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Livre 1 Le Monde de Loss PDF

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Chants de Loss - maziere jean - ref 14778

Ref. 14778
INTRODUCTION

CRÉDITS ET REMERCIEMENTS
Ces pages, les Chants de Loss, sont dédiées à la mémoire de la maman aimée d’Alysia
et ma belle-maman chérie, Danielle Loretan.

L’ÉQUIPE
Les autrices : Axelle « Psychée » Bouet, Alysia Loretan, Émilie Latieule.

Les collaborateurs : Julien « Djoul » Salamin, Yann « BBS » Décombaz (vous ne voulez pas savoir ce que
veut dire BBS) et Stéphanie « Sté » Roth.

Rédaction et plume littéraire : Axelle « Psychée » Bouet

Révisions et pinaillage techniques : Julien « Djoul » Salamin (notre emmerdeur en chef), assisté d’Alysia
Lorétan

Les Testeurs : Julien « Djoul » Salamin, Yann « BBS » Décombaz, Stéphanie « Sté » Roth, assistés de
Laurent Gärtner

Direction artistique : Axelle « Psychée » Bouet

Graphisme, design et logo : Axelle « Psychée » Bouet, Inès de Carvalho, Pierre le Pivain

Maquettisme et mise en page : Alysia Loretan

Illustrations : Axelle Bouet, Pierre le Pivain, Julien Fenoglio, Christine Deschamps, Sabrina Tobal,
Émile Denis, Lunart, Jade River, Agathe Pitié, Radek FV, Inès de Carvalho.

Rédaction des scénarios : Vincent Lelavechef, Yann « BBS » Décombaz, Nicolas Bernard

Coordination éditoriale, correction et emmerdements maximaux : Romain Delplancq

Relecture : Clément « le petit scarabée d’Émilie »

Promotion, presse et gestion de la communauté : Vincent Lelavechef, Axelle « Psychée » Bouet, Yann
« BBS » Décombaz (notre grand Nagus à nous !)

LES CONTRIBUTEURS ET LES PREMIERS FANS


Stéphane « Alias » Gallay, auteur de Tigres Volants et des romans Erdorin qui nous a suivis et conseillés depuis
les débuts, Igor Polouchine, auteur de Shaan et Shaan Renaissance, sans qui cette aventure n’aurait simplement
jamais commencé, Michel Chevalier, des Éditions Stellamaris pour son soutient de premier fan de Loss depuis
les premiers chapitres du premier roman et, enfin, Vincent Zellweger qui gagne haut la main avec Michel
Chevalier ex aequo le titre de premier fan des Chants de Loss.

REMERCIEMENTS
On va commencer par remercier Hicham, de Matagot, pour avoir cru en nous et nous avoir fait confiance en
se lançant avec nous dans l’édition de ce jeu. Nous tenons aussi à remercier la pléthore de relecteurs qui nous
ont aidés depuis nos premières lignes à parfaire le présent ouvrage. Enfin, nous tirons chapeau bas à tous nos
fans qui nous suivent et nous encouragent avec passion depuis quatre ans et sans qui nous n’aurions jamais
pu parvenir à un tel résultat. Je songeais à écrire ici des noms particuliers, mais en fait, vous êtes bien trop
nombreux à qui nous devons cette reconnaissance. Alors, si je vous dis que vous êtes tous membres du groupe
Facebook Les Chants de Loss, vous vous reconnaîtrez. Merci mille fois de tout cœur à vous tous !

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AVANT-PROPOS

AVANT-PROPOS
J ’aurais voulu ne pas avoir besoin d’écrire ces lignes.
Mais on nous a souligné la nécessité d’un clair
reste à l’heure actuelle 46 millions d’esclaves dans le
monde… contre 38 en 2014.
avertissement, que nous avons souhaité accompagner
de quelques mots de mes co-autrices Émilie Latieule, Nous sommes aussi féministes, comme je le dis plus
Alysia Loretan et moi-même Axelle «Psychee» Bouet. haut. La grande majorité des gens ignorent que dans
le monde, trois femmes sur cinq sont violées au moins
Les Chants de Loss, la saga de romans comme le jeu de une fois dans leur vie. Qu’à l’échelle mondiale, près
rôle, contiennent des sujets, des thèmes et des scènes de 90 % des femmes ont été agressées sexuellement au
explicites dans la violence, l’érotisme, le sexe, l’oppres- moins une fois dans leur vie. Qu’une femme a vingt
sion et l’injustice. Le monde de Loss est cruel, sexiste, pour cent de chance de plus de mourir d’un assassinat
les hommes misogynes y sont légion, le système social qu’un homme. Et que les droits les plus évidents des
s’est appuyé sur des lois patriarcales anciennes discri- femmes, à égalité avec les hommes, dont nous bénéfi-
minant la femme, légitimées par l’omniprésence de cions vous et moi, ne concernent que moins du quart
l’influence de l’Église du Concile Divin. La quasi-tota- de la population mondiale.
lité de ses peuples pratique l’esclavage et ne voit rien
de choquant à considérer un être humain comme une Maintenant, songez qu’à certaines époques, ce fut
propriété. Ce contenu fait partie intégrante de l’univers parfois bien pire. Paradoxalement, selon les époques,
de Loss. Il est un des socles des sujets traités dans la ce fut aussi parfois meilleur que ce que nous croyons
saga des romans et le jeu de rôle, ainsi qu’une source savoir. Après tout, nous n’avons en général que des
d’intrigues, de drames, de contextes et de réflexion connaissances parcellaires de l’Histoire.
pour les pratiquants du jeu de rôle. S’il est présent,
son objectif est aussi de susciter la réflexion du lecteur. Ces réflexions, partagées avec Alysia et Émilie, nous
ont convaincues de ne pas édulcorer ni minimiser la
Ces thèmes peuvent heurter ou indigner certains violence et l’horreur dont peut faire preuve la civili-
lecteurs sensibles. Nous préférons donc vous avertir sation des Lossyans. Ni d’en ignorer aussi les mer-
avant que vous soyez bouleversé. veilles, les aspects touchants, la magie ou l’exotisme.
C’est un tout. Et c’est une leçon.
Quelques mots des autrices
Vous pourrez donc être choqué, peut-être marqué,
Alors, pourquoi ? Cette question, je considère souvent révolté, indigné même. Si dans le jeu de rôle le ton
qu’elle trouve sa réponse d’elle-même, dans ce qui est neutre, il reste sans concession. Nous ne faisons
m’apparaît comme des évidences que tout quidam nulle complaisance avec les violences de Loss ; ce
pourrait comprendre par simple réflexion. Mais la ré- serait de peu d’intérêt. Mais elles existent, nous en
alité n’est pas si simple ; voici donc l’explication. parlons ; faites avec. Dans le roman, c’est mon but de
vous toucher, vous émouvoir et vous révolter ! Si vous
En tant que féministes et humanistes (bien que pas êtes indifférent aux affres des personnages, à l’injus-
forcément toutes les trois au même degré), nous savons tice sous-jacente au récit, c’est que j’ai échoué à vous
ce que fut le combat qui rendit la société dans laquelle montrer l’horreur des aspects du réel et de l’Histoire
vous vivez relativement humaniste et raisonnablement que nous préférons ne pas connaître. Dont on dé-
féministe, où vous jouissez de cette liberté qui vous est tourne les yeux et les pensées. Lisez, voyez l’horreur,
si chère. Et qui est tellement tellement récente. Il est soyez-en révolté, et réfléchissez-y.
donc évident que nous sommes tout à fait contre toute
forme d’asservissement et de discrimination. Rien ne Vous ne voulez pas y réfléchir ? Vous êtes indigné par
les justifie ou ne les excuse jamais. Plus que des crimes, ce que vous lisez et l’audace de nos propos les plus
ce sont les antithèses de l’humanisme. crus ? Nous en avons conscience, c’est un choix ; si
cela vous a choqué, c’était aussi notre dessein, un but
Mais on oublie pourtant que dans notre monde, l’idée totalement assumé par Alysia, Émilie et moi-même.
que l’on ne peut pas disposer d’êtres humains comme
de propriétés et marchandises est un concept très Bonne lecture à vous tous !
jeune. La fin de l’esclavagisme en Occident n’a eu lieu
qu’au cours de la seconde moitié du XIXe siècle et non
sans mal. Même en France, les derniers esclaves ne
furent libérés qu’en 1963 aux îles Maurices ; malgré
le fait que l’esclavage y fût officiellement aboli depuis
1835. Sans oublier enfin que l’actualité nous rappelle
atrocement que cette notion, qui nous paraît presque
naturelle, ne l’est, et de loin, pas partout sur Terre. Il

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INTRODUCTION

TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION 2
Crédits et remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .2

Avant-propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .3

Aux origines . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .6

Qu’est-ce que les Chants de Loss ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

Les aventures de Loss . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

Qu’est-ce que le jeu de rôle ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

Qu’est-ce que le Da Vinci-punk ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

CHAPITRE 1: LE MONDE DE LOSS 18


Le monde aux deux soleils. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

Le monde des Lossyans . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22

Les Lossyans . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24

L’organisation sociale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27

Science et technologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

Les parias . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

Le loss-métal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

Les mammaliens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34

Les symbiotes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38

L’histoire de Loss . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

Les Vertus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

La vie quotidienne des Lossyans . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59

La mort et les rites funéraires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62

La famille et le nom . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

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TABLE DES MATIÈRES

Les hommes, les femmes et les genres. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64

L’éducation et le travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

Les loisirs et les jeux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68

La justice et les lois . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70

Codes sociaux et vie quotidienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71

Nourriture, boissons et étoffes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74

L’esclavagisme et le Haut-Art . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77

CHAPITRE 2: PEUPLES ET CIVILISATION 86


Les peuples de Loss . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88

Les régions et capitales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112

L’Église du Concile Divin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 138

La Guilde des Marchands . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .146

La Cour des Ombres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 154

Les femmes d’épée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158

CHAPITRE 3: SCIENCES ET GÉNIES 162


Les génies de Loss . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .164

Technologies et merveilles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 167

Les navires lévitants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173

La médecine lossyanne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177

CHAPITRE 4: LES PARIAS 180


Les Chanteurs de Loss. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182

Le chamanisme et les cultes mineurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .186

Les Terriens perdus de Loss . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .189

INDEX 190

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INTRODUCTION

Aux origines
— Ainsi donc tu es une chamane…
Il était difficile d’affirmer qui toisait l’autre ; l’homme qui venait de parler, le ton dur et assuré, le
regard perçant sur un visage de fauve, encadré de cheveux noirs ou la femme assise sur des peaux de-
vant lui, les yeux perdus dans un amas de rides et de cernes, témoin de l’âge qui avait sculpté ses traits
à l’image d’un corbeau ?
La vieille sembla goûter le silence longuement, dans cet échange muet, face à face, tandis que les
seuls sons à percer la nuit étaient ceux de quelques oiseaux sinistres et le crépitement léger des braises
qui, seules, éclairaient la cabane de toile. Ses yeux délavés de bleu, enfoncés dans leurs orbites, s’agi-
taient d’un mouvement saccadé, tandis qu’elle jaugeait le solide gaillard aux atours de voyage, coupés
simplement, mais dont le prix eut payé la vie d’une dizaine d’esclaves des plaisirs. Elle se décida enfin ;
sa voix, comme si elle reflétait son faciès, croassa :
— Et toi, tu es un Chanteur de Loss.
L’homme leva un sourcil, avant de dérider un sourire à peine visible. En un instant, la femme qui lui
faisait face venait de lui plaire :
— Comment peux-tu l’affirmer, Sohora ?
La vieillarde reprit d’un rire sinistre :
— Et toi, Jawaad, le Maître-marchand, comment peux-tu dire que je suis chamane, hein ? Sais-tu
même ce que c’est ?
— Question contre question, fit remarquer Jawaad, d’un ton impassible. Tu y tiens vraiment ?
La vieille montra une des peaux ouvragées devant elle, en guise d’invitation à s’asseoir :
— N’est-ce pas ainsi que l’on commence une conversation ?

Au sommet de la crête boisée qui dissimulait aux regards le jardinet et les pilotis entourés de nasses
où était installée la hutte dans laquelle avait pénétré leur patron, Abba et Damas attendaient. Ortentia,
partiellement voilée par de gros nuages de pluie, éclairait mal l’obscurité. Abba avait beau être un puissant
colosse noir des Franges, à la taille hors-norme, il n’aimait pas la nuit. Pour être exact, il en avait une
trouille superstitieuse, surtout perdu au fin fond des marais de l’Argas. Et la désinvolture de son collègue,
en train de tirer sur sa pipe, assis sur une souche pourrissante, la main au-dessus du foyer pour en cacher
le faible éclat rougeoyant, l’agaçait d’autant plus. Il ne connaissait guère Damas, embauché quelques
mois plus tôt par Jawaad ; un homme sec et mince, pas très grand, aux longs cheveux noirs filasses, aux
traits taillés à la serpe et qui semblait poser sur tout un regard désabusé. Il ne le confirmait jamais et à
raison, d’ailleurs, mais des rumeurs prétendaient qu’il était d’origine Jemmaï. Il ne parlait pas beaucoup ;
le plus souvent pour lancer quelque remarque moqueuse ou cynique.
Le géant se tenait debout, arbalète mécanique sur l’épaule. Il préférait l’arme, même pesante, au
genre de fusil bruyant qu’affectionnait son compère. Faisant les cent pas sur la crête, il se remit à râler :
— Et toi, tu t’en fous royalement qu’on soit à un jet de pierre d’une maison de sorcière, dans un
marais maudit, sous une nuit à attirer les démons à venir danser avec les vivants ?!
Damas leva la tête, affichant un sourire qui cachait mal qu’il se retenait de rire à la question :
— Cela ferait un sacré paquet de mauvais sorts, à t’entendre ?
Damas gronda en réponse. Même en cachant mal sa trouille, le colosse avait un timbre de voix grave
et bestial, à faire hésiter les plus aventureux :
— Je ne sais pas pourquoi Jawaad a voulu approcher cette rebouteuse… et pourquoi en pleine nuit,
par les Hauts Seigneurs ?! Il voudrait nous attirer la guigne qu’il ne s’y serait pas pris autrement !
Là, le Jemmaï éclata de rire sans pouvoir se retenir :

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AUX ORIGINES

— Il y a bien assez de démons sous le ciel, qui marchent sur deux jambes, boivent du vin et sont avide
d’or et de femmes, pour que je ne perde pas de temps à croire qu’il y a en a encore d’autres, venus des
abîmes sous la terre ! J’ai vu le Rift de près, là où l’Église interdit à tous de pénétrer. Et tu sais quoi ? Il n’y
avait pas un seul démon noir aux yeux rouges, crachant le feu et la cendre. Même pas l’ombre d’une trace
dans la plus noire des nuits. Juste une terre désolée et mortelle qui veut tuer tout ce qui ose l’arpenter.
La tirade de Damas réussit à faire s’arrêter net le géant, qui fixa son acolyte sans cacher sa surprise :
— Mais tu sais parler ?! C’est pas parce que tu le dis que je vais te croire, mais j’avais fini par conclure
que tu étais aussi peu loquace que Jawaad et que j’allais devoir apprendre à faire la discussion tout seul,
quand on voyage. Je dois dire que je suis…
— Attends !
Le colosse fronça les sourcils et tourna la tête vers le fond du vallon, de l’autre côté de la cabane de
la sorcière :
— Les oiseaux… ces satanés oiseaux de nuit ne croassent plus ?!
Damas enfonça du pied la gueule de sa pipe dans le sol meuble et se leva à son tour, dans un mou-
vement de félin en chasse, tenant fermement son long fusil de précision. Il baissa immédiatement le ton :
— Parce que quelque chose les a dérangés. Quelque chose qui veut être discret et n’y est pas parvenu.
Quelque chose qui menace…
Immédiatement, le géant noir prit un teint de pierre en blêmissant ; il murmura, la voix nouée :
— Des démons ?
Damas fit non de la tête et montra la berge du fleuve, en contrebas. Il fallait des yeux hors-norme
pour percer la nuit à telle distance ; c’était son cas, comme nombre de Jemmaïs. Seule la plus noire obs-
curité pouvait le gêner :
— Pas des démons. Des chiens et des hommes en chasse.

Jawaad accepta le gobelet de bois que lui tendit la vieille, reniflant le contenu, avant de le boire. C’était
une infusion sucrée qui, avec beaucoup d’imagination, aurait pu passer pour un thé parfumé. Mais une
boisson offerte ne se refusait pas et ce n’était pas de l’alcool, l’exception à laquelle le Maître-marchand
ne transigeait pas : il n’en buvait jamais. Il fixa la chamane et lui fit un signe de tête. C’était à elle de
commencer ; elle s’en amusa et rajouta un fagot sur le feu qui revint lentement à la vie :
— Tous les chamans peuvent le savoir, Jawaad. Comme tous les Chanteurs, tu vibres. Vous vibrez tous.
De loin, dans l’océan terne des âmes lossyannes, vous brillez comme de petits faros de papier flottant sur
les flots, battus par les vents. On ne peut que vous voir.
— Comment ?
La vieille lâcha un sourire édenté :
— Tu ne livrerais pas tes secrets si facilement, non ? À toi… Que veux-tu à une chamane, toi qui crois
savoir ce que nous sommes ?
— Tu as appris, d’un regard, quelque chose qui n’est su que de trois personnes sous le ciel. Deviner
pourquoi je te cherche ne doit pas t’être si difficile, non ?
La vieille lâcha un autre sourire et elle hocha la tête. C’était bien vu comme réponse et elle joua le jeu :
— Tu es mourant. Ton Ambrose me parle ; il aspire au repos, il se lasse de lutter sans fin contre le
cancer qui te ronge. Il y a longtemps qu’il a vécu bien plus que ce que le permet les règles de la vie.
C’est pour cela, alors ? Pourtant, il y a de très bons physiciens, capables de soigner les hommes comme
les symbiotes. Tu es vieux, bien plus vieux encore que moi. Tout riche et puissant que tu es, tu vas finir
par mourir, comme tout le monde.
— J’ai encore des choses à faire, qui ne peuvent être remises. Je n’y renoncerai pas et je ne laisserai
pas le temps me dicter sa loi. Je sais et tu l’as prouvé, que vous, les chamans, comprenez les symbiotes
mieux que quiconque.
— As-tu donc peur de mourir ?
Jawaad dérida un sourire, levant un instant son regard noir sur la femme sans âge. Le feu redessinait le
relief de ses rides à la manière d’un parchemin froissé.
— Cette question est sans objet, la poser est inutile. Si mon symbiote te parle, il t’a donc dit ce qui
lui a donné son exceptionnelle longévité dont je profite, mais qui tire à sa fin…

7
Ref. 14778
INTRODUCTION

Sohora fronça les sourcils et toisa avec plus d’insistance le marchand à sa remarque, ses yeux se
mouvant avec attention. Il se passa un long moment silencieux avant qu’elle n’affiche une moue perplexe,
tendant dans un geste tremblant un doigt perclus d’arthrite vers le poitrail du marchand :
— Qu’est-ce que ton médaillon, dont la force a changé si profondément la nature de ton symbiote
de longévité ?
— Un Artefact Ancien. Il est bien antérieur au Long-Hiver et a déjà prolongé la vie de plusieurs
porteurs, tous mes ancêtres.
— Mais sa force décroît et avec elle, ton espoir de vivre assez longtemps pour parvenir à tes fins, c’est
cela ?
— Et tu peux en savoir plus que moi.
— Qu’est-ce qui te l’assure ? Un chasseur d’artefact sage et érudit serait de meilleur conseil qu’une
chamane, ne crois-tu pas ?
— J’ai arpenté cette voie, vieille femme. J’ai appris tout ce qu’il était possible d’apprendre…
— Et tu restes sans réponse, je le comprends bien. Cette chose en loss-cristal, à ton cou, qui vibre au
gré du Chant de Loss qui t’habite, échappe à la raison des Lossyans. Alors la solution, aussi improbable
soit-elle, est évidente…
— Un terrien…
Sohora fixa le Maître-marchand, dans un échange entendu de regards qu’un spectateur eut été bien en
peine d’interpréter. Dans la nuit, le silence retomba, avant que la vieille chamane ne se remette à parler :
— Tu vas chercher une terrienne ; une Chanteuse de Loss, assez puissante et assez forte pour que ton
médaillon vibre à l’unisson avec elle. Choisis-la docile, prends son âme et instrumentalise sa volonté. Et
puis, laisse sa logique de terrienne trouver la solution à laquelle tu ne pourras jamais penser.
— Pourquoi une ?
— Parce que les femmes sont toujours plus fortes, bien sûr !
La seule réponse de Jawaad fut un sourire indéchiffrable.

— Jawaad !
Le Maître-marchand émergea dans la nuit en poussant la tenture de la hutte. Au vu du ton avec lequel
Abba l’avait appelé, il n’avait aucun doute qu’il s’agissait d’une urgence. Ses deux seconds lui faisaient
face, encore essoufflés et en armes. Damas lui fournit une explication sans attendre :
— Dix hommes, autant de chiens et deux cavaliers sur des griffons de guerre. Ils ont suivi notre piste,
mais ils viennent pour elle.
Abba commenta, en ajustant son arbalète lourde :
— Ça en fait un paquet ; ils remontent déjà la crête.
Jawaad tourna la tête pour fixer la hutte un instant, avant de revenir à ses hommes. Son regard s’assom-
brit jusqu’à être si noir qu’il semblait qu’il avait dérobé la nuit. Inspirant longuement, il laissa échapper un
long son grondant, presque inaudible. Tout ce qu’il portait de métal sur lui s’auréola d’une fugace teinte
de bleu :
— Elle m’a donné toutes mes réponses ; alors, allons payer ma dette. Il n’y aura aucun survivant…

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PROLOGUE

— Vous n’êtes plus sur Terre ; bienvenue sur Loss.

Un érudit lossyan s’adressant dans sa langue à un Terrien perdu

QU’EST-CE QUE LES CHANTS DE LOSS ?


L es Chants de Loss sont une série de romans, un
univers et un jeu de rôle de fantasy Da Vinci-punk
ayant pour cadre un monde étranger et lointain : Loss.
ce monde hostile. Issus des peuples antiques d’Asie,
d’Afrique, d’Europe, ils colonisèrent les côtes des
Mers de la Séparation, une vaste mer intérieure parse-
mée d’archipels. Ils y fondèrent de nouvelles cultures
Loss est un endroit où créatures mortelles, pouvoirs et de grandes cités-États.
mystérieux, secrets oubliés et civilisations anciennes
côtoient la science de la Renaissance, les merveilles Et ils découvrirent le loss-métal : un métal aux propriétés
technologiques des génies et des ingénieurs, les ex- merveilleuses présent dans nombre de technologies
ploits des navires lévitants, des armes à impulsion et lossyannes. Sa capacité la plus étrange est celle de
des premières machines électriques, et les effrois des servir de catalyseur au Chant de Loss, qu’un nombre
premières expériences sur la vie. infime de personnes, le plus souvent les femmes — et
surtout les rousses — savent manipuler. Un pouvoir
Loss est peuplée et explorée uniquement dans l’en- rarissime et mal compris qui permet de contrôler la
semble des terres formant un sous-continent autour gravité, le magnétisme, les forces élémentaires, voir la
des Mers de la Séparation. Mille ans après le Long- vie elle-même. Un don effrayant qui évoque la magie
Hiver provoqué par les Chanteurs de Loss, qui faillit et les exploits des anciens dieux et des héros.
faire disparaître tous les hommes, les sociétés ont
prospéré en une vingtaine de cultures dominées le Cette force s’est d’ores et déjà révélée ravageuse, et
plus souvent par des cités-États. Un empire règne faillit anéantir toutes les civilisations lossyannes. Ce
pourtant sur les Mers de la Séparation, l’Hégémo- fut le jour de la destruction d’Antiva par la terrible
nie d’Anqimenès, fief de la toute-puissante Église du et démoniaque Orchys de Parcia. Ce fut le jour d’un
Concile Divin. Cette Église s’est appuyée dessus pour cataclysme à l’échelle du monde, quand les soleils
écraser presque tous les autres cultes, devenus margi- disparurent et restèrent voilés des années durant. Ce
naux, et depuis impose sa loi — par la propagande fut le Long-Hiver, mille ans auparavant.
comme par la force militaire. Elle décide ainsi de ce
qui est moral et de ce qui est impie. Quand celui-ci prit fin au bout de cinq ans, presque
tous les Chanteurs de Loss étaient morts, exterminés,
Et seule la cité-État d’Armanth, capitale de l’Athé- par terreur et haine de leur pouvoir. Les cités-États
maïs, fait véritablement de l’ombre à cette toute-puis- n’étaient plus que ruines abandonnées, les Lossyans
sance. La cité des Maîtres-marchands est le havre des réduits à affronter la faim, le froid et les épidémies.
savants et des libres penseurs, la cité aux cent mille
esclaves, la plus grande et la plus libre de toutes les Les premiers Prophètes de l’Église du Concile Divin
villes de Loss. clamèrent que les dieux avaient failli, laissant les
Chanteurs de Loss asservir les Lossyans jusqu’à les
détruire, alors qu’ils avaient été créés pour les ser-
DEUX SOLEILS vir. L’Église rétablit un semblant d’ordre social puis
une véritable hégémonie qui rayonna depuis leurs
Loss est une planète lointaine, hostile et sauvage, à la premiers temples d’Anqimenès. Croisades après
faune et la flore exubérante et dangereuse. Un monde conquêtes, l’Église imposa ses Dogmes, sa foi et son
qui n’a jamais été fait pour les humains. Nul ne sait autorité sur toutes les Mers de la Séparation. Et qui-
comment ceux-ci y sont arrivés, nul ne sait même de- conque lui résistait était écrasé sans pitié.
puis combien de millénaires ils y vivent. Mais tous les
Lossyans savent que les humains viennent des Étoiles. Mais cette conquête ne connut jamais de succès
Seul change le mythe sur cette arrivée et ces origines. complet. De nouvelles cités-États, de nouveaux em-
pires se bâtirent au cours des siècles. Des peuples dé-
fendirent leurs croyances face aux croisades, d’autres
DES DRAMES ET DES MERVEILLES luttèrent sans pitié pour leur indépendance. Si cer-
tains embrassèrent volontiers la foi du Concile, la
Les Lossyans disent que les premiers dieux leur plupart la subirent. Enfin, il y a ceux qui résistent
offrirent Loss en cadeau. D’autres que ce fut une toujours rageusement et victorieusement, tandis que
punition, ou encore les conséquences d’une guerre d’autres courants de pensée plus progressistes gran-
divine. Dans tous les cas, ils parvinrent à survivre à dissent au sein des cités-États.

11
Ref. 14778
INTRODUCTION

DES CONFLITS ET DES LUTTES c’est ce qui fait d’eux des Lossyans. L’individu qui ne
les connaît pas, ne les comprend pas ou n’en fait pas
Loss est un monde en permanence miné par la démonstration est regardé comme un barbare, une
guerre. Chaque cité-État lutte pour s’emparer des bête sans aucun droit.
moyens de l’autre et assurer sa propre subsistance. La
paix y est rare, la mort violente et fréquente — par la Partout, ces vertus sont plus respectées que le
maladie, par l’épée, par la faim. C’est un monde de loss-métal, la richesse ou les biens matériels ; elles
raids, d’armadas et d’armées en marche, un monde surpassent et contredisent même les Dogmes du
où même la nature est en conflit contre les hommes, Concile Divin. Il importe plus aux Lossyans d’honorer
où ceux-ci savent qu’il faut tout leur génie renouvelé et reconnaître les Vertus et ceux qui les portent,
pour en triompher. que de respecter les Dogmes. Car ces trois qualités
demandent de peser hommes et femmes à leur juste
C’est un monde de lutte. L’Église du Concile Divin, une valeur, sans rien considérer d’autre. Ne sont pris en
religion autoritaire disposant de centaines de légions compte ni l’origine, ni la race, ni le rang, ni même la
fanatisées et dont le bras armé est Anqimenès, capitale parole de l’Église, à son grand désarroi.
de l’Hégémonie, s’oppose à l’élan irrésistible du pro-
grès, de la connaissance, et de l’innovation incarnés Si les Lossyans sont machistes et sexistes, si la valeur
par la Guilde des Marchands. Celle-ci, un immense de la femme est souvent sous-estimée sauf en tant
consortium de confréries, de seigneurs terriens et de qu’esclave (et donc marchandise), si les Dogmes du
cités-États de l’Athémaïs, a fait d’Armanth un centre Concile imposent des lois cruelles, les Vertus offrent
d’où se répandent des idées subversives et hérétiques. toujours une échappée ; une opportunité de dépasser
son rang et briser les carcans de la société. Ainsi,
Loss est un monde dur et injuste, sur lequel pèsent femmes capitaines de navires ou officiers militaires,
en permanence les héritages des Dogmes de l’Église, guerrières, savantes et intellectuelles, chefs de fa-
et ce même quand ils se fissurent devant les théories mille et d’entreprises ont brandi honneur, courage
et les livres des philosophes, des savants et des intel- et sagesse face aux hommes et à égalité avec eux,
lectuels modernes. Ces Dogmes font de l’esclavage jusqu’à être reconnues. Ce sont les Femmes d’épée,
une pratique sacrée, destinée à l’origine à assurer vues avec méfiance, mais ô combien respectées !
un contrôle absolu sur les Chanteuses de Loss. Ce
qu’on appelle aussi le Haut-Art leur est réservé, tan-
dis qu’on tue tous les hommes Chanteurs de Loss
que l’on croise. Après le loss-métal, ce qui a le plus
COMPLOTS ET SECRETS OUBLIÉS
de valeur, ce sont les femmes, souvent asservies. Et Loss est enfin un monde de faux-semblants, de passés
personne n’imagine un monde sans esclaves. oubliés, d’histoires réécrites et de mythes réinventés.

Ces mêmes Dogmes appuyés par des traditions Dans les profondeurs des forêts et des déserts de
patriarcales ne font que peu de place aux femmes Loss se cachent les ruines des Anciens, peuples pré-
dans la société et la famille, pour qui les applique décesseurs des Lossyans, lieux de légendes où des
à la lettre. Ils réfutent aussi les anciens cultes, les explorateurs audacieux peuvent trouver des artefacts
idées novatrices, certaines recherches scientifiques et merveilleux ou redoutables.
historiques. Malheur à qui ose défier les Dogmes, car
l’Église le pourchassera, lui et tous les siens. C’est aussi un monde de sociétés secrètes, de com-
plots entre familles marchandes et lignées aristocra-
tiques. Des luttes intestines, complexes et cachées
font rage entre les noirs desseins des sectes de
l’Église, et les sombres mystères des sociétés occultes
de la Guilde des Marchands. La vérité n’est jamais
claire, les apparences sont souvent trompeuses et les
certitudes toujours remises en jeu. Rien n’est jamais
ce qu’il semble être sur Loss ; à commencer par le
passé perdu puis réécrit par l’Église, que les Lossyans
commencent à peine à redécouvrir.

Les navires lévitants de Loss parcourent les océans et


les plaines, voguant au-dessus des troupeaux d’ani-
maux géants et des prédateurs qui les suivent, carto-
HONNEUR, COURAGE ET SAGESSE graphiant toujours plus le monde. Savants et génies
explorent les arcanes des sciences et de la matière,
Les Lossyans tiennent en grande considération trois dévoilant le mouvement des astres, les arcanes de
Vertus : Honneur, Courage et Sagesse, les trois qua- l’ingénierie et de la médecine, les secrets du loss-mé-
lités qui pour eux définissent le monde et l’humanité ; tal ; et les plus téméraires (ou hérétiques) explorent les

12
Ref. 14778
PROLOGUE

savoirs et mystères des Anciens. Chaque découverte sans attaches et sans liens débarquent de nulle part,
est une nouvelle énigme et un nouvel enjeu dans qui sait ce qu’ils ont fait, qui ils sont réellement et
une lutte entre l’obscurantisme et le progrès, pré- ce qui les a forcés à choisir la vie aventureuse plutôt
mices d’une prochaine guerre à grande échelle qui que l’honorable devoir de veiller sur leur famille ?
ne souhaite pas dire son nom. Personne ne consi- Mais la plus grave question qui se pose quand on les
dère vraiment l’arrivée d’une bande d’Adventores croise, même s’il n’y a presque aucune chance que
dans les murs d’une cité ou d’un village comme une ce soit le cas, c’est : l’un d’eux serait-il un démon
bonne nouvelle, à part peut-être les marchands et Chanteur de Loss ?
les bonimenteurs. Quand ces individus voyageurs,

LES AVENTURES DE LOSS


L es personnages-joueurs (PJ) sont ceux des
Lossyans qui ne craignent ni les dangers de
la mer, ni les fantômes de la nuit, ni les démons
dédain. Après tout, un aventurier est un individu qui
a priori n’a pas de famille et d’attaches proches, et
qui préfère errer sur les routes plutôt que servir les
Chanteurs de Loss. Aventuriers, voyageurs, explo- siens et rester auprès d’eux.
rateurs, mercenaires, pirates, réprouvés, hérétiques,
progressistes, libertaires, savants, ingénieurs, fuyards Il existe un mot athémaïs pour désigner ces indi-
et terriens perdus… Ils ont tous trois points communs : vidus : les Adventores, littéralement « ceux qui sur-
leur courage qui surpasse la peur superstitieuse de viennent ». Un aventurier est considéré par défaut
l’inconnu, leur séparation volontaire ou forcée d’avec comme un voyageur venu d’ailleurs pour ses propres
leur foyer, et, qu’ils la recherchent ou non, la gloire affaires ou parce qu’il a été engagé. Ce qui veut
dont ils écrivent leur Légende. dire qu’il est une source potentielle de problèmes.
Outre qu’il ne connaît sans doute pas les coutumes
et codes locaux, un tel barbare gêne parce qu’il n’a
LES AVENTURIERS DE LOSS pas de famille sur laquelle veiller comme devrait le
faire tout homme d’Honneur. Pourtant, les Lossyans
Les personnages-joueurs sont des aventuriers, un mot lui témoignent aussi un certain respect. C’est un
que la plupart des cultures lossyannes chargent au- homme qui erre, qui découvre, qui a le Courage
tant de respect que de méfiance, avec une pincée de d’oser explorer le monde et la Sagesse d’y survivre.
Ref. 14778
INTRODUCTION

Dans la mesure où la quasi-totalité des gens ne se


Les négociants
risqueraient pas au-delà de la journée de carriole Érudits, marchands, espions, officiers, diplomates et
qui les sépare du grand marché local, l’aventurier artistes, les négociants sont employés pour résoudre
fait figure de légende. Il est certain de se voir de- les problèmes par la discussion et le marchandage.
mander, à la première occasion, de raconter les Ce sont alors des tâches où le but est d’éviter au
anecdotes exotiques de ses voyages ! maximum les effusions de sang et les tensions me-
nant à des conflits ouverts. Ce qui demande de la
Les aventuriers circulent et opèrent en équipe, pour ruse, des moyens financiers, des pressions sociales, et
des questions de survie et d’efficacité. Il est fréquent beaucoup, beaucoup de préparation, de négociation
que des Adventores travaillent au service d’un homme et de patience.
riche et puissant qui a besoin d’exécuteurs de tâches
sortant de l’ordinaire. Certaines de ces tâches peuvent
Les condottieres
être criminelles, allant du vol au meurtre en passant
par l’exfiltration, la prise d’otage, ou le sabotage. Porte-flingues, sabres à louer, éclaireurs, gardes du
D’autre peuvent être totalement légales et plus com- corps ou mercenaires, les condottieres ont pour tâche
merciales, comme de l’escorte, du transport de don- de tuer ou protéger pour de l’argent, ce qui peut
nées sensibles ou secrètes, ou de la protection d’indi- s’avérer très vite plus compliqué qu’on ne l’imagine.
vidus importants. Enfin, cela peut être plus exotique et Dans un monde sauvage, à la faune mortelle, on ne
dangereux, comme l’exploration d’une région sauvage peut se passer ni de leur force et de leur efficacité
soupçonnée de receler un gisement de loss-métal, ou martiale, ni de leur capacité à éviter les dangers.
une expédition dans des Ruines Anciennes encore à Dans des cultures où forces de l’ordre et système ju-
découvrir, piller ou cartographier. diciaire sont des notions très floues et aux institutions
non seulement limitées, mais souvent corrompues, ils
Les Adventores de Loss se définissent entre autres ont pour tâche de régler définitivement certains pro-
par leur Motivation. Chaque personnage-joueur s’en blèmes qui nécessitent des solutions radicales, tout
choisit ou s’en invente une, et celle-ci établit les autant que d’empêcher les rivaux de leurs clients ou
raisons pour lesquelles le personnage s’est retrou- maîtres de faire de même.
vé à courir l’aventure. Il peut être recherché, prépa-
rer une vengeance, vouloir se refaire après une vie
Les coureurs de nuit
malchanceuse ou encore poursuivre un idéal trop
grand pour rester sagement derrière les murs de sa Espions, monte-en-l’air et autres experts du trafic,
cité. La Motivation est le premier moteur des per- les coureurs de nuit ont pour principale activité l’in-
sonnages-joueurs, le carburant qui va lancer leurs trusion, le vol, l’assassinat discret et l’art de ne pas
premières péripéties – et leur rencontre. se faire remarquer. Un peu comme les condottieres,
on les engage pour résoudre efficacement et rapide-
Au cours de leur vie tumultueuse, les aventuriers ment des problèmes que la justice ne réglera pas, ou
nouent de nombreuses relations et constituent des difficilement. Enlever un membre de la famille d’un
réseaux de contacts. Tous les personnages-joueurs rival, faire disparaître des documents compromet-
n’en ont ont pas forcément, ce sont des avantages que tants, dérober un secret industriel ou simplement
l’on peut acheter à la création du personnage. Le ni- des objets précieux, espionner des agissements d’un
veau social, l’appartenance à une guilde marchande, adversaire, les coureurs de nuits sont l’instrument
à une organisation religieuse ou étatique impose des invisible et indispensable de bien des affaires et
contraintes, mais fournit aussi des avantages rela- scandales publics. Mais ce sont aussi des gens qui
tionnels et matériels précieux. Surtout pour ces gens travaillent pour leur propre compte, en indépendant
qui savent pertinemment que leur travail leur attire ou avec les Cours des Ombres. Après tout, voler est
systématiquement des ennuis, parfois bien plus gros une manière efficace de s’enrichir, tant qu’on ne se
que les problèmes traités dans le cadre littéral de fait pas prendre.
leurs missions.
Les explorateurs

LES GRANDS TYPES D’AVENTURIERS Marins, capitaines, savants, voyageurs ou encore


marchands et chasseurs d’artefacts, les explorateurs
Souvent, un groupe d’aventuriers, avec toute sa di- cherchent de nouveaux marchés commerciaux, de
versité, est embauché ou réuni avec une spécialité, nouvelles ressources, de nouvelles richesses, mais
qui va influer sur ses tâches et son efficacité. Voici aussi des secrets oubliés ou jamais découverts sur
de manière un peu schématique les quatre grands le monde de Loss, qui n’est finalement que peu
types de groupes. Il est probable qu’une équipe ras- connu. Les explorateurs ont souvent des mécènes
semble finalement des archétypes de personnages de ou des commanditaires, car pour explorer, il faut
ces quatre types. Mais cette classification permet de un navire lévitant ou une caravane puissante et
savoir quelles aventures les personnages vont vivre, fortement armée, bref, des moyens. Mais il y a de
et dans quel contexte. grandes récompenses à la clé, ainsi qu’une gloire qui

14
Ref. 14778

retombe aussi bien sur les aventuriers que sur celui que membres de l’équipage ou parce qu’un comman-
qui les a engagés. ditaire leur en confie un… À moins qu’ils n’aient les
moyens d’acquérir le leur, de l’entretenir et de payer
un personnel. Un groupe peut aussi être forcé de che-
LES DÉCORS miner à dos de cheval ou d’autres montures terrestres,
malgré le danger de ces expéditions dès qu’elles
Il y a trois grands décors privilégiés dans le monde s’éloignent des zones urbaines. Ces voyages sont riches
de Loss : les cadres urbains des cités-États, les mers de péripéties et de surprises au gré des escales et des
et les côtes lors des voyages maritimes, les fleuves et échanges que l’on peut y faire. Et c’est aussi l’occasion
les plaines parcourus par les navires lévitants, et enfin d’affronter pirates, fauves et autochtones.
les contrées plus sauvages où se risquent les hommes
les plus téméraires. Enfin, il y a les explorations, le domaine le plus in-
trigant des secrets de Loss. Les ruines des Anciens
Le jeu de rôle Les Chants de Loss tend à privilégier sont des sources de trésors et de mystères inimagi-
les aventures urbaines. Les cités-États sont les cœurs nables, mais il faut tout d’abord les trouver, y accé-
des plus profondes intrigues politiques du monde de der, puis avoir la force, l’expérience et le Courage
Loss, et l’homme y est toujours le plus dangereux des de les explorer. Les dangers sont nombreux et
adversaires. Les conflits, les guerres et les vendettas peuvent venir aussi bien de la faune exotique que
s’initient et se concluent dans les villes. C’est de là des rencontres avec des Lossyans hostiles. Et puis
que partent les plus grandes quêtes et les plus loin- toute expédition attise forcément des rivalités… qui
tains voyages ; mais aussi que l’on négocie, achète, peuvent être mineures, ou aussi graves que l’inter-
vend et échange. Si vous affectionnez les antagonistes vention des Ordinatorii de l’Église elle-même venant
humains, c’est là que vous en trouverez. réclamer dans sa toute-puissance ce que les person-
nages-joueurs auraient pu découvrir.
Cependant, les trajets maritimes et terrestres sont très
importants. On considère que tôt ou tard, un groupe
d’aventuriers aura accès à un navire lévitant, en tant

15
Ref. 14778
INTRODUCTION

La vie est un jeu violent et hallucinant ; la vie, c’est se jeter en parachute et prendre des risques, tomber et se
relever, c’est de l’alpinisme, c’est vouloir monter au sommet de soi-même et être insatisfait et angoissé quand on
n’y parvient pas.

Paul Coelho

QU’EST-CE QUE LE JEU DE RÔLE ?

P our comprendre comment vous servir des livrets


du jeu de rôle Les Chants de Loss, autant vous
expliquer ce qu’est le jeu de rôle. Et à vrai dire, s’il
carner le monde, proposer et arbitrer toutes les situa-
tions et intrigues, et interprète tous les personnages
secondaires de l’histoire, du plus humble anonyme
est facile d’en donner une définition claire, celle-ci ne jusqu’aux plus grandes légendes. Il s’appuie sur une
fait que survoler la richesse et la variété de ce qu’en- histoire écrite, le scénario. Celui-ci ressemble moins à
globe cette activité ludique. Alors nous allons tenter celui d’un film ou d’une série qu’à une trame ouverte,
de faire simple et de vous en délivrer un bon aperçu. établissant le fil de l’intrigue, des amorces et mises
en scène de situations, et tous les décors et les per-
sonnages qui y existent. La fin a beau rester plus ou
LA DÉFINITION DU JEU DE RÔLE moins prévisible, l’histoire ne dépendant que des dé-
cisions des joueurs, elle n’est jamais déterminée… et
Ce qui suit est notre définition préférée, considérée peut réserver bien des surprises. C’est même le but !
comme la plus collégiale et établie par la Fédération
Française des Jeux de Rôle, il y a quelques années. Les joueurs et le meneur de jeu s’appuient non seu-
lement sur l’imaginaire d’un univers, mais aussi sur
Le jeu de rôle est un jeu de société coopératif. Un un ensemble de règles et de mécaniques visant à
joueur particulier, le meneur de jeu, met en scène une simuler les aléas de cet univers. Il permet de définir
aventure dans un cadre imaginaire en s’aidant d’un les atouts et les faiblesses des personnages (incarnés
scénario. Les autres joueurs interprètent les person- par les joueurs ou pas) et emploie un système de jets
nages principaux de cette aventure. Le jeu consiste en de dés pour simuler les chances de réussite d’une
un dialogue permanent au moyen duquel les joueurs action entreprise par un personnage.
décrivent les actions de leurs personnages. Le me-
neur de jeu décrit à son tour les effets de ces actions, Le troisième principe du jeu de rôle : on ne le « gagne »
joue les personnages secondaires et arbitre la partie pas. Il n’y a aucun vainqueur particulier, pas plus que
en s’appuyant sur des règles. de perdant défini par la logique et la mécanique du
jeu. Le but d’une partie est de s’amuser tous en-
semble et de vivre une histoire passionnante. Une
COMMENT ÇA FONCTIONNE ? partie de jeu de rôle prend généralement fin au bout
d’une durée décidée à l’avance, ou quand les joueurs
En fait, vous avez tous joué au jeu de rôle quand vous ont atteint les objectifs mettant un terme à l’aven-
étiez petit, pour peu que vous ayez eu des camarades ture (ils ont résolu l’enquête, sauvé la personne en
avec qui « faire comme si ». Qui joue la princesse et détresse, tué le méchant, etc.).
le prince charmant contre un dragon imaginaire, ou
encore qui s’improvise Iron-man et l’autre la Veuve Enfin, le jeu de rôle est un loisir sans fin. On peut
Noire… Ainsi, les deux enfants se mettent à racon- continuer à jouer les mêmes personnages, d’une
ter une histoire fictive donc chacun choisit le dé- aventure à l’autre, qui progressent et évoluent au fil
roulement des intrigues et la réussite des différentes de leurs péripéties, et certaines intrigues peuvent
épreuves. Tous, nous y avons joué. Et tous, nous avons s’étaler sur de très nombreuses parties de jeu, pour
quelques beaux souvenirs d’enfance où nous avons former une grande histoire au long cours similaire
incarné pour un moment nos héros préférés, tout en aux sagas littéraires ou aux séries télévisées.
leur inventant de nouvelles aventures.
Vous trouverez de plus amples explications et plein
Le jeu de rôle, c’est pareil. À la différence qu’un en- de conseils dans le Livre 3, pour les joueurs et le
semble de systèmes et de codes, une mécanique de meneur de jeu au chapitre Conseils aux meneurs de
jeu et un contexte s’y ajoutent pour définir ce qu’il jeu, page 62.
est possible d’imaginer et la manière dont peuvent se
conclure les intrigues et les épreuves de ces aventures.

Dans le jeu de rôle tel que se présente Les Chants de


Loss, un des joueurs, le meneur de jeu, est là pour in-

16
Ref. 14778
PROLOGUE

QU’EST-CE QUE LE DA VINCI-PUNK ?


L e Da Vinci-punk (ou encore Davinci-punk) est un
sous-genre de la fantasy et le thème principal
de ce jeu de rôle. Il met en scène une époque fic-
voir soumis à l’Ordre divin à quelque chose que nous
pourrions identifier comme le siècle des Lumières. On
y sent encore tout le poids du moyen-âge qui dicte la
tive la première révolution industrielle a eu lieu en vie quotidienne et la mise en pratique des arts et tech-
même temps que la première révolution scientifique niques. Peu de gens savent lire, encore moins peuvent
de la période historique européenne qu’on nomme la comprendre un traité d’ingénierie ou avoir les moyens
Renaissance. Les idées des génies de l’époque, cou- d’en appliquer le contenu. Mais partout se dressent les
chées sur le papier, mais jamais mises en pratique et guildes et confréries qui, en commerçant et en échan-
finalement oubliées dans notre Histoire, deviennent geant, diffusent ces savoirs nouveaux et ces inventions
réalité dans une uchronie où elles sont toutes déve- de génie. Même dans la plus petite ville, on assiste
loppées, exploitées et mises en circulation. à cette marche du progrès. On s’ébahit devant ses
merveilles ; on s’effraie devant ses premières horreurs.
Supposez que toutes les merveilles du Codex Atlanticus
de Leonardo Da Vinci soient devenues des réalités Le Da Vinci-punk découvre les mystères de la phy-
employées et appliquées à son époque. Imaginez que sique et la chimie, ses génies insatiables examinent
cela soit arrivé pour d’autres grands génies univer- la vie sans encore en comprendre la nature. Ils tâ-
salistes de cette période si intellectuellement fruc- tonnent en balbutiant, mettant en pratique des in-
tueuse. Supposez enfin que les concepts de l’électrici- ventions toujours plus folles, souvent au mépris des
té et de la vapeur, de l’industrie et de la chimie aient risques, toujours outrepassant les limites rigides que
su commencer à s’imposer et qu’enfin, un dernier la religion veut imposer à une soif de connaissance
coup de pouce (comme le loss-métal, la substance qui défie sa morale et ses lois. C’est un âge d’explo-
fictive des Chants de Loss) fournisse les moyens de rateurs, de marchands, de philosophes modernistes,
créer et d’alimenter en énergie ces merveilles. de savants-ingénieurs et artistes, expérimentateurs
aussi bien qu’architectes, hommes à la fois de terrain
Le Da Vinci-punk, c’est de la super-technologie faite et de lettres. On ne distingue pas l’art de la science,
de bois et d’engrenages, de tôles de cuivre et de toiles la pensée vise à appréhender la nature et son sens en
grossières. Ici, point d’interface homme-machines, ni une unité qui rassemblerait l’esthétique, la recherche
de super-moteurs à vapeur ou de grands dirigeables divine et la réflexion cartésienne en un seul tout.
dans un siècle de charbon et d’industrie galopante.
Mais des automates mystérieux tirant leur énergie Voici ce qu’est le Da Vinci-punk, un âge de la
des dynamos à loss-métal, des navires à voiles lévi- Renaissance, des explorations et des grandes dé-
tant dans les cieux, au-dessus de chars à roues de couvertes, dans une fantasy débridée qui occulte
bois, munis de canons à impulsion magnétique. Pas volontairement les limites physiques des sciences et
de télégraphes ou de machines de Babbage, mais des techniques de ce temps, pour n’en garder que les
hauts-fourneaux crachant de l’acier et du titane, et prodiges de sa magie.
de grands ateliers à la fois familiaux et industriels
tirant leur force des éléments. Pas de radios ou de
train, mais le vent, l’eau et le soleil qui font tourner
des machines électromécaniques
et briller des lampes à arc, vi-
brer des armes électriques et
naître des matériaux pouvant
arrêter les balles ; des impri-
meries, des livres et des jour-
naux, distribués devant de
grandes universités où sont
formés des légistes, des né-
gociants, des savants et des
ingénieurs qui conçoivent
l’art, les sciences, les tech-
niques et la philosophie
comme un tout, et qui ont
hâte de découvrir le monde
et faire reculer les frontières
de la connaissance !

L’époque du Da Vinci-punk
symbolise le passage d’un sa-

17
Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

CHAPITRE 1

LE MONDE DE LOSS
L oss est un monde lointain, étrange, hostile
à l’homme, qui a cependant su s’y adap-
ter et fonder deux civilisations consécutives,
LE MONDE AUX DEUX SOLEILS
LES LOSSYANS
20
24
la première ayant subi les ravages du Long-
Hiver. Nous allons ici étudier le monde de L’ORGANISATION SOCIALE 27
Loss du point de vue naturaliste et sociolo- SCIENCE ET TECHNOLOGIE 28
gique, et vous permettre d’explorer aussi bien
sa nature sauvage et exotique que l’ensemble LES PARIAS 30
des philosophies, coutumes, traditions et ré-
cits historiques des Lossyans. LE LOSS-MÉTAL 31
Et nous aborderons les Vertus. La centrali- LES MAMMALIENS 34
té de celles-ci est le vrai point commun des
Lossyans. Elles sont, selon les cultures, au LES SYMBIOTES 38
nombre de trois ou quatre : l’Honneur, le
Courage, la Sagesse et la moins reconnue, la
L’HISTOIRE DE LOSS 43
Foi. Chacune est liée à un élément, à savoir la LES VERTUS 54
Terre, le Feu, l’Eau et l’Air. Elles sont l’essence
du monde et de ce qui façonne la nature. Ces LA VIE QUOTIDIENNE DES LOSSYANS 59
Vertus définissent ce que les Lossyans ap-
pellent l’humanité et constituent leurs codes L’ÉDUCATION ET LE TRAVAIL 67
et idéaux moraux. On ne peut y déroger sans
conséquence. Ne pas les respecter ou ne pas LES LOISIRS ET LES JEUX 68
les comprendre fait d’un individu un barbare, LA JUSTICE ET LES LOIS 70
privé des droits accordés à tout être humain.
Dans le monde de Loss, les Vertus sont plus
CODES SOCIAUX ET VIE QUOTIDIENNE 71
fortes que tout, lois et religion incluses. NOURRITURE, BOISSONS ET ÉTOFFES 74
L’ESCLAVAGISME ET LE HAUT-ART 77
Ref. 14778

Illustration

Paysage de plaine en arrière


plan un bateau lévitant et avec
Ortentia et la voie lactée

Emile Denis
Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

La nuit n’existait pas sur Loss, qu’on soit dans ses plaines, ses forêts ou ses déserts. Du moins pas selon le
sens que les terriens donnaient à ce mot. Où que l’on soit, on ne pouvait ignorer Ortentia et sa lumière bleutée, sa
surface de volutes vaporeuses couvrant le ciel sur une étendue si vaste qu’une main tendue devant soit ne pouvait
la cacher. Lisa se souvint de la lune terrienne, si petite qu’elle pouvait dissimuler derrière l’extrémité d’un doigt
tendu. Ortentia, qu’elle avait très vite identifiée comme une géante gazeuse autour de laquelle, elle le supposait,
Loss orbitait, interdisait l’obscurité en éclairant le monde d’un bleu céruléen et fantomatique.
Même sans elle, la nuit lossyanne aurait toujours été claire, cependant. Une immense galaxie, dense de millions
d’étoiles, incroyablement plus vaste et brillante que la Voie lactée vue de la Terre, barrait le ciel lossyan. À elle seule,
elle illuminait sans doute presque autant qu’une belle pleine lune. Mais ce que ne savait pas Lisa et qui se révélait
à ses yeux grands ouverts, tandis qu’Eïm, pour qui le spectacle était coutumier, ronflait déjà comme un sonneur,
c’était que toute la vie végétale de Loss s’éclairait une fois la nuit tombée. De partout, bourgeons, fleurs et mousses
luisaient d’une douce bioluminescence, allant du bleu à l’orangé, en passant par des jaunes dorés. C’était comme sa
découverte de la serre des symbiotes de Duncan ; mais à l’échelle de la forêt entière, jetant dans ses cheveux roux
des reflets chamarrés. Une pure magie, qui l’émerveillait, et la maintint longuement éveillée, malgré son épuisement.

Les Chants de Loss, les forêts d’Arcis.

LE MONDE AUX DEUX SOLEILS

L oss est loin de la Terre. Très loin. Nul besoin


ici de parler de distance ou d’années-lumière ;
sachez seulement qu’il est impossible, depuis Loss,
On peut imaginer les effets compliqués que la
proximité d’une géante gazeuse ferait subir à une
planète abritant la vie. Les scientifiques doutent
d’apercevoir la moindre lueur de notre Soleil. La pré- qu’une vie développée puisse s’épanouir si près
sence des Lossyans n’en est que plus inexplicable, d’un astre aux effets gravitationnels, radiatifs et
tout comme les arrivées régulières de Terriens ve- électromagnétiques si puissants. Pour Loss, ap-
nant s’échouer sur la planète (voir plus loin). Les paremment, cela n’a pas été le cas. Par contre, la
Lossyans ont développé de vastes connaissances as- présence d’Ortentia est à la source de nombreux
tronomiques et sont familiers le rythme des mouve- problèmes magnétiques, et dont nous parlons
ments des astres, ils tiennent le compte des éclipses plus bas.
et des pluies d’étoiles filantes. Mais peu savent que
le monde est une boule de matière tournant autour
de deux soleils. Encore moins qu’Ortentia, l’énorme Loss est un monde assez similaire à la Terre, un peu
lune de Loss, est en fait la géante gazeuse autour de plus petit que notre planète, avec une densité et une
laquelle orbite Loss. Et l’Église regarde d’un mauvais gravité plus faible d’un peu plus d’un dixième. La
œil les recherches les plus avancées en astronomie, surface océanique y est d’un peu moins de 70 %. Les
car les cieux et les Étoiles sont le domaine exclusif terres émergées forment une Pangée barrée de rifts
des esprits, des dieux et du Concile Divin. Écrire sur et de reliefs volcaniques, dont la partie nord s’étend
ce domaine ne doit se faire que sous sa supervision. autour d’une mer intérieure, nommée les Mers de la
Séparation. Le sud de la Pangée est bien plus vaste,
et occupé en grande partie par un désert qui sépare
PLANÉTOLOGIE les Mers de la Séparation du reste du superconti-
nent. La Pangée est elle-même entourée d’archipels
Le ciel de Loss, de jour comme de nuit, enchante de failles tectoniques. Les deux pôles sont dénués
celui qui le découvre pour la première fois. La bru- de terres émergées.
meuse Ortentia, d’un bleu féerique, occupe un pan
entier du ciel nocturne, barré d’une galaxie lumi- Il fait chaud sur Loss. La température moyenne est
neuse traçant un chemin d’étoiles en un immense arc, de l’ordre de 17,5 °C contre 15 °C sur Terre. Sa pres-
d’un bout à l’autre de la voûte céleste. Et durant la sion atmosphérique est elle aussi légèrement plus
journée, Ortentia se devine toujours un peu, tandis élevée, environ 106,8 hPa (elle est de 101,3 sur Terre).
qu’elle parcourt le ciel pendant six jours avant de s’en Enfin, son atmosphère contient une part plus éle-
effacer pour six autres : c’est la durée de la semaine vée de Co2, dépassant les 500 PPM. C’est une au-
lossyanne, calculée au rythme de cette lune gargan- baine pour toutes les plantes et la grande majorité
tuesque. Deux astres, un soleil jaune et lumineux et du continent est couverte de forêts profondes et de
une petite étoile blanc-bleuté toujours visible même jungles. Celles-ci sont çà et là percées de plaines
au midi, réchauffent alors la planète. Une fois par et de prairies, soit dans des cuvettes entourées de
an, Ortentia plonge Loss dans une éclipse totale qui reliefs bloquant les précipitations, soit en lieu et
dure trois jours et demi. Quand la lumière revient, la place d’anciens couverts végétaux broutés jusqu’au
nouvelle année lossyanne commence. déboisement par d’énormes herbivores. Les déserts

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Ref. 14778
LE MONDE

se concentrent autour de la partie sud du centre du par des pluies de petites météorites. Mais rien de tout
bloc continental, sous les Mers de la Séparation, et cela n’a jamais suffi à exterminer la vie qui y prospère.
sur sa partie orientale ouverte sur l’océan infini. À La planète abrite un biotope qui, non content d’être
ces déserts s’ajoutent les rifts, situés en dessous du surdimensionné même si les plus grandes espèces ont
niveau marin. La chaleur écrasante et le volcanisme disparu, se révèle formidablement résistant. S’adapter
intense en font de véritables enfers où presque aucun à un tel milieu a été un exploit pour les Lossyans,
être vivant ne subsiste. Et mieux vaut ne pas croiser constamment renouvelé encore aujourd’hui.
les quelques exceptions.
Les plantes de Loss vont de la plus petite mousse
inoffensive d’apparence à des forêts d’arbres dont la
Loss et les boussoles
voûte frôle les cent mètres de haut. Et un arbre qui
Loss est une planète très active, avec un volcanisme culmine à vingt-cinq ou trente mètres est davantage la
et une sismologie qui s’en donne à cœur joie. Elle est norme que l’exception. Qui plus est, un grand nombre
aussi en partie enfermée dans le champ magnétique de plantes différentes ont développé des systèmes de
d’Ortentia, ce qui la protège de bien des soucis cos- défense et de protection originaux et redoutables.
miques, mais perturbe tout ce qui affère au magné- Des plantes à toxine, venin, épines, poils urticants,
tisme : engins électroniques, électriques, y compris fragrances aux effets psychotropes ou étourdissants,
les boussoles. photophores et bioluminescence se sont répandues
et la plupart peuvent facilement tuer un Lossyan im-
Il y a 13 pôles magnétiques sur l’hémisphère nord prudent. Et il existe même quelques plantes carni-
de Loss, et tous sont mouvants. Une boussole vores parfaitement capables de capturer, neutraliser,
classique n’y est d’aucune utilité. Pour se diriger, et digérer un animal de la taille d’un gros chien… ou
les Lossyans se fient aux soleils et aux étoiles, à d’un enfant. Se perdre dans une forêt, pour un citadin
l’aide de compas solaires ou encore de solilithes, des lossyan qui ne la connaît pas, est une condamnation
prismes d’origine dragensmann permettant de voir la à mort à très brève échéance. Même les meilleurs
position du soleil même par temps couvert. Il existe hommes des bois ne tiennent pas très longtemps dans
des boussoles magnétiques complexes permettant un milieu sauvage qui leur est étranger et l’adaptation
de déterminer efficacement des positions, mais les à la vie forestière de certains peuples est une lutte
marins expérimentés préfèrent largement user de constante, autant qu’une affaire de symbiose avec
sextants et de compas. leur redoutable milieu. Pour résumer, prenez le côté
mortel de l’Amazonie, rajoutez-y la faune de l’Aus-
Le nombre de champs magnétiques et l’intensité de tralie, agrandissez-les exagérément, et dites-vous que
leurs variations a des effets sur tout appareil sensible : la plupart des forêts de Loss sont au moins aussi
sur Loss, rien de ce qui n’est pas blindé contre des dangereuses que ça.
impulsions électromagnétiques ne fonctionne long-
temps. Si ce n’est pas encore un problème pour la Cette profusion de spécialisations a cependant un
technologie lossyanne, en revanche, rien de ce qui avantage : la flore et la faune de Loss fournissent une
vient de la Terre dans ce domaine ne met plus de pharmacopée riche aux effets surprenants, que les
quelques heures à griller définitivement. Même les Lossyans ont appris à exploiter. Ils ont coutume de
appareils électriques peuvent avoir des comporte- dire qu’il existe une plante pour tout, et le fait est que
ments dangereux. Mais cela signifie aussi des aurores la biochimie lossyanne accomplit des merveilles dont
boréales fréquentes qu’on peut admirer même très certaines étonnent les Terriens Perdus, pourtant ac-
loin au sud. coutumés à la puissante pharmacopée du XXIe siècle.

La faune de Loss
LE BIOTOPE DE LOSS Celle-ci est dominée par ce que les Lossyans ap-
La faune et la flore de Loss ont deux traits communs : pellent des mammaliens. La taille moyenne du mam-
grand et hostile. Loss n’a jamais encaissé d’astéroïde malien de référence est supérieure à celle d’un ours
géant exterminateur de dinosaures. Mais il y a eu (à comparer avec la taille moyenne d’un mammifère
plusieurs épisodes d’extinction récents, y compris sur Terre qui est plus petit qu’un chien). Pour parler
les conséquences ravageuses du Long-Hiver, qui en termes de chiffres, le poids médian d’un mam-
frappa une partie de l’hémisphère nord. La variété malien dépasse la tonne, contre environ 40 kg pour
des espèces vivantes sur Loss s’en est trouvée dra- les mammifères de la Terre. Un mammalien her-
matiquement réduite. Le désastre a surtout emporté bivore de trois ou quatre tonnes est courant. Les plus
les espèces les plus grandes et les plus spécialisées, grands, les longilas, dépassent les vingt tonnes – et
même si les Lossyans au fait de ce détail restent très les prédateurs sont à la même échelle, comme le tar-
peu nombreux. bosarre et ses sept tonnes. Les mammaliens sont l’es-
pèce terrestre dominante sur Loss. Ils pondent des
Loss est très volcanique, souvent secouée par des œufs, mais allaitent leurs petits, qu’ils engendrent
séismes et des tsunamis, et régulièrement bombardée en nombre assez réduit. Leur sang est chaud, et

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CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

comme les mammifères terriens, ils ont conquis tous mension raisonnable. On peut cependant rencontrer
les milieux, y compris aquatiques et aériens. Les des moustiques presque aussi longs qu’un petit doigt,
mammaliens ont relativement peu de fourrure, et et quelques rares espèces d’insectes plus gros que des
favorisent le duvet dans les régions froides. Leurs lapins. Quant aux toshs, les rats de Loss, ils pèsent
ornements et robes sont des colorations de leur épi- facilement plus de trois kilos.
derme. La présence d’armures cutanées, osseuses et
externes, est très courante. Enfin, un certain nombre On trouve enfin beaucoup d’animaux domestiques
d’entre eux disposent de venins qu’ils peuvent par- d’origine terrienne : les chats (rares, car les toshs les
fois cracher, mais aussi d’armes de défense comme mangent), les chiens, les chevaux, les lapins, les ca-
des souffles bouillants ou des armes bioélectriques. nards, et les chameaux, par exemple. Les Lossyans
Beaucoup sont bioluminescents. Et tous sont dange- pensent que ces animaux les ont suivis quand ils sont
reux. Il existe quelques espèces apprivoisées, mais arrivés sur ce monde depuis la Terre.
les mammaliens sont par leur taille, leur ruse, leur
adaptation et leurs armes des créatures difficiles à Nous aborderons aussi plus loin une autre espèce
domestiquer, exterminer, ou même contrôler. À no- particulière à Loss, les symbiotes. Ils vivent en sym-
ter qu’il n’existe a priori aucun mammalien ayant biose avec pratiquement tout le biotope de Loss —
développé de système culturel avancé. Lossyans compris. Selon les savants, la vie ne serait
pas la même sur ce monde sans les symbiotes.
Il existe encore bien d’autres animaux surprenants
sur Loss. On y trouve oiseaux, reptiles, serpents, Pour plus d’informations, voir les chapitres Les
insectes, poissons, mollusques et crustacés ; mais la Mammaliens, page 34 et Les Symbiotes, page 38.
plupart, même dangereux, restent gérables et de di-

LE MONDE DES LOSSYANS


LA GÉOGRAPHIE DE LOSS les routes terrestres. Mais ce n’est pas systématique
et les navires lévitants permettent aux communau-
Les civilisations lossyannes se trouvent toutes dans tés implantées loin des côtes de profiter d’échanges
l’hémisphère nord, autour des Mers de la Séparation. réguliers.
À l’ouest, une immense chaîne de montagnes s’étend
du Grand Rift jusqu’aux limites septentrionales du Plus d’informations au chapitre Les Régions et capi-
continent, formant une barrière naturelle surmontée tales, page 112.
d’un mur de roche lisse s’élevant encore de plus de
cent mètres, barrant tout accès, et qu’on dit surveillé
par un monstre légendaire. À l’est et au sud, derrière
un réseau serré d’archipels, les Mers de la Séparation
LES EMPIRES ET LES CITÉS-ÉTATS
s’ouvrent sur l’Océan Infini, qui est à peine carto- La plus grande cité de Loss est la capitale de l’Hégé-
graphié. Le nord de Loss débouche sur les froides monie, Anqimenès, la sacrée. C’est le cœur du pou-
mers arctiques, et la calotte glaciaire du Pôle Nord. voir des Ordinatorii, les serviteurs religieux et mili-
L’hémisphère sud, barré par un désert mortel, est taires de l’Église du Concile Divin. Celui-ci règne en
encore inexploré et considéré comme inhabité. Quant conquérant sur un empire s’étendant des frontières
au Rift, c’est un territoire désolé, interdit d’accès par nord des Plaines de l’Étéocle, à l’extrême Ouest des
le Concile, et repaire des mystérieux Jemmaïs. Marches de Gennema, face à l’empire oriental de
l’Hemlaris. À son extrême opposé au sud, à peine
À deux exceptions près, il n’y a pas de véritables moins peuplé, se trouve Armanth, la cité de la Guilde
États-nations sur Loss. Les différentes civilisations des Marchands. Forte de plus d’un million d’âmes,
lossyannes sont concentrées autour de cités-États cette cité-État contrôle cependant de vastes territoires
ayant chacune ces propres lois. La pression de la et toutes les cités voisines. Elle est considérée à rai-
faune lossyanne décourage l’expansion et la fonda- son comme la capitale de tout l’Athémaïs, jusqu’aux
tion de nouvelles villes. Ainsi, la plupart des Lossyans contreforts désertiques des Franges.
vivent dans des cités fortifiées, ou des bourgs et ha-
meaux proches de celles-ci. Les villages et commu- L’Hemlaris est le second empire des Mers de la
nautés isolées sont rares. Mais il en existe cependant, Séparation, l’Empire du Trône de Rubis. Bien que
tout comme il existe des tribus nomades et forestières suivant originellement la même foi qu’Anqime-
qui parviennent à s’entendre avec la nature hostile de nès, des variations dans le culte et les dogmes ont
Loss. Les Lossyans vivent de préférence sur les côtes, valu à l’Hemlaris et sa capitale, Cymiad, l’adjectif
autour des Mers de la Séparation, afin de pouvoir d’hérétiques — ainsi qu’une croisade qui dura des
voyager par voie maritime, nettement plus sûre que siècles. Elle s’est achevée à peine quelques décennies

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LE MONDE

avant notre époque, par une guerre qui a embrasé taurer sa grandeur fragilisée par des conflits internes,
pratiquement toutes les cités-États des Mers de la Armanth et Anqimenès se livrent une guerre d’in-
Séparation et a forcé l’Hégémonie à renoncer à ses fluence au travers des cités-États des Mers de la
ambitions de conquête… Au moins le temps pour Séparation. Armanth et la Guilde des Marchands
elle de former de nouvelles générations d’ordinatorii cherchent de nouveaux marchés et répandent des
fanatiques et dévoués. idées novatrices, hérétiques et libertaires. Anqimenès,
quant à elle, manie une diplomatie agressive avec
Entre Armanth, Anqimenès et Cymiad s’étendent les l’ambition de devenir le centre du monde matériel —
Mers de la Séparation. Elles sont elles-mêmes ponc- car le monde spirituel lui appartient déjà. Elle est le
tuées d’îles et de presqu’îles peuplées et prospères, cœur de l’Église du Concile, une religion expansion-
de Terancha, aux Cités-Unies sans compter les im- niste et dogmatique qui règne sur tout Loss depuis
menses Plaines de l’Étéocle. Des peuplades barbares un millénaire. Armanth et Anqimenès ne sont entrées
y vivent, principalement des Jemmaïs, des Forestiers en guerre qu’une fois, 25 ans auparavant.
et des Dragensmanns. Alors que Cymiad tente de res-

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CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

Plus d’informations aux chapitres Les Peuples de Loss, que de parvenir à en trouver, quitte à affronter les
page 88 et L’Église du Concile Divin, page 138. tréfonds les plus terrifiants de Loss.

Très rares sont les Lossyans qui connaissent leur


LES MYSTÈRES DU PASSÉ Histoire au-delà des mille dernières années. Seuls
quelques-uns laissent leur mémoire remonter au-delà
La civilisation des Lossyans n’est pas la première à de la fondation de l’Église du Concile par ses pre-
arpenter Loss. D’autres êtres étranges ont vécu sur miers et redoutables prophètes. Tout ce qui précède
cette planète, y ont fondé des civilisations et des cités Le Long-Hiver, date 0 du calendrier lossyan, est de
dont il ne reste que de rares vestiges ensevelis — l’ordre du mythe. Et presque toutes les traces écrites
comme si quelqu’un avait frénétiquement essayé d’en ont été perdues – ou systématiquement détruites par
gommer toute trace. Y reposent des artefacts techno- les ordinatorii. L’immense majorité des Lossyans évite
logiques incroyables, parfois dangereux et considérés superstitieusement d’en apprendre quoi que ce soit.
magiques par les Lossyans. Ils sont rares, proscrits
par l’Église, mais avidement recherchés par les moins Plus d’informations au chapitre L’Histoire de Loss,
superstitieux. Et bien des expéditions n’ont pour but page 43 et dans le chapitre du livre 3 Les Secrets
du monde, page 32.

LES LOSSYANS
ASPECTS PHYSIQUES revient largement à égalité avec un Lossyan, et pour-
ra lui tenir tête, le dixième de différence de gravité
Comparés aux Terriens, les Lossyans frappent par jouant en sa faveur.
leur taille. Sur Terre, un homme d’un mètre quatre-
vingt-dix est très grand. Pour un Lossyan, c’est la
moyenne. Un grand Lossyan peut atteindre 2,20 m
et des géants comme Abba ou Eïm dans le roman
LES ETHNIES ET LES APPARENCES
font 2,30 m. Pour les femmes, 1,75 m est une moyenne, Les Lossyans sont aussi variés que les humains sur
1,80 m est courant. La légère différence de gravité Terre. Seul détail remarquable, il n’y a apparemment
joue sur la différence de taille. Les Lossyans sont aucune ethnie originaire du continent américain qui
aussi mieux bâtis, plus athlétiques et d’allure plus ait été implanté sur Loss. On trouve des Asiatiques,
puissante que les Terriens. des Africains, des Sémites, des Indo-européens,
des Slaves, des Méditerranéens — surtout d’origine
La stature impressionnante des hommes et femmes grecque — des Scandinaves et encore d’autres ethnies
de Loss a deux causes. En premier lieu, c’est un bé- plus anciennes ou locales d’origine terrienne. Après les
néfice du régime alimentaire indigène. Mais ces effets brassages et métissages nombreux, voir des hommes
de la nourriture lossyanne ne sont apparus qu’au fil de grande carrure, blonds, ou châtain clair, la peau
des générations. Les enfants d’un Terrien seront plus mate, voir café au lait avec des yeux bleus est courant.
petits que ceux d’un Lossyan et ils ne rattraperont
totalement la carrure lossyanne qu’en deux ou trois Les Lossyans aux cheveux roux sont très peu fré-
générations. En second lieu, la différence de pression quents. Ceux-ci ayant été purgés après le Long-Hiver,
atmosphérique entre la Terre et Loss, plus élevée sur puis pourchassés et asservis jusqu’à aujourd’hui, ce
celle-ci, a joué en faveur d’une augmentation légère de trait est devenu rare. Naître roux, surtout pour une
la capacité pulmonaire et des muscles de la cage tho- fillette, est une malédiction ; si elle n’a pas été aban-
racique, ainsi que d’une silhouette large en pyramide donnée, voire tuée enfant, une personne rousse sera
inversée. Les Terriens perdus ont du mal à respirer asservie vers sa 13e année et risque de finir comme
pendant quelque temps, mais s’habituent assez vite. offrande à l’Église du Concile. Il y a aussi peu d’al-
binos et de gens aux yeux vairons. Les superstitions
En termes de leur force, un Lossyan paraît fran- des Lossyans ne leur prêtent pas de beau rôle et l’on
chement plus puissant qu’un Terrien. Mais ce n’est a même tendance par endroit à les éliminer ou les
souvent qu’une apparence. Comme la grande majo- bannir dès que ces traits apparaissent.
rité des terriens importés sur Loss sont des femmes
citadines, elles ne font pas tellement le poids face À noter que quelques Lossyans vivent très vieux. Si
à des Lossyans qui sont dans leur grande majorité l’espérance de vie moyenne tourne aux alentours de
travailleurs physiques et bâtis comme des armoires 38 ans — il y a encore une assez forte mortalité in-
normandes. Par contre, un terrien musclé, physique- fantile — et qu’on appelle « ancien » un homme qui a
ment aguerri ou bon pratiquant de sports de combat passé la cinquantaine, il existe des Lossyans âgés de

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Ref. 14778
LES LOSSYANS

deux siècles sur qui le temps ne semble avoir aucune LES QUALITÉS ET TRAVERS
prise grâce aux symbiotes appelés « Ambroses ».
La fierté
Les Lossyans sont tous des gens fiers — d’eux, de
LES VERTUS leur famille, de leurs ancêtres, de leurs œuvres. Ils
laissent l’humilité aux ascètes religieux ou à leurs
Les Vertus sont un élément si universel qu’on le re- esclaves. Ils aiment aussi se vanter et enjoliver leurs
trouve dans toutes les cultures de Loss, même celles qui exploits. La gloire et le renom pèsent lourd, car la
ne suivent en rien la foi de l’Église. Il en existe trois re- renommée d’un individu rejaillit sur sa famille et sur
connues, plus une quatrième ignorée de l’Église et des les siens ; un Lossyan peut très bien perdre toute pru-
cultures conciliennes. Les voici, avec leur symbolisme : dence s’il entrevoit une bonne occasion d’accomplir
un exploit glorieux, digne d’écrire sa Légende. Leur
L’Honneur, qui est la Terre, est lié aux capacités so- fierté est ce qui les rend courageux et aventureux.
ciales. Il a pour couleur le vert.
Cette fierté se révèle souvent susceptible et chatouil-
Le Courage, qui est le Feu, est lié au corps. Il a pour leuse, et il n’est pas toujours judicieux d’insulter sans
couleur le rouge. être sûr de soi. Les crimes d’honneur et les vendettas
ne sont pas rares. Dans un univers rude et dangereux,
La Sagesse, qui est l’Eau, est liée à l’esprit. Elle a pour la survie passe par la solidarité familiale. Un Lossyan
couleur le bleu. sans famille, sans proches et sans clan est un être
seul, perdu, vulnérable, dont on se méfie.
La Foi, qui est l’air, est liée aux pouvoirs du Loss. Elle
a pour couleur le blanc. La superstition
Les Lossyans sont superstitieux. En plus de leur
La Foi est une vertu que ne reconnaît pas l’Église crainte respectueuse et méfiante des membres redou-
du Concile Divin. Presque tout le monde l’a oubliée, tés de l’Église du Concile, les Lossyans craignent leurs
à force de l’effacer des textes et de voir ses promo- nombreux dieux, les esprits, les spectres, les mauvais
teurs, principalement les chamans, pourchassés et présages et les signes célestes. Quand un lieu est mau-
exterminés. dit ou porte malheur, le quidam moyen prend cela au
sérieux. L’athéisme et la mécréance sont impensables,
et l’apostasie est presque partout un crime. Les devins
L’honneur, ferment social
et les intercesseurs spirituels sont consultés par tout
De manière générale, l’Honneur d’un Lossyan est homme qui veut se lancer dans de grands projets.
le ciment de la cohésion familiale et de ses rela-
tions sociales. C’est une grande partie de ce qui L’hospitalité
forge sa renommée et donc le respect de ses pairs. L’hospitalité est sacrée : on ne laisse pas sa porte fer-
Un Lossyan sans Honneur n’a plus de parole, ses mée à un voyageur égaré qui cherche un toit pour
promesses, serments, et engagements ne valent plus la nuit. Et ce même voyageur honorera ses hôtes de
rien. Un Lossyan sans honneur peut être escroqué, son mieux, par des services, du troc, par les louanges
dépouillé et trompé sans scrupules. Et il ne lui res- qu’il fera ailleurs de leur hospitalité, etc. Fournir des
tera rien, à part ses armes et ses bras, pour tenter vivres à un homme dans le besoin est normal et le
de le défendre et le reconquérir. Ce qui n’est pas voyageur sait qu’il trouvera toujours un endroit où
aisé, les Lossyans étant loin d’être tous de bons dormir au chaud et avaler un peu de soupe.
combattants.
La curiosité
L’Honneur remplace un peu le contrat dans un Les Lossyans sont en général curieux. La défiance
monde où la plupart des gens ne savent pas lire, envers la nouveauté ne prévaut que si celle-ci a des
et où les institutions légales n’ont souvent ni les apparences de magie ou si elle peut éveiller la mé-
moyens ni la mission de faire respecter les accords fiance de l’Église. Les Lossyans respectent les érudits,
écrits. C’est aussi une valeur morale ; l’Honneur sera les savants, les ingénieurs, même s’ils peuvent aussi
donc valorisé ou dévoyé par le comportement public s’en méfier. Les Lossyans, notoirement courageux et
des individus, hommes ou femmes, pour au bout aventureux, peuvent prendre des risques pour assou-
du compte se défendre lors de duels. Les Lossyans vir leur curiosité. Cette intrépidité reste cependant
évitent cependant le plus possible les duels à mort, limitée, chacun se devant à sa famille et aux siens.
car une coutume respectée par presque tout le Les Lossyans sont donc malgré tout peu nombreux
monde — au risque d’y perdre son honneur — dicte à partir à l’aventure.
qu’un homme qui en tue un autre en duel devient
responsable de la famille du défunt. Le respect de la vie
Les Lossyans ne tuent pas inutilement, et massacrent
Vous retrouverez plus d’informations au chapitre Les peu. Quand ils capturent un ennemi, ils préfèrent
Vertus, page 54. souvent soit le retenir comme otage contre rançon,

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Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

soit l’asservir. Ils ne se montreront cruels que si la Cependant, plus on va vers le sud, à Armanth et dans
nécessité l’exige — de même avec leurs esclaves, à l’Athémaïs en général, et plus la protection juridique
moins que les lois ou les traditions l’exigent. Même des femmes dans le cercle familial devient égalitaire.
si un maître a tous les droits sur son esclave, qui est On leur accorde le divorce, le droit d’héritage et de
sa propriété, en tuer ou en mutiler est très mal vu. propriété, le droit de porter plainte en cas d’abus et
Et comme renommée et honneur dominent les rela- de violences conjugales. Dans le sud des Mers de la
tions sociales, cette réprobation n’est pas anodine. Séparation, un homme qui bat, asservit sa femme ou
Cependant, les Lossyans n’hésitent jamais long- vend une de ses filles risque fort bien d’y perdre sa
temps à donner la mort au besoin, et y rechignent renommée et son honneur.
bien moins que les humains du XXIe siècle. Après
tous, la mort et la violence font partie intégrante Vous retrouverez plus d’informations au chapitre La
de leur environnement. vie quotidienne des Lossyans, page 59.

Le sexisme L’esclavage
Les Lossyans se montrent souvent virils, notoirement Les Lossyans n’ont aucun souci avec l’esclavagisme.
machistes et, selon les cultures, clairement sexistes. Il est pour eux logique et sacré : on le nomme le
La société patriarcale, légitimée par les Dogmes Haut-Art. Il est considéré comme utile, nécessaire,
implacables de l’Église, domine les sociétés conci- et l’immense majorité des Lossyans ne comprendrait
liennes, comme dans l’Hégémonie, les Plaines de pas qu’on le juge inacceptable. Plus qu’un état de fait,
l’Étéocle, les Cités-Unies et chez l’empire oriental de pour les Lossyans, l’esclavagisme est un art, pratiqué
l’Hemlaris. Les femmes sont sous la responsabilité par une profession respectée.
et le joug des hommes de la famille, qui ont tout
pouvoir sur elles. Une femme indépendante, libérée La chose qui a le plus de valeur avec le loss-métal,
de l’autorité masculine, est rare. Mais certaines sont selon les Lossyans, ce sont les femmes. La grande
officières militaires, capitaines de navire, dirigeantes majorité d’entre elles ont appris la prudence et la
de guildes, professeurs, entrepreneuses et chef de crainte dès qu’il y a un risque d’être soumise à ce
famille. Et les Lossyans respectent — même s’ils sort redouté, car toute femme ayant commis un crime
s’en méfient — celles que l’on nomme les « femmes ou capturée par un ennemi risque à coup sûr d’être
d’épées ». Indépendantes et fortes, souvent combat- condamnée à l’asservissement.
tantes mais pas nécessairement, elles ont décidé de
défendre leur honneur à la manière des hommes, et À noter que le Haut-Art a été créé à l’origine
sont prêtes à se battre en duel. pour asservir et contrôler les Chanteuses de Loss.
Ref. 14778
L’ORGANISATION SOCIALE

Désormais, on asservit ou on tue toute personne Vous retrouverez plus d’informations au chapitre
dont les cheveux ont le malheur d’être roux. Les L’Esclavagisme et le Haut-Art, page 77.
Dogmes de l’Église tendent aussi à prêcher l’asser-
vissement des Terriens perdus.

L’ORGANISATION SOCIALE

I l y a cinq classes sociales dans les cités-États


lossyannes : l’aristocratie, le clergé de l’Église
du Concile, les guildes marchandes et les confré-
central d’Anqimenès. Chaque ville abrite au moins
un temple et ses Ordinatorii, qui parfois forment
des légions à part entière. Se plaçant au-dessus de
ries, le peuple et les esclaves. Ce modèle est le plus tous les cultes locaux qu’elle refrène et limite for-
courant. Il est propre aux cultures conciliennes, et tement (les cultes publics sont en général interdits
par exemple, sera inexistant chez les Erebs ou les ou mal vus), l’Église fait respecter les Dogmes du
Dragensmanns qui ont une société organisée hors de Concile, chasse les hérésies, traque les Chanteurs
l’influence de l’Église. de Loss, s’assure que les offrandes que chaque cité
doit verser au Concile sont honorées. Les prêtres et
les Ordinatorii forment une élite à part. Bien que
L’ARISTOCRATIE ET LA DÉMOCRATIE certains soient très proches du peuple, on a tendance
à les craindre.
Chaque cité comporte une aristocratie qui s’appa-
rente à une noblesse d’épée. Les forces militaires des L’Église a souvent des écoles, toujours des orphe-
cités-États sont des troupes et légions financées par linats et parfois des hospices. Malgré le poids des
la noblesse, qui est souvent responsable de les diri- Dogmes du Concile, il est donc ardu de prétendre
ger. Plus une ville a de légions, plus l’aristocratie est que son pouvoir ne se base que sur la peur et la ty-
influente. Elle est reconnue comme le bras armé de rannie. Dans certains endroits, elle représente même
la cité, et se considère comme responsables de sa la civilisation, la culture et le progrès. Mais plus on
défense. Ses membres jugent normal de profiter de va vers le sud, plus la Guilde des Marchands a de
leurs privilèges et de leur statut en retour. pouvoir et plus l’influence de l’Église se réduit. À
Armanth et dans tout l’Athémaïs, l’Église n’a presque
Aussi influente soit-elle, l’aristocratie n’est pas la classe aucun pouvoir.
dirigeante. Les cités-États sont en général dirigées par
des instances démocratiques, même dans le cas de
monarchies. Les cités sont dirigées par une Agora de
tribuns élus par une assemblée de représentants ou
LES GUILDES ET LES CONFRÉRIES
par les citoyens des différentes classes sociales. Le plus Les guildes et les confréries représentent le troisième
souvent, tout le monde peut voter, même de manière grand pouvoir, celui de la bourgeoisie marchande,
indirecte, à la condition d’être adulte, citoyen, et mâle. souvent plus riche que la noblesse. Les guildes pro-
Les femmes ont très rarement le droit de vote. tègent les intérêts et les droits de leurs membres,
assurent la transmission des techniques et du savoir,
Ainsi donc, selon les cas, les nobles, les prêtres ou veillent à leurs orphelins, leurs vieillards et leurs
encore les marchands domineront l’Agora et diri- veuves. Les guildes et les confréries sont la pro-
geront la ville le temps de leur mandat, en général tection sociale, la solidarité et le représentant poli-
de cinq à dix ans. Si l’Agora représente le pouvoir tique des artisans, des ingénieurs, des ouvriers, des
exécutif, c’est l’Assemblée qui gère le législatif. Le universitaires et des marchands. Une guilde est en
népotisme est courant, autant que l’oligarchie et la général une union de marchands ou d’artisans de
corruption ; les prises de pouvoir par la force ne sont produits finis. Une confrérie rassemble les ouvriers,
pas rares. Mais les Lossyans n’aiment pas l’autocratie les ingénieurs, les artistes et les intellectuels. Et les
en général. L’argent, la politique, les forces armées, guildes et les confréries se fédèrent entre elles. La
les liens familiaux et les alliances forment un système plus puissante et influente de ces entités connues est
complexe où le pouvoir passe de main en main et se l’organisation de la Guilde des Marchands, dont le
dispute souvent. Parfois jusqu’au champ de bataille siège se tient à Armanth et dont le pouvoir rivalise
et les rues des villes. avec celui de l’Église.

Les plus puissantes guildes ont leurs halls, leurs mar-


L’ÉGLISE DU CONCILE chés, leurs écoles, leurs tribunaux et banques, leurs
flottes et même des armées entières. Les plus puis-
L’Église est toujours présente dans les cités-États, sants maîtres-marchands ont des fortunes telles qu’on
mais elle n’est pas forcément aux ordres du pouvoir prétend qu’ils pourraient acheter des villes entières.

27
Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

LE PEUPLE LES ESCLAVES


Tout le monde n’est pas membre d’une guilde et Enfin restent les esclaves. Hors des cités-États, il y
d’une confrérie, et chaque cité n’a pas une guilde en a assez peu, mais il existe tout un marché de
ou une confrérie pour chaque corps de métier, tant l’esclavage ; c’est même une des sources de richesse
s’en faut. Le peuple se débrouille en majorité seul, en d’Armanth. Les esclaves sont des propriétés considé-
famille, pour défendre ses intérêts. Les notions de po- rés et traités comme des animaux et des biens. Les
lice, de tribunaux, de sécurité sont limitées. Les cités Lossyans tiennent cependant à leurs esclaves domes-
ont des gardes chargés de maintenir l’ordre en cas de tiques et il est très rare de les mutiler ou de les tuer
gros pépin et éventuellement de pourchasser les cri- gratuitement. Mais il est exceptionnel qu’un esclave
minels dangereux, mais leur travail est avant tout de puisse fuir, principalement à cause de l’usage des lin-
protéger les murs de la ville et de maintenir l’ordre. cis, et des chiens dressés à les sentir ; toute tentative
La plupart des méfaits, crimes et litiges sont réglés est rudement châtiée, en public, parfois par la mort.
par les gens eux-mêmes, sauf les plus graves. Ceux Si le sort d’une esclave peut être relativement doux,
qui en ont les moyens, nobles, bourgeois, riches arti- voire agréable, celui d’un esclave mâle est peu en-
sans, confréries, ont des gardes privés ou des milices. viable. Il sera employé pour les travaux de force, dans
les mines et les chantiers, comme gladiateur dans les
En dehors des villes, plus de gardes, pas d’armées, arènes, voire comme auxiliaire et chair à canon dans
et les gens ne peuvent plus compter que sur eux- les batailles. Les femmes sont, quant à elles, utilisées
mêmes, et leur famille. Le peuple a une représenta- pour les travaux et corvées domestiques, comme ani-
tion politique dans les cités-États plutôt restreinte. maux de compagnie et comme jouets sexuels.
Siéger politiquement est un investissement important,
que le petit artisan, le pêcheur ou le fermier ne peut Un esclave sur Loss perd tout y compris son propre
pas se permettre. S’il veut manger, il doit s’occuper nom et n’a techniquement plus ni droit ni Honneur.
de son métier. Ainsi donc, la plupart du temps, les Les Lossyans asservissent peu les érudits, les ingé-
représentants du peuple sont des aristocrates, des nieurs et les intellectuels, qu’ils soient hommes ou
érudits aisés ou des prêtres proches de lui, rarement femmes, préférant demander une rançon contre leur
un membre du peuple lui-même. liberté ou leur proposer de travailler pour eux.

SCIENCE ET TECHNOLOGIE

L es différentes civilisations lossyannes ne sont


pas toutes au même niveau, technologiquement,
mais les sociétés très en retard sont rares et isolées.
avec toute sa culture et ses connaissances, qui se
retrouve perdu sur Loss.

La plupart des peuples lossyans ont accès à peu de Vous retrouverez plus d’informations au chapitre Les
choses près aux mêmes technologies que leurs voi- Vertus, page 54
sins, et les différences tiennent dans les progrès les
plus modernes et les recherches et techniques les plus
avancés de chacun.
L’ÉRUDITION DES LOSSYANS
Le Lossyan moyen est, du point de vue de l’Occiden-
LA NOTION DE « CIVILISÉ » tal du XXIe siècle, inculte. Il sait compter, mais rare-
ment lire et écrire. C’est un fermier ou un éleveur qui
Un Lossyan définit en général être « civilisé » : celui vit de la terre, n’a jamais vu de livres ou de journaux
qui connaît les principes des Vertus et les dogmes et ne connaît rien dans le domaine scientifique. S’il
du Concile Divin. Aucun rapport donc avec le fait peut parler de quelques us et coutumes de régions
de savoir lire et écrire ou être cultivé. Un Lossyan voisines, sa connaissance géographique ne dépasse
« civilisé » sera d’autant plus considéré, si en plus, il pas les routes et les pistes à une journée ou deux de
sait parler l’athémaïs, la lingua franca de Loss. marche. La plupart des Lossyans n’ont jamais voyagé
plus loin que le grand marché local, ou qu’en pèleri-
Tout ce qui n’est pas « civilisé » et ne suit pas les pré- nage dans un temple de l’Église. Leurs connaissances
ceptes de l’Église du Concile est considéré comme se limitent en général à celles de leur métier et ils
barbare, pour un Lossyan. Les barbares n’ont pas auraient du mal à appréhender des idées innovantes
de Vertus et ne sont donc pas des humains au sens ou révolutionnaires. Ils ne sont pas très cultivés et
lossyan du terme. Ils ne sont pas protégés par les leur préoccupation principale consiste à travailler
lois et les codes et on peut très bien les chasser, les pour nourrir leur famille, trouver comment passer
traquer, les asservir ou les tuer. Y compris un terrien les saisons difficiles et les hivers pénibles et ne pas

28
Ref. 14778
SCIENCE ET TECHNOLOGIE

s’attirer les mauvais augures, la colère des esprits, des de tissage mécanisé plutôt efficaces, et maîtrisent
ancêtres, des dieux, et de la nature hostile. les techniques des hauts-fourneaux et la fonderie et
l’usinage de l’acier et du titane. Les outillages des
Cependant, les Lossyans sont aussi des gens curieux artisans sont de qualité très variée et l’horlogerie et
et aventureux, ce qui fait naître pas mal de penseurs, la micromécanique font leurs débuts. Un domaine
de chercheurs et d’explorateurs. Les plus grandes dans lequel les Lossyans ont une grande maîtrise
cités-États ont des universités et des collèges et le est la construction de marine et, enfin, grâce à cer-
métier d’ingénieur — dans tous les domaines — est tains Artefacts Anciens, les Lossyans construisent
assez courant. Les citadins sont un peu plus nom- des automates qui n’ont rien à envier à nos robots
breux à savoir lire et l’imprimerie a donné l’appari- les plus futuristes.
tion de journaux et de pamphlets plutôt répandus.
Mais posséder une bibliothèque complète est un
luxe de bourgeois, écrire un livre une preuve de
grande érudition.
LE LOSS-MÉTAL
Le loss-métal permet de fabriquer et alimenter des
dynamos électriques et de construire les moteurs
LES ARTEFACTS DU PASSÉ à lévitation des navires lévitants. Ces machineries
sont plutôt chères ; le loss-métal est rare et pré-
Avant que les humains ne soient implantés sur Loss, cieux. Les connaissances des Lossyans sur l’élec-
des civilisations étranges y ont évolué. Il n’en reste tricité viennent de l’étude d’Artefacts passés et la
que des vestiges, mais un explorateur opiniâtre peut physique de l’électricité est encore balbutiante. Les
trouver des trésors étranges et uniques. Dans l’im- Lossyans croient toujours en grande majorité qu’il
mense majorité des cas, ces artefacts n’ont pas plus s’agit d’une force magique. Trop l’étudier est mal
d’effet que des œuvres d’art et leur valeur tient à vu par l’Église.
leurs matériaux, loss-métal, loss-cristal et autres
substances rares. Mais certains sont fonctionnels, Les Lossyans savent fabriquer avec le loss-métal des
voire dangereux et mortels. Beaucoup d’innovations moteurs électromécaniques et aussi des lampes à arc.
lossyannes dont l’électricité et les moteurs à lévita- Ils ont développé avec les propriétés de cette source
tion ont été inspirées par l’étude de ces artefacts. d’énergie les pistolets et fusils impulseurs et les mo-
Les riches lossyans sont très friands de ces objets, et teurs des navires lévitants, qui permettent de s’élever
les intellectuels cherchent toutes les occasions de les dans les airs, hors de portée de la faune géante et
étudier, mais leur possession est fort mal vue par les agressive de Loss. On se sert aussi des moteurs à
Ordinatorii, et a conduit à quelques procès et exécu- lévitation sur les chantiers urbains, pour soulever de
tions pour hérésie après une trouvaille trop exotique, lourdes charges. Avec les effets électriques et magné-
fonctionnelle ou dangereuse. tiques du Loss, on a créé nombre d’armes de contact
terriblement efficaces, exotiques et dangereuses.
Enfin, l’emploi de la chaleur électrique est connu,
LA TECHNOLOGIE LOSSYANNE et appliqué à des hauts-fourneaux, ce qui permet
de travailler certains métaux comme le titane et de
Le niveau technologique et scientifique moyen des faire des alliages d’acier très résistants et solides, à
Lossyans s’apparente à peu près à celui des XVIe et moindre coût et en grande quantité.
XVIIe siècles terriens. Les mathématiques et la géomé-
trie sont très avancées, l’astronomie et le mouvement Vous retrouverez plus d’informations au chapitre Le
des étoiles commencent à être étudiés. On cartogra- Loss-métal, page 31
phie toujours plus précisément le monde connu et
les Lossyans sont d’impressionnants ingénieurs hy-
drauliques et éoliens. La biologie est encore un peu
balbutiante, l’optique se développe, mais la chimie
INVENTIVITÉ ET HÉRÉSIES
est bien maîtrisée et offre un essor de nouveaux Si l’on cherche, il y a forcément un savant ou un
matériaux aux propriétés remarquables. La physique inventeur qui a conçu une petite merveille surpre-
commence à s’intéresser avec succès à l’électricité et nante ou effrayante qui défie l’entendement — par
ses applications grâce aux propriétés du Loss-métal, exemple, plusieurs grands Génies étudient de très
aux notions des atomes et des éléments, des gaz, près les capacités voltaïques du béryl et parviennent
des fluides. La pharmacopée lossyanne est surpre- à créer des panneaux solaires capables de fournir de
nante d’efficacité pour un humain du XXIe siècle. Les l’électricité ! Ce n’est pas pour rien qu’on parle d’un
Lossyans emploient engrais et jachères, pour une univers Da Vinci-Punk. L’ingéniosité des Lossyans
agriculture maîtrisée ; l’irrigation, les moulins à eau s’étend dans tous les domaines. En fait, son seul
et à vent, les machines-outils hydrauliques sont cou- frein, hormis les évidents problèmes de matériaux
rants. Ils connaissent et emploient beaucoup l’im- et de disponibilité, est le respect craintif et supersti-
primerie et le papier, savent fabriquer des dynamos tieux des dogmes du Concile, qui interdit certaines
et des machines électromécaniques, ont des ateliers recherches ou applications industrielles hérétiques.

29
Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

Comme les explosifs, par exemple : la poudre noire explosifs fiables sont rares, plus instables et dange-
est connue, mais l’Église tente de conserver un fort reux que les impulseurs et bien moins compris. Les
contrôle dessus. La plupart du temps, ils sont seuls à Lossyans voient évidemment souvent d’un mauvais
mandater les experts et ingénieurs qui les conçoivent, œil l’usage d’une chose dangereuse condamnée par
et les emploient dans les chantiers et mines sous leur le Concile.
strict contrôle. On s’en sert avec plaisir pour des feux
d’artifice colorés, mais ces derniers pouvant causer Vous retrouverez plus d’informations aux chapitres
de graves accidents, on craint réellement le pouvoir Les Génies de Loss, page 164 et Les Navires lévitants»,
destructeur des explosifs. On n’ose donc pas encore page 173
s’en servir comme arme sauf occasionnellement : les

LES PARIAS

H ors des civilisations, conciliennes ou pas, il


existe des gens ayant des destins ou des origines
étranges, ce qui est loin d’être à leur avantage. Voici
apprennent rapidement à ne pas dévoiler leur ori-
gine. Un Terrien Perdu qui échoue sur Loss sans trou-
ver d’aide dans les premières heures ne survit pas,
ci-dessous les plus remarquables, ce dont l’existence sauf exception, plus d’une journée sur Loss.
même a changé et change encore le cours du monde
de Loss.
LES CHANTEURS DE LOSS
LES TERRIENS PERDUS Les Chanteurs de Loss sont le plus souvent d’une part
des femmes, d’autre part des personnes rousses, pos-
Encore aujourd’hui, aucun savant ne sait comment sédant le don d’entrer en résonnance avec le loss-mé-
les humains sont arrivés sur Loss à l’origine. La lé- tal, et en « chantant » avec lui, d’altérer les lois de
gende et les Dogmes disent que les Lossyans viennent la gravité et de l’électromagnétisme. Le Chant de
des Étoiles et y retournent à leur mort. Mais à peu Loss est un pouvoir très rare, mais intrinsèquement
près tout le monde sait que les Lossyans ne sont pas destructeur et difficile à contrôler. Le plus faible des
originaires du monde où ils vivent, car il continue à Chanteurs de Loss a la capacité de faire autant de
arriver des terriens sur Loss. Bien que ce soit rare, dégâts qu’une grenade à main. La plus puissante
des habitants de la Terre, planète que les savants et et légendaire de toutes, considérée comme un dé-
érudits connaissent, au moins par les témoignages mon, Orchys de Parcia, a véritablement dévasté le
et récits des terriens, apparaissent quelque part sur monde de Loss et crée les ravages du Long-Hiver. Les
Loss. On les nomme les Terriens Perdus. Chanteurs de Loss sont craints, considérés comme
des démons, et ils sont soit asservis, soit pourchassés.
À noter que l’Église du Concile est très claire sur le C’est parce qu’ils sont si redoutés qu’on asservit toute
sort des terriens : ils doivent être asservis. Les rares personne rousse dans les civilisations conciliennes.
Terriens Perdus qui ont pu survivre à leurs premiers
temps sur Loss et s’y adapter, souvent avec de l’aide,
LES CHAMANS
Les chamans sont intimement liés aux symbiotes et
à la nature de Loss, entité vivante à part entière
pour eux. Leurs pouvoirs sont aussi redoutés que
leur influence passée sur le peuple des Lossyans : les
chamans exercent réellement un contrôle sur tous
les êtres vivants de Loss. Accusés d’avoir laissé les
Chanteurs de Loss détruire le monde, déclarés sor-
ciers et hérétiques par l’Église, ils ont été extermi-
nés et sont désormais très rares dans les régions de
culture concilienne où ils doivent se tenir cachés en
permanence. Mais ils continuent leur tâche mysté-
rieuse, ainsi qu’à assurer un de leurs devoirs majeurs :
guider et conseiller les Chanteurs de Loss.

Vous retrouverez plus d’informations au chapitre Les


Parias, page 180.

30
Ref. 14778
LE LOSS-MÉTAL

Il n’y a rien qui ait plus de valeur que le loss-métal et la seule chose qui s’y compare dans l’avidité lossyanne, ce
sont les femmes, bien avant l’or et les joyaux. Le loss-métal n’est pas cher que parce qu’il est rare. Son extraction est
si mortelle qu’on y envoie que des forçats et des prisonniers, des êtres sans vertus ni valeur, que l’on peut sacrifier
et qui n’y font pas long feu. Il est si difficile de le raffiner que les meilleurs ingénieurs à connaître ces techniques
sont considérés comme des trésors vivants par leur cité-État. Et enfin, rien ne peut le remplacer : sans lui, il n’y
aurait plus de voyages ni de commerce et peut-être même plus d’industrie dans toutes les Mers de la Séparation.
Mais surtout, l’Église exige de toutes les villes un tribut de loss-métal, qu’il est impératif de payer à chaque
temple, c’est le devoir de la cité. Et malheur à celle qui tarde à le donner. Car rien ne surpasse ni n’est plus dan-
gereux que l’avidité des ordinatorii.

Extrait de l’Encyclopedia Magna, par Haerran Sabucius Littera Opiterneptis

LE LOSS-MÉTAL

L e loss-métal est la base de la technologie los-


syanne. Et la source de nombreux mystères et
merveilles, dont certaines ont des effets dévastateurs.
nels à matière de masse négative pour générer
un effet de répulsion « antigravitationnelle ». Le
loss-métal possède toutes les propriétés intrin-
On le nomme génériquement loss quand on parle de sèques d’un matériau à fort rendement énergé-
l’élément, mais il est le plus souvent appelé loss-métal tique capable de parvenir à générer des effets
et ressemble à de l’argent très brillant qui ne se cor- quantiques dans le monde macroscopique. Est-ce
rode pas et ne ternit jamais, un peu comme le platine ; que cela existe dans notre univers ? Je n’en sais
sa dureté est d’ailleurs assez similaire. Il pèse plus rien, mais la théorie des Trous de Ver et autres
lourd que le plomb. ponts d’Einstein-Rosen admet l’existence de ma-
tière à masse négative, donc, oui, cela existe sans
Sans le loss-métal, une bonne partie des plus grandes doute. Est-ce plausible ? Oui, bien que la physique
merveilles lossyannes ne fonctionnerait pas et il re- du loss-métal ne respecte pas vraiment les lois de
vêt un certain caractère sacré qui ajoute encore à sa la physique telle que nous la connaissons. C’est
rareté. Il est si vital que partout, les noms du monde un des paradigmes du JdR Les Chants de Loss à
et du métal sont indéfectiblement liés. admettre. Ce ne sera pas le seul.

ORIGINES ET PROPRIÉTÉS Le loss-métal est magnétique, et conduit l’électricité


comme un supraconducteur. Mais surtout,
Le loss-métal est présent en infimes quantités par- convenablement employé, il a la capacité de faire
tout, y compris dans tous les organismes vivants de léviter des objets en s’opposant aux propriétés de
Loss. Mais les gisements exploitables sont rares et le la gravitation. Il ne le fait pas à l’état naturel. C’est
loss-métal est ardu à extraire, raffiner et traiter. Les une sorte d’effet de répulsion engendré par la mise
mines de loss-métal sont précieuses et convoitées. en proximité de deux pôles de même polarité. Si on
contraint les deux pôles à se rapprocher en luttant
Le loss-métal est un unobtainium. En bref, un métal contre cette force, la répulsion s’emballe et génère un
aux propriétés physiques plus ou moins impossibles, effet d’antigravité : une éjection de matière à masse
dérivé d’un isotope du palladium — voilà pourquoi négative (qui n’a aucune manifestation visuelle sauf
il ressemble tant à du platine. Il est légèrement ra- un miroitement léger de l’air, comme des ondes de
dioactif et s’avère toxique s’il est ingéré ou inhalé. chaleur). À ce moment, ce qui est alors attaché aux
Le fait est que malgré son usage technologique, et deux pôles dans un mécanisme qu’on appelle moteur
son étude encore balbutiante par des savants qui à lévitation est littéralement soulevé de terre par cet
ignorent tout des théories atomiques, le loss-métal a effet d’antigravité. Pour quelques grammes de loss-
un caractère mystérieux et magique, et est considéré métal, on déplace ainsi une dizaine de tonnes. L’effet
comme sacré. est exponentiel : 200 g de loss-métal suffisent à faire
léviter un galion à pleine charge à quelques mètres
au-dessus du sol.
Note de l’autrice : le loss-métal viole a priori les
règles de la physique. Je le sais et si cela vous Un tel effet coûte de l’énergie et le loss-métal s’al-
choque, j’en suis navrée. Techniquement, il se tère au fur à mesure qu’on le contraint à générer
contente de les contourner en se basant sur l’hy- de la répulsion. Il finit par se corroder et perd son
pothèse qu’un métal de forte densité atomique à magnétisme et sa capacité à léviter. Les Lossyans
réaction isomérique serait capable, excité par les savent raffiner le loss-métal corrodé pour le recycler,
bons procédés, d’ouvrir des espaces dimension moyennant une perte inévitable.

31
Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

LES GISEMENTS DE LOSS-MÉTAL Mais l’usage le plus courant et répandu concerne les
moteurs à lévitation. Pour les navires lévitants, bien
Les mines de loss-métal sont en général à ciel ou- sûr, mais aussi pour les mines, les arsenaux et les
vert et de grande taille. L’extraction du minerai qui chantiers de construction où ces machines, souvent
l’abrite demande un long processus de raffinage, aus- asservies à des grues, permettent de soulever à peu
si complexe que celui de l’or. Trouver des blocs de d’efforts d’énormes charges.
minerai plus gros qu’une paillette est rare. Le minerai
de loss est en général dilué en quantités infimes au L’autre usage commun du loss-métal concerne les
milieu d’autres métaux : argent, nickel, platine et pal- armes, principalement les fusils, pistolets et canons à
ladium, bien évidemment — à noter que ce dernier impulsion, mais aussi les armes de contact électriques
est considéré par les Lossyans comme un déchet sans et les rares et redoutées armes ardentes.
utilité. En général pour trouver un filon de loss-métal,
on explore les régions à minerai riche en argent et Plus de détails sur ces objets et merveilles au cha-
l’on se sert de magnétite, par aimantation, pour juger pitre Les Génies de Loss, page 164 et dans le Livre
de la qualité et de la concentration du loss-métal 2, chapitre Les Armes, page 173.
dans les échantillons. Il va de soi que pour beaucoup
de Lossyans, une mine de loss est aussi sacrée que
le loss-métal lui-même et que l’abîmer ou la rendre
inexploitable est un crime impardonnable.
LE LOSS ET LA SOCIÉTÉ LOSSYANNE
Le loss-métal est vital pour les Lossyans ; pour leur
La durée de vie d’un mineur ou d’un ouvrier de raf- technologie, leur armement et leurs échanges com-
finage du loss est courte. Respirer les vapeurs du merciaux. C’est la clef de la révolution industrielle
loss-métal en fusion ou la poussière du minerai est de cet univers Da Vinci-Punk. Le loss-métal est
toxique. En cinq à sept ans — pour les plus chanceux si précieux qu’il sert d’étalon à toutes les valeurs
— le loss s’infiltre dans leur organisme qu’il ravage monétaires. Les monnaies sont toutes étalonnées à
par cancers, effondrements immunitaires et autres l’indice de la valeur du loss-métal sur les marchés
maladies neurologiques ou pulmonaires graves. Aussi, d’échange. Et toutes les cités-États, comme les plus
on envoie aux mines des forçats : esclaves, criminels grandes guildes marchandes, ont des réserves consé-
condamnés et prisonniers de guerre. Et l’on s’arrange quentes de centaines de kilos, voire de tonnes de
pour avoir de la main-d’œuvre disponible. Quant aux barres de loss-métal.
raffineries, elles sont très aérées et ventilées. Tous les
travaux demandant manipulation du minerai et des
barres de loss-métal sortant des hauts-fourneaux sont
eux aussi confiés aux forçats. Cependant, même les
artisans spécialisés et les contremaîtres de ces ateliers
voient leur espérance de vie raccourcie.

Bien entendu, les ingénieurs qui manipulent les


moteurs à lévitation ont le même souci malgré les
précautions élémentaires prises, bien que dans des
proportions moins dramatiques. Les émanations
produites pendant l’échauffement et la corrosion du
loss-métal sont toxiques et tout le monde le sait.
Mais les Lossyans font avec, car il n’en demeure pas
moins indispensable.

USAGE ET MERVEILLES DU LOSS


Le loss entre dans la conception de nombreuses
technologies et industries basées sur des systèmes
électromécaniques comme les dynamos électriques,
permettant de fournir un mouvement pour des ma-
chines-outils. On s’en sert aussi pour alimenter les
lampes à loss, qui utilisent des lampes à filament de
platine, ou encore pour chauffer les très recherchés
fours thermiques. Les automates sont mus par des
dynamos à loss et par de complexes assemblages
électromécaniques. On prétend même que certaines
machines de guerre utilisant ces technologies sont
mises au point dans le plus grand secret.

32
Ref. 14778
LE LOSS-MÉTAL

En plus d’être vital, le loss-métal est sacré. Les lois Ce que savent la plupart des Lossyans à ce sujet, c’est
sur le vol du loss-métal, sa destruction, son trafic, que les Chanteurs de Loss ne peuvent Chanter, donc
ou le vandalisme de gisements sont toutes particu- user de leurs étonnants pouvoirs, que s’il y a une
lièrement sévères et les coupables finissent torturés concentration suffisante de loss-métal à proximité.
et exécutés en place publique, leurs proches réduits Plus cette concentration est élevée, plus il entre en
en esclavage. résonnance avec les Chanteurs. Ainsi, la première fois
que le Chant se déclare chez une personne en har-
L’Église du Concile Divin, partout où elle est implan- monie avec le loss-métal en révèle aussi la présence.
tée, exige des tributs en loss-métal aux dirigeants des Il suffit de moins d’un gramme si l’objet est à portée
cités-États. Chaque année, dans des cérémonies pom- de main du Chanteur.
peuses, on vient donc s’acquitter de son offrande en
loss aux temples locaux. Et certains individus riches Les notions de proximité et de quantité de loss-mé-
viennent en offrir spontanément pour s’attirer les tal pour les Chanteurs ont sans doute été mesurées,
grâces des Êtres du Concile dans leurs affaires, ou mais c’est un savoir hérétique et perdu. En général,
demander miracles et bénédictions. on peut affirmer que la simple présence de quelques
grammes de loss, dans un rayon d’une douzaine de
Par voie de conséquence, non seulement le loss- mètres, suffit à amplifier le pouvoir des Chanteurs
métal est rare et convoité — guerres, raids et de Loss. Et plus il y a de loss-métal, plus leur Chant
pillages pour s’en emparer sont monnaie courante gagne en intensité, en puissance — et en potentiel de
— mais on en use avec parcimonie. Si très peu de ravages. Un Chanteur de Loss au milieu d’un riche
loss-métal est nécessaire au bon fonctionnement gisement naturel de loss-métal dispose d’un poten-
des machines employées par les Lossyans, toutes les tiel terrifiant. On a cependant constaté que si des
autres inventions qui pourraient améliorer leur vie et réserves de loss-métal sont enfermées derrière du
leur confort resteront encore inaccessibles tant que plomb ou d’épaisses couches de pierre, la capacité
les procédés pour l’extraire, le raffiner et le recycler d’interaction des Chanteurs de Loss avec le loss-mé-
n’auront pas progressé. tal diminue. C’est un détail encore mal connu et cette
sécurité n’est encore employée que dans les grandes
cités-États.
LA VALEUR DU LOSS-MÉTAL
Peu de gens savent également que le loss-métal pré-
Un gramme de loss-métal en vaut vingt d’or. Une sent près d’une personne se mettant à Chanter su-
barre de loss-métal s’échange à environ 2 000 andris bit le même genre de corrosion — bien que le plus
d’argent — à peu près le prix de 40 chevaux. Il n’y a souvent très faible — que s’il était employé pour
pas de monnaie en loss-métal, ce que l’on comprend alimenter des moteurs.
aisément à ses propriétés et son statut. Seuls de rares
tractations et très gros échanges se font avec des
lingots de ce métal, toujours sous haute surveillance.
LA FAUNE ET LE LOSS-MÉTAL
Cependant, on trouve du loss-métal sous forme Il existe encore très peu d’études sur l’interaction
de barres et tiges de combustibles, mais aussi entre le loss-métal, les animaux et la flore lossyanne.
d’amorces dans les technologies qui nécessitent son Les érudits savent que loss-métal se retrouve en
emploi. Et personne ne laisserait ne serait-ce qu’un quantités infimes dans tout le biotope lossyan, des
dixième de gramme de loss-métal dans la nature, plantes aux animaux en passant par les symbiotes.
même totalement corrodé. La récupération et le re- Cette concentration est plus élevée dans les matières
cyclage, y compris sur un champ de bataille, sont et créatures bioluminescentes et encore davantage
très courants. chez certaines espèces pourvues d’armes bioélec-
triques ou capables de cracher ou projeter des li-
Plus de détails dans le Livre 2 au chapitre quides surchauffés. Mais les créatures qui semblent
L’Équipement, page 170 avoir la plus forte concentration de loss dans leur
organisme sont les symbiotes ; et personne ne sait à
quoi cela sert. Dans ce domaine, le mystère reste en-
CHANTEURS ET LE LOSS-MÉTAL tier, et les connaissances en biochimie et en physique
des Lossyans ne sont pas suffisantes pour éclairer
Les Chanteurs de Loss sont intimement liés au ce secret.
loss-métal, même si personne ne comprend com-
ment. Il y a bien des études et recherches dans ce Plus d’informations dans le chapitre du Livre 3 Les
domaine, qui doivent se poursuivre en secret ici et Secrets des chamans, page 57.
là. Mais l’Église du Concile les juges comme une im-
pardonnable hérésie. Elle traque et punit sans pitié
tout chercheur qui s’aventurerait dans ce domaine.

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Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

Il y a des créatures terrifiantes, oh que oui ! J’en ai tellement vues, plus effrayantes et mortelles que ce que
l’esprit peut s’imaginer. J’ai vu la rage sauvage et la ruse au-delà de toute comparaison des grandes draekyas.
J’ai aperçu la dévastation, la terreur et la mort semées en une nuit par un morrow. Ou ces gardiens-machines des
ruines des Anciens que rien ne peut arrêter ou freiner, qui n’existent que pour exterminer tous ceux qui oseraient
déranger leurs maîtres morts depuis longtemps. Même les plus belles fleurs, comme la synthaïa, ne sont que des
pièges mortels parés de tromperie. Il n’y a pas un de ces citadins qui se vantent de leur force et de leur civilisation
qui pourrait survivre plus d’un jour dans la plus modeste des forêts. Mais ne t’y trompe pas, Anis, même si tu le sais
déjà : les pires des monstres, les plus avides, les plus dangereux, les plus cruels, les plus retors et les plus acharnés
à détruire ce qui ne veut que la paix, ce sont les hommes.

Eïm le Voyageur.

LES MAMMALIENS

L e taxon qui domine l’écosystème de Loss est ce-


lui des mammaliens. Des créatures de toutes les
tailles mais enclines au gigantisme, qui possèdent des
Les vénidés : prédateurs quadrupèdes ayant des traits
communs assez proches des mammifères, du lori à la
draekya en passant par le tosh. La plupart sont carni-
mamelles et allaitent leurs petits tout en pondant des vores, ovipares et certaines espèces peuvent changer
œufs. Ce sont des vertébrés ovipares (à l’exception de sexe en cas de nécessité.
de quelques familles de vivipares, identifiables à leur
petite taille, comme les loris). Ils sont caractérisés Les raptidés : les prédateurs bipèdes apparentés
par l’allaitement de leurs petits, un système nerveux aux différentes familles des griffons, mais aussi aux
développé et évolué, un encéphale divisé en plusieurs tarbosarres. Ils sont tous ovipares et omnivores ou
bulbes séparés, un double cœur à quatre cavités ex- carnivores.
centrées, une homéothermie (le contrôle stable de
leur température interne), des sacs aériens (organes Les mammaliens ont énormément de formes et varia-
respiratoires reliés aux poumons) et la présence de tions de leur métabolisme. Il en existe par exemple
plaques ou crêtes osseuses externes le long de leur certains à six membres, plusieurs espèces disposent
colonne vertébrale et autour de leur crâne. Les mam- d’une fourrure, de plumes ou de duvet, d’autres sont
maliens ne cessent jamais de grandir tout au long parfaitement adaptés à l’environnement aquatique et
de leur vie. il en existe autant de bipèdes que de quadrupèdes.
Un point marquant est leur taille moyenne : celle d’un
ours (à comparer avec la taille moyenne des mam-
Un taxon (qui vient du mot taxonomie) est une mifères : celle d’un chien). Oui, les mammaliens sont
entité conceptuelle qui est censée regrouper tous gros et grands, à l’aune de la flore de Loss qui ne fait
les organismes vivants possédant en commun pas semblant non plus. Les plus petits pèsent entre
certains caractères taxinomiques ou diagnos- 3 et 6 kilos, les plus gros dépassent les 40 tonnes et
tiques bien définis. Le taxon des mammaliens peuvent mesurer 8 mètres au garrot. La course au
regroupe cinq grands ordres, une classification gigantisme a clairement été l’un des choix évolutifs
récente, mais connue des naturalistes lossyans. de ce taxon, apparemment à peine freiné par les
cataclysmes massifs dont le dernier en date est le
Long-Hiver, qui n’a éliminé que quelques espèces
Les sikaidés : les mammaliens apparentés aux qua- géantes localement. Cependant, quelques archéolo-
drupèdes comme le sika et le mora, aux formes gues — la profession n’existe pas en tant que telle sur
proches de nos mammifères herbivores, sans oublier Loss — trouvent de temps en temps les restes fossiles
tous les rongeurs et les plus petits mammaliens à d’animaux encore plus gigantesques.
régime général végétarien. La plupart sont vivipares
ou ovovivipares.

Les draseidés : les mammaliens à six pattes dont fait


APPARENCE
partie le dragen. Beaucoup sont souvent capables de Les mammaliens sont en général dépourvus de poils,
vol. Ils sont tous ovipares. sauf pour quelques espèces vivant aux limites arc-
tiques ou d’autres forestières couvertes d’une toison
Les arafidés : les mammaliens géants semblables à de faible épaisseur. Par contre, les plumes décoratives
nos dinosaures, du ghia-tonnerre aux plus grandes et les duvets protecteurs sont plus courants. La peau
espèces de longilas en passant par le marche-forêt. des mammaliens est colorée et bigarrée ; elle forme
Ils sont ovipares. des motifs à usage de camouflage qui en période de
rut et de reproduction changent pour arborer des

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Ref. 14778
LES MAMMALIENS

nuances flamboyantes. Les taches et motifs biolu- ront toujours porteurs d’un symbiote. Ils vivent avec
minescents sont communs. Tous les mammaliens ont eux en bonne entente, à leur bénéfice mutuel, et cer-
des plaques, cornes et crêtes osseuses plus ou moins tains symbiotes apportent des avantages majeurs à
développées, allant du crâne à la queue. Ces plaques leurs hôtes. Les symbiotes ont sur les mammaliens
sont très différentes d’une espèce à l’autre : parfois des effets décrits en détail au chapitre Les Symbiotes,
peu nombreuses et limitées à des cornes complexes, page 38.
d’autres fois véritables carapaces et armes natu-
relles, mais leur présence est une des caractéristiques
constantes des mammaliens.
COMPORTEMENT
Les mammaliens volants ne sont pas vraiment d’une Vu que les mammaliens sont présents dans tous les
grande agilité, ce sont plutôt des planeurs qui ont écosystèmes, les informations qui suivent sont très
besoin de points d’envol et les dragens, par exemple, génériques, et ne s’intéressent donc qu’aux points
vivent aux cimes des arbres ou sur des falaises. Enfin communs de tous les mammaliens. Les comporte-
beaucoup de mammaliens ont un crâne draconien as- ments varient bien sûr très souvent selon les espèces
sez typique, parfois avec un bec corné et une crête dé- et les milieux.
veloppée. Mais d’autres ont des gueules plus proches
de certains mammifères terriens.
Hiérarchie et troupeaux
Les mammaliens ne cessent jamais de grandir au Chez les mammaliens sociaux, ce sont en général
long de leur vie, de sorte que les plus vieux représen- les femelles qui atteignent la plus grande taille et
tants de l’espèce sont aussi les plus gros. L’espérance qui dominent les troupeaux et les hardes en qualité
de vie des mammaliens est assez étendue, mais en de chef ou d’alpha. Le comportement de meute est
moyenne, ils vivent environ 20 à 30 ans. Certaines fréquent chez les mammaliens, aussi bien les her-
espèces dépassent allègrement le siècle. bivores que les carnivores et les opportunistes. Il y
a relativement peu de mammaliens individualistes
ou solitaires, mais ce sont systématiquement les plus
Sens et magnétoréception
dangereux, comme les Draekyas. Les troupeaux sont
C’est une des étrangetés des sens des mammaliens, organisés et hiérarchisés, les duels entre les femelles
qui n’est pas développée chez toutes les espèces : ils pour la domination et la dispute du rang au sein
possèdent une capacité de perception des champs de la harde sont fréquents. Les mâles adultes sont
électromagnétiques (la magnétoréception). Cela leur le plus souvent à l’écart de la masse des femelles
permet d’une part de repérer clairement les pôles et des petits, et les femelles dominantes s’assurent
magnétiques fluctuants de Loss et s’en servir pour de repousser tout mâle trop entreprenant. Dans la
s’orienter, et d’autre part de ressentir la proximité de mesure où certains mammaliens peuvent changer de
variations de champ magnétique, y compris celles sexe en cas de déséquilibre, il n’est pas rare de voir
émises par d’autres êtres vivants. Ce sens, couplé mâles et femelles se battre pour la domination… et le
à la vue, l’ouïe et l’odorat, est redoutablement effi- mâle vainqueur changer de sexe pour devenir la chef
cace pour repérer des proies dissimulées. Dans ce de la meute ou du troupeau !
domaine, le draekya est le champion de Loss, plus
efficace encore que ses cousins aquatiques, et seuls
Reproduction et soins parentaux
les dragens peuvent rivaliser avec lui. Fort heureu-
sement, le très répandu griffon a une magnétorécep- Les mammaliens ont tous des périodes de rut une
tion limitée. Les autres sens des mammaliens sont fois par an, sauf quelques cas comme les toshs qui
très variés, mais la nature semble n’en avoir doté en ont trois ou quatre et les loris deux. Dans cette
aucun d’une capacité d’écholocalisation sauf pour période, les mâles paradent le plus possible pour
les mammaliens aquatiques. La vision infrarouge attirer et impressionner les femelles et certaines es-
est très peu répandue, mais elle existe et semble pèces se battent pour démontrer leur virilité et faire
être liée à un symbiote. Les mammaliens semblent fuir les prétendants. C’est durant ces périodes que
ne pas distinguer le violet et l’indigo, une faiblesse les mammaliens peuvent changer de sexe pour réta-
que les San’eshe emploient dans leurs techniques blir un déséquilibre qui gênerait leur reproduction,
de camouflage. et augmenter leurs chances individuelles d’être le
reproducteur le plus sollicité. Il ne vaut mieux pas
choisir ce moment pour déranger les mâles agressifs
Symbiotes et mammaliens
et excités à l’extrême. Mais ce sont les femelles qui
Les mammaliens sont colonisés, comme tout ce qui choisissent les reproducteurs. Les cas de couples
vit sur Loss, par les symbiotes. En moyenne, environ unis pour la vie sont rarissimes, et le mâle ne par-
50 à 70 % des mammaliens vivent avec un symbiote ticipe en général pas beaucoup aux soins paren-
implanté dans leur organisme. La différence n’est en taux, le plus souvent chassé par la femelle quand
général pas visible de loin, mais les plus grands et elle est prête à pondre. Les mammaliens pondent
vieux représentants d’un groupe de mammaliens se- d’un à une dizaine d’œufs à la fois, qui sont couvés

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Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

pour une période d’un à deux mois en moyenne. d’individus parcourant toujours les mêmes chemins,
Certains mammaliens composent un nid complexe souvent suivis par des prédateurs divers. Parmi eux,
et isolé — parfois construit par le mâle avec une les plus craints sur Loss, plus encore que les draekyas
ingéniosité remarquable — pour garder les œufs à qui sont finalement assez rares, sont les griffons. Les
bonne température. Les soins de la mère durent bien Lossyans les ont apprivoisés, mais assemblés en
après l’éclosion ; les mammaliens veillent sur leurs meutes sauvages, ils peuvent traquer et suivre leur
petits au moins plusieurs mois, voire des années proie des semaines durant. Omnivores bipèdes, cou-
après leur naissance. Ces soins diffèrent cependant reurs et charognards, avec une adaptation à la traque
entre espèces migrantes et territoriales. Certains et des pattes avant préhensiles, les griffons sont les
œufs de mammaliens peuvent entrer en dormance loups de Loss.
pendant des dizaines d’années, et ainsi éclore si les
conditions sont réunies et qu’un mammalien décide
d’adopter les petits plutôt que les manger.
LES LOSSYANS ET LES MAMMALIENS
Nous avons déjà abordé le souci que peuvent avoir
Prédation et défense
les Lossyans avec la faune de leur planète. Disons
Les mammaliens sont pourvus de nombre d’armes qu’on peut imaginer l’étendue du problème en affir-
et de défenses naturelles variées, exotiques et mor- mant que, pour certains herbivores migrateurs, une
telles. Ils ont souvent des armures osseuses solides muraille de trois mètres de haut n’est guère plus em-
ornées de défenses, piques et autres armes natu- barrassante qu’une clôture de jardin.
relles, en plus de griffes et de crocs. Mais ils dis-
posent aussi de venins et de toxines, à travers leur Les tentatives d’exterminer les mammaliens ont été
morsure, via des dards ou exsudés par leur peau. notoirement inefficaces : parfois, leur comportement
Enfin, certains ont des armes bioélectriques alimen- a changé de manière belliqueuse et clairement hostile
tées par des organes recelant de petites quantités de voire, disent certains récits, organisée en réponse à
loss-métal. Dans ce domaine, les plus redoutables une campagne d’éradication, au point de voir s’al-
exemples d’armes naturelles variées et mortelles lier des espèces habituellement ennemies, y compris
sont celles de la draekya qui dispose de flagelles proies et prédateurs. Beaucoup pensent qu’il s’agit
luminescents capables de lancer des terribles dé- là de la manifestation du pouvoir des chamans, sans
charges de haut voltage, et du ghia-tonnerre qui que rien permette de le prouver.
souffle un nuage de postillons électrifié par ses or-
ganes accumulateurs situés dans sa crête. La taille Donc, les Lossyans ont appris à vivre avec les grands
et le gigantisme sont aussi une défense, y compris mammaliens et à les écarter de leurs terres agricoles
pour les placides longilas, terriblement dangereux et leurs centres urbains, en ne les abattant qu’en cas
par leur masse quand ils piétinent tout ce qui ne de nécessité. Tuer un grand mammalien demande de
s’écarte pas de leur route. Plusieurs espèces pré- toute manière des moyens conséquents : un ghia-ton-
datrices ont un épiderme mimétique, qui les rend nerre sent à peine la balle de fusil que vous venez
aptes à se fondre aisément dans leur environnement. de lui tirer dans le thorax. Deux des instruments
Enfin, certaines espèces ont un cri si strident qu’il efficaces pour tenir les mammaliens à l’écart sont,
peut assommer un homme adulte. par exemple, les chiens, pour toutes les vermines
mammaliennes lossyannes, et les griffons domesti-
qués. Ceux-ci font fuir la plupart des mammaliens,
Déplacements et alimentation
même les plus gros et hargneux, y compris la draekya
S’il y a des mammaliens volants et aquatiques, il y a qui ne se risque dans une communauté urbaine que
peu de fouisseurs mammaliens. Le tosh ne fait pas poussée par l’arrivée de sa fin imminente, quand elle
de véritable terrier, mais envahit et aménage ceux ne peut plus chasser.
d’insectes. Il y a par contre quelques bons grimpeurs
au mode de vie arboricole. Les volants sont loin des
performances aériennes des oiseaux et ont besoin
d’espace pour décoller et atterrir ; la voltige ou la
vitesse ne sont pas leurs points forts. Les aquatiques
sont capables de performances et d’une adaptation
similaire à celle des cétacés terriens. Les mammaliens
sont aussi bien herbivores que carnivores, omnivores
et charognards. Ils se chassent et se dévorent d’une
espèce à l’autre et les cas de cannibalisme dans une
espèce ne sont pas rares. Il n’y a pratiquement aucun
mammalien qui s’apparente à nos grands singes.

Les troupeaux d’herbivores en migration sont fré-


quents et peuvent atteindre des centaines de milliers

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Ref. 14778

Les Lossyans ont domestiqué pas mal d’es-


pèces : pour leur viande, leur cuir, leur laine
duveteuse et leur fourrure, leur lait aussi. Et
bien sûr, certains comme animaux de monte
et de bât et parfois de compagnie. En voici
quelques-unes :

Les moras : des sortes de phacochères blindés


élevés pour leur viande principalement.

Les loris : l’espèce la plus proche du chat en


termes de niche écologique. Ce sont des ani-
maux de compagnie et des chasseurs de toshs.

Les esqiris : des sortes de gros rongeurs mar-


supiaux rondouillards à la fourrure courte, et
au corps partiellement caparaçonné, qui se
reproduisent facilement. On les élève pour
leur viande et leur fourrure.

Les sikas : des antilopes répandues en nombre


de sous-espèces qui forment de grands trou-
peaux. Elles sont domestiquées partout, sou-
vent en semi-liberté.

Les ghia-tonnerres : croisement entre un tri-


cératops et un rhinocéros, les ghia-tonnerres
sont élevés en semi-liberté presque unique-
ment par les nomades ar’anthias. Ils sont
parfois employés comme animaux de bât par
d’autres peuples.

Les griffons : les griffons sont des omnivores


charognards et opportunistes qui vivent en
meutes. La version apprivoisée et nettement
plus omnivore et sélectionnée pour sa (rela-
tive) petite taille, comme monture rustique et
de guerre. Ils sont assez courants, mais bien
moins appréciés que les chevaux, car il n’est
guère facile de s’en occuper.

Les dragens : mammaliens carnivores ailés


semblables à des dragons. Les seuls à avoir
appris à les employer comme montures sont
les Dragensmanns qui les élèvent avec pas-
sion, et les San’eshe qui font de même quoique
bien plus rarement. La monte et l’entretien
des dragens sont compliqués et coûteux.
Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

Ce qui différait particulièrement n’était pas les quelques autres esclaves, toutes reconnaissables à leur collier
d’un seul tenant de métal, souvent du bronze, et à des tenues courtes et nettement plus dénudées que les vêtements
parfois lourds et couvrants des femmes libres, même en ce chaud matin de fin d’été, mais à leurs symbiotes, souvent
visibles. Tous n’en portaient pas ; Lisa put estimer qu’une personne sur cinq ou six en arborait un visiblement. Il
devait y en avoir plus, en comptant les symbiotes cachés par les vêtements. Les plus visibles avaient des allures de
diadèmes précieux, semblant mêler la beauté biologique de fleurs précieuses et chamarrées, et l’éclat de métaux
iridescents et de joyaux flamboyants ; les autres, le plus souvent arborés par des hommes, ressemblaient à des
bracelets d’entrelacs raffinés et complexes courant de l’avant-bras à la naissance de la main. Mais il y avait aussi
des symbiotes semblables à des boucles d’oreilles précieuses, et d’autres semblant être entrés en fusion avec la
chevelure de leur hôte pour créer des filaments et des tresses chatoyantes jouant avec la lumière et les couleurs.

Les Chants de Loss, Mélisaren

LES SYMBIOTES

D ans tout l’écosystème de Loss, une créature fra-


gile, insignifiante et minuscule tient un rôle si ma-
jeur que certains naturalistes lossyans se demandent si
communication sommaire, dont le fonctionnement
est inconnu, car un symbiote ne tente jamais de co-
loniser un être qui en porte déjà un : les symbiotes
la nature pourrait survivre sans ces animaux. n’entrent jamais en concurrence.

On les nomme de manière générique les symbiotes. Le cycle de vie des symbiotes est assez simple. Ils
Ils sont répandus dans tous les biotopes et ont coloni- naissent sous forme de spores, qui vont s’agripper à la
sé aussi bien animaux que végétaux. Dans l’immense première surface solide que le vent leur aura permis de
majorité des cas, ils sont totalement inoffensifs pour rencontrer. Si cette surface n’abrite pas de vie végétale,
leur hôte et se contentent d’une symbiose presque in- au moins des mousses ou des lichens, la spore s’éteint
visible, ponctionnant les nutriments nécessaires à leur et meurt en quelques heures. S’il a pu trouver un pre-
survie ; en échange de quoi, ils améliorent l’immunité mier hôte végétal, même sommaire, la spore grandit et
et la régénération physique des êtres qui les abritent. entame la seconde phase de son cycle, pour devenir un
polype. Celui-ci croît plus ou moins vite et si son hôte
Et dans quelques rares cas, ils peuvent faire bien est une plante robuste, un arbre par exemple, le polype
mieux, voire devenir des armes terrifiantes. Et dé- va finir par arriver aux dimensions et à l’apparence
sormais, les symbiotes font partie des intermédiaires d’un corail ou d’une gorgone des mers aux couleurs
des Lossyans, leurs alliés devant la maladie et les chamarrées et bioluminescentes. La phase de crois-
infections et bien plus que cela… sance d’un polype oscille entre trois mois et deux ans.

Une fois le polype arrivé à maturité, il bourgeonne


APPARENCE ET MODE DE VIE pour donner naissance à des tas de petits sym-
biotes, en général entre cinquante et deux-cents.
Les symbiotes sont donc des créatures minuscules, qui Ceux-ci vont ramper pour rejoindre les extrémités
à l’air libre ressembleraient à de petites méduses de de branches et feuilles, là où ils ont des chances de
la taille d’une pièce de monnaie. D’aspect fragile, ils pouvoir se faire bousculer par un hôte potentiel, s’y
ont des couleurs irisées présentant pratiquement tout agripper, se chercher un coin chaud et s’implanter.
le spectre des teintes possibles, avec des reflets métal- Quant au polype, il meurt en général peu après avoir
liques. On comprend aisément que ceux élevés par les achevé de bourgeonner.
Lossyans soient devenus de véritables bijoux vivants.
La dernière phase du cycle du symbiote arrive avec
Dotés de très fins tentacules, les symbiotes arrivent la mort de l’hôte. Quand le symbiote sent que son
à adhérer à n’importe quelle surface, mais leur dé- hôte est sur le point de décéder, il commence à en-
placement est très lent, de l’ordre de trois mètres à fler en une petite sphère qui pousse à la surface du
l’heure. La plupart du temps, leur lente reptation derme. Le bubon, rempli de spores, éclatera au plus
est inutile car ils ne quittent plus leur hôte une fois tôt quelques minutes avant le décès de l’hôte, mais le
celui-ci colonisé et décèdent peu après ce dernier. plus souvent après sa mort, répandant les spores qui
Les symbiotes disposent seulement d’une forme très vont chercher une surface accueillante pour pousser…
sommaire de cellules photosensibles capables de et le cycle recommence.
leur faire discerner le clair-obscur et les nuances de
lumière ; cela leur permet de ramper sur leur hôte Les symbiotes sont fragiles à tous les stades de leur
pour trouver le coin le plus abrité pour s’implanter. évolution en spores, polypes, et symbiotes non im-
On suppose aussi qu’ils disposent d’une forme de plantés : ils ne supportent pas les climats trop secs

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Ref. 14778
LES SYMBIOTES

qui les dessèchent en quelques heures et les vagues Quand le symbiote meurt, l’hôte est fragilisé.
de froid les tuent en une journée. Ce qui ne les a pas Son système immunitaire est affaibli et subit des
empêchés de coloniser tous les milieux : il y a des dérèglements hormonaux, problèmes cardio-vas-
symbiotes même dans les fleuves et les mers et les culaires, et désorientation cognitive. L’hôte est en
seuls milieux qui n’abritent a priori aucun symbiote souffrance plusieurs semaines. Et souvent, s’ils y
sont les déserts secs et les glaciers. Il n’y a cependant survivent, on peut remarquer que certains hôtes se
qu’une fois qu’ils ont trouvé un hôte qu’ils sont hors mettent à la recherche d’un autre symbiote pour
de danger et en sécurité. Eu égard à leur fragilité, si se le faire implanter.
les symbiotes sont répandus partout, ils ne colonisent
pas tous les êtres vivants. Pour une espèce donnée,
la moyenne d’individus colonisés serait plutôt d’un Enfin, certains animaux de Loss portant un symbiote
tiers environ. Enfin, les symbiotes sont très spécia- se comportent étrangement, c’est-à-dire d’une ma-
lisés. Chaque sous-espèce ne sait en général coloni- nière totalement inattendue pour leur espèce. Ce ne
ser que son espèce-hôte. Le symbiote commun des sont pas des comportements fous ou suicidaires, mais
ghia-tonnerres ne sait par exemple coloniser qu’eux. des épisodes d’altruisme, de défense ou de vengeance
On trouve donc toujours les zones de reproduction interespèce qui ne devraient pas arriver.
des symbiotes non loin des zones de peuplement de
leurs espèces-hôtes. Il y a à ce sujet trois histoires que les Lossyans se
content au coin du feu. Celle d’une grande draekya
femelle qui aurait ramené près de sa ferme un pe-
L’effet sur les animaux
tit enfant qui s’était perdu depuis plusieurs heures
Comme en moyenne un animal ou plante sur trois en forêt (alors que tout draekya qui tombe sur un
porte un symbiote, on peut conclure que la nature de Lossyan paumé se dit forcément que le buffet est
Loss devrait dans son ensemble se passer aisément ouvert, à table) ; ou encore celle d’un troupeau de
de ces hôtes et de leurs avantages. Mais les natura- longilas en pleine panique qui piétina pendant des
listes de Loss se demandent quel effet aurait sur le heures un petit village, aplatissant tout sauf… la pe-
monde la disparition de ces créatures si répandues, tite église du Concile où étaient réfugiés une bonne
qui semblent même indispensables à certaines es- partie des villageois, femmes, enfants et anciens. Et
pèces. Car il y a des différences notables entre les enfin, celle d’un navire baleinier armanthien qui fut
représentants d’une espèce animale qui porte un poursuivi des semaines durant par une grande fe-
symbiote, et celles qui en sont dépourvues : melle et coulé dans le port de la ville par la créature
vengeresse, qui repartit une fois sa sinistre tâche
Rallonge la durée de vie : l’hôte est en meil- accomplie.
leure santé, a un meilleur système immuni-
taire, et récupère de ses blessures bien plus
efficacement. Il vit donc plus vieux.
LES SYMBIOTES D’ÉLEVAGE
Immunise à certaines maladies : si les mala- Depuis sans doute presque aussi longtemps que les
dies ayant des causes internes et auto-im- Lossyans sont venus des Étoiles, les symbiotes ont
munes ne sont guère affectées, les infections été domestiqués. Il faut dire que l’avantage pour
extérieures, empoisonnements du sang et qui devient l’hôte d’un symbiote est évident. Les
toxines sont filtrés par l’action du symbiote Lossyans ont apprivoisé les symbiotes, les ont do-
et nombre de maladies bactériennes et cer- mestiqués et en ont tiré une variété de races aux
taines virales sont alors sans effet ou avec qualités aussi variées que les éleveurs pouvaient en
des effets réduits. produire.

Augmente la taille de son hôte : on ne sait Les symbiotes d’élevage sont une tradition répandue
pas trop pourquoi, mais les hôtes des sym- et une source de revenus importante. Il y a même
biotes ont en moyenne une masse supé- quelques villes et communautés dont c’est un des
rieure à leurs congénères qui en sont dé- commerces principaux. Un Lossyan sur cinq en
pourvus, d’environ 10 à 20 %. moyenne porte un symbiote. Il en existe une très
grande variété décrite plus bas. La plupart diffèrent
Régénère les lésions de son hôte : cette ré- surtout par leur apparence, certains étant sélection-
génération permet une guérison des plaies nés pour pouvoir être arborés comme des bijoux vi-
accélérée et une récupération plus rapide vants parfois aussi chers que des vrais. La majorité
avec moins de séquelles. des symbiotes se contentent d’améliorer la réponse
immunitaire et la régénération cellulaire de leur hôte,
Provoque une infertilité (chances de repro- le rendant plus solide, en meilleure santé, apte à ré-
ductions réduites) : mais elle reste relative- cupérer plus facilement et l’immunisant à pas mal de
ment faible et à l’échelle des espèces, n’a maladies infectieuses.
vraiment pas d’incidence importante.

39
Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

Les symbiotes ne sont pas accessibles à toutes les Changer de symbiote est tout aussi ardu, car il faut
bourses. C’est d’ailleurs un des présents d’une dot le tuer. Et il ne meurt que par certains poisons ou
de mariage ou un cadeau à un enfant qui a passé parce que son hôte est à l’agonie. La technique est de
sa troisième année. C’est donc un investissement et leurrer le symbiote en créant une agonie artificielle
seules les personnes les plus aisées peuvent concevoir de son hôte avec des neurotoxines plongeant le pa-
leur achat comme un caprice sans conséquence. tient dans un état de mort apparente, à l’instar de la
tétrodotoxine. La technique est maîtrisée et le risque
est relatif, mais, même si cela est très rare, certains
L’élevage de symbiotes
patients ne se réveillent pas.
Les symbiotes d’élevage ne se reproduisent pas dans
la nature. Ils meurent en général avant leur hôte Les symbiotes sont sensibles aux toxines violentes. Le
quand ce dernier agonise, ayant épuisé toutes leurs plus souvent, il mourra d’un poison violent inoculé à
ressources pour le maintenir en vie. Ils n’ont donc son hôte, mais le sauvera en ayant lutté contre. On
pas le temps de produire des spores et suivre leur peut aussi perdre un symbiote après avoir survécu à
cycle naturel. un terrible choc traumatique, comme une perte de
sang massive, un membre tranché, ou encore certaines
La méthode de reproduction est de conserver les maladies, comme la Rage… Dans ces cas là, encore
lignées issues de polypes précieusement soignés et une fois, on peut remercier le symbiote, dont la mort
maintenus en vie. Les polypes, en situation de stress, augmente les chances de survie de la victime.
régressent sans achever de bourgeonner en attendant
des jours meilleurs et on peut bouturer un bout de
Quelques symbiotes courants
polype à un autre, mais aussi couper une branche
de polype, la greffer à une plante et voir grandir un Les graetis : les symbiotes les plus courants, aux effets
nouveau polype. Ce faisant, on peut donc en faire classiques, décrits ci-dessus. Les graetis sont sélection-
bourgeonner pour qu’il produise quelques symbiotes nés pour leur beauté et leur apparat. Les plus simples
à la fois et interrompre sa germination avant qu’il l’ait forment une arabesque ou un tatouage artistique et
achevée pour empêcher son décès. chamarré autour d’un petit cœur central, là où il s’im-
plante. Les plus complexes sont de véritables joyaux
Les Lossyans ont sélectionné les meilleurs symbiotes extravagants de couleurs et de luminescences.
en observant les effets de ceux-ci sur leurs hôtes et
en bouturant les polypes pour privilégier les qualités Les lincis : ce sont les symbiotes que l’on implante
recherchées. Un travail de tâtonnement, mais rendu sur les esclaves pour leur interdire toute fuite. Il émet
assez facile par la relative aisance à faire pousser et une odeur imperceptible aux humains, mais à la-
se multiplier les polypes. quelle les chiens dressés à la traque sont sensibles.
Ils ont aussi pour effet de rendre totalement infertile,
ce qui évite quasi totalement les grossesses acciden-
Les Lossyans et les symbiotes
telles. Un linci peut coûter un certain prix, le placer
Mis à part le prix des symbiotes, en porter n’est pas sur une esclave est un investissement. C’est pour cela
sans conséquence : ils agissent sur l’organisme et le que souvent l’on rajoute quelque luxe à un simple
modifient en profondeur, ce n’est pas innocent. linci, pour que son apparence soit un agrément, que
ce soit graetis ou jasmines.
Pour implanter un symbiote, il faut s’adresser à un
physicien : médecins, pharmaciens ou apothicaires Les jasmines : des symbiotes qui modifient l’odeur
sauront le faire et certains sont mêmes spécialistes du corporelle de leur porteur, le plus souvent pour créer
domaine. Les chamans s’y connaissent encore mieux, une odeur florale et sucrée. L’hôte verra sa sueur, sa
mais là, il faut pouvoir en trouver un — et oser lui salive, ses sécrétions avoir cette odeur et ce goût.
demander. Pour inciter le symbiote à s’implanter où Certaines versions de jasmines ont carrément des
on le veut, on incise donc le derme puis on le pose odeurs enivrantes et irrésistiblement attirantes. Mais
sur la plaie qu’il va recouvrir et envahir pour com- il existe aussi des jasmines qui imitent des odeurs
mencer sa symbiose par cet orifice. animales ou des senteurs d’humus, ce qui est bien
pratique en termes de discrétion.
L’effet est aussi douloureux d’une brûlure avec un fer
chauffé à blanc quand le symbiote s’ancre à l’orga- Les ambroses : ce sont les plus chers et précieux des
nisme et commence à faire corps avec lui. On anes- symbiotes. Leur bénéfice est de ralentir les effets du
thésie donc généralement le patient, un luxe que l’on temps sur leur hôte. C’est la jeunesse éternelle et une
n’accorde pas aux esclaves à qui l’on pose un linci, longue vie, en théorie. Avec un ambrose, un Lossyan
afin qu’elles vivent l’épreuve de manière marquante peut espérer vivre jusqu’à cent-cinquante ans et plus
— sans oser le jeu de mots. Une fois ceci fait, le pa- et ne vieillir qu’à peine. Mais les symbiotes ont une
tient va vivre deux ou trois jours de légère fièvre et durée de vie, eux aussi, et ils finissent par mourir. Dès
de malaises, le temps que la symbiose soit achevée. lors l’hôte subit le contrecoup de la mort du symbiote
Et dès lors, il en tirera les bénéfices. et meurt en général en semaines.

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CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

Les nyctes : un type de symbiote qui modifie la vue, les gorgones. Elles sont décrites dans le chapitre Les
et rend nyctalope. L’hôte voit dans la pénombre quasi Antagonistes, mais si nous en parlons ici, c’est parce
aussi clairement qu’en plein jour et, dans l’obscurité, qu’elles sont à la source du pire des symbiotes jamais
il parvient à distinguer les reliefs là où tout le monde créés par les Lossyans.
serait aveugle.
Les gorgones ne sont pas des symbiotes, mais leurs
Les sylphères : un autre symbiote qui modifie les cousines, de terribles parasites et un danger mortel
sens, ici, l’odorat qui devient presque aussi efficace quand arrive la saison nocturne où elles se mettent en
que celui d’un chien. Avec quelques conséquences : il chasse et contaminent leurs hôtes, qui vont devenir
faut s’y adapter, mais on comprend de suite l’intérêt. des Dévoreurs sauvages, répandant terreur et mort.
D’autres peuvent modifier l’ouïe, mais ils sont vrai- Heureusement, le cycle de vie des gorgones est long et
ment rarement utilisés, car leurs effets secondaires les animaux de Loss fuient toute zone contaminée par
sont difficilement supportables. ces parasites. Ainsi donc, ceux-ci n’apparaissent que
comme des épisodes de contamination sporadiques.
Il y en a encore beaucoup d’autres, dont certains très
exotiques, qui rendent partiellement bioluminescents,
Les Dévoreurs, armes de guerre biologiques
changent les sécrétions en poison, ou en drogue, etc.
Mais les plus courants sont ceux listés ci-dessus. Certains savants de l’Hégémonie ont pris le risque
d’étudier et élever des gorgones pour tenter d’en faire
des symbiotes domestiques. Ce qui n’a eu guère de
succès, dit-on, bien qu’il se raconte que certains cha-
LES CHAMANS ET LES SYMBIOTES
mans sauraient créer des symbiotes d’immortalité.
Nul n’a jamais étudié ce sujet ni ne s’en est vanté, Leurs études ont tout de même eu une réussite re-
mais la tradition chamanique a intégré les symbiotes lative, aux conséquences effrayantes : les Dévoreurs.
dans ses rites et sa cosmogonie. Ils font partie in-
tégrante des rituels de ces intercesseurs entre les Un symbiote dévoreur est implanté sur un hôte humain
hommes et le monde spirituel, entre la volonté des non consentant. Une fois implanté, l’hôte se met à
Lossyans et celle de la nature. Tous les chamans sans muter, grandir et enfler un peu comme une victime
exception portent un symbiote ; souvent, ces derniers parasitée par une gorgone. Il devient aussi affamé et
sont même issus de lignées secrètes et sacrées sélec- se sert là où il y a de la viande, y compris humaine.
tionnées par des générations de chamans. Un Dévoreur est alors une arme de guerre terrifiante
aussi bien par sa force et sa résistance surnaturelles
Le secret qui lie les chamans aux symbiotes n’est que par sa violence sans limites et sa tendance à dé-
transmis que de chaman à chaman et que de maître vorer ses ennemis, même vivants. Un Dévoreur peut
à élève, comme une passation de pouvoir qui ne peut dépasser une demi-tonne, atteindre les trois mètres et
en général arriver qu’une fois dans la vie de celui qui défoncer un mur de pierres sèches comme d’autres
le transmet. Un secret qui n’est jamais écrit, jamais bousculent une palissade, mais sa durée de vie est
retranscrit et qu’ils n’ont jamais révélés. Ce qui est limitée à quelques années. Il est en permanence affamé
sûr, c’est que les chamans ont en général autant de et le symbiote finit par le digérer vivant. L’hôte finit
connaissances médicales sur les symbiotes et leur in- toujours par perdre le peu de raison qui lui reste dans
teraction avec leurs hôtes que les meilleurs physiciens une dernière crise de rage sanguinaire, où soit il est
de Loss et qu’ils sont capables de bien des choses qui abattu, soit il se dévore lui-même.
dépassent totalement les meilleurs savants lossyans en
matière de soins et de guérison dans ce domaine. Mais pour l’Hégémonie, et les troupes d’élite du
Concile, ce sont des forces d’assaut redoutables
Mais on prétend que cela ne s’arrête pas là, car après qu’ils n’hésitent pas à déployer pour semer la terreur
tout, la haine farouche et la détermination de l’Église dans le cœur de leurs adversaires. Ce sont souvent
à détruire les chamans de Loss ont forcément une des esclaves et prisonniers de guerre, traités comme
raison, liée à la prétention de ces derniers d’être des bêtes et lâchés pour briser les lignes ennemies,
les messagers et les intermédiaires entre le monde puis abattus ou capturés et enchaînés pour un pro-
des esprits, le monde de la nature et le monde des chain usage. Cependant, les plus fortes âmes parmi
hommes. Et s’il y a bien un être qui unit tout ce qui ces pauvres hères arrivent à surmonter l’influence
vit sur Loss, qui leur est commun et universel, ce sauvage et affamée du Dévoreur et conservent une
sont les symbiotes. Plus de détails dans le Livre 3 grande partie de leur conscience. Ils sont les plus
«Les secrets des chamans», page 57. dangereux, car ils sauront comment rester en vie
longtemps, satisfaire à la faim de la bête qui les
dévore et exploiter au mieux leur puissance surhu-
LES GORGONES maine. Et ces Dévoreurs là, quand ils s’associent et
forment des bandes, deviennent un des pires dangers
Les symbiotes sont petits, insignifiants, et sans dan- que peuvent croiser les Lossyans, et surtout ceux qui
ger. À l’exception de leurs rares et terrifiants cousins, les ont créés !

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L’HISTOIRE DE LOSS

Il y a toujours deux versions de l’Histoire : celle que l’on a voulu graver dans les mémoires, imprimée sur le
papier et enseignée dans les temples et les écoles. Et il y a celle qu’on a voulu faire disparaître et qui ne survit que
cachée sur de vieux parchemins, au fond des ruines passées et dans la mémoire d’hérétiques qui se cachent. La
véritable Histoire n’est pas plus l’une que l’autre ; elle est toujours fluctuante, quelque part entre les deux.

Extrait de l’Encyclopedia Magna, par Haerran Sabucius Littera Opiterneptis

L’HISTOIRE DE LOSS
P lus on va vers le passé, moins les Lossyans en
savent sur la réalité et les détails de leur histoire
commune, qui a été réécrite par les survivants, les
cellaires. Peuvent-ils la dévoiler ? Pas sans créer de
graves remous. Est-ce si différent de l’histoire offi-
cielle ? Oui, pour tout ce qui précède l’An 0 AC, et
vainqueurs en général. Les premiers historiens et ar- la réalité provoquerait sans doute de terribles dégâts
chéologues commencent à peine à explorer les traces dans la société concilienne.
et faits du passé.

Les seules sources d’information sont les chroniques Le calendrier qui suit est basé sur le calen-
écrites et les récits oraux, souvent légendaires. Plus drier de l’Église du Concile, qui note l’an 1 AC
de mille cinq cents ans de destructions et de guerre comme la première année après la création du
ont rendu ces sources floues, erronées ou lacunaires. Concile (AC). La chronologie présente se termine
quelques années avant le début des romans, qui
La grande question est donc : existe-t-il des Lossyans sont considérés comme une histoire alternative,
connaissant la véritable histoire de leur monde ? Oui, et non « canon.
quelques-uns, même si leurs connaissances sont par-
Ref. 14778

AVANT L’HIVER
-2500 à -500 : fondation des
premières colonies lossyannes,
éparpillées autour des Mers
L es Lossyans sont venus des Étoiles. Plus personne n’en doute, même chez les peuples
les plus tribaux et isolés. Le fait que des terriens se retrouvent régulièrement perdus
sur Loss y est pour beaucoup. Cependant, la manière de raconter comment et pourquoi
de la Séparation et au-delà. les Lossyans sont arrivés diffère largement selon les peuples et les croyances. Et même
Domestication des premiers l’Église du Concile ne dit rien à ce sujet, révélant simplement, que comme pour toutes
animaux. les religions et les dieux de Loss, cette décision fut admise avec bienveillance par le
Concile Au-Dessus de Tous, à l’époque silencieux, discret et attentif, qui laissa les dieux
-525 : apparition des chamans, do-
de chaque peuple emmener leurs ouailles sur Loss.
mestication des symbiotes.
-470 : premiers Chanteurs de Loss. Toutes les populations connues de Loss apparurent autour des Mers de la Séparation,
-450 : fondation des premières ci- avec un accès à l’océan. Ce fut une époque difficile, sombre et mythique. C’est durant
tés-États connues dans la région des cette période que furent domestiqués les premiers animaux de Loss, dont le symbiote,
plaines de l’Étéocle. cette créature que nombre de Lossyans portent sur eux. C’est aussi vers la fin de ces pre-
miers âges que fut découvert le loss-métal. Mais bien avant de comprendre son usage et
-410 : fondation d’Antiva.
ses propriétés, c’est pour son interaction avec les Chanteurs de Loss qu’il fut recherché.
-360 : fondation de Parcia.
-240 : découverte du loss-métal.
-217 : fondation du Cercle des
Mages (l’Apolloneïos) à Antiva. L’ÈRE DES MAGICIENS
-165 : premiers mentorats officiels

P
de Chanteurs de Loss par des lusieurs grands États et empires furent finalement fondés, tandis que les hommes
congrégations chamaniques. exploraient et apprenaient à s’adapter à un univers terriblement dangereux et
-104 : premier Chanteur de Loss hostile, mais riche et foisonnant de ressources. Parmi les premières grandes cités de
nommé Glaive (incarnation et dé- l’époque se distinguèrent vite Parcia, Antiva, et Noïqomos. Il ne reste aujourd’hui rien
fenseur) d’une divinité étéoclienne. de ces villes, de leur civilisation et de leur histoire.

En un temps relativement bref, les Chanteurs de Loss, détenteurs de cette faculté à


pouvoir entrer en résonance avec le loss-métal et accomplir des merveilles, devinrent
une arme et un nouveau pouvoir politique, une force mystique puis quasi divine.

Ce fut l’ère des Magiciens et des Dieux. En quelques décennies, les Chanteurs de Loss
furent considérés comme les enfants, les messagers, les détenteurs de l’image divine, venus
sur Loss pour protéger, dominer et guider les hommes. Bientôt, aussi rares fussent-ils
même à l’époque, ces Chanteurs régnèrent sur les peuples de Loss.

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-31 à 0 : Guerres Divines -94 : début de l’Ère des Magiciens


Deux cités au centre de deux grands États entre les Plaines d’Étéocle et le sud de
-82 : les principales cités-États
l’Hégémonie se firent une guerre à outrance dominée par leurs Chanteurs de Loss.
sont de facto dominées par une
Antiva, au Nord, abritait l’Apolloneïos, le plus grand et influent rassemblement de
caste de Chanteurs de Loss : les
Chanteurs de Loss. Au Sud, Parcia, à la tête d’une coalition d’États, dont la championne
Glaives.
et chef militaire des armées coalisées, Orchys Athysmante de Parcia, était considérée
l’incarnation d’Athéna. -64 : premier schisme des cha-
mans. Brève guerre civile à
La légende raconte que l’épuisement gagnait toutes les cités dévastées par le conflit Noïqomos.
et qu’Antiva et ses alliés ne cédaient pas. Orchys Athysmante de Parcia trahit alors les -48 : second schisme chamanique.
dieux eux-mêmes. Elle offrit son âme aux Enfers et apprit en échange le Chant des Extermination de la mégafaune de
Abîmes. Antiva subit ce dernier de plein fouet et fut rasée en une fois, engloutie dans l’Étéocle par les Chanteurs de Loss.
un cratère immense. Mais le cataclysme emporte Orchys et ses armées, et toute la région Nombre de chamans se réfugient
sur une centaine de lieues. dans les Neiges-Dragon.
-19 : Orchys Athysmante est nom-
0 : Destruction d’Antiva, Long-Hiver mé Glaive d’Athéna et prend la tête
de la Coalition de Parcia.
La destruction d’Antiva provoqua la plus incontrôlable des terreurs. On sacrifia des
esclaves, hommes et femmes, en masse aux dieux. Des communautés entières implo- -3 : Bataille Céleste
sèrent, s’isolèrent ou se suicidèrent, des cités furent abandonnées du jour au lendemain.
Le chaos dura jusqu’en 28 AC.

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LA NAISSANCE DU CONCILE
An 1 AC (Âge du Concile) :: date
référence du calendrier du Concile.
An 6 : Fin du Long-Hiver S i les Lossyans eurent un doute que les dieux eux-mêmes avaient été trahis, et que
leur colère s’abattait sur le monde, ils n’en eurent plus du tout quand commença le
Long-Hiver qui dura six ans : l’hiver durait plus de six mois. Le ciel ne se découvrait
41 : première rédaction des Dogmes presque jamais et l’été disparut. À la seconde année, les famines commencèrent, avec les
de l’Église. épidémies. La guerre n’avait pas cessé, ni ses ravages, mais elles se livraient désormais
62 : la foi du Concile se répand dans pour la survie.
toute la côte nord des Mers de la
Séparation. Les Lossyans eurent beau supplier leurs dieux, le printemps ne revint pas avant six ans,
72 : premières légions d’Ordinatorii annihilant des cités et des peuples entiers jetés sur les pistes d’un monde hostile où les
pour la défense de l’Église. prédateurs aussi souffraient et avaient faim. Ce fut une ère sombre, qui mit fin à tout
règne de la magie, et des Chanteurs. Ils furent maudits, haïs, et les rares survivants ne
97 : Anqimenès se déclare capi- vécurent pas longtemps dans un univers qui les avait bannis. C’est dans ce monde aux
tale de l’Hégémonie et Cité Sainte repères perdus, un an avant la fin de l’hiver, qu’apparurent les premiers prophètes du
du Concile. Concile au Dessus de Tous.
98 : Asharon meurt sans avoir
choisi de successeur, réunions du
Synode Premier d’où émerge la hié- 11 à 28 : La Grande Purge
rarchie moderne de l’Église et trois La nouvelle était connue que le Long-Hiver et les nombreuses autres destructions étaient
prophètes à pouvoirs égaux. le fait des Chanteurs de Loss. Rapidement, les Lossyans considérèrent les Chanteurs
114 : premier traité écrit sur le Haut- comme des démons. Ils les traquèrent, les détruisirent, eux, leurs alliés, leurs proches,
Art dont la technique se répand. leur famille et finalement toute personne qui était suspectée être Chanteur. Loss sombra
dans une guerre fratricide et une chasse aux sorcières qui ravagea même les chamans.
135 : second Synode, déclaration On nomme cette période la Grande Purge et ce nom fait toujours frémir les Lossyans.
des chamans hérétiques. Les pre-
miers pourchassés seront les

L’EXPANSION DE L’HÉGÉMONIE
Svatnaz.
201 : début du premier conflit entre
l’Hégémonie et les Dragensmanns.

L ’Église du Concile profite de l’état de délabrement des peuples de Loss pour asseoir
son autorité par son organisation et sa stabilité rassurante et efficace ; elle est le bon
outil, au bon endroit — Anqimenès en avait vraiment besoin — et au bon moment, tel
que le prétendaient les premiers prophètes du Concile.

Ce ne fut pas simple. Le Concile remit totalement en question les anciennes croyances,
codes et foi des Lossyans. De plus, ses dogmes ne prêchaient ni amour, ni paix, mais

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231 : Anqimenès se déclare


une philosophie apparentée au légisme, qui peut se résumer par : « l’ordre par la force hégémonienne.
et l’autorité ». 325 : premiers navires à lévitation
inventés par l’Imareth.
Bon an, mal an, en même temps que se rebâtissaient les villes, les ports, et les temples,
le Concile étendit son influence et un modèle de civilisation moderne et efficace. 363 : reprise des conflits entre
Cela ne se fit pas sans nombre de guerres, massacres et drames de tous bords. Mais clans dragensmanns soutenant
toujours les prophètes du Concile étaient protégés par leurs gardiens invisibles et Nashera et l’Hégémonie.
mortels, les Thanataires. 368 : le Trône de Rubis embrasse
la foi du Concile Divin. L’Hemlaris
Pendant les siècles suivants commencèrent de grandes campagnes militaires où les est rapidement converti.
Ordinatorii répandirent leur Église par la foi et la force. L’esclavagisme passa de simple 380 : l’Hemlaris dresse la pre-
coutume à un art sacralisé. Avant tout créé pour mettre les Chanteurs de Loss sous mière carte complète des Mers de
contrôle, il va se répandre partout sous sa forme connue : Le Haut-Art. la Séparation.

Le modèle patriarcal dur de l’Église se répand comme ses Dogmes qui deviennent un 394 : la technologie des navires lé-
code de loi. L’Église convertit une grande partie des Mers de la Séparation ; de gré, ou vitants se répand.
de force. 412 : scission religieuse à Anqimenès
entraînant une guerre civile qui finit
dans un bain de sang après l’as-
209 à 219 : Guerre des Braises sassinat de Peregaïus, un des pro-
Conflit entre l’Hégémonie et les Dragensmanns qui protègent leurs chamans. Destruction phètes de l’Église. Retrait partiel de
de nombreux clans dragensmanns, mais la guerre s’achève en statu quo. l’Hégémonie des frontières sud de
l’Étéocle.

361 à 372 : Guerre d’Étéocle 422 : premières bombardes à im-


pulsion, apparition des moteurs à
L’Église déclare Nashera et ses citées alliées hérétiques après un incident religieux. lévitation pour la construction.
Nashera accepte de se soumettre à la religion du Concile Divin, mais contre toute
attente, l’Hégémonie lui déclare quand même la guerre.

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LA GUERRE DES APOSTATS


452 : près de 15 légions se dirigent
vers le sud de l’Étéocle. Premiers
conflits avec les cités et commu-
D ans sa conquête des provinces des Plaines d’Étéocle, les Ordinatorii poussèrent les
barbares hérétiques que l’on nomme les Jemmaïs jusqu’au sud-ouest, à la limite du
Rift vers 380 AC. Cet enfer acquit vite la réputation d’être le seul refuge pour qui voulait
nautés de passage qui ne peuvent fuir l’Église du Concile. Par la suite, l’Athémaïs, l’Ereb’heïm et les Franges s’avérèrent
ni ne veulent fournir la Croisade plus accessibles pour des réfugiés.
en ravitaillements.
560 : conflits maritimes entre Les Jemmaïs refondèrent dans Jemmaï-he’Jil une nation tribale très solidaire sur des
l’Hégémonie et l’Hemlaris pour le terres arides et inhospitalières. L’adaptation à leur nouvelle patrie les endurcit encore
contrôle des routes commerciales plus qu’ils ne l’étaient, tout en accueillant les réfugiés des exactions de l’Église. Mais
le long des côtes est des Mers de cette dernière, appuyée par l’Hégémonie qui pense avoir une mainmise confortable sur
la Séparation l’immense territoire des Plaines d’Étéocle, veut détruire une fois pour toutes l’hérésie
qui prospère dans le Rift et résiste par la violence à toute conversion.
455 : bataille de Haut-Mur.
458 : bataille de Scarla. Les Jemmaïs
déploient les premiers mousquets à 449 à 556 : Première Croisade
impulsion connus et des unités de La première croisade de l’Église du Concile est lancée : six légions de l’Église, six de
Chanteurs de guerre. l’Hégémonie, et trois des cités d’Étéocle. Pratiquement 80 000 soldats sont rassemblés
466 : bataille des quatre rivières. pour écraser les Jemmaïs.
Trois légions hégémoniennes et
étéocliennes sont écrasées dans Les 15 légions en marche demandent pratiquement le double en escorte de ravitaillement
les forêts du Darmos par les et l’intendance ne suit pas, car le sud de l’Étéocle, en proie à des désordres civils, n’est
Dragensmanns et Forestiers aidés pas en mesure d’alimenter une telle masse, malgré une flotte navale conséquente. Ce
de troupeaux d’animaux sous in- grave problème essentiel va être à la source de la Guerre Sans Fin ni Frontières.
fluence chamanique.
473 : bataille du Détroit des 464 à 549 : Guerre sans Fin ni Frontières
Céramides, la première bataille Également nommée la Guerre des Apostats, durant laquelle les Jemmaïs et leurs récents
connue de navires lévitants. alliés réfugiés que l’on va connaître sous le nom d’Apostats vont profiter de la tension ac-
480 : le fusil à impulsion est géné- crue par les exactions de la Croisade dans les Plaines de l’Étéocle avec une remarquable
ralisé dans la plupart des armées. finesse politique. Avec l’aide de l’aristocratie et de l’élite intellectuelle étéoclienne, ils
n’eurent aucun mal à convaincre les cités-États sous le joug des Hégémoniens (qui les
pillaient littéralement) de former une coalition. Et ils lui apportèrent leurs hommes,
leurs armes, leur expérience de la guérilla et une autre arme, plus terrible encore : des
Chanteurs de Loss. La guerre va pratiquement durer un siècle.

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547 à 553 : Première épidémie de Rage 513 : seconde bataille de Scarla, le


La Rage apparaît à Haut-Mur et se répand à une vitesse fulgurante. Seuls les Lossyans siège de la cité, devenue un mur
portant un symbiote sont épargnés, mais ils doivent se battre contre les Enragés qui se de tranchées sur près de 200 km
changent en hordes folles et meurtrières. La maladie va décimer tout l’Étéocle, l’Hégé- ne progresse pas. Première vague
monie, dévaster le peuple des Forestiers puis tout le sud des Neiges-Dragon, atteindre d’exilés s’installant dans l’Athémaïs.
l’Imareth et enfin Terancha et les archipels san’eshe. Il faudra plusieurs décennies pour 530 : trêves informelles sur le sud
que les peuples touchés s’en remettent et on estime qu’environ 15 % de la population de l’Étéocle, émaillées de soulève-
des Mers de la Séparation est décédée. ment et de conflits mineurs, plu-
sieurs années de famine forcent les
armées de tous les camps à réduire
effectifs et campagnes.
545 : la croisade contre les Apostats
reprend, une flotte aéronavale brise
les lignes du mur de Scarpa. Le
conflit redouble de violence.
551 : chaos généralisé dû à la Rage,
cette dernière tuera le Prophète
Acturus.
556 : disparition des Apostats qui
se séparent des Jemmaïs. 571 : pre-
mier traité d’astronomie écrite par
Ankeserios dit Le Messin, qui des-
sine une théorie héliocentriste du
système solaire.
584 : création des Lincis, les sym-
biotes d’esclaves.
595 : l’Hégémonie renforce ses posi-
tions territoriales dans les Marches.

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LES GUERRES D’EMPIRES


601 : mort douteuse du Prophète
Anatin. Son remplaçant, Electus,
convainc ses confrères de décla-
L ’Hemlaris, aussi appelé l’Empire du Trône de Rubis représenta rapidement le seul
concurrent de poids à l’Hégémonie, lui faisant obstacle dans son expansion et dis-
putant le contrôle des Marches de Gennema. L’Hégémonie ne manqua pas l’occasion
rer l’Hemlaris hérétique en vertu de se lancer dans une nouvelle guerre quand l’empereur fit valider le Mandat Divin, un
de sa foi du Mandat Divin. Appel traité désignant tout empereur comme légataire direct de l’autorité divine du Concile.
à la croisade. Une hérésie qui tomba à point nommé pour lancer une croisade et celles qui suivraient.
638 : invention de la poudre noire,
immédiatement déclarée héré- Face aux légions de l’Hégémonie, celles de l’Hemlaris, bien que largement inférieures
tique. Mais sa formule est pourtant en nombre, s’avérèrent plus motivées et fanatisées encore. Un Guerrier de l’Empereur
répandue, même dans l’Église. ne se rend jamais, la notion même de défaite sans mort lui est inconnue. Mais pas celle
de la ruse, et la tactique de combat mobile de ces unités de cavalerie compensait en
651 : invention du linotorci à Nashera, grande partie leur infériorité numérique et matérielle. Ce qui devait être une guerre
qui se répand dans l’Hégémonie. facile devint une suite de conflits sanglants mus par une haine mutuelle grandissante
712 : la Guilde des Marchands ré- que rien ne pourrait tarir.
pand dans la société civile les tech-
niques du Haut-Art et commence
à prendre le contrôle du marché 603 à 604 : Première croisade
des esclaves dans tout le sud des La première croisade s’achève par un massacre à la bataille de Haïcan. Les Guerriers
Mers de la Séparation. de l’Empereur sont menés par des généraux tacticiens hors pair. L’Hégémonie prend la
735 : la Nuit de Feu. Une nuée de mesure de la redoutable efficacité des techniques de combat moderne de son adversaire.
météores bombarde une zone al-
lant du golfe de l’Étéocle jusqu’aux 621 à 628 : Deuxième croisade
Hautes-marches, provoquant chaos,
destructions et panique, puis deux Assistée de troupes étéocliennes, la seconde croisade finit par s’enliser en batailles d’es-
ans de récoltes faibles et de famine. carmouches, l’Hégémonie finit par perdre le contrôle quand les Gennemons se rebellent
et les repoussent. L’Hemlaris annexe le sud des Marches de Gennema.
745 : expansion des mécaniques
éoliennes et hydrauliques dans
l’Athémaïs, grâce à l’inventeur 662 à 677 : Troisième croisade
Mulhad de Saniro Une flotte puissante attaque directement l’Empire du Trône de Rubis, appuyée par une
flotte aéronavale. Les troupes hemlaris sont repoussées par des Ordinatorii mobiles et
bien protégés, appuyés par des navires lévitants et des canons-impulseurs employés en
ligne de barrage. Cymiad est occupée et pillée avant qu’une contre-offensive maritime
et terrestre de l’Hemlaris appuyée de flottes mercenaires teranchen et d’Imareth ne force
la Croisade à faire retraite.

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677 à 685 : Guerres civiles hégémoniennes 770 : l’Église ordonne à l’Hemlaris


Des tensions entre l’Église et les cités-États de l’Hégémonie, épuisées par les guerres de renoncer à l’Hérésie du Mandat
incessantes, explosent en révoltes violentes ; plusieurs légions locales se retournent Divin. En retour, l’Empereur fait
contre l’Église. La guerre civile dans l’Hégémonie prend fin après la mort inexpliquée chasser et exécuter une partie des
de deux prophètes, dont l’héritier d’Electus. Beaucoup y voient un signe religieux fort. autorités de l’Église à Cymiad.
802 : Synode de l’Église, nombreux
771 à 782 : Quatrième croisade appels à l’unité et à la paix, mais que
les Prophètes rejetteront. Révision et
Celle-ci met du temps à se rassembler. L’Athémaïs et Terancha refusent d’y participer, durcissement des Dogmes.
l’Imareth envoie quelques navires pour la forme. Le conflit tourne rapidement en guerre
de harcèlement maritime. L’Hégémonie finit par abandonner le port de Hang-Boda. Fin 832 : Dragensvard manque de tom-
de la quatrième croisade, mais les raids et batailles navales ne cesseront pas pendant ber face à des légions transportées
les vingt années suivantes. par navire lévitant et escortées par
les premiers Béhémoths. L’assaut
tourne court sous une contre-of-
829 à 841 : Guerre des pirates fensive de monteurs de dragens,
Mélisaren et des alliés du sud des Plaines de l’Étéocle lancent une guerre maritime pour mais les pertes sont terribles.
mettre fin aux pillages et pirateries de l’Imareth qui met fin à la guerre en payant de 889 : découverte du titane.
très lourds tributs à Mélisaren et ses alliés, mais pillera les routes maritimes de Nashera 905 : l’Église renonce à déclarer
pendant des années. Mélisaren et ses alliés ferment les yeux. Nashera et Allenys entrent hérétiques les cités-États refusant
en guerre contre l’Imareth pour mettre fin aux pillages de leurs routes commerciales. de participer à la Croisade, à l’ex-
S’ensuivent 25 ans de batailles navales et de sièges de ports incessants. La Guilde des ception d’Armanth et Khoïemonos.
Marchands intervient pour parvenir à un accord de paix entre l’Imareth et ses adver-
saires, court-circuitant le plan d’alliance de l’Hégémonie avec Nashera pour envahir l’île. 912 : découverte du Labyrinthe
sous Armanth. Dans les années
qui suivent, explosion d’apports
902 à 910 : Cinquième croisade technologiques et premières dé-
La Cinquième Croisade Hemlaris débute poussivement, mais rassemble une force consé- couvertes de la dynamo à Loss.
quente. Cependant, ni Terancha, ni l’Imareth, ni l’Athémaïs ne veulent y participer, sous Armanth commence à lancer des
la pression de la Guilde des Marchands. Pareillement pour une partie des Cités-Unies missions d’exploration des ruines
et tout le sud de l’Étéocle. La totalité du golfe d’Haïcan et ses cités-États est occupée. des Anciens.
Pillages et destructions massives, explosion du trafic d’esclave dans la plus grande
capture de masse de l’histoire de Loss.

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L’ESSOR D’ARMANTH
927 : fondation de l’Enclave.
Exploitation des jungles san’eshe,
non sans mal. V ers 460 AC, un petit groupe de réfugiés s’installait sur la lagune marécageuse d’un
fleuve turbulent, l’Argas. Ils fondèrent un petit port de commerce local, surtout
de bois flotté. C’est ainsi que naquit Armanth. La Guilde des Marchands cherchait une
937 : Armanth devient la capitale
officielle de l’Athémaïs. ville où s’établir loin des conflits qui s’enlisaient entre les clans des mers de Terancha, et
Allenys et ses Cités-Unies. Elle vint donc y investir et utilisa son réseau de caravanes et
941 : mort de l’empereur de l’Hemla- de routes maritimes pour concentrer sur Armanth ses activités de négoce d’esclaves dont
ris sans aucun héritier mâle en âge Armanth arracha le monopole à l’Église pour en devenir la plaque tournante actuelle.
de gouverner. Pour la première fois
de son histoire, l’Empire du Trône À partir de 650 AC, Armanth était la principale destination d’une immigration de po-
de Rubis a une impératrice. pulations persécutées, avant de devenir le havre des intellectuels, des libres penseurs, et
948 : le plus important dépla- des femmes fuyant l’Église. Elle fut plusieurs fois assaillie par ses voisins athémaïs et fut
cement de troupe de l’histoire même pillée plusieurs fois, avant d’être considérée comme une de leurs cités-États, ce
conduit à une invasion massive et qui lui rapporta une richesse bienvenue. Malgré ses déboires, rien ne freina plus la crois-
la prise de Cymiad en moins de six sance d’Armanth qui étendit son influence dans tout le sud des Mers de la Séparation.
mois, mais à des coûts humains et
matériels inimaginables.
915 à 915 : Sixième croisade contre l’Hemlaris
952 : La Guerre de la Croisade se
transforme en série de batailles Après la bataille de Guaning, nombre de troupes engagées de force se retirent de la
de mouvement, sur terre et sur Croisade. L’Hemlaris a déployé ses propres béhémoths et unités de cavalerie et d’ar-
mer. L’Hégémonie doit abandon- tillerie lourde dans un combat où les Guerriers de l’Empereur se moquent de leurs
ner Cymiad, tandis que les pertes propres pertes.
augmentent en nombre.
946 à 963 : Septième croisade contre l’Hemlaris
Coup d’État de l’Église après la septième tentative d’assassinat de l’impératrice. Il
échoue quand deux légions de l’Église la trahissent et forme la Garde du Mandat Divin
en prêtant allégeance à au Trône de Rubis. Une invasion coordonnée de troupes hemla-
ris, appuyée par les Gennemons et des flottes teranchen libère tout le golfe d’Haïcan
occupé par l’Hégémonie. Reprise de la guerre et déclaration de la Septième Croisade.

954 à 955 : Bataille de Feri


Les Cités-Unies qui avaient répondu à la Croisade s’effondrent en guerre civile. Après
la libération de Cymiad, brièvement occupée par l’Hégémonie, une flotte coalisée com-
prenant quasi tous les états du sud des Mers de la Séparation s’attaque directement aux
villes côtières entourant l’Hégémonie. Une bataille navale au large d’Equerius implique

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962 : Armanth dépasse amplement


près de 2000 navires de toutes tailles. Destructions massives, pillages et incendies sur le demi-million d’habitants et pros-
toutes les côtes. père dans une situation de guerre
généralisée.

956 : Batailles des Six drapeaux 967 : signatures de traités de paix


entre l’Hégémonie et l’Hemlaris.
Entre Anqimenès et Equerius ont lieu sept jours de bataille de mouvement entre toutes L’Empire du Trône de Rubis ac-
les armées hégémoniennes, les troupes de l’Hemlaris et des Gennemons, et les mer- cepte des conditions de contrats
cenaires dragensmanns appuyés par des flottes mercenaires Imareth, Teranchens et commerciaux très désavantageux,
Athémaïs. Des rumeurs prétendent qu’on y a même vu trois béhémoths jemmaïs. pour payer sa dette à Armanth.
970 : les Cités-Unies s’accordent

ET APRÈS ?
à nouveau pour une paix et une
alliance durables après vingt ans
de guerre civile.

E t après, vous appartient. Mais quelques événements sont évidents : les tensions
entre les deux empires, et l’Église et l’Hérésie d’Hemlaris sont devenues une haine
ancestrale et aveugle. Armanth, bien que moins puissante militairement, est en train de
973 : les prisonniers ordinatorii
d’Armanth sont rendus à l’Hégé-
monie qui accepte de signer un
gagner en influence à un degré tel que celle-ci va finir par supplanter l’autorité d’Anqi- accord de paix.
menès sur les Mers de la Séparation. À un moment, l’Hégémonie conclura que pour
envahir et soumettre l’Hemlaris, il faut détruire Armanth. Et elle en a les moyens, il lui
suffit de réarmer et de former ses troupes.

Entretemps, l’Athémaïs essaye d’explorer et agrandir la carte du monde, par terre et


par mer. Au sud, par-delà le désert des Franges, il y a encore plus de déserts, bar-
rant le continent. Mais il y a d’autres peuples inconnus et ce n’est vraiment pas une
bonne nouvelle. Du côté de l’Hemlaris, on fait de même par-delà les montagnes du
Nevertsguïkhana, où vivent là aussi d’autres peuples.

Enfin, les Dragensmanns et leur exploration des terres inconnues par-delà le Mares
Avisen vont faire face aux secrets des Anciens, autrement plus dangereux que tout ce que
les Lossyans n’ont jamais affronté. Et rencontrer un étrange allié possible : les Apostats
qui, en silence et depuis 500 ans, fondent leur propre monde.

Finalement, terriblement isolée, l’Hégémonie n’a que la conquête pour son expansion.
Et elle ne connaît que cela. Mais qui sait pourquoi l’Église, elle aussi, souhaite conquérir
le monde entier ? Est-ce pour une question de foi ? Ou pour autre chose ?

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CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

— Ce n’est donc plus un démon Chanteur de Loss ?


— Ça ne l’a jamais été à mes yeux. J’en ai vu des démons, des vrais. Ils sont humains ; ils ont perdu toutes
leurs Vertus, devenus fous par goût du sang, du vice, du pouvoir et de l’or. Ils sont démons par leurs actes, non
leur nature. Elle, elle n’est qu’une gamine née avec un pouvoir maudit et elle n’a fait qu’en user pour sauver des
gens. D’ailleurs… pourquoi a-t-elle pris ce risque d’user de son pouvoir de Chanteuse ? On sait bien que tu ne lui
as jamais donné cet ordre.
— Parce qu’elle le pouvait. Et je ne lui ai jamais interdit de le faire.

Les Chants de Loss, Mélisaren

LES VERTUS
L es Lossyans ne considèrent en général que trois
éléments constitutifs du monde, et trois vertus :
La Terre qui est l’Honneur, le Feu qui est le Courage,
rés par la collectivité, on le perd par des humiliations
que les siens réprouvent. Des trois vertus, l’Honneur
est la plus visible, et la plus publique, elle ne peut
et l’Eau qui est la Sagesse. Il reste une vertu, perdue être cachée ou secrète.
depuis longtemps, comme son élément, l’Air qui est
la Foi. L’air est partout, mais invisible, il n’est plus L’Honneur est ce qui définit un Lossyan socialement.
considéré comme un élément, sauf pour les alchi- Sans honneur, il n’a plus de parole et ne peut être
mistes. Quant à la Foi, nous y reviendrons à la fin considéré de confiance ou fiable : c’est un infâme,
de ce chapitre. un vil. On ne le soutiendra plus et il sera honni,
méprisé, et rejeté des siens, jusqu’à l’ostracisme et
Selon les peuples, il y a quatre, voire cinq éléments au mépris.
ou plus, y compris le bois, le métal, ou encore le
vide. Mais cette approche des Trois Vertus est an- L’Honneur étant une vertu sociale et publique,
cienne, bien antérieure à l’Église. Le respect los- elle dépend de la culture d’origine du personnage,
syan des Trois Vertus est si fort qu’il surpasse les mais les principes suivants sont considérés par tous
règles religieuses et est intégré dans toutes les cou- comme honorables :
tumes et lois. Il définit la notion d’humanité. Être
privé ou dépourvu d’une de ces trois Vertus, c’est La parole donnée ne se reprend pas : jurer, pro-
être plus animal qu’humain et surtout ne plus pou- mettre, ou passer un marché ne se défait pas sans
voir prétendre aux droits universels des Lossyans. l’accord de la personne concernée. Trahir un ser-
Même les peuples les plus exotiques ou barbares ment ou un marché est une terrible offense pour
respectent ces principes, partout autour des Mers un Lossyan.
de la Séparation, et on ne connaît aucun peuple qui
n’y adhère pas. Ne servir qu’un maître : un Lossyan n’accepte qu’une
seule allégeance à la fois. S’il sert un seigneur, un
Nous allons décrire en détail ces Vertus, ciment social patron, ou un protégé, il n’a plus d’autre allégeance
et moral des Lossyans. que celle-ci et il ne la trahira jamais. Trahir son al-
légeance est une offense impardonnable pour un
Lossyan.

Assumer ses actes, endosser sa responsabilité : com-


mettre une erreur, un délit, ou un crime est de la
seule responsabilité du fautif, y compris par négli-
gence ou imprudence, même s’il est la victime. La
responsabilité individuelle passe avant les règles, les
lois et les décrets. Ainsi on ne plaint guère quelqu’un
sur Loss de devoir payer les conséquences de ses
L’HONNEUR, LA TERRE actes. Nier sa responsabilité, ou pire encore, mentir
ou tenter de tricher pour rejeter la faute sur autrui
La Terre est la stabilité, la droiture, l’assurance, la est un déshonneur.
source de la naissance et du foyer. Elle est l’Honneur :
l’Honneur est le fait d’agir en priorité en vertu de ses Souffrir sans se plaindre, mourir sans supplier :
convictions, en lien avec les principes partagés par en être capable est grandement respecté par les
son groupe, son peuple, les croyants de sa religion. Lossyans, qui mépriseront facilement ceux qui lar-
L’Honneur est un code de conduite qui est partagé moient et supplient, d’autant plus si ces derniers
par la communauté : on le gagne par des actes admi- sont des combattants.

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Ref. 14778
LES VERTUS

Ouvrir sa porte à l’étranger, respecter la maison de pas aisément, car il faut une situation de danger et
l’hôte : respecter les codes et les principes de l’hos- la nécessité déterminée de surmonter la peur, pour
pitalité. Les Lossyans partagent toujours la soupe, voir apparaître le Courage.
un coin-de-feu et une paillasse pour le voyageur.
Celui-ci sera d’autant plus honoré si en échange, Le Courage est une vertu très respectée des
il rend service, ou laisse un présent, même symbo- Lossyans. Il est honorable pour eux de faire front
lique, pour ses hôtes. Ne pas ouvrir sa porte à un au danger quand c’est nécessaire, et faire preuve de
voyageur est très mal vu, même si dans les lieux les lâcheté est le signe d’une faiblesse impardonnable.
plus reculés ou encore en temps de guerre, c’est une Quelques points de la notion de Courage sont uni-
règle peu respectée. versels sur Loss :

Ne pas laisser une offense impunie : la notion d’of- Ne pas craindre la mort : c’est une constante de la
fense dépend de la susceptibilité de la victime et mentalité lossyanne : la mort vient pour tous, et la
de la gravité du crime. Les Lossyans peuvent très craindre, supplier, et se plaindre est une preuve de
bien s’insulter comme des charretiers ou s’arnaquer lâcheté devant l’ultime épreuve de tout être vivant.
mutuellement sans en prendre ombrage, alors que Pour autant, tous les Lossyans feront de leur mieux
d’autres prendront comme offense un regard trop pour rester en vie. Aller au-devant de la mort est
insistant. Mais quand un Lossyan subit une offense, pour eux un gâchis et, dans certains cas, un ultime
il doit la faire payer, surtout si elle eut lieu en public. déshonneur. Le suicide, sauf pour un mourant ou une
Un homme peut très vite perdre la face à ne pas ré- personne totalement déshonorée et rejetée par tous,
pondre à une offense, d’autant plus qu’elle est grave paraît inexplicable.
et connue. Il est rare que la réparation débouche sur
la mort, mais cela arrive. Être stoïque face à la souffrance : les Lossyans
trouvent lâche de supplier et de se plaindre de ses
Respecter la vie, d’autant plus qu’elle est jeune : souffrances. Les larmes comme expression des émo-
les Lossyans n’aiment guère tuer et s’ils peuvent tions sont tout à fait naturelles pour eux et il y en a
régler le problème autrement, ils vont préférer trou- même qui regarderaient étrangement un homme qui
ver une alternative, y compris les travaux forcés et ne verserait pas de larmes à la mort d’un proche ou à
l’asservissement. Les massacres gratuits, tortures et des retrouvailles émouvantes. Mais il faut se montrer
crimes sadiques sont mal vus. Et plus particulière- stoïque devant la douleur et démontrer qu’on a le
ment, les Lossyans considèrent les enfants sacrés : courage de l’endosser sans se plaindre.
s’attaquer à des enfants ou les tuer est absolument
impardonnable. Affronter l’ennemi : un Lossyan ne fuit pas en lâ-
chant ses armes sur le champ de bataille. C’est une
Obéir à l’Église du Concile : même si c’est très démonstration de faiblesse impardonnable. Les
loin d’être une constante, la majorité des Lossyans Lossyans font tout pour ne pas fuir ou se rendre
sont superstitieusement respectueux de l’Église du sans avoir combattu jusqu’au bout. Mais ils savent
Concile, et de ses représentants, les Ordinatorii. faire retraite et se rendre si la situation est désespérée
Même si c’est dans les faits très largement contre- ou que la défaite est évidente. Face avec un homme
dit, tout Lossyan considère honorable de respecter menaçant, un Lossyan fera front sans reculer. Il ne
un Ordinatori. L’idée qu’on puisse les agresser est laissera pas non plus une victime se faire molester
effrayante pour la plupart des Lossyans. sans intervenir.

Explorer des voies nouvelles : les Lossyans sont


superstitieux ; de plus, les Dogmes du Concile
considèrent comme hérétiques certains domaines
de recherche, comme l’étude des Artefacts et des
Anciens. Il est pourtant vertueux pour un Lossyan
d’aller explorer l’inconnu. La curiosité et la soif de
découverte sont importantes, même si cela veut dire
défier l’Église.

LE COURAGE, LE FEU Faire face au danger pour les autres : les Lossyans
font de leur mieux pour se porter au secours des
Le feu est l’énergie, la vivacité, la force et la renais- leurs en danger et tenteront quoi qu’il arrive d’inter-
sance ; c’est le Courage. Le Courage est le fait de sur- venir et de leur prêter main-forte dans la mesure de
monter sa peur pour faire face au danger. Le Courage leurs moyens. Face aux périls du monde dangereux
nécessite la peur, car c’est d’elle que naît la vertu de et cruel qu’est Loss, le courage est de prendre aus-
Courage, au contraire de l’audace ou de la témérité, si le risque de tendre la main, et d’offrir son aide,
qui sont dictées par le désir, l’envie, l’orgueil ou le même à son ennemi.
manque d’instinct de survie. Le courage ne se devine

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Ref. 14778

Tuer quand il faut tuer, épargner quand on le peut : C’est une vertu qui s’identifie vite, malgré son carac-
le courage c’est aussi de choisir quand donner la tère intime.
mort, ou pas. Il est dit qu’il est parfois plus cou-
rageux d’épargner un ennemi que de l’achever. De L’homme sans sagesse est impulsif, sanguin et colé-
même, donner la mort est un acte de charité qui rique, il est irréfléchi, et doit endosser plus que tout
doit être assumé : si un être est en proie à la plus autre les conséquences de ses décisions malavisées.
grande détresse, physique, ou morale, le Lossyan Les Lossyans n’hésiteront plus à le traiter de sot, et
considérera que l’acte le plus charitable sera de lui ne lui accorderont aucun crédit. Voici les quelques
donner la mort. points universels de la sagesse vue par les Lossyans :

Réfléchir avant d’agir : le Lossyan sage se remarque


par sa capacité à temporiser ses actes afin d’en peser
les conséquences et anticiper celles-ci. Ce qui est
aussi la qualité d’un homme rusé ou d’un stratège,
qui doit décider de ses choix et réfléchir d’avance aux
conséquences qui en découleront.

Écouter avant de parler : un homme sage sera bien


avisé d’écouter son interlocuteur afin d’en apprendre
LA SAGESSE, L’EAU plus sur ses réelles intentions ou la situation. C’est
une qualité importante pour les plus sagaces des
L’eau est le calme, le mouvement incoercible qui hommes politiques, mais aussi pour les plus prudents
contourne tous les obstacles, le miroir qui reflète le et malins des esclaves.
soi, la profondeur des abîmes, la sérénité de la force
qui prend son temps pour abattre les plus solides Choisir ses mots, car les mots sont le pouvoir : les
fondations. Elle est la Sagesse. La Sagesse est le fait Lossyans ont coutume de dire qu’une flèche peut
de se conformer à une éthique, souvent partagée par percer un cœur, mais qu’un discours peut en toucher
sa communauté, qui allie la conscience de soi et des mille. L’art de discourir et maîtriser la rhétorique
autres à la tempérance, la prudence réfléchie, la sin- peut changer le destin d’une cité, et un homme sage
cérité et le discernement, afin de fonder un jugement sera avisé de savoir choisir ses mots et être prudent
basé sur une vision éclairée et raisonnée des choses. de leur usage. Les Lossyans respectent beaucoup l’art
du discours, et ont tous conscience de son pouvoir.

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Ref. 14778
LES VERTUS

Enseigner et transmettre : la sagesse est aussi de Mais pour qui connaît la Foi, elle est au-delà de toutes
donner aux autres de quoi apprendre. L’homme les vertus, elle est la confiance absolue et aveugle. Elle
sage transmet son savoir et sa vision éclairée du est le sacrifice et la dévotion et finalement, elle touche
monde. Les Lossyans disent de la sagesse qu’elle est du doigt aux essences mêmes de la spiritualité et du
le seul trésor dont la valeur grandit d’autant qu’il don de soi. Elle est l’Amour inconditionnel.
est distribué.
C’est une Vertu incompréhensible pour la plupart
Rester l’esprit ouvert : l’homme sage apprend tou- des Lossyans. L’idée même que la confiance, le sa-
jours, y compris les idées novatrices, pour peu crifice et l’amour, dépassent les vertus et se change
qu’elles soient d’apparence raisonnable. Un homme en don absolu de soi leur est étrangère et même
sage sait qu’il y a toujours à apprendre des autres, hérétique vis-à-vis de concepts ou divinités immaté-
que ce soit de leurs réussites ou de leurs échecs. Un riels. Cependant, pour certains peuples, comme les
homme sage est donc toujours porté à écouter les Dragensmanns, les Erebs ou les San’eshe, le concept
idées nouvelles. ne les surprend pas, de la part de leurs prêtres, cha-
mans, et ascètes les plus dévoués.
Ne jamais rien croire acquit : le dernier principe
de la sagesse est de ne pas rester convaincu de ses Voici quelques-uns des principes généraux de la Foi :
connaissances et avis. Un homme sage admet de se
remettre en question afin d’être toujours amené à Donner sans attendre à recevoir : la Foi n’attend pas
réfléchir et remettre en doute ses propres acquis. de récompense. Celui qui suit cette vertu ne peut
C’est un trait dangereux et qu’un homme d’autant concevoir l’idée de demander que lui soient rendus
plus avisé usera avec discernement et discrétion. les fruits de sa dévotion, de son amour et de ses
Car remettre en doute les choses peut amener à actes de foi. Si, bien sûr, il peut souhaiter attirer la
remettre en doute les Préceptes Sacrés de l’Église considération de l’objet de sa ferveur, il n’attend pas
du Concile. que celui-ci le gratifie en retour.

Aimer sans compter : il n’y a ni limite ni décompte


aux actes de dévotion et d’amour que le Lossyan
est capable de faire envers l’objet de sa Foi. Il aime
et vénère sincèrement et sans le moindre doute. Le
Lossyan ne regardera pas quel prix il paye pour ai-
mer et vénérer.

Faire une confiance aveugle : tout ce qui vient de l’ob-


jet de sa Foi ne peut être remis en doute, quels que
L’AIR, LA FOI - LA VERTU PERDUE soient ses commandements, ses actes, ses intentions.
Le Lossyan suivant cette Vertu ne pourrait imagi-
Avant le Long-Hiver, il y avait donc quatre éléments, ner douter de l’objet de son amour inconditionnel
et quatre Vertus. Et la quatrième, désormais perdue, et ne pourra réaliser aisément si celui-ci lui ment, le
était l’Air : la Foi. Pour les Lossyans, il n’y a désormais trompe, ou agit contre son bien.
que trois éléments, car l’air ne compte pas, puisqu’il
ne se voit pas ; il est un peu comme le vide, le néant, Accepter de tout risquer : les risques à prendre
quelque chose sans masse qui n’a pas d’effet sur le pour servir, rejoindre, retrouver, l’objet de sa Foi ne
monde réel. Quant à la foi, il n’y a que la fidélité et comptent pas. Tout ce qui est matériel ne pèse pas
l’obéissance en l’Église du Concile. lourd face à la dévotion. Le Lossyan suivant la Vertu
de l’Air peut faire preuve d’un courage et d’une té-
La Foi telle que définie ci-dessous est donc très mérité au-delà de toute raison, pour le bénéfice de
rare. C’est la vertu des chamans, des Chanteurs de l’objet de sa Foi.
Loss et de très rares peuples spiritualistes. Même
les Dragensmanns ou les Forestiers ne s’intéressent Considérer les choses comme absolues : tout comme
pas à cette notion et s’ils en savent l’existence, ne un Lossyan ne pourrait remettre en doute sa foi et sa
lui accordent aucune valeur. C’est ce qui la rend si dévotion, celle-ci ne se mesure pas, et est sans limites.
spécifique et étrange pour tous les Lossyans. Cette ferveur dépasse le monde matériel et survit à la
mort. Celui qui croit si puissamment n’a peur ni de
L’air est l’immatériel et l’intangible, il ne se voit pas, la souffrance ni du doute. Le message de la Foi, ses
mais se ressent. Il ne peut être touché, mais affecte commandements, ses conseils, sa sagesse ou sa folie
tout. Il se répand partout, invisible, mais présent en sont absolus et vains sont les efforts à faire changer
toute chose. Il est la Foi qui est le concept de confiance d’avis celui qui aime avec tant de dévotion.
en ce qui n’a pas d’existence vérifiable par les sens,
l’expérience ou la preuve matérielle. Pour les Lossyans, Exposer sincèrement sa foi : celui qui aime et vénère
il est honorable de faire confiance et de la donner. ne le cache pas, sauf si les circonstances l’exigent. Il

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Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

lui paraît évident que sa Foi coule de source et il la La Sagesse est une vertu spirituelle, la raison naît de
défendra et la déclamera sincèrement en refusant de l’écoulement du temps, la tempérance de la faculté à
se répudier, quel qu’en soit le prix, car ce serait la laisser le mouvement suivre son cours comme le fait
trahison de sa propre âme. l’Eau. C’est l’Esprit.

L’Air, l’entité du Chant de Loss


LES VERTUS, ÉLÉMENTS ET FORCES
L’Air est associé à la Foi, et au dernier composant du
Les trois vertus forment pour les Lossyans l’ensemble monde : le Chant de Loss.
des constituants de l’être, puisqu’ils sont aussi des
éléments ; nous avons donc un premier triptyque : la Avant l’avènement du Concile, le Chant de Loss, dé-
Terre, le Feu et l’Eau qui forment un second trip- sormais considéré comme l’expression d’un pouvoir
tyque en tant que vertus : l’Honneur, le Courage, la démoniaque et visant à asservir l’Homme, était un
Sagesse. Mais pour les philosophes lossyans, il y en a des éléments constitutifs du réel, une idée désormais
un troisième, qui englobe donc ainsi l’entièreté de la impensable et hérétique pour l’Église.
construction du monde : La Voix, le Corps, l’Esprit.
Le Chant de Loss symbolisait l’énergie primordiale ;
L’Honneur est une vertu sociale, et la Terre est donc à ce qui anime toute chose et le détruit, le souffle
la source de l’Honneur, et la représente. C’est la Voix. d’énergie sans lequel il n’y a que le néant. Le Chant
de Loss serait donc, selon cette philosophie toujours
Le Courage naît de la décision d’agir, l’action est transmise et partagée par les chamans, l’expression
le Feu, le Feu est ce qui anime alors le mouvement. de ce pouvoir qui donne mouvement et existence à
C’est le Corps. toute chose.
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LA VIE QUOTIDIENNE

Nous n’enterrons pas nos morts, Anis, nous les brûlons. Il ne doit rien en rester, qu’ils ne soient plus qu’esprit
et qu’ils rejoignent les Étoiles, auprès de ceux que nous avons aimés et qui veillent sur nous. Nous ne les pleurons
pas, nous ne leur élevons pas de tombes ni de monuments. Seul reste le souvenir que nous emportons avec nous
et que nous chérissons. Et parfois, parce que même fortes de ses vertus nos âmes sont faibles et ont besoin de
réconfort, nous les prions, et serrons contre nos cœurs des objets que nous gardons précieusement et qui nous
rappellent un peu de ce qu’ils furent de leur vivant.

Les Chants de Loss, Les forêts d’Arcis.

LA VIE QUOTIDIENNE DES LOSSYANS


I l y a quatorze peuples différents autour des Mers
de la Séparation, et au moins autant de cultures,
de coutumes, de rites et de croyances, sans compter
nom de la semaine diffère selon les peuples. Le terme
athémaïs est « khémys ».

celles des sous-cultures locales. En faire le tour serait Voici le calendrier athémaïs, le plus généralisé,
impossible, ainsi nous allons nous intéresser à ce qui lui-même directement issu des règles calendaires
réunit les Lossyans plutôt que ce qui les différencie, conciliennes :
dans leur vie quotidienne.

La référence qui suit est celle de la culture conci-


lienne. On nomme ainsi les peuples sous l’influence Jours
de l’Église depuis un millénaire. Nous allons trier
par thème : la mort, la naissance, les hommes et les 1er et 7e : Alad, Ni’alad
femmes, les genres et la sexualité, l’enfance, le travail,
les loisirs, les repas, les étoffes et les modes vesti- 2e et 8e : Alith, Ni’alith
mentaires, les lois, le calendrier, etc. Les coutumes, 3e et 9e : Althier, Ni’althier
modes de vie, rites et folklore se confondent bien trop
pour pouvoir parfois les différencier, ainsi nous allons 4e et 10e : Alkamm, Ni’alkamm
les aborder ensemble, en donnant des précisions sur 5e et 11e : Alsyo, Ni’alsyo
les grandes différences avec certaines cultures non
conciliennes répandues. 6e et 12e : Alere, Ni’concilo

LE CALENDRIER LOSSYAN Mois


La durée du jour sur Loss est d’environ 33 heures 1er (printemps) : Mounokio
terriennes et les Lossyans divisent le jour solaire en
2e : Teygélio
douze heures, de l’aube au crépuscule, dont la du-
rée varie, en fonction de la durée de la journée, qui 3e : Scirossio
raccourcit en hiver et se prolonge en été. La nuit est
divisée en quatre veilles de tours de garde. 4e (été) : Hécatio
5e : Métageio
La mesure du temps détaillée, employant minutes et
secondes, n’existe que pour la navigation ou dans les 6e : Boédio
laboratoires et ateliers des génies, pour les mesures 7e (automne) : Pianétio
précises. L’utilisateur d’une horloge ou d’une montre
à gousset mesure donc le temps de manière différente 8e : Miamactio
de ci-dessus. Le jour est divisé en deux fois 12 heures
9e : Posédio
égales, elles-mêmes divisées en 60 (5 fois 12) minutes
puis secondes. 10e (hiver) : Elaphio
11e : Elestio
L’année lossyanne dure 585 jours et se divise en
douze mois, plus une période d’une durée variable 12e (fin de l’hiver) : Lenéio
de 7 à 10 jours nommée La Chasse Sauvage qui a
lieu juste après La Longue Nuit. L’année commence
en général après La Chasse Sauvage. Chaque mois
compte quatre semaines de deux fois six jours. Le

59
Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

LES FÊTES ET DATES IMPORTANTES débutent peu après le coucher du soleil, pour deux
heures environ de communion et de sermons au sein
Les fêtes qui suivent et leurs dates sont en général des des temples brillamment éclairés pour l’occasion.
fêtes conciliennes et ont toutes cours à Armanth. La C’est à cette occasion que l’on présente en général
notion de vacances n’existant pas dans le monde de les enfants baptisés. Le plus souvent avant la messe,
Loss, ces festivités sont fort bienvenues pour s’amuser la place devant les temples devient une petite foire
et oublier pour quelque temps la difficulté du labeur. locale animée.

La plupart des peuples respectent un jour de congé,


Les fêtes patronales
le dernier de la semaine de 12 jours, où personne, pas
même les esclaves, ne travaillera. On ne sera pas sur- Si les vacances n’existent pas, les Lossyans peuvent
pris d’apprendre que les forçats n’ont parfois jamais profiter de nombre de jours de congés ou de fête.
un jour de repos. Et dans certains lieux, les hommes Les fêtes patronales sont dédiées aux Vertueux :
libres comme les esclaves triment eux aussi sans aucun héros ou personnages légendaires souvent adoptés
congé. La seule fête qui impose un repos obligatoire par l’Église. Il y a un ou deux fêtes patronales par
est la Longue Nuit, vous verrez pourquoi ci-dessous. semaine ; les corps de métier concernés par la fête
ne travailleront pas — c’est même illégal selon leurs
règlements. Les plus grandes fêtes concernent tout
Les messes de l’Église
le monde pendant un à deux jours de festivités.
Elles ont lieu une à deux fois par semaine (forcé- Ainsi, sur un mois tout le monde en profite au moins
ment le 12e jour, mais aussi selon les régions le 6e) et une ou deux fois.
Ref. 14778
LA VIE QUOTIDIENNE

À Armanth, les deux festivités les plus renommées ment un terme à leurs ravages. La fin de la Chasse
et qui durent trois jours sont la Fête de Muhamat, Sauvage est souvent ponctuée par des cérémonies
un festival naval avec feux d’artifice et parades de funèbres pour les victimes.
galères bariolées, et la Fête de Blanda, organisée
conjointement par les hospices et les maîtres-escla-
Le Renavosi  - l’Étain
vagistes, où nul mal ne peut être infligé aux esclaves,
et où un certain nombre d’entre eux sont tirés au sort Fête qui porte bien des noms, on cite ici son nom
pour être affranchis — s’ils le souhaitent. athémaïs et dragensmann. Au 12e jour de Mounokio,
le début du printemps, toutes les façades sont parées
de fleurs et de rameaux et des cortèges se forment
Les triomphes des cités-États
pour aller bénir champs et culture, suivis de grands
Les triomphes sont l’équivalent des fêtes nationales banquets entre voisins. Il est fréquent que les citadins
pour les cités-États. Ils commémorent une grande ne travaillent pas, mais viennent participer aux se-
victoire ou un ancien leader militaire ou politique. mailles et labours. Nombre de mariages sont célébrés
Souvent, les triomphes durent trois à quatre jours, à cette époque.
avec des fêtes et foires payées par les plus riches
notables, les cirques et arènes faisant donner les plus
La Nuit de Feu
grands spectacles de l’année.
Au solstice d’été, vers le 18 Métageio, une pluie
À Armanth, le triomphe le plus connu commémore la d’étoiles filantes zèbre le ciel pendant trois à quatre
fin dramatique de la Croisade lancée par l’Hégémo- nuits. Pour les Lossyans, les étoiles tombant des cieux
nie contre la cité (voir Histoire de Loss page 43). C’est sont les âmes des morts, pêcheurs sans vertus qui
l’occasion de parades nautiques majestueuses en uni- disparaissent en brûlant. On célèbre alors un spec-
forme des marins de l’Elegio. L’Église d’Armanth est tacle magique, mais dangereux, car certaines mé-
en deuil pendant ces quatre jours. téorites atteignent le sol dans cette période avec les
dégâts qu’on imagine et l’on est témoin de la chute
de milliers d’âmes rejetés des cieux. C’est une fête
La Longue Nuit
des Morts : les communautés organisent pendant trois
La fête la plus universelle de Loss s’accompagne du jours de grands feux de joie, sortent les autels dédiés
phénomène céleste bouleversant qui annonce le dé- aux ancêtres et vont décorer les frontons des temples
but de l’année. Au dernier jour de Lenéio, Ortentia de bande d’étoffes rouges et de bougies.
au lieu d’être bleutée, est assombrie comme un puits
de noirceur barrant le ciel. C’est une éclipse to-
Le Jour du Serment
tale de trois jours. La vie tombe en suspens, même
les plantes éteignent leur bioluminescence et le Une fête armanthienne qui marque l’équinoxe d’au-
climat est partout froid, humide et très orageux. tomne vers le 17 Pianétio. Le Jour du Serment re-
Les Lossyans cessent toute activité et attendent, monte à de très lointaines histoires sur les premiers
entretenant feux et éclairages, se rassemblant entre accords d’entraide entre les habitants athémaïs
familles, voisins, confréries et quartiers. On festoie d’Armanth et les réfugiés venus de toutes les Plaines
au chaud, on rit, boit, chante, danse, conte et l’on d’Étéocle. Pendant deux jours, les amis, alliés, confré-
s’échange des présents et des promesses. C’est sou- ries et familles renouvellent leur serment, avec force
vent à cette date que les alliances et contrats de déclamations, cadeaux et des torrents d’alcool. Il est
mariage sont passés. de coutume que les esclaves renouvellent leur ser-
ment de soumission à leur maître. C’est une date
Mais personne ne s’aventure dehors. Durant cette privilégiée pour les signatures de grands contrats et
période, le monde appartient aux gorgones qui pour les mariages.
craignent le jour et la lumière. Elles partent en chasse
sans jamais s’arrêter, donnant naissance à autant de
Le Diban
Dévoreurs qu’il y aura eu de proies à leur tomber
sous les pseudopodes. Les monstres des contes des Le Diban est la fête qui annonce officiellement la
veillées de la Longue Nuit existent et rôdent dehors, fin du travail des champs et le solstice d’hiver. C’est
et l’on peut parfois les entendre hurler. aussi à cette date, vers le 20 Elaphio, que tradition-
nellement sont abattus les moras pour les réserves
d’hiver. C’est un grand banquet qui se prolonge sur
La Chasse Sauvage
deux jours où sont entrepris les grands travaux de
Juste après la Longue Nuit, entre Lenéio et Mounokio, réfection des domiciles lossyans. On échange beau-
vient une période qui dure de sept à dix jours après coup de cadeaux, avec une préférence pour les mets
laquelle commence l’année et le printemps. Cette exotiques et les vêtements. On va aussi prier dans les
date correspond à la période dramatique ou les temples et l’Église a coutume d’organiser de grandes
communautés lossyannes partent en chasse des messes avec chants, spectacles, sermons et intronisa-
Dévoreurs pour les éliminer afin de mettre rapide- tion des nouveaux Ordinatorii.

61
Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

LA MORT ET LES RITES FUNÉRAIRES


P our les Lossyans, la mort est partout. Tout le
monde meurt : c’est le destin de toute vie. Et
avec une espérance de vie moyenne de 38 ans et une
Le Concile parle de la voûte céleste seulement
comme le lieu où les âmes des morts vertueux
veillent sur les vivants, au pied des trônes du Concile
assez forte mortalité infantile, les Lossyans y sont Divin. Les plus brillantes étoiles sont celle des an-
tous confrontés dès l’enfance. ciens dieux et des esprits, qui veillent eux aussi sous
la sage autorité du Concile. La notion d’au-delà
paradisiaque n’est jamais décrite ou détaillée, sauf
LE REGARD À LA MORT chez les Dragensmanns et les Forestiers qui par-
tagent le concept de plaines vertes et chaudes et de
Les Lossyans ne craignent pas la mort comme nous, banquets éternels.
habitants de l’Occident du XXIe siècle. Ils la voient
souvent : elle s’invite dans leurs foyers, les fauche Les Lossyans considèrent qu’une fois qu’il est asser-
dans leurs cités, les frappe au coin des forêts, ou vi, un esclave ne peut pas accéder aux Étoiles. Un es-
prend son dû au gré des caprices de la mer. Si en clave ne possède plus rien, même pas son Honneur.
avoir peur n’est pas rare, tout le monde s’attend à la Ainsi, défait de l’une des Trois Vertus, il ne peut
subir. Épidémies, maladies graves, accidents, décès briguer aucune place dans la voûte céleste. C’est
infantiles, guerres et ravages sont le lot de la vie. On pour cela, quand un esclave décède, qu’il est enterré
en parle sans fard, on admet qu’elle peut frapper dans un coin, ou jeté aux toshs. Mais cela a aussi
demain et l’on considère donc de manière bien plus engendré une coutume respectée : quand un esclave
relative la valeur de sa propre existence et de la vie est proche de la mort, son maître l’affranchit, avec
des autres. Ce qui fait aussi que les Lossyans res- cette phrase rituelle :
pectent la vie, et évitent de donner la mort.

D’un autre côté, les Lossyans sont aussi plus prompts « Je
 Je te rends ta liberté, et ton honneur, puisse les
à donner la mort par charité ou nécessité. Le Lossyan ancêtres te donner une place dans les Étoiles. »
ne trouve pas vraiment choquant d’abréger une vie Ainsi donc, le Lossyan rend à l’esclave son hu-
pour mettre fin à des souffrances ou de tuer un en- manité : ses Vertus. Et une chance d’atteindre
nemi par nécessité. ainsi sa place parmi les Étoiles. »

APRÈS LA MORT ? LES RITES FUNÉRAIRES


Les Lossyans sont venus sur Loss depuis les Étoiles ; à Les Lossyans considèrent que pour que l’âme puisse
leur mort, c’est vers les étoiles que retourne leur âme. rejoindre les Étoiles, elle doit y être aidée afin de
C’est pour eux dans la brillante voûte stellaire que faciliter son ascension. Le corps représente alors un
résident leurs parents, leurs ancêtres et leurs proches fardeau pour le défunt, qui risque de s’y agripper
disparus. Mais pas tout le monde. et devenir un morrow, un spectre mort-vivant qui
hantera le monde.
Loss est souvent percutée par des météorites et
striée de pluies d’étoiles filantes. Ce sont des âmes La crémation est le rite le plus répandu. Le défunt
qui ont échoué à s’élever et chutent depuis les est brûlé et ses cendres sont éparpillées dans le vent.
astres. Plus une âme a manqué de vertus et plus le Les Étéocliens bâtissent cependant des autels et
poids de ses péchés immoraux et de ses crimes pèse, mausolées familiaux qui abritent alors les biens et
la faisant tomber d’autant plus fort. Ainsi, pour les souvenirs symboliques des défunts, et où ils viennent
Lossyans une météorite s’écrasant sur Loss est le se recueillir. Dans l’Hégémonie, la seule exception
signe qu’une âme chargée de crimes et de péchés partielle à la crémation sans monument funéraire
est retombée au sol. Et si elle provoque des désastres concerne les Prophètes et certains Cardinaux, pour
et des morts, c’est qu’elle était si chargée de haine qui ont été bâtis des temples funéraires.
qu’elle a souhaité susciter ces derniers maux avant
l’anéantissement. Les Athémaïs brûlent les corps et prélèvent ensuite
os et cendres, qui sont mis en urne. Celles-ci sont
Il y a donc en l’espèce pour les Lossyans une forme conservées dans chaque maison et quand une famille
de paradis. Les âmes des morts veillent sur les vi- bâtit une nouvelle demeure ou y emménage, l’urne
vants depuis les cieux et éclairent la nuit. Mais pas est scellée dans les fondations ou dans les murs de la
d’enfer. L’enfer, c’est la fin, le néant, la disparition maison familiale. Leur contenu est parfois transvasé
de l’âme immorale et pécheresse. Être effacé comme dans de grands cinéraires réunissant les restes de
si l’on n’avait rien laissé derrière soi à sa mort est un tous les défunts de la famille.
concept effrayant pour les Lossyans.

62
Ref. 14778
LA VIE QUOTIDIENNE

Les Hemlaris, comme les Dragensmanns enterrent Enfin, on ne pratique pratiquement jamais ces rites
leurs morts. Mais si ces derniers ont des cimetières et funéraires pour les enfants âgés de moins de trois
sanctuaires, la crémation est un de leurs rituels réservés ans et les mort-nés. La plupart des Lossyans consi-
aux hommes morts au combat. Quant aux Hemlaris, déreraient comme déplacé et indécent de le faire.
deux ans environ après la mise en terre, ils ouvrent Tant qu’un enfant n’a pas passé trois ans, il n’a pas
les tombes dont ils prélèvent les ossements, qui seront de vertus, et pas plus d’humanité que n’en aurait
alors déposés avec soin dans des catacombes. Chaque un esclave ou un animal. Malgré le fait qu’on tende
village a la sienne, mais aussi chaque grande famille à chérir les enfants sur Loss, la mortalité infantile
aristocratique. Chaque cité a sa nécropole. a imposé cette coutume pour éviter un deuil trop
courant. L’enfant sera en général inhumé de ma-
Dans les cultures conciliennes, il est courant que nière discrète et intime. Tout juste pendant deux
toute maison ait un petit autel dédié à ses ancêtres, semaines, au plus, la famille aura-t-elle placé sur
en général une petite alcôve. À ses pieds, on y dépose sa porte une bande d’étoffe bleue pour prévenir les
offrandes simples et souvenirs des défunts, que ce soit visiteurs du deuil.
un bibelot ou bijou, mais aussi des portraits pour les
familles les plus riches ou traditionalistes.

LA FAMILLE ET LE NOM

P our un Lossyan, son identité est indissociable de


sa famille et des siens : un homme sans famille
est dénué de protection et n’a rien pour prouver son
Le seul cas qui fasse exception à la toute-puissance
masculine est celui des Femmes d’Épées. Elles se
passent d’autorité ou de caution mâle, dans la me-
Honneur. Cela veut dire qu’il doit survivre seul et sure où elles s’affichent en armes, souvent vêtues
que, pire que tout, une fois vieux, il mourra sans à la masculine et prêtes à défendre leur Honneur
personne pour pratiquer les derniers rites funèbres. par l’épée.

LA FAMILLE LES NOMS


La notion de famille est assez large pour un Lossyan. Les Lossyans tiennent à leur nom : celui de leur fa-
Cela désigne en premier ses parents et grands-pa- mille et leur prénom. Ils ne voient cependant pas la
rents, ses enfants, son mari ou épouse, ses frères nécessité de donner leur nom de famille quand ils se
et sœurs et leur famille. Mais aussi sa confrérie de présentent. Ce qui identifie un Lossyan dans ses re-
métier et les liens qui l’unissent à ses amis proches lations et sa vie sociale, c’est son prénom avant tout.
qu’il appellera souvent « mon frère, mon fils, mon C’est lui qui importe ; le nom de famille est plutôt
père ». Un apprenti peut appeler son maître « père » employé avec le nom de son village, de sa ville ou
et le considérer ainsi comme tel. L’adoption familiale de sa confrérie pour s’identifier en cas de nécessité.
est affaire de serments et d’affection mutuelle. C’est Ou pour appuyer son honneur devant une offense
ainsi qu’elle est alors reconnue par la société. ou l’ennemi. Les Lossyans sont aussi connus par un
surnom. Ce ne sont pas toujours des adjectifs ou des
La société concilienne est patriarcale, bien que ce ne titres, mais parfois des noms composés, ayant une
soit pas forcément la norme dans les cultures qui ne référence symbolique, folklorique ou mythologique.
sont pas sous le joug de l’Église. Mais la plupart du
temps, le chef de famille est le père ou le grand-père. Les enfants de moins de trois ans et les esclaves n’ont
Son pouvoir sur sa famille est étendu, même si cela pas de « nom ». Les Lossyans les considèrent comme
s’estompe en descendant vers le sud et Armanth. étant dépourvus de Vertus et donc pas véritablement
Mais ce sont le plus souvent les hommes qui dé- « humains ». Pour les enfants, il s’agit surtout de cou-
cident. Les femmes doivent se cantonner à donner tumes destinées à accepter le risque élevé de mor-
avis, points de vue et conseils. Dans les cadres les talité infantile, et donc, de ne pas leur accorder une
plus traditionalistes, la femme n’a tout bonnement trop grande place dans la société tant qu’ils n’ont pas
pas le droit de contester une décision ou donner son passé le cap risqué des trois ans.
opinion. Plus on va vers des régions progressistes,
plus les femmes sont écoutées, considérées et respec- Pour les esclaves, c’est simplement parce que leur
tées, et sont parfois chefs de famille. nom, comme le reste, ne leur appartient pas. On
donne aux esclaves des noms symboliques et repré-
Encore une fois, cela ne concerne que les cultures sentatifs, qui peuvent changer de propriétaire en
conciliennes : les Forestiers et les Dragensmanns par propriétaire et il est rare que ceux-ci conservent leur
exemple sont nettement plus égalitaires et paritaires. nom d’origine.

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Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

Le nom des enfants leur est donné officiellement au de leur futur conjoint pendant trois jours, avant le
cours d’une fête cérémoniale et joyeuse à leur troisième moment ultime de la cérémonie. L’épouse est voilée
anniversaire. Ce baptême a souvent lieu dans le cadre et presque aveugle pour la cérémonie, parfois pour
des temples du Concile ou avec un Ordinatori pour toutes les festivités.
bénir l’événement, mais ce n’est pas systématique.
Les mariages sont toujours festifs, mais les rites sont
très variés. Même la monogamie n’est pas générali-
LES UNIONS ET LE MARIAGE sée, surtout dans l’Hemlaris, où des aristocrates col-
lectionnent épouses, concubines et esclaves, parfois
Les Lossyans portent une grande affection et un intérêt si mêlés qu’on aurait du mal à les différencier.
notable aux œuvres ayant pour thème de l’amour. Mais
en règle général, pour eux, « l’amour, c’est pour les en- Dans la société concilienne, un mariage est à vie, sauf
fants ». Le sentiment amoureux n’est pas quelque chose si l’époux répudie son épouse, l’asservit ou même la
de mauvais en soi, mais il tend à rendre déraisonnable tue… oui, il a le droit, aussi déshonorant et risqué
et plus grave encore, peu soucieux de l’Honneur. que ce soit. Il y a un peu plus de souplesse avec
ces principes dans les Plaines d’Étéocle, et dans les
Ils ont donc un rapport prudent et mitigé avec ce sen- cultures des archipels des Mers de la Séparation,
timent, estimant qu’il a tendance à provoquer drames mais une séparation des époux reste toujours difficile
et catastrophes. Dans la mesure où les mariages sont et très mal vécue socialement. La répudiation ne se
en général affaire d’alliances et de transactions, il fait pas chez les Étéocliens, et les Teranchens sans
s’avère que c’est souvent le cas. un dédommagement de l’épouse répudiée. La notion
de divorce n’existe que dans l’Athémaïs. Une femme
Les Lossyans de culture concilienne sont en règle gé- qui demande la rupture du mariage l’obtient en gé-
nérale monogames. Chez les Étéocliens, les mariages néral, soit parce qu’elle a de bons arguments (vio-
ne sont pas une affaire religieuse, et même si certains lences conjugales, adultères, et autres déshonneurs de
demandent la bénédiction d’un prêtre, ils ne font pas l’époux), soit en payant un dédommagement.
appel à l’Église et ses temples. Seuls les plus grands
mariages parmi l’aristocratie font exception, surtout L’héritage passe en général toujours par les enfants
pour des raisons de prestige. Tous les mariages sont mâles et se divise de manière inégale entre l’aîné et
fêtés publiquement, lors de festivités familiales qui les autres fils. Les filles n’héritent de rien, mais plus
regroupent toute la communauté locale. Personne ne on va vers le Sud, plus elles reçoivent selon l’héri-
vient les mains vides, que ce soit pour participer au tage une part qui, bien que modeste, est quantifiée
banquet ou pour offrir au couple de quoi commencer pour subvenir à leurs besoins. Les mariages sont sou-
son installation. vent des unions d’alliance et d’intérêt et l’on bataille
âprement pour décider de la dot et des avantages et
La coutume est assez similaire chez les Athémaïs, intérêts des deux parties. Pour rappel, une dot est
et à Armanth. La cérémonie d’union et le vœu du destinée au nouveau ménage qui se formera grâce au
mariage ont lieu dans un espace consacré face à la mariage. Mais l’homme étant le chef de famille, c’est
mer, par un officiant connaissant les rites ancestraux, lui et sa famille qui en auront l’usufruit.
très rarement un Ordinatori. Les époux sont isolés

LES HOMMES, LES FEMMES ET LES GENRES

P our l’Église du Concile et par conséquent pour


les Lossyans vivant sous le joug de ses Dogmes,
l’homme, ici comprendre l’individu de sexe mâle, do-
les plus dures, ce sexisme confine à la misogynie, et
l’illusion de la femme faible, inférieure à l’homme en
tous points, soumise à lui par les Dogmes du Concile,
mine tout. Il paraîtrait impensable pour le Lossyan est une réalité qui ne se discute pas.
traditionaliste qu’une femme de sa maisonnée ose
même songer à l’idée de ne pas lui obéir aveuglé- Nous avons déjà mentionné que plus on va vers le
ment ou se rebelle à son autorité. Pour un Lossyan, Sud, Armanth et sa société progressiste, plus ce prin-
la femme est faible et lui est inférieure. Il est de cipe tend à se modérer. Cependant, il y va de l’hon-
son devoir de la protéger, de veiller sur elle, mais neur de toute femme de ne pas désobéir, tout du
aussi de faire usage de tous les moyens pour qu’elle moins en public, à son époux ou son père. Une règle
obéisse et se soumette à son autorité. La majorité des moins strictement respectée avec ses frères ou ses
Lossyans considèrent donc que la place de la femme oncles, par exemple. Si dans le nord des Plaines de
est à la maison, près des enfants ; et qu’une femme l’Étéocle, il est inimaginable qu’une fille tienne tête à
ne devrait pas se mêler des affaires des hommes, ni son frère, ça ne froissera pas vraiment qui que ce soit
diriger et encore moins combattre. Pour les sociétés sur les côtes sud de la même région. Les régions les

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Ref. 14778
LA VIE QUOTIDIENNE

plus dures avec ces lois sont l’Hégémonie, l’Hemlaris, (un mot qui se traduirait littéralement par « ceux qui
et les Cités-Unies, et les peuples des Franges. Alors aiment eux-mêmes ») et le terme répandu est « gillys »
que chez les Dragensmanns ou les Gennemons, par (« ceux qui aiment »)
exemple, qu’une femme tienne tête à sa famille est
totalement admis. L’homosexualité et les problèmes de genre existent
dans Loss, mais contrairement à ce que l’on pour-
Traditionnellement, une femme ne peut porter les rait croire, ça n’est pas une problématique aussi
armes ni défendre son honneur. La coutume la plus dramatique que pour les humains du XXIe siècle. Les
dure condamne même à de lourds châtiments la Lossyans n’ont pas pratiqué le rejet et l’exclusion,
femme qui oserait se saisir d’une arme ou porter la c’est bien plus compliqué que cela.
main sur un homme, même si celui-ci l’agresse. Ce
traitement de la place de la femme est à nuancer, L’explication par l’exemple sera plus parlante : que
de tels extrêmes sont peu communs, mais le fait est faire quand un officier militaire, courageux et hono-
qu’on insistera sur le fait que la place d’une femme rable, tenant son rang et sa position, s’avère préfé-
est au foyer et qu’elle ne doit ni toucher aux armes ni rer les hommes ? Le fait qu’il soit homosexuel doit-il
apprendre à se battre. supplanter les vertus dont il fait preuve et qui sont
reconnues par tous ? Pour un Lossyan, la réponse est
Ce qui n’empêche pas certaines d’entre elles de non. Ce serait renier sa valeur et ses vertus. Ce qui
le faire. Ce sont les Femmes d’Épée et elles sont posera nettement plus problème au même Lossyan,
rares. Chez les Hégémoniens, ce ne sont que des c’est si la sexualité de cet individu met en péril son
Ordinatorii de légions de l’Église : toute autre femme rang et sa fonction.
voulant défendre son honneur elle-même finira asser-
vie ou suppliciée. Mais plus on se dirige vers le sud, Bref… il ne faut pas que cela se voie, même si tout le
plus on en rencontre, et cela rend les Lossyans à la monde le sait et les Lossyans préfèrent parfois que
fois curieux et mal à l’aise. cela se sache quand ils le souhaitent. Mais cela ne
doit pas être affiché publiquement. Ne pas respecter
Plus de détails dans le chapitre Les Femmes d’épée, cette règle contraignante serait considéré comme un
page 158. déshonneur, et parfois un délit grave : l’Église autant
que la morale réprouvent officiellement les relations
Pour toutes les autres femmes de Loss, la coutume et homosexuelles. Mais l’Église est mal placée pour
les lois ne sont guère en leur faveur. Mais ce qui com- donner des leçons : au sein de ses légions, ces rela-
pense ce tableau assez triste est que pour la plupart tions sont courantes.
des gens, une femme, bien que légalement inférieure
en droits aux hommes, reste non seulement un in- Malgré tout, vivre sereinement son homosexuali-
dividu faisant preuve de Vertus qu’il faut respecter, té est ardu dans une société patriarcale qui exige
mais aussi une citoyenne productive et indispensable. qu’hommes et femmes accomplissent les devoirs de
Sa valeur et sa force de travail sont universellement leur place, comme enfanter. C’est même plus diffi-
reconnues, et finalement, ce n’est que dans les plus cile et injuste encore pour les femmes, comme on
hautes couches de la société que cette différence de peut l’imaginer. Pourtant, les drames sont assez rares.
traitement entre hommes et femmes peut se faire le Si l’homosexualité est réprouvée et si les concernés
plus sentir, là où l’on peut se passer de la force de tendent le plus souvent à le cacher, il est courant
travail des femmes, et donc de leur importance et que la famille l’admette. Elle imposera alors quelques
de leur utilité. contraintes, comme exiger d’une femme qu’elle en-
fante au moins une fois, quitte à ce qu’elle rompe son
À Armanth et dans l’Athémaïs en général, mais aussi mariage par la suite. Pareillement, un homme devra
à Terancha ou chez les Jemmaïs, la protection ju- malgré son homosexualité s’astreindre à trouver une
ridique des femmes dans le cercle familial devient femme et fonder une famille. Comme l’adoption est
égalitaire. On leur accorde le divorce, le droit d’héri- admise à la place de l’enfantement, le refus de pro-
tage et de propriété, le droit de porter plainte en cas créer n’est pas si grave.
d’abus et violences conjugales. On leur prête aussi
plus de valeur. Un homme qui y bat, ou pire, y as- Il y a peu de crimes homophobes dans les cultures
servit sa femme ou une de ses filles, peut perdre sa lossyannes, mais ils existent. Cependant, même si la
renommée et donc son honneur s’il ne se retrouve pas considération publique envers les homosexuels n’est
devant un tribunal sur plainte de sa propre famille. guère flatteuse, l’homophobe qui affiche sa haine sera
facilement déshonoré aux yeux des Lossyans.

SEXUALITÉS ET GENRES Les soucis de genre existent autant que les problèmes
de sexualité sur Loss. Et si c’est pour tout le monde
Il existe un terme lossyan pour parler des homo- très compliqué, il s’avère que là aussi, la société conci-
sexuels de manière générique, dérivé du dialecte te- lienne leur a donné une place et a trouvé certaines
ranchen : on les y nomme localement les kaenogillys solutions à ces problématiques, malgré les heurts.

65
Ref. 14778

Le gydreïs Les Courtisans jouent souvent de leur ambiguïté


Il existe un type de symbiote, au départ né des re- sexuelle apparente ou sociale. Ils ne sont pas tous
cherches de physiciens concernant le contrôle de la porteurs d’un gydreïs, loin de là, et l’on trouvera
fertilité féminine, qui altère si efficacement le système autant d’hommes que de femmes. Les guildes de
hormonal humain qu’il parvient à modifier complè- Courtisans sont cependant souvent des refuges qui
tement tous les caractères sexuels secondaires. Le accueillent chaleureusement toute personne harce-
gydreïs est utilisé par les personnes transgenres pour lée ou mise en danger par ses problèmes de genre.
parvenir à donner à leur organisme le genre apparent Celles-ci ne deviennent pas forcément Courtisans,
auquel elles s’identifient. mais travailleront au sein de leur confrérie.

Ce symbiote est particulièrement efficace et ses effets Les confréries de Courtisans sont le seul milieu ou
sont puissants, mais il ne fait pas réellement muter les un gilly peut ouvertement afficher son homosexualité,
organes reproducteurs. S’il est capable de faire dispa- qu’il soit client ou prestataire. La plupart des grandes
raître totalement des seins ou effacer toute pilosité, cités ont une ou deux confréries de Courtisans, avec
transformer l’apparence féminine en masculine et in- des établissements de spectacles, des maisons de
versement, cette mutation n’est pas une transforma- plaisirs et de bains, des auberges, cantonnés à un
tion totale. Quant à la chirurgie, elle ne peut rien de ou des quartiers bien délimités. L’Église condamne
plus et aucun médecin lossyan ne se risquerait dans ce la prostitution, mais ferme mes yeux sur les activités
domaine. Les gydreïs sont peu répandus : on ne peut des Courtisans. Dans l’Empire d’Hemlaris, ils sont
s’en procurer qu’au sein des confréries de Courtisans. considérés comme une fonction sociale publique et
leurs activités et leur recrutement sont encadrés par
des coutumes complexes. C’est une tradition très
LES COURTISANS concilienne et assez récente.

Le terme réunit une communauté très variée, dont les Il est à noter que les établissements des Courtisans
transgenres ne font pas tous partie. Il s’agit de confré- n’emploient d’esclaves dans leurs activités que pour
ries regroupant intersexués, travestis, et gillys (homo- les tâches ménagères ou à titre privé. Certains
sexuels), tous versés dans les arcanes de la séduction, Courtisans sont des personnalités incontournables
de l’étiquette de cours, de la discussion, de la musique de la haute société, surtout dans l’Athémaïs. Les
et d’autres formes d’arts. Ce sont des artistes du di- Lossyans acceptent en général assez bien l’existence
vertissement de salon et des personnes de compagnie, des Courtisans et leur présence, mais ça n’est pas un
liés une prostitution de luxe. C’est une prestation à sujet dont on parle à table.
laquelle les Courtisans sont formés et qu’ils peuvent
fournir, mais c’est loin d’être systématique.
Ref. 14778
LA VIE QUOTIDIENNE

L’ÉDUCATION ET LE TRAVAIL
L es Lossyans dans leur grande majorité ne savent
ni lire ni écrire. En général, dans une cité-État,
environ 25 % des citoyens savent lire, moins de 15 %
ville ne l’interdit pas pour des raisons de sécuri-
té incendie. Si les artisans et commerçants les plus
pauvres font travailler leurs enfants, on les envoie
dans les milieux ruraux. L’éducation comme l’ap- dans les écoles dès qu’on le peut si l’on en a les
prentissage d’un métier se fait de parents à enfants, moyens. Tout le monde travaille, femmes comprises,
mais l’influence des guildes et corporations, après sauf dans la plus haute bourgeoisie ou dans l’aristo-
celle de l’Église, a créé tout un réseau scolaire et cratie. La vie est cependant plus facile et les congés
académique où sont formés artisans, génies, artistes, plus nombreux dans les villes. Mais les cités-États
comptables, magistrats et autres intellectuels. Ainsi, dépendent des communautés rurales et les réserves
les savoir-faire et les compétences se répandent de de nourriture sont rarement suffisantes pour tenir
mieux en mieux, aidés par le papier et l’imprimerie, plus de quelques mois.
répandus partout. Cependant, même en sachant lire,
la plupart des Lossyans restent notoirement illettrés :
Le regard au travail
ils ne sauront que difficilement écrire convenablement.
Les Lossyans ne voient aucun caractère sacré au tra-
Mais le travail et les métiers sont encore largement vail et diront sans hésiter qu’ils n’aiment pas cela. Ce
affaire de famille. Les ateliers sont souvent de pe- qui est respecté, c’est le fait de produire une valeur
tites tailles, les grandes installations industrielles sont ou une création de ses mains, mais pas le travail lui-
rares et les machines-outils souvent hors de prix. même, qui est une contrainte.
L’immense majorité des produits manufacturés est
encore fabriquée à la main, bien que dans les do- Pour ne pas travailler, il faut être riche ce qui est une
maines militaires, de la construction, de la draperie source de prestige pour les Lossyans, mais ce n’est
et de la marine, l’industrialisation progresse sans pas une nécessité : si un homme a assez de moyens
cesse. Quant à l’agriculture, elle aussi est en grande de subsistance pour pouvoir travailler moins, il choi-
majorité familiale, profitant des progrès de l’irriga- sira plutôt le farniente au travail acharné pour éco-
tion et de la maîtrise des sols, mais employant une nomiser encore. Être oisif n’est ainsi pas vraiment
vaste main-d’œuvre humaine et peu de machines. considéré comme une tare, l’homme qui a l’occasion
de moins travailler peut consacrer son temps aux
siens, amis compris, ce qui est très bien vu. Il est
LE TRAVAIL moins accepté de ne pas assumer sa responsabilité
et d’éviter de travailler alors qu’on a une famille
La journée commence peu après l’aube pour s’ache- dans le besoin.
ver au crépuscule. On mange bien le matin et bien le
soir, avec une pause à midi pour se restaurer un peu On évite donc de faire travailler les enfants si l’on
et faire une bonne pause. Car la journée lossyanne peut se le permettre, et l’on ne les grondera pas
est longue : 33 heures terrestres. s’ils jouent au lieu de travailler ou d’étudier, pa-
reillement avec les jeunes étudiants des écoles et
Le travail rural emploie tous les bras disponibles, universités chez qui l’oisiveté occasionnelle est to-
souvent dès sept ans. Hommes et femmes travaillent talement acceptée.
aux champs et dans les élevages, dès que le temps le
permet. Les jours de repos sont rares, l’agriculture
ne le permet pas, surtout dans les régions les plus
froides où les saisons de semi et de récolte sont
L’ÉDUCATION
courtes. L’année lossyanne permet cependant deux Une chose très importante à retenir : pour tous les
à trois récoltes par an selon les semis et le climat. peuples lossyans, l’enfant est sacré et souvent traité
Souvent, les champs sont communs à une commu- en enfant-roi. Jusqu’à leur septième année, garçons
nauté et une partie des récoltes et des bénéfices sont et filles sont choyés, ne travaillent pas et peuvent
partagés équitablement. Les plantations de grands jouer en toute liberté, le plus souvent avec un mi-
propriétaires terriens ne sont pas la norme, pas plus nimum de contraintes parentales. À partir de sept
que le servage, qui a pratiquement disparu sauf dans ans, il va souvent aider sa famille aux travaux et
quelques régions de l’Hégémonie et de l’Étéocle. aux champs ou entrer dans une école ou comme
Mais en règle générale, les fermiers sont pauvres, apprenti, mais si la famille est aisée, il restera choyé
et une année de mauvaise récolte peut suffire à les et très libre jusqu’à 14 ans, âge de la majorité pour
mettre en danger. les Lossyans.

Dans les villes, le travail est rythmé par les gongs L’éducation basique forme à la lecture, l’écriture et le
de l’Église et les cloches des beffrois des grandes calcul. Les écoles les plus fréquentes appartiennent
guildes. On travaille souvent la nuit tombée si la à l’Église qui s’en sert aussi comme centre de recru-

67
Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

tement. Mais des écoles de guildes et corporations les autres devant payer un prix fort. Les formations
sont très courantes dans le Sud. sont liées à des apprentissages auprès de maîtres qui
garderont leurs disciples plusieurs années.
Il y a trois formations principales dans les universités
lossyannes : celle d’ingénieur, qui donne les archi- La formation universitaire lossyanne ne fait aucune
tectes, les géomètres et les génies ; celle de physi- distinction entre les arts graphiques et les techniques
cien qui donne les professions médicales ; et celle d’ingénierie. Elle ne reconnaît guère encore non plus
de lettres et droits, qui donne les comptables, les la différence entre sciences théoriques et sciences ap-
métiers littéraires et de la magistrature et les écri- pliquées et ignore les concepts de physique fonda-
vains publics. mentale. Il n’existe pas de « savants » se consacrant à
un champ d’études exclusif, sauf dans les domaines
Ces formations se font dans des locaux différents : médicaux ou littéraires. Les sciences et les savoirs
ces universités appartiennent à des guildes, congré- doivent avoir une application pratique dans les arts
gations ou confréries qui éduquent leurs enfants, et techniques.

LES LOISIRS ET LES JEUX

L es Lossyans aiment s’amuser et farnienter, et


savent s’occuper. La plupart des loisirs sont so-
ciaux et se passent à l’extérieur : sauf pour les plus
LES COMBATS D’ARÈNE
Les cités-États ont souvent des arènes et amphi-
riches, une maison lossyanne est souvent étroite, théâtres dédiés à ces spectacles, qui se font souvent
surpeuplée et peu éclairée, donc quand on veut se en journée pendant les jours de congés et fêtes. Les
détendre, on préfère le faire dehors. gladiateurs sont des esclaves entraînés par des dres-
seurs et maîtres d’armes professionnels. Les combats
sont codifiés pour éviter de perdre trop de gladia-
LES SPECTACLES DE RUE teurs, mais tout dépend des caprices des organisa-
teurs et du prix qu’ils sont prêts à y mettre pour un
Les saltimbanques, théâtre de rue, musiciens et trou- bain de sang et réjouir le public. Cependant, même
badours, prestidigitateurs et dresseurs animaliers si ce sont des esclaves, les Lossyans n’aimant pas les
sont légion, comme les attrape-nigauds tenant des morts gratuites, les gladiateurs sont rarement envoyés
stands de jeux d’argent à même la rue. On trouve à la boucherie. Les exécutions publiques en arène
donc de ces spectacles à tous les coins de rue et sont très rares. Ces spectacles sont souvent gratuits.
l’on respecte les saltimbanques, même si l’on s’en
méfie, car avec eux, on s’attend toujours à ce qu’ap-
paraissent voleurs et tire-laines.
LES CONCOURS DE HAUT-ART
Les esclaves dressées et entraînées sont présentées
comme des chefs-d’œuvre par les maîtres-escla-
Ref. 14778
LA VIE QUOTIDIENNE

vagistes. Ceux-ci aiment faire la démonstration de LES JEUX


leurs talents à la danse, au chant, à la séduction.
Il s’agit d’établir l’absolue docilité de ces esclaves Les plus courants sont les jeux de dés et les jeux de
au cours de spectacles particulièrement colorés cartes. En général, il s’agira de jeux de hasard ou de
et luxueux, suivi parfois de ventes aux enchères. bluff plus ou moins élaborés qui n’ont d’intérêt que
Certains de ces concours sont publics, donnés dans parce qu’on y mise de l’argent. On peut donner en
des amphithéâtres et primés, un peu comme on offre exemple le Jhaemo, un jeu de cartes qui rappellerait
des prix aux meilleurs chevaux ou chiens d’exposi- la belote et donne la part belle aux mises et au bluff,
tion. Ces spectacles sont toujours payants. et les Part-points, un jeu de dés un peu étrange où
l’on parie sur un nombre donné qu’il faut alors ap-
procher autant que possible sans le dépasser, en je-
LE THÉÂTRE ET L’OPÉRA tant deux paires de dés. On joue beaucoup aussi aux
billes en misant. Et l’on aime chanter et déclamer,
Le théâtre se fait dans des salles plus ou moins disputer des concours d’injure poétique, de boisson et
adaptées, à même les rues parfois, mais aussi dans de bras de fer. La musique est très souvent pratiquée
de grands amphithéâtres pour des spectacles à gros et presque aussi souvent dansée.
budget destinés à une riche clientèle. Il en est de
même pour l’opéra. Les Lossyans aiment chanter ; Les jeux de société sont la marelle, le Katawa, un
le chant et la musique en tant que représentations jeu frangien de pari qui ressemble au backgammon et
artistiques sont très courus. Les meilleurs acteurs, emploie un boulier et des cartes, et le Meteretron, un
metteurs en scène et chanteurs, et même quelques croisement complexe entre un jeu d’échec et d’aba-
compositeurs et musiciens sont de vraies vedettes lone considéré comme le roi des jeux de stratégie.
courtisées par les mécènes les plus riches pour orga-
niser des spectacles à leur bénéfice. Certaines repré-
sentations publiques sont sponsorisées et gratuites.
Celles-ci ont lieu souvent le soir.
LES LOISIRS SEXUELS
L’accès aux services sexuels n’est pas réservé qu’aux
hommes : selon les régions, il y a des lieux tout à fait
LES TAVERNES tolérés pour les femmes libres. Le risque de tom-
ber enceinte est très réduit grâce à différents types
Les tavernes sont le principal lieu de distraction du de symbiotes rendant infertiles. De plus, les loisirs
Lossyan, avec les spectacles de rue et d’arènes. On y sexuels ne sont pas l’apanage des maisons closes et
va pour boire, discuter, jouer aux dés et aux cartes, de leurs Houris ni des Jardins d’Esclaves. Il y a une
éventuellement conclure des affaires et rentrer chez forte prostitution, même si celle-ci est mal vue. Quant
soi après le couvre-feu. On distingue différents types aux Courtisans, ils ont leurs Salons de Fumerie re-
de tavernes : connus publiquement.

Les bouis-bouis sont des tavernes à mauvaise bière, Au plus bas de cette échelle, il y a les prostitués : la
alcools pas toujours de qualité et menus de ratas et plus basse classe sociale, y compris des hommes, qui
de soupe dont il vaut mieux ignorer la composition. vendent leur corps à même la rue. Autant dire que
Souvent, on vient y manger à l’abri la nourriture qu’on c’est une activité dégradante, dangereuse, et interdite
a achetée aux étals dehors. Il y a rarement de quoi y par l’Église.
dormir et quand il y a, ce ne sont au mieux que des tas
de paille et des bancs dans la salle commune. Viennent ensuite les Maisons de Houris, des maisons
de passe de bas étage où des esclaves enchaînées
Les brasseries proposent de la bière brassée, du vin, dans des alcôves lugubres sont contraintes de faire
et différents alcools. La nourriture y est plus variée et de l’abattage pour des clients peu regardants. Les
de meilleure qualité. Elles sont aussi plus spacieuses esclaves qui y finissent connaissent un des pires types
et disposent souvent d’alcôves discrètes. Il est fré- d’asservissement.
quent d’y assister à des spectacles, ou d’y trouver des
cages de combat. Certaines brasseries fournissent de Les Jardins des Esclaves sont des sortes de harems
bons services d’hôtellerie. où une personne riche peut profiter dans un cadre
luxueux des Esclaves des Plaisirs à sa disposition.
Les salons de fumerie sont des tavernes où le luxe Le niveau de qualité diffère selon le luxe et les ta-
règne. Ils comprennent les meilleurs kumats et thés, rifs, et certains sont des havres de la sexualité la
les meilleurs alcools, les drogues les plus exotiques, plus luxueuse et débridée. Il y a quelques Jardins
des services allant des bains aux massages en pas- des Esclaves ouverts aux femmes, avec des esclaves
sant par les chambres d’hôte luxueuses et des ser- mâles et femelles.
vices sexuels exotiques. Ces salons de fumerie per-
mettent toutes les fantaisies et sont souvent tenus Les salons de fumerie des Courtisans sont abordés
par des Courtisans (voir page 66). ci-dessus.

69
Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

LA JUSTICE ET LES LOIS


N ous allons nous intéresser à ce qui concerne les
principes et les points communs des lois et de la
justice lossyanne et préciser les quelques exceptions.
asservit les siens. Le contexte est rarement pris en
compte dans un crime, pas plus que la personnalité
du criminel, sauf si des individus témoignent qu’il a
respecté les Vertus.

LES PRINCIPES DE LA JUSTICE Les Dogmes de l’Église


Si la plupart des communautés humaines se dotent Les Dogmes sont appliqués de manières très diverses
de lois, les organes judiciaires, eux, sont nettement en fonction de l’importance locale de l’Église, mais
moins communs. Le monde de Loss ignore en règle ne sont jamais ignorés ; généralement la justice civile
général ce qu’est une force de police. Cela donne une les intègre dans ses lois. Pour résumer, on les respecte
justice souvent appliquée au bon vouloir des habi- toujours, mais rarement à la lettre. L’Athémaïs ne
tants et des communautés ou bien aux caprices des les applique que pour les plus graves hérésies, et les
autorités en place. En gros, la justice dans le monde sociétés non conciliennes les ignorent.
de Loss est assez rarement juste et souvent expé-
ditive. Cependant, les Lossyans ont une haute idée Plus de détails au chapitre Les Dogmes de l’Église,
de la notion de justice ainsi que des représentants page 139.
chargés de la rendre.

Pour comprendre ce paradoxe, il faut s’attarder sur


les principes de la justice lossyanne.
LES APPLICATIONS DE LA JUSTICE
Dans les communautés et villages, le coupable d’un
crime est souvent arrêté par les habitants ou parfois
Les Vertus et la Loi
par les gardes et hommes de main de l’autorité locale
Les Vertus sont le socle des lois qui se réfèrent aux puis traîné devant le conseil de la communauté qui va
principes d’Honneur, de Courage, et de Sagesse. Le entendre les plaignants, le coupable, et décider de la
vol, la duperie ou le mensonge sont des crimes contre sentence selon les lois et traditions du coin. Le procès
l’Honneur ; la lâcheté, la trahison, et la désertion sera plus ou moins vite expédié, peut être public ou
contre le Courage. Quant à la Sagesse, elle implique rendu en privé, et la peine est totalement soumise
qu’un acte stupide ou irréfléchi, fait sous l’effet de au bon vouloir du conseil ou du chef local. Il arrive
l’alcool, de drogues ou d’une altération mentale est aussi que les habitants se fassent justice eux-mêmes
totalement de la responsabilité de celui qui le com- sans attendre.
met, sans la moindre circonstance atténuante.
Dans les cités et grandes villes, la justice emploie un
Cela veut aussi dire que certains crimes d’Honneur personnel dédié à la faire respecter et appliquer. Ce
sont acceptables. Que la mort d’un agresseur ne sera sont le plus souvent les gardes locaux qui font office
pas condamnée et que certaines duplicités pour pro- de polices, mandatés par le sénat ou les dirigeants
téger des êtres chers sont pardonnables si le cou- de la cité, mais aussi par les guildes et confréries ou
pable a prévu la manière de rattraper son crime ou aristocraties. Chacun défendant les intérêts de qui le
le dénoncer. paye, leur champ d’action et leur degré d’intervention
diffèrent donc, parfois jusqu’à entrer en conflit avec
Plus de détails au chapitre Les Vertus, page 54. les autres forces de sécurité.

Chez les Dragensmanns ou les Forestiers, la justice


La responsabilité individuelle
est rendue d’une manière similaire à celle des com-
Chaque individu est responsable de ses mots, faits munautés et villages, quoiqu’avec une meilleure or-
et gestes, il doit donc en assumer les conséquences. ganisation. Mais dans les cités conciliennes, la loi est
C’est pour cela que les Lossyans font attention à dispensée par des professionnels comptant des juges,
ce qu’ils disent, car ils se doivent d’assumer tous des magistrats chargés d’instruire les procédures, des
leurs propos et se préparer à en répondre devant avocats et légistes experts des différents codes de loi,
un accusateur. le tout dans des tribunaux.

Si un homme se fait cambrioler en son absence, il En théorie, tout citoyen a droit à un procès, mais
peut être considéré aussi responsable que le voleur et rien ne garantit son équité. Pouvoir profiter d’un juste
ne pourra demander compensation des biens volés. procès devant ses pairs dépend de son rang social et
Un homme pauvre ne pourra pas justifier une inca- de sa fortune : pour un voleur de bas peuple, ce sera
pacité à payer ses impôts au prétexte d’un manque une décision prise en quelques minutes et appliquée
de moyens, y compris si l’on saisit ses biens ou qu’on immédiatement. Seuls les membres du pouvoir et in-

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Ref. 14778
LA VIE QUOTIDIENNE

dividus riches et influents pourront profiter d’une Les peines sont en général exécutoires immédiatement.
vraie justice. Les autres évitent de leur mieux de subir La prison est rare. Mais dédommagements, coups de
les foudres de la loi, et s’arrangent entre eux pour fouet ou de bâton, pilori, humiliations publiques, mise
régler leur compte et se faire justice même si des au ban, mutilations, asservissement et parfois exécution
magistrats intègres essayent de dispenser une justice sont les peines courantes. Les Lossyans condamnent à
plus équitable et populaire. mort pour des délits qui pour les hommes du XXIe siècle
ne le mériteraient pas du tout ; citons l’agression d’un
Les procès de litiges civils et commerciaux sont Maître-marchand, d’un membre de l’Église ou de l’aris-
instruits à partir de plaintes. Le magistrat chargé tocratie, le sacrilège ou l’hérésie, l’incendie urbain, la
d’arbitrer le conflit est en partie payé par la partie piraterie, l’espionnage industriel, le vol de loss-métal
accusatrice, et le litige est réglé selon les lois locales. ou encore le viol, ainsi que toute forme d’agression
physique sur les enfants. Si vous avez de bonnes rai-
sons d’avoir commis un meurtre et/ou une position
PROCÈS ET CONDAMNATIONS d’influence privilégiée, vous serez condamné à verser
un dédommagement à la famille du défunt.
La loi lossyanne n’applique ni le principe de pré-
somption d’innocence ni la notion de caution et tout Les peines de mort sont parfois cruelles et publiques.
inculpé est enfermé jusqu’à son procès. Si les riches La mise à mort la plus courante reste cependant l’égor-
et les puissants sont assignés à résidence ou enfermés gement ou la pendaison. La prison est une peine très
dans des appartements confortables, tous les autres rare pour s’assurer que le condamné ne puisse s’enfuir
finissent dans des cellules exiguës et ont de la chance pendant que les siens règlent un dédommagement.
s’ils le sont avec leurs vêtements : dénuder un captif
avant de le jeter au trou est courant.

L’instruction d’un procès consiste à constater le crime


LES DUELS ET VENDETTAS
et ses circonstances, réunir les témoins des faits, En règle générale, les Lossyans règlent leurs comptes
puis trouver un avocat et des individus pouvant faire sans s’entretuer, à cause d’une coutume qui dit que
cautions de moralité (si l’on en a le temps). Obtenir l’homme qui en tue un autre en duel est responsable
les aveux de l’accusé implique maltraitances et tor- de sa famille. Mais le duel à mort peut arriver. Celui-
tures pour accélérer la procédure, mais les Lossyans ci peut se faire d’homme à homme ou par l’entremise
pensent généralement que la torture ne fait avouer de champions. Le duel est parfois proposé, voire im-
que les crimes les plus graves et impardonnables. Les posé lors d’un procès pour litige par des magistrats.
esclaves ne peuvent officiellement jamais témoigner.
Dans les faits, cela dépend des autorités du juge et Les hommes puissants en général et les Maîtres-
ils seront fréquemment torturés pour s’assurer de la marchands en particulier règlent souvent leurs pro-
véracité de leurs propos, ce qui implique qu’ils té- blèmes à coup d’assassins et d’empoisonneurs. Quand
moignent souvent ce que le tortionnaire veut leur ces règlements de compte prennent des dimensions
faire dire. Une fois réunis les différents éléments, le familiales, claniques ou entre guildes concurrentes, cela
procès a lieu : le juge entend les différentes parties, devient une vendetta. La vendetta est une affaire de
les témoignages, les plaidoiries et décide de la peine dette d’honneur sans fin, qui grossit à chaque crime
en s’appuyant sur les lois locales. Il peut y avoir un d’honneur des deux parties. Le seul cas où la justice in-
conseil pour discuter de la peine, selon les régions et tervient, de manière souvent musclée, c’est quand une
l’importance du procès. vendetta menace la stabilité publique de sa cité-État.

CODES SOCIAUX ET VIE QUOTIDIENNE

C eux qui parmi nos lecteurs ont voyagé un peu


auront rapidement constaté que la politesse et
les conventions changent très vite et qu’il suffit de
moyen de se faire jeter dehors. Autre exemple, retirer
ses armes en entrant dans une maison de culture
dragensmann est un signe de soumission au maître
faire 1000 km pour que la politesse de l’un soit l’in- des lieux, pas de politesse.
jure de l’autre.

Sur Loss, c’est un peu pareil. Par exemple, une des


pires injures au sein de l’empire de l’Hemlaris est
POLITESSE ET CONVENTIONS
d’adresser la parole, dans sa maison, à une femme à Saluer : la poignée de main pour saluer est courante,
laquelle on n’a pas été présenté, fût-elle la dernière mais pas systématique. Les Hégémoniens comme
des servantes. Alors que ne pas saluer les femmes les Hemlaris et les Ar’anthias des Cités-Unies ne se
dans une maisonnée armanthienne est un très bon touchent jamais pour saluer. Les premiers saluent

71
Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

bras levés, les seconds s’inclinent plus ou moins bas est traité comme un membre de la famille, mais en
selon le rang leur interlocuteur. Les Dragensmanns échange offrira son aide le temps de son séjour. Pour
se saluent en se donnant des accolades et de grandes les Dragensmanns, celui qui est invité dans une de-
claques sur l’épaule. Les Jemmaïs placent leur paume meure laisse un présent et repart avec un cadeau de
à plat sur la paume de leur vis-à-vis. Les Teranchens la famille. Dans les Plaines de l’Étéocle, l’invité a les
serrent la main, mais feront souvent l’accolade. Enfin, pieds lavés par une des femmes de la maison, esclave,
les San’eshe s’embrassent s’ils se connaissent ou se servante ou fille de la famille. Dans l’Athémaïs, un
présentent en guise de premier salut. invité dispose des esclaves de la maisonnée comme si
elles lui appartenaient, mais en échange il doit laisser
Se présenter : les Lossyans se présentent la première un présent, même une pièce de monnaie.
fois par leur prénom, leur cité d’origine et leur sur-
nom, puis parfois leurs titres et nom de famille. C’est À table : la fourchette est une fantaisie connue seule-
très fréquent qu’une femme rajoute « fille de » pour ment dans l’Hégémonie. Les gens mangent à la main
informer son interlocuteur de l’identité de son tu- ou s’aident de cuillères et couteau. Les baguettes
teur officiel. Si elle est mariée, elle remplacera par sont répandues dans l’Hemlaris, les Cités-Unies et
« femme de ». Armanth, mais pas dans l’Athémaïs. On se met à
table les mains lavées. Les esclaves doivent manger
Entrer dans une maison : chez les Athémaïs, on se dé- au sol, sauf sur ordre exprès de leur maître. Dans
chausse, comme dans l’Hemlaris. Dans toutes les Mers les banquets et réunions de famille, les femmes ne
de la Séparation, on ne pénètre pas armé sans y être mangent pas avec les hommes, une tradition qui dis-
expressément invité, sauf chez les Dragensmanns pour paraît dans l’Athémaïs. En Hégémonie, les femmes
qui se désarmer est une faiblesse et chez les Hemlaris mangent après les hommes. Chez les Dragensmanns,
dans le cas de leur aristocratie. Chez les Jemmaïs et tout le monde est affalé à table en même temps,
les Nomades des Franges, on vide sa gourde devant esclaves compris.
la porte pour la faire remplir dans la maison
Hommes et femmes : on ne touche pas à une femme
Hospitalité : on ne peut refuser l’hospitalité à une sans son consentement, que ce soit pour la gifler ou
personne dans le besoin, un homme invité ne doit lui attraper le bras. Quand un homme accompagne
y commettre aucun crime ou affront. La plupart des une femme, celle-ci est à sa gauche pour éviter qu’une
peuples respectent cette règle, bien que les Svatnaz et femme gêne l’homme chargé de la protéger quand il
les San’eshe y soient très réticents. Dans l’Hemlaris on dégaine son arme. Cette règle est imposée aux es-
accordera le gîte et le couvert à un non-Hemlaris, mais claves femmes, qui doivent marcher à gauche de leur
le plus souvent dans une remise ou une étable. L’invité maître. L’homme entre en premier dans une maison
Ref. 14778
LA VIE QUOTIDIENNE

parce qu’en cas de traquenard, c’est le premier qui de la Séparation, une femme ne dénude jamais sa
s’exposera. Même une Femme d’Épée aura bien du gorge : les décolletés ne sont jamais plongeants. En
mal à changer cette habitude. Le fait de laisser s’as- Athémaïs, les femmes portent, sous des robes as-
seoir une femme avant l’homme qui l’accompagne sez légères, des pantalons et chausses. Enfin, chez
n’est pas une politesse répandue sauf dans le Sud, les Hégémoniens, comme chez les Gennemons, les
comme le fait de céder systématiquement sa place femmes se couvrent les cheveux. Et dans l’empire
assise à une femme. En général, les Lossyans le font d’Hemlaris, jamais une femme, sauf pour des ques-
selon la santé ou l’âge, pas selon le genre. tions de travail, ne laisserait entrevoir ses jambes, ses
bras ou exposer un décolleté.
Titres de politesse : les langues lossyannes emploient
en général plusieurs pronoms et conjugaisons des- Les codes vestimentaires masculins existent aussi,
tinés uniquement aux formules de politesse et aux mais sont plus larges. Si être torse et bras nus est
rangs sociaux. Les titres sont donc assez peu usités, commun, il est très malvenu de se découvrir au-des-
la politesse est dans la langue elle-même. Le tutoie- sus du genou, pour des raisons similaires à celles
ment est le plus courant et se pratique par défaut, le des femmes : seuls les esclaves dévoilent leurs cuisses.
vouvoiement est une déférence marquée. L’athémaïs C’est d’ailleurs pour cela que dans tout l’Athémaïs,
comporte cinq pronoms de ce type et une conju- jamais un esclave ne portera de kilt ou de jupe
gaison pour les rangs sociaux, donc on emploiera par-dessus ses braies, car ce sont des attributs ré-
un des trois pronoms pour marquer l’intimité ou la servés aux hommes libres. On tolérera cependant
neutralité avec son interlocuteur ou pour signifier des exceptions pour raison de travail, plus facilement
ses intentions amicales. Les deux autres sont pour que pour les femmes. Toutes ces considérations sont
l’un réservé aux parents et supérieurs proches, pour respectées avec plus de liberté par les Jemmaïs, les
l’autre aux éminences. On emploie donc peu : mon- Erebs et les Dragensmanns, mais ignorées par les
sieur, seigneur, altesse, etc. Seule exception, le terme Forestiers ; quant aux San’eshe, ils vivent à demi nus,
« madame » qui insiste sur le respect — mais aussi sur hommes et femmes.
la différence sociale — envers toute femme. L’autre
exception concerne les autorités de l’Église, nommées Concernant les parures, les tatouages et les bijoux,
« Excellence ». Les Dragensmanns se moquent tota- il y a là aussi quelques règles : on ne porte jamais
lement des titres, y compris concernant leurs chefs. de ras-de-cou ; les ras-de-cous et colliers serrés sont
Dans l’Empire de l’Hemlaris, les formules, pronoms des colliers d’esclaves que nulle personne libre n’ar-
et titres de politesse sont strictement codifiés. borerait. C’est pratiquement la seule contrainte gé-
nérale. Les bijoux sont très variés, avoir des oreilles
Les rendez-vous : les Lossyans ont rarement des percées est commun chez les femmes, mais aussi
montres, il n’y a pas d’horloges sur chaque place et chez beaucoup d’hommes. Les bijoux faciaux et
tout le monde mesure habituellement le temps à la piercings ne sont pas inconnus, mais vus comme
position du soleil. Les Lossyans pour se donner ren- des apparats tribaux et primitifs. Seules les esclaves,
dez-vous se fient à l’aube, au zénith, au crépuscule, et particulièrement les Languirens, ont les tétons
ou à des choses aussi précises que « cet après-midi ». percés. Ça ne viendrait pas à l’idée d’un homme ou
On ne s’offusque donc pas vraiment d’un retard et d’une femme libre.
l’on va plutôt s’en inquiéter.
Les tatouages sont assez répandus. Il est plus facile
de les afficher pour les hommes que pour les femmes,
LES CODES VESTIMENTAIRES mais ces dernières apprécient ces décorations intimes
et indélébiles. Ce sont le plus souvent des motifs
Les premiers codes vestimentaires concernent les décoratifs complexes, rarement des scènes représen-
règles de décence, en fonction de la morale conci- tatives. Il est commun qu’une esclave soit tatouée
lienne, et tout ce qui concerne la nudité. Ils sont par son propriétaire pour en accroître la beauté et
d’ailleurs en partie partagés par les peuples non la valeur. Les tatouages faciaux existent chez les
conciliens, San’eshe exceptés. Pour résumer : la nu- Ar’anthias des Cités-Unies et chez les Forestiers, un
dité est très mal vue, comme se découvrir le ventre peu plus rarement chez les Dragensmanns.
et les cuisses.
Les seules restrictions des couleurs concernent
Tout ce qui va du genou à la poitrine, chez la femme, l’usage du rouge carmin et du bleu ciel. Le rouge
doit être couvert. Pas de ventres ou de dos à l’air, profond est la couleur exclusive des capes et toges
ni de jupette. Ces fantaisies font partie des signes des tribuns et des légionnaires ordinatorii, et le bleu
ostentatoires des esclaves, dont on exige souvent céruléen est la couleur du deuil en général. Quant
qu’elles exposent leurs formes. Autant dire que toute aux chaussures et bottes à hauts talons, elles sont
femme libre évite ce type de méprise. Dans l’en- peu répandues, mais portées par les hommes et les
semble des cultures conciliennes, on évite les tenues femmes les plus aisés pour compenser une petite
moulantes, sauf pour raisons pratiques. La robe ou taille, plus rarement par coquetterie. Les talons ai-
la jupe longue est de rigueur, et dans le sud des Mers guille n’existent pas.

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Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

NOURRITURE, BOISSONS ET ÉTOFFES


D ire que les Lossyans ne mangent pas vraiment
comme les terriens du 21e siècle serait enfoncer
une porte ouverte. Nous allons décrire leurs habitu-
Le doli : une boisson fermentée et salée préparée à
base de lait et de levures de pain, qui se conserve
bien. Pratiquement sans alcool, d’un goût âcre et fort,
des alimentaires, les produits les plus courants, et les c’est la boisson des enfants et des esclaves domes-
plus typiques, ce qu’on trouve dans les auberges, mais tiques, parfois aromatisée d’épices ou de miel.
aussi dans les étals des tisserands et des drapiers.
Les habitudes, les coutumes et les produits à dispo- L’hydromel : si les Dragensmanns adorent cela, ils
sition varient beaucoup, on va donc faire beaucoup n’en sont pas les inventeurs, ce sont les Forestiers,
de généralités. qui exportent à prix d’or leur recette. L’hydromel est
localement produit partout, bien que ce soit une bois-
son festive : les abeilles lossyannes sont plus dange-
LES BOISSONS reuses que celles de la Terre.

Les Lossyans boivent peu d’eau et l’on évite au- Le somnae ou vin des rêves : produit à partir de la
tant que possible de se désaltérer à la rivière. La fermentation de l’applerine, un fruit athémaïs res-
raison est simple : l’eau peut tuer. Les épidémies semblant à une sorte de pêche violette. C’est un di-
pour cause d’eau contaminée font des ravages et gestif très doux et sucré. Son abus a des effets envou-
les étangs et rivières grouillent de parasites. Les tants, voire hallucinogènes. Certains vins très forts
Lossyans boivent de préférence des boissons fer- sont employés comme drogue.
mentées ou bouillies, y compris le lait. Les jus de
fruits, peu courants, sont l’exception. Le Me-kwei : une bière douceâtre, mais très forte en
alcool, d’origine hemlaris, bue soit très froide, soit
La boisson la plus courante est la bière que l’on pré- très chaude, produite à partir de la fermentation du
pare à base de grains fermentés, le plus souvent en riz et du sorgho. Pour un Occidental du 21e siècle,
fonction de ce dont on dispose sur place. La vraie cela se rapproche du saké.
bière au malt d’orge ou de blé et houblon, assez char-
gée d’alcool, est une bière festive. La version courante
est une bière blanche et amère, nourrissante et légère
en alcool.

Juste après vient le thé. Il y a des quantités de varié-


tés, qui regroupent les tisanes et infusions, mais la
plupart des mélanges incluent des feuilles de la plante
de théier, que l’on fait pousser partout. Certaines va-
riétés et certains mélanges dépassent en prix les vins
les plus rares.

Enfin, il y a le vin qui est produit partout dans les


Mers de la Séparation, jusqu’aux limites sud de l’Hé-
gémonie. Les Étéocliens en ont fait une de leurs spé-
cialités, disputée uniquement par les Teranchens. Les
Athémaïs en boivent beaucoup et constitue souvent
la boisson principale des travailleurs, coupé d’eau
(bouillie bien sûr) et légèrement épicé. On distingue
deux grands types de vins, nommés respectivement
le « Saccato » littéralement la piquette, et « l’Aurovim »,
le vin de garde. Le premier est acide, se boit coupé
et ne se conserve pas. Le second est mis en bouteille
et est l’apanage des gens aisés.

Quelques boissons typiques


Le kumat : des graines dorées issues d’une graminée
géante que l’on torréfie et qu’on broie avant infusion.
L’odeur et le goût rappellent le café, c’est une boisson
LA NOURRITURE
très courue. Avec une simple tasse, n’importe qui se Commençons par les évidences : il n’y a ni réfrigé-
retrouve insomniaque pour douze heures. Il existe rateur, ni lyophilisation, ni conserves stériles. Bien
une méthode pour en faire un poison. que pour le dernier cas, la technique existe, elle est

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Ref. 14778
LA VIE QUOTIDIENNE

complexe, méconnue et peu répandue encore. Sans Les dattes : la datte lossyanne ressemble un peu
compter qu’elle n’est pas infaillible. Les seuls moyens à celle de la Terre, mais fait presque la longueur
efficaces de conserver la nourriture sont de la sécher, d’une main. Les dattiers poussent lentement, mais
la saler ou la fumer, ce qui n’est pas adapté à tous les produisent beaucoup. Le fruit, sucré et farineux, est
produits. Les serres ou cultures sous toit climatisées séché ou réduit en farine.
sont un luxe : avoir un produit exotique frais est rare,
quand ce n’est pas tout bonnement impossible. Le loba : poisson de haute mer, le loba ressemble à
la bonite terrienne et pèse plus que le poids d’un
Les Lossyans se fournissent en produits locaux. Seules homme. Sa chair est rouge et a un goût assez fin. Le
les bourses les plus remplies permettent d’acheter cer- loba est malaisé à conserver, mais abondant. Tout
tains produits frais exotiques qu’on parvient à grand port a des navires de pêches qui en amènent des
prix à faire pousser. Les Lossyans sont contraints aux quantités à destination des citadins.
saisons pour leur variété alimentaire : et si une saison
a été mauvaise, on va devoir taper dans les réserves. La pandira : une volaille lossyanne qui ressemble à
Une mauvaise année peut facilement finir en famine. une grosse pintade au plumage chamarré.
Quant à la viande, qui est un produit onéreux, elle est
en fait assez rarement fraîche : on va la sécher, la saler, Le til : une graminée dont la fibre est employée pour
la transformer en charcuterie et la faire durer toute tisser des étoffes solides et chaudes. Sa graine est
l’année. Le sel est cher : comme il est indispensable, il comestible ce qui fait du til la céréale la plus cultivée
fait l’objet de taxes conséquentes. dans le monde. Mais si elle fait un pain convenable,
son gruau a un goût de carton.
On mange avant tout du pain et des recettes céré-
alières comme le gruau. C’est un des plats chauds La banane : très répandue dans tout le sud-est des
communs pour le petit peuple, agrémenté de légumes Mers de la Séparation. On la sèche, on la confit, on
frais ou secs, parfois d’un peu de viande salée quand en fait des farines et elle est très commune, avec des
on a les moyens. Le riz est assez répandu dans tout dizaines de variétés.
l’est des Mers de la Séparation, et constitue une al-
ternative goûteuse aux céréales bouillies. Les légumes La larente : grand poisson d’eau douce, vorace, mais
courants sont surtout les pois et fèves qu’on peut facile à élever. Sa chair se sale et se conserve très
faire sécher comme quelques fruits. Certains légumes aisément, et on le consomme presque partout.
comme les choux peuvent être traités et conservés
en saumure. Enfin, les légumes frais sont ceux de la Le sika : on l’élève pour son lait, son cuir, sa viande et
saison. Les salades sont un mets peu répandu. sa laine dans le Nord. La viande de sika se conserve
moins bien que celle du mora.
Manger de la viande fraîche est un luxe, bien que
l’élevage soit répandu et que nombre de fermes Le qasit : un tubercule à mi-chemin entre la patate et
peuvent abattre un ou deux moras pour l’année. En le topinambour, à la saveur sucrée et douceâtre. Un
général, on élève des bêtes pour leurs produits lai- des légumes qui se conserve le mieux sans traitement
tiers ; vaches, chèvres (il n’y a pas de moutons sur particulier et remplace la pomme de terre.
Loss), mais aussi sikas et même ghia-tonnerres. Ils
permettent d’avoir des fromages et du lait et ils sont
très répandus. La chasse permet de se fournir en
gibiers, mais chasser dans le monde de Loss n’est
LES ÉTOFFES ET TISSUS
pas sans risques conséquents. Le plus courant apport En l’absence de moutons, et les mammaliens n’ayant
en protéines animales est la pêche, très développée. quasiment pas de toison ou de fourrure, il y a donc
Le poisson se sèche et se conserve aisément, et les quelques différences avec les tissus de la Terre.
élevages de poisson d’eau douce sont répandus. Mais
cela reste inaccessible aux plus pauvres. La plupart des étoffes sont soit fournies par des
végétaux, comme le til qui permet de tisser des
fibres cotonneuses douces et chaudes, soit par des
Quelques aliments typiques
insectes, car il existe une demi-douzaine de fils de
Le mora : mammalien aux allures de phacochère soie différents aux propriétés variées. Restent enfin
consommé comme le cochon. D’un développement les cuirs, très répandus. Les fourrures sont plutôt
rapide, sa viande grasse est facile à conserver et rares et proviennent en général du Grand Nord.
transformer en charcuterie. Il est répandu partout. Seul le sika possède une toison un peu fournie, mais
seulement dans le Grand Nord, qui exporte sa laine
L’applerine : fruit de l’athémaïs dont l’arbuste pousse à grand prix.
aisément même sur les mauvais terrains, tant qu’ils
sont ensoleillés. Le fruit est aisé à sécher, mais on Les Lossyans ont appris à extraire de leur foison-
veille à ne pas manger ceux qui auraient commencé nante nature plusieurs latex employés en industrie,
à fermenter, car ils ont des effets psychotropes. mais aussi dans la confection. La plupart du temps,

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Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

ce sont pour des vêtements et accessoires utilitaires et Le til : une fibre tirée d’une céréale comestible très
pour l’imperméabilisation. Mais on les emploie aussi courante. Cotonneuse, chaude et douce, l’étoffe qu’on
pour des renforts et pièces flexibles de vêtements en produit est employée dans toute la draperie et la
très ajustés, des corsets aux vestes. Il existe quelques confection, mais aussi dans la voilerie.
combinaisons moulantes, mais c’est peu répandu et
destiné aux monte-en-l’air ou aux gens cherchant un Le lin : autre fibre très répandue et prisée, le lin per-
vêtement très isolant. met des vêtements légers, doux et agréables à por-
ter aussi bien en climats chauds que froid, selon la
finesse de l’étoffe. Solide, facile à teindre et peindre,
Les textiles et étoffes sur Loss
il est employé dans tous les domaines.
La laine : produite par les sikas au Grand Nord des
Mers de la Séparation, elle vaut très cher. Elle est Le chanvre : fibre épaisse et rugueuse, elle est surtout
surtout destinée à la draperie et la tapisserie. employée en cordages, sacs et tapisserie.

Le velours : produit lui aussi à partir de la toison Les cuirs : il existe des quantités d’applications et de
courte des sikas d’élevage. Il est plus commun que la formes de cuir employées en confection et ses appli-
laine, mais très recherché. cations industrielles et domestiques sont sans fin. Son
prix dépend de son traitement.
Le tussah : soie d’araignée étéoclienne, donnant un fil
et un textile plus épais que la soie et moins vaporeux. Les latex : voir plus haut
Il est répandu et d’un prix très abordable.
Les fourrures : comme mentionnés plus haut, les four-
La soie : il en existe une demi-douzaine de variétés. rures sont un luxe rare. Les mammaliens n’en ayant
C’est une spécialité de l’Hemlaris, mais adoptée par presque pas, celles-ci ne viennent que du Nord et en
les Cités-Unies et même dans tout l’Imareth. C’est faible quantité.
une étoffe prisée et répandue, assez onéreuse selon
sa qualité.
Ref. 14778
L’ESCLAVAGISME ET LE HAUT- ART

Elena réalisa qu’elle venait d’être cédée pour une fortune. Mais si elle avait appris auprès des autres filles que
souvent, plus une esclave était vendue cher, plus son sort et son futur seraient assurés d’être agréables et doux,
ici elle était persuadée du contraire. Elle pouvait lire dans les yeux du Bey une démence vicieuse et sadique, le
régal qui lui chatouillait le ventre et lui caressait l’ego au plaisir qu’il aurait à user de sa nouvelle acquisition
pour ses plus pervers plaisirs. Oh, Elena n’avait aucun doute qu’il ferait attention à ne pas l’abîmer trop vite. Elle
était rousse et terrienne, d’une beauté rare et unique par son métissage, d’une féminité sauvage et rebelle. Mais
même Priscius au moment de serrer la main de son client, en lui tendant la laisse d’Athéna, fut saisi d’un remords
pénible qu’il du étouffer immédiatement.
L’esclavagiste prit juste le temps de glisser quelques mots à Elena, avant de laisser Jharin prendre possession
de sa nouvelle acquisition :
— Tu viens de sauver ma maisonnée, sois-en fière. Et du prix que ton maître a payé pour te posséder. C’est
un des plus grands honneurs que peut recevoir une esclave.

Les Chants de Loss, Mélisaren

L’ESCLAVAGISME ET LE HAUT-ART
P oint culturel d’autant plus important qu’on le
retrouve dans pratiquement toutes les socié-
tés et cultures de Loss à l’exception des San’eshe,
elle n’a plus d’Honneur. Elle est de facto, si l’on en
doutait encore, un animal, une propriété. Parce que
tout simplement, un esclave n’a plus ni le droit ni les
l’esclavagisme sur Loss est un sujet assez vaste et moyens de défendre son honneur ou de le faire dé-
assez complexe pour nous, humains occidentaux fendre par sa famille. L’esclave ne fait que refléter et
du XXIe siècle. Pour les Lossyans, l’idée de posséder représenter l’honneur de son maître. Lui n’en a pas,
un être humain n’est absolument pas choquante, sauf si un exploit force la société à lui en reconnaître.
sauf pour quelques cultures non conciliennes. Les
Lossyans ne considèrent pas la notion d’humanité Sans Honneur, un Lossyan n’en est plus un. C’est
comme un droit inaliénable de naissance, mais un ce point qui effraie tant tout le monde concernant
statut qui se gagne, se mérite et donc peut être perdu l’asservissement. Il lui est alors tout retiré : pro-
ou retiré. Sur Loss, l’esclavagisme n’est pas si diffé- priétés, possessions, droits, nom, dignité et même
rent de ce qu’il fut sur Terre, à l’époque romaine et leur humanité. Certains préféreront mourir plutôt
durant une partie du moyen-âge. que d’être asservis. Pourtant, personne ne considé-
rerait l’esclavage comme inacceptable, c’est même
L’esclavage est plutôt répandu. C’est moins une force pour beaucoup de Lossyans une bonne solution de
de travail qu’un luxe et une marque de rang social, lutte contre la plus grande pauvreté des indigents et
un signe extérieur de richesse. On emploie bien des l’insécurité des rues. Et asservir un barbare ou un
esclaves pour les travaux les plus pénibles, mais la Terrien Perdu est une évidence, puisque ce sont de
vraie richesse, c’est d’avoir des esclaves de compa- pauvres hères qui ne comprennent ni les Vertus ni
gnie à son service. Posséder des esclaves ou souhaiter les bienfaits de l’Église.
en posséder est tout à fait normal, tout comme en
exploiter et en faire commerce. Le Haut-Art, l’art de
savoir asservir, est considéré comme un talent noble,
sacré et admirable.
LES ESCLAVES
Il n’y a pas d’équivalent de traite négrière sur Loss ;
et Armanth et quelques autres villes mises à part,
LOSSYANS ET L’ESCLAVAGISME nulle part de forte concentration de communauté
d’esclaves dans un périmètre limité. L’esclavage ne re-
Les Lossyans partagent pratiquement tous des va- présente pas une source de revenus par l’exploitation
leurs, les Vertus, qui de leur point de vue les diffé- d’un grand nombre d’entre eux dans des plantations
rencient des animaux : l’Honneur, le Courage et la ou des ateliers.
Sagesse. L’idée que certains individus soient dépour-
vus de l’une de ces Vertus ne les surprend pas, mais Il existe cependant des chantiers, mines et carrières
à leurs yeux, cela signifie que celui-ci n’est alors plus où des condamnés aux travaux forcés sont exploités
humain : au mieux c’est un barbare, au pire une bête dans des conditions si rudes qu’ils ne vivent guère
stupide et indigne de considération. plus de quelques années ; en majorité des criminels
condamnés et des prisonniers de guerre. Il est rare
C’est vis-à-vis de ces principes, de ces corrélations qu’un esclave soit envoyé aux mines sans avoir com-
culturelles, que les Lossyans jugent qui est humain et mis de faute grave, à moins d’être tombé sur un pro-
qui ne l’est pas. Mais une fois une personne asservie, priétaire sans scrupule ni pitié.

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CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

Il n’y a guère qu’au maximum 5 à 6 % de la popula- se voir offrir la jouissance de biens et privilèges par
tion d’une cité-État d’asservis. Et plus les commu- son maître. Il ne dispose pas plus de son nom, que
nautés sont petites, plus ce pourcentage se réduit. Les son propriétaire peut modifier à sa guise, que de
deux seules exceptions sont Anqimenès et Armanth. son intégrité physique. Ce dernier est parfaitement
Anqimenès compte 10 à 12 % d’esclaves et Armanth en droit d’user de sa propriété à sa convenance, y
un peu moins de 10 %, principalement par son Marché compris de la vendre, la prêter, la donner, la sou-
aux Cages, le commerce d’esclaves étant une de ses mettre aux sévices et châtiments qu’il voudra, ou
grandes sources de revenus. Aux grands marchés, encore lui ôter la vie.
Armanth peut parfois se retrouver avec presque
250 000 esclaves, dont 50 000 environ en vente et en Cependant, les esclaves sont protégés par des conven-
transit dans ses murs. tions coutumières : il est considéré comme déshono-
rant de maltraiter ou affamer son esclave, de négliger
sa santé et son bien-être, ou encore de le mutiler
À noter qu’il y a eu des époques dans l’Italie de la ou le tuer gratuitement. Un esclave est un investis-
Rome antique où il y avait jusqu’à 2 à 3 millions sement qui n’est pas anodin et une représentation
d’esclaves, c’est-à-dire un tiers de la population. de l’honneur de son propriétaire. Il n’est pas rare
Même l’ensemble de l’Hégémonie d’Anqimenès qu’un esclave soit affranchi à la mort de celui-ci, tout
n’en abrite pas autant. comme il est courant qu’un esclave ayant accompli un
haut fait regagne ainsi sa liberté. Celui qui traite de
manière cruelle et injuste son esclave non seulement
Hommes et femmes asservis risque de provoquer une rébellion et des drames,
mais entache son honneur et sa réputation.
La plupart des esclaves domestiques sont des femmes.
Les Lossyans préfèrent les femelles, aussi bien pour Si toute rébellion ou fuite d’esclaves est châtiée dure-
des questions de contrôle que de plaisir, mais aussi ment, le propriétaire peut lui aussi être condamné à
de prestige. De plus, le Haut-Art est rarement pra- de lourdes amendes, voire à des peines plus lourdes
tiqué sur des mâles. Une esclave est en général une encore. Un propriétaire d’esclaves est responsable de
servante domestique, un animal de compagnie et une ce que commettent ses esclaves : les dégâts provoqués
source de distractions sexuelles. On ne les emploie pas par l’esclave sont de sa responsabilité.
aux champs ou dans les ateliers et industries. Pour un
Lossyan, il n’y a guère de différence entre posséder Les Lossyans sont plutôt bienveillants avec leurs
un chat ou un chien et un esclave ; sauf que ce dernier esclaves et en prennent soin. Mais il ne faut pas le
a des qualités supplémentaires indéniables et qu’il lui prendre comme un fait constant : les sadiques, les
est possible de temps en temps de regagner sa liberté. bourreaux et les salopards existent comme partout.
Il y a des esclaves maltraités et certains meurent des
Un homme asservi est le plus souvent un forçat : soit sévices qu’ils subissent, tandis que d’autres mettent
un ennemi capturé, soit un criminel. Les Lossyans ne fin à leur jour. Légalement, rien ne peut être atten-
sont guère tendres avec eux et ceux-ci connaissent té contre un homme qui maltraite un esclave, sauf
un sort franchement déplorable. Les Lossyans ont par sa propre famille en portant plainte pour dégra-
du respect pour leurs esclaves femmes. Si elles ne dation d’une possession familiale. Le plus souvent,
sont plus considérées que comme des animaux de quand un propriétaire a un souci avec son esclave
compagnie, elles sont souvent chéries et plutôt bien ou souhaite s’en débarrasser, il se contente de le
traitées, même si leur sort peut parfois être fran- revendre. La vente et le commerce d’esclaves sont
chement glauque, comme les houris de bordels. Les notoirement encadrés, soit par l’Église, soit par les
hommes, eux, sont traités comme une force de travail confréries de la Guilde des Marchands, les condi-
corvéable à merci, dont la vie n’a aucune valeur. Les tions de vente aussi bien que les prix et les contrats
forçats condamnés aux pires peines sont envoyés sur de cession.
les chantiers et aux mines, et leur vie est en géné-
ral courte et misérable. Les seuls à s’en sortir un Une esclave peut enfanter, et selon les cas et la décision
peu mieux sont les gladiateurs, mieux considérés et de son propriétaire, son enfant sera asservi à sa puberté
quelque peu respectés, qui ont une petite chance un ou affranchi dès sa naissance et adopté par la famille.
jour de gagner leur affranchissement s’ils parviennent Il faut noter qu’affranchir une esclave n’est pas si
à rester en vie et briller dans l’arène. rare. Souvent ce sera pour l’épouser ou l’offrir en
mariage, pour l’adopter dans la famille ou pour la
récompenser d’un haut fait.
Statuts légaux
Un esclave est une propriété, et un bien mobilier avec
Les types d’esclaves
un statut légal à mi-chemin entre un humain, et un
animal. Aucun Lossyan ne nierait vraiment qu’un On peut distinguer plusieurs types d’esclaves, en
esclave est un être humain, mais il n’a aucun droit fonction de leur usage, mais aussi de leur dressage
en théorie. Il ne possède plus rien, bien qu’il puisse (voir plus loin) :

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Ref. 14778
Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

Les esclaves domestiques : ce sont les serviteurs de vent, ce genre de rôle est pris par des apprentis ou les
maisonnée, chargés des tâches d’entretien domes- enfants des ouvriers et que les esclaves sont en général
tiques et des corvées. Selon la taille du domaine et chers, ils ne sont guère répandus sauf dans les plus
la richesse de la famille, ils seront spécialisés, comme grands centres industriels, comme les chantiers navals
les cuisiniers, par exemple. Certains peuvent être des d’Armanth ou les manufactures de soie de Cymiad.
nourrices ou des gouvernants pour les enfants de
leur maître. Leurs journées peuvent être longues et
Les traditions et lois de l’esclavage
harassantes, mais il est de coutume de leur offrir un
jour à deux jours de repos par semaine lossyanne et Quelques généralités sur les contraintes et interdits
la permission de quitter le domaine pour la journée. des esclaves. Ils varient largement selon les régions,
donc ils ne sont portés ici qu’à titre général :
Les esclaves de compagnie : assignés à une personne
en général, mais pas forcément, ce sont le plus souvent Il n’est pas exceptionnel de voir un esclave
les esclaves les mieux traités qui tiennent tenir com- armé, mais cela sera toujours vu d’un mau-
pagnie à leur maître et dont les corvées sont assez ré- vais œil. Cependant, en cas de risque, on
duites, la principale étant le service et quelques tâches met à disposition des esclaves des maison-
ménagères, comme laver le linge de leur propriétaire. nées des armes pour défendre leur vie, mais
Ils peuvent être formés aux arts musicaux et lyriques surtout celle de leurs propriétaires. Il est
ou être simplement d’agréable compagnie, voire une fréquent que les lois locales interdisent que
source de prestige par leur apparence et la qualité les esclaves portent la main à toute arme,
de leur service. Ces esclaves suivent leur propriétaire sauf sur ordre exprès de leur maître.
partout ; il est fréquent qu’ils aient des moments de
loisir quand celui-ci est occupé ou n’a pas besoin ou Les deux pires crimes que peut commettre
désir de leur présence. un esclave sont la tentative de rébellion et
l’agression d’une personne libre. Dans les
Les esclaves des plaisirs : elles sont pratiquement deux cas, c’est pratiquement systématique-
toujours formées par le Haut-Art dans les Jardins ment la mort ; mais il est possible que selon
des Esclaves des plus grands maîtres-esclavagistes. le degré de gravité du crime, et la décision
Elles sont choisies sur d’exigeants critères esthé- du propriétaire, il lui soit accordé une grâce :
tiques et intellectuels pour être des esclaves de la sentence se transformera alors en châti-
compagnie aux talents accomplis, que ce soit dans ment public, au fouet le plus souvent. Et le
les arts, les danses, la culture générale, les services propriétaire devra éventuellement s’acquit-
du bain et des massages et bien entendu, les ser- ter de dédommagements.
vices et les jeux sexuels. C’est parmi les esclaves des
plaisirs que se trouvent les esclaves les plus chers. La fuite est un autre crime châtié avec
L’immense majorité des esclaves des plaisirs sont cruauté. Il est presque impossible pour un
des femelles. Les mâles destinés au plaisir sexuel esclave qui porte un linci d’échapper aux
des femmes sont rares. chiens qui traqueront son odeur. Mais dans
tous les cas, malheur à l’esclave qui est rat-
Les esclaves publiques : elles sont la propriété d’une trapé. Il peut espérer échapper à la mort ou
personne ou d’une confrérie/guilde, qui en use dans à la mutilation une première fois, mais sera
des auberges, maisons de bains ou encore maisons sévèrement puni. La seconde fois, il sera
de prostitution. Les houris, esclaves prostituées, sont mis à mort lentement et en public pour ser-
enchaînées aux alcôves où elles reçoivent les clients, vir d’exemple.
parfois plusieurs dizaines par jour. Les autres es-
claves publiques n’ont guère un sort plus enviable. Le vol est un crime qu’on ne pardonnera
Si une esclave travaillant comme serveuse dans une pas à un esclave, y compris celui d’un qui-
auberge est assez bien traitée, les esclaves de mai- gnon de pain parce qu’il meurt de faim. Si
son de bain sont exploitées comme les houris pour l’on reproche lourdement au maître sa né-
maximiser les revenus de leur propriétaire. Celui-ci gligence aux besoins et à la santé de son
veille à leur santé et leur sécurité, car il en aurait esclave, celui-ci sera durement et publique-
de sa poche et pourrait, en cas de plainte de clients ment châtié. En cas de récidive, il est pro-
ou d’accidents, devoir en répondre devant la loi ou bable qu’il soit amputé d’une main et aban-
les personnes lésées. Mais la vie de ces esclaves sera donné à son sort.
souvent courte et dramatique.
Tout maître s’attend à ce que son esclave obéisse de
Les esclaves de travail : indifféremment hommes et son mieux et exécute aveuglément les ordres qu’il
femmes, mais assez peu courants, les esclaves de tra- lui donne. La désobéissance de l’esclave n’est pas
vail sont les auxiliaires des ouvriers et des patrons tolérée, surtout devant témoin. C’est un bon moyen
des ateliers et manufactures. Leur tâche est similaire pour un Lossyan de risquer de perdre la face, donc il
à celle des apprentis et des aides. Comme le plus sou- n’hésitera pas à punir d’autant plus sévèrement que

80
Ref. 14778
L’ESCLAVAGISME ET LE HAUT- ART

l’affront aura été marquant. Il est impensable qu’un Chanteuses de Loss. Dans la mesure où l’Église et
esclave mente, triche, ou dissimule quoi que ce soit. ses Dogmes sont notoirement sexistes, l’emploi du
Ceux-ci ne se gênent pas pour le faire, mais le châ- Haut-Art sur des mâles est très récent, bien que cela
timent est rude pour qui se faire prendre. Selon les fonctionne, quel que soit le genre, la culture ou la
maîtres, ce point peut aller très loin, ceux-ci exigeant personnalité de la victime.
que leur esclave ne leur dissimule rien, y compris
leurs pensées et désirs les plus intimes, avec une Le Haut-Art demande des qualités particulières, aussi
interdiction complète de tenter de voiler ou cacher bien en termes de psychologie, que d’entêtement, de
quoi que ce soit. sens de l’observation, de l’adaptation, de la résistance
mentale, ainsi qu’une certaine imperméabilité à la
On ne reconnaît pas la filiation et la famille d’un pitié. Un esclavagiste qui sait le manier peut parfai-
esclave : une fois asservis, ils n’existent plus, même tement être un homme compatissant et chaleureux,
pour une mère. Selon les cas, un propriétaire est en mais il n’a aucun droit de laisser parler sa pitié de-
droit de retirer les enfants d’un esclave, soit pour les vant les suppliques et les souffrances des esclaves
adopter, soit pour les élever en futurs esclaves (les qu’il va dresser.
Lossyans n’asservissent pas les enfants avant la qua-
torzième année). Les liens fraternels ne sont pas plus
Le conditionnement
respectés que le reste. Séparer des frères, des sœurs
ou des jumeaux ne pose pas plus de dilemmes aux Une esclave qui subit le Haut-Art se voit dénuée de
Lossyans que s’ils devaient séparer les chiots d’une tout ce qui constitue l’identité et l’amour-propre de
même portée. chaque individu. Elle est enfermée nue, privée de
nourriture, d’intimité, de la moindre liberté de mou-
Enfin, on attend de tout esclave respect, déférence vement ou de parole, forcée à supplier et à obéir
et humilité. L’injure ou la provocation, le dédain, ou aveuglement à des ordres très simples répétés encore
le mépris d’un esclave pour une personne libre n’est et encore, pour pouvoir simplement boire, manger
jamais toléré. L’individu lésé peut très bien ne pas ou faire ses besoins. Avec patience et cruauté, elle est
attendre d’aller demander des comptes au proprié- avilie jusqu’à ce qu’elle ne puisse espérer améliorer
taire et battre l’esclave frondeur lui-même, qui, par la son sort qu’en acceptant sa situation et en coopérant
suite, risque bien d’en reprendre une couche quand totalement avec son tortionnaire qui poursuivra sa
son maître l’apprendra. tâche jusqu’à obtenir sa pleine obéissance. Tout le
principe pour le dresseur est de pousser sa victime
dans ses derniers retranchements pour briser toute
LE HAUT-ART once de capacité à la rébellion. Une fois ceci obtenu, il
pourra reconstruire l’esclave en un parfait animal dé-
C’est par ce nom que la plupart des Lossyans dé- voué à servir, qui ne remettra plus son sort en cause.
signent le dressage des esclaves. Pour eux, c’est un
art, codifié et presque sacré. À l’origine, le Haut-
Le dressage
Art a été conçu et perfectionné par l’Église pour
parvenir à mettre sous un joug psychologique com- Une fois l’esclave totalement brisée et conditionnée,
plet Chanteuses de Loss, seule alternative selon les elle peut alors être éduquée et dressée. Selon les cas,
Dogmes du Concile à leur destruction complète. cette étape sera sommaire et rapide ou au contraire
poussée avec le même raffinement et la même cruauté
Le Haut-Art est un ensemble de techniques et de mé- à la perfection, que ce soit pour la musique, la danse,
thodologies de dressage et de conditionnement d’un les arts corporels ou ceux des bains, du massage, des
être humain, visant à annihiler toute autonomie réelle plaisirs sexuels, bref, tout ce qui pourrait augmenter
et capacité de rébellion. Il y a un millénaire que ces la valeur du futur produit mis en vente. Une éduca-
techniques sont peaufinées ; chaque génération d’es- tion parfaite et aussi poussée peut prendre des mois,
clavagistes les a testées, perfectionnées et enrichies. voire des années.
Le Haut-Art a fait l’objet de traités de références,
jusqu’à devenir une institution. Désormais, ce talent Tout est codifié et soigneusement planifié, y compris
est si performant que très peu de gens peuvent résis- les punitions et châtiments corporels pour réussir
ter au Haut-Art convenablement usité. Une poignée ce travail. Le plus ardu de cette pratique consiste à
de semaines suffit pour briser n’importe quel indivi- détruire et reconstruire en ne laissant qu’un mini-
du, et à peine trois à quatre mois pour s’assurer que mum de séquelles physiques et psychologiques, afin
le conditionnement l’aura rendu incapable de sur- d’obtenir une esclave parfaite. Dans ce domaine, les
vivre sans le joug d’un maître ou d’avoir des velléités violences sexuelles font partie des choses à éviter,
de recouvrer sa liberté. autant que la torture.

Le Haut-Art est rarement employé sur les hommes. Le Haut-Art demande du temps, des moyens, du
Il a d’abord été conçu dans l’esprit des Ordinatorii personnel, d’autres esclaves formées — les éduca-
de l’Église comme un outil efficace pour asservir les trices — et un lieu adapté. C’est un métier qui exige

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Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

un investissement : les Jardins des Esclaves emploient taires et des pillages. Les pirates de l’Imareth n’hé-
beaucoup de monde. C’est pour cela que le Haut-Art sitent guère à lancer des razzias au cours desquelles,
est réservé à la formation des esclaves de compagnie en sus de piller, ils font des prisonniers qui seront
et des esclaves des plaisirs. alors revendus partout. Enfin, certains peuples sont
considérés comme des viviers de capture, comme les
En général, même le meilleur esclavagiste doit comp- Svatnaz et les San’eshe.
ter avec environ 5 % de pertes et d’échecs. La pres-
sion psychologique et physique est intense, surtout Comme mentionné plus haut, le pourcentage d’es-
les premières semaines, avec l’isolement de l’esclave, claves dans la population est relativement faible.
ses privations, les mauvais traitements pour le briser C’est un produit de luxe souvent destiné le plus sou-
et environ une personne sur vingt, voire plus, ne le vent à l’agrément et au prestige, ce qui implique que
supportera pas et basculera dans la folie ou attentera les acheteurs sont exigeants et que tout est mis en
à sa vie ou à celle des autres. Dès le début du dres- œuvre pour préserver les marchandises en bon état
sage, l’esclavagiste veille à bien observer ses captifs et en tirer le meilleur prix.
pour déceler les risques et les anticiper.

Personne ne sort indemne de ce dressage. Une per-


sonne qui l’a subi en restera fragilisée, émotive, dé-
pendante et très sensible à l’autorité. Selon les cas,
cela créera un manque et un besoin si vif que la
personne qui a vécu le Haut-Art ne pourra jamais
vraiment être libre. Elle cherchera toujours le joug et
la protection d’un maître, instinctivement. C’est pour
cela que certains Lossyans disent qu’il est stupide
d’affranchir ces esclaves-là. Ce n’est pas véritable-
ment un cadeau qu’on leur fait.

LE COMMERCE DES ESCLAVES


Dans tout le nord des Mers de la Séparation, le
marché de l’esclavage reste encore en partie sous le
contrôle de l’Église. Elle attribue les licences, forme
les esclavagistes au Haut-Art et valide et contrôle
les cargaisons et convois de marchandise. C’est une
manne financière et l’Hégémonie est une très grande
importatrice d’esclaves. C’est même un des meilleurs
clients des marchés d’Armanth.

Mais au sud, la Guilde des Marchands a conquis le


secteur depuis plusieurs décennies. Elle fixe désormais
les prix, les conditions de vente et la plupart des es-
clavagistes préfèrent aller se former à Armanth, qui
concentre les plus prestigieux Jardins des Esclaves de
toutes les Mers de la Séparation, ce qui étonne toujours
puisqu’Armanth est la cité-État la plus progressiste de
tout Loss. Mais le fait est qu’une bonne partie de la
richesse de la cité des Maîtres-marchands est due au
commerce d’esclaves. Après tout, après le loss-métal,
les femmes sont la richesse la plus convoitée ; le com-
merce d’esclaves femelles est donc florissant.

L’approvisionnement
Les Lossyans font des raids pour se procurer des
esclaves, mais ils ne sont pas si courants. Ils n’en
font pas non plus l’élevage. Les principales sources
d’approvisionnement sont la vente de filles par les fa-
milles pauvres ou souhaitant se débarrasser d’enfants
non désirés, l’asservissement des indigents arrêtés
et en second lieu les captures des campagnes mili-

82
Ref. 14778
L’ESCLAVAGISME ET LE HAUT- ART

Si les forçats sont mis en vente en lot comme du bé-


La mise en vente
tail, les esclaves femelles — et mâles de luxe — sont Les esclaves sont vendus sommairement vêtus, mais
vendues le plus souvent à l’unité. On vend toujours les filles des plaisirs les plus chères sont offertes
aux enchères, et l’on fait ses offres toujours devant au regard concupiscent des acheteurs uniquement
le produit. Le plus grand marché d’esclaves est le parés de quelques bijoux. Le vendeur, qui peut être
Marché aux Cages d’Armanth, qui peut accueillir l’esclavagiste, mais aussi un commissaire-priseur,
jusqu’à 50 000 esclaves dans son enceinte et dispose détaille les qualités et l’éducation de l’esclave et
de pas moins de 100 estrades de ventes, ainsi que s’arrange pour faire grimper les enchères en faisant
d’un luxueux hall des enchères, le Celendiaterio, où s’exposer la fille mise en vente. Il n’est pas rare que
dans une ambiance festive agrémentée de serviteurs des esclaves exposés sur les estrades se rebiffent
et de musiciens, sont mises en vente parmi les plus ou renâclent à l’exercice, certaines le faisant à des-
chères des filles de Loss. sein ; elles ont ainsi quelques chances de pouvoir
attirer l’attention d’un acheteur plutôt qu’un autre,
et toutes savent que leur sort dépend à cet ins-
Ref. 14778
CHAPITRE 1 : LE MONDE DE LOSS

tant de qui deviendra leur nouveau propriétaire. LES LANGUIRENS


Les incidents sont rares sur les estrades les plus
luxueuses, où les esclaves mises en vente ont ac- Les esclaves les plus recherchées et les plus rares
cepté leur sort. C’est plus courant dans les ventes sont les languirens, des esclaves des plaisirs condi-
de captifs non dressés qui sont alors entravés pour tionnés à ne pouvoir résister à la moindre sollici-
éviter un accident. tation érotique et prendre du plaisir même dans la
douleur. Les languirens sont toutes des esclaves des
Enfin, certaines ventes se font en privé : les clients plaisirs ayant subi le Haut-Art de main de maître et
les plus riches se déplacent dans les Jardins des bien entendu destinées aux jeux sexuels, y compris
Esclaves pour prendre le temps de choisir tout à loi- les plus rudes et pervers.
sir leur future acquisition. Cependant, la Guilde des
Marchands exige qu’un certain nombre d’esclaves Le languori ne peut s’apprendre que de languiren à
soient mises aux enchères publiques : un esclavagiste languiren, mais il est admis que certaines personnes
peut très bien perdre sa licence s’il n’en fournit pas naissent naturellement languiren. La formation d’une
le quota qu’on lui demande. Cette exigence de la part languiren — là encore, il est très rare d’user de cette
de la Guilde est motivée par les taxes qu’elle retire de technique de dressage sur un esclave mâle — est un
ces ventes et les bénéfices de la location des places conditionnement physique qui s’apparente clairement
d’estrades et des commissaires-priseurs. à une forme de torture particulièrement perverse,
pénible et difficile à endurer : c’est un mélange d’iso-
En général, le prix d’une esclave éduquée sommaire- lation sensorielle, de drogues hallucinogènes, et de
ment varie de 200 à 1 000 andris d’argent, en fonction stimulations de plaisir et de douleur en imprégnant
de son âge et de sa beauté. Ce qui représente dans le sujet choisi d’odeurs masculines pendant tout le
le cas le moins onéreux environ le prix de dix che- languori. Au bout de dix à quinze jours de condi-
vaux. Une captive sans dressage vaut communément tionnement, l’esclave ne pourra plus contrôler son
50 andris d’argent. Quant aux esclaves des plaisirs instinct et ses sens en présence d’un homme. Une
passés par le Haut-Art puis éduquées avec soin, leur languiren frémit et frissonne érotisée à la moindre
prix oscille entre 1 500 et 10 000 andris d’argent, tout caresse et est presque incapable de résister au désir.
en pouvant parfois s’élever à plus de dix fois cette Son degré de dépendance, de docilité et d’asservis-
somme. Les esclaves rousses sont rares et très pri- sement est sans commune mesure avec toute autre
sées et, même sans dressage, s’échangent à au moins esclave formée même par le Haut-Art.
250 andris d’argent et les esclaves Terriens Perdus le
double de cette somme au minimum. Les languirens sont terriblement érotiques de fé-
minité exacerbée et animale et elles usent de leur
séduction plus qu’aucune autre esclave ne pourrait
ESCLAVES CHANTEUSES DE LOSS y parvenir, tant elles sont à la fois affranchies du
moindre frein moral et dépendantes du besoin de
Il y a très peu d’esclaves Chanteuses de Loss. À ressentir et trouver du plaisir. Certaines languirens
Armanth, cité de 1,2 million d’habitants, elles ne ne peuvent plus se satisfaire de ce besoin autrement
sont guère plus d’une soixantaine. Celles-ci sont qu’à travers la douleur ou l’humiliation d’être uti-
donc particulièrement précieuses et d’autant plus lisées comme des jouets sexuels sans aucun tabou.
choyées ; le prestige d’un homme qui possède une C’est pour elles une nécessité aussi impérieuse que
esclave Chanteuse est énorme et sa possession fait la faim, mais bien plus difficile à satisfaire. Parfois,
alors partie de ses trésors les plus précieux. Il est chez certaines, le languori a laissé de telles séquelles
inutile de parler de prix, bien entendu. Tout le monde qu’elles ne pourront jamais vraiment être assouvies. Il
envie celui qui possède une Chanteuse de Loss, et est de notoriété publique qu’une languiren délaissée
certains propriétaires le cachent même. En général, ou insatisfaite peut dépérir ou se livrer à n’importe
c’est cependant l’Église qui possède le plus grand qui pour trouver le moyen d’assouvir ses besoins et
nombre de Chanteuses, la loi lui permettant d’exiger calmer sa faim dévorante et constante.
que lui soient remises les rousses et les Chanteuses
de Loss, même si cette loi est assez peu respectée. Un languori coûte cher, mais la rareté et le prix des
Estimer le prix d’une esclave Chanteuse de Loss est languirens sont dus au taux d’échec du condition-
presque impossible, mais sur les marchés d’Armanth, nement. Un sujet sur trois environ n’y résiste pas et
les acheteurs sont prêts à enchérir à au moins meurt, ou devient dément. Il est difficile de choisir
15 000 andris d’or ! la bonne candidate apte à supporter le traitement
et le plus souvent, les expertes à en juger sont les
À noter que vu leur grande rareté, il existe quelques languirens elles-mêmes.
élevages d’esclaves rousses, même si l’idée d’élever
un cheptel d’esclaves n’est pas courante. L’un des éle- Les enchères d’une languiren démarrent entre 3 000
vages les plus connus était celui de la Maison Tuna, à 4 000 andris d’or en général, et se terminent à trois
une ex-grande famille marchande d’Armanth. ou quatre fois ce prix, sauf exception.

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Ref. 14778
Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATION

CHAPITRE 2

PEUPLES ET
CIVILISATIONS
L e monde de Loss réunit quinze peuples
et autant de coutumes et de civilisations
différentes, tous originaires de la Terre. Tous
LES PEUPLES DE LOSS
LES RÉGIONS ET CAPITALES
88
112
ont réinventé un mode de vie pour s’adapter à
leur nouveau monde. Chacun à leur manière, L’ÉGLISE DU CONCILE DIVIN 138
ces peuples jouissent d’un niveau technolo- LA COSMOGONIE 138
gique semblable à la Renaissance Da Vinci-
punk, grandement amélioré par les capacités LES DOGMES DE L’ÉGLISE 139
du loss-métal et une inventivité à peine freinée
par la religion. ORGANISATION DE L’ÉGLISE 140
Pourtant Loss, c’est aussi un équilibre précaire LA GUILDE DES MARCHANDS 146
prêt à basculer à nouveau dans la guerre, alors
que s’affrontent par influences et conspirations LES LOIS ET PRINCIPES 149
interposées deux idées en apparence irréconci-
liables, incarnées par l’Église du Concile Divin, LE CONSEIL DES PAIRS 150
et la Guilde des Marchands. Plus qu’une guerre LES MAÎTRES-MARCHANDS 151
idéologique entre progressisme et obscuran-
tiste, c’est une lutte politique sans merci à qui LA COUR DES OMBRES 154
des deux parviendra à imposer son pouvoir au
monde entier. FONCTIONNEMENT ET STRUCTURE 155
Entre ces deux idéaux et les deux puissances ACTIVITÉS 155
qui les incarnent, il y a une troisième force ;
la plus ancienne, la plus redoutée, la plus se- LES FEMMES D’ÉPÉE 158
crète. Celle des chamans, ceux qui écoutent
Loss. Et qui furent, autrefois, les protecteurs
PLACE DANS LA SOCIÉTÉ 158
des Chanteurs de Loss. COUTUMES ET LOIS 159
STRUCTURE ET ORGANISATION 159
Ref. 14778
Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

— Tu peux me dire pourquoi passer par cette terrasse-là, alors que c’est le jour du marché, et que c’est
toujours bondé ? On aurait pu prendre les chevaux, et faire le tour par les canaux au Sud !
Jawaad lâcha un sourire :
— J’aime cette foule. Il y a ma boutique de thés, plus loin.
Le maître marchand pointa d’un signe nonchalant une échoppe à la devanture coquette serrée entre deux
autres enseignes de commerce de bouche. S’y pressaient quelques clients devant un large étal chargé de bocaux
colorés et de pots d’épices de toutes sortes.
La foule était dense sur la rue, rassemblant un mélange bigarré de Lossyans de tous les horizons. Les
Athémaïs au teint café au lait dominaient, suivis des noirs des Franges, de la même ethnie qu’Abba, des Étéocliens
au profil fier et altier et des Teranchens reconnaissables à leurs cheveux châtain clair et leur peau hâlée. Armanth
accueillait la plus grande diversité des peuples des Mers de la Séparation et, en tournant simplement la tête, parmi
tous ces visages, on pouvait aisément apercevoir des Hégémoniens grands et massifs, quelques Dragensmanns
aux cheveux de feu et à l’allure imposante et des Hemlaris, de l’Empire du Trône de Rubis, aux yeux bridés et
à la peau de caramel ; et la liste des peuples, des ethnies et des atours exotiques était encore longue.

Les Chants de Loss, Armanth

LES PEUPLES DE LOSS


S ont présentés ici les 15 peuples habitant autour
des Mers de la Séparation. Nul ne sait vraiment
si d’autres cultures existent, mais légendes et rumeurs
Langage
Le Rethien, qui emploie des sinogrammes voisins de
abondent à ce sujet. Vous noterez qu’il n’y a pas de ceux de l’Hemlaris et dont l’écriture est particulière-
peuple et ethnie d’origine amérindienne. C’est un ment ardue à maîtriser.
sujet abordé dans le Livre Les Secrets de Loss.
Vertus

LES AR’ANTHIAS DES CITÉS-UNIES On s’en doutera, la Vertu la plus importante pour
le peuple des Cités-Unies est l’Honneur ; davantage
Asiatiques métissés de Méditerranéens, quelques- dans sa dimension familiale et publique que person-
uns d’entre eux sont blonds, mais la plupart du nelle et intime. Les Ar’anthias se soumettent aux
temps, les cheveux sont noirs ou châtain. Ce sont codes sociaux pour ne pas froisser leur famille, leur
des architectes et des marins remarquables, plutôt clan, leurs voisins. Puis derrière vient le Courage, ver-
citadins. Dans les grandes plaines d’Allenys, les tu d’importance, car c’est la seule qui permet de bri-
Ar’anthias sont des nomades élevant des troupeaux ser les codes sociaux de ce peuple très traditionaliste.
de ghia-tonnerres. Superstitieux, traditionalistes et
très attachés aux dogmes de l’Église, ils font grand
Organisation
cas de l’honneur et de la fidélité à leur peuple et
leurs croyances. Monarchie constitutionnelle. L’aristocratie domine les
cités-États, mais les rois sont entourés d’un conseil très
influent élu par l’Église et les représentants les plus
Apparence générale
riches et puissants de la cité. Les femmes sont tota-
Sveltes et de taille moyenne (1,75 m à 2 m), la peau lement exclues de la vie publique ou politique. Il n’y
assez foncée, parfois dorée. Des traits très fins et a que dans certaines carrières militaires que celles-ci
métissés, aux yeux légèrement bridés. Les cheveux et peuvent — difficilement — échapper au carcan pa-
yeux noirs dominent, mais on trouve facilement tous triarcal de la société ar’anthia. À noter que les Cités-
les types de cheveux et de couleurs d’yeux par leur Unies sont souvent en conflit les unes avec les autres.
métissage. Pour référence, les habitants des Cités-
Unies ressemblent aux Philippins.
Religion
Le Concile Divin. Les Ar’anthias ont de surcroît
Traits de personnalité
leurs propres coutumes et superstitions que l’Église
Susceptibles et fiers, religieux, aventureux, curieux, ne tente pas réellement d’endiguer, les rites propres à
patriotes, traditionalistes, superstitieux et coura- ce peuple allant dans le sens du respect des Dogmes
geux. Une blague athémaïs dit que pour empêcher du Concile, très fortement pris au sérieux chez eux.
un Ar’anthia d’agir, il suffit de dire que ce qu’il fait Les Ar’anthias acceptent très mal de voir des femmes
est interdit quelque part dans un Dogme. s’occuper de religion et le nombre de femmes dans
l’administration civile de l’Église et dans les légions

88
Ref. 14778
LES PEUPLES DE LOSS

ordinatorii des Cités-Unies est donc très faible. La Mais les cités-États ne peuvent pratiquement rien
seule exception concerne les Athim’si, les vierges exporter en nourriture et elles dépendent énormé-
gardiennes des esprits des ghia-tonnerres, un culte ment de la pêche. Leurs exportations concernent en
mineur des Ar’anthias. grande majorité les métaux de toute sorte, avant tout
le fer, le cuivre, le nickel et l’argent, mais aussi l’étain,
le mercure, le manganèse, et même du minerai de
Ennemis et alliés
titane ainsi que du soufre. Cette richesse provient
Les Cités-Unies ont pour partenaires privilégiés des contreforts des Monts sans Tête et des Abîmes,
l’Hégémonie, l’Étéocle, le Terancha et, paradoxa- deux chaînes montagneuses au volcanisme effréné.
lement l’Athémaïs. Mais elles voient d’un mauvais L’orfèvrerie et l’artisanat des métaux, les esclaves en
œil Armanth et sa décadence. L’entente est encore nombre, quelques épices et quelques têtes de bétail
plus difficile avec l’Imareth, dont les piratent consi- ghia-tonnerre complètent leurs exportations.
dèrent les Cités-Unies et ses côtes comme une cible
de pillages et un bon vivier d’esclaves à revendre ;
Notes culturelles
les batailles navales entre les deux peuples ne furent
pas rares. Enfin, les Cités-Unies ont des relations Les femmes ar’anthias sont traitées de manière assez
tendues avec l’Hemlaris, malgré des échanges com- similaire à celles de l’Hemlaris, c’est-à-dire comme
merciaux fructueux. des demi-personnes et souvent plus considérés
comme des propriétés et des monnaies d’échange
que comme des êtres libres à part entière. L’esclavage
Capitale
y est commun et répandu, très codifié et le sort des
Allenys, surnommée la Cité aux toits d’or, à cause esclaves est fréquemment sordide ; les Cités-Unies
de l’usage en masse de bronze pour les dômes et emploient presque autant de forçats pour ses mines
décorations des toitures. 250 000 habitants y vivent que l’Hégémonie.
l’hiver, environ 180 000 l’été, les nomades reprenant
leur route dans les plaines.
Noms
Masculins : Bayan, Alh’anam, Benjarin, Arvin, Mahal,
Production et commerce Ron, Tueblar, Hannaki, Rafiqui, Raed, Thej, Ymar
Les Cités-Unies sont autosuffisantes en matière agri-
cole : la région est assez riche et le génie de bâtisseurs Féminins : Cheska, Mae, Kini, An’im, Chirito,
des Ar’anthias fait le reste en matière d’agriculture. An’iham, Biri, Jalana, Kelin, Lualathi, Viri, Thima

89
Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

LES ATHÉMAÏS ET ARMANTH tôt d’allure maghrébine, mais les Armanthiens sont
très métissés et peuvent posséder des traits cauca-
D’origine hellène, méditerranéenne, et moyen-orien- siens, asiatiques ou scandinaves même dans les plus
tale, les Athémaïs sont un gros melting-pot de anciennes familles.
peuples venus de toutes les Mers de la Séparation,
même si les moyen-orientaux dominent dans leur
Traits de personnalité
apparence. On compte cependant pratiquement
toutes les ethnies de Loss à Armanth. Peuple curieux, Curieux, ambitieux, commerçants, explorateurs,
ouvert et progressiste, les Athémaïs accordent une trompeurs, ouverts d’esprits, vantards, pragmatiques.
grande place au commerce et aux échanges, juste Les Athémaïs ne sont pas connus comme de grands
avant leur soif de connaissance et de savoir. Armanth guerriers, et sont réputés préférer se préoccuper
l’Hérétique, aussi surnommée la Décadente, est la d’eux-mêmes et privilégier la négociation et les ar-
seconde plus grande et puissante cité de Loss, et ses rangements à la confrontation directe.
dirigeants et habitants n’ont guère de considérations
pour l’Église du Concile, même si celle-ci reste pré-
Langage
sente et respectée par son aristocratie.
L’athémaïs, la lingua franca des Mers de la
Séparation. L’alphabet est alpha-syllabique et com-
Apparence générale
porte quelques centaines de signes, ce qui le rend un
De taille moyenne (1,75 à 2 m), la peau mate à brune, peu ardu à apprendre.
mais on peut trouver de tout, bien que les traits
aquilins et racés des moyen-orientaux dominent. Les
Vertus
cheveux vont de châtains à noirs, souvent bouclés,
voire parfois crépus, mais là encore on peut trouver La Sagesse est la plus recherchée des Vertus pour
facilement toutes les teintes. Les Athémaïs sont plu- les Athémaïs : elle symbolise le savoir, la culture, la
connaissance et la négociation, tout ce qu’ils aiment.
La moins privilégiée est l’Honneur. Ce n’est pas que
les Athémaïs s’en fichent, mais le leur est un peu à
géométrie variable. Tout dépend de l’enjeu et de la
manière de s’en sortir sans trop l’entacher.

Organisation
Démocratie représentative et oligarchie de fait pour
Armanth ; monarchie constitutionnelle et oligarchie
pour le reste de l’Athémaïs. Les cités-États sont
le plus souvent dirigées par un Bey entouré d’un
conseil élu par les guildes marchandes et l’aristo-
cratie. Armanth est dirigée par un Conseil des Pairs
choisis uniquement parmi les Maîtres-marchands les
plus puissants de la ville, un sénat de la noblesse, un
du peuple et un Elegio élu par le peuple. Les femmes
ne peuvent pas voter, mais elles peuvent être dési-
gnées candidates ou représentantes des différentes
assemblées démocratiques, bien qu’elles ne puissent
se présenter d’elles-mêmes.

Religion
Le Concile Divin, mais l’Église doit y faire appliquer
ses dogmes avec beaucoup de compromis, et voit son
pouvoir politique réduit à une simple représentativi-
té. Armanth a un certain mépris pour l’Église, mais
l’aristocratie lui reste relativement fidèle, et le peuple
continue à la craindre. Les Athémaïs sont supersti-
tieux, ce qui aide l’Église, mais ils sont attachés à
des rites anciens, hérités de la culture étéoclienne et
de leurs divinités marines. Pour eux, la mer est une
divinité dont les Néréides, les nymphes des mers,
sont les filles qu’il faut respecter et à qui il faut faire

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Ref. 14778
LES PEUPLES DE LOSS

des sacrifices. C’est à la mer et aux Néréides que sont communes. Farouchement opposés à l’Église du
sont consacrés les mariages traditionnels Athémaïs. Concile, ils sont en permanence en guerre contre
l’Hégémonie d’Anqimenès.
Ennemis et alliés
Apparence générale
Les grands ennemis de l’Athémaïs sont l’Hégémo-
nie pour des motifs historiques et économiques, De type scandinave, entre 1,85 m pour les femmes
suivi de l’Hemlaris, un peu pour la même raison. et 2,10 m pour les hommes, à la peau claire, sou-
Les San’eshe les détestent aussi, mais eux n’aiment vent les cheveux blonds. Mais on trouve aussi des
personne de toute façon. Les Cités-Unies s’en mé- Dragensmanns aux yeux et aux cheveux noirs, sur-
fient, mais commercent et échangent beaucoup. tout chez les Eleksmanns, éleveurs de chevaux et
L’Athémaïs a de bonnes relations avec les Nomades de troupeaux de sikas. Les roux ne sont pas rares,
des Franges, tout le sud de l’Étéocle, et des liens puisque les Dragensmanns ne les considèrent pas
particulièrement forts avec Terancha, mais aussi comme des démons.
l’Imareth, malgré ses pirates.
Traits de personnalité
Capitale
Fougueux, aventureux, téméraires, assez belliqueux,
Armanth, une cité immense bâtie sur une lagune, qui facilement irritables, explorateurs. Les Dragensmanns
abrite 1,2 million d’âmes et a la particularité d’être ont un respect culturel très fort pour les animaux et
dépourvue de murailles. la vie sauvage, et évitent autant que possible toute
surexploitation de ressources naturelles.
Production et commerce
Langage
Armanth exporte quantité de produits finis, mais sur-
tout du bois de marine, de l’ébénisterie, des esclaves, Le Kaergen, dont l’alphabet runique, le Kaerg, com-
de la draperie, de la manufacture de métaux, de la porte 44 lettres. À noter que jamais un Dragensmann
technologie et enfin des épices et de l’orfèvrerie. Sa ne grave en vain de Kaergs sur une surface, ce serait
monnaie est presque un étalon monétaire pour toutes attirer dangereusement les esprits.
les Mers de la Séparation.
Vertus
Notes culturelles
Avant tout le Courage, puis la Sagesse. C’est un
Les Athémaïs accordent nombre de droits progres- peuple aventureux d’explorateurs qui mérite sa répu-
sistes aux femmes, y compris celui de propriété, de tation de témérité. L’Honneur chez les Dragensmanns
justice à titre personnel et de divorce, même si ce est lié au respect de sa parole et de sa famille. Mais
dernier droit est rarement usité dans l’aristocratie, ils mentent, trompent et volent sans vergogne et font
plus traditionaliste. Les femmes peuvent même y être montre d’assez peu de pitié avec des étrangers.
universitaires, professeurs, ou travailler de manière in-
dépendante. Paradoxalement, c’est un des peuples qui
Organisation
a le plus d’esclaves femmes et en fait le plus de com-
merce de luxe dans les Maisons et Jardins d’Esclaves. Monarchie clanique. Ce sont par les filles aînées des
rois et chefs de clans que passe la succession, celles-ci
choisissant leur futur époux qui deviendra le nouveau
Noms
chef de clan. Les femmes, même toujours sous la tutelle
Masculin : Abid, Ahmed, Andro, Domez, Roberto, familiale, sont donc grandement respectées et écou-
Menzio, Celio, Damazo, Bassem, Kais, Khalil, tées. Les rois et chefs ont toujours un conseil influent,
Rolando, Ottone, Melik où dominent la sagesse et la parole des chamans.

Féminin : Alma, Alya, Hedi, Lara, Ida, Lucia, Valeria,


Religion
Nahima, Kheira, Kalissa, Tamara, Madalena, Inaya,
Hadda. Religion chamanique en grande partie informelle
(le culte n’est pas l’apanage d’une élite) qui renie
totalement les principes de l’Église du Concile. Les
LES DRAGENSMANNS Dragensmanns sont proches de la nature, des an-
cêtres et des forces naturelles, invoquant aussi bien
Guerriers-cavaliers blonds, massifs et grands, mon- les esprits de la terre, de la mer et des bois, que
teurs de chevaux et des dragens vivant dans des des divinités comme Jormungen, le seigneur des
terres froides et rudes, non loin du cercle arctique. dragens, Wotan, le père des dieux, Adda, sa femme
Ce sont des hommes braves, fougueux et colériques, et protectrice de la famille, ou encore Ilmater,
de tradition chamanique. Les femmes guerrières y déesse des guerrières et des jeunes mères et son

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Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

frère Thor, seigneur des tempêtes et de la furie et


Notes culturelles
dieu des combattants. Les Dragensmanns pratiquent l’esclavage, mais
l’affranchissement et l’adoption dans le clan
après quelques années est quasi systématique. Les
Ennemis et alliés
Dragensmanns considèrent les Terriens perdus sur
Les Dragensmanns sont ennemis mortels avec toute Loss comme un présage de bon augure, et s’ils les
l’Hégémonie et ne cherchent jamais à discuter avec asservissent, ils les traitent avec respect, les consi-
eux. Soit ils les fuient, soit ils les attaquent. Ils ont dérant comme sacrés, et les appellent les Oubliés.
des liens forts et historiques avec les Forestiers avec La société dragensmann est relativement égali-
qui ils font souvent commerce et alliance, mais com- taire : pas loin d’un tiers des combattants sont des
mercent et échangent aussi avec l’Étéocle. Enfin, femmes, même si elles le restent rarement une fois
nombre de réfugiés svatnaz vivent désormais dans qu’elles ont des enfants ; et les hommes respectent
les clans dragensmanns. les femmes, voire apprennent à craindre leur colère
et leur solidarité. Les Chanteurs de Loss sont libres,
mais sous la tutelle et la surveillance des chamans.
Capitale
Dragensvard, puissante place-fort bâtie à flanc de fa-
Noms
laise sur la côte, disposant d’un vaste port et du plus
grand rassemblement connu de monteurs de dragens. Masculins : Ervain, Sven, Renson, Odgarson, Alfard,
Elle compte environ 75 000 personnes. Dunmar, Baradhuin, Hank, Khanmor, Thorson,
Cudrein, Thomarson, Brajar, Angvar.
Production et commerce
Féminins : Alyn, Brigid, Elain, Cuthmeia, Tharya,
En plus de la laine et de la peau de sika, les Ledda, Iris, Berena, Seren, Greda, Thebga
Dragensmanns échangent leur acier d’une qualité
exceptionnelle réputée partout. Ils exportent aussi
des chevaux et des huiles et composés biolumines-
cents extraits de mammaliens marins et côtiers de
LES EREBS
la zone arctique. Enfin, ils produisent et vendent en Issus de peuples moyen-orientaux montagnards et très
faible quantité du sang-de-feu, un kérogène puissam- secrets, les Erebs vivent du bois et de l’agriculture. De
ment inflammable. culture en partie matriarcale, très mystique, la sagesse
et l’observation du monde naturel tiennent chez eux
une très grande place, et ils ne reconnaissent pas la
foi de l’Église du Concile. C’est leur isolement, leurs
montagnes et leurs forêts qui les ont épargnés des
Croisades des Ordinatorii, et ils entretiennent de bons
échanges commerciaux avec Armanth.

Apparence générale
Assez petits (1,70 m à 1,85 m) et plus secs que les
Athémaïs, les traits plus arabisants et marqués, la
peau assez foncée. Étrangement les yeux bleus ne
sont pas rares, fruit de métissages anciens un peu
oubliés. Les Erebs ressemblent fortement aux habi-
tants du golfe Persique.

Traits de personnalité
Calmes, mystiques, méditatifs, assez fatalistes, as-
sez fermés au monde extérieur. Rarement de nature
guerrière, mais il en existe une caste, redoutée, les
Bhaarams. Un dicton athémaïs dit que quand un Ereb
vous adresse plus de 5 mots, c’est que vous êtes un
être spécial.

92
Ref. 14778
LES PEUPLES DE LOSS

Langage Capitale
L’Abalon, dont l’alphabet syllabique s’écrit en stries Harrimsid, qui en fait est un comptoir athémaïs d’une
le long de lignes verticales. Mais le plus souvent les douzaine de milliers d’habitants, où vivent quelques
Erebs emploient l’alphabet athémaïs. centaines d’Erebs et qui leur sert de marché extérieur.

Vertus Production et commerce


La Sagesse est primée par ce peuple, non dans son as- Du bois, des métaux (fer et cuivre), du mellia et autres
pect intellectuel et culturel, mais dans un sens profon- produits rares et précieux extraits de la canopée, et
dément plus philosophique et contemplatif. L’Honneur du poisson, dont des leregus, des crustacés dont la
est mis en avant dans la fidélité à la parole, aux tradi- viande peut être séchée et qu’Armanth raffole. Mais
tions, aux codes et à la Foi Ereb. Le Courage est res- le commerce extérieur n’est guère le souci des Erebs.
pecté lui aussi, mais pour les Erebs, il menace toujours
de se confondre avec l’orgueil et l’intrépidité. Notes culturelles
Les Erebs sont secrets et n’aiment pas s’ouvrir aux
Organisation
autres peuples de Loss, qu’ils considèrent comme
Elle est tribale. Les chefs des villages sont toujours, impurs et trop dévorés de passions matérielles. Ils
des hommes élus par chaque membre adulte du vil- se mêlent au minimum des affaires du monde et at-
lage. Cependant les chefs de famille sont toujours les tendent qu’on leur rende la pareille. Comme pour les
Anciennes, les grand-mères de la famille et même Dragensmanns, les Chanteurs de Loss y sont libres
le chef écoute son ancienne. Les ascètes et chamans et sous la tutelle des chamans et la surveillance de
des villages sont quant à eux conseillers spirituels et tous. Ils sont considérés comme sacrés. Les Erebs ne
matériels des chefs. La société Ereb est très figée, et pratiquent pas l’esclavage, mais ne font rien contre
fonctionne par castes. Celles-ci sont assez poreuses, qui le pratique, et n’accueillent que sporadiquement
mais changer de caste nécessite de respecter des des esclaves en fuite.
épreuves et des rites orchestrés par les ascètes et les
Anciennes, ou de faire ses preuves devant le chef
et son conseil. Ne pas avoir de caste chez les Erebs
condamne à ne pas recevoir d’aide de la communau-
té ; il est possible de perdre sa Caste, une punition
répandue pour des délits et crimes graves.

Religion
Chamanisme mystique basé sur les quatre éléments,
liés aux Vertus, ce qui en fait le dernier peuple los-
syan à suivre la voie chamanique des Vertus et don-
ner une importance à la Foi et l’Air, que l’on nomme
le Haana. Les croyances Erebs sont entièrement bâ-
ties sur les Vertus et leur signification symbolique.
La pratique ascétique demande beaucoup de rituels
méditatifs et d’épreuves initiatiques que peu d’indivi-
dus peuvent endurer. Le Haana consacre une grande
place à une profonde connaissance des phénomènes
naturels, et il s’avère que les ascètes et chamans sont
tous experts en climatologie.

Ennemis et alliés
L’Église en général voue les Erebs à l’Hérésie pour
des raisons évidentes. Les seuls alliés réels des Erebs
sont les Athémaïs. Mais les Nomades des Franges
commercent avec eux sans écueils, malgré leur
crainte des pratiques magiques et sombres à leurs
yeux des Erebs. Enfin, ces derniers ont des rela-
tions très chaleureuses bien qu’assez rares avec les
San’eshe, faisant exception à la haine de ce peuple
de tous les étrangers.

93
Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

Noms la plupart sont bruns aux yeux marrons, mais les


Masculin : Bilyad, Saafi, Khalad, Rashi, Emeth, blonds aux yeux bleus sont fréquents, et il leur naît
Khashif, Khan, Alam, Ali, Ferez, Malik, Zahad, régulièrement des personnes rousses. Leurs traits fins
Imran, Faruk et aquilins les font souvent considérer comme le plus
beau peuple de tout Loss.
Féminin : Noor, Leah, Hasfa, Emra, Fatima, Najil,
Areeba, Ayasha, Shabi, Tima, Anun, Rebi, Khama,
Traits de personnalité
Uhuri.
Fiers voire orgueilleux, traditionalistes, respectueux
des codes mais encore plus des Vertus, superstitieux
LES ÉTÉOCLIENS entre autres vis-à-vis de l’Église, cultivés, raffinés,
très sociaux.
D’origine hellène pour la plupart, les Étéocliens sont
un peuple noble et fier, à la haute stature, qui fait
Langage
grand cas du respect des codes et de l’honneur. Les
blonds sont nombreux parmi eux et c’est, avec les L’Hellensa, langue riche et complexe maniant la
Dragensmanns et les Forestiers, le peuple qui compte nuance et les paraboles, dont l’alphabet d’une tren-
le plus de naissances de roux. Malgré leur fidélité taine de signes est l’un des plus simples connus.
superstitieuse à l’Église, ils ont un grand attachement
pour leurs anciens mythes, croyances, et dieux. Les Vertus
Étéocliens ont une grande considération pour l’éru-
dition et comptent dans leurs rangs parmi les plus L’Honneur est la Vertu la plus mise en avant dans
grands savants connus. la culture étéoclienne dans sa dimension sociale et
personnelle, comme ciment de tous les rapports de la
société à ses membres. Chacun doit respecter sa place
Apparence générale
dans celle-ci. Mais les Étéocliens sont, heureusement
Assez grands parfois, mais dans la moyenne los- assez ouverts d’esprit et mesurent avec importance
syanne (1,80 m à 2 m), la peau hâlée voire foncée, et respect la valeur de la Sagesse à ce sujet, avec un
attachement particulier à l’érudition et aux arts. Ils
sont en général plutôt courageux, mais ce n’est pas
une Vertu majeure à leurs yeux.

Organisation
Démocratie représentative, où l’Église et l’aristo-
cratie pèsent un poids important sur la politique
des cités-États, mais ne restent qu’une partie des
Agoras dirigeantes qui sont cependant notoire-
ment oligarchiques. Les cités étéocliennes ont des
princes, mais la seule qui soit dirigée par l’un d’eux
est Nashera. Les femmes sont totalement exclues
de la politique. Exceptionnellement, une femme a
pu être désignée sur ovation comme membre d’un
Conseil de cité. Mais ces cas sont rares. Chez les
Étéocliens, le peuple et la bourgeoisie se mêlent
aisément, l’aristocratie formant une élite à part qui
a souvent charge des forces militaires des cités. Les
Étéocliens respectent énormément les tribuns de
leurs Agoras.

Religion
Le Concile Divin. L’Église est très influente dans
toutes les Plaines d’Étéocle, mais plus on descend vers
le sud, plus les Dogmes de l’Église s’assouplissent, et
laissent une place, bien que mineure, aux anciens
mythes et cultes d’origine grecque. Les croyances
locales des Étéocliens font directement référence à
des mythes, légendes et divinités d’origine grecque.
Y entendre invoquer Apollon, Héra, ou Poséidon ne

94
Ref. 14778
LES PEUPLES DE LOSS

surprend personne, et des officiants sont souvent in-


Noms
vités pour sacrer certains rites civils. Masculin : Athos, Berrus, Eschile, Naras, Octave,
Zaherd, Polympus, Rado, Rufule, Xanthos, Ansiphe,
Strobo, Adax.
Ennemis et alliés
La question est compliquée, car les Étéocliens ne Féminin : Agathe, Sisyphe, Lilandre, Clytia, Demi,
forment pas une unité politique. Ils sont un ensemble Chloé, Penera, Xamia, Maia, Melena, Junée, Hélène,
de cités-États avec leurs intérêts propres. On peut Euterpe.
résumer en disant que tout le sud de l’Étéocle est
nettement en faveur de l’Athémaïs, le nord en faveur
de l’Hégémonie, et les villes des côtes est en faveur
des Cités-Unies. Les Étéocliens craignent beaucoup
LES FORESTIERS DE L’ELMERASE
les Dragensmanns et les Forestiers, qui ont très Vivant au-dessus des Plaines de l’Étéocle dans des
mauvaise réputation. Mais ils commercent avec eux, forêts vastes, profondes et dangereuses, ce sont des
comme ils commercent avec l’Hemlaris. Le grand descendants de Celtes à la culture tribale. Comme
ennemi de tout l’Étéocle est finalement l’Imareth et les Svatnaz, ils sont souvent chassés comme cheptel
ses pirates. d’esclaves par l’Hégémonie, ainsi que par des chas-
seurs d’esclaves étéocliens ; mais contrairement à ces
premiers, les Forestiers affichent une résistance et
Capitale
une pugnacité qui font payer cher aux chasseurs d’es-
Nashera, la Cité Blanche, une cité ancienne au bord claves leurs raids et tentatives de captures. Comme
d’un très grand lac, d’une beauté époustouflante par on peut s’en douter, Les Forestiers sont particulière-
ses temples et ses jardins, cœur de la culture et de ment méfiants et prudents, ne commerçant qu’avec
l’art étéoclien, forte d’un demi-million d’habitants. précaution. Ce sont des archers redoutables et leur
société accorde une grande place à leurs femmes, qui
guerroient avec eux.
Production et commerce
Là encore, les Plaines de l’Étéocle sont si étendues
Apparence générale
que ses productions sont très variées. Mais c’est
avant tout le grenier à céréales de toutes les Mers Sveltes et souvent athlétiques, de taille moyenne
de la Séparation, ainsi que le plus grand producteur (1,75 m à 2 m), les blonds sont assez courants, mais les
de vins et de spiritueux. Elles fournissent aussi du châtains dominent. Les roux ne sont pas trop rares
textile en quantité, du bois, de la pierre, de l’argent, au sein de ce peuple. Leur peau est hâlée et souvent
du plomb, de l’or et disposent de quelques-unes des cuivrée. Les traits des Forestiers sont saillants et ra-
plus riches mines de loss-métal connues. L’artisanat cés, de type notoirement caucasien. Ils ont souvent
et l’art étéocliens (céramiques, verre, sculptures, ins- une allure générale de puissance physique
truments de musique) sont si prisés que c’est une
autre exportation en soi. L’Étéocle fait aussi com-
Traits de personnalité
merce d’esclaves, mais en importe bien plus qu’il
n’en exporte. Méfiants, rusés, fougueux au combat, très prudents
avec les étrangers, industrieux, protecteurs, raison-
nés. Les Forestiers fuient et se cachent dès qu’ils
Notes culturelles
soupçonnent l’approche d’Ordinatorii.
Les Étéocliens, loin de considérer la femme comme
sans valeur ou comme marchandise, ne lui accordent
Langage
cependant guère de place dans la vie civile. Celles-ci
n’ont que peu de droits face aux lois et à l’autorité Le Klam’prayen, qui ne possède pas d’alphabet, mais
patriarcale qui domine la société. Cependant, si au que les Forestiers écrivent avec celui de l’Hellensa.
Nord, les femmes sont isolées de la place publique
et soumises aux lois patriarcales toutes-puissantes,
Vertus
plus on va vers le Sud, moins la pression sociale
pèse sur elles et plus on leur accorde de droits et La Sagesse et le Courage presque à égalité. Mais la
de libertés. L’esclavagisme est courant dans l’Étéo- prudence et le sens de l’organisation de ces hommes
cle ; on y considère qu’un homme qui veut montrer industrieux et raffinés — même si les Étéocliens les
qu’il a réussi sa vie se doit de posséder une esclave. prennent pour des sauvages — les rendent plus sen-
Bien sûr, acheter et entretenir une esclave pour le sibles aux hommes sages et raisonnés. L’Honneur des
prestige n’est en général accessible qu’à des bourses Forestiers est un peu compliqué à saisir, car variant
bien remplies. selon qu’ils côtoient leur famille, leur clan, d’autres
Forestiers, ou des étrangers. Pour résumer : ils en ont
peu et en font d’autant moins cas qu’il y a peu de
lien avec leur interlocuteur.

95
Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

Organisation Ennemis et alliés


Tribale. Chaque tribu est organisée autour d’un À part les Dragensmanns, les Forestiers n’ont aucun
village ou d’une place forte, souvent arboricole et allié. Ils échangent avec les Étéocliens, mais avec
dissimulée. Les plus grandes places fortes sont inex- beaucoup de prudence.
pugnables et remarquablement organisées. Les chefs
de tribus sont choisis à la mort du précédent au
Capitale
cours d’épreuves physiques et intellectuelles ardues
et parfois mortelles, auxquelles hommes et femmes La Croisée peut être considérée comme telle, mais
peuvent participer. Les officiants du culte forestier, c’est un bourg de 4500 habitants de l’Étéocle qui sert
le plus souvent des femmes, président aux destinées de relais de commerce pour les Forestiers, dont les
des villages en interprétant les signes naturels et les plus grandes places fortes ne dépassent jamais les
visions des ancêtres. 2000 habitants.

Religion Production et commerce


Culte des ancêtres et des forces de la nature qu’on Produits de la forêt, dont du mellia, des résines, des
appelle généralement le Culte forestier. Ils ont beau- produits pharmaceutiques, mais surtout du cuir, de
coup de dieux et d’esprits tutélaires, où domine l’ivoire et des peaux. Les Forestiers produisent aussi
Adda, la déesse-mère. Elle est l’amante de Loss, qui du bois, de l’orfèvrerie et de l’acier, mais en font peu
est la grand-mère-terre qui adopte tous les genres et commerce. Il leur arrive aussi d’exporter quelques
toutes les formes. Enfin vient Deddain, le chasseur esclaves capturés dans l’Hégémonie.
sauvage, à la fois pourvoyeur du gibier, et seigneur
des fauves. Les sacrifices animaux et, parfois, hu-
Notes culturelles
mains font partie des rites. Chaque tribu, mais aussi
chaque guerrier reconnu, a souvent sa divinité tu- La société des Forestiers est très paritaire, c’est même
télaire liée aux ancêtres du clan. La Légende prend sans doute l’une des plus égalitaires de Loss dans
dans ses cultes une place majeure. Il y a des chamans les rapports entre hommes et femmes. C’est un des
forestiers, très rares, mais très respectés. rares peuples où il n’y a rien de surprenant à voir
une femme forgeronne, par exemple. La plupart des
femmes vivent au foyer et élèvent les enfants, en éle-
vant et cultivant la terre, mais elles le font aux côtés
des hommes. Et les jeunes guerrières forestières sont
très courantes. L’esclavagisme y existe, mais il est
assez rare, la plupart des esclaves des Forestiers le
sont suite à un crime grave, ou, car déjà trop asservis
et conditionnés, ils ne pourraient s’adapter à la rude
liberté de ce peuple.

Noms
Masculin : Eilpenn, Dedder, Maec, Heiddyn, Gymna,
Draaduin, Cadogan, Cydwalla, Nadyreith, Wilmot,
Vinfred, Yannis.

Féminin : Yemi, Yseult, Cuada, Anna, Birice, Daire,


Dailine, Emaine, Paine, Sanis, Sandra, Piri, Adyle,
Aëla.

96
Ref. 14778
LES PEUPLES DE LOSS

LES GENNEMONS Gennemons sont superstitieux et ruraux, proches de


leurs animaux. Le meurtre d’un de leurs chevaux
D’origine asiatique et sibérienne, métissée avec leurs ou griffons est un crime aussi grand que celui d’un
voisins, ce sont les habitants des marches côtières homme.
entre l’Hégémonie et l’Hemlaris. Ils ont donc passé
une bonne partie de leur histoire à subir les assauts
Langage
des deux empires. Ce sont des cavaliers indisciplinés
à l’honneur pointilleux et vif à s’emporter, vivant dans Le gennemon, qui n’a pas d’alphabet propre, mais
leurs grandes plaines de l’élevage de chevaux, grif- emploie les sinogrammes hemlaris
fons, longilas et sikas. Leur histoire tourmentée a forte-
ment renforcé l’identité patriotique des Gennemons…
Vertus
et leur méfiance face aux étrangers. On distingue les
peuples des plaines, nomades, et les peuples des cités, L’Honneur est d’une importance vitale dans la struc-
sédentaires et influencés par l’Hégémonie et la culture ture sociale gennemon, qui emploie peu monnaie et
hemlaris. Les deux peuples ne s’entendent guère. contrat. Les échanges sont basés sur la confiance
et la parole donnée, y compris pour les pactes, les
alliances et les unions. Trahir sa parole, ignorer une
Apparence générale
coutume ou ne pas respecter une promesse est pour
Asiatiques proches des Mongols de la Terre, avec eux inimaginable ; c’est d’ailleurs l’interprétation de
des métissages slaves. Ils sont plutôt massifs, mais ces concepts qui donnent lieu aux fréquentes disputes
pas très grands (de 1m70 à 1m90). Les cheveux sont tournant régulièrement à des guerres de clan. Il n’est
noirs et raides la plupart du temps, la peau hâlée, pas facile de négocier avec ce peuple quand on ne le
les yeux bridés noirs ou marrons. Les yeux verts sont connaît pas bien. Ce sont des gens courageux, voire
pour eux une sorte de signe exceptionnel de beauté ombrageux ; pour un Gennemon, régler un souci par
dangereuse, nimbée de démonisme. les armes est monnaie courante.

Traits de personnalité Organisation


Fiers, honorables et droits, mais indisciplinés, fa- Conseils de leaders aristocratiques et claniques, avec
rouches, batailleurs et prompts à la querelle. Les pour les clans nomades un certain mépris pour les ci-

97
Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

tés-États et leurs concitoyens sédentarisés, qui le leur Gennemons élèvent aussi des longilas de bât et en
rendent bien. Dans la société gennemon, les grandes échangent de temps en temps.
lignées issues d’ancêtres héroïques ou légendaires
dominent la société, appuyées par l’Église. Les plus
Notes culturelles
hauts rangs au sein des clans sont rarement dévolus
aux femmes. Mais dans les clans ruraux, cela arrive, Les cités-États gennemons collaborent peu et sont
bien que le rang — avant tout honorifique — de chef même très souvent en guerre. Les clans nomades
de clan soit toujours transmis aux enfants mâles. Le sont eux aussi souvent en conflit, mais de manière
mariage est très important pour les alliances de clan plus mesurée. Cependant, ils restent un peuple que-
et les coutumes afférentes y sont très complexes et relleur, prompt aux vengeances, aux raids et aux
surprenantes pour les étrangers (comme le rite de pillages entre clans. Mais ses membres s’unissent
l’enlèvement de la future épouse, ou celui du duel dès qu’il y a une menace extérieure. L’esclavage est
du futur époux contre les frères ou le père de sa pro- courant chez les Gennemons, mais ils accordent peu
mise). Fait peu courant, l’amour a un rôle important de valeur au Haut-Art.
dans ces unions, pourtant orchestrées par intérêt.
Noms
Religion
Masculin : Chulun, Kushi, Saek, Oyun, Narandag,
Celle du Concile Divin dans les grandes cités gen- Arundan, Chinghis, Raenkha, Baathior, Gandamar.
nemons, mais plus on va vers les clans nomades,
plus la foi de l’Église se mâtine de croyances locales Féminin : Nergui, Chimay, Saran, Saranerel, Altani,
et de rites complexes liés à des formes de magie et Chauli, Enkhi, Oyuni, Munkhtsaria, Delger, Hulan.
de divination. Ces rites, que les Gennemons nom-
ment le Kalumi, se retrouvent partout et s’ils restent
discrets dans les cités-États, ils sont vitaux pour les
membres des clans nomades qui n’entreprennent rien
LES HÉGÉMONIENS
sans consulter une Hama-kalu, la sorcière des rites Disciplinés, autoritaires, sexistes et orgueilleux,
Kalumi. Certaines d’entre elles sont aussi chamanes. d’origines nordique et slave, ce sont les habitants
du grand Empire religieux et conquérant dont
Anqimenès est la capitale. Ils sont les plus impor-
Ennemis et alliés
tants et dévoués fidèles de l’Église du Concile et
Les Gennemons se sont fait marcher dessus aussi bien considèrent comme légitime et juste que le reste
par l’Hégémonie que par l’Hemlaris, les deux em- du monde doive vivre sous leur joug. L’Hégémonie
pires se battant souvent sur les Marches de Gennema. est sans conteste à la fois l’un des lieux les plus ci-
Mais l’occupation de l’Hégémonie au siècle dernier vilisés du point de vue urbain, et la société la plus
et la dernière Croisade ont laissé des marques : les militarisée qui se puisse trouver. Pratiquement un
Gennemons détestent l’Hégémonie autant qu’ils la habitant sur huit est, de près ou de loin, membre de
redoutent. Ils ont de riches contacts commerciaux la structure religieuse et militaire des légions et de
avec l’Athémaïs et Armanth, qui a des comptoirs sur l’Église. C’est enfin sans conteste le peuple le plus
les côtes et à Mille-Feux. sexiste des Mers de la Séparation.

Capitale Apparence générale


Mille-feux est un port commercial florissant sur l’île Des Nordiques à la carrure imposante, mais d’appa-
d’Estis, célèbre pour ses multiples cultures en terrasses. rence moins puissante que les Dragensmanns (1,80 m
La cité puissamment défendue est forte de plus de à 2 m). Leurs cheveux sont majoritairement noirs ou
100 000 habitants ; paradoxalement, son pouvoir po- bruns, les blonds sont assez peu répandus, mais les
litique est assez réduit, les Gennemons la considèrent yeux bleus sont très fréquents.
simplement comme un terrain neutre d’échanges.
Traits de personnalité
Production et commerce
Racistes, disciplinés, cultivés, méfiants, fiers, reli-
Les grandes productions des nomades gennemons, gieux, sexistes, traditionalistes, industrieux et mili-
outre le textile et la laine de sika, sont les chevaux taristes. Le peuple est particulièrement craintif, voire
et les griffons. Mais ils n’exportent et vendent que servile, devant tout représentant de l’Église.
des races communes, même si ces animaux dressés
restent de grande qualité. Les marches de Gennema
Langage
sont très fertiles. Les cités-États et clans sédentaires
produisent et échangent beaucoup de céréales, fé- Le Qemedius, langue académique encore récemment
culents et légumes secs, ainsi qu’une matière fort très répandue dans la littérature érudite et scienti-
prisée : le sucre, extrait des racines du labasin. Les fique des Mers de la Séparation. La complexité de

98
Ref. 14778
LES PEUPLES DE LOSS

sa grammaire écrite — son alphabet emploie à la


Capitale
fois un système alphabétique, syllabique, et des idé- Anqimenès, la plus grande cité connue, avec près de
ogrammes — est légendaire. 2 millions d’habitants. C’est aussi la plus organisée et
la plus fortifiée, protégée par trois séries de remparts
culminant à trente mètres de haut.
Vertus
L’Honneur avant toute chose, aussi bien dans le res-
Production et commerce
pect des traditions, des lois, de la hiérarchie, que de
la position sociale. Le respect de l’honneur hégémo- Anqimenès importe bien plus qu’elle n’exporte. Elle
nien, bâti sur des lois pesantes issues des Dogmes produit en quantité d’abord de la métallurgie, dont
de l’Église, est véritablement étouffant et participe à du titane, puis de l’équipement militaire (réputé le
l’absence de liberté et de fantaisie que ressent tout meilleur au monde) de toutes sortes, des produits de
étranger venant voyager à Anqimenès. La Sagesse luxe — technologies au loss-métal, draperie, ébénis-
est, paradoxalement pour un peuple qui s’enorgueillit terie, parfums, esclaves, orfèvrerie et bijouterie. Elle
de sa culture sans pareille, finalement peu considérée produit beaucoup d’agriculture et exporte vin, bière
sauf au sein des hautes autorités de l’Église et sous le et autres alcools.
contrôle de ses Dogmes. À noter que la plupart des
Hégémoniens ne savent pas du tout lire.
Notes culturelles
La culture hégémonienne est absolument patriar-
Organisation
cale ; elle ne laisse aucun pouvoir ni droit aux
Les Prophètes ne règnent pas sur l’Hégémonie, di-
rigée par deux Consuls élus tous les quinze ans.
Mais le pouvoir de l’Église s’étend à toute l’admi-
nistration. L’empire et ses cités sont dirigés par des
sénats aux ordres du Consulat. Ce dernier est à la
tête d’un Sénat central où seuls peuvent siéger des
aristocrates membres vétéran de l’Ordinatori ou de
l’Église. Le pouvoir s’acquiert au mérite et se main-
tient par népotisme, toujours à la condition d’être
membre de l’Ordinatori ou de l’Église. Les femmes
ne peuvent jamais accéder à des responsabilités,
elles sont considérées comme mineures et dépen-
dantes toute leur vie, exception faite de quelques
officiers militaires.

Religion
La religion de l’Église du Concile dans sa version la
plus orthodoxe. Les Hégémoniens ne laissent pas la
moindre place à quelque autre forme de foi, et n’ad-
mettent pas la moindre apostasie ou réinterprétation
des Dogmes. L’inquisition de l’Église est sans pitié
dans l’Hégémonie ou tout écart aux lois et interdits
du Concile et a immensément plus de pouvoir que
les autorités judiciaires civiles.

Ennemis et alliés
Si le plus grand ennemi de l’Hégémonie est
l’Hemlaris, les choses changent beaucoup et l’empire
réalise que pour détruire le Trône de Rubis, il doit
abattre Armanth, ce qui implique l’Athémaïs et
ses alliés. Ses autres ennemis inexpugnables sont
les Dragensmanns. Mais la moitié des Mers de la
Séparation n’aime pas du tout l’Hégémonie, qui le
leur rend bien. Ses principaux alliés sont finalement
le nord des Plaines de l’Étéocle, et dans une moindre
mesure les Cités-Unies. Cependant, l’Hégémonie
commerce avec tout le monde, pour satisfaire à ses
besoins dévorants de ressources.

99
Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

femmes, qui y sont considérées comme des êtres idéographique (elle s’apparente aux sinogrammes
inférieurs. L’esclavage de nombre d’entre elles est chinois) et si elle reste assez complexe à apprendre,
particulièrement sordide et concerne pas loin de 10% elle est d’un usage répandu et accessible.
de la population féminine. C’est aussi la culture qui
emploie le plus d’esclaves de travail : être captif ou
Vertus
prisonnier de l’Hégémonie conduit à un asservisse-
ment funeste et pénible qui ne laisse pas beaucoup L’Honneur avant tout. La place de chacun dans
d’années d’espérance de vie. l’ordre des choses est sacrée, mais les Hemlaris jugent
aussi de l’honneur individuel et des Vertus comme
moyen d’élévation sociale et de considération. Puis le
Noms
Courage, qu’ils ont à foison ; les Hemlaris n’ont pas
Masculin : Ragus, Flavius, Andro, Semerain, de honte de fuir un adversaire, mais ils ne se rendent
Numerom, Qintus, Gonord, Arismus, Ballard, Caeso. jamais. Les duels sont toujours importants, puisque
le vaincu n’admettra sa défaite que si son adversaire
Féminin : Auria, Verbe, Tinis, Emetia, Nome, fait preuve d’Honneur.
Armanda, Gerepis, Nesime, Tertie, Nemetia, Avilae.
Organisation

LES HEMLARIS Empire qui a souvent des allures de fédération de


territoires féodaux. Il est géré par une efficace et
Les habitants de l’Empire du Trône de Rubis sont massive administration civile. L’empire est gou-
des Asiatiques similaires aux terriens d’Asie du Sud- verné par une puissante aristocratie jalouse de ses
Est. C’est un melting-pot culturel très varié dont les privilèges, avec à sa tête l’impératrice du Trône de
membres placent au-dessus de tout le respect de la po- Rubis. Les plus hautes fonctions administratives sont
sition de chacun dans l’ordre des choses. Les Hemlaris héréditaires et ne se transmettent que de père en
sont assez sexistes et très xénophobes. Ils emploient un fils. Les femmes de pouvoir ne sont pas si rares,
système administratif qui contrôle le déplacement des mais elles sont soumises à l’autorité des chefs de
étrangers. Mais celui-ci ne fonctionne vraiment qu’à famille et ne choisissent ni qui elles vont épouser ni
Cymiad et dans ses grands ports, le reste de l’empire quel sera leur destin. Les femmes sont des monnaies
étant trop vaste pour que ce contrôle soit vraiment ef- d’échange pour des alliances ou des concubines et à
ficace. Les Hemlaris ont une hostilité toute particulière peine mieux traitées que la moyenne du «doma» —
pour l’Hégémonie. Les Guerriers de l’Empereur, des le bas peuple. Ce dernier (petits artisans, fermiers
forces d’élite copiées sur les légions ordinatorii, sont et pécheurs, ouvriers, etc.) est respecté et considéré,
connus pour ne jamais se rendre, une réputation de mais il a peu de droits et ses membres sont traités
fidélité et de courage qui se vérifie même avec ses plus comme des serfs. La bourgeoisie est quant à elle
modestes habitants. beaucoup plus libre et nettement plus progressiste.

Apparence générale Religion


Asiatiques proches des peuples de Thaïlande, d’In- Une variante du Concile Divin, qui fait de la famille
donésie ou encore de Chine du Sud. Leur taille varie impériale les dépositaires du Mandat Céleste ; cela
entre 1,75 m à 2,05 m. Leur peau est hâlée, de dorée veut dire que l’Impératrice est considérée comme
à brune, leurs yeux bridés, et leurs cheveux noirs ou d’essence divine. C’est un schisme de l’Église, qui
châtains. Les métissages sont très nombreux et les domine la société hemlaris. Son Église n’est donc plus
apparences variées. Il est courant chez les Hemlaris dépendante de celle d’Anqimenès et de ses prophètes
aisés de se teindre les cheveux de couleurs éclatantes qui la considèrent comme une hérésie. Le Mandat
ou criardes, voire même en rouge. Céleste est très riche de rituels variés et fait la part
belle aux ancêtres mythiques, voire divinisés.
Traits de personnalité
Ennemis et alliés
Fiers, xénophobes, sexistes, courageux jusqu’au sa-
crifice ; organisés et respectueux des conventions et L’Hemlaris a des bonnes relations commerciales
de la hiérarchie. Les disparités locales sont cepen- avec presque tout le monde, mais limite fortement
dant nombreuses à cause de la variété des ethnies et ses échanges diplomatiques. Ses deux ennemis sont
cultures locales. C’est cependant un peuple raffiné de avant tout l’Hégémonie (ils sont en état de guerre,
bâtisseurs et d’ingénieurs de talent. même s’il n’y a plus d’armées en marche depuis des
décennies), et les Cités-Unies, malgré des échanges
commerciaux fructueux. L’Hemlaris a des relations
Langage
un peu houleuses avec Armanth à qui elle a dû céder
Le khuo-qin-thahaa-hmi, que tout le monde appelle des avantages commerciaux exorbitants qu’elle ne
Hemlaris pour se faciliter la vie. Son écriture est peut renier.

100
Ref. 14778
LES PEUPLES DE LOSS

Capitale part belle au Haut-Art et aux esclaves de Maisons


Cymiad, la Cité de Rubis, puissante, somptueuse et de Plaisirs. Il est très fréquent aussi bien dans le pe-
ordonnée, capitale de l’empire avec pratiquement tit-peuple que chez la noblesse de vendre une, voire
600 000 habitants. plusieurs de ses filles une fois adolescentes dans des
Maisons de Plaisirs ou de répudier une épouse de la
même manière. La société hemlaris est en pleine évo-
Production et commerce
lution avec le progressisme de la bourgeoisie inspirée
La liste de ce que produit l’Hemlaris serait sans fin, par le modèle d’Armanth.
son empire fournit une quantité de matières pre-
mières, mais on peut citer la soie, le bronze, l’acier,
Noms
les céramiques, les teintures et les encres, la poudre
explosive et les feux d’artifice, la draperie de ma- Masculin : Adung, Chen, Boontung, Taniat, Banjit,
rine et de til, le me-kwei (une bière proche du saké) Hanuman, Durmi, Hong, Mlathi, Nankun, Engh,
et d’autres alcools, et les esclaves de luxe. L’Empire Hongswa, Prahong, Vaython.
importe beaucoup de métaux, du lin, des épices, des
esclaves pour le Haut-Art et les denrées alimentaires Féminin : Wanii, Yai, Yindee, Nata, Aini, Sun, Cahaya,
du sud et de l’Étéocle. Taya, Cundi, Sondhi, Annuyai, Choi, Len, Daychanee,
Emyarang.
Notes culturelles
L’Hemlaris est une mosaïque de peuples et d’ethnies
sous la tutelle de l’Impératrice du Trône de Rubis,
et donc localement, on peut facilement trouver des
cultures différentes du modèle décrit ici. L’esclavage
y est commun, répandu et très dur, mais il fait la

101
Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

LES JEMMAÏS rares, mais moins qu’ailleurs. Les Jemmaïs sont aussi
souvent assez secs, les traits taillés à la serpe.
Métissage complexe de bases indiennes, méditerra-
néennes et maghrébines, les Jemmaïs forment un
Traits de personnalité
peuple à part entière qui s’est enrichi par l’apport de
réfugiés de tout Loss. Humanistes au sens contempo- Méfiants, secrets, implacables, pragmatiques, incré-
rain du terme — même si l’esclavage est présent —, dules, curieux, cultivés. Les Jemmaïs n’ont pas de
farouchement agnostiques, résolument scientifiques, croyances, mais des philosophies prônant le progrès.
ce sont des survivants et des nomades aux quelques
bourgs à l’urbanisme et l’agriculture redoublant
Langage
d’ingéniosité. Honnis par l’Église et l’Hégémonie,
craints par tous les autres, ils ne sont véritablement Le kammaïa, qui possède cinq alphabets différents.
connus par personne. Depuis plus de 400 ans, la Le plus simple comporte 31 lettres, mais les quatre
plupart de ceux qui voyagent ou résident autour autres sont de véritables codes de cryptages toujours
des Mers de la Séparation cachent leurs origines. plus ardus à déchiffrer.
Il n’y a que les Maîtres-marchands d’Armanth et de
l’Athémaïs, et quelques caravaniers des Franges à
Vertus
avoir la permission de faire des affaires avec eux. On
dit que personne ne peut atteindre les frontières du Le Courage et la Sagesse sont considérés et mis en
Jemmaï-he’Jil, leur territoire au cœur du Rift, sans avant à parts égales. La dureté de la vie dans le Rift,
un guide jemmaï. Les Apostats vivent non loin au la résistance acharnée des Jemmaïs face aux croi-
nord des territoires jemmaïs, mais de manière tota- sades de l’Église, leur farouche indépendance, leur
lement autarcique et ont très peu de contacts avec cohésion et leur attachement au progrès, aux sciences
leurs cousins. et à la culture n’ont jamais baissé. Même non-guer-
riers, tous les Jemmaïs hommes et femmes savent se
battre ; l’entraînement à leurs arts martiaux est une
Apparence générale
quasi-institution.
De taille relativement moyenne (1,75 m à 2 m), et le
teint mat et bronzé, les Jemmaïs ont la plupart du
temps les cheveux noirs. Les roux et les yeux verts sont

102
Ref. 14778
LES PEUPLES DE LOSS

Organisation Notes culturelles


Démocratie représentative. Les clans et bourgs jem- Le peuple jemmaï ne pratique que très peu l’esclavage
maïs sont gérés par des conseils élus. Tout citoyen (par exemple celui des Chanteurs de Loss) qui est tem-
homme ou femme peut voter, mais seuls les vétérans poraire et se finit toujours par un affranchissement au
âgés de 45 ans ou plus peuvent être élus dans le bout de quelques années. C’est aussi un peuple très
conseil. Celui-ci désigne ensuite ses Jhe’mels, ses mi- paritaire, mais on ne voit presque jamais de femmes
nistres, chargés de diriger clans et bourgs, et peut les jemmaïs hors de leur territoire. Les Jemmaïs cachent
révoquer à tout moment. La société jemmaï est très toujours leur origine dès qu’ils voyagent et sont très
paritaire, bien que la fonction guerrière soit interdite secrets. Aucun d’eux ne parlera de son pays, de son
aux femmes, sauf exception. Il y a très peu de bourgs peuple, des sciences et techniques de ses contempo-
jemmaïs, c’est un peuple nomade, qui s’organise au- rains, même à une personne de confiance. Il y a plus
tour de cœurs agricoles ou miniers particulièrement de Terriens et leurs descendants parmi les Jemmaïs
bien pensés et gérés, et de troupeaux animaux en que partout ailleurs sur Loss et un grand nombre
semi-liberté dont ils prélèvent ce qui leur est néces- de Chanteurs de Loss, formés dans des écoles. Tout
saire. Mais il y a cependant une industrie, de faible étranger pénétrant le Jemmaï-he Jil sans guide jem-
capacité mais de grande qualité. maï autorisé peut s’attendre à se faire massacrer ou
au mieux reconduire à ses frontières.
Religion
Noms
La civilisation jemmaï est farouchement laïque et
hostile à toute forme de religion organisée, à com- Masculin : Rihal, Aryan, Mayak, Mani, Nohan, Vikis,
mencer par l’Église. Cependant, il existe des cultes Neeren, Varun, Jay, Daras, Nishanti, Ragant, Sunail,
et rites informels autour des chamans, ainsi que du Tushaïr
respect et de la vénération des ancêtres et des grands
philosophes passés, qu’ils soient jemmaïs ou pas. Féminin : Ayami, Sahy, Kuva, Neealam, Esawati,
Ahima, Lenya, Rinti, Akuni, Seema, Shivan, Ira,
Ania, Daevi
Ennemis et alliés
Les Jemmaïs n’ont comme seuls vrais alliés qu’Ar-
manth et dans une moindre mesure l’Athémaïs.
Les Nomades des Franges s’en méfient, comme les
LES NOMADES DES FRANGES
Étéocliens qui en entendent très peu parler… et le Voisins des Athémaïs, ils vivent d’élevage dans les
reste du monde les prennent pour une légende de déserts et les plaines arides des Franges, près de
mauvais augure. Et malheur au Jemmaï qui se fait leurs chevaux, leurs longilas et de leurs troupeaux
capturer par l’Église ou l’Hégémonie. Il finira exé- de sikas, en un nombre incalculable de clans patriar-
cuté, après avoir été torturé pour ses informations. caux. Souvent grands et massifs, à la peau noire, ils
sont célèbres pour leur endurance et leur manque
de pitié, mais aussi pour leur générosité et leur fierté
Capitale
ombrageuse. Les Nomades le sont tous et ont bâti
Jamais aucun Jemmaï ne révélera le nom de la capitale de magnifiques villes en partie troglodytes à flanc
de son peuple et tous évitent de l’évoquer, mais elle est de falaise, qui sont toutes des relais commerciaux
surnommée «Himanil» — Sanctuaire/havre — et tient et des riches et luxueuses oasis entourées d’ingé-
le rôle de bibliothèque, le cœur des connaissances des nieuses plantations. On appelle aussi les Nomades
Jemmaïs. Environ 40 000 habitants. y vivraient des Franges les Frangiens.

Production et commerce Apparence générale


Les Jemmaïs fonctionnent pratiquement en autarcie Grands (1,85 m à 2,10 m), et la plupart du temps
via leurs échanges intérieurs. Ils importent cependant élancés, voire félins quoique certains peuvent être
quelques céréales, du bois, du vin, des étoffes, des massifs et larges. Leur peau est couleur café au lait
épices via leurs routes vers l’Athémaïs et exportent jusqu’à chocolat, comme leurs cheveux, bouclés, et
des métaux et minerais issus des riches gisements très souvent crépus. Leurs traits saillants et affûtés
du Rift : fer, soufre, manganèse, plomb, argent et ti- accentuent leur allure de fauve, mais la beauté de
tane. Les Jemmaïs n’exportent que très peu de pro- leurs femmes est très réputée.
duits finis, d’artisanat et d’ingénierie, mais ceux-ci se
vendent à prix d’or et sont recherchés par les collec-
Traits de personnalité
tionneurs les plus aisés.
Fiers, superstitieux, impitoyables, généreux, accueil-
lants, volontiers festifs, fidèles, belliqueux, entêtés, fa-
rouchement indépendants. Les Nomades guerroient
souvent, c’est même une tradition pour eux.

103
Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

Langage querelles sont courantes dans ce système puisque


Le Mengetsu, qui s’écrit avec l’alphabet Athémaïs. tout le monde tente de faire partie des membres
influents qui pourront constituer conseil royal. Les
femmes sont totalement exclues de la vie politique,
Vertus
mais en privé, les hommes écoutent leur épouse et
L’Honneur est très important dans la cohésion so- leur mère.
ciale de chaque tribu nomade, et ceux-ci sont très
chatouilleux avec le respect des traditions et de la
Religion
parole donnée. Ils commercent fort bien, mais ne
supportent pas le mensonge et la duperie. Tromper Le Concile Divin, mais avec une très forte présence
un Nomade est une mauvaise idée. Le caractère em- d’anciennes croyances locales d’origine chamanique.
porté et facilement colérique de ce peuple aux cou- La notion de tabous (choses, lieux, gestes, personnes)
tumes parfois cruelles explique leur réputation de revient sans cesse dans les croyances et coutumes
manque de Sagesse. des Frangiens. Ceux-ci sont superstitieux et croient
en des quantités de démons et esprits malfaisants
nés du désert et du Rift, et l’Église a préféré intégrer
Organisation
en partie ces croyances que de tenter de les faire
Monarchie clanique. Chaque tribu se reconnaît disparaître. Il y a des chamans parmi les Nomades,
des ancêtres communs et est dirigée par un roi. mais ils sont très rares, mal vus des Frangiens et se
La succession se fait par le fils aîné, mais elle cachent de l’Inquisition de l’Église.
peut occasionnellement être transmise par la fille
aînée en absence de fils. Elle ne peut régner, mais
Ennemis et alliés
peut choisir un régent le temps que son premier
fils accède au trône. Les rois sont le plus souvent Les Nomades n’ont pas vraiment d’ennemis. Ils
entourés d’un conseil choisi par l’ensemble des s’entendent bien avec qui ne vient pas se mêler de
aristocrates et familles d’influence du clan. Les leur mode de vie, de leurs croyances et traditions,
souvent assez éloignées des Dogmes, ce qui ne
les rend pas sympathiques pour l’Hégémonie, les
Cités-Unies ou l’Étéocle. Les principaux alliés et
partenaires commerciaux des Frangiens sont l’Athé-
maïs et l’Ereb’heïm malgré l’habitude pénible des
Nomades de faire régulièrement des raids sur des
petits bourgs peu protégés, et dans une moindre
mesure l’Étéocle.

Capitale
Daremath, en bordure des impénétrables Forêts
d’Acier. C’est une ville magnifique et luxuriante
construite à l’ombre d’un grand pic de roche rouge,
d’environ 50 000 habitants.

Production et commerce
Les Nomades commercent en grandes caravanes
du nord au sud et le long du désert à la frontière
de l’Athémaïs. Ils exportent du cuir, des peaux, des
sikas sur pied, de la verrerie, des épices, divers mé-
taux dont le cuivre, le fer, l’argent, le loss-métal,
des étoffes de luxe et des teintures ainsi que des
pierreries. Les Franges importent sel, céréales, pois-
son, et produits d’artisanat et de luxe assurant leur
mode de vie.

Notes culturelles
Les Frangiens sont très souvent en conflit avec
l’Athémaïs ou entre eux. Les villes sont très peu
nombreuses, mais puissantes et très protégées ; elles
ont la réputation méritée d’être des havres magni-
fiques aux allures de palais et de jardins. Elles sont
Ref. 14778
LES PEUPLES DE LOSS

proches de sites miniers riches, et toujours bâties fiants avec les étrangers. Le courage, sous toutes ses
autour de bassins et d’oasis. On y trouve aussi les formes, est pour eux la plus grande des qualités.
marchés d’esclaves, vendus en grand nombre par les
Nomades, capturés au cours des raids de clans, mais
Langage
aussi, fait rare, produits dans des élevages. Malgré
cela, les Frangiens restent un peuple très nomade, qui Le kami’ama, qui s’écrit avec un alphabet de séries de
ne conservent pas tant d’esclaves que sa réputation le nœuds de couleurs sur des lignes de fibres. L’écriture
laisse prétendre et dont les femmes sont plus libres est rarement employée, mais se répand chez eux.
que l’apparence le laisserait croire. Les Nomades font
partie des rares à connaître quelques routes menant
Vertus
au sud du continent de Loss, par-delà les Franges,
mais ceux qui s’y aventurent sont rares et colportent Le Courage. Les San’eshe sont rudes, prompts à vou-
des histoires sinistres et incroyables sur ce qu’ils ont loir prouver leur bravoure, leurs jungles sont mor-
pu y trouver. telles et la vie peut y être courte, ainsi donc, c’est
pour eux la plus importante et vitale des Vertus.
Vient ensuite la Sagesse, qui est l’apanage des an-
Noms
ciens et des chamans et qui est vitale elle aussi, car
Masculin : Yared, Eyasu, Tsegay, Mulugia, Nahoum, elle enseigne comme survivre au danger et pérenniser
Ocram, Kassahun, Sassay, Imengetsu, Jalid, Kassa, les tribus. L’Honneur est de peu d’importance pour
Hiliwuna. un peuple égalitaire qui partage tout et ne comprend
pas bien le sens du mot propriété privée.
Féminin : Hawi, Fayza, Tsega, Annan, Saba, Yarebisra,
Betelhen, Halim, Niya, Hatinsay, Yenu, Asalina,
Organisation
Saede.
Tribale avec démocratie directe ; les clans sont orga-
nisés autour d’un sage, d’un chef de chasse, et d’un
LES SAN’ESHE chaman. Chacun a égalité de voix en cas de déci-
sion à prendre, mais la plupart d’entre elles se font
Peuple à l’origine incertaine, mais ressemblant à des par consensus avec l’ensemble de la tribu. Anciens,
Polynésiens, les San’eshe ont une culture fortement chefs de chasse et chamans peuvent être hommes ou
tribale et chamanique, qui fait grand cas du courage femmes indifféremment, leur seul point commun est
et des passions et ne fait aucune distinction entre d’être en général des anciens de la tribu. La succes-
les genres. Ils hantent, le plus souvent dans une vie sion se fait elle aussi par consensus, elle peut donc
semi-nomadique, leurs profondes et mystérieuses être héréditaire, mais ce n’est en rien coutumier. Les
jungles. Le culte du Concile ne s’y est jamais implan- San’eshe ne font qu’une seule différence entre hommes
té, et pour cause, les jungles san’eshes sont terrible- et femmes, c’est la grossesse et l’accouchement : pour
ment dangereuses et seules quelques criques côtières qu’un San’eshe soit adulte, il doit prouver son courage
peuvent être colonisées. Mais les San’eshe empêchent de manière exemplaire. Mais accoucher est considéré
par une violence sans pitié ces implantations, faisant pour les San’eshe comme une démonstration de cou-
montre d’une rare haine vis-à-vis de tous étrangers. rage ayant la même valeur qu’avoir connu un champ
Historiquement, ils sont depuis des siècles victimes de bataille ou avoir accompli un exploit de chasse.
de raids teranchens et Athémaïs pour capturer des
esclaves, et l’on commence à exploiter leurs forêts
Religion
pour extraire de l’ealta, la résine employée en indus-
trie et construction navale. Culte chamanique très proche de la nature, qui consi-
dère que tout ce qui est vivant a un esprit conscient.
Les chamans sont traditionnellement des femmes,
Apparence générale
mais ce n’est pas systématique. C’est le seul peuple
Asiatiques remarquablement grands (1,85 m à de Loss à considérer les Chanteurs de Loss comme
2,10 m), aux traits fins et racés. C’est un peuple mé- réellement sacrés et l’expression la plus visible de la
tissé qui s’apparente aux peuplades polynésiennes. nature spirituelle et physique de l’entité vivante qu’il
Les yeux noirs, les cheveux bruns ou noirs, longs nomme Shaya : Loss.
et raides, ils sont notoirement bien bâtis et d’allure
féline. Les yeux bleus sont étonnamment courants,
Ennemis et alliés
et si les roux sont très rares, il en apparaît de temps
en temps. À part les Erebs de manière sporadiques, les San’eshe
n’ont aucun allié et les rares contacts avec d’autres
peuples sont la plupart du temps hostiles au dernier
Traits de personnalité
degré. Les San’eshe sont considérés comme un vivier
Passionnés, sauvages, impétueux, généreux, mais xé- d’esclaves et leurs jungles comme une zone d’exploi-
nophobes, aisément belliqueux et terriblement mé- tation, autant dire qu’ils ne sont amis avec personne.

105
Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

Capitale harmonie avec leur milieu rude et mortel. Ils fuient


Aucune. Il court des rumeurs sur un sanctuaire cha- les interactions avec des étrangers, car la plupart
manique sacré qui servirait de lieu de rassemblement viennent les chasser, pour en asservir entre autres
aux peuples san’eshe, mais aucun d’entre eux n’a les femmes réputées splendides et flamboyantes. Ils
jamais voulu ni pu en parler. ne pratiquent eux-mêmes jamais l’esclavage, et les
Terriens perdus qu’ils trouvent sont adoptés par la
tribu… s’ils survivent à la jungle. Des mouvements
Production et commerce
fédérateurs commencent à apparaître pour lutter
Aucun. Les San’eshe exploitent tout ce qui leur est contre leurs envahisseurs.
nécessaire dans leurs jungles et n’échangent que de
manière sporadique, lors des rares contacts qui ne
Noms
connaissent pas de fin tragique. Ils ne recherchent
pas vraiment de produits d’importation, mais l’acier Masculin : Afiri, Newari, Ahurei, Endi, Kahau,
et les étoffes solides peuvent leur plaire. Les San’eshe Kaiemé, Haku, Lawkua, Nui, Leré, Raaitor, Tsutuné,
sont connus pour l’exceptionnel artisanat du béryl. Venga, Poairu.
Malgré leur vie partiellement nomade et sauvage, ils
pratiquent une agriculture très florissante. Féminin : Eeva, Enda, Aitiare, Ahinu, Ilona, Ina,
Khelani, Opuhi, Maiva, Manahiri, Piri, Poia, Seira,
Uhupa, Hani.
Notes culturelles
Les San’eshe n’ont aucune ville ni aucun centre com-
mercial. Ils vivent en tribus de quelques dizaines
à centaines de membres, souvent nomades, se dé-
LES SVATNAZ
plaçant dans leurs forêts avec aisance, en parfaite Ces hommes de bois d’origine slave sont des cou-
sins des Hégémoniens, séparés d’eux tout au début
de l’expansion de l’Église, qu’ils rejettent fortement
dans sa version orthodoxe. Ces derniers les persé-
cutent et les chassent comme vivier d’esclaves de-
puis des siècles. Persécutés, presque exterminés et
déportés en masse, les Svatnaz ont appris à vivre
cachés dans leurs profondes et froides forêts, vi-
vant une vie en partie nomade et ne cessant de
reculer vers les rives ouest de la Taïga des Griffons
ou vers les frontières des Neiges-Dragon. Ce sont
de très bons marins, sur des navires petits, légers
et maniables.

Apparence générale
D’origine slave, la carrure large, mais bien moins mas-
sive que leurs voisins, mesurant entre 1m75 et 1m95,
la peau claire mais un peu plus halée que celle des
Hégémoniens, les yeux le plus souvent marrons, et les
cheveux allant de châtains à bruns. Les blonds aux
yeux bleus ne sont pas si rares, et il y a une certaine
quantité de roux, bien que peu nombreux.

Traits de personnalité
Méfiants, téméraires, voyageurs, audacieux, prudents,
rusés, vengeurs, généreux. Un Svatnaz n’accordera ja-
mais la moindre confiance à un Hégémonien.

Langage
Le kateren, langue métissée de dialectes hégémo-
niens et dragensmanns. Elle est écrite avec l’alpha-
bet dragensmann.

106
Ref. 14778
LES PEUPLES DE LOSS

Vertus Production et commerce


Le Courage. Les Svatnaz sont un peuple de survi- Les Svatnaz ne commercent qu’avec les Dragensmanns
vants aguerris à résister à l’implacable et perma- et les Gennemons et de manière assez limitée. Ils
nent ennemi qui les harcèle depuis des siècles. Le échangent du poisson, des peaux, de la fourrure (tou-
Courage a forgé la nature guerrière de ce peuple jours rare sur Loss), du cuir, de l’ivoire et des denrées
peu nombreux, et leurs traditions impliquent nombre végétales rares comme certains mellias, mais aussi des
d’épreuves assez effrayantes pour même faire hésiter objets d’artisanat de cuir, d’ivoire et de béryl (vais-
un Dragensmann, mais auxquels les jeunes du clan, selle, armes) et enfin des esclaves, sélectionnés parmi
y compris certaines femmes, se plient sans hésiter. leurs condamnés les plus susceptibles d’être vendus
cher. Et parfois des filles rousses, uniquement pour
leur grande valeur. Le plus souvent, ils importent en
Organisation
échange des céréales, de la laine de sika, de l’étoffe,
Clanique et patriarcale, organisée en grands villages des cordes et de l’artisanat de métaux.
fortifiés, soit troglodytes, soit mobiles sur le dos
de dharomos domestiqués. Les hommes chassent,
Notes culturelles
commercent, guerroient et protègent, les femmes
cultivent, élèvent et gèrent la maisonnée. Vu de l’ex- Les Svatnaz sont persécutés depuis un millénaire
térieur, hommes et femmes sont clairement séparés par l’Hégémonie qui les considère comme héré-
et les premiers dominent les secondes, mais vu de tiques, et comme une sorte de vivier à esclaves. On
l’intérieur, les mères, les épouses et les sœurs sont peut presque les considérer comme un peuple en
toujours écoutées et respectées, et dans les villages voie d’extinction. La société svatnaz malgré les ap-
et tribus, le chef de famille est la grand-mère. Les parences et les rôles bien clairs dévolus aux hommes
Svatnaz ont coutume d’avoir plusieurs sites d’ins- et aux femmes est relativement égalitaire. On n’y
tallation pour leurs villages et de voyager au fil des empêche pas une femme de mener une carrière tra-
saisons de site en site, une mobilité qui leur assure ditionnellement dévolue aux hommes, ni ne restreint
une meilleure défense contre les raids hégémoniens. leur liberté d’opinion et d’acte. Les chamans ne sont
pas rares dans les communautés svatnaz, et les per-
Religion
Une version ancienne et très altérée du culte du
Concile Divin, mâtiné de traditions chamaniques et
d’adoration des anciens des clans. Ce culte a ses
propres Dogmes et figures religieuses, il se murmure
même qu’il a son propre Prophète caché, bien diffé-
rent de ceux de l’Église officielle. Bien sûr, cette re-
ligion que les Hégémoniens surnomment le Schisme
est considérée comme une hérésie épouvantable et
impardonnable par l’Église.

Ennemis et alliés
Les seuls véritables alliés des Svatnaz sont les
Dragensmanns. Ces derniers se méfient des Svatnaz
qui suivent une religion qui leur déplaît beaucoup,
mais il y a malgré tout une véritable entraide entre
les deux peuples vis-à-vis de leur ennemi commun,
et un grand respect. Les échanges commerciaux
sont nombreux, et sans l’aide des Dragensmanns, le
peuple svatnaz aurait sans doute disparu. Il y a aussi
des échanges commerciaux et des relations régulières
avec les Gennemons. Quant à leurs ennemis, ce sont
l’Hégémonie et ses alliés et tous les peuples venant
les chasser comme du gibier.

Capitale
Kratezneg, village mobile en partie construit sur le
dos de dharomos, de larges mammaliens blindés. Le
clan est fort de près de 2 500 guerriers pour 14 000
habitants, c’est une des plus grandes communautés
de Svatnaz.

107
Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

sonnes rousses sont en général toujours libres. Mais lettres, mais qui est aussi souvent écrite avec celui
pas les Chanteurs de Loss, asservis et confiés aux de l’Athémaïs.
chamans. L’esclavage y est rare, mais cruellement,
les Svatnaz en font pourtant parfois commerce (y
Vertus
compris des leurs, le plus souvent des condamnés,
mais pas toujours) avec leurs voisins. La Sagesse, quand on parle de l’acuité d’esprit, de
la vivacité, de la ruse, de la réflexion et de tous les
aspects de l’intelligence et de la stratégie. C’est une
Noms
chose que tous les Teranchens admirent et respectent,
Masculin: Bogdan, Zleytan, Andru, Yuri, Godzimir, bien avant l’honneur et le courage. À noter que les
Cezlaw, Radim, Bretik, Blahos, Boïr, Milcho, Zecdaw, Imareth sont un petit peu plus chatouilleux sur l’hon-
Vladimir. neur que les Teranchens, qui sont connus pour être
des bonimenteurs, des beaux parleurs et des arna-
Féminin: Vera, Sveltana, Slava, Stana, Cvita, Milena, queurs qui ne le cachent même pas.
Mirka, Siluswa, Bojka, Miluse, Luba, Miledena, Lida,
Rosica.
Organisation
Monarchie constitutionnelle par cités-États ; les
LES TERANCHENS ET L’IMARETH Teranchens tiennent immensément à leurs lignées
royales et à leur aristocratie, bien que celle-ci soit
Les Teranchens et l’Imareth sont deux îles voisines surtout représentative. Les cités-États sont dirigées
dont les peuples se ressemblent tant, que nous les par des rois entourés d’un Conseil élu au suffrage
avons réunis sous un seul descriptif. Nous préci- direct par l’ensemble des classes sociales. Les
serons les différences culturelles entre les deux, la femmes ne peuvent voter, mais selon les cités-États
principale étant qu’ils ne s’entendent pas beaucoup. peuvent se présenter, faire campagne et être élues.
D’origine méditerranéenne et moyen-orientale, les Il y a de temps en temps des régimes monarchiques
Teranchens sont d’excellents marins, connus pour absolus, mais ils ne durent guère. Les Teranchens
leur indiscipline, leur ruse et le relatif peu de cas sont un peuple qui tient à son indépendance et à
qu’ils font de l’honneur. Cultivés et toujours pru- sa liberté et la rivalité entre les cités-États est très
dents, ils dominent par leurs navires les îles des ar- répandue. Concernant l’Imareth, il y a des ports
chipels, et si les Teranchens préfèrent le commerce, et des comptoirs qui sont tenus par des Princes-
l’Imareth a pratiquement fait de la piraterie une pirates. Ici, guère de constitution, mais des Conseils
institution officielle. Ils sont souvent surnommés les de Princes-pirate parfois aussi puissants que des rois
cousins des Athémaïs et sont très proches d’eux, sont malgré tout élus par les capitaines de navires,
partageant entre autres leur esprit progressiste, leur bien que souvent une place soit prise à la force du
sens du commerce, leur soif de découvertes et leur fer et par la ruse.
considération des femmes.
Religion
Apparence générale
Le Concile Divin, mais avec des nuances et beau-
D’allure méditerranéenne et de taille moyenne ; un coup d’eau dans le vin de l’orthodoxie de l’Église.
peu petits (1m75 à 1m95). Ils sont bronzés, la peau Les Teranchens ne sont pas très religieux et ne
assez mate, parfois café au lait. Les traits aquilins et voient pas de problème à faire partie des régions
marqués, ils ont souvent les cheveux bruns ou noirs, considérées comme hérétiques par l’Église d’Anqi-
souvent bouclés, parfois même frisés. Ils ressemblent menès. Il y a des frictions entre l’Église et les auto-
assez aux Athémaïs, mais peuvent avoir des traits rités des cités-États, mais l’équilibre trouvé dans une
moyen-orientaux très marqués. Les peaux et che- version modérée des principes et règles de l’Église
veux clairs ne sont pourtant pas des exceptions. semble perdurer efficacement. Les Teranchens en
ont profité pour faire revivre des rites locaux et des
traditions héritées du culte de la Mer et des anciens
Traits de personnalité
dieux helléniques.
Rusés, commerçants, malins, ouverts d’esprits, am-
bitieux, cupides, hospitaliers, indisciplinés, prudents.
Ennemis et alliés
Les Teranchens tiennent en grande estime les arts
littéraires et la musique. Les Teranchens n’ont pas réellement d’ennemis, plu-
tôt des rivaux, comme les Cités-Unies et le nord de
l’Étéocle. Si l’Église les a déclarés hérétiques, cela ne
Langage
les empêche pas de commercer avec tout le monde,
L’Eqrasi, une langue dont l’écriture alpha-syllabique même l’Hégémonie. Leur meilleur allié reste pourtant
ne comporte pourtant qu’une petite centaine de clairement l’Athémaïs et Armanth. À noter cependant
que l’Imareth n’est pas dans la même posture. Les

108
Ref. 14778
LES PEUPLES DE LOSS

Athémaïs n’aiment guère ce peuple de pirates, même à l’apport de captifs de ces raids. Cependant, les
s’ils commercent avec eux, et les cités-États côtières Teranchens asservissent relativement peu leurs com-
de l’Étéocle et des Cités-Unies les craignent. patriotes et encore moins leurs femmes, qu’ils res-
pectent beaucoup.
Capitale
Noms
Gillas pour l’Imareth, port en partie de piraterie,
puissamment fortifié, comptant 65 000 âmes. Pour Masculin : Egée, Ajax, Vivianos, Balérios, Gaios,
Teranchen, la célèbre et magnifique Khoïemonos, Yolopous, Gillipe, Danil, Dédalo, Dimosthénis,
connue de tous les marins tant le port est essentiel au Kléonikos, Oresto, Paschalis
commerce dans toutes les Mers de la Séparation, forte
de plus de 300 000 habitants. Féminin : Adramea, Arabela, Areti, Glycène, Litsa,
Noula, Ganyphée, Démeter, Giasimé, Doris, Laydia,
Kyra, Olymbia
Production et commerce
Les îles teranchens ne sont guère connues pour
leurs matières premières, à part le poisson foi-
sonnant et des exportations de métaux précieux :
argent, or, platine, loss-métal. Ce sont surtout
deux commerces qui lui assurent sa richesse : le
trafic d’esclaves particulièrement florissant qui
passe par ses îles, et la manufacture de produits
finis, principalement toutes les formes possibles
de poterie et contenants en bois, en verre, en terre
cuite et en céramique. C’est une véritable indus-
trie à laquelle s’ajoute de la manufacture de luxe
en joaillerie, maroquinerie et métaux précieux et
la sculpture et la pierre taillée ainsi que leur in-
génierie en architecture et marine.

Notes culturelles
Les Teranchens ont toute une culture maritime
qui est un véritable mode de vie : la moitié de ses
habitants sont peu ou prou marins. La piraterie
fait partie de ses traditions et l’Imareth n’a guère
de scrupules à faire des raids côtiers chez ses
voisins, pillant tout ce qui peut se monnayer et se
revendre ailleurs. Les Teranchens font de même
très souvent et sans gêne. Le trafic d’esclave est
d’ailleurs un commerce florissant chez eux grâce

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Ref. 14778
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CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

La plupart des gens qu’elle apercevait avaient des traits moyen-orientaux, et leur allure autant que leurs atours,
étaient une sorte de mélange entre les tenues d’une Renaissance méditerranéenne débraillée, et celles d’un monde
arabe dont on aurait ex purgé tout le faste des Contes des Mille et une Nuits. Il y avait tant de monde dans les
rues, de boutiques et d’échoppes pressées les unes aux autres. Des portiques ouverts sur de petites cours vomissant
presque leurs ateliers sur la rue ou cachant mal des immondices servant de mangeoires à des porcs, des chiens
et d’autres animaux plus étranges qui lui étaient totalement inconnus. Tant de bruits, d’odeurs fortes parfois aux
limites du soutenable, et tant de chaos qu’elle en vivait des frissons de panique. Une masse immense de monde ; et
si peu d’ordre, de loi, et d’organisation qu’elle semblait fonctionner sans elle-même savoir réellement quel miracle
participait à l’harmonie invisible de son ordonnancement.

Les chants de Loss, Mélisaren

LES RÉGIONS ET CAPITALES

C e qui suit reprend les quinze peuples décrits


plus tôt, mais du point de vue géographique,
physique et anecdotique. Nous allons aborder les
ne s’y aventurent pas. La plupart des jungles ont de
grandes zones de sols marécageux et même des man-
groves profondes de dizaines de milles. L’archipel
15 grandes régions des Mers de la Séparation en des San’eshe ressemble à un enfer vert et c’en est
décrivant leur climat, leur topologie, les lieux mar- un. Personne n’y résiste plus d’une journée sans des
quants et les villes principales de chaque région, avec moyens et une expérience solides. S’y perdre est
quelques notes et anecdotes. d’une facilité désarmante, et l’on n’y trouve en guise
de sentiers que les pistes des animaux, ce qui n’est
Vous verrez souvent des comparaisons entre ces en- pas une bonne nouvelle : la plupart d’entre eux sont
droits, et des régions d’Europe et d’Asie afin de don- au minimum dangereux.
ner des références quant aux conditions de vie, pay-
sages et climats. Il ne faut pas oublier que le monde Paradoxalement, il y a assez peu de mammaliens
de Loss est en général plus chaud que celui de la géants sur l’archipel. Les plus gros ne dépassent pas
Terre, et qu’une année de Loss dure presque 600 les trois ou quatre tonnes et, à part dans les mangro-
jours de 33 heures, ce qui a quelques effets sur les ves, il n’y a aucun grand troupeau de longilas ou de
saisons et les bouleversements climatiques, auxquels leurs cousins. L’archipel est une jungle où la grande
s’ajoute une activité sismique assez intense. taille est un handicap à tous points de vue.

Politique
L’ARCHIPEL DES SAN’ESHE En plus d’être un endroit à peu près invivable, l’ar-
chipel des San’eshe est habité par le peuple éponyme,
Géographie qui est hostile à pratiquement toute visite dans ses
jungles tropicales. Les tribus san’eshes ne sont pas
L’archipel des San’eshe fédérées et il n’existe aucune ville ni aucun point
est un ensemble mor- d’échanges commerciaux, tout au plus des places
celé d’îles et d’îlots sacrées de réunions régulières, qui changent selon
ayant tous comme les saisons et les années. Il n’y a donc aucune or-
point commun d’être ganisation politique dans la région, ce qui explique
couverts de jungles aussi l’absence totale d’infrastructures routières. Les
tropicales luxuriantes San’eshe s’en passent très bien avec leur mode de
qui compte parmi les vie. Et qui n’est pas san’eshe ne reste pas en vie plus
arbres les plus hauts connus dans les Mers de la d’un jour dans l’archipel, à l’exception de l’Enclave
Séparation (certaines cimes dépassent les 70 mètres et de ses exploitations.
de haut). Le couvert végétal est si dense qu’on ne
peut depuis les berges rien voir d’autre qu’un mur de
Les côtes du bout du monde
troncs, de lianes et de buissons, si épais qu’y est diffi-
cile d’imaginer qui que ce soit parvenir à y pénétrer. Une vaste région sur tout le sud de l’archipel, que
convoiteraient bien des colons athémaïs pour l’ou-
Et en effet, il n’y a aucunes plaines ou surface dé- verture sur l’Océan Infini, en y implantant une es-
boisée sur la totalité des îles, et pratiquement aucun cale. C’est une suite ininterrompue de mangroves qui
réel massif, seulement quelques falaises et surplombs s’enfoncent vers les côtes parfois sur 30 milles. Très
rocheux, dont des plateaux continentaux sis 500 étendue, la mangrove dispose de son propre écosys-
mètres au-dessus de la jungle. Même les San’eshe tème géant, dominé par les arkahaas, des cousins

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Ref. 14778
LES RÉGIONS ET CAPITALES

des longilas, pouvant mesurer près de 40 mètres de qu’elle dispose de son propre écosystème, et est
long et peser plus de soixante tonnes. Parfaitement l’accès à des Ruines Anciennes régulièrement visi-
adaptés à ces milieux de marais et d’eau, ils broutent tées et explorées par les chamans, au point qu’ils en
les arbres, sont capables de nager, flotter, et défon- connaissent depuis longtemps les moindres secrets.
cer au besoin les plus épais massifs de mangroves C’est un lieu où les Chanteurs de Loss formés par
pour assurer leur passage. Et ils ont un prédateur, le les chamans vont en pèlerinage, en général pour y
koan. Un mammalien amphibie qui pourrait évoquer trouver un petit fragment de loss-cristal, qui ne les
quelque crocodile des mers. Malgré le fait qu’il pèse quittera plus.
lui-même vingt tonnes pour plus de dix-huit mètres
de long, il est capable de courir tout aussi bien que de
nager à une vitesse impressionnante. Les dimensions
et la puissance de la faune des Côtes du Bout du
L’ATHÉMAÏS ET ARMANTH
Monde en font le sujet de légendes sur des monstres
capables de briser des navires en deux et seuls des Géographie
fous osent s’aventurer dans ces régions. Et jusqu’ici,
presque aucun n’en est revenu indemne. L’Athémaïs est en ma-
jorité une vaste côte au
climat méditerranéen,
L’Enclave
dont le sud jouxte le
L’Enclave est une colonie, principalement athémaïs, désert des Franges. À
établie pour assurer le trafic de bois et d’esclaves l’Ouest, la région est
depuis les archipels san’eshe vers le reste des Mers barrée par les massifs
de la Séparation. Fort de presque 7 000 habitants, vallonnés et secs du
c’est un port fortifié, mais dont les défenses ont sou- Jebel’himm et à l’Est par les montagnes de l’Argas,
vent été réalisées avec les moyens du bord, le plus qui tirent leur nom d’un puissant fleuve qui s’écoule
souvent du bois. La pierre est rare aux alentours, les sur la côte est, dans la vallée de l’Argas et dont l’em-
bâtiments sont eux aussi de bois, mis à part le petit bouchure abrite Armanth. Le territoire de l’Athémaïs
fortin de garnison de la Guilde des Marchands et le est assez étendu et ses frontières avec ses voisins
phare. L’endroit est peu accueillant, et l’ambiance, des Franges sont un peu floues. Pour résumer, sauf
sinistre. Tout autour de l’Enclave, la forêt a été défri- à quelques régions délimitées par des de grandes
chée pour des plantations et des tronçons de route bornes de pierre, la frontière entre l’Athémaïs et les
permettant l’accès aux exploitations forestières Franges, c’est le désert. Tout au Sud-ouest, la fron-
des essences de bois précieux locaux, et quelques tière avec l’Ereb’heïm est nettement plus marquée par
villages fortifiés, habités par des esclaves, des ré- le massif montagneux éponyme.
prouvés, exilés et criminels chassés de l’athémaïs,
survivent tant bien que mal. La ville elle-même et Si le climat est donc sec et méditerranéen sur toute
son énorme complexe de traitement de marchandise la côte de l’Athémaïs, ce qui impose d’ailleurs une
humaine accolé à ses stocks de bois et ses flotteries irrigation maîtrisée dont la technologie fait la fierté
écrase le visiteur sous une impression de malheur des ingénieurs en hydrologie de la région, la vallée
et de sombre fatalité. Et quand on sait que l’Enclave de l’Argas bénéficie d’un climat plus humide, avec
est une escale de tout ce que l’Athémaïs, mais aus- une saison des pluies qui dure du 8e au 10e mois
si Terancha et l’Imareth, les Cités-Unies et même de l’année. Elle a de véritables allures de mous-
l’Hemlaris comptent de trafiquants et de pirates, on son, avec des averses fréquentes et des ondées quasi
se doute que la ville n’est guère sûre. Néanmoins, quotidiennes. La région est très fertile, mais c’est
il y a un comptoir de la Guilde des Marchands, aussi une suite ininterrompue de bassins humides et
une petite garnison et quelques navires armés. Les de marécages le long du puissant fleuve, qui a de-
San’eshe ont souvent pris l’Enclave d’assaut et les mandé bon nombre d’aménagements hydrauliques
raids sur les camps de travail et les villages voisins constamment entretenus.
sont réguliers.
Enfin, prenant son embouchure à Samarkin, le fleuve
Al’harrin, long de presque huit cents milles et égre-
Lieu particulier
nant trois grands lacs le long de son cours, est assez
Le sanctuaire Huaara comparable au fleuve Nil. Profitant de la saison des
Jamais un San’eshe n’a révélé la localisation exacte pluies qui font descendre des masses énormes d’eau
de ce lieu légendaire qui serait la terre sacrée où des montagnes de l’Argas, il entre en crue et fertilise
se rassemblent les chamans des tribus de l’archi- ses berges, véritable grenier à blé de toute la région.
pel. En fait, beaucoup d’explorateurs pensent qu’il Il prend son cours dans les frontières nord des Forêts
n’existe pas, parce que des sanctuaires chamaniques d’Acier et constitue une voie commerciale particuliè-
ont été remarqués en de nombreuses îles. Mais le rement prospère, qui a assuré durant longtemps la
sanctuaire Huaara est particulier : il est sis au centre richesse de Samarkin avant qu’elle ne soit surclassée
d’une immense caverne au plafond effondré, si vaste par Armanth.

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CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

Politique Seconde plus grande cité de tout Loss après


L’Athémaïs est une riche et fertile succession de fiefs de Anqimenès, la cité des Maîtres-marchands est
Beys provinciaux et de cités-États dirigées en général construite sur une lagune dans l’estuaire du fougueux
par des Princes-marchands avec comme première ca- fleuve Argas. Une partie de la ville et de ses nom-
ractéristique qu’ils ne s’entendent en général que s’ils breux chantiers navals est bâtie sur des îlots artifi-
ont un adversaire commun contre qui s’unir. Le reste ciels et son urbanisme est aussi chaotique que le sont
du temps, ils se battent pour de complexes histoires les décisions des familles dirigeantes et les humeurs
de succession et de rang au sein des familles fonda- du Conseil des Pairs. Armanth est surtout connue
trices de ces fiefs, avec une nette préférence pour les pour accueillir les intellectuels, les libres penseurs,
affrontements informels par mercenaires et pillards les savants harcelés ou pourchassés dans leur pays, y
interposés plutôt qu’à la tête d’armées en marche, compris des femmes, et y être de grande tolérance et
Armanth jouant le rôle d’arbitre aux gros bras quand modernisme. Pourtant, c’est la capitale du commerce
les querelles prennent trop d’ampleur. des esclaves et lors des Grands Marchés aux Cages,
elle abrite parfois plus de 200 000 captifs destinés à
Les cités-États athémaïs comptent peu de légions et être revendus.
de forces militaires régulières. Les guerres ouvertes y
sont devenues rares depuis qu’une paix relativement Armanth connaît un climat à mi-chemin entre tropi-
respectée s’est installée entre eux et les Nomades des cal et méditerranéen. Il y fait assez chaud les deux
Franges. Étrangement, malgré leurs conflits incessants, tiers de l’année pour y vivre en bras de chemise et
les Beys et les seigneurs de l’Athémaïs évitent la guerre, les étés peuvent être torrides. Mais au cœur de l’hiver,
ce qui ne les empêche pas d’user de toutes les solu- l’air froid des montagnes de l’Argas descend sur la
tions alternatives même des plus radicales ou violentes, lagune et occasionne une à deux semaines de chutes
pour régler leurs affaires. La piraterie, les bandes de de neige. Le temps reste relativement doux, il est rare
mercenaires et les seigneurs-pillards sont donc, le plus qu’il puisse y geler, mais la neige va tenir pendant
souvent, au service de l’un ou l’autre prince, en fonc- quelque temps, parfois jusqu’à trente centimètres.
tion des allégeances, de derniers rebondissements des Les hivers, sans cette courte période de neige, sont
conflits familiaux et de qui paye le mieux. Si l’on assiège rares et de mauvais augure selon les Armanthiens qui
plus de murailles, des villages, des ponts et des relais s’attendent alors que la saison des pluies se double
sont donc pillés, des champs et des vergers incendiés, de violentes tempêtes tropicales et d’inondations qui
des mines et exploitations saccagées et cela peut encore causeront beaucoup de ravages sur cette cité posée
déboucher sur de sanglantes batailles sur le pré. sur l’eau.

L’Athémaïs est, du point de vue topographique, une Enfin, Armanth est une puissance régionale en elle-
région très organisée, avec de nombreuses routes et même. Si elle ne dispose pas d’armée, la cité des
voies commerciales sûres et entretenues, où le risque Maîtres-marchands abrite des centaines de compa-
d’attaque par la faune sauvage est rare. Bien sûr, plus gnies mercenaires, et la flotte de défense de la ville,
on se rapproche du désert des Franges, des Forêts sous le contrôle de l’Elegio, le chef de l’exécutif, est
d’Acier et des massifs montagneux, plus les routes composée de vétérans de la marine marchande et
sont risquées et sommaires, cédant la place aux na- de corsaires. La puissance économique de la cité est
vires lévitants. Mais dans l’ensemble, tout l’Athémaïs enfin sa meilleure arme : elle dicte le commerce de
est relativement peuplé, les zones désertes sont rares toutes les Mers de la Séparation et peut très bien
et la civilisation semble y fleurir sans entraves, mal- mettre à mal ses voisins en imposant un blocus qui
gré les dangers récurrents issus de l’endémique ins- sera suivi par tous les comptoirs de la Guilde des
tabilité politique locale. Marchands. C’est, avec ses principes progressistes et
libertaires et sa très nette tendance à refuser le joug
et l’autorité de l’Église du Concile Divin, la raison
Armanth
principale qui fait d’Armanth la plus grande et sé-
La capitale de l’Athémaïs. rieuse concurrente à Anqimenès et son pouvoir reli-
gieux et économique.
Population : 1,2 million d’habitants
Samarkin
Dirigeant : Le Conseil des Pairs (voir chapitre La
Guilde des Marchands), et l’Elegio (chef de l’exécutif Ancienne capitale économique de l’Athémaïs,
et de la flotte) Samarkin a vu une grande partie de ses Princes-
marchands et de ses Beys déserter la ville pour
Forces militaires : 350 navires armés, dont 150 lé- Armanth, laissant derrière eux des palais vides, des
vitants avec leurs équipages. Milice de la ville (les casernes désertées et de grands jardins à l’aban-
Elegiatorii), au nombre d’environ 5 000. don. Pourtant, Samarkin et ses presque 80 000 ha-
bitants reste un centre commercial très important.
Principe de la ville : rien ne doit entraver la bonne Sise à l’embouchure du puissant fleuve Al’harrin,
marche du commerce. elle est une étape obligée du commerce des céréales

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Ref. 14778
LES RÉGIONS ET CAPITALES

produites dans les vallées fertiles et inondables sule jusqu’aux îles du Comptoir, à l’est de l’Athémaïs.
en amont, et jusqu’à sa source au nord des Forêts Très humide, la végétation y est carrément tropicale,
d’Acier. Axe commercial aussi bien qu’artère de avec des forêts et des bayous. L’endroit est assez peu
transport vital, Samarkin subit pourtant les effets habité, à part autour d’Armanth et de Berregi, un
de sa déchéance : Beys et Maîtres-marchands s’y port côtier assez modeste. On trouve plus au Sud,
battent âprement pour le contrôle des terrains et contre les massifs de l’Ereb’heïm une autre petite
palais laissés de côté par l’émigration vers Armanth cité, Harrimsid (voir les Erebs). Ces villes et quelques
et le pouvoir officiel détenu par la famille Alezzio villages forment un réseau de commerce maritime.
est sans cesse remis en question. La vallée de l’Argas est le grand fournisseur du bois
dont Armanth ne peut se passer.
Samarkin dispose d’une assez importante présence
d’Ordinatorii, y compris une légion complète, la
Lieux particuliers
plus puissante de la région. Forte de plus de 5000
hommes, elle fait quelque peu autorité locale : les Les îles du Comptoir
Beys et princes marchands de la ville n’ont quasiment Très peu élevées et très humides, ce sont des îles et
aucune armée digne de ce nom. Le port de la ville, îlots marécageux, véritables pièges pour celui qui
fortifié et ouvert sur le delta de l’Al’harrin, est très ne connaît pas assez bien la région pour y naviguer.
actif, particulièrement étendu et accueille des flottes Il y a bien eu un comptoir, nommé Armidian, mais
entières. Dans les faits, il n’est pas loin de pouvoir une épidémie de Rage a emporté ses habitants il y
concurrencer celui d’Armanth en termes de capa- a plusieurs générations et les îles du Comptoir sont,
cités et de moyens, mais dispose de bien moins de depuis, abandonnées à leur sort. Il n’en reste que
chantiers navals. quelques habitants redevenus barbares, peu enclins
à accueillir des étrangers. Il semble que des pirates
chassés de l’Imareth aient fini par trouver que les
Le Jebel’himm
ruines d’Armidian et les chenaux entre les marais
Collines arides où même la vigne rechigne à pousser, de ces îles offraient un bon refuge à leurs activités.
balayées par les vents chargés de miasmes venus du On prétend même que ce serait un des havres de la
Rift, le Jebel’himm est l’endroit désolé et perdu où Cour des Ombres.
les puissantes familles athémaïs envoient en exil leurs
membres trop turbulents. L’élevage y est l’activité La Forteresse du Jebel
principale, l’agriculture n’y étant que vivrière autour Dans les montagnes du Jebel, désert parfois balayé
du fleuve Zin, qui est à sec 6 mois par an. par des nuages de soufres et de fluor venu des vol-
cans et des gouffres du Rift et de la Mer des Enfers,
Rash’el Meï, la plus grande ville locale avec 24 000 se trouvent des Ruines Anciennes à flanc de falaise,
habitants est cependant assez prospère par son com- visibles de très loin comme une forteresse de pierre
merce maritime avec les Marches Méridionales de et de métaux s’élevant à des centaines de mètres.
l’Étéocle et son trafic connu avec les Jemmaïs. Elles ont souvent été approchées, tout le monde les
connaît, mais aucune exploration n’a encore été cou-
ronnée de succès. Il semble que les machines des
Le fleuve Al’harrin
Anciens fonctionnent toujours, à commencer par les
Courant vers le Sud depuis son delta dans la mer, le portes intérieures de la Forteresse. On dit qu’elles
fleuve Al’harrin compte pas moins de trois des plus se refermeraient derrière quiconque ose pénétrer ce
grandes cités de l’Athémaïs le long de ses berges : sanctuaire, et les malheureux seraient ensuite dévorés
Samarkin (voir plus haut), Harrin’dim qui compte par les gardiens des lieux, sans échappatoire. Ce qui
22 000 habitants et Daremath qui appartient aux est vrai, c’est que personne encore n’en est revenu
Nomades. À lui seul, le puissant fleuve aux fertiles depuis presque deux siècles.
crues annuelles et ses trois grands lacs poissonneux,
qui longe la chaîne montagneuse de l’Argas, nourrit Le Labyrinthe
plus du tiers de la population de l’Athémaïs, très dense Armanth a bien des secrets. L’un des plus étranges
autour de ses berges. Mais il arrive tous les dix ans serait que sous la gigantesque ville, partant du piton
environ que le climat du désert des Franges provoque central où est bâti le Palais de l’Elegio, un labyrinthe
des sécheresses redoutées par la population locale, le de coursives et de couloirs doté de murs de pierre
fleuve pouvant voir son régime baisser de plus de la lisse et d’une sortie de béton s’enfonce toujours plus
moitié. C’est aussi une très importante artère commer- loin vers des Ruines Anciennes oubliées. Si les ni-
ciale avec les Nomades des Franges et vers la lisière veaux supérieurs servent de caves, d’accès secrets
des Forêts d’Acier (voir le désert des Franges). et de passages courant sous le fleuve Argas, nul n’a
jamais réussi à descendre aux plus bas niveaux, les-
quels, selon la légende, déborderaient de trésors.
La vallée de l’Argas
La vallée de l’Argas est une côte humide de forêts
et de marécages qui s’étendent sur toute une pénin-

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CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

LES CITÉS-UNIES ET ALLENYS carrefours commerciaux ou autour de bourgs et vil-


lages frontaliers, redessinant une complexe carte des
influences des uns et des autres. Les cols, les ponts
Géographie
et les gués sont souvent gardés et parfois taxés de
Décrire la presqu’île manière outrageuse, et il n’est pas rare de croiser
des Cités-Unies est des troupes en marche ou des flottilles de guerre,
compliqué en raison uniquement chargées de faire peur à tel ou tel voisin.
de la variété de ses De plus, au-delà de la petite zone agricole autour des
reliefs et de ses côtes. cités-États et de puissants bourgs fortifiés, la cam-
Ce sont cependant les pagne est presque vide de toute présence humaine :
plaines et un climat les Cités-Unies sont finalement peu peuplées au re-
méditerranéen doux gard de leur surface.
qui dominent la ré-
gion, du moins, si on l’observe du côté ouest. Du Enfin, il existe une séparation marquée entre les ha-
côté est, le relief est très tourmenté, intensément bitants des cités et les nomades ar’anthias, qui vivent
volcanique et fortement perturbé par l’influence de une bonne partie de l’année en déplacement dans
la Mer de Corail et de ses typhons. les plaines. Les premiers méprisent les seconds qui
le leur rendent bien, mais surtout les nomades se
Les Cités-Unies comportent nombre de massifs for- moquent des querelles des princes et vont jusqu’à
mant une chaîne montagneuse qui coupe la presqu’île parfois se mêler de leurs conflits uniquement pour
en deux. La chaîne porte différents noms : de Del’kana assurer leur propre passage, s’ajoutant alors de ma-
à Shae’dym, elle se nomme les montagnes Aeries, nière sanglante au chaos de ces petits conflits. Les
puis du centre jusqu’aux Abîmes, les Monts sans nomades ar’anthias ne sont pas plus diplomates
Tête. Certains sommets atteignent les 5000 mètres qu’ils sont pacifistes et conciliants.
; neiges éternelles et glaciers y cohabitent avec les
volcans actifs et les calderas fumantes. Pour rappel, les Cités-Unies sont très croyantes et
l’Église y a une très forte influence, ce qui lui per-
Si les rivières sont nombreuses, elles manquent met non seulement d’arbitrer les conflits, mais de
cruellement dans les Marches Ar’anthias et jusqu’à littéralement présider au destin d’Allenys, la capitale,
Allenys ; effet d’un microclimat qui bloque en grande malgré un régime constitutionnel.
partie les précipitations derrière les montagnes. Or
une bonne partie de la population de la région y vit,
Allenys
ce qui implique beaucoup de travail de construc-
tion hydraulique pour pallier le manque d’eau libre. La capitale des Cités-Unies.
Les réservoirs et bassins artificiels abondent, mais
parfois le manque d’eau peut cruellement se faire Population : 250 000 hab. en hiver, 180 000 en été.
sentir, surtout à Allenys qui reste une ville de très
grande taille. Dirigeant : le Roi Salgus, entouré d’un conseil élu
constitué en partie par l’Église.
Le bois manque aussi dans le sud et le centre de toute
la presqu’île, ce qui rend l’Hyponnie et ses jungles Forces militaires : 3 légions royales et 3 légions d’Or-
luxuriantes vitales pour les populations de toute la dinatorii de l’Église. 90 navires de guerre.
région. Heureusement, il y en a aussi dans les vallées
des chaînes montagneuses, même si cette manne est Principe de la ville : l’excellence dans tous les arts.
exploitée précieusement. La faune des Cités-Unies est
connue pour ses ghia-tonnerres, dont les représen- Allenys est une cité portuaire fortifiée, surnommée
tants sauvages peuvent devenir de véritables dangers. partout la ville aux toits d’or, car tous ses nombreux
Mais il y a nombre d’autres animaux dans les plaines palais et temples sont coiffés de dômes pavés de
et les montagnes qui représentent un risque pour les bronze étincelant. Les métaux étant une des grandes
voyages et les communautés humaines. richesses de la ville et de la région, Allenys en profite
et en abuse parfois : même les sommets de certaines
tours et les grandes portes de la cité sont de bronze,
Politique
ainsi que le pourtour de certaines fenêtres, ou de re-
Les Cités-Unies ne le sont que de nom. Il s’agit d’un bords de toits de riches bourgeois. Le blanc des murs
ensemble de neuf cités-États dominées par la puis- et l’or des toits donnent de loin une vision enchan-
sante Allenys, qui ont simplement réussi, un peu sous teresse au voyageur qui entre dans le port lui aussi
la pression des conflits extérieurs (avec l’Hemlaris fortifié, dominé par deux phares puissamment armés.
notamment) à faire la paix. Mais leur collaboration
ne s’étend guère au-delà d’alliances destinées à as- Allenys est très riche, comme on l’aura compris,
surer cette paix fragile. Régulièrement, des conflits ce que prouve sa forte population d’esclaves, un
entre rois et princes des cités explosent le long des commerce plutôt florissant d’ailleurs. Elle est aussi

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LES RÉGIONS ET CAPITALES

très traditionaliste. Le pouvoir est fortement cen- morrows hantant ses profondeurs. Les habitants de
tralisé autour de ministres nommés par le gouver- la région sont très proches physiquement et cultu-
nement avec à sa tête le conseil élu par les notables rellement des Hemlaris.
de la ville, les princes et les autorités de l’Église.
Une grande partie de la police est gérée par les
Kash’yen
Ordinatorii du Concile Divin et on les voit partout,
même dans le port où stationnent leurs puissants Kash’yen est une grande île en face d’Allenys, dans la
galions de guerre. Le cœur de la ville est le Haut- Mer de Sarres. À l’origine, c’est la seconde source de
Palais, qui est une ville dans la ville, une forteresse bois pour les Cités-Unies, mais la surexploitation de
royale faite de terrasses et jardins, de hautes tours et l’île a été fatale à ses forêts qui ne subsistent plus que
de bâtisses puissantes, qui peut abriter en cas de be- dans les montagnes. Avec une seule petite ville et une
soin pratiquement 30 000 personnes pour des mois. poignée de villages éparpillés sur des terres de plus
Le reste de la ville est relativement ordonné, avec en plus arides Kash’yen n’a plus grand-chose à offrir
des rues en pente et des terrasses assez imposantes, à ses habitants qui depuis une cinquantaine d’an-
permettant aux légions de vider leur caserne rapi- nées rejoignent les Cités-Unies quand ils le peuvent.
dement. Clairement, la ville et ses remparts ont été De fait, avec cet abandon progressif, les problèmes
prévus de longue date pour faciliter sa défense et l’on de ravitaillement alimentaire et l’effondrement de
soupçonne même que certaines arches et structures l’économie de l’île, celle-ci retourne à vitesse grand
décoratives sont juste là pour être sabotés et les faire V à l’état sauvage et devient de plus en plus hostile
tomber afin de créer des obstacles à une invasion. à ses derniers habitants. Il n’y a plus guère que des
pécheurs de narvas, les grandes baleines de Loss, qui
Les abords immédiats de la ville sont assez peu ha- y ont encore une activité, souvent partagée avec de
bités et on en quitte les faubourgs et les villages en la piraterie et du trafic.
à peine une journée . Mais une bonne partie des
fermiers vivent dans la ville. Au printemps, celle-ci
Les Monts sans Tête
se vide et les Ar’anthias rassemblent leurs troupeaux
de ghia-tonnerres pour aller dans les plaines et ne Chaîne de montagnes très élevée finissant par plonger
revenir que vers l’automne. dans la Mer de Corail, les Monts sans Tête égrènent
plus d’une centaine de volcans dont la majorité est
active. Autant dire que même jusqu’à Allenys, il est
Les Marches Ar’anthias
rare que passe un jour sans que le ciel soit strié de fu-
Plaines arides notoirement dépourvues de sources mées colorées issues d’un volcan en activité. Pourtant,
d’eau, les Marches Ar’anthias sont arpentées par on y trouve des communautés humaines prospères, à
des nomades très pieux et traditionalistes, et leurs commencer par Mes’rymdia, capitale du métal et de
grands troupeaux de ghia-tonnerres. Il est ardu d’ail- l’exploitation minière des Cités-Unies. On extrait de
leurs de distinguer les sauvages des domestiqués, ces montagnes le fer, le cuivre, le nickel et l’argent,
et le voyageur prudent aura la sagesse de ne pas mais aussi l’étain, le mercure, le manganèse, et même
approcher ces animaux dangereux et colériques. Les du minerai de titane ainsi que du soufre. Cependant, y
Marches sont assez peu peuplées, mais suffisamment circuler est vraiment risqué. Les habitants de la région
de routes commerciales y circulent, privilégiant les connaissent tous les dangers de la fureur volcanique et
caravanes de ghia-tonnerre aux navires lévitants, ont appris à vivre avec et à la craindre.
qui transportent les métaux précieux exploités dans
les Monts sans Tête et le long des chaînes mon-
Lieux particuliers
tagneuses, particulièrement riches en minerais. Ce
trafic fait en partie la fortune des nomades qui orga- Les Abîmes
nisent bien sûr ces immenses caravanes que les pré- Les Monts sans Tête ont parfois des allures d’en-
dateurs évitent et que les pillards hésitent à attaquer. fer sur Loss. Les Abîmes en sont un. C’est là que
se trouvent les plus grands volcans des Cités-Unies,
dont La Gueule des Abîmes, une caldera avec un lac
L’Hyponnie
de lave en activité permanente, et qui explose une
L’Hyponnie est une péninsule verdoyante couverte à deux fois par an. Mais l’ensemble de la péninsule
de jungles. Le long des côtes se trouvent quelques est invivable, entre vapeurs toxiques, tremblements
bourgs et villages vivant principalement de la pêche de terre, coulées pyroclastiques et typhons de la Mer
et de l’exploitation du bois. Del’agami, au sud de de Corail venant s’écraser contre les montagnes.
l’Hyponnie, centralise ce trafic important, presque Des rumeurs insistantes disent qu’il y a des Ruines
vital pour tout le reste des Cités-Unies. Si la fo- Anciennes quelque part dans les Abîmes, mais seuls
rêt est exploitée, ce n’est pas sans poser nombre des fous oseraient tenter de les trouver.
de problèmes. Sa faune est réputée terriblement
dangereuse, prenant régulièrement son lot de vies Les Îles Maudites
humaines et personne n’irait s’y enfoncer trop pro- Au sud des abîmes se trouve un chapelet d’îles in-
fondément. Des rumeurs parlent de fantômes et de habitées qui ont été l’objet de conflits entre Allenys

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Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

et Khoïemonos, pour le trésor qu’elles recèlent : des pharmacopée des Frangiens et de leurs voisins. Enfin,
mines de loss-métal d’une grande richesse. Mais le commerce du bois avec tous ces soucis n’est pas
elles restent inexploitées. Après plusieurs batailles et assez rentable. Les Frangiens préfèrent leurs déserts
conflits, les deux cités-États avaient su se partager la et leurs savanes arides à une forêt qui n’a jamais
manne et les îles, mais trois générations plus tard, les voulu de présence humaine.
ravages volcaniques des Abîmes ont frappé les îles :
pluies de cendre, fumées de soufre, hivers sans fin,
Politique
tsunamis. Finalement, entre ça et les maladies en ré-
sultant, tout le monde a abandonné l’espoir de mettre Le désert des Franges ne fait plus guère l’enjeu de
un jour le pied sur ces îles pourtant très aisément grandes tensions politiques. Les Forêts d’Acier sont
accessibles. Gageons pourtant que cela ne durera pas. inexploitables, les savanes et le désert demandent
bien trop d’adaptation pour en tirer quelque chose
de la manière dont les Frangiens y parviennent, et au
LE DÉSERT DES FRANGES sud de leur territoire, il y a encore plus de déserts et
de Terra Incognita hostiles. En fait, ce sont plutôt les
Frangiens qui pendant longtemps ont posé problème
Géographie à leurs voisins, en essayant d’aller chercher chez eux
ce qui manquait sur leurs propres terres.
À quelques égards le
désert des Franges Mais depuis quelques décennies, ces coutumes de
semble bien por- pillages et de ravages contre rançons ont notoire-
ter son nom, même ment diminué. Le Sid Tarad Aneyazu, en faisant bâtir
si certaines parties la magnifique Daremath sur la rive de l’Al’harrin, a
sont luxuriantes. aussi lancé un mouvement d’alliance des cités et des
Clairement, l’ensemble villages le long du fleuve jusqu’à Samarkin. Une paix
de ce grand territoire presque respectée s’y maintient depuis, entretenue
est désertique, et le Dae’shaï est connu comme une par de riches échanges commerciaux. Mais pour les
mer de dunes sableuses où la pluie ne tombe pas plus tribus des Nomades du reste du désert des Franges,
d’une fois tous les dix ans. Il y a cependant autour loin de ce havre, par contre, les conflits, les pillages
du désert nombre de savanes arides assez herbeuses et les incursions dans l’Athémaïs ne sont pas finis et
pour que les Frangiens puissent y faire brouter leurs surviennent régulièrement.
troupeaux et, s’ils se contentent de longer le Dae’shaï
et ses terribles dangers avec leurs bêtes, ils n’ont au-
Daremath
cune crainte à le traverser au besoin avec leurs voi-
liers des sables. Daremath est la capitale des Nomades des Franges.
Politiquement, elle n’a guère de poids que le long du
En fait, le désert des Franges n’est que la partie vi- fleuve Al’harrin, mais pour tous les nomades, elle est
sible, au nord, d’un immense désert qui n’a encore le cœur de leurs échanges et de leurs rassemblements.
jamais été exploré. Par voie de terre, l’idée est consi- S’il y a quelques clans qui y sont interdits suite à des
dérée comme irréalisable par tout le monde, même exactions trop graves, tous les nomades savent que
si les Nomades des Franges pensent qu’en longeant les portes de la Cité Rouge, ainsi qu’ils la surnom-
les côtes depuis la Forêts d’Acier et en emportant ment, leur sont ouvertes.
leurs précieuses machines à dessaler l’eau, c’est tout
à fait possible. On connaît de ce désert que les Portes La ville, puissante et bien défendue, compte 50 000
de la Mort et les massifs volcaniques du Nijhi’rani, habitants, et a été bâtie contre un grand piton ro-
pratiquement inexplorés. cheux dans lequel ont été taillés palais, lieux de
cultes, entrepôts, réserves et nombre d’habitations.
Mais vers l’Est, entre l’Ereb’heïm et les montagnes La cité déborde ensuite jusqu’au fleuve avec un port
de l’Argas, là où naît le puissant fleuve Al’harrin, le très actif. Elle bouillonne en permanence d’activité
désert cède le pas à la lisière d’une épaisse et vaste et le commerce y est roi. Bien entendu, la Guilde
forêt aux arbres gigantesques : les Forêts d’Acier. Leur des Marchands y a un comptoir et profite de ces
nom vient de la solidité des essences qui dominent échanges. La monnaie la plus courante à Daremath
cette canopée gigantesque et dont la dureté vient et qui est presque le cœur de son économie n’est pas
même à bout des meilleures haches. Oui, cela veut l’andris ou les métaux précieux, mais le sel.
dire que malgré sa richesse potentielle, les Frangiens
exploitent très peu cette forêt qui ne leur facilite de
Le Dae’shaï
toute manière pas la tâche à bien des égards. Les
prédateurs y sont nombreux et redoutables, y com- Désert des déserts dans l’ensemble des Mers de la
pris des dragens qui nichent au sommet des puissants Séparation, le Dae’shaï est une mer de dunes où
arbres. Même la flore des Forêts d’Acier est dange- rien ne pousse, et où ne vivent que les créatures les
reuse, tout en étant une manne inépuisable pour la plus endurantes que l’on puisse connaître. Même les

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Ref. 14778
LES RÉGIONS ET CAPITALES

Nomades, pourtant aguerris à ces conditions, n’y L’EREB’HEÏM


résident pas. Ils ne font que traverser le désert sur
de puissants navires des sables, véritables villages
Géographie
lévitant, pour aller et venir d’un côté à l’autre des
Franges sans avoir besoin de contourner cette région Au sud des monts de
redoutable. Mais ils sont les seuls à savoir y navi- l’Argas commencent
guer sans s’y perdre ou se faire déchiqueter par les ceux de l’Ereb’heïm,
plus puissantes créatures du coin, les prayars, dont qui font face aux ar-
la description se limite à leur gueule à la mâchoire chipels san’eshe et à
articulée capable d’engloutir un jeune longila en une l’Océan Infini. C’est
seule bouchée. pour résumer une ré-
gion très fertile et ver-
Il y a cependant des expéditions lancées au cœur doyante, mais forestière et très escarpée, qui égrène
du Dae’shaï pour retrouver les Portes Blanches, un les vallées étroites tombant directement sur la mer,
massif rocheux au milieu des dunes qui s’ouvre sur barrées par des falaises et de très hauts massifs dont
des Ruines Anciennes. Quelques navires des sables certains culminent à 6000 mètres d’altitude. Le nord
en sont revenus chargés de trésors, mais ils sont peu de l’Ereb’heïm fait frontière avec la vallée de l’Argas
nombreux comparés à ceux qui ont été perdus, et la de l’autre côté du golfe et abrite une population de
position exacte des Portes Blanches reste inconnue. pécheurs et agriculteurs côtiers profitant des petites
plaines, souvent marécageuses.
Les Forêts d’Acier
Plus on descend vers le Sud plus les reliefs inter-
Nous parlons assez largement des Forêts d’Acier disent même toute implantation sur les côtes. On
plus haut. Et leur réputation d’être impénétrable peut naviguer des jours et ne voir que des falaises,
n’est pas galvaudée. Aucune route ne les traverse et jusqu’à passer la chaîne montagneuse, qui s’ouvre
il faut les longer par les montagnes pour atteindre sur des collines boisées rejoignant les Forêts d’Acier.
l’Ereb’heïm. Les arbres y sont de très grande taille Mais cette région est si peu explorée qu’il n’en existe
et par endroit certaines canopées dépassent ample- pas la moindre cartographie exacte, même pas des
ment les 70 mètres. Elles sont si épaisses que la lu- côtes. Les Athémaïs ont à peine commencé à oser s’y
mière du jour n’atteint pratiquement plus le sol. Très aventurer, mais pour pouvoir arpenter la région, il
peu explorées, on ne sait guère ce qui y vit, seules leur faudra trouver une crique portuaire et construire
les lisières de la forêt sont exploitées, non pour leur un comptoir.
bois (sauf de chauffage) extrait des arbrisseaux, mais
pour les produits pharmaceutiques. Un peuple en-
Politique
tier pourrait se cacher dans les Forêts d’Acier et
personne ne le saurait. Des rumeurs parlent de cha- L’Ereb’heïm est peu peuplé. Les Erebs vivent entre
mans et d’être mi-animaux, mi-humains qui en ont eux voire en autarcie et il est connu que leur réponse
fait leur domaine. générale quand on veut commercer avec eux est :
«nous ne manquons de rien». Les pistes d’un village
à un autre sont étroites, escarpées et dangereuses, les
Lieux particuliers
falaises tendent à interdire le commerce par la mer,
Les Portes de la Mort les navires lévitants n’ont aucun moyen d’y accéder.
Elles s’ouvrent sur tout le sud de la grande Pangée Il n’y a guère que les mules et les chevaux qui sont
de Loss, mais n’ont pratiquement jamais été explo- efficaces dans la région. Comme tout l’Ereb’heïm est
rées. Et pour cause : il ne s’y trouve aucune source sauvage, cela veut aussi dire que tout voyage y est
d’eau connue et les températures de jour y dépassent périlleux et qu’il faut y être bien guidé et bien armé
les 50°C. Rien ne semble pouvoir y survivre et la pour espérer arriver à bon port.
passe tire son nom des cadavres d’animaux de toutes
tailles, parfois inconnus, qui parsèment le désert. Cependant, autour du port athémaïs d’Arrimsid,
on trouve des communautés rurales de paysans et
Le Nijhi’rani pêcheurs plus ouverts sur le négoce, et la ville sert
Chaîne de montagnes volcaniques qui se perd dans le un peu de lien commercial et d’échange culturel
Rift, le Nijhi’rani n’a presque jamais été exploré non entre les Erebs et le reste du monde. Mais même
plus. On raconte que l’endroit est émaillé de quan- ces citadins restent notoirement fermés et s’ouvrent
tités de Ruines Anciennes et d’étranges structures avec patience et prudence aux étrangers. Tout est
dépassant l’imagination, mais aussi d’êtres de métal long, compliqué et demande des efforts quand on
et d’hommes à demi sauvages et masqués qui tuent veut échanger avec ce peuple qui est connu pour son
tout ce qui ose approcher. hérésie religieuse assumée. C’est une des régions de
Loss à compter le plus grand nombre de chamans,
ce qui rend ses habitants suspects et inquiétants
pour tout le monde.

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Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

Arrimsid organisé, parvient à s’y cacher sans que rien ne puisse


Arrimsid compte une douzaine de milliers d’ha- parvenir à l’en déloger. Et ce n’est pas pour rien. Les
bitants. Elle est une cité autonome athémaïs et un arbres y sont très variés et très denses. Certains, très
comptoir d’Armanth. Le port est un relais commer- hauts, dépassent plusieurs millénaires. Ces bois sont
cial vers les îles san’eshes principalement, mais aussi striés de pistes de broussailles denses tracées par les
une base de départ pour l’exploration des côtes vers plus grands mammaliens, dont les étranges clairières
le Sud et l’Océan Infini. rondes que laissent les marche-forêts.

Petite et modestement défendue, la ville, qui compte Il va sans dire qu’avec une étendue de 1000 milles du
quelques centaines d’Erebs, est entourée de quelques nord au sud et d’est en l’ouest et malgré les commu-
villages de paysans et pêcheurs sur une des rares nautés humaines qui y vivent, souvent sur les berges
plaines de la région. Cette modeste ville vit à un des fleuves qui traversent tout l’Elmerase, cette fo-
rythme relativement lent et paisible, c’est même rêt reste largement inexplorée et s’avère réellement
un peu perturbant pour les Armanthiens habitués hostile aux humains. Si ses lisières sont parsemées
à la frénésie chaotique de leur immense cité-État. d’exploitations forestières, il est très ardu d’y péné-
Arrimsid compte toute une flottille de navires de trer et de l’arpenter. Et si le pire danger est la faune,
pêches, mais abrite aussi des sécheries de poisson. la présence des Forestiers, très méfiants et adeptes
Dans les eaux des lagunes environnantes, on élève et des réponses radicales quand on pénètre sur leurs
l’on pêche le leregus, un crustacé prisé à Armanth, et territoires, n’est pas une menace moins redoutable.
qui peut être conservé séché.
Politique
Lieux particuliers
Les fleuves et les lisières de l’Elmerase sont beau-
Le piton de cristal coup disputés entre les cités-États qui dépendent
Premier des deux lieux légendaires dont les Erebs ne des richesses de la forêt. Mais ces tensions n’évo-
parleront pas aux étrangers, le Piton de Cristal serait luent que rarement vers des conflits ouverts, parce
bel et bien un piton rocheux entièrement fait de béryl que menacent en permanence des ennemis redou-
bleu et abritant nombre de cavités et grottes. Celui-ci, tables : les Forestiers. Si ces derniers sont considérés
caché dans les montagnes et très difficile d’accès, sert comme des barbares semi-humains aussi bien par
de sanctuaire sacré aux plus grands rassemblements les Hégémoniens qu’une partie des Étéocliens, tous
chamaniques des Erebs. savent qu’en cas de conflits, ils viendront arbitrer
à leur manière, et celle-ci est sans pitié. C’est aus-
Le Gouffre si ce qui explique pourquoi l’Elmerase, au-delà de
Caché dans les collines qui descendent vers les Forêts ses dangers, est peu explorée : ses profondeurs sont
d’Acier se trouverait un cirque aux allures de vé- le domaine des Forestiers, tout le monde le sait et
ritable gouffre qui s’ouvre sur des amoncellements tout le monde connait le risque de venir déranger
étagés de Ruines Anciennes, qui en apparence n’ont un peuple parfaitement adapté à un milieu qui tend
pas de fond. Les Erebs ont l’air d’en savoir beaucoup pourtant à tuer le malheureux qui va s’y perdre en à
sur ce lieu et ils l’ont clairement arpenté et exploré peine plus d’une journée. Il est certain que le sous-
en partie. Mais là encore, l’endroit reste un mystère. sol de l’Elmerase regorge de minerais précieux, mais
personne n’a envie de prendre le risque d’aller les
exploiter. Pareillement pour ses Ruines Anciennes :
LA FORÊT DE L’ELMERASE les Forestiers ont échangé des trésors rarissimes qui
n’ont pu être trouvés que dans ces sanctuaires pré-
cieux, mais pour y accéder, il faudra explorer la forêt.
Géographie Et l’on aura compris l’étendue du problème.

L’Elmerase est une


La Croisée
immense forêt par-
ticulièrement dense Les Forestiers n’ont pas de capitale et leurs villes
sise entre les monts arboricoles sont bien cachées dans les profondeurs
Gapériens et les monts de l’Elmerase. Ainsi, ils ont adopté une politique de
Gémeaux, à l’ouest du neutralité et d’échanges économiques avec une cité
territoire de l’Hégé- de l’Étéocle, la Croisée, sise à l’embranchement des
monie. En fait, la fo- deux rivières donnant naissance au fleuve Atérios qui
rêt se prolonge même vers l’est dans les forêts du va se jeter dans les Schasmes. La Croisée abrite 4500
Darmos, la seule différence entre ces deux forêts est habitants et compte environ 500 à 600 Forestiers
une frontière naturelle, le fleuve Topaze. installés dans une bonne entente relative. C’est une
ville qui vit de l’exploitation des bois rares, des res-
L’Elmerase est gigantesque, si grande d’ailleurs qu’un sources végétales comme le mellia et du commerce
peuple entier, les Forestiers, relativement prospère et de peaux et de cuir.

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Ref. 14778
LES RÉGIONS ET CAPITALES

Les monts Gapériens Le froid et le climat rude et humide rendent l’ex-


L’ouest de la forêt de l’Elmerase est barré par une ploitation de la Forêt Sans Fin compliquée, d’autant
grande chaîne de montagnes — qui en fait descend que des bandes de griffons chassent tout ce qui peut
encore bien plus au sud et se prolonge vers le nord- se manger. Mais c’est une source de bois inépui-
ouest. Les monts Gapériens sont très peu accessibles sable exploitée aussi bien par l’Hégémonie que par
à cause de la forêt, mais les Forestiers y ont accès, et les Dragensmanns. C’est aussi l’abri dans lequel se
exploitent plusieurs mines et gisements de métaux cache le peuple martyrisé des Svatnaz, qui y trouve
précieux indispensables. Les montagnes dépassent un refuge efficace vu l’étendue de la forêt.
les 5 500 mètres et les glaciers et neiges éternelles y
sont fréquents. À noter qu’on y trouve trois volcans
Politique
actifs assez tumultueux et que des rumeurs parlent
de la Ville Morte, des Ruines Anciennes qui ne sont Une partie de la Forêt sans Fin, autour des Lacs
pas enterrées et serviraient même d’abri à tout un Blancs est exploitée par l’Hégémonie de manière par-
village Forestier. ticulièrement ordonnée et réfléchie, et elle défriche
et colonise les terres agricoles ainsi dégagées, malgré
la rudesse du climat. La forêt est d’ailleurs indis-
Lieux particuliers
pensable à l’industrie avide de matières premières et
La Passe-Haute de bois d’Anqimenès. À l’Ouest, les Dragensmanns
La Passe-Haute est un col d’altitude assez difficile vivent dans les mêmes forêts, avec des modèles agri-
d’accès, qui reste cependant la plus fréquentée des coles plus harmonieux et nettement moins indus-
voies commerciales entre les Dragensmanns et les triels, selon leur tradition. La Forêt sans Fin est l’obs-
Forestiers. La Passe-Haute est connue des Étéocliens tacle principal à des affrontements de masse entre
et les Hégémoniens, mais son accès est ardu. Les l’Hégémonie et les Dragensmanns. Elle ne permet
Forestiers veillent à sa protection, car cette artère pas le déploiement de forces militaires importantes
est vitale pour leurs échanges privilégiés avec leurs et les grandes légions des Ordinatorii ont vite appris
voisins. La route de la Passe-Haute débouche dans que la forêt est un théâtre parfait pour les tactiques
le Wervayllas, non loin de Grimrad. de combat d’escarmouches des Dragensmanns.

Les Ruines Anciennes de l’Elmerase Enfin, c’est le dernier refuge des Svatnaz, peuple aux
Elles n’ont pas toutes de nom et, oui, il y en a beau- croyances hérétiques, dont une partie vit dans les
coup : au moins quatre, dont trois connues des Neiges-Dragon et une autre du côté de la Taïga des
Forestiers. Elles ont été partiellement explorées Griffons, essayant pour ces derniers d’échapper aux
et le trafic des artefacts qui en sortent profite aux razzias de l’Hégémonie qui vont y chasser des esclaves.
Forestiers. Mais ces trésors sont étranges et parfois
même totalement incompréhensibles, même pour qui
L’enclave svatnaz
connaît les Anciens, comme s’il s’agissait de quelque
chose d’encore différent. L’Enclave svatnaz au nord du Concilianeum est une
série de petits villages et communautés dont la ma-
Plus de détails sur les Ruines Anciennes de l’Elme- jorité, mobile, est construite sur le dos de dharomos
rase dans le Livre 3 «Les Secrets du monde», page 32 apprivoisés. Les autres sont des villages troglodytes
dans les massifs ouest des Dents de Khimshis. Le
plus grand de ces villages est un peu considéré
LA FORÊT SANS FIN comme la capitale de ce peuple, c’est Kratezneg,
entièrement mobile et qui arpente l’enclave sans ja-
mais rester plus d’un mois au même endroit. Fort de
Géographie 14 000 habitants avec un grand nombre de guerriers
et de structures de défense, Kratezneg est le dernier
La Forêt sans Fin havre des Svatnaz. Mais en l’occurrence, c’est avant
s’étale d’est en ouest tout parce que l’Hégémonie ne voit aucun intérêt à
en une masse ininter- balayer cette enclave et asservir tout ce peuple en
rompue, des Neiges- une fois. Ce serait une opération de grande enver-
Dragon jusqu’au-de- gure coûteuse en vies humaines qui n’arrangerait
là de la Taïga des pas Anqimenès, qui préfère repousser ce peuple plus
Griffons. C’est une loin dans les forêts et se contenter d’envoyer des
forêt au relief très mercenaires et des chasseurs d’esclaves assurer un
plat, au climat froid, aux hivers parfois très rudes ravitaillement constant.
et dont le sol peut geler deux à trois mois par an,
parcourue de pistes de troupeaux de grands sikas Mais il ne faut pas croire que l’Enclave est dému-
et infestée de griffons. On y croise aussi beaucoup nie. Les Svatnaz ont les moyens d’échanger avec les
de nids de dragens. Gennemons, profitent de l’océan au nord pour se
déplacer rapidement, sont totalement à l’aise dans

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CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

l’épaisse et froide taïga et en exploitent avec efficacité L’Hégémonie est divisée en six principales régions :
toutes ses ressources. Cela rend l’Enclave difficile à le Concilianeum, très grande prairie particulière-
prendre d’assaut et explique pourquoi elle perdure ment bien aménagée et considérée comme le cœur
efficacement, sauvant les Svatnaz, qui ont manqué industriel et agricole de l’empire, qui connaît cepen-
disparaître, et sont toujours menacés. dant des hivers rigoureux ; la baie d’Anqimenès, très
peuplée et urbanisée autour de la grande capitale
éponyme, cœur politique et spirituel de l’Église du
Lieux particuliers
Concile Divin ; les Lacs Blancs situés au cœur de
La Taïga des Griffons la Forêt sans Fin et qui sont une colonie hégémo-
Elle n’est citée ici que parce que c’est la limite terri- nienne exploitant les lacs et les bois épais qui les
toriale des Svatnaz, et qu’elle tire son nom du pré- environnent malgré des hivers longs et très rudes ; les
dateur qui domine la forêt et y pullule : des griffons forêts du Darmos, une partie de la forêt de l’Elmerase
des neiges, particulièrement redoutables et de grande sous contrôle de l’Hégémonie et d’où proviennent
taille. Les Svatnaz en ont apprivoisé quelques-uns les métaux dont Anqimenès a un besoin constant ;
qu’ils élèvent, mais il est difficile de les domestiquer. le Ginnon, une péninsule connue pour son activité
volcanique tumultueuse, aux terres agricoles riches,
Le Sanctuaire du Schisme mais souvent rendues inexploitables par les éruptions
En fait, si les Hégémoniens sont persuadés que les fréquentes ; et enfin les Rodhialis et Kalumna, deux
Svatnaz ont un Sanctuaire pour leur Prophète héré- îles, la première riche et verdoyante et la seconde
tique du Schisme, celui-ci n’existe pas. Ce fameux désolée qui sont deux relais commerciaux très impor-
sanctuaire est en fait une nécropole troglodyte bien tants pour le trafic maritime de l’Hégémonie.
cachée, qui semble avoir été bâtie dans des Ruines
Anciennes pratiquement inaccessibles aujourd’hui. L’ensemble de cette région possède un réseau hy-
Quant à la localisation du Prophète, nul ne la drographique important avec, dans les forêts du
connait, mais sans doute est-il parmi les habitants Darmos, certains des plus longs fleuves des Mers de
de Kratezneg, voire en exil dans les Neiges-Dragon. la Séparation. Ils sont cependant en général assez tu-
multueux et il est malaisé d’y naviguer. On privilégie
La Mer de Glace largement pour cette raison l’usage de navires lévitants
C’est l’océan qui baigne les rives du nord de la Forêt qui en suivent le cours. Il y a aussi un grand nombre
sans Fin. Il s’agit d’un océan polaire, mais les glaces de régions sauvages, dont certaines désolées comme la
de la banquise ne descendent jamais si bas. Par contre, Plaine Noire, ou une partie du Ginnon. Si l’Hégémonie
les hauts-fonds et les embouchures des fleuves gèlent est étendue en surface, sa population se concentre
souvent en plein hiver. Les eaux sont très riches et une surtout au plus près d’Anqimenès et il y a des coins
des sources de viande et d’huile des Svatnaz provient véritablement inexplorés. C’est aussi une région qui a
des mammaliens marins qu’ils exploitent. C’est pour connu beaucoup d’instabilités et de conflits passés qui
ce peuple une artère importante et le seul moyen effi- ont laissé des traces. Il y a encore des villes entières
cace de réunir les Svatnaz de l’Enclave et des Neiges- qui ne sont plus que ruines abandonnées ou laissées
Dragon, et commercer avec les Dragensmanns. aux princes-bandits qui pullulent dans les zones les
plus sauvages de la région. Enfin, les grands troupeaux
de longilas parcourent les vastes terres ouvertes entre
L’HÉGÉMONIE ET ANQIMENÈS la baie d’Anqimenès et les Plaines de l’Étéocle et les
lisières des bois présentent de grands dangers dus aux
fauves qui les hantent.
Géographie
Politique
L’Hégémonie est un
territoire vraiment L’Hégémonie fonctionne comme un empire centra-
très vaste, qui va de la lisé, avec une administration qui obéit aux ordres
Forêt sans Fin au nord d’Anqimenès, et un réseau étendu d’officiers et d’ad-
aux Plaines de l’Été- ministrateurs chargés de planifier toute l’économie et
ocle au sud-ouest, et la politique de l’empire.
des monts Gémeaux
à l’Ouest aux marches Cependant, c’est une machine si étendue qu’elle
de Gennema à l’Est sur plus de 2 000 milles. Le cli- tend à se gripper toute seule au moindre couac. Les
mat y est de tempéré à froid et l’Hégémonie connaît voies de communication et de ravitaillement ne par-
régulièrement des hivers plutôt rudes et enneigés au donnent pas le moindre retard ou accroc, et forcé-
niveau d’Anqimenès. Plus au Nord, les neiges peuvent ment, plus on s’éloigne d’Anqimenès pour se diriger
durer trois mois. Les étés peuvent parfois être assez vers les frontières plus sauvages et peu peuplées de la
secs, mais le climat reste en général tempéré froid région, plus il y a de problèmes venant ralentir, voire
avec quelques épisodes tous les huit ou dix ans d’hi- bloquer ce réseau. Et le plus gros de ces problèmes
vers redoutables. a toujours été le même : la guerre.

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LES RÉGIONS ET CAPITALES

Si l’on y regarde de près, l’ensemble de l’Hégémonie est reliée à un vaste port par une large chaussée
fonctionne entièrement autour de la gestion d’un état fortifiée et par des canaux provenant des fleuves
de guerre permanent et d’une économique d’expan- Ardis et Silvae qui se jettent dans la baie. Le port est
sion et de conquête. C’est la seule culture et la seule lui-même fortement militarisé sur la moitié de sa
région dans toutes les Mers de la Séparation qui a surface, et se prolonge dans les canaux en perma-
besoin d’esclaves pour assurer le bon fonctionnement nence entretenus. La baie est fleurie de centaines de
de son industrie, et sans un apport régulier, cette in- mâts des navires mouillant sur place, dans un va-et-
dustrie ne peut plus assurer ses rendements. C’est en vient incessant pour fournir Anqimenès en matières
gros une sorte de fuite en avant et au premier écueil, premières et assurer le commerce de la plus grande
cette machinerie tend à s’effondrer. ville connue de Loss.

Cela donne d’une part de fréquents problèmes de ra- Anqimenès elle-même est entourée d’une rangée de
vitaillement et des disettes, voire des famines, d’autre trois murailles massives et concentriques, au réseau
part de gros soucis d’intendance et de justice puisque de communication fortifié, avec des tours s’élevant à
tout est centralisé, créant le terreau parfait pour de trente mètres et bardées de la plus formidable artil-
la corruption locale, des soulèvements, des rébellions lerie imaginable. Ces murs sont percés par les aque-
et bien entendu des pacifications violentes. Il y a des ducs fortifiés apportant l’eau à la cité, qui la stocke
petits villages qui ont été entièrement dévastés et dans de grands réservoirs. Et au centre des grandes
leurs habitants asservis sans pitié par les Ordinatorii. voies de communication partant en étoile dans les
Les grandes révoltes sont très rares, surtout dans les quartiers de la ville se trouve le Temple du Concile,
grandes villes. Mais malgré cette crainte qui s’ajoute tel une cathédrale dont les plafonds et la coupole
à la peur superstitieuse des représentants de l’Église, dépassent les cent mètres de haut et dont les flèches
ces événements peuvent arriver aux frontières, qui, culminent pour certaines à deux cents mètres.
mal surveillées et gardées, sont aussi la proie de
nombre de raids des voisins de l’Hégémonie, de pil- Anqimenès est une ville magnifique, mais à l’am-
lards et de bandits. Bref, l’Hégémonie est un grand biance pesante. La lourdeur des règles et des Dogmes
empire qui semble très ordonné, voire étouffant… de l’Église affecte tout le monde. Des quartiers di-
mais plus on s’éloigne du centre du pouvoir, plus il visent la population en classes sociales et sont barrés
semble chaotique et désorganisé. de portes gardées limitant la circulation, donnant
parfois des allures de prison géante et le mépris affi-
ché pour les très nombreux esclaves et indigents de la
Anqimenès
part des classes dirigeantes et de la population aisée,
La capitale de l’Hégémonie, plus grande cité connue la discrimination sexiste constante — pratiquement
de tout Loss. toutes les femmes portent des voiles cachant leurs
cheveux, parfois leur visage, et des vêtements cou-
Population : 1,9 million d’habitants vrants — ainsi que la présence militaire constante
rendent l’ambiance oppressante. Pourtant, si on a les
Dirigeant : Les deux Consuls Impériaux, élus en ma- moyens et qu’on n’est pas gêné par ses lois, il y fait
jorité par les autorités de l’Église. Actuellement, il plutôt bon vivre et Anqimenès déborde de luxe, de
s’agit de deux frères, Marcus et Halenus Atorides. richesse et de produits exotiques importés de toutes
les Mers de la Séparation.
Forces militaires : 300 navires armés, dont 150 lé-
vitants avec leurs équipages, et une douzaine de
Le Concilianeum
Béhémoths. 15 légions hégémoniennes et 18 légions
de l’Église totalisant 170 000 militaires. Plaine agricole humide au pied des Dents de
Khimshis, entre la baie d’Anqimenès et les Marches
Principe de la ville : le Cœur et le Centre spirituel de de Gennema, la région, à l’origine vaste étendue
l’Église du Concile Divin. parcourue par des nomades et leurs troupeaux, a été
radicalement aménagée en terre agricole au réseau
Anqimenès est un monstre gigantesque à l’architec- de communication et de transport très dense. À ses
ture riche et complexe, urbanisée avec un ordre et frontières, les bastions de légions de l’Hégémonie
un soin maniaque. Blottie derrière les plus formi- pullulent pour empêcher toute incursion. Comme
dables murailles jamais construites, la ville est un nous en parlons plus haut, si la plaine est très riche
ogre qui nécessite toutes les ressources de l’Empire et fertile, en hiver, il ne fait pas toujours bon y vivre
pour subsister. Alors que c’est Armanth qui a parmi et le climat peut s’avérer rude. Les dégels causent
ses surnoms «La cité aux cent mille esclaves», c’est bel souvent de gros soucis avec des routes devenant
et bien Anqimenès qui en exploite le plus : plus du des bourbiers infâmes et seuls les navires lévitants
dixième de sa population est asservi. peuvent alors circuler. Ce qui peut avoir des effets
désastreux sur l’approvisionnement d’Anqimenès,
Anqimenès est visible de très loin, bâtie sur un pla- qui dépend en grande partie de l’agriculture de
teau peu élevé à quelques milles des côtes. La cité cette région.

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CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

Les Lacs Blancs dérée. Le Haut-Port, une cité fortifiée de 10 000 habi-
Région froide et humide, constellée de lacs et de tants, grandit perpétuellement par l’apport de réfugiés
marais, les Lacs Blancs sont à la source de l’un du Ginnon et constitue un carrefour de commerce
des deux fleuves d’Anqimenès. Région très boisée, naval particulièrement important entre les Plaines de
l’exploitation forestière y domine, mais les rives du l’Étéocle et l’Hégémonie. L’île est vaste, mais très ha-
fleuve Silvae sont aussi très agricoles, malgré un cli- bitée et cultivée. Chaque année, elle voit ses régions
mat difficile. On pourrait croire la région, proche de sauvages aménagées en terrasses agricoles. La plupart
la capitale assez calme, mais étant au cœur de la des petites plaines côtières sont déjà occupées. Cela ne
Forêt sans Fin, il s’agit de l’une des deux régions de se fait pas sans heurt, car les habitants d’origine des
l’Hégémonie à subir le plus d’incursions de pillards Rhodialis sont farouchement indépendants et n’aiment
dragensmanns, surtout sur ses frontières ouest. Ainsi pas du tout cette invasion de réfugiés. Les heurts ne
donc, nombre de garnisons y stationnent, régulière- sont pas rares et les Ordinatorii doivent souvent user
ment déployées pour anticiper des raids qui se pro- de la force pour calmer les conflits.
duisent pratiquement chaque année.
Kalumna
Les forêts du Darmos
Kalumna est la plus grande île d’un archipel habité
Les forêts du Darmos sont la partie nord-est de l’El- depuis des lustres par des autochtones peu amicaux.
merase. L’Hégémonie a sur cette région un contrôle Ruraux et isolationnistes, ils ne se mêlent guère des
relativement limité. Dès qu’on s’éloigne des voies de affaires du monde, et ne cachent pas leur hostilité
communication et des cités pour s’enfoncer dans la à l’occupation hégémonienne. Il n’y a guère de res-
forêt, on trouve celle-ci sauvage et presque inhabitée. sources dans Kalumna, à part quelques denses forêts
En fait, ce sont surtout les routes longeant la chaîne d’altitudes, et quelques bons coins de pêche. Mais
des monts Gémeaux jusqu’à Octodurum et la plaine Anqimenès y a trouvé des gisements de loss-métal
de la lisière de la forêt jusqu’aux Ferii Rupes qui et de platine et les exploite activement, ayant même
sont civilisés et à peu près habités. Les côtes sont créé un port pour cela, devenu un carrefour com-
cultivées et relativement prospères, mais la grande mercial assez fréquenté. À part ses autochtones et les
richesse de la région, ce sont les exploitations mi- habitants de Port-Kalumn, l’archipel est très peu peu-
nières autour d’Octodurum et de Pax Darmae. Il plé, mais c’est dans les mines de Kalumna que sont
s’agit cependant pratiquement du cœur de l’Empire, envoyés mourir tous les criminels de l’Hégémonie.
et tout le poids de l’Hégémonie se fait sentir où que
l’on aille dans la région… tant qu’on n’entre pas dans
Lieux particuliers
les forêts sauvages.
La Plaine Noire
Au sud-ouest d’Oenopons s’étend toute une vaste
Le Ginnon
plaine infertile et dévastée, au sol de cendre noire et
De climat tempéré doux, océanique et accueillant, de pierre calcinée où émergent çà et là les ruines de
le Ginnon pourrait être un havre, s’il n’était pas cités anciennes dont il ne reste que les fondations.
une région volcanique terriblement active depuis L’endroit est laissé à la faune sauvage de Loss, mais
ces derniers siècles. La péninsule est très habitée même elle semble éviter ce lieu maudit où, dit-on,
et couverte de terres agricoles fertiles où s’égrènent des morrows gémissent par centaines toutes les nuits.
petits villages et bourgs fortifiés dans des paysages La Plaine Noire est la région ravagée par le Chant
vallonnés au pied de hauts volcans. Mais malheu- des Abîmes (voir «L’histoire de Loss», page 43) et
reusement, et de manière désormais régulière, ces où se trouvait Antiva. Aucun Lossyan, sauf les plus
derniers crachent des masses de cendres parfois fous, n’irait tenter de s’aventurer dans cette région et
épaisses d’un demi-mètre, pratiquement tous les même les routes la contournent.
quatre à cinq ans désormais. Les séismes et les cou-
lées pyroclastiques sont presque annuels et la vie Le schasme
des habitants devient de plus en plus compliquée, Entre les Hautes-Marches et la Plaine Noire, servant
les forçant à émigrer au nord et dans les Rhodialis. de frontière entre l’Hégémonie et les Plaines de l’Été-
Pour le moment, pourtant, les habitants s’accrochent ocle, c’est un vaste marais particulièrement dangereux,
malgré les conditions de vie. Mais famines et épidé- à cause de miasmes qui peuvent emporter l’homme
mies consécutives aux éruptions deviennent de plus qui les respire en quelques heures. Personne ne l’a ja-
en plus fréquentes. mais exploré, bien entendu, mais quelques autochtones
vivent à sa frontière nord et s’y aventurent parfois.
Les Rhodialis
Les Exculsanei
Grande île luxuriante en face de Nashera et de son Deux petites îles interdites d’accès, où se trouve-
port le Parcis, les Rhodialis sont escarpées et vallon- raient des chantiers navals de l’armée hégémonienne
nées, mais rendues fertiles par les apports des cendres et des camps d’entraînement pour ses troupes d’élite,
du Ginnon et une activité volcanique locale très mo- les Quaesitorii.

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Ref. 14778
LES RÉGIONS ET CAPITALES

Paerga
Politique
L’île, non loin des côtes du Ginnon, est citée ici seu- L’Hemlaris est un empire qui, vu de près, semble
lement parce que des rumeurs persistantes parlent de nettement plus proche d’une fédération de territoires
Ruines Anciennes émergeant du sol partout sur ce féodaux dominés par des cités autonomes, que d’un
lopin de terre si désolé que seuls les animaux marins, empire centralisé comme l’Hégémonie. Si Cymiad est
quelques pécheurs primitifs et les oiseaux y habitent. la capitale de l’empire, elle est moins son cœur admi-
Mais on dit que l’endroit a servi et sert encore de nistratif que symbolique. Pourtant, tous les Hemlaris
relais à des expéditions navales et des raids de pira- sont très fiers de leur impératrice et attachés à leur
terie dans le Ferii Rupes. empire et à ses représentants, une vaste et puissante
administration civile et héréditaire au service des
Khans, les rois et princes de l’aristocratie qui dirige
L’HEMLARIS ET CYMIAD les fiefs et les cités.

La planification est le maître-mot de l’organisation


Géographie de l’Hemlaris : chaque village et ferme rend compte
de ses productions et de ses cultures, les rendements
L’Hemlaris est une ré- sont calculés et provisionnés, le transport des ma-
gion côtière fortement tières premières fait l’objet d’une gestion remarquable
enclavée dans l’énorme pour fournir tous les besoins aux quatre coins de
massif montagneux l’empire ; même les taux d’échanges des produits
du Nevertsguïkhana, commerciaux sont planifiés et prévus. Ce qui arrange
les plus grandes mon- beaucoup la Guilde des Marchands qui a pu ainsi
tagnes des Mers de la offrir les services de ses experts-comptables et de ses
Séparation, avec des courtiers, forts bienvenus malgré la méfiance hostile
sommets frôlant les 8 500 mètres et des plateaux assez répandue que l’Hemlaris voue à son ancien allié
d’altitude à 5 000 mètres. envers qui Cymiad s’est fortement endettée.

C’est grâce aux climats océanique d’une part et à Comme l’Hégémonie, l’Hemlaris est fortement
la mer intérieure de Kys, d’autre part, que la vaste militarisé quoiqu’à une échelle inférieure. Ce sont
région n’est pas une suite de déserts et de plaines surtout, cependant, des structures et unités de dé-
arides. Mais le désert de Shaïmu, au pied des monts fense et non des troupes d’invasion et d’expansion.
Frontaliers, à la fois torride et glacial, donne une pe- L’Hemlaris a bien assez de terres inconnues à ex-
tite idée de ce que tout l’Hemlaris aurait été sans sa plorer et coloniser vers le sud-est (et au-delà des
précieuse mer intérieure et le bassin humide qu’elle montagnes) pour ne pas avoir de velléités particu-
crée. On devine cependant l’importance d’une agri- lières d’envahir ses voisins, en tout cas pas autant
culture maîtrisée dans une région où les terres arables que l’Hégémonie. De plus, la fonction guerrière y est
ne sont pas si nombreuses que cela et doivent être aussi considérée comme non seulement noble, mais
cultivées avec intelligence et efficacité. comme un art en soi et aucun peuple dans tout Loss
ne prend plus profondément au sérieux les principes
Tout le sud-est de l’Hemlaris est, a contrario, une du combat et de la guerre.
jungle dense, peu explorée et en partie marécageuse.
S’il est périlleux de s’y enfoncer, les côtes sont égre-
Cymiad
nées de villages et de bourgs fortifiés entourés de
cultures et les poissonneuses eaux des mangroves La capitale plus symbolique qu’administrative de
de la Mer de Corail sont exploitées. Mais c’est aussi l’Hemlaris, cœur de son pouvoir.
une région de typhons et de tempêtes qui frappent
souvent avec violences les communautés côtières, et Population : 600 000 habitants, troisième plus grande
la mer est réputée elle aussi pour ses dangers. cité lossyanne.

La zone la plus peuplée de l’Hemlaris se situe Dirigeant : l’Impératrice du Trône de Rubis


entre la Mares Vermicii et la Mer de Kys, au su des
Marches de Gennema, dans de grandes plaines arro- Forces militaires : 10 légions des Guerriers de l’Em-
sées par les nuages venus des Mers de la Séparation. pire, 6 légions de cavaleries, 6 légions d’Ordinatorii
Le climat est tempéré doux, avec quelques rivières et pour 140 000 soldats environ. La flotte de Cymiad,
fleuves, parsemés de champs, de prés et de quelques basée à Hongua, totalise 180 navires armés, dont 40
plaines où paissent des troupeaux de sikas à demi lévitants et leurs équipages avec quatre Béhémoths.
sauvages et des familles de longilas qui semble par-
tager le territoire avec les hommes dans une relative Principe de la ville : surnommée la Cité de Rubis
bonne entente. (voir plus bas).

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Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

La cité de Rubis tire son nom de l’usage fréquent de Les Mishaï, des nomades cousins des Montagnards
carreaux et tuiles de béryl rouge pour les fenêtres et (voir plus bas) le parcourent et y commercent le béryl,
pour couvrir les toits ornés et décorés de ses très nom- le soufre et d’autres minéraux, le sel, des peaux et du
breux palais et maisons de maître, principalement le lait. Le désert est terriblement hostile par son climat et
Palais de l’Empereur qui a les dimensions d’une petite sa faune, mais il n’en est pas moins très riche en mine-
ville. Mais le nom vient aussi du Trône de Rubis, au rais et s’il est peu habité, les Mishaï comptent quelques
cœur du palais, taillé dans un rubis d’un seul tenant, villages et un bourg industriel foisonnant : Nuï-den, qui
pesant plusieurs tonnes et où siège l’Impératrice. exploite des mines de fer, d’étain et de soufre.

Cymiad impressionne par son savant mélange d’or-


Les monts Frontaliers
donnancement tracé au cordeau et de raffinement
esthétique. La cité qui possède trois séries de fortifi- Il s’agit de la dernière partie habitée des montagnes
cations et de murailles pour se protéger sur trois de du Nevertsguïkhana. On surnomme son peuple les
ses quatre côtés, le dernier étant occupé par les ins- Montagnards, et ce sont des hommes rudes et bar-
tallations portuaires. Il y a cependant assez peu de bares aux habitudes fières et cruelles, mais farou-
bâtiments très hauts, de tours ou de hautes flèches. chement attachés aussi bien au Trône de Rubis qu’à
Les maisons sont de brique et de bois, la pierre est leur indépendance. Les monts Frontaliers sont très
réservée aux forts, aux murailles et aux terrasses élevés, et les plateaux habités où paissent les trou-
et soubassements des palais. Cymiad n’accueille peaux des Montagnards culminent à 3 500 mètres
d’ailleurs pas tous ses habitants dans ses murs, et d’altitude. On raconte que nombre de Ruines
environ 250 000 personnes, y compris les quartiers Anciennes se cachent dans les vallées et canyons
des étrangers et de la Guilde des Marchands sont à profonds de la région.
l’extérieur des murailles. En général, ce sont les ha-
bitants les plus pauvres, mais aussi les commerçants,
La Mer de Kys
les nomades et une partie des fermiers de la ville qui
résident hors des murs. La mer de Kys est une mer intérieure peu profonde,
aux eaux peu salées et très poissonneuses. Malgré
Enfin, la ville est très étendue sur sa plaine. D’une quelques tempêtes de sable venu du désert de Shaïmu
part, palais et grands jardins privés et publics qui peuvent rendre la navigation très risquée, c’est
prennent de la place, d’autre part la nécropole im- une mer calme et amplement employée pour com-
périale qui côtoie Cymiad est très vaste. Les grandes mercer et voyager. Ses côtes, surtout du côté ouest,
artères, droites et perpendiculaires, sont assez larges sont très habitées.
pour organiser des marchés. Elles achèvent de don-
ner à la ville une impression de gigantisme qui est à
La Muraille des Lames
peine exagéré : dans sa plus grande longueur, la cité
dépasse les 10 milles. Frontière nord de l’Hemlaris face aux Marches de
Gennema, la muraille des lames est un ensemble de
L’autre chose qui en ressort, c’est son melting-pot fortifications et de murailles en un réseau de défense
culturel. Même si la capitale est fermée et accueille très dense, censé arrêter les légions hégémoniennes.
peu les étrangers, la variété des peuples de l’Hemlaris Le résultat n’a jamais été totalement efficace, puisque
et de l’influence de ses voisins se voit partout, les les passages par la mer sont possibles. C’est la rai-
métissages sont nombreux, les styles culturels se per- son pour laquelle Hang-Boda et Haïcan deviennent
cutent et se mélangent allègrement. C’est aussi une progressivement de grands ports militaires surarmés.
ville très industrieuse, bondée d’écoles, d’université, La vallée que protège la Muraille des Lames est très
d’ateliers et de laboratoires. Et enfin, on y croise fertile et riche, mais a beaucoup souffert de la guerre
beaucoup d’esclaves, Cymiad rivalisant presque avec dont les stigmates, visibles partout, perdureront en-
Armanth par le nombre de ses jardins d’esclaves et core longtemps.
maisons de maîtres-esclavagistes.
L’isthme de Kaïnaa
La région autour de Cymiad est fortement urbanisée
et aménagée sur presque trois jours de cheval. Les L’isthme de Kaïnaa est la frontière sud de l’Hemla-
voyageurs vantent la beauté magique de ces cam- ris, et aussi le prolongement au sud de son cœur
pagnes harmonieuses, paisibles et très habitées. agricole et urbain. La région, assez vaste et étendue,
a un climat tempéré doux, presque tropical, avec
des saisons des pluies marquées, de très belles villes
Le désert de Shaïmu
dans des planes entourées de collines cultivées et
Pris en étau dans les massifs prolongeant les mon- de terrasses, entre les eaux de la Mares Vermicii et
tagnes du Nevertsguïkhana, le désert de Shaïmu de la Mer de Kys. C’est la région de l’Hemlaris la
grimpe en série de plateaux toujours plus hauts et plus connue des voyageurs et la plus ouverte aux
arides, s’offrant le luxe au fil des saisons d’être à la fois étrangers, même s’il ne s’y sentent jamais tout à fait
torride et glacial. Mais toujours abominablement sec. les bienvenus.

126
Ref. 14778
LES RÉGIONS ET CAPITALES

Le Kaï-hong fondes et bardées de dangereux récifs coralliens. Il


Habité par les peuples Sari et Makäi, le Kaï-hong est faut bien connaître la seule voie de navigation qui les
une grande jungle très humide et océanique, dont les traverse pour ne pas se rajouter à la longue liste des
côtes se prolongent en mangrove dans la tumultueuse navires qui se sont échoués contre ces îles. Elles sont
Mer de Corail. La région et ses peuples semblent d’ailleurs habitées et plusieurs communautés sont des
parfois donner l’impression de n’être plus du tout naufrageurs qui trompent les navires en allumant de
dans l’Hemlaris et que l’Empire du Trône de Rubis et faux feux de signalisation et que même l’Imareth
ses codes sont très loin. Les habitants sont plus non- pourchasse pour s’en débarrasser.
chalants, plus ouverts et égalitaires en général, mais
aussi moins civilisés selon les normes de l’Hemlaris.
Politique
Les jungles sont impénétrables et elles ne sont exploi-
tées que pour la chasse et la cueillette. L’agriculture L’Imareth est dominé par une sorte de fédération
se limite à quelques zones côtières et la pêche est la informelle de Princes-pirates et de petits rois, le plus
ressource principale. Les Saris, qui sont de très bons souvent conservant leur pouvoir par un subtil mé-
plongeurs, vont récolter à 10 ou 20 mètres de profon- lange de compétence politique et de brutalité. Le
deur les coraux rouges, bleus et verts luminescents pouvoir n’y est que rarement héréditaire. Le com-
qui donnent son nom à la mer. mandement et l’influence se gagnent et se perdent
par la ruse et la force, ce qui implique des conflits
fréquents. Pourtant, les Princes-pirates de Gillas sont
Lieu particulier
élus par les capitaines des navires pirates de la cité,
Le Nevertsguïkhana tandis qu’à Anédeïmos, le roi est en poste tant qu’il
Si vous vous demandez où se trouve la source des n’est pas destitué ou assassiné par un rival qui prend
secrets autour du Trône de Rubis, du Champion du alors sa place. On retrouve la même ambiance dans
Trône, des légendaires sabres de loss-cristal et de les communautés rurales et les villages de pêcheurs.
certaines armes foudroyantes dont sont équipés les La force et la ruse règnent en maître sur une orga-
béhémoths de l’Hemlaris, la réponse est quelque part nisation politique chaotique, au point que les habi-
dans l’immense chaîne de montagnes aux pics dépas- tants de l’Imareth ont pour habitude de se débrouiller
sant les 8 500 mètres, que seuls quelques hommes ont entre eux pour assurer les services communs.
explorés. On y trouve plusieurs Ruines Anciennes,
connues et tenues secrètes par le pouvoir impérial, Comme nous en avons déjà parlé, avec ses activités
qui en étudie le contenu et les explore, faisant de de piraterie, d’esclavage et de trafics, l’Imareth est
l’Hemlaris sans doute une des trois civilisations de une région de fort mauvaise réputation. On ne re-
Loss à en savoir le plus sur les Anciens Peuples, sans garde jamais un Imareth sans méfiance, même quand
doute plus que les Armanthiens eux-mêmes. on le connaît bien. S’ils partagent les mêmes traits
assez progressistes et modernes que les Teranchens,
les Imareth restent avant tout pour tout le monde
L’IMARETH un peuple d’hommes sans foi ni loi, dénués de pi-
tié et d’honneur ; cela n’aide pas à la sérénité des
négociations sereines, pourtant, nombre de Maîtres-
Géographie marchands d’Armanth ont des relations et des inté-
rêts commerciaux dans les équipages et comptoirs
L’Imareth est l’une des pirates de la région, et entretiennent des relations
vastes îles de l’archipel étroites, afin d’éviter d’être la cible des pirates.
central des Mers de la
Séparation. Longue
Gillas
d’un peu plus de 600
milles, l’Imareth est Capitale par défaut de l’Imareth, plus pour sa bonne
très montagneuse, santé économique et son influence stratégique que
d’un climat méditerra- pour des raisons politiques, Gillas compte 65 000 ha-
néen assez humide, couverte de bois peu denses. Les bitants. La ville, qui abrite un port fortifié particuliè-
forêts profondes y sont rares ; sur toute l’île poussent rement vaste et impressionnant, est divisée en quar-
des massifs de bosquets pouvant s’étendre en maquis tiers mouvants sous le contrôle de Princes-pirates
épais à perte de vue. réunis en un conseil de ville, qui en fait délègue ses
responsabilités à des secrétaires et administrateurs
Les montagnes qui barrent l’est de l’île tombent à chargés de tenir la ville en bon état. Le reste du
pic en calanques dans la Mer des Pirates, et leurs temps, les Princes-pirates se chamaillent allègrement
sommets s’élèvent à presque 3000 mètres. La côte entre deux campagnes de piraterie ou de mercenariat
nord est ainsi presque inhabitée et pour tout dire, dans les Mers de la Séparation. Assez chaotique, mal
inhospitalière à part quelques rares criques étroites. gérée, la ville compte un grand nombre d’indigents,
Entre l’Imareth et Terancha se trouve tout un cha- mais aussi la plus grande proportion de compagnies
pelet d’îles serrées, les Dhamiris, aux eaux peu pro- mercenaires de tout Loss, plus encore qu’à Armanth.

127
Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

Dulce Valles boisé et vallonné, à l’ombre des Dents de Khimshi ;


La région sud de l’Imareth est vallonnée et couverte les Gennemons laissent d’ailleurs ces forêts en paix,
de maquis, entrecoupés de terrasses de vergers et et les exploitent très peu, les considérant aussi bien
de vignes descendant en champs cultivés jusqu’à la sacrées que magiques et dangereuses.
mer. L’ambiance y est amicale, accueillante, paisible
même, fort loin de l’image de Gillas et ses pirates. Au sud se trouve l’île d’Estis, et la capitale des
Les habitants commercent directement avec leurs Gennemons, Mille-Feux. À la différence des plaines
voisins teranchens. C’est la plus riche région agri- habitées par des Gennemons sédentaires, l’île est
cole de l’Imareth et une sorte de consensus veut aménagée en milliers de terrasses agricoles ver-
que les Princes-pirates, les rois et leurs querelles ne doyantes entrecoupées de bois, de haies et de bos-
viennent pas affecter l’économie de la région, vitale quets, avec quelques pâturages et un dense réseau
pour toute l’île. routier. L’île est connue pour sa sécurité remar-
quable, il n’y a plus beaucoup d’animaux dange-
reux qui y vivent. Entre les plaines et la Muraille
Les Vépérides
des Lames, au sud-ouest s’étend une zone maré-
Les Vépérides sont une très ancienne colonie Imareth cageuse et régulièrement inondée, mais où les no-
au nord d’Anédeïmos. L’archipel est constitué d’îles mades vont chaque année à la saison sèche faire
désolées où vivent des pécheurs et éleveurs au pied paître leurs chevaux et leurs sikas. On dit que c’est
de volcans actifs. Les îles sont voisines de Kalumna de ces marais que viennent les kaerins, les rares et
et les locaux y font commerce, principalement de fougueux chevaux mammaliens que seuls montent
poisson, de viande et de peau. C’est aussi un refuge les plus braves et expérimentés des chefs et leaders
connu des pirates de l’Imareth dans leurs campagnes des clans gennemons.
de piraterie et il s’y trouve quelques petits ports for-
tifiés bien dissimulés.
Politique
Il n’y a guère à ajouter sur les Gennemons que ce qui
Lieu particulier
a été dit dans le chapitre Les Peuples. Les Gennemons
Les grottes du Karadur vivent en grande majorité de manière nomade ou
Dans une vallée nichée au cœur des montagnes se semi-nomade, leurs villages et caravanes juchés ou
trouve une vaste grotte naturelle, d’ailleurs habitée tirés par les longilas suivant les troupeaux de sikas
par des bergers qui en ont fait une habitation troglo- et de chevaux. Ce sont aussi de grands éleveurs de
dyte. Mais tout au fond des galeries courant à plus de griffons et ces derniers sont réputés partout pour leur
deux mille dans les profondeurs, ces mêmes bergers dressage parfait et leur redoutable efficacité guer-
parlent d’une immense porte prétendument faite de rière. Mais dans toutes les Mers de la Séparation,
pur loss-métal. Personne ne l’a jamais ouverte, mais un cheval gennemon se vend, lui aussi, une petite
quelques explorateurs sont allés voir de plus près fortune. Ces derniers sont connus pour leur petite
et parlent de bas-reliefs Anciens et d’étranges ma- taille comparés aux autres races équines de Loss, et
chines immenses autour de cette porte, restée close pour leur infatigable endurance.
depuis des éons.
Les clans gennemons entretiennent des relations
compliquées d’alliances et de dettes, impliquant
LES MARCHES DE GENNEMA disputes et règlement de compte, de manière aussi
anarchique d’apparence, qu’en réalité particulière-
ment ritualisé. Un étranger n’y comprendrait rien,
Géographie mais la manière de gérer les dettes et les vengeances
est très codifiée chez les Gennemons, comme leurs
Plaine montant en rites d’unions et de mariage, alors qu’au premier
marches vallonnées abord, cela semble sauvage, barbare et franchement
de la mer aux mon- indiscipliné. On notera aussi que les sédentaires et
tagnes des Dents de les nomades ne s’aiment guère, mais s’allient sans
Khimshis, les Marches faille devant tout ennemi qui viendrait s’en prendre
sont barrées au sud par aux Gennemons. Leur histoire passée a forgé une
la Muraille des Lames, identité nationale et une solidarité aussi terrible que
frontière fortifiée avec leur colère.
l’Hemlaris et au nord par le fleuve Émeraude qui dé-
limite la frontière avec l’Hégémonie. La plus grande
Mille-feux
partie des Marches de Gennema sont occupées par
de grandes prairies ouvertes où les Gennemons La capitale économique des Marches de Gennema,
élèvent en liberté leurs troupeaux. Les zones rurales c’est un port florissant et particulièrement vivant, et
aménagées sont rares et resserrées autour de leurs bien entendu on y croise des animaux des Gennemons
quelques cités-États. Le nord des Marches est très à chaque coin de rue.

128
Ref. 14778
LES RÉGIONS ET CAPITALES

Abritant plus de 100 000 habitants c’est une des plus pour traverser le mur par une faille et entrer dans des
grandes villes de Loss, entourée de murs puissants Ruines Anciennes, d’où ils reviennent régulièrement
et de réseaux de fortifications complexes. Grâce aux avec des trésors et des Artefacts.
échanges commerciaux, la ville s’enrichit en perma-
nence de bâtiments d’arts et accueille nombre d’ar-
tisans et intellectuels.
LES NEIGES-DRAGON
Si Mille-Feux n’a pas de réel pouvoir politique, c’est
un peu à dessein. Elle sert de terrain neutre aux Géographie
conflits entre les cités-États et les clans gennemons.
Un palais et une place, le Tribunal, y sont ouverts Les Neiges-Dragon
à cette seule fin, avec une armée de scribes et de (nommées ainsi en ré-
spécialistes des très nombreuses lois des clans, et des férence aux Dragens)
archives complètes. sont une vaste région
océanique et septen-
Mille-feux tire son nom des milliers de lanternes de trionale, dont une
mellia éclairant son port, ses murailles et le faîte de petite partie sert de
ses plus hauts bâtiments, un élément de pur prestige plancher aux premiers
décoratif, mais auquel tiennent ses habitants. glaciers de la calotte polaire de Loss. Ce que les éru-
dits appellent «limite des glaces éternelles» est d’ail-
leurs trompeur. La banquise arctique fond tous les
Le Bastion
étés, et seuls des glaciers subsistent sur le plancher
Le Bastion est plus une forteresse qu’une ville et se rocheux au nord des Steppes Eleksmanns. Ceux-ci,
trouve à l’embouchure du fleuve Émeraude. Abritant loin de tout recouvrir, descendent vers la mer en
en général environ 17 000 personnes, le Bastion est vastes fleuves de glace creusant leur chemin dans la
organisé comme une caserne, incroyablement for- pierre nue. Les plus vastes glaciers montent à 200
tifiée et défendue, et accueille la seule légion or- mètres de haut pour une largeur de 4 à 5 milles et une
ganisée comme telle des Marches Gennemons, qui longueur de cent milles environ. Entre ces glaciers,
s’avère être une légion entière de cavalerie lourde le sol est nu et dépourvu de végétation, recouvert 8
de griffons. Sa raison d’être est de servir de pre- à 10 mois par an d’un manteau neigeux parfois épais
mier rempart à toute incursion de l’Hégémonie et de dizaines de mètres, et qui ne fond qu’au plus fort
toutes les cités-États des Marches ainsi que quelques de l’été. Mais la faune, tirant sa subsistance de la vie
clans nomades, participent à équiper et ravitailler le marine, y abonde et les mers arctiques sont incroya-
Bastion, qui possède même une véritable petite flotte blement poissonneuses.
de guerre de puissants galions lévitants.
Les mers entourant les Neiges-Dragon ont donc
comme trait notable, hormis de geler régulièrement
Les dents de Khimshis
à la limite arctique, d’être fréquentées par des ice-
Les Dents de Khimshis sont les premières marches bergs qui viennent souvent s’échouer sur les côtes.
vers le Nevertsguïkhana et au nord, vers la Taïga Le Mares Avisen s’enfonçant dans le continent
de la Forêt sans Fin. Les Gennemons ne tentent pas profondément au Sud, la plupart de ces bancs de
de traverser ces montagnes à pic dont les sommets glace ont disparu bien avant d’y pénétrer. Mais la
dépassent les 5 000 mètres, mais plusieurs clans glace est aussi coutumière aux Dragensmanns que
de nomades que l’on surnomme les Montagnards la saison des pluies ou les chutes d’étoiles filantes
y vivent. Très isolationnistes, ils se mêlent peu des à d’autres. Et ils savent naviguer en tenant compte
autres Gennemons et élèvent surtout des chevaux, de ce danger, même si la glace prend régulièrement
mais exploitent et vendent aussi du sel, des métaux son tribut de vies.
et des fourrures qu’ils semblent aller chercher en pas-
sant des cols vers le nord connu d’eux seuls. Les Neiges-Dragon sont divisées en quatre régions :
le Wervayllas au sud, au climat tempéré et aux étés
doux. Les hivers y sont assez rudes, mais la région est
Lieu particulier
fertile. C’est la plus agricole, mais aussi la plus com-
Le mur de Kamaï-dar merciale grâce à des échanges avec les Forestiers et les
Caché dans les Dents de Khimshi, à la naissance d’une Étéocliens à travers les cols des monts Gapériens. Le
rivière qui disparaît dans les bois, se trouve le Mur de Sternpeïnal à l’ouest, une péninsule boisée et froide,
Kamaï-dar, perpétuellement plongé dans l’ombre par s’ouvre sur la toundra au nord. C’est une région assez
les pics environnants. C’est une surface de glace qui ne sauvage habitée par des marins et des pêcheurs de
dégèle jamais et s’élève à 300 mètres de haut et s’étend narvas, mais aussi des éleveurs de chevaux. Les
sur pas loin de 100 à sa base. L’endroit est un lieu de Steppes Eleksmanns, sous la limite arctique, sont
pèlerinage sacré pour les prêtres du Kalumi, mais des une grande étendue de toundra assez désolée, mais
rumeurs prétendent que certains d’entre eux y vont qui fournit un terrain idéal pour les nomades de ce
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Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

peuple qui y font paître leurs troupeaux de sikas Population : 75 000 habitants
laineux et de chevaux. Enfin, les Neiges-Dragon vont
de Dragensvard et sa vaste vallée vallonnée et rurale, Dirigeant : Herreisson «Marche-tonnerre» Svarden,
malgré un climat plutôt difficile et des hivers longs, à roi et chef de guerre légendaire.
la Forêt sans Fin qui commence à l’Est et se prolonge
à l’autre bout du continent. Forces militaires : contingent de 500 monteurs de
dragens, une légion de cavalerie lourde et une de
cavalerie légère, 50 navires de combat légers pour
Politique
environ 20 000 guerriers mobilisables en moins de
   

Les Neiges-Dragon sont relativement peu peuplées deux jours.


et les réseaux routiers limités à des pistes et sentiers
avec quelques chemins côtiers nommés avec beau- Principe de la ville : centre militaire et industriel des
coup de prétention «routes» par les habitants. La plus Dragensmanns.
grande partie des voyages et du commerce se fait
par voie maritime. Et pour les déplacements dans Dragensvard est une cité fortifiée sise à flanc de fa-
les terres, le cheval robuste est de mise. Les dragens laise. Bâtie en trois terrasses reliées par des passe-
de monte sont répandus, mais un dragen supporte relles, des escaliers et des allées pentues, on trouve
mal le poids de deux cavaliers ; ils ne sont employés au niveau de la mer le port, consacré principalement
que pour les courriers, les alertes, la reconnaissance à accueillir les navires de guerre de la forteresse et
et la guerre. Ce qui n’est déjà pas si mal : la grande une flotte de pêche ainsi que quelques navires com-
force des Dragensmanns est qu’une attaque-surprise merciaux. La ville elle-même est contre la falaise. Elle
ne le reste pas longtemps grâce à un réseau d’alerte est bâtie de pierres, et accumule terrasses, jardins et
employant les airs pour communiquer. places suspendues. Enfin, au sommet de la falaise se
trouve la ville moderne, ainsi que les fortifications de
Les Dragensmanns n’ont pas à proprement parler de la Tour de Garde, le palais du roi, les casernes, et les
cités-États, mais des cités et villages claniques. La terrains de manœuvre. Les nichoirs des dragens sont
plupart du temps, ils abritent entre 250 et 750 per- construits au flanc de la falaise le long de la ville.
sonnes. Difficile de savoir qui y est soldat, garde ou
autre, car les Dragensmanns tendent à être souvent à Voir Dragensvard donne un aperçu du génie archi-
la fois guerriers, et possesseurs d’un métier et d’une tectural des Dragensmanns quand ils se mettent à
fonction. Seuls les monteurs de dragens font un peu bâtir du solide et du vaste. La ville est protégée de
exception. La seule cité à avoir une armée régulière est nombreuses séries de remparts en terrasses abritant
Dragensvard. À noter que les quatre cités nommées sur des canons placés de manière très stratégique pour
la carte des Neiges-Dragon sont toutes assez peuplées : couvrir tous les angles, et de tours ayant le même
entre 5 000 et 25 000 habitants environ. C’est une forte usage pour des hommes armés d’arbalètes. Derrière
concentration qui explique aussi pourquoi une grande ces murs grouille une intense activité commerciale,
partie des Neiges-Dragon est notoirement inhabitée. et au sommet de la falaise où s’étale le reste de la
ville qui n’a pu trouver de place derrière les remparts,
Et enfin, contrairement à la rumeur répandue sur ce s’organisent de vastes entrepôts et relais caravaniers,
peuple aux allures et coutumes barbares, la culture, malgré la vétusté des routes des Neiges-Dragon. Il est
les sciences et l’érudition tiennent une place im- à noter que les navires lévitants sont peu employés, à
portante dans la société, et l’on trouvera dans les cause de la forte prévalence de forêts et de bois dans
grandes cités aussi bien des notaires, que des lé- cette vaste région.
gistes, des scribes, des archivistes, des ingénieurs et
des intellectuels, que des artisans de grand talent Enfin, Dragensvard est un carrefour culturel et poli-
employant des technologies industrielles parfois très tique important. Herreisson est le plus puissant chef
modernes. Quant à la réputation d’hommes sans loi, de clan connu, le roi de la cité. La parole de ses
les Dragensmanns ont tout un système judiciaire basé émissaires est respectée partout. Cette influence a
sur deux codes de justice, civil et sacré. Le premier résolu bien des conflits internes et fédéré les clans il
règle les litiges de négociation et d’entente, le second y a plus de 30 ans pour quelques-unes de leurs plus
règle les crimes, au cours de procès organisés pen- grandes victoires contre l’Hégémonie. Vieillissant,
dant les Thegs, assemblées officielles se tenant dans le roi a consacré ses efforts à moderniser la socié-
les grands bourgs et les villes sous la supervision de té de sa ville et étendre son influence culturelle.
magistrats, chefs de clans, sages et chamans. Dragensvard a toute une industrie de l’acier et du
bronze, des hauts-fourneaux, un complexe réseau
d’acheminement de bois et de charbon et profite de
Dragensvard
ces installations pour développer un véritable sys-
Capitale des Neiges-Dragon, c’est à la fois la plus tème de chauffage central. Mais on y trouve aussi
grande forteresse dragensmann et le lieu de son deux grands ateliers de papeterie, des libraires, et
plus grand Theg (assemblée judiciaire chargée de plusieurs écoles et ateliers d’ingénierie, de médecine,
résoudre les conflits) de droit, etc.

130
Ref. 14778
LES RÉGIONS ET CAPITALES

Les Steppes Eleksmanns où il se trouve réellement. Car en réalité, il longe une


Situées au plus grand nord des Neiges-Dragon, les crête de montagne tout le long de la Barrière jusqu’aux
Steppes Eleksmanns sont une toundra qui reverdit monts Gapériens pour enfin s’arrêter devant la mer,
chaque été. Son nom lui vient des fiers nomades à pic. Et c’est bel et bien un mur, lisse et dénué de la
éponymes, éleveurs de chevaux qui vont, dès le moindre aspérité, dépassant de cent mètres la cime
printemps, y faire paître leurs troupeaux. Ils pas- des montagnes sur lesquelles il a été bâti, comme pour
seront l’été en semi-liberté tandis que les nomades interdire tout passage. Bien sûr, beaucoup pensent
s’installent dans des camps au bord de la mer et aux qu’il s’agit d’une construction des Anciens et des
lisières forestières. Ils partent régulièrement s’occuper légendes funestes parlent d’une bête monstrueuse,
de leurs animaux entre deux campagnes de chasse le Gardien du Mur, aussi haute que celui-ci, qui le
aux mammaliens marins. parcourt inlassablement pour le défendre.

Les Terres Inconnues


Le Wervayllas
Les Dragensmanns n’ont que le Mares Avisen pour
Région la plus fertile et prospère des Neiges-Dragon aller explorer tout l’ouest de Loss et ils ne se sont
le Wervayllas est d’un climat doux avec des hivers pas gênés. Pour le moment, aucune colonisation n’a
relativement modérés comparés au reste du pays. été envisagée, mais toute la côte, ainsi que les plaines
C’est aussi la région la plus densément peuplée des et vallées sont cartographiées campagne après cam-
Neiges-Dragon et celle qui compte le plus grand pagne, malgré de forts coûts humains. Il en ressort
nombre de clans. Les campagnes sont boisées, mais deux informations : la première est que la région est
entrecoupées de nombre de pâturages et champs. terriblement dangereuse en raison de sa faune et de
La forêt y est épaisse et profonde, mais nettement certaines étrangetés monstrueuses — on parle de
moins dangereuse que celle de la Forêt sans Fin, morrows et de démons d’acier et de verre — et la se-
et les habitants du cru ont appris à l’exploiter et conde est qu’il y a énormément de Ruines Anciennes
l’aménager dans l’habituel respect pour la nature affleurant en surface.
propre aux Dragensmanns. C’est à Amundi que se
trouve le Verhealla, le sanctuaire sacré du culte des
Dragensmanns, où tous vont faire un pèlerinage au
moins une fois dans leur vie. Et c’est dans les monts
LES PLAINES DE L’ÉTÉOCLE ET NASHERA
Gapériens que se cache le col de la Passe-Haute qui
assure la principale liaison commerciale avec Les Géographie
Forestiers et les Étéocliens.
Les Plaines de l’Étéo-
cle doivent leur nom
Les monts Gémeaux
au fleuve long de près
Les monts Gémeaux dont la façade sud se trouve en de 1 200 milles qui ali-
territoire hégémonien sont un vaste rempart naturel mente le lac Nashera
contre le grand ennemi dragensmann. Il n’y a aucun puis se jette dans un
col facile d’accès sauf depuis Octodurum et, sous la golfe au sud. C’est une
pression d’Herreisson, des fortins ont été bâtis pour très vaste région dont
parer à toute intrusion. C’est aussi très important pour le climat va de méditerranéen au sud à tempéré
Dragensvard, car une grande partie des minerais dont doux au nord. Elle est constituée principalement de
ses ateliers ont besoin sont extraits des montagnes. plaines et de collines verdoyantes, de côtes accueil-
lantes et de profonds golfes abrités. Les plaines sont
très vastes, semblables à des savanes, où paissent et
Lieux particuliers
migrent en vastes troupeaux sikas, longilas, ghia-ton-
Le Détroit des tempêtes nerres et aramios tandis que des hordes de moras
Il est cité ici, car c’est la limite extrême actuelle de sauvages occupent les bois et les lisières.
l’exploration maritime des Dragensmanns, qui ne
sont pas de très grands marins. Au-delà, ils savent La frontière nord des Plaines de l’Étéocle est dé-
que l’océan déchaîné se poursuit sans fin. Les îles limitée par les Hautes Marches, très vallonnées et
du Détroit, poissonneuses et riches de vie animale, accidentées, et qui s’arrêtent à la lisière de la forêt
sont une aubaine telle qu’un village habité quelques de l’Elmerase. Les Plaines de l’Étéocle s’arrêtent au
mois par an a été bâti sur une des îles avec un port sud du Therneris, la dernière frontière avant le Rift.
abrité, mais les tempêtes dangereuses et il n’est pas La mer occupe une grande importance pour la ré-
rare que des bateaux ne reviennent jamais. gion, puisque tout l’est et le sud de l’Étéocle s’ouvrent
sur les Mers de la Séparation en une vaste côte qui
Le Mur s’étend sur plus de 2 000 milles. Enfin, à l’ouest, la
Sur la carte de Loss, le mur apparaît en pointillé, tracé frontière est limitée par les massifs des monts de la
par les cartographes d’Armanth sur les informations Barrière, chaîne de montagnes aux sommets frôlant
des Dragensmanns. Il n’est pas exactement placé là les 5 000 mètres.

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Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

Politique canaux courant dans la plaine vers les nombreux


La grande majorité des grandes plaines à l’intérieur villages agricoles et les vastes étendues de champs
des terres et au contrefort de la Barrière sont sauvages verdoyants. Bref, comme on l’aura deviné, l’eau,
et laissées à la savane et aux grandes migrations des dans sa forme la plus maîtrisée et contrôlée, est le
mammaliens, ce qui représente, si on y ajoute les premier trait marquant de Nashera.
forêts d’Arcis, les deux tiers de la région. Les Plaines
d’Étéocle sont pourtant sans conteste une des zones Le second trait de Nashera est le luxe global de
les plus civilisées des Mers de la Séparation, bien que son architecture, exploitant à la moindre occasion
toute la région ait été un champ de bataille dévasté pour tous les palais officiels, places et demeures de
des siècles durant. l’aristocratie le marbre et la pierre blanche, d’où
son surnom. L’emploi de colonnades et de fronton
Mais les guerres et des vagues d’épidémies de rage ont se retrouve partout, et même les quartiers les plus
laissé des traces. Beaucoup de cités-États contiennent pauvres s’évertuent avec leurs moyens à imiter cette
des quartiers en ruine, on croise souvent les reliefs à architecture. Pourtant, si de loin la cité est majes-
l’abandon de villages et de bourgs quand on parcourt tueuse, entre ses vastes palais entourés de jardins
la campagne ou encore des traces d’anciens ponts, luxueux et les flèches délicates de ses tours orne-
chemins et routes oubliés. Il en émerge une sorte mentées, une fois qu’on la visite on réalise que l’écart
de sentiment de passé glorieux mais révolu, dont la entre richesse exubérante et pauvreté extrême est
culture étéoclienne ne se remet que difficilement en terriblement marqué dans la ville. D’autre part,
devant rebâtir sur ses propres ruines. Nashera est construite sur des ruines qui émergent
de partout, comme un rappel d’une ville qui essaye
Les Étéocliens se sont donc repliés nettement sur de retrouver une gloire perdue.
leurs cités-États et sur leurs côtes, au fond de leurs
golfes, en cultivant la nostalgie d’un passé mythique. Nashera est une cité dominée par l’aristocratie de la
Mais leur région reste très riche, très active et récu- cité-État et de ses voisines inféodées à elle, où l’Église
père sa prospérité. Les cités-États sont très indépen- a une puissante influence. Dépendante de son port,
dantes, souvent en rivalité ouverte, et l’on distingue Le Parcis, situé à cent milles de la ville, Nashera a
clairement deux factions : les villes du sud autour de un besoin vital de commerce et d’échanges au vu de
Mélisaren, alliées à Armanth, et les villes du nord sa situation. Elle tend à le satisfaire par une diplo-
autour de la grande Nashera, alliées à Anqimenès. matie agressive, que le Premier Régent Onaxaphore
encourage depuis 25 ans. La Guilde des Marchands
qui préfère des comptoirs côtiers ou proches de
Nashera
centres industriels a seulement une représentation
Plus puissante cité-État des Plaines de l’Étéocle, diplomatique à Nashera, et la cité ne se cache pas
considérée comme la capitale de sa moitié nord. de privilégier massivement ses propres organisations
commerciales répandues dans toute la moitié nord
Population : 450 000 habitants, quatrième plus grande de l’Étéocle.
cité lossyanne.
Mélisaren
Dirigeant : Le Premier Régent Onaxaphore, prince-
tyran de fait de la ville. Mélisaren est la concurrente en influence commer-
ciale et politique, à défaut de l’être en taille, de
Forces militaires : 7 légions d’Ordinatorii, 10 légions Nashera. Plus grande cité du sud de l’Étéocle avec
royales dont deux contingents de cavaleries légère près de 250 000 habitants, la ville est bâtie autour
et lourde, et une flotte de 95 navires de guerre com- d’un piton rocheux à la pointe de l’estuaire du fleuve
prenant 50 lévitant au Parcis, dont trois béhémoths, Étéocle, qui s’ouvre sur un profond golfe aux eaux
pour un total de 130 000 soldats et marins. paisibles. Riche, vaste et accueillante, la cité-État,
qui est divisée en Ville-basse et Ville-haute avec des
Principe de la ville : surnommée la Cité Blanche, gar- séries de remparts très modernes et puissants, est
dienne de la tradition étéoclienne. particulièrement cosmopolite. Elle assure le trafic
commercial de l’Étéocle pour toute la moitié Sud
Nashera est bâtie sur les berges du lac Nashera, à des Mers de la Séparation. Les étrangers y sont très
l’embouchure des fleuves Atlas et Étéocle. La ville nombreux, les comptoirs commerciaux luxuriants,
a les pieds dans l’eau, elle dispose d’un puissant les marchandises exotiques y abondent comme les
et luxueux port de pêche et militaire et un grand idées et les innovations. Cependant, alors que la
nombre de canaux la traversent en un quadrillage ville est alliée avec nombre de ses voisines et a un
parfait et savant, délimitant les quartiers de la vaste poids politique important, elle ne peut rivaliser mi-
cité-État. Ses premières défenses sont d’ailleurs des litairement avec Nashera. Avec seulement 4 légions
canaux extérieurs aussi vastes que des étangs, amé- (dont deux d’Ordinatorii), c’est une faiblesse qu’elle
nagés en douve, tout autour de la ville. Ils servent n’a jamais pu compenser, ne pouvant que renforcer
aussi de réserve de pêche et alimentent les autres ses défenses.

132
Ref. 14778
LES RÉGIONS ET CAPITALES

Les Hautes-marches ruines d’anciens bourgs et de villes vides. Les traces


Les Hautes-marches sont la frontière entre les Plaines de la guerre et des ravages de la rage s’y voient par-
d’Étéocle et l’Elmerase d’un côté, et l’Hégémonie de tout et il semble presque pour le voyageur que toute
l’autre. Ce sont des terres accidentées, faites de vallons la région a été abandonnée par le reste des Plaines de
aux pentes raides et de gorges désolées entre des enfi- l’Étéocle. La seule forme d’autorité restante est celle
lades de collines aux bosquets épars. La seule richesse de casernes et fortins où des légions d’Ordinatorii
locale vient de quelques exploitations de gisements de veillent avec lassitude aux frontières, dans l’attente
métaux et de pauvres villages serrés au fond des gorges sans doute vaine d’une nouvelle invasion des Jemmaïs
contre les fleuves qui traversent les Hautes-marches. et des Apostats.

La Barrière Lieux particuliers


Déjà mentionnés plus haut, les monts de la Barrière, La Passe Dorée
faiblement habités par des communautés mon- Traversant plusieurs cols de basse et haute altitude
tagnardes d’éleveurs et de mineurs, forment une à travers la Barrière, la Passe Dorée doit son nom
infranchissable frontière entre l’Étéocle et les Terres aux mines d’or et d’argent qui y furent découvertes.
Inconnues. Le seul passage connu pour la traverser Épuisées depuis, on croise encore quelques groupes
au sud est la Passe Dorée, qui permet de rallier le Jaï- nomades d’orpailleurs et des prospecteurs miniers
shimi, malheureusement en territoire jemmaï donc en quête de richesse. Mais surtout, la Passe Dorée
hostile, même si des échanges commerciaux spora- permet de trouver un accès vers l’ouest et les Terres
diques ont lieu. Cependant, les Étéocliens ne cessent Inconnues, malheureusement, en passant dans les
d’explorer la Barrière malgré ces cimes escarpées et territoires jemmaïs, ce qui est hautement risqué.
hautes de 5 000 mètres, vers le nord et le sud, pour
trouver des cols et des passages vers l’ouest. Les forêts d’Arcis
Le sud-est de l’Étéocle, d’Eredocle à Naedrisen, est
barré par une forêt primitive parfois très profonde
Les Marches de Vignes
et infranchissable. S’ils sont exploités, ces bois sont
Connues pour ses vins appréciés dans toutes les Mers réputés aussi inextricables que dangereux et une
de la Séparation, les Marches de Vignes sont une quantité de légendes prises très au sérieux par les
région côtière et agricole prospère et très peuplée, Lossyans font des forêts d’Arcis un lieu sacré et hanté.
avec de très belles cités et nombre de bourgs for-
tifiés, au milieu de terrasses plantées de vignes sur Le Cloakerien
des collines pentues. Mais la région fait la convoitise Ce marais insalubre est envahi aussi bien de vermines
et le bonheur des pirates, et l’Imareth y organise que d’animaux dangereux. Une route la traverse en
régulièrement des campagnes de pillage et d’extor- longeant les côtes depuis Haut-Mur, une cité-État à
sion. Ce sont le plus souvent les flottes mercenaires demi à l’abandon bâtie à l’époque où une partie des
de Mélisaren et des alliés de l’Athémaïs qui tentent marais avaient été asséchés et aménagés. Des quan-
d’intervenir, plus que Nashera dont cette insécurité tités de légendes courent sur des sorciers et chamans
arrange les visées politiques. qui hanteraient le Cloakerien et des ruines qui cache-
raient une Cité Ancienne engloutie. Personne n’a été
assez fou pour les vérifier.
Les Marches Méridionales
Comme pour les Marches de Vignes, les Marches L’Aridaei
Méridionales sont assez peuplées, surtout sur les Au sud de Gamidéren, cité-État vivant de l’exploi-
côtes, et disposent d’un réseau routier assez dense, tation du bois et qui fournit Nashera, se trouvent les
mais peu sûr. Séparées de l’est de l’Étéocle par la forêts de montagne de l’Aridaei. Elles sont habitées
partie sud des Forêts d’Arcis, la région balance entre à ses lisières, mais une bonne partie de ses profon-
les influences de Nashera et Mélisaren. Mais ses ci- deurs est inconnue. On raconte qu’il y a quelques
tés-États sont particulièrement indépendantes et sont dizaines d’années, des légions entières d’Ordina-
très souvent en guerre les unes contre les autres. torii y ont disparu sans laisser de traces et que
La situation politique instable nuit notoirement au des monstres mi-animaux, mi-machines, hantent
développement commercial. Au final, les habitants ses bois, protégeant des Ruines Anciennes jamais
sont souvent isolés, appauvris et les bandes de pil- explorées.
lards pullulent autant que sont fréquents les raids
de piraterie. Les Solitaires
Deux petites îles sans intérêt réel, mais transformées
en base avancée pour les opérations maritimes des
Le Therneris
corsaires au service des cités-États du sud de l’Été-
Région sauvage et sèche, comme un avant-goût de ocle. La rumeur prétend que leur forteresse dissi-
l’implacable désert du Rift, le Therneris est habité par mule trésors et arsenaux impressionnants, et de plus
de pauvres villages isolés et fortifiés, souvent dans les sombres secrets.

133
Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

Le détroit des Céramides L’eau est une denrée précieuse et rare dans cette
Cité ici, car c’est sur les côtes environnant ce détroit région. Le moindre ruisseau, la plus petite source
dangereux et régulièrement soumis aux effets des sont des biens précieux qui doivent être exploités
éruptions volcaniques du Rift que se sont déroulées sans gaspillage et le plus efficacement possible. Les
les plus grandes batailles de la Guerre sans Fin ni Jemmaïs ont résolu cette contrainte en devenant des
Frontières. Les traces sous forme de forts abandon- experts hydrauliques et de très bons gestionnaires
nés et de villages en ruines, autant que de navires de ressources. Les vallées occupées par les villages
naufragés, sont encore bien visibles, plusieurs siècles des clans jemmaïs disposent de réservoirs entretenus,
plus tard. souvent en partie souterrains, et de systèmes perfor-
mants d’irrigation et de captation de l’eau de pluie.
L’exploitation de l’énergie éolienne y est elle aussi
LE RIFT poussée à un raffinement technique remarquable,
aussi bien pour l’irrigation et le pompage de l’eau
que pour l’industrie.
Géographie
Les Jemmaïs ne sont pas très nombreux. Leur société
Si les abîmes dont est notoirement fédéralisée et les fonctions militaires
parlent souvent les sont mises en communs entre les clans. Ce sont des
Lossyans dans leurs nomades, c’est-à-dire que leurs cœurs agricoles
légendes et leurs his- voient passer les clans qui vont d’une vallée à l’autre.
toires existent, le lieu Il n’existe que cinq ou six bourgs permanents, ac-
qui y ressemble le plus cueillant les structures industrielles et culturelles des
est le Rift. Il s’agit Jemmaïs, ainsi que leurs casernes. Tous les Jemmaïs
d’une mer intérieure semblent toujours prêts à la guerre. Ils s’attendent
en formation, ou pour résumer, la coupure des deux en permanence aux assauts ordinatorii de l’autre
parcelles du grand continent où se trouvent les Mers côté de leurs montagnes à l’est, mais aussi à voir
de la Séparation. réapparaître tôt ou tard les Apostats ; le retour de
leurs cousins exilés pourrait être une très mauvaise
Le Rift est bien plus long que ce qu’en connaissent nouvelle selon eux.
les Lossyans, Apostats exceptés. La Mer des Enfers
qui se forme au fond des gouffres et des failles du
Himanil
Rift se trouve presque un mille plus bas que le niveau
de la mer. Il en résulte que l’ensemble de la région La capitale des Jemmaïs, inconnue du reste du monde.
n’est qu’une succession de marches barrées de mas- La ville est troglodyte, bâtie en partie dans des Ruines
sifs rocailleux et terriblement volcaniques descendant Anciennes. Elle abrite 40 000 habitants, une popu-
vers l’abîme de la Mer des Enfers, coupant le monde lation énorme par rapport à la moyenne des bourgs
en deux. jemmaïs qui dépassent rarement les 600 habitants.

Rien ne vit au cœur du Rift. Volutes mortelles et C’est le lieu de rassemblement régulier des clans,
brouillards empoisonnés abondent dans une cha- le centre de leurs ministères et de leur organisation
leur torride qui peut dépasser les 60 °C, les sources politique, mais aussi le refuge de leurs bibliothèques
ne sont pas d’eau, mais d’acide, le sol est gorgé de et universités. Jamais aucun Jemmaï ne parle de cette
tant de sel qu’il forme des sculptures aussi grandes ville à un non-Jemmaï.
que des glaciers. Rien ne s’y adapte, tout ce qui vit
y trouve une mort atroce. Mais derrière l’abri des Himanil possède sa propre garnison d’élite, recrutée
massifs entourant le Rift, par contre, et malgré les parmi les meilleurs guerriers jemmaïs, et une petite
enfilades de volcans, de calderas et de lacs de lave, poignée se soumet à un entraînement redoutable
la vie a trouvé sa place, profitant du moindre recoin pour devenir des Dari’aman, des commandos d’in-
accueillant, malgré la rudesse de ces lieux désolés ; filtration qui rivalisent avec les légendaires Sicaires.
humains compris.
Le Jaï-shimi
Politique
Désert s’étendant largement vers l’ouest, pris entre
Les Jemmaïs occupent le Jemmaï-he’Jil, une chaîne deux chaînes de montagnes, le centre du désert est
montagneuse coincée entre le désert du Jaï-shimi au une mer de sel. On n’y trouvera pas une goutte d’eau
nord et les profondeurs du Rift, au sud. La chaîne et il n’y pleut pas plus d’une fois tous les dix ans.
de montagnes se prolonge à l’est avec des cols et des Selon les Jemmaïs, c’est au bout de ce désert à l’ouest
passages vers le nord et le sud, offrant une multitude que se sont établis les Apostats. Les Jemmaïs le sur-
de petites vallées abritées et fertiles, bien que pouvant veillent, mais ne s’y rendent que pour récolter du sel
devenir aride. et du natron et ne le traversent jamais.

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Ref. 14778
LES RÉGIONS ET CAPITALES

Le Jemmaï-he’Jil connu des prédateurs teranchens est le loup-vipère,


La chaîne de montagnes où vivent les Jemmaïs, aux fauve arboricole qui hante les maquis et les bosquets.
sommets dénudés quasi dépourvus de neige. Suivant Mais on croise aussi des draekyas, des griffons et des
la Mer des Enfers, la chaîne de montagnes bifurque tarbosarres.
au nord vers les monts de la Barrière. Cette dernière
partie est la plus humide, même si on y trouve fort Une des raisons pour lesquelles les Teranchens vivent
peu de forêts. Les sommets dépassent les 3 500 mètres surtout sur les côtes tient au volcanisme de leur
et l’on y trouve très peu de cols, les pentes sont ter- chaîne de montagnes, et aux perturbations sismiques.
riblement raides et dénudées, et l’activité sismique C’est une des raisons pour laquelle les Fournaises
et volcanique y est marquée. C’est cependant non Rouges sont très peu colonisées.
seulement de ces vallées fertiles, mais aussi de cette
activité volcanique que profitent les Jemmaïs ; les gi-
Politique
sements de minerais abondent en surface, dont le
manganèse, l’argent, le titane et le loss-métal. Terancha est une île de marins et de commerçants ; les
deux concepts sont d’ailleurs si indéfectiblement liés
qu’en Eqrasi, la langue teranchen, les deux mots sont
La Mer des Enfers
pratiquement semblables et proviennent de la même
Déjà décrite plus haut, la Mer des Enfers est compa- racine. Si l’aristocratie et le concept de lignées royales
rable à une mer d’acide salé et bouillonnant où émer- sont très importants, voire sacrés pour les Teranchens,
gent les cheminées de volcans et de fumeurs, dans une leurs élites sont les marins et toute politique sensée
atmosphère mortelle. Mais sur les flancs des marches tend à leur octroyer nombre d’avantages pour encou-
consécutives de falaises, on prétend que se retrouvent rager leur métier. Ainsi, un capitaine de navire est
des Ruines Anciennes ensevelies profondément. systématiquement anobli et son équipage considéré
comme l’ensemble de ses vassaux, avec des lois spé-
cifiques les protégeant tous.
Lieux particuliers
Comme on le mentionne plus haut, Terancha est assez
Aucun, on peut considérer tout le Rift comme un
peuplée, principalement sur ses côtes. À l’exception
lieu particulier.
de Khoïemonos, les cités-États sont plutôt petites et
dépassent fort rarement les 5000 habitants. Si elles
sont souvent en conflit les unes avec les autres, ceux-
TERANCHA ET KHOÏEMONOS ci se résument à des rivalités, et quelques batailles
navales, d’ailleurs assez ritualisées pour éviter les
Géographie pertes humaines et matérielles. Les seules véritables
exactions viennent des combats entre Terancha et les
Terancha est le nom pirates de l’Imareth, ces derniers ne renâclant guère
de l’île principale de aux raids sur leur voisin.
l’archipel qui barre
tout le sud-est des
Khoïemonos
Mers de la Séparation.
Voisine de l’archipel La capitale culturelle et politique des Teranchens,
des San’eshe, elle oc- pôle économique et port de commerce incontour-
cupe une place straté- nable pour tous les marins des Mers de la Séparation.
gique entre l’Athémaïs et les Cités-Unies. Le climat
de Terancha est méditerranéen et océanique, de plus Population : 310 000 habitants.
en plus humide à mesure que l’on se dirige vers l’est
et l’île des Fournaises Rouges. Dirigeant : La Reine Ganiceïs, assistée du Conseil de
Régence et de l’Agora de la cité.
La végétation teranchen est constituée principale-
ment de maquis et de beaux bosquets épais, avec Forces militaires : 4 légions d’Ordinatorii, 4 de garde
dans de vastes vallées des forêts profondes qui de- civile et une flotte forte de 120 navires de guerre dont
viennent d’impénétrables jungles sur tout le fronton un tiers lévitant, pour au total environ 40 000 soldats
est. Terancha est barrée en son centre par une chaîne et marins de guerre.
montagneuse aux quelques sommets dépassant les
3 000 mètres, avec un seul col réellement accessible, Principe de la ville : surnommée la Belle Cité, non
la Passe Noire, qui permet de traverser au milieu pour son apparence, mais pour la liberté de ses ha-
des montagnes. Malgré une assez notoire présence bitants, femmes comprises.
humaine, Terancha reste en grande partie sauvage : la
faune lossyanne y pullule, grands prédateurs compris. Khoïemonos est un vaste port en partie fortifié dont
Ni les maquis secs ni les forêts et jungles de l’ouest les quais et les arsenaux débordent si largement
ne sont des lieux sûrs pour les voyageurs. Le plus au-delà de ses murailles que la ville a finalement

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Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

renoncé à agrandir ses fortifications. Pour répondre pauvres, au sol infertile et dont les forêts ne sont plus
à la nécessité impérieuse de pouvoir défendre son que des souvenirs.
port, les autorités de la ville aidées de quelques gé-
nies fous ont trouvé une solution originale : les qua-
Les îles Sauvages
rataires. Ce sont d’énormes galères déclassées, qui
ont été arrimées dans la baie, les flancs et structures À l’origine, les îles Sauvages étaient peuplées de
blindés de bronze et de fer, bardés de rangées de San’eshe, mais il n’en reste plus un seul. Tous ont été
canons et de mortiers et qui servent de forteresses exterminés, asservis et, pour les survivants, exilés
flottantes. Il est pratiquement impossible de les faire au sud, tandis que les îles étaient colonisées par les
manœuvrer, mais ils gardent la baie comme autant Teranchens. Malgré tout, les îles Sauvages portent
de châteaux-fort posés sur l’eau équipés au fil des bien leur nom. Ce sont des jungles impénétrables
ans de quais flottants et de grues d’amarrage. Deux et dangereuses, que les Teranchens exploitent avec
de ces quarataires ont d’ailleurs été offerts par la nombre de difficultés. Mais le bois, le ciment de
Guilde des Marchands, très présente et influente à résine, les épices et produits de luxe qu’on peut y
Khoïemonos. trouver et y faire pousser assurent la richesse de ses
colonies au nombre encore très modeste.
La cité possède avec Armanth un point commun
frappant : c’est une ville d’échange, où tout se vend
Tansheyn
et s’achète. Où toutes les idées circulent, même les
plus hérétiques aux yeux de l’Église, et où est per- Tansheyn porte le nom de la cité-État qui domine ce
mis largement ce qui serait considéré comme mo- bout de l’île des Fournaises Rouges : Tansheynimis.
ralement inacceptable ailleurs, à commencer par la La plupart des Teranchens considèrent comme fous
liberté et les droits des femmes. Bien sûr, ce n’est les habitants de cette région, car ils vivent à l’ombre
pas non plus un havre d’égalité, loin de là. Mais des volcans en permanente activité de l’île. Il ne se
c’est un des lieux les plus ouverts à cette idée pro- passe pas cinq ans sans une éruption majeure de la
gressiste, qui ne choque guère que les plus obtus des Bouche du Titan, le plus actif des volcans connus de
Teranchens. Les autres s’en moquent et profitent de toutes les Mers de la Séparation. Mais c’est cette ac-
leur Belle Cité, connue entre autres pour sa liberté tivité qui dure depuis des éons qui assure la richesse
de mœurs sexuelles. des communautés installées sur l’île. Ces dernières
exploitent le fer, le plomb, l’or, le platine, le loss-mé-
La capitale est actuellement dirigée, bien que le mot tal, mais aussi les sels soufrés et enfin d’énormes
soit un peu exagéré car la royauté est seulement re- gisements de guano, issus des colonies d’oiseaux.
présentative dans la cité-État, par la Reine Ganiceïs
Aquilée. Âgée de 24 ans, elle a accédé au trône à la
Lieux particuliers
mort accidentelle de son époux, peu après avoir eu
son second enfant, un héritier mâle âgé désormais Les Fournaises Rouges
de 4 ans. Les Teranchens étant ce qu’ils sont, il n’a Si l’ouest des Fournaises Rouges est occupé et ha-
pas été question de désigner un autre roi puisque bité, on peut se demander raisonnablement com-
l’héritier est né. La ville est donc officiellement sous ment on y parvient tant la région est en permanence
régence. Mais Ganiceïs, que tout le monde croyait bouleversée par une activité sismique et volcanique
inoffensive, s’est révélée une redoutable et efficace permanente. La moitié ouest de l’île est sauvage,
politicienne au charisme attachant et puissant. Ses dangereuse et inhabitée, couverte de jungles et de
décisions et initiatives ont fait énormément pour la mangroves. Des incendies la dévastent régulièrement,
population indigente et les petits artisans, avec pour mais la végétation luxuriante reprend ses droits en
résultat un puissant bond économique qui a attiré permanence. On prétend que dans les profondeurs
en quelques années énormément d’immigration et des cavernes de lave de la Bouche du Titan se trouve
d’investissements. Il est à parier que Ganiceïs, de plus une entrée vers des Ruines Anciennes, rumeur confir-
en plus aimée du peuple et soutenue par la Guilde mée par la circulation d’artefacts dans la région. Mais
des Marchands, restera reine pour encore de nom- les habitants de l’île sont les premiers à prétendre que
breuses années. c’est une légende.

Le Karo
Les Dhamiris
Le Karo est un ensemble de Ruines Anciennes ca-
Petit chapelet d’îles au trafic commercial important. chées à flanc de montagne au cœur de Terancha.
Omiris, un port en plein essor et qui commence à Il a été exploré autant que possible, mais des sec-
devenir une petite ville industrielle, est le point de tions entières, barrées par des portes titanesques
départ des navires chargés d’esclaves, de bois, de de métal inaltérable, restent toujours inaccessibles.
produits rares venant des îles Sauvages et de l’Archi- Ce sont sans doute les Ruines Anciennes les plus
pel san’eshe. Avant que le commerce naval explose, connues, elles sont même visitées par des voyageurs,
les Dhamiris étaient des îles désolées de pécheurs des guides offrant leurs services pour les guider dans

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Ref. 14778
LES RÉGIONS ET CAPITALES

des zones sûres. Et de temps en temps, ces visiteurs Tout cela coûte cher ; on économise autant que c’est
disparaissent sans laisser de traces. raisonnablement possible. Si les spécialistes indis-
pensables et les officiers qui participent sont assez
bien rémunérés, le personnel d’escorte et d’inten-
TERRA INCOGNITA dance n’est pas mieux payé que pour une mission de
commerce. Il ne peut compter que sur les primes à
Une grande partie de Loss, à vrai dire son immense son retour, qui dépendent de la générosité du com-
majorité, reste inexplorée. Mais bien sûr, c’est un manditaire… et du capitaine.
sujet qui passionne explorateurs, marchands et car-
tographes. Passant par les mers avant tout, en se ris- Cependant, les hommes qui se lancent dans ces aven-
quant sur le vaste océan par-delà le Bout du Monde, tures sont souvent motivés par autre chose que la
la Mares Avisen ou encore la Mer de Corail, ces paie : d’abord, c’est moins risqué que la guerre et
expéditions sont à la recherche de fortunes à faire reste mieux payé que le service de bord commun.
et de nouvelles terres pleines de promesses et de Ensuite, il y a le prestige d’être un des hommes
richesses, sans oublier les secrets à découvrir et la partis à la découverte de l’inconnu, un prestige qui
gloire à en tirer ! offre autant de gloire que d’éventuelles retombées
d’ascension sociale. Enfin, il y a les opportunités de
Abordons le problème de voyager dans la Terra découverte de trésors divers, de pillages possibles,
Incognita avec un navire lévitant. Ces vaisseaux ne sans oublier la valeur que représente la possibilité de
peuvent se poser que sur une surface aquatique. Pour monnayer ce qu’on aura appris de terres inconnues.
parvenir à réussir une expédition de cartographie en Les marins de Loss ne sont en général pas des soldats
navire lévitant, il faut prévoir grand : au moins une disciplinés et, tout capitaine le sait, il vaut mieux les
goélette ou un galion. Les plus grandes expéditions laisser s’emparer de quelques richesses qui satisfe-
pensent en termes de flotte, de deux ou trois bâti- ront à leur avidité, plutôt que de le leur interdire au
ments, voire plus. risque d’une mutinerie ou d’un pillage qui dérape
en massacre.
Il faut aussi penser à un personnel conséquent. Un
cartographe, ses assistants, des érudits et génies, des Un dernier point, qui reste une réalité frappante.
botanistes, des taxidermistes et naturalistes, et leur Dans ces expéditions, on peut compter environ 3 à
personnel. Il faut prévoir des bivouacs fréquents et 5% cumulatif de pertes humaines par mois lossyan.
des animaux de monte pour des reconnaissances. Il En un an (une année lossyanne dure 585 jours), c’est
faut aussi une escorte armée, des guides, des éclai- entre un tiers et la moitié de l’équipage qui sera sans
reurs, un palefrenier, etc. C’est une affaire qui engage doute mort, de maladie, d’accidents, de règlements
30 à 50 personnes, plus l’équipage de 130 marins et de compte, d’attaques par des créatures sauvages,
spécialistes de bord environ ; cela exigera d’autant etc. Ce qui fait le malheur des uns fera le bonheur
plus de haltes de réapprovisionnement que l’expédi- des autres : pour les survivants, la prime et le butin
tion ira en terre inconnue. S’il s’agit d’une expédition qu’ils peuvent espérer en seront d’autant plus fastes.
majeure organisée par une cité-État, on comptera
alors au moins un navire fortement armé.

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CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

Se levant comme un seul homme, la presque totalité des quarante membres de l’Église quitta son siège et fit
un pas en avant vers l’oratoire. Et d’une même voix, ils déclamèrent tous :
— Fais vœu de soumission, serviteur de l’Église du Concile Divin, seule et unique devant les dieux, les Esprits
et les Hommes. Fais vœu d’obéissance à ceux qui se sont soumis à nos Très Hauts Seigneurs et qui sont tes aînés
et tes pairs. Que leur parole devienne ta loi, que leurs désirs deviennent tes ordres, toi qui sers notre Grande
Église pour l’unité et la sauvegarde de l’homme, à tout jamais.
Duncan en resta bouche bée. Il ne fut pas le seul. Zaherd se tourna à cette grande exclamation, sorte de
prière sacrée jamais entendue sous la coupole de l’Agora et qui figea le temps dans une aura de recueillement
religieux que seul un fou aurait osé déranger. Sur les estrades, la quasi-totalité des tribuns fixait les prêtres avec
le même étonnement sans lâcher un mot. Lilandra fit même un pas en arrière, prise d’une crainte respectueuse,
écrasant du talon le pied de son voisin, qui étouffa son cri, saisi par le même mutisme que les autres.
Les quarante voix se turent, remplacées par une seule, vieille et rauque, mais qui sonnait de ces tons as-
surés de qui a passé sa vie à connaître et maîtriser le pouvoir de son autorité. C’était Jallaïus, le Cardinal de
Mélisaren, qui avait amplement dépassé le siècle, et portait lourdement le poids de ses ans malgré les bénéfices
d’un Ambrose qui lui avait donné une longue et vigoureuse vie.

Les Chants de Loss, Mélisaren

L’ÉGLISE DU CONCILE DIVIN


L ’Église du Concile divin est la religion organisée
qui domine les Mers de la Séparation. Près des
quatre cinquièmes des humains de Loss y croient
s’y soumettre comme le faisaient les esprits et les
dieux. Les preuves de ce pouvoir des Êtres du Concile
et de la logique de ces dogmes ne manquaient pas,
et la respectent. Créée durant le Long-Hiver (voir de la destruction d’Antiva au Long-Hiver, jusqu’aux
L’Histoire de Loss), cette religion est autoritaire, prosé- Thanataires invisibles et invincibles qui protègent les
lyte, conquérante, patriarcale et sexiste. Mais au-delà Prophètes (voir plus loin). Cette vision indiscutable
de son existence par elle-même, sa raison d’être tient de l’application des principes de l’Église favorisa une
en un principe : éviter que puisse un jour recommen- restructuration rapide et solide de la société, autour
cer ce qui a manqué détruire les Lossyans, le Chant d’Anqimenès. Quant à la politique qui s’en inspire,
de Loss. C’est sur cette base que le Concile a bâti ses elle est comparable au légisme.
premiers Dogmes, et a pu prospérer.

LA COSMOGONIE
HISTOIRE EN RÉSUMÉ
Nous ne nous étendrons pas en détail sur ce sujet,
Alors que l’Hiver sans Fin laissait place au chaos et il sera traité dans le supplément Anqimenès et le
aux barbaries de la Grande Purge, les premiers prêches Concile Divin. Nous soulevons ci-dessous l’essentiel
d’Ortonus, le second Prophète du Concile Au-Dessus des principes.
de Toutes Choses, eurent comme effet de faire rapi-
dement cesser les massacres aveugles qui décimaient La cosmogonie du Concile Divin explique que les
la population et faillirent faire totalement disparaitre dieux et les esprits ne sont pas les créateurs de l’uni-
aussi bien Chanteurs de Loss, que roux et chamans. vers, mais leurs servants. Les créateurs sont les Êtres
du Concile, régnant au-delà des étoiles et essaimant
Ortonus édicta les premières règles du culte, à com- la vie partout, pour la confier aux esprits et aux di-
mencer par son nom complet : Le Concile des Êtres vinités, pour régner, guider et protéger.
Au-Dessus de Toutes Choses, hommes, esprits et
dieux. La mission d’Ortonus et des Prophètes sui- Il y a selon le Concile Divin une infinité de mondes
vants fut de dévoiler au monde que les dieux et les comme autant de sphères de cristal où une planète
esprits des anciennes fois lossyannes avaient tous se tient en son centre. Autour tournent les étoiles,
failli en laissant les démoniaques Chanteurs de Loss les lunes et les soleils ; et il y a autant d’êtres vivants,
asservir l’homme plutôt que le servir. Ils expliquèrent d’esprits et de dieux qui les gouvernent. Au-dessus
que pour éviter le retour de ce danger, il fallait s’en de tout cela, les Êtres du Concile observent et n’in-
remettre totalement aux Êtres du Concile et à leurs terviennent que si leurs serviteurs ont échoué à leur
représentants mortels, les Prophètes, et à l’ordre des tâche. L’Église du Concile admet totalement l’exis-
Ordinatorii qui les servent. tence d’autres vies intelligentes et d’autres civilisa-
tions, bien qu’elle n’admette ni l’héliocentrisme ni
L’Église du Concile déclara que ses lois, les Dogmes, l’idée de l’infinité de l’espace. Elle fait remarquer que
étaient au-dessus de tout et que les Lossyans devaient nombre de ces vies intelligentes ne connaissent pas

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L’ÉGLISE DU CONCILE DIVIN

le Concile Divin. Les Lossyans sont donc privilégiés LES DOGMES DE L’ÉGLISE
et bénis, placés dès lors un rang au-dessus de toutes
les créatures intelligentes de tous les autres mondes : Voici les principaux Dogmes de l’Église du Concile,
ils connaissent le Concile, et les Prophètes de l’Église tels qu’ils sont actuellement en vigueur. Ils ont plu-
parlent en son nom et sont protégés par ses envoyés sieurs fois été remaniés et corrigés, et s’ils ne sont
directs, les Thanataires. Ce qui signifie aussi que pas tous respectés, ils sont le ciment de l’Église. Tout
pour l’Église du Concile, tout être intelligent non croyant connait en théorie ces Dogmes par cœur.
concilien, quel qu’il soit, est un barbare inférieur. Il
n’est pas lossyan. Ce ne sont pas les seuls Dogmes. D’autres sont
compilés et décidés au fil des conciles, conclaves,
L’Église n’encourage ni ne reconnaît de culte des re- mais aussi des ententes locales de l’Église avec ses
liques et des Saints. Le culte du Concile Divin ne ouailles et les autorités laïques. Si les Dogmes pa-
reconnaît aucune vertu à la souffrance, au martyr, ou raissent très stricts et ne souffrir aucune hétérodoxie,
à l’humilité et la notion de sainteté ne définit donc dans les faits, le pouvoir de l’Église n’aurait pu
pas ce que nous imaginons en tant qu’Occidentaux. s’établir sans compromis ni aménagements. Ainsi,
Les Hommes Saints sont remarqués et vénérés pour plus on s’éloigne du cœur historique et spirituel de
le rayonnement de leur sagesse, de leur savoir, ou l’Église, Anqimenès, et plus les dogmes s’adaptent
de leurs actions qui ont fait grandir le savoir lossyan aux cultures locales. Non sans conséquence, puisque
ou la cause supérieure de l’Église du Concile Divin, cela a donné naissance à des courants religieux
tout en faisant preuve de Vertus exceptionnelles. Ces si différents qu’ils en sont devenus des hérésies,
Hommes Saints peuvent être des religieux ou des comme le culte Kalumi des Gennemons et le culte
civils, issus du monde aussi bien intellectuel que mi- impérial hemlaris.
litaire ou ecclésiastique et certains sont même des
laïcs vénérés localement. Il n’y a pas de règle officielle Aucun dieu, ni homme, ni esprit ne peut se
pour canoniser un Homme Saint, celui-ci est reconnu placer devant le Concile : l’Église interdit tout
par l’Église de son vivant ou après sa mort par la exercice religieux public ou construction de
ferveur que les gens mettent à entretenir son souve- centres religieux pour les divinités locales. Il
nir et son modèle. Quand il est reconnu, son nom est toléré de prier et vénérer en privé dieux
et une courte hagiographie sont gravés sur une dalle et esprits, mais leurs ecclésiastiques peuvent
au sein du grand temple d’Anqimenès. Il est alors être pourchassés pour idolâtrie.
autorisé de donner son nom à un temple, bien que
les adorateurs attendent rarement cette permission. Aucune autorité émanant des hommes ne
Localement, il n’est cependant pas rare que certains peut se placer au-dessus des Prophètes de
biens intimes de l’Homme Saint soient conservés l’Église : la plus haute autorité lossyanne se-
comme des reliques légendaires à qui la population lon l’Église est celle des Ordinatorii et de
prête des pouvoirs réels. Par contre, on ne conserve leurs officiers, prêtres et Prophètes. Ceux-ci
jamais ses restes, puisque tout Lossyan doit être en ne sont donc sensés devoir obéissance à au-
théorie incinéré pour pouvoir rejoindre les Étoiles. cune hiérarchie sur Loss hormis l’Église, et
ne répondre qu’à eux-mêmes et à leurs su-
périeurs. Dans les faits, l’Église préfère se
soumettre aux autorités locales ou faire pro-
fil bas.

Le Chant de Loss doit servir l’homme, pas


l’asservir : selon ce dogme, soit on asservit
un Chanteur de Loss, soit on le détruit.
Pour l’Église, les Chanteurs de Loss sont
des incarnations démoniaques. Ils ne sont
pas responsables de leur nature, mais ils
doivent être contrôlés par tous les moyens.
Par extension, toute femme rousse est as-
servie et les hommes roux le plus souvent
exécutés. Quand un Chanteur de Loss
s’éveille, il est courant que soient asservies
ses sœurs et ses filles, sous prétexte que le
Chant de Loss s’éveille le plus souvent chez
les femmes. C’est ce Dogme qui a engendré
le Haut-Art.

L’homme est né pour grandir, apprendre,


prospérer, bâtir et dominer : un des pre-

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CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

miers Dogmes des origines, qui remonte à un temple. Il leur est interdit de se marier
Ortonus et dont le contenu fait débat. En et d’avoir des enfants, sauf quelques rares
effet, le terme homme a été choisi pour dé- cas tolérés d’adoption.
signer le lossyan mâle, ce qui a justifié l’in-
fériorité de la femelle et donc sa soumis- Tout homme refusant la Loi du Concile est
sion, ouvrant la voie aux concepts Apostat : tout Lossyan qui renie la foi de
patriarcaux et sexistes du modèle sociétal l’Église ou résiste à ses représentants est
inspiré par l’Église. Le reste du Dogme sti- Apostat et condamné à mort. Si une ville
pule le rôle que doit jouer l’Église dans les résiste à une croisade d’Ordinatorii, tout
cultures, la société et les civilisations, en individu ayant résisté est déclaré apostat et
encourageant les progrès techniques et in- exécuté sans attendre. Les femmes qui au-
tellectuels, sous son contrôle attentif. ront résisté ou simplement soutenu les
hommes seront asservies et leurs enfants en
Aucun pouvoir ne peut mettre en péril la bas âge recrutés et élevés dans les orpheli-
protection du Concile : cela englobe trois nats du Concile pour devenir des Ordinatorii.
points détaillés dans le Dogme. Le premier
point concerne toute innovation ou avancée L’Église seule peut éviter la répétition du
technologique ou scientifique, elle doit être Long Hiver : l’Église, en plus de préciser le
approuvée par l’Église. Si celle-ci n’est pas fonctionnement de sa philosophie politique,
considérée comme conforme aux Dogmes, déclare par ce Dogme qu’elle est seule au-
elle sera déclarée hérétique. L’Église du torisée à révéler et transmettre l’histoire de
Concile se réserve ainsi un monopole sur les Loss avant le Long-Hiver. Les Guerres
plus intéressantes innovations. Les études sur Divines ont été réécrites ; Orchys de Parcia
la biologie et la nature de la vie, l’astronomie, est universellement considérée comme un
ou encore la chimie fondamentale sont des démon qui a voulu détruire les hommes, et
champs de recherche presque assurément les femmes rousses portent toute sa marque
frappés d’hérésie. À noter que le coupable maudite. Le Chant de Loss est un pouvoir
jugé n’est pas forcément exécuté : il arrive diabolique qui doit être muselé et mis au
tout simplement qu’il disparaisse au service service de l’homme. Creuser le passé, re-
de l’Église. Le second point de ce Dogme trouver des archives, fouiller des ruines et
concerne les Artefacts Anciens. Faire le trafic, collectionner les artefacts et bien sûr révé-
la vente, l’usage ou l’étude d’Artefacts est ler les secrets et les savoirs de ce passé est
considéré comme hérétique. Là encore, une hérésie.
l’Église ne détruit pas toutes ces merveilles,
elle les stocke pour les étudier en secret. Le Il existe encore d’autres Dogmes, dont un sur la
troisième point est que toute puissance géo- Rage qui doit être combattue comme un ennemi
politique trop ambitieuse sera jugée comme mortel, et sans qu’il soit question de l’étudier ou
un péril pour l’Église. Ce dogme permet aux tenter de la soigner. On peut aussi mentionner le
Ordinatorii de déclarer hérétique tout oppo- Dogme sur l’esclavage et sa nature, qui traite des
sant jugé potentiellement « menaçant ». règles essentielles de l’asservissement. Il y a enfin
plusieurs Dogmes sur les châtiments et traitements,
La parole des Ordinatorii est la Loi du et même sur comment déclarer une guerre ou lancer
Concile : personne ne peut, en théorie, re- une croisade ! Mais les neufs ci-dessus sont les plus
mettre en question la parole d’un Ordinatori, généraux, essentiels et connus.
à part un autre membre de la hiérarchie du
clergé. La parole d’un Ordinatori fait force
de loi. C’est l’un des Dogmes les moins res-
pectés et le plus souvent pris à défaut.
ORGANISATION DE L’ÉGLISE
Cependant, tout Lossyan évite de contrarier L’Église du Concile Divin pourrait se comparer au
volontairement un Ordinatori. pouvoir papal impérial. Mais même si son influence
sur Anqimenès est totale, la cité n’est pas une théo-
Aucune femme ne peut porter la foi de cratie à proprement parler.
l’Église du Concile : dogme instauré il y a
trois siècles après les Guerres Civiles On distingue dans l’ordre de l’Église deux branches
Hégémoniennes. La place des femmes dans principales, aux contours flous : l’Église, qui ras-
l’Église est en grande majorité subalterne et semble les ecclésiastiques et prêtres de la religion
hors de l’ordre des Ordinatorii, elles sont et l’Ordinatori, qui rassemble les forces de police et
traitées comme des inférieurs, quand elles les légions, organisée de manière militaire, grades
ne sont pas esclaves. Les femmes ordinatorii et rangs compris. Le fait est que la plupart des
existent pourtant, en général dans les ordres membres du clergé séculier de l’Église sont en géné-
militaires, mais aucune ne peut officier dans ral des Ordinatorii, souvent officiers ; ainsi les deux

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L’ÉGLISE DU CONCILE DIVIN

branches, ayant deux rôles fondamentalement diffé- Plus de détails sur les prophètes et les Thanataires
rents tendent souvent à se confondre. Et un Espicien dans le Livre 3 «Les Secrets du monde», page 32.
peut très bien être capitaine ou général de légion en
même temps.
Les Primarques
Cependant, pour toutes les décisions qui ne relèvent Ce sont les ministres de l’Église. Il y a en général un
pas strictement du domaine militaire, c’est la parole Primarque par grande cité-État, qui représente l’au-
du collège de l’Église, respectivement les Prophètes, torité supérieure du Concile pour l’ensemble du culte.
les Primarques et les Espiciens, qui prévaut sans dis- Parmi eux sont nommés les ministres de l’Église, cha-
cussion. L’Ordinatori est au service de l’Église et à cun ayant en charge la direction de l’un des postes
ses ordres. majeurs de l’administration du clergé. Chaque mi-
nistre est responsable de gérer son portefeuille et ne
rends compte qu’aux Prophètes ; il a une assez large
Le légisme est une philosophie politique qui liberté d’action. Dans leur ensemble, les Primarques
considère que la loi est le fondement de toute sont très influents et riches et, techniquement, ils sont,
société, et que celle-ci doit être appliquée par la comme les Espiciens, des seigneurs tout-puissants
force et non par une puissance morale qui la jus- sur leur domaine, rivalisant de pouvoir avec les plus
tifierait. La position de force et l’application de la grands princes des cités-États.
loi ne se réfèrent donc à aucune morale ou vertu,
mais seulement à la compétence et l’efficacité de
Les Espiciens
qui détient le pouvoir. Le légisme entre en conflit
avec la philosophie des Vertus et ne s’est jamais Les Espiciens sont les leaders du ministère local
répandu efficacement. Il a par contre influencé la du Culte de l’Église du Concile. Chaque cité-État
culture hégémonienne et Hemlaris. en compte au moins un. La fonction se compare à
celle d’un évêque, le grand-prêtre du clergé local
de sa congrégation pour toute la région dont il a
Les Prophètes la charge. Les Espiciens sont le cœur de la hié-
rarchie du ministère de l’Église, mais sont très au-
Au sommet de l’organisation de l’Église, il y a tonomes : il n’est pas rare que certains Espiciens
les Prophètes. Ils sont toujours trois, bien que ce fassent passer l’intérêt de leur congrégation et de
nombre ait fluctué. À l’origine il n’y avait qu’un seul leur cité-État avant les intérêts de l’Église d’Anqi-
Prophète, et dans l’histoire, il y en a parfois eu deux, menès. Il s’agit du plus haut grade accessible lo-
voire quatre. calement dans l’Église. Celle-ci ne désigne jamais
de Primarques ailleurs que dans l’Hégémonie. La
Les Prophètes sont la voix et la représentation directe plupart des Espiciens sont des vétérans et gradés
du Concile Divin sur Loss et par conséquent dictent de l’Ordinatori, mais certains peuvent avoir accédé
les grandes directions de la doctrine de l’Église. Les à ce rang par la voie « civile ».
Prophètes ne sont pas toujours d’accord entre eux,
et malgré le fait qu’ils soient à la même échelle au
Les prêtres et les abbés
sommet de la hiérarchie de l’Église, il est fréquent
qu’un Prophète ait dans les faits une influence et un Les prêtres forment le pilier de la hiérarchie de
pouvoir accru sur les deux autres. Chaque Prophète l’Église et sont de rang égal aux lieutenants de l’Or-
est toujours accompagné d’un invisible Thanataire dinatori. Mais leur rôle est avant tout civil et local.
qui le rend pratiquement invulnérable. Ils dirigent les cérémonies du culte, les bénédictions,
les unions, les sacrements de la naissance à la mort,
Les Prophètes président les assemblées ministérielles et le respect du Dogme parmi les fidèles dont ils
de l’Église et décident des réunions des Conciles. Les ont la charge. Ils sont aidés en cela par des diacres,
Conciles sont rares, on en convoque en général un des prévôts civils, et des subalternes ordinatorii. Ce
par siècle à des moments exceptionnels. sont les représentants de l’Église les plus proches du
peuple, les plus nombreux et les plus influents sur
On ne sait pas exactement selon quels critères un leurs ouailles qui les fréquentent quotidiennement.
haut membre du clergé de l’Église est choisi pour Les Abbés sont les prêtres à qui a été confiée la direc-
devenir Prophète. La sélection se fait lors de réunions tion d’une école, d’un orphelinat ou d’un hospitalet
tenues particulièrement secrètes où sont appelés un de l’Église. Le titre est honorifique, mais les abbés
petit nombre de Primarques et parfois d’Espiciens. sont les dirigeants des structures sous leur charge.
Le nouveau Prophète désigné est alors présenté pu-
bliquement. Une partie des candidats disparaît sans
Les Inquisiteurs
que personne ne sache ce qui leur est arrivé. Être
choisi Prophète change profondément le candidat, L’Inquisition chargée d’enquêter et d’appliquer la loi
parfois au moins de difficilement le reconnaître dans concernant les hérésies et crimes envers l’Église est à
ses nouvelles habitudes et sa personnalité. la charge des prêtres, dont un certain nombre, formés

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en collèges inquisitoriaux, travaillent sans relâche à et général de légion, un grade équivalant à celui
cette tâche. Paradoxalement, et malgré la cruauté des d’Espicien.
sentences en cas de crime avéré, ce sont des hommes
loyaux et honnêtes pour la plupart. Les monstres L’Ordinatori veille à remplacer tout lien familial
tortionnaires y sont rares, d’autant que la décision de par une profonde et religieuse fraternité entre les
justice n’appartient pas à l’Inquisition, qui enquête, Ordinatorii. La vie dans les casernes est rude et
mais aux Espiciens. Si une région vit des procès in- cruelle, mais elle est aussi riche et fournie en éduca-
justes, des tortures barbares et des exécutions san- tion ; tous les Ordinatorii sont lettrés. Il est à noter
guinaires, c’est que l’Espicien local est un tyran dont que le modèle de légion de l’Ordinatori a été suivi
l’Inquisition n’est que l’outil. par beaucoup de forces militaires qui ont recruté des
vétérans ordinatorii retournés à la vie civile pour for-
mer leurs propres armées.
Les Ordinatorii
Les Ordinatorii sont le bras armé et les serviteurs
Les Quaesitorii
de l’Église, formés dans des casernes depuis leur
plus jeune âge. Si le recrutement se fait souvent Les Quaesitorii sont les hommes de Hautes-Œuvres
avec des orphelins intégrés dans des casernes mili- des Prophètes : leurs assassins, leurs soldats d’élite
taires ou avec de jeunes gens n’ayant que cela pour et leurs enquêteurs. Peu nombreux, les Quaesitorii
échapper à un rang social misérable, un des enfants sont chargés de la sécurité des proches et familles
d’une famille aristocratique pourra y être envoyé des hautes instances du clergé. Certains corps d’élite,
pour servir le clergé de l’Église et s’assurer ainsi une reconnaissables à leurs armes ardentes, enquêtent
carrière influente. Enfin, les enfants d’un Ordinatori et pourchassent tout complot ou menace envers le
le deviennent souvent à leur tour. La plupart des Concile et l’Église et sont utilisés comme troupes
ecclésiastiques ont suivi cette formation et la plu- d’éclaireurs ou d’avant-garde pour briser les plus
part ont porté le linotorci et la lance-impulseur de solides résistances adverses. Ils ne se chargent en
l’Ordinatori. C’est le seul rang ouvert aux femmes, aucune manière de justice : ce sont des tueurs froids,
à la condition de masquer leur visage en public et efficaces et discrets. Quand un Quaesitori annonce
devant tout autre Ordinatori, et de ne jamais expo- son titre, tout le monde préfère obtempérer sans re-
ser leur corps. Être ordinatori est une carrière qui chigner. Le rang des Quaesitorii est hors de la hié-
peut se prolonger jusqu’à devenir officier supérieur rarchie de l’Église citée plus haut. Techniquement, ils

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L’ÉGLISE DU CONCILE DIVIN

ne rendent compte qu’au Ministère des Primarques L’Église manie allègrement le bâton et la carotte.
et aux Prophètes. D’un côté, pauvres et indigents peuvent être soignés,
et aidés. De l’autre, ils peuvent être asservis sans
pitié, pratiquement sans besoin d’explication et au
L’ÉGLISE ET LES LOSSYANS mépris des lois des cités-États locales quand celles-
ci ne leur donnent pas raison par défaut. L’Église
L’Église du Concile a une influence énorme sur la se considère comme intouchable, toute-puissante et
culture des peuples lossyans. Une influence qui s’étend supérieure à toute autre autorité. Le despotisme, les
sur toutes les Mers de la Séparation et les quatre cin- abus de pouvoir, la tyrannie cruelle y sont monnaie
quièmes de sa population. L’Église est la religion domi- courante autant que les prêtres généreux dont la
nante et n’en tolère pas vraiment d’autres. Les cultures seule ambition est de montrer que l’Église aime ses
non conciliennes mises à part, la foi en l’Église du ouailles et veille sur eux.
Concile est la norme et le respect de ses Dogmes des
principes de vie pour toutes les cités-États de Loss et L’Inquisition est omniprésente et les temples se
malgré la pérennité de petits rituels privés et de cultes mêlent de tous les aspects de la vie privée au tra-
locaux ici et là, toujours vivaces. vers des rituels de la naissance, des passages à l’âge
adulte, de l’éducation, des mariages, des rites funé-
Mais les choses ont quelque peu évolué et se sont raires, de l’administration des biens et des avoirs de
assouplies, parfois au corps défendant de l’Église qui l’Église, du commerce et de la finance, mais aussi
a dû mettre de l’eau dans son vin. Les effets combi- de la défense, et des forces armées. On ne peut
nés de l’influence des grandes corporations civiles oublier l’Église ; son emblème, le Cercle d’Argent,
d’une part et de l’expansion de la littérature et du est partout.
savoir moderne d’autre part ont lézardé le socle de
l’énorme pilier que représente le pouvoir de l’Église. L’Église gère des écoles, des universités, des hospices.
Elle-même admet, bien que du bout des lèvres, que Ses temples sont souvent attenants à des orphelinats
certains principes et codes devraient être révisés et et des casernes, mais aussi des Maisons des Esclaves
qu’une tolérance plus large est souhaitable vis-à-vis réputées pour le raffinement du Haut-Art qui y est
des contrevenants. Cependant, les Prophètes ne re- pratiqué ainsi que des maisons closes à houris. Elle
mettent pas en question les Dogmes eux-mêmes et à dispose aussi de biens fonciers et immobiliers, gérant
Anqimenès, oser interroger ces sujets est une bonne des terres et des villages ou encore des corporations
manière d’attirer les Inquisiteurs comme la petite qui lui payent écot. Bref, l’Église est puissante, riche,
vérole sur le bas clergé. influente et répandue partout.

Relations sociales Les rites courants de la vie


Le rapport des civils à l’Église est un peu compli- Chaque maison lossyanne, en plus de souvent possé-
qué mais, dans l’ensemble, il s’agit de dévotion re- der de petits autels dédiés aux esprits, ancêtres, ou
ligieuse, de respect de l’autorité des prêtres et du aux anciens dieux, dispose sur son foyer ou face à
pouvoir des Ordinatorii, de crainte superstitieuse du la porte d’entrée d’un grand bougeoir où trône une
Concile et de peur légitime de ses moyens matériels. chandelle blanche posée dans un « cercle d’argent »
L’Église possède nombre d’esclaves Chanteuses de (souvent un cercle de terre cuite blanche, pour les
Loss, le plus souvent dédiées à la distraction et aux plus pauvres). La chandelle est allumée à chaque
plaisirs, mais celles-ci sont aussi des armes terribles. tombée du jour, pour au moins quelques instants de
Les Espiciens ont souvent une esclave parfaitement prière. Les plus riches laissent la chandelle brûler
conditionnée en guise de garde du corps, et qu’ils toute la nuit.
n’hésiteront pas à utiliser et à sacrifier au besoin.
Tous les Alere et Ni’concilo, les temples ouvrent
Les Lossyans respectent les prêtres, voire les leurs portes de la tombée du soir à minuit pour
apprécient. Ces derniers sont proches du peuple : un culte, avec des prières, parfois un sacrifice rituel
les prêches réguliers dans les temples rassemblent animal, des prêches, des sermons, et la bénédiction
nombre de fidèles, les hospices de l’Église sont de la foule pendant que sont rappelés les Dogmes.
ouverts gratuitement aux gens pauvres qui ont C’est un rite sacré aussi bien qu’une fête et un ren-
besoin de soin et l’Église locale distribue souvent dez-vous social important. La plupart des Lossyans
de la nourriture aux nécessiteux. Plus on va vers n’imaginent pas s’y soustraire, par intérêt ou par
le Sud, moins les codes et règles concernant les respect religieux.
femmes sont appliqués rigidement. Les diacres et
assistants des prêtres ont à cœur de soulager les
Le culte des Nomae et Bénis
maux de l’humanité, préserver la civilisation et la
faire prospérer. Ce sont des pères, des sages et des Les Nomae : ils sont aussi surnommés les Divins, et il
aînés pour le petit-peuple. Sauf bien sûr, quand ils s’agit des serviteurs terrestres et spirituels du Concile
deviennent des tyrans. Divin, leurs intermédiaires directs.

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CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

Hormis les Thanataires, on distingue les Moiriès, ou confrérie a pour patron un Béni. Il est courant que
agents du malheur et de l’injustice, incarnés sous les soient conservées, par des congrégations ou dans des
traits d’esprits de la maladie, de la souffrance, de la temples de l’Église, des reliques de Bénis.
guerre, du chagrin, de la folie, etc. Ils sont considé-
rés cependant comme une part essentielle de l’ordre
Les sacrements
céleste : le dépassement de soi pour devenir un être
de Vertus, ne peut se faire sans se confronter aux La naissance : officiellement, le nom de l’enfant,
horreurs du monde, qu’ils incarnent. Les autres sont même choisi à la naissance, ne sera donné que passé
les Alogias, faiseurs de miracles chargés de répandre sa troisième année. Une fois passé son anniversaire,
l’espoir et le bonheur, incarnés sous les traits d’es- il est présenté au temple et son nom officiellement
prits de la joie, de la fête du rire, de la vie nouvelle et annoncé. Ce nom sera béni par un prêtre et l’enfant
de la guérison. Beaucoup d’Alogias sont directement sera alors reconnu et inscrit en tant qu’individu sur
liés à un Béni, être saint qui, au cours de sa vie, a les registres du temple. À noter que même pour les
accompli miracles et exploits en relation directe avec moins pratiquants, cette coutume est respectée, par-
un des domaines d’un Alogia ou un autre. fois dans une cérémonie laïque.

Les Bénis : le culte autour d’eux est modéré par Le passage à l’âge adulte : l’âge adulte sur Loss est
l’Église afin qu’elle ne perdre pas son autorité sur ses de quatorze ans. Le rituel coutumier est un sacre-
ouailles. Malgré tout, dans une région qui compte un ment public qui a lieu une fois par an, en présence
Béni parmi les siens, celui-ci sera souvent l’objet de de l’Espicien. La cérémonie est un serment de dé-
cultes et de fêtes, et aura toujours une place privilé- votion, obéissance et fidélité à l’Église du Concile,
giée dans un temple. Chaque corps de métier, guilde après quatre jours de jeûne et d’isolement complet
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L’ÉGLISE DU CONCILE DIVIN

des futurs adultes. Tous les hommes présents doivent selon les régions. On peut être sûr qu’ils sont pris à la
faire couler leur sang en jurant ; toutes les femmes lettre dans l’Hégémonie, mais que tout le monde s’en
doivent poser les deux genoux à terre, tête basse, au moque dans l’Athémaïs, à Armanth en particulier.
moment du serment.
Les services de la prostitution sont interdits. Si
Le mariage : chez les Lossyans, il est de coutume de l’Église encourage l’usage d’esclaves dans des bor-
se marier dans une fête laïque. Cependant plus le dels, les houris, faire appel aux services sexuels d’une
mariage implique d’intérêts et se fait entre familles prostituée libre est un crime. L’Église chasse — un
riches, plus grandes sont les chances qu’il se fasse re- peu en vain — aussi bien les catins que leurs clients.
ligieusement. Deux bracelets d’argent sont apportés
par l’époux et scellés aux poignets de l’épouse devant Manquer une messe sans avoir une bonne
les témoins et la famille, tandis que le prêtre unit les raison est une faute qui doit être réparée
deux mariés. Ces bracelets sont parfois laissés aux par un don en nature, argent ou service
poignets de l’épouse, à vie. Elle ne pourra en théorie d’intérêt général.
les retirer qu’en les brisant. L’époux ne porte aucun
symbole marital dans ce type de cérémonie, mais l’al- Ne pas offrir l’hospitalité à un étranger dans
liance, tradition athémaïs, se répand de plus en plus. le besoin est un crime.

Aucune femme ne devrait porter d’arme, se


Les interdits, règles et codes courants battre, prendre des fonctions militaires, pos-
Ces codes, interdits, et règles, existent partout mais séder une entreprise en son nom propre ou
sont plus ou moins adaptés, assouplis ou galvaudés encore étudier les Sciences et les Arts.

Sur Loss, les Sciences et les Arts corres-


pondent à ce que nous nommerions de nos
jours les sciences et arts appliqués, et l’in-
génierie, voir le chapitre Les génies de Loss,
page 164.

Une femme qui ne peut prouver qu’elle a une


famille, des tuteurs ou un protecteur peut
être arrêtée et asservie sur-le-champ.

Dissimuler, aider, cacher — ou être com-


plice par non-dénonciation — toute per-
sonne rousse, ou Chanteur de Loss est un
crime puni de mort et d’asservissement de
toute la famille directe du coupable.

Il est interdit d’affranchir une esclave (pas


un, mais bien une). Il est interdit de laisser
libre un Terrien Perdu.

L’Église n’admet pas le meurtre d’un


Lossyan par un autre Lossyan. Le viol, la
torture, les crimes sur enfants sont impi-
toyablement châtiés avec cruauté.

L’homosexualité est une hérésie pour l’Église,


mais officieusement, il y en a tant au sein de
l’Ordinatori et dans les Maisons des Esclaves
que l’Église ne condamne que le fait d’affi-
cher ouvertement l’homosexualité, pas son
existence… Et encore est-elle forcée de fer-
mer les yeux sur ses propres rangs.

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CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

Armanth comptait moins d’une centaine de Maîtres-marchands en titre, dirigeants de la Guilde des
Marchands qui avait fait de la cité-État l’immense ville et puissance économique qu’elle était. Jawaad était l’un
d’entre eux, et célèbre à bien des titres ; à commencer par son âge respectable. Il était Maître-marchand depuis
toujours et avait, selon les rumeurs, largement plus d’un siècle, malgré les apparences ; et s’il n’était pas le seul
à avoir un Ambrose comme symbiote, ce détail peu commun ne passait pas inaperçu. Il était célibataire, sans
parent et sans héritier ; un trait encore une fois peu commun et saugrenu pour tout Lossyan. Mais surtout, il
était célèbre pour avoir refusé son entrée au Conseil des Pairs, alors qu’il y avait été élu, quand les trois quarts
de l’aristocratie ne pouvaient que rêver vainement y siéger un jour.

Les Chants de Loss, Armanth

LA GUILDE DES MARCHANDS


L a Guilde des Marchands est l’entité supra-poli-
tique qui domine Armanth et impose ses règles
et lois commerciales sur plus de la moitié des Mers
zaines de milliers de personnes travaillent directement
pour elle. Mais elle n’est pas que cela, et nous allons
en parler ci-dessous.
de la Séparation. Loin d’être simplement un immense
conglomérat de corporations et de comptoirs se char-
geant de gérer et contrôler le commerce à grande
échelle, c’est une organisation immense, tentaculaire,
HISTOIRE EN RÉSUMÉ
dont on retrouve la présence dans tous les milieux La Guilde des Marchands est née à Terancha en 645,
politiques, les agoras des cités-États et les cours des de la fusion de plusieurs guildes prenant de l’im-
princes, mais aussi les universités, les écoles, les bu- portance entre Khoïemonos, l’Imareth et les Cités-
reaux de recherche, les bibliothèques et les ateliers Unies. Le but de cette alliance était d’arrêter des
des plus grands génies. Et quand on réalise l’étendue conflits commerciaux entre corporations rivales, qui
et la diversité de son influence, en constante pro- tournaient aux raides pirates incessants, ce qu’elle
gression depuis un siècle au point d’avoir la capacité fit efficacement. Le nom d’origine de la Guilde des
d’arrêter des guerres, on comprend deux choses : la Marchands fut vite oublié pour ne garder que ce
première, c’est à quel point la Guilde des Marchands titre, un peu trompeur quant à sa raison d’être et sa
peut légitimement effrayer l’Église par sa concurrence structure. Pendant tout le VIIe siècle AC, la Guilde
idéologique ; et la seconde, c’est que cette immense des Marchands intervint comme entité diploma-
organisation sert de toute évidence un objectif qui va tique pour arbitrer les conflits entre les archipels
bien au-delà du contrôle et du monopole du com- des Mers de la Séparation et les régions où elle était
merce dans les Mers de la Séparation. implantée, usant de quantités d’agents officiels et
d’espions pour s’emparer en même temps des se-
La Guilde des Marchands a la mainmise sur les cours crets de certains marchés. C’est ainsi que vers 712, la
de la monnaie et des matières premières, et décide Guilde des Marchands parvint à diffuser les secrets
peu ou prou des prix partout. Même si l’Église et du Haut-Art dans la société civile, en publiant en
l’Hégémonie forment la structure politique la plus masse des manuels techniques de l’Église. Ce fut
puissante financièrement, avec les plus grandes ré- un premier pas vers le contrôle du trafic d’esclave,
serves de loss-métal qui se puissent imaginer, même sans doute le marché le plus fructueux, presque à
si l’Empire de l’Hemlaris est autrement plus puis- égalité avec celui du loss-métal. C’est aussi la Guilde
sant que tout ce que la Guilde des Marchands pour- des Marchands, en s’implantant dans l’Athémaïs, qui
rait rassembler militairement, c’est pourtant elle qui participa activement à l’exploration des côtes in-
parvient à imposer les cours d’échange de ce métal connues du sud-est des Mers de la Séparation, et
pratiquement partout. Mais son influence ne s’arrête lança l’exploitation du peuple san’eshe comme vivier
pas là : elle a aussi un quasi-monopole sur le tra- d’esclaves exotiques.
fic et le financement des grandes routes maritimes,
sur le marché de l’argent et sur le trafic d’esclaves En 765, la Guilde des Marchands, qui avait déjà
pour toute la moitié sud des Mers de la Séparation. défini sa structure politique, autour du Conseil des
Désormais, le cours et la valeur des esclaves sont Pairs et des Maîtres-marchands, installa un comp-
fixés par ses soins, tandis que les meilleurs lieux toir dans un petit bourg installé dans un delta entre
de formation n’appartiennent plus à L’Église, mais des falaises et des marais insalubres : Armanth.
sont les Jardins des Esclaves d’Armanth, désormais Elle y centralisa son commerce d’esclaves et fi-
réputés partout. nança la construction de quais et ports, déplaçant
ses intérêts et moyens de Samarkin, trop souvent
Bref, la Guilde des Marchands est un monstre en rendue instable par les disputes incessantes entre
termes de pouvoir et de dimensions, et plusieurs di- les beys qui menaçaient régulièrement la Guilde.

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CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

L’immigration explosa, attirant de plus en plus de L’entité que forme la Guilde des marchands dépasse
marchés et d’investisseurs et donna naissance au largement le cadre du commerce et de l’industrie, et
Marché aux Cages. En moins d’un siècle, l’Église s’immisce en tant qu’intermédiaire politique et di-
perdit le contrôle et le monopole de ce marché, plomatique avec une influence qui dépasse celle des
d’abord parce que le Haut-Art s’était répandu par- plus puissantes cités-États. Elle est une entité quasi
tout, ensuite parce que la Guilde des Marchands étatique en elle-même, à égalité avec l’Église, l’Hégé-
rachetait et annexait comptoir après comptoir. C’est monie et l’Hemlaris. Et elle a un levier très efficace
vers 866 et la fin du IXe siècle que la Guilde des pour cela : c’est elle qui maîtrise l’argent et le cours
Marchands démontra sa véritable influence cultu- des matières premières.
relle et politique sur les Mers de la Séparation, en
se posant en égale diplomatique de l’Église dans La Guilde des marchands est dirigée par le Conseil
les affaires et conflits des cités-États, mais aussi en des Pairs, que nous abordons plus loin en détail. Ces
répandant massivement les technologies éoliennes trente hommes sont tous sélectionnés par leurs pairs
et hydrauliques industrielles. à partir de trois critères : leur statut (ils doivent être
Maîtres-marchands, voir plus bas), leur influence
À partir du XIe siècle, La Guilde des Marchands politique reconnue au sein d’une cité-État (celle-ci
investit massivement dans le développement de la peut être liée aux relations, à la fortune, à l’impli-
ville jusqu’à en faire une mégapole florissante. Elle y cation politique) et enfin leur lignée (les Pairs sont
établit son Conseil des Pairs, y transféra son centre privilégiés parmi les descendants des fondateurs de
administratif et reprit l’exploration des côtes sud-est la guilde).
des Mers de la Séparation. Des contacts se nouèrent
avec les Jemmaïs et Armanth devint un centre cultu-
Les Francs-mestres
rel majeur éclipsant l’influence d’Anqimenès dans
les sciences et les savoirs. Mais surtout, la Guilde Au service des Pairs, il y a les Francs-mestres. Ce sont
des Marchands encouragea et diffusa durant toute les chefs des grands comptoirs de la Guilde répartis
sa montée en force un modèle socioculturel progres- partout, mais aussi les dirigeants des grandes institu-
siste et libéral, dont l’influence grandit au rythme tions comme les universités et centres industriels. Ces
du pouvoir géopolitique de la Guilde. Pratiquement Francs-mestres ne se valent pas en pouvoir, qui dépend
toutes les cités-États des Mers de la Séparation ont de la taille et de la fortune de la structure dont ils sont
un comptoir de la Guilde des Marchands. Même responsables. Mais ils ne répondent cependant que
l’Hemlaris a dû accepter de céder non seulement devant le Conseil des Pairs et leur rôle est de gérer et
des ports, mais des routes et des terrains avec des administrer comptoirs et propriétés de la Guilde. Un
autorisations de passages commerciaux perpétuels, Franc-mestre est souvent un Maître-marchand, mais ce
en échange des services rendus par l’Athémaïs lors n’est pas du tout systématique ; et on compte pas mal
de la dernière guerre contre Anqimenès. Les Maîtres- de femmes à ce poste, tout du moins dans les régions
marchands exploitent le pouvoir économique de la qui le permettent politiquement.
structure dont ils sont les princes à des visées di-
plomatiques, politiques et culturelles pour répandre
Les Vesseris
leurs idées libérales, désormais sans hésiter à affron-
ter frontalement l’influence de l’Église. Enfin, au service des Francs-mestres, il y a d’une
part des administrateurs locaux et secrétaires, d’autre
part des Vesseris, des officiers militaires, souvent vé-
FONCTIONNEMENT ET STRUCTURE térans et mercenaires, en charge des troupes affec-
tées à la protection des comptoirs et structures de la
La Guilde des Marchand se présente de l’extérieur Guilde. Un Vesseri ne dirige que quelques centaines
comme une corporation de guildes marchandes et d’hommes au mieux, sauf pour certains comptoirs
de corporations de métiers et d’artisans. C’est d’ail- qui accueillent de véritables légions, très bien équi-
leurs à quoi ressemble son organigramme : la Guilde pées et organisées, bien que de taille réduite (en gé-
des Marchands a des parts dans presque tous les néral, pas plus de 1 000 à 1 500 hommes).
comptoirs commerciaux et toutes les corporations
et guildes locales des cités-États, sauf si les lois
Les Messagers et le courrier
locales l’en empêchent – et encore, il n’est pas dit
que cela l’arrête, elle finance alors cela de manière Le système de transmission des directives est pyrami-
occulte. La Guilde des Marchands fait de même avec dal au sein de la Guilde, mais peut très bien en cas
les écoles, chantiers navals et universités dès qu’elle de nécessité sauter une hiérarchie. Le but est que l’in-
le peut. Dans les faits, elle a un monopole sur ces formation circule vite, ainsi presque tous les navires
structures de l’Athémaïs à tout le sud de l’Étéocle en de la Guilde ou affiliés à elle portent forcément, en
passant par Terancha et des Cités-Unies. Ses comp- plus de leur cargaison, du courrier et des messagers.
toirs sont partout ; il y en a même un à Anqimenès, L’ordre des Messagers de la Guilde est d’ailleurs une
bien que modeste. institution en soi.

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Ref. 14778
LA GUILDE DES MARCHANDS

Les Quaetirs portent leur soutien et leur aide structurelle aux


Mais le portrait ne serait pas complet sans parler guildes et confréries des villes où ils sont instal-
des Quaetirs, les enquêteurs experts de la Guilde. lés, en échange d’une réciprocité. Ce soutien
Il existe à Armanth une école dédiée à la formation s’étend entre les comptoirs et les membres de la
de ces enquêteurs, mais ils sont parfois recrutés à Guilde des Marchands.
l’extérieur. Tous ont le même profil : observateurs,
minutieux, obsédés par la preuve, ils ne travaillent Maintien des valeurs boursières et des monnaies : les
que très peu sur la base du témoignage, n’emploient comptoirs et officines bancaires de la guilde doivent
que rarement la torture qu’ils jugent inefficace, et pouvoir garantir le traitement des comptes en banque
œuvrent d’une manière plus similaire à des enquê- de leurs membres et s’assurer du maintien constant
teurs privés modernes. Assistés par des juristes de des étalons monétaires, y compris en intervenant
la Guilde, ce sont de redoutables limiers souvent si nécessaire sur les marchés financiers en cas de
experts en armes, et leur salaire ainsi que leurs trouble économique grave, afin d’éviter toute déva-
moyens leur permettent d’assurer une efficacité luation de la monnaie en une région donnée.
sans comparaison dans la résolution des enquêtes
et problèmes de la guilde. Mais il en existe peu, et Assurance des billets à ordre et titres au porteur :
leur champ d’action est limité par les caprices des de même, les banques et officines de la Guilde et
Pairs. Cependant, ils ont le droit d’enquêter même ses affiliés doivent disposer des réserves nécessaires
auprès des Maîtres-marchands. pour garantir les échanges et paiements, ainsi que la
circulation des documents à échange monétaires, qui
doivent tous être certifiés et validés.
LES LOIS ET PRINCIPES
Libre circulation des biens : les membres de la Guilde
La Guilde des Marchands se fonde sur une règle pre- doivent garantir, au besoin en faisant appel à des
mière d’où découlent toutes les autres : légistes et en entretenant des forces armées, la libre
circulation des caravanes marchandes, des biens et
des services de toutes les sortes possibles. Quelques
« Rien ne doit entraver la bonne marche du exceptions concernent certaines drogues et le trafic
commerce. » d’enfants.

Protection des technologies et innovations : ce dernier


C’est sur cette base qu’est bâti le corpus des lois de la point concerne en quelque sorte la protection des
Guilde, toutes chargées de faire respecter ce principe brevets et des savoirs, mais aussi la promotion de la
premier. Les énumérer serait un travail de titan, mais recherche, des sciences et des techniques. Les comp-
on peut simplement relever les points principaux : toirs de la Guilde sont encouragés à investir dans ces
domaines pour favoriser l’innovation, mais aussi pour
Lutte contre le pillage et la piraterie : la Guilde des assurer le respect et la protection des savoir-faire
Marchands impose le financement d’équipages cor- contre l’espionnage industriel.
saires et autonomes chargés de sécuriser les routes
maritimes ou escorter les navires marchands. On notera qu’il n’y a dans ces points rien qui concerne
des affaires morales ou humaines en matière de jus-
Solidarité entre la Guilde et les confréries et guildes tice. La Guilde des Marchands ne s’en mêle pas. Le
locales : les différents comptoirs de la Guilde ap- Conseil des Pairs et l’Elegio d’Armanth peuvent à

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Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

la rigueur intervenir en cas de vendetta trop grave son organe exécutif. Mais il est aussi l’instance diri-
entre Maîtres-marchands. Mais rien dans les statuts geante suprême de la Guilde. Son rôle est cependant
officiels de la Guilde ne concerne la morale ou les assez limité ; il faut le considérer simplement comme
crimes humains de quelque sorte. Officiellement, ces l’organe qui valide et oriente la politique et les initia-
choses regardent les cités-États et les pouvoirs lo- tives commerciales les plus importantes de la Guilde
caux. Bien sûr, c’est un secret de polichinelle que des Marchands, sans oublier que celle-ci fonctionne
l’influence de la Guilde est telle qu’elle inspire, voire toujours de manière autonome : chaque comptoir gère
impose un progressisme des idées et des considéra- ses affaires un peu comme il veut tant qu’il respecte
tions socioculturelles à l’encontre de l’Église. Mais la les lois et principes de la Guilde des Marchands. Et
Guilde des Marchands a la prudence de n’en faire de temps en temps, l’un d’eux se fait taper sur les
aucune loi ni aucun principe, ce qui la rend difficile doigts par le Conseil parce qu’un Pair aura noté un
à mettre en cause. peu trop d’aises prises — ou d’argent perdu.

Les Aînés de la Guilde


LE CONSEIL DES PAIRS C’est au sein du Conseil des Pairs que se trouvent
Les membres du Conseil des Pairs siègent à Armanth les Aînés, les membres des sept plus vieilles familles
et sont désignés à vie. Ils ne sont pas élus au sens des Maîtres-marchands. Leur rôle au sein de l’orga-
où nul ne peut demander cette magistrature : elle est nisation est difficile à expliquer clairement tant les
offerte par cooptation des membres du Conseil des Aînés restent un groupe informel qui ne s’exprime
Pairs qui choisissent qui en fait partie, uniquement jamais sur ses objectifs. Mais son rôle est réputé se
parmi les Maîtres-marchands d’Armanth. Le Conseil résumer à suggérer les idées, innovations, avancées
des Pairs est l’une des trois assemblées d’Armanth et et directions dans les domaines sociaux, culturels
Ref. 14778
LA GUILDE DES MARCHANDS

et politique à l’ensemble du Conseil pour améliorer villes où sont établis les comptoirs de la Guilde. Leur
l’étendue et l’influence de la Guilde des Marchands. titre n’est pas immuable. S’il est intimement lié à
Beaucoup de rumeurs murmurent que ce sont les l’hérédité, puisque sont privilégiées les familles des
Aînés qui ont mené la Guilde à prendre un tel pou- fondateurs et des premiers dirigeants de la Guilde,
voir partout, non pas pour assurer son rôle écono- il dépend avant tout de la fortune de la famille du
mique et commercial, mais bel et bien pour répandre concerné. En clair, c’est le plus riche qui gagne. Le
l’hérésie de ses idées subversives et progressistes. plus pauvre des Maîtres-marchands en titre doit
Les Aînés seraient ainsi, avec l’aide de services pouvoir prouver qu’il dispose de plus ou moins un
d’espionnage et des polices spéciales, comparable million d’andris en fortune et biens propres. Selon
aux Séraphins d’Armanth chargés de protéger l’Ele- les cités ou régions, cette somme peut être multipliée
gio : responsables de bien des révolutions, émeutes, par dix ou vingt, comme à Armanth.
soulèvements et désordre civil quand cela servait
leurs objectifs. D’aucuns prétendent qu’ils auraient Ainsi, une concurrence féroce agite les plus grandes
même pu faire assassiner un Prophète par le passé. fortunes n’ayant pas encore accès à ce titre, mais
Quant à la vraie nature des Aînés, les rumeurs sont aussi les plus fragiles financièrement. Entre les
si nombreuses et folles à ce sujet que l’on pourrait Maîtres-marchands et les candidats au titre, tous les
en remplir des volumes entiers. coups sont permis, ce qui engendre des vendettas
qui ont parfois tourné en véritables guerres civiles.

LES MAÎTRES-MARCHANDS Ce titre ne confère pas qu’un grand honneur : les


Maîtres-marchands sont les dirigeants des Comptoirs,
Les Maîtres-marchands sont les chefs des plus leurs privilèges surpassent ceux de toute autre fonc-
grandes familles bourgeoises et marchandes des tion au sein de la Guilde et ils sont presque intou-
chables légalement, sauf par le Conseil des Pairs lui-
même ; et ce même en cas de crime grave comme le
meurtre. La Guilde a parfois une influence énorme
sur certaines cités-États, cela procure aux Maîtres-
marchands une immunité judiciaire semblable à celle
des tribuns et aristocrates, pratiquement à égalité
avec celle des Ordinatorii. Leurs moyens et pouvoirs
sont énormes et il est facile pour l’un d’entre eux
d’en abuser. Tout comme il est alors facile pour
ses rivaux de riposter dans le même registre — car
tous les coups sont bons entre Maîtres-marchands.
Paradoxalement, ils sont les plus importants contri-
buteurs aux taxes et impôts de la Guilde. Ils sont
donc par vases communicants les plus importants
financeurs des universités, ports, flottes et autres
structures de service de la Guilde.

151
Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

Priscius révisait enfin son point de vue, après avoir eu la sévère et fort désagréable sensation qu’on venait
de le prendre pour le dernier des imbéciles.
C’était quelques jours plus tôt, dans la brume marine et moite du matin, chargée d’effluves humains et enva-
hie de cris, qu’il avait suivi Batsu sur le Marché aux Cages d’Armanth. La capitale de la Guilde des Marchands,
organisation répandue sur toutes les Mers de la Séparation, si puissante qu’elle s’était littéralement payé sa propre
cité-État, était parmi toutes les villes lossyannes une perle de progrès et de liberté ; une ville aux mœurs si modernes
que nulle citoyenne n’avait, sauf suite à un procès pour crime grave, à craindre d’être un jour asservie et marqué
d’un linci. Rares étaient les savants et intellectuels à y redouter l’inquisition des Ordinatorii du Concile, dont la
présence, imposée et inévitable, n’était guère plus que représentative et consultative ; mais Armanth était aussi la
plaque tournante majeure du commerce d’esclaves dans toutes les Mers de la Séparation. Il en venait de tous les
coins des terres connus : parqués puis revendus ; dressés, matés et brisés, éduqués cruellement et sans pitié ; les plus
grandes maisons marchandes y avaient leurs plus prestigieux Jardins des Esclaves d’où sortaient des marchandises
de prix rompues par la force à tous les arts visant à plaire et distraire ; au destin d’animaux chargés de servir et
donner plaisir et prestige à leurs propriétaires.
Armanth avait été fondée trois siècles plus tôt. D’abord simple village de pécheurs abritant des réfugiés fuyant
les guerres de l’Étéocle et les persécutions de l’Église au nord, la ville avait grandi tant bien que mal sur des îlots
de sable perdus dans une lagune marécageuse en ne pouvant compter que sur le commerce, accueillant toujours
plus de réfugiés fuyant les légions d’Ordinatorii et leurs exactions ; Cités-Unies, Hemlaris, Terancha, le Ginnon,
les Plaines d’Étéocle, il en était venu de partout rebâtir leur vie dans la baie de l’Argas, parfois depuis le plus
lointain nord des Mares Saeparent. Libres penseurs, intellectuels, savants, apostats ou simplement pauvres hères
qui avaient eu le malheur d’être sur le chemin de légions en marche, ils n’avaient eu d’autre choix que de tenter
de trouver un navire et de traverser la mer pour rejoindre Armanth. Cette traversée, difficile, était aussi la meil-
leure protection de la cité-État. Les légions de l’Église du Concile, sous l’étendard de l’Hégémonie d’Anqimenès,
s’étaient concentrées sur leur croisade contre l’empire oriental de l’Hemlaris dans une guerre qui avait embrasé
tout le monde connu en oubliant finalement cette cité de réfugiés lointaine et sans intérêt d’un coin de l’Athé-
maïs. Quand Anqimenès s’était enfin réveillée pour constater qu’elle avait une nouvelle concurrente en taille, en
puissance et en influence politique, la puissante Guilde des Marchands en avait déjà fait sa capitale ; et Armanth
dépassait un million d’habitants.
Une seule fois, trente ans plus tôt, l’Hégémonie avait tenté une action militaire sous l’ordre de l’Église contre
la cité de la Guilde des Marchands. La croisade, hâtive et mal préparée, s’était soldée par un désastre. Alertée
bien à l’avance par ses réseaux de l’arrivée d’une armada désorganisée — rien n’est plus efficace que le commerce
comme soutien à l’espionnage et la Guilde des Marchands en abuse — Armanth avait loué les services de toutes
les flottes voisines des îles des Mers de la Séparation, pirates de l’Imareth compris. Aucun galion de l’Église ne
toucha les côtes de l’Athémaïs. Presque par jeu, Armanth renvoya les Ordinatorii survivants sans demander aucune
rançon. Mais, sauf pour quelques prêtres et officiels qui furent épargnés, pas avant qu’ils aient tous enduré cinq
ans d’emprisonnement et de travaux forcés.
Armanth est désormais considérée comme la lumière de la civilisation moderne selon le point de vue d’une
bonne partie des Mers de la Séparation : on y trouve plus que partout ailleurs des collèges et des universités
réputées, où tous peuvent suivre les cours et les débats de quelques-uns des plus grands esprits du monde.
Plus étonnant encore, des femmes y enseignent elles-mêmes les sciences et les lettres. Elles peuvent d’ailleurs
y divorcer, travailler, commercer, gérer leurs biens et circuler librement sans l’obligation d’avoir l’assentiment
exprès d’un membre masculin de leur famille. Il est même arrivé, au grand plaisir du Conseil des Pairs, instance
du pouvoir exécutif de la ville et cœur dirigeant de la Guilde des Marchands, que des princesses de l’aristocratie
d’autres cités, bien plus pointilleuses sur les préceptes des Dogmes du Concile, viennent y trouver refuge et
demander asile aux autorités de la ville.
En quatre siècles, l’influence d’Armanth avait fini par essaimer sur nombre de cités-États voisines, commer-
çant avec elle autour des Mers de la Séparation. On la considérait aussi bien comme la cité des vices et des
mœurs dissolues que comme le havre de la science et de la culture, le refuge des penseurs et des génies ; mais
tout aussi bien portait-elle, comme si elle avait souhaité contredire sa réputation, le prestige douteux d’être
aussi la cité des marchands d’esclaves.
La réalité est finalement fort simple : après le loss-métal, le minerai qui permet de fabriquer les dynamos,
les armes à impulsion et les moteurs à lévitation, le second bien le plus recherché et convoité dans tout Loss
n’est pas l’or : ce sont les femmes. La fortune de la ville est en partie bâtie sur les esclaves de son Marché aux
Cages et sur l’immense trafic maritime et terrestre qu’il génère. L’ironie de la chose ne peut manquer de frapper :
Armanth la décadente, ville de culture, de liberté et de progrès, aux femmes honorées, respectées et reconnues,
le reste en partie grâce à l’asservissement de milliers d’esclaves.
— Tu vas voir, je te fais un cadeau !
Priscius fixa, dubitatif, son collègue et débiteur. Batsu arborait à cet instant son pénible et éternel sourire de
vendeur de tapis en quête de benêts à rouler. L’esclavagiste de luxe avait un doute sur le cadeau et il n’était pas un
benêt, lui. C’était un homme dans la force de l’âge qui affichait la taille, la carrure et l’embonpoint d’un Nordique
massif aux allures hégémoniennes, le visage rond mangé par une barbe qui hésitait entre le blond et le poivre et

152
Ref. 14778
LA GUILDE DES MARCHANDS

sel. Ses affaires avaient prospéré un temps, et il était vêtu à la hauteur de sa richesse et de ses prétentions : une
chemise ouverte et ample de til fin, une sorte de coton commun dans le Sud et un veston ouvert aux couleurs
chaudes et chamarrées, rehaussés de boutons d’argent, sur un pantalon ample, brun feu, orné de pièces de cuir
ouvragé. Pour parachever son rang, un manteau de lourde soie d’un bleu voyant reposait sur son épaule. Que le
tout lui tienne plutôt chaud sous la chaleur pesante du Marché aux Cages lui importait bien moins que d’afficher
sa fortune et sa renommée clairement, surtout en ce moment où sa réputation souffrait de vilains accrocs.
Batsu lui devait une esclave des plaisirs ; cela durait d’ailleurs depuis un moment et Priscius se doutait
bien que ce cadeau ne pourrait pas avoir suffisamment de valeur pour rembourser la dette de son confrère.
Le maître-esclavagiste avait assez perdu de réputation ces derniers temps pour savoir que désormais des mar-
chands comme lui ne verraient aucune gêne à tenter de le tromper. Il avait cumulé les mauvais investissements
commerciaux — il aurait admis de mauvais gré que c’était un peu de sa faute — et sa dernière cargaison avait
fini piétinée par un troupeau de longilas après un orage qui avait mis deux navires lévitant à terre. Le rembour-
sement des investisseurs avait failli le ruiner et il n’avait pas arrangé les choses en usant de toutes les arguties
juridiques possibles pour retarder le versement de ses échéances. Cela lui avait coûté aussi cher en renommée et
en crédit que la fortune qu’il avait encore à devoir débourser, mais il n’était pas homme à laisser les cieux jouer
avec son destin sans lutter contre, lui ; il lui fallait simplement garder la face. Une réputation, cela se reforge.

Les Chants de Loss, livre 1, Armanth, chapitre 3

Le hall d’accueil de l’assemblée du Conseil des Pairs grouillait de monde en cette fin de séance publique.
L’exubérance des toilettes des participants, marchands et notables, donnait l’impression d’assister à un concours
d’apparat dont le but était, du dernier des plus insignifiants secrétaires au plus fastueux des Maîtres-marchands,
d’étaler sa fortune et son rang de toutes les manières possibles ; y compris les plus vulgaires ou ridicules dans l’excès.
Dans la chaleur de l’après-midi et malgré la fraîcheur de l’immense salle à colonnades étudiée pour sa
climatisation, cet étalage de tenues, toutes plus chamarrées et luxueuses les unes que les autres, créait une
atmosphère étouffante ; à dire vrai, les hommes et femmes les plus richement parés des lieux devaient cuire
sous leurs amoncellements de mantels brocardés, de chemises lacées, de pourpoints chamarrés, de toges or-
nementées et de tuniques brodées.
Jawaad avait fait, quant à lui, ce qu’on pourrait admettre être un effort. Il portait une large chemise de lin
blanc assez commune mais de coupe raffinée, et un gilet de cuir chamoisé, d’un noir bleuté, aux épaules ornées
de fins galons dorés, qu’il avait rehaussé de la broche ouvragée et sertie frappée de l’écusson des Maîtres-
marchands, à la forme d’un navire sous les étoiles. Mais là s’arrêtait sa bonne volonté vestimentaire. Un kilt
à lanières de cuir noir un peu passé et limé par-dessus un simple pantalon et une paire de bottes vaguement
cirées constituait le reste de ses atours. Dans la foule du hall où s’attardaient les groupes discutant et com-
mentant les derniers débats du Conseil des Pairs, il détonait donc fortement. Sa toilette sobre et négligée, face
aux abondances des costumes et uniformes locaux, tenait lieu de pied de nez évident aux conventions et à ses
confrères qui engloutissaient des fortunes colossales pour rivaliser de luxe.
L’arrivée de Jawaad, même vêtu comme un manant, ne passa pourtant clairement pas inaperçue.
D’une part, car il était très connu. Armanth comptait moins d’une centaine de Maîtres-marchands en titre,
dirigeants de la Guilde des Marchands qui avait fait de la cité-État l’immense ville et puissance économique
qu’elle était. Jawaad était l’un d’entre eux, et célèbre à bien des titres ; à commencer par son âge respectable. Il
était Maître-marchand depuis toujours et avait selon les rumeurs largement plus d’un siècle et demi, malgré les
apparences ; s’il n’était pas le seul à avoir un ambrose comme symbiote, ceux-ci, justement, sont connus pour
permettre de passer plus d’un siècle et demi sans vieillir ; ce détail peu commun intriguait tout de même. Il
était célibataire, sans parent et sans héritier ; un trait encore une fois peu commun et carrément saugrenu pour
tout Lossyan. Mais surtout, il était célèbre pour avoir refusé son entrée au Conseil des Pairs, alors qu’il y avait
été élu, quand les trois quarts de la bourgeoisie marchande la plus riche ne pouvaient que rêver vainement y
siéger un jour.
Ensuite, sa venue étonnait parce que tout le monde savait que jamais Jawaad ne montait au palais du Conseil
des Pairs. En fait, sauf s’il y était contraint — et encore fallait-il parvenir à l’y forcer — jamais le maître-mar-
chand ne se rendait à la terrasse du palais de l’Elegio, qui formait le cœur politique d’Armanth. Il fuyait la poli-
tique et détestait avoir à se mêler de ce genre de vanités et de préoccupations ; ce qui ne l’empêchait pas d’avoir
nombre d’alliés et débiteurs dans les couloirs de ces palais, chargés d’être ses yeux, ses oreilles et ses mains.
Enfin, accompagné de son escorte habituelle, elle aussi assez célèbre, cette fois composée non seulement d’Abba
et Damas mais aussi de sa comptable, Alterma, ce qui était plus rare, il portait dans ses mains un paquet-cadeau.
Ce qui était sans doute le plus incongru quand on le connaissait. La boîte, doublée de soie satinée et élégamment
fermée d’un nœud ornementé retenu d’une petite fibule d’argent, le tout dans des tons pastel, était de toute évi-
dence un présent. Or, si le taciturne et désagréable Maître-marchand avait une réputation, c’était bien celle de
ne jamais rien offrir à personne.

Les Chants de Loss, livre 1, Armanth, chapitre 4

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Ref. 14778
CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

— Alors c’est toi dont Janus vante les qualités en insistant pour que je te recrute ?
Il se nommait Ezio Le Palagio, c’est ce qu’Elena avait appris de la bouche de Janus, parmi d’autres choses.
Mais il ne ressemblait pas vraiment à l’image mentale qu’elle s’en était faite. Décrit par le voleur comme un fin
calculateur dénué de scrupules qui s’était hissé au premier rang de la Cour des Ombres par un mélange savant
d’alliances, d’obligés et de massacres de ses rivaux, elle avait imaginé une sorte de gros pirate barbe-noir aux
petits yeux féroces. Ce qu’il n’était pas vraiment. Le seul point commun était peut-être qu’il semblait aussi âgé
qu’elle l’avait imaginé.
L’homme, flanqué de deux molosses étrangement calmes, et entouré de ses hommes de main tous plus
sinistres les uns que les autres, avait dépassé la quarantaine. Élancé, voire mince, il devait dépasser d’une tête
Elena, et portait les cheveux mi-longs, noirs et bouclés, mêlés de mèches poivre et sel. Vêtu d’une tunique ample
aux manches bouffantes de cuir richement brodé sur une chemise écrue, et portant par-dessus des chausses une
sorte de jupe évoquant quelque kilt composé de pans de cuir, il semblait aussi sec que son visage au teint mat
et taillé à la serpe au bouc soigné pouvait le confirmer. Son regard d’un bleu pâle toisait la terrienne comme
s’il voulait en estimer le prix à la revente.
— Je vais te dire ce que tu vaux, fille. Un bon prix pour une esclave rousse, voilà à mes yeux tout ce que
tu as de valeur ; de quoi remplir mes coffres d’or, voire même de loss ! Pourquoi est-ce que je me priverais d’un
magot facile en t’accueillant comme un membre de la Cour des Ombres ?

Les Chants de Loss, Mélisaren

LA COUR DES OMBRES


L a Cour des Ombres est en quelque sorte le
pendant criminel de la Guilde des Marchands,
ou tout du moins prétendue telle. En effet, la Cour
condamné à l’ostracisme par les premiers prêtres
de l’Église. Mais Aurus, courageux et éclairé, aurait
compris qu’avec l’avènement du pouvoir de cette re-
des Ombres est omniprésente et répandue partout, ligion et de ses lois, il n’y aurait plus de place sous
mais ici s’arrête la similitude car il y a autant de le soleil pour les Lossyans épris de liberté. Avec sa
Cours des Ombres que de cités-États et chacune est cour et ses chevaliers et suivants, il aurait décidé de
indépendante des autres. La Cour des Ombres est poursuivre son règne caché, créant la première Cour
un nom, un mythe, une légende tout à fait réelle, des Ombres, qui aurait pour tâche de préserver la
certes, mais qui ne désigne pas une organisation liberté, y compris par tous les moyens illégaux né-
structurée. Il s’agit de sociétés de voleurs, roublards, cessaires, et de partager son modèle avec toutes les
parias, mendiants et trafiquants gérant les affaires villes où cette liberté serait menacée.
criminelles et les activités illicites au sein des grandes
cités lossyannes et protégeant leurs membres des Si rien dans les archives historiques ne parle du
autorités locales. « La » Cour des Ombres n’existe prince étéoclien Aurus, Nashera est reconnue comme
pas, mais les Cours des Ombres trouvent fort utile hébergeant la plus ancienne Cour des Ombres, bien
que la plupart des gens croient le crime organisé qu’elle fût dévastée puis refondée plusieurs fois. Mais
chapeauté par une organisation tentaculaire qui par tradition, les Cours des Ombres se réfèrent toutes
aurait ses ramifications partout. Et si cette croyance à Aurus dans leurs mythes et leurs serments fonda-
est fausse et que finalement la plupart des Lossyans teurs, de même que les poèmes et odes à la liberté qui
s’en doutent, la légende, elle, perdure solidement. lui sont attribués. C’est un personnage légendaire et

Pour la suite de ce chapitre, nous nous référerons


au terme Cour des Ombres pour parler de
l’organisation en général, même si chaque cité-
État a sa propre Cour des Ombres.

HISTOIRE EN RÉSUMÉ
L’origine du nom « la Cour des Ombres » est incon-
nue, mais ses princes font remonter sa naissance et
son titre aux premières années de la naissance du
Concile Divin. Un prince de l’Étéocle, souvent nom-
mé Aurus, aurait été déchu de son rang et exilé,

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Ref. 14778
LA COURS DES OMBRES

quelques reliques censées lui avoir appartenu cir- les abus et comportements nocifs de ceux des siens
culent comme autant de trésors sacrés dans les Cours qui iraient trop loin, ou encore de criminels qui ne
des Ombres. Ainsi, l’héritage d’Aurus revêt un ca- seraient pas membres de la Cour.
ractère sacré, et les Cours des Ombres prétendront
toujours qu’elles sont un espace de préservation de
la liberté et un refuge pour les opprimés, un rôle
qu’elles jouent toujours selon les régions.
ACTIVITÉS
Tout ce qui est illégal dans une cité est forcément
le sujet de l’intérêt et des activités de la Cour des
FONCTIONNEMENT ET STRUCTURE Ombres. La plupart du temps, les cœurs de son
business sont le racket, les pots-de-vin, le vol à la
Dans tous les milieux du crime, la Cour des Ombres tire, les cambriolages et la prostitution. Mais rien
a l’influence d’une sorte d’arbitre musclé qu’il est ne rapporte autant que le trafic d’artefacts, d’épices
préférable de ne pas se mettre à dos. Tout ce qui interdites et de drogues, ou d’autres denrées régle-
concerne les trafics et commerces illégaux passe mentées ou prohibées (y compris le loss-métal). La
par la Cour des Ombres et son réseau. Malgré une fausse-monnaie, la falsification, l’espionnage et le
organisation flottante et opaque, certains diraient trafic de secrets industriels sont d’autres secteurs
à raison chaotique, la Cour des Ombres a toujours importants, bien que demandant des spécialistes de
un poids non négligeable sur les pouvoirs en place haut niveau.
dans une cité, qu’ils soient politiques ou commer-
ciaux. Cette influence est assurée à grands coups La Cour des Ombres ne s’occupe pas de piraterie
de pots-de-vin, de chantages et d’informations com- et si elle pratique l’enlèvement, le trafic d’esclaves
promettantes, mais il y a des cités-États où existe y est mal vu et considéré comme contraire à l’héri-
véritablement un arrangement informel entre les tage d’Aurus. Cela n’empêche pas certains Princes
autorités et la Cour des Ombres. Après tout, mieux et leur cour de s’y adonner allègrement et de kid-
vaut savoir que les criminels doivent obéir à des lois napper de jolies filles ici pour aller les revendre à
et en répondre devant leurs pairs, que de les laisser des esclavagistes plus loin. Mais les Princes d’autres
dans la nature sans savoir où et comment les trouver. Cours traiteront ces trafiquants humains sans hon-
neur, voire comme s’ils n’étaient pas de la Cour
Chaque Cour des Ombres est dirigée par un Haut- des Ombres.
prince et dans les plus grandes cités, par plusieurs
Princes vassaux (le même terme est indifféremment Contrairement à une rumeur répandue, l’assassinat
employé pour hommes et femmes). Chacun se trouve n’est pas un des services courants que l’on peut de-
alors à la tête d’un quartier ou d’une portion de la ville, mander dans une Cour des Ombres et si certains en
selon la manière dont les criminels se la sont partagée. sont capables, ces transactions ne se font jamais au
sein de la Cour qui considère que cela ne la regarde
Les Princes règnent sur une cour composée de pas, sauf si un de ses membres proposant ce service
Barons, Chevaliers et Écuyers ; tous sont des chefs lui attire des ennuis — et la manière de régler le
de bandes, réseaux et organisations sévissant sur le problème est alors expéditive.
territoire de leur Prince et appliquant ses lois et sa
justice. En cas de litige, les Princes se réunissent et Enfin, les légendaires Sicaires d’Armanth ne font pas
leur décision est soumise à la règle de l’unanimité partie de la Cour des Ombres. Cette dernière les
moins un. Tant que le litige n’est pas réglé, le conflit craint autant que tout le reste de la cité-État.
peut se poursuivre dans les rues. La nomination
d’un Prince est un processus assez complexe, infor-
mel et souvent meurtrier, qui donne la part belle au
plus fort ou rusé. Le Haut-prince le plus influent ou
SECRETS ET LÉGENDE
retors de tous est le juge et l’arbitre final de toute La Cour des Ombres est une sorte un secret de poli-
réunion et peut trancher par décret si le conseil chinelle autant qu’une organisation particulièrement
des Princes ne parvient pas au consensus. Le Haut- discrète. Tout le monde sait qu’elle existe, mais per-
prince a théoriquement droit de vie et de mort sur sonne ne sait vraiment ce qu’elle est ni comment
toutes les cours, mais dans les faits, peu ont la folie rencontrer ses membres. Le culte du secret y est
d’en abuser. important, et ce dernier est souvent assuré par des
pots-de-vin et du chantage auprès des autorités offi-
Le but premier de la Cour des Ombres est d’assurer cielles afin qu’elles ferment les yeux sur les activités
la protection et la tranquillité de ses membres sou- en interne de la Cour.
haitant poursuivre leurs activités et prospérer libre-
ment. Elle arbitre les conflits entre bandes, gère la La plupart du temps, la Cour des Ombres est instal-
répartition des territoires pour ces organisations et lée dans des caves, catacombes et autres lieux diffi-
protège ses membres des poursuites judiciaires. Mais ciles d’accès et souterrains. Mais elle peut aussi se
elle assure aussi sa propre justice en interne contre tenir au sein du quartier le plus pauvre et mal famé

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LA COURS DES OMBRES

de sa cité-État et avoir une sorte de pignon sur rue la cité, l’application des lois de la Cour des Ombres
pour qui sait repérer les signes et codes qu’emploient et les activités sur les cités voisines qui en dépendent,
la Cour des Ombres pour se signaler. Ceux-ci dif- il n’y a à Armanth qu’un seul et unique Prince omni-
fèrent dans chaque ville et seuls des experts peuvent potent et des Barons qui lui doivent allégeance. Dans
les reconnaître d’une cité à une autre. les faits, cela ne change pas grand-chose à la manière
dont se structure l’organisation dans son ensemble.
Mais pour les plus puissants de ses dirigeants, la dif-
SIGNES DISTINCTIFS férence est de taille : le Prince peut appliquer sa loi à
son bon désir, y compris retirer son titre à un Baron
Les membres en titre de la Cour des Ombres ar- sans avoir à obtenir l’assentiment d’autres Princes.
borent tous un signe reconnaissable par leurs pairs, Ezio est en quelque sorte un monarque absolu ré-
mais savamment dissimulé. Le plus souvent, il s’agira gnant sur le monde criminel d’Armanth. Et il est bien
d’un tatouage plutôt que d’un bijou, parfois d’un type décidé à le rester pour longtemps.
particulier de symbiote graeti. Il n’y a pas de motif
universel, mais chaque Cour des Ombres a son signe Ezio cache avec efficacité son histoire, dont il ré-
distinctif. À Armanth par exemple, celui-ci est un invente les détails chaque fois qu’il la raconte en
petit X surmonté d’un point, tatoué sous la clavicule, produisant ici et là des témoins tous plus ou moins
à l’aine ou sur la nuque. crédibles pour achever de rendre le fil de son récit
flou et difficile à vérifier. Il semble attesté qu’il est
issu d’une famille pauvre en lien avec le milieu du
LE PRINCE D’ARMANTH crime organisé et qu’il a suivi une carrière militaire
quand il était jeune — dans les Elegiatorii, selon
Ezio Le Palagio est l’unique Prince de la Cour des certains. Il aurait connu l’actuel Elegio d’Armanth
Ombres d’Armanth, qui règne donc en maître sur les et certains parmi les proches du Prince confirment
organisations criminelles de la ville. Avant son ascen- d’ailleurs qu’ils se connaissent bien et sont, sinon des
sion deux décennies auparavant, Armanth comptait amis, du moins des alliés réels. Une rumeur tenace
cinq Princes qui se partageaient la cité-État, non sans colporte qu’entre le Prince et le chef de l’exécutif en
de houleuses dissensions. On prétend qu’Ezio les a place à Armanth existerait un pacte qui aurait encore
tous assassinés, les uns après les autres, avec leurs cours, vingt ans après. Ezio aurait reçu de l’aide pour
principaux lieutenants, dans une accession au pou- accéder à sa position, en échange de quoi il aurait
voir fulgurante et sanglante. agi pour endiguer les violences meurtrières des luttes
entre les Princes de la Cour des Ombres d’Armanth
Ezio a dépassé les cinquante ans, mais n’en parait et aidé les autorités à démanteler certains réseaux
que quarante. Sa prise de pouvoir lui a permis de se criminels. Cela aurait permis à l’Elegio d’assurer son
payer un Ambrose, un symbiote de longévité. C’est élection et la légitimité de son emprise sur l’exécutif
un homme grand et sec, aux cheveux mi-longs bou- de la ville.
clés, avec des mèches poivre et sel. D’origine pure-
ment athémaïs, il a le teint mat, les traits taillés à la Assis depuis vingt ans sur un trône qu’il conserve à
serpe et porte un bouc soigné. Il a les yeux bleus, grand renfort de fins calculs, de subtilité et d’absence
un attribut peu commun pour son ethnie. Malgré notoire de scrupules, usant d’alliances et de cadeaux
la fortune et le luxe dont le Prince peut disposer, autant que de chantages et d’assassinats pour conser-
Ezio affectionne étrangement les vêtements simples, ver le contrôle, Ezio ne cache pas qu’il s’agit là de
confortables et pratiques, même s’il n’hésite pas à y sa seule ambition. Mais il n’est pas dupe et sait que
mettre le prix. celui-ci s’effondrera aux premiers signes de faiblesse,
aussi prépare-t-il avec patience et attention sa suc-
Le Prince de la Cour des Ombres d’Armanth est cession. Il compte bien recréer après lui la règle du
avant tout connu par son titre. Peu de gens, hors Haut-prince et des princes d’une Cour des Ombres
du milieu, auraient une chance de le reconnaître unie. Mais il ne se fait aucune illusion : ce plan est
en le croisant. Ce qui arrange bien Ezio, qui peut particulièrement ardu et risqué. Il ne faudrait pas
ainsi régulièrement profiter de sa richesse sans avoir longtemps pour que réapparaissent les guerres de
à faire d’effort particulier pour se cacher. Il reste gangs et les assassinats en masse pour la lutte de
néanmoins prudent : il a une quantité d’ennemis. Les pouvoir. Et même si seuls ses plus proches lieutenants
Princes des petites cités voisines dont il régule par la le savent, le fait est qu’Ezio doit une grande partie
force les activités quand elles concernent Armanth, de son pouvoir à son pacte, toujours respecté malgré
mais aussi certains de ses propres Barons, à qui il quelques troubles avec l’Elegio. Les forces de police
interdit le titre et les privilèges de Prince dans la d’Armanth n’auraient aucune chance d’arrêter effi-
Cour des Ombres. cacement une nouvelle guerre des gangs, mais Ezio
ne se raconte pas d’histoire : l’Elegio enverrait sans
Car Armanth est un cas à part, dans l’organisation aucune hésitation ses Séraphins pour le tuer, lui et
criminelle des Cités-États. Au lieu d’avoir un Haut- sa famille, par simples représailles, si jamais le pacte
prince et des Princes qui se partagent les quartiers de venait à être trahi.

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CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

— Tu ne devrais pas l’encourager à se battre, Jawaad. C’est une femme !


— Et… ?
— Et quoi ? Ce n’est pas la place d’une femme, par les Hauts-Seigneurs ! Tu crois qu’un homme va l’épouser
en apprenant qu’elle se bat comme une chiffonnière dans ses braies ? Et avec son patron ?
Alterma protesta, le menton haut :
— Mais cela ne regarde personne, que je sache, que je m’entraîne avec Jawaad. C’est utile et c’est un très
bon exercice !
Le maître-marchand haussa les épaules en fixant Abba, en guise de réponse. L’esclavagiste grogna un coup
en retour :
— Une femme devrait garder sa place, surtout une érudite et une intellectuelle si brillante. Je vois pas ce que
cela lui apporte de savoir se battre.
Jawaad haussa encore une fois les épaules, allant se chercher une serviette.
— Pas se battre. Se défendre et faire de l’exercice. C’est une bonne partenaire d’entraînement.
— Voilà, exactement, rajouta Alterma. Je ne compte pas devenir une Femme d’épée si c’est ce que vous
craignez, Abba. Mais je ne compte pas non plus me sentir comme un agneau sans défense. Ça ne fait pas de
mal, de savoir se défendre seule !

Les Chants de Loss, Armanth

LES FEMMES D’ÉPÉE


C hez les Lossyans, surtout au sein de la culture gé-
nérale concilienne, on aura compris que chacun
doit garder sa place, aussi injuste soit-elle, mais aussi
Ce sont, pour résumer, de véritables féministes dans
un monde sexiste.

que les individus sont identifiés à une norme sociale.


Cette norme est dictée par les Vertus plus encore que
par les Dogmes de l’Église, et n’est en aucun cas un
PLACE DANS LA SOCIÉTÉ
ordre naturel qui aurait pour excuse des lois biolo- Les Femmes d’épée sont la plupart du temps tenues
giques dont les Lossyans ignorent en général tout. en grand respect : elles sont reconnues et traitées avec
Sur Loss, il n’y a pas plus de « darwinisme social » que égard, même si elles ne sont pas toujours appréciées et
de « loi naturelle immuable ». D’ailleurs, ces considé- qu’on se méfie souvent d’elles. Elles ne sont pas consi-
rations n’intéressent finalement que les débats des dérées comme « femmes » selon l’assertion ordinaire
philosophes, et encore : ces principes vont à l’encontre du terme et tiennent une place et un rôle social bien
même des Vertus, c’est-à-dire le socle de toutes les spécifique, un peu comme le seraient les mercenaires
écoles de pensée philosophiques des Lossyans. et les soldats de carrière, ou encore les marins et les
marchands, c’est-à-dire une confrérie qui reconnaît
Aussi quand un individu ne peut s’adapter à la place ses membres, même sans appartenir au même peuple.
qui lui est dévolue, les Lossyans se demandent alors
comment lui en trouver une, et finalement, celle-ci Les Femmes d’épée sont généralement décrites
finit par se créer et être admise si son utilité et sa comme une communauté informelle de femmes
respectabilité font consensus. C’est par exemple la souvent perçues comme caractérielles, belliqueuses,
manière dont a été réglée l’approche lossyanne de soupe au lait, pour certains un peu dérangées, voire
l’homosexualité et des problèmes de genre (voir «La perdues, mais dont la valeur ne peut être niée. Une
vie quotidienne des Lossyans», page 59). Femme d’épée perd souvent ce titre quand elle est
mariée, bien que ce ne soit pas systématique. Mais on
Le cas des Femmes d’épée est encore plus marquant. considère que dès qu’elle prend époux et donc foyer
Incapables d’accepter la place ô combien frustrante et famille, elle revient vers la place traditionnelle dé-
et peu reluisante qui leur est dévolue dans la société, volue aux femmes. Même si elle reste une femme qui
ce sont des femmes indépendantes et volontaires qui a défié les traditions et les lois, même si ce qu’elle a
ont décidé de défendre leur honneur elles-mêmes et été restera marqué dans toutes ses relations sociales.
tiennent tête aux hommes y compris par la voie des
armes. Elles sont officières militaires, aventurières, Pour une question de représentation, on peut consi-
capitaines-pirates, chef d’entreprise ou maîtresse de dérer que les Femmes d’épées représentent de 1 à 2 %
confrérie d’artisan, voire simplement femmes du pe- de la population féminine dans les cultures conci-
tit peuple ayant appris à se défendre sans hommes. liennes. Pour les cultures non conciliennes, ce serait
Mais elles ont toutes pour point commun le refus environ 15 % des femmes, bien que la parité de ces
de revenir sur leur décision d’être totalement auto- sociétés rend le concept de Femmes d’épées quelque
nome quant à leur place dans la société lossyanne. peu inutile.

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LES FEMMES D’ÉPÉE

COUTUMES ET LOIS service des cités-États sont constitués d’équipages


en grande partie féminins. Les Femmes d’épée ne
Une Femme d’épée est admise et respectée partout, sont pas rares dans l’aristocratie, même si une femme
sauf avec les membres les plus intégristes de la so- indépendante, menant ses affaires seule et pire en-
ciété concilienne, et encore. Elle est souvent armée, core, érudite ou exerçant une profession d’élite, est
et si elle peut faire appel à un Champion, elle sait en toujours déstabilisante.
général défendre son honneur seule, les armes à la
main, et personne ne pourra y redire, contrairement C’est à Ansaren que se trouve la seule académie mi-
à la coutume et aux Dogmes. litaire de l’Étéocle ouverte aux femmes et qui forme
des Femmes d’épées. Elle est même réservée aux
Pratiquement aucune cité-État ou culture n’a légiféré femmes. Tenue par la légendaire Lame d’Argent,
clairement sur les Femmes d’épées, mais certains l’école est unique en son genre dans toutes les Mers
principes coutumiers sont devenus des lois de fait de la Séparation et accueille entre 300 et 400 élèves
quand un magistrat doit se prononcer sur un litige. avec un encadrement d’une centaine de personnes,
Les Femmes d’épée sont reconnues comme ayant les uniquement féminin.
mêmes droits sur ses affaires, ses biens et ses pro-
priétés qu’un homme selon les lois. La seule chose
Dans les Cités-Unies
interdite pour une Femme d’épée est d’être repré-
sentante du pouvoir exécutif ou législatif d’une cité. Les Femmes d’épées ne sont admises que dans les
Une Femme d’épée ne peut jamais, sauf exception, carrières militaires, mais toute une caste d’archères
être chef de cité, diriger les forces armées d’une ville et d’éclaireurs d’élite, les Athi’jai, protectrices des
ou siéger comme tribun. vierges-prêtresses Ar’anthia y existe et y est fort
respectée. Cette caste est d’ailleurs organisée en ca-
À noter que même Femme d’épée, certaines libertés sernes fermées à la vie monacale et mystérieuse.
de mœurs ou vestimentaires des hommes ne leur sont
pas permises. Une Femme d’épée court vêtue, s’af-
Dans le Sud et en Athémaïs
fichant à demi-nue ou dansant ivre morte dans une
taverne risque très gros. C’est dans le sud de l’Étéocle, dans l’Athémaïs et
les Franges que l’on rencontre le plus aisément de
Femmes d’épées dans tous les secteurs. Bien sûr,
En Hégémonie
prétendre qu’elles sont très nombreuses est un peu
Techniquement, les seules Femmes d’épée existantes exagéré, mais elles sont nettement plus courantes que
sont les légionnaires et officières ordinatorii qu’ad- dans toutes les autres sociétés conciliennes.
met l’ordre. Elles doivent garder leur visage masqué,
rester chastes et perdent tout rang et droit si elles Armanth compte deux compagnies mercenaires
décident de se marier pour avoir des enfants. Il leur presque entièrement constituées de Femmes d’épées :
est parfois permis d’adopter. Les plus hauts rangs de les Pisseuses de Feu et la Compagnie d’Ann-gria.
l’Ordinatori leur sont inaccessibles.
Dans les cultures non conciliennes
Dans Gennema
Comme nous l’avons indiqué plus haut, la notion
Les femmes combattantes sont rares, mais les de Femmes d’épées ne s’applique pas vraiment eu
Femmes d’épée sont presque une tradition puisque égard à la parité relative de ces cultures. Mais les
les Hama-kalu et leurs filles célibataires sont consi- plus indépendantes des femmes de ces sociétés y
dérées comme telles. ressemblent clairement et sont très respectées,
quoique vues avec autant de curiosité que dans les
sociétés conciliennes.
Dans l’Hemlaris
La société traditionaliste hemlaris reconnaît diffici-
lement les Femmes d’épées, mais aussi bien comme
combattantes que chefs de famille et d’entreprise,
STRUCTURE ET ORGANISATION
celles qui parviennent à s’imposer sont considérées Les Femmes d’épées ne sont pas plus une organisa-
avec un respect bien supérieur à leur équivalent mas- tion qu’une confrérie formelle et si la solidarité entre
culin. Une unité d’élite de 250 combattantes constitue elles est toujours forte, il n’existe aucune structure
une des deux gardes rapprochées de l’Impératrice et les rassemblant. Il n’est donc guère facile pour une
est surnommée la Légion de Rubis. jeune fille d’être admise et acceptée comme Femme
d’épée. Le fait est que seules celles qui ont eu l’op-
portunité d’avoir des talents et des compétences
En Étéocle
martiales, ou fait preuve d’une assez grande intelli-
Les Femmes d’épées combattantes sont assez répan- gence pour s’assurer d’autres formes d’appuis sans
dues, surtout dans le Sud. Des navires corsaires au y perdre d’autonomie, pourront parvenir à tenir tête

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CHAPITRE 2 : PEUPLES ET CIVILISATIONS

au système patriarcal des Lossyans et parvenir à reconnue comme une des plus grandes artistes de
être reconnues Femmes d’épées. Cela ne va pas sans la cité et les plus riches mécènes d’Armanth la de-
drames parfois mortels, ni sans ruptures familiales mandent. Mais elle est aussi réputée pour son éru-
et ce n’est jamais une décision qui se déroule sans dition, son caractère impétueux, frondeur et indé-
heurts ou dégâts. pendant, son aptitude à se sortir des pires situations
par ses talents oratoires et juridiques et ses frasques
Une solution est souvent de demander l’appui et sentimentales — y compris lesbiennes.
la protection d’une autre Femme d’épée. Mais ces
dernières ne seront jamais tendres avec qui veut le
Lin Sha, la Grande Marchande
devenir, et une jeune fille tentant de gagner ainsi sa
liberté sera traitée sans aucune pitié. Néanmoins, Lin Sha, née dans la plus grande pauvreté et vendue
ce principe de mentorat est courant, et il existe enfant, était destinée à finir sa vie concubine d’un
des troupes et des équipages majoritairement fémi- puissant marchand de l’Hemlaris, au statut à peine
nins, constitués de Femmes d’épées qui se serrent supérieur à celui d’esclave. On raconte beaucoup de
les coudes. légendes sur la manière dont elle a gagné son in-
dépendance, mais une chose est certaine : c’est un
mélange de chance, d’intelligence et d’une immense
FEMMES D’ÉPÉES CONNUES force de caractère, qui lui a permis de survivre à tous
ces drames et de devenir Maîtresse-marchande, un
cas rare au sein de l’Empire. Âgée de près de cent
Erzebeth, capitaine du Défiant ans, Lin Sha règne désormais sur un réseau com-
mercial étendu depuis Hongua jusqu’aux Cités-Unies.
Originaire de l’archipel des Teranchens et œuvrant Elle a vécu deux guerres, survécu à une douzaine
à Mélisaren, dans l’Étéocle, Erzebeth est une ca- d’assassinats et à plusieurs vendettas commerciales,
pitaine-corsaire célèbre pour ses exploits guerriers et est réputée aussi impitoyable qu’opiniâtre. Malgré
et pour son puissant galion lévitant, le Défiant. des scrupules très relatifs quant à ses affaires, mal-
Erzebeth est réputée de l’Étéocle à l’Athémaïs et très heur à qui s’en prend aux femmes qui travaillent
crainte des pirates qui sillonnent les alentours de pour elle !
l’Imareth. Son équipage est sûrement aussi célèbre
qu’elle : il n’est presque exclusivement constitué que
Munsharia au bras d’acier
de femmes recrutées parmi les volontaires qui ne
manquent pas sur les ports. Disciplinées, d’une fidé- Munsharia est la plus célèbre chef de clan des
lité à toute épreuve, elles voient dans cet enrôlement Marches de Gennema. Son clan, surnommé les Bras-
une échappatoire à des époux, des parents ou une Forts, est en quelque sorte le gardien de l’accès aux
famille tyrannique. On y compte même quelques cri- pâturages des marais du sud, où vivent les derniers
minelles ayant commis un meurtre pour se défendre kaerins sauvages. Et si cette femme est si célèbre, ce
de la violence masculine. n’est pas pour son origine plutôt modeste et sans
histoire, mais ses confrontations avec des hommes,
qu’ils soient de son clan ou des voisins, où elle s’est
Imastis l’Éclairée
montrée systématiquement plus rusée, diplomate,
Véritable célébrité à Armanth, Imastis est à tout belliqueuse et guerrière qu’eux. Fait rare, elle monte
point de vue un génie. Originaire d’une famille tra- elle-même un kaerin, un grand mâle reproducteur
ditionaliste de la petite noblesse aristocratique de connu sous le nom de Tempête du Nord. Veuve de
la ville, elle a fui, puis dénoncé un mariage forcé, l’ancien chef du clan, mort lors d’une chasse, et mère
en assurant elle-même sa défense après avoir appris de deux fils, elle s’est entourée de conseillères avisées,
les subtilités juridiques d’Armanth en autodidacte, imposant ses vues modernes et pour tout dire assez
faisant la démonstration d’un sens de la rhétorique innovantes à tout son clan. Même si certains hommes
presque surhumain. Mais elle ne s’est pas arrêtée à ont tenté de l’évincer, Munsharia âgée de près d’un
ce talent et, une fois obtenu gain de cause et nantie siècle, mène toujours les Bras Forts. Elle n’a eu de
d’un généreux dédommagement, elle s’est intéressée cesse d’enrichir et d’agrandir son clan. La plupart des
aux sciences, aux arts et aux techniques, toujours femmes gennemons la voient comme un exemple de
toute seule, se passionnant avant tout pour la sculp- courage et de détermination.
ture et la peinture de fresques. Elle est désormais

160
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CHAPITRE 3 : SCIENCES ET GÉNIES

CHAPITRE 3

SCIENCES ET GÉNIES

L e Da Vinci-punk, c’est la super-technologie


faite de bois et d’engrenages, de tôles de
cuivre et de toiles grossières. Ici, point d’in-
LES GÉNIES DE LOSS
LES TECHNOLOGIES DU LOSS
164
165
terface homme-machine, ni de moteurs à va-
peur ou de grands dirigeables dans un siècle LES MATÉRIAUX 167
de charbon et d’industrie ; mais des navires à LES INNOVATIONS RÉPANDUES 169
voiles, proches des grands galions lévitant dans
les cieux. Pas de télégraphes ou de machines de LES MERVEILLES 171
Babbage, mais des hauts-fourneaux crachant
de l’acier et de grands engins tirant leur force LES NAVIRES LÉVITANTS 173
du vent et de l’eau, dans des ateliers familiaux
éclairés aussi bien à la bougie, qu’à d’artisa- LEURS PERFORMANCES 173
nales lampes à arc.
USAGES ET EXPLOITATION 174
On y sent tout le poids du moyen-âge qui n’est
pas si loin, mais on y voit poindre le progrès LES BÉHÉMOTHS 175
et ses merveilles, mais aussi ses premières hor- LA MÉDECINE LOSSYANNE 177
reurs. On y découvre la physique et la chimie,
on y explore la vie sans encore en comprendre QUELQUES REMÈDES COURANTS 177
la nature ; et la science se confronte aux re-
ligions vivaces qui la craignent et veulent la LES MALADIES 178
brider. C’est un âge de savants ingénieurs et
artistes, expérimentateurs aussi bien qu’ar-
chitectes, où l’on ne distingue pas l’art de la
science, les fusionnant en une seule et unique
pensée visant à appréhender la nature et son
sens, sans séparer l’esthétique de la raison.
Ref. 14778
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CHAPITRE 3 : SCIENCES ET GÉNIES

— Il n’y a donc pas de savants, de scientifiques ?


Yvain éclata de rire :
— Scientifique ? Ce mot n’existe même pas en athémaïs ! Non, non Thin, rien de tout cela. Pour l’esprit los-
syan, il n’y a aucune différence entre les arts, les techniques et les sciences. L’homme de génie ne peut être que
les trois ou rien. On ne peut rechercher les mystères de l’univers sans en comprendre la géométrie et les formes,
sans être initié à leur sens. Les génies le sont donc non pas parce qu’ils sont chercheurs dans un domaine de
pointe, mais parce que leur esprit est conditionné à l’universalisme. Et pour ceux qui n’en sont pas capables, ils
deviennent ingénieurs de terrain, sur les chantiers de construction, les navires et dans les ateliers des artisans.

Les Chants de Loss, Les Ordinatorii.

LES GÉNIES DE LOSS


L e monde de Loss est rempli de merveilles et
d’inventions prodigieuses qui, si elles nous pa-
raissent désuètes, n’en restent pas moins des prodiges
que leur protégé et client soit aussi doué en peinture,
qu’en chimie ou en géologie. C’est ce qui différen-
cie les ingénieurs lossyans, qui ne pourront pas être
pour la société lossyanne. Ces technologies sont is- experts de plus d’un ou deux domaines, des génies.
sues de l’inventivité des génies, artisans et savants des D’autre part, cela explique pourquoi il faut prévoir un
différentes cultures des Mers de la Séparation qui, pont d’or pour embaucher un génie reconnu.
depuis environ un siècle, connaissent une explosion
de créativité aussi bien artistique que technique.
La formation des Génies
Mais le monde de Loss doit aussi ses merveilles à Les carrières en ingénierie sont rarement héritées
deux phénomènes qui ont nourri cette innovation : des parents aux enfants. C’est le futur maître du can-
les artefacts des Anciens, d’une part, et d’autre part, didat qui décide s’il accepte de le prendre comme
les savoirs des Terriens Perdus. Ces deux sources disciple, même si ces parents peuvent payer sa for-
ont grandement contribué aux plus étonnantes des mation — le maître prendra l’élève médiocre pour
découvertes et des inventions des génies de Loss, le former comme assistant en laissant les parents
donnant naissance à leur civilisation Da Vinci-punk. espérer. Les élèves sont âgés de dix à treize ans quand
commence la formation. Celle-ci dure une dizaine
d’années, souvent en université. Les apprentis vivent
DÉFINITION LOSSYANNE DU GÉNIE et travaillent au service de leur maître qui les forme
aux arts et techniques, selon ses propres spécialités
Au XXIe siècle, la culture universitaire différencie sa- et connaissances.
vants, chercheurs, théoriciens, expérimentateurs de
terrain, artistes créateurs, et ingénieurs. Ce n’était Pour ceux des élèves montrant des dispositions à
pas du tout le cas à la Renaissance et le concept de devenir génies, la formation est très dense et large et
spécialisation et de compartimentation entre arts, englobe la peinture, la sculpture, l’architecture, l’in-
savoirs et techniques est récent. De même, sur Loss, génierie civile, l’électricité, la mécanique, l’hydrau-
ces trois principes sont intimement liés et l’art se lique, la science des matériaux, la chimie, l’anatomie,
confond avec les techniques, les sciences et les savoirs l’optique, voire de la zoologie, de la botanique et un
les plus théoriques. Un génie lossyan en maîtrise tous peu de physique fondamentale. Chacun de ces talents
les aspects, même s’il est issu d’une formation en est mis à contribution et appris sur le terrain, autant
ingénierie (voir le chapitre L’éducation et le travail, qu’à travers des cours magistraux et une mémori-
page 67). sation de monceaux de livres. Le disciple participe
aux travaux, expériences et projets du maître avec les
Un génie se définit comme un polymathe, un individu autres élèves et apprend donc aussi bien sur le tas
expert dans des champs nombreux et différents, ainsi qu’à travers livres et documents.
que l’étaient des gens comme Pythagore, Démocrite,
Averroès, Isaac Newton, Benjamin Franklin, Michel- À l’âge de vingt à vingt-deux ans en moyenne, le
Ange, John Von Neumann et le plus célèbre de tous : génie est formé. À ce stade, bien souvent, il a déjà
Léonard de Vinci. Le génie lossyan est formé à de ses premiers clients et ses premiers chantiers. La plu-
nombreux domaines des sciences et des arts et va part des génies travaillent comme ingénieurs civils,
les mettre à contribution toute sa vie durant. Le plus industriels, navals, ou militaires. Une minorité se
souvent, un génie est connu et recherché pour un ou consacre principalement à la peinture et à la sculp-
deux domaines de prédilection. Mais dans les faits, ture, et enfin, les meilleurs d’entre eux deviennent
les clients et mécènes des génies recherchent un inventeurs et créateurs, capables de prendre tout type
maître de tous les arts et sciences et s’attendent à ce de commande. Quand un génie réalise son premier

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LES GÉNIES DE LOSS

chef-d’œuvre reconnu par ses pairs, il est considéré d’idées révolutionnaires dans les domaines scienti-
à son tour comme maître et peut avoir des élèves. fiques et techniques. Or de telles transmissions, bien
que pouvant se produire, n’ont rien d’évidentes.
Les génies dans la société
Les Terriens Perdus sur Loss n’ont guère le beau rôle.
Comme on s’en doute, les génies sont très recher- Dans leur immense majorité, ceux que l’on trouve
chés, d’autant qu’une grande partie de l’industrie sont de jeunes femmes citadines apparaissant près
lossyanne dépend de leurs savoirs. Il existe des artisans de centres urbains, et les Lossyans ont tôt fait de les
ingénieurs et mécaniciens spécialisés qui leur font asservir. Leur statut, leur condition et les barrières
concurrence, surtout dans le domaine naval et mili- linguistiques n’aident pas tellement à l’échange de
taire, mais ceux-ci sont cantonnés à une seule tech- connaissances.
nique, le plus souvent apprise sans aucune formation
académique. Par exemple, les opticiens et micromé- Dans la plus grande majorité des cas, ce que savent ces
caniciens sont très rares. Ce sont le plus souvent des Terriens se perd un peu devant leur principale préoc-
génies, capables donc aussi bien de faire de l’hor- cupation : s’adapter et survivre à un univers étranger,
logerie que de tracer des plans de fortifications, ou hostile et dangereux. Sans compter que l’Église in-
de peindre un plafond ornementé. Les confréries où siste sur le danger de ces connaissances étrangères et
se regroupent les génies — souvent dépendantes de contraires aux Dogmes du Concile et que, la plupart
grandes guildes marchandes — protègent sévèrement des terriens étant esclaves, on ne prête guère crédit à
ces professions et leurs membres. Il arrive même qu’il leurs propos. Pourtant certains Terriens parviennent
soit interdit à tout type de génie d’exercer sa pro- à se sortir plutôt bien de cette situation peu enviable.
fession sans être membre de la confrérie locale. Le
mécénat de la part de grandes fortunes laïques, reli- Ainsi, même si ces apports sont rares, ils existent.
gieuses ou aristocratiques y est fréquent. Il y a des sociétés secrètes et des organisations qui
compilent du mieux possible le savoir des Terriens
Et bien sûr, les génies sont rémunérés fort cher. Les Perdus. La chimie moderne comme le tableau pério-
plus célèbres d’entre eux sont courtisés par tous dique des éléments font partie des savoirs méconnus
les moyens possibles, quitte à leur offrir en plus de que certains tentent de rassembler, le plus souvent
l’or des avantages en nature parfois extravagants. de manière cachée afin d’éviter d’attirer l’oreille de
Certains mécènes pourraient parfaitement imaginer l’inquisition de l’Église.
payer leur poids en or pour débaucher le plus grand
génie du moment. Et d’autres envisagent sans hésiter La plus connue des innovations issues des Terriens
de l’enlever. C’est ainsi que par exemple, à Armanth, Perdus, après la chirurgie et les principes de l’hy-
des règlements civils de la Guilde des Marchands giène médicale, est incontestablement le travail du
encadrent les salaires et cadeaux que l’on peut offrir à titane. Le raffinage du titane est un procédé physi-
un génie, afin de limiter au plus possible la « fuite des co-chimique d’une rare complexité, quasi impossible
cerveaux ». Dans quelques cas, les plus prestigieux à réussir sans de solides connaissances en électri-
d’entre eux n’ont pas le droit de quitter la cité-État et cité et en chimie poussée, et clairement d’origine
son territoire sous peine d’être accusés de trahison ! Terrienne.

Peu d’apports en électricité venus des Terriens ont


LES TECHNOLOGIES DU LOSS percé jusqu’ici, tout comme des connaissances en
aéronautique. Les Lossyans en sont encore à tester
Les possibilités et propriétés du loss-métal sont abor- les planeurs et les premiers moteurs à hélices sont
dées dans le chapitre Le loss-métal, page 31. au stade de prototype. Une invention à coup sûr ter-
rienne est le gramophone, une technologie qui reste
balbutiante mais se répand très vite en même temps
L’apport des Terriens perdus au génie lossyan
que l’électromécanique miniaturisée.
Une question qui se pose dès qu’on se penche sur
certaines particularités du monde de Loss, c’est : Et concernant les explosifs et les armes à feu ? En
qu’est-ce que les Terriens Perdus ont apporté à la fait, les Lossyans connaissent ces principes, mais en
technologie et aux innovations lossyannes ? usent avec crainte et scrupules : ils ont peur de tout
ce qui explose, une peur renforcée par l’instabilité et
Il paraît évident que l’écart d’évolution entre la so- la dangerosité de ces armes pour qui ne sait pas bien
ciété lossyanne et celle des Terriens est franchement les manier. La conception et l’usage d’explosifs sont
marqué : d’un côté une civilisation qui est arrivée à en théorie réservés à l’Église et interdits aux autres
un niveau technologique comparable à celui du XVIIe — même si tout navire armé digne de ce nom a au
siècle, et l’autre qui a dépassé l’âge atomique pour moins un tonneau incendiaire dans son arsenal. Les
entrer dans l’âge de l’information. On s’attendrait armes à impulsion restent nettement plus sûres et
donc à ce que les Terriens Perdus arrivés sur Loss d’une efficacité suffisante pour n’avoir laissé aucune
apportent à cette planète une quantité incroyable place à une technologie concurrente et balbutiante.

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CHAPITRE 3 : SCIENCES ET GÉNIES

Par contre, en ingénierie civile et dans les mines, la (treize rien que sur l’hémisphère nord). Cela ne rend
poudre noire est souvent employée, un marché qui pas les choses faciles. Tout ce qui est électronique
fait la joie des négociants de l’Église. La plupart des grille très vite. Et l’emploi d’ondes radio et autres
ingénieurs artificiers en étaient autrefois membres, systèmes à distance fonctionnant sur les ondes élec-
mais ces dernières années, à Armanth comme dans tromagnétiques est très aléatoire. Quant à la trans-
l’Hemlaris, beaucoup de monde a été surpris de voir mission d’ondes par câbles, pour le moment, si cela
apparaître les tout premiers feux d’artifice laïques et existe dans les laboratoires et les projets des génies,
quelques usages civils sur des chantiers, fruit du tra- l’idée même de mettre au point un système de télé-
vail de nouveaux ingénieurs civils qui osent braver la graphe reste hypothétique.
peur et les interdits.
Les dérivés et exploitations des hydrocarbures ne
sont pas non plus à portée des Lossyans. Il n’y a
Ce qui n’existe ou ne fonctionne pas sur Loss
pas de pétrole accessible sur Loss. S’il existe une
Loss n’est pas la Terre, mais les lois physiques dans forme de kérogène hautement inflammable utili-
tous les domaines y sont tout à fait comparables : la sé par les Dragensmanns, le sang-de-feu, il n’y a,
physique fonctionne toujours de la même manière, hors des Neiges-Dragon, pas le moindre lieu où du
partout dans l’univers. pétrole affleure en surface. En trouver des réserves
accessibles serait une gageure, ce qui interdit pour
Il existe cependant deux exceptions de taille : la le moment aux Lossyans l’exploitation du moindre
transmission d’ondes électromagnétiques dans l’air dérivé pétrolifère, carburant et plastique en premier
dans le monde de Loss est particulièrement problé- lieu. Pour faire simple : ils en ignorent l’existence
matique et, comme les champs magnétiques de Loss en tant que telle. Il y a des gisements de charbon
sont très puissants et assez capricieux, l’électronique (houille et anthracite), mais ceux-ci ont des rende-
y est inadaptée au possible. ments assez faibles. Les Lossyans savent en tirer du
coke, des boules de charbon traitées, employées dans
Même si elle en est assez éloignée, Loss est en orbite le chauffage domestique et dans les fourneaux ; c’est
autour d’Ortentia, une géante gazeuse qui génère un d’ailleurs une découverte dragensmann désormais
champ magnétique colossal, provoquant des fluctua- répandue. Mais c’est un produit qui reste assez peu
tions constantes qui affectent toutes les planètes dans commun, largement moins que sur Terre et dont les
son sillage. Celles-ci viennent s’ajouter aux pertur- Lossyans se méfient : mal utilisé, le coke libère en se
bations propres à Loss, dues à la présence de son consumant du monoxyde de carbone et peut tuer
étrange métal et des pôles magnétiques multiples silencieusement toute une maisonnée.
Ref. 14778
TECHNOLOGIES ET MERVEILLES

Lisa y avait pourtant reconnu avec surprise des choses qui lui étaient plutôt familières : un véritable gra-
mophone doté de pièces et d’ornementations dont elle ne saisissait pas la raison d’être et un globe terrestre, ou
plus exactement lossyan, tracé de latitudes et longitudes, mais dont la majeure partie n’était qu’esquissée et qui
portait ici et là la mention en larges lettres « terres inconnues ». Elle avait aussi reconnu un petit poêle à charbon
à air pulsé, doté d’isolants thermiques pour conserver la chaleur, surprenant d’une ingéniosité qui lui paraissait
bien moderne pour cette civilisation à ses yeux arriérée et barbare. Il y avait encore d’autres instruments plus
discrets, posés sur le bureau : des compas, une loupe, une règle à calcul, un porte-mine et ce qui ressemblait à
du vrai papier blanc ou encore un astrolabe. Et bien sûr, il se trouvait une lampe de chevet à ampoule à filament
et dynamo de loss. Dans la plupart des cas, elle aurait été incapable de savoir se servir de tous ces objets dont
les plus modernes avaient au bas mot un siècle de retard sur son propre monde. Il avait même été nécessaire
qu’Azur lui montre comment allumer et éteindre les lanternes à alcool qui éclairaient la cabine la nuit venue.

Les Chants de Loss, Mélisaren

TECHNOLOGIES ET MERVEILLES

P etit tour d’horizon, essentiel et loin d’être ex-


haustif, de ce qui existe comme matériaux, in-
ventions, technologies et merveilles accessibles sur
temps, ils sont destinés aux vêtements et accessoires
utilitaires et pour l’imperméabilisation. Mais on les
emploie aussi pour des renforts et pièces flexibles
le monde de Loss. Si nous précisons que la liste est de vêtements très ajustés, des corsets aux vestes.
loin d’être complète, c’est parce que les savants fous On commence aussi à s’en servir pour des joints
et les génies créatifs abondent dans les Mers de la et tubes imperméables, mais le latex se corrode et
Séparation et que quoi qu’on puisse imaginer, il y devient poreux avec le temps, exigeant un entretien
a sans doute quelque part quelqu’un qui essaye de compliqué et onéreux.
l’inventer et le mettre au point. Même les folies les
plus noires de Frankenstein et de ses recherches sur la
Le ciment et le béton
vie ne sont pas impossibles à croiser au détour d’un
manoir perdu où un homme s’est enfermé dans ses Les ciments et les bétons sont très employés dans les
travaux. Pareillement, les recherches sur l’alchimie, bâtiments en dur. Le béton est cher à fabriquer et
la transmutation, la transmission de l’énergie par chaque génie en connaît une recette dont la compo-
la lumière ou des câbles, l’étude des forces les plus sition varie, conservée comme un secret industriel. Il
fondamentales existent forcément. Et nul ne serait est répandu, même si la plupart des maisons utilisent
surpris qu’il existe un équivalent lossyan au génie de de simples mortiers plus ou moins sommaires réalisés
Tesla et de ses merveilles. à partir de matières premières locales. Le ciment,
quant à lui, demande de véritables connaissances en
Bref, tout est possible, dans les limites de la physique : chimie et un processus de fabrication rigoureux. Le
il n’y a aucune magie sur Loss et même si certains béton armé (de bois et de fer) est connu mais son
pouvoirs s’y apparentent et si les superstitions et usage onéreux est limité.
Légendes y sont puissantes, les lois de l’univers rap-
pellent qu’on ne peut les ignorer et que tenter de les
Le ciment de résine
violer a forcément toujours un prix.
Invention très récente venue des génies des chan-
tiers navals d’Armanth, il semble qu’à l’origine ce
LES MATÉRIAUX soit un matériau employé depuis très longtemps
par les San’eshe. La technique de préparation a été
En général, on trouve sur Loss à peu près les mêmes vendue par la suite à d’autres cités-États ce qui a
matériaux que sur Terre. Mais d’une part, la tech- valu quelques retentissants procès dans la cité des
nologie a quelques traits caractéristiques et emploie Maîtres-marchands. C’est un composé basé sur une
quelques inventions auxquelles on ne penserait pas, résine végétale d’une résistance qui s’approche de
et d’autre part, il y a quelques matériaux tout à fait celle de l’acier et qui est aussi léger que l’aluminium.
uniques à la planète, que les Lossyans ont appris Il est compliqué à manier, mouler et produire. On
à exploiter. s’en sert pour les pièces mobiles de marine, car il est
trop cher pour faire de grandes structures ; mais la
technique évolue rapidement et se répand. La résine
Les latex
est issue d’un arbre, l’ealta, qu’on commence à peine
Les Lossyans ont appris à extraire de leur foison- à acclimater ; on l’exploite encore dans les jungles
nante nature plusieurs latex employés dans l’indus- san’eshes. Le ciment de résine est aussi employé pour
trie, mais aussi dans la confection. La plupart du les structures d’arcs à poulie et d’arbalètes, pour des

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CHAPITRE 3 : SCIENCES ET GÉNIES

instruments de musique et même pour des acces- de gisements réellement productifs, dont les deux
soires de mode. principaux sont sur le territoire de l’Hégémonie. Son
extraction est difficile, son raffinage compliqué, son
usinage ardu. Il vaut à poids égal plus cher que l’or et
Le linotorci
n’a que peu d’usages. En premier lieu, on en fait des
Le linotorci est un matériau composite très ancien, armes, les lames ardentes, basées sur une technologie
mais perfectionné au fil des siècles. Il s’agit de complexe qui emploie des dynamos à loss intégrées
couches savamment encollées de lin, de soie ou en- pour faire fortement chauffer le métal. Les lames ar-
core de tussah (soie d’araignée) entre deux épaisseurs dentes brûlent et découpent ainsi tout ce qu’elles
de cuir. Le résultat est une matière légère, souple et touchent avec une redoutable efficacité, mais seules
capable d’encaisser flèches, traits et balles. C’est si les unités d’élite ordinatorii en sont pourvues. On en
efficace qu’il est courant non seulement d’en voir des fait aussi des armes et armures classiques bien que
armures, éventuellement renforcées d’une fine couche leur prix soit prohibitif. Les armures de titane et li-
d’acier et d’émail, mais aussi des boucliers, parfois notorci font partie de l’élite des armures de tout Loss
de très grandes tailles, comme ceux des légionnaires et dans ce domaine, ce sont les artisans de l’Hemlaris
ou des servants d’artillerie de marine. qui sont les plus avancés.

Le titane est inaltérable, léger et résistant et sup-


Les aciers
porte de très hautes températures, en plus d’avoir
L’acier peut être produit dans le monde de Loss de nombre de qualités comme catalyseur chimique. Il
manière industrielle, grâce à des hauts-fourneaux. est aussi connu pour sa biocompatibilité, qui permet
Il peut aussi être usiné et sa qualité et sa dureté certaines facilités en chirurgie, pour des fractures
dépendent des connaissances en chimie des ma- et des prothèses, même si rares sont les médecins à
tériaux. Le meilleur acier de tout Loss reste celui oser en user.
des Dragensmanns, particulièrement prisé par les
artisans de l’Hemlaris pour la forge de lames da-
Le béryl
masquinées. Les aciers industriels sont aisés à pro-
duire, mais considérés de qualité médiocre. Celle-ci Le béryl est un matériau employé depuis très long-
est suffisante pour fournir du matériel militaire et temps par les sociétés les plus primitives de Loss,
industriel, mais reste boudée par les artisans d’élite. mais dont les propriétés lui ont valu d’être adopté
L’acier reste cependant onéreux, même si l’on fait désormais par pratiquement tout le monde. C’est un
systématiquement appel à lui pour tout équipement cristal translucide et laiteux, allant du blanc au rouge
que l’on souhaite solide. Il est encore rare de trouver profond en passant par différentes nuances de bleu et
des artisans pouvant usiner ou boulonner l’acier en de vert, qui est relativement courant. Les gisements
mécanique de précision et les machines industrielles accessibles sont souvent à l’air libre, en grande quan-
sont le plus souvent faites de bois, de cordes, de tité. Il est très dur, résistant et peut être usiné par
cuivre et de bronze. taille et polissage. Quelques essais ont eu lieu pour
tenter de l’exploiter en verrerie et cristallerie, mais il
perd ses propriétés de dureté et de résistance quand
Le platine
il est trop chauffé. Par contre, travaillé par polissage,
En plus du bronze, de l’or et de l’argent, les il permet de créer des lames solides et tranchantes,
Lossyans connaissent le platine, qu’ils surnomment dont le fil ne s’use pas. C’est un matériau prisé pour
vrai-argent. Les gisements sont très souvent sur des pointes de flèches, des dagues et têtes de haches
les mêmes sites que les gisements de minerai de et un outil très précieux pour toutes les professions
loss-métal. Il est fréquent qu’une mine de nickel qui ont besoin de lames tranchantes et pérennes.
ou d’argent exploite aussi du platine. Malgré ses Les scalpels et instruments de découpe en chirurgie
qualités physiques et son inaltérabilité, le platine sont pratiquement tous en béryl et l’on en retrouve
n’est pas plus cher que l’or. Il est plus recherché dans le travail du cuir, la confection et la cordellerie.
que l’argent parce qu’il ne se ternit pas quoiqu’il Très résistant aux acides et bien moins fragile que le
arrive sauf avec quelques acides, mais il est bien verre, le béryl est aussi employé comme contenant en
plus difficile à travailler. Le loss-métal a une densité chimie et en médecine. Enfin, c’est une pierre orne-
supérieure à celle du platine, il est donc facile de mentale prisée, peu onéreuse, mais qui peut être aussi
trier les différents minerais. Le platine est avant tout bien taillée en facettes que polie en perles.
employé en bijouterie et en horlogerie, mais certains
physiciens ont découvert ses propriétés de catalyse
Le loss-cristal
chimique et de haute résistance à la chaleur.
Le loss-cristal est pour la plupart des Lossyans
une sorte de légende et, pour les chercheurs et les
Le titane
génies qui parviennent à s’en procurer, un mystère.
Les origines du titane viennent d’Anqimenès ; c’est Personne ne sait comment il a pu être produit, per-
un métal rare ; on ne connaît qu’une demi-douzaine sonne ne comprend vraiment ses propriétés et, fina-

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Ref. 14778
LES TECHNOLOGIES ET MERVEILLES

lement, presque personne ne sait à quoi cela pouvait


Le moteur à lévitation
vraiment servir pour les Anciens. Le loss-cristal ne Les moteurs à lévitation sont employés pour les na-
se trouve que dans les ruines et cités enfouies des vires lévitants et les engins de levage sur de gros
Anciens ; c’est en soi un artefact, recherché des col- chantiers. Ils sont onéreux, complexes, et demandent
lectionneurs tandis que nombre de savants tentent la maintenance et l’expertise d’un ingénieur. Les plus
d’en percer les secrets. Il n’a cependant que deux efficaces emploient des moteurs électromécaniques
usages connus. D’abord l’ornementation, car taillé ou et des dynamos à loss pour optimiser leur poussée
en éclats, il diffracte la lumière avec plus de brillant, et leur capacité de lévitation. Plus ils sont gros et
de couleurs et de reflets que le diamant. Ensuite la puissants, plus ces moteurs chauffent, c’est pour cela
fabrication de lames, car des épées ont été taillées que les moteurs des plus grands galions et des béhé-
dans cette matière, dont les légendaires sabres du moths sont refroidis à l’eau. À noter qu’il est possible
Champion du Trône de Rubis, qu’on dit capables de de créer une poussée avec un moteur à lévitation
trancher l’acier. Le loss-cristal est un supraconduc- et donc avancer sans l’aide du vent ou d’une autre
teur à température ambiante. Il est proprement insen- force motrice. Mais cet usage est très gourmand en
sible à la chaleur, sa dureté s’approche de celle du loss-métal et très peu répandu.
diamant et sa résistance dépasse largement celle de
l’acier, alors même qu’il ne pèse pas plus lourd que
La dynamo et les moteurs à Loss
le titane. Il a souvent, à première vue, l’apparence du
loss-métal et ne diffère que par sa masse. On peut le En se servant de la faculté de répulsion du loss-métal,
tailler et le polir, quoiqu’avec grande difficulté, et en capable de créer du mouvement, on fabrique une
faire des joyaux particulièrement décoratifs à l’éclat machine dynamoélectrique qui produit du courant
inimitable. À noter qu’il entre, comme le loss-métal, continu. Le même système permet de concevoir des
en résonnance avec les Chanteurs de Loss, à la dif- moteurs électromécaniques capables d’entraîner
férence qu’il ne se corrode pas. On ignore s’il a les une rotation qui peut être convertie en tout un tas
autres propriétés du loss-métal, mais des rumeurs d’autres mouvements mécaniques. Il y a deux limites
racontent que l’expérience de faire fonctionner un à cette technologie ; d’abord, plus une dynamo est
moteur à lévitation avec du loss-métal aurait donné grande, plus elle emploie de loss-métal et ensuite
des résultats incroyables — on parle d’un vrai vais- plus elle chauffe, plus le refroidissement peut s’avérer
seau qui aurait pu voler dans les cieux. compliqué. De plus, ces machines demandent l’as-
sistance constante de spécialistes. Et, bien entendu,
le loss-métal a un coût qui fait préférer l’usage de la
LES INNOVATIONS RÉPANDUES force hydraulique, éolienne, ou animale. C’est donc
un luxe d’employer ces machines à grande échelle.
Ce qui suit décrit les technologies courantes dans
le monde de Loss. En général, on est plus ou moins
La lampe à Loss
assuré de les rencontrer fréquemment, bien que ce
ne soit pas toujours à la portée de tout le monde. Avec une petite dynamo à Loss, on peut concevoir
Certaines machines et innovations sont tout simple- une lampe à arc dont l’ampoule emploie le principe
ment très coûteuses à produire et donc assez rares. de l’incandescence. Mais la réalisation des ampoules,
qui emploient un filament de platine, est compliquée
et celles-ci sont fragiles. Ces lampes sont un luxe
Les armes à impulsion
souvent considéré tapageur, sauf en voyage ou en
Les armes à impulsions sont des pistolets, fusils et mer. On s’éclaire majoritairement à la bougie, au feu
canons, le plus souvent à un coup, employant deux et aux lampes à huile.
petits percuteurs de loss-métal et un système méca-
nique à ressort qui les pousse l’un contre l’autre. Le
Le four à Loss
phénomène puissant de répulsion de pôles de même
polarité du loss-métal permet alors de projeter une Le four à loss est un four électrique employant une
bille de fer ou de cuivre avec une grande vélocité. résistance de cuivre ou de bronze et des isolants ther-
C’est une arme efficace, qui se compare aisément miques de céramique et terre cuite). Ces fours sont
aux fusils et canons à poudre noire ; cependant, elle rares, c’est un luxe assez dispendieux pour les parti-
surchauffe vite. Un pistolet peut tuer à trente mètres, culiers. Ils sont cependant très prisés en chimie et en
un bon fusil à cent et les meilleurs canons ont une métallurgie où un contrôle précis d’une température
portée supérieure à 500 mètres. Il existe des modèles stable et élevée est recherché.
à plusieurs tirs, à culasse et semi-automatique ou
à plusieurs canons rotatifs, mais ceux-ci sont rares
La lunette astronomique
et du domaine du prototype de génie. À noter que
trempé ou même plongé dans l’eau, un impulseur L’optique dans le monde de Loss commence à prendre
peut toujours tirer. L’eau est d’ailleurs un excellent un certain essor et les lunettes astronomiques se ré-
moyen de refroidir cette arme et augmenter sa ca- pandent de plus chez les savants comme chez les
dence de tir. curieux et les riches dilettantes. Ces lunettes sont

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CHAPITRE 3 : SCIENCES ET GÉNIES

assez anciennes mais le système n’a évolué que len- spectateurs. Mais la conception d’un piano est un
tement jusqu’aux dernières décennies, avec les pre- art difficile et l’on ne compte qu’une dizaine d’ate-
mières tentatives de réglage de focale. La longue-vue liers d’artisans et ingénieurs, à Armanth, à savoir les
ou lunette de bord est nettement plus répandue et concevoir. Leur prix est particulièrement élevé et ils
on peut pratiquement l’acheter partout. L’usage de restent peu répandus.
la lunette astronomique n’est pas toujours bien vu de
l’Église qui n’apprécie guère les études sur les astres
La machine à compter
et le mouvement des corps célestes.
Exécuter des calculs complexes est plus important
que mesurer le temps pour les Lossyans. Ce qui dans
Les bésicles
la plupart des cas se résume au boulier, aux règles
Les lunettes permettent de compenser certaines dé- à calcul et au calcul mental. Mais les « machines à
ficiences de la vue. C’est une vieille invention, mais compter » sont apparues, venues de Cymiad : des
qui n’a vraiment commencé à progresser efficace- calculateurs mécaniques, monstres d’engrenages
ment que dans ces dernières décennies pour passer dont il existe nombre de variantes. Les dernières
d’un gadget anecdotique à un outil prisé, recherché sont capables de tabuler leurs résultats, permettant
et répandu. Cela reste tout de même une technique littéralement de tirer des lignes de calcul et de les
complexe qui demande de grandes compétences imprimer sur papier. Toutes d’un prix exorbitant,
d’optique. Les versions les plus simples sont assez elles n’en sont pas moins très recherchées et d’une
courantes, mais les bésicles parfaitement adaptées immense utilité pour les mathématiciens, les ingé-
à la vue d’un client peuvent parfois atteindre des nieurs et les comptables. L’une des plus puissantes
prix astronomiques. machines à compter, la Machine de Jhaabi, appar-
tient au Conseil des Pairs et sert uniquement à cal-
culer et préciser les tables nautiques de la marine
Le microscope
d’Armanth.
Le microscope est une innovation récente et pas en-
cor très performante. Mais l’influence de plusieurs
La seringue
génies et médecins a fait se répandre cette invention
comme une traînée de poudre partout dans le sud de L’usage moderne du béryl et les progrès médicaux
l’Étéocle et dans l’Athémaïs ; les progrès du micros- ont permis de créer des aiguilles, seringues, cathé-
cope sont bien plus rapides que ceux de la lunette ters et autres instruments de perfusion efficaces. Peu
astronomique. Le grossissement est pour le moment de médecins ont cependant aisément accès à ces
suffisant pour parvenir à étudier des amas de cellules instruments. Ils sont plutôt chers, les ingénieurs et
et des échantillons biologiques et il a déjà une utilité artisans capables d’en produire ne peuvent fournir
remarquable dans le domaine de l’étude biologique que des petites quantités, mais cette technique et
et de la médecine. Mais il reste fragile, rare et cher son usage se répandent.
et ne sort pas des laboratoires.
La presse à imprimer
L’horloge mécanique et la montre à gousset
Le papier existe sur Loss depuis longtemps. Sa
La mesure du temps à l’échelle du jour n’est guère composition diffère selon les traditions et les inno-
une chose importante pour les Lossyans. Ce n’est vations, mais il est pratiquement toujours basé sur
pas une société très productiviste, la mesure du l’emploi de chiffons, de pâte de bois et de cotons.
temps n’a d’intérêt que pour certains secteurs limi- L’imprimerie est ancienne dans sa technique la plus
tés, comme le travail en laboratoire ou à bord des élémentaire, la xylogravure. Mais les dernières dé-
navires : c’est elle qui permet de calculer et tenir des cennies ont vu l’essor de la presse à imprimer à
caps, mais aussi mesurer le temps restant d’épui- caractères mobiles en métal, donnant naissance à
sement du carburant de loss-métal. Les horloges la typographie. La fabrication des encres d’impri-
mécaniques ont été adoptées par toutes les marines merie, des caractères et des presses est tout un art
qui ont les moyens de se payer ces appareillages et un secteur réservé et recherché. C’est d’ailleurs
d’art complexe. Les montres à gousset sont bien une véritable révolution culturelle : grâce à la presse
plus rares ; c’est un luxe qui n’est accessible qu’aux à imprimer, on peut estimer qu’il s’imprime pour
Lossyans les plus riches. Armanth, et ce depuis un siècle, presque un de-
mi-million de livres par an, sans compter les jour-
naux et les feuilles de chou vendus dans la rue.
Le piano
Le livre est devenu un outil commun et répandu,
Le piano existe, comme le clavecin qu’il détrône et Armanth compte largement plus d’une centaine
rapidement et ces deux instruments particulière- d’ateliers d’imprimerie. Dans toute l’Hégémonie et
ment ingénieux ont fait leur place en musique. Les une partie des régions où l’Église est la plus in-
premiers concerts de pianos remportent de francs fluente, les ateliers d’imprimerie et libraires sont
succès et attirent beaucoup de mélomanes et de sous son autorité.

170
Ref. 14778
LES TECHNOLOGIES ET MERVEILLES

LES MERVEILLES mais les plus connus à Armanth sont les gardiens des
Archives du Palais de l’Elegio.
Les objets qui suivent sont quelques exemples des
merveilles lossyannes. Il existe d’autres machines et
inventions étonnantes qui seront dévoilées au fil des « Le nouvel arrivant leva la main, pour saluer,
suppléments et articles sur Loss. Certains de ces ob- mais n’eut pas le temps de finir son geste ; le
jets sont réellement considérés par leur rareté et leur silence qui régnait dans la vaste bibliothèque fut
prix comme des artefacts. Leur valeur et leur dispo- rompu par les sons grinçants d’une mécanique
nibilité sont pour certains abordées dans le Livre 2 menaçante se mettant brutalement en mouvement.
Les Lois de Loss au chapitre Équipement, page 170. Colossal, en quittant l’ombre de la colonne où
il patientait sans bruit, l’automate gardien se re-
dressa en déployant ses bras. Au sommet de son
L’automate
corps humanoïde et épais, constitué de tôle de fer
L’automate est un appareil visant à imiter la vie, et de cuivre, sa tête aux yeux ronds, qui culminait
renfermant divers dispositifs mécaniques complexes à près de trois mètres, se figea sur Landri, faisant
utilisant des moteurs électromécaniques et des dy- jouer d’invisibles mécanismes feutrés au bruit in-
namos à Loss pour s’animer. Le comportement de sectoïde, tandis que les focales de ses lentilles de
ces automates peut être figé (le système fait toujours verre semblaient percer la pénombre pour identi-
la même chose) ou bien il peut s’adapter, bien que fier l’intrus devant qui il faisait barrage. »
sommairement, à sa mission, aux ordres reçus et aux
changements son environnement, s’apparentant alors Tome 3 : Les Forêts d’Arcis.
à un véritable robot autonome. L’automate est en gé-
néral une sorte de statue ou de poupées animée ser-
vant de décoration et d’objet de prestige. Cependant, Le gramophone
des génies lossyans étudiant les Artefacts des Anciens
ont trouvé comment adapter, recycler et exploiter les Le gramophone est un appareil permettant de jouer
restes des gardiens robotiques de ces ruines mysté- un morceau de musique enregistré sur un disque pho-
rieuses pour créer ces merveilles autonomes, parfois nographique. Il est constitué d’un plateau tournant
intelligentes. Les automates autonomes sont rares, sur lequel est déposé le disque à sillons en métal (ou
Ref. 14778
CHAPITRE 3 : SCIENCES ET GÉNIES

plus communément en cire), qui est mis en rotation présentant le monde de Loss. Ce type de sphère sert
au moyen d’une manivelle, ou d’un moteur à Loss à déterminer les coordonnées célestes des astres et le
pour les plus perfectionnés. Le gramophone est com- mouvement précis des planètes, ce qui n’est guère du
plexe : rares sont les artisans et génies capables de le goût de l’Église. Celle-ci ne permet pas la possession
reproduire. C’est surtout le disque phonographique de cet artefact qui prouve à coup sûr que le système
qui demande le plus de travail et l’enregistrement en de Loss est héliocentrique et que Loss est en orbite
lui-même est encore une technique un peu balbu- d’Ortentia. Celui qui possède une sphère armillaire
tiante et peu répandue. risque une grosse amende et sûrement quelques mau-
vais moments passés aux frais de l’Église ainsi que la
destruction de son bien.
L’astrolabe
L’astrolabe est un instrument qui superpose deux
Le char mécanique
machines scientifiques, et permet de mesurer la hau-
teur des astres et de lire l’heure en fonction de la po- Le char mécanique est une carriole blindée munie
sition des étoiles ou des soleils. Sa conception s’ap- d’un système d’essieux directionnels entraînés par
puie à l’origine sur une double projection plane qui la puissance d’un ou plusieurs moteurs à loss, qui
permet de représenter le mouvement des astres sur supporte un à deux canons à impulsion et un équi-
la voûte céleste. Dans sa forme simplifiée, l’astrolabe page de servants et conducteurs armés, en général
nautique est un instrument de navigation permet- assez limité. C’est une machinerie coûteuse, com-
tant de déterminer sa latitude après avoir mesuré la plexe, capricieuse, difficile à manier et à déployer
hauteur méridienne du soleil. D’usage limité pour sur un champ de bataille, et qui reste encore le plus
les observations astronomiques, il sert surtout pour souvent au stade de prototype. En fait, l’existence
l’astrologie, dans l’enseignement de l’astronomie et de ces machines tient plus de la légende qu’autre
pour le calcul de l’heure et des dates. Il est constitué chose, cependant, elles existent vraiment et font
d’un tympan fixe sur lequel sont gravés les cercles partie de l’arsenal d’armes secrètes de certaines
qui définissent les positions astronomiques ; celui armées de défense.
de l’araignée, la projection de la carte du ciel et
celui du limbe, le cercle gradué extérieur. Son usage
Le canon à feu
pour l’astronomie moderne est mal vu par l’Église,
mais il est très prisé en navigation. L’astrolabe est Personne n’ose croire que cette arme existe, mais
toujours calibré pour mesurer la position du soleil on prétend que les tours de défense des murailles
principal, jaune. d’Anqimenès sont bardées de ces étranges canons
à impulsion modifiés pour projeter des colonnes de
flammes qui boutent le feu à n’importe quoi, à une
Le Nocturlabe
portée de plus de cent mètres. Le canon à feu n’est
Un nocturlabe ou nocturnal est un vieil instrument de pas la seule arme merveilleuse dont on ignore le
navigation utilisé pour déterminer l’écoulement du stade de concrétisation : citons les miroirs solaires
temps en fonction de la position d’une étoile dans le en béryl qui seraient montés à bord des puissants
ciel nocturne. Parfois appelé Nocturnum Horologium, navires de l’Hemlaris ou encore le canon de la mort,
cet instrument a un fonctionnement proche du ca- une arme décrite comme colossale qui projetterait
dran solaire. Un nocturlabe est fait d’un disque ex- de la foudre à une distance incroyable et pourrait
terne où sont gravés les mois de l’année, d’un disque terrasser une armée entière. Mais considérant que
interne gravé avec les heures et éventuellement les les béhémoths sont déjà des merveilles difficiles à
demi-heures et d’un marqueur vers le disque externe. croire réelles, il est probable que certaines de ces
Enfin, le dispositif est complété par un pointeur vers armes ultimes ne soient pas que de simples légendes.
une étoile prise en référence, en général l’Étoile du
Voyageur. Le centre de l’instrument est percé. Étant
donné que l’instrument est fait pour un usage noc-
turne, les marques peuvent être en relief ou éclairées
de mellia et de cristaux réfléchissants.

La Sphère armillaire animée


La sphère armillaire, dans son approche classique en
astronomie, est un instrument mécanique employant
un système à remontoir ou à moteur électroméca-
nique qui modélise la sphère céleste en mouvement.
Elle est utilisée pour montrer le mouvement apparent
des étoiles, des deux soleils, d’Ortentia et de l’éclip-
tique autour de Loss. La sphère armillaire est com-
posée de plusieurs cercles et une boule centrale re-

172
Ref. 14778
LES NAVIRES LÉVITANTS

— Lévitation !
Le grondement sourd des machines brutalement sollicitées couvrit immédiatement tout autre son, dans un
bruit presque animal, qui aurait pu évoquer quelque chant bestial et primitif. Et la Callianis s’arracha brutale-
ment aux flots agités, la lévitation pressant sur les eaux fougueuses qui se dérobaient sous la force de répulsion,
pour l’élever vers le ciel, prenant une gîte qui jeta sa proue vers les cieux dans un tumulte effrayant. Même les
mécaniciens furent surpris de l’inclinaison du vaisseau. Ce n’était pas véritablement anticipé : les vagues et la
surface incertaine et instable de l’eau contrariaient la force de répulsion. Ce n’était pas pour rien qu’en mer,
jamais on ne se servait de la lévitation pour soulever un navire dans les airs.
Damas dut se rattraper de toutes ses forces pour ne pas glisser sur le bois trempé de pluie et d’embruns avec
les quelques hommes qui ne s’étaient pas solidement arrimés. La pente était de pratiquement quarante degrés.
Mais les canonniers tenaient bon leur poste.
Dans le chaos, à l’instant du choc entre les deux navires, et des hurlements des hommes qui couvraient à
peine la plainte mécanique des machines, et les craquements des structures durement sollicitées, le dernier ordre
vint de la voix, surprenante de puissance, de Jawaad, à la seconde même où eu lieu l’impact entre les deux
navires :
— Feu roulant !
L’enfer se déchaîna.

Les chants de Loss, Mélisaren.

LES NAVIRES LÉVITANTS

É lément emblématique de la technologie los-


syanne que permettent les propriétés du
loss-métal, les navires lévitants sillonnent le ciel
maine. Ainsi, les navires lévitants sont courants et
environ un navire de commerce ou de guerre sur
quatre voguant sur les Mers de la Séparation est ca-
comme autant de nefs aux mâts fièrement dressés pable de léviter pour poursuivre sa route au-dessus
suivant des couloirs terrestres tracés par la géogra- des terres. Mais ce n’est pas si facile, nous allons
phie des fleuves et des massifs, à l’instar des routes y revenir.
maritimes dictées par les courants et les côtes. S’ils
sont si répandus, ce n’est pas parce qu’ils permettent
un transport facilité de marchandises en quantité,
ce que des caravanes tractées et des animaux de bât
LEURS PERFORMANCES
pourraient tout aussi bien faire, mais parce qu’un Un navire lévitant est, comme tout bateau, une coque
navire lévitant, capable en général de flotter six à bâtie autour d’une quille — les navires monocoques
dix mètres au-dessus du sol, est à l’abri relatif de la ne sont pas les seuls qui existent sur Loss — des
faune lossyanne et ses dangers. Si le transport par mâts et une voilure contrôlée par un système de
route existe, il ne se fait que sur des zones périur- cordages, et enfin un système giratoire, en général
baines et des secteurs particulièrement sûrs, souvent des safrans, une barre et un gouvernail. Bref, les
fortement protégés et gardés, là où la faune a bien constituants d’un bateau classique, mais avec des
voulu céder le pas aux Lossyans et à la civilisation. aménagements assez importants.

Un navire lévitant ne diffère pas tellement, vu de


Les moteurs à lévitation
loin, des navires sillonnant les Mers de la Séparation.
D’ailleurs, l’immense majorité des navires lévitants Tout d’abord, la machinerie nécessaire aux moteurs
sont aussi prévus pour naviguer et leur coque n’est à lévitations ne permet pas de créer des chaloupes et
pas adaptée du tout à reposer sur autre chose que de barques à lévitation. C’est sans doute possible pour
l’eau quand leurs moteurs à lévitations sont à l’arrêt. un bon génie et avec des innovations accessibles,
mais c’est simplement trop onéreux et compliqué
Les navires lévitants sont répandus dans pratique- pour être devenu un concept exploité. En fait, les
ment toutes les cultures, sauf celles ayant pour en- plus petits navires lévitants sont en général au moins
vironnement des forêts profondes qui rendent leur des caravelles, péniches ou chebecs.
usage impossible — par exemple, les Dragensmanns
ne s’en servent pratiquement pas. Malgré la com- La seconde règle est que les contraintes matérielles
plexité de conception de ces voiliers volants, les des moteurs à lévitation sont telles qu’on ne peut
savoir-faire et les technologies ont eu le temps de pas faire de navires lévitant avec des matériaux lé-
se répandre partout, même si c’est encore une fois gers qui seraient flexibles, mais fragiles. La puis-
Armanth, Anqimenès puis l’Empire du Trône de sance que peut dégager la répulsion des moteurs à
Rubis et l’Étéocle qui sont à la pointe dans ce do- lévitation est telle qu’elle peut aisément briser des

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CHAPITRE 3 : SCIENCES ET GÉNIES

madriers de bois : toute structure qui n’a pas été La lévitation et l’eau
renforcée et prévue pour y résister ne tient jamais La bulle de vide que crée la répulsion du loss-métal
bien longtemps. Comme il faut au moins deux mo- a des effets assez dangereux avec la masse mouvante
teurs pour un navire lévitant, la place et les renforts de l’eau. Ainsi, les navires lévitants évitent de flotter
que ces machineries demandent imposent donc des au-dessus de la mer. Au-dessus d’un fleuve ou d’un
aménagements très spéciaux et des matériaux bien lac paisible, le risque est bien moindre, de même
choisis. dans un port abrité. Mais en pleine mer, le risque est
très haut. Seuls les béhémoths et leur masse énorme
Enfin, ces machines exigent une formation spéci- s’y hasardent. Les autres préfèrent naviguer de ma-
fique pour les exploiter et ne fonctionneraient pas nière traditionnelle.
sans un entretien par des spécialistes. Tous les na-
vires lévitants ont des machinistes, au moins un de
La propulsion
bord quand ce n’est pas deux ou trois, plus d’autres
mécaniciens. Dans la grande majorité des cas, la propulsion des
navires lévitants est assurée par leur voilure, adap-
tée à leur configuration de voiliers flottant dans les
Les moteurs à lévitation chauffent. Non seule- airs, impliquant des matures et voiles s’étalant sur les
ment par eux-mêmes à cause des contraintes côtés de la coque pour une meilleure stabilité. Mais
matérielles sur leur mécanique, mais en plus les capacités de répulsion des moteurs à lévitation
parce que les pièces mécaniques et les moteurs ne sont pas passées inaperçues des meilleurs génies
électromécaniques qui activent l’effet de lévita- de Loss et il existe donc des navires perfectionnés
tion chauffent aussi. Pour la plupart des navires qui emploient des moteurs spécialement adaptés à
à deux ou quatre moteurs, le refroidissement à la propulsion. Celle-ci n’est guère plus rapide qu’à
air suffit, et quelques seaux d’eau sont toujours voile, voire parfois moins performante que la voi-
prêts en cas de besoin. Mais sur les vaisseaux lure en cas de grand vent, mais elle a l’avantage de
comportant six moteurs et plus, on ajoute tout ne pas en dépendre. Par contre, c’est un surcoût en
un circuit de refroidissement à eau, et donc la loss-métal notoire.
nécessité de réserves d’eau et d’évacuation de la
vapeur, bref, des cheminées.
L’autonomie
L’autonomie des navires lévitants dépend de leur ré-
La hauteur de lévitation serve de barres de loss-métal. Mais pour deux barres
chargées dans chaque moteur, un navire lévitant peut
La plupart des navires lévitants ne peuvent s’éle- flotter sans interruption pendant un à deux mois.
ver que de huit mètres environ pour deux moteurs. Avec les contraintes des navires, des équipages, des
Pour quatre à six moteurs, ce qui représente un moteurs et de l’environnement, les navires lévitants
espace et un poids conséquent, on peut monter à ont besoin de changer les barres environ tous les
dix ou douze mètres. Au-delà, seuls les moteurs les 2500 km de route parcourue. Le coût des barres de
plus performants et les technologies les plus inno- propulsion est élevé, mais avec un kilo de loss-métal
vantes permettent d’atteindre ou dépasser les quinze pour un navire à deux moteurs, vous pouvez voyager
mètres. On ne connaît aucun navire lévitant capable un an. Cependant plus le navire est gros et comporte
de s’élever plus haut dans les cieux, mais selon cer- de moteurs, plus la dépense augmente. Les plus
tains génies, ce serait cependant possible, bien que puissants vaisseaux de guerre peuvent devenir des
très risqué et difficile à contrôler, en employant par gouffres financiers, et capture et pillage sont alors
exemple du loss-cristal ou les dons d’un Chanteur une nécessité pour rentabiliser les coûts.
de Loss.

L’effet de répulsion et d’antigravité des moteurs


USAGES ET EXPLOITATION
à lévitation repousse tout dans une bulle plus ou Les navires lévitants sont répandus et dans un port,
moins étendue sous le navire, y compris l’air. sur dix vaisseaux de commerce de toute taille, il est
Ainsi, un courant puissant repousse tout ce qui fréquent de trouver deux ou trois lévitants. Les flottes
passe dans le champ de répulsion dont la taille de navires lévitants sont donc communes.
varie selon la puissance des moteurs. Il ne s’y
crée pas un vide dans la mesure où l’air chassé Les navires lévitants sont rarement employés seule-
est remplacé constamment, mais le courant crée ment pour de la navigation terrestre : la configuration
un son constant de vent qui souffle, et seules les des Mers de la Séparation exige une certaine mixité
masses lourdes ne sont pas repoussées par cet technique qui impose que ces navires puissent aussi
effet. Il ne fait pas bon se tenir sous un navire voguer sur les flots. Cela impose aussi des contraintes
lévitant en marche. quant aux routes terrestres qu’ils peuvent suivre. Les
navires lévitants ont le plus souvent besoin d’une

174
Ref. 14778

masse d’eau où poser leur coque quand les moteurs conçus pour s’élever très haut parce que la faune
à lévitation sont éteints. Les itinéraires terrestres les locale dangereuse y est plus rare, ils sont souvent
plus courants longent par conséquent les fleuves et assez rapides, mais totalement incapables de voguer
grandes rivières ou ne s’en éloignent que pour passer sur les eaux. Certains de ces voiliers des sables sont
d’une étendue d’eau idoine à une autre. Cela réduit d’une taille qui défie l’imagination et peuvent abriter
leur champ d’action aux grandes plaines et aux cours des centaines de personnes comme autant de villes
d’eau profonds, souvent avec des relais de cités ayant volantes. Ces modèles aux dimensions prodigieuses
aménagé des ports adaptés. sont presque légendaires, mais il en existe chez les
Nomades des Franges aussi bien que dans les déserts
Quid alors des zones vallonnées, des montagnes ou de Shaïmu, en Hemlaris.
encore des forêts profondes ? Dans le premier cas, il
faut savoir que les navires lévitants ne peuvent ar-
penter des pentes élevées de plus de quelques degrés.
Dès que des collines sont trop escarpées, ils doivent
LES BÉHÉMOTHS
les contourner et louvoyer de vallon en vallon, ce qui Les béhémoths sont si rares et ont été si peu aper-
réduit drastiquement leur vitesse journalière. Et face çus sur un champ de bataille que beaucoup de gens
à des montagnes, le navire lévitant ne peut rien faire pensent qu’il s’agit de légendes colportées par des
si ce n’est longer les vallées fluviales : il est incapable vétérans ivrognes ou des marins bonimenteurs. Et
de franchir des cols. C’est à ce moment que les ca- pourtant, ils existent, aussi rares soient-ils, et sont
ravanes et moyens de transport classiques prennent même considérés comme l’arme absolue des plus
le relais. grandes puissances de Loss.

Le problème est le même dans les forêts : la hauteur Un béhémoth est un navire géant prévu pour se poser
des arbres et l’épaisseur des frondaisons interdisent sur une surface liquide, mais dont les dimensions, le
le passage d’un navire lévitant, sauf au-dessus des blindage, la conception et l’armement ont été entiè-
plus larges cours d’eau. Il a été abordé différem- rement pensés pour prendre d’assaut les murs d’une
ment dans les plaines arides et les déserts, avec les cité-État. Sa force de frappe est capable d’en faire le
navires des sables. Ici, les vaisseaux lévitants sont siège, sa puissance de feu d’en ravager les défenses,
à fond plats, larges et pourvus de roues ou de pa- son autonomie de parvenir à ses fins dans un délai
tins leur permettant de se poser au sol. Rarement aussi bref que possible. Si leur superstructure est en-

175
Ref. 14778
CHAPITRE 3 : SCIENCES ET GÉNIES

core de bois, les béhémoths rivalisent en blindages peuvent faire 150 mètres de long. Mais la concep-
de cuivre, de fer et d’acier. Ce sont des forteresses tion de ces machines est abominable de complexité
volantes, disposant de centaines de bouches de ca- et leur coût est totalement astronomique. Pour le
non-impulseurs et de mortiers, capables d’embarquer moment, ces monstres n’ont fait la démonstration
des milliers de soldats, avec arsenal et ravitaillement de leur colossale puissance que pendant la Bataille
et en théorie d’assurer leur couverture sans besoin des Six Drapeaux. Mais ils n’avaient alors été em-
d’escorte. On peut aisément les comparer aux pre- ployés qu’en défense, par l’Hégémonie qui n’avait
miers cuirassés « dreadnought » de l’aube du XXe pas le choix, et face à des flottes très mobiles et en
siècle. Comme eux, tout l’armement principal d’un surnombre — un contexte où ils avaient peu brillé.
béhémoth est d’un calibre démesuré et en guerre, il Juste assez pour donner envie à bien des amiraux
joue un rôle similaire : la domination totale du champ de lancer ces monstres dans un véritable assaut gé-
de bataille aéronaval. néralisé sur une grande cité.

Dans les faits, rien ne semble pouvoir résister à un On peut estimer que l’Hégémonie dispose d’une de-
béhémoth. Nanti de dix à quinze moteurs à lévita- mi-douzaine de ces monstres et l’Hemlaris peut-être
tion, de tout un système de refroidissement, armé trois. On prétend que Nashera dans les Plaines de
de canons de gros calibre et de longue portée, aussi l’Étéocle en posséderait un. Ce seraient les Apostats
solide qu’une forteresse, il peut foncer sur une ci- dans le Jemmaï-he’Jil qui disposeraient des plus puis-
té-État au mépris de ses défenses et de ses murs, sants de tous, bien que personne n’en ait jamais vu.
frapper de front ses murailles à plus de mille mètres, Malgré sa colossale flotte, Armanth n’en possède
ravager ses quartiers à distance tandis qu’il mas- aucun et le Conseil des Pairs ne croit pas que les bé-
sacre ses défenses de son artillerie de courte por- hémoths existent vraiment ou soient un réel danger.
tée. Un béhémoth est un monstre. Les plus grandes L’avenir risque de leur donner tort.

176
Ref. 14778
LA MÉDECINE LOSSYANNE

— Une autre dose de péramine, et préparez-moi un cathéter et un drain !


L’homme penché au-dessus de sa patiente affichait une haute stature et cette allure voûtée que l’âge impose
aux grandes tailles. Sans doute autrefois aurait-il rivalisé sur ce point avec Jawaad. Mais dans son cas, la
jeunesse n’était plus qu’un lointain souvenir que rappelaient les boucles de cheveux blanc cassé dépassant de
son bonnet de lin, se prolongeant en une barbe taillée avec soin que cachait un masque chirurgical de la même
étoffe. Duncan était un des premiers médecins sur l’ensemble du sud des Mers de la Séparation à user de ce
genre de précautions sanitaires, dont il enseignait la méthodologie et l’utilité le plus souvent possible et qu’il
avait imposé à tout son personnel en cas de besoin. Comme ici, alors qu’il opérait avec dextérité et précision
l’esclave de son ami, sous son regard.
Jawaad était à l’autre bout de la grande pièce entièrement carrelée de blanc du sol aux murs. Appuyé contre
la porte, bras croisés, il obéissait à la consigne stricte de ne pas approcher à moins de trois mètres. Sa présence
était d’ailleurs un privilège qu’avait admis Duncan. Pour tout autre, il aurait refusé tout spectateur qui ne soit
pas de ses élèves ou du personnel de son hospice.
Son assistante, comme lui revêtue d’une grande blouse blanche, d’un bonnet et d’un masque, opina, pour
aller chercher ce que demandait le doyen et préparer une seringue du puissant antalgique qu’avait réclamé
Duncan. Jawaad observait Lisa, plongée dans le coma depuis le matin. Il conservait le plus parfait silence, sans
un mouvement. Il aurait eu du mal à prétendre comprendre ce que faisaient les deux médecins, en détail, tout
du moins. Mais il était en fait facile de le résumer : ils tentaient de sauver sa petite Terrienne, pour laquelle il
avait pris tant de risque pour la confier à temps à son vieil ami.

Les Chants de Loss, Mélisaren

LA MÉDECINE LOSSYANNE

U n peu moins de la moitié des techniques mé-


dicales lossyannes, surtout dans les soins aux
maladies et toxines, se base sur les symbiotes. Quand
sans compter. Il y va de l’intérêt public et du leur.
Mais le reste du temps, il faut avoir des andris pour
être bien soigné.
un médecin tombe sur un blessé grave ou un malade
fortement atteint, son premier geste médical sera L’autre problème est que la chirurgie lossyanne est
souvent de lui implanter un symbiote, si le patient balbutiante. Il ne faut guère compter sur l’habilité
ou ses proches ont les moyens de payer. Passé trois des chirurgiens pour les blessures et lésions internes
jours le temps que le symbiote fasse corps avec son les plus complexes et même remettre en place cer-
hôte, toute une panacée de traitement peuvent alors tains os cassés est problématique et souvent source
permettre de guérir le patient en agissant sur le sym- de complications. La chirurgie dentaire se résume
biote. C’est à lui que sont destinés les meilleurs mé- le plus souvent à arracher des dents cariées bien
dicaments dont disposent les Lossyans. que les premiers outils de fraise et de plombage se
répandent timidement. Les techniques de chirurgie
La pharmacopée lossyanne est cependant, même viscérales se développent à peine et l’on ne parle
sans avoir de symbiote, assez musclée si on la com- même pas de la reconstruction fonctionnelle. Bref,
pare aux moyens des médecins de la Renaissance. pour le moment, la connaissance approfondie de la
La nature est généreuse de ce point de vue avec biologie humaine du point de vue chirurgicale reste
les Lossyans, peut-être pour se faire pardonner sa l’apanage d’expérimentateurs et de quelques génies
cruauté. Il existe une bonne trentaine de plantes et de la médecine. Le reste du temps, on fait un peu
extraits antibiotiques différents qui, si on les manie comme on peut, malgré quelques réussites que per-
bien, permettent de soigner et juguler la plupart des mettent, justement, les traitements et la pharmacopée
infections qui tueraient autrement tout malade. Les accessible aux médecins.
anti-inflammatoires et antipyrétiques sont eux aussi
communs et sauvent nombre de vies.

Malgré tout, une pharmacopée ne fait pas tout : il


QUELQUES REMÈDES COURANTS
faut y avoir accès. Et avoir les moyens financiers Le plus connu, répandu et simple de ces traitements
de payer ces remèdes. C’est le problème ; tout cela est le métée, appelé aussi aïbya par les Athémaïs ou
n’est pas donné et les plus pauvres en sont réduits encore miel salé par les Dragensmanns. C’est un
aux éventuels rebouteux locaux, parfois efficaces, ou baume cicatrisant, qui ressemble à un gel poisseux
le plus souvent aux remèdes traditionnels et aux et collant comme de la mélasse, salé et très amer,
prières, qui le sont nettement moins. Quand une issu d’un mélange de miel et de plantes médici-
épidémie menace, la plupart des hospices et des nales macérées. Le métée fonctionne uniquement
apothicaires distribuent les médicaments nécessaires avec un porteur de symbiote. C’est un cicatrisant

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Ref. 14778
CHAPITRE 3 : SCIENCES ET GÉNIES

aux propriétés puissamment antiseptiques qui va puissants avantages immunitaires. Il n’existe nulle
accélérer la guérison des plaies, sauf si les dégâts part de système de santé publique capable d’interve-
sont internes. Appliqué quotidiennement, le métée nir dès l’apparition d’une épidémie pour distribuer
permet de regagner une case supplémentaire de des antibiotiques. Et se faire soigner reste toujours
blessure par jour. onéreux. Ainsi, les maladies infectieuses ne sont
pas éradiquées et les tout premiers concepts de vac-
L’autre remède le plus répandu est un antibiotique cins ne concernent encore que des traitements qui
et anti-inflammatoire qui ne s’active efficacement que emploient les symbiotes comme vecteurs. Pour les
sur des gens ayant un symbiote : l’eau de mirula. La autres, il reste les remèdes antibiotiques dont nous
mirula est une fleur, une plante carnivore vivant dans parlons plus haut et qui sont plutôt efficaces, les
les marécages des régions côtières du sud des Mers antipyrétiques et les anti-inflammatoires. Ce sont
de la Séparation. Le suc digestif de ces fleurs est des produits assez communs dans les bocaux d’un
filtré puis distillé pour devenir un remède qui doit bon apothicaire et les réserves des hospices. Mais
être avalé par le patient. Son dosage doit être précis, leur coût qui n’est pas à la portée des bourses des
à forte dose, l’eau de mirula provoque des nausées si plus pauvres, le manque de connaissance sur les mé-
violentes qu’elles peuvent tuer. L’eau de mirula ad- thodes de transmissions et la prophylaxie laissent
ministrée pendant une semaine à un patient souffrant encore de beaux jours à toutes ces maladies. Cela
de blessures graves permet de réduire le temps de explique par exemple l’origine pratique de la tradi-
guérison naturelle d’un tiers. Certaines formules que tion qui consiste à ne pas nommer et reconnaître
seuls les meilleurs médecins s’aventurent à donner comme « lossyan » un enfant qui n’a pas passé le cap
peuvent diviser ce temps par deux. de sa troisième année : ses chances de survies n’ont
rien d’assurées. Et dans le monde de Loss, un enfant
Enfin, un remède employé par tout le monde, et qui sur trois en moyenne n’atteindra pas l’âge adulte
fonctionne dans tous les cas est le nawmé, un anes- (vers quinze ans).
thésiant qui à faible dose soulage la douleur et aide
au sommeil, et à forte dose plonge le patient dans Nous ne fournissons volontairement pas de données
un coma qui peut durer plusieurs heures. Le nawmé, chiffrées sur les maladies. Celles qui suivent sont des
tiré des kystes parasites d’un arbre assez commun, exemples servant de toile de fond et d’inspirations
est assez cher et ne s’emploie pas à outrance. Mais dramatiques. Un personnage-joueur ne devrait pas
il permet de soulager les plus terribles souffrances contracter de maladie grave ou mortelle sur un jet
et surtout de tenter une chirurgie dans de bonnes de dé.
conditions — si l’on sait s’en servir, et qu’on sait
maintenir le comateux en vie. Le nawmé s’administre
La lèpre
avec de l’eau, ou en le faisant brûler pour en respirer
les vapeurs. Maladie peu contagieuse et qui peut être soignée
avec l’arsenal antibiotique lossyan. Mais le traitement
est long et cher. La lèpre s’attaque à la peau, aux
LES MALADIES muqueuses et aux nerfs périphériques et provoque
déformations et infirmités sévères. Elle demande des
Une grande partie des maladies infectieuses les plus années d’incubation, il faut une longue exposition à
mortelles ou contagieuses ont été jugulées par la un vecteur pour être atteint, mais peu de personnes
pharmacopée lossyanne grâce, entre autres, aux savent que le risque est limité avec quelques pré-
symbiotes et à une excellente pharmacopée de re- cautions d’hygiène. C’est une maladie chronique qui
mèdes antibiotiques. Des maladies comme le cho- peut mettre dix à vingt ans à tuer son hôte. Malgré
léra, le typhus, la variole, la tuberculose ou encore sa rareté relative et les moyens efficaces de la soigner,
la peste ne sont plus en mesure de provoquer des elle terrifie les Lossyans et beaucoup la considèrent
pandémies et des mortalités massives. Quant aux comme la marque d’une punition du Concile Divin.
MST, tellement ravageuses au cours du XVIIIe et XIXe Les toshs sont des vecteurs de lèpre.
siècle, elles ont été renvoyées au rang de problèmes
de santé mineurs par l’emploi assez systématique de
La grippe lossyanne
symbiotes pour les esclaves des plaisirs, habitude qui
s’est répandue dans les maisons closes et chez les C’est une grippe comme vous l’imaginez, qui régu-
Courtisans pour se prémunir de ces risques. Ce qui lièrement se répand en vagues épidémiques dans
ne veut pas dire que la syphilis ne reste pas mor- des communautés lossyannes. Sa première particu-
telle ! Mais simplement, il est rare d’être contaminé larité est que les symbiotes ne font qu’en atténuer
et des traitements antibiotiques existent, pour ceux les symptômes, mais n’immunisent pas contre elle.
qui peuvent se les offrir. La seconde est qu’elle prend régulièrement son dû
en vies humaines. Très contagieuse, la grippe los-
On ne compte en moyenne et selon les cultures et syanne incube en quelques heures et peut tuer en
les cités-États qu’entre un tiers et un cinquième de une journée. Elle ne frappe pas que les plus faibles,
la population qui dispose d’un symbiote et de ses enfants et personnes âgées. Au contraire, elle est

178
Ref. 14778
LA MÉDECINE LOSSYANNE

bien plus virulente sur les jeunes adultes à cause de lents et sanguinaires, un stade où on les nomme
leur trop forte réaction immunitaire. En gros, plus les Enragés et que les malades tendent on ne sait
on est solide, plus on risque la mort. Heureusement, comment à franchir de manière simultanée. Ainsi
les vagues épidémiques sont rares et la pharmaco- une communauté infectée peut se réveiller envahie
pée lossyanne assez solide pour sauver les patients d’Enragés agressant, frappant et mordant au mépris
atteints… si du moins les réserves sont suffisantes de la souffrance, des blessures physiques et du dan-
pour les soigner. Puces et parasites sont des vecteurs ger, aveugles et meurtriers. Oui, c’est exactement
de grippe. comme une invasion de zombies au cinéma. Il n’y
a aucun remède pour les personnes atteintes et l’on
ne connaît aucun vaccin. La seule prophylaxie est
La rage
la mise en quarantaine de la communauté atteinte
La rage lossyanne est une maladie qui s’attaque au pour empêcher la propagation puis d’en tuer et
système nerveux central et au cerveau, rendant fous brûler tous les membres. Cette maladie est la peste
furieux ses victimes avant de les tuer. Elle est assez noire de Loss : elle a décimé des cultures entières
différente de la rage terrienne. Tout d’abord, elle est et tout le monde la craint. Seuls les Lossyans et les
très contagieuse, et se transmet par les mucosités et mammifères d’origine terrienne sont vecteurs de la
voies aériennes. Ensuite, elle a une période d’incu- rage. Les symbiotes immunisent à la rage, mais il
bation de dix à douze jours sans symptôme avant n’est pas rare qu’ils en meurent en sauvant leur hôte
la phase active. Enfin, les malades atteints passent de l’infection.
par un premier stade grippal avant de devenir vio-
Ref. 14778
CHAPITRE 4 : LES PARIAS

CHAPITRE 4

LES PARIAS
L es discriminations font saigner Loss au-
tant que la Terre. Les Lossyans sont en-
core loin de considérer ces travers comme
LES CHANTEURS DE LOSS
QUI, ET COMBIEN ?
182
182
des défauts qu’il faudrait éradiquer. Mais les
Vertus forcent tout Lossyan à devoir dépasser L’ÉVEIL DU CHANT DE LOSS 182
ses a priori et ses haines. Elles transcendent COMMENT FONCTIONNE-T-IL ? 183
les races, les cultures les orientations sexuelles
et de genre. Elles ne jugent que l’Honneur, le LES EFFETS DU CHANT DE LOSS 183
Courage et la Sagesse de l’individu.
LE REGARD DE LA SOCIÉTÉ 184
Il existe des êtres que rien ne peut véritable-
ment racheter aux yeux des Lossyans conci- LE CHAMANISME ET LES CULTES MINEURS 186
liens. Il n’y a pas de Vertus pour sauver le sort
des Terriens Perdus, pas plus que pour les dé- ORIGINE ET HISTOIRE 186
mons Chanteurs de Loss. Quant aux chamans,
ils sont plus redoutés encore, car ils ont un LE CHAMANISME CONTEMPORAIN 187
pouvoir que l’Église ne comprend pas et une ANCIENS CULTES DES LOSSYANS 187
influence sur le peuple qu’elle s’acharne avec
grand mal à combattre. LES TERRIENS PERDUS DE LOSS189
Ces parias ne sont pas les seuls et il existe LES PRÉLEVÉS 189
des cultures où, au contraire, on les protège
et on les respecte. Mais pour tous ces êtres, LES ÉGARÉS 189
malheur à eux quand ils sont face à la culture
concilienne. Celle-ci ne leur accordera aucune LES LOSSYANS ET LES TERRIENS 189
autre place que la mort ou la servitude.
Ref. 14778
Ref. 14778
CHAPITRE 4 : LES PARIAS

Elle ferma les yeux et une note douce et cristalline s’échappa de ses lèvres, comme un léger souffle de vent.
Subtilement, l’air sembla palpiter. Non, pas seulement l’air ; la réalité elle-même s’agitait, comme des ondes sur
l’eau.
Elle Chantait. Et le loss vibrait avec elle à l’unisson.
La lampe à loss s’éleva paresseusement au milieu des poussières flottantes délivrées de toute pesanteur
pour glisser dans l’air et venir rejoindre les mains tendues de la terrienne. Elle ne la saisit pas, mais la caressa
seulement, la frôlant du bout des doigts. Dans le mécanisme de cette dynamo faite de pièces de cuivre, de fer
et de bois, les deux pôles de loss-métal, qui ne pesaient même pas à eux deux plus d’un gramme, chantaient
avec Lisa. Elle en conçut un sourire de joie immense. Et le plus naturellement du monde, engrenages, fils, vis
et écrous cédèrent en se désolidarisant les uns après les autres, offrant un éclaté de toute la mécanique de la
lampe, jusqu’à ce que les deux petites barres de loss, vibrantes et étincelantes de bleu, finissent par se poser
avec toute la douceur d’une plume dans les paumes tendues de la jeune femme. Le moment était semblable à la
magie fugace et improbable d’une parfaite communion. Et, lentement, Lisa cessa de chanter, laissant la magie
retomber en même temps que chutaient mollement au sol tous les objets emportés par la force qui venait de se
jouer des lois de la physique.

Les Chants de Loss, Mélisaren

LES CHANTEURS DE LOSS


L e Chant de Loss, c’est cette étrange faculté
unique aux humains, qu’ils soient lossyans ou
venus de la Terre, de s’accorder au loss-métal qui
prévalence naturelle. Les Terriens Perdus sont plus
fréquemment Chanteurs que les Lossyans, un sur
dix mille environ.
les environne, entrer en résonnance avec lui et ainsi
« Chanter », ce qui produit des effets altérant la gravi- Il y a deux constantes dans ces chiffres: les femmes
té, l’électromagnétisme, les énergies et même la vie. et les personnes rousses sont les plus concernées par
Aucune créature de Loss ne possède ce pouvoir, de l’apparition de ce pouvoir, plus du double des cas
près ou de loin. pour les femmes rousses. Dans certaines régions,
on croit que seules les femmes peuvent devenir
Le Chant de Loss provoqua, au paroxysme d’une Chanteuses de Loss et beaucoup de Lossyans sont
guerre entre Chanteurs, l’anéantissement d’Antiva persuadés que tous les roux sont Chanteurs. Et c’est
suivi des six ans du Long-Hiver (voir»L’histoire de d’ailleurs un des ordres absolus de l’Église :
Loss», page 43).
Le Chant de Loss doit servir les Lossyans
Le Chant de Loss est un pouvoir ravageur par nature et l’Église du Concile et non l’asservir. Toute
et dont on peut aisément perdre le contrôle. L’Église personne née rousse ou suspectée Chanteuse
du Concile — et elle n’est pas la seule — tente en de Loss doit être asservie et, si elle ne peut
permanence d’endiguer et museler ce danger, tout l’être, doit être tuée.
en se refusant à l’éradiquer, ce qui serait impos-
sible : il ne cesse de naître des Chanteurs, malgré
leur grande rareté. L’ÉVEIL DU CHANT DE LOSS
Le Chant de Loss ne s’apprend pas : si un sujet n’est
QUI, ET COMBIEN ? pas né avec le don d’entrer en résonance avec le
loss-métal, il ne l’apprendra jamais. Seuls les chamans
Jamais personne sur Loss n’a vraiment tenté de me- san’eshe et, dit-on, certains chamans dragensmanns
surer la part de Chanteurs dans la population, les seraient en mesure de repérer les signes avant-cou-
chiffres qui suivent ne sont pas connus des Lossyans. reurs de l’Éveil d’un Chanteur, mais ils n’enseignent
pas leurs secrets.
La prévalence des Chanteurs ne dépasse pas un
Lossyan pour vingt-cinq mille individus, mais on La seule manière connue de vérifier si quelqu’un
ne compte pas les Chanteurs de Loss tués au mo- est Chanteur de Loss, c’est de le mettre face à un
ment de leur Éveil et après ; c’est la prévalence danger qui menace sa survie immédiate. Le Chant
naturelle. En comptant les décès par accident et de Loss est instinctif et avant tout enclenché par la
consécutifs aux persécutions, on aura un Chanteur peur. L’urgence de se battre pour rester en vie face à
pour trente-cinq mille individus environ. Chez les l’imminence de sa fin provoque la première tentative
Jemmaïs, les San’eshe ou les Dragensmanns, par à Chanter. On appelle cela l’Éveil ; et c’est le plus
contre, on revient à quelque chose de proche de la souvent violent.

182
Ref. 14778
LES CHANTEURS DE LOSS

L’Éveil ne se produit que s’il y a une concentra- Le Chant a aussi d’autres limites : le Chanteur doit
tion suffisante de loss-métal dans les environs. Un être en mesure d’user de sa voix pour que le loss-mé-
ou deux grammes suffisent : envahi par la peur de tal entre en résonnance avec lui. Ce qui rend très
mourir, le sujet se met soudain à Chanter. Ce n’est malaisée toute discrétion quant à son usage, sauf
pas un cri ou un hurlement : il y a des notes et des par un entraînement intensif afin de savoir exacte-
harmoniques, que ce soit dans un chant sourd de ment quels accords et quelles tonalités murmurés
baryton ou les arpèges harmonieux d’un soprano. suffiront à créer un effet. Une personne muette, ne
Et à ce Chant répond le loss-métal environnant pouvant produire ni son et ni mélodie, ne peut pas
qui se met à vibrer au diapason. Tout ce qui est user du Chant de Loss quand bien même elle en
métallique et proche du Chanteur luit d’une faible aurait le don.
lumière bleutée, l’air se charge en ozone, la réalité
elle-même se brouille et semble onduler comme de
l’eau troublée.
LES EFFETS DU CHANT DE LOSS
La première fois, c’est toujours ravageur. La source Le Chant de Loss n’est pas qu’un pouvoir. C’est un
du danger — et ce qui se trouve à proximité — lé- instinct, un sens supplémentaire ; une nouvelle fonc-
vite puis se fait repousser avec violence tandis que tion organique qui habite le Chanteur et qui subit
la gravité change brutalement, dévastant tout. Les des contraintes aussi bien extérieures, nous l’avons
dégâts du Chant de Rage, le nom de ce pouvoir vu plus haut, que profondément intimes.
instinctif et brutal, sont comparables à ceux d’une
grenade défensive. La première manifestation du Chant de Loss, com-
mune à tous les Chanteurs, c’est le Chant de Rage :
Une fois que l’Éveil s’est produit, il n’y a pas de retour cette onde de force fait fluctuer la gravité et re-
en arrière possible. Le sujet est un Chanteur de Loss, pousse tout autour d’elle avec la force d’une tor-
et s’il n’apprend pas de sa propre initiative à contrô- nade. C’est ainsi que se déclenche l’Éveil et c’est
ler comment il entre en résonance avec le loss-métal, le premier pouvoir commun à tous les Chanteurs.
son instinct le fera pour lui, avec des conséquences C’est aussi le plus animal et instinctif : un Chanteur
dramatiques et funestes. en usera s’il est en danger mortel. Il est traumati-
sant, nous y reviendrons.

COMMENT FONCTIONNE-T-IL ? Le second pouvoir s’acquiert aisément avec de l’en-


traînement : c’est le Chant d’Éther, qui réduit, voir
Avant tout, un Chanteur de Loss sans loss-métal annule la masse des objets. Après commencent la
à sa portée est démuni. Il lui en faut au moins un découverte des étrangetés du Chant de Loss et de sa
gramme sur lui ou dans son environnement immé- nature même : il devient partie intégrante de la psy-
diat. Plus grande est la masse de loss-métal à proxi- ché du Chanteur, de sa personnalité, de son intellect
mité, plus grande est la zone qu’elle influence où et de sa vision du réel. Il ne lui obéit pas ; il est une
un Chanteur peut Chanter. La présence des barres de ses formes d’interaction avec le monde.
des moteurs des navires lévitants permet d’activer le
Chant jusqu’à trente mètres de distance. Les grandes Ainsi donc, une brute guerrière va utiliser le Chant
concentrations de loss-métal permettent de s’y ac- de Loss en conjonction avec des armes et sa force
corder à des centaines de mètres. Un Chanteur de physique. Une âme ravagée et vengeresse tendra à
Loss portera, s’il le peut, un bijou fait de ce métal. briser, détruire, et créer des cyclones et des vagues
Comme le loss ressemble d’assez près à de l’argent, de force. Une personne douce, rêveuse et artiste,
il est aisé de le faire passer inaperçu. Cependant, saura projeter en hologrammes des illusions et des
le loss-métal s’épuise, consommé par le Chant ; il fantasmagories évoluant au gré de sa voix. Un indi-
finira, à force, par se ternir et se corroder et ne vidu chasseur et adepte de la discrétion aura appris
plus pouvoir entrer en résonance avec le Chanteur à fredonner et murmurer doucement le Chant de
de Loss. l’Ombre, pour déformer sa propre image et devenir
presque invisible. D’autres, fascinés par les forces na-
Plus le Chanteur a de loss-métal à sa portée, plus turelles, canalisent la chaleur, le froid, la foudre, ou
l’amplitude de son pouvoir augmente. Un Chanteur encore l’air sous forme de brises et de tempêtes. Et
de Loss dans une réserve de loss-métal sera dévasta- certains Chanteurs peuvent entrer en résonance avec
teur. Mais il faut un entraînement poussé pour faire la psyché d’autres animaux, pour les apprivoiser et
entrer autant de loss-métal en même temps en réson- les dominer. Étrangement, ces pouvoirs sur le corps
nance avec son Chant. C’est en cela que les Chanteurs et l’esprit semblent inopérants sur les Lossyans et les
de Loss très puissants sont une rareté et un danger. créatures d’origine terrienne.
Orchys Athysmante de Parcia aurait pu faire entrer
en résonnance plus d’une tonne de loss-métal et au- En d’autres termes, il existe autant de variantes du
rait ainsi déchaîné le Chant des Abîmes, responsable Chant de Loss que de Chanteurs. Il ne peut être
du Long-Hiver. vraiment catégorisé de manière exhaustive.

183
Ref. 14778
CHAPITRE 4 : LES PARIAS

L’Écho diabolique par les Dogmes du Concile. Ce sont des


L’usage du Chant de Loss n’est jamais bénin. D’une rejetons démoniaques des anciens cultes que l’Église se
part, car il est épuisant : plus le Chanteur use de sa doit de contrôler et mettre sous sa coupe. L’expression
voix, plus l’épuisement et la pression physique s’ac- « démon Chanteur de Loss » est courante.
croissent. Un Chant aux effets étendus et puissants
tenu sur un long moment produit sur l’organisme le Tout Chanteur de Loss confirmé ou potentiel doit
même effet que courir un marathon. être asservi ou tué. Dans les régions sous influence
concilienne, on tue presque systématiquement les
Et l’autre contrainte est bien plus intime : quand hommes Chanteurs. Quant aux Chanteuses, elles
un Chanteur déclenche un effet, il ressent la ré- sont réduites en esclavage ; c’est sur elles que l’on
sonnance du Chant à son environnement comme va user du Haut-Art avec la plus cruelle et la plus
s’il s’agissait de ses propres sens étendus. Quoique efficace sévérité. L’esclave qui a subi ce dressage et ce
d’une manière atténuée, il voit, touche, sent et goûte conditionnement se retrouve sous un contrôle com-
l’environnement affecté par le Chant et se trouve plet de ses actes, de ses désirs de son autonomie. Par
aux premières loges quand l’effet est dévastateur voie de conséquence, son instinct et son pouvoir de
et mortel. S’il tue avec, il est le premier à savoir Chanteuse sont eux aussi en théorie muselés et mis
dans tous les détails comment il vient de tuer. Il sous contrôle. Et surtout, en cas de danger extrême
touche de près l’horreur de l’agonie de ses victimes, pour sa vie, elle ne pourra pratiquement pas laisser le
comme s’il en vivait l’écho. L’épuisement est donc Chant de Loss prendre le pas. C’est le but ultime de
non seulement physique, mais aussi psychique et ce conditionnement, redoutablement efficace. Mais il
peut conduire le Chanteur à la dépression, la dé- n’est pas parfait : les accidents arrivent et ils peuvent
mence et même la mort. faire mortellement mal.

La place des Chanteurs de Loss diffère cepen-


LE REGARD DE LA SOCIÉTÉ dant selon les cultures. Chez les Jemmaïs, les
Dragensmanns et les San’eshe, ils sont respectés,
Les Chanteurs de Loss sont considérés comme respon- bien que chapeautés et toujours surveillés. Au moins
sable du Long-Hiver et la manifestation d’un pouvoir sont-ils libres. Chaque description de peuple (au
Ref. 14778
LES CHANTEURS DE LOSS

chapitre Les peuples de Loss, page 88) précise le les vaisseaux sur terre, voir les propulser en absence
traitement des Chanteurs de loss quand cela diffère de vent. C’est un atout rare mais très recherché, car
des cultures conciliennes. Dans les sociétés où les les capacités des navires lévitants sont ainsi décu-
Chanteurs de Loss sont bien considérés, ils par- plées. Enfin, les Chanteurs de Loss sont utilisés pour
ticipent à la vie commune en aidant aux travaux des spectacles de « magie » et distraire la foule et
lourds ou encore en défendant les leurs, parfois en- leurs maîtres.
fin en offrant des divertissements. Ils sont toujours
craints, cependant. Dans les sociétés conciliennes, Mais les Chanteurs de Loss sont très rares et valent
les Chanteurs de Loss qui ne sont pas esclaves très cher. Posséder une Chanteuse de Loss est un
doivent se cacher et éviter le plus possible que leur prestige qui vaut une fortune, on ne les emploie donc
pouvoir soit révélé : ils seraient aussitôt traqués pas sur des chantiers et l’on prend grand soin de ne
par tous les moyens possibles pour les capturer, pas risquer de les abîmer. Un Lossyan n’en croisera
les asservir, ou simplement les tuer. Très peu de sans doute pas plus d’une ou deux fois dans sa vie,
Lossyans prendraient le risque de faire confiance à le plus souvent dans des spectacles organisés, parfois
un Chanteur de Loss en fuite ou non asservi ; ce se- comme esclave de compagnie d’un individu riche.
rait traiter avec un démon, une créature sans Vertus Ou, bien plus rare mais bien plus terrifiant, comme
vouée à répandre le mal sur le monde. arme vivante sur un champ de bataille.

Il y a très peu d’accidents dramatiques dus au pou-


Les Chanteurs asservis
voir d’un Chanteur qui céderait à la panique ou à
Les Chanteurs de Loss dans les sociétés conciliennes la démence : ils sont pour leur immense majorité
sont tous esclaves, et sont une sorte de luxe presti- conditionnés par le Haut-Art, ou entraînés par des
gieux. Ils sont parfois utilisés pour leur principale chamans qui leur ont appris à se contrôler avant
capacité : le Chant de rage et le Chant d’Éther. Ils de- tout. Les incidents sont rares et deviennent souvent
viennent alors gardes du corps (ou plutôt chiens de des histoires et des contes qu’on se raconte dans les
garde, puisque toujours esclaves). Certains Chanteurs auberges au coin du feu.
servent sur des navires lévitants aidant à manœuvrer
Ref. 14778
CHAPITRE 4 : LES PARIAS

— On dit que les chamans n’existent plus. Mais on ne le prétend que pour se rassurer : s’ils n’existent plus,
ils sont moins effrayants.
— Ils font si peur que cela ?
— Oh oui. Parce qu’il y a longtemps, on raconte que sont eux qui comprenaient le mieux le monde, qui
lui parlaient le mieux, qui l’écoutaient le mieux. Ils étaient presque ce qu’est le Concile Divin, maintenant. Sauf
qu’ils pouvaient prouver leur pouvoir. Ils n’avaient pas besoin de prétendre, il leur suffisait d’en user. Tout le
monde savait qu’il était véritable ; ils pouvaient parler aux animaux et aux plantes, prévoir les malheurs et les
catastrophes et soigner les pires maux. Mais il n’y avait pas que cela.
— Quoi donc ? Car rien de tout cela n’est si effrayant ?
— Le plus effrayant, c’est que c’était eux qui formaient, guidaient et protégeaient les Chanteurs de Loss.
Personne ne les comprenait mieux qu’eux. Les chamans leur ont appris leur pouvoir. Et tu sais mieux que
personne ce que cela veut dire.

Les Chants de loss, Les forêts d’Arcis.

LE CHAMANISME ET LES CULTES MINEURS

N ous avons beaucoup parlé de l’Église du Concile


Divin, religion omniprésente et toute-puissante
dans les cultures conciliennes de Loss. Mais, d’une
sont les chamans eux-mêmes qui furent les plus
grands savants dans ce domaine et qui répandirent
le plus activement l’usage et l’élevage des sym-
part, des peuples comme les Dragensmanns et les biotes. En parallèle, leur rôle d’intercesseur entre les
San’eshe se moquent bien du Concile Divin et, Lossyans et les forces naturelles évolua avec l’essor
d’autre part, jamais l’Église et ses Ordinatorii n’ont des Chanteurs de Loss.
réellement pu éradiquer les anciens cultes religieux.
Ces derniers perdurent sous des formes culturelles De manière générale, c’est aux chamans qu’on finit
privées et tolérées ou des organisations informelles par confier la surveillance, la garde et l’éducation
ayant au fil des siècles adopté une existence secrète. des Chanteurs de Loss. Les chamans pouvaient re-
connaître un Chanteur à des signes précurseurs avant
Parmi tous ces cultes, le plus influent et vivace, que que ce dernier ne vive le traumatisme de l’Éveil. Cela
l’Église considère comme la plus grande des hérésies évitait ainsi les accidents dont nous avons déjà parlé
qu’elle doit combattre après celle des Chanteurs de concernant le Chant de Loss.
Loss, est celui des chamans.
Les chamans participèrent à la naissance de l’ère des
Magiciens, entre -100 et 0 AC. Leurs connaissances
ORIGINE ET HISTOIRE de symbiotes et leurs talents particuliers de précep-
teurs pour les Chanteurs se répandirent partout. Les
Parler de l’histoire du chamanisme dans Loss est un Chanteurs de loss au summum de leur gloire, deve-
sujet compliqué. Parce que tout ce qui a été écrit nus des quasi-dieux pour les cités-États qu’ils domi-
avant l’An 0 AC a été détruit dans les décennies qui naient à l’époque, avaient dans leur ombre pour la
ont suivi la montée en force de l’Église. Et depuis, les plupart un chaman, mentor et conseiller auquel ils
chamans n’ont plus rien couché sur le papier. Ce qui étaient intimement liés.
pose encore aujourd’hui la question de la méthode
qui leur permet de transmettre leurs connaissances Puis vint la destruction d’Antiva et le Long-Hiver.
et leurs savoirs. Ce que savent les rares chercheurs Les chamans eurent le choix entre subir le sort des
et sages osant enquêter sur un sujet qui est une très Chanteurs ou se retourner contre eux. Beaucoup
bonne manière de finir sur un bûcher pour héré- choisirent l’un ou l’autre camp, mais ils furent
sie est donc très sommaire. Ce sont finalement les comme tout le monde décimés dans le chaos qui
Dragensmanns jamais envahis ni conquis par l’Hé- s’abattit sur les Lossyans. Une toute petite partie des
gémonie et l’Église qui ont gardé le plus de traces de chamans eut la sagesse de fuir les centres urbains.
l’histoire de leurs chamans. Leur culte aurait pu survivre et prospérer, mais
L’Église ne leur en laissa pas l’occasion. Elle mas-
Le chamanisme est la plus ancienne forme de culte sacra tous les groupes de chamans qu’elle trouva,
connue des Lossyans. Mais dans les premiers siècles traqua les fuyards sans relâche, détruisit les temples,
d’occupation de Loss, tandis que les Lossyans ap- tous les lieux sacrés et oblitéra toute trace écrite
prenaient à vivre avec leur nouvel environnement, qu’ils avaient pu laisser.
ils prirent une place particulière. Il y eut une mu-
tation de la nature des chamans qui suivit la dé- Depuis, l’Église n’a jamais cessé de pourchasser
couverte des symbiotes et leur domestication. Ce les chamans. Pas à cause de leur connexion aux

186
Ref. 14778
LES CHAMANS ET CULTES MINEURS

Chanteurs, cette raison ne fut que secondaire. Mais et communiquer. Aucun chaman ne parlera jamais
parce que les chamans sont tous profondément, abso- de ces choses-là ; c’est un secret bien gardé. Il est
lument, liés à une foi indéfectible et qui a un pouvoir cependant évident que l’ensemble des chamans
réel sur Loss, un pouvoir que l’Église ne comprend forme une union active aux desseins insondables ;
pas, mais qui menace son œuvre. Un chaman, même si l’Église les pourchasse si ardemment, peut-être
seul, peut faire des miracles qu’un Ordinatori ne peut est-ce parce qu’elle a de très bonnes raisons d’en
ni comprendre, ni même tenter d’imiter. Le danger avoir peur.
pesant sur les Dogmes et sur le pouvoir de l’Église
était trop grand. Depuis, alors qu’elle continue à tra-
L’Ambiose, le monde spirituel
quer les chamans sans relâche, l’Église ne comprend
toujours pas la nature du pouvoir de cet ennemi et Il s’agit d’un monde qui coexiste avec le monde réel
ne parvient pas à en trouver la source. Et malgré des et qui serait le fruit de l’union de tous les symbiotes
tentatives nombreuses d’étudier des chamans captu- qui peuplent Loss. Les chamans sont capables d’al-
rés, elle reste toujours aussi perdue face à ce qu’ils ler y plonger leurs sens et leur esprit et même d’y
sont. Sans doute certaines autorités en savent-elles voyager et, dans une certaine mesure, d’y commu-
plus qu’elles ne le prétendent. Mais elles jugent alors niquer et interagir. C’est cette capacité qui permet
cette information si dangereuse qu’il vaut mieux que aux chamans et aux communautés qui les abritent
l’ensemble de l’Église reste dans l’inconnu. d’échapper aux traques acharnées de l’Église et de
ses sbires. L’Ambiose offrirait d’autres pouvoirs en-
core plus mystérieux, mais hormis les chamans, pra-
LE CHAMANISME CONTEMPORAIN tiquement personne n’en connaît l’existence.

On pourrait penser que les chamans sont désormais Plus d’informations et de détails sur les secrets des
très peu nombreux. C’est bien le cas dans toutes les chamans et la nature de leur pouvoir dans le Livre 3
régions de Loss dominées par la foi du Concile Divin «Les secrets des chamans», page 57
et ses Ordinatorii ; mais en fait, non seulement ils n’ont
jamais disparu, mais leurs traditions et savoirs se per-
pétuent malgré tous les efforts menés par l’Église et
son Inquisition pour les éradiquer. Il y a donc peu
ANCIENS CULTES DES LOSSYANS
de chamans, mais ceux-ci se cachent bien, restant à Si l’Église du Concile Divin a, en apparence, écrasé
dessein isolés les uns des autres. Dans tout l’Athémaïs, toutes les anciennes formes de culte pour imposer
une région densément peuplée, plus grande que l’Italie le sien, jamais elle n’a interdit de croire en autre
et la Croatie réunies, il n’y a sans doute pas plus d’une chose que ses Dogmes. C’est un cas assez particu-
centaine d’entre eux. lier où l’Église a eu l’intelligence d’assimiler, pour
en neutraliser le pouvoir, toutes les religions qui lui
Les chamans n’ont plus de rôle social d’influence faisaient de l’ombre.
dans les cultures conciliennes ; ils restent discrets,
au plus loin du tumulte humain. Ils ne conservent de Les Lossyans sont superstitieux : ils ont besoin de
contacts qu’avec des populations de communautés donner du sens aux étoiles filantes, aux tempêtes et
isolées, jouant le rôle de rebouteux et soigneurs, à la foudre, aux catastrophes naturelles et aux phéno-
parfois de devins et de conseillers spirituels pour mènes les plus mystérieux. L’Église est, paradoxale-
un nombre limité de personnes qui participent à ment, très scientifique et pragmatique et préfère bien
leur dissimulation. souvent s’aventurer dans le terrain de la science et
de la culture pour les expliquer. Mais elle a récupéré
Par contre, dans les cultures non conciliennes, leur les explications et les imprécations des cultes des
rôle n’a pas changé et reste d’importance. Aussi peuples qu’elle a convertis, sans trop intervenir pour
bien chez les Dragensmanns que les Forestiers interdire de croire à ces superstitions. La seule règle
de l’Elmerase ou les San’eshe, le chaman est une est qu’aucune de ces croyances ne peut prendre le
des figures centrales de la cohésion sociale des pas sur les Dogmes de l’Église.
communautés. Il est le pendant des leaders et des
chefs, le détenteur des savoirs naturels, l’érudit qui Il reste donc des cultes et des croyances, des noms de
connaît la nature sauvage, mais aussi et toujours dieux, d’esprits et de créatures mythologiques qu’on
le mentor des Chanteurs de Loss, dont il assure invoque régulièrement sans se gêner. Et certains in-
l’éducation et dont il contrôle les risques. dividus prennent le rôle informel d’officiants pour
des cérémonies traditionnelles qui remontent à ces
Cependant, les chamans sont de toute évidence en- anciennes croyances et qui ont désormais été rema-
core bien plus que cela. Ils semblent tous être liés niées en intégrant les concepts du Concile Divin dans
par-delà les vastes étendues de Loss, disposent d’un leur structure même.
véritable et inexplicable pouvoir sur la faune et le
biotope lossyan et forment une seule et unique orga- Personne ne sera donc surpris que dans un village,
nisation informelle qui n’a jamais cessé d’échanger une vieille sorcière connaisse encore des rituels di-

187
Ref. 14778
CHAPITRE 4 : LES PARIAS

vinatoires ou des prières et sacrifices anciens pour pour que tout le monde fasse montre d’une grande
assurer la naissance d’un héritier mâle. Dans les prudence avec ces pratiques.
villes, pareillement, des hommes et des femmes ont
ces rôles et bénissent les maisons et les navires, les Nous ne vous parlerons pas ici en détail de ces
montures, les attelages, les troupeaux… Et font aus- cultes, croyances et esprits. Ce serait trop long à
si bien appel aux Êtres du Concile et leurs Saints aborder. Nous en avons décrit quelques-uns pour
Hommes, qu’aux anciens dieux et héros ou encore chaque peuple, mais tout ceci sera abordé plus riche-
aux esprits naturels locaux et aux ancêtres spectraux. ment dans le supplément à venir sur Les Peuples de
Loss. Retenez simplement que rebouteux, sorcières,
Cependant, il ne faut pas oublier que ces pratiques devins, ritualistes et hommes vénérant les anciens
sont seulement tolérées. Quoi qu’il se passe, quand dieux, d’Apollon à Odin en passant par la Terre-
un de ces officiants prend trop d’importance et d’in- Mère, Lug, ou Le Mandat Divin, ne sont pas rares.
fluence, l’Église interviendra : ses Inquisiteurs sont là Toutes ces croyances se fondent dans le culte du
pour ça. Et si, finalement, les bûchers pour hérésie Concile Divin… tant qu’elles ne viennent pas le re-
et sorcellerie sont rares, ils font suffisamment peur mettre en doute.
Ref. 14778
LES TERRIENS PERDUS

— La langue, tu la connaissais ?


— Heu… non, mais tu sais, moi, à part l’athémaïs et un peu d’argot étéoclien… De toute manière, j’avais pas
besoin de comprendre sa langue pour saisir qu’elle insultait et suppliait, ces trucs-là ; comme d’habitude, quoi.
Abba souffla par le nez. Le récit de Batsu ressemblait trait pour trait à la manière dont on trouvait parfois
des Terriens Perdus, errant nus sans savoir parler de langue lossyanne, près d’un village ou d’une communauté.
Les terriens étaient rares à s’échouer sur Loss. En général, leur arrivée était considérée comme une sorte de
présage positif et de cadeau ; surtout si c’étaient des filles. Encore plus si elles étaient rousses. Leur sort ne
différait pas vraiment de tout autre terrien que les Lossyans trouvaient. Elles étaient asservies elles aussi ; le
paradoxe était que si les rousses étaient très recherchées et désirées comme esclaves, tout le monde craignait
l’éventualité que ce soit alors une Chanteuse de Loss.
Les Chants de Loss, Armanth

LES TERRIENS PERDUS DE LOSS


E ncore aujourd’hui, aucun savant ne sait comment
les humains sont arrivés sur Loss. La légende
et les Dogmes disent que les Lossyans viennent des
l’eau, avant un flash et l’apparition d’une personne
qui n’y était pas l’instant d’avant.

Étoiles et y retournent à leur mort. Mais à peu près


tout le monde sait que les Lossyans ne sont pas ori-
ginaires du monde où ils vivent. Car il continue à
LES LOSSYANS ET LES TERRIENS
arriver des Terriens sur Loss. Les Lossyans n’ont aucune explication à ces
étranges phénomènes. Pour eux, souvent, l’appa-
Bien que ce soit rare, des habitants de la Terre, pla- rition d’une Terrienne nue est un présage positif,
nète que les savants et érudits connaissent au moins un cadeau des dieux qui sera rapidement capturé
par les témoignages et récits des Terriens, appa- et asservi. Les Lossyans considèrent les Terriens
raissent quelque part sur Loss. On distingue de leur comme des barbares, et donc les traquer et les as-
part deux récits. servir est tout à fait normal. Comme une femme de
la terre est un cadeau rare et précieux, elle aura de
la valeur dans une vente aux esclaves ; les Lossyans
LES PRÉLEVÉS en profitent. Et un terrien perdu sur Loss ne sur-
vit de toute manière pas longtemps sans l’aide de
Dans le premier cas, qui arrive le plus souvent à des Lossyans. Quelques-uns s’en sortent cependant, et
femmes citadines, elles se souviennent s’être endor- s’adaptent à ce nouveau monde, qu’ils en acceptent
mies seules chez elles ou avoir eu un étourdissement les règles, ou qu’ils luttent contre. Et bien sûr, les
en sortant seules d’une boîte de nuit, ou dans un coin plus érudits des Lossyans sont curieux du savoir des
de rue un soir, toujours seules, et ne se souvenir de terriens et de leur monde, et les recherchent pour
rien, sauf de leur réveil, nues, à proximité directe d’un leurs informations.
village ou d’une ville. La plupart d’entre elles sont
persuadées d’avoir été droguées ou enlevées, mais ne À noter que l’Église du Concile, elle, est très claire
se rappellent rien. sur le sort des Terriens : soit ils sont asservis, soit
ils sont tués. Donc, les Terriens qui ont pu survivre
à leurs premiers temps sur Loss et s’y adapter, sou-
LES ÉGARÉS vent avec de l’aide, apprennent rapidement à ne pas
dévoiler leur origine.
Dans le second cas, bien plus rare, où n’importe qui
apparaît avec ses vêtements et ce qu’il avait dans
les poches, les sujets disent avoir senti alors qu’ils
vaquaient à leurs occupations une odeur électrique,
et une sensation désagréable et perturbante de ne
plus rien peser pendant un bref instant. Puis une vive
douleur les a étourdis en même temps qu’un violent
flash les aveuglait. L’instant d’après, ils se retrou-
vaient perdus dans un nouvel environnement.

Quelques très rares récits souvent mis en doute dé-


crivent ce qu’aurait vu un Lossyan à l’instant où un
terrien est apparu devant lui : un picotement élec-
trique, un miroitement de l’air, comme une onde sur

189
Ref. 14778
INDEX

INDEX
A L
Adventores : 13, 14 Lampe à loss : 32, 182
Aînés : 150, 151 Légende : 13, 25, 96
Anciens : 12-15, 29, 34, 51, 53, 55, 105, 115, 121, 127, 128, 131, Linci : 40, 80, 152
140, 164, 169, 171, 180, 187 Linotorci : 50, 142, 168
Antagonistes : 42 Long-Hiver : 8, 11, 18, 21, 24, 30, 34, 45, 46, 57, 138, 140,
Apostats : 48, 49, 53, 102, 133, 134, 176, 190, 182, 183, 184, 186
Automates : 17, 29, 32, 171 Loss-cristal : 8, 29, 113, 127, 168, 169, 174
Loss-métal : 4, 11-14, 17, 18, 26, 29, 30-36, 44, 71, 82, 86,
C 95, 99, 104, 109, 118, 124, 128, 135, 136, 146, 152, 155, 165,
168-170, 173, 174, 182, 183
Capitale : 5, 22, 86, 112-137
Chaman : 42, 105, 186, 187
Chamanisme : 5, 93, 180, 186, 187 M
Chant de Loss : 8, 11, 30, 58, 138-140, 180-186 Maître-marchand : 6-8, 11, 71, 82, 86, 90, 102, 114, 115, 127,
Chanteurs de Loss : 5-13, 26, 27, 30, 33, 44-48, 54, 57, 81, 146, 148, 149, 150, 151, 153, 167
84, 86, 92, 93, 103, 105, 108, 113, 138, 139, 143, 145, 169, 174, Mammalien : 4, 18, 21, 22, 34-37, 75, 76, 92, 107, 112, 113,
180-189 120, 122, 128, 131, 132
Concile Divin : 3, 5, 11, 12, 20-25, 28, 33, 47, 62, 86, 88, Médecine : 5, 12, 130, 162, 168, 170, 177, 179
90, 94, 98, 100, 104, 107, 108, 114, 117, 122, 123, 138-143, Meneur de jeu : 16
154, 178, 186-188 Mers de la Séparation : 11, 20-23, 26, 31, 44-54, 59, 64,
Conseil des Pairs : 86, 90, 114, 146-153, 170, 176 72-76, 82, 88, 90, 91, 95, 98, 99, 102, 109, 112-114, 118,
Cour des Ombres : 5, 86, 115, 154, 155, 157 122-128, 131-138, 143, 146, 148, 152, 159, 164, 167, 173, 174,
177, 178
D Morrow : 34, 62, 117, 124, 131
Moteurs à lévitation : 29, 31, 32, 47, 152, 169, 173, 174, 175, 176
Dogmes : 11, 12, 26, 27, 30, 46, 47, 51, 55, 64, 70, 81, 86,
Motivation : 14
88, 94, 99, 104, 107, 123, 138-143, 152, 158, 159, 165, 184,
187, 189
Draekya : 34-39 N
Dynamos à loss : 17, 32, 168, 169 Navires lévitants : 5, 12, 14, 15, 22, 29, 30, 32, 47, 48, 50,
51, 114, 117, 119, 122, 123, 130, 137, 162, 169, 173, 174, 175, 185
E
Église : 3-12, 15, 20-33, 42-73, 77-108, 114-117, 122, 123, 132, O
136-154, 158, 165, 166, 170, 172, 180-189 Orchys de Parcia : 30, 140
Équipement : 33, 171 Ordinatorii : 23, 24, 31, 46, 53, 55, 64, 73, 89, 99, 100, 134,
Esclavage, esclave : 3, 12, 26, 28, 33, 40, 51, 62, 63, 73, 77- 140-142, 145, 159, 168, 187
84, 89, 92-95, 98-103, 106-109, 127, 140, 143-146, 153, 154,
160, 177, 184, 185 P
Espicien : 141-144
Parias : 30, 180
Expérience : 15, 48, 57, 112, 169
Personnage-joueur (PJ) : 13, 14, 178
PEUPLES 
F Ar’anthias : 71, 73, 88, 89, 116, 117
Femme d’épée : 73, 158-160 Athémaïs : 11, 12, 22, 26, 27, 48-53, 62-66, 70-74, 88-
99, 102-105, 108, 109, 113-115, 118, 119, 133, 135, 145-148,
G 152, 159, 160, 170, 177, 187
Dragensmanns : 23, 27, 37, 46, 47, 53, 57, 62-65, 70-74,
Génie : 12, 17, 89, 130, 160, 164-169, 173
88, 91-99, 107, 121, 122, 129-131, 166, 168, 173, 177, 182,
Gillys : 65, 66
184, 186, 187
Guilde des Marchands : 5, 12, 22, 23, 27, 50-52, 78, 82-86,
Erebs : 27, 57, 73, 92, 93, 105, 115, 119, 120
113, 114, 118, 125, 126, 132, 136, 146-154, 165
Étéocliens : 62, 64, 74, 88, 94, 95, 96, 103, 120, 121, 129,
H 131-133
Forestiers : 23, 48, 49, 57, 62, 63, 70, 73, 74, 92, 94, 95,
Haut-Art : 5, 12, 18, 26, 27, 46, 47, 50, 68, 77, 78, 80, 81, 96, 120, 121, 129, 131, 187
82, 84, 98, 101, 139, 143, 146, 148, 184, 185 Gennemons : 50, 52, 53, 65, 73, 97, 98, 107, 121, 128,
Haut-prince : 155, 157 129, 139
Histoire de Loss : 4, 18, 24, 43, 51, 124, 140, 182 Hégémoniens : 48, 65, 71, 73, 88, 98, 99, 106, 107, 120,
121, 122
Hemlaris : 22, 26, 47-53, 63-66, 71-73, 76, 88, 89, 91,
95-101, 113, 116, 117, 125-128, 141, 146, 148, 152, 159, 160,
166, 168, 172, 175, 176

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INDEX

Imareth : 47-53, 76, 82, 89, 91, 95, 108, 109, 113, 115, 127,
128, 133, 135, 146, 152, 160
S
Jemmaïs : 22, 23, 48, 49, 65, 72, 73, 102, 103, 115, 133, 134, Sbires : 187
135, 148, 182, 184 Séraphins : 151, 157
Nomades des Franges : 72, 91, 93, 103, 114, 115, 118, 175 Sociétés secrètes : 12, 165
San’eshe : 35, 37, 52, 57, 72, 73, 77, 82, 91, 93, 105, 106, Spécialisation : 191
112, 113, 120, 135, 136, 167, 182, 184, 186, 187 Symbiote : 7, 8, 35, 38, 39, 40, 42, 44, 49, 66, 146, 153,
Svatnaz : 46, 72, 82, 95, 106-108, 121, 122 157, 177, 178
Teranchens : 53, 64, 72, 74, 88, 108, 109, 127, 135, 136, 160
Primarque : 141 T
Prophète : 49, 50, 107, 122, 138, 141, 151 Technologie : 4, 17, 18, 21, 28-32, 47, 91, 113, 162, 165, 167,
168, 169, 173
Q Terriens Perdus : 21, 30, 84, 164, 165, 180, 182, 189
Quaesitori : 124, 142 Thanataires : 47, 138, 139, 141, 144
Quaetirs : 149 Toxine : 21

R V
RÉGIONS : VERTUS : 4, 12, 18, 25, 28, 54-65, 70, 77, 88, 90-108, 139,
Archipel des San’eshe : 112 141, 144, 158, 180, 185
Athémaïs : 11, 12, 22, 26, 27, 48-53, 62-66, 70-74, 88- Courage : 12-15, 18, 25, 54, 55, 58, 70, 77, 88, 91, 93, 95,
95, 98, 99, 102-105, 108, 109, 113-115, 118, 119, 133, 135, 100, 102, 105, 107, 180
145, 146, 148, 152, 159, 160, 170, 177, 187 Foi : 18, 25, 54, 57, 58, 93
Armanth : 11, 12, 22, 23, 26-28, 51-53, 60-65, 72, 77-84, Honneur : 12, 13, 18, 25, 28, 54, 58, 62, 63, 64, 70, 77,
88-93, 98-103, 108, 113-115, 120, 123, 126, 127, 131, 132, 88-100, 104, 105, 180
136, 145-167, 170-173, 176, 189, 190 Sagesse : 12, 13, 18, 25, 54, 56, 58, 70, 77, 90, 91, 93, 94,
Cités-Unies : 23, 26, 51-53, 65, 71-73, 76, 88, 89, 91, 95, 95, 99, 102, 104, 105, 108, 180, 191
99, 100, 104, 108, 109, 113, 116, 117, 135, 146, 148, 152, Vesseris : 148, 191
159, 160 Vie quotidienne : 4, 5, 17, 18, 26, 59, 61, 63, 65, 67, 69, 71,
Allenys : 51, 52, 88, 89, 116, 117 73, 75, 158, 191
désert des Franges : 53, 113-115, 118,
Erebheïm : 115
forêt de l’Elmerase : 120-122, 131,
Forêt sans Fin : 121-124, 129, 130, 131
Hégémonie : 11, 12, 22, 23, 26, 42, 45-53, 61, 62, 65, 67,
72, 74, 78, 82, 89-92, 95-104, 107, 108, 120-125, 128-130,
133, 141, 145-148, 152, 159, 168, 170, 176, 186
Anqimenès : 11, 12, 22, 23, 27, 46, 47, 53, 78, 91, 98,
99, 100, 108, 114, 121-124, 132, 138-143, 148, 152, 168,
172, 173, 190
Hemlaris : 22, 26, 47-53, 63-66, 71-73, 76, 88-91, 95, 97,
98-101, 113, 116, 117, 125-128, 141, 146, 148, 152, 159, 160,
166, 168, 172, 175, 176
Cymiad : 22, 23, 50-52, 80, 100, 101, 125, 126, 170
Imareth : 47-53, 76, 82, 89, 91, 95, 108, 109, 113, 115, 127,
128, 133, 135, 146, 152, 160
Marches de Gennema : 22, 50, 98, 123-160
Neiges-Dragon : 45, 49, 106, 121, 122, 129, 130, 131, 166
Dragensvard : 51, 92, 130, 131
Plaines de l’Étéocle : 22, 23, 26, 48, 51, 64, 72, 95, 99,
122, 124, 131-133, 176,
Nashera : 47, 50, 51, 94, 95, 124, 131-133, 154, 176
Rift : 7, 22, 48, 102-104, 115, 119, 131-135
Terancha : 23, 49, 51, 52, 65, 89, 91, 113, 127, 135, 136,
146, 148, 152
Khoïemonos : 109, 118, 135, 136, 146
Reliques : 139, 144, 155
Richesses : 14, 116, 120, 137

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pour le compte des éditions Lynks, 102 rue de Miromesnil 75008 Paris
ISBN version de base : 979-10-97434-39-7
ISBN version Collector : 979-10-97434-40-3
Dépôt légal : première édition – octobre 2019
191
Ref. 14778

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