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Le texte suivant est tir de Perspectives : revue trimestrielle dducation compare (Paris, UNESCO : Bureau international dducation), vol.

XXIV, n 3/4, 1994 (91/92), p. 677-690. UNESCO : Bureau international dducation, 2000 Ce document peut tre reproduit librement, condition den mentionner la source.

LON TOLSTOI
(1828-1910)
Semion Filippovitch Egorov1 Depuis plus de cent ans, Lon Tolsto fait partie des crivains les plus clbres et les plus lus du monde entier. Son nom figure invariablement parmi les principaux auteurs cits dans lIndex translationum de lUNESCO. Tolsto, crivait V.I. Lnine en 1910, a su poser dans ses crits un si grand nombre dimmenses problmes, il a su atteindre une telle puissance artistique que ses uvres se classent parmi les meilleures de la littrature mondiale2 . La gloire de Tolsto crivain a, dans une certaine mesure, clips ses ides pdagogiques. Pourtant, sa pense et son action dans ce domaine ont engendr dinnombrables dbats qui ne sont pas encore clos. Parmi ses contemporains, certains pdagogues professionnels mettaient mme en doute sa comptence quant aux questions dducation, et lenseignement quil dispensait dans lcole quil avait ouverte tait presque considr comme le divertissement dun aristocrate russe en proie lennui. Nanmoins, lhistoire de la pdagogie des temps modernes tmoigne exactement du contraire; en effet, si les crations littraires de Tolsto reprsentent un grand progrs dans le dveloppement culturel de lhumanit, son exprience pdagogique a aussi largement contribu aux sciences de lducation et lenseignement. En dpit dune opinion largement rpandue parmi les critiques littraires, Tolsto plaait ses ouvrages pdagogiques au-dessus de ses uvres littraires (il la soulign plusieurs reprises). Pour savoir qui a raison, de lcrivain lui-mme ou de ses interprtes, il faut examiner la place quoccupaient les questions de pdagogie dans sa vie et ses activits, dfinir ce quil a apport de nouveau dans ce domaine, et dgager linfluence de ses thories sur le dveloppement du systme scolaire et de la pense pdagogique.

Le chemin de la pdagogie
Ds sa jeunesse, Lon Tolsto a souhait contribuer concrtement lducation du peuple. Dans son premier ouvrage, Les quatre tapes du dveloppement dont la structure est, cet gard, symbolique, il dcrit le processus de formation du caractre de lhomme, depuis la petite enfance (moment de lapparition de la vie morale) jusqu la jeunesse (poque o elle se dfinit compltement). Cest en 1852-1857 que parat la srie de nouvelles autobiographiques, Enfance, Adolescence et Jeunesse; lauteur y tudie lunivers spirituel de lenfant, de ladolescent, puis du jeune homme, leurs motions, le processus dapprentissage dans lequel ils sont engags et leur dveloppement moral, notamment dans le cas dun enseignement ayant un objectif prcis. Dans ces trois nouvelles on retrouve lide quil est indispensable de respecter la personnalit de lenfant, conviction dont est pntr Tolsto et qui deviendra la pierre angulaire de ses recherches pdagogiques. La quatrime et dernire partie, qui devait sintituler Lhomme adulte, na pas t rellement crite mais on la retrouve dans dautres uvres du jeune Tolsto telles que la

nouvelle, Les cosaques et le rcit, La matine dun propritaire (lui aussi, dans une large mesure, autobiographique) dont le hros abandonne luniversit sans avoir achev ses tudes, estimant avoir acquis sa vision du monde, compris le sens de la vie et choisi son avenir, tout en tant convaincu que lessentiel est de faire du bien aux gens parmi lesquels on vit. Le bonheur individuel est insparable du bien-tre dautrui, et tant que la classe la plus nombreuse de la population - la paysannerie - continuera croupir dans la misre et lignorance, le bien-tre de la socit et, par consquent, le bien-tre individuel demeureront impossibles :
Agir sur cette classe de la population simple, rceptive et innocente, la dlivrer de la pauvret, lui procurer le bien-tre social et lducation dont, par bonheur, je bnficie, corriger ses vices ns de lignorance et de la superstition, dvelopper son sens moral et lamener aimer ce qui est bon ... quel avenir radieux3 ! .

Comme le hros de son rcit, Tolsto, alors g de vingt et un ans, ouvre une cole dans sa proprit de famille, Iasnaa Poliana, et entreprend de soccuper de lducation des enfants des paysans. Cette premire exprience fut de courte dure : les cours lui pesaient, peut-tre en raison de linsuffisance de ses connaissances professionnelles ou parce quil aspirait confusment dautres champs daction. Au printemps 1851, Tolsto entre dans larme; il sert dabord dans le Caucase, puis fait partie des dfenseurs de Sbastopol. Peu de temps aprs la guerre de Crime (1853-1856), ayant donn sa dmission, il retourne Iasnaa Poliana et reprend ses activits ducatives, mais cette fois avec un plus grand nombre denfants de paysans. Il est intressant qu laube de cette activit nouvelle pour lui, il crive en ce termes au pote Athanase Fet, comme pour se justifier :
Il ne sagit pas pour nous de nous instruire, mais bien plutt dapprendre ces enfants au moins un peu de ce que nous savons4 .

Lobservation du comportement de lenfant, de ladolescent et du jeune homme par Tolsto lcrivain, tout comme ses tentatives denseignement lui rvlrent que lducation tait loin dtre une chose facile, et que, sans exprience professionnelle, il tait impossible de la pratiquer avec succs. Cest pourquoi il se mit consulter les ouvrages spcialiss, entrer en contact avec des ducateurs et commena sintresser aux expriences poursuivies dans divers pays. En 1857, Tolsto entreprit son premier voyage en Europe, visitant lAllemagne, la France et la Suisse. Tout en se familiarisant avec la culture europenne, il tudia galement les mthodes denseignement de ces pays, et, de retour en Russie, largit et renfora son activit denseignant, surtout pendant la priode allant de 1859 1862. De son propre aveu, ce furent trois annes de passion pour cette cause . A cette poque, lducation ne passionnait pas seulement Lon Tolsto, mais toute llite intellectuelle dmocrate de Russie o se prparait une rforme scolaire. Les projets ministriels faisaient lobjet de vifs dbats au sein dune opinion publique plutt mfiante vis-vis de la politique du gouvernement tsariste dans le domaine de linstruction publique. Tolsto, en particulier, estimait que les fonctionnaires de lducation ntaient pas en mesure de mettre sur pied un systme qui rponde aux intrts du peuple tout entier : Pour que linstruction publique puisse fonctionner, il faut quelle soit confie la socit5 . Il entreprend des dmarches en ce sens et projette de crer une association ayant pour objectif de diffuser lducation dans le peuple, publier une revue pdagogique, fonder des coles l o il ny en a pas et o le besoin sen fait sentir, mettre au point le contenu de lenseignement, assurer la formation des matres, doter les coles des ressources matrielles ncessaires, contribuer une gestion dmocratique du systme scolaire, etc. .

Toutes ses tentatives pour obtenir des autorits la permission de crer une socit de ce genre furent vaines mais cela ne larrta en rien :
Je consacrerai tout mon bien et toutes mes forces la ralisation de ce programme ; quon me le permette ou non, mme si je me retrouve seul, je crerai une socit secrte pour linstruction du peuple6.

En 1859, il ouvre une cole pour les enfants des paysans, et en 1860, entreprend son deuxime voyage en Europe o il visite lAllemagne, la France, lItalie, la Belgique et lAngleterre. Il assiste une confrence de Dickens sur lducation, rencontre Proudhon plusieurs reprises, fait la connaissance du rvolutionnaire, historien et pdagogue Lelewel, dbat des questions fondamentales du dveloppement social avec Herzen, rvolutionnaire, crivain et philosophe russe qui avait choisi dmigrer en Angleterre. En tudiant lexprience des pays europens, Tolsto cherche le moyen de faire face aux problmes de linstruction publique en Russie. Pendant les annes 70, il travailla la rdaction de manuels scolaires; mme pendant les priodes les plus actives de sa production littraire et jusqu la fin de sa vie, Tolsto ninterrompra jamais ses recherches pdagogiques qui contribueront donner forme sa conception de linstruction du peuple et cristalliser les principes fondamentaux de ses thories pdagogiques. Lidal dune pdagogie humaniste Tolsto a parfois expos ses opinions sous une forme prtant diverses interprtations, ce qui a permis ses adversaires de prsenter, par exemple, les dclarations de lcrivain sur linnocence naturelle de lenfant comme des preuves de pdocentrisme et la libert de frquentation des cours accorde llve comme une preuve danarchisme. Toutefois, il est impossible de dnaturer la pense de Tolsto ds que lon se met lexaminer dans le contexte gnral de sa conception de lducation, dont les fondements sont le caractre populaire, lhumanisme et la dmocratie, ainsi que la libert denseignement. A lpoque o Tolsto stait lanc dans laction pdagogique, les tendances dmocratiques de lenseignement en Russie sappuyaient sur des traditions anciennes remontant Mikhal Lomonossov, et trs enracines dans la culture pdagogique mondiale. Pourtant, au milieu du XIXe sicle, la plus grande partie de la population du pays - la paysannerie - tait non seulement prive dinstruction, mais totalement analphabte. Tolsto souffrait profondment de lexistence, dans la socit contemporaine, de cet abme entre la culture et lducation des couches privilgies, dune part, et la privation totale des connaissances les plus lmentaires impose la majorit de la population, dautre part. Il voyait dans cet cart dramatique la cause dun grand nombre dantagonismes et de flaux sociaux. Pour lui, lducation devait tre universelle ; en stendant uniformment toutes les couches de la population, elle permettrait dliminer le despotisme et la violence, la superstition et linjustice : Le besoin essentiel du peuple russe est lducation. Cette formule exprime la pense fondamentale de Tolsto qui dfend avec intransigeance les intrts du peuple tout entier, et surtout de la paysannerie, dans le domaine de lducation. Cest du principe de luniversalit quil sinspire galement en examinant tous les autres problmes pdagogiques, en valuant les mrites et les lacunes de linstruction scolaire, la qualit de lenseignement, lutilit des dcouvertes scientifiques, etc. Tolsto tait convaincu que les sciences devaient unir les tres dans lintrt de la socit toute entire et de son bien-tre matriel et spirituel. Ses activits pdagogiques se droulaient lpoque de lindustrialisation de la Russie, processus qui stait acclr aprs labolition du servage en 1861. Tolsto considrait que le

dveloppement capitaliste subordonnait les connaissances scientifiques et techniques ses propres objectifs, indpendamment du bien gnral, suscitant ainsi de nouveaux antagonismes sociaux. Les dcouvertes scientifiques et techniques et leurs applications pratiques, qui ne favorisaient que les intrts de la classe dominante ou de certains de ses lments, devinrent la cible des critiques de Tolsto qui crivait, dans ses articles :
Non seulement ces connaissances ne remplissent pas la principale condition dfinissant lessence des
sciences, qui est de servir au bien de la population, mais encore elles poursuivent un objectif directement inverse et bien dtermin : rduire la majorit du peuple en esclavage au profit dune minorit en recourant toutes sortes de sophismes, dinterprtations mensongres, de tromperies et descroqueries7 .

Pour contrebalancer cette tendance, Tolsto proposait de dmocratiser et dhumaniser les sciences et lducation : les ralisations scientifiques et techniques ne reprsentent un vritable progrs que lorsquelles sont mises au service de la socit et du peuple tout entier. La libert de lcole et de lenseignement occupait une place centrale dans les conceptions pdagogiques de Tolsto. Pour lui, la libert tait lunique critre de la pdagogie . Ce jugement le fit comparer Jean-Jacques Rousseau et aux reprsentants du mouvement de lducation libre , de lducation nouvelle et autres tendances. Effectivement, linstar de Jean-Jacques Rousseau, Tolsto disait que lenfant constitue, par nature, un tre parfait et innocent et quil ne faut pas sopposer son libre dveloppement. Nanmoins, dans la conception de Tolsto, la libert de lenseignement ne se rapprochait que fort peu des prceptes de Rousseau, et moins encore de la pdagogie excessivement centre sur lenfant qui rige en absolu lide de libert et la pousse jusqu labsurde. En Russie, ses partisans les plus acharns exigeaient, par exemple, que lenfant jouisse dune libert telle quil puisse choisir ses parents. Selon les thses de Tolsto, le dveloppement de lenfant est un processus permettant lpanouissement spontan de ses qualits, dans lequel linfluence de lenseignant doit tre minimale, comme celle dun guide qui ne serait pas habilit agir de faon contraignante sur la formation des ides de ses lves. Toutefois, dans sa pratique pdagogique, Tolsto scarta assez souvent de la thorie. Il suffit, pour sen convaincre, de se reporter aux souvenirs de lun de ses fils, Ilya Levovich Tolsto qui crivait :
Nous grandissions entours de tous cts par un solide rempart de gouvernantes anglaises et de prcepteurs, et dans ces conditions, il tait facile nos parents de suivre chacun de nos pas et dorienter notre vie leur guise, [...] dautant plus quils avaient des vue identiques sur notre ducation8... .

De telles contradictions ne sont pas rares dans les conceptions pdagogiques de Tolsto, comme dailleurs dans lensemble de son uvre, ce qui ne diminue en rien la valeur de la philosophie humaniste dont elles procdent. Les contradictions que prsentent les conceptions de Tolsto, crivait Lnine en 1910, ne sont pas strictement personnelles ; elles sont le reflet des conditions, des influences sociales et des traditions historiques extrmement complexes et contradictoires qui ont dtermin la psychologie des diffrentes classes et couches de la 9 socit russe . Pour Tolsto, la libert de lenseignement et de lducation reprsente un principe sotrique, philosophique et moral qui est lantithse de la pdagogie autoritaire et qui exige une attitude comprhensive vis--vis de llve et le respect de sa dignit dtre humain. La libert de lducation est un principe qui dcoule des lois internes de lactivit cognitive. La connaissance ne peut tre que libre. Si cette condition nest pas remplie, le dynamisme, lesprit dinitiative, la cohrence, le caractre systmatique et toutes les autres rgles de la pdagogie classique traditionnelle restent vains, perdent toute signification. Lenseignement

est dautant plus efficace quil sappuie sur cette loi. Le savoir ne peut pas tre transmis ni impos llve contre sa volont. Celui-ci doit faire des efforts et acqurir par lui-mme les connaissances, ce quil fera beaucoup mieux en obissant sa propre volont plutt qu la contrainte impose par lenseignant. Un autre aspect tout aussi important du principe de la libert de lenseignement est celui de lorganisation sociale. Aux excs dune bureaucratie tatillonne, Tolsto opposait une ducation populaire manant de la socit. Ses aspirations refltaient une tendance qui ne cessa de se renforcer en Russie pendant le XIXe sicle et dont cette notion de libert de lenseignement propre Tolsto constitua lune des formes originales. Au nom de cette libert, Tolsto rclamait aussi pour le peuple le droit de crer des coles rpondant aux vux des parents et de la socit, cest--dire des coles dont lactivit ft entirement dtermine par le peuple lui-mme. Tant que les pouvoirs tablis continueraient dterminer le contenu et les mthodes de lenseignement, celui-ci ne pourrait pas contribuer au dveloppement dune vritable culture dans le peuple. Cette conception de Tolsto correspondait totalement laffirmation formule un peu plus tard par un autre minent pdagogue russe, contemporain de Tolsto, Constantin D. Ouchinski : Ceux qui connaissent bien lhistoire de la Russie nhsiteront pas une minute confier lducation du peuple au peuple lui-mme10 . Dfendant et dveloppant les idaux dune pdagogie humaniste, Tolsto insista galement sur la ncessit dasseoir le processus ducatif sur des bases scientifiques. A chaque discipline scientifique correspond un domaine et des mthode de recherche qui lui sont propre. Pour la pdagogie, cette matire, cest lenfant et les manifestations infiniment originales de sa nature. A la diffrence de la psychologie et des sciences de lenfance qui apparurent plus tard, Tolsto considrait que ltude de lenfant tait indissociable des problmes pratiques de lenseignement et de lducation. Cest ce principe qui caractrisait sa position mthodologique. De mme, les techniques quil prconisait et appliquait pour tudier lenfant diffraient compltement de celles de la psychologie. Au milieu du XIXe sicle, lexprimentation prit une plus large place dans la recherche psychologique. Les psychologues slectionnaient lune ou lautre des fonctions psychiques, obtenant ainsi des rsultats objectifs concernant cette fonction. Tolsto ne niait pas limportance pour lenseignant dune bonne connaissance des caractristiques psychiques de lenfant. Il avait lui-mme recours lexprience pour comparer lefficacit des diverses mthodes denseignement de la lecture. Cependant, dans sa pratique, lenseignant na pas affaire une fonction psychique isole, mais une personnalit en formation : llve. Il est donc indispensable que lenseignant et lducateur en aient une vue globale. Cest pourquoi la mthode fondamentale pour Tolsto tait celle dune analyse diversifie (y compris sociologique et psychologique) conduisant des dductions logiques et, ce qui nest pas moins important pour le pdagogue, des gnralisations exprimes sous une forme typologique. Cest lune des particularits les plus remarquables de son analyse de lenfant en tant quobjet de lducation. En lisant les uvres pdagogiques de Tolsto, on sent la prsence presque physique dun enfant vivant, non pas fig comme sil posait pour une photo, mais pris au vol dans la manifestation et le dveloppement de ses diverses capacits, dans la formation de sa personnalit et dans lvolution de ses tats dme sous linfluence des multiples et diverses influences qui sexercent sur lui. Dans ses travaux pdagogiques, Tolsto a montr que lenfant pense davantage par images, couleurs et sons et que, lors des premires tapes de linstruction, la pense image lemporte dans son activit cognitive sur la rflexion logique. Limage utilise par lenseignant renferme beaucoup plus dinformations pour lenfant, au tout dbut de son instruction, quun raisonnement logique. La pense image persiste aux stades suivants de lenseignement ainsi

que dans les recherches car, la diffrence de la pense logique, elle ne dvoile pas simplement un ou plusieurs aspects dun phnomne, mais son intgralit. En sattachant dfinir lobjet et les mthodes de la pdagogie, Tolsto a donn son interprtation de nombreuses notions (alphabtisme, instruction, ducation, etc.) qui constituent lappareil conceptuel de ce domaine relativement indpendant de la connaissance scientifique quest la pdagogie. Pour Tolsto, lalphabtisme, cest savoir lire et crire ; linstruction, cest la connaissance du monde environnant, y compris les relations sociales et les rapports entre les faits : Lalphabtisme, cest la capacit de former des mots laide de signes connus et de les prononcer puis, laide des mmes signes, de former des mots et de les reprsenter. Quy a-t-il de commun entre lalphabtisme et linstruction ? Lalphabtisme est une capacit dtermine (Fertigkeit) alors que linstruction est la connaissance des faits et des rapports entre eux11 . La conclusion logique de ce constat est que lalphabtisme na vraiment de valeur que sil sert de moyen dinstruction. Cet idal humaniste et ces principes duniversalit, de dmocratisation et de libert de lenseignement ne restrent pas, pour Tolsto, au stade des dclarations ou des abstractions : il proposa des mthodes pour rsoudre certains problmes de pdagogie et exera une activit pratique en qualit denseignant, dorganisateur dcoles, de rdacteur de revue pdagogique et dauteur de manuels lusage des coles primaires.

Isnaa Poliana : lcole et la revue


Outre les coles relevant directement du Ministre de linstruction publique, il existait en Russie des coles issues de linitiative de groupements ou de particuliers. Parmi celles-ci, la plus clbre fut lcole de Iasnaa Poliana fonde par Tolsto dans sa proprit de famille, prs de Toula. Au dbut, lide de Tolsto de crer chez lui une cole gratuite fut accueillie par les paysans avec incrdulit et mfiance : le premier jour, vingt-deux adolescents seulement en franchirent timidement le seuil. Au bout de cinq six semaines, le nombre des lves avait plus que tripl. Bien que lorganisation de lenseignement diffrt sensiblement de celle des coles traditionnelles, le nombre des lves (garons et filles de sept treize ans) ne cessa de saccrotre. Les cours commenaient entre huit et neuf heures du matin. A midi, une pause permettait aux lves de djeuner et de se dlasser; puis les cours reprenaient pendant trois quatre heures. Chaque enseignant donnait cinq six heures de cours par jour. Les lves taient rpartis en trois groupes, selon leur ge, leurs aptitudes, leurs rsultats : cours lmentaire, cours moyen et cours suprieur. Les places ntaient pas assignes de manire stricte, chacun sasseyait l o il voulait; il ny avait pas de devoirs faire la maison. En classe, la mthode la plus souvent utilise ntait pas le cours, au sens gnral du terme, mais des entretiens btons rompus avec les lves, durant lesquels les enfants sinitiaient la lecture, lcriture, larithmtique, au catchisme, la grammaire, assimilaient les connaissances historiques, gographiques et les lments de sciences naturelles accessibles leur ge. Ils apprenaient aussi dessiner et chanter. De mme, le contenu de lenseignement ntait pas immuable, il se modifiait selon le dveloppement des enfants, les possibilits de lcole et des enseignants, les vux des parents. Tolsto enseignait lui-mme aux grands les mathmatiques, la physique, lhistoire et quelques autres disciplines ; dans la plupart des cas, il exposait les rudiments des sciences sous forme dune histoire. Les enfants ntaient jamais punis, ni pour leur conduite ni pour leurs mauvaises notes. En effet, le respect de la personnalit de llve impliquait que celui-ci prenne lui-mme conscience, sans punitions et sans contraintes de la part des adultes, de la ncessit de se soumettre une certaine discipline, indispensable au succs de lenseignement : 6

Malgr leur jeunesse, les coliers sont des tres humains qui ont les mmes besoins que nous et pensent de la mme manire que nous ; ils veulent tous apprendre. Cest pour cela seulement quils vont lcole, et cest pourquoi il leur sera trs facile daboutir la conclusion quil faut, pour apprendre, se soumettre certaines conditions12 .

Tolsto et les instituteurs de son cole encourageaient lindpendance des lves, dveloppaient leurs aptitudes cratrices et veillaient ce quils assimilent consciemment et activement les connaissances. Pour cela, ils avaient souvent recours aux rdactions, surtout sur des sujets libres, ce qui plaisait beaucoup aux enfants. Tolsto voyait l un des moyens de dvelopper chez les enfants une personnalit cratrice, leur permettant par la suite de crer de nouvelles formes de relations sociales dignes de lhomme civilis. Ce qui faisait la particularit de lcole de Iasnaa Poliana, ctait son attitude lgard des connaissances, comptences et aptitudes que les enfants acquraient en dehors de lcole : la valeur ducative de ces activits ntait pas nie, comme ctait le cas dans la plupart des autres coles; au contraire, elle tait considre comme un pralable indispensable lobtention de bons rsultats scolaires. Dans la vie quotidienne, les sources dinformation sont innombrables, mais souvent les enfants ne savent pas bien les interprter. La tche de lcole est donc de faire entrer dans le champ de la conscience les informations que les lves puisent dans la vie quotidienne (un principe semblable a t, par la suite, adopt dans le systme du pdagogue amricain John Dewey). A Isnaa Poliana, les tches de lenseignant taient beaucoup plus complexes que dans une cole dote dun horaire fixe, dune discipline contraignante, dun assortiment de rcompenses et de punitions, dune srie de sujets dtude strictement limite. Linstituteur tait soumis une tension morale et intellectuelle constante ; tout moment, il devait tenir compte de ltat et des possibilits de chacun de ses lves. On exigeait de lui ce quon peut appeler de la crativit pdagogique. Quant aux rsultats obtenus Isnaa Poliana, ils taient diffrents, eux aussi, de ceux des autres coles : Nous [tmoigne un ancien enseignant de Iasnaa Poliana, Evgueny Markov] observions les rsultats stupfiants des lves [de Tolsto] en sandales de corde, parmi lesquels certains garnement dlurs, arrachs leur herse ou leur troupeau de moutons, pouvaient au bout de quelques mois denseignement crire facilement des rdactions tout fait correctes13 . Les activits et linfluence pdagogique de Tolsto ne se limitrent pas lcole de Iasnaa Poliana. En effet, vingt coles primaires, au moins, ouvrirent simultanment sur son initiative et avec sa participation directe dans le district de Krapivna qui fait partie de la province de Toula. Ses expriences qui, pour lpoque, taient tout fait inhabituelles, attirrent lattention de lopinion publique, tant en Russie qu ltranger, et contriburent au dveloppement de lducation lmentaire. Des enseignants de nombreuses villes de Russie et dailleurs, intresss par lapplication en milieu scolaire dides humanistes, se rendaient frquemment Isnaa Poliana. La prsence de ces visiteurs perturbait videmment le droulement normal des cours mais Tolsto, qui sen rendait compte, ne refusait pas son autorisation ses htes car les entretiens quil avait avec eux lui permettaient de vrifier le bien-fond de ses ides, de les comparer aux autres mthodes denseignement et dducation connues lpoque. Cest pour cela que Tolsto entreprit la publication dune revue pdagogique intitule Iasnaa Poliana. Son programme comprenait la description de nouvelles mthodes denseignement, de nouveaux principes dadministration pour linstruction primaire, de nouveaux modes dorganisation du processus ducatif, dexpriences dducation extrascolaire et de diffusion de livres parmi la population, ainsi que des monographies consacres aux coles ouvertes spontanment avec une analyse de leurs qualits et de leurs faiblesses, etc. Pour Tolsto, la tche essentielle de cette revue consistait, propos de ces expriences d ducation libre , tudier les activits spontanes faisant partie du processus 7

dapprentissage dont la connaissance serait dune valeur inestimable tant pour la pdagogie en tant que science que pour lenseignement en tant que pratique. Cest pourquoi il chercha largir lventail des contributions, tout en spcifiant quil ne voulait pour collaborateurs que des enseignants ne considrant pas uniquement leur profession comme un moyen dexistence et comme une obligation, mais galement comme un domaine dexprimentation pour la science pdagogique14. Tolsto lui-mme publia dans cette revue quelques articles fondamentaux tels que : Linstruction publique , Comment enseigner lire et crire , Projet dorganisation des coles du peuple , A qui doit-on apprendre crire et qui doit le faire... , Le progrs et la dfinition de linstruction , dans lesquels il critique les vices de lancien systme dducation, prconise une nouvelle cole populaire et examine les moyens de dvelopper les facults cratrices des enfants, ainsi que de nombreuses autres questions. Lactivit pdagogique de Tolsto fut fructueuse et lui apporta beaucoup de satisfaction, mais elle suscita la mfiance des autorits tsaristes : il fut lobjet de perscutions et les ides exposes dans Isnaa Poliana furent considres comme subversives pour les principes fondamentaux de la religion et de la morale ; le douzime numro de la revue, qui parut en dcembre 1862, allait tre le dernier. Cest cette poque que Tolsto commena travailler son roman pique Guerre et paix, sans toutefois cesser de rflchir des expriences pdagogiques. Il parvint la conclusion que celles-ci lui avaient permis de dcouvrir quelque chose qui nexistait pas dans la pdagogie contemporaine : [...] je continue beaucoup rflchir sur lducation, et je mapprte crire tout ce que je sais dans ce domaine et que tout le monde ignore ou rcuse15 . Au dbut des annes 70, il ouvrit de nouveau lcole de Iasnaa Poliana et collabora de nouveau lorganisation dautres tablissements dans tout son district, sefforant de sauver tous les Pouchkine, Ostrogradski, Philarte et Lomonossov qui pullulent dans chaque cole et tentent de surnager16 . Cest leur intention - les petits moujiks , comme il appelait les enfants des paysans - que Tolsto entreprend son Abcdaire, auquel il travaille en 1871 et 1872 avec enthousiasme, et son Nouvel abcdaire, pour lequel il interrompt en 1875 la rdaction dAnna Karnine.

Labcdaire et le nouvel abcdaire


Tolsto avait depuis longtemps lintention de rdiger un abcdaire lintention des tout petits; le sien ne devait ressembler aucun autre. Son plan gnral, son contenu, sa structure logique lui prirent beaucoup de temps. Tolsto en parla souvent avec motion : Je ne sais ce qui sortira de ce travail, mais jy ai mis toute mon me17 . Il avait de grandes ambitions pour lAbcdaire, estimant que plusieurs gnrations denfants russes, fils de moujiks et fils de tsars, y apprendraient lire et connatraient grce lui leurs premires motions potiques . Il alla mme jusqu dire : ... Quand jaurai termin cet abcdaire, je pourrai mourir en paix18 . LAbcdaire du comte L.N. Tolsto, paru la fin de 1872, fut en effet un grand vnement pour le systme scolaire et la pdagogie. Il justifia, dans une large mesure, les espoirs de son auteur, dont il incarnait les principes pdagogiques humanistes. Pourtant, nombreux furent ceux pour qui ce souci de rsoudre les problmes de linstruction lmentaire tait une cause indigne du talent du grand crivain russe qui commenait connatre une clbrit mondiale ; le caractre novateur de cet ouvrage pdagogique ne fut pas immdiatement compris et apprci sa juste valeur. Tolsto ne trouva ni comprhension ni sympathie chez ses proches, mme chez sa femme. Nanmoins, il restait convaincu que

lducation lmentaire dterminait, dans une trs large mesure, le dveloppement intellectuel et moral de lenfant, peut-tre mme le bonheur ou le malheur de toute sa vie. Savoir si les tudes apporteraient de la joie lenfant, si celui-ci allait acqurir le got de sinstruire de faon dsintresse, sil saurait par la suite mettre les valeurs spirituelles audessus des biens matriels, tout cela dpendait largement de la manire dont il aurait fait ses premiers pas dans le monde du savoir. Quand jentre dans une cole, crit Tolsto, et que je vois cette foule denfants dguenills, sales et maigres, les yeux brillants, le visage souvent anglique, je suis saisi deffroi, dune angoisse comme celle quon prouve en voyant quelquun se noyer. [...] Et ce qui est en train de couler, cest ce quil y a de plus prcieux, cest--dire cette spiritualit qui est si frappante chez ces enfants19 . Le dveloppement du principe spirituel qui devra tre pris en charge par la nouvelle gnration, ne saurait se raliser sans lcole. Cest la tche prioritaire de celle-ci ; et elle est beaucoup plus importante que celle qui consiste communiquer aux lves une certaine somme de connaissances. Cest cette tche que stait attel Tolsto avec son abcdaire, cest--dire ds les dbuts de lenfant lcole. LAbcdaire du comte L.N. Tolsto comprenait quatre livres : les abcdaires proprement dits, des textes pour linstruction lmentaire, des textes slavons, des lments servant lenseignement du calcul. Dans cet ensemble, labcdaire proprement dit reprsentait un moyen lmentaire, mais indispensable, dacquisition de connaissances scientifiques et de principes moraux. En ralit, il sagissant dune sorte dencyclopdie lusage de jeunes enfants leur dcrivant leur environnement immdiat et leur donnant des notions de base sur la physique, la chimie, la botanique, la zoologie, expliquant comment vivent les plantes, ce que ressentent les hommes et les animaux, ce que sont les phnomnes magntiques, lectriques, et bien dautres choses. LAbcdaire du comte L.N. Tolsto suscita des dbats enflamms chez les spcialistes des mthodes denseignement. A cette poque, la mthode phontique rgnait dans lenseignement de la lecture : on enseignait llve un son, puis la lettre qui en constituait le symbole ; ensuite, on runissait les phonmes-lettres pour former des syllabes et des mots. La mthode phontique sopposait la mthode orthographique traditionnelle, qui consistait prsenter la lettre comme le symbole dun son et relier ensuite les lettres-phonmes entre elles. Tolsto contestait le fait dopposer les deux mthodes, quil considrait comme complmentaires ; il dmontra que la mthode phontique contient des lments graphiques et que le nier, ctait ignorer une exprience pdagogique sculaire. La mthode propose par Tolsto fit lobjet dune vrification exprimentale qui lamena exposer une srie dides originales sur la faon organiser des expriences pdagogiques, et cela plusieurs annes avant que divers pdagogues (Sikorski, A. Lay, E. Meumann), tant en Russie quen Occident, aient commenc utiliser largement lexprimentation pour valuer les diffrentes mthodes denseignement. Publi en 1875, le Nouvel abcdaire tait plus universel et, grce la polmique de Tolsto avec ses adversaires, il stait largement amlior. Favorablement accueilli par la presse et par les revues pdagogiques, il fut mme introduit dans les coles publiques par le Ministre de lducation. Du vivant de Tolsto, il y eut plus de trente ditions, avec des tirages trs importants pour lpoque : Cest un modle de simplicit idale et de vrit pratique , Cest le sommet de la perfection sur le plan de la psychologie et de la prsentation , estimrent dminents pdagogues. Lun dentre eux, le professeur S.A. Ratchinski, enthousiasm par lide de servir lducation populaire et qui avait abandonn sa chaire luniversit pour enseigner dans une cole de village, eut ce jugement aussi bref que catgorique : Tout Russe cultiv devrait connatre les livres pour enfants du comte L.N.20 .

En crivant des histoires pour son abcdaire, Tolsto a, en fait, labor toute une littrature lusage des enfants. Aujourdhui encore, en URSS, nous apprenons ds lenfance connatre luvre de lauteur de Guerre et Paix, de Rsurrection, dAnna Karnine en lisant des rcits tels que Le requin , Le petit Philippe , Le lion et le petit chien , Le saut , Trois ours , Le prisonnier du Caucase , etc. Et les principes dcriture mis au point pour les rcits de lAbcdaire (tout doit tre beau, court, simple et surtout clair ) ont contribu former ce qui allait tre le style de Tolsto. Par la suite, les recherches pdagogiques de Tolsto furent, dans une trs large mesure, lies ses thses morales et thiques sur lenseignement ; il les exposa dans des articles, des lettres, des entretiens, des notes tels que : Penses sur lducation , Le travail physique , Entretiens avec des enfants sur des questions de morale , Tche principale de lenseignant , etc. Rompant avec la religion institutionnalise (Tolsto fut excommuni par le synode de lglise), il dveloppa sa conception de ce quil appelait le christianisme authentique ainsi que son refus de rpondre au mal par la violence en soulignant le rle exceptionnel de lducation dans lamlioration des relations entre tres humains et dans la ralisation du bien-tre social. Pendant les dernires annes de sa vie, les ides pdagogiques de Tolsto se rpandirent non seulement en Russie, mais aussi dans dautres pays du monde o les ractions quelles suscitrent furent galement trs diverses. Les uns estimaient que ses conceptions de lenseignement et de lducation taient trop thoriques et loignes des besoins de lcole ; dautres, au contraire, les accueillaient trs favorablement. Ainsi, lenseignant japonais Sekiji Neshyama considrait cette approche la fois sensible et perspicace de lenfant comme une nouvelle tape de la pdagogie, et les mthodes de dveloppement des aptitudes cratrices de lenfant mises au point par Tolsto comme une grande dcouverte pdagogique21. Le grand crivain japonais Nakasato Kazan, fondateur de la littrature dite pour le peuple , alla mme jusqu faire de sa proprit un Isnaa Poliana en miniature et ouvrit une cole du dimanche o il lisait aux enfants des paysans des contes russes quil avait adapts. Des gens aussi divers que le pdagogue espagnol Angel Bueno, lhomme de lettres franais Fernand Aubier, linstitutrice anglaise Fanny Franks, linstitutrice argentine Clotilde Gonzlez demandrent conseil Tolsto. Aprs avoir tudi le fonctionnement de lcole de Iasnaa Poliana, lAmricain Ernest Crosby, crivit un ouvrage : L.N. Tolsto enseignant. Revenu aux tats-Unis aprs son voyage en Russie, Crosby parlait souvent ses collgues amricains de lcole de Tolsto et dun pisode caractristique dont il avait t tmoin Isnaa Poliana : un petit paysan qui jouait avec la fille de Tolsto, Sacha, lui donna un grand coup de bton sur la main gauche. La petite fille, en pleurs, courut vers son pre en lui demandant de la protger et de punir lagresseur. Tolsto prit sa fille sur ses genoux, la consola, lui parla et lui proposa ensuite daller offrir ce petit garon de la confiture de framboise (les enfants de paysans navaient pas souvent loccasion de manger de la confiture). Sattendant tout, sauf la tournure inattendue que prenait lincident, le petit garon fut extrmement surpris. Aprs cela, il y avait peu de chances quil se conduise en agresseur, conclut Crosby. Pourtant, un enseignant amricain lui rtorqua : A mon avis, le lendemain, ce petit garon aurait d la frapper sur lautre main . Ce fut le tour de Crosby de stonner. Ayant rflchi la remarque, inattendue pour lui, de son collgue, il conclut quil existait deux manires (la russe et lamricaine) de ragir une manifestation de violence ou de bonne volont. Crosby voyait bien que la raction russe comportait sa vrit profonde, et cest pourquoi il crivit : Mais sil y a quelque chose de vrai dans cette vision russe des choses, pourquoi ne pas lappliquer plus souvent dans notre vie ?... Il faudrait certainement que les enseignants y pensent22 . 10

Peu aprs la mort de Tolsto, V.I. Lnine, parlant de sa contribution au dveloppement de la culture mondiale, dclara : Il y a dans son hritage ce qui ne sombre pas dans le pass, mais appartient lavenir23. Cest pourquoi, aprs la victoire de la rvolution socialiste, pdagogique de Tolsto devint, de mme que son uvre littraire, le patrimoine du peuple tout entier. Ses ouvrages sont frquemment publis avec dnormes tirages dans toutes les langues des peuples de lancienne URSS. Ses uvres littraires sont inscrites au programme des coles denseignement gnral, et ltude de ses uvres pdagogiques figure dans les programmes des tablissements qui forment les ducateurs denfants dge prscolaire, les instituteurs et les professeurs du secondaire et du suprieur. On peut, assurment, voir un sens profond dans le fait quen 1987, anne de son jubil, lAssociation des auteurs duvres littraires et artistiques pour les enfants et la jeunesse, rattache lUnion des socits sovitiques de relations culturelles et damiti avec les pays trangers, ait cr une Mdaille dor internationale Lon Tolsto destine dminents humanistes qui se sont consacrs aux enfants. Les premiers laurats ont t Albert Sabin (membre de la National Academy of Sciences des tats-Unis dAmrique), Astrid Lindgren (femme de lettres sudoise) et Antonina Khlebouchkina (directrice de la maison denfants no 1 de Tachkent, URSS).
Notes 1. Semion Filippovitch Egorov (Fdration de Russie). Docteur en sciences de lducation. Chercheur lInstitut dducation thorique et de recherche internationale sur lducation lAcadmie russe de lducation. Spcialiste en histoire de lducation. Auteur de nombreuses publications, dont la plus importante est : Thorie de lducation dans le systme ducatif russe au dbut du XXe sicle (1987, en russe).. V .I. Lnine, L. N. Tolsto , dans uvres, ditions sociales (Paris) et ditions du Progrs, Moscou, 1968, t. 16, p. 340 ; voir aussi Lon Tolsto, Miroir de la rvolution russe , ibid, t. 15, p. 120-227. L. N. Tolsto, Utro pomescika (La matine dun propritaire), dans uvres compltes, t. 4, p. 165. L. N. Tolsto, uvres compltes, t. 60, p. 325. L. N. Tolsto, uvres pdagogiques, en russe, Moscou, 1951, p. 55. Ibid., p. 56-57. L. N. Tolsto, uvres compltes, t. 38, p. 141-142. L. N. Tolsto, Moi vospominanija [Mes souvenirs], Moscou, 1914, p. 178-181. V I. Lnine, uvres, t. 16, p. 342. C. D. Ouchinski, uvres compltes en russe, Moscou-Leningrad, 1948, t. 3, p. 622. L. N. Tolsto, uvres pdagogiques, p. 88. Ibid., p. 157-158. Vestnik Evropy, recueil pour lanne 1900, II, p. 583. L. N. Tolsto, uvres pdagogiques, p. 61. N. N. Gousev, Zizn L.N. Tolstogo [La vie de Lon Tolsto], s.d., t. 2, p. 129. N. N. Gousev, ibid., p. 131. L. N. Tolsto, uvres compltes, t. 62, p. 130. L. N. Tolsto, uvres compltes, t. 61, p. 269. N. A. Konstantinov (et al.), Istorija pedagogiki [Histoire de la pdagogie], Moscou, 1982., p. 237, Azbuka (Abcdaire), et Novaja azbuka [Nouvel abcdaire], Moscou, 1978, p. 191. A. I. Sifman, L.N. Tolstoj i Vostok [Lon Tolsto et lOrient], Moscou, 1971, p. 286. E. Krosbi, Tolstoj kak ucitel [E. Crosby, Tolsto en tant quenseignant], traduit de langlais en russe, Moscou, 1906, p. 60 et suivantes.. V. I. Lnine, uvres, t. 16, p. 344.

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