Le Littoral Dans Le Contexte Du Changement Climatique: Bservatoirenational Surleseffetsduréchauffementclimatique
Le Littoral Dans Le Contexte Du Changement Climatique: Bservatoirenational Surleseffetsduréchauffementclimatique
Le Littoral Dans Le Contexte Du Changement Climatique: Bservatoirenational Surleseffetsduréchauffementclimatique
S U R L E S E F F E T S D U R É C H A U F F E M E N T C L I M AT I Q U E
Le littoral
dans le
contexte du
changement
climatique
Rapport au Premier ministre
et au Parlement
La documentation Française
Publications de l’ONERC à la Documentation française
« En application de la loi du 11 mars 1957 (art. 41) et du Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992,
complétés par la loi du 3 janvier 1995, toute reproduction partielle ou totale à usage collectif de la présente
publication est strictement interdite sans autorisation expresse de l’éditeur. Il est rappelé à cet égard que l’usage
abusif et collectif de la photocopie met en danger l’équilibre économique des circuits du livre ».
© La Documentation française, Paris 2015
ISBN : 978-2-11-010037-5
Sommaire
RÉSUMÉ................................................................................................ 7
Partie A
Les principaux impacts du changement climatique
sur le littoral .......................................................................................... 19
Partie B
Changement climatique et niveau de la mer :
de la planète aux côtes françaises ............................................. 43
Partie C
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise
à la planification................................................................................... 85
Section 1
La vigilance « Vagues-submersion » ...................................................... 87
Section 2
Coûts des événements naturels sur le littoral et dispositif
assurantiel ................................................................................................... 93
Section 3
Réglementation des territoires exposés aux risques
de submersion marine ............................................................................. 100
Section 4
Une stratégie nationale pour anticiper l’érosion littorale............. 106
Section 5
Expérimentations de la relocalisation des activités et des biens,
vers une recomposition spatiale des territoires menacés
par les risques littoraux .......................................................................... 111
3
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Section 6
Les connaissances scientifiques, aujourd’hui et demain................. 116
Section 7
Le projet LiCCo et le point de vue d’élus des deux côtés
de la Manche ............................................................................................... 128
Nouvelle d’anticipation
Entre terre et mer .............................................................................. 135
ANNEXES............................................................................................... 173
4
Mot du président
Dans les territoires littoraux, comme dans les territoires de montagne, les effets
du réchauffement climatique sont précoces et déjà perceptibles par les popula-
tions. Il en résulte, dans ces territoires, un intérêt particulier pour les questions
relatives au climat et, actuellement, une accentuation des réflexions pour l’anti-
cipation et l’adaptation.
Depuis le début du XXe siècle, une hausse de près de 20 cm du niveau moyen des
mers a été enregistrée, ce qui représente une évolution significative. Pour les côtes
les plus basses, une telle hausse correspond à des débordements de plusieurs
mètres. Aussi, il n’est plus possible, en 2015, d’omettre ce phénomène dans la
gestion des territoires côtiers. D’autant que la hausse du niveau marin va se pour-
suivre de nombreuses années, principalement du fait de la dilatation de l’océan
par la chaleur qu’il emmagasine et du fait de la fonte des glaces continentales
qui s’est accélérée au cours des dernières décennies. Au cours de la première
décennie du XXIe siècle, la fonte des glaces continentales représente l’équivalent
d’un cube de près d’un kilomètre de côté rejoignant l’océan chaque jour ! Selon
le 5e rapport d’évaluation du GIEC, le niveau marin va continuer de monter, entre
26 et 82 cm d’ici à la fin du XXIe siècle.
5
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Répondre durablement aux besoins croissants des populations est un défi majeur
pour tous les territoires littoraux, surtout lorsqu’ils sont insulaires.
Est-il raisonnable d’empiéter sur le domaine maritime pour étendre nos infras-
tructures alors que le niveau de l’océan ne cesse de monter et que les risques
de submersion marine sont déjà réels sur de nombreux littoraux ? Devons-nous
multiplier les ouvrages de défense contre la mer ? Devons-nous libérer les zones
côtières de leurs usages socio-économiques ? Devons-nous relocaliser les biens ?
Il est urgent de trouver un équilibre dans l’occupation des espaces et l’emploi des
ressources. Les effets du changement climatique nous rappellent que notre pla-
nète n’est pas infinie, que nos ressources ne sont pas illimitées et que l’inaction
n’est pas une option envisageable. Nous devons nous mobiliser et faire face col-
lectivement aux défis présents tout en préparant les défis futurs.
Paul Vergès
6
Résumé
Le littoral français présente des enjeux très spécifiques, tant du point de vue de
la démographie, de l’urbanisation, des activités socio-économiques que du point
de vue environnemental.
Les données accumulées depuis le début du XXe siècle révèlent une tendance
significative : en moyenne sur les océans du globe, le niveau de la mer a aug-
menté rapidement au cours du dernier siècle, à un rythme jusqu’à 5 fois supé-
rieur à celui des derniers millénaires, soit un taux moyen d’élévation du niveau
de la mer de 1,7 ± 0,2 mm/an sur la période 1901-2010 et de 3,2 ± 0,4 mm/
an sur la période 1993-2014.
Et selon tous les scénarios climatiques envisagés aujourd’hui, il est très probable
que le taux d’augmentation du niveau moyen global de la mer au XXIe siècle sera
supérieur au taux observé au cours de la période 1971-2010. Ainsi, à la ving-
taine de centimètres de hausse déjà observée depuis 150 ans, devraient s’ajouter
encore plus de 26 à 82 cm d’ici la fin du siècle selon les efforts faits pour réduire
plus ou moins efficacement les émissions de gaz à effet de serre.
Même si l’élévation du niveau moyen de la mer observée depuis 150 ans peut sem-
bler faible en comparaison des hauteurs de vagues et de marées qui peuvent les
dépasser de plusieurs ordres de grandeur, le rapport de synthèse du GIEC (2014)
indique qu’une remontée du niveau marin de 0,5 m impliquerait une augmenta-
tion de 10 à 100 fois de la fréquence de submersion en l’absence de mesures
d’adaptation pour s’en protéger.
Pour protéger les populations des submersions, le dispositif vigilance a été enrichi
en octobre 2011 du risque « vagues-submersion 1 ». Celui-ci a été développé par
Météo-France en collaboration avec le Service hydrographique et océanographique
de la marine (SHOM) et avec le soutien de la Direction générale de la prévention
des risques du ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Éner-
gie. Son objectif est d’informer le public et les acteurs de la gestion de crise en
cas de risque de submersion marine. Il constitue, ainsi, le premier maillon de la
7
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Les coûts des indemnités d’assurances au fil des trente dernières années montrent
déjà la vulnérabilité des habitations et des activités. La réduction de la vulnérabi-
lité ou, tout au moins, la maîtrise de l’augmentation passe par des mesures de
prévention et d’adaptation pour éviter l’accroissement inéluctable des coûts des
catastrophes. Cependant, les possibilités d’adaptation des ouvrages de protec-
tion existants semblent réduites, si l’on vise à la fois un coût soutenable dans la
durée et un niveau de sécurité garanti et durable.
Un meilleur suivi sur le long terme des phénomènes naturels, de leurs consé-
quences et des coûts des indemnités qu’ils induisent permettra de préciser les
mesures de réduction de vulnérabilité à mettre en place afin de prévenir les risques
et de s’adapter au changement climatique notamment sur le littoral.
Les dégâts importants occasionnés par les tempêtes Lothar et Martin en 1999,
Klaus en 2009 et Xynthia en 2010 ont incité l’État à mettre en place une série
de mesures afin de réglementer l’urbanisation sur les territoires exposés au phé-
nomène d’érosion ou aux risques de submersion marine. Ainsi dès 2011, le plan
« submersions rapides » (PSR) a été mis en place pour répondre aux besoins opéra-
tionnels de prévention et de protection des territoires face au risque d’inondation.
Dans cette approche des risques littoraux aggravés par le changement clima-
tique, il importe de bien réfléchir aux modalités de mise en œuvre d’une logique
de protection. Celle-ci ne peut s’aborder sans considérer la place des enjeux au
sein du système concerné. En ce sens, l’anticipation doit guider toute stratégie
8
Résumé
Tout l’enjeu pour les collectivités locales et l’État consiste à mieux prendre en
compte l’évolution du trait de côte dans les politiques publiques, de faire des
choix d’urbanisme et d’aménagement adaptés et cohérents et de prévoir sur le
long terme et dans un contexte de changement climatique les conséquences de
ces choix relatifs à la protection du littoral et de ses usages.
La recomposition des territoires doit être vue comme une solution alternative aux
options traditionnelles de fixation du trait de côte et de « défense côtière et de
lutte contre la mer », impliquant nécessairement l’artificialisation du trait de côte,
la coupure des échanges terre-mer et de fortes dépenses sur des opérations par-
fois peu pérennes.
Dans le cadre de l’appel à projet programmé par la Stratégie nationale décrite pré-
cédemment, cinq expérimentations ont été retenues par le ministère en charge de
l’Écologie, réparties le long des côtes métropolitaines et ultramarines.
Sur la base des enseignements de ces projets, un guide national sera élaboré
proposant des éléments méthodologiques et de doctrine concernant la mise en
œuvre de la relocalisation des activités et des biens.
9
Le littoral dans le contexte du changement climatique
10
Introduction : le littoral,
un espace à forts enjeux
La population des départements littoraux ne cesse d’augmenter, tant dans les com-
munes littorales métropolitaines (figure 1), avec une augmentation de + 41 % depuis
1962 (83 habitants en plus par km2), que dans l’arrière-pays qui montre une progres-
sion de + 70 % (36 résidents en plus par km2), alors que l’évolution sur l’ensemble du
territoire n’est que de + 36 %, soit 27 résidents en plus par km2. En outre-mer, cette
croissance est encore plus importante et s’élève à + 89 %. Cette nette progression
11
Le littoral dans le contexte du changement climatique
est surtout alimentée par des soldes migratoires importants en métropole (phéno-
mène d’haliotropisme 1) et des soldes naturels très excédentaires en outre-mer.
Figure 1 – Densité de population des communes des départements littoraux en 2010
Note de lecture : les informations ont été lissées spatialement pour mieux faire ressortir les tendances.
Source : INSEE, RP 2010. Traitements : SOeS (Outil Geoidd).
12
Introduction : le littoral, un espace à forts enjeux
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_ ` a a b c d e f g h h ` i j f d e
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mètres carrés construits par kilomètre carré, est 3 fois plus forte dans les com-
munes littorales métropolitaines que sur l’ensemble du territoire hexagonal. Cette
pression est 1,3 fois plus forte dans les communes littorales urbaines que la
moyenne métropolitaine des pôles urbains. Ce rapport croît quand on s’éloigne
des villes. Il est de 2,8 pour les communes périurbaines et de 4 pour les com-
munes rurales, pour lesquelles la construction est très forte en bord de mer.
En hab./km²
1000
Manche - mer du Nord
Atlantique
Méditerranée
Guadeloupe
800
Martinique
Guyane
Réunion
600
400
200
0
m
m
m
m
0
0
0
0
00
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00
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00
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o p q o q p r o r p s o s p t o t p
Dans les zones basses (territoires littoraux dont l’altitude est inférieure à la hauteur
atteinte par la mer avec une occurrence centennale), le tissu urbain occupe 5,6 %
du territoire, c’est plus que la moyenne métropolitaine (3,9 %), mais moins que la
moyenne des communes littorales. Beaucoup des zones basses métropolitaines sont
en effet des polders et des zones de marais (marais breton, marais de Brouage, etc.),
ce qui explique leur assez faible part de territoires urbanisés. À l’inverse, les terres agri-
coles, dont les prairies, représentent près des trois quarts de leur occupation du sol.
Ces zones basses, d’une superficie de 7 000 km2, ont une population estimée à
850 000 habitants. On y compte 570 000 logements. Certains secteurs sont rela-
tivement peu habités comme la Camargue ; d’autres, à l’instar de la plaine des
Flandres (territoire des Wateringues), ont une population importante et de nom-
breux enjeux industriels.
Ces territoires concentrent, par ailleurs, une part importante des installations
conchylicoles, souvent la première activité impactée en cas de submersion.
15
Le littoral dans le contexte du changement climatique
16
Introduction : le littoral, un espace à forts enjeux
Les espaces naturels, principalement les milieux ouverts non prairiaux, les zones
humides et les surfaces en eau, couvrent 52 % de la surface des communes litto-
rales. Ces espaces recèlent de nombreux habitats (plage, dune, marais, estuaire,
mangrove, etc.) et espèces de grand intérêt. Un peu plus d’une centaine d’habi-
tats écologiques côtiers d’intérêt communautaire sont recensés sur les rivages
métropolitains. Ils constituent en particulier des lieux d’hivernage et de reproduc-
tion pour de nombreuses espèces, notamment de poissons ou d’oiseaux d’eau.
Le littoral tient une place particulière dans le projet de loi pour la reconquête de
la biodiversité, de la nature et des paysages avec la mise en place d’une nouvelle
catégorie d’aire marine protégée : les zones de conservation halieutique qui per-
mettent de conserver les zones fonctionnelles des ressources halieutiques. De
17
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Figure 8 – Carte des aires marines protégées en France métropolitaine, existantes et en
projet à la date du 23-02-2015
Source : Agence des aires marines protégées.
3. http://www.conservatoire-du-littoral.fr/38-changement-climatique.htm
18
Partie A
Les principaux impacts
du changement climatique
sur le littoral
Éric Brun, MEDDE/DGEC/SCEE/ONERC
© ONERC/Sylvain Mondon
Les principaux impacts du changement climatique sur le littoral
Zone de rencontre de la mer et des terres, le littoral est directement touché par
le changement climatique. Les impacts y prennent des formes multiples, héritant
des changements passés ou préfigurant les changements futurs subis par les
océans et par les continents.
Compte tenu des enjeux très forts autour du littoral décrits en introduction, il
est important d’évaluer la forme que prendra ce changement climatique sur les
zones littorales françaises, de métropole et des outre-mer et d’en peser les consé-
quences. C’est un préalable pour la prise de conscience des impacts induits et
pour identifier puis mettre en œuvre les mesures d’adaptation nécessaires, dans
le but de réduire les risques et les coûts associés.
Celui-ci subit déjà de nombreux effets du changement climatique dont les princi-
paux sont décrits ci-après. Ces effets seront de plus en plus visibles, que ce soit
en métropole ou outre-mer, et seule une limitation très forte des émissions de
gaz à effet de serre (GES) pourra contrecarrer cette évolution. Cependant, quels
que soient les efforts réalisés, il faudra poursuivre la politique volontariste d’adap-
tation, notamment pour faire face à la hausse du niveau de la mer que l’inertie
thermique de l’océan rend inéluctable. Les deux prochains chapitres de ce rap-
port seront largement consacrés à ce dernier phénomène.
Cette hausse est plus forte, environ le double, au-dessus des terres qu’au-des-
sus des océans (GIEC, 2014). Cela est dû au fait que les eaux océaniques de
surface se mélangent au cours du temps aux eaux plus profondes, si bien qu’il
faut bien plus de chaleur pour réchauffer l’océan que pour réchauffer les surfaces
21
Le littoral dans le contexte du changement climatique
22
Les principaux impacts du changement climatique sur le littoral
La hausse récente des températures de l’air au-dessus des océans et des conti-
nents n’est pas la même selon les régions, mais la hausse de la température de
surface de la mer est visible sur la quasi-totalité des domaines maritimes joux-
tant la France métropolitaine et les DOM-COM. C’est ce que montre la figure A2
pour la période entre 1950 et 2005.
Wallis et Futuna
Tromelin
Terre Adélie
Saint Pierre et Miquelon
Saint Paul
Saint Martin
Saint Barthélemy
Réunion
Polynésie Française
Nouvelle Calédonie
Nouvelle Amsterdam
Métropole/ Perpignan
Métropole/ Lille
Métropole/ Brest
Mayotte
Marquises
Martinique
Kerguelen
Juan de Nova
Guyane
Guadeloupe
Glorieuses ERSST
Europa HadISST
Crozet
Corse
Clipperton
Bassas da India
- 0,1 - 0,05 0 0,05 0,1 0,15 0,2 0,25
ographie : s t .
Compte tenu des dernières projections climatiques publiées par le GIEC, les océans
et les continents continueront à se réchauffer au cours du XXIe siècle, même dans
le cas où les émissions de GES retrouveraient d’ici la fin du siècle leur niveau
d’avant le début de l’ère industrielle, vers 1850. Cela est dû en grande partie à
la longue durée de vie du CO 2 dans l’atmosphère (plus de cent ans) ainsi qu’à
l’inertie thermique des océans.
23
Le littoral dans le contexte du changement climatique
24
Les principaux impacts du changement climatique sur le littoral
Il faut garder en mémoire que cette synthèse a été obtenue par des modèles
climatiques dont la maille de calcul était pour la plupart comprise entre 100 et
250 km, si bien que des îles comme La Réunion, la Martinique ou la Guadeloupe
y sont généralement représentées par des points de grille aux caractéristiques
essentiellement ou totalement océaniques. Il ne faut donc surtout pas traduire
directement la hausse globale de température projetée (GIEC, 2014) à la fin du
siècle (2081-2100) par rapport à l’ère préindustrielle (1,1 à 2,5 °C pour le scénario
Representative concentration pathway 2.6 (RCP2.6), 1,9 à 3,5 °C pour le scéna-
rio RCP4.5, 2,2 à 3,9 °C pour le scénario RCP6.0 et 3,4 à 5,6 °C pour le scéna-
rio RCP8.5) en multipliant cette hausse par les valeurs affichées sur la figure A3.
Le littoral se réchauffera lui aussi dans des proportions sans doute assez proches
des valeurs intermédiaires entre celles des océans et des terres qu’il sépare. Au
stade actuel des connaissances, il est encore impossible de dresser des projec-
tions détaillées tout au long du littoral de la France métropolitaine ou des DOM-
COM. En effet, il faudrait pour cela pouvoir simuler l’évolution de l’océan, du
continent et de l’atmosphère au plus près de la côte, à des résolutions adap-
tées à la physiographie du littoral, tout en assurant le couplage avec l’océan hau-
turier et l’atmosphère aux limites du domaine. C’est encore aujourd’hui hors de
portée des capacités de calcul disponibles si l’on veut traiter de grandes zones
géographiques telles que le littoral atlantique. C’est pourquoi les projections cli-
matiques régionales, telles que celles faites dans le cadre du projet international
COordinated Regional climate Downscaling EXperiment sur l’Europe (EURO-CORDEX)
(Jacob et al., 2014), ont limité leur ambition à des simulations à maille très fine
(12,5 km), mais où seule l’atmosphère était simulée à cette échelle. Les condi-
tions océaniques étaient déduites des simulations à échelle plus grossières réa-
lisées pour le rapport du GIEC, telles que celles synthétisées dans la figure A3.
Ces projections climatiques régionales sont cependant très utiles pour préciser
les projections de hausse des températures près des côtes. Ce sont plusieurs
scénarios extraits de celles-ci, produits par l’Institut Pierre-Simon Laplace (IPSL),
Météo-France et le Centre Européen de Recherche et de Formation Avancées en
Calcul Scientifique (CERFACS), qui ont été rendus accessibles sous le portail de
données « Donner accès aux scénarios climatiques Régionalisés français pour l’Im-
pact et l’Adaptation de nos Sociétés et environnements » (DRIAS 1), en réponse
aux besoins d’information pour la mise en œuvre des mesures d’adaptation au
changement climatique.
1. http://www.drias-climat.fr/
25
Le littoral dans le contexte du changement climatique
26
Les principaux impacts du changement climatique sur le littoral
Il faut noter que même dans les zones où les précipitations devraient diminuer
en moyenne annuelle, les pluies seront en général plus intenses, mais sur des
périodes plus courtes, favorisant, dans les zones littorales qui s’y prêtent, des
éboulements de falaise ou des glissements de terrain.
Des tempêtes ou vents forts lointains peuvent également générer une forte houle
qui se propage sur des centaines ou milliers de kilomètres puis déferle sur les
côtes sous la forme de très grosses vagues souvent destructrices. La côte atlan-
tique, mais aussi les Antilles et La Réunion sont régulièrement concernées par
les dégâts d’une houle générée loin de leurs rivages.
2. http://pluiesextremes.meteo.fr/
27
Le littoral dans le contexte du changement climatique
des tempêtes qui ont frappé les régions océaniques de moyenne latitude, au
cours du XXe siècle. Plusieurs méthodes existent pour reconstruire l’historique
des tempêtes passées, aboutissant parfois à des résultats contradictoires. Ainsi,
depuis les cent dernières années, aucune tendance significative ne se dégage, à
la hausse ou bien à la baisse, ni sur le nombre de tempêtes ayant frappé l’ouest
et le sud de l’Europe ni sur leur intensité.
Les DOM-COM situés dans les régions tropicales sont régulièrement frappés par
des cyclones tropicaux dont certains causent des dommages considérables sur
leur littoral. De façon générale, la connaissance sur les trajectoires et intensi-
tés des cyclones s’est considérablement accrue depuis les années 1970 grâce
à leur surveillance par des satellites. Le nombre de cyclones dans chacun des
principaux bassins océaniques tropicaux varie énormément d’une année sur
l’autre et aucune tendance certaine ne se dégage quant à une augmentation
de leur nombre au cours des dernières décennies (GIEC, 2014). En revanche,
il est quasiment certain que l’intensité et la fréquence des cyclones les plus
forts ont augmenté depuis 1970 dans le bassin Atlantique Nord, dans lequel
se situent les Antilles.
28
Les principaux impacts du changement climatique sur le littoral
29
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Acidification de l’océan
Depuis quelques années, l’acidification des océans prend une part croissante dans
le débat sur le changement climatique. Bien que ni la hausse des températures
ni tout autre paramètre climatique n’en soient la cause, l’acidification est asso-
ciée au changement climatique, car elle résulte elle aussi de l’augmentation de la
concentration en CO 2 dans l’atmosphère. En effet, à l’interface océan-atmosphère
s’établit un équilibre entre la pression de gaz carbonique dans l’océan et celle
dans l’atmosphère. Cette dernière ayant augmenté consécutivement aux émis-
sions anthropiques depuis l’ère industrielle, l’océan cherche à maintenir l’équi-
libre des concentrations et puise du CO 2 atmosphérique qui se dissout d’abord
dans les eaux superficielles puis dans les eaux plus profondes par mélange.
30
Les principaux impacts du changement climatique sur le littoral
Les écosystèmes qui occupent les zones littorales sont le fruit de processus mul-
tiples et très complexes pour lesquels l’environnement climatique joue un rôle parti-
culièrement important. Certaines espèces de zooplanctons requièrent, par exemple,
des conditions de température très précises, si bien que les paléoclimatologues
se servent de leurs traces dans les sédiments pour reconstituer les températures
du passé sur plusieurs millions d’années. Toute modification des conditions cli-
matiques dans une zone littorale risque de bouleverser profondément les fragiles
équilibres dans lesquels les écosystèmes existants se sont établis et développés.
Mais les conditions climatiques ne sont pas le facteur unique contrôlant l’établis-
sement et le développement des écosystèmes des zones littorales, ni même dans
certains cas le facteur principal, si bien qu’il est aujourd’hui impossible de dresser
un panorama complet des impacts possibles du changement climatique sur la bio-
diversité. Il est par contre certain que celui-ci sera très fort et qu’il concernera de
très nombreux domaines, comme cela a été mentionné dans plusieurs rapports et
3. http://www.circle-med.net
31
Le littoral dans le contexte du changement climatique
colloques récents (GIEC, 2014 ; CGDD, 2011 ; projet GICC/LITEAU 4 ; PIGB, 2013).
Parmi les facteurs non climatiques, il faut mentionner la pression sans cesse crois-
sante de nombreuses activités humaines. Parmi celles-ci peuvent être cités l’urba-
nisation du littoral et ses rejets massifs d’effluents polluants, l’aménagement du
littoral pour gagner des terres sur la mer ou sur les marais côtiers, la pêche, les acti-
vités maritimes et portuaires et l’aquaculture. L’introduction d’espèces d’origines
lointaines, potentiellement invasives, joue également un rôle important notamment
par la vidange des ballasts de certains navires ou le creusement de canaux reliant
deux bassins océaniques initialement séparés. Coll et al. (2010) estiment que 53 %
des plus de 600 espèces nouvellement observées en Méditerranée sont arrivées
par le canal de Suez. Plus récemment sont apparus les champs d’éoliennes en
mer et les turbines marémotrices qui nécessitent la construction en mer d’impor-
tantes infrastructures. Ainsi, sur le littoral, la pression subie par les écosystèmes
est exercée par le changement global plutôt que par le seul changement climatique.
4. http://www.gip-ecofor.org/gicc/?q=node/353
32
Les principaux impacts du changement climatique sur le littoral
Figure A6 – Composite des anomalies de salinité de surface maximale (haut) et minimale
(bas) pour la période 2070-2099 par rapport à la période 1961-1990. Chaque point de
grille représente respectivement les maxima et minima parmi l’ensemble des 6 scénarios
utilisés dans l’étude.
Source : adapté de Adloff et al. (2015).
5. http://www.mistrals-home.org/spip/spip.php?rubrique1
33
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Enfin, il faut rappeler la menace posée par l’acidification des océans sur la biodiver-
sité évoquée plus haut, dont les enjeux sont considérables, car ils ont un impact
direct sur le fonctionnement du réseau trophique. C’est l’ensemble de la chaîne
alimentaire marine qui pourrait être atteinte avec de lourdes conséquences sur la
sécurité alimentaire humaine (la Food and Agriculture Organization [FAO] estime
qu’en 2011 la pêche et l’aquaculture apportent 6,5 % des protéines dans l’ali-
mentation humaine mondiale, valeur s’élevant à 8,4 % pour la France).
Impacts socio-économiques
Même s’il est impossible aujourd’hui d’évaluer précisément quels seront les
impacts socio-économiques du changement climatique sur le littoral métropolitain
6. Circulation permanente à grande échelle de l’eau des océans, engendrée par les écarts de température
et de salinité des masses d’eau.
7. http://www.cnrs.fr/cw/dossiers/doseau/decouv/ecosys/eutrophisat.html
8. C3E2 http://www.gip-ecofor.org/gicc/?q=node/346
34
Les principaux impacts du changement climatique sur le littoral
Figure A7 – Évolution en été de l’indice climatique spécifique pour le tourisme entre les
années 1970 (gauche) et les années 2080 (droite) pour le climat simulé avec le modèle
climatique régional RCAO dans le cadre des scénarios SRES A2 (haut) et B2 (bas)
Source : d’après Amlung et Moreto (2009).
35
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Mais comme le soulignent Van de Walle et al. (2009) dans une enquête du CREDOC,
des études basées sur des indices climatiques touristiques établis dans le cadre
actuel sont réductrices. En effet, elles ne prennent en compte qu’une partie des
critères qui conditionnent les habitudes touristiques. Les autres critères, tels que
l’offre touristique, la dimension culturelle, les conditions économiques ou bien
encore les conditions de transport évolueront fortement au cours des prochaines
décennies, venant tempérer les conclusions que l’on peut tirer des seuls critères
climatiques.
* http://www.charm-project.org/fr/presentation/charm-iii-apercu
36
Les principaux impacts du changement climatique sur le littoral
37
Le littoral dans le contexte du changement climatique
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38
Les principaux impacts du changement climatique sur le littoral
Bien que les stratégies de modélisation pour simuler les impacts poten-
tiels du milieu naturel et de l’homme présentent des limites fondamen-
tales, l’approche proposée dans le cadre du projet CHARM peut fournir une
première approximation utile quant à l’impact potentiellement dramatique
du changement climatique et de la surexploitation sur la biodiversité. Une
telle approche peut permettre la gestion des habitats partagés des com-
munautés de poissons et la prévision de leurs variations tant en termes
de composition que de distribution. Les types de communautés ayant une
composition d’espèces, de niveaux d’abondance et de diversité contras-
tés, et correspondant à une forte affinité pour un habitat résistant aux
changements du climat ou aux usages anthropiques, peuvent tirer béné-
fice de l’établissement des zones marines protégées ou d’autres plans
de gestion spatialement explicites. Ce type de gestion peut être particu-
lièrement important dans le contexte d’usages marins multiples et d’aug-
mentation de la pression anthropique en Manche.
39
Le littoral dans le contexte du changement climatique
40
Les principaux impacts du changement climatique sur le littoral
Concentration en CO 2
Scénario Forçage radiatif vers vers 2100 exprimée en Profil d’évolution
2100 (W/m2)
éq-CO 2 (*) (ppm)
RCP2.6 2,6 475 Pic puis déclin
RCP4.5 4,5 630 Stabilisation avant 2100
RCP6.0 6,0 800 Stabilisation après 2100
RCP8.5 8,5 1 313 Croissant (sans politique
climatique)
(*) Équivalent CO 2 : concentration de CO 2 qui entraînerait le même forçage radiatif qu’un mélange
de CO 2 et d’autres gaz à effet de serre ou d’aérosols.
14
RCP 8.5
RCP 6.0
12
RCP 4.5
RCP 2.6
SRES A2
10
SRES A1B
SRES B1
8
W/m2
0
1850 1900 1950 2000 2050 2100 2150 2200 2250
Année
ographie : s t .
41
Le littoral dans le contexte du changement climatique
42
Partie B
Changement climatique
et niveau de la mer : de la
planète aux côtes françaises
Synthèse du volume 5 du Climat de la France au XXIe siècle
produit dans le cadre de la mission confiée à Jean Jouzel
(CEA – LSCE/IPSL - CNRS), écrit par :
Serge Planton, Météo-France/CNRM
Gonéri Le Cozannet, BRGM
Anny Cazenave, CNES
Stéphane Costa,
Université de Caen Basse-Normandie
Olivier Douez, BRGM
RAPPORTS
DGEC Le climat de la France Pierre Gaufrès, CEREMA
François Hissel, ONEMA
au XXIe siècle Déborah Idier, BRGM
Volume 5 Vanessya Laborie, CEREMA
¬ WUDYHUV DFWLRQV
6¶$'$37(5
Changement climatique
et niveau de la mer :
de la planète aux côtes françaises
Serge Planton, Météo-France/CNRM,
Gonéri Le Cozannet, BRGM,
Anny Cazenave, CNES,
Stéphane Costa, Université de Caen - Basse-Normandie,
Olivier Douez, BRGM,
Pierre Gaufrès, CEREMA,
François Hissel, ONEMA,
Déborah Idier, BRGM,
Vanessya Laborie, CEREMA,
Vincent Petit, BRGM,
Philippe Sergent, CEREMA.
Sous la direction de Jean Jouzel, CEA - LSCE/IPSL
Introduction
À l’échelle d’une vie humaine, le niveau moyen des océans et la répartition océan/
continent paraissent figés dans le temps, immuables. Toutefois, les observations
géologiques témoignent de larges variations du niveau moyen des mers lors des
grands changements climatiques passés, reflétant le volume des glaces conti-
nentales. Ainsi, le niveau des mers était-il plusieurs mètres au-dessus de son
niveau actuel lors de périodes chaudes passées, comme la dernière période inter-
glaciaire (il y a environ 125 000 ans), ou les périodes chaudes du Pliocène (il y
a environ 3,3 millions d’années), témoignant de la vulnérabilité des calottes de
glace actuelles (Groenland et Antarctique) à des variations de quelques degrés de
la température moyenne à la surface de la Terre. Inversement, le niveau des mers
a diminué lors des glaciations, atteignant à son minimum environ 130 m en des-
sous du niveau actuel lors du dernier maximum glaciaire, il y a environ 20 000 à
25 000 ans, du fait de la formation de calottes de glace en Amérique du Nord et
en Eurasie. Au cours de la déglaciation, le niveau de la mer est remonté rapide-
ment jusqu’à 8 000 ans avant la période actuelle, puis plus graduellement pen-
dant les millénaires suivants, et il s’est stabilisé voici environ 3000 ans. Au cours
des deux millénaires précédant le XIXe siècle, le niveau des mers était stable, avec
des variations de moins de 6 cm par siècle.
Toutefois, les données accumulées depuis le début du XXe siècle ont mis au jour
une tendance significative : le niveau de la mer a augmenté rapidement au cours
du dernier siècle, à un rythme jusqu’à 5 fois supérieur à celui des derniers millé-
naires (de 1,5 à 3 mm par an). Un large consensus existe parmi la communauté
scientifique pour attribuer ce phénomène au réchauffement du climat moyen
observé sur la même période. La montée des températures dans les basses
couches de l’atmosphère entraîne une augmentation du niveau marin par le biais
de plusieurs facteurs. D’une part, les océans se dilatent (phénomène « d’expan-
sion thermique »), des océans plus chauds occupant un volume plus important.
D’autre part, la fonte et l’écoulement dans l’océan des glaciers de montagne et
des calottes du Groenland et de l’Antarctique génèrent un apport d’eau douce
plus important à l’océan. Enfin, la hausse des températures s’accompagne de
changements du cycle hydrologique qui ont une influence sur le stockage d’eau
sur les continents, qui dépend aussi des activités humaines via les systèmes de
retenues et le pompage des nappes souterraines.
45
Le littoral dans le contexte du changement climatique
CO2(ppm)
280
UTSM Antarctique (°C)
240
200
1
0
-1
UT Antarctique (°C)
-2
-3
-4
4
0
50
100
Figure B1 – Reconstructions sur les derniers 800 000 ans de la concentration de CO 2 dans
l’atmosphère (en vert clair), de la température de la surface de la mer (TSM) tropicale
(en vert foncé), de la température au dôme Concordia sur l’Antarctique (en rouge) et des
évolutions passées du niveau moyen global de la mer (en bleu). Le signe ' représente une
différence par rapport à la valeur actuelle.
Source : d’après Masson-Delmotte et al. (2013).
Les périodes glaciaires sont caractérisées par un niveau moyen des océans bas,
allant jusqu’à 130 m en dessous du niveau actuel lors du dernier maximum gla-
ciaire intervenu il y a environ 21 000 ans. À l’inverse, les périodes interglaciaires
sont marquées par des niveaux marins élevés. Ainsi, lors du précédent épisode
1. ppm : parties par million. C’est le rapport du volume de CO2 dans l’atmosphère par rapport au volume
total de gaz.
46
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
interglaciaire (Eémien, entre 116 000 et 129 000 ans avant la période actuelle),
on estime que le niveau marin a dépassé le niveau actuel de 5 à 10 m, avec une
estimation la plus probable à 6 m. Au cours de cette dernière période, les don-
nées paléoclimatiques indiquent une variabilité significative du niveau des mers,
dont l’ampleur fait débat ; elle a pu dépasser 2 m par 1 000 ans. À partir de son
niveau au dernier maximum glaciaire, et jusqu’au début de l’Holocène, période
interglaciaire actuelle ayant débuté il y a 11 700 ans, le niveau de la mer s’est
élevé à un taux moyen d’environ 1 m par siècle. L’élévation du niveau marin s’est
ensuite ralentie il y a 6 000 ans. Durant les deux, trois derniers millénaires, le taux
d’élévation s’est stabilisé à environ 0,5 mm/an (avec des variations inférieures
à 6 cm par siècle), jusqu’à une accélération récente, depuis la fin du XIXe siècle,
clairement détectée dans les observations instrumentales les plus anciennes des
marégraphes (Wöppelmann et al., 2008).
Hormis pour les variations observées depuis l’ère industrielle, toutes ces évolu-
tions passées ont pu être reconstruites à partir de données paléoclimatiques et
géologiques. La composition isotopique (rapport O18/O16 dans les foraminifères 2
et les coraux) permet, par exemple, d’estimer les volumes des calottes glaciaires et
la température des océans pour en déduire le niveau de la mer (Bard et al., 1990 ;
Waelbroeck et al., 2002). Aux échelles de temps de quelques siècles à quelques
milliers d’années, on utilise aussi des biomarqueurs d’anciennes lignes de rivage
ou niveaux d’eau, ainsi que des données archéologiques (Lambeck et al., 2010).
Les marégraphes fournissent une mesure relative du niveau de la mer par rap-
port à la croûte terrestre sur laquelle ils reposent, car ils enregistrent aussi les
mouvements verticaux de celle-ci. En cherchant à connaître uniquement la com-
posante climatique du niveau de la mer, il faut donc corriger la mesure maré-
graphique des mouvements du sol. Si, au contraire, on s’intéresse à la hausse
totale locale, celle ressentie par les populations, alors, c’est bien la mesure rela-
tive qu’il faut considérer.
2. Les foraminifères sont des organismes unicellulaires marins ayant la particularité de posséder une coquille
appelée « test » perforée de pores.
47
Le littoral dans le contexte du changement climatique
● Données marégraphiques
Les premières mesures du niveau de la mer datent du XVIIIe siècle et furent réali-
sées à partir d’échelles de marée, simples règles graduées fixées sur les quais.
Peu précises, elles se limitaient à l’observation des phases de pleines et basses
eaux. Une mesure plus précise du niveau marin est permise depuis l’ère post-indus-
trielle grâce aux marégraphes, appareils permettant l’enregistrement automatique
des variations de l’altitude de la surface océanique par rapport à une référence
locale. Les premiers marégraphes à flotteur du XIXe siècle, dont les mouvements
horizontaux étaient retranscrits sur papier pour obtenir une courbe d’évolution
du niveau de l’eau en fonction du temps, ont fait place à des systèmes plus per-
fectionnés comme les marégraphes à ultrasons ou les marégraphes à pression.
Toutefois, leur principe est le même : mesurer le niveau instantané de la mer au
cours du temps en un lieu particulier et enregistrer les données (et les communi-
quer à distance pour les appareils les plus récents).
La mesure du niveau moyen des océans nécessite de filtrer les données pour
se débarrasser des variations liées aux vagues et houles, aux marées, ou à des
situations météorologiques particulières. Les données de niveau de la mer sont
donc moyennées sur des périodes allant du mois à l’année.
Les données marégraphiques historiques ont plusieurs limites. D’une part, elles
ont une distribution spatiale hétérogène : elles se situent principalement dans l’hé-
misphère Nord le long des côtes européennes et américaines (il existe quelques
longs enregistrements marégraphiques dans l’hémisphère Sud mais en nombre
limité), et ne donnent donc aucune information sur le niveau marin en plein océan.
D’autre part, la densité du réseau marégraphique a fortement varié dans le temps,
le réseau actuel étant beaucoup plus dense qu’au début du XXe siècle. Les maré-
graphes n’ont pas toujours fonctionné en continu et on retrouve ainsi des « trous »
dans les séries de données pour nombre d’entre eux.
● Données altimétriques
Les données des marégraphes sont complétées depuis le début des années 1990,
par les observations des satellites altimétriques : Topex/Poseidon (lancé en
1992), Jason-1 (2001), Envisat (2002), Jason-2 (2008) et AltiKa (2013). Ces
données permettent d’obtenir une cartographie quasi mondiale de la hauteur de
la surface des océans avec une très grande précision et, par la même occasion,
d’estimer la distribution régionale de la vitesse d’élévation du niveau de la mer.
Au fil des différentes missions altimétriques, la précision de la détermination du
niveau instantané de la surface de la mer est passée de quelques décimètres à
environ 1 à 2 cm aujourd’hui.
48
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
surface fixe dans le temps. Il suffit ensuite de faire la différence de ces deux gran-
deurs pour obtenir le niveau instantané de l’océan par rapport à l’ellipsoïde de
référence (figure B2) : niveau de la mer = altitude satellite – distance altimétrique.
● À l’échelle planétaire
De nombreuses études ont utilisé les données des marégraphes pour reconsti-
tuer l’évolution du niveau moyen global des océans depuis la fin du XIXe siècle.
49
Le littoral dans le contexte du changement climatique
40
20th Century Satellite altimetry period
100 30
20
50
Sea level (mm)
0
0
-10
-50 -20
-30
-100
1900 1920 1940 1960 1980 2000 1995 2000 2005 2010
Time (yr) Time (yr)
Infographie : studio du département de l’édition de la DILA.
3. L’effet stérique représente la modification de la masse volumique des océans liée aux changements de
température et de salinité.
50
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
La contribution des eaux continentales au niveau de la mer a deux origines : (1) les
variations naturelles du cycle de l’eau liées à la variabilité climatique naturelle, et
(2) les activités humaines modifiant directement l’hydrologie régionale, telles que la
construction de barrages sur les fleuves et le pompage de l’eau dans les aquifères,
principalement pour l’irrigation des cultures. Les barrages font baisser le niveau
de la mer alors que le pompage des eaux crée une hausse du niveau de la mer.
L’amplitude absolue de ces deux phénomènes a été de l’ordre de 0,5 mm/an sur
la seconde moitié du XXe siècle. Mais, étant de sens opposés, ces deux effets se
sont plus ou moins compensés. Néanmoins, le pompage des eaux souterraines
s’est accentué ces dernières décennies, ce qui explique les valeurs positives de
l’effet net des eaux continentales dans le tableau B1.
51
Le littoral dans le contexte du changement climatique
52
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
Figure B5 – Carte de la distribution géographique des vitesses de variation du niveau de la
mer (entre octobre 1992 et décembre 2013) le long des côtes de l’Europe occidentale
Source : LEGOS.
Concernant les outre-mer, des études récentes basées sur des reconstructions en
2D du niveau de la mer avant la période altimétrique (Meyssignac et al., 2012b)
ont montré que, depuis 1950, la hausse de la mer a été assez différente d’une
région à l’autre. Ainsi, en Polynésie, la hausse a atteint 3,5 mm/an, soit près de
deux fois la hausse moyenne globale sur cette période (1950-2010) alors qu’à
Nouméa (Nouvelle-Calédonie), la hausse est estimée à 2 mm/an (Becker et al.,
2012). À La Réunion, on estime que la hausse des soixante dernières années n’a
pas été significativement différente de la moyenne globale (Palanisamy et al., 2015).
53
Le littoral dans le contexte du changement climatique
4. Ce service, basé à Liverpool, est responsable de la collecte, de la publication et de l’analyse des don-
nées marégraphiques du globe.
5. http://refmar.shom.fr/fr/donnees-historiques
54
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
Tableau B2 – Taux de variation du niveau de la mer aux XIXe et XXe siècles, estimés à partir
de données marégraphiques françaises
Le cas des outre-mer est quant à lui assez problématique, les séries mises à dispo-
sition étant encore trop courtes pour analyser le signal du changement climatique.
À titre d’exemple, on ne dispose que de dix années effectives pour La Réunion,
quatre pour Mayotte et la Martinique et dix pour la Polynésie française. Il est donc
actuellement impossible de donner des chiffres pour des périodes plus longues
que la période altimétrique (figure B4) pour ces régions.
À l’échelle planétaire
55
Le littoral dans le contexte du changement climatique
1,0
Moyenne sur
2081-2100
0,8
0,6
(m)
RCP8,5
0,4
RCP6,0
RCP4,5
RCP2,6
0,2
0,0
2000 2020 2040 2060 2080 2100
Année
Figure B6 – Projections de l’élévation du niveau moyen global de la mer au XXIe siècle
relativement à 1986-2005 pour les deux scénarios d’émission RCP2.6 et RCP8.5. Les
plages de couleur autour des courbes correspondent à l’intervalle d’un changement
« probable » (67 % de chance). Les barres verticales correspondent à un changement
« probable » de la moyenne de la période 2081-2100 pour tous les scénarios RCP, et les
barres horizontales aux valeurs médianes associées.
Source : IPCC (2013), Figure SPM.9.
Dans ce rapport, les auteurs donnent une « confiance moyenne » aux estimations
fondées sur des modèles décrivant les processus à l’origine des changements du
niveau de la mer. Ces modèles utilisent directement les projections des modèles
climatiques de l’exercice international d’intercomparaison CMIP5 7 pour ce qui
concerne l’expansion thermique. Les contributions à l’augmentation du niveau
de la mer dues à la fonte des glaciers de montagne et des calottes polaires sont
basées sur la littérature scientifique. Des résultats de ces estimations sont repro-
duits sur la figure B6 et des valeurs des changements probables pour le milieu et
la fin du XXIe siècle pour les différents scénarios sont reportées dans le tableau B3.
56
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
Une des conclusions déduites de ces estimations est qu’il est très probable que le
taux d’augmentation du niveau moyen global de la mer au XXIe siècle sera supérieur
au taux observé au cours de la période 1971-2010 pour tous les scénarios RCP.
Les auteurs de l’AR5 considèrent par ailleurs que seul l’effondrement des parties
des glaciers émissaires de la calotte antarctique dont la langue terminale flotte
sur la mer, s’il se déclenchait, pourrait entraîner une hausse significativement
supérieure aux changements probables du niveau moyen de la mer. Cependant, ils
considèrent avec un niveau de confiance moyen que cette contribution ne dépas-
serait pas quelques dizaines de centimètres d’élévation du niveau des mers au
cours du XXIe siècle.
57
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Il résulte de tous ces phénomènes que plus de 95 % des régions océaniques
connaîtront très probablement une hausse du niveau de la mer à la fin du XXIe
siècle. Par ailleurs, environ 70 % des littoraux du monde vont connaître un chan-
gement du niveau de la mer ne s’écartant pas de plus de 20 % de l’élévation du
niveau moyen global de la mer.
À plus long terme, l’inquiétude majeure réside dans les calottes antarctique et
groenlandaise. Les simulations des modèles indiquent qu’au-delà d’un certain
seuil de réchauffement, la fonte en surface de la calotte du Groenland ne sera pas
compensée par l’accumulation de neige. Ainsi, si la température de stabilisation
58
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
dépasse ce seuil pendant des millénaires, cette calotte (dont la fonte totale repré-
senterait 7 m d’augmentation du niveau de la mer) pourrait fondre en presque
totalité. Selon le 5e rapport du GIEC, ce seuil serait supérieur à environ 1 °C
(faible confiance), mais inférieur à 4 °C (confiance moyenne). Si le réchauffement
se maintenait durablement à ce niveau, la planète connaîtrait alors une éléva-
tion du niveau de la mer de plusieurs mètres au cours des siècles et millénaires
à venir. Une contribution liée à un retrait abrupt, irréversible à l’échelle multisé-
culaire ou millénaire, de parties marines de la calotte antarctique dans des sec-
teurs potentiellement instables est aussi possible. Ces déstabilisations peuvent
survenir à long terme, mais aussi à une date rapprochée, surtout celle de l’An-
tarctique Ouest. Les principales incertitudes résident dans l’intensité de réchauf-
fement nécessaire à leur déclenchement et la date correspondante, sans que
l’on puisse encore aujourd’hui affecter un niveau de confiance à cette occurrence.
En fait, les projections qui ont été réalisées à l’échelle de régions côtières ne
résultent souvent que d’une extension de résultats qui ne sont établis que pour
des régions éloignées des côtes. De plus, ces projections d’échelle se limitent à
une évaluation des changements de volume de l’océan et, lorsqu’elles prennent
en compte les changements de masse, notamment dus à la fonte des glaciers
et des calottes, il ne s’agit dans la plupart des cas que d’une extrapolation de
résultats établis en moyenne globale.
59
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Dans son dernier rapport, le GIEC présente les disparités régionales d’élévation
du niveau de la mer à l’horizon 2090, telles que prévues par la moyenne d’en-
semble des modèles climatiques globaux, en tenant compte aussi des phéno-
mènes mentionnés ci-dessus (figure B7). La prise en compte, dans les projections,
de l’ensemble des facteurs à l’origine des variations régionales du niveau de la
mer est récente et constitue un progrès incontestable de ces dernières années,
très utile pour estimer à l’échelle régionale l’évolution future de la mer. Il reste
néanmoins certaines incertitudes liées à la variabilité interne (décennale à mul-
tidécennale) qui se superpose à ces phénomènes et que les modèles de climat
ne peuvent simuler de façon fiable. Il reste aussi à préciser ces projections à
l’échelle des côtes françaises en prenant en compte tous les processus perti-
nents à cette échelle plus fine.
Tout d’abord, nous rappelons les phénomènes en jeu lors de submersions marines.
Puis les enseignements issus des observations et les impacts potentiels de la
remontée du niveau marin en termes de submersion sont présentés. La problé-
matique de l’effet de la remontée du niveau marin sur la submersion induite par
les tsunamis ne sera pas abordée ici.
60
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
● Phénomènes en jeu
L’élévation du niveau marin pourra induire ou aggraver deux types de submer-
sions : les submersions permanentes de zones basses et les submersions tem-
poraires. Ces dernières sont définies comme des submersions de terres qui ne
sont pas submergées en temps normal (Directive européenne 2007/60/CE 8).
Des deux phénomènes, les submersions temporaires se distinguent par la mise
en danger des personnes exposées. Ainsi, en mer du Nord, les submersions
marines consécutives à la tempête du 1er février 1953 avaient provoqué environ
2 000 décès. Plus récemment, en France, plus de 50 personnes ont péri lors de
la tempête Xynthia de 2010.
Pour fixer les ordres de grandeur sur les côtes métropolitaines, la marée (mar-
nage) varie de quelques dizaines de centimètres (Méditerranée) à plus de 12 m
(baie du Mont-Saint-Michel). En Manche-Atlantique, les surcotes décennales obser-
vées dans les ports (zone abritée) varient de quelques dizaines de centimètres
(Socoa) à plus de 1 m (Dunkerque). Sur les plages métropolitaines exposées, les
quelques observations et modélisation de wave set-up disponibles lors d’épisodes
de tempêtes, par exemple sur le site du Truc vert (côte aquitaine), indiquent des
valeurs de plusieurs dizaines de centimètres, représentant environ 60 % de la
surcote totale (Idier et al., 2012a).
Outre ces facteurs d’élévation du niveau statique, les vagues jouent aussi un rôle
à plus haute fréquence : elles influencent l’élévation instantanée du niveau d’eau
sur le littoral au travers du jet de rive (swash), c’est-à-dire le flux et le reflux des
vagues à la côte. Ce phénomène, aussi appelé « wave run-up », peut être à l’ori-
gine de franchissements.
Le niveau d’eau maximal atteint par la mer au-dessus de son niveau moyen est ainsi
déterminé en estimant la hauteur de marée prédite, la surcote atmosphérique, le wave
set-up et le swash. Il convient toutefois de garder à l’esprit que ces phénomènes ne
8. http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:32007L0060
61
Le littoral dans le contexte du changement climatique
sont pas indépendants et peuvent interagir entre eux. Par exemple, dans certaines
zones comme la Manche Est, la marée influence la surcote (Idier et al., 2012b).
Figure B8 – Principaux phénomènes physiques contrôlant le niveau d’eau ; ce schéma n’est
pas à l’échelle.
Source : BRGM.
62
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
al., 2014). Lors de tempêtes, on assiste généralement tout d’abord à une mon-
tée progressive du niveau statique et à un renforcement de l’intensité de la houle
(temps 1). Au-delà d’une certaine intensité, il peut y avoir franchissements par
paquets de mer, la submersion associée restant en général limitée (temps 2). Si
le niveau statique continue à s’élever et dépasse la cote maximale des défenses
côtières, la submersion passe alors en régime de débordement (temps 3B). Lorsque
le niveau statique diminue du fait de la marée et/ou de la baisse de la surcote,
on peut observer, suivant la configuration, une « vidange » partielle de l’eau accu-
mulée à terre vers la mer ou de nouveaux franchissements jusqu’à ce que les
conditions de mer diminuent (temps 3A).
Les dommages induits par les submersions liées à une tempête sont donc dus
à la conjonction de plusieurs phénomènes, certains pouvant interagir entre eux.
Pris individuellement, chacun des paramètres (par exemple hauteur des vagues
ou surcote) peut-être caractérisé par une probabilité d’occurrence. Pour autant,
le caractère extrême d’une valeur donnée n’est pas systématiquement associé à
une forte submersion ou à de forts dommages (exemple : forte surcote atmosphé-
rique par faible coefficient de marée). Pour analyser les submersions, il convient
donc de prendre en compte tous les phénomènes précités, ainsi que leurs proba-
bilités conjointes. Il convient aussi de rappeler que plusieurs scénarios de condi-
tions au large peuvent mener à une même submersion, de sorte que la période
de retour de la submersion induite par un scénario au large est en général plus
faible que celle de ce scénario.
63
Le littoral dans le contexte du changement climatique
L’analyse est cependant plus délicate lorsque l’on s’intéresse non plus aux niveaux
d’eau, mais aux submersions elles-mêmes, ou encore à leurs conséquences. En
effet, la plupart des facteurs à l’origine des submersions marines évoluent égale-
ment dans le temps, dans des proportions qui sont souvent mal connues. Wong
et al. (2014) ont montré que les dommages induits par les submersions côtières
étaient en forte augmentation. Cela traduit vraisemblablement une augmentation
de l’exposition aux submersions marines et, peut-être, de meilleures connais-
sances concernant les dommages induits par les catastrophes naturelles.
Très peu d’exemples locaux d’impacts sur les populations ont été identifiés. Un
exemple cité dans le rapport du GIEC de 2007 est le cas d’une île habitée par
250 habitants vers 1900, qui a été abandonnée en 1918 à la suite de l’aggrava-
tion des aléas de submersion marine et d’intrusions salines dans les aquifères.
Néanmoins, le contexte local de cette partie de la côte Est des États-Unis est
marqué par une élévation relative du niveau marin plus rapide que la moyenne.
Ainsi, il n’y a pas aujourd’hui de preuves quantifiées que la remontée globale du
niveau marin ait causé des aggravations des aléas ou des risques submersions.
64
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
Les estimations faites aux échelles globales, même si elles donnent des informa-
tions sur les tendances et ordres de grandeur, comportent un certain nombre de
limites liées, d’une part, aux hypothèses de remontée du niveau marin utilisées
dans ces études (prise en compte d’une remontée du niveau marin global absolu
au lieu d’une remontée du niveau marin local relatif à la cote terrestre), d’autre part,
à la méthode utilisée pour estimer la submersion (hypothèses sur les phénomènes
au large, projection statique de niveau de la mer sur une topographie donnée).
De tels processus ne peuvent être caractérisés qu’à l’échelle locale. Les encadrés
« La modélisation numérique comme outil d’évaluation de l’impact de la remon-
tée du niveau marin sur l’aléa submersion » (ci-dessous) et « Le cas des grands
estuaires : Seine et Gironde» (p. 68) présentent des exemples de telles réalisations.
65
Le littoral dans le contexte du changement climatique
66
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
Pour évaluer des coûts de dommages potentiels futurs, il est nécessaire de réali-
ser non plus une carte pour un scénario donné, mais une réelle carte d’aléa, croi-
sant fréquence et intensité des submersions marines épisodiques, ainsi que les
mouvements du trait de côte induits par la submersion permanente, l’érosion et
l’accrétion. Il est également nécessaire de disposer de bases de données per-
mettant d’évaluer les coûts des dommages directs constatés sur des événements
passés. En pratique, les dommages potentiels induits par des événements de
submersion aggravés par l’élévation du niveau marin sont difficiles à évaluer : par
exemple, les travaux de Hallegatte et al. (2011) ont montré à travers l’exemple
du cyclone Katrina (2005) que les dommages indirects ne pouvaient être déduits
simplement d’une évaluation des dommages directs. En tout état de cause, des
niveaux d’incertitude importants sont associés aux évaluations existantes des
coûts potentiels des dommages induits par les submersions marines dans le
contexte du changement climatique. De telles évaluations restent aujourd’hui des
exercices de recherche.
67
Le littoral dans le contexte du changement climatique
68
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
69
Le littoral dans le contexte du changement climatique
● Phénomènes en jeu
Le trait de côte est susceptible d’évoluer de différentes manières en réponse à
l’élévation du niveau de la mer (figure B11) : si l’on suppose qu’aucun ajustement
morphologique n’a lieu à mesure que le niveau marin s’élève, les zones les plus
basses peuvent alors être inondées. Au contraire, une baisse rapide du niveau de
la mer sans ajustement morphologique se traduira par un régime d’émergence,
avec un gain des terres sur la mer.
Dynamique
sédimentaire
W
Apports
Accrétion
Emergence
Variations
Hausse rapide du niveau
W Stabilité W
Baisse rapide de la mer
Submersion
permanente
Erosion
Pertes
W
Dans le cas général, les littoraux ne réagissent pas de manière passive à l’élé-
vation du niveau de la mer. En effet, les sédiments de la zone littorale peuvent
être déplacés par de nombreux processus, notamment les vagues et les courants
(figure B12), modifiant ainsi l’aspect de la zone côtière (bathymétrie, topographie).
Des matériaux peuvent être transportés par les fleuves jusqu’aux estuaires, ou
bien prélevés sur les falaises ou des coraux, pour finalement être redistribués
sur les côtes. Enfin, les activités humaines peuvent modifier cette dynamique de
manière directe (exemples : défenses côtières, rechargements en sable) ou indi-
recte (exemples : modification des transports solides dans les bassins versants
via des aménagements fluviaux ou des modifications d’occupation des sols).
70
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
Figure B12 – Processus naturels (A) et anthropiques (B) impliqués dans la mobilité
sédimentaire en zones côtières. Les variables hydrométéorologiques indiquées en gras
dans la figure A (exemple : vagues, précipitations) peuvent elles-mêmes être affectées
par le changement climatique. Cependant, on considère généralement que l’élévation du
niveau marin est la manifestation du changement climatique qui aura le plus d’impacts
sur le recul du trait de côte dans les prochaines décennies à siècles.
Source : d’après Cazenave et Le Cozannet (2014).
71
Le littoral dans le contexte du changement climatique
En Europe, les études Eurosion 10 et Corine Erosion Côtière ont procédé à un état
des lieux de l’érosion. Elles ont mis en évidence que 30 % des plages étaient
en recul en Europe (41 % en France métropolitaine), ce qui reste un chiffre élevé
pour une forme géomorphologique d’accumulation. Elles ont montré également
que 60 % des rivages limono-vaseux européens (49 % en France) sont actuelle-
ment en accrétion. Des travaux menés dans les départements d’outre-mer ont
également permis de réaliser un premier état des lieux vis-à-vis de l’érosion : 25 %
des 630 km de côtes de l’archipel guadeloupéen sont en érosion contre 60 %
de côtes dites stables et 12 % en accrétion (dont la moitié en raison de l’action
de l’homme) ; à La Réunion, 50 % des côtes sont en érosion. Ainsi, les obser-
vations des mouvements du trait de côte montrent non seulement que l’érosion
affecte une part significative du littoral dans le monde et en France, mais aussi
qu’il existe des situations très diversifiées selon les sites, les régions, les diffé-
rents types de côtes (plages, falaises, marais) et les forçages auxquels ils sont
exposés (marées, courants, vagues, activités anthropiques).
Quel rôle joue l’élévation du niveau de la mer actuelle dans la crise érosive des
littoraux ? L’analyse des observations disponibles montre que la réponse à cette
question dépend du contexte local. Ainsi, des régimes de submersion permanente
ont été observés dans des zones actuellement en subsidence rapide (affaissement
du sol), pour lesquelles le niveau de la mer relativement à la côte peut s’élever
de plusieurs centimètres par an. À l’opposé, on peut observer l’accrétion, voire
l’émergence, de certains littoraux affectés par des soulèvements du sol, vis-à-vis
desquels le niveau de la mer baisse actuellement 11.
10. www.eurosion.org
11. Dans les deux cas, cependant, des contre-exemples existent. Le cas de la mer Caspienne pour laquelle
le niveau de la mer s’est élevé de 3 m en dix-huit ans peut illustrer cette situation : si dans de très nom-
breux secteurs, de nombreuses parties du trait de côte ont reculé, quelques secteurs demeurent en accré-
tion, en raison d’une dynamique sédimentaire très active ou d’activités humaines. Ainsi, même dans des
cas pour lesquels l’élévation du niveau de la mer est très rapide, ses effets peuvent parfois être compen-
sés par une dynamique sédimentaire très active. Cela montre le rôle majeur que peuvent avoir des facteurs
côtiers locaux dans les mouvements du trait de côte.
72
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
12. On peut cependant noter le cas particulier de la Guyane, pour lequel Gratiot et al. (2008) ont observé
une cohérence temporelle entre la position de la limite de la mangrove et les cycles de marée de 18,6 ans.
Leur étude suggère donc que les mangroves de Guyane sont très sensibles à de petites variations du niveau
de la mer.
13. http://www.developpement-durable.gouv.fr/Strategie-nationale-de-gestion.html
73
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Les risques induits par le recul du trait de côte futur dépendent non seulement
des conséquences du changement climatique, de la dynamique sédimentaire
côtière locale et régionale, mais aussi de l’exposition des infrastructures à l’aléa
recul du trait de côte et de la dynamique démographique. Quelles que soient les
zones côtières affectées par une nouvelle littoralisation, il conviendra de faire en
sorte que l’exposition aux risques ne s’accroisse pas, en décourageant les nou-
velles constructions dans les zones les plus exposées. En outre-mer, peu de scé-
narios de mobilité du trait de côte ont été réalisés 14. Pourtant, l’adaptation peut
s’y révéler particulièrement complexe, car les zones basses côtières y sont des
zones essentielles pour le développement.
14. Les zones les plus vulnérables ont cependant été identifiées à La Réunion (Explore 2070).
74
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
Dans ce contexte particulier, l’eau douce qui s’écoule vers la mer entre en contact
avec l’eau de mer. Une zone d’interface se forme entre l’eau douce plus légère
et l’eau de mer sous-jacente dont la densité est plus importante. Cette interface
n’est pas statique en cas de surexploitation de l’aquifère par exemple ; on parle
alors d’« intrusion marine ».
Les aquifères côtiers sont plus ou moins sensibles aux intrusions salines en condi-
tions naturelles ou sous influence anthropique (prélèvement par pompage), en fonction
de leur structure, de leur hétérogénéité et de leur relation avec les eaux de surface.
En effet, l’impact d’une invasion d’eau salée dans un aquifère littoral peut se révéler
souvent irréversible. Une augmentation du niveau marin associée aux changements
climatiques aura comme conséquence la migration de l’interface eau douce/eau
salée vers le continent et donc une intrusion saline (Werner et Simmons, 2009). Une
bonne compréhension d’une intrusion saline induite par une augmentation du niveau
marin est donc essentielle pour la gestion des ressources des aquifères côtiers.
Pour une nappe, le niveau piézométrique (niveau d’eau de l’aquifère) s’élève géné-
ralement vers l’intérieur des terres (zones de recharge de l’aquifère). L’intrusion
d’eau salée a la forme d’un biseau qui plonge sous la nappe d’eau douce, d’où
son appellation commune de « biseau salé » (figure B14). Ce contact entre ces
eaux de densités différentes va évoluer suivant les lois de la diffusion et de l’hy-
drodynamique en fonction d’un contexte géomorphologique, lithologique et hydro-
géologique propre à chaque région, mais également par rapport à la recharge et à
l’exploitation de l’aquifère. À noter, que, du fait de la miscibilité des fluides, l’in-
terface n’est pas nette, mais correspond à une zone de transition.
75
Le littoral dans le contexte du changement climatique
76
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
● Phénomènes en jeu
La compréhension de l’intrusion marine associée à une augmentation du niveau
marin est importante pour la gestion future des aquifères côtiers. Elle est abor-
dée en considérant trois cas avec les conditions aux limites suivantes au niveau
de l’interface « aquifère-mer » :
– une limite contrôlée par un flux d’eau douce vers la mer ne variant pas lors d’une
augmentation du niveau marin, car on suppose que l’augmentation du niveau pié-
zométrique de l’aquifère est concomitante à la montée du niveau marin ;
– une limite contrôlée par un niveau piézométrique maintenu constant malgré
l’augmentation du niveau marin ;
– une augmentation du niveau marin associée à une remontée générale du niveau
piézométrique.
77
Le littoral dans le contexte du changement climatique
– modification des zones de décharge des aquifères pouvant impacter les éco-
systèmes des zones humides ;
– augmentation du niveau piézométrique associée à l’élévation du niveau marin
et à la modification du régime des précipitations pouvant occasionner des impacts
sur des infrastructures du sous-sol (système d’assainissement, réservoirs enter-
rés, etc.).
L’intensité de ces impacts peut varier de manière significative selon les lieux, la
nature des aquifères, et leurs modalités d’exploitation. Les impacts associés aux
modifications des régimes de recharge et de décharge peuvent être aussi natu-
rellement influencés par la variabilité climatique. Pour certains aquifères, l’exploi-
tation des eaux souterraines par forage (pompage) peut accentuer les impacts
potentiels du changement climatique et de l’augmentation du niveau marin.
Concernant les ouvrages portuaires (figure B16), deux grands types peuvent être
distingués :
– les digues à talus : ce sont des ouvrages dont la face exposée à la mer est
composée soit d’enrochement naturel, soit de blocs en béton ;
– les digues verticales : en béton ou en maçonnerie, la face exposée à la mer est
verticale ou très fortement pentue.
78
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
L’arrière de ces ouvrages peut être le plan d’eau du port, une voie de circulation,
un parking, un terre-plein ou un quai. En France métropolitaine (hors Corse), 180
km de digues portuaires ont été répertoriés :
– 139 km de digues à talus (dont 113 km en enrochement naturel et 26 km avec
une carapace en blocs béton) ;
– 41 km de digues verticales.
Les digues sont des ouvrages extrêmement coûteux et construits pour plusieurs
décennies ; certains ont des enjeux économiques ou patrimoniaux importants. Il
est donc capital d’anticiper les changements globaux attendus pour adapter les
structures en service et réviser si nécessaire la conception des nouveaux ouvrages.
● Phénomènes en jeu
Les ouvrages de protection côtière et portuaire sont dimensionnés à partir des
données de forçages météo-marins et des conditions géotechniques de fonda-
tion. Les contraintes hydrauliques principales sont la houle incidente et le niveau
marin (figure B17). Le changement climatique aura donc une influence sur les sol-
licitations sur ces ouvrages (Hawkes et al., 2010). On peut penser qu’il induira
principalement deux effets à prendre en compte : la modification des houles au
large (hauteur, période, direction ; Hemer et al., 2013) et l’augmentation du niveau
marin (niveau moyen, surcotes marines).
79
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Figure B17 – Dimensionnement d’un ouvrage maritime par zones d’exposition en fonction
des niveaux marins (affouillement en pied, run-up et franchissement en crête).
Source : CIRIA, CUR, CETMEF (2009).
À noter qu’en fonction du type d’événement, le même ouvrage peut se trouver parfois
en zone de shoaling (niveau élevé) et parfois en zone de déferlement (houle forte).
Pour estimer l’effet sur les vagues de la remontée de 1 m du niveau marin pour un
ouvrage situé sur une pente de 1 %, il faut imaginer un ouvrage déplacé de 100 m vers
le large et donc soumis à des vagues plus fortes s’il est situé en faible profondeur.
15. Secteur où les vagues se gonflent et se cambrent sous l’effet de la diminution de profondeur.
16. Un exemple de tel ouvrage est la digue d’Antifer, dont la partie au large, parallèle au trait de côte, est
située à une distance de l’ordre de 2 600 m du rivage. La longueur de cet ouvrage est de 800 m environ, et
il est fondé à une profondeur d’environ 22 m.
80
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
Notons que pour les sollicitations hydrauliques autres que le niveau de la mer,
l’évolution en fréquence et en intensité des houles extrêmes n’est pas établie
en France sur ces vingt-cinq dernières années. En particulier, les séries de houle
disponibles, qui permettraient de confirmer ou non ces informations, n’ont pas
une longueur suffisante. L’évolution des surcotes météorologiques est également
17. http://www.bulletin-officiel.developpement-durable.gouv.fr/fiches/BO201115/met_20110015_0100_0021.pdf
81
Le littoral dans le contexte du changement climatique
beaucoup moins documentée que celle des niveaux marins ; les méthodes de
calcul sont moins robustes et les incertitudes plus importantes.
Le projet « Sao Polo » a ensuite modéré ces premières conclusions à travers trois
pistes.
Piste 2. Les règles de dimensionnement qui ont été initialement appliquées sont
des règles pour des structures neuves, comme si on démolissait l’ouvrage désor-
mais mal dimensionné et on le reconstruisait en l’adaptant aux nouvelles solli-
citations. Une option peu étudiée est le renforcement de l’ouvrage existant. Des
tests sur modèles réduits physiques en canal à houle ont donné les conclusions
suivantes pour une remontée d’un mètre du niveau marin :
– pour un ouvrage portuaire en enrochements, le renforcement de la structure
avec une troisième couche de blocs (de même dimension que la première et deu-
xième couche) et un rehaussement du mur de couronnement de 1,5 m suffisent
82
Changement climatique et niveau de la mer : de la planète aux côtes françaises
Enfin, tous ces travaux font l’hypothèse que les fonds restent fixes. Lorsque les
fonds sont mobiles, une incertitude importante existe sur l’évolution bathymé-
trique future devant l’ouvrage. Il est possible que la pente des fonds se raidisse ;
ce qui accentuera encore les vagues et les sollicitations sur l’ouvrage. Seule une
modélisation hydrosédimentaire complète de l’ouvrage et de son site d’implan-
tation, selon des scénarios climatiques régionalisés, peut préciser la géomé-
trie optimale de la future structure. De tels outils relèvent encore aujourd’hui du
domaine de la recherche.
83
Partie C
L’adaptation aujourd’hui :
de la gestion de crise
à la planification
Section 1
La vigilance « Vagues-submersion »
Les territoires littoraux français sont exposés à l’action de la mer et peuvent être
vulnérables aux inondations par submersions marines. Les marées, l’exposition
aux tempêtes, les fortes vagues soumettent le littoral à des aléas spécifiques. La
submersion marine, inondation rapide et parfois sévère du littoral, focalise l’at-
tention des pouvoirs publics et des médias depuis les événements liés à la tem-
pête Xynthia en février 2010.
1. http://www.developpement-durable.gouv.fr/La-premiere-evaluation.html
87
Le littoral dans le contexte du changement climatique
88
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
marins et de leur nature (sable, vase, galets, etc.) qui accélère ou freine la propa-
gation de la vague sur la côte, ainsi que des caractéristiques du rivage telles que
l’orientation de la côte par rapport à la direction dans laquelle se propagent les
vagues. Ainsi, le déferlement de fortes vagues sur le rivage peut franchir, fragili-
ser ou endommager les jetées, digues et autres infrastructures. Un autre phéno-
mène de surcote peut s’ajouter dans les estuaires lorsque l’écoulement des eaux
fluviales est contrarié par des vents contraires. Les conséquences peuvent deve-
nir dramatiques lorsque le débit du fleuve est accru par de fortes précipitations.
Les submersions marines peuvent affecter une grande partie de nos côtes de
métropole, y compris en Méditerranée où la marée est de faible amplitude.
27-28 février 2010
La nuit du 27 au 28 février 2010, lors du passage de la tempête Xynthia sur le
golfe de Gascogne, la forte baisse de la pression atmosphérique et les vents vio-
lents ont provoqué une forte surcote alors que le niveau de la mer était déjà au
plus haut en raison d’une marée de coefficient 102 et de fortes vagues. La mer
a alors dépassé de plus de 1 m le niveau des plus grandes marées déjà obser-
vées : 1,53 m au-dessus des plus hauts niveaux correspondants aux plus fortes
marées astronomiques a été relevé au marégraphe de La Rochelle. L’eau est mon-
tée à plus de 2 m dans certaines habitations du littoral charentais et vendéen.
89
Le littoral dans le contexte du changement climatique
5 février 2014
Le 5 février 2014 une dépression très creuse (en dessous de 950 hPa) a circulé
sur les îles Britanniques générant de très forts vents de sud-ouest sur les côtes
bretonnes. Ces vents ont levé des vagues de 6 à 8 m près des côtes et provo-
qué un afflux d’eau sur les littoraux exposés au vent d’ouest-sud-ouest. Dans un
contexte de coefficient de marée de 99, une surcote fut prévue le matin (de 65 à
80 cm) au moment de la pleine mer vers 7h30 locales. La figure C2 donne les pré-
visions pour Le Conquet des différents modèles numériques utilisés à Météo-France
pour prévoir la surcote et le niveau d’eau. Les observations des marégraphes indi-
quées en rouge montrent le bon comportement de la prévision numérique, assez
proche de la réalité observée.
80 Modèle Centre
Européen de
Prévisions /
70 Météo-France / SHOM
Modèle "AROME"
60 Météo-France / SHOM
50
Modèle "ARPEGE"
Météo-France / SHOM
Surcote (cm)
40
30
Observations
20
10 représentation
du cycle de la marée
0
-10
-12 0 12 24 36 48
05/02/2014 06/02/2014
La vigilance « vagues-submersion »
L’analyse de la situation de la tempête Xynthia a montré que Météo-France dispo-
sait d’informations permettant d’alerter de l’occurrence de ces phénomènes, mais
devait améliorer la diffusion de l’information vers le public, en plus des avertisse-
ments déjà transmis aux responsables de la Sécurité civile. Conçu à l’origine pour
fournir des informations sur les risques associés à cinq types de phénomènes,
90
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
Figure C3 – Carte de vigilance émise le 4 février 2014 à 16h00 locale. Le littoral des
Côtes-d’Armor et du Finistère aux Pyrénées-Atlantiques a été placé en vigilance orange
« vagues-submersion ».
91
Le littoral dans le contexte du changement climatique
92
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
Section 2
Coûts des événements naturels sur
le littoral et dispositif assurantiel
En effet, après chaque événement naturel qui crée des dommages à des biens,
l’arrêté fixe les communes et les périodes concernées par la catastrophe ainsi
que la nature des dommages couverts par la garantie. Une commission intermi-
nistérielle, présidée par le ministre de l’Intérieur, est réunie pour reconnaître la
nature catastrophique du phénomène ainsi que son étendue et examiner les dos-
siers transmis par les préfectures à la demande des collectivités territoriales. Les
biens indemnisés sont les biens couverts par un contrat d’assurance «dommages
incendie des biens » tel que l’assurance « dommage multirisques habitation » et
l’assurance « dommages aux véhicules ».
Le montant des coûts des catastrophes naturelles (hors dommages aux automo-
biles) sur la période de 1990 à 2012 est estimé à partir de ces données à près
de 21,7 milliards d’euros dont 12,5 milliards pour les inondations, 8,3 milliards
pour la sécheresse et 0,9 milliard pour les autres périls. Ces chiffres varient beau-
coup d’une année sur l’autre comme le montre la figure C4.
93
Le littoral dans le contexte du changement climatique
3 000
2 500
2 000
1 500
1 000
500
0
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 0 1 2
199 199 199 199 199 199 199 199 199 199 200 200 200 200 200 200 200 200 200 200 201 201 201
INONDATION SÉCHERESSE AUTRES PÉRILS
Figure C4 – Évolution du coût des catastrophes naturelles hors véhicules en France entre
1990 et 2012 (coût actualisé en euros)
Source : CCR - Caisse centrale de réassurance.
Toutefois, il n’exprime que partiellement le montant des dommages subis par des
aléas naturels. En effet, les dommages subis par les effets d’un vent de tempête
relèvent de la garantie « tempête, grêle, poids de la neige sur les toitures » (TGN)
distincte de la garantie « catastrophes naturelles ». Pour mieux mesurer les effets
des événements naturels, il convient d’ajouter les coûts des indemnisations liées
à ces deux garanties (CatNat et TGN).
Selon la Mission risques naturels (MRN) sur les trente dernières années, les
indemnisations totales dues aux conséquences dommageables des événe-
ments naturels s’élèvent, en moyenne annuelle, à 1 milliard d’euros pour les
tempêtes, 500 millions d’euros pour les inondations (dont 10 % au titre de la
submersion marine), 320 millions pour la sécheresse géotechnique et moins
de 50 pour les autres catégories d’événements naturels. Cette période n’a
pas connu d’inondations aux conséquences aussi exceptionnelles que les
tempêtes de 1999.
94
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
13 000
12 000
(montants actualisés en millions €)
11 000
10 000
Indemnités versées
9 000
8 000
7 000
6 000
5 000
4 000
3 000
2 000
1 000
0
2 3 4 5 6 7 8 9 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 0 1 2 Années
198 198 198 198 198 198 198 198 199 199 199 199 199 199 199 199 199 199 200 200 200 200 200 200 200 200 200 200 201 201 201
Figure C5 – Évolution annuelle de 1982 à 2012 des indemnités versées au titre des
garanties catastrophes naturelles et tempête-grêle-neige (ou de la sinistralité CatNat
et TGN) en France
Source : FFSA-GEMA – Fédération française des sociétés d’assurances - Groupement des entreprises
mutuelles d’assurance.
Si ces données intègrent les dommages assurés causés aux biens des collec-
tivités, ainsi que les pertes d’exploitation et pertes indirectes, elles n’incluent
pas celles causées aux récoltes, aux infrastructures non assurées et aux biens
de l’État.
Les travaux de l’Observatoire national des risques naturels (cf. encadré ONRN
ci-après) ont permis de produire des indicateurs de sinistralité selon différents
niveaux de granularité géographique : départemental pour les vents de tempête,
communal pour les inondations entre autres.
95
Le littoral dans le contexte du changement climatique
96
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
Figure C7 – Répartition des montants cumulés indemnisés au titre des inondations liées
à l’événement Xynthia (submersion marine et débordements de cours d’eau)
Source : CCR.
À l’échelle encore plus fine de l’habitat affecté par la submersion ou les vagues de
tempête, une récente recherche 1 codirigée par l’université de Bretagne-Ouest et le
Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), financée par la Fondation
MAIF pour la prévention, a permis d’exploiter des dossiers d’expertise sinistre de
sociétés d’assurances volontaires, pour analyser les facteurs d’endommagement
et tester des méthodes statistiques permettant de prédire les coûts de tempêtes
futures, démontrant l’intérêt des données d’assurance, sous réserve d’améliorer
les données mobilisables, tant en qualité qu’en quantité (Figure C8, André, 2013).
1. Projet Johanna.
97
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Figures C8 – À gauche carte du résultat de la modélisation hydraulique des hauteurs d’eau
maximales aux Bouchôleurs lors de Xynthia avec la localisation des sinistres d’assurance –
Modélisation BRGM ; fond orthophoto BD ORTHO® IGN) ; à droite carte des indicateurs de
l’aléa et de la répartition des sinistres de la tempête Johanna en Bretagne
Sources : André (2013).
Conclusion
Le littoral français est menacé par un ensemble de phénomènes naturels et
concentre de forts enjeux de développement urbain et touristique, ce qui le rend
particulièrement sensible aux risques qui devraient augmenter avec les effets du
changement climatique, notamment l’élévation du niveau des mers.
Les coûts des indemnités d’assurances au fil des trente dernières années montrent
déjà la vulnérabilité des habitations et des activités. La réduction de la vulnéra-
bilité ou tout au moins la maîtrise de l’augmentation passe par des mesures de
prévention et d’adaptation pour éviter que l’accroissement des coûts des catas-
trophes soit inéluctable.
Le travail engagé par l’ONRN sur les risques et la sinistralité pourra démontrer la
complexité des situations et la nécessité de travailler « sans regret ».
98
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
99
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Section 3
Réglementation
des territoires exposés aux
risques de submersion marine
Comme cela a été souligné dans l’introduction du présent rapport, le littoral fran-
çais est un espace soumis à des pressions démographiques et économiques
très importantes, mais c’est avant tout un ensemble de milieux, contrastés,
vivants et mobiles qu’il s’agit de bien appréhender. Ces territoires littoraux
sont confrontés à deux principaux aléas que sont la submersion marine et l’éro-
sion. Ces aléas génèrent des risques lorsqu’ils touchent des secteurs plus ou
moins anthropisés avec des constructions, habitations, activités permanentes
ou saisonnières.
Cette anthropisation du littoral est le fait d’une forte attractivité estivale, d’une
certaine confiance dans les protections et d’un oubli des risques résiduels et pas-
sés. La tempête Xynthia de 2010 ainsi que les préoccupations quant aux consé-
quences du changement climatique ont montré la fragilité du littoral. Les constats
sont flagrants sur les côtes aquitaine, languedociennes et normandes. La succes-
sion des tempêtes a causé beaucoup de dégâts sur les habitations, les infras-
tructures et les activités, mais aussi sur le milieu naturel : aujourd’hui le recul du
trait de côte est une impressionnante réalité développée plus loin dans ce rapport.
100
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
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Figure C9 – Nombre de communes du bord de mer ayant été concernées par un arrêté
de catastrophe naturelle pour un aléa littoral entre 1985 et 2014
Source : DGPR-Base de données Gaspar (extraction 03/2015).
La série ne permet pas de remonter au-delà de vingt ans. Ces tempêtes ont tou-
ché le littoral par des effets de submersion et produit des dégâts liés aux précipi-
tations. Ces phénomènes ne sont pas nouveaux et si la succession des tempêtes
semble montrer une augmentation, elles n’en sont pas pour autant des indices
d’évolution du changement climatique. De telles tempêtes se sont déjà produites
en des périodes antérieures et il a été montré précédemment que le nombre de
tempêtes ayant frappé la France durant les soixante dernières années n’a pas
augmenté du point de vue statistique.
Ces événements ont incité l’État à mettre en place une série de mesures afin de
réglementer l’urbanisation sur les territoires exposés au phénomène d’érosion
ou aux risques de submersion marine.
101
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Élaborée par l’État en association avec les parties prenantes, la SNGRI fixe le cap
de prévention des risques d’inondation à court, moyen et long terme. Ces priorités
nationales seront déclinées localement via des plans de gestion des risques d’inon-
dation (PGRI) qui vont permettre de planifier, coordonner et mettre en œuvre les
actions prioritaires sur les territoires les plus exposés, notamment les 122 territoires
à risque important d’inondation, dont 34 intégrant des problématiques de submersion
marine, identifiés fin 2012, pour lesquels des stratégies locales seront élaborées.
Figure C10 – Déclinaison à l’échelle des territoires de la stratégie nationale de gestion des
risques d’inondation
Source : MEDDE /DGPR.
Sur ces questions de risques littoraux, le plan de prévention des risques littoraux
(PPRL) reste le principal outil de prévention pour les communes à risque. Sur le
champ spécifique des PPR, 303 PPR littoraux prioritaires ont été identifiés par la
circulaire du 2 août 2011. À la fin du premier trimestre 2015, 273 d’entre eux
étaient prescrits et 68 approuvés ou appliqués par anticipation.
102
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
L’aléa érosion est aussi quantifié en fonction de l’impact des événements majeurs.
L’aléa de référence érosion est défini par une méthode de type « Federal Emergency
Management Agency » (FEMA), « Dune Erosion » (DUROS), Kriebel (1985) et Dean
(1991) à un horizon de cent ans 2.
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Figure C11 – Illustration de la prise en compte de la hausse du niveau des mers pour
la qualification de l’aléa de submersion marine
Source : circulaire du 27 juillet 2011 relative à la prise en compte du risque de submersion marine dans
les PPRL.
1. http://www.developpement-durable.gouv.fr/Guide-methodologique-Plan-de.html
2. Ces méthodes sont fondées sur des approches variées majoritairement empiriques. Elles décrivent le
profil perpendiculaire de la plage après un épisode de tempête.
103
Le littoral dans le contexte du changement climatique
À toutes les étapes de l’élaboration des PPRL, dont l’avancement pour les risques
littoraux est présenté en figure C12, la concertation et l’association des parties
prenantes sont recherchées afin d’adapter cette démarche générale aux réalités
du terrain et aux données disponibles. Ces outils de prévention qui ont vocation à
être révisés régulièrement vont pouvoir, progressivement, à mesure de leur publi-
cation, intégrer de nouveaux éléments de connaissance du territoire.
Dans cette approche des risques littoraux aggravés par le changement climatique,
il importe de bien réfléchir aux modalités de mise en œuvre d’une logique de pro-
tection. Celle-ci ne peut s’aborder sans considérer la place des enjeux au sein du
système concerné. En ce sens, l’anticipation doit guider toute stratégie d’urba-
nisation dans un dialogue et une démarche de projet à court et long terme asso-
ciant les collectivités à la gouvernance.
104
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
105
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Section 4
Une stratégie nationale pour
anticiper l’érosion littorale
Comme cela a déjà été mentionné dans l’introduction de ce rapport, le littoral est
un des territoires français qui connaît la plus forte augmentation démographique
et touristique, conduisant à un haut niveau d’artificialisation des communes :
2,5 à 3 fois la moyenne métropolitaine. Plus on se rapproche de la côte, plus
cette artificialisation est forte.
Ainsi, plus de 140 000 personnes résident à moins de 250 m des côtes en éro-
sion et plus de 800 000 personnes résident dans des zones basses.
106
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
Dans ce sens, il s’agira d’initier des stratégies locales adaptées sur les territoires
qui prennent en compte les phénomènes naturels et anticipent au mieux leurs
impacts. Ces stratégies intégreront l’ensemble des projets de développement,
d’aménagement et de gestion de l’espace littoral, stratégies partagées par l’en-
semble des acteurs concernés, dans le respect des trois piliers du développe-
ment durable que sont les enjeux sociaux, économiques, et environnementaux.
107
Le littoral dans le contexte du changement climatique
La Stratégie nationale se fonde sur l’idée principale qui est de considérer la mobi-
lité du trait de côte et la dynamique hydrosédimentaire comme parties intégrantes
du littoral et des échanges terre-mer.
108
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
explicite dans les plans locaux d’urbanisme (PLU) et les schémas de cohérence
territoriale (Scot) du phénomène d’érosion littorale.
Le troisième axe (C) souhaite favoriser la relocalisation des activités et des biens,
et des usages situés dans des territoires soumis à de forts aléas naturels, tout
en maintenant le dynamisme des territoires. L’action 7 de cet axe vise à préparer
la mise en œuvre de cette option de relocalisation dans une dynamique de recom-
position spatiale territoriale. La relocalisation est avant tout une action d’anticipa-
tion (anciennement dénommée « repli » ou « recul stratégique »). Il est à noter que
ce principe, qui souhaite un changement de paradigme du rapport de l’homme
avec la nature, forme le sous-titre de la Stratégie nationale de la gestion intégrée
du trait de côte qui s’intitule « Vers une relocalisation ».
Le quatrième axe (D) a pour objectif de préciser les principes de financement pour
la gestion du trait de côte, en identifiant ce qui est du ressort de l’État et des col-
lectivités locales.
La relocalisation doit être vue comme une solution alternative aux options tradi-
tionnelles de fixation du trait de côte et de « défense côtière et de lutte contre la
mer », impliquant nécessairement l’artificialisation du trait de côte, la coupure des
échanges terre-mer et de fortes dépenses sur des opérations parfois peu pérennes.
L’enjeu au niveau national est de capitaliser les expériences par la rédaction d’un
cahier des enseignements qui fera état du bilan des démarches, de leurs difficul-
tés, de leurs atouts et mettra en exergue diverses méthodes à valoriser en lien
avec les porteurs de projets qui sont au nombre de cinq.
109
Le littoral dans le contexte du changement climatique
L’objectif est de nourrir véritablement la feuille de route qui engage l’État, les col-
lectivités territoriales et l’ensemble des parties prenantes à mieux prendre en
compte l’érosion littorale dans les politiques publiques d’aménagement durable
en métropole comme en outre-mer.
Les expérimentations de « relocalisation » font aussi l’objet d’un suivi par le comité
national de suivi de la Stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte,
coprésidé par deux députées, Chantal Berthelot, députée de la deuxième circons-
cription de la Guyane, et Pascale Got, députée de la cinquième circonscription
de la Gironde.
110
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
Section 5
Expérimentations de la
relocalisation des activités et des
biens, vers une recomposition
spatiale des territoires menacés par
les risques littoraux
Sur la base des enseignements de ces projets, un guide national sera élaboré
proposant des éléments méthodologiques et de doctrine concernant la mise en
œuvre de la relocalisation des activités et des biens.
111
Le littoral dans le contexte du changement climatique
enseignements de l’appel à projets, qui est en cours d’analyse, sont pluriels. Ils
suscitent dès aujourd’hui des réflexions tant sur le contenu et la méthodologie
des projets que sur leur pilotage et la coconstruction de la démarche avec l’en-
semble des acteurs concernés par la relation terre-mer et l’aménagement du lit-
toral. Ils se précisent sur diverses thématiques comme l’amélioration de la vision
de projet à partager avec l’ensemble des acteurs locaux, les opportunités pour
réinventer un modèle économique et spatial littoral, mais aussi les réflexions sur
l’amélioration ou l’évolution des outils réglementaires, concernant la valeur des
biens impactés par l’érosion, la propriété et la maîtrise de l’occupation du sol
par la collectivité, l’instauration possible d’un système d’autorisation d’occupa-
tion temporaire, la notion de phasage temporel lié au recul de la côte, les pistes
de financement de ces opérations ou études.
112
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
de la stratégie nationale, installé depuis janvier 2015. Celui-ci considère que cet
appel à projets est très révélateur et qu’il fait partie intégrante des axes priori-
taires à mettre en œuvre pour la fin 2015.
Le site de Vias à l’ouest du Cap d’Agde se situe entre deux stations balnéaires
littorales de l’Hérault (Vias et Portiragnes). Le site est occupé par de l’habitat en
majorité précaire issu du « durcissement de la cabanisation » phénomène récur-
rent du littoral languedocien (environ 3 000 parcelles dont 100 à 150 familles de
façon permanente), et 14 campings (3 350 places, représentant 50 emplois avec
196 emplois saisonniers). Le site est soumis à des aléas importants d’érosion
(de 1 à 3 m/an), de submersion et d’inondation (territoire à risque inondation [TRI]
Béziers-Agde). La démarche s’inscrit dans un important programme de gestion
raisonnée du littoral engagé depuis 2005 dans un contrat plan État-Région, qui a
inscrit pour ce site l’objectif de la reconstitution du cordon dunaire et la valorisa-
tion du littoral. Le projet de co-construction de relocalisation des biens et des per-
sonnes mené par les porteurs avec leur bureau d’étude est souhaité participatif
et itératif. Il engage également un soutien actif des services de l’État.
1. http://www.developpement-durable.gouv.fr/Les-Operations-Grands-Sites.html
113
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Trois « sites-ateliers » portés par le GIP Aquitaine avec les communes de Lacanau,
la Teste-de-Buch et Labenne
Le littoral de cette commune, située sur la côte Est de la Guadeloupe, est consti-
tué de petites falaises instables soumises à une érosion littorale et à des risques
de mouvements de terrain. Intégrant la bande des 50 pas, le territoire en ques-
tion est occupé par de nombreuses habitations individuelles souvent précaires et
sans titre. Il est à remettre dans le contexte difficile de la gestion de cette frange
littorale et dans celui – plus global – socio-économique du littoral guadeloupéen. Il
s’agit d’évaluer les solutions pour ces habitants dont certains sont dans une situa-
tion d’urgence. Envisageant le relogement et le développement, un projet d’éco-
quartier devrait amorcer la dynamique de projet. Cette synergie territoriale pourra
également s’appuyer sur les diverses démarches en cours ou à venir : investisse-
ments économiques, projets de valorisation du front de mer, de renouvellement
du tissu urbain du centre-ville soumis à la submersion cyclonique, de la construc-
tion d’un port de plaisance et d’échange, de la qualification d’une promenade lit-
torale avec la renaturation des espaces libérés. La cohérence de cet ensemble
de démarches sera confortée par l’élaboration des documents d’urbanisme et
114
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
115
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Section 6
Les connaissances scientifiques,
aujourd’hui et demain
Pour retracer des évolutions sur de plus longues périodes, il est nécessaire de
recourir à des méthodes d’observation indirectes, telles que la photo-interprétation,
ou l’analyse de cartes anciennes (exemples : cartes d’état-major ou de Cassini),
permettant respectivement de quantifier des évolutions couvrant le dernier siècle
ou d’obtenir des analyses qualitatives de l’évolution morphologique depuis le XIXe
voire le XVIIIe siècle. Ces informations sont nécessaires pour établir un lien entre la
116
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
117
Le littoral dans le contexte du changement climatique
1. Une cellule hydrosédimentaire est une section du littoral où le mouvement des sédiments (sable et galets)
s’effectue principalement au sein de cette section.
118
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
Il est très difficile de prévoir la réponse des systèmes littoraux actuels aux chan-
gements globaux, particulièrement si ces modifications sont fortes et rapides par
rapport à leur capacité d’adaptation. En raison des redistributions des stocks sédi-
mentaires actuellement actifs ou qui le deviendraient, il est impossible de garantir
que les zones actuellement en érosion ou en sédimentation naturelle (les baies
et estuaires) le seront toujours dans un siècle. Dans les zones estuariennes,
l’évolution des débits liquides et solides des fleuves sera tout aussi importante.
2. « Sao Polo » : Stratégies d’adaptation des ouvrages de protection marine ou des modes d’occupation du
littoral vis-à-vis de la montée du niveau des mers et des océans (Programme GICC 2008).
119
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Ces résultats soulignent le rôle prépondérant des courants de houle sur celui du
niveau de la mer dans le façonnement du rivage de Camargue, contrairement aux
plages de poche, dont un exemple est illustré par la figure C13. Sur la base des
vitesses passées du recul du rivage et des prévisions de l’élévation du niveau de
la mer, 90 % des 23 plages de poche de Provence étudiées devraient perdre 75 %
de leur surface actuelle d’ici à 2100, alors que les plages de Camargue dispose-
raient d’un espace de recul important grâce aux lagunes en arrière des cordons
dunaires, ce qui leur permettrait de s’adapter et de mieux résister à la remontée
du niveau de la mer.
120
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
121
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Figure C14 – Impact d’un épi entraînant d’un côté une accumulation limitant l’action
marine au pied des falaises et de l’autre l’accentuant
Source : Stéphane Costa.
3. http://www1.liteau.net/index.php/publications/apports-du-programme-liteau-a-la-gestion-durable-de-la-
mer-et-du-littoral-projets-de-recherche-20042012
122
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
123
Le littoral dans le contexte du changement climatique
124
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
125
Le littoral dans le contexte du changement climatique
126
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
– une fois dans la colonne d’eau, le signal va subir les phénomènes d’at-
ténuation et de diffusion : le lidar bathymétrique est donc particulièrement
sensible aux conditions environnementales et exige une eau relativement
translucide (les particules en suspension, la vase ou toute turbidité lui
sont néfastes) ;
– seuls les rayons lumineux rétrodiffusés sur le fond de l’océan consti-
tuent le signal utile. C’est donc seulement une partie extrêmement faible
du signal laser de départ qui arrive en retour sur le télescope du lidar, ce
qui nécessite d’utiliser des lasers particulièrement puissants.
Pour le produit Litto3D, l’acquisition par lidar bathymétrique est spécifiée
jusque 30 m de profondeur dans les zones les plus favorables de métro-
pole, voire 40 m en outre-mer (eaux particulièrement limpides). Au-delà, le
SHOM revient aux méthodes classiques de lever bathymétrique par son-
deur à base d’ondes sonores.
127
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Section 7
Le projet LiCCo et le point de vue
d’élus des deux côtés de la Manche
\ ] ^ ^ j ` _ ` ^ ]
a ] k i `
\ ] ^ _ ` a ] b c `
d ] b ` _ ` e \ ` f e
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Figure C20 – Localisation des 5 sites normands qui ont participé au projet LiCCo
Source : Conservatoire du littoral.
1. www.licco.eu et licco@conservatoire-du-littoral.fr.
128
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
L’apport anglais a reposé sur le retour d’expérience des stratégies de l’État porté
par l’agence gouvernementale (Environment Agency). Depuis près de vingt ans,
cette agence définit à travers les Shoreline Management Plan (SMP) des stratégies
à moyen et long terme (2025, 2050 et 2100) à travers trois postures : maintien
du trait de côte actuel, repli stratégique ou pas d’intervention active.
Par ailleurs, les Britanniques ont particulièrement travaillé sur le lien avec les popu-
lations côtières à travers l’implication du National Trust dans l’animation locale de
mise en œuvre de stratégies de communication sur l’adaptation.
En Normandie, les moyens pour y parvenir ont été multiples : faire appel à l’ap-
proche historique (cartes anciennes, série de photos aériennes de l’IGN, etc.) ;
réaliser une « photo » actuelle du site décrivant le trait de côte, la biodiversité et
les enjeux éco systémiques, les usages ; se projeter à deux échéances à travers
un volet prospectif aux horizons 2025 et 2050.
Rien de tel que le témoignage suivant de trois décideurs impliqués dans le projet
pour décrire les bienfaits de la collaboration internationale quand il s’agit de faire
face à un problème aussi important que l’érosion côtière.
« Le rapport de la mer à la terre est un très vieil enjeu que la région prend en compte
depuis longtemps. Dès que nous avons obtenu la majorité, en 2004, nous avons
créé le syndicat mixte du littoral normand, une structure qui regroupe des équipes
du Conservatoire du littoral et les élus des deux régions normandes. Quelques
années plus tard, en 2011, le Réseau du littoral normand et picard (ROLNP) a vu
le jour. C’est une structure informelle rassemblant la Picardie, les deux régions
normandes et le Conservatoire du littoral, dont la vocation est de regrouper et de
compléter les travaux des scientifiques sur le trait de côte. Le projet européen
LiCCo (Littoraux et Changements côtiers), qui date de 2011, s’est donc lui aussi
inscrit dans cette démarche. Il a permis à nos équipes de mieux appréhender les
enjeux internationaux liés au trait de côte.
129
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Grâce à LiCCo, nous allons pouvoir gagner du temps en confrontant nos connais-
sances scientifiques et en agissant de façon pragmatique. Ce programme nous
enrichit mutuellement. Il nous a permis de mettre plus facilement des mots sur
une situation qui dépasse notre territoire puisqu’elle est universelle : la mer n’a
pas de frontière administrative, elle ne parle ni anglais ni français. Mais elle n’est
pas pourtant un ennemi de l’Homme. C’est pourquoi nous sommes fiers d’être
passés d’une politique de défense contre la mer à une politique de gestion durable
du trait de côte. C’est la marque d’un véritable changement culturel. »
« Nous, élus des communes littorales avions déjà une approche technique sur le
recul du trait de côte. Nous avons pris conscience des enjeux potentiellement
dramatiques du changement climatique sur le littoral lors de la tempête Xynthia
de 2010. S’en est suivie toute une démarche réglementaire avec l’élaboration de
plans de prévention des risques littoraux.
Le Projet LiCCo est venu se greffer à ce qui existait déjà. Au début, pour être hon-
nête, j’avais la crainte que ce ne soit qu’un programme de plus. En fait, l’approche
a été très différente, plus scientifique et beaucoup plus fine. Jusque-là, les ser-
vices de l’État utilisaient des cartes qui ne prenaient en compte ni les marées ni
les ouvrages de défense. LiCCo les répertorie de façon très précise puisque le
littoral est découpé en bandes de 200 à 300 m, ce qui nous a permis aussi de
mieux comprendre les mécanismes hydrosédimentaires. Nous, par exemple, nous
nous trouvons dans un estuaire et la mer a plutôt tendance à céder du terrain !
Or, l’État nous impose des cartes indiquant des risques de submersion tous les
dix à vingt-cinq ans dans des zones qui n’ont pas été submergées depuis deux
cents ans au moins !
Grâce à LiCCo, nous adoptons une réflexion de moyen et long terme autour de
riches échanges avec des scientifiques : des climatologues, mais aussi un socio-
logue. Cette approche nous a permis de définir la vision que nous avions, nous,
élus, des territoires du Conservatoire du littoral et celle qu’en avait la population.
Nous savons que nous avons vingt-cinq ans pour faire face au problème, c’est la
bonne échelle de temps. Les habitants, et on le comprend, ont du mal à admettre
que, dans certains lieux exposés, ils pourraient être amenés à quitter leur bien.
En travaillant avec les Britanniques au sein du projet LiCCo, nous nous sommes
rendu compte que nous étions en retard et que les Anglais ont un rapport diffé-
rent à leur espace naturel. En Grande-Bretagne la population accepte plus facile-
ment la réalité des risques. En France, beaucoup pensent encore que si la mer
gagne du terrain, on doit bétonner, construire des digues. Nous, élus, avons com-
pris qu’on n’arrête pas la mer. Il va falloir que la population mesure que le risque
est réel. Dans trente ans, Merville sera différente de ce qu’elle est aujourd’hui. »
130
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
« En Angleterre, les autorités locales ont en charge les questions d’érosion litto-
rale, mais c’est l’Agence de l’environnement qui prend en compte les enjeux de
submersion marine. Autre acteur incontournable, le National Trust. Cet organisme
plus que centenaire, qui compte 3 millions de membres, détient de nombreuses
terres le long du littoral.
131
Le littoral dans le contexte du changement climatique
a été un atout, car nous avons des côtes qui comportent de nombreuses simili-
tudes en termes de géologie, de paysages (ports importants mais petites com-
munes) et d’influence de l’océan Atlantique. Nous savons que si des maisons
isolées doivent être déplacées aujourd’hui en raison de l’érosion littorale, dans
vingt ans, cela touchera des villages et, dans cinquante ou cent ans, sans doute
de plus grandes villes. Même des agglomérations situées à basse altitude, comme
Portsmouth ou Hull, vont devoir faire face à la hausse du niveau de la mer. Il faut
que nous convainquions les habitants de la nécessité de prendre en compte ce
problème et de s’y adapter. L’État ne peut pas s’engager à bâtir et à maintenir
partout en état, à grands frais, des ouvrages de défense. »
1. http://planbleu.org
132
L’adaptation aujourd’hui : de la gestion de crise à la planification
133
Le littoral dans le contexte du changement climatique
134
Nouvelle d’anticipation
Entre terre et mer
Isabelle Bellin, Technoscope
Entre terre et mer
– Bonjour madame, lance Cyprian, pas peu fier de côtoyer cette professeure
respectée.
– Bonjour Cyprian.
– Une trentaine. Ils sont un peu en retard... Enfin, une heure et demie pour venir
de Strasbourg, ça reste bien peu ! Avant ces navettes par sustentation magné-
tique, il fallait compter cinq heures !
– La voilà !
Après de rapides présentations, les uns et les autres se répartissent dans des
cyclosolaires, les plus sportifs aux pédales. Madame Flore leur a indiqué le canal
scolaire sur lequel brancher leur puce auditive et leur lentille bionique pour pou-
voir être connectés, échanger entre eux sans être dérangés par d’autres trans-
missions, consulter images et vidéos.
– En route. Nous sommes heureux de vous accueillir dans notre belle région.
Ensemble nous allons remonter le temps et apprécier le chemin parcouru. Nous
vous emmenons d’abord au lycée où, pour le 30e anniversaire de la création de
Mascoote, quelques élèves, dont Cyprian, ont monté une exposition sur notre jeune
ville. Même si elle ne compte que 3 000 habitants, Mascoote reste emblématique
137
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Grâce à ses électrodes, la professeure transmet aux élèves une image de polder
sur le canal scolaire et poursuit.
– En attendant que les concertations aboutissent, les résidents ont été provisoire-
ment réinstallés dans la ville voisine et les malades pris en charge dans les hôpi-
taux de la région. Un bouleversement pour ces familles. Mais bien peu de choses
comparé aux impacts du réchauffement climatique à l’échelle de la planète : des
138
Entre terre et mer
– Parce que le niveau de la mer montait ! Et de plus en plus vite : d’environ 3,2 mil-
limètres par an à l’échelle mondiale à cette époque, et depuis plusieurs décen-
nies. Cela paraît peu, mais c’était déjà presque deux fois plus qu’au début du
XXe siècle. Et cela a continué ensuite, en un siècle la mer est montée d’environ
35 centimètres. Les scientifiques l’avaient prévu dès les années 2000. Et c’est
bien ce qu’on a constaté en France. Le réchauffement climatique est en cause
pour deux raisons principales : l’océan se dilate en se réchauffant et il contient
de plus en plus d’eau provenant de la fonte des glaciers et des calottes polaires.
– Mais 35 centimètres, c’est rien par rapport aux marées ? rétorque un élève.
– Ici, c’est énorme à cause des nombreuses zones basses. Mais vous avez rai-
son, le phénomène est aggravé par les tempêtes qui érodent la côte sous l’effet
des vents et des vagues, font reculer la dune et entrer la mer dans les terres. On
savait qu’un million et demi de personnes subiraient des inondations sur le litto-
ral français, 70 millions en Europe et des centaines de millions dans le monde.
Ça y est, nous y sommes : allons voir cela en images !
Ils garent les cyclosolaires et pénètrent dans le hall lumineux du lycée. Cyprian
présente l’exposition.
– Merci Cyprian, reprend madame Flore. C’est un bon aperçu de notre territoire.
J’ajoute que la précision de certains outils, comme les méthodes d’altimétrie,
nous ont bien aidés à identifier les zones à maritimiser et à faire les bons choix.
Maintenant, allons rejoindre Bootcoote où nous prendrons le bateau pour la faro-
lienne. En chemin, vous allez voir à quoi ressemble un littoral maritimisé. Couvrez-
vous bien, ça souffle aujourd’hui.
139
Le littoral dans le contexte du changement climatique
En concentrant leur regard sur les différentes espèces, les élèves visualisent
sur leur lentille bionique des informations. Ils découvrent les Tamarix utilisés
pour le bois de chauffage, les Atriplex qui forment de jolies haies et servent pour
le fourrage, la betterave maritime, le lupin réticulé, les asperges ou encore la
vigne que les submersions marines protègent du phylloxera, ce puceron rava-
geur. Ici et là, quelques constructions discrètes sont réservées aux agriculteurs.
Un peu plus loin, ils atteignent la Termer, cette bande de deux kilomètres de large
que l’on trouve désormais sur une partie du littoral français où tourisme, élevage,
pêche, chasse cohabitent et où ne sont construits que des abris légers, démon-
tables et mobiles. La route flotte maintenant.
– Comme vous pouvez le voir, la Termer est surtout constituée de prés-salés, recou-
verts lors des grandes marées comme en ce moment : on y cultive toutes sortes
de plantes halophiles, qui s’accommodent bien du sel. Certaines sont comestibles
comme les salicornes ; d’autres sont utilisées en parapharmacie ; la plupart sont
destinées à l’industrie cosmétique ou pharmaceutique. Sur votre droite, c’est du
riz. Et à gauche des microalgues, dont on tire le carburant Bioalgo. Il y a aussi des
élevages d’alevins dans les zones toujours immergées, comme là-bas au milieu
des roseaux. Tiens, regardez ! Des flamants roses ! Ils viennent de la réserve où
ils sont de plus en plus nombreux à nidifier.
140
Entre terre et mer
– Bien sûr, on les mène sur la terre ferme à la moindre alerte. Grâce aux prévisions
météorologiques, on connaît les risques d’inondation plusieurs jours à l’avance.
Ensuite, en temps réel, chacun est prévenu sur sa puce cérébrale d’alerte, en
fonction de sa position précise.
L’ambiance devient de plus en plus marine. La route flotte désormais sur environ
un mètre de fond. Ils atteignent Bootcoote.
– Quelques mots sur ce quartier flottant. Il a été conçu en même temps que la
ville dans l’arrière-pays. Certains habitants, même s’ils ont compris qu’on ne pou-
vait plus continuer à bétonner les côtes pour l’intérêt de quelques-uns, au risque
de mettre des vies en danger, ont tout de même voulu conserver ce qu’on pour-
rait appeler un « pied en mer ». Le conseil participatif a imaginé cette solution :
un quartier flottant, de structure légère, démontable et écologique à tout point de
vue. La centaine d’habitants qui y loge en est locataire, sur décision du conseil.
Les services publics sont réduits au minimum et des engagements sont à res-
pecter en termes d’écologie. En la matière, nos meilleures sentinelles sont les
poissons et les coquillages qui ont élu domicile dans les structures. À commen-
cer par les huîtres, que plusieurs ostréiculteurs élèvent ici, qui seraient très vite
impactées. Côté sécurité, tous les habitants de Bootcoote ont l’obligation d’éva-
cuer les lieux en cas d’alerte et n’ont aucune assurance quant au fait de retrou-
ver leurs biens. Chacun peut, par ailleurs, être renvoyé dans les terres en cas
de comportement inapproprié. Une vingtaine de havres – comme on les appelle
– sont aussi réservés à la location saisonnière, en priorité pour les habitants de
Mascoote. En trente ans, il n’y a encore jamais eu de gros dégât, mais comme
vous l’avez compris, généralement on ne s’installe pas à vie ici. Cela attire sur-
tout les jeunes à la recherche d’une grande proximité avec la nature. Venez, allons
visiter un de ces havres.
Un intérieur très simple, mais confortable, bien loin du monde hyperconnecté de ces
ados. Bien loin aussi des énormes quartiers flottants créés en Chine, à Manhattan
ou à Singapour. Ici, pas d’étage et une architecture destinée à limiter la prise
au vent. Électricité solaire, récupération d’eau de pluie, toilettes sèches, comme
dans tous les quartiers écologiques. Cyprian aimerait bien habiter là, mais ses
parents préfèrent une maison en ville. Ils louent un havre chaque été ou presque.
La petite troupe embarque sur le Navhy, le bateau à hydrogène qui fait la navette
entre Bootcoote et la farolienne, pour le personnel et les touristes.
141
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Ils approchent de l’installation. Même s’ils ont déjà vu des images ou des films
de ce drôle de monstre marin de plus de 20 kilomètres de long, sur place, c’est
impressionnant. Surtout que la mer est formée. Des techniciens assurent la visite.
Les élèves montent à tour de rôle dans la nacelle à 200 mètres de haut. Ils aper-
çoivent alors la dune, les prés-salés et la Termer tout le long du littoral, au loin
Mascoote et l’usine de dessalement. Tous se retrouvent ensuite dans la salle
les machines, sous-marine, comme insonorisée par rapport au vacarme extérieur.
142
Entre terre et mer
Les élèves peuvent voir les turbines en action, le tableau synoptique de la salle
de contrôle et tous les relevés de paramètres. Avant de rejoindre le littoral, ils
sont invités à partager un traditionnel waterzooi de bars et maigres, les poissons
désormais pêchés dans la région au lieu de la roussette et du cabillaud qui ont
disparu à cause de la surpêche et du changement climatique. Affamés par cette
matinée au grand air, les jeunes ne se font pas prier même si ce légendaire plat
flamand n’est pas dans leurs habitudes. Les discussions vont bon train.
– Oui, environ 30 % de la superficie des océans est déjà concernée, répond madame
Flore. Tout le système biologique est bouleversé : des espèces ont disparu, cer-
taines populations d’organismes marins se sont effondrées, d’autres ont proliféré
au détriment des espèces autochtones. Cela a longtemps été le cas de l’huître
creuse du Pacifique, qui avait été introduite en France il y a un siècle et devenait
très envahissante. Depuis qu’on a réussi à gérer son développement, c’est devenu
une ressource locale importante. L’autre impact majeur de la concentration tou-
jours plus forte de CO 2 dans l’atmosphère, c’est l’acidification des océans : planc-
ton, crustacés, mollusques et coraux sont particulièrement touchés. C’est très
inquiétant, car l’ensemble de la chaîne alimentaire est atteinte et nous n’avons
pas encore trouvé de solution.
– C’est le zouave de Zuydmer ! Comme celui du pont de l’Alma à Paris, sauf que
le nôtre a les pieds dans l’eau salée ! Et il est un peu plus sophistiqué. Il enre-
gistre des données sur la montée des eaux, la houle, mais aussi sur le climat et
même l’érosion côtière grâce à un système de télémétrie laser 3D. Il fait partie
du réseau national d’observatoires du trait de côte. Il a été installé en 2030, en
même temps que les réflexions sur la réorganisation de Mascoote.
143
Le littoral dans le contexte du changement climatique
– Nous allons vous laisser explorer cet espace entièrement sauvage, précise
madame Flore. Je vous demande de préserver la faune et la flore en restant sur les
sentiers balisés. Cette réserve fait 250 hectares. Elle est d’une grande importance
écologique. Vous trouverez sur le canal scolaire de nombreuses informations sur
les espèces végétales – surtout des argousiers, troènes sauvages, de l’aubépine,
des oyats –, les animaux – de nombreux oiseaux d’eau, des flamants roses, des
lapins, des chevaux Haflinger –, ainsi que les parcours pédestres, les localisations
des observatoires et les espaces d’information. Je serai bien sûr à votre disposi-
tion sur ce même canal. Avant de vous laisser découvrir Nioudune, un petit mot
encore sur Mascoote. Vous avez pu constater et, j’espère, comprendre pourquoi
Mascoote est souvent cité en exemple en France et en Europe. Après la tempête
Xynthia, plusieurs stratégies d’adap-
tation ont été imaginées en France.
Deux ont été retenues. Dans la majo-
rité des cas, il a été décidé de réor-
ganiser les territoires et les activités
selon l’érosion et les risques de sub-
mersions, en instaurant une Termer.
Parfois, on laisse faire la nature, les
dunes s’érodent et se reforment au
gré des vents ; parfois, on accom-
pagne cette évolution naturelle. Dans
quelques cas spécifiques, lorsque
cette solution est difficilement envi-
sageable au regard d’enjeux stra-
tégiques comme des villes denses
ou d’intérêt patrimonial, le trait de
côte est maintenu aussi longtemps
que possible. Cela passe par diffé-
rentes solutions de digues ou par le
rechargement des plages en sable,
comme l’ont longtemps fait les Pays-
Bas. Les choix faits à Mascoote, non sans mal comme je vous l’ai dit, associent
plusieurs stratégies, toutes importantes, même si certaines vous paraîtront déri-
soires bien que très utiles, comme de stabiliser les dunes en replantant des oyats
tous les ans, en posant ces barrières en bois que vous avez pu apercevoir, qu’on
appelle des « ganivelles », ou grâce au repos dunaire, cette période de plusieurs
mois dans l’année où toute circulation humaine y est interdite. Cette réorganisation
du territoire s’est accompagnée d’un développement économique local, durable
et propice à une économie circulaire. Il faut savoir qu’à l’époque, la région avait
un des plus forts taux de chômage, plus de 18 % dans les années 2010, ce qui
doit vous sembler astronomique ! Maintenant, on vit bien ici et ce n’est pas seu-
lement grâce au tourisme, même s’il faut reconnaître que le climat en été attire
plus de monde que sur la côte méditerranéenne écrasée de chaleur (Mascoote
accueille 30 000 habitants en été !). C’est aussi parce qu’il y a du travail sur la
144
Entre terre et mer
La petite troupe se disperse, chacun appréciant les lieux à sa manière. Les deux
heures passent bien vite, trop vite. La nuit tombe, il est temps de reprendre la
navette. Chacun repart avec, en souvenir, un petit pot de miel de Nioudune. Aucun
doute que plusieurs reviendront et feront, à leur tour, découvrir la région.
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155
Rapport d’activité
de l’Observatoire
Rapport d’activité de l’Observatoire
L’ONERC est présidé par M. le sénateur Paul Vergès et dirigé par M. Laurent Michel,
directeur général de l’énergie et du climat. Le secrétariat général est assuré par M.
Nicolas Bériot assisté de quatre chargés de mission, dont un ingénieur documen-
taire-webmestre. L’ONERC constitue le « pôle Adaptation » de la DGEC, en charge
du pilotage de la politique nationale d’adaptation. Il assure également la fonc-
tion de point focal de la France au sein du GIEC. Cette annexe, sans être exhaus-
tive, présente les principales actions impliquant l’ONERC depuis septembre 2014
jusqu’à septembre 2015.
Action internationale
Du fait de la publication du 5e rapport d’évaluation du GIEC, la fonction de point
focal du GIEC pour la France a occupé une large part des activités internationales
de l’Observatoire en 2014 et 2015. En outre, l’ONERC participe régulièrement à
d’autres travaux internationaux notamment au niveau de l’Union européenne, de
l’océan Indien, du bassin Méditerranéen et a développé des relations multilaté-
rales et bilatérales avec les services en charge des politiques publiques d’adap-
tation dans plusieurs pays.
159
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Lors des assemblées plénières du GIEC, Nicolas Bériot copréside le comité finan-
cier. Les assemblées plénières du GIEC ont finalisé et approuvé à l’unanimité des
195 pays membres le 5e rapport d’évaluation. Ces assemblées ont permis égale-
ment de consolider les règles et procédures de l’institution préalablement à l’élec-
tion d’un nouveau bureau en octobre 2015. L’ONERC coordonne le versement de
la contribution française au budget du GIEC émanant de trois ministères : Affaires
étrangères, Recherche et Développement durable. Enfin, l’ONERC appuie la par-
ticipation des chercheurs français aux travaux du GIEC en prenant en charge une
partie des missions des experts.
160
Rapport d’activité de l’Observatoire
conférence Paris climat 2015 (COP21) pour les aspects relatifs aux sciences cli-
matiques et aux politiques publiques d’adaptation.
Tour de France du Climat, photo collective autour de la sphère du ministère, sur les marches de la Grande
Arche de La Défense, 31 mars 2015.
© Arnaud Bouissou MEDDE-MLETR.
161
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Espace européen
Représentant la DGEC, l’ONERC siège pour la France au sein du groupe de travail
mis en place par la Direction générale Climat de la commission européenne pour
le suivi de la mise en œuvre de la stratégie européenne d’adaptation adoptée en
2013. Dans ce cadre, l’ONERC met à jour annuellement les informations concer-
nant les actions d’adaptation de la France par l’intermédiaire des documents de
suivi (MMR adaptation) sur la plate-forme d’échange Climate Adapt (http://climate-
adapt.eea.europa.eu/) et participe aux travaux préparatoires à l’élaboration d’un
cadre d’évaluation des politiques d’adaptation (exemple : adaptation scoreboard)
conduits par l’Agence européenne de l’environnement.
162
Rapport d’activité de l’Observatoire
163
Le littoral dans le contexte du changement climatique
Les terrains d’étude pour ce projet sont les parcs naturels régionaux de la région gre-
nobloise (PNR du Vercors comme terrain principal et PNR des Bauges, de Chartreuse
et des Baronnies provençales comme terrains satellites), territoires partenaires sen-
sibles au changement climatique et permettant de prendre en compte une diver-
sité de gradients, tant climatique qu’altitudinal, social, économique et écologique.
Le portail de l’adaptation
Afin de donner encore plus de visibilité au sujet de l’adaptation et aux impacts du
changement climatique, le site web de la DGEC incorpore à différentes rubriques
les éléments élaborés sur la base des travaux de l’ONERC. La rubrique consacrée
164
Rapport d’activité de l’Observatoire
165
Le littoral dans le contexte du changement climatique
166
Rapport d’activité de l’Observatoire
Rapports annuels
Le rapport annuel « L’arbre et la forêt à l’épreuve d’un climat qui change » a été
publié à l’automne 2014 et diffusé directement à plus de 2 000 destinataires. Il
dresse un panorama des enjeux de l’adaptation au changement climatique pour
l’arbre et la forêt en France métropolitaine. Ce rapport a été présenté à plusieurs
reprises auprès de professionnels de la filière bois et auprès d’agent du minis-
tère chargé de l’Agriculture et remis par le président de l’ONERC, Paul Vergès,
à Madame la ministre de l’Écologie du Développement durable et de l’Énergie,
Ségolène Royal.
La ministre Ségolène Royal s’est vu remettre le 11 février 2015 le rapport sur « L’arbre et la forêt à l’épreuve
d’un climat qui change » par le sénateur de La Réunion, Paul Vergès, président de l’ONERC.
Source : © MEDDE/SG/DICOM
167
Le littoral dans le contexte du changement climatique
168
Rapport d’activité de l’Observatoire
Grand public
Dans le cadre d’un partenariat pluriannuel avec l’association Météo et Climat, pré-
sidée par Jean Jouzel, les supports d’information réalisés par la Direction générale
de l’énergie et du climat avec l’appui de l’ONERC ont été diffusés lors des jour-
nées scientifiques 2014 dédiées à la qualité de l’air et du Forum international de
la météorologie au printemps 2015. De plus, l’ONERC a diffusé, au sein de son
réseau, 200 exemplaires du numéro spécial de la revue La Météorologie (éditée
par Météo et Climat) consacrée au 5e rapport d’évaluation du GIEC.
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Le littoral dans le contexte du changement climatique
Statistiques de fréquentation
L’accroissement significatif de la fréquentation du site de l’ONERC (cf. tableau
ci-après) au cours des années 2013 et 2014 s’est stabilisé en 2015 à environ
10 000 visites et 20 000 pages vues en moyenne chaque mois. L’évolution de
170
Rapport d’activité de l’Observatoire
171
Annexes
Annexes
Annexe 1
SIGLES ET ACRONYMES
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Le littoral dans le contexte du changement climatique
176
Annexes
Annexe 2
CONTRIBUTEURS ET REMERCIEMENTS
Cet ouvrage a été réalisé sous la direction de Laurent Michel, directeur de l’Ob-
servatoire national des effets du réchauffement climatique, et de Nicolas Bériot,
secrétaire général.
Auteurs :
Isabelle Bellin, Technoscope
Vincent Bourcier, MEDDE/ONERC
Éric Brun, MEDDE/ONERC
Anny Cazenave, CNES
Sébastien Colas, MEDDE/CGDD, Observatoire national de la mer et du littoral
Stéphane Costa, Université de Caen Basse Normandie
Jean-Karl Deschamps, 1er vice-président de la région Basse-Normandie (interviewé
par Clotilde WARIN, MEDDE/SG/DICOM)
Olivier Douez, BRGM
Jérôme Duvernoy, MEDDE/ONERC
Pierre Gaufrès, CEREMA
Mireille Guignard, MEDDE/DGALN
Nick Hardiman, conseiller au Département des inondations et du risque litto-
ral à l’Agence de l’environnement en Angleterre (interviewé par Clotilde WARIN,
MEDDE/SG/DICOM)
François Hissel, ONEMA
Thierry Hubert, MEDDE/DGPR
Déborah Idier, BRGM
Didier Jourdan, SHOM
Vanessya Laborie, CEREMA
Antoine Lafitte, Plan Bleu
Roseline Laroche, MEDDE/DGPR
Sylène Lasfargues, MEDDE/ONERC
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