2012 AlexandreMerle
2012 AlexandreMerle
2012 AlexandreMerle
Auteur:
Alexandre Merle
Author:
Date: 2012
Type: Mémoire ou thèse / Dissertation or Thesis
Référence: Merle, A. (2012). Analyse de l'implantation d'outils de Lean Construction au
chantier AP60 Phase 1 [Mémoire de maîtrise, École Polytechnique de Montréal].
Citation: PolyPublie. https://publications.polymtl.ca/974/
URL de PolyPublie:
https://publications.polymtl.ca/974/
PolyPublie URL:
Directeurs de
recherche: Mario Bourgault
Advisors:
Programme:
Génie industriel
Program:
ALEXANDRE MERLE
(GÉNIE INDUSTRIEL)
DÉCEMBRE 2012
Ce mémoire intitulé :
REMERCIEMENTS
Je remercie l’ensemble des personnes du projet AP60 pour leur accueil et leur sympathie.
Je remercie M. Earle Chin, qui m’accompagné durant toute la durée de mon stage au Projet AP60
durant l’été 2011 et m’a fait bénéficier de son expérience et de son expertise.
Je remercie M. Stéphane Bélec et M. Trevor Bouk, respectivement Directeur VPO pour SLH et
Responsable VPO pour RTA, pour l’intérêt qu’ils ont porté à mon mandat ainsi que toute
l’équipe VPO.
Je remercie M. Robert Pellerin, Président du jury, pour ses judicieux commentaires qui ont
permis d’améliorer ce mémoire.
Et je remercie toutes les personnes avec qui j’ai travaillé pendant mon stage, toutes les personnes
qui m’ont ouvert les portes de leur bureau et ont accepté de me faire part de leurs expériences.
iv
RÉSUMÉ
Cette recherche s’intéresse au cas du Projet AP60, projet de construction d’une aluminerie au
Québec. Rio Tinto Alcan (RTA), le maître d’œuvre et client du projet, a choisi d’explorer
l’introduction de la culture Lean sur le chantier de construction de sa future usine. Depuis 2008,
RTA a déjà développé cette culture dans ses installations industrielles et l’entreprise a pu en
observer les bénéfices.
Ce mémoire apporte une vision inédite et interne du processus d’introduction de la culture Lean
sur un chantier de construction et du cheminement des parties prenantes à travers ce changement.
Il met en évidence les gains obtenus par l’introduction d’une culture d’élimination des gaspillages
et l’utilisation d’outils issus de cette culture. Enfin il met l’accent sur l’importance du travail à
mettre en œuvre pour parvenir à ces gains, travail de chacun et principalement de la hiérarchie à
tous ses niveaux.
v
ABSTRACT
Construction companies are increasingly interested in the methods which allowed manufacturing
industries to increase their production performances.
This master thesis focuses on AP60 Project, the construction of an aluminum smelter in Quebec.
Rio Tinto Alcan (RTA), the master of work and owner of the project, chose to explore the usage
of the Lean culture in the construction effort of its future plant. Since 2008, RTA applies said
culture in its production facilities and gains were consistently observed.
In the context of an intervention-research, the researcher joined the owner's team. Fully
integrated with the project teams, firstly at the office, then on site on a permanent basis, he acted
as an agent of change for the implementation of Lean tools. The researcher analyzed the
deployment of Lean Construction's tools on site by means of a questionnaire designed to gather
feedback from stakeholders, interviews with stakeholders as well as his presence on site. This
modus operandi enabled the researcher to make recommendations regarding the introduction of
Lean culture in a future construction project.
This master thesis provides an internal and innovative vision of the process of introducing Lean
culture on a construction site, coaching and tracking stakeholders through change. It highlights
the gains obtained by the introduction of a waste eliminating culture and the adaptation of tools
from classical Lean culture. Finally, it emphasizes the magnitude of the required work in order to
achieve these gains, both at the individual and management levels.
vi
RÉSUMÉ ........................................................................................................................................ iv
ABSTRACT .................................................................................................................................... v
INTRODUCTION ........................................................................................................................... 1
5.3.4 Réflexion globale depuis le sommet sur les ICP ...................................................... 167
5.3.6 Rendre systématiques les bonnes pratiques mises en évidence sur le Projet AP60 . 169
Tableau 1.1 : Trois types d’activité dans une production manufacturière ....................................... 6
Tableau 1.3: Éléments constituant le Lean Construction (traduit de Eriksson (2010, p. 400)) ..... 25
Tableau 4.1: Clarté et cohérence perçues des objectifs des CI, comparaison par groupe ............ 130
Tableau 4.2: Niveau des attentes initiales de l’implantation des CI, comparaison deux à deux des
items de réponse ................................................................................................................... 132
Tableau 4.3: Niveau des attentes initiales de l’implantation des CI, comparaison par groupe .... 132
Tableau 4.4: Niveau des attentes initiales de l’implantation des CI, concordance entre les
réponses des trois groupes .................................................................................................... 135
Tableau 4.5: Intensité des craintes ressenties dans le cadre du déploiement des CI, comparaison
deux à deux des items de réponse ........................................................................................ 137
Tableau 4.6: Intensité des craintes ressenties dans le cadre du déploiement des CI, comparaison
par groupe ............................................................................................................................. 138
Tableau 4.7: Intensité des craintes ressenties dans le cadre du déploiement des CI, concordance
entre les réponses des trois groupes ..................................................................................... 141
Tableau 4.8: Groupes des trois items où il y a le moins de crainte et où il y a le plus de crainte 142
Tableau 4.9: Influence des forces en présence sur le processus d’implantation des CI,
comparaison deux à deux des items de réponse ................................................................... 146
Tableau 4.10: Influence des forces en présence sur le processus d’implantation des CI,
comparaison par groupe ....................................................................................................... 147
Tableau 4.11: Influence des forces en présence sur le processus d’implantation des CI,
concordance entre les réponses des trois groupes ................................................................ 148
xii
Tableau 4.12: Pertinence des méthodes employées pour déployer les CI, comparaison deux à
deux des items de réponse .................................................................................................... 151
Tableau 4.13: Pertinence des méthodes employées pour déployer les CI, comparaison par groupe
.............................................................................................................................................. 151
Tableau 4.14: Pertinence des méthodes employées pour déployer les CI, concordance entre les
réponses des trois groupes .................................................................................................... 153
xiii
Figure 1.3 - Comparaison des ratios Production/Gaspillage entre l'industrie et la construction ... 18
Figure 1.4 - Différentes étapes de planification à l'intérieur de l'outil « Last Planner » ................ 28
Figure 1.6 - Structure du Lean Project Delivery System (tiré de Ballard et Howell (2003b)) ....... 31
Figure 1.8 - Critères de succès de projet selon Shenhar & Dvir (1997) (traduit et adapté) ........... 38
Figure 1.9 - Critères de succès de projet selon Atkinson (1999) (traduit et adapté) ...................... 39
Figure 1.10 - Critères de succès de projet selon Lim et Mohamed (1999) (traduit et adapté) ....... 39
Figure 1.11 - Synthèse des grands critères de succès d'un projet de construction (traduit et adapté
de Chan (2004)) ...................................................................................................................... 40
Figure 1.12 - Définition de la zone de contrôle d'un processus par une équipe ............................. 42
Figure 1.13 - Sept groupes d'ICP définis par le KPI Working Group (2000) (traduit et adapté) ... 42
Figure 1.14 - Phase de projet selon le KPI Working Group (2000) (traduit et adapté).................. 43
Figure 2.1 - Vue aérienne du chantier de construction AP60 le 20/05/2012 (source RTA) .......... 46
Figure 2.7 - Mise en place d'un flux tiré entre différentes phases du projet .................................. 59
Figure 2.10 - Plan d'action du déploiement de la philosophie Lean et des Centres d'Information 64
Figure 2.11 - Exemple de tableau de bord mis en place pour l'équipe ingénierie (source RTA)... 69
Figure 2.12 - Extrait du rapport de stage effectué au sein du Projet AP60 durant l'été 2011
(Merle, 2011, p. 30) ................................................................................................................ 72
Figure 4.1 - Illustration de l'approche systémique (adaptée de Rio Tinto Alcan (2010)) .............. 99
Figure 4.4 - Courbe présentant le processus de changement chez les personnes......................... 104
Figure 4.5 - Évolution de l'état d'esprit au cours d'une implantation ........................................... 106
Figure 4.6 - Organisation matricielle du projet présentant les différents Centres d'Information . 113
Figure 4.7 - Attentes et craintes des parties prenantes du déploiement ....................................... 129
Figure 5.1 - Schéma possible d'intégration des Centres d'Information dans une organisation
matricielle ............................................................................................................................. 162
Figure 5.2 - Format possible d'un Centre d'Information par secteur - Section des ICP ............... 163
Figure 5.3 - Format possible d'un Centre d'Information par secteur – Autres sections ............... 163
xv
AP Aluminum Pechiney
CI Centre d’Information
LPDS Lean Project Delivery System (Système de livraison des projets Lean)
ANNEXE W - EXEMPLE D’ICP PROACTIF ET RELATIF UTILISÉ DANS LE CI SSE .... 208
INTRODUCTION
Depuis plusieurs années, la philosophie Lean, qui s’est d’abord développée dans le secteur de
l’automobile puis dans celui de la production manufacturière, commence à s’intégrer au secteur
de la construction.
Consciente des gains possibles dans le cadre de l’utilisation de la philosophie Lean et ayant
découvert l’adaptation de cette philosophie au secteur de la construction sous le concept de Lean
Construction, RTA a décidé de l’expérimenter dans l’un de ses projets de construction, celui
d’une nouvelle installation dans laquelle elle assure elle-même la maîtrise d’œuvre.
Souhaitant explorer cette nouvelle culture de travail sans engager de changement organisationnel
dans le mode de gestion de projet, l’expérimentation du Lean Construction a été introduite sous
la forme d’initiatives isolées puis d’un projet de recherche avec l’affectation d’une ressource
dédiée sur le site de construction.
La réalisation de cette étude trouve son originalité dans le choix de placer le chercheur au cœur
de la vie quotidienne d’un chantier de construction, des défis et de la passion qu’il génère. Plus
spécifiquement, elle a pour objectif principal de démontrer, suivant une vision de terrain, la
compatibilité de la culture Lean avec le secteur de construction dans les conditions d’un projet
industriel majeur.
Ce mémoire se développe selon cinq chapitres respectant la structure traditionnelle d’un travail
de recherche. Le Chapitre 1 présente une revue de la littérature scientifique traitant de la
philosophie Lean, du concept de Lean Construction et des outils qui en sont issus. Cette revue de
littérature détaille la philosophie Lean selon ses définitions, son origine et ses applications. Elle
met ensuite en valeur le concept de Lean Construction en explicitant sa définition et les
particularités qui le différencient de la philosophie Lean classique. Elle présente finalement les
différents outils issus de la philosophie Lean et du concept de Lean Construction étudiés dans
cette recherche.
Le chapitre 4 contient les observations effectuées par le chercheur ainsi que les résultats de
recherche. Les résultats de recherche analysent le déploiement de la philosophie Lean tant au
niveau de la succession des évènements, depuis le début du projet jusqu’à la conclusion de celui-
ci, qu’au niveau des caractéristiques propres à l’organisation.
Dans le Chapitre 5, le chercheur propose une discussion autour de ses résultats de recherche. Il
détaille la contribution de sa recherche à la littérature scientifique tout en observant les limites de
3
son travail. La fin du ce chapitre est l’occasion pour l’auteur de développer de nouvelles pistes de
recherche et de nouveaux schémas d’organisation issus de la réalisation de ce mémoire et
nécessitant un travail d’étude.
4
Pour donner au lecteur une image claire de l’état de connaissances sur cette philosophie
d’organisation du travail et présenter les concepts clés permettant de comprendre cette étude sur
l’implantation du Lean Construction, ce chapitre débutera par une présentation de la philosophie
Lean.
Il s’attachera ensuite à mettre en lumière le concept de Lean Construction, et les différences par
rapport à la philosophie Lean. Seront ensuite présentés les outils issus de la philosophie Lean
étudiés dans ce mémoire.
La philosophie Lean est une culture de travail qui vise, avec un investissement matériel et
financier minimum, à éliminer les dysfonctionnements qui obèrent la création de valeur et à
améliorer les performances de l’entreprise. Elle est issue de la philosophie de travail développée
au sein de l’entreprise japonaise Toyota au lendemain de la Seconde Guerre mondiale par Eiji
Toyoda et Taiichi Ohno dans le but de répondre à l’explosion de la demande en produits
manufacturés.
Originellement, cette culture de travail était connue sous le nom de Toyota Production System
(TPS). On retrouve son nom actuel, Lean Production, dans une publication de Krafcik (1988).
Cette publication suit le lancement du l’International Motor Vehicle Program (IMVP) au MIT en
1979 et le partenariat de travail entre les constructeurs automobiles Toyota et General Motors
amorcé en 1983 (Holweg, 2007). Ces deux évènements vont être à l’origine de la diffusion de la
méthode de travail TPS maintenant appelée Lean Production et de la culture Lean qui y est
associée dans l’industrie automobile occidentale (Drucker, 1971; Krafcik, 1988; Salem et al.,
1
Il existe une traduction française aux mots Lean et Lean Production : maigre et production allégée. Ces traductions
étant très peu utilisées dans la littérature scientifique ou dans le milieu professionnel, ce mémoire de recherche
utilisera les termes anglais Lean et Lean Production couramment employés en langue française et compris de tous .
5
2006). Les méthodes de travail développées par Toyota constituent aujourd’hui, et depuis plus de
trente ans, la référence pour les constructeurs automobiles occidentaux.
L’amélioration continue et la recherche de réduction des gaspillages ne sont pas nées avec
Eiji Toyoda : elles sont héritières de l’histoire industrielle. L’histoire de la recherche des
performances industrielles, dont les grandes dates sont visibles à l’ANNEXE A, commence dans
les arsenaux pour répondre aux besoins des armées. Elle se poursuit avec la révolution
industrielle qui voit l’arrivée de l’organisation scientifique du travail de Frederick Taylor et de la
chaîne de fabrication d’Henri Ford. C’est après la Seconde Guerre mondiale, marquée par
l’explosion de la demande, que se développent les méthodes de travail Toyota. On observe depuis
une diffusion et une évolution constante des connaissances dans ce domaine.
Pour augmenter la création de valeur avec un nombre de ressources équivalent, Toyoda et Ohno
développent le concept des « 3M » dans le TPS (Liker, 2004). Les « 3M » constituent des pistes
d’amélioration pour l’organisation :
1. Muri : Terme japonais signifiant le surplus de production venant d’un standard (différent
du simple excès de production intégré au Muda) ; il entraîne un dépassement des
ressources habituelles de l’organisation.
2. Mura : Terme japonais signifiant l’irrégularité des flux. Cette irrégularité de flux est
souvent à l’origine de gaspillage (Muda) destiné à compenser ces variations.
3. Muda : Terme japonais signifiant gaspillage .Partant de cette réflexion, Monden (1998)
identifie à son tour trois types d’activités sur la base de l’ajout de valeur dans le processus
de production. Ces trois types d’activités sont présentés dans le Tableau 1-1 suivant les
définitions de Hines et Rich (1997).
Dans leur globalité, les activités à non valeur ajoutée viennent « de complexités générées par
l’organisation du travail et résultent principalement de problèmes d’interface et
7
C’est à partir de cette définition des gaspillages que 7 types génériques ont été identifiés pour
servir de base dans le cadre d’activités manufacturières (Womack et al., 1990) :
• Transport : par exemple, déplacement de la matière d’œuvre entre deux postes distants qui
pourraient être côte-à-côte.
• Attente : par exemple, équipement utilisé en deçà de sa capacité de travail car en attente
de la matière d’œuvre ou en attente d’une machine
• Retouche : par exemple, problème de qualité sur les produits réalisés qui oblige à réparer
ou reprendre une partie du processus de réalisation
• Inventaire : par exemple, stockage de matière d’œuvre (matière première, produit semi-
fini ou produit fini) qui représente une valeur immobilisée source de perte de valeur pour
l’entreprise
Le travail de Womack et al. (1990) montre que la mise en place du Lean production permet de
consommer moitié moins de ressources qu’avec l’utilisation d’une autre organisation de travail.
Dans ce contexte, le terme « ressource » représente ici des éléments aussi différents que la
surface de travail nécessaire, le matériel, l’investissement dans les outils et les heures de travail.
Si la finalité de la philosophie Lean est l’élimination des gaspillages, l’atteinte de cet objectif
passe par une évolution de la culture de travail. Cette culture doit permettre la recherche des
gaspillages présents dans le processus de création de la valeur et non la recherche des
8
« responsables » de ces gaspillages. Le déploiement de cette culture qui prend la forme du Lean
Production, permet de hiérarchiser et prioriser les gaspillages pour organiser leurs éliminations.
Toute organisation possède une culture. Ce phénomène est observable à différentes échelles
(pays, villes, entreprises,…). Le sociologue Guy Rocher (1973) nous donne sa définition d’une
culture humaine :
Une culture, dans notre cas une culture d’entreprise, est un élément profondément ancré dans
chacun des membres de l’organisation. Sa modification représente un défi très important. Le
propos de Cécile Bareil sur le changement dans lequel elle précise qu’une organisation ne change
pas tant que les personnes qui la composent ne changent pas, correspond parfaitement à la
problématique de changement de culture.
Agir dans le sens d’une modification de la culture d’entreprise nécessite d’agir simultanément sur
trois dimensions de l’organisation2 :
• Le système opérationnel
2
Suivant les schémas utilisé par RTA
9
Dans leur livre consacré au Lean, Liker et Meier (2006) édictent quatorze principes
fondamentaux de la méthode Toyota et de la culture sur laquelle elle se base :
1. Fondez vos décisions sur une philosophie à long terme, même au détriment des objectifs
financiers à court terme
2. Organisez les processus en flux pièce à pièce pour mettre au jour les problèmes
5. Créez une culture de résolution immédiate des problèmes, de qualité du premier coup
8. Utilisez uniquement des technologies fiables, longuement éprouvées, qui servent vos
collaborateurs et vos processus
10. Formez des individus et des équipes exceptionnels qui appliquent la philosophie de votre
entreprise
12. Allez sur le terrain pour bien comprendre la situation (genchi genbutsu)
13. Décidez en prenant le temps nécessaire, par consensus, en examinant en détail toutes les
options. Appliquez rapidement les décisions
Dans son approche de la culture Lean et des méthodes de production Toyota, l’entreprise de
conseil recrutée par RTA pour faire évoluer sa culture de travail a réuni les quatorze principes
fondamentaux de Liker et Meier (2006) en cinq principes guides.
10
Les cinq principes guides de la culture Lean, utilisés depuis 2008 au sein de RTA sont :
• Aller voir : S’il y a un problème, vous vous déplacez et allez voir. Recueillez les
informations pertinentes, trouvez la cause fondamentale, obtenez le consensus et prenez
l’initiative.
Les cinq principes guides ci-dessus ont une application pratique pour chacun des outils Lean
déployé en entreprise3. Pour être efficace, la mise en lumière des gaspillages et leur élimination
doivent être intégrées à la culture d’entreprise. C’est ainsi qu’il est possible de déployer le Lean
Production dans une organisation.
Le concept de Lean, par la culture d’entreprise qu’il met en place, essaie de relier deux aspects de
l’entreprise, d’un côté la main d’œuvre et de l’autre la gestion organisationnelle de la production,
le tout dans le but d’obtenir une production et une productivité la plus importante possible avec le
minimum de ressources possible (Katayama & Bennett, 1996).
1.1.2.2 Outils
L’intérêt de l’industrie automobile occidentale pour les méthodes de travail Toyota a entrainé la
mise au point de concepts et de méthodes accessibles et compréhensibles au travers de différents
outils. Une définition absolue du Lean étant très compliquée, on trouve différente représentation
de ce concept. Sa représentation la plus classique et la plus expressive et le « Temple Lean » issu
du TPS.
Il existe de très nombreuses illustrations du « Temple Lean » dans la littérature scientifique sans
qu’aucune ne soit réellement prédominante. La Figure 1.1 ci-dessous en est un exemple, proche
de celle utilisée par RTA.
3
Voir ANNEXE B - Application des 5 principes guide
11
AMÉLIORATION CONTINUE
GESTION
FLUX
des STOCKS
UNITAIRE
TAMPONS
SYSTÈME À POKA
FLUX TIRÉ YOKE
TEMPS
ANDON
TAKT
Cette représentation fait aussi ressortir le côté holistique de la philosophie Lean. Une brique seule
est peu utile, mais leur assemblage construit quelque chose. Cette représentation renvoie le
principe qu’utilisés ensemble, tous les concepts et outils apporteront plus que s’ils sont implantés
et utilisés séparément (Humeau, 2008).
• Pilier 2 : Qualité
Il apparaît évident, sous cette forme, que le toit (amélioration continue) ne peut être mis en place
avant une brique de base (usine visuelle).
Cette représentation permet d’illustrer la cohérence du concept de Lean Production. Celui-ci est
trop souvent vu par les professionnels comme une « caisse à outils » dans laquelle on vient se
servir selon les besoins de l’organisation.
12
Le choix des outils nécessaires pour éliminer les gaspillages présents dans l’organisation se fait
suivant le processus visé, les compétences de l’organisation, les types de procédés et la
disponibilité des ressources. Parmi cette vaste liste, il existe la gestion visuelle, 5S et le travail
d’équipe qui sont des outils de base dont l’utilisation est commune à l’ensemble des entreprises.
Les outils cités ici sont importants dans le Lean Production mais il est important de conserver à
l’esprit qu’ils ne sont qu’un moyen. Ils permettent de former, motiver, impliquer les acteurs de
l’organisation et amènent de bons résultats mais ils ne se suffisent pas à eux mêmes.
L’engagement et un minimum de compétences sont nécessaires de la part des personnes qui
composent l’organisation. Cet engagement passe par un changement de culture de travail dans
l’organisation, depuis les personnels de gestion jusqu’à l’opérateur directement en contact avec la
matière d’œuvre. Cette nécessité de changement de culture permet de venir chercher le caractère
holistique du Lean Production pour former un cercle vertueux. Il permettra de tirer des gains
substantiels de l’utilisation des différents outils dans le cadre d’un déploiement cohérant.
L’introduction du Lean Production dans une organisation est un processus complexe pour lequel
il existe peu d’exemples documentés et qui doit être adapté à chaque nouvelle organisation.
13
• Leadership
• Développement du personnel
• Autonomisation
Ces quatre catalyseurs doivent être utilisés pour guider et engager l’organisation sur le chemin du
changement de culture et la mise en place du Lean Production.
Pour travailler selon les principes de la philosophie Lean, une période est nécessaire pour amener
l’organisation et les personnes qui la composent vers une nouvelle culture. Le cheminement à
réaliser doit être accompagné.
14
Malgré une attente très forte sur le sujet de l’implantation et une littérature scientifique très
importante sur le sujet de Lean Production et du TPS, aucune publication scientifique n’est en
mesure de donner un « manuel » de l’implantation Lean. Les travaux les plus sérieux publiés sur
cette problématique sont réalisés par le Lean Enterprise Institute (LEI) et le Lean Advancement
Initiative (LAI).
Sans donner le manuel absolu de l’implantation Lean, le LEI propose une « carte » des
principales étapes du cheminement vers une organisation Lean. Ce modèle, présenté à la
Figure 1.2, offre un point de départ à la réflexion des organisations.
Le LAI propose un modèle plus directif pour le déploiement du Lean Production mais ce modèle
très dirigiste apparaît parfois complexe pour les PME. Ce modèle intègre douze étapes ainsi que
des indicateurs à mettre en place.
L’introduction de la philosophie de Lean Production en Occident n’a pas toujours apporté que
des améliorations dans le processus général de fonctionnement des unités de production. Ces
nouvelles pratiques ont amené diverses problématiques tant au niveau de la main d’œuvre que sur
les différents aspects de gestion des ressources humaines de l’entreprise (Jørgensen & Emmitt,
2008). De nombreux problèmes apparus dans le cadre de l’implantation de la philosophie Lean
dans des organisations occidentales viennent d’une mauvaise compréhension de cette
philosophie, de ses objectifs et de la méthode utilisée pour y parvenir. Ce point de vue est celui
défendu par Humeau (2008) lors d’une présentation effectuée pour Rio Tinto Alcan.
Liker et Meier (2006), dans leur livre The Toyota Way, montrent les limites du concept de Lean
Production. Tout au long de l’ouvrage, les auteurs font profiter le lecteur de leur expérience dans
l’introduction et l’utilisation du Lean Production en entreprise ; ils mettent notamment en
évidence la rapidité avec laquelle il est possible de retomber dans un mode de pensée occidentale.
Cet écart par rapport au concept original conduit à une utilisation des outils Lean Production sans
appliquer les principes de base qui y sont attachés.
Au-delà des observations de terrain que rapportent Liker et Meier (2006), le Lean Production
suscite des opinions très diverses de la part de certaines parties prenantes du secteur
16
manufacturier. Adulé par certains, il est parfois décrié par d’autres. Le syndicat de cadre CFDT
(France), dans le cadre d’un article dans sa revue périodique (Vernède & Boisson Zyskind, 2012),
s’interroge sur l’effet de « mode » existant autour du Lean Production et de son application sans
distinction à tous les secteurs économiques. Il encourage ses représentants à être très vigilants
quant à ces pratiques. Dans le cas de l’article cité, le questionnement n’est appuyé sur aucun fait
rapporté. Mais la simple existence de cette opinion et sa publication constitue un défi
supplémentaire pour les agents de changement chargés d’implanter le Lean Production dans une
entreprise.
17
Cette partie présente l’état des connaissances de la littérature scientifique sur l’introduction de la
culture Lean dans le secteur de la construction et l’organisation du travail associée, le Lean
Construction.
Après une présentation du Lean Construction, seront abordées les particularités qui différencient
les secteurs de la construction de ceux de l’industrie manufacturière. Les principales
caractéristiques du Lean construction seront mises en évidence ainsi que la problématique de la
mise en place du Lean Construction dans une organisation.
« way to design production systems to minimize waste of materials, time, and effort in
order to generate the maximum possible amount of value »
Suite aux travaux qu’ils ont menés, Greg Howell et Glenn Ballard (2003a), co-fondateurs du
Lean Construction Institute en 1997, observent :
« normally only about 50% of the tasks on weekly work plans are completed by the end of
the plan week »
18
Cette observation vient appuyer les prises de position de Koskela. Howell et Ballard préconisent
comme solution la nécessité de :
« active management of variability, starting with the structuring of the project (temporary
production system) and continuing through its operation and improvement. »
Suivant la même philosophie que le Lean Production, le Lean Construction s’attache donc à
identifier et à éliminer les gaspillages présents dans l’organisation pour assurer une création de
valeur maximum (Koskela & Howell, 2002). La différence qui existe entre le Lean Production et
le Lean Construction se trouve dans le type d’organisation dans laquelle on souhaite éliminer les
gaspillages. Dans ces conditions, si les objectifs et les principes restent les mêmes, les moyens et
les approches doivent être adaptés.
La Figure 1.3 propose une statistique du Construction Industry Institute qui présente une
comparaison des ratios production/gaspillage dans l’industrie manufacturière et l’industrie de la
construction.
0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100%
Produc>on
Gaspillage
Source : Construction Industry Institute
Le graphique présente une forte disparité entre les deux secteurs montrant un gisement
d’amélioration très important dans la construction. Les différences d’environnement et de
contraintes entre ces deux secteurs d’activités sont de nature à expliquer, pour une part, la
disparité observée. Néanmoins, le Lean Construction apparait comme un moyen d’améliorer les
performances du secteur de la construction.
Bien que le premier appel de Koskela (1992) date maintenant de vingt ans, l’intégration du Lean
Construction au sein de projets de construction et sur les chantiers restent encore peu développé.
Cette pratique est majoritairement visible aux États-Unis, au Danemark et au Royaume-Uni
(Jørgensen & Emmitt, 2008).
19
Les problèmes de l’industrie de la construction évoqués par des auteurs comme Koskela et
Howell (2002) tirent leur origine des particularités de cette industrie. Au moins trois aspects
distinguent l’industrie de la construction des autres types d’industrie :
Dans le cas d’une production industrielle, la production d’un bien est très souvent
indépendante du lieu de consommation final. Il est aisé de délocaliser, séparer et assurer
l’assemblage d’une production sur un site différent du site final grâce aux circuits de
transport actuels (avion, bateau, frêt,…). La valeur ajoutée d’un produit se crée alors tout
au long de ce chemin.
Par le choix de certains composants nécessitant un très long délai de livraison (commande
effectuée avant que la conception finale de l’ensemble ne soit connu), par le degré de
qualité exigé sur des produits uniques et par la co-activité résultant du travail de
nombreuses entreprises différentes sur le site de construction, l’industrie de la
20
Les effets combinés des trois dimensions qui distinguent le secteur de la construction d’une
production manufacturière sont incertains et potentiellement très importants. La réduction de ces
incertitudes est possible dans un contexte industriel par une structure organisationnelle fortement
intégrée associée à une augmentation des systèmes de contrôle. Ce type de contrôle permet, à
défaut d’obtenir une amélioration de l’efficacité du processus, de créer une stabilité, condition
nécessaire de la réduction de ces incertitudes. Mais dans le cas de la construction, de nombreuses
incertitudes sont difficilement contrôlables. On trouve notamment les conditions climatiques, la
co-activité, les conditions de sol et le changement d’entrepreneur qui peut amener des
circonstances imprévues et avoir un impact significatif sur le projet en terme de coûts et délais.
L’adaptation du Lean Production au Lean Construction oublie souvent ce qui a pu faire la force
et les succès de la culture de travail Lean : l’optimisation des activités répétitives. Or celles-ci
sont beaucoup plus importantes dans l’industrie manufacturière (Jørgensen & Emmitt, 2008;
Pellerin, 2012).
Les concepts de Lean Construction et de Lean Production se basent, tout deux, sur la philosophie
Lean. Mais, Jørgensen & Emmitt (2008) pointent des différences dans les moyens et les
approches à utiliser. Comme pour l’industrie manufacturière, l’utilisation du Lean construction
doit, avant tout, s’adapter à l’organisation ciblée pour son l’implantation (Modig, 2004). Il est
toutefois possible donner deux caractéristiques principales du Lean Construction : le
développement d’un nouveau compromis et la définition des axes principaux de l’organisation.
Le Lean Construction est né de l’écart observé entre les modèles théoriques et la réalité dans le
secteur de la construction (Koskela, 2000).
21
Koskela reprend le modèle TPS de Toyota, choisi comme référence par l’industrie
manufacturière, pour construire un nouveau modèle de production en mode projet suivant trois
axes complémentaires développés dans le Tableau 1.2 (Koskela, 2000) :
• Transformation
• Flux
• Création de la valeur
Prendre soin de ce qui doit Prendre soin que ce qui est Prendre soin de rejoindre
Contribution
être fait non-nécessaire soit réduit les attentes clients de la
pratique
au maximum meilleure façon possible
En établissant ce nouveau compromis pour guider exécution d’un projet de construction, Koskela
effectue un rapprochement entre le modèle théorique et ce qui est observable dans la réalité.
Eriksson (2010) identifie six axes principaux qui structurent le Lean Construction et les définit
par rapport aux caractéristiques du secteur de la construction. Les travaux d’Eriksson (2010) sur
ce sujet sont complétés par les analyses de Green et May (2005) sur la mise en place du Lean
Construction.
22
La réduction des gaspillages constitue l’élément principal du Lean Construction (Ballard et al.,
2003; Green, 1999b; Jørgensen & Emmitt, 2008). L’aspect central rattaché à cet élément est
l'exigence de la propreté et du bon ordre que l’on doit retrouver partout sur le chantier. Cet
objectif ne peut être réalisé qu’en encourageant les ouvriers à y participer (Salem et al., 2006). La
réduction des gaspillages passe aussi par la mise en place du juste-à-temps (Jørgensen & Emmitt,
2008), le recours aux technologies de l’information tels que la modélisation 3D (Ballard et al.,
2003; Green & May, 2005) et la pré-fabrication d’éléments et équipements (Green & May, 2005).
La conduite d’un projet de construction centré sur la gestion des flux de production est un
élément central du Lean Construction (Jørgensen & Emmitt, 2009). Ce type de gestion peut
s’appuyer sur des outils de type « Last Planner » (Ballard et al., 2003). Il doit s’assurer la
participation de tous à la prise d’action immédiate par des méthodes d’autocontrôle (Ballard et
al., 2003; Green & May, 2005) et l’établissement de jalons dans le plan d’exécution (Salem et al.,
2006).
La focalisation sur les besoins client, qui constitue un élément clé du Lean Construction
(Jørgensen & Emmitt, 2009), met en avant le fait que la satisfaction du client dépend autant du
produit final que du processus d’exécution de celui-ci (Maloney, 2002). Pour que les
entrepreneurs et fournisseurs s’approchent au plus près des besoins et des exigences du client, il
est important de les impliquer dans un projet dès la phase d’ingénierie. L’introduction des
principes Lean est donc possible dès la conception : elle permet la mise en place d’une
« ingénierie concurrente »4 et améliore les résolutions de problèmes.
Une amélioration continue efficace passant par des perspectives à long terme est importante en
Lean Construction (Green & May, 2005; Salem et al., 2006). Celle-ci se concrétise par la mise en
place de mesures de performance (Salem et al., 2006), l’amélioration des procédés et la résolution
4
Voir 1.3.8.3 - Ingénierie concurrente
23
de problèmes impliquant des travailleurs (Ballard et al., 2003). Le partage de connaissance est un
autre aspect important du Lean Construction (Green & May, 2005).
Les résolutions de problèmes doivent se concrétiser dans une bonne compréhension des
différentes équipes partenaires autour de l’utilisation d’outils de travail collaboratifs, de locaux de
travail communs et d’objectifs communs (Eriksson, 2008; Green & May, 2005).
Ces particularités d’un projet de construction peuvent être résumées par des problématiques très
complexes (Winch, 1987), dans une organisation temporaire multiple (Koskela, 1992). Or, la
philosophie Lean a pour objectif de mettre en avant les flots, la coopération et un schéma global
(Liker, 2004), ce qui apparait difficile au vue des particularités du secteur de la construction
citées précédemment.
Dubois & Gadde (2002) vont encore plus loin en observant que le manque de relations à long
terme entre les différents acteurs de la construction (ces acteurs peuvent être des entreprises, leurs
dirigeants, leurs employés ou leurs ouvriers) rend très difficile le processus des leçons apprises et
de l’innovation qui sont par ailleurs deux éléments très importants de la philosophie Lean.
Enfin, il est important d’adopter des perspectives globales (Jørgensen & Emmitt, 2009) pour être
capable d’améliorer de manière centralisée un projet et éviter les améliorations locales (Eriksson,
2008; Green & May, 2005).
Une perspective globale doit permettre de réduire le nombre de parties prenantes. Dans une
volonté similaire, il est important que les différentes phases, ingénierie, construction et opération
ne travaillent pas de manière isolée. Les perspectives globales sont importantes pour choisir les
objectifs et effectuer un balancement approprié entre les éléments coûts, qualités, délais (Green &
May, 2005).
24
Green et May (2005) développent l’idée d’un déploiement de la philosophie Lean Construction
en trois étapes visible dans le Tableau 1.3. Chacune d’entre elles représente un niveau de
sophistication supérieur et permet ainsi de faire évoluer l’organisation dans la compréhension et
l’intégration de la philosophie Lean Construction.
La première étape s’attache, selon la description de Green et May (2005), à la réduction des
gaspillages. Elle se concentre sur les gestionnaires plutôt que sur les travailleurs et se concrétise
par l’élimination des mouvements inutiles, l’élimination des coûts non-nécessaires, l’optimisation
des flux et le partage d’informations sur les gains réalisés. Dans le cas du Lean Construction, ces
processus reviennent à mettre en place des démarches de propreté bon ordre, juste à temps, mise
en place de jalons et ICP.
Dans l’étape 3, Green et May (2005) avancent l’idée d’une évolution des structures de conduite
de projet. Cette dernière étape se définit par l’utilisation poussée des technologies de
l’information, des techniques de préfabrication, de la méthodologie « Last Planner », des
méthodes d’autocontrôle, par la mise en place de relations long terme, l’utilisation des
suggestions des travailleurs, le suivi de paramètres non-scientifiques et la formation de toutes les
parties prenantes.
L’accomplissement de ces trois étapes doit déboucher sur de grands changements dans la
conduite de projet. La définition de trois étapes et le renvoi à différents outils et techniques
apportent un point de vue sur l’introduction de la philosophie Lean Construction dans une
organisation. Cependant, ce concept est développé de manière générale pour correspondre au
secteur de la construction dans son ensemble. Son utilisation doit donc se faire suivant les
caractéristiques du projet de construction en cours
25
Eriksson (2010) construit une association entre les étapes définies par Green et May (2005) et les
six éléments principaux qui constituent, d’après ses recherches, les fondements de la philosophie
Lean construction (Tableau 1.3)
Tableau 1.3: Éléments constituant le Lean Construction (traduit de Eriksson (2010, p. 400))
Dans le cas du Lean Construction comme dans celui du Lean Production, il n’existe pas de
« manuel d’implantation » à proprement parler. Les travaux d’Eriksson (2010) et de Green et
May (2005) apportent des directions et des pistes qu’il convient ensuite d’adapter.
L’étude de la littérature montre qu’un très gros travail a été mené pour donner la cohérence et de
la lisibilité au concept de Lean Construction aujourd’hui (Jørgensen & Emmitt, 2008). Mais cette
relative disponibilité de littérature traitant du Lean Construction laisse transparaitre un domaine
encore immature du point de vue de Eriksson (2010) tant il manque de raisonnements théoriques
non biaisés. Il est aisé de trouver des articles traitant de concept de Lean Construction mais plus
difficile lorsque l’on recherche des cas pratiques d’implantation et d’utilisation de ces outils.
Ce point de vue est repris par Jørgensen & Emmitt (2008) pour qui de grands succès sont
attribués au Lean Construction, mais peu sont réellement documentés. Ce constat recoupe les
mises en garde effectuées par Green (1999a, 2000, 2002) sur un choix aveugle de la philosophie
Lean et de son intégration au secteur de la construction sans analyser leur compatibilité.
Le fait que de nombreux secteurs économiques (assurance, santé, industrie de petit volume, …)
aient réussi à démontrer les impacts positifs de la philosophie Lean sur leurs méthodes de travail
par cette récupération de données (Arleroth & Kristensson, 2011) est là pour encourager les
recherches et rendre disponible plus de données sur des cas d’utilisation du Lean Construction.
27
1.3 Outils
Les concepts de Lean et Lean Construction sont liés à de nombreux outils. Cette partie présentera
les outils et les bonnes pratiques de l’industrie que l’on retrouve dans l’étude menée.
Le « Last Planner » est l’outil, au nom déposé, synonyme de la philosophie Lean Construction
dans le monde occidental ; il bénéficie de la promotion du Lean Construction Institute. Il s’agit
de l’outil rattaché à la philosophie Lean Construction qui fait l’objet du plus grand nombre de
publications scientifiques.
Cet outil, qui se traduit littéralement par « Dernier Planificateur », tient une place centrale dans le
« Lean Projet Delivery System ». Son intention est de décentraliser la tâche de planification
(Forbes & Ahmed, 2009) en la rapprochant du terrain. Ce déplacement d’une partie du centre de
décision doit servir à optimiser l’utilisation de la main d’œuvre et des équipements disponibles
pour la réalisation des jalons prévus au calendrier maître. La Figure 1.4 montre le fonctionnement
général de l’outil « Last Planner » depuis la planification à très haut niveau jusqu’à la réalisation
des activités sur le terrain.
Cette volonté de rapprocher la planification du terrain vient d’une étude réalisée par Ballard &
Howell (1998) qui ont mis en évidence qu’en moyenne 54% des planifications de tâche ne sont
pas respectées sur les chantiers de construction.
28
• Planifica>on
Will
(Va)
hebdomadaire
ou
quo>dienne
Forbes et Ahmed (2009) dressent la liste des points saillants de l’utilisation de l’outil « Last
Planner » :
• la mise en place de cet outil repose sur l’hypothèse que les projets de construction ont des
plans de travaux comportant des mises à jour erronées
• Les échecs doivent être traités comme des opportunités d’amélioration pour les
prochaines tâches
Le tableau de bord, dans sa définition générale, est un outil permettant de connaître l’état d’un
système ou d’un processus à l’aide d’un nombre restreint d’indicateurs.
Saulou (1982) utilise l’analogie du tableau de bord de voiture pour illustrer l’utilité et la fonction
d’un tableau de bord. A l’image d’un tableau de bord de voiture, son équivalent en gestion
présente de nombreux indicateurs :
Kaplan et Norton (1992) choisissent d’effectuer un parallèle entre le tableau de bord et un cockpit
d’avion :
«Think of the balanced scorecard as the dials and indicators in an airplane cockpit. For
the complex task of navigating and flying an airplane, pilots need detailed information
about many aspects of the flight. They need information on fuel, air speed, altitude,
bearing, destination, and other indicators that summarize the current and predicted
environment. Reliance on one instrument can be fatal. Similarly, the complexity of
managing an organization today requires that managers be able to view performance in
several areas simultaneously».
Epstein & Manzoni (1998) développent l’idée que le tableau de bord doit servir à transmettre la
stratégie de l’organisation sur le terrain pour traduire celle-ci en action. Le tableau de bord
devient le vecteur de cette stratégie.
La construction d’un tableau de bord est un processus en soi qui doit être effectué avec
méthodologie. Un tableau de bord mal conçu, manquant de rigueur et de réflexion sur les
30
Au delà du simple suivi en vue d’assister la prise de décision, les tableaux de bord développés par
RTA ont pour vocation le rassemblement d’une équipe autour d’un outil visuel. Celui-ci doit
permettre, en plus du suivi des indicateurs sur le fonctionnement du processus, de solutionner les
problèmes mis en lumière et d’avoir une vision des activités planifiées.
Dans une optique similaire, Fernandez (2003) donne au tableau de bord la mission de rapprocher
les centres de décision du terrain pour être capable de suivre la vitesse toujours plus rapide de
l’économie. Pour illustrer son propos, il utilise la boucle de rétroaction (Figure 1.5) existant dans
tout système pour mettre en place une commande et l’adapter ensuite.
Dans le cas des activités économiques, une boucle de rétroaction stable mais lente n’est plus
viable. Celle-ci doit se rapprocher du terrain pour se raccourcir. Le tableau de bord est un moyen
pour y parvenir.
Le modèle LPDS constitue une nouvelle compréhension de l’exécution d’un projet. Ballard et
Howell (2003b) imaginent avec ce nouveau modèle un projet qui n’est plus appréhendé en termes
de phases (conception, approvisionnement, installation) mais avec des relations d’imbrication et
de boucle entre les phases.
La Figure 1.6 représente les différentes phases d’un projet défini avec le modèle LPDS.
31
Figure 1.6 - Structure du Lean Project Delivery System (tiré de Ballard et Howell (2003b))
La première phase, dite de définition du projet, implique le client et les parties prenantes pour
définir les objectifs, les critères et les choix de conception. Ces trois activités s’influençant
mutuellement, une bonne communication est nécessaire entre les parties prenantes pour obtenir la
meilleure compréhension possible. Toutes les parties prenantes de l’exécution doivent être
présentes dans cette phase.
Cette phase va permettre, par la communication entre les parties prenantes, d’aligner la
conception des processus et du produit sur les critères de conception. Si le client souhaite trouver
de nouvelles opportunités pour son projet, il faut revenir à la phase précédente.
amenés à travailler ensemble à la conception. Le but est de pouvoir réduire les reprises de travaux
déjà effectués et les délais d’exécution dus à une avancée trop rapide de l’ingénierie.
Cette phase débute avec la livraison du matériel et des informations qui permettent de l’utiliser.
Cette phase se termine lorsque le client commence à retirer des gains de son outil, ceux-ci
arrivant après l’activité de commissioning.
Utilisation (Use)
Le concept de propreté bon ordre a pour objectif de maintenir l’espace de travail le plus propre
possible. L’outil 5S issu de la philosophie Lean va plus loin en utilisant un processus de sélection
du matériel nécessaire et en établissant des standards de rangement. Ces standards de rangement
sont souvent présents sous la forme de photos. Le terme 5S réfère à :
• Self discipline : Tenir les équipes responsables de maintenir les normes convenues
La mise en place d’une démarche de propreté bon ordre ou de l’outil 5S permettent d’augmenter
la sécurité d’un chantier, de réduire les coûts en termes de quantité d’outils, de réduire les pertes
et les dégradations de matériels par mauvais entreposage.
33
La résolution de problème est une activité courante dans le cadre d’une organisation et d’un
projet de construction. Il s’agit même de l’une des activités principales. Généralement la
résolution d’un problème amène à la prise de contre mesure.
Liker (2004) préconise l’utilisation de la méthode 5, « Pourquoi ? », pour être capable d’identifier
les causes fondamentales d’un problème et les résoudre au lieu de gérer les conséquences à
chaque nouvelle apparition du problème. Le fonctionnement veut que l’on pose la question
« Pourquoi ? » plusieurs fois jusqu’à arriver à la cause fondamentale du problème.
Toyota a mis sur pied une procédure complète de résolution de problème en 7 points (incluant le
5 Pourquoi) (Liker, 2004).
Dans la même perspective, RTA a adapté la méthode TPPSP (Toyota Practical Problem Solving
Process) (Figure 1.7) à ses besoins pour l’utiliser dans ses installations.
Cet outil est disponible au travers de logiciels de modélisation dynamiques spécialisés pour le
génie civil.
Comparable, dans le concept, aux maquettes numériques depuis longtemps utilisées dans les
domaines de l’automobile et de l’aéronautique, les produits BIM regroupent toutes les
informations liées à la construction autour d’une maquette numérique : géométrie de
construction, données spatiales, données géographiques et sur les équipements installés (Howell
& Batcheler, 2005).
L’objectif d’un tel outil est d’assurer la conservation des données relatives à la construction et au
bâtiment pendant toute la durée de vie de celui-ci, mais aussi d’éviter la perte de données entre
les différentes phases d’exécution du projet de construction. Comparé à des outils CAD, le BIM
crée un stockage unique de toutes les données de construction sous un format commun.
L’utilisation de l’outil BIM permet, en outre, d’éliminer les gaspillages liés à une saisie répétée
des mêmes données géométriques par différentes parties prenantes. La répétition de saisie de
données amène des gaspillages de ressources et des possibilités d’erreurs.
L’utilisation de ce processus entend éliminer les gaspillages, autant en terme d’échéancier que de
coûts. Il permet donc de livrer les projets plus rapidement et dans des coûts plus faibles. Ce
processus, développé par Toyota sous le nom de « Material Information Flow Mapping » (Rother
& Shook, 1999), permet d’identifier les gaspillages dans un processus ainsi que leurs causes
fondamentales.
Hines et Rich (1997) identifient sept outils de cartographie de la chaîne de valeur, chacun d’entre
eux ayant ses forces et ses faiblesses lui permettant d’être plus efficace sur certains types de
gaspillage. Les sept outils peuvent être utilisés de manière indépendante ou combinée.
La cartographie de la chaîne de valeur est un outil visuel qui va permettre de classer les activités
étudiées dans les catégories : valeur ajoutée, non-valeur ajoutée et gaspillage nécessaire5.
Les outils présentés précédemment sont des éléments importants du Lean et Lean Construction.
Ils s’appuient tous sur un faisceau de bonnes pratiques traduisant une culture tournée vers
l’amélioration et la réduction des gaspillages. Cette partie présente plusieurs éléments relevant de
ces bonnes pratiques mises en place ou reliées à l’objet d’étude.
La mise en place d’un flux tiré doit permettre de réaliser un travail uniquement pour pouvoir
transmettre celui-ci à l’étape suivante (Ballard & Howell, 2003b). Cette règle permet d'éliminer
les gaspillages de sur-production, l’un des sept types de gaspillage identifié par la philosophie
Lean.
Différents outils présentés précédemment permettent d’identifier les gaspillages se trouvant dans
l’organisation. Les ressources de l’organisation étant limitée, il est important de prioriser ceux-ci
pour les éliminer le plus efficacement possible (Arleroth & Kristensson, 2011).
5
Voir Tableau 1.1
36
1. Importance : suivant les objectifs et le degré de satisfaction de l’entreprise, avec une forte
importance pour les aspects SSE
Une autre méthode consiste à comparer les gaspillages au travers d’une analyse de Pareto et ainsi
trouver ceux qui ont le plus d’impact sur l’organisation (Gupta, 2004).
La mise en place du principe d’ingénierie concurrente a pour objectif de transformer le travail des
ingénieurs pour le faire passer de l’état de « solution » à celui de « proposition » (Green & May,
2005; Jørgensen & Emmitt, 2009; Winch, 2006). Dans ce contexte, les différentes propositions
de conceptions qui sont proposées sont discutées par les parties prenantes pour identifier la
meilleure. Les critères de choix comprennent le respect des objectifs du client, les capacités et
méthodes d’exécution de la construction, les impacts SSE, les coûts et les délais.
De cette manière, les équipes de construction sont impliquées dans les choix de conception.
La gestion visuelle dans le cadre du Lean Construction est une pratique qui est commune à
plusieurs outils. On trouve notamment dans ces outils le 5S, la cartographie des flux de valeur, le
Centre d’Information et la gestion de processus.
Cette technique permet de mettre en place un outil de gestion simple et compréhensible par tous
qui nécessite peu d’interprétation. Il s’agit de la première étape d’implantation de la philosophie
Lean dans une organisation.
37
Le succès est le but ultime de tout projet (Chan, 2004). Dans le secteur de la construction, cette
idée simple à appréhender est difficile à formaliser, le succès d’un projet de construction restant
conceptuel et sujet à plusieurs définitions et interprétations.
La littérature scientifique travaille à construire la définition qui permettrait de donner les critères
de succès d’un projet. Munns & Bjeirmi (1996) définissent un projet comme la réalisation d’un
objectif spécifique par l’utilisation de ressources dans différentes tâches et activités. Chan (2004)
donne une définition qu’il a construit à partir de la littérature scientifique :
« criteria of project success can be defined as the set of principles or standards by which
favourable outcomes can be completed within a set specification »(Chan, 2004; p7)
Dans le cadre d’exécution de projet au sein de l’économie générale, Freeman & Beale (1992)
montrent que de nombreux gestionnaires de projet appréhendent la question du succès comme un
élément intuitif. En ce sens, la littérature scientifique traitant du sujet arrive à la conclusion que le
concept de succès n’a pas le même sens pour toutes les parties prenantes d’un projet.
En plus de présenter des variations entre les personnes sur les critères de réussite, Parfitt &
Sanvido (1993) montrent que cette variation est aussi fonction du type d’activité économique
dont il est question. La position dans un projet (clients, firme d’ingénierie, sous-traitant,
directeur, gestionnaire, ingénieur, …) donne à chacun de ces groupes des critères et objectifs
propres pour le succès du projet).
Depuis la fin des années 1990, la perception et les critères de réussite de projet ont beaucoup
évolués. On trouve à la base les trois critères : coût, qualité, délais (Navarre & Schaan, 1988) que
Atkinson (1999) a appelé le « Triangle de fer ».
38
Ces critères analysés dans toutes les publications scientifiques ont commencé à partager leur
espace avec des indicateurs dits « moins scientifiques » :
La définition des critères de réussite d’un projet nécessite ensuite les outils de suivi de ces
critères. Les Indicateurs Clés de Performance (ICP) ou Key Performance Indicator (KPI) sont
une réponse pour disposer d’information claire et lisible.
La construction de ces indicateurs nécessite de trouver l’ensemble cohérant qui donnera la bonne
image. Shenhar & Dvir (1997) proposent une division en quatre classes (Figure 1.8) des critères à
transformer en indicateurs. Ces quatre classes se construisent sur une échelle temporelle en
présentant des critères pouvant être évalués au cours du projet (Efficience du projet), rapidement
à la suite de celui-ci (Impact sur le client), dans un délai de 1 à 2 ans après le projet (Succès
commercial) et dans le long terme soit 4 ou 5 ans après le projet (Préparation du futur).
Succès du projet
Figure 1.8 - Critères de succès de projet selon Shenhar & Dvir (1997) (traduit et adapté)
39
Atkinson (1999) propose lui aussi une structure temporelle (Figure 1.9) en définissant une
première période avec l’exécution du projet et une seconde période post-projet. La période post-
projet permettant de regrouper un éventail d’informations plus large, celle-ci est scindé en deux
catégories traitant pour la première du système et pour la seconde des aspects économiques et
commerciaux.
Succès du projet
Figure 1.9 - Critères de succès de projet selon Atkinson (1999) (traduit et adapté)
Une autre vision est proposée par les auteurs Lim et Mohamed (1999) qui attendent d’un projet
qu’il atteigne des critères de réussite autant dans ses aspects de réalisation et d’exécution terrain
que dans une dimension globale (Figure 1.10). Ils ont construit à cet effet une structure micro-
macro permettant d’avoir une vue sur plusieurs niveaux d’exécution.
Succès du projet
Figure 1.10 - Critères de succès de projet selon Lim et Mohamed (1999) (traduit et adapté)
40
Chan (2004) propose un résumé (Figure 1.11) des différents critères de succès d’un projet
énoncés dans la littérature :
Qualité
de
réalisa>on
Temps
Succès
d'un
Rentabilité
projet
Santé
Sécurité
économique
du
Environnement
projet
Figure 1.11 - Synthèse des grands critères de succès d'un projet de construction (traduit et adapté
de Chan (2004))
L’analyse des critères de réussite donne les premières directions permettant de construire les
indicateurs de succès d’un projet. Dans cette partie, ne seront traités que les indicateurs de
performance relatifs à l’exécution du projet.
• Les ICP doivent être focalisés sur les aspects critiques du projet, des intrants ou des
extrants
41
• Il est important de limiter le nombre d’ICP suivis pour ne pas disperser les efforts, créer
de la confusion et utiliser trop de ressources à les maintenir
• Les ICP doivent être basés sur de larges échantillons pour être robustes face aux
variations spécifiques au projet. Collin avance même l’intérêt de développer des
indicateurs génériques pour les projets
• Les ICP doivent être acceptés et compris de toutes les personnes qui les utilisent
• Les ICP doivent être dynamiques pour pouvoir suivre l’organisation qu’ils mesurent
• La représentation graphique des ICP doit être simple, lisible et permettre une mise à jour
aisée
La construction d’ICP tels que définis dans les standards de l’entreprise RTA est en accord
globalement en accord avec les propositions de Collin (2002). Néanmoins, le choix de RTA de
définir un ICP comme un outil de travail servant à déclencher une prise d’action dans le cas où un
processus sort de sa zone de contrôle a apporté une vision différente sur quelques points :
• Pour être accepté et compris de tous, l’indicateur doit être construit par l’équipe qui
l’utilise. Il ne doit pas être générique
• Un ICP doit, par des niveaux prédéfinis, déclencher automatiquement des prises d’action
(dans le cadre un processus formel)
La Figure 1.12 ci-dessous présente les zones de contrôle et d’influence d’une équipe ou d’un
individu. Il est possible d’identifier comme première zone : la « zone de contrôle », à l’intérieur
de laquelle les possibilités d’agir sont totales ou presque. Un peu plus éloignée, se trouve la
« zone d’influence » dans laquelle le groupe ou l’individu a la possibilité d’agir mais ne peut
assurer un résultat et ensuite la « zone hors de contrôle » dans laquelle il est impossible d’agir.
42
Figure 1.12 - Définition de la zone de contrôle d'un processus par une équipe
Les ICP référants à la « zone de contrôle » seront traités et utilisés en interne. Les ICP associés à
la zone d’influence nécessiteront, au besoin, la collaboration avec d’autres groupes pour mener
des actions et les ICP traitant de la «zone hors-contrôle» réclameront une action plus élevée dans
la hiérarchie. Le KPI Working Group (2000) dans son rapport de janvier 2010 au ministère de la
construction britannique a défini les sept groupes principaux d’ICP (Figure 1.13) qui sont utilisés
pour suivre un processus de construction :
Sa>sfac>on
clients
Changement
Qualité
issus
du
client
Performances
Coût
financières
Temps
Groupe
Santé
Sécurité
d'ICP
Figure 1.13 - Sept groupes d'ICP définis par le KPI Working Group (2000) (traduit et adapté)
Les ICP rentrant dans chacun de ces sept groupes doivent permettre de suivre les performances
du projet au cours de toutes les phases d’exécution de celui-ci. Le KPI Working Group identifie
les phases suivantes (Figure 1.14) dans l’exécution d’un projet :
43
l’investissement
Fin de mise en
Fin de vie du
construction
Engager la
Engager
service
projet
Planifica>on
et
Mise
en
Temps
de
vie
Construc>on
service
du
projet
concep>on
Figure 1.14 - Phase de projet selon le KPI Working Group (2000) (traduit et adapté)
L’utilisation d’ICP dans le cadre d’un projet de construction sert à suivre un processus en
constante évolution. Dans ces conditions, il est important d’avoir un indicateur qui permettra de
prendre les actions nécessaires avant que le processus n’ait trop dévié ou causé des retards sur le
chemin critique. Ce fait nous amène à considérer deux types d’indicateurs :
• Indicateur Réactif (ne sera capable de détecter le problème qu’une fois celui-ci apparu)
Pour construire des ICP proactifs, l’expérience des équipes de travail de RTA les amène à
chercher des indicateurs basés sur les 6 branches du diagramme d’analyse de processus
d’Ishikama (Figure 1.15).
1.5 Conclusion
Amené sous le nom de Lean Construction, cette culture de travail conserve les grands principes
du Lean Production en s’adaptant aux particularités du secteur de la construction. Moins mature
que sont aîné, le Lean Construction grandit avec la multiplication des recherches qui lui sont
consacrées et avec la diffusion de ses principes.
45
Le projet de recherche présenté dans ce mémoire prend comme objet d’étude l’implantation
d’une nouvelle culture de travail dans un environnement professionnel particulier : la réalisation
d’un projet de construction industriel majeur. De façon à donner au lecteur de cette étude toutes
les clés pour la comprendre, ce chapitre décrit le contexte dans lequel se déroule la recherche.
En premier lieu sera présentée l’entreprise Rio Tinto Alcan, client et maître d’œuvre du projet
AP60. Le Projet AP60 sera alors détaillé, puis viendront ensuite la description du projet de
déploiement Lean Construction dans le projet AP60.
Rio Tinto Alcan représente la branche aluminium du groupe minier anglo-australien Rio Tinto.
Actuellement premier acteur mondial de la production d’aluminium, ce groupe se démarque aussi
par sa technologie de pointe dont il fait la démonstration notamment au travers du projet AP60.
Alcan créé en 1902, devenu Rio Tinto Alcan en 2007, a obtenu cette position de leader sur le
marché mondial de l’aluminium par une politique de rachat d’autres grands producteurs
d’aluminium.
Après une centaine d’années d’innovation et de développement de ses activités dans le monde
entier, Alcan tente en 1999 une fusion avec le groupe suisse Algroup et l’entreprise française
Pechiney. Cette fusion sera bloquée par la Commission Européenne pour éviter une situation de
monopole. C’est l’année suivante qu’Alcan rachètera Algroup et en 2003 qu’il achètera Pechiney.
En 2007, lors d’une tentative d’OPA du groupe producteur d’aluminium américain Alcoa, Alcan
accepte une contre OPA de la part du groupe minier Rio Tinto. De cette acquisition naîtra le
groupe Rio Tinto Alcan qui devient le premier producteur d’aluminium dans le monde. Les
principaux concurrents actuels de Rio Tinto Alcan sont le groupe américain Alcoa et le groupe
russe Rusal.
Rio Tinto Alcan tire actuellement une part très importante de sa production d’aluminium de
première fusion dans la région du Saguenay/Lac-St-Jean au Québec (1 067 000 Tonne en 2011
pour une production totale de 1 866 000 Tonne en Amérique du Nord en 2011 (Rio Tinto Alcan,
2012)).
46
Le Projet AP60 de Rio Tinto Alcan doit permettre de démontrer la technologie éponyme à travers
la construction d’une usine pilote (Figure 2.1). Cette construction est une construction neuve sans
utilisation ou rénovation d’installation préexistante à l’exception d’un bâtiment administratif.
Figure 2.1 - Vue aérienne du chantier de construction AP60 le 20/05/2012 (source RTA)
La première phase du projet, qui se déroule jusqu’à décembre 2012, a pour objectif la livraison
sécuritaire d’un démonstrateur de la technologie AP60 au coût minimum dans un échéancier
réaliste avec une première sortie de métal prévue durant le premier trimestre 2013.
47
Cette phase sera possiblement suivie d’une seconde destinée à étendre les capacités de production
de métal de la part de Rio Tinto Alcan une fois que la technologie AP60 sera stabilisée.
La réalisation de ce projet aura mobilisé jusqu’à 1 300 ouvriers simultanément sur le chantier de
construction et 194 personnes travaillant pour la firme d’ingénierie (SLH) et le maître d’œuvre
(RTA), l’ensemble dans un environnement sécuritaire avec une fréquence de blessures
consignables de 0,4 par 200 000 heures travaillées.
6
Source : Guide de presse Rio Tinto Alcan (2012)
48
2.2.2 Déroulement
La réalisation du projet AP60 de RTA s’est effectuée de 2006 à fin 2012 pour permettre la
production du premier métal au cours du 1er trimestre 2013. La Figure 2.2 ci-dessous retrace les
étapes majeures du projet.
Un délai d’exécution aussi long est assez rare pour ce type de projet industriel. Dans le cas du
projet AP60, il est imputable à un ralentissement du projet en 2009-2010 pendant la crise
financière.
49
2.2.3 Technologie
La technologie AP60 est une technologie Aluminium Pechiney (AP) basée sur le procédé Hall-
Héroult (AP Technology, 2012) utilisé depuis plus de 100 ans dans la production industrielle
d’aluminium.
Un consortium constitué par les entreprises SNC-Lavalin et Hatch (SLH) a été choisi comme
firme d’ingénierie dans le cadre de la réalisation de ce projet de construction qui présente de très
grands défis techniques ainsi que des attentes très élevées en termes de propriété intellectuelle et
de qualité.
Rio Tinto Alcan, par la voie de ses directeurs et gestionnaires, montre un très grand attachement
aux valeurs de Santé, Sécurité, Environnement (SSE).
Cet engagement à protéger la santé et la sécurité des personnes (personnel, visiteurs et riverains)
et la qualité de l’environnement dans lequel ils évoluent sont matérialisés par des chartes, des
procédures et des formations.
Cette philosophie est communiquée dès l’arrivée sur le projet par le slogan sans compromis qui
se retrouve sur de très nombreuses affiches :
L’idée centrale de cette philosophie se concentre sur l’identification des risques dans le but de les
supprimer ou, si cela n’est pas possible, de s’en protéger en ayant identifié toutes les sources
probables de danger.
Tous ces efforts ont permis de réduire le taux d’accident à une fréquence de 0,47 par 200 000h
travaillées et à constater l’absence de blessure grave. Ces résultats sont à comparer à ceux des
précédents projets de construction de RTA8 dans la région du Saguenay-Lac Saint Jean avec
lesquels on peut observer une division par 50 de la fréquence d’accident depuis la fin des
années 90.
Ce travail et ces résultats traduisent le leadership mis en place autour de ces thèmes au sein du
projet qui s’est matérialisé par un changement de culture des parties prenantes de la construction
de l’usine. L’atteinte de ce résultat doit beaucoup à l’intégration de ces nouveaux standards SSE
dès le début du projet.
Le projet AP60 est mené dans le cadre d’un contrat IAGC9 entre RTA et SLH. Cet élément
juridique est à l’origine de toute l’« infrastructure de gestion » du projet. Dans cette partie, le
7
Source : service SSE RTA du Projet AP60
8
Voir ANNEXE F - Évolution des performances SSE dans les constructions des nouvelles installations RTA au
Saguenay-Lac Saint Jean
9
IACG : Ingénierie, Approvisionnement et Gestion de la Construction (EPCM en anglais pour Engineering,
Procurement and Construction Management)
51
chercheur définit le contrat de type IAGC et pendant le contrat de type IAC10. Il présente ensuite
l’influence de cet élément juridique sur l’étude.
Dans le cadre de ce mémoire lié au projet AP60 de RTA, les termes « maître d’œuvre » et
« client » font référence à Rio Tinto Alcan représenté par son équipe travaillant au Projet AP60.
Les termes « firme d’ingénierie » et « représentant du maître d’œuvre » représentent quant à eux
le consortium SNC-Lavalin/Hatch.
Pour la construction de son usine pilote AP60, Rio Tinto Alcan a choisi d’assurer la
responsabilité de l’exécution. Pour cela, une firme d’ingénierie a été engagée, chargée d’assurer
la réalisation de l’ingénierie du projet, les approvisionnements et d’agir en tant que représentant
du maître d’œuvre (RTA) sur le chantier. Toutes ces activités restent sous la supervision de RTA
qui conserve la responsabilité et la maîtrise du projet.
Ce type d’organisation, dans le cadre d’un projet, se matérialise par un contrat de type IAGC
entre le maître d’œuvre et la firme d’ingénierie qu’il choisit. Ce type de contrat permet au maître
d’œuvre, de conserver le contrôle sur l’ingénierie et la construction de son produit (usine pilote
AP60), mais il en assure aussi les risques en termes financier, de faisabilité ainsi que le coût de
toutes les modifications qu’il souhaite effectuer au cours du projet et la responsabilité
d’exécution des travaux (incluant les aspects SSE) ; tout en confiant à une compagnie spécialisée
dans l’ingénierie et la construction (Consortium SLH) la charge de le représenter et de mettre à sa
disposition l’expérience et le personnel nécessaires à la réalisation ce type de projet.
L’exécution de la construction est réalisée par des entrepreneurs sous contrat avec le maître
d’œuvre gérés par l’intermédiaire de son représentant SLH. Ceux-ci emploient eux-mêmes leurs
ouvriers auprès des syndicats de la construction.
Du fait de l’organisation du projet, le bureau du projet situé à Montréal accueille et fait travailler
sur le même lieu des personnels des firmes d’ingénierie Hatch et SNC-Lavalin (SLH) et du
maître d’œuvre Rio Tinto Alcan.
10
IAC : Ingénierie, Approvisionnement et Construction (EPC en anglais pour Engineering, Procurement and
Construction)
52
Le Tableau 2.1 ci-dessous donne une partie des éléments permettant de choisir entre un contrat de
type IAGC et un contrat de type IAC pour la réalisation d’un projet de construction.
nouvelles méthodes de travail, réussir à convaincre son représentant sur le chantier de participer à
cette expérimentation alors que celle-ci ne fait pas partie du PCMO négocié dans le cadre du
contrat IAGC entre le maître d’œuvre et son représentant.
L’engagement de la firme d’ingénierie, au côté du maître d’œuvre, apparaît comme l’un des
éléments nécessaire à la réussite de cette expérimentation compte tenu du rôle central que celui-ci
occupe dans le Projet et de l’importance de ses équipes comparée aux équipes du client (rapport
de l’ordre de 1 à 10). Une implantation réussie avec la firme d’ingénierie aura un impact
bénéfique sur la totalité des entrepreneurs agissant sur le chantier.
La participation au projet d’une firme d’ingénierie représentant le maître d’œuvre sous la forme
d’un consortium de deux entreprises différentes constitue un élément facilitant, cette organisation
étant synonyme d’une culture d’entreprise moins forte et d’une plus grande ouverture dans les
modes de gestion employés.
Le Projet AP60 est une organisation temporaire multiple très dynamique, de grande envergure et
faisant travailler ensemble un nombre important d’acteurs, tant au niveau entreprise (maître
d’œuvre, firme d’ingénierie, entrepreneurs, sous-traitants, fournisseurs,…) que salariés (jusqu’à
1600 personnes simultanément – tout corps de travail confondu).
Un projet de construction technique tel que le projet AP60 se déroule en plusieurs phases inter-
reliées (Figure 2.3) mais présentant des défis, des équipes et des modes de fonctionnement
différents.
Chacune de ces phases présente ses propres particularités en termes d’approche du projet, du site
de construction, des résolutions de problèmes et de la culture.
54
L’écart le plus important se trouve entre les phases de Construction et de VPO. La vision du
chantier passe du concept de travaux gérés par discipline et contrat à l’activité de test à vide
55
d’équipements. Ces équipements, pour leur construction et mise en place, portent sur plusieurs
disciplines de construction et plusieurs contrats (un équipement va nécessiter des travaux
électriques et hydrauliques pour l’alimenter, mécaniques pour le mettre en place, civils pour
réaliser son support d’installation,…). Pour pouvoir débuter la phase de VPO d’un équipement,
chaque activité de construction d’un équipement doit être complétée. La différence de mode de
suivi des activités complique fortement le suivi du processus de transfert progressif des systèmes
entre les deux phases de projet.
La connexion entre les phases de VPO et d’Opération présente les mêmes caractéristiques
qu’entre les phases d’Ingénierie et Construction. Le passage d’une vision d’équipements à celle
de systèmes n’est pas très éloigné. Le principal besoin réside dans la coordination entre les deux
équipes ainsi que la compréhension, de la part de l’équipe VPO, de la stratégie d’exécution
répondant aux exigences de l’équipe d’Opération.
Le cadre du projet amène aussi la collaboration entre différentes entreprises et différents acteurs.
On retrouve sur le Projet AP60 les groupes de travail suivants : (liste non exhaustive)
• Entrepreneurs
• Sous-traitants
• Fournisseurs
Il est possible d’observer un projet de construction tel que la réalisation d’une usine sous la forme
d’une matrice à trois dimensions (Figure 2.4) dans laquelle on trouve les différentes phases du
projet, les différents acteurs du projet et les différentes dimensions du projet (coût, qualité,
délais, …).
56
Le projet dans lequel ce déroule cette étude utilise une organisation matricielle (Figure 2.5). Les
deux dimensions exprimées dans cette matrice sont :
• Les fonctions :
Les fonctions regroupent toutes les activités du projet depuis celles attachées aux
phases du projet jusqu’aux fonctions support (Approvisionnement, SSE, Contrôle
de projet, Contrôle de document).
À chacune de ces fonctions est attachée une direction qui a pour principale mission
d’assurer le respect des procédures de travail détaillées dans le PCMO.
• Les secteurs :
Santé, Sécurité
Environement
Contrôle de projet
Contrôle de
document
Ingénierie
Construction
Vérification Pré-
Opérationnelle
Opération
Électrolyse
Secteur 1
TRANSFERT DE LIVARBLES
Gestion des activités en secteur
Haute Tension
TRANSFERT DE LIVARBLES
Moyenne Tension
Suivant le fonctionnement du contrat IAGC, les postes de direction des différents secteurs et
fonctions sont doublés. Chaque direction est assurée par un membre de l’équipe du maître
d’œuvre et un membre de l’équipe du représentant du maître d’œuvre. Cette organisation crée des
postes « miroirs » au niveau desquels sont partagées les responsabilités entre le maître d’œuvre et
son représentant.
L’introduction et l’adaptation de la philosophie Lean au Projet AP60 sous une forme Lean
Construction est un processus discontinu faisant intervenir de nombreuses parties prenantes.
L’évolution de l’introduction de cette philosophie et l’implantation des outils permettant de la
58
Le déploiement de la culture Lean et la mise en place du Lean Construction sur les chantiers de
construction constituent un objectif stratégique à long terme, un changement de culture ne
pouvant s’effectuer en une seule année. Suivant cette idée, l’implantation au Projet AP60 de
Centres d’Information constitue la première étape. Cette recherche se concentre principalement
sur la réalisation et sur l’étude de cette première étape.
La Direction RTA du Projet AP60 a fait le choix de la philosophie Lean et des outils qui y sont
associés pour construire l’expérimentation de nouvelles méthodes de travail dans le secteur de la
construction et de la gestion de projet. À cette fin, la direction du projet a constitué une équipe
dédiée à ce projet. La philosophie Lean et les outils qui en découlent ont été implantés à la fois
avec l’équipe chargée d’opérer la future usine et avec celle de construction sur le chantier.
L’implantation de la philosophie Lean au chantier de construction AP60 est arrivée à une période
particulière du projet (Figure 2.6). Pour assurer son succès, une attention particulière a été portée
au périmètre donné à ce déploiement et à l’acceptation de ce projet par les équipes. Cette
attention s’est portée particulièrement sur la prise en compte des différences qui existent entre le
secteur industriel et le secteur de la construction. Ces différences ont influencé grandement la
stratégie d’implantation et les outils choisis.
59
Ingénierie
2006 Août 2012
Construction
2007 Octobre 2012
VPO
Juin 2012 Novembre 2012
Mise en Service
Août 2012 Février 2012
Opération
Février 2012
Janvier 2012 Décembre 2012
Date de démarrage Date de fin du
du déploiement Lean déploiement Lean
Dans le cadre d’un projet, qui a, par essence, une durée limitée, il est très important de définir
l’objectif de la mission concernée. Durant le temps du projet, les nouveaux outils, ou la nouvelle
culture de travail, doivent être déployés, atteindre leur phase de maturité et permettre d’obtenir
des gains.
Dans le cas du Projet AP60, la nouvelle culture de travail qui est souhaitée consiste à développer
un flux tiré (Figure 2.7) entre les différentes phases restantes du projet. Ce flux tiré doit
construire et être visible par l’intermédiaire de Centres d’Information qui sont déployés à cet
effet.
Figure 2.7 - Mise en place d'un flux tiré entre différentes phases du projet
60
L’utilisation d’un Centre d’Information et son déploiement résultent d’un processus d’équipe qui
vient chercher la réflexion et l’engagement de chacun des membres. Lors de cette phase, l’équipe
est amenée à se questionner sur son processus de travail, ses tenants et aboutissants ainsi que le
moyen de les garder en contrôle et les faire évoluer.
C’est à l’occasion de cet exercice que l’équipe va construire le Centre d’Information qui
représente son processus. Il est donc possible de visualiser le processus de l’équipe, d’en suivre
les éléments clés et de les identifier. Cette vitrine fait aussi apparaitre les éléments discordants du
processus pour amener leur alignement.
Cette caractéristique de mise en valeur des éléments à aligner est particulièrement intéressante
dans le cadre d’un projet de construction où les processus sont extrêmement dynamiques et où il
existe de nombreuses «zones grises», principalement dans le processus de transfert de propriété
des équipements et systèmes de l’usine de l’équipe Construction vers l’équipe VPO puis l’équipe
d’Opération.
Une fois le processus mis au clair et présenté sur le Centre d’Information, les indicateurs et
mécanismes de suivi de contrôle du processus doivent permettre de prendre action et adresser les
problèmes et irritants soulevés. Ce processus doit aussi fonctionner pour clarifier et adresser les
« zones grises » identifiées comme devant être alignées.
La prise d’action intervient comme suite logique du suivi de processus. Il est important de
travailler sur la sensibilité que va avoir le Centre d’Information pour déclencher la génération
d’une action. Celui-ci doit être assez sensible pour ne pas laisser déraper le processus mais ne
doit pas « sonner l’alerte » pour une fluctuation passagère.
La définition de ces limites constitue une difficulté dans le cadre d’un projet de Construction où
le processus de travail est très dynamique et les variations très importantes, contrairement au
secteur industriel où le temps d’opération d’un équipement (plusieurs années) pour une tâche
particulière permet de rechercher l’optimisation et la réduction des variations.
61
L’information qui permettant de générer des actions doit tenir compte du niveau de contrôle du
processus détenu par l’équipe utilisant le Centre d’Information. Il est aussi important de s’assurer
que le déclenchement d’une prise d’action se réalise à un endroit unique pour un problème donné
pour s’assurer que la même analyse de problème et la prise d’actions ne soient réalisés deux fois.
Les systèmes d’information actuelle donnent accès à un très grand nombre d’informations mais,
paradoxalement, cette abondance éloigne ou complique l’accès à l’information essentielle qui
indique si le processus se trouve en contrôle ou non.
Cette information doit permettre de communiquer à toutes les personnes intéressées les
informations qui leur permettent de réaliser leur tâche ou qui au contraire les obligent à modifier
leur plan de travail. Cette communication doit se construire sous une forme bidirectionnelle à
l’intérieur de la rencontre autour du Centre d’Information. La parole est donnée à chacune des
personnes présentes pour leur permettre de s’exprimer sur l’information qui est sous leur
responsabilité et expliquer ce qu’elle représente.
D’un point de vue global, la communication se trouve dirigée pour permettre à celle-ci de
s’exercer horizontalement entre les différents silos (Construction, VPO, Opération) par
l’intermédiaire de la mise en place du flux tiré et verticalement par la mise en place d’un Centre
d’Information de direction pour le projet dans sa globalité (où sont présents les Directeurs de
chacune des équipes du chantier). Il est alors possible d’escalader les craintes ou problèmes
nécessitant une intervention de la haute direction par l’intermédiaire de ce canal de
communication.
La résolution d’un problème doit se faire au travers d’un processus robuste qui s’assure que les
solutions trouvées pour adresser les causes fondamentales sont appropriées et fonctionnent. Cette
assurance peut uniquement se trouver dans un suivi des contres mesures mises en place. La
réalisation de ce suivi est visible dans le Centre d’Information.
Le cycle de Deming (Figure 2.8) présente le processus que doit suivre une résolution de
problème. De façon à assurer la conservation des gains dans le temps, il est impératif de mettre en
place des standards de travail issus des résolutions de problème.
Pl
an
ir
Ag
ifi
er
Vé
ire
r
Fa
ifi
er
Standard
Le plan d’action du déploiement Lean doit permettre d’organiser le flux tiré (voir Figure 2.9 )
souhaité entre les différentes équipes et mettre en place la structure des Centres d’Information du
projet AP60 qui servira de support pour la création, l’implantation, le suivi et la fermeture du flux
tiré.
63
Le plan d’action mis en œuvre (voir Figure 2.10) pour réaliser le déploiement de la culture Lean
sur le chantier du Projet AP60 suit le processus d’évolution par phase du projet. Premier
changement de phase à avoir lieu dans le cadre de ce déploiement, le transfert des équipements de
l’équipe de Construction vers l’équipe de VPO est le premier à être pris en charge. La mise en
place du flux tiré et la construction du Centre d’Information servant d’interface entre les deux
équipes doivent être exécutées avant le début des activités de réception mécanique (activités qui
terminent le processus de transfert entre l’équipe Construction et l’équipe VPO).
Cette condition a pour but de régler l’organisation des échanges entre les deux équipes alors que
la charge de travail de l’équipe en aval commence à arriver. Il est alors possible de réserver du
temps pour ce type d’activité. Une fois à pleine charge de travail, le système de gestion doit être
robuste et ne plus nécessiter que des aménagements mineurs.
Dans un second temps, vient la construction du flux tiré pour la gestion des transferts depuis
l’équipe de VPO vers l’équipe d’Opération. Il s’agit de la même équipe que celle qui sera chargée
de mettre en service l’usine. Cette mise en place présentera une différence notoire, à savoir que
l’équipe d’Opération, formée depuis plusieurs mois, utilise déjà un Centre d’Information pour
gérer ses activités. La visibilité du flux tiré ne se fera pas dans un nouvel espace de coordination
mais à l’intérieur du Centre d’Information que l’équipe VPO a bâti pour gérer ses activités. Des
représentants de l’équipe d’Opération viendront partager dans ce forum leurs exigences vis à vis
du processus de transfert et récupérer les informations leur permettant de conduire les activités de
l’équipe d’Opération.
64
Le déploiement d’un Centre d’Information Niveau 0 vient compléter l’architecture par le haut
pour permettre la remontée des craintes hors de la zone de contrôle des équipes et créer un forum
rassemblant toutes les phases du projet.
Figure 2.10 - Plan d'action du déploiement de la philosophie Lean et des Centres d'Information
Le déploiement d’une nouvelle culture de travail dans une organisation requiert la participation
de toutes les parties prenantes. Dans le contexte du Projet AP60, les rôles suivants ont été
endossés par des personnes travaillant à la construction de l’Aluminerie Arvida – Centre
Technologique AP60. Chacun de ces rôles et positionnements permet d’assurer une continuité du
leadership, de l’effort et de l’implication au travers de l’organisation.
2.3.4.1 Sponsor
Le rôle de sponsor du déploiement d’outils issus de la philosophie Lean Construction est assuré
par le Directeur Général du Projet travaillant pour Rio Tinto Alcan.
65
2.3.4.2 Facilitateur
Le facilitateur Lean désigné aussi sous l’appellation d’agent de changement est chargé par le
sponsor de la mise en place de son projet. Il a la charge de définir plus précisément et de mettre
en œuvre, en lien avec les parties prenantes, les changements et nouvelles méthodes de travail.
Dans le cas de l’étude menée sous la forme d’une recherche-intervention, le facilitateur Lean
occupe également le rôle de chercheur chargé de réaliser l’étude de l’implantation des outils Lean
Construction au chantier de construction et d’analyser la réussite et les impacts de cette
expérience.
Le facilitateur Lean aura pour mission d’assurer un support à toutes les parties prenantes de
l’implantation des outils Lean au sein du projet. Il apportera les connaissances, les outils, l’aide
matérielle et veillera à accompagner le changement mais ne pourra en aucun cas se substituer aux
utilisateurs ou aux propriétaires dans la mise en place, l’utilisation et le maintien des outils.
2.3.4.3 Propriétaire
Les directeurs construction du maître d’œuvre et de RTA, les directeurs VPO du maitre d’œuvre
et de RTA, les directeurs de projet et les directeurs SSE vont être les propriétaires des outils et
des changements mis en place au cours de cette expérimentation.
Leur positionnement hiérarchique leur donne une position centrale dans l’organisation du Projet
et les place en première ligne pour conduire avec eux leurs équipes.
Dans le cadre du déploiement des outils issus de la philosophie Lean, ils auront pour mission de
construire le cadre d’utilisation des outils et d’assurer leur intégration dans les processus
existants. Cette mission sera réalisée avec le support du facilitateur Lean.
66
Dans le cadre de l’implantation des Centres d’Information au Projet AP60, le facilitateur Lean est
conseillé par deux ressources, les experts techniques :
Les experts techniques n’ont pas vocation à se retrouver en première ligne de l’implantation des
outils issus de la philosophie Lean. Ceux-ci apporteront un support en coulisse pour influencer la
stratégie de déploiement et les choix réalisés. Ils pourront aussi intervenir ponctuellement dans le
cadre d’interaction avec les différentes parties prenantes ou évaluer le travail accompli et le
niveau de maturité des outils et changement mis en place.
L’équipe d’Opération a une position particulière dans le cadre de cette étude car elle représente le
client final du projet de construction de l’aluminerie. Cette position lui confère un intérêt
important dans le déploiement des Centres d’Information au sein du projet de construction. Ces
Centres d’Information serviront à créer les interfaces permettant à l’équipe d’Opération de gérer
la réception de l’usine avec l’équipe de projet.
Dans ce cadre, l’équipe d’Opération ne peut être considérée comme utilisateur. Elle possède sa
propre architecture de Centre d’Information et participe à cette expérimentation uniquement par
le Centre d’Information de Direction du Projet AP60.
2.3.4.6 Utilisateurs
Les utilisateurs représentent toutes les autres parties prenantes utilisant les outils issus de la
philosophie Lean implantés dans le cadre de ce projet.
67
Ces personnes sont réparties en trois groupes suivant le type d’activité sur le chantier :
• Groupe Construction
• Groupe VPO
• Groupe SSE
Ces trois groupes ont été choisis pour participer à l’implantation des Centres d’Information car ils
permettent de représenter les différentes phases critiques du projet au moment de l’implantation.
Suivant la stratégie choisie pour le déploiement des Centres d’Information, les personnes
présentes dans ces groupes se trouvent à haut niveau dans le processus de gestion de projet. Ce
choix permet d’avoir un impact maximal sur l’organisation et mettre en place un leadership par
l’exemplarité.
Les fonctions représentées dans ces groupes sont en grande majorité celles de chefs de secteur et
de responsables de processus. Leur présence permet de réunir les principales parties prenantes du
processus de transfert des équipements entre les différentes phases du projet.
L’analyse de ce déploiement n’est pas possible sans développer et comprendre tout le chemin
réalisé en amont par les équipes de travail.
La volonté d’assurer un leadership efficace dans les domaines où il possible de réaliser des gains
substantiels en termes de performance est une marque d’excellence du Projet AP60 et de sa
direction. Certaines évolutions nécessitent de travailler à un changement de culture chez les
parties prenantes du projet. On trouve comme exemple, couronné de succès, le changement de
culture dans le domaine de la Santé, Sécurité, Environnement qui a été opéré sur le Projet AP60.
68
L’expérimentation d’outils issus de la philosophie Lean a amené très tôt la nécessité d’intégrer
des agents de changement chargés de faciliter et conduire cette initiative.
La direction du projet a réalisé un tour d’horizon des différentes pratiques existant déjà sur
d’autres projets majeurs. Cette recherche a permis de visualiser ce qui peut être attendu de
l’implantation de la philosophie Lean Construction.
Il s’agit aussi de percevoir comment peut se traduire le déploiement d’outils Lean Construction
dans le cadre d’un projet majeur et imaginer leur intégration au Projet AP60. Ces visites ont eu
lieu dans plusieurs pays différents au sein de projets dans lesquels RTA n’est pas forcément le
client. Ces projets sont effectués dans le cas de contrat IAGC et IAC.
Le résultat de ce tour d’horizon est la découverte de bonnes pratiques et d’idées originales pour
mener le déploiement d’outils Lean Construction. Cette organisation a permis de rassurer
plusieurs parties prenantes en offrant la vision d’un résultat à atteindre et la matérialisation d’un
concept abstrait et nouveau pour le secteur de la construction.
La proposition de l’entreprise de conseil, présentée sous la forme d’un atelier, n’a finalement pas
été retenue. Celle-ci proposait un nouveau schéma complet pour la gestion du projet entièrement
tourné autour des principes du « Lean Project Delivery ». Ce modèle d’implantation ne
correspondait pas aux attentes, car il nécessitait de modifier les structures organisationnelles du
projet et, par là, les modes de gestion du projet. Ce type d’approche amenait à une obligation de
révision du PCMO, solution incompatible avec un projet rendu au stade de construction dans de
bonnes conditions.
La volonté d’introduire la philosophie Lean Construction et les outils qui y sont associés a
toujours eu pour limite de ne pas modifier les structures de gestion de projet décrites dans le
69
PCMO11. Cette condition a pour but de ne pas déstabiliser la conduite du projet et les équipes de
travail par l’introduction d’importants changements non totalement maîtrisés.
Figure 2.11 - Exemple de tableau de bord mis en place pour l'équipe ingénierie (source RTA)
11
Voir ANNEXE C - Définition du stage (été 2011) au projet ap60
70
La volonté de travailler avec des outils issus de la philosophie Lean Construction n’est pas restée
concentrée sur le bureau de projet. L’utilisation sur le chantier des outils Lean Construction a
débuté très tôt. Cette première mise en place s’est réalisée sans la participation de ressource
dédiée à cette tâche. Ce fait a créé une confusion chez certaines parties prenantes sur les
concepts. La philosophie Lean a été éclipsée au bénéfice des seuls outils. La conséquence a été
d’attribuer le terme « Lean » comme nom des rencontres de début de quart.
Dans ces conditions, le terme « Lean » ne renvoie plus à la philosophie mais à un seul outil de
celle-ci.
Durant l’été 2011 a eu lieu la première tentative d’implantation d’outils Lean sur le chantier de
construction du Projet AP60 avec la présence et la participation de personnes ressource dédiées à
cette tâche. Cette initiative, décidée par la haute direction du Projet, intervient dans une phase
intense de construction et de travaux de génie civil.
L’objectif du maître d’œuvre, par la voie de ses directeurs de projet, est alors de travailler avec
les trois principaux entrepreneurs du chantier à la gestion et à l’amélioration des performances.
Dans cette initiative, le représentant du maître d’œuvre, SLH, doit jouer son rôle d’intermédiaire
et transmettre la volonté de RTA aux entrepreneurs.
L’intention de cette stratégie est de faire entrer des outils et une philosophie d’amélioration
continue sur le terrain, là où ils trouveront une application immédiate et remonteront ensuite vers
les niveaux de gestion du maître d’œuvre et de son représentant.
Cette période a duré environ trois mois, avec une présence non-permanente sur le site des
ressources dédiées à l’implantation Lean – 2 à 4 jours par semaine -.
• Création d’ICP
À la fin de l’été 2011, la mission a permis, malgré le peu de résultats directs observables,
d’évaluer le potentiel et le niveau de maturité des équipes de construction face au déploiement
d’outils issus de la philosophie Lean. Les observations effectuées ont permis d’amorcer la
réflexion sur une nouvelle tentative d’introduction de la culture de travail Lean sur le chantier de
construction.
La Figure 2.12, un extrait de la conclusion du rapport de stage rédigé à la fin de l’été 2011 sur
l’introduction d’initiative Lean avec les principaux entrepreneurs du chantier, donne une base
pour les réflexions sur une nouvelle stratégie12.
Cette adaptation de la stratégie se fait au niveau de la haute direction du projet avec les
principales parties prenantes du futur déploiement. Les principaux axes pris en compte dans le
cas de cette réflexion sont :
12
Voir ANNEXE E - Présentation de la stratégie lean
72
d’ingénierie et le maître d’œuvre qui mettront en œuvre ce nouveau type d’outil appelé Centre
d’Information par Rio Tinto Alcan.
La totalité du mandat donné en début de stage n’a pas pu être achevé pour diverses résistances
aux changements de la part de différents acteurs de l’implantation, une planification trop
optimiste et la découverte de certaines barrières au succès que je n’ai pas réussi à surmonter
avant l’échéance de fin de stage.
Néanmoins, un travail de fond a pu être mené pour sensibiliser un grand nombre de personnes
et d’organisations à l’existence de principes d’amélioration continue en chantier et leur donner
à voir les résultats que l’on peut espérer une fois l’implantation de ces pratiques complétées.
Les quelques points ci-dessous donnent des exemples précis de ces barrières au succès :
Figure 2.12 - Extrait du rapport de stage effectué au sein du Projet AP60 durant l'été 2011
(Merle, 2011, p. 30)
La crédibilité de la nouvelle stratégie se base sur le choix de concentrer l’énergie dans le transfert
des lots de réception mécanique entre les équipes de Construction et de VPO. Cette activité
présente un aspect stratégique important.
73
Pour apporter de la visibilité et de la structuration, il est décidé d’utiliser les standards de Centre
d’Information développés par RTA pour ses installations industrielles. Cette utilisation de
standards se fera avec toute la liberté et les aménagements nécessaires à leur intégration dans le
cadre d’un projet d’envergure.
Ce choix permet de mettre en œuvre un outil de travail similaire pour les équipes de construction
et d’opération et, dans ce cadre, maximiser le travail sur les flux entre les équipes.
Avec ces critères, le point choisi pour mettre en place un Centre d’Information est l’organisation
des transferts de lots de réception mécanique entre les groupes Construction et VPO. Ce choix
apporte l’avantage de ne pas entraîner ou réclamer de modifications des procédures d’exécution
du projet (PCMO) qui reste à construire pour les activités de transfert. Cette décision permet
aussi de mettre en place un Centre d’Information pour suivre une activité qui n’est pas encore
commencée, laissant plus de disponibilité à l’équipe pour la construction de l’outil.
13
Voir ANNEXE E - Présentation de la stratégie lean
74
Ce nouveau Centre d’Information doit permettre la gestion des activités propres à l’équipe VPO,
dans un premier temps la gestion de ses activités de préparation, puis l’exécution des activités de
VPO en elles mêmes. Le déploiement de ce Centre d’Information a rapidement rencontré l’intérêt
de l’équipe de VPO.
14
Voir Figure 2.9 - Structure des Centres d'Information au Projet AP60
75
2.4 Conclusion
Le contexte de cette d’étude présente de nombreux défis pour l’étudiant-chercheur qui doit
trouver sa place dans l’organisation de se projet de construction de grande envergure. Il convient,
pour l’étudiant-chercheur, qui a l’opportunité de conduire cette recherche directement sur le
terrain, d’agir dans le cadre de la méthodologie de recherche qu’il développé. Cette méthodologie
de recherche doit tenir compte des nombreuses parties prenantes, de l’histoire reliée a cette étude
(précédente expérience) et de l’aspect très dynamique de l’organisation dans laquelle il se trouve.
La méthodologie de recherche développée par le chercheur et les objectifs de cette étude seront
présentés dans le chapitre 3.
76
La recherche présentée dans ce mémoire a été menée selon les principes d’une recherche-
intervention. Le chercheur-intervenant a réalisé une immersion dans le projet de construction
décrit précédemment pour y mener la mission d’introduction de la philosophie Lean Construction
et l’implantation d’outils issus de cette philosophie. Plus précisément, l’étudiant chercheur a
assuré le rôle de facilitateur (agent de changement) en accord avec les principaux dirigeants du
projet et il a conduit le déploiement des Centres d’Information et autres outils Lean, tout en
assurant son rôle de chercheur en fonction des objectifs pré-établis.
Pour présenter les objectifs et la méthodologie de recherche, ce chapitre débutera en détaillant les
objectifs qui ont conduit à cette étude. Il se poursuivra par la présentation de la méthode de
recherche-intervention et de son application dans le cas de ce mémoire. Le sujet de la recherche
intervention nous amènera ensuite à aborder la validité des résultats d’une étude menée sous la
forme d’une recherche-intervention, pour enfin présenter les méthodes de recueil d’information
choisies pour cette étude.
En prenant appui sur les concepts de Lean, sur le Lean Construction développé par la littérature
scientifique, sur l’expérience par l’entreprise RTA en Lean dans ses propres installations, et en
s’adaptant à la réalité du terrain, cette étude analyse tous les aspects d’un déploiement de la
philosophie Lean Construction.
L’étude menée doit permettre, si les résultats sont concluants, de reproduire, ce déploiement en
tenant compte des leçons apprises.
77
Bien que définis en fonction des besoins de Rio Tinto Alcan, les objectifs spécifiques ci-dessus
représentent un grand intérêt sur le plan académique.
Cette recherche est novatrice dans la mesure où le chercheur s’est personnellement impliqué dans
le projet ; il a travaillé à l’implantation de la philosophie Lean Construction au côté des différents
acteurs, au sein même du chantier de construction. Ce mode de recherche permet d’avoir une
description inédite des mécanismes à l’œuvre à l’intérieure de l’organisation et des
comportements des acteurs. Les méthodes de déploiement sont alors développées beaucoup plus
finement par rapport à des méthodes de recherche plus macroscopique.
La Figure 3.1 ci-après illustre la démarche de recherche suivie, les activités et les différentes
étapes de celle-ci dans chacun des trois volets cités précédemment.
78
La mission donnée au chercheur implique qu’il soit l’acteur des changements, qu’il participe à la
transformation de l’objet d’étude. Le chercheur assure dans le même temps l’observation des
changements qu’il déclenche. La recherche-intervention constitue donc «une méthodologie
collaborative et transformative» (Cappelletti, 2010) et s’inscrit dans la pensée d’auteurs comme
Lewin (1946) et plus récemment, de Van de Ven (2006).
Le choix d’agir et mener cette étude sous la forme d’une recherche-intervention apparaît après la
période de l’été 201115. Dans ces conditions, l’action a précédé l’activité de recherche.
L’intégration de la composante de recherche est arrivée avec le besoin de documenter et analyser
l’expérience d’intégration du Lean-Construction. La feuille de route16 décrivant le cadre de son
action illustre parfaitement cet aspect et la participation à la transformation de son objet d’étude.
Cette activité de transformation de l’objet d’étude constitue un des principes de la recherche-
intervention (Lewin, 1946; Van de Ven & Johnson, 2006).
Le fait de regrouper les activités de conduite de changement et d’analyse dans un mandat unique
de recherche-intervention permet d’assurer la cohérence des deux actions. Du point de vue de
l’accès à la connaissance et à la récupération de celle-ci, la recherche-intervention donne un accès
direct au chercheur à la fois sur le terrain et aux personnes.
Du point de vue interne à l’organisation, le choix d’agir sous la forme d’une recherche-
intervention est un élément facilitant dans la conduite du changement. Souvent critiquée pour sa
frontière parfois floue avec l’activité de consultation, la recherche-intervention permet de réduire
15
Voir 2.3.5.3 - Définition de la stratégie 2012
16
Voir ANNEXE D - Définition de la mission sur le projet ap60
81
la pression sur les équipes destinataires du changement. L’action d’un consultant externe, en
dehors du fait qu’elle présente plus de rigidité, est ressentie comme étant plus intrusive par les
équipes citées. Par sa position, l’intervenant-chercheur doit travailler avec les destinataires pour
supporter ceux-ci dans le changement. Ce rôle évolue tout au long du projet, passant
d’orchestrateur et meneur du changement dans les premières phases d’implantation, à personne
ressource lors de l’utilisation réelle des Centres d’Information.
Le chercheur-intervenant et les praticiens interagissent entre eux pour arriver à trouver le point où
la théorie rejoindra la pratique et développera une connaissance utilisable par le chercheur et le
praticien.
La recherche de terrain apporte un début de solution quant à la problématique de l’écart que l’on
constate entre les connaissances théoriques et les connaissances pratiques. Cette question est
traitée par Ven de Ven & Johnson (2006) qui en identifient deux approches distinctes et en
proposent une troisième.
La première, défendue par Rogers (1995) et Beer (2001), observe l’écart entre les connaissances
théoriques et les connaissances pratiques comme une discontinuité dans le processus de transfert
de connaissance. La seconde développe l’idée de la complémentarité de ces deux types de
connaissance.
82
Une approche innovante proposée par Van de Ven et Jonhson (2006) essaie d’appréhender les
écarts entre théorie et pratique comme « un problème de production de connaissance »
(Cappelletti, 2010). Cette approche suppose un travail en étroite collaboration entre le chercheur
et les acteurs du processus étudié pour valider les observations.
L’un des objectifs de l’étude décrite dans ce mémoire est de réduire l’écart existant entre les
connaissances pratiques et théoriques. Dans le cas traité dans ce mémoire, l’approche défendue
par Beer (2001) et Rogers (1995), la discontinuité dans le processus de transfert de connaissance
apparaît très intéressante car elle met l’accent sur l’une des différences existantes entre les
secteurs de l’industrie et de la construction. Chaque projet de construction constitue un élément
unique, réalisé par une équipe unique, réunie pour ce projet et qui se sépare à la fin de celui-ci. La
discontinuité du processus naturel de transmission et d’apprentissage qui transforme
connaissance pratique en connaissance théorique trouve ici un point d’application.
Cette première mise en évidence amène à considérer la dernière approche proposée par
Van de Ven et Jonhson (2006) évoquant un « problème de production de connaissance ». Or,
précédemment, nous avons mis en avant la justification de l’approche de Rogers (1995) et
Beer (2001) par la discontinuité du processus de construction, cette discontinuité vient aussi
empêcher le processus de production de connaissance. Cette connaissance non-produite n’est
donc pas formalisé et ne profite pas à l’organisation. Les connaissances produites le sont sous
forme d’expériences pour chaque membre de l’équipe et restent au stade de connaissances
pratiques.
Tableau 3.1.
Recherche-Action Recherche-Intervention
Comme démontré précédemment, cette étude se déroule au sein de l’objet d’étude avec une
mission de transformation de celui-ci par l’intervenant-chercheur. Cette recherche se définit
comme transformative.
En suivant la pensée de Cappelletti (2010), la mise en avant d’un degré de contextualisation fort
du changement avec un haut degré de formalisation de celui-ci nous place dans le cas d’une
recherche-intervention.
84
Définition des termes, dans le cas du changement, par Cappelletti (2010) page 7 :
• Formalisation : « degré de formalisation qui indique à quel degré les changements réalisés
ou prévus par le chercheur sont formellement définis »
Localisé sur deux sites différents, le projet de construction dispose d’un bureau de projet sur
Montréal et d’un autre sur le site de construction de la future aluminerie à Jonquière. Ces deux
sites sont distants de 500km.
Durant la période d’été 2011, lors de l’arrivée des premières ressources dédiées à l’implantation
d’outils Lean Construction, les personnes-ressources étaient basées au bureau de projet de
Montréal et partageaient leur temps entre les deux sites sur un rythme de 2 jours/3 jours.
Dans le cadre de la recherche-intervention lancée en Janvier 2012 pour mettre en place des
Centres d’Information au chantier de construction, le choix a été de localiser la personne-
ressource à plein temps sur le site du chantier.
Cette décision permet d’assurer un support permanant aux équipes utilisatrices des Centres
d’Information et de montrer l’importance accordée par la haute direction du projet dans le
déploiement des Centres d’ Information.
85
La structure organisationnelle d’un projet de construction tel que le Projet AP60 est complexe.
Cela génère une organisation multiple, temporaire et en perpétuelle évolution, telle qu’évoquée
dans la sous-partie : 2.3.1 - Contexte de l’implantation de la philosophie Lean au chantier AP60.
Dans ce contexte, comment situer un facilitateur Lean chargé de travailler avec à la fois les
équipes de Construction et VPO, composées de personnels venant de RTA et SLH ?
Le choix a été fait de placer le facilitateur Lean dans l’équipe de Construction, sous la
responsabilité du Directeur de Construction SLH sans le positionner dans l’échelle hiérarchique.
Cette position lui garantit une très grande liberté d’action et un accès facilité à toutes les strates
de gestion de projet.
Cette étude portant à la fois sur un outil de gestion mais aussi sur des comportements et une
culture, la validité des résultats de recherche constitue un élément complexe. La validité des
résultats de recherche constitue, en ce sens, un défi important dans le contexte de la recherche
présentée dans ce mémoire.
Van de Ven & Johnson (2006) et Buono & Savall (2007) mettent en avant la qualité, la validité et
la rigueur scientifique de la recherche comme critère de légitimité d’une étude menée sous la
forme d’une recherche-intervention.
• Validité : il s’appuie sur les travaux de Lee (1999) qui exprime la validité sous les
axes interne, externe et écologique. La validité interne pose la question de l’adéquation
entre les processus de recherche et les hypothèses posées, la validité externe informe sur
la possibilité de généraliser les résultats de la recherche, la validité écologique assure la
prise en compte et la description des caractéristiques du milieu dans lequel se déroule
l’étude.
La validité des résultats d’une recherche est un élément incontournable de toute étude
scientifique. Le cas de la recherche-intervention amène plusieurs critiques concernant la validité
des résultats qu’elle apporte. Les deux axes de critique ressortant de la littérature scientifique
traitant du sujet sont (Plane & Pérez, 2000) :
Dans le cadre d’une recherche-intervention menée directement sur le terrain, il faut se prémunir
contre une possible « inversion des rôles » dans laquelle le terrain viendrait influencer le
chercheur au point d’interférer dans les résultats de la recherche. Cette « contamination » du
chercheur peut venir de différents aspects du milieu tels que des pressions politiques ou
simplement la culture interne de l’organisation étudiée. Par ailleurs, l’intervenant-chercheur est
soumis aux pressions politiques de l’environnement de travail dans lequel il évolue et, en
particulier, par le premier lien qui le relie à son objet d’étude : le contrat de travail avec son
employeur ou le contrat de recherche dans le cas d’une recherche académique.
Cet état de contrainte du chercheur-intervenant envers son employeur est défini par Schön (1983)
quand il utilise le terme de « praticien réflexif » pour nommer celui-ci ou encore par Girin (1986)
qui utilise le terme de « savant ordinaire ». L’un des effets que le lien contractuel entre le
chercheur-intervenant et son objet d’étude peut amener est la recherche d’opportunités. Cet
87
opportunisme est un moyen pour accéder au terrain et en gagner la confiance (Buchanan et al.,
1988).
Dans ce cadre, Weick (1995) nous présente comment le chercheur-intervenant doit construire par
la négociation, non pas son indépendance car celle-ci serait illusoire, mais son cahier des charges
avec les décideurs de son environnement de travail. Cette négociation doit être régulière, elle doit
couvrir les domaines de l’architecture, du planning, du périmètre, des résultats de recherche
comme des moyens. C’est de cette façon que le chercheur-intervenant pourra préserver son sujet
de recherche, construire et entretenir la confiance avec son terrain de recherche.
Le second piège dans lequel le chercheur-intervenant peut se laisser entraîner est la contagion par
les structures mentales de l’environnement dans lequel se trouve son objet d’étude (Buono &
Savall, 2007). Ces structures mentales correspondent pour Schein (1984) et dans le langage
courant à la culture d’entreprise que l’on retrouve dans toutes les organisations.
Dans le cas du travail de recherche-intervention mené, l’influence du terrain est très présente.
Elle est même nécessaire, car elle permet de construire l’intervention. Cette influence du terrain
permet de choisir l’approche de l’intervenant-chercheur qui lui permettra de rentrer en contact
avec le milieu d’étude (Buchanan et al., 1988). L’intervention réalisée s’adapte au milieu d’un
chantier de construction au Québec et s’intègre dans sa culture.
Cette influence sur l’intervenant-chercheur doit cesser lors du travail d’analyse. Weick (1995)
propose pour cela la négociation, entre les sponsors et l’intervenant chercheur, du cahier des
charges de la recherche-intervention. Cette option a été choisie et se matérialise par une charte17
négociée et approuvée par les sponsors du projet, l’intervenant chercheur et le directeur de
recherche. Cette charte traite les sujets du « Contexte », des « Objectifs », de la « Philosophie »,
du « Plan d’action » et des « Résultats escomptés ».
Dans le but de séparer, sur le plan contractuel, les deux activités de recherche et d’intervention, le
chercheur-intervenant est employé par le sponsor à temps partiel pour effectuer l’intervention. Il
est, en parallèle, chargé de la mission d’analyse de cette intervention dans un contrat de recherche
entre le sponsor et l’institution universitaire dont dépend l’intervenant-chercheur.
Le risque évoqué par Buono (2007) sous la forme d’une contagion du chercheur par le milieu et
notamment les structures mentales de l’environnement qui l’entourent renvoie au second
paragraphe de la sous-partie 3.4.2. Ce mal nécessaire est l’unique solution pour comprendre
l’objet d’étude depuis l’intérieur. Les effets de cette influence sont traités par un retour fréquent
au corpus de la littérature scientifique et l’observation de l’objet d’étude avec des acteurs hors de
son environnement.
17
Voir ANNEXE D - Définition de la mission sur le projet ap60
89
Dans le cas de l’objet d’étude de ce mémoire, les possibilités de dérive vers une activité de
consultation sont à prendre en compte avec beaucoup de sérieux. Cet aspect est d’autant plus
important que des consultants ont été approchés dans le cadre de ce projet18.
Le rôle de l’intervenant-chercheur est plus large, même si la frontière avec le consultant est
parfois étroite. Celui-ci va utiliser les outils de la consultation mais à des fins de technologie de
recherche (Plane & Pérez, 2000). Les contraintes pesant sur le chercheur-intervenant (politique,
culturel, temps ou même carrière) présentent le risque de dévier son travail vers une trop grande
dimension pratique au détriment de la partie théorique.
La différence finale, développée par Plane (2000), entre les activités de consultation et de
recherche-intervention se trouve être la production d’une connaissance, par l’intermédiaire d’une
contribution à la littérature scientifique.
L’intervention menée par l’intervenant-chercheur utilise, les outils de la consultation pour réussir
le déploiement de Centres d’Information au sein du projet de construction. Mais si ces
technologies de la consultation sont utilisées, c’est avant tout pour être capable de produire une
connaissance, objectif final de la recherche.
C’est à ce point que l’on peut déterminer la frontière entre consultation et travail de recherche
dans le cas de cette étude. La participation d’un intervenant-chercheur a été préférée à celle de
professionnels de la consultation, car la connaissance n’existe pas encore. Le processus de
recherche-intervention joue ici son rôle pour permettre aux parties prenantes et à l’intervenant-
chercheur de venir créer une connaissance.
Par là, le processus même de la recherche intervention vient empêcher la dérive vers un travail de
consultation.
18
Voir 2.3.5.1 - Début de l’implantation Lean
90
La présence du chercheur, au quotidien, sur le lieu de travail, pour supporter les équipes dans le
déploiement des nouveaux outils de travail relatifs à la culture Lean lui permet de rester connecté
au terrain et de gagner en compréhension sur le mode de travail et sur le comportement des
équipes. Il conserve aussi un contact direct avec la matière de travail de ses équipes (le chantier
de construction) et est mieux à même de comprendre, au-delà des simples descriptions, où se
situe matériellement l’action.
Ce fonctionnement positionne le chercheur directement au cœur de son objet d’étude. Dans le cas
d’une recherche où les personnes et les comportements constituent des éléments centraux, cette
position du chercheur le rapproche de l’information. Il est en mesure d’appréhender un très
grand nombre de situations ou d’évènements, parfois anodins, lui permettant de comprendre les
bouleversements engendrés. Cette position permet aussi de supprimer des intermédiaires dans le
recueil de l’information et de réduire ainsi la subjectivité inhérente aux propos recueillis par
l’intermédiaire d’autres personnes.
La présence continue sur le terrain, sur une durée longue de un an, apporte la possibilité à
l’intervenant-chercheur d’appréhender un cas de recherche dans sa globalité et prenant en compte
l’évolution et non seulement une situation. Le chercheur-intervenant devient aussi capable de
confronter ses observations personnelles aux retours d’information plus formels.
91
Enfin, la présence de l’intervenant-chercheur sur le terrain permet de faire évoluer le regard des
parties prenantes sur le chercheur pour le considérer comme une personne appartenant à leur
équipe et capable de leur apporter des connaissances.
La récupération de l’information constitue l’un des défis de cette étude. Dans la même ligne que
la validité de la recherche-intervention, la validité des relevés d’information à l’origine des
analyses de ce travail de recherche doit être assurée.
Pour être la plus exhaustive possible, la récupération de l’information dans le cadre de cette étude
va utiliser plusieurs types de source. On trouve, utilisées dans cette étude, les différentes sources
d’informations suivantes :
Pour être capable de recueillir les informations relatives de toutes ces sources, différentes
méthodologies de récupération de l’information sont utilisées. Elles ont pour but de s’adapter à
chaque point de vue et de récupérer le type d’information souhaité qui sera ensuite analysé et
traité.
Ce support constitue la base du relevé d’informations du facilitateur Lean sur le déploiement des
Centres d’Information.
Les personnes regroupées sous la dénomination d’experts techniques sont des personnes
référence dans les domaines du Lean, du Lean Construction et de la Construction. Les experts
apportent des points de vue et des observations très intéressants et permettent d’interpréter et
comprendre les évènements, réactions et modes de fonctionnements des acteurs d’un projet de
construction.
Grâce aux visites et rapports de visite de personnes ayant découvert la mise en place des Centres
d’Information au Projet AP60, un nombre important de points relatifs aux différences
observables avec les autres projets de construction de grande envergure du groupe Rio Tinto ont
été décelés.
La présence de visiteurs extérieurs au projet AP60 apporte un point de vue novateur sur la mise
en place des Centres d’Information ; elle est aussi une occasion donnée aux différentes parties
93
Ces entretiens entre visiteurs et parties prenantes de l’implantation des Centres d’Information
sont ensuite intégrés anonymement au rapport de visite. Il s’agit d’une source d’information très
précise car elle supprime le problème de réserve par rapport à l’intervenant-chercheur que peut
engendrer la recherche-intervention.
Les parties prenantes sont invitées, au cours du mois du juillet, à exprimer leur point de vue en
répondant à un questionnaire19. Pour assurer la plus grande objectivité possible dans les réponses
des parties prenantes, les données sont récupérées de manière anonyme et confidentielle.
• Objectifs
• Attentes
• Craintes
• Méthodes
19
Voir ANNEXE G - Questionnaire de recueil d’impression
94
Attentes&:&Quels&étaient&vos&attentes&initiales&pour&le¢re&d’information?&
Évaluez&vos&attentes&en&cochant&la&réponse&la&plus&appropriée,&selon& Était& Était&
FAIBLEMENT& Était&MOYENNEMENT& FORTEMEN
vous.&Certaines&réponses&sont&proposées,&vous&avez&la&possibilité&d’en& N/A&
une& une&ATTENTE& T&une&
ajouter.& ATTENTE& ATTENTE&
& & 1& 2& 3& 4& 5&
Créer& de& la& communication& entre& les& groupes& (cas& du& Centre& d’& Info& &
Construction?VPO)& & & & & &
Améliorer&la&communication& & & & & & &
Aligner&les&objectifs&et&méthodes&de&suivi& & & & & & &
Mise&en&lumière&des&éléments&critiques& & & & & & &
Partage&de&l’information& & & & & & &
Identification&des&problèmes,&irritants&et&menaces& & & & & & &
Rencontres&de&courte&durée& & & & & & &
Processus&formel&de&suivi&des&indicateurs&choisis& & & & & & &
Accompagner&la&résolution&de&problèmes& & & & & & &
Une réponse libre est toutefois attendue sur quelques questions, ceci afin de permettre aux parties
prenantes de faire part d’un avis plus personnel et de communiquer leur ressenti par rapport aux
changements apportés par le Lean.
Le choix des variables et des items proposés pour chacune d’elle résulte d’une série d’entretiens
réalisés avec les participants clés du déploiement des Centres d’Information.
Ces entretiens, réalisés en préalable à la construction des questionnaires, avec les acteurs clés du
processus d’implantation représentent le second moyen de recueil d’informations auprès des
parties prenantes. Les acteurs concernés par ces entretiens sont les directeurs de projet, les
directeurs de construction et les directeurs VPO. Dans toutes ces rencontres, les personnels du
maître d’œuvre et de son représentant qui occupent ces fonctions sont présents.
95
Trente personnes ayant répondu au questionnaire, la taille de l’échantillon permet tout juste de
supposer la normalité de l’échantillon des réponses. Pour être capable de réaliser des tests
statistiques sur des sous-échantillons de l’enquête et ne pas nécessiter l’hypothèse de normalité
des variables, il est choisi de n’utiliser que des tests statistiques non paramétriques pour leur
robustesse dans le traitement des petits échantillons.
Chacun des tests statistiques réalisés dans le cadre de cette étude utilisera un risque d’erreur de
10% ou moins. De façon spécifique, quatre types de tests statistiques ont été utilisés.
Test de Wilcoxon
Ce test permet de comparer des moyennes appariées deux à deux pour mettre en évidence un
écart significatif entre les réponses de deux items différents d’une même variable. L’utilisation de
ce test est réalisée avec l’échantillon complet des répondants.
Ce test sera effectué systématiquement pour chacun des items d’une même variable et ce pour
chaque variable, à l’exception d’« Objectif » qui ne contient qu’un item. Le test de Wilcoxon
permet de faire ressortir des groupes d’items qui ont un écart significatif avec les autres groupes
d’items d’une même variable. Pour définir un groupe, il ne faut aucun écart significatif entre les
items qui le composent et, que chaque item qui compose le groupe présente un écart significatif
avec tous les autres items à l’extérieur du groupe.
Un seuil p<0,10 permet de mettre en évidence un écart significatif entre deux items d’une même
variable. Les résultats du test de Wilcoxon pour chacun des items et chacune des variables, à
l’exception d’« Objectifs » qui ne contient qu’un item, sont disponibles en ANNEXE H.
Test de Kruskal-Wallis
Ce test permet d’effectuer une comparaison globale de moyenne entre les trois groupes visés
(Construction, VPO et SSE) concernant chacun des items des cinq variables. Le résultat présenté
nous permet de déterminer s’il existe un écart significatif entre les moyennes des trois groupes.
96
Les résultats du test de Kruskal-Wallis pour chacun des items de chacune des variables sont
disponibles en ANNEXE I.
Test de Mann-Whitney
Un seuil de p<0,10 indique qu’il existe un écart significatif entre les moyennes des deux groupes
comparés. Les résultats du test de Mann-Whitney pour chacun des items et chacune des variables
sont disponibles en ANNEXE I.
À l’inverse des deux tests précédents, le test de concordance de Kendall permet de comparer la
priorisation des éléments ou des caractéristiques pour chacune des variables entre les trois
groupes. La variable « Objectifs » ne contenant qu’un seul item, le test de concordance de
Kendall n’est pas appliqué.
Un seuil de p<0,10 signifie qu’il semble y avoir un accord entre les trois groupes. Donc, chacun
des groupes priorise les éléments de la même façon. Les résultats du test de concordance de
Kendall appliqués à chacune des variables, excepté « Objectifs », sont disponibles en
ANNEXE J.
20
La correction de Bonferroni est une méthode pour corriger le seuil de significativité dans le cas de comparaison
multiple, une comparaison triple dans le cas qui nous intéresse. Le résultat de la correction de Bonferroni se traduit
par une augmentation du seuil de significativité qui suit l’augmentation d’éléments entrant dans la comparaison.
97
3.7 Conclusion
Les résultats présentés dans le chapitre 4 sont issus de cette méthodologie de recherche qui
implique la présence permanente du chercheur dans l’organisation étudiée. Ces résultats seront
ensuite analysés dans le chapitre 5.
98
Le cheminement proposé au lecteur dans cette partie suit la progression de la recherche. Il débute
en analysant le processus d’implantation du concept Lean Construction au chantier AP60 ; cette
partie développera ensuite le cas des parties prenantes selon les observations de l’intervenant-
chercheur. L’analyse se poursuivra en traitant des outils mis en place dans le cadre de la
démarche d’implantation du Lean Construction. Elle se terminera par l’interprétation des
résultats obtenus suite à la consultation des parties prenantes par l’intermédiaire d’un
questionnaire.
Cette partie, traitant du processus de déploiement utilisé, analyse dans un premier temps la
manière dont cette recherche-intervention s’est intégrée au projet de construction. Dans un
second temps, cette partie décrit et analyse le processus de gestion du changement mis en place.
Le changement, suivant l’approche systémique utilisée par Rio Tinto Alcan pour la gestion de
changement, est placé à l’intersection de trois sphères représentant des dimensions de
l’organisation : (voir Figure 4.1)
i. Système opérationnel :
La totalité des modes de gestion, des méthodes d’attribution des objectifs et de définition
des priorités de l’organisation est rassemblée dans cette dimension de l’organisation.
Infrastructure
de gestion
Système
Opérationnel
Mentalité et
comportements
Figure 4.1 - Illustration de l'approche systémique (adaptée de Rio Tinto Alcan (2010))
100
Dans le cadre de cette étude, le mandat tel qu’il est présenté dans l’ANNEXE D pose une règle au
déploiement du Lean Construction au sein du projet AP60, la non modification des structures
organisationnelles du projet.
Cette exigence prend tout son sens avec le contexte dans lequel se trouve le Projet AP60 au début
de la phase de déploiement. Le projet est en cours depuis environ quatre années et la phase
d’exécution est très largement engagée (voir Figure 2.6). Les structures organisationnelles sont en
place et fonctionnelles et connues de tous. Il serait imprudent de changer les modes de gestion
d’un projet de cette envergure dans sa phase d’exécution.
Un ajout à l’« Infrastructure de gestion » a été réalisé avec l’introduction d’une personne
ressource dédiée. Cet ajout significatif n’est pas de nature modifier la perception de
l’« Infrastructure de gestion ».
Cheminement du changement :
1. Dans les faits, il a été possible d’observer dans le cadre du projet de construction, une
phase où, telle que le présente la figure ci-dessus, le « Système opérationnel » a été
modifié pour intégrer des Centres d’Information. Cette évolution très visible a permis une
légère évolution des « Mentalité et comportements » de la part des parties prenantes.
1 2 3
Loin d’être l’image d’un échec, ce cheminement est la preuve que l’introduction du Lean
Construction est possible et qu’elle fonctionne. Il devient nécessaire de créer les conditions de
maintien de cette nouvelle culture de travail. La création de ces conditions passera par la mise en
place d’une « Infrastructure de gestion » conçue pour la situation d’équilibre souhaitée. Dans ce
cas, le « Système opérationnel » et l’« Infrastructure de gestion » viendront guider l’évolution de
des « Mentalité et des comportements ».
Ce schéma a déjà été réalisé dans le cadre du Projet AP60 pour créer une nouvelle culture SSE.
La direction du projet a mis en place un « Système opérationnel » très performant (outil,
formation, procédure,…) qu’elle a adossé à une « Infrastructure de gestion » orientée dans ce
sens (gestion des performances, objectifs des gestionnaires et entrepreneurs, fonctions
support,…). Ces démarches ont permis de modifier la culture SSE (Mentalité et comportement)
des personnes travaillant sur le projet de construction et d’obtenir des performances de classe
mondiale dans ce domaine.
L’introduction d’une nouvelle culture de travail au sein d’une organisation nécessite un important
travail de gestion du changement. Dans le cadre de l’introduction de la philosophie Lean,
l’objectif est avant tout l’engagement des personnes, objectif qui rejoint l’idée défendue par
Céline Bareil selon laquelle l’organisation ne change pas si les individus qui la composent ne
changent pas.
La Figure 4.3 ci-dessus illustre le milieu dans lequel se met en place un changement et les forces
en présence. La première observation se fait sur la présence de deux entités : l’organisation et
l’environnement (qui lui-même englobe l’organisation). Chacune d’elle se caractérise par ses
éléments propres. Ceux de l’organisation ont été définis au 4.1.1; ceux de l’environnement sont
l’économie, la politique, la technologie et le social.
L’influence exercée par l’environnement sur l’organisation l’oblige à mettre en place des
changements afin que l’organisation continue à répondre aux besoins de l’environnement.
103
A l’échelle du projet AP60, cette pression de l’environnement n’est pas sensible. Le projet étant
largement avancé dans sa phase d’exécution et correspondants aux budgets et échéanciers prévus,
il n’existe aucun sentiment d’urgence à modifier le fonctionnement déjà en place.
L’intérêt de la démarche est donc présenté comme une opportunité d’expérimenter de nouveaux
outils, d’apprendre à les manier et de découvrir les gains apportés, le tout dans le cadre réel de
l’exécution d’un projet.
Le processus de changement représente les étapes traversées dans la réalisation d’un changement.
Ces étapes sont visibles à la fois chez les destinataires et dans l’organisation. Ils existent de
nombreuses interprétations du changement mais deux d’entre elles retiennent l’attention. La
première, développée à l’origine pour décrire les étapes du deuil, permet de comprendre les
différentes phases par lesquelles passe un individu lorsqu’il est confronté à un changement. La
seconde, plus globale, observe la motivation et la confiance des destinataires d’un changement au
cours du temps.
La courbe (Figure 4.4) ci-dessous montre les différents états que vont traverser les destinataires
d’un changement. La manifestation de chacun de ces états peut être différente d’un individu à
l’autre mais il est important que chaque étape soit accompagnée.
Dans le cas d’un changement total, les individus traversent ces six étapes, chacun à leur rythme.
Ce schéma représente la courbe du changement dans le cas de cette étude. L’existence de ce
processus nous montre l’importance de donner du temps pour le changement et principalement
lorsque l’urgence d’avoir recours au changement n’est pas clairement établie.
Dans le cas de l’implantation d’outils Lean Construction réalisée au projet AP60, ce processus de
changement a été surtout observé avec l’équipe de construction. Il a commencé dès le début de
104
l’implantation du Lean Construction21. Pour cette équipe, l’été 201122 a représenté la période de
la fuite et de l’émotion. Progressivement est apparue la phase d’acceptation passive durant la
préparation de la stratégie 201223. Le processus s’est continué pour arriver jusqu’à l’acceptation
en fin de projet avec la reconnaissance des acquis et l’évocation d’une prochaine utilisation.
Dans cette étude, le temps très long pris par ce processus est principalement dû à l’absence de
sentiment d’urgence de mise en place du changement et au manque de vision de la situation
attendue après changement. Une gestion différente de ces deux éléments aurait pu accélérer le
processus mais elle était difficilement envisageable compte tenu du contexte et de la faible
expérience en Lean Construction de l’organisation.
Le cas de l’équipe VPO est différent. Celle-ci ne se trouve pas dans une position de changement
mais de construction. Elle ne traverse donc pas les six étapes du deuil évoquées précédemment
mais se lance vers le nouveau défi proposé, l’utilisation des outils issus de la philosophie pour
21
Voir 2.3.5.1 - Début de l’implantation Lean
22
Voir 2.3.5.2 - Période de l’été 2011
23
Voir 2.3.5.3 - Définition de la stratégie 2012
105
conduire ses activités. Ce défi est porté par les deux responsables de l’équipe qui voient dans
cette implantation une opportunité pour leur équipe.
• Visibilité : reflet d’un tournant, il se met en place une sensation d’accomplissement dans
l’organisation. Même si tous les problèmes n’ont pas disparu, les données montrent des
avancées.
Il est possible de faire un parallèle entre ce schéma et le cheminement réalisé par l’équipe de
VPO. Essentiellement les trois premières phases ont été visibles. La première correspond à la
mise en place du Centre d’Information et à son utilisation jusqu’à la fin des pré-activités VPO.
Ce tournant entraîne la seconde phase qui s’enchaîne rapidement avec la troisième. La remontée
s’effectue mais n’arrive pas jusqu’à la phase 4 à cause de l’arrivée de la période de fin de projet
et d’accélération des activités de l’équipe VPO qui réorganise ses priorités.
Cette évolution montre l’importance, dans le cadre d’un projet de durée déterminée, d’être
capable de faire cheminer l’équipe rapidement vers la phase 4 en minimisant au maximum la
phase 2. Le choix de la période l’implantation, le contexte de la mise en place et l’influence de
l’environnement (autres équipes dans le cas présent) constituent des éléments très importants
pour maintenir la confiance et la motivation, éléments moteurs de la mise en place des CI.
Le point central qui caractérise cette étude, qui lui donne son originalité et apporte une
contribution nouvelle à la littérature scientifique réside dans l’intégration complète de
l’intervenant-chercheur comme membre de l’équipe de projet. Cette place lui permet d’avoir un
regard interne sur son objet d’étude. Cette sous-partie rassemble les analyses des parties
prenantes liées aux observations directes de l’intervenant-chercheur.
107
Le déploiement d’outils d’amélioration continue et leur utilisation pour obtenir des gains dans
l’organisation nécessitent une implication et un engagement des parties prenantes. Le processus
d’introduction d’outils d’amélioration continue et de la philosophie Lean sur le chantier de
construction présenté précédemment24 nous montre l’évolution de l’engagement attendu des
parties prenantes. Il nous présente aussi l’évolution de leur implication.
L’un des premiers paramètres qui permet de mesurer l’implication des parties prenantes dans
l’utilisation des Centres d’Information se trouve dans la présence soutenue des personnes lors des
rencontres.
Dans le but d’assurer une implication et un engagement le plus important possible de toutes les
parties prenantes et une efficacité maximale pour les CI Transfert Construction-VPO et VPO, un
personnel de la firme d’ingénierie a assuré la responsabilité de l’animation du CI et son
leadership. Ce choix a permis de faire d’un outil, à l’origine choisi par le maître d’œuvre, l’outil
utilisé par son représentant. De cette façon, il a été possible de créer un engagement qu’il n’aurait
pas été possible d’obtenir de la part des membres de l’équipe de la firme d’Ingénierie.
Cette affirmation est illustrée par le cas du CI SSE dans lequel l’animation des rencontres et le
leadership de l’outil sont toujours restés dans les mains du maître d’œuvre. La conséquence fut
une implication très longue à acquérir de la part des personnels de la firme d’ingénierie, cette
implication n’étant jamais devenue totale.
24
Voir 2.3.5 - Chronologie de l’implantation Lean et 2.3 - Déploiement de la culture Lean sur le chantier du Projet
AP60
108
• La reconnaissance du travail
La philosophie Lean, dans son application, passe par un changement de culture. De la même
manière que la santé ou la sécurité ne peuvent être l’affaire du seul responsable SSE mais bien de
tous les travailleurs, la réduction des gaspillages est une action collective dans laquelle le
facilitateur Lean indique le chemin.
Cet engagement de tous doit se retrouver, dans le cas de l’utilisation de l’outil Centre
d’Information, dans une transparence la plus importante possible vis-à-vis du processus pour
exprimer les craintes, les écarts et les problèmes. Cette modification des comportements doit
s’accompagner d’une modification des modes de reconnaissance. Ceux-ci doivent être basés non
plus sur l’absence de problème remonté par les personnes mais sur la capacité de celles-ci à les
résoudre (Humeau, 2008).
L’intérêt d’une organisation ne réside pas dans la présentation d’un tableau de bord affichant
uniquement des indicateurs au vert. Un tel outil ne favorise aucune possibilité d’amélioration des
performances. Or, le principe de base de la philosophie Lean est de venir accroître les
109
performances par la réduction des gaspillages en facilitant leur mise en évidence et en permettant
leur élimination. Seuls les points de difficulté doivent être mis en valeur ; il n’est pas nécessaire
de travailler à optimiser un processus qui fonctionne bien par rapport aux autres. Il s’agit de
mettre en place une gestion par exception.
Il est possible d’identifier un facteur temps. Il n’est en effet pas imaginable de pouvoir modifier
la culture d’un groupe de professionnel en quelques mois sur un sujet aussi profond que le
fonctionnement personnel dans l’environnement professionnel. Même si le changement de
culture n’a pas eu lieu, le travail réalisé sur le sujet à permis d’influencer les comportements et
des évolutions notables ont été observées25.
Un autre élément d’importance capable de restreindre la transparence dans le partage des craintes
et problèmes réside dans la confiance que le locuteur porte à son auditoire. Il n’est jamais facile
de partager un problème quand « on ne sait pas qui va en entendre parler ». Une illustration de cet
élément freinant est observé dans le cadre des rencontres mises en place entre les équipes de
Construction et de VPO réunissant les deux secteurs du chantier. Les personnes présentes avaient
25
Voir ANNEXE K - Interaction des parties prenantes
26
Voir 1.3.1 - « Last Planner »
110
du mal à évoquer ouvertement les problèmes rencontrés devant l’autre équipe et revenaient, plus
ou moins consciemment, à l’évocation des actions réalisées plutôt qu’aux craintes.
Pour permettre l’évocation des craintes et problèmes, un important travail a été réalisé pour
transformer la rencontre en un espace de confiance27. Pour y parvenir, le nombre de personnes
assistant à la rencontre a été réduit, les deux secteurs se sont rencontrés individuellement et la
haute direction n’assistait plus aux rencontres. D’abord imaginé comme un effet positif pour
montrer son implication, la présence occasionnelle de représentants de la haute direction du
projet, mêmes passifs, avait comme effet négatif le changement de la dynamique de la rencontre
qui devenait une séance de présentation de « ce qui va bien » et empêchait l’évocation des
craintes de l’équipe.
L’utilisation du Centre d’Information de direction (niveau 0), dès sa mise en place, a montré une
plus grande facilité des utilisateurs pour évoquer les craintes. Ceci peut être expliqué par le
niveau hiérarchique plus élevé des personnes présentes. Les freins à l’évocation des craintes et
problèmes dans le cadre de ce Centre d’Information proviennent des mécanismes de remontée
des informations et des craintes depuis les autres Centres d’Information.
Tous ces éléments sont à prendre en compte pour être capable d’introduire la philosophie Lean au
sein d’une organisation dans de bonnes conditions de déploiement, ceci dans le but d’arriver à
une culture de travail dite « sans blâme » qui doit être mise en place dans l’organisation pour
s’assurer que les craintes et les problèmes soient soulevés. L’énergie collective doit ensuite être
utilisée dans la résolution de problèmes et non dans la recherche de culpabilité.
Il est à noter que la mise en place d’une culture de transparence est souvent mal acceptée car elle
ambitionne de faire partager le savoir. Dans le cas d’un projet, la compétence des ressources
humaines rassemblées pour l’exécution de celui-ci est la force de chacune des parties prenantes.
Chercher la transparence et le partage des connaissances est parfois vécu comme la volonté
d’enlever une partie de ce qui fait la valeur de chacun.
27
Voir ANNEXE K - Interaction des parties prenantes
111
Dans ces conditions, le facilitateur doit développer la stratégie28 avec les sponsors du projet et la
présenter aux différentes parties prenantes. L’objet d’étude de cette recherche a connu une
stratégie évolutive29. Cet élément a affecté le travail de communication du facilitateur et a
brouillé une partie du message à transmettre.
Dans son intégration aux équipes, le facilitateur doit être capable d’amener celles-ci à consacrer
une partie de leur temps à l’activité qu’il propose. Dans le cadre d’une activité industrielle, ce
type d’activité est aisément planifiable. Dans le cadre d’un projet de construction, une partie plus
importante du temps est passée à gérer des imprévus et des urgences. Le facilitateur doit arriver à
intégrer son activité sans perturber le processus global d’exécution du projet.
Le facilitateur doit donc choisir une période au cours de laquelle le sentiment d’urgence ressenti
par les équipes est plus faible, idéalement dans le début de l’intégration des équipes.
Dans son action, le facilitateur ne doit pas effectuer les opérations de maintien de l’outil ou gérer
son utilisation, car, dans ce cas, l’appropriation n’aurait pas lieu et aucune prise d’indépendance
de l’équipe utilisatrice ne pourrait se faire. Le facilitateur est un guide qui doit montrer le chemin.
28
Voir 2.3.3 - Plan d’action
29
Voir 2.3.5.4 - Évolution de l’envergure courant 2012
112
4.3 Outils
Le concept de Lean Construction, à l’instar du concept de Lean Production, est constitué à la fois
d’une culture de travail tournée vers l’amélioration continue et d’outils supportant cette culture de
travail en formalisant et standardisant les activités.
Cette partie analysera le niveau d’adéquation des outils mis en place au chantier AP60 en traitant
de leur processus d’implantation, de leurs performances et de l’intérêt porté par les utilisateurs
concernant les opportunités futures de leur utilisation.
Dans un premier temps, cette partie se concentrera sur le déploiement des Centres d’Information,
principal outil étudié, pour ensuite traiter les autres outils mis en place au Projet AP60.
Appliqué à la structure fonctionnelle complète du projet, le schéma retenu peut être représenté de
la manière suivante (Figure 4.6) :
113
Niveau 0
Centre
d’Information
Approvisionemet
Santé, Sécurité
Environement
Contrôle de projet
Contrôle de
document
Ingénierie
Construction
Vérification Pré-
Opérationnelle
Opération
SSE VPO
Centre Centre
d’Information d’Information
Transfert Secteur 1
Électrolyse
Secteur 1
TRANSFERT DE LIVARBLES
Gestion des activités en secteur
Centre
d’Information
Haute Tension
TRANSFERT DE LIVARBLES
Moyenne Tension
Transfert Secteur 2
Secteur 2
Centre
Coulée d’Information
TRANSFERT DE LIVARBLES
Figure 4.6 - Organisation matricielle du projet présentant les différents Centres d'Information
Chacun des Centres d’Information mis en place a suivi un processus de déploiement différent.
Chacun des processus suivis a permis d’adapter le déploiement aux équipes et de pouvoir les
supporter à la cadence qu’elles ont définie. Le tableau en ANNEXE L retrace les différents
processus de déploiement des Centres d’Information et les particularités de chacun des groupes.
Les différents mode de construction et déploiement des Centres d’Information ont permis de faire
apparaître les bonnes pratiques, les incontournables et les particularités d’utilisation de l’outil
dans un projet de construction.
Les Centres d’Information fonctionnant le mieux sont VPO et Niveau 0, le Niveau 0 est celui
ayant atteint son stade de maturité le plus rapidement. Dans ces conditions, les résultats de cette
étude favorisent la réalisation d’ateliers de mise en place rassemblant une équipe (qui peut être
réduite) et durant, au minimum, une demi-journée. Cette rencontre permettra de définir les
114
besoins et apports des participants au forum en leur permettant d’exprimer leurs craintes et leurs
besoins vis-à-vis du nouvel outil. Il est important de ne pas faire durer le processus de
déploiement sur une période trop longue pour être sûr de conserver toutes les parties prenantes
impliquées.
La durée d’utilisation de l’outil étant limitée dans le temps et la fin de l’utilisation correspondant
à la fin du projet, il est important de s’assurer que l’investissement (matériel et humain) qui est
placé dans un tel outil enregistre des retours. Pour que cela soit possible, il faut que l’outil
atteigne le plus rapidement possible sa phase de maturité et permette de trouver des gains.
Chaque morcellement du processus de mise en place d’un Centre d’Information, initiative pour
passer outre les étapes essentielles de préparation, ne conduit qu’à retarder l’arrivée à maturité de
l’outil. L’expérimentation réalisée au sein du projet AP60 a montré l’importance des gains
réalisés quand la phase de préparation est réalisée dans sa totalité et sans raccourci.
La mise en place des différents Centres d’Information s’est réalisée de bas en haut dans le cas de
ce projet. Cette méthode, issue de la stratégie choisie30, va à l’inverse de ce que l’on peut
observer dans les installations industrielles. Un développement du réseau depuis la direction de
projet offre divers avantages qu’il aurait été intéressant d’avoir dans le cas de l’expérimentation
menée :
• Débuter avec la direction lui offre la possibilité de définir les informations souhaitées
pour suivre le processus et construire la remontée d’indicateurs selon les besoins de la
direction
• Cette construction permet en outre de démarrer celle-ci le plus tôt possible. Cette
opportunité ne peut être négligée dans le cadre d’un projet de construction qui, par
30
Voir 2.3.5.3 - Définition de la stratégie 2012
115
définition, est à durée limitée. Dans ces conditions, l’introduction d’un outil doit s’assurer
que celui-ci atteigne sa maturité et procure des gains avant la fin d’un projet.
L’activité d’un projet de construction nécessite un important travail de coordination entre équipes
dans le contexte d’un environnement en constante évolution. Cette problématique n’est pas
présente dans les mêmes proportions dans le cadre d’activités industrielles.
Il est important de faire la distinction entre une rencontre de coordination et l’utilisation d’un
Centre d’Information :
• Le Centre d’Information doit permettre de suivre l’état d’un processus grâce à des
indicateurs, de faire ressortir les craintes et de déclencher des prises d’action dans les
zones de contrôle ou d’influence du groupe31
La mise en place d’un Centre d’Information traitant uniquement du processus de transfert entre
les équipes de Construction et de VPO est basée sur une volonté de mélanger les deux genres.
Cette rencontre devait à la fois servir à suivre le processus de transfert et permettre de réaliser la
coordination entre les groupes.
Le besoin de coordination des équipes n’a pu être pris en charge par l’outil Centre d’Information
et a nécessité la mise en place d’une seconde rencontre dédiée à cette activité.
31
Voir Figure 1.12 - Définition de la zone de contrôle d'un processus par une équipe
116
Dans les conditions présentées, le risque existant est de voir un Centre d’Information se
transformer en une simple rencontre de présentation de l’information et des ajustements pris lors
d’une rencontre de coordination. Il s’agit, en partie, de ce qui a pu être observé dans le cas du
Centre d’Information entre les équipes Construction et VPO où la prise d’action et l’amélioration
du processus se sont retrouvées étouffées derrière le rapport de la rencontre de coordination.
Pour les autres Centres d’Information mis en place dans le cadre du projet de construction, ce
mélange entre coordination et gestion du processus n’est pas apparu. La différence notable qu’il
existe entre ces Centres d’Information et celui de suivi du transfert de Construction vers VPO se
situe dans la composition du groupe qui utilise l’outil. Si dans tous les cas des personnels du
maître d’œuvre et de son représentant sont présents, le Centre d’Information Construction-VPO,
comme son nom l’indique, rassemble des personnes travaillant pour deux fonctions différentes.
Les Centres d’Information déployés dans le cadre du projet n’ont jamais atteint la maturité que
l’on retrouve dans leur équivalent en usine. Cet état s’explique aisément par le peu de temps
d’activité des Centres d’Information au sein du projet (de 8 à 10 mois) mais surtout par le niveau
d’exposition très faible aux problématiques d’amélioration continue des parties prenantes avant
de participer à cette expérimentation. Le chemin parcouru par tous les participants dans leur
compréhension de la philosophie Lean est considérable et l’utilisation des Centres d’Information
a apporté de nombreux gains notamment dans le suivi de processus et l’alignement et la
communication entre les fonctions.
117
La mise en place du Centre d’Information qui réunit les équipes de Construction et VPO a permis
de poser la première pierre de la communication horizontale entre ces deux équipes. Cette mise
en place passe notamment les deux activités :
Cette activité, réalisée en groupe, a pour objectif de définir les tenants et les aboutissants
du processus de travail d’une équipe pour comprendre où se trouvent les éléments
importants. Cette activité permet d’aligner l’équipe de travail sur la compréhension du
processus de travail. A partir de cette activité, il est possible déterminer les ICP
nécessaires pour suivre l’état du processus.
La création du calendrier maître permet à une équipe d’établir un plan, accepté de tous,
gérant la programmation des futures activités suivant des jalons.
Le mode de réalisation de ces deux exercices, en commun et avec une participation de tous,
éloigne le risque d’acceptation implicite susceptible d’avoir une influence négative sur le
processus de travail par la suite.
L’affichage du processus de travail et des jalons qui y sont associés sur un support visible de tous
oblige les représentants des deux équipes à s’exprimer sur les points de désaccord et à prendre
position. Cette étape, susceptible de créer des tensions, est d’une très grande importance, car elle
permet l’alignement des équipes et de tous les personnels sur les processus de travail.
Cette étape d’alignement de travail entre les deux équipes concerne autant les jalons de projet que
les processus. C’est au cours de cette activité, et notamment de celle concernant le
développement du Calendrier Maître, qu’un système de flux tiré commence à être mis en place.
Les équipes en aval du processus de projet, Opération et VPO ont, au cours de cet exercice, défini
leurs exigences basées sur les éléments mis en avant dans le FIPEC.
32
Voir ANNEXE S - FIPEC de construction DU CI VPO
33
Voir ANNEXE T - Calendrier maître utilisé sur le Centre d’Information N0
118
La négociation entre les différents acteurs a ensuite permis de construire une planification des
principales activités de transfert d’équipement vers le client final conduite selon ses besoins. Le
flux tiré de travail a ensuite amené chacune des équipes en amont à organiser son activité suivant
le plan défini.
Les Centres d’Information des équipes concernées et de la direction servent ensuite à suivre
l’exécution de ce plan ; ceux-ci deviennent les outils du flux tiré.
Au sein des Centres d’Information, des flux tirés s’organisent autour d’ICP suivant la capacité de
l’équipe en amont à livrer en temps, suivant la préparation de l’équipe en aval à recevoir les
transferts et suivant la progression des activités propres à l’équipe.
La construction des Centres d’Information a permis d’aligner les équipes entre elles sur des
processus de travail en évitant les zones grises, de mettre en place des jalons définis suivant les
besoins du client final du projet et d’assurer un forum de communication hebdomadaire pour
suivre le plan défini.
Les ICP représentent l’un des points centraux de la philosophie Lean car c’est grâce à eux que
l’on peut mesurer et suivre les performances pour ensuite améliorer celles-ci en éliminant les
gaspillages et optimisant les processus34.
Pour être efficaces, les ICP doivent coller au plus près du processus. Il convient donc de refuser
de fournir aux futurs utilisateurs de Centres d’Information un « kit » d’indicateurs prêts à
l’emploi.
La construction de ces indicateurs résulte d’un processus complet qui intègre une part de gestion
du changement permettant l’appropriation de ces nouveaux outils par les parties prenantes. Pour
les quatre Centres d’Information déployés dans le cadre du projet de construction, la méthode de
création des ICP s’est adaptée.
34
Voir 1.4.3 - Indicateurs de mesure au sein d’un projet
119
Dans le cas de ce CI, l’équipe n’a jamais souhaité réaliser une réflexion de groupe sur les
objectifs et les intentions qu’elle se fixait pour l’utilisation de cet outil. Dans ces conditions, les
ICP sont construits individuellement par chacun des participants afin de suivre les processus dont
il a la charge.
Ce mode de fonctionnement permet de créer des ICP proches de la réalité et utilisant des données
justes, mais il rend difficile la compréhension de tous les ICP par chacun des participants aux
rencontres du CI. Un autre inconvénient d’un tel fonctionnement se trouve dans l’absence de
cohérence globale des indicateurs sur un objectif clair.
Dans le cas de ce CI, une réflexion globale a permis de définir l’axe de travail et les différents
ICP souhaités par l’intermédiaire d’une analyse FIPEC. Ce type de fonctionnement permet la
cohérence des informations présentées et la construction d’ICP reflétant la réalité.
Néanmoins, l’absence de données exploitables pour certains ICP souhaités a empêché leur
création.
L’évolution du processus a amené les équipes à changer les ICP. Au lieu de développer
spécialement de nouveaux ICP pour le CI, les indicateurs mis au point pour les rapports
hebdomadaires ont été présentés sur le CI. Ce choix a complexifié les informations présentées
pour les faire passer de leurs fonctions d’ICP (servant à surveiller que le processus est sous
contrôle) vers une fonction d’information de suivi de processus ne donnant pas l’état de contrôle.
Les ICP sont orientés suivant les résultats d’une analyse FIPEC35. Le choix des indicateurs
pertinents au maintien sous contrôle du processus a été assuré. La construction des ICP a, par
contre, été réalisée par une unique personne responsable de la base de données. De cette manière,
les données disponibles ont été utilisées à leur maximum et la construction des ICP a été rapide.
35
Voir ANNEXE S - FIPEC de construction DU CI VPO
120
Mais cette méthode complique le processus d’appropriation des indicateurs par leurs utilisateurs
qui ne comprennent pas toujours ce qu’ils représentent.
Il est possible de découvrir les ICP présents sur le Centre d’Information N0 en ANNEXE R.
Le choix des ICP à utiliser dans le CI Niveau 0 s’est réalisé en groupe restreint lors de la demi-
journée consacrée à la création de celui-ci. Le processus suivi est passé par une gestion de
changement permettant d’exprimer les évolutions souhaitées par l’utilisation d’un CI, puis par
une analyse FIPEC et ensuite par la construction du Centre d’Information lui-même.
Ce mode de fonctionnement permet de combiner une forte cohérence du choix des ICP avec le
processus suivi tout en s’assurant une bonne appropriation des ICP par leur propriétaire. La
session en groupe restreint offre l’avantage d’un travail efficace et d’un forum permettant
d’exprimer en confiance les doutes et les besoins concernant le futur outil.
Ce mode de fonctionnement a permis de construire le CI dans lequel les ICP ont été le plus
rapidement fixés et sont restés les plus stables.
La revue de littérature a permis de mettre en évidence les différences existantes entre le secteur
de la construction et le secteur de la production industrielle (1.2.2 - Particularités de l’industrie de
la construction). La mise en place d’ICP reflète le caractère temporaire et évolutif des projets en
les représentant sous des formes d’indicateurs cumulatifs associés au pourcentage d’avancement
ou d’exécution d’un nombre d’activités36.
L’utilisation de ce type d’ICP est très peu compatible avec une re-planification constante des
activités en retard, cette re-planification annulant toutes apparitions de retard. L’objectif de l’ICP
est de pouvoir suivre dans le temps la tendance d’évolution du processus et de sa tenue sous
contrôle. Pour y parvenir, il faut que l’indicateur et donc la planification qui le construit soient
stables dans le temps.
36
Voir ANNEXE U : Exemple d’ICP cumulatif
121
Une fois que les impacts de la re-planification ont été identifiés, celle-ci a été complexifiée. Cette
initiative permet d’encourager l’analyse des glissements et de privilégier de nouvelles prises
d’action par la résolution de problème37.
Apprentissages
Il faut réduire au maximum la complexité des ICP pour permettre leur compréhension par tous.
Ceci doit être réalisé, en ayant à l’esprit qu’un ICP n’est pas un outil pour rapporter de
l’information, mais savoir si le processus est en contrôle. Dans cette idée, le CI n’est pas un lieu
où l’on vient analyser et interpréter des indicateurs, mais déclencher des prises d’action lorsqu’un
ICP montre une perte de contrôle.
Pour être utilisable, un ICP doit être stable dans le temps. Les zones qui définissent si le
processus suivi est sous contrôle ne doivent évoluer qu’occasionnellement et principalement pour
accompagner une augmentation des standards. L’introduction des ICP dans des projets a fait
apparaître une difficulté à suivre le contrôle d’un processus en évolution. Les observations
réalisées sur le terrain amènent à favoriser des ICP relatifs38 plutôt que cumulatifs39. Ceux-ci sont
moins sensibles aux diverses et parfois trop fréquentes re-planifications qui faussent la lecture
d’un ICP40.
Le processus de projet est en constante évolution : pour être capable de le suivre, les ICP présents
sur le CI doivent pouvoir évoluer rapidement, non pas dans les limites de contrôle de processus
- celles-ci doivent être stables - mais en agissant sur les éléments suivis. Pour conduire
efficacement cette évolution, il semble qu’un travail de groupe ponctuel lors des changements de
phase de projet soit la méthode efficace.
L’absence de donnée source empêche parfois la mise au point d’un ICP. Un travail doit être
réalisé en début de projet pour s’assurer, à l’aide des leçons apprises sur des projets antérieurs, de
la capacité des outils d’information à fournir les données nécessaires.
37
Voir 1.3.5 - Résolution de problèmes
38
Voir ANNEXE W - Exemple d’ICP proactif et relatif utilisé dans le CI SSE
39
Voir ANNEXE U : Exemple d’ICP cumulatif
40
Voir ANNEXE V : Évolution de l’ICP : suivi du transfert des RM
122
Trop peu d’ICP proactifs41 ont été utilisés sur le projet. Ce fait est, pour une part, imputable au
caractère évolutif du projet qui, combiné à la plus grande difficulté de mise au point, a favorisé
l’usage d’ICP réactifs. Une évolution depuis des ICP réactifs vers des ICP proactifs représente
une importante amélioration. Un bon exemple d’ICP proactif a été utilisé dans le cadre du CI
SSE42. Cet ICP a permis de faire apparaître une corrélation entre le ratio de Quasi-incident
déclaré et les incidents avec perte de temps (représentés par des éclairs sur l’ICP). Chaque écart
par rapport à ces règles se répercute sur l’efficacité des ICP et des rencontres de CI.
Cette partie analyse la mise en place de toutes les initiatives annexes, la pertinence de leur
intégration au secteur de la construction et décrit les opportunités attendues dans une utilisation
future.
L’utilisation de la philosophie Lean et l’appropriation de celle-ci passe par une « une croyance
profonde qu’il y a toujours une solution simple et meilleure » (Rio Tinto Alcan, 2010). D’un
point de vue opération, il est intéressant d’améliorer les activités répétitives, car l’investissement
placé dans leur optimisation est largement rentabilisé.
Dans un projet, il est possible d’identifier des activités récurrentes. Une démarche mise en place
pour améliorer l’exécution de ces activités s’est déroulée sous la forme d’ateliers d’amélioration
des procédés43 rassemblant les différents acteurs du processus (maître d’œuvre, firme
d’ingénierie et entrepreneur) pendant une heure. Le résultat de ce type d’atelier est une liste
d’actions précises à mener accompagnée de dates pour améliorer le processus.
41
Voir 1.4.3 - Indicateurs de mesure au sein d’un projet
42
Voir ANNEXE W : Exemple d’ICP proactif et relatif utilisé dans le CI SSE
43
Voir ANNEXE X : Modèle de conduite d’un atelier d’amélioration des procédés
123
Ce type d’atelier a permis, lors de l’une des sessions, de faire évoluer le processus de travail pour
arriver à une économie de 520h de travail ouvrier sur une activité en comptant 830h. Cette
activité s’est répétée 38 fois sur le Projet AP60 permettant ainsi d’économiser presque 20 000h
de travail ouvrier. Cette estimation des heures économisées est réalisée à partir des relevés de
performance de l’entrepreneur44.
La mise en place de ces exercices a eu un impact très positif sur les entrepreneurs impliqués qui
se sont montrés très intéressés à reconduire l’expérience. Ce type d’atelier pourrait, dans le cas
d’une utilisation plus systématique, permettre de réaliser une élimination importante des
gaspillages sur les activités repérées comme récurrentes.
Dans le cadre des pratiques SSE du projet, un effort important a été apporté aux problématiques
de propreté bon ordre sur le chantier. Ce sujet a été abordé sous deux aspects différents, le gain
de productivité effectué grâce à cette bonne pratique et les implications SSE engendrées. Cette
pratique s’est traduite par des règles précises permettant notamment la réduction des risques de
chute d’objets.
L’effort mis sur ce thème a permis d’obtenir de très bons résultats soulignés par tous les audits
SSE chantier. Mais le chemin choisi ne va pas encore aussi loin que l’outil 5S le permet.
44
Voir 4ème diapositive : performance de soudage - ANNEXE X - Modèle de conduite d’un atelier d’amélioration des
procédés
124
Sur les cinq aspects identifiés par l’outil 5S, plusieurs sont déjà complétés en partie :
Ce volet de l’outil 5S est celui qui a été le moins utilisé et peut permettre le plus de gains. Il se
trouve pourtant éloigné de l’état d’esprit d’un chantier de construction où le type de tâche évolue
et nécessite une gamme d’outillage très large. Les ateliers d’amélioration de procédés présentés
ci-dessus contiennent une interrogation sur l’outillage, mais celle-ci est orientée vers
l’introduction de nouveaux outillages sans évoquer ceux inutilisés.
Dans le cadre du Projet, le rangement des outils est assuré quotidiennement. Une amélioration à
apporter agirait sur les espaces de rangement pour identifier plus précisément la localisation des
différents équipements.
Les processus d’inspection sont mis en place et intégrés aux inspections SSE.
La documentation sur les outillages existe et repose sur les exigences identifiées dans le cadre du
programme de prévention SSE (PCMO). Une documentation sur le rangement des équipements
sous la forme d’une gestion visuelle des espaces de rangement et des espaces de travail représente
l’étape suivante permettant l’introduction d’un standard.
• Self discipline : Tenir les équipes responsables de maintenir les normes convenues
La responsabilisation des équipes sur ce type de problématique est déjà intégrée dans le
fonctionnement du chantier. Il revient à chaque équipe de conserver son espace de travail propre
et sécuritaire.
place dans le secteur de la construction. Elle en constitue même l’une des bases dans le cadre de
l’exécution d’un projet.
La capacité à résoudre les problèmes avant que ceux-ci n’aient eu d’impacts sur le projet en
terme de coût ou d’échéancier et avant qu’ils ne soient perçus par l’organisation constitue l’une
des forces des personnes travaillant dans ce milieu.
Or, la méthodologie de résolution de problèmes développée par Toyota et reprise par RTA ne
peut se développer que dans un cadre de partage des problèmes et des craintes45. Ce partage
permet d'agir avant l’apparition de conséquences.
L’apparition des craintes et problèmes a progressivement pris place dans le cadre de l’utilisation
des Centres d’Informations où ceux-ci ont été consignés et où les contres mesures mises en place
ont été suivies. C’est un premier pas vers une formalisation de la déclaration et du suivi des
craintes, mais leur résolution se réalise toujours avec l’expérience des différentes parties
prenantes sans intégrer une recherche systématique des causes fondamentales.
Cette résolution de problèmes par l’expérience de travail dans le milieu de la construction est très
performante, mais concentre les équipes sur la solution plutôt que la cause fondamentale du
problème ou de la crainte. Une illustration de ce fait est apparue lors de la réalisation d’une
séance de résolution de problèmes selon la méthode Toyota. Les parties prenantes de cette séance
ont reconnu que, même si les solutions qu’elles avaient imaginées précédemment s’étaient
révélées efficaces, l’utilisation de l’outil de résolution de problèmes était nécessaire pour
permettre leur identification.
Malgré cet essai très positif, l’outil de résolution de problèmes est resté, dans l’idée des équipes,
comme un outil à n’utiliser que pour la résolution de « gros » problèmes ; or, la prise en compte
de ceux-ci le plus tôt possible, voire en amont, au stade de craintes, assure une résolution facilitée
et une absence de retour en agissant sur le traitement des causes fondamentales et non sur les
conséquences.
45
Voir 4.2.2.1 - Une culture sans blâme
126
L’intégration d’une méthode de travail reprenant, pour partie, le concept de l’outil « Last
Planner » a été effectuée sur le Projet AP60. L’activité mise en place avait pour objectif d’amener
un entrepreneur à gérer différemment la planification de ses activités pour être capable de
rencontrer plus facilement ses objectifs et d’adresser les problèmes récurrents rencontrés.
Pour arriver à une nouvelle méthode de gestion de la planification, l’activité de chaque journée de
travail a été conduite jusqu’aux éléments de construction. Le suivi des éléments effectivement
exécutés était ensuite comparé au travail effectivement réalisé46.
Mais l’expérience de cette méthodologie de travail n’a pas réussi à démontrer de gains pour
l’organisation et elle n’a pas rencontré l’intérêt des utilisateurs. On peut analyser les raisons de
cet échec, lié pour partie à la méthode de mise en place.
• L’utilisation du système par une seule personne chez l’entrepreneur a transformé cette
méthode de planification en un simple travail administratif de traduction de la
planification classique sous une forme détaillée.
L’outil « Last Planner », extrêmement vanté par le Lean Construction Institute, apparaît capable
d’apporter des gains en utilisant les compétences et connaissances de chacun, à chaque échelon
de l’organisation, dans le cadre de la planification et de la résolution de problèmes. Cependant,
pour être gagnante, l’utilisation de cet outil doit être réalisée en impliquant le plus largement
possible les acteurs, en continuant à choisir des activités particulières et en affirmant le soutien de
la haute direction à son utilisation.
46
Voir ANNEXE Y : Exemple d’utilisation du «Last Planner» en 2011
127
La méthodologie LPDS a été proposée à la direction du projet par un bureau de consultant. Celui-
ci a organisé une session de formation à l’approche LPDS aux différents acteurs de l’amélioration
continue de l’organisation travaillant sur le projet. Cette méthodologie n’a pas été retenue, car sa
mise en place n’a pas été jugée intéressante sur plusieurs points :
• La solution proposée passait par une refonte totale de processus de projet, méthode
inappropriée et non-souhaitée dans le cadre d’un projet déjà en cours où tous les
processus sont mis en place et correctement utilisés. Une phase de transition importante
avec des transformations profondes n’est pas souhaitée.
La gestion visuelle est le premier aspect que l’on rencontre dans le déploiement de la philosophie
Lean pour RTA. Elle constitue aussi le moyen le plus simple à appréhender pour les personnes
exposées aux principes de l’amélioration continue.
La gestion visuelle est transversale et elle s’intègre dans un nombre important d’outils issus de la
philosophie Lean. Elle permet notamment de « faire voir le processus », de mettre en place des
standards et d’assurer une communication efficace.
128
Elle a été mise en place dans le cadre des Centres d’Information qui présentent le processus de
manière visuelle afin d’assurer son maintien sous contrôle.
Un autre exemple d’intégration réussie de la gestion visuelle se trouve dans la gestion des
processus d’approbation de document. Alors que ceux-ci présentaient beaucoup de difficultés à
être complétés dans les délais, la présentation de l’état des processus a permis de réduire de
manière très importante les retards47.
Les principes de gestion visuelle dans le cadre d’un projet de construction devraient se voir
appliquer de manière systématique pour l’établissement de standards de propreté bon ordre et
dans le cadre de mise en place d’auto contrôle. Leurs mises en place nécessitent un engagement
des différents acteurs (le maître d’œuvre, son représentant et les entrepreneurs) à soutenir ces
initiatives.
47
Voir ANNEXE Z : Gestion visuelle du processus de signature
129
Pour recueillir des réponses les plus proches de la réalité sur des questions traitant directement du
travail de l’intervenant chercheur, le choix a été fait de rendre les questionnaires anonymes. Le
recueil d’information sur l’âge, le sexe ou l’expérience des répondants n’a pas été effectué pour
garantir l’anonymat des répondants en évitant les possibilités de recoupage.
Il ressort de l’exploitation du questionnaire soumis aux parties prenantes que l’intensité des
attentes du déploiement des Centres d’Information est très forte, significativement plus
importante que celle concernant les craintes exprimées (Figure 4.7).
0 1 2 3 4 5
0,53
Craintes
2,34
0,29
A_entes
3,97
Cette différence est le reflet de l’engagement des personnes dans le processus d’implantation de
la philosophie Lean dans le cadre d’un chantier de construction et la capacité des équipes à faire
évoluer leur façon de travailler.
Avec une moyenne globale de 3,97 pour l’intensité des attentes (contre 2,34 pour les craintes)
placées dans ce déploiement, il est possible d’identifier la très forte attente qui apparaît dans cette
expérimentation. La consultation ayant eu lieu 6 mois après le début du déploiement des Centres
d'Information, ce résultat est à mettre en perspective avec l’appropriation que les parties
prenantes ont faites de ce nouvel outil.
130
L’analyse des « Objectifs» permet de comprendre l’évaluation des parties prenantes quant à la
clarté et la cohérence qu’elles plaçaient dans le déploiement de Centres d’Information au début
du processus d’implantation. Plus précisément, la question posée est :
Les objectifs de mise en place d’un Centre d’Information étaient clairs et cohérents ?
Cette question représente l’unique item de l’analyse des objectifs. Celui-ci est évalué selon une
échelle de Likert à cinq points d’ancrage. Le test Kruskal-Wallis appliqué à cette question fait
apparaître un taux de signification p=0,200 (Tableau 4.1) tout juste sur la limite choisie pour
déterminer s’il existe une différence significative des moyennes entre au moins deux groupes. Il
ne semble pas y avoir de différence significative entre les trois groupes. Les objectifs étaient
clairs et cohérents pour chacun des groupes.
Tableau 4.1: Clarté et cohérence perçues des objectifs des CI, comparaison par groupe
SOUS-GROUPES TAUX DE SIGNIFICATION
GROUPE 1 GROUPE 2 GROUPE 3 K-W M-W M-W M-W
TOUS
CONSTRUCTION SSE VPO p_value p_value p_value p_value
Objectifs: N total=30 N 1=8 N 2=9 N 3=13 Two-tail Two-tail Two-tail
Moyenne Ecart-type Moyenne Ecart-type Moyenne Ecart-type Moyenne Ecart-type 1 vs 2 1 vs 3 2 vs 3
OBJECTIF1 4,138 0,743 3,750 0,707 4,375 0,744 4,231 0,725 0,2004 0,1300 0,1850 0,6970
Néanmoins, le faible niveau de la moyenne des réponses du groupe Construction sur la clarté et la
cohérence des objectifs est attribuable à la période d’implantation des CI sur le projet. En effet,
les premiers objectifs de l’implantation portaient principalement sur les besoins de l’équipe VPO
lors de l’installation et de la mise en place de ces processus. L’équipe SSE, en tant que fonction
support, a pu construire elle même ses objectifs en choisissant d’utiliser un CI.
L’enquête a également permis d’interroger les parties prenantes afin de mieux comprendre leurs
attentes concernant le déploiement de Centres d’Information. Les répondants ont dû évaluer
131
l’importance des neufs attentes48 suivantes à partir d’une échelle de Likert à cinq points
d’ancrage (1= faiblement une attente ; 5= fortement une attente) :
4.4.3.1 Analyse des items de façon générale mis en valeur par l’enquête
Les résultats (Tableau 4.2) mettent en évidence un groupe de 4 items, les attentes 2, 4, 5 et 6,
comme étant les items où les attentes sont les plus fortes avec des moyennes de réponse situées
entre 4,200 et 4,233. Ce groupe de 4 items a la spécificité de se rapporter à la communication et
au traitement des données. Cet aspect suscite beaucoup d’attente de la part des parties prenantes.
En plus de recueillir les plus hauts niveaux d’attente, les items 2, 4, 5 et 6 sont aussi ceux
présentant le moins de variance dans les réponses. Cet élément vient accentuer la place
prédominante de la communication et du traitement des données dans les attentes des parties
prenantes.
L’attente 9, traitant de la résolution de problèmes et de son intégration dans les CI, apparaît avec
le score le plus faible. Elle présente néanmoins la variance la plus élevée des 9 items proposés et
des écarts non significatifs avec plusieurs autres items. L’accompagnement de la résolution de
problème ne représente pas une attente particulièrement plus faible que les autres.
48
Les neufs attentes proposées aux répondants pour être évaluées sont construites à partir d’entretiens préalables
avec les acteurs clés de l’introduction des CI et des observations de l’intervenant-chercheur. Voir la sous partie
3.6.5.2 Construction du questionnaire
132
Tableau 4.2: Niveau des attentes initiales de l’implantation des CI, comparaison deux à deux des
items de réponse
Attentes: TOUS p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value
N total=30 Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail
Moyenne Écart Type ATTENTE1 ATTENTE2 ATTENTE3 ATTENTE4 ATTENTE5 ATTENTE6 ATTENTE7 ATTENTE8
ATTENTE1 3,750 0,968
ATTENTE2 4,233 0,803 0,0037
ATTENTE3 3,967 1,016 0,1215 0,1965
ATTENTE4 4,233 0,844 0,0027 0,9665 0,1346
ATTENTE5 4,233 0,803 0,0025 1,0000 0,1756 0,9706
ATTENTE6 4,200 0,792 0,0104 0,8296 0,2683 0,8028 0,8158
ATTENTE7 3,833 0,934 0,3024 0,0717 0,5122 0,0820 0,0339 0,0580
ATTENTE8 3,617 0,928 0,4729 0,0037 0,0801 0,0046 0,0025 0,0010 0,2630
ATTENTE9 3,600 1,020 0,7801 0,0017 0,0345 0,0068 0,0035 0,0056 0,2448 0,9577
* mesurée en cinq points d'ancrage (1=faiblement une attente ; 5=fortement une attente)
Groupe d'items pour lesquels il y a le plus d'attente
Seuil p < 0,10
Des écarts significatifs entre les réponses des trois groupes pour les items Attente 2, 5, 7 et 9 sont
mis en évidence par les résultats (Tableau 4.3) de la consultation de parties prenantes (K-
W2=0,1538 ; K-W5=0,0013 ; K-W7=0,1498 ; K-W9=0,1629)49.
La comparaison groupe à groupe des résultats de la consultation permet d’identifier qu’il n’y a
que dans les cas des attentes 5, 7 et 9 que l’on peut observer des différences significatives au seuil
de 0,10 entre les groupes (comparaison deux à deux).
Tableau 4.3: Niveau des attentes initiales de l’implantation des CI, comparaison par groupe
SOUS-GROUPES TAUX DE SIGNIFICATION
GROUPE 1 GROUPE 2 GROUPE 3 K-W M-W M-W M-W
TOUS
CONSTRUCTION SSE VPO p_value p_value p_value p_value
Attentes: Ntotal=30 N1=8 N2=9 N3=13 Two-tail Two-tail Two-tail
Moyenne Ecart-type Moyenne Ecart-type Moyenne Ecart-type Moyenne Ecart-type 1 vs 2 1 vs 3 2 vs 3
ATTENTE1 3,750 1,035 3,750 1,035
ATTENTE2 4,233 0,817 3,750 1,035 4,556 0,726 4,308 0,630 0,1538 0,1140 0,2380 0,3570
ATTENTE3 3,967 1,033 3,625 1,188 4,111 1,269 4,077 0,760 0,4988 0,3700 0,4560 0,5560
ATTENTE4 4,233 0,858 3,875 0,991 4,222 0,833 4,462 0,776 0,3231 0,5410 0,1850 0,5120
ATTENTE5 4,233 0,817 3,500 1,069 4,889 0,333 4,231 0,439 0,0013 0,0040 0,1400 0,0090
ATTENTE6 4,200 0,805 4,000 0,756 4,333 0,707 4,231 0,927 0,5944 0,4230 0,4560 0,9480
ATTENTE7 3,833 0,950 3,750 1,035 4,333 0,707 3,538 0,967 0,1498 0,2770 0,6450 0,0710
ATTENTE8 3,617 0,944 3,750 1,035 3,778 0,833 3,423 0,997 0,7082 0,9630 0,5470 0,5120
ATTENTE9 3,600 1,037 3,000 1,069 3,778 1,093 3,846 0,899 0,1629 0,1670 0,0760 0,8960
* mesurée en cinq points d'ancrage (1=faiblement une attente ; 5=fortement une attente)
Seuil p < 0,20 pour le test de Kruskal-Wallis et items correspondants
Seuil p < 0,10 pour le test de Mann-Whitney
49
En application de la correction de Bonferroni, voir page 96, le seuil choisi pour le test de Kruskal-Wallis est 0,20
133
Attente 5 :
Le partage d’informations par l’intermédiaire d’un Centre d’Information est une très forte attente
pour les groupes SSE et VPO, ceux-ci se démarquant par rapport au groupe Construction qui
présente cette attente comme moyenne. Ces deux groupes présentent une homogénéité très
important des répondants entre eux (σ5SSE=0,333 ; σ5VPO=0,439).
Ces résultats s’interprètent par rapport au type de missions confiées aux groupes SSE et VPO. Le
groupe SSE, en tant que groupe support agissant sur tout le chantier, doit être capable de réaliser
un partage d’information entre ses membres pour assurer la plus grande efficacité possible. Le
groupe VPO, est, quant à lui, un groupe de taille moyenne qui nécessite beaucoup de
coordination. Le partage de l’information entre les membres respectifs de ces deux groupes est
donc un aspect très important.
Attente 7 :
La mise en place de rencontres de courte durée apparaît comme une forte attente du groupe SSE.
Avec cette attente le groupe SSE se démarque significativement du groupe VPO (moyenne des
réponses de 3,538 contre 4,333). Le groupe Construction ne se démarque ni du groupe VPO ni de
SSE.
De la même manière que dans le cas de l’attente n° 5, le résultat que l’on observe s’explique dans
la différence de mission. Dans le cas du groupe VPO, la durée d’une rencontre provient
essentiellement d’un besoin de coordination ou de résolution de problèmes. Or, dans le cas du
groupe SSE, la réduction du temps de rencontre constitue un défi important permettant de
concentrer l’action du groupe sur le terrain. Il en ressort un intérêt du groupe SSE, groupe
présentant le moins de variance, de pouvoir utiliser un outil permettant un partage efficace de
l’information dans un temps contenu.
Attente 9 :
Les réponses apportées pour l’attente 9 démontrent un intérêt important du groupe VPO pour
assurer l’accompagnement de la résolution de problèmes. L’expression de cette attente montre
une différence entre les groupes de VPO et Construction, le groupe SSE se situant entre les deux
précédents. Le groupe SSE, quand il traite les incidents, utilise une procédure très précise. Aucun
nouveau processus en ce sens n’est donc attendu. À l’inverse, le groupe VPO dont la mission est
134
de résoudre des problèmes, démontre son intérêt pour développer les processus de résolution de
problèmes.
On observe, globalement, que le groupe Construction place des attentes moins élevées dans la
mise en place et l’utilisation des CI. Ce résultat s’explique par l’avancement de la phase de
construction déjà avancée au moment de l’implantation des CI sur le projet de construction.
On remarquera que les moyennes des réponses apportées à l’item 9 dénotent une attente moyenne
de la part de tous les groupes (comparativement aux autres items). On note également que la
variance entre les répondants à l’intérieur des trois groupes est très importante (σ9CONST=1,069 ;
σ9SSE=1,093 ; σ9VPO=0,899). L’accompagnement des résolutions de problème ne représente pas,
de manière générale, une attente particulière dans le cadre de la mise en place de CI. Les opinions
sur ce sujet sont très partagées.
L’analyse précédente nous a permis de mettre en évidence des écarts significatifs entre les
groupes dans les attentes. La poursuite de notre analyse nous permet de constater un degré
important d’accord dans la hiérarchisation des caractéristiques avec les mêmes attentes pour les
trois groupes (W=0,566, χ2=11,886, ddl=7 et p=0,070) (Tableau 4.4).
Les trois items : Attentes 2, 4 et 5, accès sur la communication de l’information entre les
membres de l’équipe (items 2 et 5) et sur le processus de travail (items 4 et 5) arrivent en tête des
attentes des trois groupes. La thématique de l’information apparaît alors comme une attente
élevée.
Les trois items ayant le moins d’attente sont : les Attentes 9, 8 et 1. Elles couvrent les sujets
impliquant la mise en place de nouveaux processus formels (items 8 et 9) ainsi que la
communication entre groupes fonctionnels.
135
Ces résultats montrent un fort niveau d’attente en termes de résultat et d’amélioration dans les
processus de travail actuels mais aussi une appréhension face à la nouveauté et à la charge de
travail supplémentaire que représente l’implantation d’un CI.
Tableau 4.4: Niveau des attentes initiales de l’implantation des CI, concordance entre les
réponses des trois groupes
La conduite des trois analyses précédentes nous permet de mettre en évidence la place très
importante de l’information, comme révélateur de problème ou comme élément à communiquer,
dans les attentes des parties prenantes de l’implantation des Centres d’Information.
Dans le cas de l’objet d’étude analysé, un travail à la sensibilisation sur les méthodes résolutions
de problème et leur utilisation régulière serait à approfiondir.
136
Les attentes vis-à-vis de l’implantation d’un Centre d’Information vont de pair avec certaines
craintes que peuvent avoir les parties prenantes. Les répondants furent donc invités à évaluer
l’importance des craintes50 suivantes à partir d’une échelle de Likert en 5 points d’ancrage
(1= faiblement une crainte ; 5= fortement une crainte) :
4.4.4.1 Analyse des items de façon générale mis en valeur par l’enquête
Les résultats (Tableau 4.5) ont permis de mettre en évidence un item, la crainte 9, comme étant la
crainte la plus faible pour les répondants avec un écart significatif par rapport aux autres items de
réponse à l’exception de l’item 10.
Ce résultat nous permet de mieux comprendre les craintes et appréhensions que peut représenter
l’introduction de CI dans un milieu de travail qui n’est pas habitué à ce type d’outil.
L’introduction d’un nouvel outil, dans un cadre de travail chargé, amène un niveau de crainte
équivalent sur la plupart des aspects relevant du fonctionnement et de la mise en place. Cette
intégration est largement perçue, dans la période initiale, comme une surcharge de travail que
50
Les dix craintes proposées aux répondants pour être évaluées sont construites à partir d’entretiens préalables avec
les acteurs clés de l’introduction des CI et des observations de l’intervenant-chercheur. Voir la sous partie
3.6.5.2 Construction du questionnaire
137
l’on vient imposer. L’aspect matériel du changement, représenté par la crainte n° 9 et en partie
par la crainte n° 10 n’est que secondaire dans le cadre des appréhensions.
De façon générale, il y a peu de crainte pour les dix items proposés aux répondants. En effet, la
moyenne des réponses ne dépasse jamais la barre des 3 qui représente un niveau moyen de
crainte sur l’item. Il serait intéressant de revenir vers les répondants pour identifier, s’ils existent,
les éléments pour lesquels ils ont des craintes.
Cette observation est à mettre en parallèle aux moyennes des items d’attentes qui se trouvent
toujours au dessus de 3,5.
L’observation des écarts type dans les niveaux de crainte rapportés par les répondants montre un
important niveau de variance dans les réponses récupérées qui traduit une absence de perception
commune des craintes liées au déploiement de CI. Le faible niveau moyen de crainte évoqué plus
haut n’est donc pas représentatif d’une situation sans crainte mais plutôt d’une organisation aux
niveaux de craintes très inégaux.
Tableau 4.5: Intensité des craintes ressenties dans le cadre du déploiement des CI, comparaison
deux à deux des items de réponse
Craintes:
TOUS p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value
N total=30 Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail
Moyenne Écart Type CRAINTE1 CRAINTE2 CRAINTE3 CRAINTE4 CRAINTE5 CRAINTE6 CRAINTE7 CRAINTE8 CRAINTE9
CRAINTE1 2,448 1,325
CRAINTE2 2,600 1,354 0,5438
CRAINTE3 2,533 1,252 0,7738 0,5575
CRAINTE4 2,500 1,358 0,7504 0,6785 1,0000
CRAINTE5 2,600 1,329 0,6097 0,8642 0,8455 0,5781
CRAINTE6 2,400 1,163 0,8327 0,5136 0,5589 0,9092 0,4272
CRAINTE7 2,517 1,184 0,6775 0,8745 0,9640 0,8474 0,7432 0,7186
CRAINTE8 2,207 1,146 0,4810 0,2469 0,3074 0,3459 0,2120 0,6354 0,2139
CRAINTE9 1,690 1,168 0,0165 0,0068 0,0067 0,0069 0,0079 0,0197 0,0024 0,0421
CRAINTE10 1,966 1,149 0,0625 0,0564 0,0776 0,0641 0,0167 0,1769 0,0374 0,3732 0,1669
* mesurée en cinq points d'ancrage (1=faiblement une crainte ; 5=fortement une crainte)
Groupe d'items étant le plus faiblement des craintes
Seuil p < 0,10
Les résultats (Tableau 4.6) mettent en évidence des écarts significatifs entre les moyennes des
trois groupes pour les items Craintes 1, 2, 3, 4, 7 et 10 (K-W1=0,0246 ; K-W2=0,0752 ;
K-W3=0,0596 ; K-W4=0,0327 ; K-W7=0,0799 ; K-W10=0,0812).
La comparaison groupe à groupe des résultats de la consultation des mêmes items permet
d’identifier que, pour chacun d’entre eux, on peut observer des différences significatives au seuil
de 0,10 entre les groupes (comparaison deux à deux).
138
Tableau 4.6: Intensité des craintes ressenties dans le cadre du déploiement des CI, comparaison
par groupe
SOUS-GROUPES TAUX DE SIGNIFICATION
GROUPE 1 GROUPE 2 GROUPE 3 K-W M-W M-W M-W
TOUS
CONSTRUCTION SSE VPO p_value p_value p_value p_value
Craintes: N total=30 N 1=8 N 2=9 N 3=13 Two-tail Two-tail Two-tail
Moyenne Ecart-type Moyenne Ecart-type Moyenne Ecart-type Moyenne Ecart-type 1 vs 2 1 vs 3 2 vs 3
CRAINTE1 2,448 1,325 3,125 1,126 2,889 1,616 1,667 0,778 0,0246 0,7430 0,0070 0,0950
CRAINTE2 2,600 1,354 3,500 1,069 2,222 1,481 2,308 1,251 0,0752 0,0740 0,0450 0,7440
CRAINTE3 2,533 1,252 3,375 1,061 2,111 1,364 2,308 1,109 0,0596 0,0460 0,0450 0,5560
CRAINTE4 2,500 1,358 3,500 0,926 2,333 1,581 2,000 1,155 0,0327 0,1140 0,0060 0,8450
CRAINTE5 2,600 1,329 2,875 1,246 2,556 1,509 2,462 1,330 0,7100 0,5410 0,5000 0,8960
CRAINTE6 2,400 1,163 2,875 1,246 1,889 1,054 2,462 1,127 0,2127 0,1140 0,5000 0,2620
CRAINTE7 2,517 1,184 2,750 0,886 3,111 1,537 1,917 0,793 0,0799 0,6060 0,0820 0,0690
CRAINTE8 2,207 1,146 2,375 0,744 1,889 1,054 2,333 1,435 0,5348 0,2360 0,7340 0,6020
CRAINTE9 1,690 1,168 2,125 1,246 1,667 1,414 1,417 0,900 0,3877 0,4230 0,2700 0,9720
CRAINTE10 1,966 1,149 2,500 1,069 2,222 1,481 1,417 0,669 0,0812 0,5410 0,0310 0,2470
* mesurée en cinq points d'ancrage (1=faiblement une crainte ; 5=fortement une crainte)
Seuil p < 0,20 pour le test de Kruskal-Wallis et items correspondants
Seuil p < 0,10 pour le test de Mann-Whitney
Crainte 1 :
Dans le cas de la crainte 1, on observe un écart entre le groupe de VPO et les groupes
Construction et SSE. Le groupe VPO semble avoir moins de crainte par rapport à l’utilisation du
CI comme simple lieu de présentation de l’information. À l’inverse, cette crainte est ressentie de
manière importante par les deux autres groupes. Le groupe de VPO n’ayant pas de support de
présentation de l’information voit cet aspect comme un besoin et non une crainte.
Le besoin du groupe de VPO de construire son système d’information au même moment que la
mise en place du Centre d’Information amène le risque de présenter une même information sur
deux supports différents et pour deux utilisations différentes. Ce risque est d’autant plus
important que la crainte perçue par rapport à celui-ci est faible dans le cas du groupe VPO.
Pour les deux autres groupes, des systèmes de récupération de l’information étaient déjà en place
lors de la mise en place des CI. Il y a donc une crainte que le nouvel outil fasse double emploi.
Crainte 2 et 3 :
Le groupe Construction se détache des groupes VPO et SSE sur le sujet de l’appréhension de la
charge de travail induite par le déploiement et l’utilisation de CI.
139
Crainte 4 :
Le temps de déploiement d’un CI est un facteur qui différencie les groupes Construction et VPO.
Le groupe Construction y accorde une importance significativement plus grande que le groupe de
VPO. Cette différence de point de vue s’explique par le temps disponible pour le groupe VPO
pour mettre en place le CI avant le début de ses activités critiques. Le groupe Construction étant
déjà en exécution, il fait face à des contraintes beaucoup plus importantes qui limitent le temps
qu’il peut accorder à cette mise en place.
Ce résultat met en évidence la différence existant entre une dynamique projet et les activités
industrielles de production. Dans le cas d’un projet, les éléments temps et phase d’implantation
sont extrêmement critiques et cette contrainte se retrouve dans les résultats.
Crainte 7 :
Le résultat observé pour l’équipe SSE n’est synonyme que d’une tendance du groupe dont les
réponses sont marquées par une variance très importante (σ7SSE=1,537). La construction du
questionnaire ne nous permet pas d’affiner davantage l’analyse pour identifier comment se
140
distribuent les répondants suivant les sous-groupes VPO (secteur, entreprise, …). Les groupes
Construction et VPO présentent des variances d’ordre d’équivalent (σ7CONST=0,886 ;
σ7VPO=0,793).
L’écart de moyenne que l’on observe entre les groupes Construction et VPO est imputable, d’une
part, à l’expérience du groupe Construction (formé depuis plus d’un an et déjà organisé pour
générer des prises d’action) et, d’autre part, à la formation récente du groupe VPO qui est à la
recherche de l’outil dans lequel la procédure lui permettra de déclencher des actions.
Crainte 10 :
La crainte associée à la mise en place de CI par fonction plus que par le secteur51 montre un écart
significatif des moyennes entre les groupes Construction et VPO. La moyenne des réponses pour
le groupe Construction est de 2,500 alors que la moyenne pour le groupe VPO est de 1,417.
Cet écart important est à rapporter aux modes de fonctionnement des deux groupes qui, pour
Construction se concentre sur le secteur, alors que VPO travaille plus fortement par fonction.
Cette observation appuie l’idée de développer une structure de CI matricielle permettant de tenir
compte plus finement des modes de fonctionnement du projet.
Pour les craintes 1, 2, 3, 4, 7 et 10, on observe que la variance des réponses de l’équipe apportées
par le groupe SSE est toujours la plus importante :
σ12 > σ11 > σ13 σ22 > σ23 > σ21 σ32 > σ33 ≈ σ31
σ42 > σ43 > σ41 σ72 > σ71 > σ73 σ10.2 > σ10.1 > σ10.3
Ce résultat, portant sur les craintes présentant des écarts significatifs des moyennes entre les
groupes, semble montrer une absence de consensus sur les craintes dans le groupe de SSE. Alors
même que le niveau moyen de crainte enregistré est assez faible, celui-ci ne semble pas être pas
représentatif d’un sentiment général du groupe. Il semble exister un écart important entre les
membres du groupe sur le ressenti des craintes.
51
Voir 2.2.6 - Fonctionnement du Projet AP60
141
L’analyse de concordance fait apparaitre une divergence (Tableau 4.7) dans la priorisation des
craintes (W=0,455, χ 2=12,283, ddl=9 et p=0,198). Il n’est pas possible de faire apparaître un ou
plusieurs types de craintes communes à l’ensemble des parties prenantes.
Tableau 4.7: Intensité des craintes ressenties dans le cadre du déploiement des CI, concordance
entre les réponses des trois groupes
Ce résultat montre l’importance d’aborder la question des craintes de manière individuelle pour
chacun des groupes (Tableau 4.8) afin d’être capable de gérer celles-ci dans le cadre d’une
gestion du changement efficace. Il est donc important que les personnes soient en mesure
d’exprimer leurs craintes.
142
Tableau 4.8: Groupes des trois items où il y a le moins de crainte et où il y a le plus de crainte
Les plus grandes craintes du groupe Construction concernent la charge de travail additionnelle
que représente la mise en place et l’utilisation des CI. Ce comportement traduit le faible potentiel
d’amélioration des performances que ce groupe place dans l’outil CI. A l'inverse, le groupe
Construction appréhende peu la forme que prendra le futur outil, comme si celui-ci passait en
second lieu ou bien que, s'étant fait imposer les CI, ils n'y accordent que peu d'intérêt.
143
Le groupe SSE, à l’inverse du groupe Construction, place ses craintes dans les possibles
disfonctionnements de l’outil et son rôle passif (item 1). Cette observation traduit un intérêt
certain pour une nouvelle solution de travail mais aussi des doutes dans le choix de l’outil CI
pour prendre cette place. Les craintes les moins fortes traitent principalement d’aspects purement
pratiques et montrent une très faible crainte d’inefficacité de l’outil CI (item 6).
Le groupe VPO porte ses craintes sur une possible inefficacité de l’outil. Cette attitude démontre
des attentes importantes de l’implantation de CI. Dans ce groupe, dont le niveau de crainte est le
plus faible, on relève les plus faibles craintes sur les aspects techniques du CI. Mais il convient de
préciser que ceux-ci sont discutés lors du choix de l’outil.
La disparité observée dans la hiérarchisation des craintes trace une carte du cheminement effectué
par les trois groupes vers le concept de Lean Construction et l’outil CI. Le groupe VPO ouvre la
marche avec une implication forte et le choix assumé de l’outil CI. Vient ensuite le groupe SSE,
ouvert à de nouvelles méthodes mais incertain sur le choix du CI dont il cherche encore les
défauts. Le groupe Construction reste quant à lui en retrait par rapport à l’outil CI et au concept
Lean Construction qu’il n’a pas choisi et dont il ne voit que peu l’intérêt. Il convient toutefois de
préciser que le sens de la question posée aux répondants portait sur les niveaux de craintes que
ceux-ci ressentaient au début de l’implantation des Centres d’Information.
144
La mise en place de nouveaux outils de travail nécessite un travail de fond avec les parties
prenantes. De nombreux éléments vont avoir une influence facilitante, freinante ou neutre sur ce
processus. Les répondants ont dû évaluer l’influence de douze forces52 qui ont potentiellement
impacté le processus de mise en place des Centres d’Information selon une échelle sémantique de
Likert à cinq points d’ancrage (1=fortement freinante ; 3=ni freinante, ni facilitante (neutre) ;
5=fortement facilitante) :
En observant la moyenne des réponses associées à chacune des douze forces évaluées par les
répondants, on constate qu’aucune n’est freinante. Les moyennes observées vont de
𝑥! = 3,577 à 𝑥! = 4,379. Cette observation nous indique qu’il existe un biais dans la rédaction
des items de la variable « forces » qui sont proposés aux répondants. La grande majorité d’entre
eux sont des éléments totalement positifs ce qui entraine un problème d’unité de mesure.
52
Les douze forces proposées aux répondants pour être évaluées sont construites à partir d’entretiens préalables avec
les acteurs clés de l’introduction des CI et des observations de l’intervenant-chercheur. Voir la sous partie
3.6.5.2 Construction du questionnaire
145
Ce problème est mis en évidence par la distribution des évaluations des répondants pour les items
« forces » qui, à l’exception des forces 2, 4, 5 et 12, ont un seul répondant ou moins évaluant
l’item 1 ou 2 sur l’échelle proposée.
Les items forces 4 et 5, de part leur formulation, restent évalués selon une échelle de Likert à 5
points d’ancrage.
Le cas des items 2 et 12 sont particuliers car ces propositions sont mal formulées et mal
adressées.
4.4.5.2 Analyse des différences de façon générale mises en valeur par l’enquête
Les résultats (Tableau 4.9) mettent en valeur la force 4 : celle-ci ressort comme étant la force la
moins facilitante et ce avec un écart significatif par rapport aux autres forces à l’exception de la
force 9.
En s’exprimant ainsi, les répondants démontrent l’ouverture dont ils font preuve pour utiliser des
outils novateurs développés dans le cadre d’un autre secteur économique. Il n’y a donc pas de
blocage idéologique à l’utilisation d’outils issus de la philosophie Lean dans un projet de
construction, mais une obligation d’amener ces outils dans le cadre d’une gestion de changement
bien préparée.
A cause du biais introduit par la formulation des items de force et le passage à une échelle à trois
points d’ancrage, il est complexe de mettre évidence des écarts significatifs entre des groupes
d’éléments.
146
Tableau 4.9: Influence des forces en présence sur le processus d’implantation des CI,
comparaison deux à deux des items de réponse
Forces: TOUS p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value
N total=30 Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail
Moyenne Écart Type FORCE1 FORCE2 FORCE3 FORCE4 FORCE5 FORCE6 FORCE7 FORCE8 FORCE9 FORCE10 FORCE11
FORCE1 4,379 0,820
FORCE2 4,033 1,098 0,0792
FORCE3 4,267 0,785 0,4898 0,3617
FORCE4 3,250 1,076 0,0004 0,0014 0,0008
FORCE5 3,667 0,877 0,0009 0,0596 0,0081 0,0231
FORCE6 3,867 0,915 0,0004 0,1497 0,0017 0,0123 0,2771
FORCE7 4,167 0,857 0,2071 0,4947 0,7351 0,0002 0,0024 0,0062
FORCE8 4,053 0,705 0,1166 0,8808 0,2452 0,0009 0,0187 0,0450 0,0762
FORCE9 3,577 0,809 0,0004 0,0609 0,0005 0,2836 0,4676 0,1793 0,0010 0,0013
FORCE10 3,833 0,866 0,0097 0,1059 0,0261 0,0093 0,2714 0,8706 0,0123 0,0604 0,1465
FORCE11 4,000 0,845 0,0670 0,8419 0,2104 0,0036 0,0423 0,1398 0,0391 0,2216 0,0443 0,2037
FORCE12 4,000 1,069 0,1433 0,8199 0,2502 0,0028 0,0424 0,3516 0,2603 0,3942 0,0971 0,2011 1,0000
* mesurée en cinq points d'ancrage (1=fortement freinante ; 3=neutre ; 5=fortement facilitante)
Groupe d'items étant le moins facilitants
Seuil p < 0,10
Le Tableau 4.9 nous permet d’identifier le groupe des trois items ayant les plus hautes moyennes
en "force facilitante" et des écarts type parmi les plus faibles de la variable force :
• Force 3 - Présence d’une ressource support dédiée sur site (4,267 pour σForce3=0,785)
Ce groupe se détache significativement des autres items à l’exception des forces 2, 8 et 12.
Précédemment, il est identifié au 4.4.5.1 que les items 2 et 12 relèvent de cas particuliers. On
identifie donc les trois éléments ci-dessus comme étant les éléments les plus importants pour
influencer positivement le déploiement d’un nouvel outil de travail, dans notre cas le déploiement
des Centres d’Information. Ces trois éléments sont : le support de la haute direction, la présence
d’une ressource support et la mise en place du changement avant la phase d’exécution (dans le
cas d’un projet).
Des écarts significatifs entre les réponses des trois groupes pour les items forces 3 et 9 sont mis
en évidence par les résultats (Tableau 4.10) de la consultation des parties prenantes
(K-W3=0,1890 ; K-W9=0,0431).
La comparaison de groupe à groupe des résultats de la consultation permet d’identifier qu’il n’y a
que dans le cas de la force 9 que l’on peut observer une différence significative au seuil de 0,10
147
entre les groupes (comparaison deux à deux). Les groupes Construction et de VPO ont une vision
différente du rôle que chaque individu peut apporter à la mise en place d’un nouvel outil. Le
groupe VPO y voit un élément beaucoup plus facilitant que le groupe Construction. Il est
intéressant de relever que la variance des réponses du groupe Construction est très faible
(σCONST9=0,354) comparée à la variance des réponses du groupe VPO (σVPO9=0,928).
Cet item traduit, pour une part, le sentiment d’engagement des parties prenantes dans le
processus. La compréhension des mécanismes d’engagement et les méthodes permettant de
persuader les parties prenantes de l’importance du rôle qu’elles ont à jouer personnellement sont
essentielles pour assurer une gestion du changement. Ce résultat amène un questionnement sur la
cause de l’écart des réponses entre les deux groupes et sur les moyens pour créer l’engagement.
La forte variance observée pour le groupe VPO sur la force 9 nous montre une non-homogénéité
du groupe vis-à-vis du déploiement des Centres d’Information.
Tableau 4.10: Influence des forces en présence sur le processus d’implantation des CI,
comparaison par groupe
SOUS-GROUPES TAUX DE SIGNIFICATION
GROUPE 1 GROUPE 2 GROUPE 3 K-W M-W M-W M-W
TOUS
CONSTRUCTION SSE VPO p_value p_value p_value p_value
Forces: N total=30 N 1=8 N 2=9 N 3=13 Two-tail Two-tail Two-tail
Moyenne Ecart-type Moyenne Ecart-type Moyenne Ecart-type Moyenne Ecart-type 1 vs 2 1 vs 3 2 vs 3
FORCE1 4,379 0,820 3,875 1,126 4,556 0,527 4,583 0,669 0,2427 0,2360 0,1810 0,8080
FORCE2 4,033 1,098 3,750 1,035 4,111 1,269 4,154 1,068 0,4982 0,3700 0,3360 1,0000
FORCE3 4,267 0,785 3,875 0,991 4,222 0,667 4,538 0,660 0,1890 0,5410 0,1210 0,2920
FORCE4 3,250 1,076 3,500 0,756 2,750 1,282 3,417 1,084 0,3036 0,1610 0,9100 0,2380
FORCE5 3,667 0,877 3,750 0,707 3,875 0,835 3,455 1,036 0,6078 0,7980 0,5450 0,3950
FORCE6 3,867 0,915 3,750 1,035 4,000 0,816 0,6940
FORCE7 4,167 0,857 4,000 1,000 4,273 0,786 0,6590
FORCE8 4,053 0,705 3,625 0,744 4,364 0,505 0,0410
FORCE9 3,577 0,809 3,125 0,354 3,444 0,726 4,111 0,928 0,0431 0,4810 0,0360 0,1610
FORCE10 3,833 0,866 3,875 0,835 4,000 0,866 3,650 0,944 0,7298 0,8150 0,6960 0,4970
FORCE11 4,000 0,845 3,714 1,254 4,111 0,333 4,077 0,862 0,8991 0,7580 0,6990 1,0000
FORCE12 4,000 1,069 3,875 0,991 4,222 1,093 3,917 1,165 0,6569 0,4230 0,8510 0,5540
* mesurée en cinq points d'ancrage (1=fortement freinante ; 3=neutre ; 5=fortement facilitante)
Seuil p < 0,20 pour le test de Kruskal-Wallis et items correspondants
Seuil p < 0,10 pour le test de Mann-Whitney
L’analyse de la concordance a été conduite deux fois pour s’adapter au questionnaire réalisé avec
les groupes. Le premier test (Tableau 4.11) prend en compte les douze items de réponses
proposés aux répondants. Les items 6, 7 et 8 n’étant pas posés au groupe SSE, le test s’applique
uniquement au groupe Construction et VPO. Le biais créé ne nous permet donc pas d’utiliser les
résultats trouvés.
148
La seconde analyse est réalisée (Tableau 4.11) en excluant les items de réponses 6, 7 et 8. Ce
choix permet de comparer la concordance des réponses des trois groupes. Ce test fait apparaître
une forte concordance entre les trois groupes (W=0,738, χ2=17,706, ddl=8 et p=0,003).
Ce résultat nous permet d’observer une communion de point de vue sur les éléments facilitants
du processus de déploiement des CI. Les résultats de ces observations, compte tenu de l’aspect
général des items de réponses proposés, doivent être pris en compte dans le déploiement de
nouveaux outils issus de la philosophie Lean. On peut trouver en tête des éléments facilitants :
Ce résultat montre la très grande importance à accorder au support des groupes dans le cadre
d’une implantation Lean Construction et l’absolue nécessité d’un soutien efficace de la part de la
hiérarchie de chacune des entités impliquées (ici RTA et SLH).
Les 3 forces les moins facilitantes (aucune n’a été jugée freinantes) sont les forces 4, 9 et 5. Ce
résultat montre le faible impact lié à l’origine de l’outil choisi ; il vient soutenir l’idée que la
culture Lean, issue de l’industrie manufacturière, peut avoir sa place dans la construction.
Tableau 4.11: Influence des forces en présence sur le processus d’implantation des CI,
concordance entre les réponses des trois groupes
Le biais identifié au 4.4.5.1 doit toutefois nuancer cette dernière analyse. L’approche déductive
choisie pour ce mémoire, en l’absence d’étude équivalente disponible, a amené à la construction
du questionnaire utilisé en fonction des observations de l’intervenant-chercheur et d’entretiens
149
avec les principales parties prenantes. N’ayant pas mis en évidence les forces freinantes agissant
dans le cadre d’une implantation Lean Construction, une nouvelle étude devrait s’attarder sur ce
point pour venir compléter les forces facilitantes mises en évidence.
150
L’enquête menée auprès des parties prenantes a privilégié l’interrogation de celles-ci sur les
méthodes et les choix effectués dans le cadre du déploiement Lean Construction au projet AP60.
Les répondants ont dû évaluer leur accord avec neuf méthodes selon une échelle de Likert à cinq
points d’ancrage (1=fortement en désaccord ; 5= fortement en accord) :
Les résultats (Tableau 4.12) mettent en évidence la méthode 6 comme étant l’item avec lequel les
répondants sont le moins en accord avec une variance de 1,101. L’analyse des réponses fait
apparaître un écart significatif des moyennes de cet item par rapport à tous les autres. Ce résultat
traduit le manque de préparation des équipes lors de la première séance mais aussi le choix
effectué par celles-ci de se lancer rapidement.
L’analyse de la variance des réponses montre un écart-type équivalent dans le cas des neuf items.
Celui-ci va de σMÉTHODE2=0,970 à σMÉTHODE8=1,130. Ces résultats montrent l’absence d’une réelle
unité de point de vue dans l’échantillon des répondants.
151
Tableau 4.12: Pertinence des méthodes employées pour déployer les CI, comparaison deux à
deux des items de réponse
Méthodes:
TOUS p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value
N total=30 Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail
Moyenne Écart Type METHODE1 METHODE2 METHODE3 METHODE4 METHODE5 METHODE6 METHODE7 METHODE8
METHODE1 3,500 1,103
METHODE2 3,692 0,970 0,0787
METHODE3 3,615 0,983 0,3579 0,2594
METHODE4 4,000 1,018 0,0165 0,0505 0,0154
METHODE5 3,960 0,889 0,0074 0,1377 0,0780 0,5957
METHODE6 2,545 1,101 0,0010 0,0000 0,0000 0,0000 0,0000
METHODE7 3,481 0,893 0,6894 0,2445 0,3222 0,0027 0,0242 0,0004
METHODE8 3,259 1,130 0,2195 0,1459 0,1179 0,0037 0,0009 0,0016 0,2829
METHODE9 3,741 1,023 0,1944 0,6808 0,4258 0,1530 0,1747 0,0001 0,1148 0,0142
* mesurée en cinq points d'ancrage (1=faiblement en accord ; 5=fortement en accord)
Groupe d'items pour lequel les réponds sont le moins en accord
Seuil p < 0,10
Des écarts significatifs entre les réponses des trois groupes pour les items forces 7, 8 et 9 sont mis
en évidence par les résultats (Tableau 4.13) de la consultation de parties prenantes
(K-W7=0,0422 ; K-W8=0,0136 ; K-W9=0,1902).
La comparaison groupe à groupe des résultats de la consultation permet d’identifier dans le cas
des trois items 7, 8 et 9 des différences significatives au seuil de 0,10 entre les groupes
(comparaison deux à deux) avec σ7=0,893 ; σ8=1,130 ; σ9=1,023.
Tableau 4.13: Pertinence des méthodes employées pour déployer les CI, comparaison par groupe
SOUS-GROUPES TAUX DE SIGNIFICATION
GROUPE 1 GROUPE 2 GROUPE 3 K-W M-W M-W M-W
TOUS
CONSTRUCTION SSE VPO p_value p_value p_value p_value
Méthodes: Ntotal=30 N1=8 N2=9 N3=13 Two-tail Two-tail Two-tail
Moyenne Ecart-type Moyenne Ecart-type Moyenne Ecart-type Moyenne Ecart-type 1 vs 2 1 vs 3 2 vs 3
METHODE1 3,500 1,103 3,143 1,215 3,333 1,506 3,818 0,751 0,3501 0,6280 0,1510 0,7330
METHODE2 3,692 0,970 3,571 0,976 3,286 1,380 4,000 0,603 0,4242 0,8050 0,3840 0,3400
METHODE3 3,615 0,983 3,500 0,535 3,286 1,380 3,909 0,944 0,4123 1,0000 0,2720 0,3750
METHODE4 4,000 1,018 4,125 0,641 3,625 1,302 4,167 1,030 0,5486 0,5050 0,6780 0,3430
METHODE5 3,960 0,889 3,714 0,951 3,875 0,835 4,200 0,919 0,5446 0,8670 0,3640 0,4600
METHODE6 2,545 1,101 2,167 1,169 2,167 0,753 3,000 1,155 0,2182 0,9370 0,2200 0,1470
METHODE7 3,481 0,893 3,286 0,488 3,000 1,069 3,917 0,793 0,0422 0,7790 0,0560 0,0570
METHODE8 3,259 1,130 2,500 1,069 3,000 1,155 3,917 0,793 0,0136 0,6130 0,0040 0,0830
METHODE9 3,741 1,023 3,143 1,215 3,750 1,035 4,083 0,793 0,1902 0,3360 0,0830 0,5210
* mesurée en cinq points d'ancrage (1=faiblement en accord ; 5=fortement en accord)
Seuil p < 0,20 pour le test de Kruskal-Wallis et items correspondants
Seuil p < 0,10 pour le test de Mann-Whitney
Méthode 7 et 8 :
Le test de Mann-Whitney permet de mettre en lumière l’écart de réponse entre le groupe de VPO
et les groupes Construction et SSE concernant les items 7 et 8. Dans ces deux cas, le groupe de
VPO estime que la formation reçue et le degré de préparation du groupe étaient corrects pour
l’utilisation des CI contrairement aux deux autres groupes.
152
Les réponses des groupes Construction et SSE s’interprètent chacune de manière différente :
La volonté de lancement rapide des CI, imposant les derniers alignements au cours des premières
séances, ne peut être retenue comme un facteur d’explication de l’écart de préparation ressenti,
car les deux groupes construction et VPO étaient exactement dans le même cas.
• Dans le cas du groupe SSE, le manque de préparation ressenti est attribuable au manque
de formation et d’accompagnement proposés au lancement et à la première phase
d’utilisation du CI. Ces deux éléments proviennent de l’absence d’une ressource dédiée à
l’amélioration continue sur le chantier de construction.
Méthode 9 :
Le support reçu dans le cadre de l’utilisation, bien que globalement jugé suffisant, fait apparaître
une différence de perception significative entre les groupes de VPO et Construction dont les
moyennes de réponse sont respectivement 4,083 et 3,143.
Cette différence de perception trouve une source d’explication avec les mêmes arguments que
ceux mis en avant pour expliquer les différences de perception entre les groupes Construction et
VPO sur les items 7 et 8.
La curiosité, les initiatives et le comportement volontaire des groupes VPO et SSE les ont amenés
à trouver le soutien dont ils avaient besoin. On observe, par les réponses à cet item, un indicateur
de l’appropriation de l’outil CI.
Le test de Kendall (Tableau 4.14) appliqué aux différents items de la variable « méthode » fait
apparaître une forte concordance entre les trois groupes (W=0,794, x2=19,056, ddl=8 et p=0,000).
153
Les items méthodes apparaissant comme les plus fortement adaptés sont les items 4, 5 et 9. Ils
représentent à la fois des éléments choisis (item 4), de contexte (item 5) et de support (item 9).
Aucune grande direction ne se détache.
Les trois items apparaissant comme les moins adaptés (items 6, 8 et 7) sont à l’inverse très
concentrés ; ils traitent tous de la préparation des équipes à l’utilisation des CI. Ce résultat reflète
le choix effectué par chacun des groupes de commencer au plus tôt l’utilisation des CI et
d’effectuer une partie de l’apprentissage directement au contact de l’outil. Ce choix est jugé, à
postériori, comme peu adéquat par les trois groupes.
Tableau 4.14: Pertinence des méthodes employées pour déployer les CI, concordance entre les
réponses des trois groupes
Les résultats du questionnaire nous permettent, d’une part, d’observer des éléments généraux
communs à toutes les entités d’un chantier et qui vont permettre de guider une future intégration
du Lean Construction. Ils mettent aussi en évidence les différences de point de vue existant à
l’intérieur d’un même projet et d’un même chantier sur l’introduction d’un nouvel outil. Ces
différences de point de vue amènent la nécessité de déployer autant d’approches, de solutions et
de supports spécifiques.
154
4.5 Conclusion
Les résultats présentés dans ce chapitre permettent de dresser une cartographie très précise du
processus d’implantation du Lean Construction au sein du Projet AP60. Ces résultats mettent en
évidence les ouvertures possibles du secteur de la construction à de nouveaux modes de travail en
utilisant les Centres d’Information mais également les autres initiatives déployées.
La conduite de cette étude développe un regard inédit sur les mécanismes à l’œuvre dans le cadre
de l’introduction de nouveau outils de travail requérant une évolution de la culture de travail. Les
résultats de cette étude permettent de s’éloigner du point de vue macroscopique pour comprendre
les dynamiques existant au sein de l’organisation. Ils permettront de tracer plus précisément le
chemin d’une nouvelle implantation de la culture Lean Construction dans de nouveaux projets.
La qualité de ces apprentissages revient, pour une grande part, à la méthodologie de recherche
employée. Celle-ci a permis au chercheur de s’approcher au plus près du terrain et d’obtenir ainsi
des résultats inédits qui viendront enrichir la littérature scientifique. Le chapitre 5 propose des
recommandations et des avenues de recherches issues de ces résultats.
155
Ce chapitre propose de revenir sur les résultats présentés dans le chapitre précédent pour les
analyser.
5.1 Contributions
Cette partie effectue un retour sur la recherche menée pour évaluer les contributions de celle-ci.
Dans un premier temps sont présentées les contributions théoriques de cette recherche pour la
littérature scientifique. Dans un second temps sont présentées les contributions pratiques de ce
travail de recherche.
Or, la philosophie Lean ne se limite pas à des outils ou un concept, il s’agit d’une culture qui se
développe dans une organisation. Les outils en sont simplement les moyens, les vecteurs.
Cette étude apporte l’originalité d’être conduite depuis l’intérieur même de l’organisation qui
s’engage dans l’implantation du Lean Construction. Le chercheur dispose alors d’une position
privilégiée pour observer le changement, les modes de fonctionnement interne ainsi que les
nombreux éléments qui ne transparaitraient pas dans le cas d’une consultation de parties
prenantes par un chercheur externe.
La première contribution pratique de cette étude se trouve dans le travail mené directement sur le
terrain par l’intervenant-chercheur qui, dans le cadre de son mandat et profitant de son intégration
à temps plein aux équipes de projet, a conduit la mise en place de nouveaux outils de travail dans
l’organisation, la formation des différentes partie prenantes et la promotion du changement. C’est
grâce à son action de facilitation du changement, de définition de la marche à suivre et ses
interactions avec les parties prenantes qu’il a conduit son intervention sur l’objet d’étude et
atteint ainsi une première étape vers le développement d’une culture de travail Lean au sein de
l’organisation.
Dans un second temps, cette contribution pratique prend la forme d’une création de
connaissances et de compétences chez toutes les parties prenantes impliquées : maître d’œuvre et
firme d’ingénierie. La réalisation de cette étude constitue un précédent pour tous les participants
et sera le point de départ d’une implantation future sur un nouveau projet. Celle-ci pourra profiter
des leçons apprises de la première expérience acquise dans cette étude.
«The only unfortunate reflection is the lost opportunities in instilling the Lean mindset
from the inception of the project.»
Cette détermination se trouve récompensée par une reconnaissance du travail accompli de la part
des fonctions corporatives de Rio Tinto Alcan. Cette recherche aura permis de contribuer à la
visibilité du concept de Lean Construction à l’intérieur de l’organisation.
157
5.2 Limites
L’étude présentée dans ce mémoire, même si elle a bénéficié d’une importante liberté, a
rencontré des limites. Celles-ci sont dues tout autant aux choix méthodologiques, au contexte
autour de l’objet d’étude qu’aux règles choisies pour l’encadrer. Cette partie relève les limites de
cette recherche et tente d’en évaluer l’impact sur les recherches futures.
Cette étude exploratoire a permis d’ouvrir de nombreuses pistes de recherche mais nécessitera
d’autres expérimentations pour affiner les résultats mis en évidence et les comparer entre eux.
Le contexte et l’environnement sont des éléments sur lesquels le chercheur a peu d’influence
mais qui ont un impact majeur sur l’objet d’étude. Dans le cas de cette étude, l’élément ayant eu
le principal impact est constitué par la phase du projet au cours de laquelle l’étude est réalisée.
Ainsi que le montre la Figure 2.6, la période sur laquelle s’est déroulée cette recherche ne couvre
pas la totalité de la durée du projet ni de la phase de construction. Cet élément du contexte a agit
sur le volet intervention de cette recherche en limitant les choix réalisables par l’intervenant-
chercheur.
Pour tenir compte de ce facteur et effectuer les choix les plus performants dans le cadre du projet
AP60, l’intervenant-chercheur a conçu une solution personnalisée. Le déploiement des Centres
d’Information a pris une direction de bas en haut et ceux-ci ont été construits autour des équipes
fonctionnelles de l’organisation. L’imposition de ces schémas permet de construire des avenues
de recherches qui seront détaillées plus tard dans ce chapitre.
158
Ce projet de recherche et la partie intervention qui le caractérise est mis en place suivant la
volonté du maître d’œuvre d’expérimenter et d’implanter le Lean Construction sur son projet de
construction. Ce mémoire fait la démonstration de l’importance de l’implication de la firme
d’ingénierie dans le cadre de l’implantation du Lean Construction à un projet. La firme
d’ingénierie associée au projet tient donc un rôle de suiveur et non de meneur pour cette
expérimentation. Une position de leader assurée par la firme d’ingénierie constituerait un élément
facilitant très important pour l’implantation du Lean Construction dans un prochain projet.
Le projet de construction décrit dans cette étude est une organisation temporaire multiple qui
nécessite la création d’une équipe rassemblant tous les talents nécessaires à a la réalisation du
projet. Une fois le projet terminé, cette équipe est dissoute.
Certains entrepreneurs travaillent avec un personnel stable qui reste de nombreuses années dans
l’entreprise et participe à la transmission du savoir. Dans le cas du projet AP60, la firme
d’ingénierie est un consortium recrutant une partie de ses personnels sous contrat spécifiquement
pour le projet en cours. Ce mode de fonctionnement accentue l’effet de dispersion de l’équipe
une fois le projet terminé et ne permet pas d’envisager la réunification de l’équipe précédemment
formée pour un nouveau projet.
En plus d’avoir guidé certains choix pour l’expérimentation du Lean construction, le contexte de
l’objet d’étude a amené la mise en place d’une règle. L’obligation de ne pas modifier les
structures organisationnelles du projet a servi de cadre pour le déploiement Lean Construction.
159
Le choix de ne pas modifier les structures organisationnelles du projet a un impact direct sur
l’approche systémique présentée dans la Figure 4.1. Cela revient à souhaiter conserver inchangé
le systèmes opérationnel, l’une des trois dimensions de cette approche :
• Le système opérationnel
Or, pour obtenir un changement pérenne à long terme, il faut agir simultanément sur les trois
dimensions. Cette limite que nous nous sommes imposée ne permettait pas de conduire le
changement à son terme. L’identification de cette limite nous montre une nouvelle avenue de
recherche.
53
Voir 4.1.1 - Analyse systémique du changement
160
L’étude menée par l’intervenant-chercheur et la place qu’il a occupé dans le Projet AP60 tout au
long de son mandat lui ont permis d’observer de nombreuses avenues de recherche ou futures
opportunités pour le concept de Lean Construction et les Centres d’Information.
Ces avenues de recherche, susceptibles d’offrir de nouvelles directions de recherche, sont aussi
des ébauches de propositions pratiques pour de futurs déploiements Lean Construction.
Dans le cadre de cette maîtrise, une approche de recherche inductive a été choisie. Grâce à cette
méthode il a été possible, à partir du thème et de la question de recherche, d’effectuer de
nombreuses observations directement sur le terrain. Ces observations ont permis d’élaborer un
questionnaire soumis aux parties prenantes de la recherche. Leurs réponses ont été traitées et
analysées pour ensuite interpréter les résultats suivant les observations de l’intervenant-
chercheur.
Cette méthode de recherche inductive a débuté avec des considérations qualitatives, pour ensuite
rechercher des données quantitatives et revenir ensuite à un mode qualitatif.
Une continuité intéressante de cette étude serait d’utiliser une approche hypothéticodéductive.
Celle-ci permettrait, d’après les résultats présentés dans ce mémoire, de construire un
questionnaire ciblé sur les éléments mis en évidence. Il serait ensuite possible d’effectuer une
comparaison de résultats.
Le cas d’étude présenté dans ce mémoire se déroule dans un contexte particulier qui a été
explicité. Dans cette partie nous évoquerons la possibilité d’un schéma d’intégration dans lequel
un plus grand nombre de possibilité s’offriraient au facilitateur. Celui-ci pourrait donc effectuer
davantage de choix par rapport aux leçons apprises du mémoire.
L’engagement des parties prenantes, dans le cas de l’implantation d’une nouvelle culture de
travail, constitue un élément de base. Le schéma de déploiement suivi dans le cas du projet AP60
161
est parti du bas vers le haut pour s’adapter au stade atteint pas le projet et pour être capable
d’obtenir rapidement des gains.
Dans le cas d’un projet où des Centres d’Information seraient déployés plus tôt, il serait
intéressant de suivre un cheminement de haut en bas. Ce choix permettrait notamment :
• La possibilité de mettre en place des audits de standard par les responsables (processus
existant en opération) pour maintenir le niveau de l’outil
Dans le cas d’un déploiement tôt dans un projet, le choix du cheminement depuis la direction
apporterait des bénéfices importants. Cela constitue un argument pour déployer la philosophie
Lean dès le lancement du projet.
La phase de projet choisi pour le déploiement de Centres d’Information n’a laissé que peu de
possibilités quant au choix des équipes utilisatrices de cet outil et l’architecture54 organisant les
Centres d’Information.
54
Figure 2.9 - Structure des Centres d'Information au Projet AP60
55
Voir 2.2.6 - Fonctionnement
162
Déployée beaucoup plus tôt dans la vie d’un projet, une structure accompagnant le
fonctionnement matriciel du projet pourrait avoir la forme suivante :
Figure 5.1 - Schéma possible d'intégration des Centres d'Information dans une organisation
matricielle
Cette architecture, représentée ci-dessus sous une de ses formes possibles, nécessite une
construction progressive et un dynamisme fort dans les Centres d’Information qui la composent.
Ce dynamisme doit se traduire par l’adaptation continue des Centres d’Information à l’évolution
du projet. Dans les faits, il faudra observer une évolution des ICP, des tableaux d’opération, du
calendrier maître et aussi de la position géographique pour suivre l’activité.
Les Centres d’Information (Figure 5.2 et Figure 5.3) de secteur, grâce à leur évolution et
proximité avec les activités de projet, auraient pour objectifs d’accompagner l’exécution dans
chacune des phases du projet et leur transition en regroupant les chefs de secteur de chacune des
fonctions au sein du même forum.
163
Figure 5.2 - Format possible d'un Centre d'Information par secteur - Section des ICP
Figure 5.3 - Format possible d'un Centre d'Information par secteur – Autres sections
La mise en place de Centres d’Information par secteur doit être accompagnée par le déploiement
d’un Centre d’Information de direction équivalent au Centre d’Information N0 mis en place dans
le cadre du projet AP60.
164
Le déploiement de Centres d’Information doit aussi se faire dans la direction du travail de terrain.
Dans cette optique, l’intégration des fonctions du projet dans ce nouveau type d’architecture doit
faire l’objet d’une réflexion particulière pour permettre d’intégrer toutes les activités et d’éviter
les « zones grises » qui représentent une importante source de gaspillage.
5.3.2.3 Construction d’un système « Pull » dans les transferts, depuis Ingénierie jusqu’à
Opération
Une partie de l’étude menée dans ce mémoire a traité de l’établissement d’un flux tiré depuis
d’équipe d’opération sur la construction en passant par la VPO. Le développement de CI par
secteur permettrait de mettre en place un flux tiré entre les différentes fonctions du projet depuis
la phase d’ingénierie. Ce mode de fonctionnement offrirait à l’équipe de construction un moyen
de s’assurer de la réception des livrables de l’équipe d’ingénierie.
5.3.2.4 Mise en place des Centres d’Information dès la phase de faisabilité du projet
La Figure 2.4 nous présente les différentes dimensions d’un projet de construction. Dans cette
figure, la dimension relative aux phases de projet mérite notre attention. Dans le cadre de cette
étude, seules les phases de construction, VPO et opération ont été traitées. La phase d’ingénierie
a bénéficié de plusieurs initiatives préalables à cette étude mais non reliées aux autres phases du
projet.
Ce choix apporterait également une plus grande marge de manœuvre dans les choix
d’implantation à réaliser (sens de déploiement, construction par secteur,…) et la possibilité
d’inclure le recours à ces méthodes de travail dans les contrats liant les différentes parties
prenantes au maître d’œuvre. Il permettrait de réaliser plus tôt un développement de compétences
des parties prenantes et la mise en place d’un mentorat. Tous ces éléments iraient dans le sens
d’une réduction de la résistance au changement des équipes.
165
L’implantation des Centres d’Information dès la phase de faisabilité d’un projet permettrait
également de choisir plus librement les différents outils à implanter (« Last Planner », résolution
de problème, amélioration des procédés, implantation avec les entrepreneurs, travaux standards,
etc…) ainsi que la méthode d’intégration aux processus de travail.
L’analyse effectuée au 4.1.1 et l’observation des limites décrites au 5.2.3 ont permis d’identifier
un élément freinant pour le processus d’implantation du Lean Construction. Dans le cadre d’une
nouvelle expérimentation ou utilisation du Lean Construction dans un projet équivalent il serait
intéressant de mener une réflexion sur l’« Infrastructure de gestion »56.
Cette réflexion permettrait d’adapter les éléments de l’« Infrastructure de gestion » de manière à
soutenir le déploiement du Lean Construction et de motiver les équipes dans le cadre d’un
nouveau projet. Parmi les éléments à prendre en compte, on peut citer :
• La structure organisationnelle
• La structure d’amélioration
Le but de cette réflexion est de s’assurer de ne placer aucune barrière de principe dans les choix
relatifs au déploiement d’une nouvelle culture de travail.
Dans cette recherche, le rôle de la firme d’ingénierie agissant en tant que représentant du maître
d’œuvre au chantier dans le cadre du contrat IAGC, s’est avéré central. Ce groupe crée le
principal lien entre le maître d’œuvre et les entrepreneurs. Il devient alors impératif de s’assurer
56
Voir la Figure 4.1 - Illustration de l'approche systémique et la partie 4.1.1 - Analyse systémique du changement
166
que cet acteur très important du chantier soit un ambassadeur de la culture Lean en donnant
l’exemple.
Une solution envisageable pourrait être l’introduction, dans le contrat IAGC, de la nécessité pour
la firme d’ingénierie d’utiliser et promouvoir le Lean Construction comme méthode de travail.
La revue de littérature détaille en 1.4 page 37 les critères de mesure du succès d’un projet et la
construction des ICP. Introduire dans les éléments de mesure des performances le niveau atteint
par l’implantation de la culture de travail Lean et la qualité de fonctionnement des outils associés
donnerait un signe très fort sur l’importance accordée à ce déploiement. L’implication des
gestionnaires dans le déploiement du Lean Construction deviendrait alors un de leurs objectifs.
La mise en place d’un tel système de mesure de performance, intervenant dans l’« Infrastructure
de gestion », représente une avenue de recherche à part entière compte tenu de la complexité du
sujet et de l’impact possible sur le projet.
Pour ses installations, RTA a développé un outil qui peut constituer une partie de la solution en
étant adapté au projet de construction : le Leadership de maintien (outil permettant d’évaluer le
niveau d’utilisation d’un Centre d’Information). Il n’a pas été mis en place dans le cadre de cette
étude à cause du sens de déploiement des Centres d’Information.
Ce mentorat, dont les conditions doivent être établies de gré à gré entre le gestionnaire et le
facilitateur Lean, doit permettre au gestionnaire d’avancer dans sa compréhension de la culture
Lean, d’accompagner au plus près l’évolution de l’organisation et d’identifier les opportunités.
167
Différents éléments ont été relevés dans cette étude concernant les indicateurs de performance et
la récupération d’information :
1. La différence de vision du chantier entre les différents groupes qui, dans le cas du
transfert de Construction vers VPO, empêche un suivi quantitatif proactif de l’avancement
des travaux : voir Tableau 2.2: Lecture du projet suivant les différentes phases et
l’explication associée.
2. La difficulté pour créer un lien entre les ICP suivies à chaque niveau de l’organisation
3. La volonté de la part des parties prenantes de suivre le plus d’informations possible à tous
les niveaux
Une nouvelle approche possible, tenant compte de ces observations, serait de construire les ICP
depuis la direction du projet. L’information nécessaire au suivi du processus serait alors tirée
depuis le terrain vers la direction, selon les besoins de celle-ci. Cette approche, complémentaire
de l’introduction des Centres d’Information depuis la direction vers les équipes de terrain, doit
permettre d’aligner l’organisation sur le maintien en contrôle des processus pour alimenter les
ICP en amont dans le processus de gestion.
Il est important de placer une limite claire entre l’utilisation des ICP qui permettent de s’assurer,
par l’intermédiaire d’un nombre d’indicateurs restreints, que les processus sont sous contrôle et la
consultation d’un rapport d’information qui permet de comprendre les problèmes indiqués par les
ICP. Il s’agit là de deux systèmes d’information complémentaires pour deux usages différents.
Le déploiement de Centres d’Information dans le cadre d’un projet de construction a montré les
gains qu’ils peuvent apporter. Seuls le maître d’œuvre et la firme d’ingénierie ont été impliqués
dans ce déploiement. Les résultats observés plaident pour un élargissement du cadre d’utilisation
de cet outil. Un rapprochement vers le terrain et les activités d’exécution est totalement
envisageable dans le cas d’une utilisation déjà mature de la part du maître d’œuvre et de son
représentant.
168
La solution à étudier et à mettre en place doit passer par une exemplarité du maître d’œuvre et de
son représentant à utiliser l’outil Centre d’Information et à en tirer des gains. Ces pratiques
apportent la possibilité d’aider les entrepreneurs à mettre en place des Centres d’Information pour
leur propre compte.
Pour pouvoir être cohérente, l’implantation de Centre d’Information chez les entrepreneurs doit
être accompagnée d’un moyen de remonter les craintes vers la firme d’ingénierie et une
communication avec la gestion du projet.
Une possibilité pour organiser cette collaboration dans le cadre de l’utilisation de l’outil Centre
d’Information pourrait consister à mettre en place une salle de gestion (war room). Cette salle de
gestion regroupant différents outils de gestion de projet permettrait à la firme d’ingénierie de
rencontrer les entrepreneurs (de manière individuelle) dans un cadre formel pour suivre leurs
performances, craintes et prochains défis.
Les entrepreneurs ne constituent pas l’unique groupe d’acteur vers qui il serait possible de
chercher des gisements d’amélioration. Les principaux fournisseurs d’un projet, notamment
locaux sont aussi susceptibles d’être parties prenantes des initiatives d’amélioration continue.
169
Plusieurs initiatives issues du Lean Production et du Lean Construction ont été explorées sur le
projet AP60. On peut citer les réalisations suivantes qui ont montré des potentiels très
intéressants :
Dans le cas d’un nouveau déploiement du Lean Construction sur un projet de construction, une
avenue de recherche possible consisterait à mettre en place les conditions d’un usage
systématique de chacune de ces bonnes pratiques dans leur domaine d’utilisation.
• L’amélioration des procédés pourrait être généralisée dans le cas d’activités répétitives
avec chacune des parties prenantes, depuis les fournisseurs principaux, jusqu’au maître
d’œuvre.
• Propreté bon ordre est un réflexe à développer partout et doit évoluer vers une
approche 5S.
• La gestion visuelle doit devenir un moyen courant de faciliter les processus et activités du
chantier.
Un autre élément présenté dans la revue de littérature, 1.3.7 - Cartographie de la chaîne de valeur,
devrait être appliqué en début de projet aux processus majeurs. De cette façon, il serait possible
d’optimiser ces processus très en amont, avant leur montée en activité, et de découvrir au plus tôt
les gaspillages qu’ils seraient susceptibles de générer.
170
Les concepts de Lean Production et Lean Construction ont un aspect holistique très fort. Chacun
des éléments présentés dans ce chapitre ne peuvent être perçus comme étant l’élément
fondamental. C’est l’utilisation de l’ensemble de ces éléments dans le but d’aller vers une
nouvelle culture de travail qui permet à l’organisation de générer les gains les plus importants.
171
CONCLUSION
Cette étude a permis de mettre en évidence, en accord avec la littérature scientifique actuellement
disponible, les apports possibles de la culture Lean pour un chantier de construction. Mais elle a
surtout aidé à la compréhension des mécanismes en action dans le cadre de l’introduction de cette
nouvelle culture pour le secteur de la construction. Ces mécanismes ont mis en évidence les
attentes et les craintes générées par le changement apporté à l’organisation. Ces éléments sont
naturels dans le cadre d’un changement et leur analyse doit permettre dans de prochains
déploiements de cibler la gestion du changement à mettre en place.
Ce projet de recherche est un des premiers à présenter un cas d’utilisation du Lean Construction
au Québec et un des premiers dans le monde à aborder cette problématique de recherche avec une
méthodologie de recherche-intervention. Cette étude, utilisant une approche inductive, ouvre la
porte à une nouvelle étude choisissant une approche hypothético-déductive en s’appuyant sur les
résultats présentés dans ce mémoire.
172
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Le nombre de blessures est exprimé en fréquence pour 200 000 heures travaillées.
Accueil
En route vers 0
1998-01
Alma
23 blessures
2003-05
2e phase Alouette − Sept-Îles
14 blessures
2007-2008
Jonquière UTB
4 blessures
Dans le cas du chantier AP60, cette fréquence s’établit à l’heure d’écriture de ce mémoire à :
Questionnaire+d’Enquête+
+
!
Toutes! les! données! seront! recueillies! et! traitées! de! façon! strictement+ anonyme+ et+ confidentielle.!!
Celles4ci!serviront!à!une!analyse!globale!du!déploiement!des!Centres!d’information!au!Projet!AP60.!
!
Concept+
• Que!représente!le!concept!de!Lean!pour!vous?!
!
!
!
!
!
Objectifs!
Évaluez+les+énoncés+suivant+en+cochant+la+réponse+la+plus+appropriée,+ Je!suis! Je!suis!
fortement! Je!suis!moyennement! fortement!
selon+vous.+ N/A+
en! en!ACCORD! en!
Vous+avez+la+possibilité+d’ajouter+un+commentaire+libre.! DÉSACCORD! ACCORD!
! + 1+ 2+ 3+ 4+ 5+
Les! Objectifs! de! mise! en! place! d’un! centre! d’information! étaient! clairs! et! ! ! ! ! ! !
cohérents.!
Observation,:,
+
!
Attentes+:+Quels!étaient!vos!attentes+initiales!pour!le!centre!d’information?!
Évaluez+vos+attentes+en+cochant+la+réponse+la+plus+appropriée,+selon+ Était! Était!
FAIBLEMENT! Était!MOYENNEMENT! FORTEMEN
vous.+Certaines+réponses+sont+proposées,+vous+avez+la+possibilité+d’en+ N/A+
une! une!ATTENTE+ T!une!
ajouter.+ ATTENTE! ATTENTE+
! + 1+ 2+ 3+ 4+ 5+
Créer! de! la! communication! entre! les! groupes! (cas! du! Centre! d’! Info! !
Construction4VPO)! ! ! ! ! !
Améliorer!la!communication! ! ! ! ! ! !
Aligner!les!objectifs!et!méthodes!de!suivi! ! ! ! ! ! !
Mise!en!lumière!des!éléments!critiques! ! ! ! ! ! !
Partage!de!l’information! ! ! ! ! ! !
Identification!des!problèmes,!irritants!et!menaces! ! ! ! ! ! !
Rencontres!de!courte!durée! ! ! ! ! ! !
Processus!formel!de!suivi!des!indicateurs!choisis! ! ! ! ! ! !
Accompagner!la!résolution!de!problèmes! ! ! ! ! ! !
! ! ! ! ! ! !
! ! ! ! ! ! !
! ! ! ! ! ! !
! ! ! ! ! ! !
!
• Ont4elles!été!atteintes?!
!
!
!
1
187
Crainte(:(Quels&étaient&vos&craintes(initiales&pour&le¢re&d’information?&
Évaluez(vos(craintes(en(cochant(la(réponse(la(plus(appropriée,(selon( Était&
Était&
Était&MOYENNEMENT& FORTEMENT&
vous.(Certaines(réponses(sont(proposées,(vous(avez(la(possibilité(d’en( N/A( FAIBLEMENT&
une&CRAINTE( une&
une&CRAINTE&
ajouter.( CRAINTE(
& ( 1( 2( 3( 4( 5(
Création&d’un&outil&servant&uniquement&à&présenter&l’information& & & & & & &
Charge&de&travail&supplémentaire&pour&la&préparation&du&Centre&d’information& & & & & & &
Charge&de&travail&supplémentaire&pour&la&l’utilisation&du&Centre&d’information& & & & & & &
Temps&nécessaire&à&la&mise&en&place&du&Centre&d’information& & & & & & &
Difficulté&de&recueille&de&l’information& & & & & & &
Système&et&procédure&lourds&et&rigides& & & & & & &
Déclenchement&de&prise&d’action&inapproprié& & & & & & &
Partage&des&craintes&et&problème&devant&l’équipe& & & & & & &
Emplacement&physique&du&Centre&d’Information& & & & & & &
Un&Centre&d’Information&par&fonction&plus&que&par§eur& & & & & & &
& & & & & & &
& & & & & & &
& & & & & & &
&
• Se&sontIelles&réalisées?&
&
&
&
&
Motivation(:(Quelles&étaient&les&forces(freinantes&ou&facilitantes(observés&lors&de&la&mise&en&place&du¢re&
d’information?&
Évaluez( les( forces( freinantes( et( facilitantes( en( cochant( la( réponse( la( FORTEMEN
FORTEMENT& MODÉREMANT& T&
plus(appropriée,(selon(vous.(Certaines(réponses(sont(proposées,(vous( N/A(
FREINANTE& Freinante&ou&Facilitante( FACILITAN
avez(la(possibilité(d’en(ajouter.( T E(
& ( 1( 2( 3( 4( 5(
Implication&et&leadership&de&la&direction&RTA&du&Projet& & & & & & &
Implication&et&leadership&de&la&direction&SLH&du&Projet& & & & & & &
Présence&d’une&ressource&support&dédiée&sur&site& & & & & & &
Utilisation&d’un&nouvel&outil&issu&du§eur&manufacturier& & & & & & &
Utilisation&des&standards&de&présentation&RTA& & & & & & &
Réunion&de&deux&équipes&distinctes& & & & & & &
Préparation&du¢re&avant&le&début&des&transferts&ConstructionIVPO&(cas&du& & & & & & &
Centre&d’&Info&ConstructionIVPO&et&VPO)&
Animation& de& la& rencontre& par& un& personnel& SLH& (cas& du& Centre& d’& Info& & & & & & &
ConstructionIVPO&et&VPO)&
Votre&implication&dans&la&préparation& & & & & & &
Possibilité&de&choisir&les&indicateurs&à&suivre& & & & & & &
Qualité&de&l’animation&des&rencontres& & & & & & &
L’intérêt&de&l’équipe&pour&l’outil&Centre&d’Information& & & & & & &
& & & & & & &
& & & & & & &
& & & & & & &
2
188
Résultat(:(
• Quels&impacts,&l’introduction&du¢re&d’Information,&a&amené&sur&votre&travail?&
&
&
&
&
• Quel&support&avez9vous&reçu&pour&«faire&vivre»&le&Centre&d’Information?&
&
&
&
&
• Quels&changements&avez9vous&observé&au&niveau&de&l’équipe?&
&
&
&
&
• Comment& jugez9vous& le& déploiement& du& centre& d’information,& à& l’heure& actuelle,& par& rapport& à& vos&
attentes&et&craintes&initiales?&
&
&
&
&
Méthode(:&
Je&suis& Je&suis&
Évaluez(les(énoncés(suivant(en(cochant(la(réponse(la(plus(appropriée,( fortement& Je&suis&moyennement&en& fortement&
N/A(
selon(vous.( en& ACCORD& en&
DÉSACCORD& ACCORD&
& ( 1( 2( 3( 4( 5(
La& procédure& pour& déployer& le& Centre& d’Information& était& clairement& &
présentée&et&expliquée.( & & & & &
Le&temps&pris&pour&préparer&le&Centre&d’Information&était&approprié( & & & & & &
La&charge&de&travail&nécessaire&à&la&préparation&du&Centre&d’Information&était& & & & & & &
appropriée(
La& personne& impliquée& dans& la& préparation& du& Centre& d’information& était& les& & & & & & &
bonnes(
La&période&d’implantation&du&Centre&d’information&était&la&bonne( & & & & & &
ère
Lors& de& la& 1 & rencontre& du& Centre& d’Information,& l’équipe& était& bien& & & & & & &
préparée.(
Pour& l’utilisation& courante& du& Centre& d’Information,& l’équipe& était& bien& & & & & & &
préparée.(
La&formation&reçue&pour&utiliser&le&Centre&d’&Information&est&suffisante.( & & & & & &
Le&support&reçu&pour&utiliser&le&Centre&d’Information&est&suffisant.( & & & & & &
& & & & & & &
& & & & & & &
& & & & & & &
(
• Observation&sur&la&méthode&de&mise&en&place&
&
&
&
3
189
Craintes:
TOUS p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value
N total=30 Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail
Moyenne Écart Type CRAINTE1 CRAINTE2 CRAINTE3 CRAINTE4 CRAINTE5 CRAINTE6 CRAINTE7 CRAINTE8 CRAINTE9
CRAINTE1 2,448 1,325
CRAINTE2 2,600 1,354 0,5438
CRAINTE3 2,533 1,252 0,7738 0,5575
CRAINTE4 2,500 1,358 0,7504 0,6785 1,0000
CRAINTE5 2,600 1,329 0,6097 0,8642 0,8455 0,5781
CRAINTE6 2,400 1,163 0,8327 0,5136 0,5589 0,9092 0,4272
CRAINTE7 2,517 1,184 0,6775 0,8745 0,9640 0,8474 0,7432 0,7186
CRAINTE8 2,207 1,146 0,4810 0,2469 0,3074 0,3459 0,2120 0,6354 0,2139
CRAINTE9 1,690 1,168 0,0165 0,0068 0,0067 0,0069 0,0079 0,0197 0,0024 0,0421
CRAINTE10 1,966 1,149 0,0625 0,0564 0,0776 0,0641 0,0167 0,1769 0,0374 0,3732 0,1669
* mesurée en cinq points d'ancrage (1=faiblement une crainte ; 5=fortement une crainte)
Groupe d'items étant le plus faiblement des craintes
Seuil p < 0,10
Forces:
TOUS p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value
N total=30 Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail
Moyenne Écart Type FORCE1 FORCE2 FORCE3 FORCE4 FORCE5 FORCE6 FORCE7 FORCE8 FORCE9 FORCE10 FORCE11
FORCE1 4,379 0,820
FORCE2 4,033 1,098 0,0792
FORCE3 4,267 0,785 0,4898 0,3617
FORCE4 3,250 1,076 0,0004 0,0014 0,0008
FORCE5 3,667 0,877 0,0009 0,0596 0,0081 0,0231
FORCE6 3,867 0,915 0,0004 0,1497 0,0017 0,0123 0,2771
FORCE7 4,167 0,857 0,2071 0,4947 0,7351 0,0002 0,0024 0,0062
FORCE8 4,053 0,705 0,1166 0,8808 0,2452 0,0009 0,0187 0,0450 0,0762
FORCE9 3,577 0,809 0,0004 0,0609 0,0005 0,2836 0,4676 0,1793 0,0010 0,0013
FORCE10 3,833 0,866 0,0097 0,1059 0,0261 0,0093 0,2714 0,8706 0,0123 0,0604 0,1465
FORCE11 4,000 0,845 0,0670 0,8419 0,2104 0,0036 0,0423 0,1398 0,0391 0,2216 0,0443 0,2037
FORCE12 4,000 1,069 0,1433 0,8199 0,2502 0,0028 0,0424 0,3516 0,2603 0,3942 0,0971 0,2011 1,0000
* mesurée en cinq points d'ancrage (1=fortement freinante ; 3=neutre ; 5=fortement facilitante)
Groupe d'items étant le moins facilitants
Seuil p < 0,10
Méthodes:
TOUS p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value p_value
N total=30 Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail Two-tail
Moyenne Écart Type METHODE1 METHODE2 METHODE3 METHODE4 METHODE5 METHODE6 METHODE7 METHODE8
METHODE1 3,500 1,103
METHODE2 3,692 0,970 0,0787
METHODE3 3,615 0,983 0,3579 0,2594
METHODE4 4,000 1,018 0,0165 0,0505 0,0154
METHODE5 3,960 0,889 0,0074 0,1377 0,0780 0,5957
METHODE6 2,545 1,101 0,0010 0,0000 0,0000 0,0000 0,0000
METHODE7 3,481 0,893 0,6894 0,2445 0,3222 0,0027 0,0242 0,0004
METHODE8 3,259 1,130 0,2195 0,1459 0,1179 0,0037 0,0009 0,0016 0,2829
METHODE9 3,741 1,023 0,1944 0,6808 0,4258 0,1530 0,1747 0,0001 0,1148 0,0142
* mesurée en cinq points d'ancrage (1=faiblement en accord ; 5=fortement en accord)
Groupe d'items pour lequel les réponds sont le moins en accord
Seuil p < 0,10
190
Placement instinctif des personnes lors des premières utilisations du Centre d’Information de
transfert des lots de réception mécanique entre les équipes Construction et VPO :
Centre d’Information
Légende
Responsable de Responsable de
l’équipe 1 l’équipe 2
Membre de Membre de
l’équipe 1 l’équipe 2
Table de réunion
Centre d’Information
Légende
Responsable de Responsable de
l’équipe 1 l’équipe 2
Membre de Membre de
l’équipe 1 l’équipe 2
Table de réunion
Interprétation de l’ANNEXE K
Les deux schémas représentent la tenue de rencontres devant le Centre d’Information de Transfert
des lots de réception mécanique entre les équipes de Construction et VPO57. Sur ces deux
schémas, on peut observer le positionnement instinctif choisi par les utilisateurs des deux équipes
Construction et VPO. Le premier schéma représente les rencontres au début de l’utilisation du CI.
Le second représente les rencontres après une phase de maturation de 2 à 3 mois.
On observe sur ce schéma une opposition entre les deux équipes, opposition amplifiée par la
position des chefs d’équipe en strict face à face. Ce positionnement dénote une attitude de
protection par rapport à l’autre groupe et un besoin de support de son groupe. Il est possible
d’observer des personnes cherchant à s’isoler et à se protéger en restant en dehors de la salle ou
dans des coins.
Après une phase de maturation, les deux équipes vont baisser leur crainte par rapport à ce nouvel
outil de travail et sont désormais instinctivement mélangées dans la salle et rapprochées à
l’intérieur du CI. L’élément d’évolution le plus frappant est le déplacement du chef de la seconde
équipe qui se place derrière l’animateur de la rencontre dans une position de soutien à celui-ci et
non plus d’opposition.
57
Voir 2.3.3 - Plan d’action page 62
Centre d’Information
Centre d’Information Centre d’Information Centre d’Information
transferts
SSE VPO Niveau 0
Construction-VPO
Date de 2011 Févier/Mars 2012 Févier/Mars 2012 Fin Avril/Mai 2012
Préparation
Date de 1ère Fin 2011 27 Mars 2011 7 Avril 2012 25 Mai 2012
utilisation
-Autonome par l’équipe -Formation superficielle -Formation superficielle -Formation des
sans aide d’une ressource des utilisateurs des utilisateurs participants clés
dédié. -Construction du Centre -Participation de plusieurs-1 séance de 4h pour
-Utilisation de la d’Information sur 4 personnes ayant travaillés analyser le besoin et
documentation et séances d’une heure avec sur le CI de Transfert choisir les indicateurs,
Mode de standards RTA l’équipe entière -Une séance de travail séance réalisée en groupe
Préparation
-Visite de Centre -Recours à une analyse avec analyse FIPEC pour réduit avec les 5 membres
d’Information présent dans FIPEC (client/fournisseur) la création des ICP clés
les installations industriels -Grande part de travail -2 séances de validation et
autonomie alignement avec les autres
utilisateurs
Présence du personnel de maitre d’œuvre et de la firme d’ingénierie
-Pas de facilitateur Lean -2 équipes différentes -Plusieurs utilisateurs non- -Rencontre de très haut
lors du déploiement (Construction et VPO) formés niveau
-1 seule personne ayant -Travail sur un processus -Dernier Centre
une réelle expérience de encore non figé d’Information mis en place
Éléments
l’outil -Peux de donnée -Présence d’une ressource
particuliers
-1er Centre d’Information disponible très expérimenté
du Projet avec standard -Réunion de 2 secteurs de
travails différents
-Aucune personne n’ayant
d’expérience de l’outil
Animation Tournantes Assuré par le Assuré par le Assuré par le directeur du
Responsable VPO (SLH) Responsable VPO (SLH) Projet (RTA)
ANNEXE L. Processus de mise en place des centres d’information
!
194
195
Centre d'Info N0 :
• Suivi des heures supplémentaires (pour éviter les excès qui peuvent constituer un risque
SSE)
• Actions correctives
o Secteur Automatisation
o Secteur Électrolyse
o Secteur Carbone
o Secteur Automatisation
o Secteur Électrolyse
o Secteur HV/MV
o Secteur Carbone
KPI Section
KPI :
1. Safety share
2. HSE weekly cross
3. Additional hours
1 4 7
4. Document transfer (between
Project and Operation)
5. Mechanical completion
2 5 8
6. Hand over package
7. Contract close-out
3 9
6 8. Spare part
9. Monitoring N3 activities from
10 Operation ORP
10. Monitoring N4 activities from
Operation ORP
Opération Section
KPI :
1. Stakeholders social weather
(Feeling about the group,
1 activities and challenges)
3
2 2. Critical risks management
(Feeling about control of critical
Green = Under control risks)
Yellow = Preoccupation
3. Site information (how many days
Red = Concerns
before transfer and before first
5
metal, how many workers on
site)
3
202
Master Calendar
Show critical
mechanicals 3
Concerns Strips completions and
hands over packages
Le graphique visible ci-dessus représente l’ICP du progrès des activités de VPO pour le secteur
Automatisation. Pour cet cet ICP, le processus suivi comprend un nombre d’activités défini. Le
choix est fait d’utiliser un ICP de type cumulatif qui permet d’observer, dans ce cas, la totalité de
travail effectué et la planification des travaux choisie.
206
Interprétation de l’ANNEXE V
Les deux représentations graphiques d’ICP visibles en annexe expriment le nombre de lots à
transférer entre les équipes de Construction et VPO. La ligne pointillée donne la planification
originale, la limite vert/jaune indique la re-planification et la limite jaune/rouge traduit un impact
assuré sur l’échéancier du projet.
Les deux représentations graphiques montrent l’indicateur original utilisé et sa mise à jour
quelques mois plus tard. On remarque que la ligne pointillée et la limite jaune/rouge ne varient
pas mais que la « zone tampon » jaune se réduit au fur et à mesure des re-planifications.
Indicateur Proactif
L’ICP ci-dessus représente le nombre de quasi accidents déclarés pour 1000h de travail (maître
d’œuvre et firme d’ingénierie exclus). Les éclairs représentent les accidents consignables
survenus au Projet AP60.
L’utilisation de cet ICP se base sur la constatation qu’un faible nombre de quasi accidents
rapporté est un signe de relâchement de l’attention en SSE et peut conduire à un incident.
L’objectif de cet ICP et de pouvoir prendre action avant qu’un problème n’ait lieu en se basant
sur un suivi des signes précurseurs. Une baisse significative de la fréquence de déclaration des
quasis accidents va entrainer la mise en œuvre d’actions spécifiques.
209
Indicateur Relatif
L’ICP représenté par le graphique ci-dessus est un ICP relatif. Celui-ci, dans sa représentation,
met en évidence une fréquence.
Cet indicateur se concentre sur les résultats présents pour les comparer aux résultats passés. Il n’y
a pas de recherche d’analyse d’un résultat cumulatif global pour le processus.
Dans cet indicateur, il s’agit de mettre en évidence une tendance dans le temps pour s’assurer du
bon fonctionnement du processus.
210
Workshop organization
Attendees :
• RTA staff
• SLH staff
• Contractor involved staff
Workshops Subjects :
• Lining
• Positive riser implementation
• Welding of negative flex on the cathodes
• Stuffing box installation
Duration : 1 hour
Workshop process : HSE
Equipment – Tools
Organization – Productivity
Matérials – Logistics
Studied activity Quality
presentation Various
Current work process
definition/presentation Brainstorming to identify
High Level possible improvements
classified in six differents Define for each possible
areas improvement :
Action to take, Who, When
2
Brainstorming results :
Positive riser example
Atelier'VI'
Montées'Positives'
'
Description+de+l’activité+:+ '
• 6'montées'positives'par'cuve'
• 52pi'de'soudure'par'montée'positive'
• 312'pi'par'cuve'
• 11856'pi'de'soudure'totale'
'
SSE+ Organisation/Productivité+ Qualité+
• Amélioration'des'accès'aux'cosses' • Nettoyage'de'la'zone'de'travail' • Préciser'la'cible'qualité'–'Autocontrôle'
• Ajout'de'plateformes' • Équilibrage'mieux'adapté' par'l’entrepreneur'
• Nettoyage'des'cadres'anodiques' • Éviter'les'erreurs'lors'de'l’installation'
• Ne'pas'retarder'l'installation'et'mise' pour'éviter'les'reprises'
en'place'des'montées'positives'
• Analyse'statistique'des'tendances'
• Souder'sans'la'cale'de'15mm'
• Éviter'la'manipulation'du'cadre'
' ' '
Équipement/Outillage+ Matériaux+Logistique+ Divers+
• Mécanisation'de'la'soudure' • Cadre'anodique':'préPmarquage'et' '
• Outils'de'serrage'automatisés' mise'en'place'd'outils'd'ajustements'
des'montées'positives'
• Balancement'approprié'du'support'
d’installation'des'montées'positives'
'
3
211
Before workshop, 15 feet of welding per men per week: 832hours welding for 1 pot
After workshop, 40 feet of welding per men per week: 312hours welding for 1 pot
520h saved5per pot
Date de l’atelier
212
Impact on project
Projection savings for Phase 2 (Positive riser)
• 520 hours reduction per pot (234 pots, 100$/hours, 6 positive riser/pot)
12 168 000$ savings for positive riser welding
Contractor
• Remove the pain
• Develop control over the process
• Become efficient
SLH
• Keep control on construction
• Give contractor the possibility to be efficient
• Improve the process
AP Technology
• Ensure compliance process
6
213
1 - Climatique
2 - Coordination travaux
3 - Problème technique
4 - Qualité
5 - Sur-planification
6 - Ressources manquantes
7 - Équipement manquant
8 - Matériel manquant
LAST PLANNER 9 - Sous-planification
La photo ci-dessus présente un exemple d’utilisation du principe de gestion visuelle. Dans le cas
de cet exemple, les documents préparation sont positionnés sur la table de validation suivant trois
catégories :
• En signature : les responsables doivent venir valider et signer les documents se trouvant
dans cette zone
• En retard : les documents se trouvant dans cette zone n’ont pas été validés dans les temps
et sont donc en retard
L’objectif de cet outil est de permettre aux gestionnaires de visualiser immédiatement (en
quelques secondes) l’état du processus d’acceptation des documents.