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CM5
Fonctions caractéristiques
Nous allons voir une nouvelle fonction qui permettra de caractériser la loi d'une variable aléatoire, mais de façon
plus intéressante que la fonction de répartition.
1 Fonction caractéristique
Dénition 1 Soit X une variable aléatoire. On appelle fonction caractéristique de X la fonction ϕX dénie
sur R, à valeurs complexes, par :
ϕX (t) = E(eitX ) ∀ t ∈ R.
En pratique, suivant les cas, la formule est diérente :
Si X est une variable discrète nie,
n
X
ϕX (t) = eitxj P(X = xj ).
j=1
+∞
X
ϕX (t) = eitxj P(X = xj ).
j=1
+∞
X +∞
X
|ϕX (t)| ≤ |eitxj P(X = xj )| = P(X = xj ) = 1
j=1 j=1
+∞
Z +∞
Z
itx
|ϕX (t)| ≤ |e f (x)| dx = f (x) dx = 1
−∞ −∞
1
2 Lois usuelles
Nous allons maintenant donner les fonctions de répartition des lois déjà vues, sauf celle de la loi hypergéomé-
trique. Pour cette dernière, il faut mieux calculer à la main la fonction caractéristique dans chaque cas.
Théorème 5 La fonction caractéristique caractérise la loi de probabilité d'une variable aléatoire, i.e. :
si on connait la fonction caractéristique de X , on connait la loi de X ,
si deux variables aléatoires ont même fonction caractéristique, c'est qu'elles ont même loi de probabilité.
On a le cas particulier d'une variable aléatoire réelle.
Théorème 6 Si ϕ est la fonction caractéristique d'une variable aléatoire X et si ϕ est intégrable, c'est-à-dire
si :
+∞
Z
|ϕ(t)| dt < +∞,
−∞
Ces deux théorèmes sont liés à la théorie de la transformée de Fourier. Nous allons nous en servir pour retrouver
la fonction caractéristique de la loi de Cauchy donnée précédemment.
ϕX (t) = e−|t| ∀ t ∈ R.
2
Preuve. Considérons la fonction ϕ(t) = e−|t| . Comme cette fonction est intégrable sur R, c'est la fonction
caractéristique d'une variable aléatoire réelle X de densité f , et, pour tout x ∈ R :
Donc X suit la loi de Cauchy et ϕ est la fonction de caractéristique associée à la loi de Cauchy.
Dénition 8 On appelle moment d'ordre k (k ∈ N∗ ) d'une variable aléatoire X , lorsqu'il existe, le réel
E(X ).
k
Proposition 9 Si le moment d'ordre k d'une variable aléatoire X existe, alors la fonction caractéristique de
X est k fois dérivable et :
1
E(X k ) = k ϕ(k) (0).
i
Preuve. On considère ici le cas réel. La démonstration est similaire dans le cas dénombrable. On suppose que
X admet une densité f. Si E(X k ) existe, la fonction x 7→ (ix)k eitx f (x) est uniformément intégrable et d'après
+∞
Z
(k)
les propriétés des intégrales, ϕX est k fois dérivable et ϕ (t) = (ix)k eitx f (x) dx, c'est-à-dire, pour tout
−∞
t∈R :
ϕ(k) (t) = E (iX)k eitX .
Dans certains cas où les calculs directs sont complexes, cette proposition permet d'obtenir rapidement E(X) et
E(X 2 ) :
E(X) = −i ϕ0X (0) et E(X 2 ) = −ϕ00X (0).
n
Proposition 10 Soit X1 , ..., Xn n variables aléatoires indépendantes. Soit S = Xj . Alors la fonction
P
j=1
caractéristique de S est le produit des fonctions caractéristiques des Xj :
n
Y
ϕS (t) = ϕXj (t) ∀ t ∈ R.
j=1
Preuve.
n
P !
it Xj
ϕS (t) = ϕX1 +...Xn (t) = E e j=1
n !
P
itXj Yn
= E e j=1
= E eitXj .
j=1
Comme les variables X1 , ..., Xn sont indépendantes, d'après une proposition du chapitre précédent, les variables
eitX1 , ..., eitXn sont indépendantes aussi et donc :
n
Y n
Y
ϕS (t) = E(eitXj ) = ϕXj (t).
j=1 j=0
Remarque Ce résultat permet de retrouver des résultats des chapitres précédents.
3
4. Si X et Y sont deux v.a.r. indépendantes, alors X +Y a pour densité :
+∞
Z
fX+Y (u) = fX (u − v) fY (v) dv
−∞
+∞
Z
= fX (v) fY (u − v) dv.
−∞
Preuve. On démontre seulement les deux derniers points, les autres points se démontrent de la même façon.
2 2 2
σ22 /2
3. Comme X ∼ N (m1 , σ1 ), alors ϕX (t) = eim1 t−t σ1 /2 et comme Y ∼ N (m2 , σ2 ), alors ϕY (t) = eim2 t−t .
Puisque X et Y sont indépendantes, d'après la proposition précédente,
2
√
(σ12 +σ22 )/2 2
σ12 +σ22 )2 /2
ϕX+Y (t) = ϕX (t) ϕY (t) = ei(m1 +m2 )t−t = ei(m1 +m2 )t−t (
.
p
On reconnait la fonction caractéristique de la loi normale de paramètres
p m1 + m2 et σ12 + σ22 , donc X + Y ∼
N (m1 + m2 , σ12 + σ22 ).
4. Comme X et Y sont indépendantes, d'après la proposition précédente,
+∞
+∞
Z Z
itu
ϕX+Y (t) = fY (v) fX (u − v) e du dv
−∞ −∞
+∞
+∞
Z Z
= eitu fY (v) fX (u − v) dv du.
−∞ −∞
+∞
Z
fX+Y (u) = fY (v) fX (u − v) dv.
−∞
4 Convergence en loi
Dénition 11 Soit (Xn )n∈N une suite de variables aléatoires dénies sur les espaces de probabilités respectifs
(Ωn , Sn , Pn ) et X une variable aléatoire dénie sur (Ω, S, P). Soit Fn la fonction de répartition de Xn et F celle
de X . Notons C(F ) l'ensemble des points où F est continue.
On dit que la suite (Xn )n∈N converge en loi vers X (noté Xn −→ X ) si, pour tout x ∈ C(F ),
L
Remarque Lorsque Fn converge vers une fonction F , il faut vérier que F est bien une fonction de répartition.
Ce n'est pas forcément le cas.
4
En général, les fonctions caractéristiques sont plus simples à manipuler et à obtenir que les fonctions de réparti-
tion. De plus, il n'y a pas à se soucier de domaine de continuité, ici on considère la limite en tout point de R. Le
théorème de Paul-Lévy est donc plus pratique à utiliser, la plupart du temps, que la dénition de la convergence
en loi. Par contre, de même que pour la dénition, si ϕn converge vers une fonction ϕ, il faut vérier que cette
fonction est bien une fonction caractéristique, ce qui n'est pas vrai a priori.
Par ce théorème, on retrouve un résultat déjà obtenu :
it
ϕn (t) = (pn eit + 1 − pn )n = en ln(pn e +1−pn )
.
On a déjà utilisé, dans le chapitre 3, le fait que lim pn = 0 car lim npn = λ. Donc, quand n tend vers +∞,
n7→+∞ n7→+∞
ln(pn eit + 1 − pn ) se comporte comme pn eit − pn . D'où :
it it
−pn ) −λ
lim ϕn (t) = lim en(pn e = eλe .
n7→+∞ n7→+∞
On reconnait la fonction caractéristique d'une variable X ∼ P(λ), donc d'après le théorème de Paul-Lévy, on a
L
bien Xn −→ X .
Le théorème de Paul-Lévy permet notamment de montrer le théorème central limite, énoncé dans le chapitre
suivant.
Dans cette partie, on notera toujours X = (X1 , X2 ) un couple de variables aléatoires et T = (t1 , t2 ) un couple
de R2 .
< T, X >= t1 X1 + t2 X2 .
On peut vérier, comme pour le cas unidimensionnel, que la fonction caractéristique d'un couple existe toujours.
On retrouve les propriétés élémentaires des fonctions caractéristiques :
Proposition 15 Soit ϕ la fonction caractéristique d'un couple de variables aléatoires, les propriétés suivantes
sont toujours vraies :
1. ϕ est continue sur R2 .
2. ϕ(0, 0) = 1.
3. ϕ(−T ) = ϕ(T ) pour tout T ∈ R2 .
4. |ϕ(T )| ≤ 1 pour tout T ∈ R2 .
Corollaire 16 Soit ϕ la fonction caractéristique d'un couple (X1 , X2 ). Alors, pour tout (t1 , t2 ) ∈ R2 ,
5
Proposition 17 Soit X = (X1 , X2 ) un couple de variables aléatoires de fonction caractéristique ϕ.
Si ϕ est intégrable sur R2 , c'est-à-dire si
ZZ
|ϕ(t1 , t2 )| dt1 dt2 < +∞,
R2
Proposition 19 Soit X = (X1 , X2 ) un couple de variables aléatoires de fonction caractéristique ϕ. Les variables
X1 et X2 sont indépendantes si et seulement si, pour tout T ∈ R2 ,
Condition nécessaire
Supposons que X1 et X2 soient indépendantes. Soit T ∈ R2 . Alors on sait que les variables eit1 X1 et eit2 X2 sont
indépendantes.
ϕ(T ) = E(ei(t1 X1 +t2 X2 ) ) = E(eit1 X1 eit2 X2 )
= E(eit1 X1 ) E(eit2 X2 ) = ϕX1 (t1 ) ϕX2 (t2 ).
⊥
Condition susante
On va traiter la condition susante uniquement pour le cas réel.
Supposons que, pour tout T ∈ R2 ,
ϕ(T ) = ϕX1 (t1 ) ϕX2 (t2 ).
Alors : ZZ Z Z
i(t1 x1 +t2 x2 ) it1 X1
e f (x1 , x2 ) dx1 dx2 = e fX1 (x1 ) dx1 eit2 x2 fX2 (x2 ) dx2
R2 R R
ZZ
= ei(t1 x1 +t2 x2 ) fX1 (x1 ) fX2 (x2 ) dx1 dx2 .
R2
Donc (X1 , X2 ) a la même fonction caractéristique que le couple de loi fX1 fX2 , et puisque la fonction caracté-
ristique caractérise la loi, la densité du couple est le produit des densités marginales, et donc X1 et X2 sont
indépendantes.