimine la zone
écrouie formée lors du polissage, les suivants permettent le dégraissage de la surface et
l’élimination des produits chimiques résiduels.
Pour déposer les électrodes, le procédé utilisé est la technique « electroless » or. Cette technique
a été choisie car elle est communément utilisée dans notre laboratoire, elle est donc plus facile
d’accès pour la préparation des échantillons, tandis que le dépôt par electroless platine n’y est
pas disponible. De plus, le contact ainsi déposé est plus fin qu’avec d’autres techniques comme
l’évaporation et permet donc une bonne pénétration des ions dans le CdTe. Des analyses SIMS
(Second Ion Mass Spectroscopy), menées au laboratoire par Nicolas Baier sur du CdTe:Cl
polycristallin, ont montré que l’or se dépose en surface sur les cents premiers nanomètres puis
la concentration diminue de 2 décades entre 100 et 200 nm [Baier, 2007, p. 35]. Cependant, le
contact n’est plus ohmique.
Les bords de l’échantillon sont recouverts avec une résine afin d’empêcher tout dépôt métallique
qui augmenterait le courant de fuite. Puis l’échantillon est plongé dans une solution de chlorure
161
de l’ensemble des pixels du champ de vue, la courbe CIE(V) peut être tracée. A partir de
faire varier la tension appliquée aux bornes du détecteur. A partir de la valeur moyenne de la CIE
- Pour tracer l’évolution de l’efficacité d’induction de charge (CIE), le manipulateur peut
pour qu’en moyenne 10 protons soient détectés par pixel.
expérience, nous avons choisi un temps d’irradiation suffisamment long, 7 minutes au minimum,
évènements qui sont arrivés au cours de l’acquisition sur ce pixel est enregistrée. Pour cette
Pour chaque point, l’efficacité d’induction de charge (CIE) moyenne pour l’ensemble des
2.5×2,5 mm² et la meilleure résolution spatiale possible est de 3 µm.
256 positions. La taille de champ de vue maximale pouvant être obtenue est de
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
d’or (AuCl 3 ) qui réagit avec le tellurure de cadmium à température ambiante et dépose une fine
couche de métal. Ensuite, les quatre bords du détecteur ont donc été rodés afin d’éliminer l’or
éventuellement déposé au cours du procédé. Cette étape s’est avérée nécessaire car la résistance
du détecteur a ainsi été augmentée de 2,5 MΩ avant rodage à 50 MΩ.
Nous avons ensuite collé l’échantillon sur une céramique via du ruban adhésif conducteur
double face. La céramique est ensuite ajustée sur le porte échantillon. La tension est appliquée
sur l’échantillon via un fil d’or grâce à un préamplificateur « Ortec 142 A », la face arrière du
détecteur est reliée à la masse.
L’échantillon est chargé dans une chambre à vide, équipée d’un microscope couplé à une caméra
optique pour visualiser la position du faisceau sur l’échantillon en temps réel.
L’échantillon est irradié avec le faisceau de protons de 4 MeV. Pour cela, la taille du faisceau est
réglée grâce à des aimants de focalisation. Le faisceau est d’abord envoyé avec une intensité
maximale sur un matériau scintillateur et, grâce à la caméra, les aimants sont réglés afin de
produire un spot le plus petit possible.
Puis, par irradiation sur une photodiode Si présente dans la chambre, la valeur du flux envoyée à
la surface de l’échantillon est ajustée de manière à ne pas détruire l’échantillon.
Les protons déposent leur énergie près de la surface. Le nuage de porteurs de charges créés
migre dans le volume du cristal, le signal mesuré est la charge induite sur l’électrode située à
l’opposée de la surface irradiée, pour chaque évènement. En parallèle, la position de l’impact est
enregistrée.
- Pour réaliser un champ de vue, la ligne du faisceau est équipée de trois quadripôles et
d’un système électrostatique pour défléchir sa direction et réaliser des acquisitions sur
256
162
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
l’ajustement des données avec l’équation de Hecht donnée par l’équation 7 au chapitre 3, nous
pouvons extraire les produits mobilité-temps de vie, notés μτ, de chaque type de porteur.
- Pour réaliser une cartographie IBIC, plusieurs champs de vue sont acquis
successivement, à une tension fixée, à partir de l’irradiation de différentes zones jointives de
l’échantillon. Puis ils sont ordonnés manuellement.
- Pour acquérir des données en ToF-IBIC, le signal transitoire de chaque impulsion est
analysé afin d’extraire le temps de transit des porteurs de charges au cours de l’évènement.
Les publications de Paul Sellin, [Sellin, 2007] et [Sellin, 2008], expliquent le principe de la
chaîne électronique d’acquisition (préamplificateur de charges, mise en forme du signal par un
amplificateur, système de détection de la position de l’impact) pour les deux méthodes
d’acquisition : les mesures IBIC (mode analogique) et les mesures TOF-IBIC (mode numérique).
En mode analogique, les impulsions créées passent à travers un préamplificateur de mise en
forme, le temps de mise en forme que nous avons choisi pour réaliser nos mesures est de 3 µs.
L’amplitude du signal dû à la charge induite est acquise en chaque pixel grâce à un analyseur
multicanaux. En mode numérique, un programme LabVIEW donne accès au signal transitoire
créé par un ion.
La caractéristique courant-tension du détecteur I1 avec des contacts or n’est pas symétrique (le
contact est de type Schottky) avec moins de courant de fuite dans un sens. Pour obtenir des
valeurs de courant de fuite similaires pour le signal induit par les trous et celui par les électrons,
l’échantillon est décollé et retourné entre les deux acquisitions.
Nous présentons dans un premier temps les courbes de CIE(V) obtenues pour chaque type de
porteurs. Nous tenons à préciser que ces mesures sont préliminaires afin de vérifier le
fonctionnement du montage expérimental. Le but de cette expérience n’est pas de connaître les
valeurs du produit mobilité-temps de vie des porteurs qui ont été calculées au laboratoire avec
des méthodes appropriées (ToF-alpha et ToF-laser) [Gros d’aillon, 2005, p. 43] et qui sont déjà
rapportées dans la littérature pour le CdTe :Cl (THM) Acrorad [Takahashi, 2001].
Le but de cette expérience est en effet d’étudier les variations relatives du produit µτ entre les
zones du cristal avec et sans défaut. C’est pourquoi, nous présentons ensuite des cartographies
IBIC représentant les inhomogénéités de CIE dans l’échantillon I1.
163
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
Nous avons mesuré l’efficacité d’induction de charge (CIE) aux tensions -5, -6, -8, -10, -11, -15,
-19 et -23 V pour les électrons et 25, 28, 32, 38, 76, 95 et 114 V pour les trous. Ces courbes sont
présentées sur la Figure 104. Nous soulignons ici que les valeurs tensions ne sont pas celles
effectivement appliquées sur le détecteur mais elles ont été calculées en prenant en compte la
chute de tension due au branchement à l’Ortec 142 A dont la résistance interne est de 100 MΩ.
Le logiciel Qtiplot permet d’ajuster l’équation de Hecht donnée dans l’équation 7 avec les
données expérimentales. A partir de l’extraction des variables de l’ajustement, nous pouvons
ainsi déterminer les valeurs de la charge initiale déposée et du produit µτ du porteur considéré.
Pour appliquer ce modèle, nous avons fait deux hypothèses. Tout d’abord, le champ appliqué est
considéré comme constant dans l’épaisseur du détecteur et égal au rapport entre la tension V et
l’épaisseur d de l’échantillon. Puis, nous supposons que la charge collectée est générée par un
seul type de porteur, bien que le faisceau de protons pénètre à 100 µm de profondeur comme
nous l’avons montré par simulation au chapitre 3. En réalité, dans le cas de l’étude du signal trou,
une partie de la charge collectée est due au courant induit par les électrons sur 100 µm et vice
versa.
(a) (b)
Figure 104. (a) Profil de la charge moyenne induite par les trous en fonction de la tension : points noirs, approximé
par la courbe de Hecht standard en bleu et par la courbe de Hecht modifiée en rouge. (b) Profil de la charge moyenne
induite par les électrons en fonction de la tension : points noirs, approximé par la courbe de Hecht en rouge.
Grâce à la Figure 104 (a), nous remarquons que les données d’induction des trous sur la cathode
(points noirs) ne peuvent pas être ajustées par l’équation de Hecht donnée dans l’équation 7. En
effet, d’après l’équation 7, les trous n’induisent pas de courant sur les électrodes quand la
tension appliquée aux bornes du détecteurs est nulle (CIE(0) = 0). Or l’expérience montre la
présence d’une tension à l’origine non nulle valant environ +19 V. Les valeurs d’induction des
trous sur la cathode ne correspondent donc pas à la forme de la courbe bleue donnée par
l’équation de Hecht standard. Une meilleure correspondance est obtenue en incluant un offset V’
164
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
dans la formule de Hecht standard comme le montre la courbe rouge sur la Figure 104 (a). Cet
offset est estimé grâce au logiciel Qtiplot et représente la tension de décalage déterminée par
l’intersection entre la courbe expérimentale de la CIE et l’axe des abscisses. La forme de
l’équation de Hecht modifiée est donnée par l’équation 11.
équation 11.
165
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
acquises avec un contact platine [Takahashi, 2001]. Cette différence peut également entraîner
des écarts entre nos valeurs et celles de la publication.
La surévaluation du produit μτ trou n’est pas un problème pour réaliser les cartographies IBIC
car nous nous intéressons aux valeurs relatives entre les zones avec des défauts cristallins et les
zones sans.
Nous avons enregistré un champ de vue à chaque tension permettant de tracer les CIE(V). Ainsi,
nous avons déterminé les conditions donnant le meilleur contraste sur l’image, pour chaque type
de porteur, avant d’acquérir les cartographies IBIC.
La charge induite par les électrons sur l’anode produit la cartographie présentée sur la Figure
105. Elle a été acquise à -19 V. L’image acquise mesure 6×3.75 mm2 et regroupe 8×5 champs de
vue. Chacun mesure 750 µm de large et est composé de 256×256 pixels, tel que la taille des
pixels est de 3 µm. Nous observons une réponse non-uniforme du détecteur avec trois types
différents de défauts listés ci-dessous. Les valeurs de CIE sont données en unité arbitraire.
1) Des lignes dont les valeurs d’efficacité d’induction de charges, comprises entre 2200 et
2400, sont plus faibles que celle des zones sans défauts (comprises entre 2300 et 2500).
La largeur moyenne de ces défauts est 46 µm. Nous observons que certains de ces
défauts sont rectilignes et traversent toute la longueur de la cartographie, tandis que
d’autres, plus petits, s’emmêlent aux autres.
2) Des disques dont la CIE moyenne est de 2200. Le diamètre apparent de ces défauts est de
66 µm.
3) Des défauts larges dont la CIE moyenne est inférieure à 1000 comme nous pouvons
l’observer sur le haut droit de la Figure 105.
166
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
Figure 105. Cartographie de l’efficacité d’induction de charge par les électrons acquise à -19 V. La cartographie est la
juxtaposition de 40 champs de vue couvrant une zone de 6×3.75 mm2.
La Figure 106 représente la cartographie de l’efficacité d’induction de charge sur la cathode par
les trous. Elle couvre une zone de 3.75×3.75 mm² avec 25 champs de vues. Ces données ont été
acquises à 76 V. Cette image IBIC montre également une répartition non-uniforme du courant
induit par le mouvement des porteurs de charges. En effet, nous observons trois types de
défauts similaires à ceux observés précédemment listés ci-dessous.
1) Des lignes dont les valeurs d’efficacité d’induction de charges, comprises entre 2100 et
2200, sont plus faibles que celle des zones sans défauts (comprises entre 2100 et 2300).
La largeur moyenne de ces défauts est 20 µm. Nous observons que certains de ces
défauts sont rectilignes et traversent toute la longueur de l’image, tandis que d’autres,
plus petits, s’emmêlent aux autres.
2) Des disques dont la CIE moyenne est de 1900. Le diamètre apparent de ces défauts est de
36 µm.
3) Des défauts larges dont la CIE moyenne est inférieure à 1020 comme nous pouvons
l’observer en bas à gauche de la Figure 106.
Figure 106. Cartographie de l’efficacité d’induction de charge par les trous acquise à 76V. La cartographie est la
juxtaposition de 25 champs de vue couvrant une zone de 3.75×3.75 mm2.
167
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
Les variations de contraste dans les images IBIC peuvent être dues à trois phénomènes
différents. La charge induite sur les électrodes dépend de la tension appliquée aux bornes du
détecteur, mais également de la charge déposée initialement Q 0 et du produit µτ des porteurs. En
effet, la valeur de la charge initiale peut fortement varier à cause de la présence d’irrégularités
dans le dépôt des électrodes ou de défauts de surface dans le CdTe. La valeur du produit µτ est
influencée par le piégeage des porteurs par des défauts présents dans le volume du cristal.
Afin de déterminer l’origine du contraste dans les cartographies, nous avons fait varier
mathématiquement les deux paramètres, µτ et Q 0 , sur un des champs de vue acquis avec le
signal trous. La Figure 107 (a) représente la valeur de µτ, calculée en chaque pixel, qui permet
d’approximer au mieux, avec l’équation de Hecht, l’évolution des valeurs de charge induite. La
Figure 107 (b) représente la valeur de Q 0 , calculée en chaque pixel, qui permet d’approximer au
mieux l’évolution de la charge induite sur ce pixel avec l’équation de Hecht. Les défauts linéaires
observés dans la Figure 106 sont visibles sur l’image (a) de la Figure 107, représentant les
variations de µτ, mais sont absents sur l’image (b). Les défauts linéaires sont donc probablement
dus à des variations du produit µτ dans cette zone, et non pas à des variations de charge initiale
déposée.
(a) (b)
Figure 107. (a) Cartographie des produits µτ qui permettent d’approximer le mieux l’évolution de la charge induite
avec la formule de Hecht. (b) Cartographie des valeurs de Q0 qui permettent d’approximer le mieux l’évolution de la
charge induite avec la formule de Hecht.
La résolution spatiale des images n’est pas seulement liée à la taille du spot choisie mais
également à la taille du nuage électronique engendré par le rayonnement ionisant, à sa diffusion
et à la répulsion électrostatique entre les charges lors de leur parcours vers l’électrode de
collecte [Bolotnikov, 2011].
168
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
équation 12.
Grâce au logiciel SRIM, présenté dans la partie 3.3.1, nous avons pu simuler le profil de dépôt
la densité de courant, et n la concentration de particules.
d’énergie des protons dans le détecteur I1. La profondeur de pénétration maximale des protons
est de 100 ± 5 µm et l’écart type latéral dans le matériau, représentant une partie de la perte de
résolution spatiale dans la cartographie finale, est d’environ 10 µm.
Nous allons également nous intéresser à la diffusion du nuage d’électrons dans le CdTe.
L’équation 12 représente l’équation de conservation du nombre de particules en trois
dimensions avec
169
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
100
Figure 108. Profil de l’élargissement du nuage électronique en fonction de la tension aux bornes du détecteur
Corrélations des inhomogénéités observées sur les cartographies avec les défauts cristallins
Pour déterminer l’origine des inhomogénéités sur les cartographies IBIC, nous les avons
comparées avec la répartition des dislocations et des inclusions dans le cristal. En effet, grâce à
la caméra présente dans la chambre à vide, nous pouvons connaître la position du faisceau sur la
surface de l’échantillon et ainsi repérer la zone investiguée avec le faisceau IBIC.
Nous comparons les cartographies IBIC avec la répartition des défauts sur la face irradiée du
cristal. En effet, ce sont les défauts proches de la surface qui vont influencer la charge induite sur
l’électrode car, le nuage électronique étant alors de petite taille, un plus grand nombre de
porteurs va être piégé et la CIE va être d’autant plus diminuée. Un défaut plus profond dans le
volume perturbe moins de porteurs. De plus, un électron piégé au milieu de l’épaisseur du cristal
a déjà induit la moitié de sa charge sur l’électrode de collecte comme nous l’avons expliqué au
chapitre 1 dans la Figure 7.
Nous rappelons que l’échantillon a été retourné entre l’acquisition du signal électron et celle du
signal trou, la surface irradiée n’est donc pas la même d’une acquisition à l’autre. La cartographie
de signal IBIC induit par les électrons doit être rapprochée de la cartographie des dislocations
sur la face tellure et celle du signal trous avec la face cadmium. Les distributions des
dislocations, dans les zones des faces tellure et cadmium irradiées avec le faisceau IBIC, sont
présentées sur la Figure 109.
170
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
(a) (b)
(c) (d)
Figure 109. (a) Dislocations révélées sur la face tellure dans la zone irradiée avec le faisceau IBIC pour l’acquisition du
signal électron. (b) Cartographie de l’efficacité d’induction de charge par les électrons acquise à -19 V.
(c) Dislocations révélées sur la face cadmium dans les zones irradiées avec le faisceau IBIC pour l’acquisition du
signal trou.(d) Cartographie de l’efficacité d’induction de charge par les trous acquise à 76V.
Nous remarquons que les lignes avec une CIE plus faible sur la cartographie IBIC correspondent
bien à la distribution des murs de dislocations sur les faces de l’échantillon I1.
En effet, leur forme sur la cartographie de la charge induite par les électrons ressemble à la
forme du réseau de dislocations révélé sur la face tellure qui est la surface irradiée. Leur largeur
est 5 à 7 fois plus grande que celle des figures d’attaques Everson et donc beaucoup plus grande
que la largeur réelle d’un mur de dislocations. Les rectangles et cercles sur la Figure 109 (a) et
(b) mettent en évidence certaines des similitudes entre les deux images.
D’autre part, la cartographie de charges induites par les trous semble être mieux corrélée avec la
répartition des sous-joints de grains sur la face cadmium (la face irradiée du cristal) sur la
Figure 109 (c). Les rectangles et cercles sur la Figure 109 (c) et Figure 109 (d) mettent en
évidence ces similitudes entre les deux images.
La diffusion des porteurs de charges au cours de leur parcours dans le volume de l’échantillon
explique le fait que les défauts sont plus larges en IBIC que sur les images acquises au
microscope optique comme nous le vérifierons dans la partie précédente.
Les défauts linéaires avec des valeurs de charge induite plus faibles que la moyenne sont dus à la
présence de murs de dislocations dans le cristal de CdTe.
Des effets similaires des murs de dislocations sur l’efficacité de collecte des charges dans des
détecteurs à base de CdZnTe ont été présentés au chapitre 1 [Marchini, 2010].
171
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
Les ronds noirs pourraient être des inclusions de tellure car leur forme, leur répartition et leur
densité correspondent aux images réalisées au microscope infrarouge sur ce même échantillon
(cf. Figure 79). En effet, les ronds noirs observés sur les cartographies IBIC sont uniformément
distribués avec des formes similaires à celles des inclusions de tellure observées sur les
cartographies acquises en lumière infrarouge. De plus, la taille de ces défauts, de quelques
dizaines de microns, est comparable à celle des inclusions de tellure dans ce matériau, en
prenant en compte la diffusion du nuage de charges au cours du parcours des charges dans le
volume du cristal. Une corrélation exacte ne peut cependant pas être mise en évidence car la
surface de l’échantillon a été polie avant le dépôt des électrodes or. Au cours de cette étape, les
inclusions de la surface sont arrachées. La densité des inclusions de tellure révélée en
microscopie IR est plus importante que celle de la cartographie IBIC car les inclusions en
profondeur dans le cristal donnent un contraste plus faible en IBIC car le nuage de charges est
alors beaucoup plus large que le défaut au moment où il l’atteint.
Des effets similaires des inclusions de tellure sur l’efficacité de collecte des charges dans des
détecteurs à base de CdZnTe ont été mis en évidence dans la littérature [Bolotnikov, 2011].
Les défauts plus larges avec moins de 1100 coups pour la CIE correspondent certainement à des
rayures ou des défauts déposés sur les électrodes.
Influence des défauts sur le produit mobilité-temps de vie des deux types de porteurs
Afin d’étudier en détail, l’influence des défauts du cristal sur les propriétés de transport des
porteurs de charges dans le volume du matériau, nous avons évalué leurs effets sur la valeur du
produit mobilité-temps de vie des électrons et des trous. L’évolution de ce produit en fonction de
la zone investiguée est présentée sur la Figure 110.
(a) (b)
Figure 110. Profils de la charge moyenne induite en fonction de la tension sur les défauts linéaires (points rouges =
mesures, et courbe rouge = ajustement), sur les ronds noirs (points noirs = mesures, courbe noire = ajustement) et
sur les zones sans défauts (points bleus = mesures, courbe bleue = ajustement) (a) par les électrons (b) par les trous.
172
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
Grâce à l’extraction des paramètres de l’ajustement de ces courbes, avec les équations de Hecht
modifiées pour lesquelles nous avons fixé la valeur de Q 0 , nous avons calculé la diminution
relative du produit µτ sur les zones avec défauts par rapport aux zones sans défauts. Les valeurs
sont référencées dans le Tableau 9.
Tableau 9. Valeurs moyennes de µτ extraites dans les différentes zones pour les signaux électrons et trous.
Ce tableau montre que les lignes contrastées sur la Figure 105 et la Figure 106 sont dues à des
variations de µτ pour une charge initiale déposée Q 0 constante. De plus, la surestimation des
valeurs de µτ trou ne nous gêne pas car nous nous intéressons aux différences relatives entre
celles calculées sur les lignes, les ronds et les zones sans défauts, qui sont significatives.
La diminution de µτ entre les murs de dislocations et les zones sans défauts est de 21 % pour les
trous et 14 % pour les électrons. Ces différences sont en adéquation avec les observations faites
sur les cartographies IBIC : les valeurs de CIE sont plus élevées, donc les propriétés de transport
des porteurs de charges semblent meilleures, dans les zones sans défauts, où il y a moins de
piégeage de charge, comparées aux valeurs CIE extraites sur les lignes.
De plus, le produit µτ moyen pour l’ensemble des pixels d’un champ de vue est plus faible que
celui extrait dans les zones sans défauts.
En parallèle des acquisitions IBIC, des données ToF-IBIC ont été acquises à partir du signal
induit par les trous dans cet échantillon et pour le même champ de vue que les images
présentées à la Figure 107.
La Figure 112 (a) représente la charge moyenne induite dans cette zone et la Figure 112 (b)
présente les valeurs de temps de transit moyen par pixel. La Figure 112 (b) a été obtenue par
extraction en chaque pixel du temps de montée, défini par le temps que met le signal de la Figure
111 pour passer de 10 à 90 % de la charge totale. Ce temps représente le temps de transit de la
charge qui est lié à la mobilité par le rapport d’d/(µV).
173
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
Figure 111. Forme typique d’une impulsion obtenue pour l’échantillon I1.
Nous observons une ligne avec une charge induite plus faible dans l’image (a) tandis que, dans
l’image (b), elle n’est plus visible. Le temps de transit indiquant l’évolution de la mobilité en
chaque pixel ne semble donc pas être influencée par le mur de dislocations.
L’absence de contraste dans l’image (b) entre le mur de dislocations et le reste du CdTe nous
amène à en déduire que les murs de dislocations influencerait la durée de vie des porteurs de
charges plutôt que leur mobilité.
(a) (b)
Figure 112. (a) Cartographie de la charge moyenne induite par les trous à 76 V. (b) Cartographie du temps de transit à
76 V.
De plus, grâce à ces données, nous pouvons extraire un temps de transit d’environ 1000 ns pour
les trous, ce qui permet de calculer une valeur de mobilité de 95 cm²/V.s. Ce résultat est
cohérent avec les données répertoriées dans le Tableau 2 du chapitre 1.
Des données ToF-IBIC ont également été acquises à partir du signal induit par les électrons dans
cet échantillon et pour un autre champ de vue. Nous observons également des lignes avec une
charge induite plus faible sur la Figure 113 (a) tandis que, dans l’image représentant le temps de
transit, elle n’est plus visible comme nous le montrons sur la Figure 113 (b).
174
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
(a) (b)
Figure 113. (a) Cartographie de la charge moyenne induite par les trous à 9.5 V. (b) Cartographie du temps de transit
à 9.5 V.
Le temps de transit est alors d’environ 800 ns pour une tension de 9.5 V, ce qui permet de
calculer une valeur de mobilité de 950 cm²/V.s. Ce résultat est cohérent avec les données
répertoriées dans le Tableau 2 du chapitre 1.
Par manque de temps, nous n’avons pas pu acquérir des données de ToF-IBIC supplémentaires
pour vérifier ces résultats sur d’autres champs de vue. Nous ne pouvons donc pas conclure avec
certitude et l’acquisition d’une nouvelle série de données serait intéressante pour aller plus loin
sur ce sujet.
175
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
6.4. Conclusion
Nous avons mesuré dans un premier temps la concentration en atome de chlore de notre
échantillon I1. Elle est de 3.3 ppm massique, donc comparable aux valeurs reportées dans la
littérature. Par ailleurs, les images SIMS n’ont pas mis en évidence de ségrégation des atomes de
chlore autour des sous-joints de grains.
Des expériences de spectroscopie optique nous ont permis d’observer des murs de dislocations
en cathodoluminescence et ainsi de mettre en évidence leur caractère non-radiatif. Les spectres
de cathodoluminescence réalisés au voisinage et sur ces défauts n’ont pas montré l’apparition de
la bande de luminescence Y normalement attribuée aux dislocations pour ce type de matériau
dans la littérature. Cette bande n’ayant pas été spatialement corrélée avec une dislocation ou un
mur de dislocations à notre connaissance, nous nous demandons si elle est vraiment liée aux
dislocations ou bien à d’autres impuretés ou défauts qui auraient pu être générés au cours de
l’indentation.
Les spectres de photoluminescence nous ont permis d’indexer les raies observées dans les
spectres de cathodoluminescence qui étaient alors trop peu résolus pour que leur nature soit
déterminée de manière certaine. Ils ont notamment confirmé que le pic large observé vers
1.47 eV, énergie à laquelle sont reportées la bande Y et les DAP(V Cd _Cl Te ) dans la littérature, peut
être attribué aux transitions de type DAP dans notre matériau.
Afin de confirmer l’absence de bande de luminescence Y et l’éventuelle augmentation de la raie
associée au V Cd -Cl 2 , des cartographies très résolues spatialement et énergétiquement pourraient
être entreprises en photoluminescence sur des échantillons de CdTe :Cl, préalablement attaqués
chimiquement afin de vérifier la présence de murs de dislocations.
Pour étudier l’influence des murs dislocations sur les niveaux profonds dans le gap du CdTe, des
études de PICTS sont nécessaires. Une étude est en cours en collaboration avec Anna Cavallini de
l’université de Bologne sur l’étude comparative des spectres entre un échantillon avec une faible
densité de murs de dislocations (cf. Figure 63 (a)) et d’un échantillon, type I1, avec une grande
densité. Les résultats ne sont pas présentés dans ce manuscrit.
Nous avons réalisé des mesures IBIC afin d’étudier la réponse d’un échantillon de CdTe
monocristallin à une irradiation avec un faisceau de protons dans le but de mieux comprendre
176
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
l’influence des murs de dislocations sur les propriétés de transport des porteurs de charges
électrons et trous.
Les cartographies d’efficacité d’induction de charge montrent une réponse non-homogène du
détecteur. Nous avons effectivement observé différents défauts avec des valeurs de CIE plus
faibles que la moyenne. Nous avons montré qu’ils sont dus à des variations du produit µτ du
porteur de charge considéré.
La comparaison des images IBIC avec les révélations chimiques, réalisées sur les faces tellure et
cadmium présentées au chapitre 4, montrent que les lignes, avec une valeur de CIE plus faible,
sont corrélées avec les murs de dislocations présents sur la face d’entrée du faisceau de protons.
Les murs de dislocations détériorent donc les propriétés de transports du détecteur.
Notamment, La valeur du produit mobilité-temps de vie sur les murs de dislocations est plus
faible que dans les zones sans défauts : de 21 % pour les trous et de 14 % pour les électrons.
D’autre part, une étude préliminaire faite avec des données de ToF-IBIC laisse penser que les
défauts dans le matériau influencent le temps de vie des porteurs de charges pour diminuer
l’efficacité d’induction de charge plutôt que leur mobilité.
Nous pensons que les disques noirs observés dans les images IBIC correspondent aux inclusions
de tellure. Une correspondance exacte ne peut cependant pas être démontrée car la surface de
l’échantillon I1 a été polie, et donc les inclusions de tellure arrachées, avant dépôt des électrodes
par electroless or pour cette expérience.
177
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
6.5. Références
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178
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
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@1 http://soft.proindependent.com/qtiplot_fr.html
179
CHAPITRE 6EFFET des murs de dislocations sur les impuretés et les porteurs de charge dans le
CdTe
180
0 CONCLUSION
Conclusion
Cette thèse a été motivée par l’observation d’inhomogénéités spatiales dans la réponse de
capteurs de rayons X, fonctionnant en intégration, développés au laboratoire. Ce travail se
concentre sur des détecteurs composés de monocristaux de CdTe:Cl produits avec la méthode
THM sur lesquels sont déposées deux électrodes de platine : Pt/CdTe/Pt. Ces perturbations se
manifestent sur les images de courant de fuite et de photocourant par l’apparition de lignes de
quelques pixels de large avec plus ou moins de courant.
De plus, les corrections d’image classiquement utilisées en radiographie ne sont pas suffisantes
pour corriger ces défauts. En effet, après avoir effectué sur l’image d’un objet à observer en
radiographie : la soustraction de l’image d’offset et la division par l’image de gain du détecteur,
certaines lignes restent toujours visibles sur le capteur. Cette rémanence traduit le caractère
non-linéaire de ces inhomogénéités de fonctionnement. Par ailleurs, après un certain temps
d’irradiation, de nouvelles lignes apparaissent sur l’image de l’objet, ce qui implique que ces
défauts ont un comportement qui évolue dans le temps, tel que la correction d’offset et de gain
est de moins en moins efficace.
Une étude sur l’évolution temporelle du nombre de charges collectées sur ces défauts en
fonction du temps montre différentes vitesses d’augmentation entre les électrodes perturbées
par la présence du défaut et celles du reste du capteur. En effet, le photocourant augmente en
fonction du temps pour l’ensemble des pixels du capteur, mais il augmente plus rapidement sur
les lignes avec plus de photocourant et moins rapidement sur les lignes avec moins de
photocourant.
En partant de ces constats, l’objectif de ce travail est de comprendre quels sont les phénomènes
à l’origine de ces inhomogénéités spatiales.
Grâce à des attaques chimiques, nous avons étudié la répartition des dislocations à la surface de
différents échantillons. Les dislocations s’alignent, pour former des murs, selon des directions
privilégiées qui sont globalement les plus compactes de la maille cubique face centrée. Nous
avons ainsi pu conclure qu’ils seraient formés au cours de la croissance des cristaux de CdTe:Cl
avec la méthode THM. En effet, les dislocations s’arrangent en murs pour relâcher les
contraintes thermomécaniques induites thermiquement lors de la croissance du cristal. Ce type
d’arrangement est en adéquation avec les mouvements de glissement accessibles à ces défauts
lors des méthodes de croissance dites à basse température par rapport au point de fusion du
CdTe. D’autre part, nous avons montré par topographie X en faisceau blanc que l’étape
181
0 CONCLUSION
d’hybridation du cristal sur le circuit de lecture ne semble pas jouer de rôle dans la création des
murs de dislocations.
Par ailleurs, l’arrangement en sous-joints des dislocations a été mis en évidence de manière
systématique pour les cristaux issus de la technique de croissance « THM » pour des échantillons
de CdTe et de CdZnTe produits par d’autres fournisseurs, contrairement aux cristaux de CdTe et
de CdZnTe issus de méthodes de croissance réalisées à plus haute température (vertical
Bridgman par exemple), au sein desquels des arrangements des dislocations en cellules ont été
révélés.
Nous avons aussi étudié la propagation des murs dans le volume de nos échantillons par attaque
chimique et par topographie X au synchrotron. Nous remarquons de manière évidente pour nos
échantillons de CdTe que les deux faces tellure et cadmium sont très similaires, ce qui prouve
que les murs de dislocations sont entièrement traversants dans le volume du cristal. Ces défauts
se propagent théoriquement dans les plans les plus compacts de la maille cubique face centrée
qui sont les plans de la famille {111}. Or ces plans forment des angles de 70° entre eux et donc de
20° avec la surface (111)Cd, les murs de dislocations devraient ainsi se retrouver à l’identique
sur les deux faces à l’angle de propagation près. Cette théorie se vérifie bien pour l’échantillon
S1, cependant nous avons remarqué pour l’échantillon I1 que les murs ne se propagent pas tous
dans les plans {111}, mais semblent en effet changer de direction de propagation dans le volume
du cristal. Ce résultat peut signifier l’activation de mouvements de montées et de glissements
déviés dans ce cristal.
Les attaques chimiques mettent en évidence une très bonne corrélation entre la répartition des
murs de dislocations sur la face cadmium du cristal I1 et les lignes de courant perturbé
observées sur la réponse des détecteurs. La face Cd est celle sur laquelle est déposée l’anode
pixellisée et sur laquelle les électrons sont collectés pour donner les images de courant de fuite
et de photocourant. Nous pouvons conclure que les murs de dislocations induisent des
inhomogénéités spatiales de fonctionnement en perturbant le transport des porteurs charges au
voisinage de l’anode de collecte. Ce résultat a fait l’objet d’une première publication dans le
journal « Transaction on Nuclear Science ».
Pour comprendre comment les défauts influencent la collecte des charges, nous avons investigué
ces défauts grâce à différentes techniques de caractérisation.
Ces expériences de spectroscopie optique à basse température ont montré que ces défauts
induisent des recombinaisons non-radiatives dans le cristal. Grâce à la réalisation de plusieurs
spectres autour de ces défauts étendus, nous n’avons pas observé l’apparition de la bande de
182
0 CONCLUSION
luminescence Y, usuellement associée aux dislocations dans la littérature pour ce type de cristal.
Par ailleurs, nous avons mis en évidence un décalage vers les hautes énergies du pic associé au
centre A en cathodoluminescence quand le spectre est acquis près du défaut, qui n’est pas
observé pour les autres raies. Ce décalage pourrait être associé à des phénomènes
piézoélectriques induits par la présence du sous-joint de grain qui engendrent des contraintes
dans le cristal, ou à une augmentation de l’intensité d’un pic associé aux transitions (V Cd -Cl 2 X).
En effet, une augmentation de cette raie, située à plus haute énergie, pourrait entrainer un
décalage du maximum d’intensité vers les hautes énergies. Dans cette hypothèse, il y aurait des
inhomogénéités locales de la concentration en V Cd et en chlore au voisinage des murs de
dislocations.
Nous avons également étudié les propriétés de transport des porteurs de charge sur ces défauts
étendu par mesures IBIC. Les cartographies d’efficacité d’induction de charge montrent qu’ils
diminuent le produit mobilité-temps de vie des porteurs de charges électrons et trous dans le
CdTe:Cl monocristallin. La valeur du produit mobilité-temps de vie sur les murs de dislocations
est plus faible que dans les zones sans défauts : de 21 % pour les trous et 14 % pour les
électrons. Les données préliminaires de ToF-IBIC ont montré que ces défauts étendus
influenceraient plutôt le temps de vie des porteurs de charge que leur mobilité. Ces résultats
font l’objet d’une publication soumise dans le journal « Nuclear Instrument and Methods in
Physics Research, A ».
Les mesures réalisées au cours de ce travail de thèse nous permettent de conclure sur les
origines des perturbations de courant de fuite et de photocourant de nos détecteurs qui sont les
murs de dislocations. Les techniques de caractérisation appliquées sur ces murs permettent de
mieux comprendre comment ces défauts influencent la collecte des charges dans nos détecteurs.
Ces travaux ouvrent de nouvelles perspectives.
A court terme, nous avons proposé dans les différents chapitres des techniques de
caractérisation qui pourraient être utiles pour mieux comprendre le fonctionnement des murs
de dislocations dans notre matériau.
A plus long terme, une réflexion en cristallogenèse doit être poussée afin de trouver des
solutions pour éliminer ces défauts étendus dans le CdTe.
183