Sommes de projections vectorielles Énoncé

Sommes de projections vectorielles

Dans tout le problème, E est un espace vectoriel sur K (R ou C).

Première Partie
1. Soit p un projecteur de E et u un endomorphisme de E.
Montrer que p et u commutent si et seulement si Ker p et Im p sont stables par u.
2. Soit q un projecteur de E et F un sous-espace vectoriel de E.
Montrer que F est stable par q si et seulement si F = (F ∩ Ker q) ⊕ (F ∩ Im q).
3. Déduire de ce qui précède que deux projecteurs p, q de E commutent si et seulement si :
E = (Ker p ∩ Ker q) ⊕ (Ker p ∩ Im q) ⊕ (Im p ∩ Ker q) ⊕ (Im p ∩ Im q)

Deuxième partie
Dans cette partie (sauf question 8), p et q sont deux projecteurs de E qui commutent.

On note : E1 = Ker p ∩ Ker q, E2 = Ker p ∩ Im q, E3 = Im p ∩ Ker q et E4 = Im p ∩ Im q.

Pour k ∈ {1, 2, 3, 4}, on note πk la projection de E sur Ek parallèlement à ⊕j6=k Ej .

On notera x = x1 + x2 + x3 + x4 la décomposition d’un vecteur x de E suivant la somme directe E =

E1 ⊕ E2 ⊕ E3 ⊕ E4 .

1. (a) Calculer p(x), q(x), p ◦ q(x) en fonction de x1 , x2 , x3 , x4 .

(b) Pour p et q, que représentent E1 ⊕ E2 , E3 ⊕ E4 , E1 ⊕ E3 , et E2 ⊕ E4 ?
(c) Montrer que p ◦ q est un projecteur dont on précisera le noyau et l’image en fonction de ceux de p et
q.
2. Exprimer les projecteurs IdE , p, q et p ◦ q en fonction de π1 , π2 , π3 , π4 et réciproquement.
3. Pour tous (i, j) de {1, 2, 3, 4}2 , calculer πi ◦ πj .
4. En déduire que :
∀(α, β, γ, δ) ∈ K4 , ∀ n ∈ N, (απ1 + βπ2 + γπ3 + δπ4 )n = αn π1 + β n π2 + γ n π3 + δ n π4
5. Exprimer (αIdE + βp + γq + δp ◦ q)n en fonction de IdE , p, q, et p ◦ q.
6. Montrer que :
→
−
(a) E1 = { 0 } ⇔ p ◦ q = p + q − IdE .
→
−
(b) E2 = { 0 } ⇔ p ◦ q = q.
→
−
(c) E3 = { 0 } ⇔ p ◦ q = p.
→
−
(d) E4 = { 0 } ⇔ p ◦ q = 0.
7. (a) Montrer qu’en dehors des cas ci-dessus, la famille IdE , p, q, p ◦ q est libre dans L(E).
(b) Déterminer dans ce cas tous les projecteurs de E qui sont combinaisons linéaires de IdE , p, q, et p ◦ q
(on en trouve 16).
(c) Déterminer les images et noyaux de ces projecteurs en fonction de ceux de p et q.
8. p et q sont maintenant deux projecteurs quelconques de E.
(a) Montrer que p + q est un projecteur de E ⇔ p ◦ q = q ◦ p = 0.
(b) Donner alors le noyau et l’image de ce projecteur en fonction de ceux de p et q.

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Corrigé

Première Partie
1. – On suppose que p et u commutent.
→
− →
−
Si x est dans Ker p, alors p(u(x)) = u(p(x)) = u( 0 ) = 0 donc u(x) est dans Ker p.
Si x est dans Im p (par exemple x = p(x0 )), alors u(x) = u(p(x0 )) = p(u(x0 )) est dans Im p.
Conclusion : si p et u commutent, alors Ker p et Im p sont stables par u (c’est un résultat général, on
n’utilise pas ici le fait que p est un projecteur).

– Réciproquement, on suppose que Ker p et Im p sont stables par u.

Puisque p est un projecteur, on a E = Im p ⊕ Ker p et Im p = Inv p.
Soit x = y + z la décomposition d’un vecteur x de E sur cette somme directe (y ∈ Im p, z ∈ Ker p).
On a p(x) = y donc (u ◦ p)(x) = u(y).
Mais par hypothèse (stabilité), u(y) est encore dans Im p = Inv p, et u(z) est encore dans Ker p.
On en déduit (p ◦ u)(x) = p(u(x)) = p(u(y)) + p(u(z)) = u(y).
Ainsi (p ◦ u)(x) = (u ◦ p)(x) pour tout x, donc p et u commutent.
→
−
2. Remarque : du fait que Im q ∩ Im p = { 0 }, la somme (F ∩ Im q) + (F ∩ Ker q) est directe.

– On suppose F = (F ∩ Im q) ⊕ (F ∩ Ker q).

Soit x dans F , écrit sous la forme x = y + z, avec y dans F ∩ Im q et z dans F ∩ Ker q.
→
−
Alors q(z) = 0 et q(y) = y donc q(x) = y ∈ F : ainsi F est stable par q.

– Réciproquement, on suppose que q(F ) ⊂ F .

Pour montrer F = (F ∩ Im q) ⊕ (F ∩ Ker q), il suffit d’établir F ⊂ (F ∩ Im q) ⊕ (F ∩ Ker q).
Soit x dans F , décomposé en x = y + z, avec y ∈ Im q et z ∈ Ker q (possible car E = Im q ⊕ Ker q).
Par hypothèse q(x) est dans F , or q(x) = q(y) + q(z) = y. Ainsi y et z = x − y sont dans F .
Mieux, y est dans F ∩ Im q et z est dans F ∩ Ker q, donc x est dans (F ∩ Im q) ⊕ (F ∩ Ker q).

3. – Supposons que p et q commutent.

Puisque p est un projecteur, on a E = Ker p ⊕ Im p.
Puisque p et q commutent, Ker p et Im p sont stables par q.
Ainsi Ker p = (Ker p ∩ Ker q) ⊕ (Ker p ∩ Im q) et Im p = (Im p ∩ Ker q) ⊕ (Im p ∩ Im q).
On en déduit : E = (Ker p ∩ Ker q) ⊕ (Ker p ∩ Im q) ⊕ (Im p ∩ Ker q) ⊕ (Im p ∩ Im q).

– Réciproquement, on suppose qu’on a la somme directe ci-dessus.

Soit x = x1 + x2 + x3 + x4 la décomposition (dans cet ordre) d’un x de E sur cette somme directe.
On a p(x) = x3 + x4 puis q(p(x)) = x4 , et q(x) = x2 + x4 puis p(q(x)) = x4 .
Ainsi p(q(x)) = q(p(x)) pour tout x, donc p et q commutent.

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Deuxième Partie
1. (a) On vient de le voir : p(x) = x3 + x4 , q(x) = x2 + x4 et (p ◦ q)(x) = x4 .
(b) Il est clair que p = π3 + π4 , q = π2 + π4 et p ◦ q = π4 .
On a E1 ⊕ E2 = Ker p, E3 ⊕ E4 = Im p = Inv p, E1 ⊕ E3 = Ker q, E2 ⊕ E4 = Im q = Inv q.
(c) L’application p ◦ q (qui envoie x sur x4 ) est la projection de E sur E4 parallèlement à E1 ⊕ E2 ⊕ E3 .
2. On a Id = π1 + π2 + π3 + π4 , p = π3 + π4 , q = π2 + π4 , et p ◦ q = π4 .
Inversement : π4 = p ◦ q, π3 = p − p ◦ q, π2 = q − p ◦ q, et π1 = Id − p − q + p ◦ q.
3. Si i = j alors πi ◦ πi = πi . Si i 6= j alors πi ◦ πj = 0.
4. L’égalité (απ1 + βπ2 + γπ3 + δπ4 )n = αn π1 + β n π2 + γ n π3 + δ n π4 est évidente par récurrence (utiliser 3).
5. On trouve :
n
(αIdE + βp + γq + δp ◦ q)n = απ1 + (α + γ)π2 + (α + β)π3 + (α + β + γ + δ)π4
= αn π1 + (α + γ)n π2 + (α + β)n π3 + (α + β + γ + δ)n π4
= αn (Id − p − q + p ◦ q) + (α + γ)n (q − p ◦ q) + (α + β)n (p − p ◦ q) + (α + β + γ + δ)n p ◦ q
= αn Id + (α + β)n −αn p + (α + γ)n −αn q + (α + β + γ + δ)n +αn −(α + β)n −(α + γ)n p ◦ q

→
−
6. (a) E1 = { 0 } ⇔ π1 = 0 ⇔ p ◦ q = p + q − Id.
→
−
(b) E2 = { 0 } ⇔ π2 = 0 ⇔ p ◦ q = q.
→
−
(c) E3 = { 0 } ⇔ π3 = 0 ⇔ p ◦ q = p.
→
−
(d) E4 = { 0 } ⇔ π4 = 0 ⇔ p ◦ q = 0.
→
−
7. (a) On suppose donc que les Ei sont distincts de { 0 }.
Soient α, β, γ, δ tels que r = αId + βp + γq + δp ◦ q = 0. Montrons que α = β = γ = δ = 0.
→
− →
−
Si on applique r à x1 6= 0 dans E1 , on trouve α = 0 (car p(x1 ) = q(x1 ) = 0 donc r(x1 ) = αx1 ).
→
−
Puis en appliquant r à x2 6= 0 dans E2 , on trouve γ = 0.
→
− →
−
Avec x3 6= 0 dans E3 , on trouve β = 0. Avec x4 6= 0 dans E4 , on trouve δ = 0 et c’est fini.
(b) On se place dans l’hypothèse précédente.
On a ϕ2 = α2 Id + (α + β)2 −α2 p + (α + γ)2 −α2 q + (α + β + γ + δ)2 +α2 −(α + β)2 −(α + γ)2 p ◦ q

Ainsi, sachant que Id, p, q, p ◦ q sont libres :

( (
α2 = α ; 2αβ + β 2 = β ; 2αγ + γ 2 = γ α ∈ {0, 1} ; β ∈ {0, 1−2α} ; γ ∈ {0, 1−2α}
ϕ◦ϕ=ϕ⇔ ⇔
2βγ + 2αδ + 2βδ + 2γδ + δ 2 = δ 2βγ + 2αδ + 2βδ + 2γδ + δ 2 = δ


 (α, β, γ) = (0, 0, 0) ; δ 2 = δ ou (α, β, γ) = (0, 0, 1) ; δ(1 + δ) = 0


 ou (α, β, γ) = (0, 1, 0) ; δ(1 + δ) = 0 ou (α, β, γ) = (0, 1, 1) ; δ 2 + 3δ + 2 = 0

ϕ◦ϕ= ⇔


 ou (α, β, γ) = (1, 0, 0) ; δ(1 + δ) = 0 ou (α, β, γ) = (1, 0, −1) ; δ 2 − δ = 0


ou (α, β, γ) = (1, −1, 0) ; δ 2 − δ = 0 ou (α, β, γ) = (1, −1, −1) ; δ 2 − 3δ + 2 = 0


(0, 0, 1, −1) 
 
 (0, 0, 0, 0) (0, 0, 0, 1) (0, 0, 1, 0)
 
(0, 1, 0, 0) (0, 1, 0, −1) (0, 1, 1, −1) (0, 1, 1, −2) 

 
ϕ ◦ ϕ = ϕ ⇔ (α, β, γ, δ) ∈


 (1, 0, 0, 0) (1, 0, 0, −1) (1, 0, −1, 0) (1, 0, −1, 1) 


 
(1, −1, 0, 0) (1, −1, 0, 1) (1, −1, −1, 1) (1, −1, −1, 2)
p ◦ q, q−p◦q
 
 0, q, 
 
p − p ◦ q, p + q − p ◦ q, p + q − 2p ◦ q 

 p, 
⇔ϕ∈
 Id,

 Id − p ◦ q, Id − q, Id − q + p ◦ q  

 
Id − p, Id − p + p ◦ q, Id − p − q + p ◦ q, Id − p − q + 2p ◦ q

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On trouve donc 16 projecteurs distincts (car Id, p, q, p ◦ q sont libres)

Remarque : la démonstration précédente peut être grandement simplifiée en remarquant que les quatre
projecteurs Id, p, q, p ◦ q d’une part, et les quatre projecteurs π1 , π2 , π3 , π4 d’autre part, engendrent le
même sous-espace de L(E) (cf question 2).
Dans ces conditions, Id, p, q, p ◦ q sont libres si et seulement si π1 , π2 , π3 , π4 sont libres.
Il revient donc au même de chercher les projecteurs sous la forme ϕ = απ1 + βπ2 + γπ3 + δπ4 .
Mais ça devient évident :
ϕ2 = ϕ ⇔ α2 π1 + β 2 π2 + γ 2 π3 + δ 2 π4 = απ1 + βπ2 + γπ3 + δπ4
⇔ α2 = α, β 2 = β, γ 2 = γ, δ 2 = δ
⇔ α ∈ {0, 1}, β ∈ {0, 1}, γ ∈ {0, 1}, δ ∈ {0, 1}
On retrouve bien 16 solutions (exprimées en fonction de π1 , π2 , π3 , π4 , mais qu’il est facile d’exprimer
en fonction de Id, p, q, p ◦ q).
(c) On va mettre tous les résultats dans un tableau. La première colonne liste tous les projecteurs ϕk
(écrits en fonction de Id, p, q, p ◦ q) et la deuxième colonne les donne en fonction de π1 , π2 , π3 , π4 .

ϕk Im ϕk = Ker ϕk =
→
−
0 0 {0} E
p◦q π4 E4 E1 ⊕ E2 ⊕ E3
q π2 + π4 E2 ⊕ E4 E1 ⊕ E3
q−p◦q π2 E2 E1 ⊕ E3 ⊕ E4
p π3 + π4 E3 ⊕ E4 E1 ⊕ E2
p−p◦q π3 E3 E1 ⊕ E2 ⊕ E4
p+q−p◦q π2 + π3 + π4 E2 ⊕ E3 ⊕ E4 E1
p + q − 2p ◦ q π2 + π3 E2 ⊕ E3 E1 ⊕ E4
→
−
Id π1 + π2 + π3 + π4 E {0}
Id − p ◦ q π1 + π2 + π3 E1 ⊕ E2 ⊕ E3 E4
Id − q π1 + π3 E1 ⊕ E3 E2 ⊕ E4
Id − q + p ◦ q π1 + π3 + π4 E1 ⊕ E3 ⊕ E4 E2
Id − p π1 + π3 E1 ⊕ E3 E2 ⊕ E4
Id − p + p ◦ q π1 + π2 + π4 E1 ⊕ E2 ⊕ E4 E3
Id − p − q + p ◦ q π1 E1 E2 ⊕ E3 ⊕ E4
Id − p − q + 2p ◦ q π1 + π4 E1 ⊕ E4 E2 ⊕ E3

8. (a) Exercice classique, fait en classe.

(b) p et q commutent donc E = (Ker p ∩ Ker q) ⊕ (Ker p ∩ Im q) ⊕ (Im p ∩ Ker q) ⊕ (Im p ∩ Im q).
Mais (p ◦ q = 0 ⇔ Im q ⊂ Ker p) et (q ◦ p = 0 ⇔ Im p ⊂ Ker q).
Il reste la somme directe : E = (Ker p ∩ Ker q) ⊕ Im q ⊕ Im p ⊕ (Im p ∩ Im q).
Soit x = x1 + x2 + x3 + x4 la décomposition d’un vecteur x de E sur cette somme directe.
On a p(x) = x3 + x4 et q(p(x)) = x4 .
L’application p ◦ q est donc la projection de E :
— sur Im p ∩ Im q
— parallèlement à (Ker p ∩ Ker q) ⊕ (Ker p ∩ Im q) ⊕ (Im p ∩ Ker q)

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