Technique D'analyse de Contenu
Technique D'analyse de Contenu
Technique D'analyse de Contenu
CONTENU
1
INTRODUCTION A L’ANALYSE DU DISCOURS (L1)
I LES GENRES
Le récit
La description
L’explication
L’évaluation
L’argumentation
La situation d’énonciation
Il convient de distinguer acte de communication (englobant) et acte
d’énonciation (spécifiant), et donc situation de communication et situation
d’énonciation
LE GENRE
- Les genres
La notion de genre telle que définie par Bakhtine (1979) qui estime que « tout énoncé
pris isolément est, bien entendu, individuel, mais chaque sphère d’utilisation de la langue
élabore ses types relativement stables d’énoncés », et c’est ce qu’il appelle les genres du
discours.
« Tout discours ou énonciation est à prendre avec les deux faces qui le caractérisent,
c’est-à-dire que tout discours est déterminé autant par le fait qu’il procède de quelqu’un
que par le fait qu’il est orienté vers quelqu’un et que jamais la communication verbale ne
2
. » (p265)
pourra être comprise et expliquée en dehors de ce lien avec la situation concrète
Ainsi, notre parole est fonction d’un genre et chaque genre est associé à des moments
et à des lieux d’énonciation spécifiques, à une régularité. Qui parle de lieu et de
moment d’énonciation, évoque la situation de communication ainsi que le contexte.
Or, on ne peut les envisager sans tenir compte des participants.
Nous considérons, comme Vion (1992), que tout discours porte les traces de dialogue,
plus ou moins explicites, avec des opinions et des partenaires potentiels, imaginaires
ou réels. Selon Jacob (1990), Paradoxalement, une vraie communication suppose des
individus assumant leurs différences. (p 159)
Comme François (1989), avant lui, écrivait qu’il faut une différence de potentiel entre
les discours des locuteurs pour qu’un dialogue fonctionne car ceux-ci doivent
apparaître dans leurs distances, Jacob fait de la différence, l’âme de la
communication.
La notion de genre ayant été traitée par plusieurs linguistes, nous proposons un
panorama de définitions. Pour Adam (1999), il faut faire la différence entre genres et
types de textes.
Pour qu’il y ait discours, il faut qu’il y ait un échange entre deux interlocuteurs
qui connaissent les intentions de l’autre quant à la finalité de leurs discours.
Car, tout le texte est orienté en fonction du but recherché.
Ce qui revient à dire, comme Bakhtine, que tout texte s’inscrit dans une situation de
communication déterminée par la visée qui détermine le type d’influence que
l’énonciateur peut avoir sur le destinataire..
3
produire de la parole (en articulant et en combinant des sons et des mots
selon les règles de la grammaire) ;
Les genres discursifs sont mobilisés par les types communicationnels. Parlant de
discours et de communication, définissons ces deux notions.
La communication
Ce qui permet de faire allusion à l’école de Palo Alto (1972) qui affirme qu’on ne peut
pas ne pas communiquer.
Le discours est le lieu de construction du sens. Pour faire sens il faut faire preuve
4
d’une compétence de communication. Autrement dit, il faut ajuster son discours en
fonction de son interlocuteur.
Le discours
Le discours, c’est le langage mis en action, la langue est assumée par le sujet parlant.
Le discours serait le langage considéré comme une action, un acte.
Autrement dit, le discours est à la fois porteur d’un message et instrument d’action.
Benveniste fait le lien entre la langue, le langage et le discours. Si la langue est un
système commun à tous, le langage est l’usage individuel de la parole. C’est en tant
qu’il inscrit l’autre dans son langage que celui qui parle passe du langage au discours.
Parce que Bakhtine (1977) pose que le langage s’adresse toujours à quelqu’un. Vion
(1995) reprend le raisonnement de Bakhtine puisqu’il affirme, à son tour, que tout
discours, oral ou écrit, est un discours adressé qui s’adapte à l’autre, que ce soit dans
la mise en mots, dans l’anticipation des réactions. Ainsi, Bakhtine annonce une
perspective interactive du langage.
« Il est déterminé tout autant par le fait qu’il procède de quelqu’un que par le fait qu’il est
orienté vers quelqu’un . » (p : 123)
Le discours est surtout, selon Benveniste qui le prend dans sa plus large extension :
5
d’influencer l’autre en quelque manière. » (ibid p : 242)
Puisque la théorie des actes de langage conçoit la prise de parole du locuteur comme
une véritable action, c’est-à-dire que l’homme parle et agit par le discours sur son
interlocuteur, nous pouvons considérer que le discours en acte se transforme en un
instrument de pouvoir.
6
Les types communicationnels (TC)
Reprenons le point de vue de Vion (1992) qui estime que communiquer implique que
les sujets parlent de positions sociales et donnent vie à des rôles. Dans la mesure où
on ne peut parler sans le faire d’une place et convoquer l’autre dans une place
symétrique ou complémentaire, toute interaction s’identifie à partir des places qui
visualisent la forme effective prise par la relation sociale entre deux individus.
Il s’agit de mettre en évidence les régularités et les invariants du discours qui sont
des normes. Ainsi, notre parole est fonction d’un genre et chaque genre est associé à
des moments et à des lieux d’énonciation spécifiques, à une régularité.
Le travail de Bakhtine prend pour objet d’étude, des discours écrits et oraux. Mais ce
sont des discours quotidiens. Notre corpus est composé d’un discours oral
institutionnel. C’est la raison pour laquelle nous faisons appel à Kerbrat et Traverso :
« Il va de soi que les productions orales relèvent elles aussi « de genre » divers, c’est-à-dire se
distribuent en « familles » constituées de productions variées mais présentant un certain « air
de famille ». Cela est attesté par l’existence de nombreux termes que la langue met à la
disposition des usagers pour caractériser tel échange particulier comme une conversation, une
discussion ou un débat, du bavardage ou du marchandage, une interview, un entretien ou une
consultation, un cours ou un discours, une conférence ou une plaidoirie, un récit ou un
rapport, une conférence ou une dispute, etc... Pour clarifier un peu la situation, il peut être
utile de rappeler la distinction proposée par certains auteurs entre deux types d’objets qui
peuvent également prétendre au label de « genres ». Prenons l’exemple d’un guide touristique :
c’est bien un « genre » de texte, mais qui relève de différents « genres de discours – descriptif,
didactique, procédural, promotionnel. » (p 41)
Les (TC) que Kerbrat et Traverso (2004) appellent (G1) correspondent, à l’oral, à un
ensemble d’échanges plus ou moins institutionnalisés dans une société donnée. Ce
qui est le cas du CS, de l’interview, du débat, de la conférence… Ces événements
communicationnels sont associés à des situations de communication et à des
communautés linguistiques.
Les frontières des (G1) et des (G2) ne sont pas étanches. Ce qui fait dire à Kerbrat et à
Traverso (2004) que les frontières de ces deux genres sont floues. Ces observations
nous ramènent à Vion (2002) qui postule que dans toute situation de communication,
il y a des modules. C’est peut-être dans ce sens que Charaudeau (2006) écrit que le
genre est d’abord situationnel car c’est la situation qui met en place les conditions de
7
production du discours. Autrement dit, un discours s’élabore par ses conditions de
production. L’étude des genres communicationnels nous permet de dire qu’un
échange se fait en fonction d’un certain enjeu qui est la construction du sens.
« Outre le fait que les types peuvent se combiner entre eux, un type déterminé intervient
toujours à l’intérieur d’un genre qui le détermine partiellement, et réciproquement. Ainsi, un
récit élaboré s’intégrera à divers genres comme la conversation, le recueil d’histoires drôles, le
roman, l’article de presse, le rapport de police, etc. autrement dit, le récit repose sur un rapport
de place interlocutif du type « narrateur/narrataire » qui se subordonne généralement à un
genre ou à une interaction caractérisant un type de « relation sociale ». » (101-102).
Les figurations textuelles qui sont à la base de toutes les productions langagières,
Kerbrat et Traverso les nomment (G2), c’est-à-dire les genres qui correspondent à
certaines catégories discursives (l’explication, l’évaluation, la description, la
narration, l’argumentation…).
Nous nous contentons des genres discursifs, des types communicationnels tout en
observant que le genre discursif alimente le type communicationnel. Les (GD) que
Adam (1992) appelle des types de séquences, sont définis par des critères qui leur
sont internes dans la mesure où une argumentation, une explication, un récit se
reconnaissent comme tels en dehors des (TC) auxquels ils sont liés.
Kerbrat et Traverso (2004) présentent les (GD) ou (G2) qui sont reconnaissables en
dehors des (TC) ou (G1) comme des sous-types communicationnels. Parce qu’ils
peuvent représentés des modules conversationnels. C’est-à-dire qu’une partie de
l’échange peut consister en un récit, une explication ou une description. Ce qui rend
les frontières des types communicationnels flexibles. Cependant, la conclusion que
nous faisons à l’issue de cette démarche méthodologique, c’est que les (TC) sont
composés de (GD) ; les genres discursifs participent à la mise en place, à la
construction des types communicationnels qui dépendent de la situation de
communication et du contexte.
8
BIBLIOGRAPHIE
ADAM (1990). Eléments de linguistique textuelle. Théorie et pratique de l’analyse textuelle. Liège,
Pierre Mardaga éditeur.
ADAM (1992). Les textes : types et prototypes. Récit, description, argumentation, explication et
dialogue. Paris, Nathan université.
BAKHTINE (1979, 1984). Esthétique de la création verbale. Paris, Gallimard.
BAKHTINE (VOLOCHINOV) (1987). Le marxisme et la philosophie du langage. Essai d’application
de la méthode sociologique en linguistique. Paris, Les éditions de minuit.
BENVENISTE (1966). Problèmes de linguistique générale. Paris, Gallimard. (Tome1).
BENVENISTE (1974). Problèmes de linguistique générale. Paris, Gallimard. (Tome 2).
CHARAUDEAU (1997). Le discours d’information médiatique. La construction du miroir social.
Paris, Nathan.
CHARAUDEAU, MAINGUENEAU (sous la dir) (2002). Dictionnaire d’analyse du discours. Paris,
Seuil.
FRANCOIS (1998). Le discours et ses entours. Essai sur l’interprétation.Paris, l’Harmattan.
GOFFMAN (1988). Les moments et leurs hommes. Paris, Seuil. Textes recueillis et présentés par
WINKIN Y.
KERBRAT-ORECCHIONI (1990, 1992, 1994). Les interactions verbales. Paris, Armand Colin (Tomes
1, 2, 3).
KERBRAT-ORECCHIONI (1997, 1999). L’énonciation. Paris, Armand Colin / Masson.
KERBRAT-ORECCHIONI (2001). Les actes de langage dans le discours. Théorie et fonctionnement.
Paris, Nathan Université.
MAINGUENEAU (1991a). L’analyse du discours. Introduction aux lectures de l’archive. Paris,
Hachette.
VICTORRI, FUCHS (1996). La polysémie. Construction dynamique du sens. Paris, Hermes.
VION (1992). La communication verbale. Analyse des Interactions. Paris, Hachette supérieur.
WATZLAWICK, HELMIN BEAVIN, JACKSON (1972). Une logique de la communication. Paris,
éditions du Seuil.
REVUES
CAHIERS DE LINGUISTIQUE FRANCAISE 1990 :Marquage linguistique, inférence et interprétation
dans le discours Genève, Université de Genève
CAHIERS DE PRAXEMATIQUE 1997 : La contextualisation de l’oral Université Paul Valéry,
Montpellier III, n°28
ARTICLES
FRANCOIS. Communication, interaction, dialogue… Remarques et questions in Le Français
9
Aujourd’hui n° 113 : 11-23
10
LA MOBILISATION DES GENRES DISCURSIFS
- le récit
- la description
- l’explication
- l’évaluation
- l’argumentation
Ainsi, notre parole est fonction d’un genre et chaque genre est associé à des moments
et à des lieux d’énonciation spécifiques, à une régularité. Qui parle de lieu et de
moment d’énonciation, évoque la situation de communication ainsi que le contexte.
Le fait de considérer la description, la narration comme des genres, nous oriente vers
Adam qui en fait des types de séquences qu’il place avec les types de discours et les
genres de discours. Ces genres sont transversaux. Ainsi, on peut retrouver
l’explication, la narration, l’argumentation, dans différents discours, d’où la nécessité,
avec Adam (Pratiques n°56, 1997), de faire la différence entre type et genre de
discours.
11
- Les types de discours : proposent des catégories élémentaires et instables qui
permettent de distinguer le discours journalistique, le discours littéraire, le discours
politique, publicitaire…
Les genres de discours : sont des textes ou des discours particuliers, qui sont
historiquement définis et qu’on peut rapporter à des lieux d’énonciation déterminés.
Ce qui revient à dire, comme Bakhtine, que tout texte s’inscrit dans une situation de
communication déterminée par la visée qui détermine le type d’influence que
l’énonciateur peut avoir sur le destinataire.
La description
Ce qui caractérise la description, c’est qu’elle fournit des informations à travers
« l’énumération des attributs » de l’objet à décrire (Adam 1992 : 81). C’est-à-dire que l’on
fait une énumération des parties ou des aspects d’un objet que l’on a vu. En
substance, la description donne à voir mais, selon Jaffré (1998), une description n’est
jamais une collection désordonnée de faits ou de données. Apotheloz (1998) fait
remarquer que la description ne peut jamais épuiser son objet. En un sens, on ne finit
jamais de décrire une chose. Ainsi, la description n’aurait pas un caractère exhaustif.
Ce qui ne l’empêcherait pas d’être une façon de présenter une réalité. En fait, l’une
des caractéristiques de la description est de fournir des informations qui donnent
l’impression de pouvoir visualiser l’objet dont il est question en le rendant le plus
visible possible. Celui qui décrit, choisi de faire cette énumération dans un ordre qui
n’est pas déterminé à l’avance.
Cet ordre qu’Adam considère comme le fruit du hasard ne semble pas l’être pour les
12
auteurs de l’ouvrage collectif édité par Reuter. C’est ainsi qu’Apotheloz définit la
description selon les critères suivants : « d’abord, l’activité descriptive subit souvent des
contraintes imposées par les objets eux-mêmes (…) Une partie du travail consiste d’ailleurs à
extraire des invariants » (pp 19-20), qui sont le fait du descripteur qui donne un sens à
la description.
Apotheloz semble dire que l’ordre de la description est imposé par l’objet à décrire.
En extrayant les invariants, le locuteur construirait le sens de la description. Les
invariants étant les traits qui reviennent souvent.
Si le descripteur est maître de l’ordre de son plan on pourrait se demander s’il décrit
tout ce qu’il voit ; s’il ne sélectionne pas ce qu’il décrit. En un sens, l’ordre et la
sélection dans la description ne sont-ils pas liés ?
Description et explication
Nous citons Pagoni-Andréani (1998) qui écrit que « les explications en « comment » sont
de type descriptif » (p 108).
L’explication
Pour commencer, nous proposons la définition que Grize (1997) donne de
l’explication. Il commence par souligner la polysémie de ce terme. Il en tire les
significations : communiquer, développer, enseigner, interpréter, motiver, rendre
compte. Et constate que seuls les verbes motiver et rendre compte nécessite
l’opérateur « pourquoi ».
Puisque nous sommes dans le domaine médiatique, nous nous intéresserons à deux
textes qui portent sur l’explication dans les médias. Celui de Charaudeau (1997 pp :
243-247) et l’article de Moirand (1999 pp 141-167, sous la direction de Beacco). Il en
13
ressort qu’expliquer, c’est éclaircir, faire comprendre, montrer ou faire savoir. En fait
l’explication cherche à combler une lacune. Dans le domaine médiatique, le verbe
expliquer peut introduire une demande ou une offre d’explication. Il peut avoir pour
synonyme le verbe dire. Ce qu’il faut noter, c’est que le discours médiatique inscrit
un public à qui « il donne à voir et apprend à voir » (Moirand p 153). L’auteur qui
reprend la définition de Grize, postule que la demande d’explication propose deux
opérateurs, « comment on fait ? » et « pourquoi ? ». De ces questions, il ressort que
l’explication est inséparable de la compréhension. Mais, pour qu’il y ait explication,
nous ferons le lien entre ce que disent Moirand et Charaudeau et les trois conditions
que Grize (1997) donne de l’explication. Pour qu’un discours soit reçu comme une
explication, il faut que :
2. Ce qui fait question n’est pas dans son existence mais dans sa cohérence
avec des savoirs établis par question ; ce dont il est question est incomplet.
3. Celui qui propose une explication doit être tenu pour compétent en la
matière et neutre. La compétence conduit à un discours d’autorité, il dépend du
« capital d’autorité » du locuteur. » (p 105).
14
Définit comme suit :
Mais qu’est ce que la justification ? Elle sert à montrer. Pour faire la différence entre
les deux opérateurs « pourquoi » et « comment », il émet l’idée selon laquelle les
questions en « comment » sont justificatives. La justification vise à apporter des
informations. Mais n’est-ce pas amener à comprendre en comblant un certain vide
chez la personne à qui on s’adresse ? Veneziano et Hudelot (2002), dans un article
traitant de la conduite Explicative / Justificative (CEJ), font la différence entre
justification et explication.
« Elle est rentrée parce je l’ai vue ». Pour l’explication, « je me dépêche parce que je
suis en retard ».
Nous avons vu, dans la partie consacrée à la description, qu’il pouvait y avoir un lien
entre explication et description. La description participe de l’explication. Car il s’agit
de dire comment quelque chose ou quelqu’un est. On note aussi que la notion
d’explication implique aussi bien une démarche descriptive qu’une démarche
argumentative. Mais, ce qui nous importe, c’est que :
L’évaluation
Nous commencerons par proposer qu’il y a de l’évaluation dans la plupart des
15
conduites sociales. A tout moment et dans chacun de nos actes, nous évaluons et
sommes évalués. Si cette notion est inhérente à notre vie, à nos actes, à nos gestes, il
est préférable de se poser la question de savoir ce qui est évalué et qui évalue. Une
première tentative de définition nous fait dire qu’évaluer consiste à apprécier par
rapport à une norme. La définition que nous proposons est la suivante : l’évaluation
est un positionnement. Il y a de la subjectivité. Cependant nous allons dire avec
Moirand (1990) qu’évaluer, c’est comparer. Mais celui qui évalue doit avoir l’autorité
nécessaire pour le faire.
Spécifique du locuteur. C’est dans cette mesure qu’ils peuvent être considérés comme
« subjectifs » » (1980 : p 85).
Autrement dit, la présence d’un évaluatif est fonction de l’idée que le locuteur se fait
de la norme d’évaluation par rapport à l’objet à évaluer. Pour illustration, nous avons
l’exemple de l’auteur :
Il est dit que cet éléphant est petit pour un éléphant mais plus gros pour les autres
animaux.
16
- Les évaluatifs de comparaison
« Ils énoncent, en même temps qu’une propriété de l’objet qu’ils déterminent, une réaction
émotionnelle du sujet parlant en face de cet objet. Dans la mesure où ils impliquent un
engagement affectif de l’énonciateur, où ils manifestent sa présence au sein de l’énoncé, ils
sont énonciatifs » (1980 : p 84).
C’est ainsi qu’ils codent l’effet de l’objet sur le locuteur : drôle, poignant,
dégoûtant…Avec les évaluatifs affectifs, le locuteur met son émotion en mot. A la
suite de Kerbrat, Moirand (1990 : 113) estime qu’ils « décrivent, en même temps qu’ils
caractérisent un objet, une personne, une réaction émotionnelle devant cet objet ou cette
personne : c’est beau, c’est émouvant… »
L’évaluateur peut aussi s’exprimer en disant « on adore », « époustouflant ». C’est une
catégorie que l’on retrouve souvent dans la presse.
« Comme celle des adjectifs précédents, leur utilisation implique une double norme :
Mais en plus, à la différence des précédents, les évaluatifs axiologiques portent sur l’objet
dénoté par le substantif qu’ils déterminent un jugement de valeur, positif ou négatif. Ils sont
doublement subjectifs :
17
- Dans la mesure où leur usage varie avec la nature particulière du sujet d’énonciation dont ils
reflètent la compétence.
- Dans la mesure où ils manifestent, de la part du locuteur, une prise de position par rapport à
l’objet dénoté. Le locuteur marquant ainsi sa présence » (1980 : pp 90-91).
La narration
Adam (1987 : 9) considère la narration comme « un mouvement vers un point ». Aussi,
pour parler de narration, il précise qu’il faut la représentation (d’au moins) un
événement qui est raconté par quelqu’un. Von Münchow (2001) nous aide à
différencier la narration de la description en parlant de la notion de causalité.
Faisant ainsi allusion au lien de cause à effet entre deux événements, deux actes.
Ce qui revient à dire que, dans le récit, il faut une succession minimale
d’événements ayant lieu en un temps t puis t+n. Il faut un début, un milieu et une fin.
Ainsi, pour qu’il y ait récit, les relations entre ces trois parties doivent être des
relations d’ordre. Tout se déroule dans le temps. C’est ce que montre le tableau
ci-après, emprunté à Adam (op cit : 49)
(agie ou subie)
18
enchaînement du type :
Voici les critères d’Adam, complétés par ceux de Laforest et Vincent parce que, de
notre point de vue, ils se ressemblent :
5 – Protagoniste humain
6 – Tension, dramatisation
Lorsqu’on raconte une histoire, on commence souvent par « ce que je vais vous
raconter s’est passé… » afin de montrer ou de signifier l’entrée dans le genre
discursif. Dans ce cas, il y a une antériorité des événements racontés.
L’argumentation
L’argumentation vise à convaincre, à amener l’interlocuteur à avoir la même
conclusion que soi. C’est ce qui ressort des définitions proposées par certains auteurs
comme Adam, Plantin ou Grize. Adam (1997) qui, dans la perspective pragmatique,
considère tout texte comme ayant une visée illocutoire en ce sens qu’il a pour but
d’agir sur les croyances, les représentations ou le comportement de l’interlocuteur. Il
écrit : « on parle souvent en cherchant à faire partager à un interlocuteur des opinions ou des
19
représentations relatives à un thème donné, en cherchant à provoquer ou accroitre l’adhésion
d’un auditeur ou d’un auditoire plus vaste aux thèses qu’on présente à son assentiment. » (p
103).
BIBLIOGRAPHIE
20
KERBRAT-ORECCHIONI (2001). Les actes de langage dans le discours. Théorie et fonctionnement.
Paris, Nathan Université.
LAFOREST (sous la dir) (1996). Autour de la narration. Paris, Nuit blanche éditeur.
LEMPEREUR (textes édités par) (1991). L’argumentation. Liège, Mardaga. Colloque de Cerisy.
MOESCHLER (1996). Théorie pragmatique et pragmatique conversationnelle. Paris, Armand
Colin.
PLANTIN (1990). Essais sur l’argumentation. Introduction à l’étude de la parole argumentative.
Paris, éditions Kimé.
REBOUL, MOESCHLER (1998). Pragmatique du discours. De l’interprétation de l’énoncé à
l’interprétation du discours. Paris, Armand Colin.
REBOUL (1986). La rhétorique. Paris, Presses Universitaires de France. (2ème édition).
REUTER (éd) (1998). La description. Théories, recherches, formation, enseignement. Septentrion
Presses Universitaires.
VARGA (1989). Discours, récit, image. Liège, Pierre Mardaga éditeur.
REVUES
CALAP 1990 : Le jeune enfant et l’explication Actes du colloque international Paris 18 et 19 mai
1990, fascicule n° 7/8, CNRS, Université René Descartes
CAHIERS DE LINGUISTIQUE FRANCAISE 1996 :Approches modulaire, pragmatique et
expérientielle du discours et des énoncés Genève, Université de Genève, n° 18
PRATIQUES 1998 : La description n°99
ARTICLES
APOTHELOZ (1998). Logique de la description et du raisonnement spatial in La description.
Théories, recherches, formation, enseignement (Yves Reuter éd). Septentrion Presses
Universitaires : 17-21.
BALLY (1942). Syntaxe de la modalité explicite in Cahiers Ferdinand de Saussure. Société
genévoise de linguistique vol 2 : 3-13
BRASSART (1998). Le descriptif : perspectives psycholinguistique in La description. Théories,
recherches, formation, enseignement (Yves Reuter éd) Septentrion PU : 70-73.
BRONCKART (1998). La description dans les démarches de recherche en psychologie in La
description. Théories, recherches, formation, enseignement (Yves Reuter éd) Septentrion Presses
Universitaires : 155-169.
Patrick Charaudeau, "Discours journalistique et positionnements énonciatifs. Frontières et
dérives", Revue SEMEN 22, Énonciation et responsabilité dans les médias, Presses Universitaires
de Franche-Comté, Besançon, novembre, 2006, consulté le 29 avril 2011 sur le site de Patrick
Charaudeau - Livres, articles, publications.
CHATMAN (1991). Arguments et narration in L’argumentation (textes édités par LEMPEREUR A),
Liège, Mardaga.
HUDELOT, PRENERON, SALAZAR (1990). Explication, distance et interlocution chez l’enfant de
21
deux à quatre ans in Le jeune enfant et l’explication. Fascicule n° 7/8, CNRS, Paris, Université
René Descartes : 241-255.
JAFFRE (1998). Description et linguistique in La description. Théories, recherches, formation,
enseignement (Yves Reuter éd) Septentrion PU : 145-147.
LAFOREST, VINCENT (1996). Du récit littéraire à la narration quotidienne inAutour de la
narration, (sous la dir de LAFOREST). Paris, Nuit blanche éditeur : 13-27.
MOESCHLER (1996). Récit, ordre temporel et temps verbaux in Autour de la narration (sous la
dir de LAFOREST), Nuit blanche éditeur : 151-167.
NONNON (1998). L’activité descriptive comme démarche d’investigation in La description.
Théories, recherches, formation, enseignement (Yves Reuter éd) Septentrion PU : 88-91.
PAGONI-ANDREANI (1998). De la description à l’explication : analyse d’un processus de
construction des connaissances in La description. Théories, recherches, formation, enseignement
(Reuter éd) Septentrion PU : 105-121.
REUTER (1998). La description en question in La description. Théories, recherches, formation,
enseignement (Reuter éd). Septentrion PU : 34-57.
VENEZIANO, HUDELOT (2002). Développement des compétences pragmatiques et théorie de
‘esprit chez l’enfant : le cas de l’explication in Pragmatique et psychologie (BERNICOT,
TROGNON, GUIDETTI, MUSIOL). Nancy, Presse Universitaires de Nancy : 215-235.
Les auteurs qui ont étudié les relations entre les énoncés, se sont surtout intéressés
aux connecteurs. Mais la question qui se pose est de déterminer les critères qui
permettent d’interpréter l’approbation et la désapprobation. Aussi, allons-nous
mettre l’accent sur les marques qui permettent d’exprimer l’accord et le désaccord.
Parce qu’elles permettent de lier ou d’articuler des énoncés entre eux. Autrement dit,
ces marqueurs permettent de lier des répliques qui se répondent puisqu’ils
présentent une certaine logique entre ce qui précède et ce qui suit le marqueur. Mais,
les marques d’approbation ne font pas que lier deux répliques. Elles permettent aussi
d’expliquer le positionnement du locuteur par rapport à ce qui a été dit avant car
elles expliquent la relation du discours de l’un au discours de l’autre. Les marqueurs
qui nous intéressent sont situés en début de réplique. Parce qu’ils renforcent ou
affaiblissent une réplique qui va dans le même sens ou dans le sens contraire de ce
qui précède.
22
23
LES MARQUES D’ACCORD ET DE DESACCORD
Les marqueurs que nous analysons dans cette partie sont, essentiellement, des
adverbes qui permettent d’exprimer des enchaînements en accord et en désaccord.
Nous les appellerons des marqueurs d’approbation. Les marqueurs qui nous
intéressent sont ceux qui marquent le regard que le locuteur (2) porte sur la réplique
du locuteur (1). Or, nombre de textes portent sur la présence du marqueur dans un
emploi monologal et non dialogal. C’est ainsi que Vion (2001) - pour qui le
positionnement ne se fait pas dans la modalité - dans son article sur les modalités et
modalisations, cite Bally pour qui la modalité correspond au positionnement du
locuteur par rapport à ce qu’il est en train de dire et la modalisation à l’expression du
regard que ce locuteur porte sur son propre discours. Ce qui nous intéresse, c’est de
considérer les marqueurs dans une perspective dialogale. Parce qu’ils sont articulés
sur le discours antérieur ou sur la réplique de l’autre et qu’ils expriment la
possibilité donnée au locuteur de refuser ou d’accepter la réplique de l’interlocuteur.
Marquant ainsi la position que les locuteurs prennent l’un face aux propos de l’autre.
Parlant des adverbes, Vion dit qu’ils constituent un commentaire sur l’énonciation.
C’est-à-dire qu’ils donnent le degré d’acceptation ou de refus de la réplique de
l’interlocuteur. Ils renforcent, qualifient, éclairent l’existence d’une information qui
va dans le même sens ou non que ce qui précède.
Nous avons établi une liste qui montre la diversité des marqueurs. Aussi, nous
prendrons des exemples qui permettront d’illustrer cette diversité.
Les marqueurs
Oui, c’est vrai, tout à fait, Exactement, bien sûr, effectivement, absolument, sans doute
exact, ouais, oh oui, oh non, ah oui, ah non, non, mais, et, oui mais…
Avant de procéder à une étude détaillée de ces marqueurs, nous soulignons, avec
Arditty (1987), que les marqueurs « oui » et « non », peuvent s’analyser comme des
reprises contenant une répétition de tout ou partie de l’énoncé auquel ils répondent.
Avec pour conséquence que celui qui associe une reprise au marqueur d’approbation
24
« oui », assume, intègre ce que dit l’autre. Ce qui est l’expression d’un enchaînement
en accord.
OUI
L’une des valeurs de cet adverbe, c’est qu’il est une prophrase ; c’est-à-dire qu’il fait
partie des « adverbes-phrases d’affirmation » écrit Rossari (2004 : 194) qui cite Le
Bidois et Le Bidois (1967 : 42). Rossari le classe dans le lot des marqueurs qui ont la
propriété de signaler que le locuteur (2) valide un point de vue exprimé par le
locuteur (1). Afin d’illustrer son propos, elle prend des exemples (p 186). Nous allons
en reproduire deux (2) ci-dessous :
(1)
Jean : … mais votre grossièreté, ça, non… je vous préviens tout de suite que je ne l’encaisserai
pas ! Ah ! Vous avez la prétention de gouverner ici…
La Bonne : Oui
(2)
- Oui
Puis, elle constate que cet adverbe apparaît après une demande de confirmation mais
qu’il est aussi capable de réaliser à lui seul, en « emploi absolu », de valider une
assertion antérieure, de l’approuver. L’une des particularités de l’adverbe « oui »,
c’est qu’il permet une « justification » ; c’est-à-dire qu’il peut être associé à d’autres
marqueurs. Contrairement à Rossari, Danon-Boileau et Morel (1998) estiment,
« curieusement, que le « oui », à l’initiale d’une intervention est l’annonce d’un point
de vue divergent. En fait l’énonciateur souligne qu’il a saisi l’opinion de l’autre, et
que, après avoir examiné son propre point de vue, il va tenter de retrouver un
terrain d’entente » (p 99). Afin de confirmer ce qu’ils écrivent, ils prennent l’exemple
suivant où un couple discute de l’organisation de leur séjour au ski avec leurs enfants
(p99).
- Jean : non parce qu’il a peur sur les skis il est pas du tout casse-cou quand il connaît pas.
25
- Véronique : oui mais toi tu compares à l’an dernier il n’avait que quatre ans.
Dans l’analyse de l’exemple qu’ils prennent, Danon-Boileau et Morel n’ont pas intégré
le marqueur « mais » qui présuppose un point de vue divergent. Les auteurs ne citent
pas de cas de « oui » seul. Il est suivi de « mais ». Dans ce cas, il est normal que
l’adverbe « oui » soit un point d’appui qui permette d’exprimer un point de vue
divergent.
A partir des auteurs que nous venons de citer, nous voyons que l’adverbe « oui » est
polysémique car il a plusieurs valeurs. L’autre particularité de cet adverbe, c’est que
sa valeur dépend souvent de la valeur de ce qui le suit. C’est en ce sens qu’il permet
une justification.
Nous paraphrasons Kerbrat qui cite Coupland, pour dire que « oui », en emploi
absolu, est potentiellement phatique.
L’adverbe « oui », pose problème parce que nous restons dans l’incertitude. Aussi
pouvons-nous considérer que « oui », permet de confirmer les propos du locuteur (2)
et que c’est une vraie confirmation. Mais l’adverbe « oui » peut prendre une autre
valeur. En effet, avec « oui », le locuteur (2) peut demander la parole. Il y a un
troisième cas où ce marqueur d’approbation peut être considéré comme étant
phatique.
a )OUAIS
26
- ils marquent une approbation
Le marqueur « ouais » employé tout seul, peut être interprété de différentes façons.
D’abord, il répond à l’interpellation faite le locuteur (1). Ensuite, il marque une
approbation du locuteur (2). Les locuteurs font la même appréciation de ce qui se
passe sur le terrain. Enfin, « ouais » pourrait marquer l’approbation du locuteur (2)
par rapport à l’objet du discours. Il marque, ainsi que le disent Danon-Boileau et
Morel (1998), une approbation ainsi qu’une convergence coénonciative.
OH, AH
Selon Morel et Danon-Boileau (1998) dont le travail est fondé sur la description des
marques prosodiques, l’interjection « ah » marque le plus souvent l’étonnement, la
vrai surprise. Elle exprimerait aussi la convergence, l’approbation. Quant à « oh », il
marque la surprise désagréable, l’écart de point de vue. Associés avec un autre
marqueur, ils spécifient et modulent l’attitude de l’énonciateur.
« Oh oui », « ah oui », fonctionnent comme « ouais » ; c’est-à-dire des marqueurs qui
servent à montrer la position du locuteur par rapport à l’objet du discours. Il en est
de même lorsque les interjections « ah » et « oh » sont associées à l’adverbe « non ».
C’EST VRAI
Locution adverbiale à valeur de vérité et d’approbation. Comme si celui qui le disait
avait une légitimité pour le faire. C’est la marque que les locuteurs ont le même point
de vue. En fait, elle permet d’exprimer un même point de vue à partir de la légitimité
de celui qui parle (locuteur 2) par rapport au locuteur (1). A l’instar de Ducrot (1980)
qui analyse le marqueur « vraiment », nous dirons que « c’est vrai » porte sur la
réplique qui précède et qu’elle qualifie. C’est un marqueur qui montre l’évaluation
de la parole de l’autre et le fait que le locuteur (2) a accepté la réplique du locuteur
(1). Cependant, nous pouvons considérer que cette locution présente un arrière-fond
qui présuppose un désaccord et qui dessine la possibilité d’une opinion contraire.
Dire « c’est vrai » revient à dire que la réplique à laquelle cette locution est liée
27
pourrait être fausse.
Nous les avons mis ensemble parce qu’ils expriment, tous les trois, l’alignement des
locuteurs sur le même de point de vue. Ils qualifient la réplique qui les précède et
montrent que le locuteur (2) a accepté la réplique du locuteur (1).
Un enchaînement marqué par « oui » et « tout à fait » comme une montée dans
l’enchaînement en accord. Il accentue l’accord. Une forme d’insistance aussi qui
montre que « tout à fait » est une nuance de l’adverbe « oui » et exprime une
adéquation parfaite entre les locuteurs. L’enchaînement marqué par « tout à fait » se
construit par des reprises :
28
Loc (2) : énonciateur (2) : approbation
BIEN SUR
Kerbrat-Orecchioni (1980, 1997) estime que ce marqueur d’approbation précise le
degré selon lequel le sujet d’énonciation adhère au contenu de son énoncé. C’est son
rôle dans le monologue. Mais, contrairement à ce qui a été souvent dit, c’est avant
tout, un marqueur de dialogue et nous sommes dans le dialogue. Dans ce cas, il
nuance les adverbes neutres comme « oui » et « non » avec lesquels il est compatible.
Ce qui revient à dire, dans une situation d’échange, qu’il précise le degré auquel le
locuteur (2) adhère au discours du locuteur (1). « Bien sûr » fonctionne sur le plan
modal.
NON
D’abord une remarque. En relevant les marqueurs, nous avons constaté que le
marqueur « non » était moins fréquent que « oui ». Cela s’explique peut-être par le
fait que le CS est considéré comme un discours consensuel. Nous verrons, à la fin de
notre travail sur ce marqueur, ce qui fait qu’il est si peu présent dans le type de
discours qui nous intéresse. « Non », en français et du fait de l’existence de « si », peut
marquer soit une discordance soit un enchaînement en accord.
29
i )« Non » et enchaînement en accord
« Non » peut exprimer un accord par appréciation entre les locuteurs. Dans ce cas,
« non » est en réponse à une réplique négative. C’est pourquoi il marque un accord.
A travers les exemples étudiés, nous avons constaté que l’adverbe « non » pourrait
exprimer : la convergence et la divergence. Qu’il marque aussi une appréciation par
rapport à l’objet du discours.
MAIS
Maingueneau (1991) note que les linguistes distinguent deux « mais » : un « mais » de
réfutation et un « Mais » d’argumentation. Pour son analyse, il s’inspire de Ducrot.
Aussi, sommes-nous aller voir la distinction que fait Ducrot entre le « mais » de
réfutation et le « mais » d’argumentation. Dans les mots du discours (1980) Ducrot
écrit :
« Pour pouvoir attribuer à « mais » une valeur unique d’opposition, qui se maintient à travers
la diversité de ses emplois, il faut faire intervenir, non seulement le contexte explicite, mais les
intentions des locuteurs, leurs jugements implicites sur la situation et les attitudes qu’ils
s’attribuent les uns aux autres par rapport à cette situation » (p 93).
30
d’information apportée par P ou Q et « non le type de relation introduite ou explicitée
par mais » (p 95). La conception dont il est parti suppose que deux éléments P et Q
sont liés par mais et que P précède Q.
Contrairement à Ducrot, Danon-Boileau et Morel (1998) estiment que mais est l’indice
d’une démarche coopérative. Ils écrivent (p 118) :
« Il nous semble plutôt que, en recourant à « mais », l’énonciateur marque qu’il conserve l’objet
de discours préalablement construit et consensuellement partagé, et indique qu’il va changer le
point de vue sur cet objet. « Mais » marque en quelque sorte une récupération de la situation
par un énonciateur qui se prépare à proposer une alternative importante ou à tout le moins un
réajustement ».
ET
Sa fonction essentielle semble être, selon Caron (1983), d’exprimer des énumérations.
Selon Ducrot (1980 : 210), ce connecteur « peut agréger les énoncés qu’il relie, de
façon à en faire l’objet d’une seule énonciation ». En ce sens que les parties mises
ensemble forment un tout. Pour Ghiglione et Blanchet (1991), c’est un connecteur qui
marque l’addition. En effet, il permet d’ajouter une information nouvelle (loc 2) à
l’information contenue dans la première réplique (loc 1) ; de connecter des répliques
et d’introduire la réplique du locuteur (2). Adam, dans sa liste de marqueurs
d’intégration linéaire, pour ce qui est de l’énumération et de la description, présente
cette conjonction comme un marqueur de relais et un marqueur de clôture.
A l’instar de Ducrot, on pourrait dire que la conjonction « et » peut relier les énoncés
pour en faire l’objet d’une seule énonciation. En effet, l’on peut considérer les
répliques comme énoncées par un seul locuteur. Parce que « et » permet de relier ce
que dit le locuteur (2) à ce qui précède (locuteur 1). Nous avons deux informations
qui sont additionnées à savoir. Les locuteurs sont sur le même plan. Nous pouvons
considérer le marqueur « et » comme introduisant un relais parce qu’il peut
permettre de faire le lien entre deux événements différents.
31
vraiment, bon, en tout cas, donc, comme, franchement, chaque fois, cela dit, si,
surtout, pourtant…
Synthèse
Ce travail sur les marqueurs nous a aussi permis de constater que la locution
adverbale « bien sûr », associée à un changement de genre ou à un autre marqueur
d’approbation est un concessif qui marque, à chaque fois, l’accord entre les
interlocuteurs. Il est associé à l’explication. Ce qui permet de renforcer la
convergence de point de vue entre les commentateurs. Alors qu’un autre marqueur
comme la locution « tout a fait » est là pour permettre la transition vers la divergence.
En règle générale, la façon dont ils sont utilisés permet d’apporter une nuance, une
divergence, une opposition. Ces marqueurs d’approbation sont des atténuateurs de la
divergence qui vient après la convergence.
Nous revenons, pour finir, sur le rôle des marqueurs d’approbation en tant
qu’élément de transition vers la divergence. La divergence que nous retrouvons dans
la reprise. En effet, certains auteurs comme Vion ou Barbéris considèrent que la
reprise n’exprime pas toujours la convergence parce que reprendre, c’est aussi
rendre compte de phénomènes de divergence énonciative. La reprise sera le thème
du prochain chapitre. Parce que, comme les marqueurs d’approbation et de
désapprobation, nous l’étudions en tant qu’un moyen qui permet d’exprimer des
enchaînements en accord ou en désaccord.
32
BIBLIOGRAPHIE
GULICH, KOTSCHI (1987). Les actes de reformulations dans la consultation. La dame de Caluire
in L’analyse des interactions verbales. La dame de Caluire : une consultation (éd par BANGE P).
Berne, Peter LANG : 15-81.
KLEIBER (1990). Marqueurs référentiels et processus interprétatifs : pour une approche ‘’plus
sémantique’’ in Cahiers de Linguistique Française n°11. Genève, Université de Genève : 241-255
33
ROSSARI (2002). Les adverbes connecteurs : vers une identification de la classe et des
sous-classes in Cahiers de Linguistique Française n° 24 : 11-43.
ROSSARI (1996). Identification d’unités discursives : les actes et les connecteurs in Cahiers de
Linguistique Française n° 18 : 157-177.
VION (1996). Modalités, modalisations, interaction et dialogisme in Dialogisme et polyphonie.
Approches linguistiques. De Boeck.Duculot : 143-156.
VION (2001). Modalités, modalisations et activités langagières in Marges Linguistiques 2001 :
209-231
34