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DP Antigone Ok

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Théâtre Royal Du Parc

Fondation d’Utilité Publique


Direction : Thierry Debroux

L’Antigone de Sophocle
Mise en scène et chorégraphie : José Besprosvany

Dates : 9 au 16 mars
Lieu : Aula Magna
Durée du spectacle : 1h30
Réservations : 0800/25 325

Contact écoles : Adrienne Gérard


adrienne.gerard@atjv.be - 010/47.07.11

Dossier pédagogique
réalisé par Nathalie Huysman
1
Une création de la Compagnie José Besprosvany/IDEA,
en coproduction avec le THEATRE ROYAL DU PARC
et l’ATELIER THEATRE JEAN VILAR.

Avec l’aide du CENTRE DES ARTS SCENIQUES,
de la FEDERATION WALLONIE-BRUXELLES/Service de la Danse
et de la COMMISSION COMMUNAUTAIRE FRANCAISE.

2
Sommaire

Introduction
Sophocle
Le théâtre grec
Antigone
La mise en scène

3
#tellementoldschool
#antiquevintage
#Pourquoijedoisassisteraca

497, 496, 495 avant J.-C. ! Bref, 71e olympiade ! Et nous voici à parler de
l’antique Sophocle, 2500 ans plus tard ! Comment survivre aussi longtemps
à travers les siècles ?

Quel est le secret de ce grand dramaturge grec qui se partage l’affiche


avec Eschyle et Euripide ?

Auteur de 123 œuvres dont les pièces les plus notables de l’histoire
comprenant Antigone et Œdipe Roi, grand victorieux des concours
dramatiques, ce super-homme a traversé l’Histoire comme un orteil
traverserait une chaussette ! Nous pouvons donc le dire avec une facilité
déconcertante !

Mais comment expliquer son succès ? Pourquoi Sophocle nous poursuit,


pourquoi Antigone est à connaître et reconnaître, aperçu d’un homme et
d’une œuvre que nous ne sommes pas prêts d’oublier.

4
Sophocle

5
Sophocle
Super - auteur
De son vrai nom : Σοφοκλῆς, Sophocle est le principal
représentant avec Eschyle et Euripide du théâtre grec. Né à
Colone (près d’Athènes), fils d’un riche armurier, il reçoit une
éducation soignée et se détache par de nombreuses qualités :
il est beau, intelligent et possède, paraît-il, un grand sens
musical. Brad Pitt à côté ? Pas grand chose. D’ailleurs en 480,
à seulement 16 ans, le voici à la tête du chœur d’adolescents,
accompagné de sa lyre, chantant la célébration de la victoire
de Salamine (défaite des Perses menés par Xerxès, le film
300 : Rise of an empire présente une partie de cette bataille) .

En 468, à 29 ans, le voici qui remporte le concours


dramatique sur le vieil Eschyle qui est alors sexagénaire ! Le
début d’une reconnaissance qui ne prendra pas fin de sitôt
puisqu’il gagne les Grandes Dionysies à 18 reprises (certains
disent 19, les chiffres sont toujours incertains à cette époque).
On peut le dire, même Lady Gaga ne s’est pas vue remettre
autant de prix. Sophocle, c’est du lourd !

La génération qui s’étend d’Eschyle à Sophocle a connu de


grands changements tant sur le plan de la pensée, de la
langue qu’au niveau plus spécifique de la composition d’une
tragédie. En effet, l’époque va être marquée par une collectivité
soucieuse de la politique ayant conscience de son rôle et des
valeurs morales qu’elle véhicule.

Sophocle va, de cette façon, s’éloigner du dithyrambe pour se


plonger dans les c o n d i t i o n s d e l ’ ê t re e t d e l e u r
contextualisation. Il va commencer à mesurer la distance qui
sépare les dieux des humains et va se pencher
spécifiquement sur la nature contrariée qui est au fondement
de l’homme.

6
Papy fait de la résistance !
Le dramaturge va œuvrer durant 63 ans à créer des pièces théâtrales. L’on dit même qu’il
aurait peut-être interprété certains rôles. Auteur de plus d’une centaine de pièces, il apporte
également à cet art quelques innovations surprenantes. Nous retiendrons :

- l’invention de la toile de fond


- l’apport d’une majesté plus grande au mouvement du chœur
- l’ajout de trois choreutes qui passent ainsi de douze à quinze
- l’introduction du dialogue à trois personnages
- l’utilisation de la trilogie libre (cela veut dire que chaque drame peut se jouer seul, se
suffisant à lui-même)
- l’approfondissement des aspects psychologiques des personnages
- la puissance des dieux, il cherche à comprendre leur justice et s’attaque aussi à la
fragilité humaine, il dépeint les hommes tels qu’ils devraient être
- et enfin, il se distingue par l’héroïsme qu’il insuffle à ces protagonistes. Cependant,
n’oublions pas que ces héros ne sont pas à prendre comme des modèles ; en effet, ils
sacrifient tout à leur idéal et à ce qu’ils jugent bien, abandonnant tout de cette façon pour
des valeurs morales absolues ou pour l’honneur.

En 409, à l’âge de 87 ans, il gagne encore le premier prix du concours dramatique avec
Philoctète ! Sophocle meurt en 407 ou 405 avant J-C. De son immense travail, seules sept
tragédies nous sont parvenues sur les 123 pièces ! Et de celles-ci, nous ne connaissons la
date exacte que de trois œuvres, la date des quatre autres restant incertaine. Cependant,
celle qui nous intéresse aujourd’hui est sans doute la plus notable de son répertoire :
puisqu’il s’agit de la célèbre Antigone. Découvrons ensemble ce que fut le théâtre de son
temps et la famille tant redoutée des Labdacides.

Un procédé stylistique à retenir : l’ironie scénique !

Cette figure de langage consiste à mettre dans la bouche d’un personnage des expressions à double portée, s’appliquant à sa situation présente, telle qu’il
croit qu’elle est, et à sa situation véritable, telle que le spectateur la connaît ou telle que la révélera la marche des événements. Cette manière de parler se
remarque par exemple très souvent dans l’Œdipe-roi, dans les paroles de Tirésias, dans celles d’Œdipe lui-même et de plusieurs autres personnages. Elle
est très rare dans Eschyle. Cette ironie dramatique est étroitement liée avec un élément nouveau qui à cette époque s’introduisit dans le drame, avec
l’intrigue. Celle-ci, qui est très différente de l’action, vient de l’inconnu qui plane sur une situation et le plus souvent d’une cause imprévue et fortuite, qui
vient se mêler aux événements et les compliquer. L’intrigue est presque nulle dans les anciens drames, quoique l’action y soit très puissante : elle existe au
contraire dans l’Œdipe-roi, dans l’Antigone, et ailleurs; il arrive même que si elle manque, l’auteur la crée au moyen d’un événement fictif, tel que la mort
simulée d’Oreste dans son Électre. Mais il ne lui a jamais donné une importance telle qu’elle pût se substituer à l’action véritable et la faire disparaître,
comme on l’a souvent fait dans les temps modernes. C’est un des mérites de Sophocle d’avoir su manier cet instrument dangereux et en tirer avec une
juste réserve des effets nouveaux, que l’action dramatique n’eût pas produits.
Émile Burnouf, Histoire de la littérature grecque. Tome premier. Paris, C. Delagrave, 1869, p. 367-374

7
Les 7 pièces de Sophocle

Avt J-C Avt J-C

8
Le théâtre grec

9
L’apport de la Grèce antique
La Grèce antique nous a légué un grand nombre de mythes et de légendes qui
ont influencé toute la littérature occidentale. En effet, cet héritage est devenu une
part spécifique de notre patrimoine culturel. D’Andromaque à Médée en passant
par la Guerre de Troie, tous ces récits peuplent encore nos imaginaires. Même
Hollywood s’est inspiré de ces histoires pour en créer des blockbusters ! En voici
quelques-uns ! Vous en connaissez d’autres ?

Nombre de ces récits se racontent au travers de sagas familiales comme les


Atrides ou les Labdacides et traduisent les rapports entre les hommes et les
dieux, leur destin mais également leur individualité face à la cité représentant
leurs idéaux de justice et d’ordre moral.

Ces mythes ont été réactualisés par de nombreuses époques mais à chaque
fois avec le prisme des enjeux contemporains qui traversent leur siècle. Ainsi,
par ces récits, les auteurs contemporains énoncent des idées nouvelles au
travers d’une histoire ancienne.

Il existe donc un fil, une continuité qui s’est tissée et qui est intimement liée à
notre histoire. Mais cette familiarité, il faut tenter de la redécouvrir à chaque fois.
Et c’est peut-être dans le fait de pouvoir les métamorphoser que réside leur
grande richesse.

Qu’est-ce qu’un mythe ?

Le mythe se caractérise par sa forme (un récit), par son fondement (une
croyance religieuse), par son rôle (expliquer l’état du monde). La notion de
mythe suppose une continuité narrative. Elle demande un cadre, des
personnages et une action. L’idée d’un dieu ou la foi en l’existence d’un héros ne
suffisent pas à fonder un mythe. Celui-ci possède une fonction étiologique, c’est-
à-dire qu’il imagine la cause de phénomènes connus. Il remonte à la Création,
à l’établissement d’un pouvoir politique, ou encore, parcourant le monde de l’au-
delà, imaginant la fin du nôtre, il explique à l’homme les principes qui doivent
guider sa vie terrestre.

http://www.editions-ellipses.fr/PDF/9782729838799_extrait.pdf

10
Des fêtes et du vin ! Vive le théâtre !

Grâce à Sophocle nous visitons la période parfaite du théâtre grec, et plus


précisément athénien ! En effet, c’est au Ve siècle que celui-ci va connaître
son siècle d’or.

Le théâtre grec est intimement lié au culte du Dieu Dionysos (dieu du vin !
Mais aussi celui des arts). En son honneur, étaient organisées des
processions avec des danses et des chants qui narraient la renommée des
g r a n d s h é ro s . L e t e r m e t r a g é d i e , q u i s i g n i fi e «  c h a n t d u
bouc  » (notamment pour l’animal sacrifié), est donc étroitement lié à la
religion.

Durant ces fêtes, l’Etat proposait un concours où trois auteurs devaient


soumettre au public (composé de toutes les strates sociales) une trilogie
(trois tragédies) suivie d’un drame satyrique. Un jury représentatif de la
Cité élisait le vainqueur. Chaque ville possédait, par ailleurs, ses propres
fêtes. Les plus connues sont les Grandes Dionysies. Elles duraient 6 jours et
comprenaient : une procession le premier jour, le deuxième et troisième jour,
un concours de dithyrambes, et enfin les quatrième, cinquième et sixième
jours, le concours de représentations dramatiques.

Un aspect particulier à retenir : les places étaient gratuites ! Donc, le


public venait en masse assister aux représentations. C’est en 410 avant
notre ère que les places devinrent payantes à Athènes ! Mais l’Etat
accordait une subvention nommée le théôrikon afin que les citoyens les plus
pauvres puissent assister aussi aux spectacles.

Le plus grand théâtre est celui d’Athènes, nommé par ailleurs, Théâtre de
Dionysos. Les représentations à cette époque, outre leur rôle de
divertissement, avaient pour but également d’amener chez les spectateurs
une pensée critique sur leur époque et sur les valeurs morales de l’Etat.
Les pièces, même présentées dans le cadre des Dionysies (trois fêtes par
an) véhiculaient des idées civiques et religieuses. En effet, toute la cité
participait à cet événement.

11
Plutôt comique ou plutôt tragique ?
Les deux !

En Grèce, on jouait des comédies entre les tragédies, sans même leur
interdire d’avoir un point de vue satirique sur l’art tragique lui-même
comme sur les ridicules de la vie publique et privée (on peut rire de
tout !). Aux Grandes Dionysies, la comédie faisait aussi l’objet d’un
concours, même si l’on ne représentait qu’une comédie pour trois
tragédies. Vers 420 avant J.-C., Aristophane fut le grand maître du
genre, dont les parodies et les audaces critiques nous étonnent toujours.

Extrait de Le théâtre est un jeu de Christophe Deshoulières aux éditions Librio

La comédie ancienne

Qu’est-ce que la comédie ancienne ? Il s’agit d’une comédie qui tire ses
origines d’anciens rituels de fertilité. A cela, on y ajoute une pincée de
plaisanteries triviales ou scatologiques, on y met une poignée de tirades
satiriques dirigées contre les personnages publics avec supplément de
caricature des dieux, et nous obtenons une superbe comédie ancienne.
L’objectif numéro 1 : nous faire rire bien évidemment ! Et pour cela,
elle se sert de tous les artifices possibles, travestissements excessifs,
joutes verbales, etc. Le maître de ce style est celui que nous venons de
découvrir : Aristophane. Il sera l’initiateur du genre dit « moyen », c’est-
à-dire les comédies qui se moquent de la vie politique et
intellectuelle.

La comédie nouvelle

Alors que le sujet athénien en comédie perd de la valeur, un nouveau


genre va apparaître nommé «  comédie nouvelle  ». Celui-ci trouve son
essence dans des comédies locales. Une seule nous est parvenue
"l’Avare ou le Misanthrope" de Ménandre écrite en 317 avant J.-C. Les
intrigues sont construites principalement autour de quiproquos
mêlant amour et argent au sein d’une famille ou des caractères sociaux
poussés dans leur extrême et facilement identifiables.

12
A bord du chariot de Thespis !
Qui est Thespis à votre avis ?

un conducteur de char
l’inventeur de la tragédie
l’inventeur de la comédie
un « hypocrite », personnage de comédie
un ivrogne, voué au culte (hips !) de Dionysos

Il est tout ça à la fois!

Véritable homme-orchestre des origines du théâtre, Thespis (actif au milieu du VIe siècle avant J.-C.) ne nous a pas légué d’archives, et c’est bien
dommage… Voué à Dionysos, poète, acteur et danseur, Thespis parcourait les campagnes en conduisant son chariot-théâtre et donnait des
représentations au milieu des fêtes du vin ou du printemps. Premier des saltimbanques, il scandalisa donc les « honnêtes gens » avec ses comédies,
avant de remporter le premier concours de tragédie aux grandes dionysies d’Athènes (546 avant J.-C.). On prétend que c’est lui qui aurait eu l’idée
de dissocier le coryphée du chœur dans un jeu de questions-réponses, créant ainsi le premier dialogue dramatique. Et l’«  hypocrite  », personnage
comique par définition, car dédoublé en lui-même, c’est le comédien par excellence selon la pensée grecque.

L’acteur et la tragédie antique

Le nom grec de l’acteur est « hypocritès » ce qui signifie « celui qui répond ». Au début, seul un acteur prenait place (le protagoniste), puis ils furent
deux et puis trois (deutéragoniste inventé par Eschyle et tritagoniste inventé par Sophocle). Les comédiens se partagent tous les rôles, ce sont toujours
des hommes adultes. Afin de pouvoir les distinguer clairement, les acteurs portaient généralement des masques et des costumes qui permettaient
l’identification de leur personnage. L'acteur antique s'efface totalement derrière son rôle, même physiquement. En effet, cet accoutrement permet à un
acteur de tenir dans la même pièce plusieurs rôles parfois très différents. Tous les rôles étaient donc joués par des hommes, hé oui même les rôles de
femmes ! Ainsi celui qui interprète Antigone dans la tragédie de Sophocle est-il aussi Hémon !

Le coryphée : chef du chœur dans une tragédie grecque, une voix soliste ; mais sa fonction existait avant l’établissement du genre tragique : le chœur
intervenait déjà dans des cérémonies religieuses, notamment sous la forme du dithyrambe.
Chant choral en hommage à Dionysos, le dithyrambe ne devient la tragédie qu’au moment où le coryphée, au lieu de se contenter de décrire une action
avec les autres choristes, s’oppose à eux sous la forme d’une voix singulière : commentateur, puis personnage. La tragédie apparaît dans ce processus
d’autonomie des voix, avec leur identification aux héros dont on raconte l’histoire, avant de la représenter pour de bon sur scène.

Le chœur est développé dans la partie Antigone !


Extrait de Le théâtre est un jeu de Christophe Deshoulières aux éditions Librio

13
L’architecture du théâtre grec
Les spectacles se déroulaient de jour et en plein air. Les acteurs évoluaient sur le proskénion et le choeur (composé de citoyens grecs) était placé
quant à lui dans l’orchestra. Celui-ci dialoguait avec un personnage ou commentait l’action en dansant et en chantant. Il agissait essentiellement
comme le médiateur entre le public, monde réel, le monde fictif, celui des héros et enfin celui des dieux.

Orchestra = (partie la plus ancienne), espace


circulaire (diamètre d’environ 20 m) en terre battue
au centre duquel se trouve l’autel de Dionysos
(thymelê) où évolue le chœur.

Theatron = «  l’endroit où l’on voit  », demi-cercle


bâti au flanc d’une colline ; il peut accueillir des
dizaines de milliers de spectateurs.

Skènè = plate-forme élevée de un à deux mètres


soutenue, du côté des spectateurs, par un mur
supportant les décors, construction provisoire en
bois qui sert de coulisses.

Proskénion = bande rectangulaire surélevée de


quelques marches sur laquelle évolue les acteurs.

Parados = Les parodoï étaient les deux passages


entre les sièges des spectateurs et la skènè, qui
reliaient principalement l’orchestra à l'extérieur du
théâtre. Le terme d'eisodos (entrée) est aussi en
usage.

Le théâtre de Dionysos trouve ses origines au Ve siècle avant J.-C. ; à cette période, il possédait seulement l’orchestra en terre battue et la skene
construite en bois. En effet, les spectateurs assistaient à la représentation sur une pente naturelle. Les gradins n’arrivèrent qu’en 420 avant J.-C.
et ceux-ci furent construits en bois. La pierre fut amenée entre 338 et 326 avant J.-C. sous Lycurgue (orateur et homme politique d’Athènes).

14
Antigone

15
Les Labdacides ou l’aveugle monstruosité
Antigone appartient à la famille des Labdacides. Pourquoi ce nom étrange ? Parce que le premier représentant de cette généalogie est Labdacos.
Son fils, Laïos, grand-père d’Antigone, a entraîné avec lui une succession de malheurs sur sa descendance suite au viol du fils de Pélops,
Chrysippe, qui s’est suicidé après cet acte odieux. Pélops, fou de rage, lança une malédiction sur Laïos et sa filiation vouant celle-ci à sa
disparition. Une malédiction qui touchera notre héroïne et ses frères.

16
Les Labdacides - #problèmedanslafamille
Œdipe : qui signifie « Pieds enflés ». Fils de Laïos
et Jocaste, il a résolu l’énigme du Sphinx, tué son
père puis épousé sa mère. Il s’aveugle suite au
suicide de Jocaste.

Soeur de Créon, épouse de Laïos puis de son


propre fils Œdipe, à qui elle donnera 4 enfants,
Jocaste se pend apprenant la véritable nature de
son union avec Œdipe.

Fiancée d’Hémon, fille d’Œdipe


et de Jocaste, Antigone s’opposera jusqu’à la
mort à son oncle Créon afin d’ensevelir son frère
Polynice.

Suite au suicide de Jocaste et à l’exil de leur père


Œdipe, les deux frères devaient régner en
alternance un an chacun sur la ville de Thèbes.
Cependant, Etéocle refuse de céder le pouvoir à
son frère lorsque le tour de celui-ci arrive.
Polynice décide donc de conduire une armée
s’alliant avec d’autres cités pour reprendre
Thèbes. Les deux frères s’entretueront au combat.
Mais Créon n’offrira de sépulture qu’à Etéocle,
punissant Polynice d’avoir attaqué la ville.
Ismène, soeur d’Antigone, figure de respect de
l’autorité. Elle ne désobéira pas à la loi de Créon
et se soumettra au fatum.

17
Antigone et le XXe siècle
Antigone a joué une part essentielle dans la réécriture des mythes du XXe siècle. En effet, un grand nombre d’auteurs connus vont s’inspirer de son
histoire pour faire parler leur époque. En voici quelques reprises :

Antigone, Jean Cocteau, 1922

Grâce au procédé de la contraction, l’auteur innove tout en gardant le sens tragique du personnage d’Antigone. Pour lui, elle représente la figure de
celle qui préfère plaire aux morts plutôt qu’aux vivants. Elle désire ardemment être à la hauteur de ses convictions éthiques et reste liée aux siens,
même si ceux-ci ne sont plus que poussière. La jeune femme s’inscrit directement dans une visée philosophique qui s’oppose au jugement humain.
Pour Cocteau, les protagonistes n’expliquent pas. Ils agissent avant tout. Le choix étant déterminé dès le départ, la situation tragique provient de la
représentation des conséquences que celui-ci implique. Néanmoins, même soumise à son destin, elle lutte jusqu’au dernier moment puisqu’elle affirme
qu’on lui vole une part de vie. Cocteau, fidèle à Sophocle, a, comme il le dénote, déblayé et concentré le texte de son prédécesseur pour faire surgir
des « reliefs inattendus ».

Antigone, Jean Anouilh, 1944

Même si des ressemblances évidentes peuvent être d’emblée soulignées entre l’œuvre antique et l’œuvre d’Anouilh, le style de ce dernier s’oppose
explicitement à celui de Sophocle. En effet, la familiarité du ton qu’use l’auteur contemporain nous ramène directement à notre temporalité. C’est
pourquoi il y use également de l’anachronisme, notamment avec bars, fusils, cigarettes… Mais une particularité réside principalement dans l’ajout de
nouveaux personnages tels que la nourrice et les gardes et la suppression du caractère sacré que revêtait la tragédie antique. Antigone, jeune et
intransigeante, montre que l’homme est libre de se révolter et de résister à l’injustice de l’homme.

Antigone, Bertolt Brecht, 1948

Antigone avec Brecht revêt un caractère fortement politique. En effet, le but de Brecht n’étant pas de restituer l’œuvre antique, il joue, par ailleurs, sur la
distance qui nous sépare de l’histoire qui est celle de Sophocle. Avec cet effet de distanciation propre à son esthétique, il génère une analogie entre la
chute du IIIe Reich et la jeune adolescente. Le conflit politique prend tout son sens. Son jeu épique vient défaire les personnages de leur dimension
mythologique pour leur conférer un caractère social. Antigone n’est donc plus une héroïne insolite qui s’insurge contre les lois de sa cité, mais une
femme ordinaire qu’un contexte va pousser à s’opposer, trop tardivement, à une tyrannie.

Antigone, Henry Bauchau, 1999 (auteur belge)

Bauchau est sans doute, dans la forme, le plus éloigné de Sophocle, puisqu’il choisit d’écrire le récit sous le genre du roman. Néanmoins, il fait parler
les silences de la tragédie grecque et confère à tous les personnages une histoire véritablement proche de l’humain. Au travers du chant, de la
peinture, de la danse, il rejoint pleinement les origines de la tragédie mais se détache de ce qui la liait directement aux dieux tout en restant pourtant
dans une forme de sacré. Poétique, onirique, la puissance de son style nous amène à découvrir une nouvelle Antigone, la mendiante, celle qui aimait
trop.

Il existerait cependant plus de 200 versions du mythe. Derrière ces ré-actualisations, se cache à chaque fois la volonté des auteurs de restructurer son
histoire en fonction du contexte historique dans lequel ceux-ci se trouvent. Le sujet d’Antigone ouvre, en effet, le débat entre les générations, entre les
sexes, entre les idées politiques et religieuses. Elle reste, comme dit George Steiner, « un matériau résistant et inaltérable. Envers et contre tout ».
18
Antigone : au-delà du mythe
Antigone refuse donc ouvertement de se soumettre aux lois écrites,
c’est-à-dire aux lois civiles qui varient en fonction du temps et des
peuples. Elle se réclame de lois qui dépassent l’entendement humain,
celles de la famille, celles du cœur, celles des dieux. En s’insurgeant
contre son oncle Créon, qui tente de faire régner l’ordre suite à la guerre
contre Thèbes, Antigone va mener un véritable combat qui va la
pousser, tout comme son oncle, dans un fanatisme qui ne prendra fin
que dans la mort de celle-ci.

Par conséquent, l’Etat et le divin s’opposent et cette opposition fonde


l’action de la pièce. Diverses dialectiques découlant de cette situation
traversent ainsi le récit. Néanmoins, au sein de toutes ces antinomies,
nous pouvons affirmer que chacun des deux partis est justifiable, leur
erreur est d’avoir sombré tous deux dans la démesure. Créon n’est donc
pas à voir comme un tyran diabolique et Antigone comme une figure de
sainte rébellion. Il s’agit de reconsidérer leur choix à la lumière de
leurs convictions extrêmes. La pièce vient ainsi questionner le rôle
de la violence dans la dissolution de l’Etat. Une question essentielle qui
touche également à notre actualité.

« Que devient le combat d'Antigone dans la Cité contemporaine ? Si l'on veut être
fidèle à la sobre puissance de la leçon sophocléenne (…) ce serait le combat de qui
choisit d'assumer jusque dans leurs conséquences les plus froides les seules
puissances de la mort contre tout ce qui assume une volonté d'ordre, ou de mise en
ordre, qui n'est pas elle-même, et c'est peut-être le plus difficile, fondée sur un
respect à l'égard de tout ce qui, d'une manière ou d'une autre, et de manière aussi
infime qu'on le veut, procède de la vie. Mais chez Sophocle, Antigone ne s'oppose
pas à proprement parler, ce n'est pas l'objet, en tous les cas, de son désir, elle
assume bien plutôt ce que l'ordre comportait, en révélant du même coup ce qu'il
avait de parfaitement odieux. Or, dans une Cité comme la nôtre où l'ordre n’est plus
représenté dans la figure unique d'un chef, mais par de multiples instances par
lesquelles il se réfracte — la science, par exemple, les multiples technologies,
l'enseignement, la culture organisée officiellement et subventionnée à de multiples
niveaux, etc. —, Antigone a sa place chaque fois qu'il sera cru possible d'épouser ce
qu'implique un ordre pour en manifester et en révéler le caractère odieux. »
Pierre Gravel

19
Et aujourd’hui, ça me raconte quoi ?

Les thématiques

Alors à quoi vous fait penser le sujet d’Antigone aujourd’hui ? Ne résonne-t-il pas
encore avec notre actualité ?

Doit-on toujours se soumettre à la loi civique ? Dans quel cadre, la désobéir est-
elle pensable ?

Peut-on échapper à son destin ? Auraient-ils pu éviter cette fin tragique ?

C’est une femme qui s’oppose à un homme… qu’est-ce que cela vous raconte ?
Est-ce essentiel ? Oui-Non pourquoi ?

La mort d’Antigone peut-elle être considérée comme un acte politique ? Est-ce un


acte de vie ou un acte de mort ?

Peut-on outrepasser des lois religieuses comme le droit à la sépulture ?

Quels autres questionnements cette thématique vous amène-t-elle ?

La tragédie de Sophocle, par conséquent, ne donne aucune réponse mais elle


invite au questionnement.

20
Antigone
La mise en scène

21
Alors on danse !
Du chœur à la danse

Le chœur, dérivé du mot grec choros, désignait à l’origine une danse


solennelle dans les fêtes religieuses. Celui-ci était souvent accompagné
de chants et de musique. L’on raconte qu’il s’agissait parfois de
véritables ballets.

Il était composé généralement de 15 garçons (choisis parmi les citoyens


de la Cité) et personnifiait un personnage collectif. Le coryphée
exprimait généralement la voix et les réflexions des citoyens. Les
interventions du chœur nommées Stasima alternaient avec des épisodes
interprétés par les comédiens.

Les parties :

- le prologue qui expose la situation


- la parados qui est l’entrée du chœur
- trois épisodes qui se jouent en alternance avec trois stasima
- et l’exodus qui est la conclusion

Occupant le rôle de médiateur, il n’avait aucune fonction dramatique. Il


était le commentateur de l’action.

L’évolution du chœur

Progressivement, aux dithyrambes, chants religieux qui étaient chantés en


l’honneur du Dieu du vin et des arts, furent intégrés des intermèdes épiques
puis des épisodes qui donnèrent naissance, au fil du temps, à la poésie
dramatique. Au fur et à mesure, le dialogue va laisser une place
importante au comédien, le chœur devenant moins présent. Néanmoins,
ces danses et ces musiques possèdent toujours une signification essentielle,
et portent aux sentiments, qu’ils y célèbrent la gloire ou le deuil. Et pour
notre Antigone ? Comment le metteur en scène José Besprosvany s’est-il
attaqué à ce chœur ? Ce seront 5 danseurs et 5 comédiens qui vont
occuper ce rôle. Les parties chorales seront chorégraphiées et alterneront
comme en Grèce antique avec les parties parlées des comédiens pour en
faire un spectacle interdisciplinaire proche de la tragédie athénienne. La
danse fonctionne comme référent au théâtre de Sophocle et représente le
lien qui unit la scène au sacré.

22
Antigone, une intégriste ?

Une thématique actuelle

Pour José Besprosvany, il est essentiel de travailler sur les enjeux


contemporains qui traversent la pièce. C’est pourquoi, une grande question
qui a fondé son travail s’axe sur la contradiction des croyances qui
opposent les deux personnages. En effet, pour notre metteur en scène,
celle-ci remue et transperce encore actuellement nos sociétés occidentales
et leurs idéologies.

La thématique de recherche est donc basée sur l’intégrisme. Conscient qu’il


s’agit d’un terme qui trouve son ancrage à notre époque, pour José
Besprosvany, il est possible d’en trouver des traces dans l’œuvre de
Sophocle. En effet, pour lui, les discours d’Antigone et de Créon sont
similaires dans leur conviction d’une pensée unique qui dirige leurs
actions.

C’est quoi l’intégrisme ?

Voici ce que nous en dit le dictionnaire Larousse :

- Attitude et disposition d'esprit de certains croyants qui, au nom du


respect intransigeant de la tradition, se refusent à toute évolution.
- Conservatisme intransigeant en matière de doctrine politique.

Vous ne reconnaissez pas là deux personnages que nous connaissons


bien ?

Si nous poussons à l’extrême les valeurs que recouvrent Antigone et Créon,


nous pouvons, en effet, énoncer qu’Antigone agit par fanatisme religieux
puisqu’elle place les lois divines au-dessus de toutes autres, et Créon agit
par despotisme. Il s’agit bien évidemment d’une clé de lecture parmi tant
d’autres pour ouvrir une perspective de mise en scène ! Mais selon vous,
existe-t-il aujourd’hui dans notre société des exemples de fanatismes
religieux et de fanatisme politique ? Si oui, lesquels ?

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La compagnie José Besprosvany
La Compagnie José Besprosvany a été créée en 1986. Avec son chorégraphe et metteur en scène elle mène une réflexion et une recherche autour
de la création chorégraphique et théâtrale, dont l’objectif principal est la réalisation d'œuvres offrant de nouveaux rapports et regards entre le
mouvement, la musique et le texte.

Ces dernières années, le travail de création de la Compagnie s’est orienté vers deux lignes conductrices importantes : d’une part, la relation – avec
ses infinies variations – entre le mouvement et la narration et, d’autre part, la volonté d’ouverture vers les cultures extra européennes. Ces
deux lignes ont guidé le travail artistique au travers des projets qui peuvent sembler très différents, mais qui trouvent une cohérence dans leur
questionnement et dans le travail sur le fond.

C’est ainsi que cette volonté de décloisonnement, tant sur le plan esthétique ou formel que sur le plan dramaturgique, ont permis la création de
spectacles inattendus et aussi hétéroclites qu’inclassables.

https://www.youtube.com/watch?v=AP0jJF2Yh0c
https://vimeo.com/20437094 https://vimeo.com/65729491
https://www.youtube.com/watch?v=4K2gGayDz3Y
Prométhée enchaîné Œdipe
Antigone

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#enfaitçameparlepasmal
#passivieuxleSophocle

Et voici que notre voyage à travers le temps se termine ici ! On peut le dire
Sophocle n’a pas pris une ride. Super-auteur un jour, super-auteur toujours.
Un antique lui ? Non, Sophocle c’est le vintage à la mode à toute époque !
Antigone en est la preuve en personne (enfin en personne…) ! Chaque
époque nous l’a démontré, Antigone reste une figure contemporaine qui
nous éclaire sur bien des aspects de notre société.

« L’ombre d’Antigone est encore plus précieuse que sa lumière.»


Bauchau

BONNE ROUTE !

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Bibliographie
Monographies:

Antigone, coll. Profil littérature, Hatier, 2002, p. 78.


Patrimoine littéraire européen. 2. Héritages grec et latin. Anthologie sous la dir. de Polet (Jean-Claude), Vol.72, 1994, p.697.
George Steiner, Antigones, Oxford, Clarendon Press, 1984 ; tr. fr. : Les Antigones, Paris, Gallimard, 1986.
Sophocle, Antigone, trad. Robert Davreu, Actes Sud, 2011, 64.
Émile Burnouf, Histoire de la littérature grecque, Tome premier. Paris, C. Delagrave, 1869, p. 367-374

Articles numériques:

Germain Beauchamp, « Sophocle, pour une logique du sujet tragique », in Jeu : revue de théâtre, n°18, 1981, p.131-132
Pierre Gravel, « Antigone aujourd’hui », in Jeu : revue de théâtre, n°50, 1989, p. 74-76.
http://www.revue-texto.net/Parutions/Livres-E/Albi-2006/LeBer.pdf
http://www.editions-ellipses.fr/PDF/9782729838799_extrait.pdf

Vidéos:
Steiner - Les Antigones
https://www.youtube.com/watch?v=gVWAmEOjDF8

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Œdipe
Théâtre Royal du Parc
Saison 2012-2013
Mise en scène et chorégraphie José Besprosvany

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Théâtre Royal Du Parc
Rue de la loi, 3
1000 Bruxelles
02 505 30 40
Animations : 02 505 30 42 - servicepresse@theatreduparc.be
http://www.theatreduparc.be

Fondation d’Utilité Publique


Direction : Thierry Debroux
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