Caractérisation Des Exploitations D'élevage de Dromadaires (Camelus Dromadaruis) Dans Les Régions Centre Et Nord Du Mali
Caractérisation Des Exploitations D'élevage de Dromadaires (Camelus Dromadaruis) Dans Les Régions Centre Et Nord Du Mali
Caractérisation Des Exploitations D'élevage de Dromadaires (Camelus Dromadaruis) Dans Les Régions Centre Et Nord Du Mali
Submitted on 26th May 2022. Published online at www.m.elewa.org/journals/ on 31st August 2022
https://doi.org/10.35759/JABs.176.1
RÉSUMÉ
Objectif : Cette étude visait à mieux comprendre les caractéristiques des élevages de dromadaires
et les pratiques d’exploitation des pasteurs et agro-pasteurs.
Méthodologie et résultats : La méthodologie retenue est basée sur des enquêtes sur la
caractérisation des élevages de dromadaires et leur productivité dans un contexte de changement
climatique. Les questionnaires ont été administrés auprès de 228 ménages dans quatre régions
administratives du Mali. Les résultats montrent que l’élevage de dromadaires est pratiqué par des
hommes (100% des élevages enquêtés). Au Centre du Mali, le dromadaire est élevé dans 86% des
exploitations enquêtées pour des travaux champêtres. Alors qu’au Nord du pays, son élevage est
dédié à la production de lait et de viande. La quantité de lait trait par jour par chamelle varie de
2,33 à 5,59 litres en saison des pluies, 2,67 à 5,02 litres en saison sèche froide et de 1,17 à 2,73
litres en saison sèche chaude. L’âge moyen d’entrée en reproduction des femelles est compris entre
4 et 6 ans. L’intervalle entre parturitions est de 2 ans.
Conclusions et application des résultats : Ces résultats permettront aux acteurs en charge de la
promotion de l’élevage en général et de celui des dromadaires en particulier de concevoir des
programmes et projets d’amélioration sur des systèmes d’élevage plus résilients face à la variabilité
pluviométrique que connaissent les régions d’étude.
Mots clés : Camelus dromadaruis, Élevage pastoral, Caractérisation, Changement climatique,
Mali
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BA et al., J. Appl. Biosci. Vol: 176, 2022 Caractérisation des exploitations d’élevage de dromadaires (Camelus
dromadaruis) dans les régions Centre et Nord du Mali
Characterization of camel (Camelus dromadaruis) farms in the central and northern regions
of Mali
ABSTRACT
Objective: The aim of this study was to better understand the characteristics of dromedary farms
and the farming practices of pastoralists and agro-pastoralists.
Methodology and results: The chosen methodology is based on surveys on the characterization of
dromedary farms and their productivity in a context of climate change. The surveys were
administered to 228 households in four administrative regions of Mali. The results show that
dromedary breeding is practiced by older men (100 % of the farms surveyed). In central Mali,
dromedaries are kept on 86% of the farms surveyed for field work. While in the north of the
country, its livestock is dedicated to the production of milk and meat. The amount of milk milked
per day per dromedary varies from 2.33 to 5.59 liters in the rainy season, 2.67 to 5.02 liters in the
cold dry season and 1.17 to 2.73 liters in the hot dry season. The average age at which females
start breeding is between 4 and 6 years. The interval between parturitions is 2 years.
Conclusions and application of results: These results will allow actors in charge of the promotion
of livestock in general and dromedaries in particular to design programs and improvement projects
on livestock systems more resilient to the rainfall variability experienced in the study regions.
Keywords : Camelus dromadaruis, Pastoral breeding, Characterization, Climate change, Mali
INTRODUCTION
Près de la moitié de la surface globale des mois (Ramet, 1913 ; Traoré et al., 2014). Le
terres émergées se caractérise par une aridité dromadaire représente l'un des fondements de
avec des hauteurs de pluies inférieures à 50 la culture et de l'agriculture des sociétés
mm à certains endroits. L’élevage pastoral est concernées. D'une manière générale, le
la principale activité qui permet de valoriser dromadaire est très estimé et il représente pour
ces écosystèmes peu favorables aux cultures son propriétaire la concrétisation de sa réussite
pluviales du fait de la faible pluviosité sociale (Ramet, 1913 ; Bengoumi et al., 2000).
(Titaouine et al., 2006). L'élevage représente Le Mali détient un effectif important de
une part importante de la production Agricole. dromadaires, il occupait en 2017 le 3ème rang
Au Mali, il a contribué en 2013 pour 15,2% de en Afrique de l’Ouest après le Niger et la
la valeur de la production agricole totale Mauritanie (FAOSTAT, 2017). En 2019,
(DNPIA, 2020). Cet élevage a toujours l’effectif total du cheptel camelin national était
représenté un important moyen de subsistance estimé à 1 241 093 têtes (DNPIA, 2020).
pour les populations des régions arides et semi- Malgré cet important potentiel zootechnique et
arides (Diawara et al., 2021). En effet, la contribution de l’espèce dans la couverture
l'élevage du dromadaire joue un rôle très des besoins en lait et viande des régions
important dans la vie sociale et économique d’élevage, l’élevage du dromadaire reste peu
des populations des zones arides et désertiques documenté de la recherche et des vétérinaires.
d'Afrique (Faye et al., 2013 ; Ben Semaoune et Au-delà du Mali, très peu d’études existent sur
al., 2019) et du Mali en particulier les caractéristiques des exploitations d’élevage
(Ouologuem et al., 2008). L'image du du dromadaire (Bourdanne et al., 1998). La
dromadaire, reste un symbole de la survie de présente étude a été initiée pour caractériser les
l'homme dans le désert, il est attaché à l'histoire éleveurs de dromadaire et leurs exploitations
des grandes civilisations nomades des régions dans les régions de Tombouctou, Gao, Kidal et
sèches et chaudes caractérisées par une longue Mopti.
période défavorable souvent supérieure à 8
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MATÉRIEL ET MÉTHODES
Sites de l’étude : Cette étude a concerné les herbeuse, la pluviosité se situe entre 200 et 400
régions de Tombouctou, Gao, Kidal et Mopti mm/an ;
(Figure 1). Les activités ont été menées dans Gossi et Ouinerden, (région de
les sites suivants : Tombouctou), zone sahélienne, la végétation
Aguelhoc, Anefif (région de Kidal), est la steppe herbeuse, la pluviosité se situe
zone saharienne, la végétation est de type entre 200 et 400 mm/an (Tracol, 2004) ;
désertique, la pluviosité est situé entre 100 - Koro, Bankass, (région de Mopti), zone
200 mm/an ; sahélienne avec 3 mois de pluies en moyenne
N’Tilit, Tessit dans le Gourma et Tina- 400-500 mm/an. Le couvert végétal est la
Hama dans l’Haoussa (région de Gao), zone steppe herbacée avec quelques ligneux de taille
sahélienne, la végétation est la steppe moyenne.
Choix des sites : Le choix des sites d’enquête niveau des sites d’étude. Un questionnaire a été
a été fait en fonction de leur accessibilité en administré auprès des chefs de ménages ou de
toute saison, la question sécuritaire, la leurs représentants. Les données collectées ont
présence de techniciens qualifiés à recycler et porté sur les profils des éleveurs de
la disponibilité des éleveurs à collaborer avec dromadaire, leurs pratiques, les objectifs de
la recherche. l’élevage, l’importance du dromadaire dans les
Unité d’observation : L’unité d’observation revenus agricoles, les races élevées, la
retenue pour conduire les activités de dynamique du troupeau, la conduite du
recherche est le troupeau. Le choix des troupeau, la reproduction, les principales
troupeaux de dromadaires a été fait en contraintes à l’élevage du dromadaire dans les
collaboration avec les pasteurs, les régions retenues et le mode de gestion des
agropasteurs et les techniciens du sous-secteur produits de leurs élevages.
d’élevage des régions retenues pour l’étude. Analyse des données : Les analyses ont porté
Collecte des données : Au total, 228 éleveurs sur la statistique descriptive. Le logiciel R
de dromadaires volontaires ont été enquêtés au 3.5.1 a été utilisé à cet effet. L’analyse de
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variance suivie de la comparaison des effets des tests ont été considérés comme
moyennes selon le test de Newman et Keuls a significatifs au seuil de 5%.
été utilisée pour le traitement des données. Les
RÉSULTATS
Caractéristiques générales des éleveurs de sont dans la tranche la plus âgée. La plupart des
dromadaires dans les zones d’étude : Le éleveurs enquêtés à Gao sont alphabétisés
Tableau 1 dresse le profil des éleveurs de (73%). A l’inverse se sont des éleveurs non
dromadaires dans les régions Nord et Centre du alphabétisés qui dominent à Kidal, Mopti et
Mali. Les éleveurs enquêtés étaient tous des Tombouctou, respectivement 80, 65 et 50%.
hommes majoritairement âgés de 40 à 60 ans. L’élevage pastoral est la principale activité des
La tranche des jeunes éleveurs est plus enquêtés dans les régions Nord, tandis que
présente à Gao (23%) et à Kidal (28%). 33% l’agriculture, constitue la principale activité
des éleveurs de dromadaires à Tombouctou des enquêtés dans les régions Centre du Mali.
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Produits du dromadaire qui procurent le revenus pour le ménage avec 90% à Gao, 85%
plus de revenus pour le ménage : Les à Kidal, 76% à Tombouctou. Cependant, à
produits qui procurent plus de revenus varient Mopti c’est la traction animale qui procure le
d’une localité à une autre (Tableau 2). Dans les plus de revenus pour 86% des éleveurs
régions Nord, c’est le lait qui procure plus de enquêtés.
Tableau 2 : Produits de l’élevage dromadaire qui procurent le plus de revenu pour le ménage
Site Nombre Éleveur (%) Lait Viande Peau Traction Animale
Gao 7 X X X -
3 X X - -
90 X - -
Kidal 15 X - X -
85 X - -
Tombouctou 10 X X -
7 X - X -
76 X - - -
7 - X - -
Mopti 14 X - - -
86 - - - X
Part du revenu de l’élevage du dromadaire comprise entre 25 et 50% selon 66% des
dans les revenus agricoles : La part du revenu éleveurs enquêtés. A Kidal, selon 37% des
de l’élevage du dromadaire dans les revenus éleveurs, le revenu tiré de l’élevage de
agricoles varie d’un site à un autre (Tableau 3). dromadaires contribue à hauteur de 25 à 75%
A Gao, 43% des éleveurs enquêtés trouvent au revenu agricole. La part du revenu de
que cette part est comprise entre 25 et 50% des dromadaire dans les revenus agricoles est plus
revenus agricoles. À Tombouctou, elle est élevée à Mopti.
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Production de lait par chamelle et par site production pouvant atteindre les 9 litres de lait.
selon les saisons : La production moyenne de En saison sèche froide, la production moyenne
lait par chamelle sur les sites de Gao, Kidal, a été de 5,02 litres de lait à Tombouctou, 3,78
Tombouctou et Mopti est donnée dans le et 3,36 litres de lait sur les sites de Gao et Kidal
Tableau 6. Pendant la saison des pluies, la respectivement. Durant la saison sèche chaude,
production moyenne journalière des chamelles la production de lait est faible avec une
a été de 4,97 litres de lait à Gao, 3,69 litres de moyenne de 2,73 litres à Tombouctou et 2,45
lait à Kidal, 5,59 litres de lait à Tombouctou et litres à Gao. La production maximale n’a pas
2,33 litres de lait à Mopti avec un maximum de dépassé 4 litres de lait par chamelle et par jour.
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Tableau 6 : Production de lait par chamelle et par site selon les saisons (en litre/chamelle/jour)
Production de lait en litre/chamelle/jour
Saison Site
Minimum Moyenne Maximum
Gao 1 4,97 9
Saison des pluies Kidal 2 3,69 6
Tombouctou 1,5 5,59 8
Mopti 1 2,33 3
Gao 1 3,78 9
Saison sèche froide Kidal 1 3,36 6
Tombouctou 1 5,02 8
Mopti 2 2,67 4
Gao 0,5 2,45 4
Saison sèche chaude Kidal 1 1,84 4
Tombouctou 1 2,73 4
Mopti 0,5 1,17 2
Tableau 7 : Âge des chamelons au sevrage, âge d’entrée en reproduction des jeunes femelles et
intervalle entre chamelages
Site Âge des Âge d’entrée en Intervalle entre
Chamelons Reproduction deux parturitions (an)
au sevrage (mois) des jeunes femelles
(an)
Moy. Écart-type Moy. Écart-type Moy. Écart-type
Gao 18,31 5,91 3,59 0,72 2,08 0,76
Kidal 12,65 1,91 3,83 0,38 2,18 0,39
Tombouctou 14,55 0,78 4,03 0,33 2,14 0,35
Mopti 11,67 0,58 6,33 0,58 2,38 0,86
Ensemble 16,46 5,39 3,74 0,70 2,10 0,59
DISCUSSION
Les éleveurs de dromadaire : qui sont-ils ? entre 40 et 60 ans. Ces résultats sont
Il ressort de l’étude que le dromadaire est très comparables à ceux trouvés par Bedda et al.
généralement élevé par les hommes. Dans la (2015) en Algérie où il n’existe pas de
zone d’étude, l’élevage de dromadaire est troupeaux camelins appartenant à des femmes
devenu culturel. La majorité des éleveurs et l’ensemble des éleveurs camelins sont des
enquêtés sont dans la tranche d’âge comprise hommes dont l’âge dépasse les 50 ans. Aussi,
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dans la région de Metlili en Algérie, Zitout des troupeaux de conduite, où la proportion des
(2007) a trouvé que l’âge moyen des éleveurs femelles reproductrices tourne autour de 60%,
enquêtés est de 50 ans avec une homogénéité est en conformité avec la tendance générale
de catégories enquêtées. Selon lui la tranche observée ailleurs en Afrique subsaharienne
d’âge de 41-50 ans représente la proportion la (Ben Semaoune et al., 2019).
plus importante (40%) ; ensuite la tranche Sources de revenus des éleveurs de
d’âge de plus de 60 ans représente 32% et en dromadaire : Les résultats ont mis en exergue
fin la tranche de 20-40 ans représente 28%. Les une diversité de produits et des services tirés
résultats de cette étude montrent que dans les de l’élevage du dromadaire. Le lait et la viande
régions Nord, il y a une faible appartenance des sont les produits phares à promouvoir dans les
enquêtés à un groupement d’éleveurs révélant régions Nord (Tombouctou, Gao et Kidal).
ainsi une faible organisation de la filière qui ne Cela s’explique par le développement de la
permet pas le développement des chaînes de filière lait et viande dans la zone et une forte
valeur autour des produits (lait, viande, cuirs, demande des consommateurs (Ouologuem et
traction, al., 2008). Au centre surtout à Mopti le revenu
Structure démographique des troupeaux : est principalement tiré de la prestation des
La structure démographique des troupeaux de dromadaires comme animaux de trait. Pour
notre échantillon d’étude établi la part des deux eux, un seul dromadaire peut remplacer une
sexes pour les trois classes d’âge considérées : paire de bœufs de trait et peut être conduit par
les jeunes non sevrés (0 à 12 mois), les sub- un seul homme à la charrue et le coût
adultes (1 à 3 ans) et les adultes (plus de 3 ans). économique d’entretien d’un dromadaire est
Les troupeaux comptent en moyenne 1 mâle moins élevé que pour une paire de bœufs de
pour 4 femelles soit 25% de mâles contre 75% trait (Faye et al., 2017).
de femelles. Cette structure démographique
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REMERCIEMENTS
Les auteurs remercient les chercheurs et remercient également les éleveurs des régions
techniciens du programme Bovin des Centres d’étude pour leur coopération et leur
Régionaux de Recherche Agronomique accompagnement dans la conduite des
(CRRA) de Sikasso et de Sotuba, Bamako. Ils enquêtes.
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