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Revue: D'Economie

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143

R E V U E
D'ECONOMIE
FINANCIERE
REVUE TRIMESTRIELLE
DE L’ASSOCIATION EUROPE
FINANCES RÉGULATIONS N° 143
e
3 TRIMESTRE 2021

LE FINANCEMENT
DE LA SANTÉ
ASSOCIATION EUROPE-FINANCES-RÉGULATIONS
Association régie par la loi du 1er juillet 1901, déclarée le 11 septembre 2008 (J.O. du 11 octobre 2008)
Siège social : 28 place de la Bourse, 75002 Paris

MEMBRES
Membres : Agence française de développement, Akeance Consulting, Amundi, Association française de la gestion
financière, Autorité des marchés financiers, Autorité des normes comptables, Autorité marocaine du marché des
capitaux, Axa, Banque de France - ACPR, Banque Delubac & Cie, Banque européenne d’investissement,
BlackRock France, BNP Paribas, Bredin Prat, Caisse des dépôts et consignations, CCR, Citigroup, CNP
Assurances, Covéa, Crédit mutuel alliance fédérale, Crédit mutuel Arkea, Direction générale du Trésor, EDF,
Engie, Euronext, Gide Loyrette Nouel, Gimar&Co, Goldman Sachs Paris, HSBC, KPMG, Kramer Levin, La
Banque Postale, Mazars, Morgan Stanley, Natixis-BPCE, Paris Europlace, Scor, Société Générale, Sopra Steria
Next, Tikehau Capital, UniCredit.

CONSEIL D’ADMINISTRATION
Présidente : Madame Pervenche Berès
Conseiller spécial de la Présidente : Monsieur Édouard-François de Lencquesaing
Personnalités qualifiées : Monsieur Benoît Coeuré et Monsieur Didier Valet
Membres de droit : Autorité des marchés financiers, Banque de France - ACPR, Paris Europlace
Membres administrateurs : Amundi, Association française de la gestion financière, Axa, BNP Paribas,
Bredin Prat, Caisse des dépôts et consignations, Covéa, EDF, Engie, Euronext, Mazars,
Morgan Stanley, Natixis-BPCE, Société Générale
En qualité de censeur : Direction générale du Trésor
Délégué général de l’Association : Sylvain de Forges
Trésorier de l’Association : Olivier Bailly

CONSEIL D’ORIENTATION
Présidents d’honneur
Jean-Claude Trichet, Christian Noyer
Président : François Villeroy de Galhau, Gouverneur, Banque de France
Jean-Pascal Beaufret, Managing director, Goldman Sachs Paris
Pervenche Berès, Présidente, AEFR
Afif Chelbi, Président honoraire, Conseil d’analyses économiques tunisien
Jean Cheval, Senior Advisor, Natixis
Benoît Cœuré, Chef du Pôle Innovation, Banque des règlements internationaux
Ambroise Fayolle, Vice-Président, Banque européenne d’investissement
Bernard Gainnier, Président, PwC France
Antoine Gosset-Grainville, Avocat à la Cour, BDGS Associés
Olivier Guersent, Directeur général, COMP-UE
Nezha Hayat, Présidente, Autorité marocaine du marché des capitaux
Hans-Helmut Kotz, CFS, Université Goethe, Francfort
Elyès Jouini, Professeur, Université Paris-Dauphine
Eric Lombard, Directeur général, Groupe Caisse des Dépôts
Emmanuel Moulin, Directeur général, Direction générale du Trésor
Robert Ophèle, Président, Autorité des marchés financiers
Alain Papiasse, Chairman CIB, BNP Paribas
Olivier Pastré, Conseiller scientifique REF ; Professeur émérite, Paris 8
Patricia Plas, Directrice des Affaires publiques et des Relations institutionnelles, Axa
Odile Renaud-Basso, Présidente, BERD
Rémy Rioux, Directeur général, Agence française de développement
Patrick Soulard, Directeur général, Unicrédit
Augustin de Romanet, Président, Paris Europlace
Jean-Luc Tavernier, Directeur général, Insee
Didier Valet, Vice-Président Industrie, Institut Louis Bachelier
Claire Waysand, Directrice générale adjointe, Engie
QUELQUES SUGGESTIONS
POUR AMÉLIORER LA PRATIQUE
DE LA COMPTABILITÉ HOSPITALIÈRE
DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ
ALAIN SOMMER*
JEAN DE KERVASDOUÉ**

197

L
es modifications de l’environnement des établissements de santé
sont majeures. Sur le plan technologique, on peut évoquer l’usage
de robots dans les taches de gestion, les crypto-monnaies, l’intel-
ligence artificielle (IA) et les nouvelles applications des innovations médi-
cales qui diffusent dans le monde entier. En France, l’organisation hospi-
talière évolue avec le groupement homogène de territoires (GHT) qui finit
par se développer comme s’organisent les relations avec la médecine de
ville grâce aux communautés professionnelles territoriales de santé
(CPTS). Sur le plan économique, les taux d’intérêt vont très vraisembla-
blement augmenter. La gestion de la dette reprendra alors une place cen-
trale malgré les mesures récentes du gouvernement et du « Ségur de la
santé ». La gestion de la liquidité retrouvera-t-elle la place qu’elle avait
dans les années 1980 ? Nul ne le sait, mais l’ère des financements abon-
dants et bon marché touche à sa fin. Enfin, les exigences des patients, les
attentes des soignants et de l’ensemble du personnel ont évolué sous
l’influence de l’épidémie. Les outils de gestion doivent accompagner ce
mouvement. Aussi, il a semblé utile de présenter ici quelques pistes de
réflexion dans ce domaine aussi important qu’austère. Il s’agit en effet de

* Directeur, Medical Organisation Management ; enseignant, Conservatoire des arts et métiers


(CNAM). Contact : alain.sommersmompartners.com.
** Membre, Académie des technologies ; chroniqueur, Le Point.fr ; professeur émérite, CNAM.
Contact : jeanskervasdoue.com.
REVUE D’ÉCONOMIE FINANCIÈRE

plus de 70 MdA de dépenses annuelles, soit à peu de choses près le montant


total de la collecte de l’impôt sur le revenu des personnes physiques !

ÉVITER LES INCONVÉNIENTS DES CONGLOMÉRATS


EN INDIVIDUALISANT LES COMPTES DE RÉSULTAT,
LES COMPTES DE BILAN ET LES COMPTES
DE FINANCEMENT
Rappelons que si les EPS (établissements publics de santé) pré-
sentent un seul bilan, ils exercent plusieurs activités. Certes les activités
en médecine, chirurgie et obstétrique correspondent à la part principale
des revenus et des charges, mais il existe également des soins de suite,
de la psychiatrie, des activités médicosociales, des écoles, de la
recherche, etc. Or ces fonctions sont financées par différentes
méthodes, notamment des actes, des « activités », des journées, des
budgets, des dotations départementales. Comment faire pour éviter aux
EPS les inconvénients des conglomérats, notamment le manque de
visibilité dans l’affectation interne des ressources et l’accroissement du
niveau de risque financier ? Car dans la sphère économique privée, les
conglomérats sont connus pour l’opacité de leur compte et les risques
198
qu’ils font encourir à leurs propriétaires et à leurs prêteurs. L’octroi de
la personnalité morale à des entités homogènes serait une solution
simple. Il existe actuellement des budgets d’exploitation spécifiques ;
en revanche, il n’existe ni bilans ni comptes de financement pour
chaque entité. Cet octroi de la personnalité morale à des entités homo-
gènes permettrait d’individualiser les flux financiers ; aujourd’hui, faute
d’individualisation de ces flux, certains EPS peuvent ne pas mesurer les
risques qu’ils encourent. Par exemple, des activités médicosociales sont
parfois sous-financées et de surcroît font parfois l’objet d’importants
retards de paiement. Établir des bilans séparés aiderait déjà nombre
d’établissements à mieux individualiser leurs flux financiers en prenant
notamment exemple des établissements privés à but non lucratif
(ESPIC) pour lesquels, par exemple, les SCI permettent d’héberger
l’immobilier et d’individualiser les flux patrimoniaux dans une struc-
ture spécifique. Non seulement l’absence d’individualisation des bilans
et des tableaux de financement de chaque activité peut rendre difficile
la gestion des actifs, mais de surcroît, pour des raisons techniques que
nous allons voir, il est aussi très mal aisé d’évaluer les performances de
chaque responsable des entités internes.
Dans l’idéal, il serait souhaitable de transformer les EPS en holding
détenant des entités à vocation unique et claire. Les actifs seraient alors
attribués à des filiales dotées de la personnalité morale et détenus à
100 % par leur maison mère pour remplir une mission bien définie.
QUELQUES SUGGESTIONS POUR AMÉLIORER LA PRATIQUE DE LA COMPTABILITÉ
HOSPITALIÈRE DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ

Chaque filiale aurait sa stratégie clairement élaborée ; les décisions


d’investissement seraient prises sur la base de comptes avec des actifs et
des résultats individualisés. L’affichage des performances ne souffrirait
d’aucune manipulation volontaire ou involontaire. Les performances
de gestion seraient ainsi lisibles immédiatement, aidant les responsables
à identifier et corriger les éventuelles dérives.

ADAPTER LA SÉPARATION ORDONNATEUR ET COMPTABLE


AUX NOUVEAUX PROCESSUS ISSUS DE LA RÉVOLUTION
INFORMATIQUE (IA, ROBOT PROCESS AUTOMATION,
PLATEFORMES, E-ADMISSION, ETC.)
Chacun sait que dans l’administration, et par extension dans tous les
EPS, celui qui décide d’une dépense (l’ordonnateur) n’est pas celui qui
paye (le comptable). Ils ne dépendent d’ailleurs pas de la même insti-
tution ; en effet, dans notre cas, l’ordonnateur est le directeur de l’EPS
et le payeur dépend de l’administration des Finances : la Direction de
la Comptabilité Publique. Les relations entre comptable public et EPS
ont fait l’objet de plusieurs réformes récentes. L’article de Paul Hernu
dans Finances Hospitalières en retrace parfaitement les enjeux (Hernu,
2017). Indépendamment des évolutions réglementaires et législatives, 199
il paraît essentiel de pouvoir insérer les méthodes de gestion des pro-
cessus, notamment les processus « commande – paiement » et « admis-
sion – encaissement » dans ces relations (Baron-Bual, 2017). Ces pro-
cessus sont actuellement rénovés par :
– les nouvelles offres des logiciels de gestion des admissions ;
– l’utilisation de la robot process automation dans les processus comp-
tables ;
– l’usage de l’IA dans les processus comptables.
A priori, rien dans ces outils ne devait modifier les relations entre
ordonnateur et payeur. Mais il est légitime de s’interroger sur l’impact
que peut avoir la refonte des processus d’admission sous-jacente à ces
outils. Cette méthode est en effet basée sur deux principes :
– une modification profonde des tâches et des responsabilités, avec
notamment un rôle majeur donné au patient en début de processus
(préadmission), tout comme au fournisseur ;
– la gestion continue et sans césure du début à la fin de la prise en
charge du patient ou du processus.
L’optimisation de ces deux processus clés améliore la prise en
charge du patient et la trésorerie et de l’établissement ; les nouvelles
organisations comptables en plateformes de « services partagés » le
modifient également. Ces facteurs nécessitent que les tâches soient
réorganisées. Et posent une série de questions. Qui sera responsable
REVUE D’ÉCONOMIE FINANCIÈRE

de l’usage au quotidien d’un algorithme comptable ? Qui validera les


modèles de paiement automatique par robot et reconnaissance
optique ? C’est donc sous cet angle que nous suggérons que soit
réexaminé le bienfondé du très ancien principe de la séparation
ordonnateur-comptable.

L’UTILISATION DU COÛT COMPLET PÉNALISE


LES SERVICES MÉDICAUX
La comptabilité analytique dépend de l’usage que l’on en fait. Ainsi,
en se plaçant du point de vue de la direction d’un établissement, voire
de la tutelle, il peut être intéressant de savoir combien coûte une
journée du service de gériatrie, une consultation aux urgences ou une
intervention chirurgicale au bloc opératoire.
Le cœur de l’allocation de ressources dans la santé reste nolens volens
la notion de coût. Les débats sur ce thème sont sans fin. Gardons-nous
de participer ici à la question générale du coût et de la valeur de la santé.
En revanche, voyons comment améliorer les processus utilisés par
l’hôpital public et ses financeurs pour bien comprendre les questions de
création de valeur.
200
Calculer un coût complet n’est jamais simple et est en partie arbi-
traire. En effet, outre les dépenses directes d’un service, le service de
gériatrie (personnel, chauffage, etc.), il faut trouver un moyen de lui
affecter sa part aux autres dépenses de l’hôpital : la direction, les services
généraux, l’informatique, etc. et donc avoir une clé de répartition de ces
charges indirectes (au prorata du montant des coûts directs, par
exemple). Ce système est la règle dans les EPS et nous allons voir qu’il
peut pénaliser les services de soins et favoriser les services support1.
La règle en gestion d’entreprise est de partir des unités productives,
dans notre cas les services cliniques et les services médicotechniques
(laboratoires, imagerie, centre d’exploration fonctionnelle, etc.), car
eux seuls représentent la vocation essentielle de l’EPS et seules leurs
activités génèrent des recettes dans le mode de rémunération actuel,
basé le plus souvent sur le paiement au séjour.
Pour chacun d’entre eux, il suffit donc de recenser les recettes
générées par jour, semaine, mois ou année, puis d’en déduire leurs seuls
coûts directs, pour l’essentiel des dépenses de personnel, de consom-
mable et des dépenses hôtelières. En soustrayant recettes et dépenses
directes, on obtient la contribution à la marge brute annuelle de
l’hôpital. Soulignons encore que seuls ces services produisent des soins
ou contribuent directement aux soins ; les autres sont des services
« support » et donc, en cas de difficulté, c’est d’abord vers eux qu’il
faudrait chercher des économies. Cela ne veut nullement dire que les
QUELQUES SUGGESTIONS POUR AMÉLIORER LA PRATIQUE DE LA COMPTABILITÉ
HOSPITALIÈRE DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ

services support sont des services mineurs dont le développement doit


être négligé ; une prise en charge réussie et sans danger nécessite des
prestations parfaites de toute la chaîne de production. Or le calcul des
coûts complets part de la logique inverse car il considère que les coûts
et les performances des services support sont quasiment intangibles. La
façon de présenter les comptes ne permet pas de poser la question de
leur efficacité ; ils sont, du point de vue comptable, considérés comme
une donnée intangible.
Cela ne veut pas dire que les « services producteurs de soins » sont
intouchables. Dans l’industrie et les services marchands, la comptabi-
lité analytique est toujours accompagnée d’une description fine des
processus de production avec des standards physiques de production
(soit la meilleure performance possible, soit la cible à atteindre) et de
plans d’action destinés à réduire en permanence les coûts.
Un coût se réduit, se combat quotidiennement, sinon il enfle inexo-
rablement, aboutissant à une perte de compétitivité. Les coûts trop
élevés d’une société l’empêchent de maintenir ses ventes et la font entrer
dans un cercle vicieux dont elle ne sortira qu’en diminuant brutalement
ses coûts. Mais, dans ces deux types d’entreprise, on ne perd pas trop
de temps à calculer les coûts ; en revanche, on tente de les diminuer de
façon permanente. Lorsqu’une prise en charge est réalisée en suivant 201
des référentiels reconnus avec un personnel formé, on améliore la
qualité et on maîtrise les coûts.
Si le recours à la comptabilité analytique est actuellement obligatoire
dans le cas d’un EPS, elle ne donne pas la priorité à la gestion du
processus de soins et au coût global des services support pour lesquels
des gains de productivité pourraient aussi être réalisés. Notons au
passage que les établissements du secteur privé à but lucratif n’utilisent
que très peu la comptabilité analytique.

LES CHARGES DITES « VARIABLES »


La comptabilité en coût complet déverse les charges des centres
support dans les centres de coût producteurs de valeur, ceux qui
produisent des soins et déclenchent une facturation. Si un centre de
coût producteur de soins commence sa journée avec des charges prin-
cipalement fixes (le personnel du service), ce qui est normal et existe
dans tous les établissements de santé de la planète, ce système comp-
table lui donne le sentiment que ses charges fixes sont devenues
variables, parce qu’elles lui seront d’autant plus imputées qu’il fera des
séjours ou des actes.
À l’inverse, la comptabilité en coût variable direct commence par
considérer ce que les services médicaux produisent comme soin, puis
REVUE D’ÉCONOMIE FINANCIÈRE

elle calcule la marge dégagée par ces services afin de déterminer les
sommes disponibles pour les fonctions support. Dans un cas, le diri-
geant disperse, ventile et répartit ; dans l’autre, il fait vivre son établis-
sement en fonction de ce qu’il produit, ce qui le conduira à accroître
le volume de soins en étant attractif et à réduire les coûts pour pouvoir
maximiser les marges.
Soulignons de surcroît que les charges des services support sont peu
variables, contrairement à ce que la comptabilité analytique en coût
complet laisse entendre. En effet :
– un service de consultation n’a pratiquement que des charges fixes
sur une année ;
– un service de restauration n’a en moyenne que 50 % de charges
variables ;
– un service de lingerie n’a que 20 % de charges variables ;
– un service de stérilisation n’a que 25 % de charges variables.
Aussi, ce qui compte pour l’EPS comme pour tout établissement de
santé, c’est d’abord le coût global de ces services et leur processus de
production. Or la comptabilité en coût complet laisse croire que le coût
du kilo de linge est à 100 % variable.
En défavorisant les services cliniques par l’usage extensif des unités
202 d’œuvre, l’EPS donne un avantage concurrentiel à ses concurrents : les
établissements privés. En effet, le périmètre d’activité de l’EPS est bien plus
large que celui de la clinique privée, donc c’est une avalanche de charges
dite « induites » qui vient handicaper les services cliniques des EPS.
L’EPS cumule les désavantages concurrentiels car les hôpitaux publics
produisent des soins en étant employeurs de ses médecins, ce que ne font
pas les établissements de santé à but lucratif ; c’est aussi le cas des actes
médicotechniques support (laboratoires de biologie, services d’imagerie,
etc.) produits à l’hôpital et le plus souvent sous-traités dans les cliniques.
Cela aboutit à élever le niveau du point d’équilibre et à le rendre très
sensible aux variations d’activité, à cumuler les risques financiers et à
réduire la capacité de réaction et d’adaptation des hôpitaux publics.
Ce qui est en cause n’est pas le niveau des salaires, mais la variabilité
des prises en charge de patients. Les ESP et les établissements privés
d’intérêt collectif (ESPIC) assurent le plus souvent la gestion des étapes
des prises en charge incluant des urgences, de l’imagerie, de la biologie,
de la chirurgie, puis éventuellement des soins de suite. Cela aboutit à
ce que les coûts des prises en charge seront très variables pour un même
type de patient selon la qualité de la coordination entre services et, bien
entendu, les durées de séjours. Aussi nous suggérons de travailler sur les
chemins cliniques et les modalités de prise en charge des patients pour
accroître la qualité et réduire les coûts (Siok et al., 2014).
QUELQUES SUGGESTIONS POUR AMÉLIORER LA PRATIQUE DE LA COMPTABILITÉ
HOSPITALIÈRE DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ

LE COÛT DE QUOI ? LA QUESTION DES UNITÉS D’ŒUVRE


Au lieu de réaliser des mesures physiques tangibles et simples comme
le nombre d’agents ou les consommables, l’utilisation de concepts
biaisés par les EPS peut conduire à déresponsabiliser.
Ainsi, par exemple, la production de la stérilisation se mesure par le
mètre carré de produit stérilisé. Mais sait-on qu’un mètre carré d’ins-
trument à nettoyer peut comporter des instruments très complexes et
d’autres très petits ou très souillés ? De la même façon, la blanchisserie
utilise le kilogramme de linge nettoyé. Il faut ne jamais avoir visité une
blanchisserie industrielle pour ne pas savoir que le coût de revient du
nettoyage d’une blouse n’est pas le même que celui du nettoyage d’un
drap. Si l’ANAP (Agence nationale d’appui à la performance) a déve-
loppé des outils remarquables pour gérer la stérilisation1, la comptabi-
lité analytique continue à utiliser une seule unité d’œuvre.
Aussi, mis à part la mesure de la consommation d’eau (mètre cube),
d’air (mètre cube) et d’électricité (kWh), l’usage d’unités d’œuvre est
simplificateur à l’extrême et fausse les calculs. Cela ne serait pas grave
en tant que tel ; après tout, il ne s’agit que de comptabilité analytique
sans décaissement. Malheureusement, la comptabilité analytique en
question aboutit à la comptabilité tout court à cause de la structure en
conglomérat. 203

Exemple : le coût relatif des blocs chirurgicaux


L’ICR (indice de coût relatif) est une unité d’œuvre destinée à
mesurer la production et les coûts des interventions chirurgicales, de
l’anesthésie, de l’anatomie pathologique, ainsi que d’autres soins très
spécifiques.
Il est basé sur des actes de la classification commune des actes
médicaux (CCAM) établie par la Caisse nationale d’assurance maladie
des travailleurs salariés (CNAM-TS). Toutefois l’actualisation de la
CCAM est très lente et bien plus lente que celle des techniques et des
pratiques médicales. En outre, le calcul de leur coût « à dire d’expert »
donne lieu à des résultats étonnants et manque de transparence.
Les ICR présentent des points positifs :
– ils introduisent la notion de coût standard dans la sphère hospi-
talière publique et privée ;
– ils permettent d’aborder les coûts des actes médicaux, ce qui est le
cœur de métier de l’EPS ;
– ils permettent de réaliser une mesure de la production médicale
des centres de coût médicotechniques.
Les ICR ont donc dans un premier temps rendu de grands services
à l’hospitalisation publique.
REVUE D’ÉCONOMIE FINANCIÈRE

Toutefois, toute personne ayant travaillé avec des chirurgiens sait


que ceux-ci connaissent heureusement mieux les noms des interven-
tions chirurgicales que ceux des actes de la CCAM. Les actes de la
CCAM sont pour la plupart des fictions qui correspondent rarement à
des entités de coût. Ils décrivent souvent les composantes des inter-
ventions, mais pas la totalité des interventions (Ifergan, 2017). Cer-
taines interventions combinent plusieurs actes de la CCAM, d’autres
interventions peuvent être rattachées à des actes de la CCAM par
nécessité sans toujours correspondre à la réalité. Mais la correspondance
entre les actes de la CCAM et les interventions n’est pas parfaite.
Comment mesurer, par exemple, le coût d’une intervention compor-
tant plusieurs actes ?
La valeur des composantes de l’ICR est basée sur le temps, surpon-
dère le coût en personnel et sous-pondère le coût des consommables,
des frais fixes et des amortissements des équipements. C’est sans doute
une bonne méthode pour calculer le coût du personnel d’un centre de
coût médical, mais cette méthode s’applique difficilement aux consom-
mables (Mévellec, 2021).
L’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH)
publie un tableau qui donne pour chaque acte la valeur du travail, de
204
l’équipement et des consommables, ce qui suppose que les coûts du
travail, la composition des équipes et les consommables utilisés par les
chirurgiens soient les mêmes pour tous les chirurgiens dans tous les
EPS, pour chaque acte de la CCAM. Cela n’est pas évidemment pas
le cas. En outre, les consommables ne sont pas achetés au même prix
pour tous les EPS. Pourtant, le recours à l’ICR présume que l’on
puisse reconstituer le coût complet du bloc. Le côté tautologique de
la comptabilité analytique réalisée en coût complet apparaît alors
clairement.
Ce système peut toutefois être grandement amélioré en se focalisant
sur les coûts standards directs du bloc. Il est possible de calculer des
coûts détaillés à la compresse près et de reconstituer le total des
dépenses. Les coûts ne se réduisent pas en utilisant des approximations,
des plans d’action ou des indices a priori. Ils peuvent être réduits en
agissant sur les achats au centime d’euro près, et de façon permanente.
Les fournisseurs de consommables médicaux sont particulièrement
doués pour les augmenter et ce sont les utilisateurs qui doivent être
vigilants.
Le cas particulier des groupes homogènes de malades (GHM)
et de séjour (GHS)
Si la mesure de l’activité et la tarification d’un hôpital en France,
comme dans le monde entier, se font à partir d’une classification des
QUELQUES SUGGESTIONS POUR AMÉLIORER LA PRATIQUE DE LA COMPTABILITÉ
HOSPITALIÈRE DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ

séjours en GHM, si cette mesure est un indéniable progrès quand on


la compare aux méthodes précédentes qui se contentaient de facturer les
journées et les actes, on assiste cependant à un mésusage de cette
classification quand on tente de l’utiliser en gestion interne. En effet,
on s’en sert de manière inappropriée car il se trouve que tous les groupes
prétendument homogènes ne le sont pas nécessairement. Cela n’est pas
grave quand on se place à l’échelon de l’établissement ; ça l’est quand
on l’utilise en gestion interne.
Un certain nombre de GHM sont donc bien homogènes car les
séjours correspondent à des séjours bien définis en termes d’interven-
tion, d’exploration et d’hébergement. Il en est ainsi, par exemple, de la
cataracte en ambulatoire ou d’un accouchement par voie basse en
maternité. Il y a cependant de nombreux séjours hétérogènes, notam-
ment en médecine. En outre, certains concernent plusieurs services et
la bonne gestion du parcours du patient nécessite alors d’autres outils
que les quelques informations collectées pour classer les patients dans
un GHM.
Par ailleurs et surtout, la révision de la classification par l’ATIH se
base sur l’étude nationale des coûts qui elle-même utilise des coûts
complets de certains EPS et fait donc des moyennes de pratiques
médicales hétérogènes et de dépenses qui le sont tout autant. Aussi, 205
faudrait-il non plus partir des moyennes de pratiques constatées, mais
créer des tarifs à partir d’une conduite thérapeutique de référence et
donc d’une description détaillée du processus de soins.
Nous suggérons la généralisation des GHM homogènes correspon-
dant à des prises en charge définies. Oui, le nombre de GHM aug-
mentera, mais leur lisibilité en sera accrue et leur gestion mieux maî-
trisée. L’adhésion du corps médical passe par une plus grande lisibilité
des GHM.

Un mode de financement qui oblige à des réajustements financiers


Le calcul des GHM-GHS ne tient pas compte du financement de
l’investissement futur. Ils comportent les amortissements et les frais
financiers du passé. Cette situation est logique car comment prévoir le
montant des investissements futurs à travers la rémunération par
séjour ?
Cela a en partie justifié le choix de certains pays, notamment la
Belgique, qui financent les investissements hors des GHS.
Pour comprendre ce problème, il faut distinguer la « capacité à offrir
des soins » et le respect des protocoles implicitement retenus par les
GHS. La « capacité à offrir des soins » est une charge fixe, elle préexiste
à toute activité et donne lieu à autorisation. Quant au GHS il est en
REVUE D’ÉCONOMIE FINANCIÈRE

principe basé sur un modèle sous-jacent de séjour avec des niveaux de


charge standardisés. Ce modèle comporte notamment une durée de
séjour et des actes et est censé couvrir à la fois le coût de la « capacité
à offrir des soins » et les coûts variables générés par la délivrance des
soins aux patients de ce GHS particulier. Le seul problème de ce type
de rémunération est qu’il est sensible à la nature et au niveau de
l’activité d’un hôpital une année donnée.
Les EPS recherchent de plus un « équilibre d’exploitation », mais un
établissement de santé doit aussi investir sans cesse et ne devrait pas
dépendre de subventions pour investir. L’équilibre d’exploitation
exclut le surplus, l’excédent, le profit ; c’est sans doute pour cela qu’il
est affiché.
Il apparaît comme vertueux, or tout établissement devrait rechercher
un excédent pour pouvoir rembourser ses dettes financières et autofi-
nancer ses investissements, mais les tarifs des GHM ne peuvent pas
tenir compte de l’investissement futur. C’est cela qui requiert de façon
chronique les subventions et les plans successifs, alors qu’il serait si
simple de laisser les EPS dégager une marge pour investir. En outre, au
lieu de présenter leurs résultats en termes d’exploitation, les EPS
devraient utiliser comme base de leur communication le tableau de flux
206
financiers et montrer leur capacité à rembourser leurs dettes ainsi qu’à
financer leur programme d’investissement. Le fait de ne communiquer
que sur les résultats d’exploitation et non sur les résultats en flux
financiers empêche les EPS de préparer le futur.
Il est normal de demander aux entités recevant un budget fixe de
l’État de présenter des budgets avec leur état prévisionnel de recettes et
de dépenses (EPRD) à l’équilibre. Mais il n’est pas sain de demander
à des entités financées à l’activité de présenter des budgets à l’équili-
bre. Cela suppose que le montant de leurs investissements sera égal à
celui de leurs amortissements, ce qui n’est pas certain et trop souvent
dangereux.

ADAPTER RÉGULIÈREMENT LES DÉCOUPAGES INTERNES


Quand on observe la comptabilité des activités hospitalières de court
séjour dites « MCO » (médecine, chirurgie, obstétrique), le nombre de
centres de coût paraît parfois important.
Pour mesurer l’origine du coût de certaines activités, il convient au
préalable de définir les étapes du processus de production de ses
activités et ses résultats. Or, trop souvent, les analystes calculent
a posteriori les coûts en additionnant les charges dans un réceptacle
comptable et en les dénommant « centre de coût ». De nos jours, les
travaux de l’ANAP et de la base d’Angers, tout comme les guides de la
QUELQUES SUGGESTIONS POUR AMÉLIORER LA PRATIQUE DE LA COMPTABILITÉ
HOSPITALIÈRE DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ

comptabilité analytique, évitent ce type de bévue. En revanche, il


n’existe pas toujours une parfaite correspondance entre la structure
comptable et la structure de l’organisation. Or tout découpage d’une
entité en centres de responsabilité devrait répondre à trois critères :
– correspondre à un métier et un enjeu stratégique ;
– avoir un pouvoir effectif et disposer des outils permettant de
l’exercer, à commencer par un système d’information ;
– connaître les objectifs attendus et les unités de mesure qui seront
utilisées pour les mesurer. Ce dernier point est clé car dans la pratique,
il permet également de contribuer à la gestion des carrières. Or il arrive
de donner une responsabilité sans fixer d’objectifs, voire, quand ils
existent, sans les évaluer. Rappelons que tout cela se place dans un cadre
institutionnel que les EPS doivent respecter car ils n’ont pas la liberté
de s’organiser comme ils l’entendent. En effet, une nouvelle entité
administrative, le « pôle », s’est surajoutée au service et aux unités
médicales ou fonctionnelles.
La nouvelle gouvernance qui voudrait que ces pôles constituent
l’unité de gestion des EPS a parfois du mal à passer dans les faits. Le
découpage en quatre niveaux (hôpital, pôle, service, unité fonction-
nelle) peut devenir un obstacle à des mouvements stratégiques rapides
et diluer les responsabilités effectives s’il ne correspond pas à une réalité 207
effective exercée. Le pôle peut devenir un obstacle s’il ne correspond pas
à un niveau de gestion effectif.
Par ailleurs, la mise en place des GHT (un cinquième niveau)
bouscule profondément les modes d’organisation. Adapter le contrôle
de gestion à cette nouvelle dimension demande de revoir souvent les
pratiques et les procédures (Mévellec, 2020). Quant à la structure
comptable, les hôpitaux ne peuvent pas s’appuyer simplement sur le
modèle des organisations du secteur privé marchand. Si tel était le cas,
les centres de coût devraient devenir centre de profit, centre de coût
productif et centre de coût discrétionnaire :
– les centres de profit seraient autonomes dans leur gestion, ils
factureraient leurs prestations, auraient leurs propres dirigeants,
auraient des actifs délimités et des équipes dédiées. Ils correspondraient
aux activités médicales (Pôles ou Services). Leur objectif devrait être de
rendre la meilleure qualité des soins et des services dans le respect des
normes sanitaires. Ils devraient dégager un excédent ;
– les centres de coût productifs auraient pour vocation de produire
des prestations plus ou moins diversifiées. Ils devraient en permanence
rechercher la manière la moins onéreuse et la plus efficace à les offrir en
respectant des normes de qualité et de sécurité. Les centres de coût
productifs n’auraient pas à équilibrer leur compte, ni à faire du surplus,
mais à être efficaces.
REVUE D’ÉCONOMIE FINANCIÈRE

Ce schéma de pensée théorique n’est pas applicable sans adaptation


à un établissement de santé car dans une prise en charge, il n’y a pas de
hiérarchie des centres de coût, comme dans le secteur privé marchand.
Toutes les étapes de la prise en charge doivent être de qualité pour des
raisons de sécurité et d’efficacité des soins. C’est ce que nous verrons
dans le chapitre suivant.

MIEUX APPRÉHENDER LA RÉALITÉ DES CENTRES


DE COÛT MÉDICOTECHNIQUES
Faut-il ou non les sous-traiter ? C’est le débat qui vient à l’esprit
quand ces centres de coût sont abordés. Nous ne répondrons pas ici à
cette question certes financière, mais aussi politique car cela serait perçu
comme un démantèlement du service public. En revanche, on peut en
améliorer la gestion.
Un ESP ou un ESPIC facture pour un séjour de chirurgie une
prestation qui comporte une intervention chirurgicale, des héberge-
ments, des explorations et des charges administratives. Cette suite
d’actes est complexe à gérer car elle met sur le même plan des presta-
tions hétérogènes.
208 Ces prestations sont produites, comme indiqué plus haut, par des
services de trois types :
– les services qui produisent des actes ou des examens dans un bloc
ou à l’aide d’une machine (chirurgie, médecine, imagerie, radiothéra-
pie, anesthésie). La quantité et le coût de chaque examen sont pris en
compte dans le calcul du tarif du GHM au travers des moyennes que
réalise l’ENC ;
– les services médicotechniques associés (pharmacie, stérilisation,
bionettoyage) ;
– les services administratifs ou d’hôtellerie que l’on pourrait retrou-
ver dans de nombreuses activités de la sphère marchande.
Les risques pris par un établissement public sont ainsi difficilement
maîtrisables car pour chaque GHM, le recours à plusieurs médecins et
à plusieurs techniques varie et est difficilement standardisable. Un
hôpital prend donc plusieurs risques, notamment celui de la variation
des examens pour une même pathologie facturée de façon unique, mais
surtout celui de la productivité de ses services médicotechniques.
Les performances des services médicotechniques dépendent :
– de la demande des services producteurs de soins ;
– de leur processus de production plus ou moins automatisé ou mis
à jour ;
– des exigences réglementaires.
QUELQUES SUGGESTIONS POUR AMÉLIORER LA PRATIQUE DE LA COMPTABILITÉ
HOSPITALIÈRE DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ

Or elles ne sont pas mesurables par un indice ou un coût unique.


Elles comportent une dimension qualitative et quantitative. Par
exemple, le métier de pharmacien hospitalier connaît actuellement une
évolution accélérée. Aussi, évaluer ses prestations au travers d’une seule
unité d’œuvre ne reflète en rien la réalité.
Deux erreurs majeures doivent être évitées :
– la comparaison de ces services avec des pairs sans décrire les
prestations réalisées, leur niveau de qualité et leur quantité ;
– la création de compte de résultat pour ces centres de coût.
Nous suggérons une contractualisation entre les services médicaux et
médicotechnique basée sur une mesure de qualité de service et une
mesure de productivité. La réalisation de ces contrats est certes très
difficile car elle demande un effort pédagogique important. Mais elle
seule permet d’assurer la qualité des prestations et la productivité
nécessaire. Elle se pratique dans de nombreux hôpitaux étrangers
cependant et ce depuis des décennies.

LE SUIVI ÉCONOMIQUE ET FINANCIER DES EPS


Tout hôpital doit soumettre à sa tutelle un projet d’évolution de ses
activités à moyen terme, mais surtout un budget. Il est bâti au cours de 209
l’année n-1 pour l’année n, alors que l’année n-1 est toujours en cours
et surtout quand les tarifs des GHS-GHM n’ont pas été publiés. Elle
ne le fera que plusieurs mois plus tard.
Par ailleurs, au lieu de suivre la réalisation d’un budget discutable (ce
que recommande la tutelle), il faudrait analyser mois par mois recettes
et dépenses et les comparer, non pas au budget, mais aux comptes de
l’année précédente. Rappelons que dans les entreprises, le budget n’est
jamais qu’indicatif, ce qui compte c’est la réalité des recettes et des
charges.
De surcroît, il est difficile de faire des prévisions fiables sur plus de
750 types de GHM ne serait-ce que parce que la patientèle évolue d’une
année sur l’autre. De façon surprenante, le nombre et la nature des
GHM connaissent de grandes variations annuelles ; ainsi dans un grand
établissement, près de 20 % des GHM d’une année ne se retrouvaient
pas l’année suivante.
Ainsi, le modèle budgétaire classique avec la séquence produits
= volume × tarifs est inopérant en raison de l’instabilité des volumes et
des mix d’activité. Le modèle en coût complet est inopérant car il
introduit une erreur potentielle dès la genèse du budget. Il faudrait
séparer les prévisions des coûts directs de celles des coûts indirects et
celles des charges variables de celles des charges fixes.
REVUE D’ÉCONOMIE FINANCIÈRE

Les résultats intermédiaires gagnent à être calculés mensuellement


C’est parce qu’elles devaient publier leurs comptes rapidement que
les entreprises du secteur marchand ont amélioré leurs procédures de
facturation et de comptabilité.
Si plusieurs EPS produisent des comptes de résultat mensuels, ce
n’est pas la règle ; or l’absence de compte mensuel constitue un han-
dicap majeur. Connaître ses résultats avec au moins quatre mois de
retard rend toute adaptation impossible. Le mois est la seule unité de
temps pour réagir. Il y a trente ans déjà, dans de très grands groupes
industriels, plus complexes que l’AP-HP, les comptes mensuels des 80
entités mondiales du mois M arrivaient avant le 7 du mois M+1 et
étaient finement analysés par le président-directeur général.
L’absence de situation intermédiaire diminue la crédibilité des diri-
geants. Comment prétendre exécuter un plan si on ne suit pas men-
suellement sa mise en œuvre ? Comment justifier des comptes faux en
milieu d’année lorsqu’il arrive que des Pôles, à l’occasion d’examens
trimestriels, aient dû réduire leurs effectifs ou retarder des recrutements
en raison de résultats intermédiaires calamiteux, alors que ces résultats
ne prenaient pas en compte toute la facturation !
210
CONCLUSION
Les conditions de gestion des EPS pourraient être améliorées par des
mesures comptables assez simples à mettre en place tant dans le calcul
de la contribution à la marge brute que dans le suivi budgétaire. De
nombreuses applications informatiques, facilement accessibles, le per-
mettent. Cela aurait en outre l’avantage de revenir au cœur de la
fonction de l’hôpital : soigner les patients et donc comprendre et aider
ceux qui soignent.

NOTE
1. Voir le site : https://www.anap.fr/ressources/prise-en-charge/biologie-pharmacie-sterilisation/sterilis
ation/.
QUELQUES SUGGESTIONS POUR AMÉLIORER LA PRATIQUE DE LA COMPTABILITÉ
HOSPITALIÈRE DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ

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Hospitalières, no 107, novembre.
211
R E V U E
D'ECONOMIE
FINANCIERE

COMITÉ DE RÉDACTION
Présidents d’honneur
Jacques Delmas-Marsalet
Hélène Ploix

**
Sylvain de Forges, Directeur de la publication
Olivier Pastré, Conseiller scientifique
François-Xavier Albouy, Directeur de la rédaction

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Raphaëlle Bellando, Professeur, Université d’Orléans
Christian de Boissieu, Professeur, Université Paris I
Jean Boissinot, Conseiller des gouverneurs, Banque de France
Pierre Bollon, Délégué général, Association française de la gestion financière
Arnaud de Bresson, Délégué général, Paris Europlace
Jean-Bernard Chatelain, Professeur, Université Paris I, GdRE « Monnaie Banque et Finance »
Jézabel Couppey-Soubeyran, Maître de conférences, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
Claude Diebolt, Directeur de recherche au CNRS, Université de Strasbourg
Jean-Louis Fort, Avocat à la Cour
Stéphane Gallon, Directeur de la division études, stratégie et risques, AMF
Olivier Garnier, Directeur général des statistiques, des études et de l’international, Banque de France
Ulrich Hege, Professeur, Toulouse School of Economics (TSE)
Pierre Jaillet, Chercheur associé, IRIS
Fatos Koc, Responsable de la gestion de la dette publique, OCDE
Frédéric Lobez, Professeur, Université de Lille II, SKEMA
Catherine Lubochinsky, Professeur, Université Paris II – Assas
Sylvie Matherat, Groupe de haut niveau de la Commission européenne sur l’Union des marchés de capitaux
Jean-Paul Pollin, Professeur, Université d’Orléans
Philippe Trainar, Professeur, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)
Natacha Valla, Directrice générale adjointe de la politique monétaire, Banque centrale européenne

38, rue de Ponthieu – 75008 Paris


Site Internet : www.aef.asso.fr
Le financement Précarité et rémunération des hôpitaux :
pour une modulation des tarifs tenant compte
de la santé de la position socioéconomique des patients
KARINE CHEVREUL
Introduction MORGANE MICHEL
JEAN DE KERVASDOUÉ
Quelques suggestions pour améliorer la pratique
Les réformes de santé dans le monde de la comptabilité hospitalière des établissements
KIEKE G. H. OKMA publics de santé
TIM TENBENSEL ALAIN SOMMER
JEAN DE KERVASDOUÉ
Assurance sociale et assurance maladie
Logique médicale, économique, industrielle
aux États-Unis : principes et paradoxes
et politique dans la définition du « prix »
THEODORE R. MARMOR
du médicament
GÉRARD DE POUVOURVILLE
Assurance maladie : l’impossible colmatage
du tonneau des Danaïdes
JEAN DE KERVASDOUÉ

Pour une budgétisation du financement Chronique d’histoire financière


de l’assurance maladie
RÉMI PELLET L’Asiento de Negros, la Compagnie des mers
du Sud, les profits de la traite d’esclaves
Entre État et marché : quel rôle futur et la révolution financière en Grande-Bretagne
pour l’assurance de santé en France ? GREGORY PRICE
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L’étouffement progressif et coûteux des OCAM


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Comment restaurer la compétitivité


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Environnement de taux d’intérêt bas
et FinTech : quels impacts sur l’intermédiation
Une overdose de technologie informatique financière dans la zone euro ?
de la santé : notes depuis la dystopie américaine ESTHER JEFFERS
JOSEPH WHITE SARAH GOLDMAN

ISBN 978-2-37647-057-1
ISSN 0987-3368
Prix : 32,00 A

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