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Chapitre 1

Définitions et équations redox

Le concept actuel d’oxydoréduction fait appel à la notion de transfert d’électrons entre


deux espèces ou plus généralement à la notion de variation de degrés d’oxydation.

1.1 Vocabulaire

Oxydation-réduction :
Un élément subit une oxydation lorsqu’il perd un ou plusieurs électrons.
Un élément subit une réduction lorsqu’il gagne un ou plusieurs électrons.

L’élément fer dans l’ion fer (II) Fe2+ peut perdre un électron. Il est ainsi oxydé et
appartient alors à l’ion fer (III) Fe3+ . On peut écrire :

Oxydation (1.1)
Fe2+ Fe3+ + e− .

L’élément cuivre dans l’ion cuivre (II) Cu2+ peut capter deux électrons. Il est ainsi
réduit et appartient alors à l’atome de cuivre Cu. On peut écrire :

Réduction (1.2)
Cu2+ + 2e− Cu .

Une espèce chimique contenant un élément qui subit une oxydation est dite « oxy-
dée ». Une espèce chimique contenant un élément qui subit une réduction est dite
« réduite ».

Oxydant-réducteur
Les électrons cédés par un élément lors de son oxydation doivent être captés pas un
autre élément. Un élément (ou l’espèce qui le contient) capable de fixer un ou plusieurs
électrons est appelé « oxydant ». L’ion Cu2+ , capable de capter deux électrons, est
un oxydant. En revanche, l’atome de cuivre ne peut pas capter d’électron : un métal
n’est jamais une espèce oxydante.

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14 CHAPITRE 1. DÉFINITIONS ET ÉQUATIONS REDOX

Les électrons fixés par un élément lors de sa réduction doivent être fournis par un autre
élément. Un élément (ou l’espèce qui le contient) capable de céder un ou plusieurs
électrons, est appelé « réducteur ». L’ion Fe2+ capable de céder un électron est un
réducteur.
Réduction
Cu2+ + 2e− Cu
Oxydant Réducteur
(1.3)
Oxydation
Fe2+ Fe3+ + e−
Réducteur Oxydant
La facilité ou la difficulté avec lesquelles un élément cède des électrons lui conférera la
notion de bon ou moins bon réducteur. De même, un corps sera d’autant plus oxydant
qu’il captera plus facilement des électrons.

Couple d’oxydoréduction ou couple redox


Un même élément peut appartenir à différentes espèces chimiques, par exemple :
l’élément fer Fe est présent dans le métal fer Fe, dans l’ion fer (II) Fe2+ , dans l’ion
fer (III) Fe3+ . Selon l’espèce à laquelle il appartient, l’élément fer peut s’oxyder ou se
réduire.
Lors d’une réduction, l’élément fer passe d’une espèce oxydée à une espèce réduite.
Lors d’une oxydation, l’élément fer passe d’une espèce réduite à une espèce oxydée.
Deux espèces contenant le même élément et dont le passage de l’une à l’autre se fait
par un transfert d’électrons peuvent êtres associées dans un couple d’oxydoréduction
symbolisé par Ox/Red.
Elles doivent vérifier la demi-équation électronique suivante :

Forme oxydée + ne− Forme réduite


ou Oxydant + ne− Réducteur
ou Ox + ne− Red
(1.4)
Couple Fe3+ /Fe2+ : Fe3+ + e− Fe2+
Couple Fe2+ /Fe : Fe2+ + 2e− Fe
Couple Cu2+ /Cu : Cu2+ + 2e− Cu

L’élément fer appartient aussi aux espèces hydroxyde de fer (II) Fe(OH)2 et hydroxyde
de fer (III) Fe(OH)3 . On peut former le couple redox Fe(OH)3 /Fe2+ qui répond à la
demi-équation :
Fe(OH)3 + e− Fe2+ + 3OH− (1.5)
mais l’association des deux espèces Fe2+ et Fe(OH)2 ne forme pas un couple d’oxydo-
réduction, parce que le passage de l’une à l’autre ne fait pas intervenir d’électrons.
En effet, il s’agit d’un équilibre de précipitation :

Fe2+ + 2OH− Fe(OH)2 (1.6)

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1.2. RÉACTION D’OXYDORÉDUCTION 15

Il en est de même pour l’ion Fe3+ et l’hydroxyde Fe(OH)3 . Une espèce chimique, qui
est la forme oxydée (ou l’oxydant) dans un couple redox, peut être la forme réduite
(ou le réducteur) dans un autre couple ; on dit qu’elle est amphotère ;
• l’ion Fe2+ est le réducteur du couple Fe3+ /Fe2+ , mais il est l’oxydant du couple
Fe2+ /Fe ;
• le dichlore C2 , surtout utilisé comme oxydant dans le couple C2 /C− , est la
forme réduite du couple HCO/C2 .
Selon les conditions opératoires et notamment selon le pH, un oxydant Ox n’est pas
associé au même réducteur Red.

Exemple :
L’ion oxydant permanganate MnO− 4 est réduit en ion manganèse Mn
2+
en milieu
acide. On fera donc intervenir le couple redox MnO4 /Mn . Le même MnO−
− 2+
4 est
réduit en dioxyde de manganèse MnO2 en milieu neutre. On fera donc intervenir le
couple MnO− 4 /MnO2 .

1.2 Réaction d’oxydoréduction


En solution aqueuse, c’est une réaction chimique dans laquelle les réactifs sont trans-
formés en produits par transfert d’électrons entre les espèces mises en jeu. En phase
sèche, on parlera plutôt de variation des degrés d’oxydation relative aux espèces mises
en jeu. D’après les définitions ci-dessus, un corps ne peut être réduit sans l’interven-
tion d’un réducteur pour fournir les électrons et un corps ne peut être oxydé sans la
présence d’un oxydant pour capter les électrons cédés.
Ainsi, par exemple, une forme réduite Red1 ne peut être transformée en forme oxydée
Ox1 sans la présence d’un oxydant Ox2 capable de capter les électrons cédés par Red1 .
Simultanément, Ox2 se transforme en sa forme réduite Red2 . Il s’ensuit qu’une réaction
d’oxydoréduction fait obligatoirement intervenir deux couples redox : Ox1 /Red1 et
Ox2 /Red2 .
Son équation peut être obtenue en superposant les deux demi-équations électroniques
des deux couples mis en jeu et en tenant compte du fait qu’au cours d’une réaction
d’oxydoréduction, le nombre d’électrons captés doit être égal au nombre d’électrons
cédés et vice-versa.
Par conséquent, une équation-bilan de réaction redox ne contient pas d’électrons :
(×n2 ) Red1 Ox1 + n1 e− demi-équation électronique du
couple Ox1 /Red1 à multiplier (1.7)
par n2

(×n1 ) Ox2 + n2 e− Red2 demi-équation électronique du


couple Ox2 /Red2 à multiplier (1.8)
par n1

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16 CHAPITRE 1. DÉFINITIONS ET ÉQUATIONS REDOX

n2 Red1 + n1 Ox2 n2 Ox1 + n1 Red2 équation-bilan de la réaction


redox
(1.9)
Dans une demi-équation électronique, les électrons sont toujours du côté de l’oxydant.
Le transfert d’électrons entre les espèces chimiques peut se faire :
• soit par contact direct entre les réactifs d’une solution ;
• soit par circulation des électrons dans des conducteurs électriques : c’est le
cas des réactions électrochimiques qui se produisent dans une pile débitant un
courant ou au cours d’une électrolyse.

1.3 Les demi-équations électroniques


Elles font intervenir la forme oxydée Ox, la forme réduite Red du couple considéré et
le nombre d’électrons échangés pour passer de l’un à l’autre. La conservation de la
matière doit y être respectée ainsi que l’équilibre en charges électriques. Il est ainsi
souvent nécessaire de faire entrer dans l’équation les espèces H2 O, H+ et OH− . Pour
des raisons exposées dans le chapitre 7, on utilisera plutôt l’ion H+ que l’ion OH−
dans l’écriture des équations redox.
On notera à ce sujet, que pour l’étude des réactions d’oxydoréduction présentées dans
cet ouvrage, la notation simplifiée H+ pour l’ion hydrogène hydraté est volontaire. Il
existe plusieurs méthodes pour « équilibrer » une demi-équation redox. Une seule est
proposée ici et elle fait appel à la connaissance des degrés ou nombres d’oxydation. Il
ne faut pas confondre la notion « d’équilibrage » d’une équation redox avec la notion
d’équilibre thermodynamique d’une réaction chimique.

Degré ou nombre d’oxydation d’un élément


Présentation
L’état d’oxydation d’un élément n’est pas le même selon l’espèce à laquelle il ap-
partient. Pour caractériser l’état d’oxydation d’un atome de cet élément dans un
composé, on lui attribue la charge qu’il porterait si les électrons participant aux liai-
sons chimiques que forme l’atome dans le composé, étaient attribués à l’atome le plus
électronégatif. Par exemple, dans la molécule de dichlore C2 , le doublet d’électrons
formant la liaison covalente est également réparti entre les deux atomes : aucune
charge fictive ne peut être attribuée à l’atome de chlore. Son nombre d’oxydation n.o.
est égal à zéro.
C2 : C C (n.o.)C = 0 (1.10)
Dans la molécule HC, le doublet liant d’électrons étant déplacé du côté de l’atome
le plus électronégatif, c’est-à-dire le chlore, on attribue à l’atome de chlore la charge
fictive −I ; le degré d’oxydation de l’élément chlore dans la molécule HC est donc
pris égal à −I. Celui de l’hydrogène H étant par conséquent +I.

(n.o.)C = −I
HC : H C (1.11)
(n.o.)H = +I

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1.3. LES DEMI-ÉQUATIONS ÉLECTRONIQUES 17

L’attribution d’une charge fictive à un atome d’une liaison covalente n’est pas sans
poser problème, notamment lorsque la différence d’électronégativité entre les deux
atomes formant la liaison est peu marquée.
De même, lorsque des atomes du même élément entrant dans un composé ne jouent
pas un rôle identique d’un point de vue structural, on contourne le problème en attri-
buant à l’élément la moyenne de la charge fictive calculée pour l’ensemble des atomes
(consulter l’exemple de S2 O2−
3 ). C’est pourquoi l’établissement de conventions a été
nécessaire. Celles qui sont exposées ci-dessous sont suffisantes en chimie inorganique
pour mener à bien l’écriture des équations d’oxydoréduction utilisées dans cet ou-
vrage.

Conventions
• Règle 1 : Le nombre d’oxydation d’un élément appartenant à un corps simple
est zéro (C2 ; O2 ; H2 ; Cu ; A ...).
• Règle 2 : Lorsque l’élément appartient à un ion monoatomique, son nombre
d’oxydation est égal à la charge de l’ion (+II pour Zn2+ ; −I pour C− ; +III
pour A3+ ; −II pour S2− ).
• Règle 3 : Lorsque l’élément appartient à un ion polyatomique, la somme des
nombres d’oxydation de chaque élément est égale à la charge de l’ion. Les indices
de chaque atome doivent multiplier son nombre d’oxydation dans la somme.
Pour une molécule, la somme est égale à zéro.
L’ensemble de ces règles a permis de déterminer un degré d’oxydation pratiquement
constant pour quelques éléments couramment utilisés en chimie inorganique :
• le nombre d’oxydation de l’élément hydrogène est égal à +I pour tous les com-
posés hydrogénés (à l’exception des hydrures métalliques dans lesquels il est au
degré −I) ;
• le nombre d’oxydation de l’élément oxygène dans un composé oxygéné est −II
(excepté pour la liaison covalente -O-O- (comme dans H2 O2 ) et l’ion O2−
2 dans
lesquels le nombre d’oxydation est −I) ;
• pour les éléments du groupe « métaux alcalins » (première colonne de la classi-
fication : sodium Na ...), le nombre d’oxydation est +I ;
• pour ceux du groupe « alcalino-terreux » (deuxième colonne de la classification :
magnésium Mg ...), le nombre d’oxydation est +II.

Exemples
On peut donner quelques exemples correspondants à la règle 3.
• Dans différents composés du soufre S, le nombre d’oxydation x de l’élément
soufre est calculé comme suit :
 Dans l’ion sulfate SO2−
4 :

x + 4 · (−II) = −II =⇒ x = −II + VIII = +VI . (1.12)

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18 CHAPITRE 1. DÉFINITIONS ET ÉQUATIONS REDOX

 Dans la molécule de sulfure d’hydrogène H2 S :

2 · (+I) + x = 0 =⇒ x = −II . (1.13)

 Dans l’ion thiosulfate S2 O2−


3 , bien que les deux atomes de soufre ne jouent
pas le même rôle structural :

IV
2 · x + 3 · (−II) = −II =⇒ 2 · x = VI − II = +IV =⇒ x = + = +II .
2
(1.14)
• Pour certains composés, la moyenne obtenue pour le nombre d’oxydation d’un
élément est une fraction : dans l’oxyde de fer Fe3 O4 , on appelle x le degré
d’oxydation de l’élément fer :

VIII
3 · x + 4 · (−II) = 0 =⇒ 3 · x = +VIII =⇒ x = + . (1.15)
3
Cela signifie que certains atomes de fer sont au degré +II et d’autres au degré
+III.
• D’autres exemples sont examinés lors de l’écriture des équations redox ci-après.

Conséquences
Un élément qui subit une oxydation voit son nombre d’oxydation augmenter.
Un élément qui subit une réduction voit son nombre d’oxydation diminuer.

Lors d’une réaction d’oxydoréduction :


• la variation du nombre d’oxydation de l’élément réduit est négative ;
• la variation du nombre d’oxydation de l’élément oxydé est positive ;
• la somme de ces deux variations doit être nulle.

Écriture des demi-équations électroniques


Méthode
L’écriture doit se faire en plusieurs étapes. Seule la demi-équation obtenue à la dernière
étape est une équation équilibrée et correcte. Toutes les précédentes sont incomplètes,
donc incorrectes. On prendra l’exemple du couple IO− 3 /I

pour illustrer les étapes à
suivre.
1. Écrire de part et d’autre de la double flèche la forme oxydée et la forme réduite
en veillant à respecter la conservation de la matière pour l’élément qui subit
la variation de degré d’oxydation. Ici, l’élément est l’iode I et aucun coefficient
stœchiométrique n’est à ajouter pour la conservation de I.

IO−
3 I− (1.16)

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1.3. LES DEMI-ÉQUATIONS ÉLECTRONIQUES 19

2. Calculer le nombre d’oxydation de l’élément iode dans la forme oxydée (ion


iodate IO− −
3 ) et dans la forme réduite (ion iodure I ) :

pour IO−
3 : x + 3 · (−II) = −I =⇒ x = +V (1.17)

pour I− : x = −I (1.18)
La variation du nombre d’oxydation de l’élément iode pour passer de IO−
3 à I

est de : −VI, donc le nombre d’électrons à placer du côté de la forme oxydée


IO−3 est de 6.

3. Placer du côté de la forme oxydée le nombre d’électrons déterminé ci-dessus :

IO−
3 + 6e

I− (1.19)

4. Vérifier la conservation de la matière pour les éléments ne subissant aucune


variation de leur nombre d’oxydation. Placer notamment, soit des ions H+ , soit
des ions OH− et des molécules d’eau H2 O pour respecter la conservation des
éléments H et O.
• Trois éléments oxygène à gauche imposent trois molécules d’eau à droite :

IO−
3 + 6e

I− + 3H2 O (1.20)

• Six éléments hydrogène à droite imposent six ions H+ à gauche :

IO− −
3 + 6e + 6H
+
I− + 3H2 O (1.21)

5. S’il n’y a pas eu d’erreur, la conservation de la charge électrique est automatique


(le vérifier cependant).

Demi-équation du couple HCO/C2

HCO C2 (1.22)


Conservation en élément chlore :

2HCO C2 (1.23)

Nombre d’oxydation de C dans HCO :

(+I) + (x) + (−II) = 0 =⇒ x = +I . (1.24)

Nombre d’oxydation de C dans C2 : x = 0

La variation du nombre d’oxydation pour un élément C est de (−I) pour passer de


HCO à C2 .

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20 CHAPITRE 1. DÉFINITIONS ET ÉQUATIONS REDOX

Le nombre d’électrons à placer du côté de l’oxydant HCO est de deux, parce que
l’écriture de l’équation fait intervenir deux éléments chlore subissant chacun une va-
riation de leur nombre d’oxydation égal à (−I).

2HCO + 2e− C2 (1.25)

Conservation de l’élément oxygène O : on place 2H2 O à droite :

2HCO + 2e− C2 + 2H2 O (1.26)

Conservation de l’élément hydrogène H : on place 2H+ à gauche :

2HCO + 2e− + 2H+ C2 + 2H2 O (1.27)

On vérifie la conservation des charges électriques.

Demi-équation du couple Ni(OH)2 /Ni

Ni(OH)2 Ni (1.28)
La conservation en élément Ni est vérifiée.

Le nombre d’oxydation de Ni dans Ni(OH)2 est :

x + 2 · (−I) = 0 =⇒ x = +II (1.29)

Le nombre d’oxydation de Ni dans Ni métal est 0.

La variation du nombre d’oxydation de l’élément Ni pour passer de la forme oxydée


à sa forme réduite est de (−II).

Le nombre d’électrons à placer du côté de l’oxydant Ni(OH)2 est de 2.

Ni(OH)2 + 2e− Ni (1.30)

La conservation en éléments oxygène et hydrogène impose d’ajouter deux ions hy-


droxydes OH− à droite :

Ni(OH)2 + 2e− Ni + 2OH− (1.31)

Si l’écriture doit se faire avec des ions H+ , l’équation précédente est facilement trans-
formable en ajoutant 2H+ de chaque côté :

Ni(OH)2 + 2e− + 2H+ Ni + 2H2 O (1.32)

La conservation de la charge électrique est, dans les deux cas, vérifiée.

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