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Gveracruz Lesviolencessexuelles

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Les violences sexuelles : Prévalence, théories, causes, conséquences,


thérapies, prévention

Chapter · June 2020

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1 author:

Germano Vera Cruz


Université de Picardie Jules Verne
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1

Les violences sexuelles :


Prévalence, théories, causes, conséquences, thérapies,
prévention1

Ecrit en 2020 par :

Germano VERA CRUZ


Twitter: @gveracruz80
Ma chaine youtube: https://www.youtube.com/channel/UCJLOgOoFfTKVJzRYeXfGSLA

Professeur de psychologie
Data scientist
Université de Picardie Jules Verne, Amiens, France

Table de matières

Introduction ……………………………………………………………………………………………………..... 2
1. Types de violence………………………………………………………………………………………………. 2
2. Prévalence……………………………………………………………………………………………..……….. 2
3. Les théories et les modèles sur la violence sexuelle…………………………………………………………… 5
3.1. Types de viol
3.2. Les théories sur le viol contre les femmes
3.3. Les modèles de propension à l’agression sexuelle
4. Violence sexuelle en temps de guerre……………………………………………………………………….... 14
4.1. Les raisons de l’omniprésence de la violence sexuelle en temps de guerre
4.2. Quelques cas des conflits armés qui ont suscité des violences sexuelles
5. Les conséquences physiques, psychologiques et sociales du viol……………………………………….……. 18
5.1. L’impact physique
5.2. L’impact psychologique
4.3. L’impact social
6. La prise en charge thérapeutique de la violence sexuelle………………………………………………….…. 25
6.1. Les psychothérapies
6.2. Les interventions psychosociales
7. La prévention de la violence sexuelle………………………………………………………………………… 28
7.1. Les programmes scolaires d’éducation sexuelle
Références…………………………………………………………………………………………………..…… 31

1
Pour citer ce document :
Vera Cruz, G (2020). Les violences sexuelles : Prévalence, théories, causes, conséquences, thérapies,
prévention. Amiens, France : Université de Picardie Jules Verne.
2

Introduction

La violence sexuelle est un grave problème de santé publique et de droits humains qui a des
conséquences, à court et à long terme, sur la santé physique, mentale, sexuelle et reproductive
des victimes. Dans la mesure où la violence sexuelle est un comportement extrêmement
prévalant dans tous les contextes sociaux et qu’il s’agit d’un des comportements qui affecte
négativement le bien-être et la santé de millions d’individus dans le monde (notamment les
femmes et les enfants), il est important de l’étudier, en psychologie de la santé, en essayant de
comprendre comment il se manifeste, quelles sont les variables prédictives, ses conséquences
sur les victimes, les stratégies de prévention, etc.

1. Types de violence

La violence sexuelle peut être de nature physique (e.g., viol, contact sexuel forcé, etc.),
psychologique (e.g., harcèlement, humiliation, insultes, etc.) ou les deux; elle peut être
perpétrée contre les femmes, contre les hommes ou contre les enfants ; elle a lieu dans les
contextes des relations intimes ou non-intimes, dans le cadre familial (e.g., viol conjugal,
inceste, attouchement sexuel de mineurs, etc.), du travail (e.g., harcèlement, coercition
sexuelle sur menace directe ou indirecte de perte d’emploi et ou de droits associés, etc.) et
dans les situations de conflits armés (e.g., viol comme arme de guerre, femmes utilisées
comme esclaves sexuelles et/ou reproductives, etc.).

2. Prévalence
3

Les meilleures données de prévalence sur la violence sexuelle proviennent d’enquêtes sur les
populations. Les rapports de police et les études émanant du milieu clinique et d’organisations
non gouvernementales constituent d’autres sources de données sur les violences sexuelles ;
mais, comme seule une faible proportion de cas sont signalés, les données disponibles
conduisent à des chiffres de prévalence sous-estimés. Parmi les nombreuses raisons logiques
qui poussent les femmes et les hommes à s’abstenir de signaler la violence sexuelle dont
elles/ils sont victimes, on peut citer : (a) des systèmes de soutien inadaptés ; (b) la honte ; (c)
la crainte ou le risque de représailles ; (d) la crainte ou le risque d’être blâmés ou accusés de
diffamation.

Bien qu’il reste encore beaucoup à faire sur le plan de la recherche, des enquêtes en
population telles que des enquêtes démographiques et sanitaires (e.g., Kishhor & Johnson,
2004), des enquêtes de santé génésique (e.g., CDC, 2011) et les études multipays de l’OMS
sur la santé des femmes et la violence domestique à l’égard des femmes (e.g., MOS, 2012) ont
permis de recueillir des données sur différentes formes de violence sexuelle.

Ainsi, l’étude multipays de l’OMS de 2012 montre que la prévalence de la violence sexuelle
infligée par un partenaire intime, au cours de la vie des femmes de 15 à 49 ans, se situait entre
6% au Japon à 59 % en Éthiopie. En général, les chiffres de ce type d’agression oscillent entre
10% et 50 %, dans la majorité des pays étudiés. Selon la même étude, entre 0,3 à 12 % des
femmes ont été forcées, après l’âge de 15 ans, à avoir des rapports sexuels ou à accomplir un
acte sexuel par une personne autre qu’un partenaire intime. Dans la majorité des cas de
violence sexuelle rapportée dans cette étude, les femmes connaissaient leur agresseur (e.g.,
dans 8 cas de viols sur 10 aux États-Unis).

Une autre étude plus récente (UNICEF, 2014) indique que, dans le monde, 120 millions de
filles (une sur dix) ont subi des viols, la prévalence des violences sexuelles en général étant de
18 % chez les filles et de 7,5 % chez les garçons.

Particulièrement, l’Afrique australe, l’Océanie, l’Inde et l’Amérique du Nord sont les régions
du monde enregistrant le plus grand nombre de viols (Harrendorf et al., 2010). Par exemple,
des informations recueillies par des organisations humanitaires en 2013 faisaient état de 500
000 viols commis chaque année en Afrique du Sud (The Washington Post, 2013). Les
données de 2015 suggéraient que l’incidence du viol en Inde était 10.6% (Sharma et al.,
2015). Aux États-Unis, les statistiques du CDC (2010) indiquent qu’une femme sur quatre et
4

un homme sur neuf ont subi des violences sexuelles, du harcèlement ou du viol ; près de 23
millions de femmes et 1,7 million d’hommes ont été victimes de viol ou de tentative de viol à
un moment donné de leur vie.

Un rapport de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, rédigé par Harrendorf
et al. (2010), constate que, dans le monde, la plupart des victimes de viol sont des femmes et
la plupart des auteurs sont des hommes. Ce rapport souligne également le fait que la plupart
des viols sont commis par une personne que la victime connaît. A ce propos, les statistiques
rapportées par le réseau national Rape, Abuse & Incest (RAINN) indiquent que, dans le
monde, 7 cas d’agression sexuelle sur 10 implique un auteur connu de la victime (Smith,
2018).

A notre connaissance, à cette date, il n’y a pas de données mondiales fiables sur la violence
sexuelle contre les hommes de plus de 16 ans (commis par d’autres hommes). Pourtant, le viol
et d’autres formes de coercition sexuelle dirigés contre les hommes se produisent dans divers
endroits, comme par exemple, dans les écoles, dans l’armée et dans les prisons.

En effet, la plupart des recherches et des rapports sur le viol se limitent aux viols commis par
les hommes sur les femmes. Les recherches sur le viol entre hommes, entre femmes et les
viols commis par les femmes sur les hommes sont rares. On estime que moins d’un viol sur
dix commis par un homme sur un autre homme est signalé. Les hommes qui ont été violés par
l’un ou l’autre sexe reçoivent souvent peu de services et de soutien, et les systèmes juridiques
sont souvent inadaptés pour faire face à ce type de crime. Les cas dans lesquels l’agresseur est
une femme ne sont pas souvent traités avec sérieux. Ceci tend à faire prévaloir l’idée que les
femmes ne peuvent pas être des agresseurs sexuels, fait qui en lui-même peut occulter les
dimensions du problème (Harrendorf et al., 2010).

Enfin, dans le classement établi par la Fondation Thomson Reuters (2018), quelques pays se
distinguent en termes de violence sexuelle contre les femmes : l’Inde (c’est le pays où le
risque de violence sexuelle est le plus élevé, notamment le viol en réunion, le harcèlement
dans la rue, l’abus au sein de la famille) ; la RD Congo (c’est le deuxième pays où le risque de
violence sexuelle est le plus élevée, notamment à cause d’une forte prévalence du viol comme
arme de guerre et la coercition sexuelle sous la forme de corruption) ; les Etats-Unis (en
troisième position pour les violences sexuelles, forte prévalence du viol dans les campus
universitaires, viol avec utilisation d’une substance incapacitante, harcèlement dans le cadre
5

du travail) ; la Syrie (forte prévalence du viol de femmes utilisées comme arme de guerre), le
Nigéria (forte prévalence du trafic de femmes et de l’ esclavage sexuel), l’Afrique du sud
(forte prévalence des violences sexuelles tels que le viol, l’harcèlement dans la rue, l’abus au
sein de la famille).

3. Les théories et les modèles sur la violence sexuelle

Les théories sur les violences sexuelles ont été développées à partir d’un type particulier de
violence sexuelle : le viol contre les femmes. Ainsi, dans cette partie, d’abord nous allons
décrire les types de viol, le contexte du viol, et ensuite, nous allons examiner les différentes
théories sur les violences sexuelles, en particulier le viol contre les femmes. Finalement, nous
allons présenter les différents modèles prédictifs des agressions sexuelles.

3.1. Types de viol

Groth et Birnbaum (1979) ont décrit plusieurs types de viol, à savoir :

a) Le viol de colère ou viol correctif

Le but de ces types de violeurs est d’humilier, d’avilir et de blesser leurs victimes ; ils
expriment leur mépris pour leurs victimes par la violence physique et le langage profane. Pour
ces violeurs, l’acte sexuel est une arme pour souiller et dégrader la victime et le viol constitue
l’expression ultime de leur colère (Groth & Birnbaum, 1979). Parce que le but est d’humilier
et dégrader le plus possible la victime, le viol de colère se caractérise par une brutalité
physique, l’usage d’une force physique largement supérieure à ce qu’il ne serait nécessaire si
l’intention était simplement de maîtriser la victime et de parvenir à la pénétration (Groth &
Birnbaum, 1979). Guidé par la colère et la rage, le violeur attaque sa victime en l’agrippant,
en la frappant et en la jetant au sol, en la battant et lui déchirant ses vêtements (Stalans, 2004).

c) Le viol lié à l’affirmation de la domination

Pour les auteurs du viol d’affirmation de la domination, le viol devient un moyen de


compenser leurs sentiments sous-jacents d’insuffisance et d’infériorité sociales tout en
6

assouvissant leur profond mégalomane et fantasmagorique désir de maîtrise, de contrôle, de


domination, de projection de puissance et d’autorité. L’intention du violeur de manifestation
de domination est de démontrer (à lui et à la victime) ses « capacités » (Groth & Birnbaum,
1979).

Particulièrement, dans le viol de démonstration de puissance, le violeur s’appuie sur des


menaces verbales, sur l’intimidation (souvent avec une arme ou un couteau) et n’utilise que la
force nécessaire pour maîtriser la victime (Groth & BirnBaum, 1979).

Souffrant paradoxalement d’un complexe d’infériorité sociale, de narcissisme et d’un fort


désir de reconnaissance, l’agresseur a tendance à avoir des fantasmes dans lesquels il met en
scène des habilités de conquêtes sexuelles et ses performances sexuelles dans le cadre d’un
viol. Souvent, il croit que même si la victime lui résiste au départ, une fois qu’il la maîtrisera,
elle finira par apprécier le viol. C’est ainsi que, une fois l’acte conclu, souvent, le violeur va
jusqu’à estimer que la victime a apprécié ce qui lui a été infligé, conviction qui parfois
l’amène à demander à la victime d’envisager une relation amoureuse avec lui (Groth &
Birnbaum, 1979).

Cependant, parce que cette perception est basée sur un fantasme et non sur la réalité, le
violeur ne reste pas longtemps satisfait (rassuré) par sa supposée performance ou la supposée
appréciation manifestée par la victime. Il essaiera donc d’en trouver une autre. Cela explique
pourquoi ce type de profil de violeur tend à passer à l’acte de façon répétitive et compulsive,
commettant une série de viols sur une courte période (Awasthi, 2017).

c) Le viol sadique

Pour ce type de violeur, leur excitation sexuelle est intrinsèquement associée à l’infliction de
douleur à sa victime. Plus précisément, ces violeurs glorifient la violence et, chez eux,
l’excitation sexuelle est aussi bien associée à l’infliction de douleur et de souffrance à sa
victime qu’à la colère et à la sensation de domination (Groth & Birnbaum, 1979).

Ainsi, ce type de délinquant prend plaisir aux tourments, à la douleur, à l’angoisse, à la


détresse et à l’impuissance de la victime et considère qu’il s’agit d’une expérience érotique.
En effet, ces types d’hommes sont très excités sexuellement par de violents stimuli sexuels
(Groth & Birnbaum, 1979).
7

Les agressions du violeur sadique sont délibérées, calculées et planifiées. Et, dans de
nombreux cas, la satisfaction ultime est obtenue en assassinant la victime (Stalans, 2004).

Ma réflexion

Cette classification en trois catégories a inspiré de nombreuses études. Cependant, il nous


semble à nous qu’elle laisse de côté des cas de viol qui pourraient être liés à d’autres facteurs
tels que, par exemple, l’influence des pairs en certaines circonstances (e.g., dans certains cas
de viol collectif), la conviction erronée selon laquelle il s’agit d’un acte d’amour (e.g., dans
certains cas d’inceste), l’opportunisme lié à la situation (e.g., dans certains cas de viol où la
consommation d’alcool ou de drogue joue un certain rôle).

Particulièrement, les viols collectifs devraient être mis dans une catégorie à part.

d) Les viols collectifs

Dans certains cas, les viols collectifs sont souvent perçus par les hommes comme une
méthode justifiée pour décourager ou punir ce qu’ils considèrent comme un comportement
immoral chez les femmes, comme par exemple le fait de porter des jupes courtes ou de
fréquenter les bars (Jenkins, 1998). Dans certains contextes sociaux, les viols collectifs ont
souvent lieu dans le cadre d’une sorte d’initiation sexuelle. A ce propos, en Papouasie-
Nouvelle-Guinée, certains gangs urbains recourent souvent aux viols collectifs des femmes
comme une forme d’initiation imposée aux nouveaux membres (Sokhin, 2015).

Enfin, le viol collectif et le viol de masse sont souvent utilisés comme moyen de souder un
groupe d’hommes. Cela est particulièrement courant chez les soldats en situation de guerre.
En effet, parmi le nombre de viols commis lors des conflits armés, les viols collectifs
représentent les trois quarts, alors que dans les temps de paix cette catégorie spécifique de viol
représente le quart du nombre total. Les commandants poussent les recrues à violer, souvent
pour calmer leur frustration, récompenser la vaillance au combat, terroriser la population,
mais souvent aussi pour souder entre eux les personnes impliquées.

Ainsi, certaines recherches indiquent par exemple que les groupes rebelles qui recrutent des
soldats par la force sont plus impliqués dans les viols collectifs que ceux constitués de recrues
volontaires car ils pensent que à travers ce type d’actes, les soldats incorporés contre leur
8

volonté, passeront d’une faible à une forte loyauté envers le groupe, unis par le même crime,
pour ainsi dire (The Economist, 2018).

3.2. Les théories sur le viol contre les femmes

a) La théorie évolutionniste ou biologiste

Cette théorie affirme que, même s’il n’y a certainement pas de gène du viol chez les hommes,
il y a chez les êtres humains une prédisposition biologique au viol, et que celle-ci est
probablement le résultat de l’évolution (Thornhill, 1999 ; Crawford & Krebs, 1998). Cette
théorie part du postulat qu’il y a dans de nombreuses espèces animales, dont la nôtre, une
tendance des mâles à vouloir maximiser leur possibilité de procréation (nombre d’enfants). A
partir de là, selon cette théorie, les hommes ont été prédisposés au viol par les forces de
l’adaptation biologique (évolution) parce que cela rendait le succès reproductif plus probable.
« Malgré ses coûts, le viol augmente le nombre de partenaires possible et, par conséquent, le
succès reproducteur des mâles. Ainsi étant, il a dû y avoir une adaptation psychologique chez
les hommes favorisant l’impulsion pour le viol », écrit Thornhill (1999, p. 144). Par ailleurs,
cette impulsion serait liée au caractère très sélectif des femelles, caractère lui aussi acquis à
travers les forces évolutionnistes. Etant celles qui portent la gestation et doivent s’investir plus
dans l’élevage des enfants et, ne pouvant pas en avoir en nombre quasi illimité comme les
mâles, la sélection naturelle a favorisé chez elles le fait de judicieusement sélectionner leurs
partenaires sexuels. « Parce que chez les femmes l’évolution a favorisé la préférence pour des
partenaires protecteurs, avec un statut social et des ressources élevés, ainsi que la préférence
pour des partenaires ayant des caractéristiques physiques spécifiques telle que la symétrie
corporelle qui marque la santé héréditaire, nous pouvons déduire que, dans l’évolution de
nombreuses espèces animales, le viol, en contournant le choix de la partenaire féminine, a
permis aux mâles d’augmenter le nombre de leurs partenaires sexuelles », conclut Thornhill
(1999, p. 144).

Bien que les défenseurs de cette théorie aient eu la précaution d’expliquer que la
reconnaissance d’une base biologique pour le viol ne signifie ni l’excuser ni l’approuver
(Wright, 1994), elle a déclenché des vives polémiques et des accusations selon lesquelles elle
correspondait à un point de vue machistes et, surtout, à l’intériorisation d’une longue histoire
de violence et de domination des hommes sur les femmes (Thornhill & Palmer, 2000).
9

b) La théorie du bien de consommation (commodification theory)

Certains théoriciens ont présenté le viol comme un « crime contre les biens », dans lequel le
sexe est « une marchandise volée à une femme par un violeur » (Baker, 1997).

En effet, les proposants de cette perspective constatent que les jeunes, en particulier les jeunes
hommes, sont bombardés par une culture qui sexualise les marchandises et marchandise la
sexualité des femmes. Les entreprises vendent des produits en vendant la sexualité des
femmes qui vantent le mérite du produit. Le produit et le sexe sont délibérément confondus.
Le sexe est également volontairement marchandisé. Les hommes peuvent facilement acheter
du sexe. Les hommes peuvent également acheter de la pornographie et acheter des billets pour
regarder des spectacles sexuels.

Par conséquent, selon certains auteurs, ce qui motive de nombreux violeurs peut ne pas être
substantiellement différent de celui qui motive les hommes qui se rendent chez les prostituées
ou achètent des billets pour regarder des spectacles. Aucun de ces actes ne requiert du plaisir
mutuel ou de l’intimité émotionnelle, et ils sont tous appelés actes sexuels. Ainsi, les hommes
sont capables de satisfaire un désir sexuel sans avoir à incorporer les complexités de la
communication intime (Baker, 1997).

Baker (1997) argumente que cette approbation culturelle et cette commercialisation du sexe
en tant que bien marchandisé conduisent chez les hommes à un désir accru et à un sentiment
de droit au sexe. La plupart des hommes apprennent que le désir sexuel est comme la faim :
quand il est là, on le satisfait. Les femmes sont des bonbons. Bien sûr, la nourriture n’est pas
gratuite et le sexe non plus, mais précisément parce que les hommes peuvent payer et le font
pour le sexe, le prendre sans consentement devient beaucoup moins répréhensible moralement
que les autres crimes violents (Backer, 1997).

Par conséquent, selon Baker, il n’est pas surprenant qu’une étude ait révélé que trente-neuf
pour cent des violeurs condamnés ont été arrêtés au cours d’un vol. Comme beaucoup de ces
hommes l’ont reconnu, ils ont violé parce qu’elle (la victime) était là. « Si, en s’introduisant
chez quelqu’un par infraction ils enfreignaient déjà les lois de l’intrusion et de la propriété,
pourquoi ne pas prendre une chose de plus ? », écrit Baker (1997).

c) La théorie développementale (developemental theory)


10

Malamuth et ses collègues ont défendu l’idée que la prédisposition au viol chez les hommes
est causée non pas par une variation génétique (évolution), mais par des événements qui
surviennent pendant l’enfance du délinquant (parcours développemental) impliquant une
certaine forme d’apprentissage social (Malamuth & Heilmann, 1998). Leurs analyses
indiquent que les hommes enclins au viol proviennent de milieux sociaux difficiles où règnent
la manipulation, la coercition et la violence comme moyens valables de conduire les relations
sociales.

Ces auteurs ont commencé leur programme de recherche sur l’agression sexuelle dans une
perspective féministe mais ont par la suite décidé que les problèmes de viol, de pouvoir et de
contrôle ne pouvaient pas être suffisamment expliqués sans la considération des facteurs
développementaux.

Sur la base de leurs recherches empiriques, Malamuth et Heimann(1998) ont identifié 22


parcours développemental (interacting pathways) entraînant une forte probabilité pratique de
violence sexuelle. Par exemple : (a) le parcours impersonnel (the impersonal pathway) est
caractérisé par une association avec des pairs délinquants, une initiation à l’activité sexuelle à
un âge précoce et le fait d’avoir de nombreux partenaires sexuels ; (b) le parcours masculinité
de type hostile (the hostile masculinity pathway) est lié à un sentiment d’insécurité, par
rapport à sa masculinité, d’hostilité générale, de méfiance et de désir de dominer les femmes.

d) La théorie du contrôle ou théorie féministe du viol

Examinant le viol non pas comme une question de sexualité, mais plutôt comme une
expression de contrôle, des universitaires féministes ont remis en question la perspective
biologiste sur le viol en s’orientant vers les problèmes de contrôle et de domination (Gold,
1996).

Cette approche est résumée par la déclaration de Susan Brownmiller : « le viol n’est ni plus ni
moins qu’un processus conscient d’intimidation par lequel tous les hommes maintiennent
toutes les femmes dans un état de peur » (Brownmiller, 1993, p.158). Certaines féministes
affirment que la domination masculine sur les femmes dans les domaines sociopolitique et
économique est la cause ultime de la plupart des viols, et considèrent le viol entre hommes et
femmes comme un crime de pouvoir qui n’a rien ou presque rien à voir avec la sexualité elle-
même.
11

L’un des principaux arguments de cette théorie est que la violence sexuelle contre les femmes
est le produit d’une société inégale, où le viol et d’autres facteurs de violence masculine sont
des exemples de renforcement du système patriarcal (UKDiss, 2018). Les partisans de cette
perspective font valoir que le viol et la violence contre les femmes sont au cœur du contrôle
des femmes et de leur corps, en particulier lorsque l’avancement des femmes dans la sphère
publique déstabilise le pouvoir des hommes hérité du patriarcat (UKDiss, 2018). En effet, le
patriarcat est considéré par les théoriciennes féministes comme un système familial, social,
idéologique et politique dans lequel les hommes, par la force, par la pression directe ou par le
rituel traditionnel, par le droit et le langage, à travers les coutumes, l’étiquette, l’éducation et
par la division du travail, déterminent quelle rôle les femmes doivent ou ne doivent pas jouer,
des rôles dans lesquels les femmes sont, bien entendu, partout et toujours subordonnées aux
hommes (UKDiss, 2018).

Plus récemment, les défenseurs de cette conception ont insisté sur la nécessité de considérer le
viol commis par les hommes contre les femmes comme un acte qui non seulement vise à
dominer et à contrôler les femmes mais aussi comme un comportement alimenté par la culture
sexiste et myogène entretenue par les médias, la pornographie et un système juridique
inadapté. Dans ce contexte, nombreux sont les défenseurs/défenseuses de droits de la femme
qui ont demandé (et dans certains pays obtenu) la redéfinition de la coercition sexuelle sur la
base non pas de la question de savoir si la femme a été victime de violence mais plutôt de
savoir si elle a affirmativement consenti à l’acte. Ces exigences viennent du constat que, dans
la plupart des viols avérés ou présumés, la femme était sous l’influence de l’alcool ou de la
drogue ingéré volontairement ou involontairement et donc sans réelle possibilité de
consciemment consentir même à un acte non-violent.

Ma réflexion

Ces théories ont suscité de nombreux travaux de recherche. Et, on peut conclure de ces
travaux qu’aucune d’elles pris isolément n’a été capable d’expliquer de façon satisfaisante les
causes des différents types de viols ou les circonstances/facteurs influençant toutes les
différentes catégories de ce type d’agression. En effet, une théorie peut rendre compte de
l’occurrence de certaines catégories tout en se révélant inadéquate à expliquer d’autres. Le
plus plausible est de penser que le comportement de viol s’explique par des raisons
multifactorielles peuvent être expliquées par l’ensemble de ces théories combinées.
12

3.3. Les modèles de propension à l’agression sexuelle

Les modèles de la propension à l’agression sexuelle se différencient, les uns des autres, selon
les caractéristiques individuelles et sociales stables, dans le temps, sur lesquelles ils se
centrent pour prédire la probabilité qu’une personne commette un acte de violence sexuelle
(Lussier & Cale, 2016).

a) Le modèle cognitif (croyances et attitudes)

A partir de recherches socioculturelles, certains auteurs ont proposé l’idée que certaines
croyances et attitudes stables sont associées à une propension à commettre des actes
d’agression sexuelle. Ces biais cognitifs et attitudinaux incluent de fausses croyances sur les
relations entre les sexes, la mauvaise interprétation de certaines interactions sociales (liées aux
relations de genre) (Burt, 1980). Par exemple, des recherches spécifiquement axées sur les
relations entre les genres dans le contexte des agressions sexuelles ont révélé que les hommes
qui endossent la notion de droit masculin à disposer des femmes, qui sont méprisants ou se
jugent supérieurs au sexe opposé, qui jugent que la violence est une méthode acceptable pour
résoudre les problèmes et qui entretiennent des attitudes patriarcales traditionnelles ont plus
de probabilité de commettre un acte de violence sexuelle contre les femmes (Malamuth,
1998). Un autre groupe de biais cognitifs prédictifs des actes de violence sexuelle contre les
femmes incluent la perception des femmes comme des objets sexuels, la conviction que la
pulsion sexuelle des hommes est incontrôlable, que les femmes sont imprévisibles et
dangereuses (Polaschek & Gannon, 2004).

b) Le modèle neuropsychologique

Selon cette approche, certains déficits neuropsychologiques, dont souffrent durablement


certaines personnes, peuvent augmenter la probabilité de commettre une agression sexuelle.
Parmi ces déficits on inclut les difficultés physiologiques d’autorégulation, des déficiences
neuronales exécutives associées à des déficits du système de perception, des déficits au niveau
du système nerveux contrôlant le duo excitation/motivation et des déficits au niveau du
système nerveux responsable de la sélection des actions (Joyal et al., 2007).

Ces déficits neuronaux et physiologiques causent des difficultés qui surviennent


particulièrement lorsque les agresseurs sexuels sont confrontés à des situations où ils doivent
gérer des états émotionnels complexes et lorsqu’ils sont confrontés à une situation qui
13

déclenche leurs systèmes d’excitation / motivation. Dans ces cas, ils ont du mal à contrôler
leur comportement, ils ont des difficultés à faire face aux situations imprévues de manière
adaptée (déficience du système de sélection des actions) et tendent à entretenir des croyances
inadaptées issues des interprétations erronées des interactions sociales (défaillance du système
de perception) (Lussier et al., 2016).

c) Le modèle de la déviance sexuelle

La perspective axée sur les déviances sexuelles suggère que la plupart des personnes qui
commettent des actes de violence sexuelle sont plus excitées sexuellement par des interactions
sexuelles non consensuelles que par des interactions sexuelles consensuelles.
Malheureusement, les travaux empiriques sensés soutenir ce modèle (basés sur la
pléthysmographie pénienne) n’ont pas pu trouver des différences significatives dans les deux
groupes de participants intégrés aux protocoles de recherche (respectivement composés
d’individus qui avaient commis des actes d’agression sexuelle et ceux qui n’en avaient pas)
(Lalumière et al., 2006). A la place, ces études ont davantage fourni des preuves des
différences cognitives, attitudinales, neuropsychologiques et de style de vie affectant
l’excitation sexuelle dans certaines situations, plutôt qu’une préférence sexuelle déviante
conduisant à une propension plus élevée à la violence sexuelle (Marshall & Fernandez, 2000).

d) Le modèle de la personnalité

Basée sur l’idée que l’agression sexuelle est révélatrice de l’incapacité/difficulté d’un individu
à gérer des relations intimes « normales », cette approche considère les auteurs de violence
sexuelle à travers trois dimensions distinctes de la personnalité. Plus précisément, dans cette
conception, le fonctionnement interpersonnel est le facteur le plus important pour déterminer
si une personne aura une propension plus élevée ou moins élevée à la violence sexuelle
(Bamford et al., 2016). Or, ce modèle suggère que dans la majorité des agressions sexuelles le
fonctionnement interpersonnel est largement impacté par certaines dimensions de la
personnalité des auteurs, à savoir :

• Le style d’attachement préoccupé. Cette dimension de la personnalité découle de


recherches effectuées sur les agresseurs sexuels qui les caractérisaient comme des
personnes qui avaient un style d’attachement préoccupé (à la suite de mauvais
traitements infligés dans leur enfance, de divorce des parents, etc.) se manifestant par
14

une faible estime de soi, une incapacité à développer des relations avec les autres et
une solitude émotionnelle importante (Marshall, 1989). Dans ce cas, l’agression
sexuelle est utilisée comme un moyen défectueux de répondre aux besoins d’intimité.

• La personnalité antisociale. Cette dimension de la personnalité découle d’une étude


réalisée par Hall et Hirschman (1991) et met l’accent sur les conséquences ultérieures
des expériences aversives tel que l’abus pendant l’enfance, qui peuvent conduire au
développement de traits de personnalité antisociale à l’âge adulte. Les traits de
personnalité antisociale se combinent avec des facteurs contextuels, tels que certaines
émotions (rage / colère), certaines cognitions (pensées irrationnelles qui influencent
les émotions) et certains aspects physiologiques (excitation sexuelle déviante) qui
augmentent la probabilité de commettre des violences sexuelles (Bamford et al.,
2016).

• La personnalité narcissique. Enfin, cette dimension met l’accent sur l’hypothèse selon
laquelle les individus ayant des traits de personnalité narcissiques sont plus
susceptibles d’interpréter le refus de leurs avances sexuelles envers une personne (e.g.,
une femme) comme des insultes, et à leur tour auront une réaction défavorable à de
telles insultes (blessure narcissique) (Bamford et al., 2016). Cette dimension a été plus
utilisée comme prédictive des violences sexuelles qui incluent des victimes connues de
l’agresseur (inceste, agression d’un partenaire intime, viol d’une amie ou d’une
collègue, etc.) (Baumeister et al., 2002).

4. Violence sexuelle en temps de guerre

La violence sexuelle contre les femmes et les enfants est particulièrement aigue dans les
situations de conflits armés (guerres inter-pays ou guerres civiles). Dans ces contextes,
certaines armées et milices irrégulières adoptent tacitement le pillage de zones civiles comme
moyen pour les troupes de s’approvisionner en alimentation ou divers biens (Nobel Women’s
initiative, 2011). Aussi, les armées et les milices souvent encouragent le viol de civils par
leurs militaires comme moyen d’apaiser leur frustration, soulager l’angoisse, ou encore pour
encourager ou récompenser leurs efforts de guerre (Nobel Women’s initiative, 2011; Brown,
15

2012). Les femmes et les filles sont particulièrement visées par le recours au viol en réunion
comme tactique de guerre pour humilier, instiller la peur, disperser et /ou déplacer de force les
membres civils d’une communauté ou d’un groupe ethnique. Dans certains cas, les femmes
sont kidnappées et utilisées comme esclaves sexuelles, épouses ou simplement des
procréatrices pour les soldats (OHCHR, 2019). Par ailleurs, les réfugiés et les personnes
déplacés qui fuient leurs maisons pendant la guerre sont souvent victimes de la traite des êtres
humains à des fins d’exploitation sexuelle ou par le travail en raison de l’effondrement des
économies et de l’ordre public (OHCHR, 2019).

4.1. Les raisons de l’omniprésence de la violence sexuelle en temps de guerre

Des célèbres philosophes tels que Thomas Hobbes (Léviathan) et Jean-Jacques Rousseau (Du
contrat social) ont soutenu l’idée que l’homme sans la société (« état de nature ») tend à se
livrer à des instincts « barbares » et que c’est la société, par un mécanisme de « contrat
social » qui canalise et contrôle ces instincts tout en les transformant en actes d’obligations et
de services, de respects, de soutien et de bienfaits mutuels.

Dans les situations de conflits armés, soit règnent un état d’anarchie et de dissolution des
règles sociales et des lois juridiques, soit prédominent des règles, tacites ou explicites, de
hiérarchie, d’obéissance et de clientélisme fondées sur le despotisme et la violence. Dans les
deux cas, cela tend à développer des contextes propices à la loi du plus fort, à la violence de
toute sorte (y compris la violence sexuelle contre les plus vulnérables qui sont les femmes et
les enfants) induits par :

• La culture d’impunité envers les violations des droits humains des civils ;

• La dissolution des valeurs morales ;

• L’angoisse de la mort qui rend la vie tragique (comme l’a noté Jean-Paul Sartre,
1943) ;

• La haine de soi et des autres, due au fait que les auteurs sont eux-mêmes sont souvent
des victimes de violence, qui tendent à développer chez certains individus un « désir
de vengeance » consistant, par un mécanisme de transfert, à s’attaquer aux plus
vulnérables ;
16

• La consommation excessive d’alcool et de drogue qui joue le rôle de désinhibiteur et


de moyen de coping dans le contexte violent et stressant d’une guerre ;

• « Couvert » par l’autorité, la plupart des individus ne se sentent pas personnellement


responsable du mal qu’ils provoquent (comme l’ont montré les expériences de
Milgram sur l’obéissance, 1974).

• Le biais cognitif de “déshumanisation” des victimes (présentées comme des individus


frustres, grossiers, d’une ethnie inférieure, etc.) qui donc méritent d’être maltraitées
(voir les expériences de Bandura, 1973) ;

• Les fameux déterminants sociaux de l’agression mis en évidence par Bandura (1973)
tels que la justification morale, la mauvaise représentation des conséquences et
l’euphémisme qui consiste à diminuer la portée de l’action agressive ;

• L’effet de groupe (désindividualisation, déresponsabilisation, anonymat, inter-


émulation, sentiment d’impunité, état psychologique qui se caractérise par un
affaiblissement de la conscience de soi et où les actions vont être influencées par les
sollicitations immédiates de la situation et par ce que font les autres autour de nous)
qui explique des comportements antisociaux et excessifs (Festinger, Pepitone &
Newcomb, 1952 ; Le Bon, 1895) ;

• Les fantaisies sexuelles influencées par la pornographie (voir Vera Cruz, 2018), etc.

4.2. Quelques cas des conflits armés qui ont suscité des violences sexuelles

a) La guerre civile au Mozambique.

La guerre civile mozambicaine (1979-1992) a été une des plus violentes que le monde ait
connue : près d’un million de personnes sont mortes ; des dizaines de milliers d’enfants
(moins de 16 ans) ont été kidnappés et utilisés comme soldat ; la destruction a été si sévère
qu’à la fin du conflit (1992) le pays a été classé le plus pauvre du monde.

Concernant les violences sexuelles, les femmes et les adolescentes étaient violées (des viols
en réunion, souvent) par les soldats de l’armée rebelle et par l’armée gouvernementale ;
particulièrement, l’armée rebelle a kidnappé les femmes pour les utiliser comme esclaves
sexuelles, épouses forcées des soldats ou des génitrices d’enfants.
17

Il n’y a pas des chiffres officiels sur le nombre des femmes affectées, mais le décompte
effectué par un journaliste qui a fait des reportages sur le sujet à l’époque et qui a pu avoir un
accès officieux aux informations des représentants du Comité International de la Croix Rouge
et des Nations Unis fait état de plus de 20 milles victimes (Vera Cruz, 1994, 1995).

b) Les guerres civiles en République Démocratique du Congo.

Depuis 1996, la RDC est le lieu de plusieurs conflits armés. La première guerre est un conflit
intervenu de fin 1996 à 1997, au terme duquel le président Mobutu Sese Seko est chassé du
pouvoir par les rebelles dirigés par Laurent-Désiré Kabila. La deuxième guerre est un conflit
armé qui se déroule sur le territoire de la RDC de 1998 à 2003 (fin formelle). Elle impliqua
neuf pays africains, et une trentaine de groupes armés, ce qui en fait la plus grande guerre
entre Etats dans l’histoire de l’Afrique contemporaine (Wikipedia, 2020). En 2004, a
commencé la guerre du Kivu, un conflit armé opposant les forces armées de la RDC à celles
du Congrès national pour la défense du peuple de Laurent Nkunda et à de nombreux autres
groupes armés (Wikipedia, 2020).

Concernant les violences sexuelles, par exemple, en 2011, une étude révélait que jusqu’à 1.8
million de femmes congolaises ont été violées au moins une fois dans leur vie (Peterman et
al., 2011). Les violences sexuelles liées aux conflits armés sont particulièrement prévalentes
dans la province du Kivu : En 2008, l’ONU a répertorié 7.703 cas de violences sexuelles au
Kivu (Noordhout, 2013).

Les viols sont commis par les civils, les soldats ou les milices armées et la police. A propos,
Noordhout (2013) écrit : « … 58 % des viols commis en 2012 l’ont été par des civils, 8 % par
des militaires ou des policiers et 34 % par des miliciens. Ces violences entre civils illustrent
une rupture dans les valeurs morales de la société congolaise depuis 1994. Pour les enfants
nés après le génocide rwandais dans l’Est du pays, le viol fait partie intégrante de la vie
sociale. L’augmentation des viols parmi les citoyens est sans doute l’une des plus tragiques
conséquences de la déconstruction de la société traditionnelle ».

En 2019, Selon Kate Gilmore, haut-commissaire adjointe de l’ONU aux droits de l'homme
(citée par la BBC, 2019), il y a eu 900 cas de violences sexuelles enregistrés, dont la majorité
a été perpétrée par la police, l’armée ou des milices.

c) La guerre en Syrie.
18

Elle débute en 2011 dans le contexte du Printemps arabe par des manifestations
majoritairement pacifiques en faveur de la démocratie contre le régime du président Bachar
el-Assad. Réprimé brutalement, le mouvement de contestation se transforme peu à peu en une
rébellion armée (Wikipedia, 2020). Depuis 2012, De nombreux belligérants participent au
conflit qui connaît plusieurs phases. Particulièrement, en 2014, l’organisation salafiste
djihadiste Etat islamique en Irak et au Levant — rebaptisé ensuite État islamique (EI) — entre
en conflit contre tous les autres belligérants, s’empare de l’est de la Syrie, ainsi que du nord-
ouest de l’Irak, et proclame la restauration du califat (Wikipedia, 2020).

Concernant les violences sexuelles, à la fin de novembre 2013, selon le rapport d’une
organisation de droits humains, près de 6 000 femmes avaient été victimes de viols (y compris
de viols collectifs) depuis le début du conflit (EuroMed Droits, 2013). Les chiffres sont
probablement plus élevés, un grand nombre de cas ne faisant pas l’objet de déclaration. En
mars 2014, on a estimé à plus de 50 000 le nombre des femmes violées dans les prisons du
régime syrien ; parmi elles, 90% auraient été violées de manière répétée (FranceInfo, 2017).

Les cas de violences sexuelles les plus dramatiques sont ceux commis par l’Etat Islamique
contre les femmes d’ethnie yazidis. Les femmes yazidis ont été kidnappées en Irak par ce
groupe de djiadistes et sujettes aux plus terribles violences sexuelles. Selon l’Amnistie
International (cité par Le Monde, 2014), des centaines, peut-être des milliers de femmes ont
ainsi été mariées de force, vendues ou offertes par l’EI à des combattants ou sympathisants”.
Des filles de 14, 15 ans ou plus jeunes encore ont été soumises à l’esclavage sexuelle et
particulièrement sujettes à des actes sexuels inspirés de la pornographie (FIDH, 2018).

5. Les conséquences physiques, psychologiques et sociales du viol

Le viol est une expérience traumatisante qui affecte ses victimes de manière physique,
psychologique et sociale. Même si les effets et les séquelles du viol diffèrent selon les
victimes, la plupart tendent à souffrir de problèmes similaires compris dans trois différentes
catégories :

5.1. L’impact physique


19

Les effets physiques courants rencontrés par les victimes de viol comprennent : (a)
saignement vaginal ou anal ; (b) trouble du désir sexuel hypoactif ; (c) vaginite ou
inflammation vaginale ; (d) dyspareunie — rapports sexuels douloureux ; (e) vaginisme —
une condition affectant la capacité d’une femme à s’engager dans n’importe quelle forme de
pénétration vaginale ; (f) douleur pelvienne chronique ; (g) infections des voies urinaires ; (h)
grossesse ; (i) VIH/SIDA (Eby et al., 1995 ; Collett et al., 1998).

A propos de la grossesse suite à un viol, une étude longitudinale menée en 1996 aux États-
Unis auprès de plus de 4 000 femmes suivies pendant trois ans a révélé que le taux de
grossesse était de 5% par viol parmi les victimes en âge de procréer (âgées de 12 à 45 ans),
produisant plus de 32 000 grossesses chaque année (Holmes et al., 1996 ; Thornhill & Palmer,
2001). En 1991, une étude menée dans une maternité de Lima (Pérou) a révélé que 90% des
nouvelles mères âgées de 12 à 16 ans étaient tombées enceintes après avoir été violées, la
plupart par leur père, leur beau-père ou un autre parent proche (Krug et al., 2002). Une
organisation pour les mères adolescentes au Costa Rica a indiqué que 95% de ses clients de
moins de 15 ans avaient été victimes d’inceste (O’Toole, 1997). Une étude menée auprès
d’adolescentes en Éthiopie a révélé que parmi celles qui ont déclaré avoir été violées, 17%
sont tombées enceintes après le viol, un chiffre similaire aux 15 à 18% signalés par les centres
de crise du viol au Mexique (Krug et al., 2002). Une étude des facteurs associés à la grossesse
chez les adolescentes au Cap, en Afrique du Sud, a révélé que l’initiation sexuelle forcée était
le troisième facteur le plus étroitement lié à la grossesse non-désirée (Jewkes et al., 2001).

En effet, en 1982, l’American Society for Reproductive Medicine a rapporté que le risque de
grossesse suite à un viol est le même que le risque de grossesse après une relation sexuelle
consensuelle (2 à 4%) (Yuzpe et al., 1982). De plus, l’expérience du sexe forcé à un âge
précoce réduit la capacité d’une femme à voir sa sexualité comme quelque chose sur laquelle
elle a le contrôle. En conséquence, il est moins probable qu’une adolescente, qui a été forcée à
avoir des relations sexuelles, utilise des préservatifs ou d’autres formes de contraception au
cours de sa vie, ce qui tend à augmenter la probabilité d’une grossesse non-désirée après le
viol (Boyer, 1992 ; Holmes et al., 1996 ; Stock et al.,1997).).

Par ailleurs, la grossesse issue d’un viol est souvent une grossesse à risque. Des études à ce
sujet ont montré que les femmes mises enceintes dans de telles conditions ont un risque plus
élevé de pré-éclampsie (hypertension pendant la grossesse), associée à des quantités
importantes de protéines dans l’urine (Mayo Clinic, 2012).
20

En ce qui concerne les maladies sexuellement transmissibles, certaines études ont montré que
les femmes qui subissent des violences sexuelles et physiques de la part de partenaires intimes
sont beaucoup plus susceptibles d’avoir des maladies sexuellement transmissibles (Wingood
& DiClemente, 2000).

5.2. L’impact psychologique

La plupart des victimes de viol subissent un impact psychologique plus fort dans la période
initiale après leur agression ; cependant, ces mêmes survivants subissent des dommages
psychologiques de longue durée (Resick, 2016).

a) Chez les femmes

Trouble de stress post-traumatique (TSPT)

De nombreuses survivantes de viol souffrent du TSPT. Par exemple, aux Etats-Unis, des
données disponibles indiquent que 31% des femmes violées développent un TSPT à un
moment donné de leur vie après leur attaque et que 3,8 millions de femmes américaines
auraient un TSPT lié à un viol (Resick, 2016 ; Steketee et al., 1987).

Les symptômes du TSPT sont généralement regroupés en quatre types : (a) souvenirs
intrusifs, (b) évitement, (c) récurrence de pensée et d’humeur négatifs et (d) récurrence de
réactions physiques et émotionnelles inadaptées (Mayo Clinic, 2020).

• Souvenirs intrusifs. Les symptômes des souvenirs intrusifs peuvent inclure : des
souvenirs indésirables, douloureux et récurrents de l’événement traumatique ; revivre
l’événement traumatisant comme s’il était entrain de se reproduire (flashbacks); des
rêves bouleversants ou des cauchemars sur l’événement traumatisant ; extrême
détresse émotionnelle ou réactions physiques incontrôlables face à quelque chose qui
rappelle directement ou indirectement l’événement traumatisant.

• Évitement. Les symptômes de l’évitement peuvent inclure : éviter de penser ou de


parler de l’événement traumatisant ; éviter les lieux, les activités ou les personnes qui
nous rappellent l’événement traumatisant.

• Récurrence de pensée et d’humeur négatives. Les symptômes de changements négatifs


dans la pensée et l’humeur peuvent inclure : des pensées négatives sur soi-même, les
21

autres ou le monde ; le fait de voir l’avenir de façon pessimiste ; des problèmes de


mémoire, y compris le fait de ne pas se souvenir d’aspects importants de l’événement
traumatisant ; des difficultés à entretenir des relations intimes ; se sentir détaché de sa
famille et de ses amis ; manque d’intérêt pour les activités qui nous plaisaient autrefois
; des difficultés à ressentir des émotions positives ; se sentir émotionnellement
engourdi.

• Récurrence de réactions physiques et émotionnelles inadaptées. Les symptômes


impactant les réactions physiques et émotionnelles (arousal symptoms) peuvent
inclure : être facilement effrayé ; être toujours en état d’alerte contre le danger ;
attaque de panique ; comportement autodestructeur comme par exemple boire trop,
conduire trop vite, automutilation ; troubles du sommeil ; des difficultés à se
concentrer ; irritabilité, avoir souvent des accès de colère ou des comportements
agressifs ; entretenir un extrême sentiment de culpabilité ou de honte.

• Pour les enfants de moins de sept ans, les signes et symptômes peuvent également
comprendre : la reconstitution de l’événement traumatique ou de certains aspects de
l’événement traumatique par le jeu ; des rêves effrayants qui peuvent ou non inclure
des aspects de l’événement traumatisant.

Les symptômes du trouble de stress post-traumatique peuvent soit commencer immédiatement


après l’événement traumatique, soit apparaître des années après l’événement. Le TSPT
provoque des difficultés importantes d’adaptation aux situations sociales ou professionnelles
et dans l’entretien des relations saines avec les autres. En particulier, il diminue sérieusement
la capacité d’un individu à accomplir ses tâches quotidiennes. Enfin, les symptômes du TSPT
peuvent varier au fil du temps et d’une personne à l’autre (Mayo Clinic, 2020).

Anxiété

Après un viol, les victimes éprouvent une anxiété et une peur exacerbées. Cela comprend le
fait d’avoir des sentiments de terreur ; se sentir nerveux ; sensation de tension ou de malaise ;
des attaques de panique ; des réponses irrationnelles à certains stimuli (réponse d’évitement
et/ou d’évasion) (Kilpatrick et al., 1979).

Dépression
22

Une étude a révélé que les femmes violées étaient plus déprimées que les femmes qui n’ont
jamais subi ce type d’agression (Kilpatrick et al., 1979). L’étude a mesuré le niveau de
dépression à l’aide du test Beck Depression Inventory et a conclu que 45% des femmes
évaluées dans l’étude étaient modérément ou sévèrement déprimées (Kilpatrick et al., 1979).

Auto-blâme (self-blame)

L’auto-blâme semble être, à court et à long terme, le plus commun des effets des agressions
sexuelles. Il apparaît comme un mécanisme de coping qui souvent inhibe le processus de
guérison.

Il existe deux principaux types d’auto-blâme : l’auto-blâme comportemental — behavioral


self-blame (blâme non mérité basé sur les actions) et l’auto-blâme caractériologique —
characterological self-blame (blâme non mérité basé sur le caractère). Les survivantes qui se
sentent coupables de leur comportement estiment qu’elles auraient dû faire quelque chose de
différent et se sentent donc en faute. Les survivantes qui éprouvent un sentiment de culpabilité
caractérologique ont le sentiment qu’il y a quelque chose de mal en elles qui les a fait mériter
d’être agressées.

Cette culpabilité mène souvent à la honte. Selon Tangney et Dearing (2002), il existe cinq
façons par lesquelles la honte peut conduire à des comportements inadaptés : le manque de
motivation à chercher des soins ; le manque d’empathie ; l’isolement ; la colère ; l’agressivité.
De plus, la honte est liée à des problèmes psychologiques tels que des troubles de
l’alimentation, la toxicomanie, l’anxiété, la dépression, ainsi qu’à un comportement moral
problématique. En effet, dans une étude menée sur plusieurs années, il a été démontré que les
enfants sujets à la honte étaient également plus sujets à la toxicomanie, à des activités
sexuelles précoces, à des activités sexuelles à risques et à des infractions pénales
comparativement aux enfants qui ne tendent pas à se sentir honteux (Tangney et Dearing,
2002)

La culpabilité comportementale est associée à des sentiments de culpabilité chez les


survivantes. Alors que la croyance selon laquelle on aurait pu contrôler davantage des
événements qui ont conduit à l’agression ou ce qui s’est passé pendant l’agression (contrôle
passé) est associée à une plus grande détresse psychologique ; la croyance que l’on a plus de
contrôle pendant le processus de récupération post-agression (contrôle actuel) est associée à
23

moins de détresse, moins de retrait et plus de restructuration cognitif (Frazier et al., 2005). La
culpabilité liée à la défaillance du contrôle découle des croyances (mécanismes cognitifs),
prédominantes chez certaines personnes, selon lesquelles le monde est juste et que par
conséquent les gens obtiennent ce qu’ils méritent, que dans ce monde les événements suivent
un certain ordre que les individus sont capables de contrôler (Lerner & Miller, 1978 ;
Vonderhaar, 2014). Du point de vue cognitif et existentiel, ces croyances servent à rassurer
quant au fait de vivre dans un monde qui n’est pas uniquement livré au hasard, au chaos, et
qu’ils peuvent avoir le contrôle de leur vie (Lerner & Miller, 1978 ; Vonderhaar, 2014).

b) Chez les hommes

Des études sur les impacts du viol sur les hommes suggèrent qu’après l’agression, les
survivants ont souffert souvent, à court et à long terme, de dépression, d’anxiété, de colère, de
détresse, d’incertitude quant à leur masculinité, d’incertitude ou ambivalence quant à leur
orientation sexuelle (Walker et al., 2005). Dans une étude américaine, 97% des hommes
victimes ont déclaré être déprimés après leur attaque et 83% ont rapporté des sentiments
d’anxiété (Walker et al., 2005). En particulier, les hommes victimes de viol se sentent souvent
impuissants car ils estiment avoir perdu leur fierté et leur dignité masculine (Walker et al.,
2005).

c) Probabilité de suicide dans les deux sexes

Des nombreuses études réalisées en Amérique du Nord et en Europe montrent que les
victimes de viol sont plus susceptibles de se suicider ou de tenter de se suicider que les
personnes que n’ont jamais subi ce type d’agression, même après avoir contrôlé les effets
d’autres variables comme l’âge, le niveau d’éducation, le statut social, la santé mentale, etc.
(Davidson et al., 1996 ; Wiederman et al., 1998 ; Romans et al., 1995). Des résultats
similaires ont été trouvés dans des pays africains comme l’Éthiopie et l’Afrique du Sud
(Mulugeta et al., 1998 ; Krug et al., 2002). Enfin, une étude menée auprès d’adolescents au
Brésil a révélé que les abus sexuels antérieurs constituaient un facteur prédictif de plusieurs
comportements à risque pour la santé, y compris les pensées et tentatives de suicide
(Anteghini et al., 2001).

5.3. L’impact social


24

Le viol amène les victimes à une nouvelle situation difficile à faire face non seulement
physiquement ou psychologiquement mais aussi socialement. En premier lieu, après
l’agression, les victimes se sentent gênées de parler de ce qui leur est arrivé même à leurs
proches. Ensuite, dans le cas où elles décident de porter plainte, les victimes doivent se diriger
vers les services de police compétents. Malheureusement, dans beaucoup de pays, ou selon les
contextes sociaux, elles ne sont pas prises au sérieux et parfois même sont tout simplement
maltraitées. Par ailleurs, raconter ce qui s’est passé signifie revivre la scène, ce qui est
émotionnellement éprouvant. Sur le chemin qui les amène des examens médicaux au procès
pénal, dans les rares cas où ils ont lieu, les victimes subissent une perte d’intimité, voient leur
crédibilité mise en cause. Elles n’ont pas toujours, venant de la famille, le soutien
psychologique et matériel dont elles ont crucialement besoin. Dans certaines sociétés, elles
peuvent également subir une victimisation secondaire ou des reproches, des actes de cyber-
intimidation, ou même être assassinées (crime d’honneur).

Il est important de noter ici que le problème social dont les victimes d’agression sexuelle
souffrent le plus est le blâme venant de la société. Voyons comment il se manifeste et les
raisons qui lui sont éventuellement associés.

a) Le blâme de la victime

Blâmer la victime consiste à lui attribuer, en tout ou en partie, la responsabilité du crime en


tant qu’agent, conscient ou inconscient, incitateur. Dans le contexte du viol, par exemple, on
jugera que certaines attitudes et/ou comportements de la victime (comme le flirt, le port de
vêtements sexuellement provocateurs, le fait de boire de l’alcool ou consommer de la drogue)
ont encouragé l’agression (Wakelin & Long, 2003). On fait croire à la victime que le crime
était bien de sa faute. Par ailleurs, les violeurs sont connus pour utiliser le blâme des victimes
comme la principale exonération psychologique de leurs crimes (Wakelin & Long, 2003). Les
femmes victimes de viol reçoivent plus de blâme lorsqu’elles manifestent un comportement
qui rompt avec les conventions sociales liées aux rôles assignés à chaque genre. Le blâme
porté aux femmes victimes de viol est souvent modéré par l’attrait et la respectabilité de la
victime, les plus inattrayantes ou socialement démunies étant blâmées davantage (Wakelin &
Long, 2003). Les victimes de sexe masculin sont plus souvent accusées de faiblesse ou d’être
efféminées. Le manque de soutien de la communauté envers les hommes victimes d’agression
sexuelle est associé aussi au peu d’intérêt que la plupart des sociétés accordent au viol
perpétré contre les hommes : c’est un tabou, très peu signalé (Anderson, 1982).
25

Analytiquement, le blâme des victimes de viol a été examiné du point de vue de la théorie
d’un monde juste (just world hypothesis). Selon cette perspective, les gens ont tendance à
croire que le monde est intrinsèquement juste, acceptant difficilement d’envisager une
situation dans laquelle une personne est victimisée sans raison ou sans le mériter (Lerner &
Miller, 1978 ; Vonderhaar, 2014). Ainsi, on tend à penser que les victimes doivent avoir fait
quelque chose pour mériter leur sort (Lerner & Miller, 1978 ; Vonderhaar, 2014). Une autre
explication théorique avancée pour expliquer la tendance à blâmer les victimes de viol est la
théorie d’un monde invulnérable (the assumptive world theory) fondée sur l’hypothèse de la
protection psychologique de son propre sentiment d’invulnérabilité (psychological need to
protect one’s own sense of invulnerability) qui incite les gens à croire que le viol n’arrive qu’à
ceux qui provoquent l’agression (Schneider et al., 1994). Ce dernier biais cognitif est utilisé
comme un moyen de se rassurer sur sa propre sécurité, évitant ainsi d’avoir à faire à
l’angoisse : « si j’évite de me comporter comme ces personnes sexuellement agressées, je ne
risque rien », essaie-t-on de se persuader (Kleinke & Meyer, 1990 ; Schneider et al., 1994).

Enfin, une enquête mondiale sur les attitudes à l’égard de la violence sexuelle réalisée par le
Forum mondial pour la recherche en santé montre que les concepts de reproche aux victimes
sont courants dans de nombreux pays (Krug et al., 2002).

Le fait de blâmer les victimes peut également résulter de l’objectivation sexuelle (sexual
objectification). L’objectivation sexuelle consiste à reduire l’existence d’un individu à celle
d’un objet sexuel. Cela implique la déshumanisation (Laughnan, 2013). Une étude menée en
Grande-Bretagne a révélé que plus les femmes sont objectivées sur la base des vêtements
qu’elles portent et de ce que les médias disent à leur sujet, plus elles sont susceptibles de subir
le blâme de la victime après une agression sexuelle (Laughnan, 2013).

6. La prise en charge thérapeutique de la violence sexuelle

6.1. Les psychothérapies

La plupart des thérapies utilisées pour traiter les victimes de violence sexuelle incluent des
approches cognitivo-comportementales (e.g., thérapie basée sur la restructuration cognitive,
26

thérapie basée sur l’exposition graduée à des facteurs déclenchant le stress et les symptômes
pour tenter d’induire une certaine désensibilisation - insight/experiential therapy), des
approches empathico-émotionnelle (e.g., la thérapie centrée sur le client et basée sur
l’empathie et les émotions positives, la thérapie somato-émotionnelle), des approches psycho-
dynamiques (e.g., thérapie de groupe basée sur le jeu de rôles), des approches
suggestives/inductive (e.g., l’hypnose), etc.

En termes d’objectifs, les interventions psychothérapeutiques pour les adultes victimes


d’agression sexuelle sont conçues pour réduire la détresse psychologique et les symptômes
associés au trouble de stress post-traumatique (TSPT) par le biais de conseils, d’interactions
structurées ou non structurées ou de programmes de formation spécifiques. Plus précisément,
ces interventions visent à réduire les symptômes liés au TSPT, à supprimer ou à atténuer
l’anxiété et la dépression, à améliorer l’adaptation sociale et l’estime de soi (Mcgill, 2006 ;
NIJ, 2020).

En termes de typologies, les thérapies qui visent à aider les victimes de violence sexuelle
peuvent être classées en trois catégories (Mcgill, 2006 ; NIJ, 2020) :

• Les thérapies cognitivo-comportementales supposent qu’une personne est à la fois le


producteur et le produit de son environnement ; par conséquent, le traitement vise à
changer les comportements d’une personne dans son environnement. Le modèle
intègre des composantes de la théorie cognitive, comportementale et sociale. Des
exemples d’approches cognitivo-comportementales spécifiques comprennent la
thérapie d’exposition graduée ou une formation à la tolérance aux facteurs de stress,
l’entraînement de désensibilisation à l’effet indésirable provoqué par certains stimuli,
l’intervention cognitive visant à modifier la façon caractéristique dont l’individu se
perçoit ou perçoit les événements/situations venant de son environnement, une
formation à l’assertivité, etc.

• Les thérapies psychodynamiques se concentrent sur des aspects tels que l’expression
des émotions, la façon d’éviter les émotions pénibles, l’identification et l’adaptation
des mécanismes de défense, travailler les compétences liées à l’entretien de relations
interpersonnelles salutaires. Une composante importante de la thérapie
psychodynamique consiste à faire remonter les tensions psychiques de l’inconscient
vers le conscient de la personne, de manière à favoriser un fonctionnement plus sain.
27

• La psychothérapie de soutien, basée sur la démonstration effective de la


compréhension, de l’empathie, de l’intérêt pour la personne en tant qu’être humain,
peut être fournie dans des contextes individuels ou de groupe, et permet à une
personne de partager son expérience traumatisante et la façon dont elle vit les
symptômes qui ont résulté de l’événement dans un contexte où non seulement elles se
sont soutenues, mais également se sont appréciées. Les approches de soutien visent à
mieux appréhender l’expérience vécue, les transactions au niveau familial et
communautaire (perspective systémique) à insuffler de l’espoir, à apprendre à faire
face à ce qui s’est passé avec d’autres personnes qui ont vécu des événements
similaires, à diminuer le sentiment d’isolement d’un individu victime, etc.

Le choix d’une méthode thérapeutique spécifique dépend des caractéristiques particulières de


la victime, telles que l’étendue des symptômes du TSPT. Les caractéristiques du traitement (y
compris la durée, le nombre de séances, le cadre de traitement et l’expérience du thérapeute)
varient en fonction du type de thérapie.

En termes de développement spécifique de la thérapie, au début des séances, le traitement


comprend généralement deux aspects : (a) le développement et le maintien d’une relation de
confiance avec le thérapeute et (b) encourager la victime à raconter son histoire sur
l’agression afin que le thérapeute puisse comprendre pleinement ce qui s’est passé.

Ensuite, vient la phase suivante au cours de laquelle le thérapeute tente d’aider la victime à
donner un sens à ses souvenirs, à accepter les émotions et les sentiments associés, à réduire ou
éliminer les symptômes liés au TSPT, y compris les pensées récurrentes, les flashbacks, la
culpabilité, l’auto-blâme, la honte et les peurs associés à l’agression.

Par exemple, l’auto-blâme peut être corrigé par une technique de thérapie cognitive connue
sous le nom de restructuration cognitive, consistant à prendre les faits et à en tirer une
conclusion logique qui est moins influencée par la honte ou la culpabilité liée à l’agression.
Vu que la plupart des victimes de viol ont du mal à accepter que ce qui leur est arrivé n’est
pas de leur faute, ce procédé peut les aider à lutter contre la culpabilité et l’auto-blâme.

Enfin, dans la phase suivante, le thérapeute pourra enseigner à la victime d’agression sexuelle
des compétences telles que la gestion de la colère, l’assertivité, la meilleure façon de contrôler
et communiquer ses émotions, les astuces pour entretenir des relations positives avec les
28

autres. Ici, le thérapeute se concentre à développer chez sa patiente des mécanismes pratiques
pour faire face à des situations problématiques précises, qui surviennent dans la vie privée et
professionnelle de la victime, en se servant proprement des opinions et des croyances de celle-
ci au sujet de sa vie.

6.2. Les interventions psychosociales

En général, les interventions psychosociales sont faites dans le cadre de la famille, de la


communauté ou des associations des victimes. Ces interventions peuvent se présenter sur la
forme d’une organisation de groupes de discussion et de soutien, d’aide à l’insertion sociale
dans nouveau cadre de vie (un foyer pour les victimes, une famille d’accueil), sous la forme
d’insertion professionnelle, d’intégration dans une activité de prévention et de lutte contre les
violences sexuelles.

Le soutien psychosocial, l’insertion professionnelle ou l’activisme à travers les associations


de victimes sont essentiels. Ils aident la victime à se sentir utile aux autres et à la société, à
donner un nouveau sens à sa vie. Ils permettent l’amélioration de l’estime de soi et le
développement des relations positives.

Par exemple, au Mozambique, à la fin de la guerre civile, des organisations non-


gouvernementales et des associations locales ont œuvré à l’intégration psychosociale des
femmes victimes de violences sexuelles pendant les 16 ans de conflit armé. Particulièrement,
pour les femmes qui avaient été kidnappées et amenées de force dans les zones contrôlées par
l’armée rebelle, les familles et les communautés d’origine des victimes ont été encouragées à
accepter leur retour. Des cérémonies traditionnelles religieuses ont été organisées visant à
l’intégration sociale de ces femmes ; des sessions dites de « vérité, pardon et réconciliation »
ont été organisées dans les communautés respectives. Pour éliminer ou atténuer le
traumatisme, dans tout le pays, les familles et les communautés des victimes ont organisés des
sessions collectives de médecine traditionnelle incluant la consommation de boissons
contenant des plantes ou des racines aux vertus hallucinogènes et cathartiques.

7. La prévention de la violence sexuelle


29

Affectant toutes les parties de la société, la prévention des violences sexuelles doit être conçue
comme un effort réalisé par tous et pour tous (dans les relations interpersonnelles, dans le
cadre de la famille, dans le contexte communautaire, scolaire, professionnel, etc.).

Ainsi, les programmes de prévention des violences sexuelles doivent prendre en compte les
facteurs qui, dans une société cible, dans un groupe cible, sont identifiés comme prédisposant,
favorisant et renforçant ce type de comportement (modèle de prévention precede-proceed). A
partir de là, on doit dessiner des programmes d’action multidimensionnelle incluant les
versants suivants :

• Education sexuelle dans les écoles et dans les communautés (aborder des questions
relatives à la pertinence des conceptions psychosociales différentielles des rôles
assignés à chaque genre, évoquer les caractéristiques particulières de la physiologie
sexuelle féminine vs. masculine, soulever des questions relatives à la définition et à la
pratique situationnelle du consentement à une relation sexuelle, entamer la discussion
sur la pornographie et ses probables effets sur les comportements sexuels, sensibiliser
les adolescents sur les causes et les conséquences de la violence sexuelle, etc.) ;

• Adoption et application d’une législation et des pratiques juridiques dissuasives


(susceptible de diminuer l’impunité et augmenter la responsabilisation des auteurs) ;

• Favoriser la dénonciation des actes de violence sexuelle ;

• Favoriser l’émergence d’organisations communautaires, professionnelles ou juridiques


de défense des personnes vulnérables et/ou des victimes de ce type de violence, etc.

D’une particulière efficacité sont les programmes incluant le fait d’organiser des petits
groupes de discussion (maximum 20 individus), réunissant des non-victimes avec des
victimes, des hommes et des femmes, pour examiner les causes et les conséquences des actes
précis et contextualisés de violences sexuelles ; écouter les victimes parler des conséquences
que l’agression a eu sur elles ; et, finalement, amener les participants à s’engager, dans leur
vie privée, scolaire, universitaire, professionnelle à intervenir concrètement dans la lutte
contre les violences sexuelles (Foubert, 2000 ; Smothers & Smothers, 2011; Vladutiu et al.,
2011; Vera Cruz, 2013)

7.1. Les programmes scolaires d’éducation sexuelle


30

Malheureusement, dans la plupart des pays du monde, l’éducation sexuelle dans les écoles
soit elle n’existe pas du tout, soit quand elle existe, elle se focalise sur la biologie de la
reproduction et sur les aspects négatifs de la sexualité (e.g., maladies sexuellement
transmissibles, violence sexuelle) ; elle se fait trop souvent à partir de livres, de manière
impersonnelle et décontextualisée. Elle ne parle pas des problèmes relatifs à l’interaction entre
les partenaires, la façon de gérer le désir ou la frustration liée à un refus des avances ; elle
aborde très rarement la question du consentement, la façon de gérer les émotions liées à la
sexualité, etc. Or, depuis les années 1980, de nombreuses recherches (e.g., Aggleton, 1989 ;
Abraham et Sheeran,1993 ; Vera Cruz, 2013) ont montré que sont plus efficaces les
programmes d’éducation sexuelle qui tout en abordant les différents thèmes (reproduction,
interaction entre partenaires, émotion, risques d’infection sexuellement transmissible, la
violence sexuelle et ses conséquences sur les victimes) insistent sur les aspects positifs de la
sexualité (intimité partagée, émotion partagée, plaisir partagé, réciprocité dans la
reconnaissance, etc.) à travers des activités qui personnalisent et contextualisent les situations.
De telles activités peuvent inclure : (a) la tenue des discussions authentiques sur les enjeux
physiques et émotionnels, sur les croyances, sur les préjugés et stéréotypes liés aux genres,
etc. ; (b) l’organisation des jeux dramaturgiques sur des aspects factuels pertinents dans la
société où vivent les étudiants, la conduite des études de cas particulièrement intéressant pour
illustrer un phénomène ; (c) l’invitation des personnes qui acceptent de venir parler d’un
thème particulier ou la réalisation d’interviews de spécialistes sur un sujet particulier, etc.

Cette approche devrait faire évoluer les apprentissages didactiques basés sur l’acquisition de
connaissance en faveur d’une perspective privilégiant la discussion sur la sexualité au sein
d’un contexte social plus général, plus propice à enseigner aux jeunes le désir et le plaisir
mutuel, et à quel point cela est important pour la santé physique et mentale. En particulier,
apprenant à mieux connaître leur corps et à atteindre le plaisir sexuel partagé, les jeunes
seront plus armés pour avoir des relations sexuelles plus saines et plus épanouies. Si les
jeunes sont capables de se sentir plus relaxés avec leur propre corps et avec les plaisirs
corporels, alors ils seront moins affectés par les pressions à s’engager dans une activité
sexuelle contre leurs souhaits, dans des façons de faire avec lesquelles ils ne sont pas à l’aise,
plus armés pour lutter contre les violences sexuelles.
31

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