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VF Tome 2 - Affections Mycosiques

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PRÉFACE

C’est un honneur et un privilège pour moi de préfacer le tout premier livre de


Parasitologie-Mycologie de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP).

Nos pères fondateurs l’avaient déjà rêvé dans les années 90.
A leur suite, le bureau actuel de la SoAP a tout mis en œuvre pour satisfaire ce désir
exprimé par tous les enseignants-chercheurs de Parasitologie-Mycologie africains,
celui de rendre disponible pour les étudiants en médecine et en pharmacie ainsi que
les autres professionnels de la santé, un ouvrage de spécialité qui intègre les réalités
épidémiologiques de l’Afrique, ainsi que les nouvelles stratégies développées par les
programmes nationaux de lutte contre les maladies parasitaires et fongiques.

La structuration de ce formidable ouvrage est faite de trois (3) tomes qui mettent en
exergue la transition épidémiologie avec l’émergence et la réémergence de plusieurs
pathologies parasitaires.

Ce livre présente entre autres, des données sur l’Afrique, permettant ainsi
d’apprécier et de mesurer l’importance des endémies qui mettent à mal la santé de
nos populations. Ses approches de diagnostic clinique et biologique induisent une
meilleure prise en charge et des stratégies de prévention adéquates.

Cet évènement inédit me réjouit tout particulièrement, d’autant que la paternité de


ce livre revient à tous les enseignants-chercheurs de la SoAP, et avant tout, à nos
maîtres qui ne sont plus, et à qui nous rendons un hommage à travers cet ouvrage.

Professeur Dorothée KINDE GAZARD

Présidente de la SoAP

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
AVANT-PROPOS

Cet ouvrage, composé de 3 tomes, est destiné à la formation de base en parasitologie


et mycologie des étudiants des sciences médicales et des sciences pharmaceutiques
des universités d’Afrique subsaharienne. Son contenu est conforme aux maquettes
de cours élaborées dans ces institutions francophones.

Le tome 1 traite des maladies parasitaires endémiques en Afrique et le tome 2 des


affections mycosiques. Le plan des leçons dans ces deux tomes est identique et a été
conçu et validé par les professeurs titulaires de parasitologie et mycologie des pays
membres du CAMES (Conseil Africain et Malgache pour l’Enseignement Supérieur). Le
tome 3 est consacré d’une part au diagnostic biologique des parasitoses et mycoses,
et d’autre part à l’étude des animaux et champignons venimeux et vénéneux.
Les différents chapitres ont été rédigés par les professeurs titulaires et maîtres de
conférences agrégés de parasitologie et de mycologie membres de la Société Africaine
de Parasitologie (SoAP). Chaque chapitre, rédigé par un enseignant, a été relu et
corrigé par au moins deux autres enseignants. Avec les données épidémiologiques
évoluant rapidement grâce à l’impact de la lutte contre les maladies les plus
endémiques, et les nouvelles méthodes de diagnostic en développement, nous
prévoyons une actualisation périodique de cette première édition de cet ouvrage.

Professeur Hervé MENAN

Vice-Président de la SoAP
Responsable de l’équipe de coordination

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
REMERCIEMENTS

Nous tenons à remercier très sincèrement tous les rédacteurs et les relecteurs des
différentes leçons. Les uns et les autres ont su donner de leur temps pour que cette
première édition soit une réalité.

Nous avons souhaité, dans cet ouvrage, utiliser une iconographie provenant de nos

laboratoires africains. Ce sera le défi de la 2ème édition. Mais déjà pour cette édition,
des efforts ont été faits pour certains cycles biologiques et schémas des parasites et
champignons qui ont été réalisés par les Maîtres de Conférences Agrégés (MCA)
Vanga, Konaté, Seck ainsi que le MCA Kassi Fulgence qui a assuré la coordination de
l’édition des 3 tomes de cet ouvrage avec le MCA Kiki-Barro Pulchérie. Nous leur
adressons nos sincères remerciements pour tous les sacrifices consentis.

Professeur Hervé MENAN

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
LISTE DES REDACTEURS ET REVIEWERS

ADOUBRYN Koffi Daho (Côte d’Ivoire)


BADIANE Aïda Sadikh (Sénégal)
BAMBA Sanata (Burkina Faso)
BOUYOU Marielle (Gabon)
DABO Abdoulaye (Mali)
DIALLO Mouctar (Mali)
DIENG Thérèse (Sénégal)
DIENG Yemou (Sénégal)
DJIMDE Abdoulaye (Mali)
DJOHAN Vincent (Côte d’Ivoire)
DOLO Amagana (Mali)
DORKENOO Améyo Monique (Togo)
DOUMBO Ogobara (Mali)
DOUMBO Safiatou Naré (Mali)
EBOUMBOU Moukoko Carole (Cameroun)
FAYE Babacar (Sénégal)
GAYE Oumar (Sénégal)
GUIGUEMDE Robert (Burkina Faso)
HOUNTO Aurore (Bénin)
KASSI Kondo Fulgence (Côte d’Ivoire)
KIKI BARRO Pulchérie Christiane (Côte d’Ivoire)
KINDE-GAZARD Dorothée (Bénin)
MENAN Hervé (Côte d’Ivoire)
MOYOU-SOMO Roger (Cameroun)
NDIAYE Daouda (Sénégal)
NDIAYE Jean Louis Abdourahim (Sénégal)
NDIAYE Mouhamadou (Sénégal)
N'DIR Oumar (Sénégal)
NZENZE Solange (Gabon)
SAME EKOBO Albert Legrand (Cameroun)
SANGARE Ibrahim (Burkina Faso)
SISSINTO Savi de Tove Yolande (Bénin)
THERA Mahamadou (Mali)
TINE Roger (Sénégal)
TRAORE Boubacar (Mali)
YAVO William (Côte d’Ivoire)

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
HOMMAGES

Les auteurs de ce manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) saisissent l’occasion


de cette publication pour rendre un vibrant hommage aux Maitres et Pères Fondateurs de la
SoAP. L’enseignement et la guidance de qualité qu’ils ont donnés avec générosité ont permis
de produire cet ouvrage, un précieux héritage pour les générations à venir. L’apport des
Maitres soutient l’adage selon lequel « pour se laver, le corps ne saurait bénéficier de toute
l’eau du bain ». Qu’ils trouvent ici, l’expression de leur sincère reconnaissance.
Hommages aux Professeurs Kossivi AGBO, Martin AKOGBETO, Feu Ndri ASSALE, Aka
ASSOUMOU, Isabella BAH, Feu Samba DIALLO, Feu Oumar Talla DIAW, Yemou DIENG, Feu
Ogobara K. DOUMBO, Oumar FAYE, Ousmane FAYE, Oumar GAYE, Arona GUEYE, Robert
Tinga GUIGUEMDE, Maryvonne KOMBILA, Feu Moussa KONE, Achille MASSOUGBODJI, Roger
MOYOU-SOMO, Oumar NDIR, Jean OUHON, Jean Louis PANGUI, Feu Benoît Christophe
SADELER, Albert SAME EKOBO, Bhen Sikina TOGUEBAYE, Yéya Tiemoko TOURE et Feu Seydil
Moctar TOURE.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Généralités sur la mycologie

Sommaire

1 GENERALITES SUR LA MYCOLOGIE .......................................................................................................... 13


2 CANDIDOSES.............................................................................................................................................. 22
3 CRYPTOCOCCOSE ...................................................................................................................................... 51
4 DERMATOPHYTOSES ................................................................................................................................. 77
5 MALASSEZIOSES ...................................................................................................................................... 110
6 PNEUMOCYSTOSE ................................................................................................................................... 126

7 MICROSPORIDIOSES ............................................................................................................................... 144


8 MYCETOMES ............................................................................................................................................ 155

9 ASPERGILLOSES ....................................................................................................................................... 184

10 HISTOPLASMOSES ................................................................................................................................. 205

11 BLASTOMYCOSE .................................................................................................................................... 219

12 CHROMOMYCOSE ................................................................................................................................. 235

13 SPOROTRICHOSE ................................................................................................................................... 251

14 COCCIDIOIDOMYCOSE .......................................................................................................................... 272

15 PARACOCCIDIOIDOMYCOSE ................................................................................................................. 282

16 ZYGOMYCOSES ...................................................................................................................................... 291

17 MOISISSURES ET LEVURES EMERGENTES ............................................................................................ 307

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Généralités sur la mycologie

LISTE DES FIGURES

Figure 1. 1 : Arbre phylogénique de Woese ..........................................................................14


Figure 1. 2 : Cycle de vie du champignon. .............................................................................15
Figure 1. 3 : Différents aspects du thalle végétal chez les micromycètes ...............................16
Figure 1. 4 : Mode de production des spores chez les Mucorales et les Entomophthorales ..19

Figure 2. 1 : Aspect microscopique des levures ((forme blastospores) .................................24


Figure 2. 2 : Aspect microscopique des levures (blastospores et pseudofilaments) ..............25
Figure 2. 3 : Levures assemblées bout à bout simulant un filament mycélien : pseudo
mycelium = fausse filamentation Biologie .............................................................................25
Figure 2. 4 : Périonyxis et Onyxis à Candida ..........................................................................30
Figure 2. 5 : Onycholyse à Candida .......................................................................................30
Figure 2. 6 : Leuchonychie à Candida ....................................................................................30
Figure 2. 7 : Dtermination de la CMI par diffusion en milieu gélosé : bandelette de E test
déposée à la surface de la gélose ensemencée par une souche de Candida .........................37
Figure 2. 8 : Lecture de la CMI. Ici, la souche est sensible aux 2 antifongiques : Amphotéricine
B (AP) et Fluconazole (FL) .....................................................................................................37
Figure 2. 9 : Candida Sp. Aspect macroscopique des colonies de levure en culture ...............38
Figure 2. 10 : Aspect des colonies de Candida albicans sur milieux chromogène...................38
Figure 2. 11 : Test de blastèse. Blastospores avec tubes germinatifs .....................................39
Figure 2. 12 : Chlamydospores de C.albicans au microscope optique X40 .............................40

Figure 3. 1 : Cryptococcus neoformans (Présence d’un bourgeon) : mise en évidence de la


capsule par l’encre de Chine. (x 1000) ..................................................................................57
Figure 3. 2 : Cryptococcus neoformans (sans bougeons) : mise en évidence de la capsule par
l’encre de Chine ....................................................................................................................64
Figure 3. 3 : Cultures de Cryptococcus neoformans âgée de 48 heures sur milieu de
Sabouraud en tube à 27°C ....................................................................................................65
Figure 3. 4 : Cultures de Cryptococcus neoformans âgée de 5 semaines sur milieu de
Sabouraud en tube à 27°C ....................................................................................................65
Figure 3. 5 : Cultures de Cryptococcus neoformans âgée de 72 heures sur milieu de Pal
modifié en boîte de Pétri à 27°C ...........................................................................................65
Figure 3. 6 : Cryptococcus neoformans using a light India ink staining preparation ...............66
Figure 3. 7 : Aspect des levures de Cryptococcus neoformans au microscope optique après 72
heures d’incubation sur milieu de Sabouraud à 27°C ............................................................66
Figure 3. 8 : Mode opératoire du test Crypto Ag Lateral Flow Assay .....................................68
Figure 3. 9 : Cryptocoques après coloration au mucicarmin ..................................................69

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Généralités sur la mycologie

Figure 4. 1: Schéma des différents types de parasitisme pilaire ............................................81


Figure 4. 2 : Epidermophytie circinée du visage .....................................................................84
Figure 4. 3 : Epidermophytie étendue : thorax, fesses, bras, plis axillaires ...........................84
Figure 4. 4 : Epidermophytie plantaire .................................................................................85
Figure 4. 5 : Intertrigo interdigitopalmaire dermatophytique ...............................................85
Figure 4. 6: Dermatophytie interdigito-plantaire ..................................................................86
Figure 4. 7: Intertrigo dermatophytique du 4 ème espace inter orteil ....................................86
Figure 4. 8 : Intertrigos des grands plis (plis inguinal) ...........................................................87
Figure 4. 9 : Lésions d’épidermophytie étendue avec intertrigo du pli inguinal droit ............87
Figure 4. 10 : Epidermophytie sous-mammaire bilatérale ....................................................87
Figure 4. 11 : Onyxis des orteils ............................................................................................88
Figure 4. 12 : Onychomycose sous unguéo-distale du gros orteil .........................................88
Figure 4. 13 : Teigne microsporique .....................................................................................89
Figure 4. 14 : Teigne trichophytique .....................................................................................90
Figure 4. 15 : Teigne favique ................................................................................................90
Figure 4. 16 : Kérion de Celse ...............................................................................................91
Figure 4. 17 : Kérion de Celse ...............................................................................................91
Figure 4. 18 : Sycosis ............................................................................................................92
Figure 4. 19 : Eczéma dyshidrosique ...................................................................................92
Figure 4. 20 : Filaments mycéliens arthrosporés à l’examen direct ........................................94
Figure 4. 21 : Filaments mycéliens arthrosporés à l’examen direct d’un prélèvement de lésion
d’onychomycose des orteils .................................................................................................95
Figure 4. 22 : Parasitisme endo-ectothrix .............................................................................95
Figure 4. 23 : Parasitisme endothrix ......................................................................................95

Figure 5. 1 : Pityriasis versicolor du dos, étendu .................................................................115


Figure 5. 2 : Aspect clinique de Pityriasis capitis .................................................................115
Figure 5. 3 : Aspect de dermite à Malassezia associé à un psoriasis ...................................116
Figure 5. 4 : Pseudo-acné à Malassezia ..............................................................................116
Figure 5. 5 : Aspect de pseudoacné et de folliculite à Malassezia .......................................117
Figure 5. 6 : Atteinte rétro auriculaire à Malassezia : présence d’inflammations, de papules,
de pustules et desquamation ............................................................................................117
Figure 5. 7 : Scotch test : Présence de spores en amas, associées à des filaments...............118
Figure 5. 8 : Prélèvement, technique du Scotch-test ...........................................................119
Figure 5. 9 : Scotch test cutané positif : Spores en « grappe de raisin »...............................120
Figure 5. 10 : Examen direct d’un Scotch test sur lésion de pityriasis versicolor : présence de
blastospores en grappes, et de courts filaments mycéliens (tête des flèches). ....................120
Figure 5. 11 : Levures du genre Malassezia sur milieu Sabouraud Chloramphénicol ...........121

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Généralités sur la mycologie

Figure 6. 1 : Trophozoïte de Pneumocystis au microscope électronique à transmission .......129


Figure 6. 2 : Prékyste (ou sporocyste) à 6 corps intra-kystiques de Pneumocystis au
microscope électronique à transmission .............................................................................129
Figure 6. 3 : Kyste mûr ou asque de Pneumocystis ..............................................................130
Figure 6. 4 : Kyste vide de Pneumocystis jiroveccii au microscope électronique à transmission
...........................................................................................................................................130
Figure 6. 5 : Cycle biologique de Pneumocystis jirovecii ......................................................132
Figure 6. 6 : Amas de trophozoites de P. jirovecii dans un LBA à l’examen à l’état frais. ......136
Figure 6. 7 : Kystes de P. jiroveccii dans un LBA : examen à l’état frais ................................ 136
Figure 6. 8 : Coloration au Giemsa de Pneumocystis jirovecii d’un LBA ...............................137
Figure 6. 9 : Coloration de Mutso de Pneumocystis jirovecii ................................................137
Figure 6. 10 : Coloration au bleu de toluidine O de Pnemocystis jirovecii ...........................138
Figure 6. 11 : Kystes de Pneumocystis jirovecii visualisés par immunofluorescence directe .138
Figure 6. 12 : Biopsie pulmonaire montrant des infiltrats alvéolaires au cours d’une
pneumocystose ..................................................................................................................139

Figure 7. 1 : Représentation schématique de la spore microsporidienne ...........................147


Figure 7. 2 : Cycle biologique des microsporidies . .............................................................149

Figure 8. 1 : Madurella mycetomatis (x40) ........................................................................ 159


Figure 8. 2 : Falciformispora senegalensis (x40) ............................................................... 159
Figure 8. 3 : Prévalence et nombre de cas déclarés de mycétome ........................................ 164
Figure 8. 4 : Mycétomes du pied (A) et de la main (B) à grains noirs .................................. 166
Figure 8. 5 : Actinomycétome du pied du à Actinomadurella pelletieri ............................... 166
Figure 8. 6 : A. Grain de M. mycetomatis x 40 – B. Grains type Nocardia x 160. ................ 168
Figure 8. 7 : Grains d’Actinomadura pelletieri (x180)......................................................... 168
Figure 8. 8 : Culture sur Milieu de Sabouraud chloramphenicol et Pomme de terre-carotte
(PC) de Madurella mycetomatis.......................................................................................... 172
Figure 8. 9 : A-Sclérote de Madurella mycetomatis. B-Asques de Leptosphaeria senegalensis
........................................................................................................................................... 172
Figure 8. 10 : Examen anatomopathologique : .................................................................... 174
Figure 8. 11 : Examen anatomopathologique : .................................................................... 174
Figure 8. 12 : Examen anatomopathologique S. somaliensis (H&E x 100) .......................... 174

Figure 9. 1 : Tête aspergillaire uni et bisériée ......................................................................187


Figure 9. 2 : Prévalence mondiale de l’aspergillose pulmonaire chronique .........................190
Figure 9. 3 : Filament d’Aspergillus, coloration au bleu lactique X40 ...................................194

Figure 10. 1 : Petits éléments ovoïdes d’Histoplasma capsulatum var. capsulatum au MGG,
grossissement × 1 000 ........................................................................................................212
Figure 10. 2 : Histoplasma capsulatum var. duboisii à l’examen direct au G × 400 ..............212
Figure 10. 3 : Schéma d’un filament mycélien d’Histoplasma capsulatum ..........................213

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Généralités sur la mycologie

Figure 11. 1 : Carte de distribution mondiale de la blastomycose .......................................226


Figure 11.2 : Opacité du lobe inférieur du poumon gauche.................................................227
Figure 11.3 : Lésion cutanée verruqueuse ...........................................................................227
Figure 11. 4 : Lésion osseuse...............................................................................................227
Figure 11. 5 : Aspect typique de B. dermatitidis après éclaircissement au KOH ...................228
Figure 11. 6 : a et b : Colonies de B. dermatitidis (27°C) ......................................................229
Figure 11. 7 : a et b : Aspect des microconidies de B. dermatidis ........................................230
Figure 11. 8 : Levures de B. dermatitidis poussant à 37°C ...................................................230
Figure 11. 9 : Levure dans un micro-abcès (HES) .................................................................231
Figure 11. 10 : Levure bourgeonnante et non bourgeonnante de B. dermatitidis (PAS) ......231

Figure 12. 1 : Aspect en « chou fleur » pathognomonique: lésions sanguinolentes, suintantes


et purulentes (20 ans d’évolution) ......................................................................................239
Figure 12. 2 : Nodules lisses, disséminées sur le membre inférieur (10 ans d’évolution) .....240
Figure 12. 3 : Nodules verruqueux du membre supérieur gauche- 35 ans d’évolution. .......240
Figure 12. 4 : Association de nodules lisses et d’une tumeur verruqueuse suintante.
Elephantiasis with mossy- foot (20 ans) .............................................................................240
Figure 12. 5 : Plage(s) à centre cicatriciel, dyschromique à bords nets surelevés
papillomateux. Evolution : 2 à 3 ans ...................................................................................241
Figure 12. 6 : Transformation maligne : tumeur pédiculée surmontant un placard granuleux
et suintant ..........................................................................................................................241
Figure 12. 7 : Cellules fumagoïdes pathognomoniques de la chromomycose) - coupe
histologique .......................................................................................................................242
Figure 12. 8 : Présence d’une cellule fumagoïde brune, isolée, septée dans prélèvement
éclairci par KOH à 30% ........................................................................................................242
Figure 12. 9 : Aspect microscopique d’une cellule fumagoïde germinative. ........................243
Figure 12. 10 : Colonies noires, veloutées de Fonsecaea pedrosoi sur milieu de Sabouraud
chloramphénicol .................................................................................................................243
Figure 12. 12 : Effacement et cicatrisation de quelques nodules verruqueux chez la patiente
photo 3 traitement >2 ans par terbinafine puis itraconazole. .............................................247

Figure 13. 1 : Forme saprophytique du complexe de Sporothrix schenckii...........................254


Figure 13. 2 : Corps en « cigare » ou en « navet » correspondant à la forme levure du
complexe de Sporothrix schenckii ......................................................................................255
Figure 13. 3 : Répartition géographique de la sporotrichose ...............................................257
Figure 13. 4 : Aspect microscopique des colonies de la culture sur gelose au sang à 37°C
(Aspect blanchâtre devenant brunâtre) ..............................................................................261
Figure 13. 5 : Macroconidie en bouquets (mesurant de 2,5 à 4μm) ou en goutte ou en
triangulaires en toupie et de coloration brune placées en manchon autour des filaments sur
milieu de Sabouraud à 25-27°C ...........................................................................................262
Figure 13. 6 : Blastospores solitaires ...................................................................................262
Figure 13. 7 : Corps en « cigare » ou en « navet » correspondant à la forme levure du
complexe Sporothrix schenckii (Gomori X100), sa forme est variable suivant l’axe de la coupe
...........................................................................................................................................262

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Généralités sur la mycologie

Figure 13. 8 : Section d'une lésion cutanée fixe indiquant les formes levures du complexe
Sporothrix schenckii après coloration au Gomori-Grocott ...................................................264
Figure 13. 9 : Corps astéroïde une forme ronde, étoilée ou massuée mesurant jusqu’à 10µm
de diamètre, “corps asteroïdes” (phénomène de Splendore-Hoeppli) .................................265

Figure 14. 1 : Forme levure de Coccidioïdes sp................................................................... 274


Figure 14. 2 : Forme filamenteuse de Coccidioïdes sp ....................................................... 274

Figure 15. 1 : Levure de Paracoccidioïdes sp .................................................................... 284


Figure 15. 2 : Forme filamenteuse de Paracoccidioïdes sp ................................................. 284

Figure 16. 1 : Mode de production des spores chez les Mucorales et les Entomophthorales293
Figure 16. 2 : Hinoentomophthoromycose .......................................................................... 298
Figure 16. 3 : Patient photo avant la maladie ....................................................................... 298
Figure 16. 4 : Rhinoentomopthoromycose Plus de 24 mois d’évolution .............................. 298
Figure 16. 5: Patient photo 16. 2 avant la maladie ............................................................... 298
Figure 16. 6 : Examen direct du prélèvement cutané du patient photo 16. 1: Présence de
filament large non septé, et ramifications à angle droit ........................................................ 299
Figure 16. 7 : Aspect macroscopique d’une mucorale ........................................................ 300
Figure 16. 8 : Colonies glabres, plissées de Basidiobolus ranarum ..................................... 301
Figure 16. 9 : Colonies de Coniobolus coronatus ................................................................ 301
Figure 16. 10 : Réaction scléro inflammatoire autour d’éléments fongiques Coloration H.E.S
........................................................................................................................................... 302
Figure 16. 11 : Hyphe fongique, Coloration Gomorit- Grocott ............................................ 302
Figure 16. 12 : Après 18 mois de traitement chez patient photo 16. 13 ............................... 303
Figure 16. 13 : Patient avant traitement ............................................................................... 303

Figure 17. 1 : Aspects macroscopique et microscopique (x40) de Fusarium solani (A et B),


Fusarium oxysporum (C et D) et Fusarium lichenicola (E et F) .............................................311
Figure 17. 2 : Scedosporium apiospermum (a) conidiophores et conidies, (b) culture et (c)
corémies (stade Graphium) ................................................................................................ 316
Figure 17. 3 : Trichosporon sp. (a) culture sur gélose de Sabouraud et (b) examen
microscopique montrant des blastoconidies, des arthroconidies et éléments en « club de golf
» (bout de la flèche)............................................................................................................319
Figure 17. 4 : Piedra blanche des poils pubiens ..................................................................320
Figure 17. 5 : Examen direct montrant des filaments irréguliers et des microconidies (flèches
noires) de Fusarium dans des squames (a), et un filament arthrosporé au sein de leucocytes
d’un pus (b) ........................................................................................................................322

11
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Généralités sur la mycologie

Liste de tableaux

Tableau 3. 1 : Ancienne et nouvelle dénomination des espèces du complexe C. neoformans /


C. gattii ................................................................................................................................ 56
Tableau 3. 2 : Formules antigéniques des sérotypes de Cryptocococcus neoformans. ............ 58
Tableau 3. 3 : Variétés de Cryptococcus neoformans ............................................................ 62

Tableau 4. 1 : Clés d’identification des dermatophytes.......................................................... 98

Tableau 8. 1 : Revue des principaux agents étiologiques des mycétomes ............................ 158
Tableau 8. 2 : Caractères morphologiques des quelques agents de mycétomes .................... 160
Tableau 8. 3 : Principaux caractéristiques des agents de mycétomes fongiques ................... 169
Tableau 8. 4 : Caractéristiques des principaux agents de mycétomes actinomycosiques. ..... 170

Tableau 9. 1: Critères d’identification des espèces les plus fréquentes ................................ 196

Tableau 12. 1 : Les différents types de fructifications asexuées (anamorphes) des agents de
chromomycose ................................................................................................................... 244

Tableau 16. 1 : Caractéristiques microscopiques permettant le diagnostic de genre des


principales mucorales ......................................................................................................... 301

12
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Généralités sur la mycologie

1 GENERALITES SUR LA MYCOLOGIE


Rédigé par Pr Djimdé Abdoulaye (Mali), Relu par Pr Ndiaye Daouda (Sénégal) et
Pr Niaré Safiatou Doumbo (Mali)

13
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Généralités sur la mycologie

Introduction
Le champignon encore appelé mycète est un organisme eucaryote, hétérotrophe, uni-
ou pluricellulaire, dépourvu de chlorophylle et qui se nourrit par absorption.
Les champignons comptent parmi les êtres les plus abondants sur le globe terrestre. Il
y aurait plus de 1.200.000 espèces dans le monde. Les méthodes d’études modernes
permettent d’identifier de nouvelles espèces dans les biotopes de la terre. Quelques
400 espèces sont impliquées en pathologie humaine et plus d’une cinquantaine sont
isolées couramment en pratique médicale.
Les champignons sont des organismes cosmopolites que l’on retrouve sur tous les
continents, dans divers endroits comme la terre, l’air, les roches, le milieu marin, etc.
En plus des champignons classiquement pathogènes, de nombreuses espèces sont des
opportunistes dont le caractère pathogène ne se manifeste que chez les
immunodéprimés (VIH/SIDA, immunosuppression iatrogène, etc.).

I. Place des champignons dans la systématique du


vivant
Au XVIIIe siècle, le père de la systématique Carl von Linné classait les champignons
parmi les végétaux en raison de leur morphologie, de leur comportement immobile et
de leur nutrition qui semblait se faire à travers des « racines ».
En 1969 Wittaker propose 5 règnes : les Monomères (bactéries), les Protistes, les
Végétaux, les Champignons et les Animaux.
En 1976, l’avènement de la Biologie Moléculaire permet l’introduction de la
phylogénie moléculaire. La comparaison des séquences des gènes codant pour l’ARN
ribosomal (ARNr 16S ou 18S) permettait une nouvelle classification. En 1977, Woese
propose un arbre généalogique simple avec 3 branches : les Archaebactéries, les
Eubactéries et les Eucaryotes (Figure 1. 1).

(source K. Diongue, adapté de D. Chabasse, ed. Masson)


Figure 1. 1 : Arbre phylogénique de Woese

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Généralités sur la mycologie

II. Caractères généraux des champignons


Les champignons se développent par un système de filaments ou hyphes plus ou
moins ramifiés et souvent cloisonnés appelé thalle ou mycélium. Il n’y a pas
d’organisation sous forme de tissus ou d’organes distincts. On distingue un thalle
végétatif et un thalle reproducteur. Le thalle peut couvrir une grande surface et est
doté d’une forte capacité d’absorption de nutriments. Les champignons se
reproduisent par des spores qui représentent des éléments de résistance, de
multiplication et de dissémination du champignon dans l’environnement (Figure 1. 2).

Figure 1. 2 : Cycle de vie du champignon. (Source S. Ranque)

A. Thalle végétatif
Le thalle végétatif nait d’une spore qui se fixe sur un substrat nutritif. La spore grossit
et émet un filament qui est le tube germinatif. Le thalle devient le plus souvent
filamenteux mais il peut être unicellulaire chez les levures. Les filaments ou hyphes se
ramifient pour constituer le thalle (Figure 1. 3).

Les hyphes peuvent être tubulaires, à diamètre régulier et présenter des cloisons
internes régulières appelées septa chez les septomycètes (Ascomycètes,
Basidiomycètes et Deutéromycètes). Ils peuvent aussi être irréguliers, dilates, de

15
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Généralités sur la mycologie

diamètre plus large et peu septés. Ce type de hyphe est qualifié de coenocytique ou
siphonné et se retrouve chez les Siphomycètes (Zygomycètes).

Le thalle peut être unicellulaire avec des cellules isolées (ex. Saccharomyces cerevisiae)
ou sous forme de pseudomycelium avec des levures qui s’allongent puis bourgeonnent
en restant collés (ex. genre Candida) (Figure 1. 3).

2
2 2
2

1 1 1
1
a b c d

Les thallospores
Thalle filamenteux des champignons
filament) ; a (2. arthrospore) ; b (2.
a. thalle coenocytique ou siphonné ;
blastospores) ; c. chlamydospores (1:
b. thalle cloisonné
terminale , 2: intercalaire);
1. noyaux ; 2. cytoplasme ; 3. cloison ;
d=aleuriospores (2 : aleuries en acladium)
4. Pore

2
1 2 1
1

a b c
1
a b
Thalle non filamenteux
thalle levuriforme (1 : noyau ; 2 :
Les conidiospores
cytoplasme) ; b. thalle fumagoide (cellule
a (1. filament ; 2. microconidies) ; b.
cloisonnée dans les 3 axes) ; c. thalle en
macroconidie (1=logettes)
grain (filaments mycéliens enchevêtrés)

Figure 1. 3 : Différents aspects du thalle végétal chez les micromycètes.


Source : MC. Seck, Laboratoire Parasitologie-Mycologie, FMPO – Université CAD - Dakar

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Généralités sur la mycologie

B. Thalle reproducteur
Les champignons peuvent se reproduire par bouturage ou par formation de spores.

1. Reproduction par bouturage


Le thalle végétatif se fragmente en articles contenant des noyaux. Ces articles se
dispersent, se fixent à de nouveaux substrats. Ces articles demeurent cependant
fragiles dans l’environnement.

2. Reproduction par formation de spores de


reproduction
Les spores contribuent à la survie de l’espèce et à la dissémination du champignon
dans la nature. La reproduction peut être asexuée (stade anamorphe) ou sexuée (stade
téléomorphe).

a. Reproduction asexuée (stade anamorphe)


Il y a production de spores asexuées par division de la cellule fongique par simple
mitose. Il y a conservation totale du matériel génétique. Selon les champignons, les
spores pourront être des endospores issus de sporange (Zygomycètes), des conidies
issues de conidiophores (Entomophthorales) ou formés directement sur le thalle
(Deutéromycètes) (Figure 1. 4).

b. Reproduction sexuée (stade téléomorphe)


Ce processus permet le brassage des gènes et la ségrégation des caractères
parentaux. Le processus général comporte la fusion de cellules ou d’articles spécialisés
(plasmogamie) puis la fusion des noyaux (caryogamie) suivie d’une méiose et d’une
mitose. Plusieurs variantes existent en fonction des familles, genres ou espèces de
champignons.

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Généralités sur la mycologie

III. Classification des champignons


La taxonomie fongique est assez complexe et en changement constant. Cela en raison
de :
 L’alternance de cycles sexués et asexués en fonction des conditions extérieures ;
 L’existence de champignon sous forme anamorphe ou « mitosporic » (cycle
asexué), téléomorphe ou « méiosporic » (cycle sexué) ou encore holomorphe
(téléomorphe + anamorphe) ;
 La présence presque exclusive des formes anamorphes dans les produits
pathologiques.
Whittaker (1969) divise le monde du vivant en cinq règnes :
 Le règne des Monomères ou procaryotes (bactéries)
 Le règne des Protistes Eucaryotes uni ou pluricellulaires (protozoaires, algues
etc.) ;
 Le règne des Plantes ou végétaux chlorophylliens ;
 Le règne des Animaux ;
 Le règne des Champignons ou Fungi.
Le règne des Fungi comporte 5 Phyla :
 Chytridiomycota ou chytridiomycètes : espèces aquatiques dont les spores
portent un flagelle. On les considère comme les ancêtres de tous les autres
champignons ;
 Zygomycota ou zygomycètes : espèces à spores non flagellées dont les cellules
ne sont pas séparées par des cloisons ;
 Ascomycota, ou ascomycètes : les spores sont produites à l'intérieur de sacs (les
asques) et sont projetées, à maturité, à l'extérieur par ouverture de l'asque ;
 Basidiomycota ou basidiomycètes : les spores se développent à l'extrémité de
cellules spécialisées (les basides) et sont dispersées par le vent à maturité ;
 Glomeromycota autrefois classés dans les Zycomycota ils sont maintenant
considérés comme constituant une division à part.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Généralités sur la mycologie

A) Mucorales : 1. Sporange ; 2. Sporangiophores ; 3) Rhizoïde ; 4. Rupture d’un


sporocyste ; 5. Collerette. B) Entomophthorales : 1. Ballistospore ; 2. Conidiophore.

Figure 1. 4 : Mode de production des spores chez les Mucorales et les


Entomophthorales (Source D. Chabasse)

IV. Physiologie des champignons


Les champignons sont des Eucaryotes, immobiles, hétérotrophes et osmotrophes. Leur
nutrition se fait par absorption. Ils stockent le sucre sous forme de glycogène, se
développent en formant un thalle et se reproduisent par des spores. Contrairement
aux végétaux, leur paroi contient de la chitine. Sur le plan génétique, le triplet UGA
code pour la synthèse du tryptophane. Ils n’ont pas de chlorophylles et nécessitent
donc pour se développer une source de carbone qui proviendra de matières
organiques en décomposition (saprophytes) ou d’êtres vivants (parasites).

V. Notions de mycologie médicale


Les mycoses sont des maladies causées par des champignons microscopiques appelés
micromycètes à mode de nutrition parasitaire. Leur symptomatologie est très variée et
comporte :
- les allergies fongiques respiratoires et cutanées ;
- les mycotoxicoses causées par l'ingestion de divers aliments envahis par des
champignons sécréteurs de mycotoxines.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Généralités sur la mycologie

Les intoxications par des champignons macroscopiques (macromycètes) relèvent


plutôt de la toxicologie que de la mycologie médicale.

A. Définition des mycoses


La dénomination de mycose dérive souvent de l’agent causal en ajoutant le suffixe
« ose », parfois des caractéristiques des champignons en cause, ou de la localisation de
la pathologie ou encore de noms traditionnels. On distingue :

- Phaeohyphomycose : mycose causée par un champignon filamenteux pigmenté ;


- Hyalohyphomycose : mycose causée par un champignon filamenteux hyalin ;
- Dermatomycose : mycose de la peau ;
- Mycose disséminée : impliquant au moins 2 organes profonds et/ou la peau.

B. Classification des champignons d’intérêt médical

1. Levures
Ce sont des champignons unicellulaires avec une contamination interhumaine
prépondérante. Le thalle se réduit à un état unicellulaire de forme ronde et ovalaire,
de petite taille (généralement moins de 10μm). Certaines levures peuvent donner
naissance par bourgeonnements successifs à un pseudo mycélium (ex: Candida)

2. Champignons filamenteux
Champignons pluricellulaires avec une aerocontamination prépondérante. Ils se
développent sur leur substrat nutritif par un système filamenteux plus ou moins
ramifié dénommé thalle ou mycélium constitué de filaments cloisonnés ou non. On
distingue :
- Les dermatophytes : kératinophiles, adaptés à la peau et aux phanères de
l’homme ;
- Les moisissures du sol au comportement opportuniste (Aspergillus).

3. Les Dimorphiques
Ils se présentent dans l’environnement sous une forme filamenteuse, produisant des
spores mais sous forme de levures dans les tissus parasités de l’homme ou de l’animal.

20
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Généralités sur la mycologie

C. Habitat des champignons et mode de


contamination
Beaucoup de champignons sont présents dans le milieu extérieur (moisissures) ou font
partie de la flore fongique normale de la peau et des muqueuses. Si l’organisme
humain est affaibli (immunodépression ou immunosuppression), ces champignons
peuvent devenir pathogènes (caractère opportuniste).

La contamination peut être :

- aérienne, traumatique… pour les champignons de l’environnement ;


- à partir de notre propre flore pour les champignons saprophytes ou
commensaux de notre organisme ;
Quelques champignons sont parasites obligatoires de l’Homme (et parfois
animaux), ne font pas partie de la flore normale et entraînent des signes
cliniques ;
- directe ou indirecte à partir d’un individu parasité (ou animal, éventuellement
sol).

21
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

2 CANDIDOSES
Rédigé par Pr Hounto-Ogouyemi Aurore (Bénin), Relu par Pr Menan Hervé (Côte d’Ivoire),
Pr Dolo Amagana (Mali), Pr Nzenze Solange (Gabon) et Pr Sissinto Savi de Tové Yolande
(Bénin)

22
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

Introduction
Définition
Les candidoses sont des manifestations pathologiques liées à la présence pathogène
des levures du genre Candida. Ces micromycètes levuriformes provoquent des
affections aux aspects symptomatiques polymorphes. Deux grandes localisations
s’opposent du point de vue de leur fréquence et de leur pronostic vital. Il s’agit :
- des candidoses superficielles : cutanéo-unguéales et muqueuses qui sont
fréquentes et qui, en général, n’engagent pas le pronostic vital ;
- des candidoses profondes, septicémiques notamment, plus rares mais graves car
se développant sur des terrains particuliers, et dont l’issue peut être fatale en cas
de retard du diagnostic.
Intérêt
- Les levures du genre Candida sont responsables de plus de 80% des infections à
levures chez l’Homme et C. albicans est incriminé dans 90% des cas. Cette
fréquence s’est accrue avec l’avènement du VIH /Sida. En effet, ces levures
commensales du tube digestif (présentes dans le tube digestif chez 10 à 50% des
individus en dehors de toute manifestation pathologique), profitent de toute
défaillance passagère ou durable (immunodépression) de l’hôte pour se
multiplier.
- La candidose des muqueuses digestives est une affection classant le SIDA selon le
type d’atteinte c’est-à-dire la localisation.
- Les candidoses génitales sont des infections de la femme en période d’activité
génitale. C’est un motif fréquent de consultation en gynécologie, qui peut
affecter 8,8 à 63% des femmes (Jindal et al. 2007 ; Malazy et al. 2007). Les
récidives des candidoses génitales peuvent faire le lit à d’autres infections
sexuellement transmissibles graves comme le VIH.
- Des études effectuées au Gabon avaient trouvé que les candidoses
oropharyngées occupaient la première place parmi les infections opportunistes
avec 37%, et que la candidose orale était retrouvée chez 88% des personnes
infectées par le VIH (Okome Nkoumou et al. 2000 ; Okome Nkoumou et al, 2006).
Toujours dans le même pays, des fréquences respectives de 79,8% et 72% ont
été retrouvées sur la même cible en 2002, et en 2007 (Nzenze-Afène et al. 2010).
Une étude effectuée à Abidjan en Côte d’Ivoire a montré que les candidoses
étaient retrouvées dans 84,6% des onychomycoses avec l’espèce albicans dans
30,8% des isolats (Konaté et al. 2017).

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

I. Epidémiologie
A. Agent pathogène
Taxonomie

Sur le plan de la reproduction sexuée (qui donne lieu à la forme téléomorphe du


champignon), le genre appartient au phylum des Ascomycotina, à la classe des
Saccharomycètes, à l’ordre des Saccharomycétales, à la famille des
Saccharomycetaceae. En Pratique médicale courante, l’identification du champignon
se fait à partir des formes asexuées isolées en culture. Ainsi, le genre Candida
appartient du point de vue asexué à la division des Deuteromycotina, à la classe des
Blastomycètes, à l’ordre des Cryptococcales à la famille des Cryptococcaceae.
Plus d’une centaine d’espèces ont été décrites mais Candida albicans est l’espèce la
plus souvent incriminée (70 à 80%) dans les candidoses digestives et génitales. Au
Gabon, C. albicans est incriminée dans 70,2% des vulvo-vaginites (Nzenze-Afène et al.
2012).
D’autres espèces sont également retrouvées à savoir : C. dubliniensis C. glabrata, C.
tropicalis, C. krusei, C. parapsilosis, C. guilliermondii, C. kefyr, C. africana.

Morphologie
Ce sont des éléments fongiques unicellulaires appelés blastospores (car leur
bourgeonnement est de type blastique) (Figure 2. 1) qui mesurent 3 à 6 µm de
diamètre, ronds à ovalaires, bourgeonnant ou pas et produisant ou pas un pseudo
filament (faux filament) ou un filament vrai. Ils présentent une paroi mince, une
membrane cytoplasmique avec à l’intérieur une grande vacuole, un noyau, des
mitochondries et un appareil de Golgi.

Source: Photothèque laboratoire de mycologie, Université des sciences de la santé, Libreville Gabon.
Figure 2. 1 : Aspect microscopique des levures (forme blastospores)

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

Un pseudo filament ou pseudo mycélium est une structure filamenteuse produite par
une cellule-mère donnant naissance à une cellule fille très allongée, cylindrique qui
bourgeonne à son tour en restant attaché à la cellule qui lui a donné naissance. Cela
aboutit à une structure filamenteuse plus ou moins longue et ramifiée présentant des
étranglements au niveau des contacts intercellulaires. Des bouquets de blastospores
se développent ensuite au niveau de ces zones d’étranglement, ce qui donne au
pseudo mycélium un aspect buissonnant (Figures 2. 2 et 2. 3).

Le mycélium vrai peut s’observer avec C. albicans ainsi qu’avec quelques autres
espèces (C. dubliniensis, C. tropicalis) où l’on rencontre l’association blastospores et
vrai mycélium.

Source: Photothèque laboratoire de mycologie, Université des Sciences de la Santé, Libreville Gabon.
Figure 2. 2 : Aspect microscopique des levures (blastospores et
pseudofilaments)

Source : http://univ.encyeducation.com/uploads/1/3/1/0/13102001/parasito3an-
candidoses2.ppt
Figure 2. 3 : Levures assemblées bout à bout simulant un filament
mycélien : pseudo mycelium = fausse filamentation Biologie

Les levures du genre Candida sont des champignons opportunistes commensaux du


tube digestif qui profitent d’un dysfonctionnement du système immunitaire ou

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

d’autres facteurs favorisants pour s’exprimer. Elles puisent pour leur croissance des
nutriments en particulier le fer fixé sur les protéines de l’hôte. Ce sont des
champignons microscopiques (micromycètes) hétérotrophes dont la reproduction
asexuée se fait par bourgeonnement.

Pathogénie

Elle fait appel aux mécanismes qui font que la levure commensale passe de la
commensalité (phénomène physiologique où la levure est présente dans le site en
équilibre avec la flore locale) à la pathogénicité. Deux stades sont à différencier :
-multiplication-colonisation : où la levure se multiplie en quantité plus importante
qu’habituellement grâce à des conditions locales favorables ;
-l’infection proprement dite ou candidose : la levure se multiplie en prenant sa forme
filamenteuse (pseudomycélium) devenant pathogène, capable d’adhérence aux
cellules, puis d’envahissement tissulaire.

B. Habitat
Les levures du genre Candida sont ubiquitaires fréquemment isolées de
l’environnement (air, sol, fruits, produits alimentaires, produits laitiers, céréales). Chez
l’Homme, elles colonisent de nombreux sites et vivent à l’état commensal au niveau
des muqueuses digestives, aériennes supérieures et génito-urinaires, également sur le
revêtement cutané.

C. Mode de contamination
Candidose génitale

Source endogène : la contamination se fait par prolifération au niveau vaginal des


levures endogènes (Candida albicans) commensales, à la faveur d’un déséquilibre
entre l’hôte et le champignon.

Source exogène : le tractus gastro intestinal est une source de contamination exogène
de Candida incriminée par certains auteurs, surtout lors de Candidoses vulvo vaginales
Récurentes (CVVR). En effet, l’ensemencement vaginal peut se faire par la zone
périnéale adjacente. La contamination exogène peut également se faire à partir des
objets et mains souillés, le nouveau-né et le nourrisson peuvent ainsi être contaminés
par la mère ou le personnel soignant. L’origine sexuelle est une voie probable de
contamination mais qui reste accessoire.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

Candidoses cutanées et unguéales

- En ce qui concerne les onychomycoses et intertrigos interdigitoplantaires


candidosiques, la contamination se fait via des fragments de kératine infectés
essaimés dans la salle de bains ou dans le lit. En dehors de la famille, la
contamination peut avoir lieu en piscine, salle de gymnastique, à l'hôtel, etc. Le
réservoir de champignons est vaste. Concernant les grands plis, ceux situés à
proximité des orifices de muqueuses sont les plus concernés (plis inguinaux, pli
interfessier).
- Ces intertrigos sont observés au cours ou à la suite d’une candidose de ces
muqueuses, dont l’orifice est proche du ou des plis affectés.

D. Facteurs favorisants
Il est exceptionnel de retrouver une mycose en dehors des facteurs déclenchants.
Ceux-ci sont importants à connaitre car ils expliquent la fréquence élevée de ces
mycoses chez certains groupes de sujets, mais aussi parce qu’il est impératif d’en tenir
compte pour le traitement et la prévention. Ces facteurs se répartissent en deux
groupes : exogènes (iatrogènes) et endogènes tenant à l’hôte lui-même.
Facteurs endogènes
- Physiologiques :
- Age : prévalence élevée du muguet buccal chez le nouveau-né et
particulièrement le prématuré, à cause de l’immaturité du système
immunitaire associée au développement encore incomplet de la microflore
orale ;
- Vieillesse, principalement chez le sujet âgé porteur de prothèse dentaire ou
présentant un dysfonctionnement de la motricité œsophagienne ;
- Grossesse : le déséquilibre hormonal observé au cours de la grossesse
entraîne une modification de l’épithélium vaginal et une baisse du pH vaginal,
permettant l’implantation des levures du genre Candida ;
- Période prémenstruelle (rôle des hormones).

- Pathologiques
- Immunodépression acquise : au cours des leucémies, des lymphomes, du VIH ;
- Désordres endocriniens : diabète qui, par le biais d’une concentration salivaire
élevée en glucose, favorise la candidose oropharyngée. Par ailleurs, quand le
diabète est fortement déséquilibré, il entraine une diminution de la capacité
d’élimination des levures du genre Candida par les polynucléaires
neutrophiles ;
- Hyperparathyroïdies, hypothyroïdismes ;
- Malnutrition.

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Candidoses

Facteurs exogènes
Facteurs médicamenteux
- Corticothérapie locale ou généralisée, immunosuppresseurs, radiothérapie ;
- Antibiothérapie : les antibiotiques en inhibant la flore entérique à gram négatif
et la flore lactique, favoriseraient la colonisation intestinale par C. albicans. Ils
favorisent également la colonisation vaginale par destruction de la flore normale
protectrice à lactobacillus ;
- La contraception orale : pilules fortement dosées en œstrogène.
Facteurs professionnels
- Contacts répétés avec l’eau (ménagères, plongeurs de restaurants, poissonniers)
et avec le sucre (pâtissiers) ;
- Manipulation de produits caustiques ;
- Manucure intempestive ;
- Port de chaussures de sécurité, bottes.
Facteurs locaux
- Effet occlusif des vêtements serrés ;
- Microtraumatisme ;
- Conditions d’hygiène précaire ;
- Modification du pH par des produits d’hygiène intime ;
- Tampons vaginaux internes pouvant entraîner une irritation locale ;
- Partenaire contaminé ;
- Humidité, macération (intertrigo des grands plis).

E. Répartition géographique
Les levures du genre Candida sont cosmopolites, rencontrées dans le monde sous tous
les climats aussi bien en zone tempérée qu’en zone tropicale. La plupart des données
épidémiologiques récentes, concernant les candidémies et la répartition des espèces,
varie selon les zones géographiques étudiées. Aux Etats-Unis, au Canada et en Europe,
C. albicans demeure l’espèce majoritairement isolée avec 41 à 60% des isolats
cliniques tandis que les espèces non albicans prédominent sur le continent latino-
américain (Pfaller et al. 1999). De manière générale, on assiste à une diminution de la
prévalence de C. albicans au profit des espèces non albicans.
Candidoses génitales : Au Bénin, avec une prévalence de 39,5% elle constitue la
première cause d’infection génitale basse avant les bactérioses à Cotonou (Ogouyèmi-
Hounto et al. 2014). Au Maroc, une prévalence de 26% a été trouvée (Benchellal et al.
2011) tandis qu’au Gabon, Nzenze-Afène a rapporté une prévalence de 46,4% (Nzenze-
Afène et al. 2012).

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

II. Diagnostic biologique


A. Circonstances du diagnostic
Il s’agit d’un sujet immunodéprimé ou non présentant :
 Une candidose digestive : plusieurs formes cliniques sont décrites
- Candidose buccale, qui se manifeste soit par
 un muguet caractérisé par un enduit blanchâtre au niveau de la langue,
des gencives et de la face interne des joues ;
 une candidose atrophique où la langue est rouge luisante et dépapillée,
souvent douloureuse ;
 une candidose pseudo tumorale avec des lésions d’allure
bourgeonnante, végétantes situées à la face interne des joues ;
 la perlèche caractérisée par une fissuration bilatérale avec un fond
croûteux au niveau des commissures labiales, gênant de ce fait
l’ouverture de la bouche.
- Candidose œsophagienne caractérisée par une dysphagie douloureuse, un
pyrosis et une sensation de brûlure au passage des aliments.
- Candidose gastro intestinale avec les selles abondantes généralement
liquides et habituellement inodores avec flatulence et crampes abdominales.
- Candidose anale ou anite candidosique caractérisée par un prurit anal
souvent féroce avec une sensation de brûlure anale au passage des selles.
 Une candidose génitale évoquée chez une femme en période d’activité
génitale devant un prurit vulvaire intense (signe le plus constant) associé à des
pertes vaginales (leucorrhées) plus ou moins abondantes épaisses et
grumeleuses à aspect de lait caillé sans odeur nauséabonde. Chez l’homme,
l’atteinte génitale est beaucoup plus rare et se traduit par une balanite
caractérisée par un érythème prurigineux du gland avec de discrètes érosions
superficielles et des pustules. Les lésions sont blanchâtres dans les formes
aiguës envahissant le sillon balano-préputial.
 Une candidose cutanée dont le siège de prédilection est le pli (intertrigo). Qu’il
s’agisse des grands plis (axillaires, sous-mammaires, abdominaux, inguinaux et
interfessier) ou petits plis (commissures labiales, espaces interdigitopalmaires
localisation plus fréquente que les espaces interdigitoplantaires) l’intertrigo
candidosique débute au fond du pli et s’étend de part et d’autre de ce dernier.
Au niveau des grands plis particulièrement aux plis inguinaux, la lésion est
caractéristique. Il s’agit de lésions constituées de papules prurigineuses
vésiculo-squameuses siégeant sur peau plus ou moins érythémateuse. Dans
certains cas le fond du pli est fissuré et recouvert d’une pellicule blanchâtre.
L’intertrigo candidosique ne présente pas de limites nettes ni de bords
surélevés comme l’intertrigo dermatophytique. En effet, au-delà de la
périphérie de la lésion on peut observer des lésions papulo-vésiculo-

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Candidoses

squameuses isolées. Macération et hyperkératose sont souvent présentes au


niveau des plis inter digito plantaires.
 Une candidose unguéale ou onychomycose candidosique : On note une
atteinte préférentielle des mains chez les femmes présentant des facteurs de
risque locaux. L’onychomycose débute par une atteinte des tissus péri-
unguéaux (périonyxis) sous forme d’une tuméfaction érythémateuse parfois
douloureuse, entourant la tablette unguéale suivie secondairement d’une
atteinte de l’ongle par le bord proximal qui gagne ensuite le bord libre (Figure
2. 4).
D’autres aspects tels que l’onycholyse (décollement de la tablette unguéale de son lit :
Figure 2. 5), la leuconychie (taches blanchâtres à bords nets confluents en nappe, sur la
face dorsale de la tablette unguéale : Figure 2. 6) peuvent être observés dans la
candidose unguéale.

Figure 2. 4 : Périonyxis et Onyxis à Candida

Figure 2. 5 : Leuchonychie à Candida

Figure 2. 6 : Onycholyse à Candida


Source : Photothèque laboratoire de mycologie, Université
des sciences de la santé, Libreville Gabon.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

Une candidose systémique sera évoquée chez un patient à risque, devant une fièvre
irrégulière résistante aux antibiotiques accompagnée d’une altération de l’état
général.

B. Les modifications biologiques non spécifiques


Les candidoses ne provoquent pas de modifications biologiques non spécifiques.

C. Diagnostic mycologique
La clé du diagnostic repose sur un examen mycologique bien conduit dont
l’interprétation des résultats doit tenir compte des données de l’examen direct, de la
culture (nombreuses colonies de Candida en culture), de la symptomatologie et/ou de
l’état immunitaire du patient. La démarche du diagnostic mycologique comporte 4
étapes importantes :
- le prélèvement ;
- l’examen direct ;
- I’isolement : ensemencement et culture sur milieux appropriés ;
- l’identification des champignons isolés et éventuellement la réalisation d’un
antifongigramme.

Les prélèvements
Ils doivent être réalisés avant tout traitement spécifique. Le matériel utilisé aussi bien
pour le prélèvement que pour le recueil de ce dernier doit être stérile. Le succès de
l’examen mycologique et la qualité des résultats obtenus dépendent en grande partie
des conditions dans lesquelles les prélèvements ont été effectués. Ils doivent être
effectués à distance de toute thérapeutique antifongique et acheminés rapidement au
laboratoire pour ensemencement immédiat afin d’éviter les risques de résultats
faussement négatifs, consécutifs à une dessiccation (surtout lorsqu’il s’agit des
prélèvements humides comme les écouvillons) souvent préjudiciable à la viabilité des
levures. Il existe également un risque d’envahissement par la flore bactérienne
saprophyte susceptible de gêner la mise en évidence de l’agent fongique. Si l’examen
mycologique n’est pas fait dans l’immédiat, le prélèvement sera conservé 24 h à 48 h à
+ 4°C.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

Le site du prélèvement est guidé par le siège de l’atteinte mycosique.

- Prélèvements oro-pharyngés: ils doivent être toujours effectués avant un repas.


On utilise deux écouvillons, le prélèvement se fera par écouvillonnage plus ou
moins appuyé au niveau des lésions. Un des écouvillons servira pour l’examen
direct, l’autre pour la mise en culture.
- Prélèvement péri-anal : l’écouvillonnage est également réalisé pour les lésions
péri anales.
- Prélèvement de selles : les selles sont prélevées en cas de candidose intestinale.
- Prélèvement de biopsies œsophagiennes (plus rarement gastriques) : candidose
œsophagienne ou gastrique.
- Prélèvement génital : chez la femme, les prélèvements par écouvillonnage sont
réalisés au niveau du vagin et des culs de sac vaginaux. Les écouvillons doivent
être rapidement examinés et ensemencés non seulement pour éviter l’altération
des éléments fongiques, mais aussi pour détecter d’éventuels formes végétatives
de T. vaginalis. Chez l’homme, l’exsudat est prélevé à l’écouvillon sur le gland et
dans le sillon balano préputial.
- Prélèvement de peau et ongles : gratter les lésions avec une curette ou une lame
de bistouri ou un vaccinostyle. Pour les ongles, couper des fragments d'ongle au
niveau des zones affectées et gratter l’ongle dans le cas des lésions de
leuconychie au niveau des zones blanchâtres pour la culture, puis prélever de la
poudre au niveau du lit de l'ongle pour l'examen direct. En cas de périonyxis,
presser le bourrelet érythémateux, et prélever les sérosités à l'écouvillon.
- Candidose systémique : prélèvement de sang dans les conditions rigoureuses
d’asepsie.

Techniques
 Examen direct : c’est la première étape au laboratoire. On peut distinguer
l’examen direct des prélèvements superficiels et celui des prélèvements
profonds.
- Examen direct des prélèvements superficiels
Il s’effectue soit directement à l’état frais dans un liquide non coloré (sérum
physiologique stérile), soit en utilisant un colorant (permettant de visualiser les
éléments fongiques (blastospores, filaments ou pseudo-filaments) à l’aide d’une
solution au lugol à 2%, du bleu de toluidine, du bleu de lactophénol ou du noir
chlorazole. L’examen direct des ongles nécessite un éclaircissement préalable, dans la
potasse (KOH à 30%) ou autre éclaircissant.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

- Examen direct des prélèvements profonds


Les étalements, les appositions sur lames de fragments de biopsie ainsi que les spots
de cyto centrifugation sont réalisés à partir des prélèvements de sites profonds (LBA,
Liquide pleural, articulaire, urines, LCR, produit de raclage de cavité et de biopsie
tissulaire). Les frottis sont fixés à la chaleur ou à l’alcool puis colorés par le May
Grünwald-Giemsa ou traités par imprégnation argentique (technique de Gomori
Grocott ou de Musto).

 La culture
- Milieux standards
Le milieu gélosé de Sabouraud additionné de chloramphénicol et/ou de gentamycine
est le plus utilisé. On y associe parfois la cycloheximide (actidione®) qui empêche la
croissance de nombreuses moisissures susceptibles de contaminer les cultures. Mais
ce produit peut inhiber ou freiner aussi la pousse de certaines espèces de levures du
genre Candida telles que C. glabrata, C. parapsilosis, C. tropicalis et C. famata. La
culture consiste à ensemencer les différents prélèvements sur ce milieu dans des
boîtes de Pétri qui offrent une surface d’ensemencement plus importante
comparativement aux tubes.

 Pour les produits biologiques liquides, l’ensemencement se fait de façon


stérile, par épuisement progressif du liquide sur la gélose. La calibration
de l’inoculum permet de dénombrer les levures.
 Les produits biologiques plus épais tels que le liquide bronchique,
gastrique ou synovial, les crachats doivent être préalablement fluidifiés à
l’aide d’un mucolytique.
 Le sang est ensemencé le plus souvent directement dans des flacons
d’hémoculture.
 Les sondes ou les cathéters sont directement placés dans un milieu de
Sabouraud liquide et incubés à 37°C.
La température optimale de croissance dépend du site de prélèvement. Pour les
prélèvements superficiels, les boîtes sont incubées à 27°C. Pour les prélèvements
profonds, les cultures sont incubées à 37°C. Une durée d’incubation de 24 à 48 heures
est généralement suffisante pour isoler la majorité des levures pathogènes
appartenant au genre Candida.

- Milieux chromogéniques
Ces milieux confèrent aux colonies qui s’y développent une coloration variable en
fonction de l’espèce et sont particulièrement indiqués pour le diagnostic des levures
du genre Candida. En effet, la détection sélective de C. albicans est possible à l’aide de
milieux d’isolement contenant, outre des antibiotiques, un substrat chromogénique
(ou fluorogénique pour les milieux fluorogéniques) d’une enzyme spécifique de

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

l’espèce que l’on souhaite isoler. L’hydrolyse de cette enzyme entraîne l’apparition
d’une coloration (ou d’une fluorescence) au niveau de la colonie elle-même. Plusieurs
milieux chromogéniques ont été développés ; ils permettent d’identifier directement
C. albicans dont la couleur des colonies varie en fonction des milieux utilisés. CHROM
ID Candida® (Biomérieux), CHROM-Agar® (Becton-Dickinson), Candi-Select® 4 (Bio Rad).

- Milieux fluorogéniques
Le milieu fluoroplate Candida® (Merck) permet, en 24 à 48 heures d’incubation, la
pousse de colonies de C. albicans lorsque les boîtes sont observées sous lumière
ultraviolette à 366 nm.

- Milieux pour hémocultures


Pour les hémocultures, il est recommandé d’utiliser un milieu spécifique favorisant la
croissance fongique avec un système de lecture automatisée fondée sur la mesure du
CO2 libérée au cours de la croissance de la levure (automates Bactec ®, Bact/ALERT®). La
détection de la croissance fongique repose sur des mesures colorimétriques
(Bact/ALERT®) ou fluorimétriques (Bactec®) automatiques. A défaut de ces milieux
spécifiques, les hémocultures pour la bactériologie peuvent être utilisées pour les
levures en particulier les flacons destinés aux bactéries aérobies (car les flacons mis en
anaérobiose ne sont pas adaptés à la croissance des levures).

 Identification
Il convient d’identifier les levures à partir de colonies bien individualisées. Par ailleurs,
même si un diagnostic de présomption existe déjà, l’identification de la levure (genre
et espèce) est recommandée. En pratique de laboratoire, l’identification fait appel à
des caractères morphologiques, physiologiques, et parfois immunologiques grâce à des
tests fondés sur l’agglutination de particules de latex sensibilisées par des anticorps
monoclonaux.

Identification de C. albicans
C. albicans étant la levure la plus isolée et la plus impliquée dans les processus
pathologiques, il convient de chercher à l’identifier en priorité.
- Tests de germination ou de filamentation en sérum encore appelé test de
blastèse. Il est basé sur le fait que C. albicans/C. dubliniensis/ C. africana) sont
capables de développer dans du sérum, à 37°C en 2 à 4 heures, des tubes
germinatifs à partir d’une blastospore. Il est réalisé à partir des colonies isolées
sur milieu Sabouraud chloramphénicol.
- Test de chlamydosporulation : sur les milieux RAT (Riz Agar Tween) ou PCB
(Pomme de terre, Carotte, Bile), C. albicans est capable de produire en 24 à 48 h
à 25-28°C des chlamydospores (grosses spores arrondies à paroi épaisse) à
l’extrémité des pseudo-mycéliums.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

- Tests d’agglutination au latex (Bichrolatex® albicans). Le principe repose sur une


co-agglutination sur lame. Les particules de latex (colorées en rouge) en
suspension dans un contre colorant vert sont sensibilisées par un anticorps
monoclonal spécifique d’un antigène pariétal de C. albicans.
- Test d’Immunochromatographie sur Membrane (ICM). C’est le seul test qui
permet de distinguer C. albicans, de C. dubliniensis, grâce à deux anticorps
monoclonaux, l’un spécifique de la phase filamenteuse de C. albicans, le second
du binôme C. albicans - C. dubliniensis.

Identification des espèces non albicans


- Tests immunologiques. Ces tests sont fondés sur le principe d’agglutination de
particules de latex sensibilisées par un anticorps monoclonal.
- Tests enzymatiques. Le test glabrata RTT® de réalisation simple, permet
d’identifier rapidement C. glabrata par son aptitude à hydrolyser le tréhalose et
non le maltose.
- Etude des caractères physiologiques
Elle repose sur l’étude de l’assimilation des carbohydrates (auxanogramme) et de
la fermentation (zymogramme) recherchée en routine grâce à des galeries
miniaturisées et standardisées : Api Candida, Api 20C AUX ou ID32 C. Dans le
cadre de l’auxanogramme, la levure est placée en anaérobiose en présence
d’une source d’azote. La source de carbone est fournie par un hydrate de
carbone, déjà distribuée sous forme lyophilisée au fond de chaque cupule. Le
nombre de sucres testés varie selon la galerie commercialisée. Lorsque la levure
assimile le sucre, celle-ci se multiplie, ce qui se traduit par un trouble dans la
cupule. Dans le cas du zymogramme, les cupules sont placées en anaérobiose et
l’assimilation par la voie fermentative entraine un virage de l’indicateur de pH en
raison de la production de métabolites acides.
La discrimination entre C. albicans et C. dubliniensis sur les galeries d’identification
n’est pas déterminante. De même, des caractères physiologiques obtenus avec
certaines galeries peuvent être identiques pour 2 espèces voisines. La biologie
moléculaire pourrait aider dans ces cas à identifier l’espèce en cause. L’identification
des levures nécessite de prendre en compte aussi les caractères macroscopiques et
microscopiques des levures.

 Détermination de la sensibilité aux antifongiques


- Indications
La réalisation d’un antifongigramme à partir d’un isolat issu d’un produit pathologique
est proposée dans les situations suivantes :
 lorsque la levure est isolée d’une hémoculture ou d’un site profond ;
 lorsque la levure est isolée d’un site superficiel, notamment cavitaire, en cas de
récidive ou d’échec thérapeutique ;

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

 lorsqu’il s’agit de patients fragilisés (sévèrement atteints), notamment


immunodéprimés ou soumis à une forte pression de sélection par les
antifongiques utilisés en prophylaxie. Plusieurs méthodes peuvent être
utilisées.
- Méthode par diffusion
Cette méthode est comparable à l’antibiogramme bactérien. Des disques imprégnés
d’une concentration connue d’antifongique sont déposés à la surface d’une gélose,
préalablement ensemencée (avec l’isolat de la levure à étudier) par inondation ou
écouvillonnage. A partir des disques, l’antifongique va diffuser dans la gélose et créer
une zone d’inhibition de croissance de la levure autour du ou des antifongique(s)
testé(s). En fonction de la valeur du diamètre de la zone d’inhibition de croissance
autour de chaque disque, les souches de levures à étudier sont classées en sensibles,
intermédiaires ou résistantes à l’antifongique testé. Le milieu de Casitone est indiqué
pour les azolés et les polyènes.

- Méthodes par dilution


Dilution en milieu solide. Pour un antifongique donné, une gamme de dilution est
établie, puis incorporée dans un milieu gélosé avant coulage en boîte de Pétri.
L’ensemencement des souches à tester se fait à l’aide de l’appareil de Steer, qui est un
multiensemenceur permettant de repiquer, en une fois 36 souches sur le même
milieu.

Dilution en milieu liquide ou semi-solide.


- En milieu liquide : Le National Commitee of Clinical Laboratory Standarts (NCCLS)
a proposé en 1992 une macrométhode en tube avec détermination visuelle des
CMI. Pour pallierla lourdeur de la mise en œuvre de cette technique, le NCCLS a
proposé une méthode avec lecture spectrophotométrique des CMI. Elle est bien
corrélée avec la macrométhode.
- En milieu semi-solide : il existe plusieurs méthodes en milieu semi-solide
commercialisées sous forme de galerie (fungitestR, ATBR fungus2) qui permettent
de tester la sensibilité des levures du genre Candida dans des conditions très
proches des techniques de microdilution en milieu liquide. La galerie FungitestR
permet de tester la sensibilité à 6 antifongiques : 5-FC (5 Fluoro-Cytosine),
amphotéricineB (AmB), fluconazole, Itraconazole, kétoconozale et miconazole.
Ces antifongiques sont testés à deux concentrations différentes, ce qui permet
de fournir une CMI. La galerie ATBR fungus 2, pour sa part, teste 4 molécules :
5 FC, AmB, fluconazole et itraconazole, avec une gamme de concentration
croissante de 6 à 10 valeurs. Elle permet aussi le calcul des CMI.
Méthode par dilution-diffusion. Il s’agit de la méthode E-test, qui repose sur
l’utilisation de bandelettes imprégnées d’un gradient exponentiel prédéfini
d’antifongique. Elle consiste à déposer sur la surface d’une gélose ensemencée avec

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

l’isolat de la levure à tester, une bandelette pour chacun des antifongiques (Figure 2.
7). Les CMI sont directement lues sur l’échelle de la bandelette à leur intersection avec
l’ellipse de la zone d’inhibition (Figure 2. 8). Cette méthode, plus simple d’utilisation
que les méthodes de dilution en milieu liquide, est bien corrélée avec celle du NCCLS
(National Committee for Clinical Laboratory Standards, Etats-Unis).

Figure 2. 7 : Dtermination de la CMI par diffusion en milieu gélosé :


bandelette de E test déposée à la surface de la gélose ensemencée
par une souche de Candida

Figure 2. 8 : Lecture de la CMI. Ici, la souche est sensible aux 2


antifongiques : Amphotéricine B (AP) et Fluconazole (FL)
Source : http://www.eanofel.fr/fr/mycologie-medicale

Résultats
Examen direct : Lors de la suspicion d’une candidose, l’examen microscopique direct a
pour but de mettre en évidence dans les prélèvements, la présence parasitaire du
micromycète sous forme de blastospores associés ou non à des pseudofilaments
encore appelés pseudohyphes. Lorsqu’il s’agit de prélèvements de muqueuses
(digestive et génitale essentiellement), la seule présence de quelques blastospores ne
peut orienter vers une infection, car les levures sont commensales de ces muqueuses.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

Ainsi chez un sujet immunocompétent, l’abondance des levures à l’examen direct et


principalement la présence de pseudofilaments sont des éléments qui permettent
d’évoquer le caractère pathogène des levures. Par contre, la mise en évidence de
levures sur des lésions d’onychomycose ou dans les prélèvements profonds
normalement stériles, plaide en faveur du caractère pathogène de ces dernières.

Culture : elle permet d’apprécier l’aspect macroscopique des colonies.

- Sur Sabouraud chloramphénicol : Candida donne des colonies blanchâtres bombées


lisses crémeuses (Figure 2. 9).

Source : http://www.eanofel.fr/fr/mycologie-medicale

Figure 2. 9 : Candida Sp. Aspect macroscopique des colonies de levure en


culture

- Sur milieu chromogénique : C. albicans se colore en bleu sur Candida ID®2, en vert
sur CHROM-agar® ou encore en Rose violet sur Candi-select® et Candi 4® (Figure 2.
10).

Source :http://univ.encyeducation.com/uploads/1/3/1/0/13102001/parasito3an-
candidoses2.ppt
Figure 2. 10 : Aspect des colonies de Candida albicans sur milieux chromogène

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

C. dubliniensis et C. africana développent également une coloration verte sur CHROM-


agar® de même que sur les milieux Candi-select® et CHROM ID Candida®. Ces espèces
très proches de C. albicans présentent les mêmes caractéristiques que cette dernière.
Les milieux chromogéniques ne peuvent donc pas différencier ces trois espèces. Sur
ces milieux, l’aspect et la couleur des colonies d’espèces non albicans telles que C.
krusei, C. tropicalis et C. glabrata permettent également l’identification présomptive
de ces trois espèces.
- Sur milieux fluorogéniques : la pousse des colonies de C. albicans présente une
fluorescence bleutée.
Identification
- le test de germination ou de filamentation en sérum permet d’observer les
tubes germinatifs qui sont des fins tubes émis par la levure, sans constriction à la
base et caractéristiques de l’espèce C. albicans (Figure 2. 11).

Source :http://univ.encyeducation.com/uploads/1/3/1/0/13102001/parasito3an-
candidoses2.ppt

Figure 2. 11 : Test de blastèse. Blastospores avec tubes


germinatifs

- Test de chlamydosporulation : sur les milieux RAT et PCB, on note la formation


de chlamydospores qui sont de grosses spores terminales (ou intercalaires) à
paroi épaisse biréfringente, à l’extrémité du pseudomycélium ; elles sont
caractéristiques de l’espèce C. albicans (Figure 2. 12). C. dubliniensis produit en
nombre plus important des Chlamydospores, disposés par paire ou par triple.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

Source :http://univ.encyeducation.com/uploads/1/3/1/0/13102001/parasito3an-candidoses2.ppt
Figure 2. 12 : Chlamydospores de C.albicans au microscope optique X40

- Des tests d’agglutination au latex (Bichrolatex albicans®). Dans le cas de colonie


de C. albicans, on observe des agglutinats rouges sur fond vert. Ce test réagit
aussi avec C. dubliniensis.

Interprétation
Le caractère pathogène de la levure doit être discuté dans un contexte clinique et
épidémiologique, en particulier lorsqu’elle est isolée de sites superficiels normalement
colonisées (peau, bouche, trachée, selle, vagin) ou qu’elle provient de prélèvement
pouvant être contaminés (lavages bronchiolo-alvéolaires, urines…)

L’interprétation doit, en effet, tenir compte de nombreux facteurs tels que l’espèce
isolée, l’abondance des levures en culture pure, l’isolement à plusieurs reprises de la
même espèce (souche), ainsi que des données de l’examen direct qui est très
contributif lorsqu’il est positif.

Le terrain : un sujet immunodéprimé (VIH en particulier), une maladie sous-jacente


(diabète en particulier), sont aussi à prendre en compte. Quelques exemples :

- Dans les sites cutanés ou les sites cavitaires, la présence de levures peut
correspondre à une simple colonisation. L’interprétation ne se fera qu’après
identification de l’espèce et la confrontation avec les données cliniques. Dans les
situations où cela est possible, la numération des levures est très contributive au
diagnostic. Par exemple, la présence de plus de 10 colonies par cm 2 de surface
oro-pharyngée écouvillonnée, ou par ml de solution de rinçage buccal, ou encore
par gramme de selles, est en faveur du caractère pathogène de la levure isolée.
- L’isolement de levure du genre Candida dans les selles témoigne le plus souvent
d’une simple colonisation. Celle-ci doit cependant être prise en compte dans la
surveillance des patients à risque, en réanimation, et en onco-hématologie.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

- La présence de levures du genre Candida dans une urine peut être fortuite, et sa
responsabilité ne sera démontrée que devant une culture pure, abondante et en
l’absence de sonde. Toutefois, il convient de noter que la présence de levures
dans les urines doit être interprétée avec prudence. Une souillure issue des voies
urinaires basses (urètres) n’est pas rare. Dans ce cas, on s’attachera à dénombrer
le nombre de colonies. Ainsi, une candidurie supérieure à 104UFC, (Unité
Formant Colonies) par ml, chez un patient non sondé, est en faveur d’une
infection urinaire.
- La présence des levures dans un prélèvement des voies aériennes
(expectoration, aspiration bronchique, lavage broncho alvéolaire) est parfois
d’interprétation difficile en raison d’une colonisation fréquente de la voie
aérienne supérieure oro-pharyngée. Seule la biopsie (rarement pratiquée) est
contributive au diagnostic d’une levurose pulmonaire.
- Pour les prélèvements profonds (normalement stériles) comme pour les
hémocultures, l’identification d’un seul isolat suffit à porter le diagnostic et à
instaurer un traitement antifongique adapté à l’espèce et, éventuellement, à
l’antifongigramme. Leur sensibilité demeure décevante (en général inférieur à
50%, selon les souches), malgré l’amélioration des milieux spécifiques. Il est donc
important de répéter les prélèvements chez tout patient à risque et, de
préférence au moment des pics fébriles. Dans l’attente des résultats de
l’identification de la levure isolée d’une hémoculture ou d’un prélèvement
profond (normalement stériles), il convient de communiquer rapidement au
clinicien les données de l’examen direct pour une prise en charge thérapeutique
adaptée du patient.

Pour résumer, deux situations sont à considérer en pratique de laboratoire :


 Cas des levures isolées d’un produit biologique normalement stérile (liquide,
tissu) : l’isolement des levures à partir de tels prélèvements présente une haute
valeur diagnostique, si les mêmes espèces sont isolées en grand nombre, sans
autres germes associés.
 Cas des levures isolées d’un conduit naturel ou de la peau et des phanères
habituellement non stériles : il convient en raison du caractère commensal de
certaines levures et d’une souillure possible du prélèvement, de tenir compte :
- des résultats de l’examen direct : la présence de pseudofilaments à
l’examen direct est associée au caractère pathogène des levures;
- de l’abondance des levures en culture.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

III. Diagnostic Immunologique


Il est surtout utile dans les localisations profondes des candidoses. L’impossibilité
d’avoir recours, pour l’isolement et l’identification des levures, à des procédures
invasives, a conduit au développement des méthodes immunologiques pouvant
mettre en évidence les anticorps et/ou les antigènes marqueurs d’une infection
fongique invasive.

Recherche des anticorps


En pratique, la sérologie des levuroses est limitée au diagnostic des candidoses.
Plusieurs tests commercialisés sont à disposition :

- L’IFI (immunofluorescence indirecte) utilisant des blastospores de C. albicans,


déposés sur des lames prêtes à l’emploi ;
- L’HAI (hémagglutination indirecte), détectant préférentiellement des anticorps
de type IgM ;
- L’immuno-électrophorèse et électrosynérèse, détectent les anticorps
précipitants, principalement pendant la phase parasitaire de la levure ;
- L’ELISA (Enzyme-linked ImmunoSorbent Assay) met en évidence des anticorps
dirigés contre les mannanes.
En raison du caractère commensal de C. albicans au niveau du tube digestif, il est
recommandé d’associer 2 ou 3 techniques. Un patient peut présenter un taux résiduel
d’anticorps anti-Candida. Un taux élevé, notamment en ELISA, plaide en faveur du
caractère pathogène de la levure. Chez l’immunodéprimé, en raison de la colonisation
accrue de Candida chez ces patients et de la faible production d’anticorps, l’utilisation
répétée (bi-hebdomadaire) est nécessaire afin de suivre l’évolution cinétique des
anticorps. Son ascension plaide en faveur d’une infection récente. Utilisant aussi des
techniques ELISA, la détection combinée des anticorps anti-mannane et de l’antigène
mannane, couplée à la répétition des examens, révèle tout son intérêt pour le
dépistage précoce des candidoses profondes.

Recherche des antigènes circulants

La séro-immunologie des levuroses reste limitée en pratique aux seules candidoses


profondes chez les patients immunocompétents. Mais malgré des avancées techniques
récentes, cette sérologie peut souvent être mise en défaut chez l’immunodéprimé du
fait de l’évolution rapide de l’infection, du faible taux d’anticorps produits et, parfois
de leur saturation par les antigènes fongiques circulants. Dans ces situations, la
détection des antigènes circulants ou de métabolites fongiques dans le sang, mais
aussi dans les urines, le liquide céphalorachidien, le lavage broncho-alvéolaire,
peuvent pallier à ces inconvénients.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

Actuellement, on distingue 3 tests commercialisés pour la détection des antigènes


mannanes de Candida :

- Test Pastorex® Candida. Il consiste en l’agglutination des particules de latex


sensibilisés par un anticorps monoclonal anti-Candida de type IgM et présente
une excellente spécificité. Mais sa sensibilité est mauvaise, ne dépassant pas
30% ;
- Test Platelia Candida Ag®. Il détecte les mannanes circulants par une technique
ELISA sandwich en microplaque. Même si sa spécificité est excellente, sa
sensibilité n’excède pas 50%. De plus, comme pour le test précédent
d’agglutination, il reconnaît de façon inconstante les mannanes pariétaux des
blastospores de Candida non albicans (C. krusei, C. kefyr et C. parapsilosis). Son
utilisation est recommandée avec la recherche combinée des anticorps anti-
mannanes utilisant la même méthode (ELISA). Ces tests Platelia permettent de
réaliser un diagnostic de candidoses systémiques en 4 jours en moyenne, avant
la positivité des hémocultures ;
- Test Serion ELISA antigen Candida®. Ce test est voisin du précédent, basé sur la
détection des antigènes mannanes par une technique ELISA sur microplaque.

IV. Principes thérapeutiques

A. But
• Détruire l’agent pathogène
• Guérir le malade
• Éviter les complications

B. Moyens : ce sont des moyens essentiellement


médicamenteux
 Nystatine : mycostatine® présenté en suspension buvable de 100.000UI/ml et en
comprimés enrobés à 500.000UI.
 Amphotéricine B : fungizone® présenté en suspension buvable de 100mg/ml, en
gélule de 250 mg, en poudre injectable de 50mg et en lotion pour application
locale.
 Amphotericine B liposomale : Ambisome® : elle ne représente pas une efficacité
supérieure, mais permet une meilleure tolérance lors des perfusions et une
moindre toxicité rénale. Par ailleurs, ces formulations peuvent être administrées

43
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

plus rapidement et à de plus fortes posologies (3 à 5 mg/kg/j) alors que pour


l’amphotericine B conventionnelle, la dose maximale journalière est de
1mg/kg/j.
 Les dérivés azolés
- Fluconazole : Triflucan® gélule de 50, 100 et 200mg, suspension buvable,
solution pour perfusion à 2mg/ml. Il possède une excellente
biodisponibilité aussi bien par voie orale indépendante de l’acidité
gastrique, que générale. Il est contre indiqué chez la femme enceinte et est
actif sur toutes les levures du genre Candida à l’exception de C. krusei et C.
glabrata pour lequelles son activité est dose dépendante.
- Kétoconazole : Il est présenté sous une forme locale (crème, gel,
pommade) et orale Nizoral® (comprimés à 200mg et suspension buvable à
20mg/ml). L’inconvénient majeur de cette molécule est sa toxicité
hépatique. Par ailleurs, sa biodisponibilité dépend de l’acidité gastrique et
est donc perturbée par les antiacides, les antiH1et l’atropine.
- Itraconazole : sporanox®. C’est un triazolé dont l’absorption varie d’un
individu à un autre, ce qui est son inconvénient majeur. Sa biodisponibilité
per os est variable et son absorption est maximale lorsque le produit est
ingéré après le repas. Il est contre-indiqué chez la femme enceinte. Comme
les autres azolés, il présente un risque hépatique et de nombreuses
interactions médicamenteuses. L’itraconazole est présenté sous forme de
gélule à 100mg ou de suspension buvable.
- Voriconazole : Vfend®. Il est efficace également sur C. glabrata et C. krusei.
Il possède les mêmes contre-indications que le fluconazole et
l’itraconazole. Une surveillance des fonctions hépatiques et rénales
s’impose. Le voriconazole se présente sous forme de comprimés à 50 et
200mg, suspension buvable de 40mg/ml et sous forme injectable
(ampoules de 30ml=200mg à diluer avant perfusion).
- Posaconazole : Noxafil®. Il est présenté sous forme de suspension buvable
à 40mg/ml (avec cuillère-doseuse graduée).
- Econazole : Gyno-Pevaryl® 150mg, boîte de 3 ovules, Gyno-Pevaryl®LP,
150mg, 1 ovule, Crème pour application locale.
- Miconazole : Daktarin® gel buccal, Gyno Daktarin® comprimé
gynécologique dosé à 400mg, crème pour application locale.

 Les Echinocandines
Cette nouvelle classe d’antifongiques fait partie des polypeptides
- Capsofungine : Cancidas®. Elle a une action fongistatique et fongicide. Des
réactions allergiques sont décrites ainsi que les phlébites au point
d’injection.

44
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

 Solutions ou savons bicarbonatés, antiseptiques aqueux (dérivés iodés,


chlorhexidine)

C. Indications
Il convient, dans tous les cas, de rechercher les facteurs favorisants et de les maîtriser
à défaut de pouvoir les éradiquer. Les résultats de l’antifongigramme permettent de
mettre en place le traitement approprié.

Candidose digestive
 Candidoses oropharyngées sans atteinte œsophagienne
- En cas de lésions débutantes ou peu avancées, il convient de prescrire en
première intention un traitement local comme la nystatine ou
l’amphotéricine B par voie orale, ou un azolé comme le miconazole gel
buccal. L’application doit être faite en dehors des repas 3 à 4 fois par jour et
les produits doivent rester en contact de la muqueuse buccale au moins 2 à
3 mn. Une durée de 7 à 15 jours est préconisée.
- En cas de rechute ou lésions avancées, prescrire du fluconazole 50 à 100mg
par jour pendant 7 à 14 jours.
- En cas d’association de perlèche, faire une application locale d’antifongique
tel qu’amphotéricine B.
 Œsophagite candidosique : kétoconazole, itraconazole, fluconazole sont efficaces
à bonne dose (100 à 200mg/j pendant 15 jours).
Mycose gastrique : mycostatine (4 à 6 comprimés par jour en dehors des repas
pendant 7 à 10 jours) ou amphotéricine B (4 à 6 gélules par jour en dehors des
repas pendant 7 à 20 jours).

 Formes digestives basses : amphotéricine B sous forme gélule. Si candidose péri


anale, associer un antifongique local.

Candidose des muqueuses génitales


 Candidose vulvo vaginale aigue en dehors de la grossesse
- Le traitement est local avec Gyno Daktarin®LP à raison de 1 comprimé dans
le vagin le soir au coucher associé à une application locale vulvaire de
Daktarin® crème pendant 2 à 4 semaines, ou Gyno-Pevaryl® 150, un ovule/j
pendant 3 jours, ou Gyno-Pevaryl® LP (un ovule LP en dose unique le soir, ou
éventuellement répété le lendemain matin) associé à une application locale
de la crème pendant 4 semaines pour le traitement vulvaire. Bien que la
candidose vulvo vaginale ne soit pas une maladie sexuellement

45
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

transmissible, le traitement du partenaire est conseillé surtout s’il présente


des signes cliniques associés (balanite).
- On peut associer, en cas de candidoses génitales récidivantes ou chroniques
caractérisées par au moins 3 épisodes de candidose génitale identifiées
cliniquement et mycologiquement en l’espace de 12 mois, un traitement par
voie générale comme fluconazole 150mg en une prise ou 50mg /jour
pendant 3 jours.
 Candidose génitale au cours de la grossesse : Seules les formes locales non
absorbées sont autorisées. Le traitement doit éviter les traitements généraux.
 Balanite : un traitement local sous forme de crème est prescrit. Le traitement de
la partenaire s’impose aussi.
Dans tous les cas, pour le traitement du sujet contact les mêmes molécules sont
prescrites.

Candidoses des plis ou intertrigos candidosiques


Après toilette, le traitement consiste à appliquer sur les lésions cutanées, une crème,
lait ou lotion d’un antifongique (azolé, cyclopiroxolamine ou amphotéricine B en
solution). La durée du traitement sera d’environ 15 jours à 3 semaines. Il convient de
lutter contre les facteurs favorisants comme l’humidité et la macération.

Candidose unguéale ou onychomycose candidosique


- Lutter contre les facteurs locaux susceptibles d’entretenir les lésions
(macération): séchage des doigts.
- Lutter également contre la surinfection : application de solution
antiseptique comme la chlorhexidine.
- Après un bain antiseptique, les ongles des doigts atteints sont massés plusieurs
fois par jour par un topique antifongique local (gel, lotion), imidazolé ou
ciclopiroxolamine (Mycoster®). Sur le périonyxis, on peut utiliser de
l’amphotéricine B en lotion ou un imidazolé en crème avec une application par
jour, en alternance avec un antiseptique. En cas de sites multiples (plusieurs
ongles atteints simultanément), un traitement par voie générale peut être
entrepris. On utilisera le Nizoral® per os pendant 4 à 6 mois pour les ongles de la
main, 9 à 12 mois pour les ongles des pieds, ou le sporanox® à 200mg matin et
soir, une semaine par mois donc de manière séquentielle (pulsethérapie)
pendant 3 à 6 mois voire plus en fonction de l’évolution des lésions. Le
fluconazole (Triflucan®), excellent anti-candidosique, pourra être administré
pendant 6 mois à raison d’une prise hebdomadaire de 300 à 400mg, le même
jour de la semaine (pulsethérapie).

46
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

Candidose systémique
 Mesures générales
Le consensus actuel, devant la gravité des candidoses et le risque de dissémination
avec localisations secondaires, est de traiter préventivement et la stratégie est celle
retenue par la conférence de consensus de Paris en 2004 (Reignier et al. 2004). Le
choix du traitement dépend d’un certain nombre de facteurs liés au patient lui-même:
existence ou non d’une neutropénie, présence d’une voie veineuse centrale, état
stable ou non du sujet, espèce de Candida en cause et existence ou non d’une
prophylaxie anti-Candida antérieure. Avant de traiter, il faut s’assurer aussi qu’il s’agit
d’une véritable infection à Candida et non d’une colonisation. Mais devant la gravité
des infections systémiques à Candida dont la mortalité peut atteindre 60% des cas
dans certaines séries, la décision est de traiter précocement. Toute hémoculture
positive à Candida suffit à décider de la mise en route immédiate du traitement.

 Traitement des candidoses invasives chez le non neutropénique


L’amphotéricine B déxosycholate (0,1 à 1mg/kg en IV par jour) ou le fluconazole est le
traitement de choix en première intention et avant identification précise de l’espèce.
L’état de la fonction rénale, si elle est dégradée (créatinémie supérieure à 1,5 fois la
normale), fera préférer en première intention le fluconazole à l’amphotéricine B
conventionnelle. Le voriconazole (dose de charge 6mg/kg toutes les 12 heures pendant
les premières 24 heures puis 4mg/kg deux fois par jour) peut être également
utilisé. Lors de l’identification de l’espèce, le traitement sera ajusté selon la sensibilité
des levures aux antifongiques.

 Traitement des candidoses invasives chez le neutropénique


Avant l’identification de l’espèce, en première intention, un consensus international
préconise, en fonction de l’état de la fonction rénale, soit l’amphotéricine B
conventionnelle, soit la caspofungine ou encore l’amphotéricine liposomale.

Après l’identification de l’espèce, le choix sera fonction de la fonction rénale, en raison


des risques néphrotoxiques (toxicité moindre des formulations lipidiques de
l’amphotéricine B). La caspofungine est aussi efficace que l’amphotéricine B, mais
mieux tolérée. Le choix sera fonction de la souche et le fluconazole peut être indiqué
en cas d’isolement d’une souche sensible.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

V. Prévention

A. But : réduire la colonisation et empêcher l’infection

B. Les moyens
- Traitement antifongique
- Le traitement de certaines affections comme le diabète, le VIH
- La recherche et le traitement des facteurs de risque (foyer digestif par exemple)
- L’observance des mesures d’asepsie rigoureuse dans les centres hospitaliers (du
matériel de ponction veineuse, des sondes, des cathéters, des mains par le
lavage minutieux et le port de gants stériles)

C. Indications
Candidose systémique
D’une façon générale, Les mesures d’hygiène dans les services de réanimation (unités
de soins intensifs) doivent être rigoureuses. Le lavage des mains avant tout contact
avec un patient est à rappeler afin d’éviter les transmissions croisées à l’intérieur d’un
service. L’efficacité du lavage des mains à la chlorhexidine est démontrée. La pose et la
manipulation des cathéters doivent être très rigoureuses.

 Sujet neutropénique
- Parmi les antifongiques actifs et bien tolérés, le fluconazole est recommandé
par certaines équipes.
- Le posaconazole est également indiqué dans la des infections fongiques
invasives.
- Le traitement empirique à base d’amphotéricine B avec sa formulation
liposomale (compte tenu du risque aspergillaire) est habituellement utilisé
chez les patients neutropéniques en hématologie.
 Sujet non-neutropénique
Chez les sujets non-neutropéniques, en particulier en réanimation, aucune prophylaxie
systématique n’est recommandée.

Candidoses superficielles
- Chez les sujets infectés par le VIH, les candidoses digestives étant des maladies
opportunistes, surveiller le taux de CD4 et mettre en place un traitement

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

antirétroviral selon les recommandations de l’OMS concernant la prise en charge


des PVVIH.
- Chez le sujet diabétique, équilibrer le diabète et mettre en place un traitement
antidiabétique.
- Candidose vulvovaginale récidivante, rechercher et traiter un foyer digestif.

Conclusion
- Les candidoses sont des infections opportunistes dues à des champignons
levuriformes, du genre Candida dont l’espèce albicans est responsable de la
plupart des manifestations pathologiques chez l’Homme.
- Candida albicans existe à l’état commensal sur les muqueuses digestives et
génitales. Un certain nombre de conditions favorisent le passage de la levure du
stade commensal à un stade pathogène.
- Les infections candidosiques les plus fréquentes sont muqueuses, et
apparaissent le plus souvent sous l’effet de facteurs favorisants. Par ailleurs, C.
albicans est toujours pathogène lorsqu’il est isolé d’une lésion cutanée.
- Le diagnostic de candidose repose sur l’examen clinique avec confirmation par
l’examen mycologique.
- La prévention et le traitement des candidoses ne se réduisent pas à leur seul
traitement par voie locale ou générale mais doivent faire rechercher et traiter les
facteurs favorisants, particulièrement en cas de formes récidivantes.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Candidoses

Bibliographie
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D Chabase, Cl Guiguen, N. Contet- Audonneau : Mycologie Médicale : Edition Masson,
1ère édition, Paris 1999.
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50
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Cryptococcose

3 CRYPTOCOCCOSE
Rédigé par Pr Adoubryn Koffi Daho (Côte d’Ivoire), Relu par Pr Bamba Sanata (Burkina
Faso), Pr Diallo Mouctar (Mali), Pr Ndiaye Daouda (Sénégal) et Pr Kassi Fulgence (Côte
d’Ivoire)

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Cryptococcose

Introduction
Définition

La cryptococcose est une mycose cosmopolite, à évolution subaiguë ou chronique, due


à un champignon levuriforme encapsulé, Cryptococcus neoformans, au comportement
opportuniste très marqué. En effet, elle est favorisée par l’immunodépression à
médiation cellulaire consécutive à une infection par le Virus de l’Immunodéficience
Humaine (VIH), à un lymphome, à une maladie systémique, à une corticothérapie au
long cours ou à des thérapeutiques immunosuppressives, à la sarcoïdose, au diabète
insulinodépendant, à l’insuffisance rénale chronique, à la cirrhose hépatique, et à la
tuberculose. La manifestation la plus fréquente et la plus grave est l’atteinte du
système nerveux central réalisant une méningo-encéphalite.

La mise en évidence de la levure dans un prélèvement biologique implique la


recherche d’autres localisations et la mise en route rapide du traitement.

Intérêts

L’étude de la cryptococcose revêt un intérêt quadruple.

Au plan épidémiologique, on estime à 80%, la prévalence de l’exposition à C.


neoformans avec des sujets porteurs des anticorps anti-C. neoformans en l’absence de
cryptococcose. Cependant, la maladie est relativement rare et survient, le plus souvent
sur un terrain de déficit profond de l’immunité cellulaire.
Jusque dans les années 1980, l’incidence de la cryptococcose était faible dans les pays
développés (200 à 300 cas aux États-Unis et 25 cas par an en France), mais l’infection
par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) a totalement modifié l’épidémiologie
de cette infection, puisqu’elle est actuellement le principal facteur favorisant la
cryptococcose.
Jusqu’à l’arrivée des traitements antirétroviraux hautement actifs en 1996, la
cryptococcose survenait dans les pays industrialisés chez 1 à 10% des patients infectés
par le VIH.
Dans les pays en voie de développement, Kadjo et al enregistraient une prévalence
globale de la cryptococcose neuroméningée (CNM) à 0,6% en Côte d’Ivoire de 2006 à
2009 en milieu hospitalier.
Au CHU de Bobo-Dioulasso au Burkina Faso, Bamba et al. estimaient cette prévalence à
1,8% (61/5129) de 2002 à 2010.
Actuellement, l’avènement des antirétroviraux a contribué à la baisse de la prévalence
de la cryptococcose neuroméningée. Bamba et al. au CHU de Bobo-Dioulasso notaient

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Cryptococcose

une tendance à la baisse de cette prévalence de 3,1% en 2002 à 0,2% en 2010 corrélée
à l’augmentation du nombre de patients sous antirétroviraux.
Chez les patients non infectés par le VIH, le nombre de cas répertoriés reste stable au
cours du temps. L’incidence annuelle est estimée aux États-Unis à 0,8 cas pour 100
000, soit à un niveau comparable à celui de la méningite à méningocoques dans cette
population.
Au plan clinique, la cryptococcose est une affection cosmopolite qui connait une
recrudescence avec l’avènement du VIH-sida dont elle est une affection classant le
sida, amenant à rechercher une coïnfection par le VIH chez tout sujet atteint de
cryptococcose.
La cryptococcose se présente le plus souvent sous la forme d’une méningo encéphalite
disséminée dont la mortalité aiguë est de 100% en l’absence de prise en charge
thérapeutique adaptée, et de l’ordre de 20% malgré les traitements antifongiques, y
compris chez les patients sans facteur de risque sous-jacent.
La cryptococcose extrapulmonaire est une infection définissant le stade syndrome de
l’immunodéficience humaine (sida), souvent révélateur de l’infection par le VIH. Elle
survient à un stade avancé de l’immunodépression (médiane des lymphocytes
CD4+ < 50/mm3).
Par ailleurs, dans certains pays d’Afrique subsaharienne ou en Asie du Sud-Est, la
cryptococcose complique encore l’évolution de la maladie chez près d’un tiers des
patients infectés par le VIH. C’est actuellement la première cause de méningite aiguë
de l’adulte dans de nombreux pays africains. Cependant, les raisons de ces différences
d’incidence, indépendantes du traitement de l’infection par le VIH elle-même, ne sont
pas connues mais on peut évoquer par exemple des différences d’exposition ou une
susceptibilité génétique particulière.
En Thaïlande, la cryptococcose extrapulmonaire a été identifiée chez 36% des patients
séropositifs suivis dans un centre hospitalier près de Bangkok, avec, comme facteurs
de risque, le sexe masculin, un âge inférieur à 33 ans, la sévérité de
l’immunodépression et un sous-type particulier du VIH (forme CRF01-AE ou sous-type
E).
Le diagnostic du genre Cryptococcus est facile mais il faut différencier Cryptococcus
neoformans avec le sérotype A (génotype VNI et VNII), qui est l’espèce la plus
impliquée dans la maladie, des autres espèces de cryptocoques. La mise en évidence
de la levure dans un prélèvement biologique implique la recherche d’autres
localisations et la mise en route rapide du traitement.
Au plan thérapeutique, le traitement est une urgence, mais malgré les médicaments,
des difficultés thérapeutiques existent occasionnant une létalité de 20 à 30% dans les
pays développés et de l’ordre de 50 à 80% dans les pays sous-développés.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Cryptococcose

La prise en charge thérapeutique (choix des antifongiques, traitement de


l’hypertension intracrânienne, ou chirurgie éventuelles) dépend de la gravité des
localisations et du terrain sous-jacent.
Par ailleurs, la mise sous un traitement antirétroviral de toutes les personnes vivant
avec le VIH permettra la réduction de l’incidence de cette maladie.

Historique

En 1833, le genre Cryptococcus a été créé par Kützing avec Cryptococcus mollis une
espèce aujourd’hui rejetée du fait d’une description d’origine insuffisante.
Anciennement dénommée blastomycose européenne, torulose ou maladie de « Busse-
Bushke », la cryptococcose a été décrite pour la première fois en 1894. Otto Busse et
Abraham Buschke en effet, deux médecins allemands, isolent un microorganisme à
partir d’une lésion tibiale chez une jeune femme de 31 ans. La même année, en
Sardaigne, Franscesco Sanfelice isole la levure qu’il découvre capsulée dans une
culture de jus fermenté de pêche. Il nommera cette souche Saccharomyces
neoformans.
En 1895, il démontre sa pathogénicité en inoculant la souche à des animaux de
laboratoire.
En 1896, le français Ferdinand Curtis décrit un nouveau cas de cryptococcose. Il
renommera cette souche isolée d’une lésion de la hanche Saccharomyces
subcutaneous tumefaciens.
Après sa découverte, environ 50 synonymes ont été utilisés pour désigner le
champignon. Vuillemin en 1901 lui donne son nom définitif, Cryptococcus neoformans
sans donner une nouvelle description du genre.
En 1914, l’atteinte neuroméningée a été rapportée en 1914 par Verse.
En 1935, les variétés C. neoformans neoformans et C. neoformans gattii ont été
identifiées par Bernham.
Dans les années 1950, Neil et Evans prouvent que la capsule de C. neoformans est
sérologiquement réactive et décrivent 3 sérotypes (A, B et C).
En 1951, Emmons isole la levure du sol en Virginie.
En 1968, Wilson décrit le sérotype D.
En 1975, l’obtention de la forme sexuée (téléomorphe) par Kwong-Chung le fait
classer parmi les Basidiomycètes (la reproduction des spores se fait par
bourgeonnement externe), et il prend alors le nom de Filobasidiella neoformans. Mais
du fait de l’importance médicale et historique de Cryptococcus neoformans, le genre
est maintenu avec cette espèce comme néophyte.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Cryptococcose

I. Épidémiologie

A. Agent pathogène

1. Taxonomie
Le genre Cryptococcus, comme le genre Candida, est encore très hétérogène.
Cryptococcus neoformans appartient au règne des Fungi, au groupe des Eucaryotes,
au sous-groupe des Mycophytes, au phylum des Basidiomycota, au sous-phylum des
Agaricomycota, à la classe des Tremellomycètes, à l’ordre des Tremellales, à la famille
des Tremellaceae et au genre Filobasidiella/Cryptococcus.
Les travaux de phylogénie sur la base d’analyse de séquences des acides nucléiques
ont permis de retenir plus de 34 espèces de Cryptococcus puis plus de 80 espèces dont
la grande majorité n’est pas pathogène. Outre Cryptococcus neoformans qui est la
seule espèce pathogène, 4 autres espèces peuvent être isolées de prélèvements
d’origine humaine : Cryptococcus albidus, Cryptococcus laurentii, Cryptococcus terreus
et Cryptococcus uniguttulatus.
Au cours des deux dernières décennies, de nombreuses études phylogénétiques ont
rapporté des différences phénotypiques et génotypiques au niveau de Cryptococcus.
Les résultats de ces études remettent fortement en cause le concept de deux espèces
précédemment admis. Depuis 2015, deux complexes d’espèces sont admis : le
complexe d’espèces C. neoformans et le complexe d’espèces C. gattii comprenant 7
espèces et 13 génotypes. La relation entre espèces et génotypes est présentée dans le
tableau 3. I.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Cryptococcose

Tableau 3. 1 : Ancienne et nouvelle dénomination des espèces du complexe C. neoformans


/ C. gattii [Hagen et al., 2015]
Génotypes PCR- RFLP
Ancienne denomination Nouvelle dénomination
/ AFLP
VNI / AFLP1
C. neoformans var. grubii VNII / AFLP1A / VNB C. neoformans
VNII / AFLP1B
C. neoformans var. neoformans VNIV / AFLP2 C. deneoformans
Hybride inter variété de C. Hybride C. neoformans x C.
VNIII / AFLP3
neoformans deneoformans
VGI / AFLP4 C. gattii
VGIII / AFLP5 C. bacillisporus
C. gattii VGII / AFLP6 C. deuterogattii
VGIV / AFLP7 C. tetragattii
VGIV / VGIIIc, AFLP10 C. decagattii
Hybride C. neoformans var
Hybride C. deneoformans x
neoformans x C. gattii AFLP8
C.gattii
AFLP4/VGI
Hybride C. neoformans var grubii Hybride C. neoformans x
AFLP9
x C. gattii AFLP4/VGI C.gattii
Hybride C. neoformans var grubii Hybride C. neoformans x C.
AFLP11
x C. gattii AFLP6/VGII deuterogattii
AFLP : Amplification sélective de fragments de restriction génomique.
RFLP : Polymorphisme de longueur des fragments de restriction.

En plus des 7 espèces et de l’hybride AD (VNIII), trois hybrides interspécifiques ont été
décrits : C. neoformans var. neoformans x C. gattii (sérotype BD, génotype AFLP8, C.
neoformans var. grubii x C. gattii (sérotype AB, génotype AFLP9 ; et C. neoformans var.
grubii x C. gattii (sérotype AB, génotype AFLP11).

2. Morphologie
Les cryptocoques apparaissent comme des micro-organismes unicellulaires,
réfringents. Ce sont des levures rondes sphériques ou ovoïdes de 3 à 7µm de diamètre
en moyenne avec une paroi épaisse, mais qui peuvent atteindre 15 à 20 µm suivant les
milieux avec un cytoplasme granuleux et des vacuoles lipidiques. Elles sont entourées
d’une capsule mucilagineuse, caractéristique (Bourée et al., 1985). Cette capsule est
plus ou moins épaisse selon les souches, leur environnement in vivo, la nature du
milieu de culture. Dans les conditions habituelles, on n’observe ni mycélium, ni

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Cryptococcose

pseudomycélium. La levure se multiplie par bourgeonnement, généralement unique


mais parfois multipolaire. Les bourgeons sont reliés à la levure-mère par un col étroit
et peuvent former exceptionnellement des pseudofilaments.

Bourée et al., 1985


Figure 3. 1 : Cryptococcus neoformans (Présence d’un
bourgeon) : mise en évidence de la capsule par l’encre de
Chine. (x 1000). [Bourée et al., 1985]

La capsule mucilagineuse, de nature polyosidique, est constituée de deux


macromolécules : le galactoxylomannane (GalXM) qui représente environ 12% des
polyosides et le glucuroxylomannane (GXM) qui représente 88% du matériel osidique
total. Cette capsule polyosidique est un facteur de protection contre le milieu
environnant et la phagocytose et constitue surtout le facteur majeur de la virulence de
la levure. Le glucuroxylomannane détermine la spécificité antigénique déterminant 5
sérotypes.
Cryptococcus neoformans existe sous 3 formes :
- C. neoformans var. neoformans correspondant au sérotype D ;
- C. neoformans var. grubii correspondant au sérotype A ;
- Hybride des sérotypes A et D ;
- C. neoformans var gattii correspond aux sérotypes B et C.

3. Biologie
Cryptococcus neoformans a été considéré pendant longtemps comme exclusivement
exosaprophyte mais les études ont prouvé une existence endosaprophytique dans le
jabot du pigeon. Son développement s’arrête à + 39°C, et il ne peut pas se multiplier
dans le tractus du pigeon où la température se situe entre + 41°C et 43°C. Le pH du
jabot, entre 6,3 et 6,8, est un pH favorable à la levure. De plus, la température du jabot
est plus basse que la température corporelle. Ainsi, les jabots offrent des conditions

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Cryptococcose

plus favorables à la survie de Cryptococcus neoformans que le reste du tube digestif et


constitueraient le principal biotope du champignon dont la dissémination se ferait à
partir des fientes.
Sa température de développement est de 27°C à 37°C. Il peut résister dans le sable
pendant 16 mois et dans la terre humide et ombragée pendant 2 ans. Il peut survivre
pendant 10 ans dans des conditions favorables.
Du point de vue reproduction, la multiplication des cryptocoques se fait de façon
asexuée par bourgeonnement multilatérale. A partir d’une levure (cellule mère), il y a
bourgeonnement à l’un des pôles de la levure puis la levure va se scinder en deux et on
aura des cellules filles. On aura alors des nouvelles levures.
Les formes parfaites Filobasidiella neoformans (sérotypes A – D) et Filobasidiella
bacillispora (sérotypes B – C) résultent de la reproduction sexuée.
Caractères antigéniques

La capsule polysaccharidique, composée de glucuronoxylomannane, de


galactotomannane et de nannoprotéines, est le facteur majeur de virulence et permet
le diagnostic rapide à l’examen direct à l’encre de Chine. Elle présente également 11
facteurs antigéniques parmi lesquels 8 permettent la différentiation des sérotypes
[[Ikeda et al. 1982].

Le tableau 3. 2 ci-après présente les formules antigéniques des différents sérotypes.

Tableau 3. 2 : Formules antigéniques des sérotypes de Cryptocococcus neoformans


[Ikeda et al. 1982].
Sérotypes Facteurs antigéniques Variété
A 1,2,3,7 grubii
B 1,2,4,5 gattii
C 1,4,6 gattii
D 1,2,3,8 neoformans
A-D 1,2,3,7,8 hybride neoformans-grubii

Le kit “Crypto Check Iatron”, longtemps utilisé pour identifier les sérotypes des isolats
cliniques de C. neoformans et dont la production a été interrompue en 2004, ne
contenait que les facteurs sériques sélectionnés contre les 5 facteurs antigéniques
nécessaires au sérotypage. Les sérums contre les facteurs 2, 3 et 4 n’étant pas
indispensables à la détermination des sérotypes.

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Cryptococcose

4. Pathogénie
La pathogénicité de ce champignon repose sur plusieurs facteurs correspondant pour
les uns aux caractéristiques basiques nécessaires à la contamination de l’hôte, à la
survie et à la multiplication de la levure ; pour d’autres, à des facteurs de virulence
regroupant les différentes productions du cryptocoque. La capsule est la clé de la
pathogénicité à travers le glucuronoxylomannane qui possède des effets délétères sur
les mécanismes de défense de l’hôte. Les différents effets sont : l’invasion des tissus de
l’hôte, le tropisme du champignon pour le cerveau, sa protection de la destruction des
radicaux libres, l’induction d’un œdème cérébral et d’un granulome inflammatoire
fonction de l’état immunitaire du sujet.

B. Habitat
C. neoformans var. neoformans et C. neoformans var. grubii ont été retrouvés à l’état
libre dans la nature en saprophyte. Ils abondent dans le sol enrichi en matières
organiques, dans les fientes de pigeons, de moineaux, de canaris, de perroquets, de
perdrix, de poulets, les débris de bois (Eucalyptus) et dans la poussière domestique des
patients ayant une comorbidité cryptococcose-sida. La présence de la levure a été
également démontrée dans l’eau de boisson et l’air environnant des pigeons. Les fruits
(jus) et les produits laitiers peuvent aussi le véhiculer.
Cependant, C. laurentii, C. albidus et C. uniguttulatus sont des exosaprophytes dont on
ne connaît pas l’habitat de façon précise.
Autrefois, on retrouvait le complexe d’espèce C. gattii uniquement dans les creux
d’arbres d’Eucalyptus. Cependant, des auteurs de récentes études l’ont isolé à partir
d’une cinquantaine d’autres arbres et même à partir du sol et une variété d'animaux
comme les chats, les chiens et les chèvres dans des niches écologiques très diverses.

C. Mode de contamination
La porte d’entrée de Cryptococcus neoformans dans l’organisme est essentiellement
pulmonaire par inhalation de poussières infectieuses. Elle est inévitable mais la primo-
infection pulmonaire est le plus souvent asymptomatique et de découverte fortuite.
Elle peut ensuite être disséminée par la voie sanguine ou lymphatique et être
responsable d’une forme neuroméningée, et/ou septicémique.
La porte d’entrée cutanée par inoculation directe après un traumatisme cutané est
rare. Chez les sujets immunocompétents, les lésions sont circonscrites à la zone du
traumatisme. Chez l’immunodéprimé, l’atteinte cutanée survient dans 10% des cas et
témoigne de la dissémination de l’infection.

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Cryptococcose

Il existe une possibilité de contamination interhumaine d’homme à homme (en dehors


de greffons infectés) ou d’animal à animal.

D. Facteurs favorisants
Le cryptocoque étant ubiquitaire, l’inhalation du champignon est fréquente et
probablement inévitable. Il existe une résistance naturelle importante à cette infection
et la majorité des sujets fait une infection latente, comme en témoigne la présence
d’anticorps spécifiques chez 90% des sujets normaux.
La maladie se greffe sur des terrains préférentiels. Le principal facteur prédisposant est
le sida. La cryptococcose survient lorsque le taux de CD4 est inférieur à 150/mm 3 et
révèle l’infection pour près du tiers des patients, ce qui implique de rechercher
systématiquement une coïnfection par le VIH en cas de diagnostic de cryptococcose. La
cryptococcose atteint également les patients porteurs d’une lymphopénie CD4
idiopathique et ceux porteurs d’un déficit de l’immunité à médiation cellulaire.
En l’absence de sida, l’un des facteurs suivants est habituellement retrouvé : le
traitement immunosuppresseur, la corticothérapie au long cours, les hémopathies
lymphoïdes, la transplantation d’organes et plus rarement, le diabète
insulinodépendant, l’insuffisance rénale chronique, la cirrhose et la tuberculose. Mais
pour un quart des patients atteints de cryptococcose sans infection par le VIH associée,
aucun facteur de risque n’est retrouvé.

E. Répartition géographique
La présence de Cryptococcus neoformans dans le sol est ubiquitaire mais la distribution
n’est pas uniforme, correspondant à de petits foyers en particulier dans l’entourage de
cas cliniques. Le sérotypage des souches a permis de constater qu’il y a une
distribution géographique et humaine des différents sérotypes. Le sérotypage
représente un marqueur épidémiologique pour la distribution géographique :

- Les sérotypes A et D sont prévalents et sont isolés des cas humains, du sol, des
fientes d’oiseaux, aux Etats-Unis d’Amérique, au Canada, en Amérique du Sud,
en Australie, en Nouvelle-Zélande, au Japon, en Asie du Sud Est, en Afrique et en
Europe. Le sérotype A est le plus commun.
- C. neoformans var. neoformans a été isolé de cavités d’arbres en décomposition.
Cette variété n’apparaît pas associée à un arbre particulier mais plutôt à une
niche spécialisée résultant de la biodégradation naturelle du bois qui fournit un
substrat favorable à sa croissance.
- Les sérotypes B et C ne sont isolés qu’à partir de cas humains, essentiellement
en zones tropicale et subtropicale d’Afrique, d’Asie du Sud-Est (sérotype B) mais
aussi en Californie du Sud (sérotype C). En revanche, ils ne sont jamais isolés à

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Cryptococcose

partir du sol ou de pigeons. Leur niche écologique est constituée par les forêts
d’Eucalyptus camaldulensis et d’Eucalyptus tereticornis. L’isolement de la variété
gattii à partir de ces arbres a été réalisé en Australie. Les études conduites en
Afrique sur ces mêmes arbres importés d’Australie depuis le 19 ème siècle n’ont
pas permis d’isoler cette variété. Ce résultat fait supposer que les nouvelles
conditions écologiques s’exerçant sur les arbres importés se soient révélées
défavorables à l’association avec les levures. L’on remarque néanmoins que la
distribution globale des deux espèces d’arbres correspond à la distribution
épidémiologique des cas de cryptococcose dus à la variété C. gattii : Hawaï,
Californie, Mexique, Brésil, Afrique centrale, Afrique du Sud, Sud-Est Asiatique où
ces Eucalyptus ont été exportés. L’une des hypothèses est que les agents
auraient évolué pour occuper d’autres niches écologiques non encore
découvertes qui serviraient de réservoirs naturels du pathogène. La composition
du bois d’Eucalyptus camaldulensis présente une concentration au moins dix fois
supérieure à celle des autres eucalyptus en lignine et polyphénols, produits dont
la dégradation exige l’activité de phénoloxydase. Ainsi C. neoformans pourrait
constituer un agent important de dégradation des substances ligneuses.
- Le sérotype D infecte plus volontiers les sujets caucasiens que les sujets
originaires d’Afrique (5%) ou des Antilles.
- Le sérotype D est prévalent dans les cryptococcoses cutanées primitives.

Depuis son apparition, on a remarqué que la grande majorité des patients, atteints de
SIDA et infectés par le cryptocoque, le sont par la variété C. grubii. Cette observation
est valable dans les régions où la fréquence des infections dues aux sérotypes B et C
reste identique chez les patients non séropositifs pour le VIH.

Le tableau suivant résume les principales différences entre les 3 variétés de


Cryptococcus neoformans.

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Cryptococcose

Tableau 3. 3 : Variétés de Cryptococcus neoformans


Ecology
Environme ntal Soil contaminated Eucalyptus tree and NA
source with pigeon decaying wood
droppings forming hollows in
living trees
Geographical Worldwide Tropical and Worldwide
distribution (predominant in subtropical areas
Northern Europe) (Southern
California, Africa,
Australia and
Southeast Asia)
Sexual state Filobasidiella Filobasidiella Filobasidiella
neoformans var. neoformans var. neoformans var.
neoformans bacillispora neoformans
Biochemical
properties
Canavanine Yes No Yes
susceptibility
Glycine No Yes No
assimilation
Thymine Yes (orange color Yes (blue-green No (no color change)
assimilation change) color change)
Serotypes D B and C A
(rabbit polyclonal
antisera)1
Immunoflourescence Punctate NA Annular
binding pattern to
the IgM monoclonal
antibody 13F1 (Mab
13F1)
Usual immune status Immunocompromised Immunocompetent Immunocompromised
of the infected host

Le sérotype “AD” qui est un hybride est également retrouvé dans les mêmes régions que les
séroypes A et D.

NA: not available (Non disponible).

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Cryptococcose

II. Diagnostic biologique

A. Circonstances du diagnostic biologique/éléments


d’orientation
Les manifestations de la cryptococcose sont multiples et fonction de l’organe atteint
mais dominées par les signes neurologiques. La primo-infection pulmonaire est
souvent asymptomatique et de découverte fortuite. Le diagnostic biologique peut être
réalisé, chez le sujet vivant avec le VIH, devant :
- une symptomatologie pulmonaire fait de : dyspnée, toux avec expectoration
minime, parfois hémoptoïque, douleurs thoraciques et fièvre ;
- devant un syndrome de détresse respiratoire ;
- des signes d’irritation méningée avec des céphalées frontales, temporales ou
rétro-orbitaires, résistantes aux antalgiques, des nausées, une irritabilité, des
vertiges, une obnubilation voire un coma, des troubles du comportement et du
caractère sont également fréquents et une fièvre souvent présente mais
rarement supérieure à 39°C ;
- un syndrome méningé franc avec raideur de la nuque,
- des troubles visuels ;
- des lésions cutanées sous forme de papules, de pustules ombiliquées, de masses
sous-cutanées ou d’ulcérations à bords irréguliers prédominant à la face et au
cuir chevelu ou disséminées sur tout le corps et qui peuvent ressembler à des
lésions de Molluscum contagiosum.

Les manifestations cliniques étant non spécifiques et parfois minimes ou


intermittentes, il faut donc savoir évoquer le diagnostic qui sera très facilement
confirmé par les examens biologiques.

B. Modifications biologiques non spécifiques


Au niveau biochimique, l’hyperprotéinorachie (Valeur normale: 0,2-0,4g/l) est liée à la
rupture de la barrière hémato-méningée qui est présente lors de tout processus
inflammatoire méningé. L’hypoglycorachie est liée soit à une consommation de
glucose par les cellules inflammatoires et la levure, soit à une altération des systèmes
de transport au travers de la barrière hémato méningée. La biochimie du LCR traduit le
fait que la CNM fait partie intégrante des méningites lymphocytaires à liquide clair.

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Cryptococcose

C. Diagnostic mycologique
Prélèvements

Les cryptocoques sont recherchés dans divers prélèvements pulmonaires (lavage


broncho-alvéolaire, expectorations, ponctions pleurales, biopsies), les lésions cutanées
(pus d’abcès ou de drainage, biopsies), ganglionnaires, médullaires, osseuses et
principalement dans le liquide de ponction lombaire (liquide céphalorachidien) dans le
sang total ou sérum et les biopsies d’organes.
Le diagnostic mycologique comporte plusieurs étapes.
Examen direct
L’examen est réalisé sur différents produits biologiques :
- le culot de centrifugation (liquide céphalo-rachidien, liquide de lavage broncho-
alvéolaire, urines) ;
- l’écouvillonnage de pus d’une lésion cutanée ou osseuse ;
- les biopsies d’organes…
On utilise l’encre de Chine diluée au 1/3è ou au 1/5è pour mettre en évidence la
capsule polysaccharidique. L’encre de Chine colore le fond de la préparation en noir ;
la capsule apparaît alors comme une auréole blanche, très nette, régulière, de taille
variable autour de la levure.

Figure 3. 2 : Cryptococcus neoformans (sans bougeons) :


mise en évidence de la capsule par l’encre de Chine. (Photo
CD-Rom ANOFEL2, Banque d’images numériques)

Cultures

La mise en culture des échantillons est indispensable pour permettre l’identification de


l’espèce. Elle consiste à faire un ensemencement sur milieu Sabouraud
chloramphenicol (SC) à partir du culot de centrifugation, et la culture est incubée à
30°C et à 37°C. La pousse est obtenue en 3 à 5 jours avec des colonies blanches
crèmeuses, muqueuses, prenant très rapidement un aspect brillant, coulant et se
colorant en ocre plus ou moins foncé avec le temps.

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Cryptococcose

Figure 3. 3 : Cultures de Cryptococcus neoformans âgée de 48


heures sur milieu de Sabouraud en tube à 27°C [Photo Pr. KD.
Adoubryn]

Le relief est plan et la surface crémeuse ou muqueuse et brillante. La surface devenait


ocre et coulante avec le temps (Figure 3. 4).

Figure 3. 4 : Cultures de Cryptococcus neoformans


âgée de 5 semaines sur milieu de Sabouraud en
tube à 27°C [Photo Pr. KD. Adoubryn]

La couleur des colonies est brune à marron sur le milieu de Pal modifié (Figure 3. 5).

Figure 3. 5 : Cultures de Cryptococcus


neoformans âgée de 72 heures sur milieu de Pal
modifié en boîte de Pétri à 27°C [Photo Pr. KD.
Adoubryn]

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Cryptococcose

A l’examen microscopique, on observe des levures globuleuses, de taille très variable


mesurant de 2 à 12µm de diamètre avec la présence de rares bourgeons,
multilatéraux.

Pour Cryptococcus gattii, les levures sont plus ovoïdes et souvent plus petites.

Figure 3. 6 : Cryptococcus neoformans using a light India ink staining


preparation PHIL 3771 lores

La capsule était très petite et difficile à mettre en évidence. Il n’y avait ni mycélium, ni
pseudomycélium (Figure 3. 7).

Figure 3. 7 : Aspect des levures de Cryptococcus neoformans


au microscope optique après 72 heures d’incubation sur
milieu de Sabouraud à 27°C [Photo Pr. KD. Adoubryn]

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Cryptococcose

Le diagnostic de genre repose sur la non fermentation des sucres et sur la recherche
de l’uréase. Pour ce dernier caractère, on utilise un milieu liquide tamponné contenant
de l’urée et du rouge phénol (milieu urée-indol). Après une incubation pendant 3
heures à 37°C, le milieu vire au rose, témoin de la production d’une uréase par la
levure. Cependant, toutes les souches ne produisent pas cette enzyme.

Le diagnostic d’espèce est basé sur l’assimilation des sucres, l’absence de réduction
des nitrites, la réduction du tétrazolium, la sensibilité à l’actidione et la production de
phénoloxydase.

La recherche de phénoloxydase se fait sur le milieu de Staib ou sur le milieu de Pal.


Sur ces milieux, en 2 à 3 jours entre 27°C et 37°C, la levure se colore en brun foncé à
noir. Mais, il existe des souches non productrices de phénoloxydase.

D. Diagnostic immunologique spécifique


Détection de l’antigène capsulaire

En général, la détection de l’antigène cryptococcique se fait par agglutination de


particules de latex sensibilisées avec des anticorps spécifiques. La recherche peut être
faite dans le sérum, le liquide céphalo-rachidien (LCR), le liquide de lavage broncho-
alvéolaire (LBA), les urines à l’aide de diverses trousses dont certaines détectent des
anticorps monoclonaux, polyclonaux ou combinés. Une technique ELISA (PREMIER,
Meridian) est également utilisée. Elle est plus sensible que l’examen direct. Ces
méthodes ont, en général, d’excellentes spécificité et sensibilité. Il faut cependant
savoir que certains tests ne permettent pas tous les contrôles et que certains
n’utilisent pas d’enzyme protéolytique (pronase) qui pourtant améliore la spécificité et
la sensibilité à près de 95%. L’ELISA a l’avantage de permettre le criblage d’un grand
nombre d’échantillons, mais perd sa valeur dans la détermination des titres
antigéniques élevés. Enfin, il faut suivre scrupuleusement les recommandations du
fabricant et ne pas modifier les volumes, les températures et les temps d’incubation au
risque d’altérer les qualités du test.

Il existe des causes connues de faux positifs. Certaines sont sans rapport avec une
infection fongique : le facteur rhumatoïde, la contamination de la pipette avec l’eau
de condensation de l’agar, une perfusion de macromolécules de type hydroxyéthyl
amidon. D’autres sont dues à des infections par des champignons ayant des
antigènes de réactivité croisée : Trichosporon et potentiellement d’autres espèces de
Cryptococcus.

Les faux négatifs sont liés à l’absence d’utilisation du pronase ou aux rares
phénomènes de prozone qui nécessitent une dilution de l’échantillon pour objectiver
une positivité (le pronase est inefficace).

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Cryptococcose

Ces dernières années, des tests immunochromatographiques ont été développés pour
la détection de l'antigène cryptococcique dans le sérum, le plasma ou le LCR. C’est le
cas de la technique LFA ou Lateral Flow Assay (Figure 3. 8).

Figure 3. 8 : Mode opératoire du test Crypto Ag Lateral Flow Assay


(Lindsley et al., 2011)

Détection des anticorps spécifiques

La recherche d’anticorps anti-cryptococciques ne fait pas partie du diagnostic de la


cryptococcose. Les anticorps sont présents à des taux très faibles, indécelables par les
techniques classiques d’immunofluorescence ou d’immunoélectrophorèse. Leur
présence serait de bon pronostic. Certaines réactions immuno-enzymatiques
paraissent plus sensibles. Elles sont réservées à des laboratoires spécialisés.

Détermination du sérotype

Le sérotypage des souches est réalisé dans un but épidémiologique.

La détermination du sérotype peut être effectuée par des techniques biochimiques,


une technique d’immunofluorescence directe ou par des techniques d’agglutination.
Le kit commercial Crypto Check (Iatron Laboratories ®, Tokyo, Japon) utilisé dans le
sérotypage des souches n’est plus disponible avec l’avènement de la PCR.

Actuellement, la PCR multiplex basée sur l’amplification des gènes CAP64 et LAC1 qui
codent respectivement pour la protéine de la capsule et la mélanine permettent de
différencier 5 sérotypes (A, B, C, D et AD). En Côte d’Ivoire, les travaux de Kassi et coll.
en 2016 ont révélé que les isolats cliniques sont majoritairement de sérotype A (88%),
suivis de 11% de sérotype AD et 1% de sérotype B. Plusieurs rapports de la littérature
au niveau africain confirment la prédominance du sérotype A décrit comme le plus
prévalent (Wyk et coll. en 2014).

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Cryptococcose

E. Diagnostic anatomopathologique
Les colorants histologiques habituels ne colorent pas la capsule qui se présente alors
comme un halo clair autour de la levure.

Le cryptocoque est colorable par l’hématéine éosine (HE) en rose pâle, et la capsule
apparaît comme un halo légèrement réfringent.

La méthode de Gomori Grocott (imprégnation argentique) colore les levures en noir,


mais ne permet pas de visualiser la capsule.

La capsule peut être colorée de façon spécifique soit par le bleu alcian (elle apparaît en
bleu), soit par le mucicarmin (elle apparaît en rouge). C. neoformans est la seule levure
mucicarmin positive et bleu alcian positive. La capsule est colorée également en rouge
par le P.A.S.

Figure 3. 9 : Cryptocoques après coloration au mucicarmin (Photo


CD-Rom ANOFEL2, Banque d’images numériques)

F. Diagnostic moléculaire
Le diagnostic moléculaire a un intérêt taxonomique car il permet la différenciation des
sérotypes. Il fait appel à des laboratoires spécialisés.

Les techniques moléculaires d’identification sont basées sur l’utilisation de sondes


d’hybridation spécifiques, l’amplification génique (PCR) ou des techniques dérivées
de la PCR.

Les amorces utilisées sont des séquences répétitives ou hypervariables d’acides


aminés (minisatellite ou microsatellite) de l’ADN du champignon. Ces séquences sont
amplifiées et permettent d’obtenir des profils variables et distincts pour différentes
souches de Cryptococcus neoformans. Des sondes ADN spécifiques et des amorces
avec des séquences ITS ribosomales et des séquences 18S sont utilisées dans la plupart

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Cryptococcose

des études. Une PCR multiplex utilisant 6 amorces est également utilisable. Avec ces
techniques moléculaires, les 2 variétés de C. neoformans apparaissent identiques.

Le génotypage par PCR RFLP du gène URA5 permet de préciser le génotype tandis que
la Multilocus sequence typing (MLST), du fait du séquençage d’ADN, précise les
sous-types moléculaires.

III. Principes thérapeutiques

A. But
Les objectifs du traitement sont de stériliser le foyer infectieux, de guérir le malade et
de prévenir les rechutes.

B. Moyens
Il s’agit essentiellement de moyens médicaux.

L’amphotéricine B désoxycholate (Fungisone®), la 5-fluorocytosine (Ancotil®), le


fluconazole (Triflucan®), l’itraconazole (Sporanox®), le kétoconazole (Nizoral®) sont les
antifongiques habituellement utilisés. Leurs modalités d’emploi dépendent
essentiellement du terrain et de la localisation de l’infection.
Présentations
L’Amphotéricine B : (Poudre pour perf. IV à 50mg). Antifongique fongicide de la famille
des polyènes.

Les triazolés: Fluconazole (gél 50, 100, 150 et 200mg) ; (Poudre pour susp buv.
50mg/ml) ; (Susp pour perf. IV à 2mg/ml), Itraconazole (gél 100mg) ; (Sol buv.
10mg/ml) ; (Sol pour perf. IV à 10mg/ml).

La 5-fluorocytosine : (cp 500 mg) ; (Sol pour perf. IV à 2,5 g). Elle possède un spectre
d’activité limité à cause d’une forte résistance innée. Cependant, son association à
l’Amphotéricine B est synergique, justifiant les stratégies thérapeutiques combinant
leur usage simultané pour le traitement de la CNM.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Cryptococcose

C. Indications/posologies
Traitement des cryptococcoses méningées
Les résultats de l’essai ACTA (Advancing Cryptococcal Meningitis Treatment for Africa),
ont conduit l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à modifier son protocole
thérapeutique publié en 2010 pour la CNM.
Le protocole thérapeutique consiste (OMS, 2018) en un traitement initial d’induction
(2 semaines), suivi d’un traitement de consolidation (8 semaines), puis de maintien.

Phase d’induction (2 semaines)

AMB déoxycholate (1mg/kg/jour) et 5FC (100mg/kg/jour) répartis en 4 prises


quotidiennes), pendant une semaine, suivie de FCZ (Ad : 1200mg/jour et 12mg/kg/j
chez l’enfant jusqu'à un maximum de 800mg par jour) pendant 1 semaine.
En fonction de la disponibilité des médicaments, des schémas alternatifs sont
recommandés :
 Deux semaines de FCZ (1200mg/j pour les adultes, 12mg / kg / jour pour les
enfants et adolescents) + flucytosine (100mg / kg / jour, répartis en quatre prises
quotidienne) ou ;
 Deux semaines d’AMB (1mg / kg / jour) + FCZ (1200mg/j pour les adultes, 12mg /
kg / jour pour les enfants et les adolescents jusqu'à un maximum de 800mg par
jour) ;
 Deux semaines de FCZ (1200mg/j pour les adultes, 12mg / kg / jour pour les
enfants et adolescents)

Phase de Consolidation (8 semaines)


FCZ (800mg/j pour les adultes, 6-12mg/kg/j pour les enfants et les adolescents,
maximum de 800mg par jour)
Phase de Maintenance (ou prophylaxie secondaire)
 FCZ : 200mg/J pour les adultes, 6mg/kg /j pour les adolescents et les enfants). Ce
traitement d’entretien est conseillé après la négativation de la culture du LCR et
maintenu jusqu’à l’obtention d’une restauration immunitaire stable sur plusieurs
mois (taux de CD4≥ 200 cell/mm3 à deux contrôles séparés de 6 mois chez un
patient sous traitement ARV depuis au moins un an).

Traitement des cryptococcoses extra-méningées


Chez le sujet immunodéprimé ou en cas de cryptococcose grave et/ou évolutive le
traitement sera celui d’une localisation méningée.
Chez le sujet non immunodéprimé par le VIH (patient sous immunosuppresseurs, ou
des cancéreux), la prudence impose un traitement. Devant une forme
asymptomatique, un traitement par un dérivé azolé par voie orale devra être instauré
(fluconazole ou itraconazole : 200-400mg/j pendant 3 à 6 mois). Lorsqu’il s’agit d’une

71
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Cryptococcose

forme symptomatique peu grave, le traitement sera fait par les mêmes azolés et aux
mêmes posologies pendant 6 à 12 mois.
Dans la cryptococcose cutanée primitive consécutive à un traumatisme local, le
pronostic est favorable sous traitement antifongique associé ou non à un traitement
chirurgical.
NB: L'initiation immédiate du traitement antirétroviral n'est pas recommandée chez les
adultes, les adolescents et les enfants vivant avec le VIH et présentant une méningite à
cryptocoque en raison du risque de mortalité accrue. Elle devrait être différée de 4 à 6
semaines après le début du traitement antifongique. Les ponctions lombaires
déplétives sont très contributives pour la survie du patient.
Evolution
Au cours du traitement, l’amélioration clinique est en général lente en une à deux
semaines. La guérison n’est obtenue qu’après au moins 6 semaines de traitement et
seulement dans 50 à 70% des cas selon le déficit immunitaire sous-jacent et le
traitement. L’efficacité du traitement est variable en fonction de la gravité des
symptômes et du déficit immunitaire sous-jacent.
La mortalité est encore élevée, malgré le traitement, de l’ordre de 50% avec des
extrêmes de 25 à 100% en fonction du terrain et des affections associées. La mort
survient par dissémination poly-viscérale ou par hypertension intracrânienne ; elle-
même d’origine infectieuse ou mécanique, par trouble de circulation du LCR.

E. Suivi biologique/ post-thérapeutique


La culture du LCR se négative en 15 jours à 2 mois. Il est donc inutile de multiplier les
ponctions lombaires en début de traitement car elles risquent d’être refusées
ultérieurement, à un moment où il sera capital d’évaluer l’efficacité du traitement.
Cependant, le contrôle à 15 jours est important car le risque d’échec à la fin du
traitement serait plus grand pour les sujets dont le LCR serait négatif à 2 semaines. La
présence de levures encapsulées à l’examen direct peut persister plusieurs mois, alors
même que les cultures sont négatives. Il s’agit vraisemblablement de « cadavres » de
cryptocoques. Un examen direct positif ne doit donc pas faire modifier le traitement.

IV. Prévention/prophylaxie

A. But/objectifs
La cryptococcose est une maladie presque obligatoire qui se manifeste sur les sujets
immunodéprimés. Il faut donc éviter, d’une part, la contamination de ces sujets et,
d’autre part, les éventuelles rechutes.
72
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Cryptococcose

B. Moyens/stratégies
La prévention primaire concerne les personnes vivant avec le VIH avec un taux de
lymphocytes CD4 inférieur à 200 cellules/µl chez lesquelles un traitement antirétroviral
devrait être institué systématiquement.
La prévention secondaire est le traitement prophylactique des rechutes. Il s’agit d’un
traitement systématique chez le sidéen (Fluconazole : 200-400mg/j) et chez
l’immunodéprimé jusqu’à la restauration durable de l’immunité.

Conclusion
La cryptococcose est une maladie opportuniste grave et fréquente au cours de
l’infection à VIH/sida. Son incidence a diminué avec l’instauration du traitement
antirétroviral dans les pays développés et commence à l’être en Afrique. Le diagnostic
est facile mais le traitement est difficile avec un pronostic fonction du terrain.

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76
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

4 DERMATOPHYTOSES
Rédigé par Pr Thera Mahamadou Ali (Mali), Relu par Pr Hounto-Ogouyemi Aurore (Bénin),
Pr Ndiaye Daouda (Sénégal), Pr Yavo William (Côte d’Ivoire) et Pr Sissinto Savi de Tové Yolande
(Bénin)

77
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

I. Généralités

A. Définition
Les dermatophytoses sont des affections dues à des champignons microscopiques
filamenteux ayant une affinité pour la kératine et appartenant à trois principaux
genres : Trichophyton, Microsporum et Epidermophyton. Ils sont caractérisés par la
production de spores diverses : microconidies, macroconidies, arthrospores et
chlamydospores.
Ce sont des affections dues à la colonisation des tissus contenant de la kératine
(couche cornée peau, ongles et cheveux) par ces micromycètes filamenteux. Le
parasitisme du revêtement cutané provoque les dermatophytoses cutanées (DC),
l’atteinte des ongles détermine l’onyxis dermatophytique et le parasitisme pilaire
provoque les teignes du cuir chevelu (TCC) caractérisées par une perte des cheveux
ainsi que le sycosis qui est une atteinte de la barbe.

B. Intérêt
L’étude des dermatophytoses revêt un double intérêt épidémiologique et médical.
Sur le plan épidémiologique : leur fréquence est élevée en consultation
dermatologique ; certaines formes entrainent un préjudice esthétique important. Ce
sont des affections cosmopolites, dont les agents pathogènes ont une distribution
géographique préférentielle.
Dans le cas des DC, on rencontre plus fréquemment Trichophyton soudanense en
Afrique. Toutefois, selon les études, d’autres espèces prédominent : c’est le cas au
Gabon avec T. rubrum dans 43,4% des cas, T. interdigitale dans 28,7% des cas et T.
soudanense dans seulement 14,5% des cas (Nzenze-Afène et al., 2013). En Europe, les
DC des plis sont causées par 3 dermatophytes à transmission interhumaine ;
Trichophyton rubrum qui est impliqué dans 70-80% des cas, Trichophyton interdigitale
dans 15-20% des cas et Epidermophyton floccosum dans 5% des cas. Au niveau de la
peau glabre et des pieds, on rencontre des dermatophytes anthropophiles mais aussi,
des dermatophytes zoophiles tel Microsporum canis.
Les TCC constitue l’affection fongique du cuir chevelu la plus répandue au monde. Plus
fréquentes chez l’enfant, mais rapportées aussi chez l’adulte (Nzenze-Afène et al.,
2001, Auchus et al., 2016), elles sont observées le plus souvent en zone intertropicale.
En Afrique, les fréquences rapportées par différentes études chez les enfants d’âge
scolaire varient de 17,0% en zone sahélienne du Mali à 59,5% en zone soudanienne du
Mali (Coulibaly et al., 2016), en passant au Gabon dans des régions différentes par
15,3% (Nzenze-Afène et al., 2009) et 23,1% (Hogewoning AA et al., 2011). L’atteinte
unguéale a été observée dans 22,3% au Sénégal (Seck MC et al. 2014). Au Gabon,

78
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

parmi les micromycètes responsables d’onychomycoses l’étiologie dermatophytique a


été estimé à 12,5% aux doigts et 20,8% aux orteils (Nzenze-Afène et al., 2011).
Globalement, M. canis, T. tonsurans et T. violaceum sont les espèces les plus
fréquemment en cause dans les TCC (Zhan et al., 2017). En Afrique, en fonction des
aires géographiques, on retrouve T. soudanense, M. audouinii, T. mentagrophytes et
M. langeronii (Nzenze-Afène et al., 2013, Coulibaly et al., 2016). La contagiosité des
TCC est forte, réalisant des épidémies au sein de collectivités telles les écoles ou en
milieu familial. L’impact esthétique est lié à la perte des cheveux.
Sur le plan médical, le diagnostic est facile, et les médicaments disponibles sont
efficaces. Le diagnostic différentiel avec les atteintes dues aux levures du genre
Malassezia est en général aisé, car ces dernières déterminent des états pelliculaires du
cuir chevelu sans atteinte parasitaire du cheveu. Cependant, le diagnostic clinique peut
être plus difficile dans les formes atypiques de teigne simulant un état pelliculaire du
cuir chevelu avec plus ou moins de chute des cheveux. Les DC peuvent servir de porte
pour les infections bactériennes avec risque de complications.

II. Épidémiologie

A. Agents pathogènes
Les agents pathogènes sont des dermatophytes, champignons microscopiques,
filamenteux qui ont une affinité pour la kératine de la couche cornée de la peau, et des
cheveux ; ils sont kératinophiles et kératinolytiques. Les dermatophytes sont toujours
pathogènes et respectent toujours les muqueuses.
Les dermatophytes appartiennent au règne des Fungi, à la division des Ascomycotina,
à la classe des Ascomycètes, à l’ordre des Onygénales, à la famille des
Arthrodermataceae et à trois genres : Epidermophyton, Microsporum et Trichophyton.
Microsporum et Trichophyton représentent la forme asexuée pour laquelle une forme
sexuée dite Arthroderma a été décrite.
Les espèces sont classées en dermatophytes anthropophiles, zoophiles et telluriques.
Les espèces anthropophiles sont adaptées à l’homme et sont transmises par
contamination interhumaine. On cite les espèces suivantes dans le genre
Epidermophyton, une seule espèce, E. floccosum ; dans le genre Microsporum : M.
audouinii, M. ferrugineum, M. langeronii qui est la variété africaine de M. audouinii ; et
dans le genre Trichophyton : T. rubrum, T. soudanense, T. tonsurans, T. violaceum, T.
concentricum, T. mentagrophytes var. interdigitale, T. schoenleinii.
Les espèces zoophiles sont adaptées à différents animaux et sont transmises à
l’homme par le contact avec un animal contaminé. Ici on cite, Microsporum canis
(chats, chiens, etc.), Microsporum equinum (chevaux), Microsporum nanum (porc),
Microsporum persicolor (rongeurs), Trichophyton equinum (chevaux), Trichophyton

79
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

mentagrophytes var. granulosum (rongeurs, lagomorphes, hérissons, etc.),


Trichophyton simii (singes), Trichophyton verrucosum (bétail).
Les espèces telluriques sont adaptées au sol et sont transmises à l’homme par un
contact avec le sol. On cite M. gypseum, T. ajelloi, T. terrestre.
Les trois genres de dermatophytes sont définis d’après les caractères morphologiques
des éléments de reproduction asexués rencontrés en culture.
• Genre Epidermophyton:
- caractérisé par des macroconidies en massue à parois et cloisons minces et
par l’absence de microconidies ;
- Epidermophyton floccosum est la seule espèce du genre.
• Genre Microsporum:
- macroconidies en fuseau, de grande taille, avec des parois épaisses à surface
échinulée ;
- microconidies sont piriformes.
• Genre Trichophyton:
- macroconidies fusiformes, à parois toujours minces ;
- ces macroconidies peuvent, en fonction des souches, être rares, voire
absentes sur les milieux de culture usuels. Les microconidies sont rondes ou
piriformes.
Au niveau du parasitisme pilaire, il existe une atteinte endo-ectothrix et endothrix du
cheveu. Dans le parasitisme de type endothrix, les filaments mycéliens et les spores se
retrouvent à l’intérieur du cheveu. Dans le type de parasitisme pilaire endo-ectothrix,
les filaments mycéliens sont à l’intérieur du cheveu et les spores sont à l’extérieur.
Selon la taille et la disposition des spores, on distingue un parasitisme microsporique,
caractérisé par des petites spores de 2-4µm de diamètre serrées les unes contre les
autres et disposées en palissade (ex : M. canis) ; un parasitisme microïde caractérisé
par des petites spores de 2-3µm de diamètre, disposées en chainettes (arthroconidies)
(ex : T. mentagrophytes) ; et le parasitisme mégasporé, caractérisé par des
arthroconidies volumineuses de 4-12µm de diamètre (ex : T. verrucosum).

80
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

a b

c d e

a. type endothrix pur (filaments et spores à l’intérieur du cheveu)


b. type favique (filaments à l’intérieur du cheveu)
c. type microsporique
d. type micoide
e. type megaspore
Source : MC. Seck, Laboratoire Parasitologie-Mycologie, FMPO – Université CAD - Dakar

Figure 4. 1: Schéma des différents types de parasitisme pilaire

B. Réservoir de micromycètes parasites


Dans le cas des espèces anthropophiles, l’homme est le réservoir exclusif de parasite.
Pour les espèces zoophiles, les animaux constituent le réservoir, en particulier les
mammifères, les animaux domestiques (chien, chat) pour M. canis par exemple. Les
espèces telluriques ont pour réservoir de micromycètes parasites le sol où les spores
peuvent persister pendant très longtemps.

C. Mode de contamination
Elle se fait par contact avec des poils ou des squames contaminés, suivi d’une
adhérence des éléments fongiques à la couche cornée. L’origine peut être
interhumaine pour les espèces anthropophiles (Trichophyton rubrum, T. interdigitale,
etc.), avec une prédominance de la contamination en milieu sportif (salle de
gymnastique), sur le sol humide des piscines, dans les douches collectives, les

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

vestiaires des écoles, les lieux d’ablution des mosquées. Elle est favorisée par la
macération (plis chez les obèses, espaces sous-mammaires, séchage insuffisant,
chaussures fermées ou de sécurité…).
Dans le cas des TCC, la transmission est directe suite à un contact interhumain ou
indirecte par le biais d’objets contaminés (peignes, foulards, chapeau, brosse des
coiffeurs (Coulibaly et al., 2016).
Pour les espèces zoophiles les spores sont transmises de l’animal à l’homme par le
contact direct, soit professionnel, soit en cajolant les animaux de compagnies.
La transmission des spores telluriques résulte d’un contact de l’homme avec un sol
contaminé, dans un contexte professionnel le plus souvent.

D. Facteurs favorisants
Plusieurs facteurs favorisent la transmission des dermatophytes. Il s’agit de :
 Facteurs favorisant la contagiosité :
La vie en collectivité, la promiscuité, le faible niveau socio-économique, le manque
d’hygiène, l’utilisation commune de peignes, brosses, foulards (pour les TCC).
 Facteurs hormonaux :
A la puberté, la présence de substances fongicides dans le sébum explique la
disparition spontanée des lésions de TCC et leur plus grande fréquence chez l’enfant.
 Facteurs climatiques :
La chaleur et l’humidité sont favorables au développement des champignons.
 Facteurs locaux et physiologiques :
Les microtraumatismes, la macération, mais aussi la grossesse favorisent le
développement des champignons.
 Facteurs pathologiques :
Le diabète, le VIH-SIDA, les hémopathies malignes.
 Les facteurs professionnels : Les professions qui exposent au contact avec les
animaux, ou avec les sols contaminés
 Facteurs médicamenteux :
L’utilisation sans discernement des antibiotiques, les antituberculeux, les
contraceptifs oraux, les anticancéreux, les corticoïdes, les immunosuppresseurs
favorisent le développement des champignons.

E. Répartition géographique
Les dermatophytoses sont des affections cosmopolites, avec une prédominance dans
les pays chauds et humides. Leur répartition est liée à l’écologie des champignons
pathogènes.
L’atteinte par les champignons anthropophiles et zoophiles comme M. canis est liée
aux habitudes socioculturelles (présence d’animaux domestiques à domicile pour M.

82
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

canis et le partage de serviettes, de culotte, de matériels de rasage, de coiffure et la


promiscuité pour les dermatophytes anthropophiles).
Les dermatophytes telluriques étant retrouvés de manière plus ou moins importante
sur tous les continents, la contamination de l’homme est fortuite, lors des contacts
avec le sol.

III. Diagnostic biologique

A. Circonstances du diagnostic biologique.


Il est important de considérer l’âge, la localisation des lésions, la nature de
l’inflammation, l’origine géographique et un antécédent de contact avec les animaux.
Les dermatophytoses se manifestent sous différents tableaux cliniques. Nous
distinguons les atteintes de la peau glabre, les atteintes des plis, les atteintes des
ongles, les atteintes des poils et des cheveux.
Dans le cas d’une atteinte de la peau glabre, on peut rencontrer :
- Les épidermophyties circinées : anciennement appelées herpès circiné ; elles
débutent par une zone érythémateuse avec une croissance centrifuge sous forme
d’anneau inflammatoire avec présence de petites vésicules à la périphérie des lésions,
qui sont parfois isolées ou multiples voire parfois confluentes. Les espèces
responsables sont : E. floccosum, T. rubrum, T. mentagrophytes, T. verrucosum, M.
canis.

83
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

Figure 4. 2 : Epidermophytie circinée du visage


(Source Coulibaly et al., 2016)

Figure 4. 3 : Epidermophytie étendue : thorax, fesses, bras, plis axillaires


(Source : Prof Nzenze-Afène, 2014)

Les lésions plantaires et palmaires : l’atteinte palmaire est rare. Elle consiste en une
lésion érythémato-squameuse, prurigineuse et intense surtout au niveau des plis
palmaires. L’espèce responsable est T. rubrum.
L’atteinte dermatophytique est plus observée aux plantes des pieds qu’aux mains. Elle
est caractérisée par des papules prurigineuses avec ou pas des vésicules sur une peau
plus ou moins érythémateuse avec à la longue apparition d’hyperkératose et
desquamation.

84
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

Figure 4. 4 : Epidermophytie plantaire


(Source : Prof Nzenze-Afène, 2014)

Les folliculites : elles touchent tous les follicules pileux sauf pubiens et axillaires. La
lésion est centrée sur un poil, parfois inflammatoire et douloureuse. Les folliculites
sont liées à des microtraumatismes, à l’usage local des corticoïdes, ou à des troubles
circulatoires. Elles sont généralement dues à T. rubrum, mais aussi, plus rarement, à
des espèces zoophiles (M. canis, T. mentagrophytes) ou telluriques (M. gypseum). La
péri-folliculite granulomateuse de Wilson est une folliculite chronique de la jambe.
Dans le cas d’une atteinte des plis, on peut observer :
- La dermatophytie interdigito-palmaire : caractérisée par une atteinte érythémato-
papulo-squameuse et prurigineuse des espaces interdigitopalmaires (EIDPAL), elle est
moins fréquente aux mains qu’aux pieds

Figure 4. 5 : Intertrigo interdigitopalmaire dermatophytique


(Source : Prof Kombila, 2010)

La dermatophytie interdigito-plantaire ou intertrigo dermatophytique de ou des


espace(s) interdigito-plantaire(s) (EIDPL): concerne surtout l’adulte, et touche
préférentiellement les 3ème et 4ème espaces interdigitaux ; d’autres espaces peuvent
être atteints tels que la plante du pied, le dos du pied ou les ongles. La lésion prend
l’aspect d’une simple desquamation sèche ou suintante, associée ou non à des fissures
ou des vésicules ou bulles sur la face interne des orteils et au fond du pli. La peau du
fond du pli s’épaissit et devient blanc nacré. Le prurit est variable.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

Les espèces responsables sont les espèces anthropophiles telles T. rubrum, T.


mentagrophytes var. interdigitale et E. floccosum

Figure 4. 6: Dermatophytie interdigito-plantaire


Source : K. Diongue, CHU Aristide Le Dantec de Dakar

Figure 4. 7: Intertrigo dermatophytique du 4ème espace inter orteil


(Source : Prof Nzenze-Afène, 2014)

Les intertrigos dermatophytique des grands plis : Aux plis inguinaux (anciennement
appelé « eczéma marginé de Hébra »), l’atteinte réalise un placard érythémato-
squameux prurigineux, extensif, souvent bilatéral, asymétrique, à contours circinés,
qui s’étend sur la face interne de la cuisse. Les espèces responsables sont : T. rubrum
et E. floccosum.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

Figure 4. 8 : Intertrigos des grands plis (plis inguinal)


(Source : Anofel, 2013)

Figure 4. 9 : Lésions d’épidermophytie étendue avec intertrigo du pli inguinal droit


(Source : Prof Nzenze-Afène, 2014)

Figure 4. 10 : Epidermophytie sous-mammaire bilatérale


(Source : Prof Kombila, 2010)
Dans le cas d’une atteinte des ongles, on peut observer :
L’onyxis dermatophytique : l’atteinte unguéale est presque toujours associée à celle
des espaces interdigitaux ou des plantes. Elle débute généralement dans la partie

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

distale et latérale de la tablette unguéale (zone disto-latérale). Il en résulte un


épaississement de la tabletet unguéale avec une hyperkératose sous-unguéale : cet
aspect clinique est dénommé onychomycose sous-unguéale distale quand toute la
partie distale est concernée et onychomycose sous-unguéale disto-latérale quand
seule la partie disto-latérale est affectée. L’onycholyse est caractérisée par le
décollement distal de la tablette unguéale. Les espèces les plus fréquentes sont T.
rubrum, T. mentagrophytes var. interdigitale et E. floccosum.
Du point de vue clinique, en dehors des aspects ci-haut décrits, la leuconychie,
l’onychomycose proximale et l’onychomycodystrophie totale sont aussi rapportées.
L’onychomycose sous-unguéale distale est la plus fréquente ; elle débute aux bords
latéraux des doigts avec atteinte secondaire des ongles qui s’épaississent et
deviennent friables, accompagnée d’une destruction de la matrice. Les ongles
prennent une couleur jaune à brune (dyschromie de l’ongle).
L’onychomycose proximale est rare et observée surtout chez l’immunodéprimé. La
lésion débute par une tâche blanche au niveau de la lunule, puis elle s’étend en
préservant la partie distale.
L’onychomycodystrophie totale est une destruction totale de l’ongle avec une atteinte
de la matrice. Toutes les atteintes unguéales peuvent évoluer vers une destruction
totale de l’ongle.

Figure 4. 11 : Onyxis des orteils


(Source : Anofel, 2013)

Figure 4. 12 : Onychomycose sous unguéo-distale du gros orteil


(Source : Prf Nzenze-Afène, 2014)

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

Dans le cas d’une atteinte des cheveux ou teignes du cuir chevelu (TCC), on peut
observer les différents tableaux cliniques suivants :
Les Teignes tondantes de type microsporique : Elles touchent l’enfant avant la
puberté. Elles entrainent des grandes plages alopéciques de 2 à 7cm de diamètre,
unique ou multiple (en petit nombre 1-4), la surface est sale couverte de squames
grisâtres, plus rarement d’aspect inflammatoire, les cheveux sont coupés courts à
quelques millimètres de leur émergence. Les cheveux atteints sont fluorescents à la
lumière de Wood. Les espèces incriminées sont M. langeronii (espèce la plus fréquente
au Gabon), M. audouinii, M. ferrugineum et M. canis.

Figure 4. 13 : Teigne microsporique (Source : Coulibaly et al.,


2016)

Les Teignes tondantes trichophytiques se traduisent par la présence de petites lésions


éparses, squamo-croûteuses parfois pustuleuses engluant des cheveux cassés très
court, réalisant des petites plages alopéciques de 1 à 2cm de diamètre, en grand
nombre, pouvant confluer, la surface est squameuse, les cheveux sont cassés très
court parfois invisibles englués dans les squames. Il y a persistance de cheveux sains
dans la zone de lésion. Il n’y a pas de fluorescence sous la lumière de Wood. Les
espèces incriminées sont T. soudanense, T tonsurans et T. violaceum.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

Figure 4. 14 : Teigne trichophytique (Source : Coulibaly O et al., 2016)

Le Favus (teigne favique), débute de façon insidieuse, et réalise des plaques


croûteuses surélevées, grises, jaunâtres ou jaune soufre, irrégulières de contour, et
d'étendues variables. Ces plaques alopéciques sont inflammatoires et cicatricielles
marqués par des petites dépressions remplies de croutes appelées "godets faviques",
agglomérés. L’espèce causale est T. schoenleinii.

Figure 4. 15 : Teigne favique (Source Anofel,


2013)

Le Kérion de Celse (teigne inflammatoire) est une atteinte le plus souvent d’origine
animale ou tellurique qui entraîne une réaction inflammatoire majeure de l’hôte
humain. L’aspect des lésions est nodulaire et pustuleux, douloureux, avec une plaque
érythémateuse, du pus qui s’écoule des orifices pilaires, une absence de fluorescence
sous lumière Wood. Une surinfection bactérienne est commune. Le kérion est parfois
secondaire à l’application d’une corticothérapie locale de façon inappropriée. Il y a

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Dermatophytoses

souvent de petites adénopathies satellites inflammatoires mais pas de fièvre. Les


espèces responsables sont les zoophiles ou telluriques : T. mentagrophytes var
granulosum, T. verrucosum, M. canis, M. gypseum. Certaines espèces anthropophiles
ont été aussi incriminés T. rubrum, T. tonsurans et T. violaceum.

Figure 4. 16 : Kérion de Celse

Source : K. Diongue, CHU Aristide Le Dantec de Dakar

Figure 4. 17 : Kérion de Celse (Source : Prof Kombila, 2010)

La teigne de la barbe ou sycosis se présente comme une folliculite aiguë suppurée


avec des plages papuleuses inflammatoires, pustuleuses, parfois verruqueuses. Elles
sont difficiles à distinguer cliniquement d’une folliculite bactérienne, d’autant plus
qu’elles sont souvent compliquées par une surinfection bactérienne. Seul le
prélèvement mycologique fera la preuve de l’atteinte par un dermatophyte. Les
espèces causales sont identiques à celles du kérion.
Les aspects cliniques atypiques des TCC sont parfois difficiles à identifier en particulier
lorsqu’elles simulent un pityriasis (état pelliculaire) diffus ; lorsqu’elles sont modifiées
par l’application de topiques ; et lorsqu’elles évoluent sur terrain immunodéprimé, en
particulier l’infection VIH, la TCC pouvant alors simuler une dermatite séborrhéique ou
un psoriasis.

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Dermatophytoses

Figure 4. 18 : Sycosis (Source : Anofel, 2013)

Les dermatophytes peuvent provoquer des formes cliniques rares parmi lesquelles
on distingue :
1. Les maladies trichophytiques : la maladie de Hadida et Schousboë est rare ; elle se
développe sur un terrain prédisposé. Elle est caractérisée par l’envahissement des
tissus profonds à partir d’un point de départ cutané. Les espèces en cause sont : T.
rubrum, T. schoenleinii, T. violaceum.
2. Les mycétomes : ce sont des tumeurs inflammatoires chroniques, poly fistulisées. Le
diagnostic nécessite une biopsie. Les espèces incriminées sont T. rubrum, M. canis, M.
langeronii (Nzenze-Afène et al., 2006).
3. La forme de l’immunodéprimé (VIH-SIDA, corticothérapie générale au long cours,
greffe d’organes…) : la symptomatologie est atypique : la bordure évolutive et le prurit
sont absents, il y a une profusion des lésions, avec une extension rapide. Parfois, on
observe une atteinte des organes profonds posant un véritable défi diagnostique.
4. Les dermatophytides : ce sont des réactions allergiques à expression cutanée se
produisant à proximité ou à distance d’un foyer dermatophytique. Elles se manifestent
souvent sous forme d’une éruption cutanée prurigineuse et vésiculeuse (eczéma
dyshidrosique) sur les faces latérales des doigts, des paumes. L’examen mycologique
au niveau des lésions sera négatif.

Figure 4. 19 : Eczéma dyshidrosique (Source : Prof Kombila, 2010)

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Dermatophytoses

B. Diagnostic différentiel
L’intertrigo interdigital à dermatophytes doit être distingué d’un intertrigo
candidosique à Candida albicans, d’un eczéma dyshidrosique et d’un intertrigo à
bacille gram négatif (avec lésions érosives, parfois verdâtres, résistantes au traitement
antifongique).
L’atteinte dermatophytique des grands plis doit être distinguée d’un intertrigo
candidosique (avec érythème, d’aspect vernissé et suintant, fissuré au fond du pli qui
est recouvert d’un enduit blanchâtre ; présence de papulo-pustules au-delà de la
périphérie de la lésion) ; d’un érythrasma à Corynebaterium minutissimum (avec un
placard brun chamois finement squameux avec fluorescence rose-corail sous lumière
Wood) ; d’un psoriasis (psoriasis inversé) ; d’une dermite d’irritation ; d’un eczéma de
contact d’aspect vésiculo-suintant.
Les lésions annulaires sont souvent considérées comme synonymes de
dermatophytoses, surtout chez l’enfant. Il faut faire attention à les distinguer d’une
dermatite atopique ; d’un eczéma nummulaire ; d’un psoriasis annulaire ; d’un
pityriasis rosé de Gibert (maladie éruptive à lésions multiples).
Les formes atypiques chez l’immunodéprimé doivent être différenciées d’une
dermatite atopique ; d’un eczéma nummulaire ; d’un psoriasis annulaire ; d’un
pityriasis rosé de Gibert (maladie éruptive à lésions multiples) ; ou d’un lupus
érythémateux.

C. Diagnostic mycologique
Le diagnostic mycologique reste le diagnostic de certitude des dermatophytoses. Il
exige une démarche rigoureuse en trois étapes : le prélèvement, l’examen direct et la
mise en culture qui permet l’identification définitive des espèces.
Prélèvements
Le prélèvement est effectué à distance d’un traitement antifongique, au moins 14
jours pour la peau et un à deux mois pour un ongle : les lésions à prélever sont
fonction de la localisation de l’infection. Le prélèvement doit être en quantité
suffisante, recueilli dans une boîte de Pétri stérile et acheminé rapidement au
laboratoire.
Dans les lésions cutanées, on prélève les squames (par grattage) sur les lésions sèches,
et on effectue un écouvillonnage humidifié à l’eau stérile pour les lésions
inflammatoires.
Dans le cas d’une folliculite, on prélève les poils à l’aide d’une pince à épiler, ou par
écouvillonnage humidifié à l’eau stérile.
Dans le cas d’une TCC, l’examen à la lampe de Wood (lumière UV) permet de visualiser
les cheveux microsporiques qui présentent une fluorescence verte caractéristique. Les
squames et les cheveux sont recueillis à l’aide d’un grattoir, les cheveux fluorescents

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Dermatophytoses

prélevés à l’aide d’une pince. Le cas échéant, le pus est prélevé à l’aide d’un écouvillon
stérile.
Dans le cas d’un onyxis, si l’atteinte est distale ou disto-latérale, on prélève la tablette
unguéale jusqu’au niveau de la jonction entre la zone contaminée et la zone saine de
l’ongle. S’il s’agit d’une leuconychie, on racle la partie supérieure affectée (blanchâtre)
de l’ongle.
Examen direct
L’examen direct met en évidence l’aspect parasitaire des dermatophytes qui permet
d’instituer rapidement le traitement.
Les prélèvements sont déposés dans une goutte d’hydroxyde de potasse à 30% qui a
un rôle éclaircissant, détruit la kératine et permet de visualiser, dans le cas des TCC, les
2 types d’atteinte pilaire les plus fréquents : il s’agit de l’atteinte endo-ectothrix de
type microsporique et de l’atteinte endothrix de type trichophytique.
L’éclaircissement du prélèvement peut se faire aussi avec le chloralactophénol qui
permet de conserver plus longtemps les éléments fongiques. On peut aussi utiliser des
colorants tels que le noir chlorazole (qui éclaircit et colore), le bleu coton pour
permettre une meilleure visualisation. Dans les DC, l’examen direct met en évidence
les filaments mycéliens cloisonnés arthrosporés.

Figure 4. 20 : Filaments mycéliens arthrosporés à l’examen direct d’un prélèvement


d’un intertrigo-interorteil

Source : MC. Seck, Laboratoire parasitologie-mycologie, Hôpital militaire de Ouakam-Dakar

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Dermatophytoses

Figure 4. 21 : Filaments mycéliens arthrosporés à l’examen direct d’un prélèvement


de lésion d’onychomycose des orteils
(Source : Prof Nzenze-Afène, 2014)

Figure 4. 22 : Parasitisme Figure 4. 23 : Parasitisme endothrix


endo-ectothrix
(Source : K. Diongue, Laboratoire Parasitologie-Mycologie, CHU Aristide Le Dantec - Dakar)

Mise en culture
Les prélèvements sont ensemencés sur deux milieux : (i) Sabouraud additionné de
chloramphénicol et de cycloheximide (actidione : inhibe la croissance des moisissures);
(ii) Sabouraud+chloramphénicol (inhibe la croissance des bactéries). L’incubation dure
3-4 semaines, à 26-27oC. La lecture se fait tous les jours ou tous les 2 jours. Il faut
attendre au moins 3 semaines avant de déclarer une culture négative.
L’identification morphologique : Elle est basée sur l’étude des aspects macroscopique
et microscopique des colonies fongiques qui permet d’identifier les espèces de
dermatophytes responsables des lésions observées. Sur le plan macroscopique, on
note l’aspect du recto, du verso, et la rapidité de croissance.
Pour la réalisation de l’examen microscopique, nous avons 2 possibilités :
1er cas: Prélever à l’öse quelques fragments de colonies. Déposer entre lame et lamelle
dans du bleu coton
2ème cas: technique du drapeau (Roth)

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Dermatophytoses

Sur le plan microscopique, on note la présence de filaments mycéliens (en raquette ou


en bambou), de chlamydospores intercalaires ou terminales sur les filaments, des
microconidies, des macroconidies, des ornementations telles que les vrilles, les
organes pectinés. Les aspects notés sont comparés avec une clef d’identification
standardisée.

Filaments En "raquette"
mycéliens
cloisonnés En "bambou"

Chlamydospores

Microconidies (unicellulaires) :
rondes ou piriformes

Macroconidies lisses
(genre Trichophyton et
Epidermophyton)
Macroconidies (pluricellulaires et
cloisonnées transversalement)
● Paroi lisse chez
Trichophyton et
Epidermophyton
Macroconidies échinulées
● Paroi rugueuse chez
(genre Microsporum)
Microsporum

Ornementa Organe pectiné (en Ex : Microsporum audouinii,

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

tions forme de peigne) Trichophyton schoenleinii


Organe nodulaire
Ex : Trichophyton schoenleinii
(en forme de nœud)
Chandelier favique Ex : Trichophyton schoenleinii
Clou favique Ex : Trichophyton schoenleinii
Ex : Microsporum persicolor,
vrille Trichophyton
mentagrophytes

Schéma : clés d’identification des dermatophytes


(source : http://www.microbiologie-medicale.fr/mycologie/identificationchampignons.htm)

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

Tableau 4. 1 : Clés d’identification des dermatophytes

parasitisme
Genres Espèces Délai culture Surface revers Macroconidies Microconidies Ornementation
pilaire
Nombreuses,
Epidermophyton Poudreuse, lisses (parfois
Rapide Jaunâtre,
Attaque la peau, les E. floccosum jaune- échinulées), en Chlamydospores
(5 à 6 jours) chamois
ongles verdâtre "régime de
bananes"
En "quenouille",
Duveteuse,
Rapide Pigment échinulées (parois Inconstantes, Mycélium en
M. canis Microspori-que blanche,
(5 à 6 jours) jaune-orangé et cloisons piriformes raquette
aspect étoilé
épaisses)
Plâtreuse, En "cocon",
Favique ou endo- Rapide Chamois
M. gypseum beige puis nombreuses, Rares, piriformes
ectothrix (5 à 6 jours) foncé
chamois échinulées
Chlamydospores,
Duveteuse, Rares, déformées,
Microsporum M. Lent Beige mycélium en
Microspori-que blanche à paroi épaisse et piriformes
Attaque la peau, les langeronii (8 à 10 jours) saumoné raquette, organes
grise échinulée
ongles, les cheveux, pectinés
les poils Aspect de Assez rares,
Nombreuses,
feutre, lancéolées, Vrilles, filaments
M. Rapide arrondies, en
blanche à Rose-lilas finement articulés à angle
persicolor (5 à 6 jours) "bout
beige puis échinulées (paroi droit
d’allumette"
rosée mince)
microïde Rapide Poudreuse, Incolore ou Assez rares, en Nombreuses, Vrilles, filaments
T. mentagro- (5 à 6 jours) duveteuse, brun- massue, lisses, arrondies, articulés à angle
phytes blanc-crème rougeâtre parois minces disposées en droit
buisson

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Dermatophytoses

Genres Espèces parasitisme pilaire Délai culture Surface Revers Macroconidies Microconidies Ornementation
Très rare, endothrix Rapide Duveteuse, Incolore ou En général très Inconstantes, Organes
ou ecto-endothrix (6 à 7 jours) blanc-crème brun rares, lisses piriformes, en triangulaires
T. rubrum
ou violacée allongées, parois acladium
minces
favique Très lent Cireuse, jaunâtre Chlamydospores,
T. schoenleinii (15 jours) jaunâtre clous et chandeliers
faviques
endothrix Lent Glabre et rouille Très rares, lisses Très rares, "fil de fer barbelé"
(10 à 15 jours) plissée, aspect piriformes
T. soudanense
étoilé, couleur
"abricot sec"
endothrix Lent Poudreuse ou Beige ou rouge Rares, lisses, Nombreuses, chlamydospores
(10 à 15 jours) veloutée, allongées, parois piriformes
T. tonsurans
blanche à minces
jaune soufre
mégaspore Très lent (3 Verruqueuse, brun Chlamydospores,
semaines) blanc-crème filaments toruloïdes
T. verrucosum
(avec renflements
et étranglements)
endothrix Lent Bombée, violet Filaments
(10 à 15 jours) glabre, toruloïdes (avec
T. violaceum violette renflements et
(parfois étranglements)
blanche)

(Source : http://www.microbiologie-medicale.fr/mycologie/identificationchampignons.htm)

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

L’identification par les tests physiologiques : ces tests sont basés sur les besoins
physiologiques des ermatophytes :
- Les besoins en acides aminés et vitamines ;
- L’hydrolyse de l’urée (milieu de Christensen ; urée indole) ;
- La croissance sur milieu BCP (bromocrésol pourpre) ;
- La croissance sur grains de riz
- La tolérance thermique.

Les clés d’identification :


En culture, les champignons se présentent sous forme de filaments septés, fins et
réguliers, hyalins. On peut noter, en fonction des espèces etd es souches, l’absence de
macro et microconidies, la présence exclusive de macroconidies, la présence exclusive
de microconidies, la présence de macro et microconidies, les macroconidies à paroi
lisse ou à paroi échinulée.

Exemple d’identification de certains dermatophytes isolées au Mali : (cf. autres


exemples en annexes)
T. soudanense :
Aspect macroscopique des cultures : colonies de couleur jaune, rouille ou abricot sec
au recto et au verso;
Aspect microscopique : filaments septés avec ramifications antérogrades et rétro
grades donnant un aspect en « fil de barbelé ».
M. langeronii :
Aspect macroscopique des cultures : colonies d’aspect blanchâtre duveteux au recto ;
beige ou brun clair au verso ;
Aspect microscopique : filaments mycéliens septés avec des dilatations en raquette ; et
de nombreuses chlamydospores intercalaires ou terminales.

IV. Principes thérapeutiques

A. But
Le but est d’éliminer le ou les dermatophytes responsables des lésions.

B. Moyens
Dans le traitement des TCC, il faut associer un antifongique par voie systémique à un
antifongique par voie locale. La voie systémique permet à l’antifongique d’atteindre le
bulbe pileux non accessible par voie cutanée. L’application locale d’antifongique
permet de diminuer la contagiosité. Dans les DC, l’application locale peut suffire, sauf

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

si les lésions sont trop importantes. Dans les onyxis, le traitement est local uniquement
en l’absence de l’atteinte de la matrice. En cas d’atteinte matricielle, il faut associer au
traitement local un traitement par voie générale

Les moyens sont spécifiques et non spécifiques.


 Les moyens spécifiques sont : les antifongiques par voie systémique et en
application locale.
Les antifongiques par voie systémique : la Griséofulvine (Griséfuline®), la
terbinafine (Lamisil®), l’itraconazole (Sporanox®)
Les antifongiques par voie locale : la ciclopirox olamine 1% (Mycoster® crème), la
ciclopirox 8% (Mycoster® solution filmogène, les dérivés imidazolés tels le
bifonazole (Amycor®), le kétoconazole (Kétoderm®), le sulconazole (Myk®),
l’éconazole (Pevaryl®) etc.), et l’amorolfine (Locéryl®)
 Les moyens non spécifiques sont le traitement adjuvant par le rasage des
cheveux, la corticothérapie brève, dans le cas des lésions très inflammatoires.

C. Indications
Dans les TCC, chez l’enfant jusqu’à 15 ans, privilégier en première intention la
Griséofulvine per os, à la dose de 15-20mg/kg/j pendant 6 à 8 semaines. On y associera
un traitement local par des dérivés azolés.
Chez l’adulte, on donne la terbinafine per os (250mg/j)
La dose préconisée chez l’enfant est de 4 à 5mg/kg/jour
Durée du traitement : 4 semaines, efficace surtout sur les Trichophyton.
La terbinafine peut être associée par voie locale (topique) pendant les deux premières
semaines du traitement à l’administration de shampoing quotidien, puis bi
hebdomadaire.
Si un onyxis des mains est associé, le traitement doit durer au moins 3 mois.
Dans les DC, le traitement local à la terbinafine ou avec un autre antifongique azolé
(Amycir®, Ketoderm®, Fonx®, Dakatarin® est privilégié. Il est à appliquer sur les lésions
cutanées (peau glabre, plis) après la toilette et séchage, 1 à 2 fois/jour, pendant au
moins 3 à 4 semaines.
Dans les onyxis, on applique un vernis type Mycoster® 1 fois/j ou Locéryl® 1 à 2
applications par semaine, pendant 3 à 6 mois voire plus. On peut aussi pratiquer une
avulsion chimique par de l’urée associé à un meulage. En cas d’atteinte matricielle, on
institue un traitement par la terbinafine per os, 1 comprimé/j pendant 6 semaines à 3
mois pour les mains et 3 à 6 mois voire plus pour les pieds. En indication hors AMM, le
Sporanox® est conseillé dans les onychmycoses en pulse-thérapie à la dose de 200mg
matin et soir pendant 1 semaine par mois, 2 à 3 mois consécutifs de même le
Fluconazole (beaucoup moins cher) est indiqué en pulse-thérapie à la dose de 150mg à
400mg 1 fois par semaine pendant 3 à 6 mois.

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Dermatophytoses

E. Résultats/Evolution/Surveillance
Le traitement est efficace. La surveillance est clinique. La terbinafine est efficace
contre le genre Trychophyton et est peu efficace sur Microsporum canis.

V. Prévention

A. Mesures individuelles
Il s’agit de mettre en œuvre le traitement curatif des cas de TCC et de DC. Et de
recommander d’éviter de marcher pied nus (piscines, sauna, etc.) ; de restreindre à
l’usage individuel, certains objets personnels (serviettes, linge, outils de coiffure) ; de
bien se sécher après la toilette, car les zones humides sont favorables au
développement des champignons ; de préférer les chaussures aérées aux baskets ;
d’éviter les contacts directs entre la peau et le pelage des animaux parasités.

B. Mesures collectives
Pour stopper une épidémie à TCC, réaliser une enquête familiale ou en milieu scolaire
pour l’identification et le traitement des contacts
Une composante importante de la prévention collective est la Communication pour le
Changement de Comportement ciblée sur des groupes particuliers, par exemple les
coiffeuses traditionnelles.

Résumé
Les dermatophytoses sont des affections fongiques dues à des dermatophytes,
champignons filamenteux kératinophiles responsables d’infections cutanées
superficielles (peau, cheveux, ongles). L’interrogatoire occupe une place importante
dans le diagnostic. L’humidité, les traumatismes locaux, les occlusions des plis sont des
facteurs favorisants. Les lésions sont squameuses hyperkératosiques, papuleuses, plus
ou moins vésiculeuses aux pieds et aux mains ; des placards circinées avec bordure
érythémato-papulo-vésiculeuse et centre plus ou moins squameux au niveau de la
peau glabre ; et des plages alopéciques sur la tête. Le diagnostic passe par un examen
mycologique indispensable pour isoler le dermatophyte. Le traitement est
essentiellement basé sur les antifongiques locaux et par voie générale. La prévention
est basée sur le respect des mesures d’hygiène, le traitement des cas diagnostiqués et
la communication pour le changement de comportement visant des groupes cibles.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

Conclusion
Les dermatophytoses sont des affections fréquentes sous les tropiques. Leur prise en
charge correcte passe par un diagnostic étiologique qui nécessite d’adopter une
démarche diagnostique rigoureuse. Le diagnostic différentiel se pose avec plusieurs
autres dermatoses. La grande contagiosité des TCC implique de traiter les cas et les
contacts, notamment en milieu scolaire.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

Annexes

Teigne du cuir chevelu à Microsporum langeronii

A.grande plaque d’alopécie ; B. aspect des colonies au recto ; C. aspect des colonies au
verso ; D. chlamydospores intercalaires et terminales ; E. mycélium en raquette (flèche)
Source : MC. Seck, Laboratoire parasitologie-mycologie, Hôpital militaire de Ouakam-Dakar

Onychomychodystrophie totale à Trichophyton verrucosum

A. Aspect des ongles atteints ; B. Aspect des colonies au verso ; C. aspect cérébriforme
des colonies au verso ; D. Aspect toluroïde des filaments mycéliens
Source : MC. Seck, Laboratoire parasitologie-mycologie, Hôpital militaire de Ouakam-Dakar

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

Onyxis à Trichophyton rubrum

C.Aspect de ongles atteints ; A. Aspect macroscopique des cultures sur gélose Sabouraud
(noter la diversité) ; B. aspect microscopique des cultures montrant des filaments mycéliens
septés avec une excroissance triangulaire (flèche)
Source : MC. Seck, Laboratoire parasitologie-mycologie, Hôpital militaire de Ouakam-Dakar

Trichophyton soudanense

C et B. Aspects macroscopiques des colonies au verso et recto ; A. Aspect en fil de fer


barbelé des filaments mycéliens et ramifications rétrogrades
Source : MC. Seck, Laboratoire parasitologie-mycologie, Hôpital militaire de Ouakam-Dakar

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

Onyxis à Trichophyton rubrum

Aspect de l’ongle du pouce atteint ; B. Examen microscopique des débris d’ongle montrant
des filaments mycéliens septés ; C. aspect macroscopique de la culture au verso ; D. examen
microscopique de la culture montrant des filaments mycéliens septés avec une excroissance
triangulaire (flèche)
Source : MC. Seck, Laboratoire parasitologie-mycologie, Hôpital militaire de Ouakam-Dakar

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

Genre Epidermophyton

• Pas de microconidies
• Seulement des macroconidies en « régime de banane »

(Source : The Geraldine Kaminski Medical Mycology Library, Doctorfungus Corporation, 2003)

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

Microsporum audouinii
• Microconidies
• Macroconidies à parois rugueuses, spiculées

Microsporum canis

Trichophyton soudanense

(Source : The Geraldine Kaminski Medical Mycology Library, Doctorfungus Corporation, 2003)

Aspects macroscopiques
A l’endroit : colonies cérébriformes, poudreuses de couleur abricot et
A l’envers, colonies jaunes-orangées avec des mèches de filaments qui irradient
autour de la colonie
Aspects microscopiques:
Très peu de microconidies
Pas de macroconidie
Présence de filaments d’aspect buissonneux avec des ramifications rétrogrades
(caractéristiques).

108
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Dermatophytoses

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Malassezioses

5 MALASSEZIOSES
Rédigé par Pr Diallo Mouctar (Mali), Relu par Pr Nzenze Solange (Gabon), Pr Guimguemdé
Robert (Burkina Faso) et Pr Kiki Barro Pulchérie C (Côte d’Ivoire)

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Malassezioses

Introduction
Définition:

Les infections à Malassezia (malassezioses ou Pityrosproses) sont des épidermomycoses


dues à des levures lipophiles du genre Malassezia, qui sont kératinophiles, majoritairement
lipodépendantes, et appartenant à la flore commensale de la peau de l’Homme et des
animaux à sang chaud. Ce sont des affections fréquentes sans caractère de gravité,
caractérisées par leurs habituelles récidives,

Intérêt :
Ces levures sont en particulier responsables chez l’Homme de pityriasis versicolor, de
pityriasis capitis, de pseudo acné, de folliculite, de dermite séborrhéique et très rarement
d’infections systémiques, dans certaines circonstances. À ce jour, 14 espèces au minimum
ont été décrites.

Historique :
Le champignon, responsable de ces pathologies, essentiellement cutanées, (capillaire est
relatif au cheveu : le micromycète ne parasite pas le cheveu) et systémique, décrit pour la
première fois en 1846, a été longtemps présenté sous deux aspects différents :
Une forme essentiellement levure, est décrite comme responsable d’affection du cuir
chevelu dénommée pityriasis capitis
Une forme levuriforme avec présence de filaments, est reconnue responsable d’affection
cutanée appelée pityriasis versicolor
On doit à Baillon, en 1889, la création du genre Malassezia et la dénomination de Malassezia
furfur pour désigner les formes mycéliennes observées. Les levures du genre Malassezia ont
fait l’objet de nombreuses controverses. En 1961, le genre Malassezia comporte deux
espèces : M. furfur, incluant tant les formes rondes de Pityriasis versicolor (anciennement
dénommé Pityrosporum orbiculare) que les formes ovales de Pityriasis capitis ou dermite
séborrhéique (Pityrosporum ovale) et Malassezia pachydermatis (anciennement
Pityrosporum canis), seule espèce non lipodépendante, surtout isolée dans les oreilles saines
ou infectées du chien. En 1995, le genre s’est élargi en 7 espèces dont M. furfur, M.
pachydermatis, M. sympodialis, M. globosa et M. restricta. Ces levures de petites tailles (3 à
8 microns), sont caractérisées par un bourgeonnement unipolaire sur une base large
donnant à la cellule-mère porteuse, un aspect en « étui » ou en « petit flacon »

111
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Malassezioses

I. Epidémiologie

A. Agent pathogène
Taxinomie

Ces levures appartiennent au Règne des Fungi.


Sur le plan asexué, à la Division (Phylum) des Deuteromycotina
Classe des Blastomycètes
Ordre des Cryptococcales
Genre: Malassezia
Sur le plan sexué, elles sont assimilées aux Basidiomycètes.
Actuellement, on distingue plusieurs espèces impliquées en pathologie humaine :
Malassezia (M.) furfur (levure connue de longue date en pathologie humaine, est l’un
des principaux agents du pityriasis versicolor). Six autres espèces sont impliquées en
pathologie humaine, M. sympodialis, M. globosa, M. restricta, M. obtusa. M. slooffiae
et M. pachydermatis. Ces 2 dernières espèces sont également isolées d’animaux, M.
pachydermatis est isolée du chien, le chat et M. slooffiae surtout du porc.
Il existe d’autres telles que déjà, M. dermatis, M. equina. M. japonica, M. nana, M.
yamatoensis (2008) qui ont été rapportées dans la littérature.
Les levures du genre Malassezia lipophiles et kératinophiles font partie de la flore
cutanée habituelle de l’Homme et de certains animaux. Ce sont donc des levures
strictement épicommensales. Elles sont lipodépendantes, sauf M. pachydermatis qui
est la seule espèce non lipodépendante et qui pousse sur milieu de Sabouraud (sans
adjonction de lipides).
Chez l’Homme, les Malassezia sont particulièrement abondantes sur les régions du
corps où la peau est grasse, riche en glandes sébacées (thorax, visage, cuir chevelu, et
oreille). Elles sont absentes des paumes des mains et plantes des pieds.

Morphologie
Ce sont des levures de taille et de forme variable ; elles sont polymorphes (rondes, à
ovalaires, cylindrique). La reproduction se fait par bourgeonnement unipolaire, la base
du bourgeon est large. Une association avec du mycélium fait de filaments courts
enchevêtrés ± trapus est possible.

Biologie
Toutes les espèces du genre Malassezia sont des levures lipophiles et lipodépendantes
excepté M. pachydermatis. Au cours de ces dernières décennies, un intérêt accru a été
porté sur leur aspects métaboliques, physiopathologiques, mais aussi sur le

112
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Malassezioses

développement des milieux d’isolement, d’identification et les outils de diagnostic


moléculaire.

Pathogénie:

Les Malassezia sont des levures commensales de la peau ; elles prolifèrent dans
l’épiderme en produisant du mycélium sous l’influence de facteurs climatiques et de
facteurs intrinsèques à l’Homme :
- Chaleur, humidité, d’où la fréquence du Pityriasis versicolor dans les régions
tropicales ;
- Peau grasse (teneur importante en triglycérides et acides gras libres) ou
application de corps gras sur la peau ;
- facteurs hormonaux (grossesse, hypercorticisme), diminution de l'immunité
cellulaire (SIDA).

B. Habitat
C'est une levure commensale du revêtement cutané humain. Elle est particulièrement
abondante dans les zones riches en glandes sébacées (thorax, visage, cuir chevelu). Elle est
absente des paumes et des plantes. Sur la peau normale, elle est retrouvée en faible
quantité, sous sa forme levure).

C. Facteurs favorisants
Les malassezioses ne sont pas des infections transmissibles.
Les levures du genre Malassezia sont commensales de la peau, et le passage de la levure
d’un état commensal à un état pathogène est à l’origine des mycoses observées. Les
Malassezia prolifèrent dans l’épiderme en produisant du mycélium sous l'influence de
différents facteurs favorisants.

Par ailleurs, des facteurs physiologiques peuvent être évoqués: peaux grasses
ou séborrhéiques, hyperhydrose, transpiration, malnutrition ; des facteurs climatiques :
chaleur, humidité, port de vêtements occlusifs de nature synthétique ; des facteurs
iatrogènes : corticothérapie, contraceptifs oraux, immuno-dépresseurs, cosmétiques gras,
huiles corporelles, crèmes hydratantes ; des facteurs individuels : hypercorticisme,
grossesse, déficit de l’immunité cellulaire. La pseudo acné à Malassezia est une forme
clinique rare.

√-Peau grasse (teneur importante en triglycérides et acides gras libres) ou application de


corps gras sur la peau (cosmétiques ou huiles solaires).
√-L’humidité favorisée par une augmentation de sécrétion sudorale (transpiration) sous
l’effet de la chaleur; le pityriasis versicolor est particulièrement fréquent dans les zones
tropicales et se voit surtout pendant la saison chaude (été) dans les zones tempérées.

113
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Malassezioses

√-L’influence hormonale telle la grossesse, l’hypercorticisme.


√-Une modification de l’immunité cellulaire (immunodépression) comme en témoigne
l’importance de la dermatite séborrhéique chez les sidéens.

D. Répartition géographique
Cosmopolites et bénignes les affections à Malassezia sp sont très fréquentes dans les
régions tropicales et en saison estivale dans les pays tempérés. Elles atteignent l’adolescent
et l’adulte jeune. Différents auteurs montrent que l’adulte jeune est le plus affecté par
les malassezioses. Cependant, l’intervalle des tranches d’âge chez l’adulte jeune varie en
fonction des formes cliniques et des zones géographiques. C’est ainsi qu’en Inde en 2002 :
21-30 ans ; Tunisie 2004: 15-30 ans ; Iran 2004 : 20-30 ans ; Bosnie 2006 : 16-30 ans ;
Indonésie 2008 : 25-44 ans ; Turquie 2009 : 20-30 ans ; Argentine 2012 : 25-45 ans ; Afrique
(Gabon) 2017 : 18-45 ans. Concernant le sexe, le sexe féminin ou masculin prédomine et ce
en fonction des formes cliniques et des zones géographiques. La folliculite à Malassezia et la
pseudo acné à Malassezia sont rares. Quant à la dermite séborrhéique, l’altération de la
perméabilité de la barrière cutanée aggravée par la production locale irritante de
l’acide oléique par les lipases des espèces du genre Malassezia sont considérées comme
responsables du développement de cette pathologie.

II. Diagnostic biologique

A. Circonstances du diagnostic biologique/éléments


d’orientation
1- Lésions superficielles à Malassezia

Les circonstances de découverte de la principale forme clinique (pityriasis versicolor) sont la


présence de macules arrondies, hypochromiques voire hyperchromiques sur peau noire, peu
prurigineuses et finement squameuses, « signe de Copeau », pouvant confluer en grandes
nappes à contours géographiques.
-Le Pityriasis versicolor est souvent observé chez des sujets jeunes (adolescents ou adultes)
provenant des régions tropicales et en saison estivale dans les pays tempérés.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Malassezioses

Figure 5. 1 : Pityriasis versicolor du dos, étendu


(Source: Unité de Mycologie USS, Gabon, Prof.
Nzenze)

Les autres formes cliniques sont:


Le Pityriasis capitis ; c’est un état pelliculaire du cuir chevelu qui peut être sec ou ± stéatoïde
(gras).

Figure 5. 2 : Aspect clinique de Pityriasis capitis


(Source: Unité de Mycologie USS-Gabon, Prof Nzenze-
Afène)

-Dermite séborrhéique
Cette affection siège généralement sur le visage. Favorisée par le stress et
l'immunodépression. Les lésions érythémato-squameuses qui se voient sur les sourcils, les
plis nasogéniens, la lisière du cuir chevelu. Le prurit est habituel. Chez le nourrisson l’atteinte
du cuir chevelu et des plis sont constatés.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Malassezioses

Figure 5. 3 : Aspect de dermite à Malassezia associé à un


psoriasis (Source: Unité de Mycologie USS, Gabon Prof
Nzenze-Afène)

- Folliculite et pseudo acné à Malassezia


C’est une dermatose qui est papuleuse, folliculaire, prurigineuse, parfois pustuleuse,
fréquente chez l'homme jeune. Cette folliculite a été décrite chez l’immunodéprimé. Elle
siège généralement sur le dos, la poitrine parfois le visage.

Figure 5. 4 : Pseudo-acné à Malassezia


(source : Unité de Mycologie USS-Gabon, Prof Nzenze- Afène)

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Malassezioses

Figure 5. 5 : Aspect de pseudoacné et de folliculite à Malassezia


(Source: Unité de Mycologie USS-Gabon, Pr. Nzenze-Afène)

-Des atteintes plus rares à type de blépharite ou affection rétro-auriculaire (Figure 5.6).

Figure 5. 6 : Atteinte rétro auriculaire à Malassezia : présence d’inflammations, de


papules, de pustules et desquamation (source : Unité de Mycologie USS-Gabon, Prof
Nzenze-Afène)

Des associations des formes peuvent être rencontrées telles que ; Pityriasis
capitis/Pityriasis versicolor, Pityriasis versicolor/Folliculite à Malassezia, Pityriasis
capitis/Pityriasis versicolor/Folliculite à Malassezia, Pityriasis capitis/Dermite
séborrhéique/Pityriasis versicolor (Nzenze et al., 2017)

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Malassezioses

2- Fongémies à Malassezia
Ces Malassesioses sont rares. Elles sont constatées chez des prématurés ou des
immunodéprimés et qui sont en général nourris par des intralipides par voie intraveineuse.

B. Diagnostic mycologique
Le diagnostic est en général facile; dans les cas douteux, on peut mettre en évidence une
fluorescence jaune vert pâle caractéristique des lésions (sous l’effet de la lumière de Wood).

Prélèvements
Les prélèvements sont réalisés directement sur les lésions par grattage des lésions : les
squames sont recueillies dans une boîte de Pétri stérile par technique du scotch-test
Dans le Pityriasis versicolor, le scotch-test cutané est un moyen facile de prélèvement et qui
permet de porter le diagnostic de pityriasis versicolor: on colle fortement, sur la macule
suspecte, un morceau de ruban adhésif transparent; puis on le détache, et on l’applique sur
une lame porte-objet que l’on observe ensuite directement au microscope. Il est possible
d’ajouter une goutte de bleu lactophénol sur la lame avant d’y appliquer le scotch. Les
éléments fongiques, colorés, sont plus faciles à voir.

Figure 5. 7 : Scotch test : Présence de spores en amas, associées à des filaments


Source (Unité de Mycologie USS-Gabon, Prof.Nzenze-Afène)

La technique du scotch, parfaite pour un diagnostic de Pityriasis versicolor, n’est pas


réalisable dans tous les cas (non recommandée sur le cuir chevelu ni sur une région pileuse)

Dans ce cas, le grattage des lésions au vaccinostyle ou à la curette ramène des squames
(signe du copeau) qui sont ensuite examinées au microscope optique entre lame et lamelle
dans un produit éclaircissant: solution de potasse à 30%, ou solution de noir chlorazole
(incluant éclaircissant et colorant).

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Malassezioses

Figure 5. 8 : Prélèvement, technique du Scotch-test (Les mycoses : P.


Bourée, 1991)

Culture
La culture est rarement réalisée en pratique courante car elle n’est pas indispensable
au diagnostic. Elle permet d’identifier l’espèce en cause. La température optimale de
croissance est variable selon les espèces de 30-32°C (pour toutes les espèces) ou 37°C
(pour certaines espèces).
Malassezia sp, (sauf M. pachydermatis lipo-indépendante) ne pousse pas sur les
milieux de Sabouraud habituels. La croissance se fait sur des milieux à base d’huiles
naturelles (espèces lipodépendantes). Pour l’isoler, il faut donc au préalable avoir
suspecté le diagnostic devant une lésion cutanée évocatrice. Le médecin doit alors
préciser sur l’ordonnance : recherche de Malassezia sp.
La culture peut se faire sur des milieux spécifiques pour Malassezia : milieu de
Sabouraud additionné d'huile d'olive, milieu de Dixon ou milieu de Leeming et Notman
modifié qui permettent d’isoler et de maintenir facilement les espèces du genre
Malassezia
Dans les infections systémiques: les hémocultures sur milieu spécifique enrichis en
lipides est nécessaire, elles sont cependant rarement positive. En outre, le retrait du
cathéter souillé et sa mise en culture (un segment du cathéter) sur gélose Sabouraud
additionnée d’huile d’olive ou autres miliaux spécifiques, permettra le diagnostic.

Résultats et interprétation
L’examen est réalisé à l’objectif 20 ou 25, et le diagnostic est porté sur la mise en
évidence : Dans le pityriasis versicolor, d’amas de blastospores rondes ou ovales à
paroi épaisse de 2 à 5 µm de diamètre, disposées en « grappes » associées parfois à
des filaments fins à trapuset courts.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Malassezioses

Figure 5. 9 : Scotch test cutané positif : Spores en « grappe de raisin » (dans le cercle)
Source : K ; Diongue, Laboratoire Parasitologie-Mycologie, CHU Aristide Le Dantec - Dakar

Figure 5. 10 : Examen direct d’un Scotch test sur lésion de pityriasis versicolor :
présence de blastospores en grappes, et de courts filaments mycéliens (tête des
flèches)
Source : K. Diongue, Laboratoire Parasitologie-Mycologie, CHU Aristide Le Dantec - Dakar

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Malassezioses

Dans la dermite séborrhéique et le pityriasis capitis, les Malassezia se présentent sous


forme de levures ovales sans filaments associés.

Dans la folliculite du dos, on observe des manchons de levures rondes, à paroi épaisse
autour des poils (absence de filaments)

Les colonies de Malassezia sp poussent environ en 8 à 15 jours. L’examen


macroscopique de la culture montre, des colonies, blanchâtres à jaunâtres.

Figure 5. 11 : Levures du genre Malassezia sur milieu Sabouraud Chloramphénicol


Additionné d’huile d’olive (source: Unité de Mycologie USS-Gabon, Pr. Nzenze-Afène)

L’examen microscopique révèle des blastospores de petite taille (1,5 à 4µm) ovoïdes,
globuleuses à allongées à bourgeonnement unipolaire sur une base large.
La culture sur milieu de Dixon modifié, à différentes températures, permet par ailleurs
de séparer les espèces Malassezia fufur, M. sympodialis, M. pachydermatis et M.
slooffiae, capables de se développer à des températures élevées (40°C), de M. globosa,
M. obtusa et M. restricta dont l’optimum de température de culture est de 32-35°C.
L’identification en culture est fondée sur la lipodépendance ou non, la morphologie
microscopique des blastospores, l’activité catalasique et le profil d’assimilation du
tween 20, 40, 60, 80 (2008).
Toutes les espèces de Malassezia ne fermentent pas les sucres et sont toutes uréase
positive.

C. Diagnostic histologique
Histologie : les levures du genre Malassezia ont la capacité de coloniser la kératose
actinique et sont donc identifiables sur coupe histologique.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Malassezioses

III. Principes thérapeutiques

A. But
Arrêter la multiplication des levures et faire disparaître les lésions

B. Moyens
Kétoconazole (KETODERM®) 2% gel unidose ; crème ; sachets gel moussant
Bifonazole (AMYCOR®) 1% solution
Ciclopirox olamine (MYCOSTER®) crème ; solution alcoolisée ; shampoing
Sulfure de sélénium (Selsun®)
Amphotéricine B injectable 50mg.

C. Indications - posologie
Le Pityriasis versicolor (P.v)
- Dans les lésions± isolées et peu étendues, le traitement est local par l’application
d’un topique antifongique matin et soir pendant 2 à 4 semaines.
- Dans les lésions squameuses étendues, un décapage local mécanique ? est préconisé
par une solution détergente de type Mercryl® ou Septivon®.
- Le traitement antifongique consiste ensuite en une application sur tout le corps y
compris le cuir chevelu, d’un topique azolé en gel moussant Par exemple :
kétoconazole en topique (Kétoderm®, récipient unidose, gel moussant à 2 %). Une
deuxième application est recommandée une semaine après.
- Un autre des traitements du pityriasis versicolor est le sulfure de sélénium (selsun®):
Après décapage de la peau au mercryl laurylé, on applique le Selsun® sur tout le
corps à l’aide d’un gant de toilette humide. Après avoir laissé en contact 15 à 20 mn,
on rince abondamment. Les applications sont bihebdomadaires pendant 2 à 4
semaines.
- Dans les lésions étendues ou rebelles au traitement local, des azolés actifs par voie
orale tels que l’itraconazole (sporanox®), peuvent être prescrits pendant 15 jours à
raison de 200mg d’Itraconazole par jour, le Fluconazole voire la griséofulvine sont
utilisés par certains auteurs.
- Les autres formes cliniques (la dermite séborrhéique, la folliculite du dos ou du
« décolleté » chez la femme bénéficient d’un traitement par topique antifongique
- Dans le cas de Pityriasis capitis, un shampoing à base de ciclopirox olamine (type
Sebiprox® 1,5% ou ketoderm® sachet gel moussant 2%) sera prescrit x 2 fois par la
semaine (bihebdomadaire) pendant 1 mois (traitement curatif) puis 1 fois par
semaine pendant 2 mois en traitement préventif.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Malassezioses

- Les infections systémiques ou profondes à Malassezia, souvent liées à la présence


d’un cathéter et d’une alimentation parentérale lipidique, le retrait du cathéter peut
faire disparaître la fongémie.
- L’Amphotéricine B par voie intraveineuse sera prescrite en cas de fongémie à
Malassezia à raison de 1mg/Kg/j, pendant 10 jours et le kétoconazole (200 à 400mg
mg/j) pendant 10 jours sont indiqués dans ces formes systémiques.

D. Suivi biologique/ post-thérapeutique


Pour éviter les récidives, il convient de maitriser les facteurs favorisants (sudation,
application de produits cosmétiques gras). Une utilisation de produits corporels
cutanés et capillaires adaptés, c’est-à-dire fonction du type de peau, associée au
traitement antifongique local est nécessaire pour ramener la densité de la levure sur la
peau à la normale

IV. Prévention /Prophylaxie

A. But
Il s’agit d’éviter les facteurs susceptibles de favoriser le développement de Malassezia
sp et d’induire les différentes formes cliniques connues.

B. Moyens/Stratégies
- Le pityriasis versicolor tend à récidiver, surtout l'été. Si l'on a présenté une fois du
pityriasis versicolor, il faut éviter les récidives et appliquer quelques règles d'hygiène
communes à toutes les atteintes mycosiques: porter des sous-vêtements en coton,
les changer fréquemment après transpiration excessive
- Un traitement préventif peut être envisagé chez des patients pour lesquels la récidive
est très fréquente ou l’extension de la maladie importante. Dans ces cas, un
traitement hebdomadaire (sulfure de sélénium) ou mensuel (kétoconazole gel
moussant monodose®) est proposé par certains praticiens qui conseillent sa mise en
œuvre pendant les périodes très chaudes et humides et ce, pendant plusieurs mois
par an.

123
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Malassezioses

Bibliographie:

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125
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

6 PNEUMOCYSTOSE
Rédigé par Pr Dieng Thérèse (Sénégal), Relu par Pr Bamba Sanata (Burkina Faso),
Pr Badiane Aïda Sadikh (Sénégal), Pr Yavo William (Côte d’Ivoire) et Pr Sissinto Savi de
Tové Yolande (Bénin)

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

Introduction
Définition:
La pneumocystose est une mycose profonde se manifestant par une pneumopathie
interstitielle diffuse due à Pneumocystis jirovecii, champignon opportuniste atypique
car non cultivable et insensible aux antifongiques, se développant chez les sujets
immunodéprimés en particulier ceux infectés par le VIH/Sida

Intérêt
Depuis l’avènement de l’infection à VIH/Sida dont elle est une des affections
révélatrices, cette maladie qui n’affectait que les nourrissons prématurés et les
enfants malnutris a connu un regain d’intérêt. C’est une infection classante du stade
Sida. Ainsi en France, en 2013, la pneumocystose représentait la pathologie inaugurale
du Sida la plus fréquente chez les adultes avec 31% des cas (Cazein et al.,2015).
Les trithérapies antirétrovirales et la chimioprophylaxie au cotrimoxazole ont entraîné
une baisse de l’incidence de la pneumocystose chez les sujets VIH positif.
Par ailleurs, elle constitue un risque de complication chez les personnes transplantées,
les sujets atteints de cancers ou d’hémopathie maligne et chez ceux qui sont sous
traitement à effet immunosuppresseur. Du point de vue médical, c’est une affection
redoutable d’évolution mortelle en absence de traitement en particulier chez les sujets
immunodéprimés infectés ou non par le VIH.

Historique
En 1909 : Carlos Chagas observa pour la première fois le micro-organisme dans des
prélèvements pulmonaires de porc l’identifiant à tort comme un trypanosome.
En 1910 : Antonio Carinii fit la même observation dans des poumons de rats.
En 1912 : le couple Delanoë mit en évidence l’agent pathogène dans des rats capturés
à Paris et démontrèrent qu’il s’agissait d’un micro-organisme différent des
trypanosomes. Il le nomma Pneumocystis carinii.
Entre 1945 et 1955 : des pneumopathies interstitielles à plasmocytes ont été décrits
chez des prématurés, des enfants malnutris (orphelinats) et Vanek et Jirovec en
attribuent la responabilité à Pneumocystis carinii
En 1976 : Frenkel émet l’hypothèse de l’existence d’espèces de Pneumocystis
différentes selon l’hôte infecté et propose d’appeler Pneumocystis jirovecii l’espèce
responsable de l’infection humaine.
En 1981 : Augmentation du nombre de cas de pneumocystose corrélé à celui du SIDA
(60 à 80% des patients VIH+).
En 1996 : Diminution des cas de pneumocystose grâce à des prophylaxies efficaces et
les, trithérapies rétrovirales.
En 2001: Reconnaissance à la conférence internationale sur Pneumocystis de
différentes espèces: Pneumocystis sp dont Pneumocystis jirovecii
En 2003: Pneumocystis carinii var hominis devient Pneumocystis jirovecii

127
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

I. Epidémiologie

A. Agent pathogène
Taxonomie
Pneumocystis jirovecci fut classé au départ comme protozoaire du fait de son
impossibilité de cultiver sur les milieux habituels des champignons, son cycle
biologique et sa morphologie comparables à ceux des protozoaires (trophozoïte, pré
kyste et kyste), l’absence d’ergostérol et sa sensibilité aux antiprotozoaires.
L’étude ultra structurale et biochimique de sa paroi (aspect trilamellaire, présence de
chitine et de β-1,3 glucanes) et de ses affinités tinctoriales (imprégnation argentique
selon Gomori Grocott), le séquençage de son ARN 16S ont permis de classer
actuellement P. jiroveccii dans le règne des champignons. Mieux, les données de la
biologie moléculaire suggèrent un lien étroit avec deux levures ascosporée,
Saccharomyces cerevisiae et Schyzosaccharomyces pombe.
Ainsi, le parasite responsable de la pneumocystose appartient :
Règne : FungiI
Phylum : Ascomycotina
Sous-phylum : Taphrinomycotina
Classe : Archiascomycètes
Ordre : Pneumocystidales
Famille : Pneumocystidaceae
Genre : Pneumocystis
Espèce : Pneumocystsis jirovecii (anciennement appelée Pneumocystis carinii, puis
Pneumocystis carinii var hominis).
Pneumocystsis jirovecii est spécifique de l’homme. Il existe d’autres espèces de
Pneumocystis chacune étant inféodée à son hôte définitif.
Ainsi P. carinii est l’agent infectieux spécifique du rat, P. muris de la souris, P. equi du
cheval, P. suis du porc et P. oryctolagi du lapin.

Morphologie
Pneumocystis jirovecii se présente sous 2 formes morphologiques selon son stade de
développement :
- La forme végétative ou trophozoïte ou forme trophique
C’est un élément amiboïde, muni de filopodes qui sont des expansions tubulaires
visibles au microscope électronique servant d’éléments de fixation aux cellules
épithéliales pulmonaires.
Deux aspects évolutifs sont distingués :
- Le petit trophozoïte
Il est arrondi ou ovalaire, mesure 1,5 à 2µm et présente un noyau, une membrane
cytoplasmique mince.

128
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

- Le grand trophozoïte
De forme variable, il mesure 3 à 5µm, et présente une paroi épaisse.

Figure 6. 1 : Trophozoïte de Pneumocystis au


microscope électronique à transmission (Thomas, 2004)

- La forme kystique
Elle se présente sous trois formes morphologiques selon le stade évolutif.
Le prékyste ou sporocyste
Il résulte de la transformation du grand trophozoïte. Il est ovoïde, mesure 3 à 8µm et
présente une paroi épaisse. D’abord mononucléés, les prékystes deviennent multi-
nucléés. Il existe ainsi 3 types de prékystes selon leur nombre de noyaux (1 à 8) et la
structure de leur paroi : les prékystes précoces (1 noyau), les prékystes intermédiaires
(à 2 à 8 noyaux) et les prékystes tardifs (8 noyaux).

Source : http://andryrasamindrakotroka.e-
monsite.com/album/images-selectionnees-parasitologie-
medicale/images-selectionnees-pneumocystis-et-
pneumocystose/

Figure 6. 2 : Prékyste (ou sporocyste) à 6 corps intra-kystiques


de Pneumocystis au microscope électronique à transmission

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

Le kyste mûr ou asque


Il a une paroi épaisse trilamellaire, mesure 6 à 8µm et contient 8 noyaux enveloppés
de cytoplasme appelés corps intra-kystiques correspondant à des ascospores et
disposés en rosace. Il représente la forme infectante probable.

Figure 6. 3 : Kyste mûr ou asque de


Pneumocystis (Aliouat et al., 2009)

Le kyste vide
C’est un élément à paroi épaisse, en forme de soucoupe, cupule ou croissant. Il résulte
de la déhiscence du kyste mûr qui a évacué ses corps intra-kystiques.

Source : Djaballah M : slideplayer.fr/slide/10370028

Figure 6. 4 : Kyste vide de Pneumocystis jiroveccii au microscope


électronique à transmission

Pathogénie
Au cours de son cycle de développement dans l’organisme humain, Pneumocystis
jirovecii exprime une glycoprotéine majeure de surface (major surface glycoprotein ou
MSG). Cette glycoprotéine est immunogène entrainant l’apparition d’anticorps
spécifiques et participe à l’attachement des trophozoïtes dans les cellules épithéliales
alvéolaires. Elle interagit avec le système immunitaire du sujet infecté (macrophages

130
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

alvéolaires, médiateurs de l’immunité humorale, polynucléaires neutrophiles et


lymphocytes TCD4+) qui s’active pour la destruction de l’agent pathogène.
Chez le sujet immunodéprimé, la prolifération du champignon crée une réaction
inflammatoire intense aboutissant à l’épaississement des cloisons alvéolaires
responsable de l’hypoxémie et de l’insuffisance respiratoire observées.

B. Habitat
Pneumocystis jirovecii infecte spécifiquement l’homme. Il est localisé dans les alvéoles
pulmonaires d’abord en position extracellulaire puis en position intracellulaire lorsqu’il
est phagocyté par les macrophages ou les polynucléaires neutrophiles.
Son ADN a été retrouvé dans l’environnement : air, eau, sol, étang.
Il existerait un portage nasal, pharyngé du personnel soignant, le champignon existant
dans l’air hospitalier.

C. Hôte définitif / Réservoir de parasites


L’hôte définitif est l’homme. Le réservoir de parasites est constitué uniquement par
l’homme infesté. La pneumocystose est une anthroponose.

D. Mode de contamination
La contamination s’effectue probablement par voie aérienne par inhalation des spores
libérées par les kystes infectieux contenus dans l’air, les poussières ou dans les
expectorations de sujet infesté. La transmission interhumaine s’effectuerait par
l’intermédiaire des gouttelettes de Pflügger.
Le champignon peut être disséminé dans l’organisme par voie sanguine provoquant
des formes cliniques extra pulmonaires rares.

E. Voie de sortie
Le champignon est éliminé à l’extérieur de l’organisme par les expectorations.

F. Cycle biologique
Il n’est pas encore totalement connu. Il se déroule dans les alvéoles pulmonaires à
l’extérieur des cellules. Les kystes mûrs (forme infectieuses probables) par rupture de
leur paroi libèrent au niveau des bronchioles terminales 8 corps intrakystiques. Ceux-ci
se transforment en trophozoïtes tandis que les kystes vides prennent leur aspect
caractéristique de cupule soucoupe ou croissant. Les petits trophozoïtes se fixent sur
les pneumocytes de type I, augmentent de taille et se multiplient ; la multiplication des

131
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

formes végétatives se produirait selon un mode asexué par division binaire ou selon
un mode sexué par fusion de formes végétatives sexuées complémentaires. Les
grands trophozoïtes se transforment en prékystes en passant par trois stades :
précoce, intermédiaire et tardif présentant progressivement 1 à 8 noyaux. Le prékyste
tardif à 8 noyaux se transforme en kyste mur contenant 8 corps intrakystiques par
condensation cytoplasmique autour de chaque noyau.
Ce cycle dure 4 à 6 heures et toutes les formes évolutives peuvent être retrouvées
dans les prélèvements bronchoalvéolaires. Il ne se déroule complètement que chez le
sujet immunodéprimé. Le sujet immunocompétent qui s’infecte parviendrait à éliminer
le champignon. Chez le sujet sain, en effet, les macrophages, les polynucléaires
neutrophiles ou les médiateurs de l’immunité humorale (tumor necrosis factor a (TNF
a), interférons et cytokines) jouent un rôle important dans la destruction du
champignon et dans la défense de l’hôte. Chez les patients à risque, le développement
fongique entraîne des lésions de l’épithélium alvéolaire dont les cloisons s’épaississent,
conduisant à une insuffisance respiratoire et l’hypoxémie.

Source : CHABASSE D., GUIGEN CI., CONTET-AUDONNEAU N. Mycologie


médicale ; Masson, Paris, 1999,323p

Figure 6. 5 : Cycle biologique de Pneumocystis jirovecii

G. Facteurs favorisants
D’ordre général
C’est la capacité de Pneumocystis jiroveccii à échapper au mécanisme de défense
immunitaire de l’hôte notamment la phagocytose par les macrophages.
D’ordre individuel
C’est le déficit immunitaire concernant notamment l’immunité à médiation cellulaire.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

 d’origine pathologique
- Infection à VIH avec un taux de lymphocytes T CD4 <200/mm³.
- Hémopathies malignes.
- Maladies systémiques (granulomatose de Wegener, périartérite noueuse,
polymyosite, lupus, sclérodermie.
- Malnutrition (nourrisson).
- Prématurés.
- Sujets d’âge avancé.
- Transplantation d’organes.
- Greffe de moelle osseuse
 D’origine iatrogène
- Immunosuppresseurs.
- Cytolytiques.
- Corticoïdes au long cours.

H. Répartition géographique
La pneumocystose est cosmopolite. Avant l’introduction de la trithérapie
antirétrovirale, la pneumocystose était l’infection opportuniste la plus fréquente chez
les sujets immunodéprimés par le VIH dans les pays occidentaux. Depuis les années
2000, son incidence a baissé de 85% depuis l’introduction de la trithérapie
antirétrovirale et de la chimioprophylaxie contre la pneumocystose.
Sa prévalence est sous-estimée en Afrique car cette mycose est rarement
diagnostiquée par défaut de mise en œuvre des moyens d’investigation biologique :
prélèvements invasifs, techniques de colorations spéciales et techniques moléculaires.
Des taux de prévalence de 27,7%, 42,7% ont été rapportés respectivement en Tunisie
et en Ethiopie chez des patients immunodéprimés par le VIH et d’autres causes.
Au Sénégal, le diagnostic biologique a permis d’enregistrer une fréquence hospitalière
de 9% parmi les sujets séropositifs au VIH présentant une pneumopathie. (Dieng Y. et
al., 2016).
En Côte d’Ivoire une étude réalisée par Kouakoussi a signalé une incidence 0,36/100
personnes-mois chez des patients VIH + (Kouakoussi et al., 2004).

II. Diagnostic biologique


Le diagnostic biologique de la pneumocystose est basé essentiellement sur la mise en
évidence des différentes formes morphologiques ou de l’ADN de Pneumocystis jirovecii
dans les prélèvements pathologiques.

133
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

A. Circonstances du diagnostic biologique


 Eléments épidémiologiques
Personnes présentant un terrain d’immunodépression d’origine pathologique ou
iatrogène.
 Signes cliniques évocateurs
- Pneumopathie traînante et rebelle aux antibiotiques se manifestant par une
toux sèche, une fièvre, une dyspnée évoluant vers l’insuffisance respiratoire
aiguë.
- Image radiographique pulmonaire indiquant un infiltrat interstitiel diffus
bilatéral à prédominance hilaire. Si le diagnostic est tardif, l’on observe un
tableau d’insuffisance respiratoire aiguë avec radiographie pulmonaire quasi
opaque en «verre dépoli» ou «poumons blancs». Le pronostic est ici réservé.

 Modifications biologiques non spécifiques


Des perturbations séro :
- hématologiques peuvent être observées :
- Lymphopénie associée à une baisse du taux des lymphocytes T CD4 ;
- Baisse de la saturation en oxygène établie par le dosage des gaz du sang :
hypoxémie grave avec PaO2 < 60 mmHg chez un sujet VIH positif souffrant de
pneumocystose à un stade avancé) ;
- Taux des lacticodeshydrogénases (LDH) souvent élevés ;
- Dans le liquide de lavage broncho-alvéolaire(LBA) rapport polynucléaires
neutrophiles/lymphocytes> 0,5.

B. Diagnostic mycologique
Prélèvements
- Liquide de lavage broncho-alvéolaire
C’est le prélèvement de choix pour le diagnostic de la pneumocystose car il permet
d’obtenir la plus grande quantité d’éléments fongiques. Il est centrifugé à 2000
tours /mn pendant 10 à 15 minutes selon sa consistance, et le culot de centrifugation
est examiné. La cytocentrifugation améliore la visibilité des éléments fongiques.

- Expectoration induite après nébulisation de sérum hypertonique.


Le produit est mélangé à volume égal avec une solution mucolytique, dilué dans du
sérum physiologique puis centrifugé à 2000 tours /mn pendant 10 mn. Le culot de
centrifugation est examiné.
- Biopsie pulmonaire ou biopsie d’autres organes dans les rares formes extra-
pulmonaires

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

Les biopsies sont divisées en 2 parties : une destinée à l’examen mycologique est
conservée dans du sérum physiologique. Des frottis par apposition sont réalisés avant
d’être colorés. L’autre partie destinée à l’examen histologique est fixée dans du liquide
de Bouin.

Techniques
 Examen au microscopique optique
- A l’état frais
Réalisable à partir du LBA ou de l’expectoration induite, il consiste à examiner une
goutte du prélèvement entre lame et lamelle.
- Après coloration
Des frottis sont réalisés à partir des prélèvements et colorés. Il existe plusieurs
techniques de coloration qui mettent en évidence des structures et des formes
évolutives différentes de Pneumocystis jirovecii.
*Colorations mettant en évidence les trophozoïtes et les corps intra-kystiques :
*Coloration de Giemsa ou de May Grunwald Giemsa
*Colorations mettant en évidence la paroi des kystes :
.Coloration de Gomori-Grocott modifiée (ou coloration de Mutso) technique
d’imprégnation argentique rapide ;
.Coloration au bleu de toluidine O (BTO).

Coloration mettant en évidence la paroi et le contenu des kystes :


Coloration de Gram –Weigert.
Pour un meilleur rendement, il faut associer une technique de coloration des
trophozoïtes à une technique mettant en évidence la paroi des kystes.

 Examen au microscopique à fluorescence


Il permet de mettre en évidence par immuno-marquage dans le LBA :
- les trophozoïtes et les kystes de P. jirovecii au moyen d’une technique
d’immunofluorescence utilisant des anticorps monoclonaux spécifiques marqués
par des fluorochromes ;
- uniquement les kystes de P. jirovecii par une technique d’immunofluorescence
indirecte utilisant un anticorps monoclonal spécifique et une antiglobuline
humaine conjuguée à un fluorochrome.
Il existe des kits commercialisés pour la réalisation de ces tests qui sont rapides,
sensibles mais coûteux. Leur utilisation est indiquée lorsque la demande est
importante et régulière.

135
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

Résultats
 Examen au microscope optique
- Examen à l’état frais
Au faible grossissement (objectif 10), les trophozoïtes apparaissent collés les uns aux
autres formant des amas spumeux très réfringents caractéristiques. A l’objectif à
l’immersion, les kystes sont repérables par leurs corps-intrakystiques très réfringents.

Figure 6. 6 : Amas de trophozoites de P. jirovecii dans un LBA à


l’examen à l’état frais. (Deluol et al., 2004)

Figure 6. 7 : Kystes de P. jiroveccii dans un LBA : examen à l’état


frais. Deluol et al., 2004

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

- Examen après coloration


*Coloration de Giemsa ou de May Grünwald Giemsa
Pneumocystis jirovecii apparait au faible grossissement sous forme d’amas spumeux. A
un plus fort grossissement, le noyau des trophozoïtes est coloré en rouge et leur
cytoplasme en bleu violacé. Au sein de cet amas spumeux se détachent les corps-intra-
kystiques colorés en rose-violet. La paroi des kystes n’est pas colorée, elle apparait en
négatif sous forme d’un halo clair.

Source : commons.wikimedia.org

Figure 6. 8 : Coloration au Giemsa de Pneumocystis jirovecii d’un


LBA

*Coloration de Grocott modifiée (ou coloration de Mutso)


Réalisable en 10 minutes, elle colore la paroi des kystes de P. jirovecii en noir sur le
fond vert de la préparation. Cependant, elle colore également en noir les levures
éventuellement présentes dans le prélèvement.

S
o
u
r
c
e

fr.wikipedia.org
Figure 6. 9 : Coloration de Mutso de Pneumocystis
jirovecii

137
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

La paroi des kystes est colorée en bleu ou violet pourpre sur le fond bleu de la
préparation. C’est une technique peu coûteuse mais qui a l’inconvénient de colorer
également la paroi des levures.

Source : fr.wikipedia.org

Figure 6. 10 : Coloration au bleu de toluidine O de Pnemocystis


jirovecii

*Coloration de Gram-Weigert
La paroi des kystes et les corps intra-kystiques sont colorés en noir sur le fond rouge de
la préparation.

 Examen au microscope à fluorescence


Les kystes visualisés par leur fixation directe aux anticorps monoclonaux marqués à un
fluorochrome ou par l’intermédiaire d’une anti-globuline humaine conjuguée à un
composé fluorescent, apparaissent sous forme arrondies, vert-fluorescents

Source : CDC : https://www.cdc.gov/dpdx/pneumocystis/index.html


Figure 6. 11 : Kystes de Pneumocystis jirovecii visualisés par
immunofluorescence directe

138
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

C. Diagnostic immunologique
Recherche des anticorps sériques
Elle a un intérêt épidémiologique chez les sujets immunocompétents. La présence des
anticorps spécifiques est le témoin d’un contage avec le champignon et est sans valeur
diagnostique. Les techniques utilisées sont l’immunodosage enzymatique,
l’immunofluorescence indirecte et l’immunoempreinte (Western blot)
Recherche de l’antigène circulant ß (1,3) -D-glucane
La présence dans le plasma de ce constituant de la paroi cellulaire de la plupart des
champignons pathogènes dont P. jiroovecii signe une infection fongique invasive. Il
existe des kits commercialisés pour le dosage plasmatique par colorimétrie de cet
antigène. Cette recherche n’est pas spécifique au diagnostic de la pneumocystose.
L’interprétation du résultat doit tenir compte de la clinique de la radiographie
pulmonaire et de la présence de facteurs de risque du patient.

D. Diagnostic histologique
Les prélèvements sont des biopsies pulmonaires ou d’autres organes dans les formes
extra-pulmonaires. Les techniques de colorations histologiques, coloration à l’acide
périodique de Schiff (PAS), Gomori-Grocott et Hématoxyline Eosine Safran (HES)
mettent en évidence des lésions histologiques caractéristiques au sein desquelles la
paroi des kystes ou les corps intra-kystiques peuvent être visualisés.
- Au début de l’infection, on observe des lésions d’exsudat alvéolaire en nid
d’abeille dans la lumière alvéolaire.
- A la phase d’état, on note un infiltrat lympho-plasmocytaire dans les cloisons
intra –alvéolaires.
- Au stade ultime de la pneumocystose, une alvéolite macrophagique est
présente.

Source : https://library.med.utah.edu/WebPath/INFEHTML/INFEC003.html
Figure 6. 12 : Biopsie pulmonaire montrant des infiltrats alvéolaires au
cours d’une pneumocystose

139
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

E. Diagnostic moléculaire
Il est basé sur la détection de l’ADN de Pneumocystis jirovecii dans différents produits
pathologiques : LBA, expectoration induite, lavage oropharyngé, par les techniques
d’amplification génique : PCR conventionnelle et PCR en temps réel plus spécifique.
Initialement, l’amorce utilisée était une séquence d’ARNr du gène 5S mitochondrial de
Pneumocystis jirovecii. (Wakefield AE et al., 1991). Au fur et à mesure de la
connaissance du génome du champignon, différentes séquences de gènes ont été
amplifiées : l’ITS de l’ADN ribosomique, la glycoprotéine majeure de surface (MSG), la
sous-unité mitochondriale mtrRNA (Yang Lu et al., 2011).
Ces techniques moléculaires sont plus sensibles que les techniques microscopiques
mais posent un problème d’interprétation car il existe des porteurs sains.
En cas de test positif, il faut différencier la colonisation de l’infection, en quantifiant la
charge infectieuse par une PCR quantitative en temps réel. De plus, le test reste positif
quelques jours à quelques semaines après traitement. La détection de l’ARN
spécifique par une RT-PCR serait une alternative pour diagnostiquer l’infection.
Par contre, la PCR a une très forte valeur prédictive négative.

III. Principes thérapeutiques

A. Buts
Le traitement est instauré pour :
- Eliminer le champignon de l’organisme du sujet parasité ;
- Obtenir la disparition des manifestations cliniques de la pneumocystose.

B. Moyens
Le traitement est à base d’antibiotiques ou de molécules antiparasitaires.
• Cotrimoxazole : association Triméthoprime (TMP)-Sulfaméthoxazole(SMZ)
Présenté en comprimés sous 2 dosages : TMP 80mg-SMZ 400mg et TMP 160mg-SMZ
800mg, et en ampoules pour administration par voie intraveineuse.
Effets secondaires: éruption cutanée, fièvre, leucopénie, anémie, thrombopénie,
élévation des transaminases.
• Iséthionate de pentamidine : poudre à 300mg à dissoudre dans 10ml d’eau
distillée, pour administration par voie intraveineuse, ou aérosol
Effets secondaires: insuffisance rénale, hypotension orthostatique, hyperglycémie,
troubles du rythme cardiaque, pancréatite, hypercalcémie, hyperkaliémie, goût
métallique.
- Atovaquone suspension orale.

140
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

- Association Clindamycine – Primaquine.


- Dapsone susp.orale + Triméthoprime.
- Trimétrexate par voie intraveineuse

C. Indications/posologie
Traitement d’attaque
Il dure 3 semaines.
a) En première intention
Cotrimoxazole : TMP 15mg/kg/j –SMZ 75mg/kg/j sans dépasser 6 comprimés dosés à
160/800mg par jour ou 12 ampoules par jour.
b) En deuxième intention, il existe plusieurs alternatives :
- Iséthionate de pentamidine : 3 à 4mg/kg/j en IV ou 300mg/j en aérosol
- Atovaquone : 750mg x 2/j
- Clindamycine 1800mg/j en 3 prises associé à la Primaquine 30mg/j en une prise
- Dapsone 100mg /j associé à la Triméthoprime 20mg/Kg/j
- Trimétrexate IV 45mg/m² associé à de l’acide folinique 20mg/m² toutes les 6
heures, dans les formes sévères.

Traitement d’entretien
Indispensable tant que le taux des T CD4 est inférieur à 200/mm³.
Il doit être arrêté quand le taux des T CD4 devient supérieur à 200/mm³ et la charge
virale VIH inférieure à 1000 copies/ml.
a) En première intention
Cotrimoxazole : 1 comp dosé à 80/400mg par jour ou 1 comp dosé à 160/800mg 3 fois
par semaine.
b) En deuxième intention
Plusieurs alternatives :
- Pentamidine aérosol : 4mg/kg/semaine ;
- Atovaquone : 750mgx2/j ;
- Dapsone : 100 mg/j.

Traitements adjuvants
a) Corticothérapie par voie orale
Elle est recommandée chez les patients VIH+ présentant une pneumocystose
pulmonaire hypoxémiante avec une PaO2 inférieure à 70mmHg en air ambiant. Elle
consiste à la prise de prednisolone à raison de 240mg/j pendant les 3 premiers jours
puis à dose décroissante.
b) Traitement antirétroviral chez les sujets VIH+ pour restaurer l’immunité
Il doit être instauré 2 à 3 semaines après le début du traitement spécifique de la
pneumocystose, pour éviter le risque de survenue du syndrome de restauration
immunitaire.

141
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

IV. Prophylaxie

A. Buts
La prophylaxie de la pneumocystose est instaurée pour :
- Prévenir le développement de la pneumocystose chez des sujets à risque :
infection à VIH avec un taux de CD4 inférieur à 200/mm³, chimiothérapie
anticancéreuse en cours, corticothérapie prolongée, transplantation d’organe et
en cas de greffe de moelle osseuse. C’est l’objectif de la prophylaxie primaire ;
- Eviter une rechute de pneumocystose : c’est la prophylaxie secondaire.

B. Moyens
Que ce soit en prophylaxie primaire ou en prophylaxie secondaire, le protocole
thérapeutique est analogue au traitement d’entretien. La molécule de première
intention est le cotrimoxazole, et l’alternative la plus efficace est l’atovaquone. Cette
chimioprohylaxie doit être interrompue lorsque le taux des lymphocytes CD 4 devient
supérieur à 200/mm³ pendant 6 mois.

Conclusion
La pneumocystose est une mycose opportuniste au cours de l’infection à VIH/SIDA et
survenant aussi chez des sujets immunodéprimés par d’autres causes. Le diagnostic
biologique de certitude nécessite d’avoir des plateaux techniques conséquemment
équipés permettant d’effectuer des prélèvements adéquats et d’utiliser des
techniques de biologie moléculaire qui améliorent la sensibilité du diagnostic. Le
traitement actuel à base d’antibiotiques ou d’antiparasitaires devrait bénéficier de
l’apport des échinoocandines dont des études cliniques ont montré l’action curative
chez des sujets immunodéprimés.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Pneumocystose

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143
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Microsporidioses

7 MICROSPORIDIOSES
Rédigé par Pr Thera Mahamadou Ali (Mali), Relu par Pr Dieng Thérèse (Sénégal), Pr Ndiaye
Jean Louis Abdourahim (Sénégal), Pr Traoré Boubacar (Mali) et Pr Kassi Fulgence
(Côte d’Ivoire)

144
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Microsporidioses

Introduction
Les microsporidioses sont des affections dues à des parasites intracellulaires des
cellules muqueuses, ayant un comportement opportuniste chez le sujet
immunodéprimé provoquant le plus souvent une diarrhée sévère avec amaigrissement
important. Elles font parties des infections parasitaires opportunistes du SIDA.

Sur le plan historique, les agents pathogènes des microsporidioses sont de découverte
récente. Cela explique qu’il existe encore des zones d’ombre dans leur biologie et leur
épidémiologie. Au XIXème, l’industrie de la soie des pays méditerranéens fut frappée
par une maladie du ver à soie, entrainant la ruine de cette industrie. Les efforts pour
en comprendre la cause ont identifié une affection parasitaire, la pébrine et les
microsporidies, comme agents pathogènes de la pébrine. Le premier cas humain a été
décrit par Torrès au Brésil seulement en 1927. La relation microsporidiose et SIDA est
établie par Desportes-Livage avec la description d’Enterocytozon bieneusi en 1985. En
1991, c'est au tour d’Encephalitozoon (Septata) hellem et, en 1993, une troisième
espèce pathogène pour l’homme est isolée, Encephalitozoon intestinalis.

L’étude des microsporidioses revêt un double intérêt épidémiologique et médical.


Sur le plan épidémiologique, il s’agit d’affections fréquentes, dont la prévalence au
cours du VIH est de 5-35% selon les pays et les méthodes de mise en évidence. La
fréquence et la généralisation de l’utilisation des médicaments anti rétro viraux (ARV)
a entrainé une diminution de la fréquence des microsporidioses. En Afrique, la
prévalence des microsporidioses était de 32% au cours SIDA, avant l’introduction des
ARV. Le spectre d’hôtes des microsporidies est large : de nombreuses espèces ont été
décrites mais seulement deux ont une importance en Santé publique pour l’homme.
Les microsporidioses sont responsables d’une forte létalité. Elles font partie des
maladies parasitaires du péril fécal.
Sur le plan médical, le portage asymptomatique est fréquent. La microsporidiose est
une affection classante du SIDA au stade C3, si la durée de la diarrhée est supérieure à
un mois. L’identification de l’agent pathogène permet l’instauration d’un traitement
approprié à l’espèce en cause.
Au niveau de la pathogénie, les microsporidies intracellulaires se multiplient et
entrainent la lyse des entérocytes avec une atrophie des villosités, une destruction de
la bordure en brosse avec infiltrat lymphocytaire de la sous-muqueuse. Cela provoque
des troubles électrolytiques, une stéatorrhée et une malabsorption chez les sujets
atteints. La dissémination par voie hématogène est observée dans l’infection à E.
intestinalis avec atteinte rénale et pulmonaire.

145
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Microsporidioses

I. Épidémiologie

A. Agent pathogène

1. Taxonomie
Autrefois classées parmi les protozoaires, suite à la compréhension de leur biologie et
grâce à la biologie moléculaire, les microsporidies ont été reclassées parmi les
champignons (Mucoromycotina).
Ce sont des eucaryotes parasites intracellulaires obligatoires appartenant au règne des
Mycètes, au phylum Microspora, à la classe Microsporea, à l'ordre Microsporida, à la
famille Microsporidae. Plus de 144 genres et plus de 1200 espèces ont été décrits. Huit
genres ont été décrits chez l’homme : Brachiola, Microsporidium, Nosema,
Pleistophora, Trachipleistophora, Vittaforma, Enterocytozoon et Encephalitozoon. Les
deux derniers genres sont les principaux responsables de la pathologie humaine. Les
espèces en cause sont: Enterocytozoon bieneusi, Encephalitozoon (Septata)
intestinalis, Encephalitozoon hellem et Encephalitozoon cuniculi. Parmi ces espèces, E.
bieneusi et E. intestinalis provoquent la plus grande morbidité liée aux
microsporidioses. Enterocytozoon bieneusi parasite les cellules de la muqueuse de
l’intestin grêle (entérocytes) et des voies biliaires. Elle est fréquemment rencontrée.
Encephalitozoon intestinalis parasite les cellules de la muqueuse de l’intestin grêle
mais aussi des voies urinaires et aériennes supérieures.

2. Morphologie
Les stades parasitaires décrits sont : la spore, le méronte, le sporonte, le sporoblaste.
La spore est la forme infectante, de résistance et de dissémination du parasite. La
spore permet le diagnostic. Son contenu est compact, et sa paroi épaisse est riche en
chitine.
- E. bieneusi : spore oviforme, mesure 1,3µ sur 0,7 µ.
- E. intestinalis : spore piriforme, mesure 1,7µ sur 1-1,1µ,
La spore contient un tube polaire enroulé en spirale dans sa partie postérieure autour
d’un noyau et une vacuole postérieure.
Les microsporidies sont des parasites de très petite taille, et leur découverte
relativement récente fait que leur biologie et leur épidémiologie ne sont pas encore
complètement élucidées. Leur mise en évidence dépend de la sensibilité des moyens
mis en œuvre pour les détecter.

146
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Microsporidioses

Figure 7. 1 : Représentation schématique de la spore


microsporidienne (Isabelle Desportes)

3. Biologie
Les microsporidies sont des eucaryotes dépourvus de mitochondries. Elles puisent
donc leur énergie dans les cellules parasitées, d’où la localisation intracellulaire
obligatoire afin d’utiliser les mitochondries des cellules-hôtes.
Leur développement se fait en deux étapes : la schizogonie et la sporogonie.
La spore est la forme de résistance et de dissémination du champignon.

4. Pathogénie
La pathogénie des microsporidies reste mal connue. L’envahissement des entérocytes
par les microsporidies à tropisme digestif (E. bieneusi et E. intestinalis) conduit à des
troubles hydroélectrolytiques, une stéatorrhée (diarrhée graisseuse), un syndrome de
malabsorption et des lésions importantes de l’épithélium digestif. Avec E. intestinalis,
une dissémination hématogène avec atteinte rénale et pulmonaire peut être obsevée.

B. Hôtes et Réservoir de parasites


Le spectre d’hôte des microsporidies est large.
Pour E. bieneusi, il s’agit de l’Homme qui est le principal hôte définitif (HD) et le
réservoir de parasites (RP). Les animaux domestiques (lapin, cochon, chien, chat, veau)
et les animaux sauvages (singe) sont aussi des RP. Un réservoir hydrique est possible.
Pour E. intestinalis, il s’agit de plusieurs animaux domestiques (âne, vache, chèvre,
cochon, chien) chez lesquels le parasite a été mis en évidence.

147
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Microsporidioses

C. Habitat
Enterocytozoon bieneusi infecte principalement les cellules épithéliales entérocytaires
de l'intestin grêle et les cellules de la muqueuse du tractus biliaire des patients atteints
de Sida.
Encephalitozoon intestinalis infecte d’abord les entérocytes de l'intestin grêle puis
dissémine par voie hématogène ou lymphatique et infecte les cellules des muqueuses
nasale, sinusale et l’arbre urinaire, même s'il peut, comme tout Encephalitozoon, se
disséminer dans tout l'organisme. Il est retrouvé aussi dans les neutrophiles et les
macrophages.

D. Mode de contamination
La forme infectante du parasite est la spore. La voie de contamination de l’hôte est la
voie orale par ingestion des spores directement par les mains sales ou indirectement
par les aliments souillés ou l’eau contaminée du fait du péril fécal. Une possibilité de
contamination directe interhumaine existe. L’élimination des spores par les selles fait
de la microsporidiose une maladie liée au péril fécal. Une élimination urinaire est
décrite

E. Cycle biologique
Le cycle est monoxène. Il se déroule chez un seul hôte. Au niveau du tube digestif, les
spores ingérées envahissent les entérocytes et se multiplient à l’intérieur. Cette phase
se déroule en 3 étapes :

Une étape infectieuse qui consiste en une opération missile avec propulsion du
contenu de la spore dans la cellule-hôte, par détente de la vacuole postérieure et
extrusion du tube polaire dans la cellule-hôte : le contenu sporal est injecté à la
manière d’une seringue dans la cellule cible.
Une étape de multiplication schizogonique ou mérogonie, qui débute après
l'inoculation du stade infectant, le sporoplasme issu de la spore. La multiplication
binaire intracellulaire aboutit à la formation d'un schizonte mérogonique ou méronte.
Une étape de sporulation ou sporogonie, qui est en fait l'évolution des schizontes en
sporontes. Ces sporontes subissent des remaniements cytologiques pour constituer
des sporoblastes, puis des spores qui sont libérées dans la lumière intestinale après la
lyse de la cellule-hôte. Les spores sont éliminées dans le milieu extérieur avec les fèces.
Dans la même cellule-hôte, les différentes phases de multiplication et de sporulation
coexistent en même temps.
Dans le cas d’Enterocytozoon bieneusi : la mérogonie et la sporogonie se produisent
directement dans le cytoplasme de la cellule-hôte.

148
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Microsporidioses

Dans le cas d’Encephalitozoon intestinalis : la mérogonie et la sporogonie se produisent


dans une vacuole parasitophore.

Figure 7. 2 : Cycle biologique des microsporidies


(Source CDC, Alexander J. da Silva, Melanie Moser, 2002).

F. Facteurs favorisants
Le cycle est favorisé par l’immunodépression due au SIDA si le nombre de lymphocytes
T CD4+ est inférieur à 50/mm3. D’autres circonstances entrainant une
immunodépression sont aussi des facteurs favorisants, par exemple
l’immunodépression iatrogène pour une greffe de moelle, ou une transplantation
d’organe, celle due au traitement d’un cancer. La malnutrition et l’hygiène déficiente
favorisant le péril fécal sont des facteurs favorisants. Il a été rapporté aussi une
susceptibilité plus grande des enfants et des voyageurs, même s’ils sont
immunocompétents, à l’occasion des épisodes de diarrhées des voyageurs « tourista ».

G. Répartition géographique
Elle très mal connue et dépend des moyens mis en œuvre pour mettre les spores en
évidence. Les microsporidies sont cosmopolites. Il existe un réseau international
d’étude des microsporidies qui applique l’outil moléculaire pour caractériser
l’épidémiologie des microsporidies.
Le consortium du Génome des Microsporidies, basé au niveau de l’Institut Broad, a
entrepris un effort de séquençage du génome des microsporidies.
(http://www.broadinstitute.org/annotation/genome/microsporidia_comparative/Mult
iHome.html)

149
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Microsporidioses

II. Diagnostic biologique

A. Circonstances du diagnostic biologique


Les circonstances cliniques qui peuvent amener à poser le diagnostic biologique d’une
microsporidiose dépendent du statut d’immunodépression du sujet.
Chez le sujet immunocompétent, la découverte est souvent fortuite, chez un enfant ou
un touriste ne présentant aucun symptôme ou parfois avec un météorisme abdominal.
Chez le sujet immunodéprimé, on peut rencontrer des signes digestifs ou
extradigestifs. Chez le sujet VIH+ avec une forte immunodépression, il s’agira d’une
diarrhée chronique, faite de 3-12 selles par jour, aqueuses, non sanglantes, non
glaireuses, avec nausées, vomissements, anorexie, déshydratation ; puis on observera
un amaigrissement avec une cachexie prononcée. Si l’immunodépression est moins
marquée, avec le nombre des cellules T CD4+ supérieur à 200/mm 3, alors la diarrhée
sera plus ou moins importante. Les signes extra digestifs comprennent une atteinte
des yeux (kerato-conjonctivites) ; des voies biliaires (sous forme de douleurs évoquant
une cholangite) ; des sinus (sinusite) et des poumons (bronchite).

B. Diagnostic mycologique
Le diagnostic de certitude de la microsporidiose est mycologique. Il consiste à mettre
en évidence les spores dans les prélèvements de produits pathologiques.
Le plus souvent, on fera un prélèvement de selles diarrhéiques. On peut également
examiner les urines, le jetage nasal, le liquide de ponction sinusale ou du lavage
broncho-alvéolaire, les biopsies d’organes (intestin, foie, pancréas, poumon, rein et
cerveau).
Les différentes techniques mises en œuvre, se basent sur la coloration des spores par
des colorants spécifiques qui se fixent sur la chitine de la paroi. Les prélèvements sont
enrichis selon la méthode de concentration de Ritchie. Un frottis réalisé à partir du
culot du Ritchie est coloré soit par la technique de l’Uvitex 2B, soit par la coloration
trichromique de Weber. Le fluorochrome Uvitex 2B utilise un dérivé du stilbène qui
colore la chitine en bleu brillant très prononcé à la périphérie.
La coloration trichromique de Weber utilise le chromotrope 2R qui colore la chitine en
rose brillant. L’intérêt de l’Uvitex 2B est sa sensibilité plus grande, mais il est peu
spécifique. Cette technique est utilisée seulement pour le dépistage. L’intérêt de la
technique de Weber réside dans le fait qu’elle constitue la technique parasitologique
de référence. Elle est plus spécifique. La lecture est cependant longue et difficile,
exigeant un laboratoire spécialisé et des lecteurs chevronnés. Sur le plan des résultats,
l’Uvitex 2B montre les spores colorées en bleu sur fond noir, et le Weber les montrent

150
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Microsporidioses

colorées en rose inhomogène (aspect de T à l’intérieur de la spore) sur fond vert. Le


diagnostic parasitologique ne permet pas de différencier les espèces.

C. Diagnostic immunologique spécifique


Le diagnostic immunologique spécifique permet de distinguer les espèces. La
technique de l’Immunofluorescence directe est appliquée. Elle utilise les anticorps
monoclonaux spécifiques des espèces E. bieneusi et E. intestinalis. Le culot de Ritchie
est étalé sur des spots auquel on ajoute l’anticorps monoclonal associé à un conjugué
fluorescent. L’IgG2a est utilisé pour Enterocytozoon bieneusi, et l’IgG1 est utilisé pour
Encephalitozoon intestinalis. La technique est facile, sensible, spécifique et permet un
diagnostic d’espèce rapide.
La sérologie applique les techniques de l’ELISA, de l’IFI ou le Western Blot : elle permet
la mise en évidence des anticorps circulants. La sérologie est utilisée au cours des
enquêtes séro-épidémiologiques et n’a pas d’intérêt pour le diagnostic.

D. Diagnostic moléculaire
Les amorces spécifiques d’espèces sont utilisées par PCR pour l’amplification génique
de l’ARN ribosomal à l’aide d’amorce spécifique d’espèce. Très sensible et très
spécifique, cette technique permet l’indentification de l’espèce et est aussi appliquée
dans le cadre du réseau international Microsopridioses pour mieux comprendre la
biologie des microsporidies.

E. Diagnostic histologique
Elle occupe une place importante surtout si l’examen parasitologique des selles revient
négatif. L’examen histologique étudie les aspects physiopathologiques et les
modifications architecturales de la muqueuse intestinale. Elle est effectuée sur les
biopsies duodénales, jéjunales et iléales obtenues par fibroscopie. La coloration est
faite au Giemsa, au bleu de toluidine O, au Gram modifié ou au trichrome.
Les parasites sont facilement reconnaissables par leur localisation caractéristique à
l’intérieur des entérocytes, en position supra-nucléaire.

F. Microscopie électronique
C’est la méthode de référence. L’examen en microscopie électronique des tissus
permet le diagnostic et l’identification de l’espèce en cause.

151
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Microsporidioses

III. Principes thérapeutiques

A. But
Le but visé est d’interrompre l’élimination des spores et améliorer l’état clinique du
patient.

B. Moyens
Les moyens sont médicaux spécifiques et généraux. Les moyens médicaux spécifiques
sont les médicaments tels que l’albendazole, la fumagilline, la nitazoxanide et les
dérivés TNP-470. Les moyens généraux consistent à assurer la prise en charge de
l’infection à VIH par les antirétroviraux (ARV).

C. Indications/posologies
Les moyens médicaux sont indiqués comme suit :
- Pour la prise en charge d’une infection à E. bieneusi, la fumagilline à 60mg par
jour est recommandée pendant 14 jours. Très efficace, cette molécule entraine
une thrombopénie et coûte cher. Ensuite, la nitazoxanide (Cryptaz®) est aussi
efficace à la dose de 1g, 2 fois par jour, pendant 60 jours consécutifs. Enfin le
dérivé TNP-470, est un analogue à la fumagilline, tout aussi efficace et moins
toxique qui représente une bonne alternative ;
- Pour la prise en charge d’une infection à E. intestinalis, l’albendazole à la dose de
400mg, 2 fois par jour pendant 21 jours constitue l’approche la plus efficace, et
qui est aussi bien tolérée.
Ces traitements améliorent le pronostic de l’infection microsporidienne. Toutefois,
aucun traitement à ce jour ne permet une guérison parasitologique complète. Les
rechutes sont fréquentes. Seule la restauration immunitaire par les ARV permet de les
diminuer.

D. Suivi biologique/post-thérapeutique
En cas de traitement par la fumagilline, une surveillance hématologique
(hémogramme) et biochimique (créatininémie, transaminénie, lipasémie,
bilirubinémie) sont necessaires.

152
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Microsporidioses

IV. Prévention

A. But
Le but de la prévention est de rompre la chaîne épidémiologique de transmission.

B. Moyens/stratégies
Pour cela, il faut appliquer les règles strictes individuelles et collectives de lutte contre
le péril fécal. En particulier, il faut adopter les règles hygiéno-diététiques qui visent à
limiter le risque de contamination interhumaine ou celui de la contamination par des
aliments pouvant faire l’objet d’une contamination fécale. Quelques exemples sont la
mise à disposition d’eau potable, la protection du réseau hydrique, les mesures
individuelles tel le lavage systématique des mains.

Résumé
Les microsporidioses sont des affections mycologiques opportunistes du SIDA. Deux
espèces sont les plus fréquentes en pathologie humaine : E. bieneusi et E. intestinalis.
Elles provoquent chez l’immunodéprimé une diarrhée chronique avec cachexie. Le
diagnostic est mycologique et immunologique et requiert des laboratoires spécialisés.
Il existe des traitements dont l’efficacité reste limitée. La thérapie antirétrovirale reste
indispensable.

Conclusion
Les microsporidioses sont des affections fréquentes chez le sujet VIH+ fortement
immunodéprimé. Leur localisation la plus fréquente est intestinale. Du fait de
l’environnement particulièrement propice en Afrique (péril fécal) à leur transmission,
leur diagnostic doit être évoqué dans tous les cas de diarrhée prolongée avec
amaigrissement. La prévention passe par l’adoption des règles hygiéno-diététiques.

153
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Microsporidioses

Bibliographie
1- http://www.mnhn.fr/mnhn/bpph/zdoc/Evolution2001/Desportes/Desportes.htm
2- http://www.md.ucl.ac.be/loumed/CD/DATA/118/446-456.PDF
3- Parasitologie Mycologie médicale, Anofel, 7 ème éd. Angers
4- Epidémiologie des maladies parasitaires, 3, Opportunistes, Coord. Christian Ripert,
Ed. Médicale Internationale (EM Inter)
5- http://www.infectiologie.org.tn/pdf/cmi/05032010/microspidines_digestives.pd
6- I. Maiga, O. Doumbo, M. Dembele, H. Et al Microsporidiose intestinale humaine à
Bamako (Mali) : présence d’Enterocytozoon bieneusi chez les patients séropositifs pour
le VIH. Cahiers d'études et de recherches francophones / Santé. 1997 ; 7 (4) :257-0.

154
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

8 MYCETOMES
Rédigé par Pr Ndiaye Daouda (Sénégal), Relu par Pr Menan Hervé (Côte d’Ivoire),
Pr Thera Mahamadou (Mali) et Pr Doumbo Niaré Safiatou (Mali)

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

Introduction
Les mycétomes se définissent comme « tout processus pathologique au cours duquel
des agents fongiques ou actinomycosiques d’origine exogène produisent des grains
parasitaires » [1].

D’autres définitions introduisent un aspect clinique : « pseudotumeur inflammatoire


polyfistulisée dont les champignons de forme filamenteuse sont rassemblés avec les
tissus nécrosés dans des grains ». Ces dernières sont insuffisantes, car elles n’incluent
pas les formes pseudokystiques non fistulisées des mycétomes. La définition de
Barquisimento permet d’inclure tous les aspects de la maladie. Les agents étiologiques
sont soit des champignons (mycétomes fongiques ou eumycétomes), soit des
actinomycètes (actinomycétomes) qui sont des bactéries. Ils vivent en saprophytes
dans le milieu extérieur et sont introduits à la suite de microtraumatismes. Le terme «
exogène » permet d’exclure l’actinomycose vraie, où les germes comme Actinomyces
israelii sont d’origine endogène. Les grains, enfin, font partie de la définition. Ils sont
constitués de filaments enchevêtrés, de morphologie complexe ; ils résultent d’une
interaction hôte-parasite.
Les mycétomes ont de nombreuses conséquences médicales, sanitaires
socioéconomiques négatives pour les patients, les communautés et les autorités
sanitaires. On ne dispose pas de données précises sur son incidence et sa prévalence.
On ignore la charge mondiale de morbidité, mais une enquête en 2013 a indiqué un
total de 8763 cas. C’est pourquoi en 2016, l’OMS a reconnu les mycétomes comme
étant une maladie tropicale négligée.
Le diagnostic biologique est parfois difficile, les actinomycétomes doivent être
distingués des mycétomes fongiques (eumycétomes) en raison de leurs traitements
radicalement différents.
Sur le plan historique, Gill décrit la tumeur à Madura (Inde) en 1842. Collebrook en
1846 lui donna le nom de « pied de Madura » qui est encore utilisé de nos jours. Van
Dyke Carter en 1860 créa le terme de mycétome et démontra une étiologie fongique.
Des cas furent ensuite décrits sur d’autres continents : Mac Questin aux États-Unis fit
état de trois cas mexicains en 1873 ; Le Dantec décrivit le premier cas africain au
Sénégal en 1894. Il soupçonna l’importance du climat dans la répartition de la maladie
[3]. Une étude faite au Sénégal en 2011 a montré que les agents étaient fongiques
dans 70,3%. Madurella mycetomatis et Actinomadura pelletieri étaient les principaux
agents identifiés. Les mycétomes à grains noirs ont été plutôt retrouvés dans le Nord
du pays tandis que les grains rouges étaient localisés au centre du pays [2].

156
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

I. Épidémiologie

A. Agent pathogène
TAXONOMIE

Les agents étiologiques des mycétomes sont nombreux. Welsh en 2007 répertoriait 13
espèces d’actinomycètes impliquées contre 29 fongiques [3]. Certaines espèces citées
avaient été récemment décrites comme Nocardia mexicana identifiée en 2004[4].
L’identification des espèces repose sur l’aspect histologique des grains et les données
des cultures. Elle a été récemment renforcée par l’apport de la biologie moléculaire.
Grâce à la biologie moléculaire, la taxonomie des champignons à l’origine de
mycétomes est en train d’être notablement modifiée [5,6]. A partir des séquences des
gènes codant pour les ARN ribosomaux, Madurella mycetomatis a été repositionnée
dans l’ordre des ascomycètes. Madurella grisea, espèce supposée jusqu’ici proche de
la précédente a été montrée comme appartenant en fait à l’ordre des pleosporales. À
partir de cultures identifiées initialement comme M. grisea par des méthodes
classiques, quatre groupes génétiques distincts ont été mis en évidence. Leptospheria
senegalensis et Leptospheria tompkinsii sont nommés respectivement Falciformispora
senegalensis, Falciformispora tompkinsi [7].

La révision de la taxonomie concerne également les actinomycètes. L’étude en biologie


moléculaire de 9 souches cataloguées comme Streptomyces somaliensis par les
méthodes d’identification classiques a permis de distinguer une nouvelle espèce
nommée Streptomyces sudanensis[8]. Il faut néanmoins garder à l’esprit que, suivant
les régions d’endémie, une à quatre espèces bien identifiées sont responsables de plus
de 80 % des cas. Ainsi au Mexique, Nocardia brasiliensis est isolé dans 86 % des cas. Au
Sénégal, M. mycetomatis dans le cas des eumycétomes, Actinomadura pelletierri et
Actinomadura madurae dans celui des actinomycétomes totalisent 89 cas sur 109, soit
81,6% [9]. Un cas tout à fait à part est celui des mycétomes où les agents fongiques
responsables sont des dermatophytes. Certains auteurs préfèrent parler de « pseudo-
mycétomes », les agents dans ce cas n’étant pas d’origine exogène. Ils n’ont été
observés que chez le sujet noir en Afrique ou aux Caraïbes, leur physiopathologie étant
mal connue. Ils réalisent des tumeurs limitées du cuir chevelu dont l’aspect
histologique est celui de grains blancs fongiques avec ciment contenant de grosses
vésicules. La réaction périphérique à cellules géantes est marquée. Les espèces parfois
isolées ont été très diverses : Microsporum canis, M. langeronii, Trichophyton
soudanense, T. schoenleinii.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

Tableau 8. 1 : Revue des principaux agents étiologiques des mycétomes


Agents de mycétomes fongiques
Grains noirs
Madurella mycetomatis Fréquent (Afrique sahélienne, Moyen-
Orient, Inde)
Madurella grisea Répartition régionale (Amérique du Sud)
Exophiala jeanselmei Rare
Falciformispora tompkinsii Exceptionnel
Falciformispora senegalensis Répartition régionale (Mauritanie-Sénégal)
Pyrenochaeta romeroi Rare
Grains blancs
Pseudallescheria boydii Assez rare (régions tropicales humides et
tempérées)
Fusarium spp. Exceptionnels
Dermatophytes Très rares
Aspergillus sp Très rares
Neotestudina rosatii Exceptionnel (Afrique)
Monosporium apiospermum
Agents des actinomycétomes
Grains rouges
Actinomadura pelletieri Répartition régionale (Afrique de l’Ouest)
Grains blancs ou jaunes
Actinomadura madurae Cosmopolite
Streptomyces somaliensis Régions désertiques et sub-désertiques
Nocardia spp. Régions tropicales humides

MORPHOLOGIE

Les agents de mycétomes fongiques sont des champignons filamenteux (eumycètes),


filaments (hyphes) épais de 2 à 6μ de diamètre, en réseau volontiers septés et ramifiés
avec présence de spores rondes ou piriformes souvent en amas évocateur de
Madurella mycetomatis (Figure 8. 1). Présence de cellules (asques) en massues et
périthèces (organes de reproduction) de couleur noire évocatrices de Falciformispora
senegalensis (Figure 8. 2) [10].

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

Figure 8. 1 : Madurella mycetomatis (x40) [10]

Figure 8. 2 : Falciformispora senegalensis (x40) [10]


[Develoux M., Adela Enache-Angoulvant. Le diagnostic biologique des
mycétomes. Revue francophone des laboratoires - Mars 2011 - N°430
// 65].

Les agents de mycétomes actinomycosiques sont des bactéries aérobies de la classe


des Actinomycètes. Les grains sont constitués de filaments bactériens ramifiés de 1µm
de diamètre. Les grains sont généralement visibles à l’œil nu à l’exception de ceux de
Nocardia sp.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

Tableau 8. 2 : Caractères morphologiques des quelques agents de mycétomes


Espèces Taille Couleur Consistance
Fongiques
M. mycetomatis 0,5-5 mm Noire Molle-dure
M. grisea 0,3-1 mm Noire Molle-ferme
P. romeroi 0,3-1 mm Noire Molle-ferme
L. senegalensis 0,5-1 mm Noire Molle-ferme
P. boydii= S. apiospermum 0,5-1 mm Blanc jaunâtre Molle
Fusarium spp. 0,5-1 mm Blanc Molle
A. kiliense <0,5 mm Blanc Molle
A. falciforme 0,5 mm Blanc Molle
A. recifei 0,5-1 mm Blanc Molle
Dermatophytes - Blanc-Jaune -

Actinomycosiques
A. pelletieri 0,3-0,5 mm Rouge Molle à dure
A. madurae 0,5-10 mm Blanc Molle
S. somaliensis 0,5-2 mm Jaune Très dure
N. brasiliensis 50-150 µm Blanc jaunâtre Molle
N. asteroides 50-150 µm Blanc jaunâtre Molle

PATHOGENIE [12,13]

ASPECTS MACROSCOPIQUES DES LÉSIONS

Macroscopiquement, l’infection se traduit par des zones granulomateuses au centre


purulent, entourées d’une coque fibreuse épaisse. Des fistules font communiquer les
zones nécrosées avec la surface. Les grains sont présents dans la partie
dermohypodermique des fistules. L’hypoderme est remanié par des lésions
nécrotiques et de la fibrose, d’où l’aspect pseudotumoral habituel du mycétome. Il
existe d’importantes modifications vasculaires. Les lésions vasculaires microscopiques
les plus fréquentes sont une hypertrophie de la tunique moyenne et une fibrose de
l’intima.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

Les grains ont trois destinées: une partie est éliminée par les fistules, une autre
détruite par la réaction tissulaire, et une autre, enfin, migre et ensemence soit des
tissus voisins, soit des tissus distants, par voie lymphatique. Les collections s’étendent
de proche en proche jusqu’à l’aponévrose. Un certain nombre de mycétomes ont leur
développement limité, sans franchir cette barrière. Le processus reprend le plus
souvent après un temps d’arrêt. Il peut y avoir envahissement du muscle, érosion des
tendons et sclérose des nerfs. Les os sont attaqués de l’extérieur, à l’inverse de ce qui
est observé dans les ostéomyélites bactériennes. Une activité ostéoclastique est
observée lorsque la réaction purulente est au contact du tissu osseux. Elle est à
l’origine de géodes dont la taille est proportionnelle à celle du grain. La construction
osseuse se faisant simultanément est ostéoblastique.

ASPECTS MICROSCOPIQUES DES LÉSIONS

La lésion microscopique élémentaire est un granulome. Une gangue de polynucléaires


neutrophiles est retrouvée au contact du grain ; elle est entourée d’un anneau
d’histiocytes souvent disposés en palissades. Des réactions à cellules géantes
s’observent plus volontiers lorsque les grains comportent un ciment matriciel (M.
mycetomatis, S. somaliensis). En périphérie se trouve une réaction subaiguë non
spécifique faite de néovaisseaux et de cellules inflammatoires polymorphes. La partie
la plus externe est constituée d’une fibrose épaisse. Trois types de réactions tissulaires
ont été décrits autour des grains de M. mycetomatis. La réaction de type I est
caractérisée par l’adhérence de neutrophiles au grain, entraînant sa fragmentation et
la destruction de filaments. Dans la réaction de type II, des fragments de grains et les
neutrophiles morts sont éliminés par les macrophages et des cellules géantes, alors
que dans le type III, il y a un granulome épithélioïde avec cellules géantes type
Langerhans. Les trois types de réaction coexistent à des degrés divers dans une même
lésion. Certains grains peuvent être détruits entièrement, et éventuellement
remplacés par un granulome épithélioïde. Cela expliquerait les améliorations partielles
spontanées que l’on a pu observer, mais le processus n’est pas suffisant pour détruire
tous les grains, et l’on ne connaît pas de guérison totale spontanée.

B. Habitat [11, 14,15]


La plupart des agents étiologiques des mycétomes ont été isolés du sol ou de plantes
de zones d’endémie. Parmi les travaux s’étant consacrés à leur habitat, il faut citer
ceux de Ségretain et Mariat au Sénégal et en Mauritanie. Ils ont montré que F.
senegalensis et F. tompkinsii étaient fréquemment retrouvés sur des épines sèches
d’acacia, en particulier celles ayant été souillées de boue lors des crues annuelles du
fleuve Sénégal. En revanche, ces champignons n’étaient pas isolés d’épines vertes,
jeunes. Neotestudina rosatii, espèce exceptionnellement mise en cause au Sénégal,
était isolée de sols sableux. M. mycetomatis était associé aux termitières. Toujours au

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

Sénégal, ces deux auteurs ont isolé N. asteroïdes et N. brasiliensis du sol. Sur le
continent américain, certains agents ont été également signalés dans le sol de
différentes régions. C’est le cas de P. boydii isolé par Emmons et Ajello, de M. grisea
isolé par Borelli au Venezuela. En Inde, c’est M. mycetomatis qui a été isolé du sol.

C. Mode de contamination [16,17]


Les agents étiologiques sont introduits à la suite de traumatismes occasionés par des
épines, échardes ou fragments végétaux à l’examen histologique de la pièce
opératoire. Les traumatismes avec des épineux, qui constituent la flore majoritaire des
régions d’endémie, sont les plus fréquemment évoqués. Cela explique la fréquence
des atteintes au pied chez les habitants de ces régions, qui marchent pieds nus ou en
sandalettes. Le coupage et le ramassage du bois de chauffe sont des facteurs de risque
des mycétomes de la main. Au Mexique, où les localisations thoraciques représentent
environ un quart des localisations, on invoque le portage de fagots de bois sur le dos
ou les épaules. Les traumatismes infectants peuvent être des plus divers ; on a invoqué
des blessures avec des outils souillés de terre, des piqûres avec des arêtes de poissons
séchés (pécheurs du lac Tchad), des morsures de serpents ou autres animaux, des
accidents de sport, des accidents de la voie publique.

Dans les populations rurales, les plus exposées aux traumatismes infectants, la
majorité des patients atteints de mycétomes sont des cultivateurs ou des éleveurs. Sur
une série de 1 374 patients au Mexique, 60,2% étaient cultivateurs. Le deuxième
groupe en importance, 21,3%, était représenté par les femmes au foyer dont la
plupart, d’origine rurale, participaient également aux travaux champêtres. Les maçons,
charpentiers, menuisiers sont également particulièrement exposés à la contamination.

D. Facteurs favorisants [18,19]


La tranche d’âge la plus frappée est 20-40 ans, les cas survenant avant la puberté sont
rares. La prédominance masculine est nette, des proportions à peu près similaires sont
retrouvées dans les grandes séries mondiales : 79,7% d’hommes contre 20,3% de
femmes au Mexique, 82,5% contre 17,5% au Sénégal. Une différence dans le mode de
vie ne semble pas être en cause. Dans les pays d’endémie, les femmes participent aux
travaux agricoles et sont, autant que les hommes, exposées aux traumatismes
infectants. Un facteur hormonal est le plus souvent invoqué pour expliquer cette
différence. Des facteurs indirects plaident en faveur de cette hypothèse : avant la
puberté, il y a autant de garçons que de filles affectées.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

E. Répartition géographique [20]


La zone d’endémie des mycétomes se trouve dans les régions tropicales de
l’hémisphère nord de part et d’autre du 15e parallèle. Les principaux foyers sont l’Inde,
la péninsule arabique, l’Afrique sahélienne (Sénégal, Mauritanie, Mali, Niger, Burkina
Faso, Tchad, Soudan, Djibouti), le Mexique. Des cas peuvent être observés en dehors
de cette « bande des mycétomes » : Thaïlande, Pakistan, Iran, Maghreb, Venezuela,
Brésil, Caraïbes. Les cas importés ne sont pas exceptionnels en France ; il s’agit
essentiellement de migrants originaires d’Afrique de l’Ouest. Les zones endémiques
sont caractérisées par une pluviométrie annuelle généralement inférieure à 1000mm,
une courte saison des pluies et une longue saison sèche. La flore est dominée par les
épineux. Certains agents pathogènes ont été isolés du sol ou d’épines végétales. Les
études menées en Afrique ont montré que la répartition des principaux agents varie
selon le degré de pluviométrie. Streptomyces somaliensis s’observe dans les régions
désertiques, Madurella mycetomatis préférentiellement entre les isoyètes 250 et
500mm, Actinomadura pelletieri dans les régions les plus humides de la zone
endémique.
Scedosporium apiopsermum, agent de mycétomes à grains blancs fongiques, a été
isolé dans des zones plus humides d’Afrique comme la Côte d’Ivoire ou la République
démocratique du Congo.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

A: Prévalence moyenne des cas de mycétome calculée par le nombre de


cas signalés dans une année dans un certain pays divisé par la population
totale de ce même pays de la même année. B: le nombre moyen de
mycétomes signalés par année par pays. [Wendy W. J. van de Sande.
Global Burden of Human Mycetoma: A Systematic Review and Meta-
analysis. PLOS Neglected Tropical Diseases 2013; 7, 11, e2550]
Figure 8. 3 : Prévalence et nombre de cas déclarés de mycétome. [20]

II. Diagnostic biologique

A. Circonstances du diagnostic biologique/éléments


d’orientation [10, 21,22]
Après une incubation de quelques mois à plusieurs années, apparaissent les premiers
signes cliniques: un petit nodule. La lésion initiale passe souvent inaperçue (le sujet se
blesse sans y prêter attention). La première consultation est souvent retardée, après
une évolution de plusieurs années. Les agents pathogènes sont très variables suivant
les pays d’endémie comme en témoignent les résultats des séries de différents pays
d’endémie. Les patients sont des ruraux adultes, la prédominance masculine de la

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

maladie est marquée. Le pied est atteint dans 70 à 80% des cas réalisant dans les
formes avancées le classique « pied de Madura ». Autrement, l’infection peut siéger en
n’importe quel endroit du corps. Une tuméfaction polyfistulisée est très évocatrice de
la maladie ; elle devient pathognomonique si l’on constate l’émission de pus contenant
des grains visibles à l’œil nu (Figure 8. 4). Parfois, les grains ne peuvent être mis en
évidence que par la microscopie en raison de leur petite taille (Nocardia sp.) ou les
fistules ne pas être productives au moment de l’examen. Les formes non fistulisées à
type de nodule, dont la fréquence est probablement sous-estimée, ne sont
diagnostiquées que par l’examen anatomopathologique. L’évolution est lente se
faisant sur des années, aboutissant à plus ou moins long terme à des complications.

Les actinomycétomes (Figure 8. 5) sont généralement plus inflammatoires, d’évolution


plus rapide que les mycétomes fongiques. La principale complication est l’atteinte
osseuse à l’origine de douleurs ; elle s’observe surtout au niveau du pied et de la main.
Dans les cas évolués, l’atteinte du pied peut entraîner une impotence fonctionnelle.
Parmi les autres complications, il faut citer les métastases ganglionnaires, les
envahissements et compressions (localisations à la tête et au cou), les surinfections
bactériennes.

Une forme clinique tout à fait particulière est représentée par les mycétomes à
dermatophytes du cuir chevelu. Tous les auteurs ne sont pas d’accord pour les
considérer comme des mycétomes, et certains préfèrent le terme de «
pseudomycétomes ». L’un des arguments pour réfuter le terme de mycétome est que
leur pathogénie est différente ; le champignon est, dans ce cas, un dermatophyte
endogène. Le tableau clinique est celui d’une tumeur végétante du cuir chevelu
rarement fistulisée. Une teigne associée est parfois notée. La majorité des cas décrits
concerne l’adulte. L’évolution est très lente, il n’y a pas d’envahissement osseux.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

Figure 8. 4 : Mycétomes du pied (A) et de la main (B) à grains noirs

Source : MC. Seck, Laboratoire parasitologie-mycologie, Hôpital militaire de Ouakam-Dakar

Figure 8. 5 : Actinomycétome du pied du à Actinomadurella pelletieri


[Develoux M., Adela Enache-Angoulvant. Le diagnostic biologique des mycétomes. Revue
francophone des laboratoires - Mars 2011 - N°430 // 65]

B. Diagnostic mycologique
Le diagnostic biologique comporte les étapes suivantes : recueil et examen direct des
grains dans les cas où il y a émission de ceux-ci, culture des grains, biopsie et examen
anatomopathologique. Certaines méthodes ne sont pas de pratique courante pour
l’instant comme les méthodes sérologiques ou la biologie moléculaire.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

PRÉLÈVEMENTS

Certaines espèces sont assez productives avec émissions fréquentes de nombreux


grains par les fistules (M. mycetomatis, A. pelletierri). Dans d’autres cas, les grains sont
rares, et il existe de longues périodes où les fistules sont sèches, non productives
(A. madurae). Dans ce cas, il peut être nécessaire de demander au patient de revenir
au moment d’une période productive. Les grains sont recueillis avec un vaccinostyle ou
un scalpel. Il faut en recueillir un maximum pour augmenter les chances d’obtenir une
culture positive.
Différents types de prélèvements sont effectués:
Lésions polyfistulisées :
Les lésions se présentent souvent sous forme polyfistulisée. Les fistules peuvent être
ouvertes ou fermées. Dans le premier cas, on ne fait qu’un écouvillonnage qui permet
de prélever les grains souvent accompagnés de pus ou de sang. Ce prélèvement est
mis dans un tube contenant de l’eau physiologique stérile. Dans le second cas, on
procède d’abord, avant l’écouvillonnage, à une ouverture des fistules à l’aide d’un
vaccinostyle ou d’une lame de bistouri. Dans tous les cas, lorsque l’émission de grains
n’est pas abondante, il est souvent nécessaire d’exercer des pressions au bord des
fistules afin de faire sortir les grains. Ces derniers peuvent être visibles à l’œil nu ou
être microscopiques.
Pièces biopsiques
Les prélèvements biopsiques ont deux destinés à l’analyse mycologique et
l’anatomopathologie. Une pièce de biopsie contenue dans un tube avec de l’eau
physiologique est envoyée au laboratoire de mycologie et une autre fixée au formol,
est destinée à l’anatomopathologie. La pièce en question est déchiquetée à l’aide
d’une lame de bistouri à la recherche de probables grains contenus dans le
prélèvement.
Prélèvement du cuir chevelu
Dans le cas particulier des mycétomes du cuir chevelu, en plus des grains, il faudra
effectuer un prélèvement au niveau du cuir à la recherche d’une teigne sous-jacente. Il
faudra faire un examen à la lumière de Wood, un grattage du cuir chevelu pour
recueillir les squames et les débris de cheveux et un écouvillonnage.
EXAMEN DIRECT
L’examen direct des grains constitue la première étape. On notera la taille, la couleur,
la consistance des grains, l’existence de ciment (figures 8. 6A, 8. 6B et 8. 7) [10]. Les
grains noirs sont toujours fongiques, les grains rouges sont toujours actinomycosiques
dus à A. pelletieri. Les grains blancs et jaunes peuvent être soit fongiques, soit
actinomycosiques.
Les tubes à eau physiologique stérile contenant les grains sont soumis à une
centrifugation à 1500 tours par minute pendant trois minutes. Ensuite, le culot
constitué par les grains est récupéré, le surnageant étant éliminé. Les grains sont

167
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

ensuite remis en suspension en remettant dans le tube de l’eau physiologique stérile.


Cette opération de lavage est répétée trois fois avant isolés les grains propres.
L’examen microscopique si besoin après action d’un éclaircissant (potasse à 30%, noir
chlorazol) permettra de distinguer les grains actinomycosiques (filaments de diamètre
< 1μm) des grains fongiques (filaments de diamètre > 3μm). Cet examen simple,
souvent négligé, peut donc déjà donner une orientation étiologique.
Lorsqu’il y a émission de pus sans grains visibles, il ne faut pas omettre d’examiner
celui-ci à la recherche de grains de petites tailles non visibles à l’œil nu (Nocardia sp.).
Les aspects microscopiques des grains des principales espèces étiologiques des
mycétomes sont résumés dans les tableaux 8. 1 & 8. 2.

[Develoux M., Adela Enache-Angoulvant. Le diagnostic biologique des mycétomes. Revue


francophone des laboratoires - Mars 2011 - N°430 // 65]. [10]

Figure 8. 6 : A. Grain de M. mycetomatis x 40 – B. Grains type Nocardia x 160. [10]

[Develoux M., Dieng M. T., Ndiaye B. Mycétomes. Encycl Méd Chir, Maladies
infectieuses. 2002 ; 8-606-A :10-11] [9].
Figure 8. 7 : Grains d’Actinomadura pelletieri (x180). [9]

168
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

Tableau 8. 3 : Principaux caractéristiques des agents de mycétomes fongiques [9]


Espèces Examen direct des Culture Microscopie
grains
M. mycetomatis 0,5 à 5mm mou à dur Lente à 37° colonies Filaments de 3 à 4μm Milieux pauvres
marron à noir filaments plates ocre à brun recto : sclérotes noirs, phialides + spores de
et vésicules : brun pigment noirâtre 2μm de diamètre, chlamydospores
diffusible, sclérote sur
culture vieillissante
M. grisea 0,3 à 1mm mou à Lente mieux à 30°C Filaments hyalins ou fuligineux parfois
ferme noir compact noir en bambou brunâtres, rares
mycélium aérien gris chlamydospores, arthrospores
P. romeroi 0,3 à 1mm Rapide compact noir Hyphes hyalins et bruns milieux
mou à ferme noir mycélium aérien gris- pauvres : pycnides (50-160 ´
brun 40-100μm) + pycniospores jaunes
(0,8-1 ´ 1,5-2μm)
F. senegalensis 0,5 à 1mm Lente Milieux pauvres : périthèces noirs
mou à ferme compact noir (100 à 300μm) + asques en éventail
périphérie noire mycélium aérien blanc à massués
avec vésicules et brunâtre (100 × 20μ) + 8 ascospores septées
ciment pigment diffusible (25 × 10μm) formées de 5 cellules
brun rougeâtre
sur milieux pauvres et
azotés
P. boydii = 0,5 à 1mm blanc Rapide mieux à 30°C Filaments et conidies terminales
S. apiospermum jaunâtre mou filaments duveteuse blanche puis ovales ou piriformes Milieux pauvres :
et vésicules brune revers brun à noir Cleistothèces bruns de 5 à 200μm+
asques évanescents (12-18 ´ 8-13μm)
+ ascospores ellipsoïdales de 4 à 7μm

169
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

Tableau 8. 4 : Caractéristiques des principaux agents de mycétomes actinomycosiques [3].


Espèces Examen direct Culture Microscopie Biologie
des grains

N. brasilensis 50-150μm T : 30-37°C Pousse Éléments Aérobie Acido-


rapide blanc à bacillaires résistant+ gélatine+
blanc jaunâtre
orange colonie lait+,
mou plissée crayeuse caséine+mannitol+,
xanthine+
N. asteroides Pousse rapide Eléments Acido-résistant+
Blanc à orange bacillaires Caséine-xanthine-
colonie glabre puis galactose-actidione-
duveteuse
S. somaliensis 0,5-2mm jaune T : 30°C colonie Chaînettes de Acido-résistant-
très dur blanche à noire spores Maltose++,
cireuse puis valbumine++
duveteuse
A. madurae 0,5-10mm blanc T : 37 °C pousse très Chaînettes de Acido-résistant
mou lente colonie jaune spores amidon+
ou blanche mannitol++
cérébriforme xylose++
A. pelletieri 0,3-0,5mm T : 37°C pousse lente Chaînettes de Acido-résistant-
rouge± mou colonie rouge vif spores hydrolyse-
surface plissée

170
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

CULTURES [23,24]

Pour effectuer les cultures il faut recueillir un maximum de grains. Ils sont en effet
constitués de filaments enchevêtrés, morts en majorité. Un certain nombre de grains,
non viables, ne pousseront pas. Les grains sont déposés dans des milieux en tube, un
par un à 2cm de distance sur milieu de Sabouraud-antibiotiques sans actidione s’ils
sont fongiques, sur Sabouraud sans antibiotiques ou milieu de Loewenstein s’ils sont
actinomycosiques ou s’il s’agit de pus contenant des grains microscopiques type
Nocardia. Lorsque l’on hésite entre une étiologie fongique ou bactérienne (grains
blancs ou jaunes), les deux types de milieu doivent être ensemencés. Les tubes sont
mis à 27-30°C et à 37°C, certains agents se développant mieux à l’une ou l’autre de ces
températures. Selon les espèces, les cultures sont plus ou moins longues, plus ou
moins faciles à obtenir. Les principaux caractères des cultures des agents
prédominants des mycétomes sont réunis dans les tableaux 8. 3 & 8. 4. Les grains
noirs des espèces fongiques les plus communes ont une pousse lente, les cultures ne
débutant qu’au bout de deux semaines en moyenne. Les cultures sont généralement
plus rapides pour les espèces fongiques donnant des grains blancs. Bien souvent, on
n’obtient que peu ou pas de fructifications et des repiquages sur milieux pauvres
(Malt, pomme de terre-carotte) s’avèrent nécessaires pour les obtenir. Le diagnostic
d’espèce s’appuie sur l’aspect macroscopique (Figure 8. 8) des cultures (recto-verso,
pigment diffusible) et l’aspect microscopique. L’aspect macroscopique peut varier de
façon notable selon les souches. Les fructifications caractéristiques de certaines
espèces (Figure 8. 7. et 8. 8B) ne s’obtiennent pas toujours et lorsqu’elles sont
présentes, n’apparaissent qu’après un intervalle de plusieurs semaines à plusieurs
mois. Le diagnostic d’espèce d’un mycétome fongique est donc long et difficile et
nécessite l’avis d’un laboratoire spécialisé.

En zone d’endémie où les possibilités diagnostiques sont limitées, il est rarement fait,
et l’on se base alors sur la couleur des grains et leur aspect à l’examen direct pour
distinguer actinomycètes et champignons en l’absence de laboratoire
d’anatomopathologie.

Le diagnostic microbiologique des actinomycètes est assez différent. On notera


également l’aspect macroscopique et microscopique des colonies : filaments non
acido-résistants ou partiellement acido-résistants (Nocardia sp.). Surtout, on étudiera
les caractères biochimiques pour différencier les espèces : Tableaux 8. 4 et 8. 5.

171
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

Figure 8. 8 : Culture sur Milieu de Sabouraud chloramphenicol et Pomme


de terre-carotte (PC) de Madurella mycetomatis

Figure 8. 9 : A-Sclérote de Madurella mycetomatis. B-Asques de Leptosphaeria


senegalensis

[Develoux M., Adela Enache-Angoulvant. Le diagnostic biologique des


mycétomes. Revue francophone des laboratoires - Mars 2011 - N°430 //
65] [10]

C. Diagnostic histologique [25]


La biopsie est indispensable lorsqu’il n’y a pas de grains retrouvés à l’examen direct ou
à l’examen microscopique du pus. Elle l’est également lorsqu’il n’y a pas de fistule,
dans ce cas comme pour d’autres formes atypiques, le diagnostic sera une surprise
anatomopathologique.
Elle est souhaitable même lorsqu’il y a élimination de grains. La biopsie à l’emporte-
pièce est souvent insuffisante et une biopsie large chirurgicale peut être faite d’emblée
ou en cas de négativité de la première. Il ne faut pas fixer toute la biopsie et penser à

172
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

garder une partie du prélèvement pour tentative de culture. La coloration par


hématine-éosine est généralement suffisante pour étudier les grains mais, selon leur
aspect, on peut être amené à pratiquer des colorations spécifiques: Acide periodique
Schiff (PAS), Gomori-Grocott (champignons), Gram (actinomycétes). On différencie
facilement les grains fongiques (filaments de 2 à 4 microns de diamètre et parfois
présence de vésicules) des grains actinomycosiques (filaments de plus petit diamètre).
On notera là encore la présence ou non de ciment, de « massues » périphériques
(Figures 12A et 12B ; 13A et 13B, 14). L’aspect de certains grains permet de porter un
diagnostic d’espèce (M. mycetomatis, M. grisea, A. pelletieri, A. madurae, S.
somaliensis). Il serait préférable de parler par exemple de grains « type » M.
mycetomatis ou M. grisea puisque la biologie moléculaire a montré que certaines
cultures attribuées à ces deux espèces appartiendraient en fait à d’autres espèces non
encore identifiées. L’aspect histologique des grains ne permet qu’un diagnostic de
genre dans le cas de Leptosphaeria et Nocardia. En ce qui concerne les grains blancs
fongiques on ne peut répondre que grains type « Scedosporium-Acremonium-Fusarium
».
La réaction autour des grains est variable, généralement granulomateuse avec des
polynucléaires au contact du grain, le tout entouré d’histiocytes et lymphocytes avec
néovaisseaux. Une troisième couche est constituée de brosse. En cas de grains
contenant du ciment, on observe volontiers une réaction à cellules géantes (M.
mycetomatis, S. somaliensis, dermatophytes). Parfois les granulomes ne contiennent
pas de grains, il faut alors multiplier les coupes. Les situations les plus difficiles,
heureusement rares, sont les suspicions cliniques où ni l’examen direct ni l’examen
histologique ne permettent de mettre en évidence de grains. Il peut être alors
nécessaire de refaire les examens après une période de surveillance.

173
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

A. Grain vésiculeux de M. mycetomatis (H&E x 100) – B. Périphérie d’un grain type Falciformispora
senegalensis montrant l’hyperpigmentation et la prédominance des vésicules en bordure (x 400)

Figure 8. 10 : Examen anatomopathologique :

Figure 8. 11 : Examen anatomopathologique :


A. Actinomadura pelletieri ; B. Madurella mycetomatis
Source : MC. Seck, Laboratoire parasitologie-mycologie, Hôpital militaire de Ouakam-Dakar

Figure 8. 12 : Examen anatomopathologique S. somaliensis (H&E x 100)


[Develoux M., Adela Enache-Angoulvant. Le diagnostic biologique des mycétomes. Revue
francophone des laboratoires - Mars 2011 - N°430 // 65]

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

D. Diagnostic moléculaire [26,27]


Devant les insuffisances que peuvent connaître méthodes microbiologiques classiques
pour l’identification des espèces, de nouvelles méthodes diagnostiques s’avèrent
nécessaires. La biologie moléculaire a été appliquée à l’identification des agents de
mycétomes, plus particulièrement ceux à grains noirs. Les techniques d’identification
moléculaire s’appuient sur l’amplification de l’ADN codant pour les régions ITS1-2
(internal transcribed spacer) des gènes codant pour les ARN ribosomaux.

La PCR amplifiant la région ITS 1, avec les amorces ITS 4 et ITS 5, combinée avec la RFLP
(restriction fragment length polymorphism) et/ou le séquençage des produits de PCR
obtenus avec les amorces 26.1 A et 28.3 A, spécifiques d’espèce, ont été mises au
point pour l’identification de M. mycetomatis et ont permis également de le
différencier de M. grisea. Plus récemment, il a été montré que l’amplification de la
région ITS 1-2, utilisant les amorces V9D et LS266 suivie du séquençage, était une
technique fiable pour l’identification d’espèce des agents responsables de mycétomes
à grains noirs.

E. Diagnostic immunologique [28-31]


La sérologie présente théoriquement plusieurs intérêts dans cette infection. Le
premier est diagnostique par la mise en évidence d’anticorps dans les formes cliniques
sans émission de grains. La sérologie pourrait aussi préciser l’espèce causale par la
mise en évidence d’anticorps spécifiques lorsque les cultures sont négatives ou
lorsqu’elles ne permettent pas une identification précise. Le deuxième intérêt de la
sérologie est la surveillance après traitement. La guérison d’un mycétome est difficile à
affirmer nécessitant un suivi clinique de plusieurs années. Le risque de récidive après
traitement est particulièrement élevé surtout en cas de mycétomes fongique pouvant
dépasser 50% des cas. La disparition des anticorps est un bon critère de guérison, leur
réapparition ou remontée est en faveur d’une reprise du processus infectieux. Les
auteurs soudanais ont utilisé diverses méthodes sérologiques (immunodiffusion,
immunoélectrophorèse, ELISA) [27, 28]. Malgré des résultats intéressants, elles ont été
abandonnées car utilisant des antigènes non standardisés, donnant des réactions
croisées, de faux négatifs ou de faux positifs. Au Mexique où N. brasiliensis est l’agent
prédominant, il a été mis au point une méthode ELISA utilisant la P24, antigène 24-kDa
immunodominant de cette bactérie.
Le taux d’anticorps élevé était retrouvé en cas d’infection active et leur baisse était
constatée parallèlement à l’amélioration clinique sous traitement. Récemment, une
méthode expérimentale ELISA a été mise au point utilisant le premier antigène cloné
de M. mycetomatis. Avec ce nouveau type d’antigène, le taux d’anticorps mis en
évidence s’est révélé corrélé à la taille de la tumeur et la durée de son évolution. Ces

175
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

résultats prometteurs entraînent un regain d’intérêt pour le diagnostic sérologique des


mycétomes fongiques.

F. Diagnostic radiologique [32]


Devant tout mycétome, l’examen radiographique doit être systématique, d’autant plus
qu’il n’y a pas de parallélisme entre l’aspect clinique et les lésions sous-jacentes.
Plusieurs facteurs interviennent dans la fréquence de l’atteinte osseuse : la durée
d’évolution, le siège de la lésion et l’espèce en cause. En dehors du pied et de la main,
les atteintes osseuses sont exceptionnelles. Au Sénégal, une atteinte osseuse était
constatée 27 fois (42,2%) en ce qui concerne 64 localisations au pied, et deux fois
(6,2%) seulement dans les 32 localisations extrapodales de la même série. L’ostéophilie
des différents agents infectieux est variable. Les actinomycètes sont plus ostéophiles
que les agents fongiques. En ce qui concerne les actinomycètes, il faut remarquer la
précocité et la fréquence des atteintes osseuses avec Actinomadura pelletieri et
Nocardia spp. Les images observées en radiologie résultent de l’association de
processus destructeur et constructeur. Les lacunes sont proportionnelles à la taille du
grain. La fonte osseuse frappe préférentiellement la base des métatarsiens et les os
courts du tarse.

Les fractures pathologiques sont exceptionnellement observées. Les images de


construction comportent une condensation osseuse et une réaction périostée.

Parmi les nouvelles techniques d’imagerie médicale, l’échographie est


particulièrement adaptée aux pays de la zone endémique. Elle donne des images très
évocatrices : multiples cavités aux parois épaisses sans renforcement acoustique.

L’échographie permet de distinguer les actinomycétomes des mycétomes fongiques.


Les premiers ont des grains moins bien individualisés, en raison de leur plus petite
taille et de l’absence de ciment dans la plupart des espèces. Les grains fongiques noirs
donnent de nombreux échos pointus, brillants, hyperéflectifs. C’est en cas de
tuméfaction non fistulisée que l’échographie est la plus performante. C’est enfin un
examen qui permet de faire un bilan précis d’extension.

La tomodensitométrie (TDM) est la méthode de choix pour détecter les lésions


débutantes au niveau du pied. La TDM et l’imagerie par résonance magnétique (IRM)
sont particulièrement intéressantes pour l’exploration des parties molles et pour un
bilan précis de l’extension.

176
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

III. PRINCIPES THÉRAPEUTIQUES

A. But
- Eliminer les agents infectieux responsables de la maladie ;
- Réparer les dégâts tissulaires ;
- Prévenir la reprise du processus infectieux ;
- Garder le potentiel fonctionnel du patient tout en pratiquant une exérèse large
pour éviter une reprise secondaire du processus ;
- Prise en charge éventuelle de la douleur.

B. Moyens
Moyens médicamenteux

Les Sulfonamides, les Aminoglycosides, les Tétracyclines, les Pénicillines, etc., sont
autant de classes d’antibiotiques utilisés, seuls ou en association, à des doses variables,
pour le traitement des actinomycétomes.

Il en est de même des mycétomes fongiques où sont généralement utilisés en fonction


des pays et des agents des Azolés, la Griséofulvine, l’Amphotéricine B et la Terbinafine.
Les modalités thérapeutiques dépendent de l’agent incriminé.

Moyens chirurgicaux
Il est réservé aux mycétomes fongiques résistant au traitement médicamenteux, dans
les mycétomes bactériens avec destruction osseuse sévère. La chirurgie propose de
réaliser une exérèse la plus complète possible.

La chirurgie peut être précédée ou suivie par un traitement médical.

C. Indications
Traitement des eumycetomes [33-39]

Les résultats des traitements médicaux sont inégaux dans les mycétomes fongiques.
Pour l’instant, les meilleurs résultats ont été obtenus avec le kétoconazole dans le
traitement des mycétomes à M. mycetomatis. Sur 50 patients traités par kétoconazole
à la dose de 400 mg/j, 72% furent guéris ou présentèrent une amélioration clinique
notable (fermeture des fistules, diminution importante de la tuméfaction),
l’amélioration fut moins marquée dans 20% des cas. Dans 8% des cas, il n’y avait pas
d’amélioration ou parfois même aggravation. Des guérisons ou rémissions ont
également été obtenues avec l’itraconazole, qui pour certains serait plus efficace que

177
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

le kétoconazole dans cette indication. La dose préconisée est de 400mg/j pendant 7 à


12 mois, associée si besoin à une chirurgie conservatrice.
Les imidazolés sembleraient moins efficaces dans les mycétomes fongiques à grains
blancs, en particulier ceux dus à P. boydii. D’autres antifongiques (terbinafine,
voriconazole) sont en cours d’évaluation.
La chirurgie garde une grande place dans le traitement des mycétomes fongiques, en
raison du résultat très inconstant des antifongiques, de leur coût prohibitif pour un
traitement prolongé qui les rend difficilement accessibles aux populations rurales
socio-économiquement défavorisées.
Le but de la chirurgie est une exérèse complète des lésions, qui évite une reprise
ultérieure du processus qui surviendrait inéluctablement si quelques grains avaient été
laissés en place lors de l’intervention ; c’est une véritable chirurgie carcinologique. Le
meilleur cas de figure est représenté par les mycétomes vus précocement ou les
formes kystiques, qui peuvent bénéficier d’une biopsie-exérèse mais qui ne
représentent que 30% des cas.
Autrement, le choix du geste dépend de la localisation et de l’extension de la
tuméfaction. Il faut, autant que possible, préserver le pronostic fonctionnel du patient.
Malheureusement, trop souvent, on doit se résoudre à l’amputation. Elle est limitée
lorsque l’atteinte se limite à l’orteil. Lorsque le mycétome intéresse l’avant-pied, on
peut utiliser des interventions conservatrices qui permettent de garder un appui.
Parmi elles, il faut citer l’amputation ostéoplastique de l’arrière-pied décrite par Bèzes.
Dans les atteintes plus importantes, on ne peut éviter l’amputation du pied.
Les amputations de la jambe ou de la cuisse sont rarement indiquées car l’atteinte est
surtout superficielle. Au niveau de la main, l’important est de conserver la pince pouce
index lorsque cela est possible. Les formes diffuses superficielles (jambe, cuisse, fesse,
tronc) obligent à une exérèse avec sacrifice large des parties molles et greffes.
Si les antifongiques ont une action inconstante dans les mycétomes fongiques, il
apparaît qu’un traitement de 2 mois par kétoconazole avant l’intervention fait
diminuer de manière significative le risque de récidive.
Pour d’autres auteurs, un traitement postopératoire par kétoconazole de 6 mois à
1 an est préconisé.
Ce traitement médicochirurgical semble être le mieux adapté aux mycétomes
fongiques, en attendant de disposer de nouvelles molécules plus efficaces que celles
disponibles pour l’instant.
Traitement des actinomycétomes [40]

Pour le traitement médical des actinomycétomes, la préférence est donnée aux


associations d’antibiotiques dont le choix dépend des espèces impliquées. Les auteurs

178
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

mexicains, qui sont confrontés essentiellement à des actinomycétomes à Nocardia


spp., obtiennent de bons résultats avec le cotrimoxazole, administré pendant des
périodes variant de 6 mois à plusieurs années. En cas d’atteinte osseuse, on propose
de remplacer l’amikacine par la ciprofloxacine aux doses utilisées dans le cas
d’ostéomyélite chronique, pendant un minimum de 7 mois. Au Sénégal, le
cotrimoxazole pendant un minimum de 1 an s’est révélé être le traitement de choix
des mycétomes à grains rouges (A. pelletieri). L’association la plus efficace est
streptomycine-disulone lorsque A. madurae est impliqué. Les doses sont de 1g/j en ce
qui concerne la streptomycine avec une dose totale de 50 g, et de 100 à 200mg/j en ce
qui concerne la disulone. En cas d’échec de ce schéma thérapeutique, on peut utiliser
l’association fosfomycine-disulone ou kanamycine-disulone [39]. Pour les mycétomes à
S. somaliensis, c’est l’association streptomycine-cotrimoxazole qui semble le
traitement de choix, le cotrimoxazole peut être remplacé par la disulone.
Les meilleurs résultats dans le traitement médical des actinomycétomes ont été
obtenus lorsque les espèces étaient Nocardia spp. ou A. pelletieri, probablement parce
que leurs grains n’ont pas de ciment. Un geste chirurgical est réservé aux formes
évoluées vues tardivement, il doit être précédé et suivi d’un traitement médical de
quelques semaines afin d’éviter les métastases ganglionnaires, d’autres diffusions à
distance, ou des récidives sur cicatrice ou sur moignon d’amputation.

IV. Prévention/prophylaxie
Le mycétome n’est pas une maladie à déclaration obligatoire (dont la notification est
exigée par la loi), et il n’existe pas de système de surveillance. Il n’y a pas encore de
programmes de prévention ou de lutte. La prévention est difficile, mais il faut
conseiller aux personnes qui vivent ou voyagent dans les zones d’endémie de ne pas
marcher pieds nus. Il est important en revanche de traiter rapidement les blessures,
même minimes, qui seraient susceptibles d’être infectantes. Après traitement, il faut
suivre le patient pendant plusieurs années pour dépister au plus tôt une reprise
éventuelle du processus, qui peut survenir plusieurs années après même s’il y a
guérison clinique apparente. Le 28 mai 2016, la Soixante-Neuvième Assemblée
mondiale de la Santé a approuvé une résolution (WHA69.21) reconnaissant le
mycétome comme étant une maladie tropicale négligée. L’élaboration d’une stratégie
de santé publique de lutte et de prévention nécessite de collecter des données
épidémiologiques sur la charge de morbidité, d’investir dans la recherche et le
développement de produits de façon à pouvoir instaurer à faible coût la prévention, le
diagnostic, le traitement précoce et la prise en charge des cas dans les milieux ayant
peu de ressources. Actuellement, le dépistage actif des cas avec un diagnostic et un
traitement précoce à l’aide des outils disponibles est l’approche la plus adaptée pour
faire baisser la charge du mycétome.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

Le 24 mars 2017, l’OMS a organisé une réunion informelle à Genève (Suisse), pour
déterminer les priorités dans la mise en œuvre de la résolution WHA69.21. Les
domaines retenus sont l’épidémiologie, la prise en charge des cas, la prévention, le
renforcement des systèmes de santé et des capacités, le suivi et l’évaluation, la
recherche, le plaidoyer et la mobilisation des ressources.

Conclusion
Les mycétomes sont toujours d’actualité dans les pays d’endémie qui se trouvent dans
les régions tropicales sèches de l’hémisphère Nord. Il faut différencier les mycétomes
fongiques des mycétomes actinomycosiques, dont les traitements sont différents. Cela
peut être fait la plupart du temps par des examens simples. Le principal problème posé
par les mycétomes en zone d’endémie est le retard au diagnostic qui aggrave le
pronostic. Faire diminuer ce délai impose une formation et une sensibilisation des
populations exposées et des personnels médicaux et paramédicaux exerçant en milieu
rural. Le traitement médical des actinomycétomes permet d’obtenir des résultats
satisfaisants si le diagnostic est porté assez tôt, mais le traitement des mycétomes
fongiques, médicochirurgical ou chirurgical, est décevant. Soit il laisse un patient
mutilé, soit il est suivi de récidives nécessitant de nouvelles interventions. Bien que
restant un problème préoccupant, les mycétomes sont occultés par les nombreuses
autres priorités médicales de ces régions du monde.

180
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Mycétomes

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183
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

9 ASPERGILLOSES
Rédigé par Pr Badiane Aïda Sadikh (Sénégal), Relu par Pr Menan Hervé (Côte d’Ivoire),
Pr Dieng Thérèse (Sénégal) et Pr Kassi Fulgence (Côte d’Ivoire)

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

Introduction
Définition
Les aspergilloses sont des mycoses principalement respiratoires dues à des
champignons filamenteux, cosmopolites, ubiquitaires, opportunistes appelés
Aspergillus.

Intérêt quadruple triple :

1- Au plan épidémiologique, la prévalence des aspergilloses n’est pas encore établie


de manière précise.

2- Au plan Clinique, les aspergilloses peuvent se présenter différentes formes :


- Localisées ;
- Invasives : qui sont les plus graves ;
- Manifestations immuno-allergiques.

Les formes les plus fréquentes sont les formes pulmonaires. Elles sont de plus en plus
diagnostiquées chez les immunodéprimés notamment chez les malades hospitalisés
dans les services hématologiques. Ce sont principalement des mycoses opportunistes.

3- Au plan diagnostic et thérapeutique, le diagnostic est difficile et repose sur des


arguments cliniques, biologiques et radiologiques. En Afrique, le diagnostic est
rarement posé. Bien que le traitement antifongique soit efficace, la mortalité est
élevée dans les formes invasives, et il existe de plus en plus de résistance aux azolés
pour A. fumigatus.

Le diagnostic d’une aspergillose est difficile à poser parce que les Aspergillus sont des
moisissures contaminants des cultures au laboratoire, ce qui rend l’interprétation des
résultats difficile. Le complexe A. fumigatus est responsable de la majorité des formes
cliniques observées. La mortalité est très élevée chez les malades immunodéprimés
justifiant une prise en charge précoce et la mise en place de moyens préventifs dans
les services à risque.

185
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

I. Epidémiologie

A. Agent pathogène

1. Taxonomie
La taxonomie des microorganismes est actuellement très dynamique ; il y a eu
beaucoup de changements ces dernières années. Depuis 2012, le code international de
la nomenclature pour les algues, les champignons et les plantes (International Code of
Nomenclature for algae, fungi and plants (ICN, McNeill & al., 2012) a institué le
concept « un champignon un nom ; ou en anglais one fungi one name ». Comment
choisir un nom, parmi ceux qui existent déjà en gardant le plus d’information possible
avec ce nom reste cependant un défi. Le sujet est toujours à discussion. La taxonomie
présentée ici est basée sur les données biologiques disponibles (Samson et al., 2014).
Ainsi, dans le monde du vivant, les Aspergillus appartiennent au :

Règne: Fungi ;
Phylum: Ascomycota ;
Classe: Ascomycètes ;
Ordre: Eurotiales ;
Famille: Trichocomaceae ;
Genre: Aspergillus.
Complexe d’espèces : Il en existe près de 300 dont une trentaine responsable de
pathologie humaine et animale ; les plus impliqués en pathologie humaine sont :
A. fumigatus, A. flavus, A. niger, A. nidulans, A. versicolor
Exemple du complexe A. fumigatus : regroupe plusieurs espèces responsables de
mycoses :
A. fumigatiaffinis, A. fumigatus (Neosartorya. fumigata), A. fumisynnematus, A.
lentulus, A. viridinutans, N. fischeri, N. glabra, N. hirasukae, N. pseudofischeri and N.
udagawae (A. udagawae)
A. niger fréquemment responsable d’otomycose: qui regroupe plusieurs espèces
aussi dont: A. tubingensis, A. foetidus, A. carbonarius et A. awamori.

186
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

2. Morphologie
Les Aspergillus sont des champignons filamenteux. Le thalle est formé de filaments
mycéliens hyalins, de diamètre fin, régulier, septès et ramifiés.

Sur les filaments végétatifs prennent naissance à partir d’une cellule particulière
(cellule du pied) des filaments dressés, non cloisonnés appelés conidiophores (stipe)
terminés par une vésicule de forme variable qui porte les Phialides (cellules
conidiogènes) soit directement insérées sur la vésicule (tête unisériée) soit portées par
des métules (tête bisériée).

Les conidies ou spores bourgeonnent à l’apex des phialides et restent accolées les
unes aux autres en chaines non ramifiées.

L’ensemble vésicule ± métules + phialides + conidies constitue la tête aspergillaire qui


est caractéristique du genre Aspergillus (Figure 9. 1).

La forme, la taille, la disposition de ces différents éléments intervient dans


l’identification des espèces d’Aspergillus.

Source : http://www.microbiologie-
medicale.fr/mycologie/identificationchampignons.htm
Tête unisériée (phialides insérées Tête bisériée (phialides insérées
directement sur la vésicule) sur la vésicule par des métules)
Figure 9. 1 : Tête aspergillaire uni et bisériée

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

3. Biologie
La croissance des Aspergillus se fait entre 25 et 40˚C. Leur croissance est favorisée par
l’humidité, mais de nombreuses espèces peuvent se développer en milieu pauvre en
eau.

Les Aspergillus se reproduisent par mode asexué et parfois sexué pour certaines
espèces par formation de spores exogènes. Ils évoluent en milieu humide en
aérobiose. Les Aspergillus produisent des toxines telles que l’aflatoxine (A. fumigatus),
l’ochratoxine (A. Ochraceus), la citrinine (A. oryzae).

Les spores sont disséminées dans l’environnement, surtout pendant les travaux.

Les Aspergillus sont cultivables sur milieu de Sabouraud sans cycloheximide


(Actidione®).

Leur développement dans l’organisme entraine la production d’anticorps, et cette


immunité est parfois responsable de phénomène d’allergie.

4. Pathogénie
Les Aspergillus sont des moisissures peu virulentes, très opportunistes dans certaines
circonstances. Les éléments participant à leur pathogénicité sont :

 La petite taille des spores (2-3µm) leur donnant la possibilité d’atteindre les
alvéoles pulmonaires ;
 La thermotolérance permettant leur développement chez leur hôte à 37°C
(jusqu’à 55°C pour A. fumigatus) ;
 La capacité d’adhérence à la membrane basale et la capacité d’induire des
microlésions et des ulcérations vasculaires par le biais de toxines nécrosantes ;
 Le tropisme vasculaire permettant le développement dans les vaisseaux et une
dissémination rapide par voie hématogène ;
 La production de mycotoxines impliquées dans des processus de sensibilisation
responsables de manifestations allergiques.

B. Habitat
Les Aspergillus sont des saprophytes des matières organiques en décomposition. Ils
sont ubiquitaires retrouvées dans l’air, le sol, les surfaces, les aliments, l’eau.

Les spores sont véhiculées dans l’espace aérien avec les poussières. Le sol et les
milieux ruraux sont riches en Aspergillus.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

Dans les habitations, ils sont retrouvés dans les logements insalubres, dans les endroits
poussiéreux, mais aussi dans les plantes. Certains aliments comme le thé, les épices
(poivre) contiennent également des Aspergillus.

Leur présence dans l’environnement augmente lors des travaux. L’humidité favorise
leur survie et leur développement.

C. Mode de contamination
La contamination se fait à partir des spores qui sont introduites dans l’organisme
habituellement par voie respiratoire par inhalation avec les poussières [1 ; 2].

Elle est également possible par voie cutanée lorsqu’il y a « une porte d’entrée » en cas
de traumatismes (accidentel ou chirurgical) [3] ; tels que les plaies, les brûlures etc.
Exceptionnellement, la contamination peut se faire par voie digestive.

D. Facteurs favorisants
Ces facteurs sont liés à l’hôte et à l’environnement.

Facteurs liés à l’hôte : l’immunodépression est le principal facteur

- Les anomalies de la lignée leucocytaire ; qui peuvent toucher leur nombre ;


agranulocytose, neutropénie profonde, ou leur fonctionnalité ; atteinte de la
lignée phagocytaire qui peut avoir plusieurs causes (chimiothérapie,
infections virales etc.).
- L’altération de la barrière cutanée et /ou muqueuse ainsi que la formation de
cavités comme au décours d’une tuberculose sont autant de facteurs qui
peuvent favoriser une aspergillose.

Facteurs liés à l’environnement : les spores d’Aspergillus sont présentes dans


l’environnement et sont disséminées avec les poussières, ainsi les travaux intra
hospitaliers, ou proche de l’hôpital, non protégés, peuvent être responsables
d’infections nosocomiales chez les immunodéprimés. La manipulation de plantes et
terreau au cours des activités de jardinage, un mauvais entretien des systèmes de
conditionnement de l’air (filtres, conduits de climatisations).

E. Répartition géographique
Les aspergilloses sont des infections cosmopolites. Aussi bien les zones tempérées que
tropicales sont touchées. Cependant, il n’existe que très peu de données dans le
monde. Celles existantes sont issues d’estimations pour la plupart et concerne

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

certaines formes d’Aspergilloses telles que l’Aspergillose pulmonaire chroniques


(Figure 9. 2) et quelques fois l’aspergillose invasive.

Les chiffres représentent les taux pour 100 000 habitants.


Source : http://www.gaffi.org/why/burden-of-disease-maps/cpa-prevalence/(année)
Figure 9. 2 : Prévalence mondiale de l’aspergillose pulmonaire chronique

II. Diagnostic biologique

A. Circonstances du diagnostic biologique


Le diagnostic de l’aspergillose est posé dans le cadre de la survenue de signes cliniques
évocateurs. L’aspergillose peut atteindre différents organes. Le terrain est très
important. Il s’agit d’un patient immunodéprimé ou d’un patient sur un terrain
allergique.

Les aspergilloses respiratoires :

Elles sont de loin les plus fréquentes, les poumons étant l’organe le plus atteint,
généralement retrouvées chez des patients immunocompétents. Dans ce groupe sont
notées :

- L’aspergillome : Considéré comme une infection saprophyte sans invasion


tissulaire, se développe à partir d’une cavité pulmonaire à la suite d’une
pathologie telle qu’une tuberculose ou un emphysème et qui communique avec
les bronches ou de voies aériennes pathologiques (BPCO, DDB, mucoviscidose).
Dans la lésion, les filaments d’Aspergillus, sont associés à du mucus et des débris
cellulaires, ceci va se traduire par la formation d’une balle fongique encore
appelée truffe aspergillaire donnant le « signe radiologique de grelot », l’espèce

190
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

la plus mise en cause est A. fumigatus. L’aspergillome étant le plus souvent


asymptomatique, sa découverte est généralement fortuite mais quelques fois
sont notés une toux, des expectorations et surtout des hémoptysies.
- Les aspergilloses pulmonaires chroniques (APC) : Les APC peuvent présenter
trois formes ; une forme cavitaire (APCC), une forme nécrosante (APCN) et une
forme fibrosante (APCF). Ces formes peuvent présenter ou pas des boules
fongiques. Sans traitement, l’APC peut détruire un lobe entier ou même les deux
poumons. Sur le plan clinique, sont notés une perte de poids, fatigue, toux,
dyspnée et hémoptysie évoluant depuis plus de trois mois.
- Aspergillose broncho pulmonaire allergique (ABPA) ou maladie de Hinson-
Pepys : il s’agit d’une réaction allergique aux antigènes aspergillaires avec une
réaction inflammatoire locale avec afflux d’éosinophiles, hypersécrétion et
altération de la paroi bronchique. Ceci a pour conséquence, un encombrement
des voies aériennes qui sont souvent dilatées. Cette forme est souvent retrouvée
chez les patients asthmatiques et ceux atteints de mucoviscidose.
- Asthme aspergillaire : C’est une forme allergique due à l’inhalation de spores
d’Aspergillus qui est à l’origine de crise d’asthme se manifestant par une toux et
une fièvre. Elle est accompagnée d’une réaction d’hypersensibilité retardée.
- Alvéolite allergique extrinsèque ou pneumopathie d’hypersensibilité : c’est une
inflammation des poumons due à une réaction allergique suite à l’inhalation de
poussières contenant des spores de champignons chez des personnes non
atopiques. Généralement, le facteur favorisant est professionnel, travaux de
ferme, d’où le nom typique de « poumon de fermier ». A la suite d’une
exposition aux sports, le patient présente une crise se manifestant par une toux,
une fièvre, une dyspnée. À la suite d’une longue exposition, le patient
développera plusieurs crises avec l’installation de complication comme une
bronchite ou une insuffisance respiratoire chroniques.
- Rhino-sinusite allergique : c’est une forme chronique de rhinosinusite due à
l’inhalation de spores de champignons chez des sujets jeunes dont le diagnostic
différentiel avec la rhinosinusite non allergique est difficile. Il est important
d’identifier le terrain allergique. Elle se manifeste par une rhinorrhée,
obstruction nasale, douleur, troubles de l’odorat, prurit nasal ou oculaire,
éternuements, toux irritative, gène ou prurit pharyngé.
- Sinusite aspergillaire : c’est une infection chronique des sinus le plus souvent
unilatéral maxillaire. L’origine est souvent dentaire. Elle se manifeste par des
céphalées, une douleur au niveau des sinus, une obstruction nasale.
- Aspergillose pulmonaire invasive : c’est la forme la plus grave qui survient
principalement chez les patients immunodéprimés notamment les malades
neutropéniques. C’est le plus souvent une infection nosocomiale chez les
transplantés d’organe. Elle se manifeste sous la forme d’une pneumopathie

191
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

aiguë infectieuse avec fièvre, toux, dyspnée, hypoxie, pouvant se disséminer à


tout l’organisme. Le pronostic est redoutable avec une mortalité très élevée.

Les aspergilloses extra respiratoires :

Formes superficielles : Elles sont diverses et variées.

- Formes oculaires : sous forme de kératite ou de choriorétinite ;


- Les atteintes des oreilles (otomycoses) : Elles se manifestent par une baisse de
l’acuité auditive, des douleurs et une fièvre ;
- Les formes cutanées qui peuvent être dues au développement du champignon
sur des plaies ou des brûlures traumatiques ;
- Les atteintes unguéales sont également diversifiées (sous unguéales, distales,
leuconychies etc.)

B. Modifications biologiques non spécifiques


L’Hémogramme montre une hyperéosinophilie et une augmentation des IgE totales
dans les formes allergiques. Dans les formes avec immunodépression, il s’agit d’une
baisse des leucocytes et le plus souvent des polynucléaires neutrophiles. Il faut
toujours rechercher le facteur d’immunodépression.

C. Diagnostic mycologique
Il pose le diagnostic de certitude de l’aspergillose et repose sur la recherche du
champignon dans divers prélèvements.

1. Prélèvements :
Les prélèvements sont divers et dépendent de la forme clinique observée. Dans tous
les cas, il faudra respecter les règles d’asepsie. Si les prélèvements ne sont pas
effectués au laboratoire ou ne peuvent être acheminés immédiatement, ils sont
conservés à + 4˚C pour un délai aussi court que possible.

 Origine pulmonaire :

Les prélèvements peuvent être :

- Crachats : provenant des voies respiratoires inférieures, recueillis dans un pot


stérile avec couvercle après rinçage de la bouche avec solution de lugol ;
- Aspiration lavage des sécrétions bronchiques, Brossage endo-bronchique,
Lavage broncho-alvéolaire, Biopsie pulmonaire transbronchique, faits sous
fibroscopie ; ils constituent les meilleurs prélèvements car proviennent des

192
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

voies respiratoires inférieures qui sont plus protégées de la contamination que


les voies supérieures ;
- Exceptionnellement il est possible de réaliser une ponction biopsie
transthoracique à l’aiguille, une ponction aspiration transpariétale ou une
biopsie pulmonaire chirurgicale.
 Autres prélèvements :

Le site de prélèvement va dépendre de la forme clinique.

- Sang dans l’aspergillose invasive ;


- Prélèvement de sinus par curetage en cas de sinusite ;
- Ecouvillonnage du conduit auditif externe dans les otomycoses ;
- Biopsie ou frottis cutané dans les formes cutanées ;
- Prélèvements d’ongle en cas d’onyxis.

2. Examen microscopique
Il comprend un examen direct et un examen après coloration :

Examen direct :

La réalisation de l’examen direct dépend du type de prélèvement. Lorsqu’il s’agit de


LBA, d’urines, de LCR, après centrifugation, il faut déposer sur une lame de verre une
goutte du culot à laquelle est ajoutée une goutte de lugol et observer au microscope
optique (X10, X20 ou X40)

Avec le sang, il n’est pas réalisé d’examen direct.

Lorsqu’il est positif, cet examen montre des filaments mycéliens de taille moyenne, (2
à 4µm de diamètre), régulière, hyalins, septés, souvent dichotomiques, avec des
ramifications à angle aigu (Figure 9. 3).

En cas de lésions aérées (sinusite, aspergillome, otite), il est possible d’observer des
têtes aspergillaires : ceci a une forte présomption d’une aspergillose. La présence de
spores sans filaments n’a pas de signification.

Par contre, la présence de filaments doit être signalée au clinicien.

Examen après coloration : différents colorants peuvent être utilisés ; noir chlorazole
réalisée de la même manière que le lugol ou les colorations effectuées sur des frottis
séchés telles que Giemsa, Musto ou Grocott modifié qui sont des colorations
argentiques et augmentent la sensibilité l’examen microscopique.

 Des flurochromes comme le calcofluor [4] peuvent aussi être utilisés dans
l’examen direct et facilitent l’observation.

193
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

A. Tête aspergillaire après culture sur Sabouraud ; B. Examen direct à l’état frais
montrant un filament septé à ramification dichotomique
Figure 9. 3 : Filament d’Aspergillus fumigatus
Source : MC. Seck, Laboratoire parasitologie-mycologie, Hôpital militaire de Ouakam-Dakar

3. Culture
Elle se fait sur milieu de Sabouraud additionné de Chloramphénicol sans cycloheximide
(actidione). Il est à noter que le cycloheximide inhibe Aspergillus, sauf en cas de forte
pathogénicité ; donc il est possible en parallèle d’ensemencer un milieu de Sabouraud
additionné de cycloheximide.

Les prélèvements peuvent être ensemencés dans des tubes ou dans des boîtes de
pétri. Sachant que l’isolement est meilleur en boîte mais les milieux sont vite
desséchés, et il y a des risques de contamination. L’ensemencement en tube assure
moins de contamination, mais est de manipulation plus délicate et la surface
ensemencée étant moins grande l’isolement peut être meilleur en boîte.

L’incubation se fait à 27°C et 37°C (A. fumigatus pousse à 37°C en 24-48h alors que les
autres espèces poussent lieux à 27°C). Les colonies sont typiques, si elles sont âgées de
8 à 10 jours.

Si les têtes aspergillaires sont mal formées ou difficiles à voir, il faut repiquer sur
d’autres milieux comme celui de Czapek (milieu de référence), le milieu à l’extrait de
malt, ou le milieu à base de corn (maïs) meal (mil) et agar.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

4. Identification des cultures: Elle est basée sur les


caractères morphologiques de la culture:
Macroscopie :

L’examen macroscopique de la culture doit noter les éléments suivants :

- Couleur : blanche au début la couleur varie avec l’apparition des spores des
formes sexuées et des sclérotes : ocre, brune, noire, verte, jaune ;
- Aspect : il peut être poudreux, broussailleux, granuleux ;
- Pigment : Il existe parfois un pigment au verso qui diffuse dans la gélose.

Microscopie :

L’identification est faite en observant les conidiophores d’une colonie âgée de 8 à 10


jours.

L’examen de la colonie de préférence avec un colorant de champignons comme, le noir


chlorazole, (il est à noter que le lactophénol est corrosif et le phénol toxique donc n’est
pas conseillé) après prélèvement de la gélose ou par la technique du drapeau (scotch),
permet de poser le diagnostic des complexes d’espèces en observant :

- Conidiophore: qui peut être lisse ou échinulé, de taille variable, droit ou sinueux,
brun ou incolore, parfois septé ;
- Vésicule qui est de forme variable : allongée, globuleuse, hémisphérique ;
- Phialides formées directement sur vésicule ou portées par des métules. Elles
recouvrent toute la vésicule ou seulement la partie supérieure ;
- Conidies lisses ou verruqueuses, rondes ou allongées ;
- Tête aspergillaire soit en colonne longue ou courte, soit radiaire ou irrégulière ;
- Pour certaines souches homothalliques, à côté des têtes aspergillaires, il est
possible devoir des cléistothèces (masses jaunes ou brunes formées d’un tissu
filamenteux compact contenant des asques transparents dans lesquelles se
trouvent 8 ascospores rouges à maturité) ;
- Autour des cléistothèces, sont souvent retrouvées des cellules en noisette ou
« Hülle cells » qui sont des cellules rondes, incolores avec une paroi très épaisse ;
- Des sclérotes qui sont des amas de filaments denses, colorés, très dur peuvent
apparaître tardivement.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

Tableau 9. 1: Critères d’identification des espèces les plus fréquentes


Espèces Température Délai de Macroscopie Microscopie
optimale Croissance
A. 40-42°C 24 à 48 h à Recto : Colonies Tête aspergillaire :
fumigatus (jusqu’à 37°C blanches, puis bleu- Unisériée, en colonne
57°C) vert, puis vert foncé compacte, assez grande
à gris noirâtre (jusqu’à 100µm de long)
Verso: Incolore, Vésicule : hémisphérique
jaune, vert ou brun- (20 à 30µm)
rouge suivant les Phialides : Directement
souches portées par la vésicule,
dressée
Conidies : Globuleuses,
vertes, échinulées, petites
(2,5 à 3µm de diamètre)
Conidiophore : Court
(300µm), lisse et incolore,
évasement progressif au
sommet
A. flavus 2 à 3 jours 37 Recto : Colonies Tête aspergillaire :
duveteuses à Unisériée ou bisériée, petite
poudreuses, en colonne ou grande et
d’abord blanches, radiée
puis jaunes, puis (300 à 400µm de long)
vert-jaune Vesicule : sphérique (25 à
Verso : Incolore, 45µm)
rosé ou brun-rouge Phialides : Directement
foncé portées par la vésicule
(unisériée) ou portées par
des métules (bisériées)
Conidies : Globuleuses à
subglobuleuses, vert pâle,
échinulées (3,5 à 4,5µm de
diamètre)

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

Conidiophore : Long (1 à
2,5mm),
hyalin, verruqueuxavec des
aspérités
A. niger 2 à 3 jours 25-30°C Recto : Colonies Tête aspergillaire : Bisériée
(culture à d’abord blanches, radiée, noire à maturité
42°C) puis jaunes et enfin Vésicule : globuleuse (45 à
granuleuses noires 75µm)
Verso : Incolore à Phialides : Insérées sur la
jaune pâle vésicule par des métules
(bisériée) disposées sur tout
le pourtour de la vésicule
Conidies : Globuleuses,
brunes, échinulées, souvent
disposées en chaîne (3,5 à
5µm de diamètre)
Conidiophore : Lisse, hyalin
ou brunâtre dans sa moitié
supérieure, très long (1,5 à
3mm)
A. nidulans 3 à 5 jours 25-30°C Recto : Colonies Tête aspergillaire : Bisériée,
(culture à duveteuses à en colonne, courte et
37°C) poudreuses, en compacte
général vert Vésicule : sphérique
foncé ou vert Phialides : Portées par des
cresson, jaunâtres métules insérées sur la
pour les souches partie supérieure de la
productrices de vésicule
cléistothèces Conidies : Rondes, vertes
Verso : Rougeâtre, échinulées, souvent
pourpre disposées en chaînes
(3 à 3,5µm)
Conidiophore : Brun, lisse,
sinueux, très petit (75 à
100µm)

5. Identification par la spectrométrie de masse:


Elle est de plus en plus utilisée dans l’identification des champignons filamenteux. Son
utilisation est surtout bénéfique pour distinguer les espèces dans un complexe par

197
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

exemple A. fumigatus et A. lentulus, ce qui est important à faire puisque ces deux
espèces ont des sensibilités aux azolés différentes. C’est une technique qui cependant
nécessite d’avoir du matériel vivant et une culture pure. Elle n’améliore pas la
sensibilité diagnostique, mais est très utile lorsque l’identification de l’espèce pose
problème.

6. Interprétation des résultats:


Le rôle pathogène d’un Aspergillus isolé dans un prélèvement est authentifié par les
notions suivantes :

- Positivité de l’examen direct réalisé dans un délai aussi bref que possible ;
- La pousse abondante et rapide dans des tubes placés à 37°C ;
- Le prélèvement a été le plus « protégé » possible. LBA, liquide de fibroaspiration.
- Lorsque l’isolement a été fait à partir de sites colonisés comme les crachats ou
les expectorations, l’interprétation est plus difficile, il faut demander plusieurs
prélèvements ;
- L’interprétation de ces résultats doit tenir compte des autres examens
biologiques réalisés. Il faut exiger un examen direct positif et prendre en compte
les autres tests biologiques et l’ensemble des arguments diagnostiques (clinique,
biologique, radiologique) ;
- Dans le cas de l’aspergillose invasive, si l’examen mycologique est positif, une
sérologie aspergillaire doit être effectuée et peut authentifier l’aspergillose
évolutive.

7. Antifongigramme
Il doit être réalisé dans certains cas par exemple chez les malades transplantés pour
parer à toute éventualité de résistance et chez les patients qui font une aspergillose
récidivante. En général, ce sont les azolés et les échinocandines qui sont testés par E-
test.

D. Diagnostic immunologique
Il repose sur la recherche des antigènes ou des anticorps en fonction de la forme
clinique. Le prélèvement est constitué de sang veineux le plus souvent mais le test
peut être réalisé aussi dans les autres liquides biologiques ; LBA, LCR etc.

 Recherche des anticorps : elle est effectuée pour confirmer un diagnostic


d’aspergillome ou d’ABPA ou une Aspergillose pulmonaire invasive.

198
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

Plusieurs techniques peuvent être utilisées : Immunoélectrophorèse (IEP) qui est la


technique de référence, l’antigène utilisé provient d’A. fumigatus. La présence de
l’activité catalasique et chymotrypsique des arcs de précipitation confirme
l’aspergillose.

- Immunodiffusion teste le sérum vis-à-vis d’espèces différentes ;


- Immunofluorescence, réaction de groupe, l’antigène est une coupe de rein de
lapin inoculé avec un fragment de culture ;
- Electrosynérèse sur gel ou membrane d’acétate de cellulose donne les mêmes
résultats que l’IEP et présente l’avantage d’être plus rapide. Elle met en évidence
l’arc à activité chymotrypsique mais pas celui de la catalase ;
- Technique immunoenzymatique ELISA (Enzyme-Linked ImmunoSorbent Assay),
c’est la technique la plus employée ;
- Hémagglutination passive, qui utilise un antigène somatique et métabolique
délipidé fixé sur des hématies formolées de mouton, traitées à la
glutaraldéhyde ;
- Radio-immuno-assay (RIA) : complexe révélé par des antiglobulines marquées à
l’iode 125.

Les anticorps recherchés sont de type IgG, IgA, IgE. Les IgG sont les plus recherchées
sauf dans les formes allergiques, pour lesquelles les IgE sont étudiées.

 Recherche des antigènes circulants dont la positivité dans le sang est un


argument biologique majeur pour le diagnostic de l’aspergillose invasive. Ils sont
surtout recherchés chez les patients neutropéniques.
La technique la plus utilisée est l’ELISA pour détecter le galactomannane présent dans
la paroi des Aspergillus, c’est une technique rapide et surtout plus sensible que le test
d’agglutination au latex.
Le galactomannane est beaucoup plus spécifique dans l’aspergillose invasive [5], car il
est très immunogénique, et est présent chez la plupart des Aspergilli. C’est un antigène
exogène qui peut être recherché dans la plupart des liquides biologiques tels que le
sang, le LCR, LBA, etc. son dosage peut être un marqueur de l’efficacité thérapeutique.
Cependant, il doit être associé à d’autres tests. Le 1,3 beta D-glucane peut
éventuellement être recherché, mais il est moins spécifique que le galactomannane
[6 ; 7].
 Interprétation des résultats :
L’interprétation des résultats de la sérologie est également difficile du fait de la
présence des anticorps chez les sujets bien portants et de la présence des spores

199
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

d’Aspergillus dans l’environnement nécessitant des précautions particulières lors de la


manipulation (hotte microbiologique).
Chez l’immunocompétent, la présence d’anticorps anti-Aspergillus a une forte
présomption lors de l’Aspergillose pulmonaire chronique et dans les formes localisées
et allergiques (IgE).
Chez l’immunodéprimé (neutropénique surtout), la présence d’antigènes circulants
dans le sang ou dans le LBA a une forte présomption d’aspergillose pulmonaire
invasive. L’intérêt de la recherche d’antigènes réside aussi dans la surveillance des
patients greffés de moelle et atteints d’hémopathies pour détecter une aspergillose
précocement.

E. Biologie moléculaire
Il repose sur la mise en évidence de l’ADN d’Aspergillus. L’ADN nucléique ribosomal de
la région des Interne Transcribed Espace (littéralement espaceur interne transcrit ITS)
(ITS1- 5.8S-ITS2) est le code-barres d'ADN officiel pour les champignons [8] (Schoch et
al., 2012), car il est le marqueur le plus fréquent pour les champignons et possède des
amorces qui fonctionnent universellement. Cependant, cette région ne marche pas
bien pour les Aspergillus, d’où l’intérêt d’associer d’autres régions telles que la
calmoduline (CaM) et la β-tubuline. La PCR en temps réel est plus utilisée,
l’identification de l’espèce peut être faite par séquençage.

Ces techniques sont de plus en plus utilisées pour le diagnostic de l’aspergillose


pulmonaire invasive, mais il n’existe pas encore de kits commercialisés. Leur coût reste
toujours élevé, ce qui fait qu’ils font rarement partie des moyens diagnostiques dans
les pays en voie de développement.

De plus, la difficulté majeure du diagnostic moléculaire qui est très sensible est de faire
la distinction entre la colonisation (portage asymptomatique) et l’infection réelle. Les
résultats de la biologie moléculaire sont à interpréter en tenant en compte des
résultats de l’examen immunologique et mycologique.

F. Examen anatomopathologique
Il repose sur la mise en évidence des filaments d’Aspergillus et l’aspect du processus
d’invasion tissulaire. Les prélèvements sont des biopsies d’organes. Des colorants
spécifiques des champignons tels que le Gomori Grocott, le Musto mettent bien en
évidence les filaments d’Aspergillus (voir Morphologie).

Les colorants histologiques comme l’acide périodique Schiff (PAS), l’hémalun éosine
safran (HES) montrent une invasion tissulaire de type vasculaire.

200
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

III. Principes thérapeutiques

A. Buts
Le traitement a pour but de guérir l’infection, d’empêcher la survenue de
complications et réduire la mortalité.

B. Moyens
Les médicaments utilisés sont :

Amphotéricine B : (AmB) et formulations lipidiques d'AmB :

L’Amphotéricine B est un polyène heptaénique à large spectre antifongique, actif sur


les filamenteux et les levures.

In vivo, elle est fongicide et les risques de résistance au traitement prolongé sont
négligeables.

Le fungizone ne franchit pas la barrière intestinale. La voie IV (perfusion) est la seule


qui permet d’obtenir une concentration sanguine suffisante. La demi-vie est de 18- 24
heures. L’élimination se fait surtout par le foie. La diffusion méningée est très faible, le
taux dans le LCR est de 1/10 ème à 1/30 ème du taux sanguin. La toxicité est surtout
rénale.

Dérivés azolés

Mode d’action des dérivés azolés : ils inhibent la voie de biosynthèse de l’ergostérol
qui est le principal stérol membranaire fongique, en bloquant la Lanostérol 14 alpha
déméthylase qui est une enzyme (CYP51A1) permettant la conversion du lanostérol en
ergostérol. Le cycle triazolé se lie au site d’activation de la lanostérol 14ademethylase,
ce qui bloque son action dans le réticulum endoplasmique, entrainant une mort
cellulaire.

La chirurgie est aussi utilisée dans le traitement des aspergilloses, elle vise à enlever la
masse fongique par exérèse, curetage ou drainage.

Echinocandines :

Mode d’action : Les échinocandines sont des inhibiteurs de la synthèse du glucane qui
freinent spécifiquement la synthèse du bêta (1-3) -D glucane, ce qui va compromettre
l’intégrité de la paroi des cellules fongiques. Ce sont des antifongiques à large spectre.

201
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

C. Indications / posologies :
Amphotéricine B :

Il est indiqué dans le traitement de l’aspergillose invasive en première ligne dans sa


forme liposomale en alternative du voriconazole.

- AmB (Fungizone®) : 0,7 à 1mg/kg/j en IV. Cette forme est de moins en moins
utilisée.
- Formulations lipidiques : présentent l’avantage d’être moins toxiques que la
forme classique.
- AmBisome® : 3mg/kg/j en IV -Abelcet® : 5mg/kg/j en IV [9]

Dérivés azolés :

Voriconazole (Vfend®) : Il constitue actuellement le traitement de référence de


l’aspergillose invasive administré à la posologie de : 6 mg/kg x 2 en IV le 1 er j suivi de 4
mg/kg/j x 2 en IV. Il est aussi utilisé dans le traitement des formes immuno-allergiques
et dans l’aspergillome simple.

Itraconazole (Sporanox®) : Il est indiqué dans l’aspergillome simple qui ne répond pas
à la chirurgie ou en complément de la chirurgie. L’itraconazole est administré avec une
dose charge de 600mg/jour pendant 48 heures puis à la posologie de 400mg/j.

La chirurgie est indiquée dans les formes localisées, et elle peut être associée à
l’itraconazole ou au voriconazole peros, mais aussi dans l’aspergillose invasive surtout
en cas d’hémoptysie. Dans l’aspergillose invasive, un traitement antifongique efficace
doit être instauré rapidement. Le traitement médicamenteux doit être poursuivi
jusqu’à l’obtention d’une guérison clinique, biologique et radiologique. La durée de la
guérison clinique est obtenue autour de 2 à 6 semaines et celle complète vers 10 à 12
semaines de traitement.

Les Echinocandines sont utilisées dans l’aspergillose invasive des adultes réfractaires
ou intolérants à l’amphotéricine B classique ou en solutions lipidiques et/ou à
l’itraconazole.

La caspofongine (Candidas®) : c’est la molécule la plus utilisée ; la dose administrée est


en fonction de la surface corporelle à 50mg/m2/jour.

D. Suivi biologique / post thérapeutique


Dans l’aspergillose invasive, le dosage du galactomannane est un bon indicateur ; sa
diminution et/ou sa disparition témoigne de l’efficacité thérapeutique alors que sa
persistance est signe d’échec thérapeutique.

202
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

La PCR quantitative peut être utilisée dans le suivi thérapeutique, mais le coût est
élevé.

IV. Prévention

A. But
Le but de la prévention est d’empêcher la survenue de l’aspergillose chez les patients à
risque.

B. Moyens
Il faut éviter la présence de spores d’Aspergillus dans l’environnement et
l’alimentation des patients à risque hospitalisés dans les services :

- Isolement protecteur : flux laminaire pour avoir un environnement exempt de


spores fongiques ;
- Interdiction des fleurs en pot, plantes vertes ;
- L’eau et l’alimentation distribuées doivent être exemptes de spores fongiques ;
- Mise en place de procédure d’isolement de zones de travaux (construction,
rénovation) dans l’hôpital ou à proximité directe.

Conclusion
Les aspergilloses sont des mycoses très peu investiguées en Afrique. Le diagnostic est
délicat, parce que les Aspergillus sont des moisissures contaminants des cultures au
laboratoire. La forme invasive est la plus grave et présente une mortalité élevée même
sous traitement.

Il faut toujours penser à rechercher une infection fongique chez les malades
immunodéprimés présentant une fièvre résistante aux antibiotiques.

203
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Aspergilloses

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204
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Histoplasmoses

10 HISTOPLASMOSES
Rédigé par Pr Gaye Oumar (Sénégal), Relu par Pr Kiki Barro Pulchérie C (Côte d’Ivoire)

205
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Histoplasmoses

Introduction
Définition
Les Histoplasmoses sont des mycoses cosmopolites, viscérales et cutanées dues à des
champignons dimorphiques appartenant au genre Histoplasma et à l’espè ce
Histoplasma capsulatum dont il existe 2 variétés responsables de deux formes
d’histoplasmose :
- Histoplasma capsulatum variété capsulatum, agent de l’histoplasmose classique ou
histoplasmose à petites formes ou histoplasmose Américaine ou maladie de Darling ;
- Histoplasma capsulatum variété duboisii agent de l’histoplasmose Africaine ou
histoplasmose à grandes formes.

Intérêt
- Epidémiologique : ces deux formes se distinguent par leur épidémiologie et leur
répartition géographique. La forme américaine est endémique en Amérique du Nord
(on parle de mycose de la vallée du Mississipi), en Amérique du Sud et en Asie avec des
cas sporadiques en Europe et en Afrique notamment au Sénégal avec un cas récent
rapporté chez un patient autochtone. La forme africaine se limite au continent africain.
- Médical : la symptomatologie entre ces 2 formes est différente. La forme américaine
est considérée comme une affection opportuniste et classante du SIDA. En effet, elle a
connu un regain d’intérê t avec la pandémie du SIDA avec une augmentation des cas
dans les années 80 aux Etats-Unis chez les populations infectées par le virus. En 1987,
le CDC d’Atlanta inclut l’histoplasmose chez le sujet séropositif comme nouveau critè re
dans la classification du sida. En région africaine, la variété capsulatum revêt un interêt
touchant la population active et survenant sur des terrains immunodéprimés,
diabétiques, cancéreux et les infectés par le VIH ; l‘Histoplasmose Africaine semble
moins influencée par le VIH.

I. Épidémiologie

A. Agents pathogènes

1. Taxonomie
- Phylum : Ascomycotina
- Classe : Ascomycètes
- Ordre : Onygenales
- Famille : Onygenacae

206
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Histoplasmoses

- Genre : Histoplasma
- Espè ces : Histoplasma capsulatum
- Variétés : H. capsulatum capsulatum
H. capsulatum duboisii

2. Morphologie
Histoplasma capsulatum est un champignon dimorphique qui se présente sous forme
de levure chez l’homme et sous forme de filament mycélien lorsqu’il est à l’état
saprophyte ou en culture. Les levures sont souvent intra cellulaires (cellules du
systè me des phagocytes mononuclés) ou extra cellulaires aprè s éclatement de la
cellule-hô te.

3. Biologie
Les terres humides aux températures comprises entre -18 et 37ºC permettent la
croissance du champignon. Le champignon survit plus de 10 ans dans la terre. Les
spores et les formes levures sont inactivés lors d'une longue exposition à une
température supérieure à 40ºC. La croissance est inhibée à un pH inférieur à 5 et
supérieur à 10. Les conditions sèches facilitent également l'inactivation des spores.

4. Pathogénie
Les spores d’H. capsulatum inhalées sont phagocytées par les macrophages à
l’intérieur desquels elles se transforment en levures et se multiplient. L’éclatement du
macrophage libè re les levures qui vont ensuite se disséminer par voie sanguine ou
lymphatique et coloniser différents organes : poumon, foie, rate, peau etc.

B. Habitat
Histoplasma capsulatum variété capsulatum est présent dans les sols enrichis en
matiè res azotés, notamment les sols riches en fientes d’oiseaux ou de volailles ou en
guano de chauves-souris (pigeonniers, poulaillers, grottes, galeries, tunnels). Pour la
variété H. capsulatum duboisii, le biotope originel est mal connu.

Les levures de H. capsulatum sont retrouvées chez l’homme et aussi chez certains
animaux, notamment les carnivores domestiques (chien, chat), les bovins et le cheval

207
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Histoplasmoses

pour la variété capsulatum, chez l’homme et certains primates comme le babouin pour
la variété duboisii.

C. Modes de contamination
Pour la variété capsulatum, la contamination humaine se fait par voie respiratoire par
inhalation des spores aéroportées.
Pour la variété duboisii, la contamination est présumée d’origine aérienne, mais on
incrimine aussi une origine transcutanée au décours d’une blessure avec
contamination tellurique. La voie digestive est aussi suspectée.
Il n’y a pas de contamination interhumaine car l’homme n’héberge que la forme levure
du champignon.

D. Facteurs favorisants

1. D’ordre individuel
- La profession : éleveurs de pigeons, de volailles, ouvriers (tunnels puits
bâtiments), personnels de laboratoire, explorateurs de grotte (spéléologie).
- L’état immunitaire: infection à VIH avec taux de lymphocytes T CD4 abaissé.
- Terrain prédisposant : cancer, éthylisme, diabè te…
- L’âge : la maladie touche surtout les adultes jeunes entre 20 et 30 ans.
- La race : l’histoplasmose Africaine pré domine chez le sujet de race noire tandis
que Histoplama capsulatum prédomine chez le sujet de race blanche.

2. D’ordre général
Le séjour en zone d’endémie.
Les caractéristiques du sol (enrichi de matières organiques).

3. Liés au champignon
- Taille des spores,
- Légèreté des spores,

208
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Histoplasmoses

E. Répartition géographique
Pour l’Histoplasmose américaine, la maladie se rencontre surtout aux Etats-Unis. Dans
certaines régions du Mississipi, le portage d’H. capsulatum peut atteindre 80%, et 60 à
80% réagissent positivement à l’IDR à l’histoplasmine. Dans les années 90, plus de 20%
des patients sidéens ont présenté une histoplasmose. Cette maladie existe aussi en
Amérique du Sud et Centrale. Ce parasite est également retrouvé en Afrique du Sud,
en Indonésie, en Indes et aux Philippines.
L’histoplasmose Africaine est retrouvée exclusivement en Afrique noire : Sénégal,
Niger, Nigéria, Afrique centrale. Cependant, c’est une maladie rare. La plupart des cas
en Afrique sont rapportés sous forme de cas cliniques en particulier de formes
disséminées chez le sujet VIH.

II. Diagnostic biologique

A. Circonstances du diagnostic biologique

1 Epidémiologiques
Il est important de considérer l’origine géographique, la profession, les antécédents
médicaux.

2 Cliniques
Histoplasmose américaine à Histoplasma capsulatum var capsulatum

L’histoplasmose américaine est asymptomatique dans 95% des cas. Lorsque la maladie
se manifeste, trois formes peuvent être individualisées :
La forme pulmonaire aiguë : l’affection débute habituellement après une incubation
d’une à trois semaines sur un mode pseudogrippal : malaise, fièvre modérée, vagues
douleurs. Elle peut rester latente ou, exceptionnellement, engendrer une dyspnée, des
hémoptysies, des douleurs thoraciques surtout en cas d’infestation massive. La
radiographie pulmonaire révèle le complexe ganglio-pulmonaire : adénopathies
hilaires uni- ou bilatérales et infiltrats parenchymateux ou opacités miliaires ou
nodulaires plus ou moins disséminées.
La forme chronique : Elle se traduit par le développement de cavités uniques ou
multiples ou d’infiltrats pseudotumoraux (histoplasmome) plus ou moins calcifiés au
sein du parenchyme. Des transformations granulomateuses ou fibreuses du médiastin

209
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Histoplasmoses

et des atteintes du péricarde peuvent également être observées. L’évolution se fait


lentement vers l’insuffisance respiratoire et le cœur pulmonaire chronique.
La forme disséminée : Elle résulte de la dispersion du parasite à l’ensemble du
système réticuloendothélial par le biais des macrophages infestés. Elle est observée en
cas d’insuffisance de l’immunité à médiation cellulaire, chez l’enfant ou au cours
d’immunodépressions pathologiques : diabète, hémopathies malignes, corticothérapie
et surtout lors de l’infection à VIH. Dans ce dernier cas, elle survient plus volontiers
lorsque les lymphocytes CD4 sont inférieurs à 150/l. Cette forme peut suivre
immédiatement une contamination ou être la conséquence d’une réactivation d’une
infestation ancienne. La fièvre est élevée et l’état général profondément atteint. De
nombreuses localisations s’observent : adénopathies, splénomégalies et plus rarement
hépatomégalie, atteinte médullaire… En l’absence de traitement, une telle forme est
constamment mortelle.
Histoplasmose africaine à Histoplasma capsulatum var duboisii

L’histoplasmose africaine atteint surtout les téguments, le squelette et les ganglions


dans les formes localisées. Elle comporte aussi des formes disséminées.

Formes localisées :
Les lésions cutanéo-dermiques se présentent comme des papules lenticulaires, des
nodules dermo-épidermiques ou hypodermiques, des abcès froids parfois fistulisés,
des ulcérations. Elles siègent surtout au niveau du tronc et de la tête. Elles sont
uniques ou multiples et trainent des semaines, des mois, ou même des années. Chez le
sujet séropositif pour le VIH, des lésions ombiliquées proches d’un molluscum
contagiosum peuvent aussi être observées.
Les localisations ostéo-articulaires simulent la tuberculose. L’histoplasmose vertébrale
ressemble au mal de Pott et peut provoquer des compressions médullaires. Les
atteintes des poignets, des coudes, des genoux, du sternum ou des côtes, relativement
fréquentes, dessinent radiologiquement des géodes mal limitées.
Les localisations ganglionnaires, isolées ou satellites d’une autre lésion, ressemblent à
des adénites tuberculeuses.
Formes disséminées : Elles sont rares, mais d’une extrême gravité ; l’atteinte
hépatosplénique est constamment mortelle. Les lésions gastro-intestinales,
péritonéales, urogénitales sont rares ; il est décrit de véritables formes septicémiques.
A la différence de l’histoplasmose classique, l’atteinte pulmonaire est exceptionnelle.

210
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Histoplasmoses

B. Diagnostic mycologique

1. Prélèvement
Dans l’histoplasmose américaine, on prélè ve les crachats, les expectorations, le liquide
de lavage broncho-alvéolaires (LBA), le pus des abcè s, ou le sang. On peut également
faire la biopsie d’organes profonds : poumons, foie, etc.

Dans l’histoplasmose africaine, il faut pré lever des croû tes, du pus d’abcè s cutanés et
plus rarement, on procè de à une biopsie d’organe (en cas d’histoplasmose disséminée)
ou ponction de moelle.

Ces prélè vements doivent ê tre transportés immédiatement au laboratoire.

2. Techniques

a. Examen direct et frottis


Cette étape permet de mettre en évidence le champignon à l’état frais et sur frottis
colorés au May Grü nwald Giemsa, au Gram, au Periodic Acide Schiff (PAS) et au Bleu
coton :

Histoplasma capsulatum se présente sous forme de petites levures de 1 à 3 microns de


diamè tre, toujours intra cellulaires. Ces levures sont toujours localisées dans les
macrophages. Ce sont des levures à parois épaisses, entourées par un halot clair non
colorable par le Giemsa et donnant l’aspect d’une capsule, d’où le nom de capsulatum.
Ces levures bourgeonnent, ce qui les diffé rencient des autres parasites intra cellulaires
comme les leishmanies ou les toxoplasmes.

211
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Histoplasmoses

Figure 10. 1 : Petits éléments ovoïdes d’Histoplasma capsulatum var. capsulatum au MGG,
grossissement × 1 000 (Dieng et al., CHU de Fann, Dakar, Sénégal)

Histoplasma duboisii se présente sous forme de grosse levure de 10 à 12 microns de


diamè tre à doubles contours. Ces levures sont localisées dans des cellules géantes
multi nucléés appelées plasmodes. Ce sont des levures bourgeonnantes à base de
bourgeonnement étroite.

Figure 10. 2 : Histoplasma capsulatum var. duboisii à l’examen direct au grossissement ×


400
Source : K. Diongue, CHU Aristide Le Dantec-Dakar

b. La culture
Elle doit ê tre effectuée sous un poste de sécurité microbiologique (hotte). Deux
milieux sont utilisés: la gélose de Sabouraud + Chloramphénicol et la gélose de
Sabouraud enrichie (sang, Cœur, cerveau et cysteine).
Dans le premier milieu, l’incubation se fait entre 25 et 30°C pendant 8 à 15 jours. On
observe sur le plan macroscopique, des colonies blanchâtres, cotonneuses ou
duveteuses qui brunissent avec l’âge. A l’examen microscopique avec du bleu coton,

212
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Histoplasmoses

les filaments portent de petites spores (2-3) et de grosses chlamydospores rondes,


parfois piriformes (10 à 25) à paroi épaisse, lisse ou échinulée. La présence de
macrospores échinulées est caractéristique des 2 histoplasmes.

Figure 10. 3 : Schéma d’un filament mycélien d’Histoplasma capsulatum


Source : MC. Seck, Laboratoire parasitologie-mycologie, Hôpital militaire de Ouakam-Dakar

Dans le deuxiè me milieu enrichi, l’incubation est à 37°C pendant 5 à 30 jours. On


observe des colonies brun-rouges, membraneuses, cérébriformes à consistance plus
ou moins crémeuse. A l’examen microscopique, on observe des levures semblables à
celles des formes parasitaires.

L’identification se fera sur les critè res morphologiques à l’examen direct et la culture
et également sur l’activité uréase.

- H. capsulatum capsulatum a une activité uréase vive aprè s 48 heures.


- H. capsulatum duboisii a une activité uréase trè s faible aprè s 48 heures.

c. L’inoculation à l’animal
L’animal de choix est le hamster doré. La souris et le cobaye peuvent ê tre utilisés, mais
ils sont moins sensibles. L’inoculation se fait par voie intra pé ritonéale. Les animaux
meurent au bout de 8 à 45 jours. A l’autopsie, on observe la présence de levures dans
le foie et la rate.

C. Diagnostic histologique
On observe

213
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Histoplasmoses

- Des formes tuberculoi ̈des (variété capsulatum) avec un infiltrat lympho-


histiocytaire ou granuleux riche en macrophage. On y retrouve rarement des
levures. La coloration au Gomori-Grocott ou au PAS met en évidence les levures
intracellulaires;
- Des formes granuleuses (variété duboisii) : on trouve généralement de grandes
levures dans de volumineuses cellules géantes situées au sein d’un granulome à
cellules épithélioides et histiomonocytaires ; les colorations au PAS et à l’argent
révèlent parfaitement leur membrane.

D. Diagnostic immunologique

1. L’IDR à l’histoplasmine
La réaction est positive quelques semaines aprè s l’infection sous forme d’une papule.
Elle persiste pendant plusieurs années aprè s la guérison de la maladie bénigne. Elle se
négative dans la maladie généralisée, et elle réapparai ̂t aprè s un traitement efficace.
Une IDR négative n’exclut pas une éventualité d’histoplasmose.

2. Les réactions sérologiques


Elles décèlent des anticorps spécifiques souvent intéressants pour les enquêtes
épidémiologiques et dans les formes chroniques, mais l’immunodépression sous-
jacente rend leur interprétation difficile dans les formes disséminées. On doit leur
préférer la recherche d’antigènes circulants.
Les techniques sérologiques de recherche des anticorps sont :
- La réaction de précipitation en milieu gélifié comme l’électrocinérè se;
- L’Immunofluorescence indirecte utilise un antigè ne figuré qui est constitué́ par
un étalement de levures d’histoplasme sur lame. La réaction sérologique est
faible parfois nulle dans l’histoplasmose africaine. Elle est aussi faible ou nulle
dans les formes disséminées de l’histoplasmose classique;
- La réaction de fixation du complément utilisant l’antigène de la levure qui se
positive à un taux > 1/32.

La détection d’antigè nes circulants par ELISA ou Western Blot : elles sont positives
mê me chez le sujet immunodéprimé et réalisables à partir de tous les liquides
biologiques.

214
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Histoplasmoses

E. Diagnostic moléculaire
Les techniques PCR sont utilisées et permettent de detecter le matériel génomique,
notamment la PCR nichée qui est sensible et spécifique.

III. Principes thérapeutiques

A. But
Le but du traitement est de stériliser le foyer infectieux et d’éviter la survenue de
rechutes.

B. Moyens
- Itraconazole (Sporanox®)
- Kétoconazole (Nizoral®)
- Fluconazole (Triflucan®)
- Amphotéricine B (Fungizone®)

C. Indications / posologies

1. Forme américaine (variété capsulatum)


Le traitement de choix reste l’Amphotéricine B par voie intraveineuse, de préférence
sous une forme lipidique. L’Itraconazole est l’azolé ayant le plus d’efficacité. Les
indications diffèrent selon le stade évolutif.
Dans la primo-infection du sujet immunocompétent, habituellement bénigne et
spontanément résolutive, on se dispense de tout traitement. Les patients infestés par
une dose massive de spores et très symptomatiques pourront bénéficier d’un
traitement par l’itraconazole, 200 à 400 mg/j pendant 6 à 12 semaines.

Dans les formes sévères ou disséminées de l’immunodéprimé, l’amphotéricine B est


indispensable à la dose de 0,7 à 1 mg/kg/j ou 3 à 5 mg/kg/j s’il sagit d’une formulation
lipidique. Le relais est ensuite pris par l’itraconazole (400mg/j) dès que l’état clinique
du patient s’améliore. Une prophylaxie secondaire à 200 mg/j est nécessaire si le
patient est encore à moins de 200 lymphocytes CD4/l, ce qui est rare lorsque les
trithérapies antivirales efficaces peuvent être utilisées.

215
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Histoplasmoses

2. Forme africaine (variété duboisii)


On recourt à l’amphotéricine B pendant 3 semaines puis relais avec les dérivés azolés
pendant 1 an. Il est souvent nécessaire de répéter les cures et d’y associer l’exérèse
des lésions en cas d’atteinte ganglionnaire ou ostéo-articulaire.

D. Suivi post-thérapeutique
La surveillance réguliè re par des examens mycologiques doit être maintenue jusqu’à la
négativation. Les rechutes sont fréquentes imposant une prophylaxie à vie chez les
sujets à risque.

IV. Prévention
Les différentes stratégies sont :
- Désinfecter les sols contaminés par les histoplasmes avec le formaldéhyde;
- Eviter les endroits où les champignons peuvent se développer et notamment la
où existent les excréments d’oiseaux et de chauves-souris (caves, grottes) ;
- Eviter de remuer les excréments d’oiseaux et de chauves-souris;
- Arroser le sol avec de l’eau pour éviter de soulever la poussière ;
- Si le sujet travaille dans une zone à risque, il faut porter des habits de protection
et un masque recouvrant le nez et la bouche.

Conclusion
Les Histoplasmoses sont des mycoses dues à des champignons dimorphiques avec
deux variétés responsables de formes cliniques différentes. Elles ont connu un regain
d’inté rê t, notamment la forme américaine avec l’avè nement du SIDA. Cependant,
l’existence de moyens thérapeutiques efficaces a permis de réduire son incidence dans
les zones à risque.

216
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Histoplasmoses

Bibliographie

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
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218
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Blastomycose

11 BLASTOMYCOSE
Rédigé par Pr Bouyou Akotet Marielle (Gabon), Relu par Pr Bamba Sanata (Burkina Faso) et
Pr Sissinto Savi de Tové Yolande (Bénin)

219
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Blastomycose

Introduction
Définition
La blastomycose ou maladie de Gilchrist est une mycose chronique granulomateuse
due à un champignon dimorphique, Blastomyces dermatitidis, souvent subclinique et
affectant initialement les poumons avec possibilité de dissémination et de localisation
extra-pulmonaires, préférentiellement la peau, les os et les voies génito-urinaires.
Anciennement appelée blastomycose nord-américaine, la description de cas en
Amérique du Sud et en Afrique, a amené à abandonner cette terminologie. Elle était
aussi appelée maladie de Chicago (Chicago Disease).

Intérêt
Sur le plan épidémiologique, la blastomycose touche les humains et les animaux,
notamment les chiens. Les connaissances sont éparses et incomplètes, générées par
les explorations faites au cours des épidémies en Amérique du Nord (Etats-Unis et au
Canada) où elle sévit préférentiellement. Elle est endémique en Amérique du Nord
dans les États de l’Est et du Sud. Son incidence semble augmenter dans certaines de
ces régions où elle est une maladie à déclaration obligatoire.
Des cas authentiques et autochtones sont également décrits dans des régions
largement dispersées d'Afrique du Nord : Tunisie et surtout Maroc ; en Afrique
subsahélienne dans au moins 18 pays et plus particulièrement en Afrique du Sud et au
Zimbabwe. Plus récemment, des cas ont été signalés dans quelques pays du Moyen-
Orient.
Sur le plan clinique, la blastomycose est souvent évoquée dans le diagnostic
différentiel de la tuberculose, des cancers de la peau ou du poumon et des mycoses
profondes à tropisme pulmonaire telle que l’histoplasmose. Elle est asymptomatique
dans 60% des cas.
L’atteinte pulmonaire est quasi constante, souvent isolée, très polymorphe,
asymptomatique, aiguë ou chronique. Parmi les personnes infectées, 25% à 40%
développent une infection extra-pulmonaire. Les disséminations osseuses et génito-
urinaires surviennent dans 20% des cas, et le système nerveux est atteint dans 5 à 10%
des formes disséminées. Ces dernières sont plus fréquentes chez les immunodéprimés
qui ne sont pas plus à risque que les immunocompétents; elles sont mortelles dans
90% des cas.
Le diagnostic est mycologique. Toutefois, toutes les cultures de ce champignon sont
dangereuses. En effet, l’inhalation de conidies infectieuses de la moisissure sous forme
d’aérosols présente également un danger d’infection. Les cultures de B. dermatitidis
en effet sous forme mycélienne et le sol contenant des conidies infectieuses peuvent
constituer un danger d’exposition aux aérosols.

220
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Blastomycose

Historique
1894 : Première description du champignon par Gilchrist aux États-Unis sur l’histologie
de lésions cutanées évocatrices de tuberculose cutanée, qui le considéra comme une
pathologie dermatologique et attribua le champignon à un protozoaire (Gilchrist,
1894).
1896 : Description du premier cas clinique, et identification du champignon, alors
dénommé Blastomyces dermatitidis, dans une biopsie après culture.
1898 : Description de la forme filamenteuse du micromycète en cause (Gilchrist et
Strokes)
1902 : Description du premier cas de blastomycose systémique (Walker et
Montgomery, 1902)
1907 : Reconnaissance du dimorphisme température-dépendant. La maladie fut
appelée « la maladie de Chicago » car la majorité des premiers cas vivaient dans cette
région.
1913 : Description de la blastomycose sud-américaine ou paracoccidioïdomycose
(maladie de Lutz-Splendore-Almeida) (Splendore, 1913)
1941 : Découverte de Paraciccidioïdes (Blastomyces) brasiliensis (Conant et Howell,
1941).
1951 : Description du premier cas en Afrique (Tunisie).
1961 : 1er cas en Afrique noire (Sénégal).
1961, puis en 1964 : Isolement du champignon à partir du sol. Adoption du nom de
blastomycose nord-américaine (Denton et al.)
1967 : Description de la forme téléomorphe du champignon : Ajellomyces dermatitidis
(McDonough et Lewis)
1984 : Découverte de B. dermatitidis dans le sol au cours d'une épidémie chez des
enfants et des adultes dans le Wisconsin (Klein, 1984).
2000 : Description de la diversité des souches de B. dermatitidis isolées du sol
(McCullough, 2000).

I. Epidémiologie

A. Agent pathogène
Taxinomie
B. dermatitidis est la forme parasitaire d’un mycète pathogène primaire saprophyte du
sol.
Règne : Fungi
Phylum : Ascomycotina
Classe : Ascomycètes
Ordre : Onygénales

221
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Blastomycose

Famille : Onygenaceae
Genre : Blastomyces (téléomorphe : Ajellomyces)
Espèce : B. dermatidis
B. dermatitidis est la forme asexuée, imparfaite, c’est-à-dire asexuée, de Ajellomyces
dermatitidis la forme sexuée hétérothallique.

Morphologie
Blastomyces dermatitidis est un champignon dimorphique. Dans les lésions humaines
ou animales, il se présente sous forme de de levures ; dans la nature, le champignon
est sous forme filamenteuse qui est la forme infectante par la production de conidies.
La forme parasitaire levure est une cellule arrondie ou allongée, de grande taille
(diamètre allant de 8 à 15µm) et présente une paroi épaisse avec un bourgeonnement
le plus souvent unique, à base d’implantation large, formant un « 8 » caractéristique.
Elle contient de nombreux noyaux.
La forme saprophyte, filamenteuse est faite de filaments mycéliens septés
(cloisonnés), fins, de microconidies, produites par les hyphes et portées par un fin
pédoncule ou un conidiophore. Les microconidies sont ovoïdes ou piriformes (en
forme de poire), d’un diamètre allant de 2 à 10µm. Ces microconidies sont infectieuses
et constituent la forme infectante pour l’Homme. Aucune macroconidie n’est produite.
La forme filamenteuse peut être transformée en levure au laboratoire sous certains
milieux, à condition que la culture soit maintenue à 37°C.

Biologie
B. dermatitidis semble survivre de façon optimale dans les sols humides et acides,
ayant une teneur élevée en azote et en substances organiques. Sa croissance est
stimulée par des chutes de pluie récentes et une température du sol élevée.
Les formes levures se multiplient par bourgeonnement.
La croissance de B. dermatitidis est lente entre 20 à 25°C, et la température optimale
de pousse est de 37°C.
Le champignon peut être inactivé par un traitement à la chaleur humide (121°C
pendant 15 à 30 min) ou à la chaleur sèche (160 à 170°C pendant 1 à 2 heures).
Des souches résistantes à l’hygromycine B et au chlorimuron-éthyle ont été identifiées.
B. dermatitidis est sensible à l’hypochlorite de sodium, à l’acide per acétique, aux
composés phénoliques, aux composés d’ammonium quaternaire, à la vapeur de
peroxyde d’hydrogène (pendant au moins 30 min), au formaldéhyde, à la formaline et

222
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Blastomycose

aux iodophores. De plus, la plupart des champignons sont également sensibles au


peroxyde d’hydrogène et au glutaraldéhyde.

Pathogénie
Dans l'environnement, B, dermatitidis existe comme une moisissure avec des hyphes
aériens septées. Ces hyphes produisent des spores (conidies) qui sont soit inhalées,
soit inoculées dans la peau d'un hôte susceptible. La température plus chaude à
l'intérieur de l'hôte entraine la transformation du filament mycélien en une levure
grâce à une phosphorylation oxydative thermo-dépendante. La levure peut continuer à
coloniser les poumons ou à se disséminer dans la circulation sanguine et dans d'autres
organes.
Dans le poumon, il existe une résistance naturelle à l’infection grâce à l’action
phagocytaire des macrophages alvéolaires, des neutrophiles et des monocytes. Par
ailleurs, les macrophages alvéolaires sont capables d’inhiber la transformation des
conidies en levures pathogènes. Cependant, la double paroi épaisse de la forme de
levure, rend parfois difficile sa phagocytose et son élimination ; de plus, les
polynucléaires sont inefficaces contre les formes levures. Celles-ci vont proliférer dans
les alvéoles, coloniser tout le poumon, pouvant ensuite disséminer par voie
lymphatico-sanguine et créer des foyers capables de se propager dans n'importe quel
système. En ordre décroissant de fréquence, les systèmes génito-urinaires, la peau, les
os, les articulations, les autres organes et le système nerveux central sont les sites
extra-pulmonaires les plus fréquents.
Avec le développement de l'immunité, une réaction inflammatoire pyo-
granulomateuse se produit sur tous les sites infectés. Cette formation de granulomes
non métalliques est précédée d’une réponse suppurative initiale expliquant la
fréquence des abcès. Même si l'atteinte pulmonaire guérit initialement, une
réactivation endogène ultérieure à la maladie, sur tout site pulmonaire ou extra-
pulmonaire, peut se produire chez un patient traité ou non.
L'immunité à médiation cellulaire joue un rôle important dans la prévention de la
dissémination, à la fois pulmonaire, qu’extra-pulmonaire. La blastomycose en effet,
n’est pas plus fréquente chez les sujets immunodéprimés, sur ces terrains, par contre,
elle peut être disséminée et plus grave. Au cours du SIDA, il n’y a pas d’augmentation
de l’incidence de la maladie. Une bonne immunité cellulaire est un facteur important
limitant la progression de la maladie. Les macrophages alvéolaires peuvent inhiber la
transformation des conidies en levures et détruire les conidies. Les polynucléaires
neutrophiles sont actifs contre B. dermatitidis.

223
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Blastomycose

B. Habitat
La niche écologique est le sol humide à pH acide enrichi de déjections animales, zones
boisées, et autres débris végétaux (végétaux en décomposition), le long des cours
d’eau et dans les lieux laissés à l’abandon, comme sous des auvents ou dans des
cabanes.

C. Hôtes
Les humains et les canidés dont les chiens sont les hôtes les plus fréquents, mais la
maladie peut également survenir chez d’autres animaux comme le chat, le cheval, le
tigre, le léopard des neiges, le lion et le lion de mer.

D. Mode de contamination
La forme infectante est la forme mycélienne saprophyte, la spore. La voie d’entrée est
aérienne. Le mode principal de pénétration est l’inhalation. Les circonstances de
contamination sont représentées par l’exposition au sol humide, la présence de zones
boisées humides ou l’existence de micro-foyers. Les expositions environnementales
partagées expliquent l'apparition d'une maladie chez les humains et leurs animaux
domestiques.
Accessoirement, la contamination par l’inoculation transcutanée à l’Homme de B.
dermatitidis survient accidentellement après blessure chez des sujets à profession
exposée, après morsure de chien contaminée ou après application de produits utilisés
en médecine traditionnelle à base de plantes et de peau d’animaux sur une blessure.
La voie intra-utérine et l’inoculation par accident de laboratoire (morsure, piqûre et
égratignure) sont d’autres modes de contamination qui ont été signalés, mais sont
relativement rares.
Il n’y a pas de contamination directe interhumaine, même si une contamination intra-
utérine a été évoquée.

E. Facteurs favorisants
Parmi les facteurs favorisant la blastomycose, on distingue :

- Le séjour en zone d’endémie : il s’agit essentiellement de la promenade en


zones boisées, en sols riches en débris végétaux (végétaux en décomposition), le
long des cours d’eau et dans les lieux laissés à l’abandon (auvents ou dans des
cabanes) ;

224
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Blastomycose

- La prédominance chez l’Homme adulte semble due à un plus fort facteur


d’exposition ;
- La blastomycose est en effet rare chez les enfants et plus fréquente entre 20 et
40 ans ;
- Certains réservoirs d’origine animale : la maladie est courante chez les animaux
domestiques tels que les chiens et les chevaux ;
- Les niches écologiques préférentielles propices à la croissance du
champignon sont les sols humides et acides (riches en azote) ;
- Les activités professionnelles telles que les travaux de construction,
d’excavation ou de jardinage, l’agriculture, la construction, surtout en milieu
rural et les travaux forestiers ;
- Les activités récréatives : la chasse, le camping, le scoutisme et les activités en
forêt ;
- L’immunodépression d’origine cellulaire : la blastomycose disséminée et les
formes neurologiques surviennent plus fréquemment chez les personnes
immunodéprimées, telles que les receveurs de greffe d'organes et les personnes
ayant une infection à VIH.

F. Répartition géographique
Rare, la blastomycose sévit préférentiellement mais non essentiellement en Amérique
du Nord dans les États du sud et sud-est des USA, particulièrement ceux situés le long
des bassins du Mississippi et de l’Ohio, les États du Midwest et les provinces
canadiennes frontalières des grands lacs, ainsi qu’une petite zone de New York et au
Canada le long de la rivière Saint Laurent.

Hors d’Amérique du Nord, des cas autochtones bien documentés ont été notifiés en
Afrique du Nord (Tunisie, Maroc, Algérie, Egypte), Centrale et de l’Ouest (RCA, Nigeria,
Ghana, Zambie), Australe (Ouganda, Mozambique, Zimbabwe), du Sud et à
Madagascar. Des cas ont été signalés en Amérique Centrale, Amérique du Sud et en
Inde.

225
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Blastomycose

Figure 11. 1 : Carte de distribution mondiale de la blastomycose

II. Diagnostic biologique

A. Circonstances du diagnostic biologique


Dans près de 60% des cas, la blastomycose est asymptomatique. Chez les patients
symptomatiques, elle mime les aspects cliniques et radiologiques d’autres affections
invasives ou cutanées et peut être suspectée et recherchée devant :

- un tableau d’une pneumopathie d’allure bactérienne d’intensivité variable, soit


asymptomatique, dans la majorité des cas, soit sous forme de pneumopathie
atypique rebelle aux antibiotiques ;
- une pneumopathie chronique pseudo tuberculeuse associant une altération
marquée de l’état général et un foyer pulmonaire chronique parfois excavé ;
- un tableau de pneumopathie sévère avec insuffisance respiratoire aiguës ;.
- la découverte à l’imagerie de lésions pulmonaires parenchymateuses variables,
nodulaires (Figure 11. 2), cavitaires ou miliaires, d’adénopathies hilaires ou
médiastinales plus rarement ;
- l’apparition de lésions à type de dermatites verruqueuses ou ulcérées
d’extension centrifuge avec bord périphérique actif surélevé, verruqueux ou
papilliforme et de zone centrale cicatricielle scléro-atrophique (Figure 11. 3).
Elles siègent sur les parties découvertes (visage, mains, poignets ; chevilles,
épaules..). Au niveau du nez et de la bouche, elles sont ulcéro-bourgeonnantes ;

226
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Blastomycose

- des lésions osseuses à type d’ostéite, des images ostéolytiques à la


radiographie (Figure 11. 4) siégeant préférentiellement sur les os plats
(vertèbres, os du crâne),
- des lésions articulaires pouvant fistuliser ;
- des atteintes génito-urinaires : orchite, prostatite, épididymites ;
- des atteintes neuroméningées, ORL, thyroidiennes dans les formes disséminées.
Chez l’immunodéprimé, les formes sévères avec insuffisance respiratoire aiguë, les
localisations neuro-méningées ou disséminées sont fréquentes.

Figure 11.2 : Opacité du lobe Figure 11.3 : Lésion cutanée Figure 11.4 : Lésion osseuse
inférieur du poumon gauche verruqueuse

B. Diagnostic mycologique
Le diagnostic de la blastomycose est avant tout mycologique.

1. Prélèvements
Les types de prélèvements varient selon les localisations.
En cas d’atteinte pulmonaire : les expectorations, les sécrétions bronchiques, le
liquide d’aspiration trachéale ou du lavage bronchioalvéolaire constituent les supports
biologiques.
Sur les lésions cutanées et sous-cutanées, les biopsies, les exsudats, les squames sont
prélevés.
Dans les lésions articulaires, les prélèvements sont constitués de liquide
d'épanchement, de pus d’ostéite, de biopsie synoviale ou de biopsie de la moelle
osseuse.

227
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Blastomycose

Les urines recueillies après massage prostatique, la biopsie de la prostate, le liquide


cérébro-spinal, le sang sont les autres échantillons qui peuvent être utilisés pour le
diagnostic.

2. Examen direct
Il peut être réalisé sur les prélèvements à l’état frais ou après éclaircissement à la
potasse (KOH) à 10 %.
L’examen direct des squames et des expectorations est parfois difficile à lire à cause
des débris cellulaires et tissulaires. Le KOH peut être associé au blanc de calcofluor qui
est un fluorochrome non spécifique qui s’insèrera dans la chitine de la paroi cellulaire
des champignons afin de faciliter le repérage des levures.
À l'examen au microscope à fluorescence, les mycètes produiront une fluorescence
vert pomme. Le bleu de lactophénol peut aussi être utilisé.
Un examen direct négatif n’exclut pas le diagnostic. Il doit toujours être complété par
la culture.
Cet examen met en évidence la forme parasitaire c’est à dire une levure multinucléée,
sphérique ou allongée, de 8 à 15µm, à bourgeonnement souvent unique à base large
d’insertion et souvent de même taille que la cellule-mère avant son détachement
donnant l’image du chiffre 8 (Figure 11. 5) avec une paroi épaisse biréfringente,
caractéristique qui suffit pour établir le diagnostic. Certaines levures peuvent avoir une
taille inférieure jusqu’à 5μm, ou supérieure atteignant 30μm. Les levures sont souvent
peu nombreuses.

Figure 11. 5 : Aspect typique de B. dermatitidis après éclaircissement au KOH

Un examen direct négatif n’exclut pas le diagnostic. Il doit toujours être complété par
la culture.

228
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Blastomycose

3. Culture

a. Isolement
La culture seule permet d’observer le champignon, et le diagnostic formel. B.
dermatitidis est un champignon pathogène du groupe de risque 3. Les cultures
sporulées ne doivent être manipulées que dans un laboratoire de sécurité biologique,
en laboratoire de confinement. En effet, l'inhalation de conidies est à l'origine de la
plupart des mycoses graves acquises en laboratoire biomédical.
Sur milieu de Sabouraud glucosé à 2% avec un pH à 6,9 et additionné d’antibiotique,
avec ou sans cycloheximide, les colonies se développent en une dizaine de jours à 25
°C.
Les milieux utilisés pour la conversion de la phase saprophyte filamenteuse à la phase
levure sont la gélose au sang enrichie en CO2, la gélose BHI (Brain Heart Infusion,
gélose cœur-cervelle) ou la gélose BHI et sang (repiquage des cultures) additionnées
de Chloramphénicol et/ou Actidione. L’incubation se fait à 37°C. Cette méthode est de
plus en plus délaissée et remplacée par des techniques d'identification moléculaire.
Ces dernières étant plus rapides et plus sécuritaires.
L’incubation dure au minimum 4 semaines.

b. Identification
La pousse débute en 5 à 10 jours. En cas de faible nombre de formes parasitaires, la
pousse peut débuter après le 30ème jour.
 Macroscopie
Les colonies sont initialement blanches ou blanc cassé et glabres ou cireuses,
deviennent ensuite beige à brun, duveteuses ou cotonneuses car les hyphes aériennes
se développent avec l'âge (Figures 11. 6a et 11. 6b). Le verso est jaunâtre à marron
(Figure 11. 6b). Sur milieu enrichi au sang, les colonies sont crémeuses et plissées.

Figure 11. 6 : a et b : Colonies de B. dermatitidis (27°C)

229
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Blastomycose

 Microscopie

L’incubation à 25-27°C met en évidence la forme saprophyte mycélienne constituée de


filaments septés fins de 2-3µm de diamètre et deux types de conidies : des
microconidies piriformes ou rondes terminales de 3 à 5µm de diamètre, à parois lisses
portées par un fin pédicule (2 à 7µm de long sur 2 à 4,5µm de large) ou des
microconidies plus volumineuses arrondis, à paroi épaisse évoquant des
chlamydospores de 8 à 18µm. (Figures 11. 7a et 11. 7b).

78a 78b
Figure 11. 7 : a et b : Aspect des microconidies de B. dermatidis

Sur milieux spécifiques à 37°C sans cycloheximide, il est possible d’obtenir la forme
levure caractéristique ovale ou ronde, à paroi épaisse réfringente pouvant donner une
image de double contour, à bourgeonnement unique avec une large base
d’implantation du bourgeon avec des colonies crémeuses plissées (Figure 11. 8).

Figure 11. 8 : Levures de B. dermatitidis poussant à 37°C

Les cultures ne sont déclarées négatives qu’après un délai de 4 semaines. Il est


exceptionnel d’avoir une hémoculture positive. Tout isolement de l’agent pathogène
confirme l’infection : il n’y a pas de colonisation.

C. Diagnostic immunologique spécifique


Il est peu contributif pour le diagnostic et utilisé lors des enquêtes de dépistage de
porteurs asymptomatiques. Les anticorps ne sont pas neutralisants, mais leur présence
permet d’affirmer un contact avec le champignon. Les techniques d’immunodiffusion,
d’immunofluorescence directe et ELISA sont utilisées pour leur détection.

230
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Blastomycose

L’antigène A est utilisé pour la détection de la blastomycose en immunodiffusion et


dans un test ELISA. Cependant, il existe une réaction croisée avec l’histoplasmose.
Selon la diffusion de la maladie, les anticorps anti-A sont présents chez 50 à 80 % des
cas. Cependant, le délai d’apparition est d’environ 2 mois, donc de peu d’intérêt dans
les primo-infections aiguës. La sensibilité du sérodiagnostic n’est pas optimale car, les
souches africaines ne possèdent souvent plus l’antigène A. Un antigène K serait
spécifique des souches africaines.

D. Diagnostic histologique
Les biopsies sont colorées à l’hématoxyline ferrique, à l’acide périodique de Schiff
(PAS) ou Gomori Grocott (Figures 11. 9 et 11. 10). Dans les formes aiguës, il existe
une réaction granulomateuse riche en polynucléaires mais sans caseum et au centre
de laquelle existent les levures caractéristiques avec une paroi cellulaire épaisse et un
cytoplasme centralement rétracté. Ces dernières peuvent être libres dans le
prélèvement.
Dans les formes chroniques, les levures sont contenues dans des cellules géantes de
Langhans au sein d’une réaction inflammatoire.
Dans la peau, il existe une hyperplasie pseudo-epiheliomateuse de l’épiderme ; les
levures sont retrouvées dans les micro-abcès riches en polynucléaires.

Figure 11. 9 : Levure dans un micro-abcès Figure 11. 10 : Levure bourgeonnante et non
(HES) bourgeonnante de B. dermatitidis (PAS)

Inoculation à l’animal

Elle se fait en intra testiculaire ou intra-cranienne chez le cobaye et en intrapéritonéale


chez le hamster doré ou souris. Elle provoque une blastomycose généralisée en 3 à 4
semaines. Les levures sont retrouvées dans les organes profonds.

231
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Blastomycose

E. Diagnostic différentiel
Il se pose parfois avec avec Cryptococcus neoformans qui se présente sous forme de
levures rondes entourées d’une capsule souvent large, à bourgeonnement parfois
multiple avec une base étroite de bourgeonnement. Dans les tissus parasités, il faut
également éliminer Histoplasma capsulatum var duboisii qui se présente sous forme
de grandes levures ovales, à base de bourgeonnement étroite.

III. Principes thérapeutiques

A. But
Le but du traitement est de guérir le paient et d’éviter la dissémination hématogène.

B. Moyens
 Moyens médicamenteux
Les antifongiques systémiques du groupe des azolés suivants sont recommandés :
l’itraconazole et le fluconazole.

Du groupe des polyènes, l’amphotéricine B notamment la forme liposomiale :


l’ambisome (AmB) est l’antifongique systémique le plus efficace. Cependant, sa toxicité
peut limiter son utilisation.

 Moyen chirurgical
Il s’agit le plus souvent de fermeture, drainage, curage ou évacuation de pus ou autres
sérosités.

C. Indications/posologie
 Les moyens médicamenteux
Sans traitement, la blastomycose évolue habituellement lentement et aboutit rarement
au décès. Le traitement dépend de la gravité de l'infection.
Les formes pulmonaires et disséminées légères ou modérées sont traitées par
itraconazole 200mg per os trois fois par jour pendant 3 j, puis 200mg per os 1 fois/j
pendant 6 à 12 mois. Le fluconazole est une alternative à l’itraconazole à la posologie de
400 à 800mg per os 1 fois/j chez les patients intolérants à l'itraconazole et dont la
maladie est bénigne.
En cas d'infection sévère mettant en jeu le pronostic vital, l'amphotéricine B est
préférée.

232
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Blastomycose

Dans les formes sévères mettant en jeu le pronostic vital, l'amphotéricine B IV est
habituellement efficace, à la posologie de 0,7 à 1mg/kg/j ou 3 à 5mg/kg/j pour la forme
liposomiale pendant 1 à 2 semaines, puis le relais est assuré par l'itraconazole 200 à
600mg/j pendant 12 mois au minimum.
En cas d'atteinte neuroméningée : AmB liposomiale est administrée à la posologie de
5mg/kg/j pendant 4 à 6 semaines et relais est assuré par l'itraconazole 200 à 600mg/j
pendant 6 à 12 mois.
Chez les enfants, la posologie de l’amphotéricine B est identique à celle des adultes.
Celle de l’itraconazole est cependant de 10mg / kg par jour (jusqu'à 400mg par jour) en
dose dégressive. La durée du traitement est de 12 mois.
Toutes les personnes infectées asymptomatiques doivent être traitées par itraconazole
afin de prévenir la diffusion extra pulmonaire.
 La chirurgie
Elle a un rôle limité : elle permet la fermeture de fistule bronchopleurale, l’évacuation
des abcès, le curetage des lésions osseuses nécrosées et le drainage des pleurésies. La
résection de cavités pulmonaires rebelles est exceptionnelle.
La chirurgie a parfois un rôle diagnostique dans des nodules ou des images d’allure
tumorale, un traitement médical antifongique doit encadrer l’intervention.

IV. Prévention/ Prophylaxie

A. But
Le but de la prévention est de rompre la chaîne de transmission.

B. Moyens/ stratégies
 Prophylaxie collective
Il est recommandé de :

- dépister et traiter les porteurs sains ;


- abattre les chiens et chats errants ;
- effectuer un contrôle vétérinaire régulier des animaux domestiques.

 Prophylaxie individuelle
Elle consiste à éviter :

233
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Blastomycose

- les zones boisées où le champignon est courant, notamment pour les


personnes immunodéprimées (déficit en polynucléaires neutrophiles et en
macrophages alvéolaires);
- tout contact avec le sol humide, les zones boisées en région d’endémie (les
brûlés, immunodéprimés) ;
- l’errance des animaux domestiques (chiens, chats).

Résumé/ Conclusion

La blastomycose ou maladie de Gilchrist est une mycose profonde granulomateuse


due à un champignon dimorphique : Blastomyces dermatitidis dont l’habitat est
constitué de sols boisés, humides et acides. Elle est endémique dans les régions
boisées d’Amérique du Nord et des cas sporadiques sont décrits en Amérique Centrale
et du Sud et en Afrique.
L’Homme se contamine par inhalation de spores et plus rarement par inoculation
accidentelle. L’atteinte pulmonaire est primitive, parfois isolée, asymptomatique ou se
manifeste par un syndrome de pneumopathie aiguë ou subaiguë ou chronique
simulant une tuberculose ou un cancer. La dissémination est toujours secondaire et
concerne la peau sous la forme de lésions verruqueuses ou ulcérées, les os, le système
génito-urinaire et le système nerveux central.
Les formes disséminées sont plus fréquentes chez les immunodéprimés.
Le diagnostic est essentiellement mycologique ou histopathologique. Il consiste à
mettre en évidence la phase parasitaire levuriforme dans les lésions à l’examen direct,
dans les pièces de biopsie et les abcès ou après culture à 37°C. La conversion de la
phase mycélienne à la phase levuriforme nécessite un repiquage des cultures dans des
milieux spéciaux, elle doit être effectuée dans des laboratoires sécurisés (laboratoire
de niveau de sécurité 3). La phase saprophyte filamenteuse est obtenue après culture
à 25-27°C.
Le traitement repose sur l’amphotéricine B et/ou l’itraconazole selon la sévérité du
tableau clinique

234
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Chromomycose

12 CHROMOMYCOSE
Rédigé par Pr Nzenze Solange (Gabon), Relu par Pr Gaye Oumar (Sénégal) et
Pr Sissinto Savi de Tové Yolande (Bénin)

235
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Chromomycose

Définition
La chromomycose ou chromoblastomycose est une mycose cutanée et sous-cutanée
chronique, causée par le développement lent, de micromycètes filamenteux noirs
(dématiés) dont les formes parasitaires caractéristiques sont des cellules fumagoïdes.
Ces pathogènes sont inoculés dans les tissus par voie transcutanée lors de la piqûre
d’un végétal (épine, écharde), ou parfois par souillure tellurique d’une plaie.

Intérêt
Bien que cosmopolite la chromomycose demeure une pathologie essentiellement
rencontrée dans les zones tropicales et subtropicales du globe. Madagascar
représente le premier foyer mondial avec une prévalence de 1 cas pour 8500 habitants
[1, 2]. Au Gabon la prévalence a été estimée à 1 pour 12500 habitants [3]. La majorité
des personnes affectées ont une activité en zone rurale et forestière [2,4, 5]. L’aspect
clinique est polymorphe, toutefois l’aspect de chou-fleur et les formes nodulaires lisses
et verruqueuses sont parmi les plus observées [2,3,6]. La mise en évidence, à
l’examen mycologique, d’éléments fongiques parasitaires pathognomoniques appelés
cellules fumagoïdes concourt sans équivoque au diagnostic de la chromomycose. Le
coût élevé des molécules antifongiques utilisées et la durée souvent longue de la
thérapie sont à l’origine de l’arrêt du traitement avant guérison complète des lésions.

Historique
La première observation clinique de cette mycose a été faite par Pedroso en 1911 à
Säo Paulo au Brésil. Rudolf, en 1914, décrit à son tour l’affection [7], mais la postérité
retient les noms de Medlar et de Lane qui approfondissent la description clinique à
partir d’un cas observé à Boston en 1915 et duquel Thaxter isole un Phialophora
verrucosa [8,9]. Dès 1914, Fontoynont et Roton présentent à la Société des sciences
médicales de Madagascar, le premier cas malgache, qui est rapporté par Brygoo en
1965 [10]. Brumpt isole, en 1922, à partir du cas de Pedroso, un champignon qu’il
nomme Hormodendron pedrosoi [11].
Pedroso et Gomez, en 1920, rapportent plusieurs nouveaux cas brésiliens qu’ils
attribuent au Phialophora verrucosa des auteurs américains. En 1922, Terra et al. [12]
proposent le nom de chromoblastomycose pour désigner cette blastomycose
provoquée par un champignon pigmenté, nom qui sera validé en 1992. A partir de
1927, de nouveaux cas ont été recensés sur le continent américain puis sur le
continent africain dont le premier fut décrit en Algérie en 1927 [13], puis en Asie en
1937 [14].

236
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Chromomycose

I. Epidémiologie

A. Agents pathogènes
Taxinomie
Les agents de la chromomycose appartiennent au règne des Fungi, à la division des
Deuteromycotina (forme de reproduction asexuée ou forme anamorphe), à la classe
des hyphomycètes et à l’ordre des Dematiaceae (hyphomycètes de couleur foncée). La
forme de reproduction sexuée (téléomorphe) de ces champignons est inconnue. Au
moins cinq espèces, réparties en 4 genres différents sont généralement reconnues
comme agents de chromomycose humaine. Il s’agit de Fonsecaea pedrosoi, de
Fonsecaea compacta, de Phialophora verrucosa, de Cladophialophora carrionii et de
Rhinocladiella aquaspersa.
Fonsecae pedrosoi est majoritairement retrouvé dans les pays à climat tropical chaud
et humide.

Morphologie
La morphologie parasitaire dans les tissus est la même pour toutes les espèces en
cause dans la chromomycose. Il s’agit d’éléments arrondis de 4 à 12µm de diamètre,
de couleur brune, pluriseptés, qui sont isolés ou groupés en amas. Ces éléments
appelés cellules fumagoïdes ou sclérotiques [15] ou encore cellules muriformes [16]
sont caractéristiques de la chromomycose et permettent de la distinguer des
phaeohyphomycoses chez lesquelles les formes parasitaires sont uniquement
filamenteuses. En culture, les agents de la chromomycose donnent des colonies
duveteuses, à croissance lente, de couleur noire ou foncée, à cause de la pigmentation
de leur paroi. Cette dernière est causée par le dépôt de mélanine de type
dihydroxynaphtalène, différente de celle de type dihydroxyphénylanine [17]. L’étude
du mycélium au microscope permet de différencier les espèces sur la base des
caractéristiques de l’appareil conidien et des formes de fructifications asexuées
caractéristiques de chaque espèce (Tableau X).

B. Habitat des champignons


Les agents de la chromomycose sont des saprophytes du sol et des végétaux (bois,
épineux, cactus, plante, etc.). Près de 90% des isolats de champignons dématiés dans
la nature, proviennent de matériel végétal [18-20].

237
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Chromomycose

C. Mode de contamination
L’Homme se contamine par voie cutanée ; le champignon est inoculé directement par
voie transcutanée, lors d’un traumatisme souvent dû à un matériel végétal souillé
(écharde, épine).
La contamination peut également être secondaire à l’infection d’une plaie par des
débris végétaux et de la terre souillés par les champignons [21].

D. Facteurs favorisants
Lors des multiples enquêtes sur la chromomycose à Madagascar, des facteurs
favorisant cette affection ont été relevés [1,2,22]. Ces facteurs sont les suivants :
- le climat, en effet, l’hygrométrie avec des précipitations de plus de 1500mm par
an et une température moyenne de 25°C favorisent le développement de F.
pedrosoi, par contre les conditions semi-arides, avec moins de 600mm de
précipitations par an, et une température moyenne supérieure à 25°C,
favorisent l’espèce C. carrionii ;
- la végétation locale, qui est hôte et vecteur des agents de la chromomycose est
un facteur favorisant majeur; dans les zones forestières, un arbuste appelé
Angivibe semble être en relation avec l’infection à F. pedrosoi ; par contre les
plantes épineuses de la famille des Didiéracées et Euphorbiacées semblent jouer
un rôle dans la transmission de C. carrionii ;
- l’activité professionnelle : il s’agit de personnes travaillant en milieu rural
(travaux agricoles) ou forestier ;
- le sexe : la prédominance masculine est rapportée par plusieurs auteurs, avec
des pourcentages variables allant de 89% à Madagascar, 82% au Mexique, 75%
au Brésil et seulement 53,1% au Gabon, où les femmes participent autant que les
hommes aux travaux agricoles [3]. A ces circonstances favorables, il faut ajouter
un facteur génétique : l’haplotype HLA-A29 pour son rôle prédisposant à
l’infection [23].

E. Répartition géographique
Madagascar représente le premier foyer mondial de la chromomycose. Des cas ont été
signalés sur d’autres îles : la Réunion, Comores, Mayotte, Djibouti et l’île Tanzanienne
de Pemba. En Afrique, les régions d’Afrique équatoriale avec principalement le Gabon,
le Cameroun, et le Congo-Kinshasa sont les plus concernées. La chromomycose est
rare en Afrique du nord. En Amérique latine, elle a été rapportée au Brésil où elle sévit

238
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Chromomycose

en Amazonie et dans l’Etat de Rio Grande et de manière plus sporadique au Venezuela,


en Colombie, au Costa Rica, au Mexique.
Dans les Caraïbes, elle est présente en République Dominicaine, à Cuba, à Puerto-Rico,
en Jamaïque, en Guadeloupe et en Martinique. Des cas ont été rapportés de plusieurs
pays d’Asie : Chine, Indonésie, Japon, Malaisie, Inde, Sri Lanka, Népal, Taïwan, mais
également d’Australie et d’Europe notamment de la France, de la Roumanie, de
l’Allemagne et de la République Tchèque.

II. Diagnostic biologique

A. Circonstances du diagnostic biologique


Eléments épidémiologiques
La chromoblastomycose est évoquée devant un patient qui vit ou qui a séjourné en
zone tropicale ou subtropicale et qui exerce ou a exercé une activité professionnelle en
zone rurale ou forestière.

Signes cliniques
Les lésions sont situées essentiellement au niveau des parties découvertes. Le membre
inférieur est atteint dans 88,5% des cas au Gabon [3] et 87,64% des cas à Madagascar
[2].
La lésion résultant du traumatisme initial, qui souvent passe inaperçu, est une papule
discrète, évoluant vers un nodule localisé au site d’inoculation du matériel végétal
infecté. Le grattage favorise, par contiguité, l’extension locale des lésions dont
l’évolution lente et chronique au niveau dermo-épidermique aboutit à des aspects
cliniques cutanés polymorphes. Toutefois les formes cliniques les plus fréquemment
rapportées sont :
- Les lésions à type de placards extensifs hyperplasiques « en chou fleur »
framboisiformes à aspect pseudo-tumoral prévalentes à Madagascar [1] et au
Gabon [3] (photo 12.1) ;

Source : Prof Kombila M. et al. [3]


Figure 12. 1 : Aspect en « chou fleur » pathognomonique:
lésions sanguinolentes, suintantes et purulentes (20 ans d’évolution)

239
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Chromomycose

- Les lésions nodulaires lisses (photo12. 2) ou verruqueuses (photo 12.3),


quelquefois d’allure tumorale, avec parfois association des 2 formes (photo 12.4).
Ces lésions sont souvent délimitées par un liseré hyperchromique ;

source : Prof Kombila M. et al. [3] source : Prof Nzenze Afène S.

Figure 12. 2 : Nodules lisses, disséminées Figure 12. 3 : Nodules verruqueux du


sur le membre inférieur (10 ans membre supérieur gauche- 35 ans
d’évolution) d’évolution.

source: Prof Kombila M. et al. [3]


Figure 12. 4 : Association de nodules lisses et d’une tumeur verruqueuse suintante.
Elephantiasis with mossy- foot (20 ans)

240
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Chromomycose

- Dans la majorité des cas, les nodules sont nombreux ; leur surface est
généralement hypochromique, recouverte de squames ou de croûtes (photo 4) ;
- Moins typiques sont les placards dyschromiques à centre cicatriciel et bords
surelevés papillomateux (photos 12.5), et les placards érythémateux, squameux,
d’aspect psoriasiforme dite psoriasis-like [6].

source : Prof Nzenze-Afène source : Prof Kombila et al. [3]

Figure 12. 5 : Plage(s) à centre cicatriciel, dyschromique à bords


nets surelevés papillomateux. Evolution : 2 à 3 ans

Des complications peuvent émailler les lésions de chromomycose. Parmi les


principales, on note les surinfections bactériennes, la dissémination lymphatique avec
adénopathies et parfois éléphantiasis. La dissémination par voie hématogène peut
occasionner des localisations cutanées à distance et des localisations viscérales [24] et
cérébro-méningées [25,26]. Plus rarement, une transformation maligne de type
carcinome dont 7 cas ont été observés à Madagascar [1, 4,] et 1 cas sur les 64 de
l’étude du Gabon [3] (photo 12.6).

Source : Prof Kombila M. et al. [3]


Figure 12. 6 : Transformation maligne : tumeur pédiculée
surmontant un placard granuleux et suintant

241
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Chromomycose

B. Diagnostic mycologique
Prélèvements
Il s’agit de prélèvements de squames, croûtes ou de biopsies.
Les lésions, au préalable désinfectées à l’alcool, sont grattées à l’aide d’un bistouri
stérile. Les squames et croûtes obtenues sont recueillies dans une boîte de Pétri
stérile.

Examen direct
Le prélèvement est déposé sur une lame porte objet dans une goutte de solution de
potasse diluée à 30% (KOH 30%). La potasse permet de ramollir le prélèvement et de
l’éclaircir, c’est-à-dire de rendre visibles les éléments parasitaires fongiques qui s’y
trouvent. Le prélèvement est examiné au microscope entre lame et lamelle, au
grossissement x10 puis x40. Il met en évidence des formations sphériques, de couleur
brune, septées, de 4 à 12µm de diamètre, appelées cellules fumagoïdes (photos 12.7
et 8). Elles sont isolées ou groupées en amas, et peuvent dans de rares cas être
bourgeonnantes, germinatives voire filamenteuses (photo 9).

Figure 12. 7 : Cellules fumagoïdes pathognomoniques de


la chromomycose) - coupe histologique (Patient photo 4)
Cliché : Laboratoire d’anatomo-pathologie. Libreville - Gabon

Source : Prof Nzenze Afène


Figure 12. 8 : Présence d’une cellule fumagoïde brune, isolée,
septée dans prélèvement éclairci par KOH à 30%

242
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Chromomycose

Source : Prof Kombila et al. [3]

Figure 12. 9 : Aspect microscopique d’une cellule fumagoïde germinative

Le diagnostic différentiel peut se faire avec d’autres mycoses cutanées telles que les
mycétomes, la blastomycose, la sporotrichose mais également avec la lèpre
lépromateuse, la tuberculose cutanée, la leishmaniose cutanée, les lésions
dermatologiques de tréponématose endémique et de Kaposi.

Culture et identification des espèces


Les squames, croûtes ou fragments de biopsie sont déposées sur milieu de Sabouraud
additionné de chloramphénicol. L’incubation se fait à 26-28°C voire 30°C, le délai
d’obtention en culture des agents de chromomycose est long, allant de 20 jours à 45
jours voire plus. Les colonies sont duveteuses noires ou foncées (photo 9) et cette
macroscopie ne permet pas de différencier les espèces en cause.

Figure 12. 10 : Colonies noires, veloutées de Fonsecaea pedrosoi sur milieu de Sabouraud
chloramphénicol
photo : Prof Nzenze-Afène S. (patient photo 3)

Le mode de conidiogénèse et les différents types de fructifications asexuées observés


au microscope vont permettre au mycologue d’identifier avec précision l’espèce en
cause (Tableau 12. 1).

243
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Chromomycose

Tableau 12. 1 : Les différents types de fructifications asexuées (anamorphes) des agents de
chromomycose

Type Type Type


Phialides acrotheca hormodendrum Hormodendrum
court Long
Fonsecaea pedrosoi + + + 0
Fonsecaea compacta + + +++ 0
Phialophora verrucosa +++ 0 0 0
Cladophialophora
+ 0 + +++
carrionii
Rhinocladiella
₋ + 0 0
aquaspersa

Figure 12. 11 : Forme de fructification _de type acrotheca de Fonsecaea pedrosoi


Source: Prof Nzenze Afène S. (patient photo 3)

C. Diagnostic histologique
Il concourt, tout comme l’examen direct des squames, à la confirmation de la
suspicion clinique. Le prélèvement consiste en une biopsie cutanée superficielle ou
sous cutanée profonde. L’examen histologique met en évidence les transformations
tissulaires caractéristiques: il s’agit d’une hyperplasie épidermique avec
hyperacanthose et papillomatose, associée à un infiltrat inflammatoire granulomateux,
fait d’abcès, de micro-abcès dermiques, de cellules épithélioïdes giganto-cellulaires, et
d’une fibrose périphérique extensive, dont l’importance est fonction de la durée
d’évolution de la maladie. Cette réaction inflammatoire est organisée autour des

244
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Chromomycose

cellules fumagoïdes qui, par ailleurs, sont aussi observées dans le cytoplasme des
cellules géantes. Les colorations à l’hématéine-éosine-safran (HES), au PAS (Acide
périodique de Schiff) et au Gomorit-Grocott permettent une excellente mise en
évidence des cellules fumagoïdes au sein des coupes histologiques [27].

D. Diagnostic Immunologique spécifique


Détection d’anticorps
En pratique courante, le diagnostic de chromomycose repose sur la mise en évidence
des cellules fumagoïdes, à l’examen direct des prélèvements cutanés et des tissus sur
coupes histologiques, et à la culture de ces derniers. Toutefois, des techniques
immunologiques ont été développées pour aider au diagnostic de cette affection. La
technique ELISA, utilise deux antigènes, l’un provenant d’une souche de Fonsecaea
pedrosoi, et l’autre d’un Cladophialophora. Ce test a une sensibilité et une spécificité
supérieure à 85% et une valeur prédictive positive de 95% [28]. Outre l’ELISA, les
techniques d’immunoprécipitation permettent la détection d’anticorps anti-Fonsecaea
pedrosoi dans la chromomycose [29].

E. Diagnostic moléculaire
Le diagnostic moléculaire a l’avantage d’être rapide et spécifique et très utile dans le
cas d’une identification morphologique difficile. En effet, les infections à Fonsecaea
peuvent être décelées par PCR [30,31].

III. Principes thérapeutiques

A. But
Le but de la prise en charge thérapeutique de la chromomycose est d’éliminer l’agent
pathogène et de guérir le patient.

B. Moyens thérapeutiques
Ils font appel à :
- la chirurgie, aux moyens physiques tels que le laser au CO2, à la thermothérapie
et à la cryothérapie [6] ;

245
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Chromomycose

- à la chimiothérapie : divers traitements ont été utilisés aboutissant à des


résultats variables. La 5- fluorocytosine (Ancotil®) a été longtemps le traitement
de référence, supplanté actuellement par les molécules antifongiques
imidazolés : l’itraconazole (Sporanox®), le fluconazole (Triflucan)®), et le
posaconazole (Noxafil®). Le Kétoconazole (Nizoral®) a été retiré du marché, pour
cause d’effets secondaires. Par ailleurs, la terbinafine (lamisil®) antifongique de
la classe des allylamines, possède une activité fongicide à la fois in vivo et in
vitro, à la différence des molécules imidazolés et constitue un médicament de
référence pour le traitement de la chromomycose [32, 33, 41].

C. Indications/posologies
Le traitement de la chromomycose ou chromoblastomycose n’est pas standardisé.
Plusieurs schémas thérapeutiques ont été utilisés avec des molécules différentes.

Dans le cas de la chromomycose à lésion unique, récente (moins d’un an d’évolution)


Le traitement repose sur l’exérèse chirurgicale complète, ou les moyens physiques
(laser au CO2, thermothérapie, cryothérapie) associé à un traitement médicamenteux,
afin d’éliminer d’éventuelles cellules fongiques, persistant dans le derme profond, et
qui auraient échappé à l’éxérèse [6,34]. La terbinafine à simple dose (250mg/j) ou à
double dose (500mg/j), l’itraconazole (200mg à 400mg/j) pendant 6 à 12 mois, voire 24
mois ont montré une bonne efficacité sur les lésions récentes et peu étendues [35,36].

En cas de lésions de chromomycose étendues, multiples et anciennes


Une antibiothérapie préalable au traitement antifongique devra être instaurée en cas
de surinfections bactériennes.
Depuis 2003, dans de nombreux pays, en particulier à Madagascar, la terbinafine
(lamisil®), antifongique à large spectre de la classe des allylamines est le traitement de
référence, en raison de sa bonne tolérance, de son activité antifongique in vivo et de
son activité anti-inflammatoire [37]. La posologie varie en fonction de l’étendue et de
l’ancienneté des lésions 500mg (double dose) d’emblée, voire 1000mg (quadruple
dose) pendant au minimum 6 mois.
La stratégie préconisée à l’issue de nombreuses études est celle de l’association d’au
moins 2 médicaments principalement la terbinafine et l’itraconazole, pouvant par
ailleurs être associées toutes les deux à l’amphotéricine B [39] ; d’autres associations:
itraconazole et amphotéricine B [39], mais aussi itraconazole et 5-fluorocytosine [40]
sont décrites. Le posaconazole est un traitement de deuxième intention, après échec
ou intolérance au traitement antifongique initial.
Remarque : Quels que soient les médicaments utilisés, plusieurs mois de traitement
sont requis pour obtenir la guérison des lésions.

246
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Chromomycose

D. Suivi thérapeutique
Le traitement est à poursuivre jusqu’à la cicatrisation des lésions et la négativation des
examens mycologiques, dont la traduction est la disparition des cellules fumagoïdes au
sein des tissus. Le suivi thérapeutique met en exergue deux difficultés majeures : la
première est liée à l’impossibilité pour la majorité des patients de prendre en charge le
traitement compte tenu de son coût et de sa durée, la seconde est inhérente à
l’efficacité limitée des antifongiques sur le long terme. Compte tenu de cette réalité,
l’observance du traitement est souvent mauvaise, ce dernier est émaillé de récidives.
La majorité des patients sont perdus de vue après affaissement ou effacement des
lésions, sans guérison définitive [3, 42] (photo 11).

Figure 12. 12 : Effacement et cicatrisation de quelques nodules verruqueux chez la


patiente photo 3 traitement >2 ans par terbinafine puis itraconazole photo : Prof Nzenze
Afène S.

IV. Prévention

A. Buts
Les micromycètes responsables de la chromomycose étant des saprophytes du sol et
des végétaux, la prévention de la chromomycose doit porter sur l’éducation de la
population cible. Par ailleurs, le diagnostic précoce doit aider à prévenir l’installation
de lésions évoluées, pour lesquelles le succès thérapeutique demeure incertain.

B. Stratégies
- Sensibiliser la population-cible sur le mode de transmission de la maladie et sur la
nécessité pour elle d’utiliser des moyens de protection tels que le port de
chaussures et de vêtements protégeant les membres et de consulter en cas de
piqûre par un végétal épineux.

247
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Chromomycose

- Améliorer les capacités diagnostiques afin d’amener les malades à consulter


précocement, c’est-à-dire dès l’apparition des lésions.

Résumé

La chromomycose ou chromoblastomycose est une mycose sous-cutanée et cutanée


chronique, causée par le développement lent, de micromycètes filamenteux dématiés
dont les formes parasitaires caractéristiques sont des cellules fumagoïdes. Bien que
cosmopolite, elle est observée avec prédilection à Madagascar, en Amérique latine
particulièrement au Brésil, et en Afrique noire principalement au Gabon. La
contamination se fait par inoculation des micromycètes pathogènes dans les tissus
cutanés et sous-cutanés, lors de la piqûre par un végétal, hôte naturel de ces
champignons microscopiques. Le diagnostic, souvent tardif, repose sur la mise en
évidence des cellules fumagoïdes dans les prélèvements cutanés ou en coupe
histologique au sein d’un granulome pathognomonique de l’affection. La principale
complication est la surinfection bactérienne. Le traitement de référence est la
terbinafine à la dose moyenne de 500mg/j sur les lésions évoluées. La prise en charge
thérapeutique est difficile car souvent trop longue et onéreuse pour des patients au
revenu financier faible.

Conclusion
La chromomycose est une mycose tropicale, négligée des populations qui en sont
victimes et encore méconnue de nombreux praticiens. Un effort de sensibilisation,
d’éducation de la population cible, de même que la formation continue des médecins,
pourraient aider à réduire les risques de contamination et amener à un diagnostic et
une prise en charge thérapeutique précoces.

248
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Chromomycose

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250
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

13 SPOROTRICHOSE
Rédigé par Pr Bamba Sanata (Burkina Faso),
Relu par Pr Adoubryn Koffi Daho (Côte d’Ivoire) et Pr Ndiaye Mouhamadou (Sénégal)

251
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

Introduction
Définition
- Définition
La sporotrichose encore appelée « syndrome du jardinier » ou « maladie des éleveurs
de roses » ou « Christmas tree disease » est une mycose chronique ou subaiguë,
cosmopolite qui sévit sur un mode endémo-épidémique ou sporadique. Cette mycose
est due à Sporothrix schenckii, actuellement connu sous le nom de complexe d’espèces
S. schenckii constituant un groupe de champignons caractérisés par des différences
majeures pour les modes de transmission, les prédilections de l'hôte, la virulence des
espèces et leurs susceptibilités aux antifongiques [1- 4]. Les espèces du complexe
Sporothrix schenkii émergent sous forme d'épidémies en Afrique du Sud, en Amérique
latine et en Chine [5- 7].
Principalement transmise par effraction cutanée, la sporotrichose se traduit par des
lésions dermo-épidermiques polymorphes subaiguës ou chroniques et, en cas
d’immunodépression (Sida), par une atteinte disséminée [8-10].
- Intérêt
L’intérêt actuel de l’étude de la sporotrichose est quadruple :
- En santé publique, la sporotrichose est une pathologie méconnue en Afrique
Subsaharienne. Aucune donnée n’existe pour la région ouest – africaine en particulier
au Burkina Faso. Cependant, des cas de sporotrichose ont été notés en Afrique du Sud,
au Zimbabwe et ailleurs en Asie, au Brésil, en Amérique centrale et au Mexique [5, 6 ;
8, 11 ; 12].
La sporotrichose est une atteinte relativement rare. Cependant, au début des années
1940, une épidémie a touché 3 000 mineurs d’or en Afrique du Sud. Une deuxième
épidémie de sporotrichose lympho-cutanée dans une mine d'or sud-africaine en 2011
touchait 87 miniers, présentant des lésions cutanées. La confirmation au laboratoire
était effective chez 10 patients, et sept avaient des lésions cliniques compatibles [5;6].
A Madagascar, onze cas ont été rapportés de 2001 à 2003, où la maladie avait été
décrite de 1909 à 1923 puis oubliée [7].
Ailleurs en Amérique du Sud, une forte incidence de sporotrichose chez les enfants est
rapportée au centre sud du Pérou avec une prédominance de la forme lymphocutanée
sur la face [11].
- Au plan clinique, la sporotrichose, causée par les espèces du complexe de Sporothrix
schenckii, est la mycose sous-cutanée la plus répandue dans de nombreuses régions
d'Amérique latine [12]. La forme pulmonaire est rare et répond mal au traitement. Un
cas de sporotrichose pulmonaire invasive chez un garçon de onze ans infecté par le VIH

252
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

a été rapporté à Kinshasa en République démocratique du Congo et traité avec succès


par du fluconazole oral [13].
- Au plan diagnostic: les méthodes actuelles fondées sur la morphologie et la
physiologie sont insuffisantes en raison de phénotypes étroitement liés des espèces du
complexe S. schenkii. En outre, des composants se chevauchent entre les espèces
pathogènes et non pathogènes. Il existe un besoin critique de nouveaux outils de
diagnostic spécifique, sensibles et rentables, d’où l’intérêt des techniques moléculaires
pour une meilleure identification des espèces du complexe S. schenkii qui ont une
susceptibilité différente aux antifongiques. Plusieurs marqueurs novateurs, basés sur
des séquences de gènes de calmoduline (CAL), pour le diagnostic à grande échelle et
l'épidémiologie du genre Sporothrix ont été récemment mis au point. Des marqueurs
spécifiques ont ainsi permis l’identification des espèces du complexe S. schenkii [4].
-Au plan thérapeutique : plusieurs options sont disponibles. Cependant, l’efficacité
des antifongiques disponibles est étroitement liée à l’espèce du complexe S. schenkii
identifiée. Des alternatives thérapeutiques utilisant une formulation non lipidique
d’amphotéricine B dans le traitement de la sporotrichose systémique due à Sporothrix
brasiliensis ont été testées avec succès au Brésil [14]. La cryothérapie a été utilisée
avec succès, et la thermothérapie par rayonnement infrarouge semble aussi efficace
dans les lésions limitées [15]. La guérison spontanée peut également s’observer lors de
formes très localisées.

Historique
En 1898, Schenck de « Johns Hopkins Hospital » à Baltimore décrit le premier cas de
sporotrichose.
En 1990, le second cas a été observé toujours aux USA, par Hektoen et Perkins qui
donnèrent le nom de Sporothrix schenckii à l’agent isolé par aspiration de lésions
cutanées.
En 1903, une nouvelle espèce variété Sporothrix lureii aurait été isolée en Italie.
Entre 1941 et 1944, une épidémie à S. schenckii a touché 3000 mineurs d’or en Afrique
du Sud sous la forme lymphocutanée.
En 1984, Fukushiro signale que les systèmes de santé ont recensé plus de 2500 cas
depuis 1945 au Japon.
C’est en 1986 que l’on signale le premier cas de sporotrichose associée au SIDA.
En 1988, une épidémie du même champignon atteint 15 Etats des USA chez 84
forestiers et jardiniers.

253
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

I. Epidémiologie

A. Agent pathogène

1. Taxonomie / Classification
- Régne: Fungi
- Phylum: Ascomycota
- Classe: Sordariomycetes
- Ordre: Ophiostomatales
- Famille: Ophiostomataceae
- Genre: Sporothrix
- Espèce: Sporothrix schenckii.

Actuellement, il a été proposé, sur la base d'aspects physiologiques et moléculaires,


que S. schenckii est un complexe d'espèces distinctes comprenant: Sporothrix
brasiliensis, Sporothrix mexicana, Sporothrix globosa, S. schenckii sensu stricto,
Sporothrix luriei et Sporothrix albicans (anciennement Sporothrix pallida) [1-4 ; 16].

2. Morphologie [9 ; 10 ; 17 ; 18]
Les espèces du complexe sont des champignons dimorphiques se présentant sous
deux phases:

 Une phase saprophytique (25-30°C) : ces espèces se présentent sous forme


filamenteuse dans le milieu extérieur et en culture avec des :
- hyphes septés;
- conidiophores avec des conidies denticulées fixées le long des hyphes ou
regroupées en rosette mesurant 2 à 3µm de diamètre;
- colonies verruqueuses noires, brunes, grises ou blanches, glabres ou laineuses.

Figure 13. 1 : Forme saprophytique du complexe de Sporothrix schenckii


([9] / Atlas de mycologie médicale. Paris Masson)

254
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

 Une phase parasitaire (37°C) in vivo (dans les tissus): ces espèces se présentent sous
forme de cellules levuriformes bourgeonnantes ovales ou fusiformes, mesurant 2,5
à 3μm de diamètre sur 3,5 à 6,5μm de longueur appelées « corps en cigare » ou
« cigar-bodies ».

Figure 13. 2 : Corps en « cigare » ou en « navet »


correspondant à la forme levure du complexe de Sporothrix
schenckii ([9] / Atlas de mycologie médicale. Paris Masson)

3. Biologie [9]
Les espèces du complexe S. schenckii se reproduisent par deux voies: la voie asexuée
(par bourgeonnement) et la voie sexuée (par production d’ascospores).
Ces espèces sont inactivées par la chaleur humide (121°C pendant 15mn). Elles sont
sensibles à l’éthanol à 70%, à l’hypochlorite de sodium (500-1000ppm), au peroxyde
d’hydrogène accéléré (6 000ppm), à un mélange sulfate de zinc anhydre et au
formaldéhyde.

4. Pathogénie [8 ; 10 ; 19]
Après la contamination résultant généralement d’un traumatisme par du bois ou des
végétaux infestés, plus rarement d’une griffure, vient une période d’incubation
variable de quelques jours à 3 semaines pouvant atteindre 3 mois. Elle se traduit par
un nodule ulcéro bourgeonnant, appelé chancre sporotrichosique, d’évolution
ulcérée et/ou végétante, simulant une pyodermite ou un granulome pyogénique.

B. Habitat /Ecologie [3 ; 9 ; 17]


Saprophytes ubiquitaires de l’environnement, les espèces du complexe Sporothrix
schenckii sont capables de survivre dans le sol, les eaux de surface et la végétation en
décomposition, le bois, du foin, les graines et divers épineux (forme mycélienne).

255
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

Elles sont retrouvées chez les animaux (chat, chameau, cheval) aussi chez les rongeurs,
les poissons, les perroquets, les animaux sauvages et chez l’Homme (sous forme
levures ou corps en cigare).
La sporotrichose est couramment observée chez l’Homme et l’animal. La sporotrichose
féline est d’ailleurs la zoonose la plus fréquente dans le monde [20-24]. En outre, des
cas humains par contact avec des chiens malades et par suite d’une morsure de
rongeur ont été rapportés [21 ; 22].

C. Mode de contamination
Les espèces du complexe sont des champignons ubiquitaires de l’environnement
retrouvées dans les plantes en décomposition, le bois pourri, les eaux de surface, et, à
l’occasion, les piscines. Chez l’Homme et l’animal, l’infection est presque toujours
consécutive à une effraction cutanée. La contamination survient par contact direct
avec les lésions ulcéreuses ou par les griffures ou les morsures de chat ou piqûre de
rongeurs, parfois, de chien ou d’écureuil [19 ; 21 ; 22].

L’inoculation transcutanée du champignon peut résulter d’une piqûre par une écharde,
une épine ou une ronce, un insecte ou un outil de jardinage ainsi que de la
manipulation de copeaux de bois ou de balles de foin. Les personnes devant manipuler
des chats ou chiens malades sont aussi à risque de contracter l’infection [21 ; 22].
La possibilité d’une contamination par voie aérienne du champignon doit être
envisagée. Toutefois, la contamination inter humaine est rare.

D. Facteurs favorisants [13 ; 19-23]


Parmi ces facteurs, on peut citer en autres :
- L’ignorance du mode de contamination ;
- Le contact avec les animaux (chats, chiens) : l’augmentation du taux d’incidence de la
sporotrichose chez les enfants du centre-sud du Pérou, semblait acquise
principalement par contact avec des chats ;
-La culture de roses : cette pratique professionnelle semble avoir un lien avec la
sporotrichose encore appelée « syndrome du jardinier » ou « maladie des éleveurs
de roses ;
- La profession : les activités professionnelles associées à l’infection comprennent la
charpenterie, le jardinage, l’agriculture, l’horticulture, la fleuristerie, l’apiculture, la
chasse, la pêche, l’élevage d’animaux et la pratique vétérinaire du fait de contact de la
terre et des végétaux où le champignon vit en saprophyte et des animaux (vétérinaire).
Au cours d’une épidémie qui a touché Rio de Janeiro (Brésil) entre 1998 et 2001, un
total de 178 cas étaient observés dont 5% de vétérinaires ;

256
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

-L’âge : la sporotrichose pulmonaire touche principalement les hommes de 30 à 60 ans


avec des facteurs de comorbidités (tabac, alcool, VIH) ;
Les conditions de température et d’humidité influencent de manière importante la
répartition géographique des zones endémiques et expliquent le développement
d’épidémies comme celle des mines du Transvaal en Afrique.

E. Répartition géographique [5-8 ; 10 ; 11 ; 19 ; 24]


La sporotrichose est principalement observée dans les régions tropicales et
subtropicales humides (Brésil, Colombie, Costa Rica, delta du fleuve Mississippi,
Venezuela, Guatemala, Mexique, Asie du Sud-Est [particulièrement en Indonésie],
Afrique du Sud et Australie).

En Europe, on a observé une augmentation des cas en Italie, tandis que seuls des cas
sporadiques ont été signalés dans les autres pays.

La prévalence de l’infection est supérieure en Asie, au Brésil, en Amérique centrale, au


Mexique, en Afrique du Sud et au Zimbabwe.

Figure 13. 3 : Répartition géographique de la sporotrichose [24]

257
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

II. Diagnostic biologique

A. Circonstances du diagnostic biologique/Eléments


d’orientation [8-10 ; 17 ; 18]
a) Éléments épidémiologiques
- L’origine géographique : séjour en zone d’endémie, essentiellement en régions
tropicales et subtropicales humides (Amérique latine, Asie du Sud-Est
particulièrement en Indonésie, Afrique du Sud, Soudan, Madagascar et
Australie).
- La profession : principalement les jardiniers, les charpentiers, les fleuristes, les
vétérinaires, les éleveurs d’animaux.
- L’âge : les hommes de 30 à 60 avec des facteurs de comorbidités (tabac, alcool,
VIH) pour la sporotrichose pulmonaire.

b) Signes et syndromes cliniques

La sporotrichose se traduit par des lésions dermoépidermiques polymorphes


subaiguës ou chroniques, et, en cas d’immunodépression, par une atteinte
disséminée.

Les principales formes cliniques d’orientation sont :

- Forme lympho-cutanée : elle est la plus fréquente de la maladie, observée dans plus
de 75% des cas. Elle est caractérisée par l’apparition d’une papule indurée d’environ 2
à 4 cm de diamètre entre 7 et 30 jours après l’inoculation du champignon dans la peau.
Une induration progressive mène à la formation d’un nodule, qui est suivie d’une
ulcération encore appelée gomme ou chancre sporotrichosique.

- Forme cutanée fixée ou localisée : elle est observée chez certains patients. Aucune
dissémination lymphatique ne se produit au cours de l’évolution de l’atteinte, les
lésions observées demeurant localisées au site de l’inoculation initiale. Cette atteinte
est nommée sporotrichose cutanée localisée. Des lésions papulaires, des plaques et
des lésions nodulaires, verruqueuses ou ulcérées peuvent apparaître sur la face, le
cou, le tronc ou les jambes. La chronicité est fréquente en raison de l’absence de
résolution spontanée. Un érythème noueux est possible.

- Autres formes cliniques peuvant conduire aux circonstances du diagnostic


biologique. Il s’agit de localisations assez rares telles que :

258
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

 les formes ostéoarticulaires : elles sont observées chez jusqu’à 80 % des


patients, qui peuvent présenter une monoarthrite associée à de l’œdème, une
effusion synoviale et une atteinte fonctionnelle. La main, le poignet, le coude,
la cheville et le genou sont les sièges les plus fréquents. En l’absence de
traitement, l’infection évolue vers l’ostéomyélite. Cette forme touche presque
exclusivement les patients présentant des déficits profonds de l’immunité
cellulaire ;
 les formes muqueuses : elles sont caractérisées par la formation de nodules
dans le nez, la bouche, le pharynx, le larynx et la trachée. Elles peuvent être
confondues avec la stomatite, la glossite, la laryngite ou les rhinites d’autres
étiologies ;
 la forme pulmonaire (pneumopathie consécutive à l’inhalation ou à la
dissémination hématogène du champignon), cette localisation est souvent
cavitaire ; il s’agit d’un pseudo tuberculose associant la lymphadénopathie
hilaire et les épanchements pleuraux ;
 les formes cérébroméningées : elles sont extrêmement rares et presque
exclusivement associées à l’immunosuppression ;
 les formes disséminées: elles sont observées chez l’immunodéprimé ;
 les localisations oculaire, conjonctivale, génitale et pénienne: elles sont aussi
observées à quelques rares occasions.

B. Modifications biologiques non spécifiques


La sporotrichose évolue suivant un mode chronique ; elle ne s’accompagne
généralement pas de signes systémiques.

Plus rarement, la maladie peut se disséminer dans l’organisme au niveau des viscères
(atteinte multi viscérale en cas de sida par dissémination hématogène).

C. Diagnostic mycologique [9 ; 17 ; 18 ; 24 ; 25]

1. Prélèvements
Après asepsie antibactérienne soigneuse, le pus des lésions, les squames ou les croûtes,
sont prélevés par grattage à l’aide d’un bistouri ou d’une curette.

En cas d’atteinte profonde, on réalise le recueil des exsudats, des biopsies d’organes (la
biopsie de la synoviale est bien supérieure à la ponction articulaire), des aspirations
bronchiques ou une ponction de liquide céphalo-rachidien et, rarement, le sang

259
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

peuvent également être mis en culture, dans les cas de localisations extra cutanées,
selon la symptomatologie.

2. Techniques
a) Examen mycologique direct
L’examen direct se réalise entre lame et lamelle en dilacérant finement le
prélèvement. Les frottis sont colorés au Gram après fixation.
La forme parasitaire est souvent difficile à observer, car peu abondante. Il s’agit
d’éléments levuriformes appelés « corps en cigare ».
Toutefois, un examen direct négatif n’est pas suffisant. C’est la culture qui fera le
diagnostic.

b) La culture
Elle est réalisée sur le milieu de Sabouraud (gélose type agar-glucose-peptone) placé à
25-27°C (obtention de filaments mycéliens ou hyphes) et, d’autre part, sur la gélose au
sang placée à 37°C en atmosphère humide (obtention de levures).
C’est cette transformation réversible dépendant à la fois de la température et de la
composition du milieu qui est caractéristique du complexe Sporothrix schenckii,
champignon thermodimorphique.
Le tube est préférable à la boîte de Pétri. Il doit être muni d’un bouchon à vis
hermétique, qui permet un meilleur confinement de la culture en évitant sa
déshydratation et les risques de contamination.

3. Résultats et interprétation : Identification de la


culture
a) Examen macroscopique

Les colonies se développent rapidement en 3 à 7 jours à la température ambiante,


mais le délai d’obtention des cultures est parfois retardé et impose de garder les
tubes 4 semaines.

L’identification mycologique se fait à partir de la morphologie des colonies, malgré de


grandes variations (sectorielles) d’aspect sur une même culture.

Sur Sabouraud à 25 - 27°C, les colonies ont un aspect crémeux et sont plates à surface
ondulée. La teinte va du blanc crème au brun chocolat en passant par toutes les
nuances, et devient progressivement noire. Elles se recouvrent de replis en rayons
avec le temps.

260
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

Sur la gélose au sang à 37°C, l’aspect est celui de petites colonies crémeuses, humides
et blanchâtres.

Figure 13. 4 : Aspect microscopique des colonies de la culture sur gelose au sang
à 37°C (Aspect blanchâtre devenant brunâtre)
(Photo TP de Cours Pasteur, Paris 2009)

b) Examen microscopique

L’aspect microscopique (au grossissement 40) peut être précisé en effilochant la


culture à l’aide de l’écouvillon en coton, ou en appuyant un morceau de scotch tenu
avec la pince et placé dans une goutte de bleu de lactophénol entre lame et lamelle.

Sur Sabouraud à 27°C : on retrouve des hyphes septés caractérisés par leur finesse et
leur aspect gracile et hyalin. Des filaments branchés perpendiculairement portent de
petites conidies, ovoïdes ou allongées, claires (mesurant 1,5 à 2,5 sur 2,5 à 5,5μm).
Puis apparaissent des macroconidies (mesurant de 2,5 à 4μm) en goutte ou
triangulaires en toupie et de coloration brune, placées en manchon autour des
filaments.

261
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

Figure 13. 5 : Macroconidie en bouquets (mesurant de 2,5 à 4μm) ou en goutte ou en


triangulaires en toupie et de coloration brune placées en manchon autour des filaments
sur milieu de Sabouraud à 25-27°C
(Photo TP de Cours Pasteur, Paris 2009)

Figure 13. 6 : Blastospores solitaires (Photo TP de Cours Pasteur, Paris 2009)


Sur gélose au sang à 37°C, on observe des levures ovales en cigare (mesurant 2,5 à 3 sur 3,5
à 6,5μm). Certaines possèdent des tubes germinatifs rappelant leur origine filamenteuse.

Figure 13. 7 : Corps en « cigare » ou en « navet » correspondant à la forme levure du


complexe Sporothrix schenckii (Gomori X100), sa forme est variable suivant l’axe de la
coupe (Coll. H I A Sainte Anne / HIA Val-de-Grâce)

262
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

D. Diagnostic immunologique spécifique [26 ; 27]


Les techniques immunologiques sont peu contributives au diagnostic biologique de la
sporotrichose. En effet, ni les techniques classiques immunologiques comme les tests
d’agglutination, de précipitation, de fixation du complément ou l’’immunodiffusion, ni
l’immunofluorescence et les méthodes immunoenzymatiques, ni l’intradermoréaction
(IDR) à la sporotrichine (d’extrait de phase levure dilué et purifié), n’aident réellement
au diagnostic immunologique de la sporotrichose ; d’autant qu’en zone d’endémie
l’IDR peut être positive chez des sujets n’ayant jamais montré le moindre signe clinique
de sporotrichose. L’IDR est en effet positive chez moins de 90% des cas confirmés de
même que chez les patients présentant des antécédents de sporotrichose. Elle est
considérée peu utile dans le diagnostic clinique de l’infection.
Les techniques classiques immunologiques sont à réserver aux formes profondes et
doivent être interprétées selon le contexte clinique et épidémiologique.

E. Diagnostic moléculaire (PCR) [4 ; 16 ; 28]


Le génotypage et le diagnostic moléculaire de Sporothrix schenkii sont basés sur
l’identification des biomarqueurs génétiques utilisant des techniques telles que
l'amplification aléatoire d'ADN polymorphe (ou Random Amplified Polymorphic DNA
(RAPD)), le polymorphisme des fragments amplifiés de restriction (ARFLP ou
Amplified Fragment Length Polymorphism), la Polymérisation de Réaction en Chaîne
combinée au Polymorphisme des fragments de restriction (ou PCR-Restriction
Fragment Length Polymorphism (PCR-RFLP)), ou par des techniques d'empreintes
protéiques comme la désorption-ionisation laser assistée par matrice (MALDI TOF).
La méthode de référence pour la reconnaissance des espèces est basée sur les
séquences d’ADN localisées sur les loci génomiques qui codent pour des protéines
telles que la calmoduline, la bêta-tubuline et le facteur d'allongement de la traduction.
En outre, les espaceurs internes transcrits du Ribosome sont aussi recommandés
comme marqueurs de diagnostic de Sporothrix.
Parmi les techniques de diagnostic disponibles, les méthodes basées sur la PCR
prédominent car elles ont classiquement une sensibilité et une spécificité plus élevées
à distinguer les espèces de Sporothrix comparés aux tests de phénotypage. Cependant,
ces techniques (PCR nichée) ne sont pas utilisées en routine.
Les amorces spécifiques sont disponibles pour l’identification des espèces du complexe
S. schenkii, pour détecter l’ADN de Sporothrix des tissus frais et des échantillons
biologiques des animaux expérimentalement infestés. La taxonomie moléculaire a, en
effet, permis récemment de montrer que l'agent responsable de la sporotrichose,
Sporothrix schenckii, est en fait un complexe d'espèces. Au moins six espèces ont été
individualisées : Sporothrix brasiliensis, Sporothrix luriei, Sporothrix globosa,

263
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

S. schenckii sensu stricto, Sporothrix mexicana et Sporothrix pallida grâce à la biologie


moléculaire.

F. Diagnostic histologique [17 ; 29]


L’analyse histologique est souvent le mode de découverte précoce de la sporotrichose,
alors que le diagnostic n’a généralement pas été évoqué cliniquement. Les biopsies de
tissu cutané, les ganglions et des nodules sous-cutanés sont colorées au periodic acid
Schiff (PAS), ou à l’hémalun-éosine-safran (HES). L’observation de ces biopsies colorées
montre une réaction granulomateuse épithélioïde, gigantocellulaire et suppurée au
centre. Il existe parfois une hyperplasie pseudo épithéliomateuse périphérique, avec
des micro-abcès dermiques ou intraépidermiques, correspondant à des phénomènes
d’élimination des cellules fungiques.
Les levures, bien colorées par le PAS ou le Gomori-Grocott, sont à rechercher dans la
zone suppurée : elles apparaissent sous forme ronde (en coupe transversale) ou en
navette (en coupe longitudinale) de 3,5 à 6,5μm de long, avec bourgeonnement
polaire à base large de 2,5 à 3μm d’épaisseur.

Figure 13. 8 : Section d'une lésion cutanée fixe indiquant les formes levures du complexe
Sporothrix schenckii après coloration au Gomori-Grocott
(Photo TP de Cours Pasteur, Paris 2009)

Le signe indirect est représenté par le corps astéroïde (phénomène de Splendore-


Hoeppli). Ce nodule extracellulaire, centré autour d’un élément fungique, de 10 à
30μm de diamètre, de forme stellaire avec des rayons de matériel éosinophile, traduit
la réaction de l’hôte dans les formes chroniques.

264
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

Figure 13. 9 : Corps astéroïde une forme ronde, étoilée ou massuée mesurant jusqu’à 10µm
de diamètre, “corps asteroïdes” (phénomène de Splendore-Hoeppli)
(Photo de Cours Pasteur, Paris 2009)

III. Principes thérapeutiques

A. But
Le but du traitement est de stériliser le foyer infectieux et d’éviter des complications
(dissémination en cas d’immunodépression sévère).

B. Moyens
Il existe des moyens médicamenteux et autres thérapies.

1- Moyens médicamenteux [12 ; 14 ; 15 ; 30-35]


Les antifongiques disponibles sont : I’Itraconazole, le fluconazole, la solution saturée
d’iodure de potassium (IK), la griseofulvine, le kétoconazole, d’autres triazolés
(Voriconazole, saperconazole, posaconazole, ravuconazole), la terbinafine,
l’amphotéricine B (Ampho B) et la 5-fluorocytosine.

2- Autres thérapies [15]


- La cryothérapie,
-La thermothérapie par rayonnement infrarouge.

265
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

C. Indications/posologie

1- Moyens médicamenteux
-Formes cutanéo-lymphatiques et fixées : les médicaments utilisés sont :

 Itraconazole (Sporanox®) : il est le traitement de choix de la sporotrichose


lymphocutanée, à raison de 100 à 200mg/j durant 3 à 6 mois (5mg/kg/j chez
l’enfant sans dépasser 200mg/j); les doses prescrites sont plus fortes (200 à
400mg/j) lors des formes ostéoarticulaires et des disséminations viscérales au
cours du VIH avec une durée de traitement très longue, au minimum de 6 mois,
allant jusqu’à un an et demi ;
 Solution saturée IK : elle est utilisée en alternative si l’Itraconazole n’est pas
disponible. Elle est administrée per os (dans du lait) pendant au moins 3 mois à
la posologie de 5 à 50 gouttes x 3/j (à utiliser sur 3-4 semaines) chez l’adulte, et
chez l’enfant à la posologie de 1-10 goutes x 3/j. Le produit a cependant un goût
amer, et présente une intolérance digestive, un iodisme et une allergie. Malgré
ses effets secondaires non négligeables, tant sur le plan digestif que sur le
métabolisme thyroïdien, l'iodure de potassium reste le traitement de choix dans
la plupart des zones endémiques ;
 Fluconazole (Triflucan®) : ce médicament est utilisé à raison de 200 à 800mg/j.
Son ’efficacité ne dépasse pas tout de même 75% de taux de guérison. Il est
réservé en cas d’intolérance aux deux premiers traitements ;
 Griséofulvine : la molécule a été utilisée avec succès ;
 Kétoconazole (Nizoral®) : à la posologie de 200 à 600mg/j, ce médicament est
moins utilisé en raison d’effets secondaires plus nombreux et d’une efficacité
moindre ;
 Terbinafine (Lamisil®) : la molécule est administrée à la posologie de 500mg/j
pendant 3-6 mois). Son action fungicide permet une action rapide.

-Formes graves : en fonction de l’atteinte, les médicaments utilisés sont :


- Pulmonaire : Amphotéricine B (AmphoB) est administrée par voie intraveineuse (IV)
puis le relais est assuré per os par itraconazole à 800mg/j ± résection ;
- Ostéo-arthrite: itraconazole est indiquée à la posologie de 200mg x2 /j pendant 12
mois ;
- Cerebroméningée: AmphoB est administrée en première intention puis le relais est
assuré par de l’itraconazole ou le fluconazole à 800mg/j ;
- Atteinte systémique : Ampho B par est réservée aux formes systémiques de même
que la 5-fluorocytosine. Toutefois, certains isolats sont résistants à l’amphotéricine B.

266
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

2- Autres thérapies [15]


La cryothérapie a été utilisée avec succès, et la thermothérapie par rayonnement
infrarouge semble aussi efficace dans les lésions limitées de la sporotrichose.

D. Suivi biologique/ post-thérapeutique


Un prélèvement (le pus des lésions, les squames ou les croûtes, le recueil des
exsudats, des biopsies d’organes, des aspirations bronchiques ou une ponction de
liquide céphalorachidien selon la symptomatologie) est réalisé pour un examen
mycologique et /ou histologique après traitement pour vérifier l’efficacité de la
stratégie thérapeutique.

IV. Prévention/Prophylaxie [18]

A. But/objectifs
Le but de la prévention est de rompre la chaîne de transmission et d’éviter des
réinfestations.

B. Moyens/stratégies
Prophylaxie primaire
Il n'existe aucun vaccin pour prévenir la sporotrichose. On peut cependant réduire le
risque de la maladie par le port de vêtements de protection tels que des gants, des
bottes et des manches longues lors de la manipulation des fils, des rosiers, des balles
de foin, des plants de pin, ou d'autres matériaux qui peuvent provoquer des coupures
mineures ou des perforations dans la peau. Il est également conseillé d'éviter tout
contact de la peau avec la mousse de sphaigne.

Prophylaxie secondaire
Les patients souffrant du SIDA ont impérativement besoin de traitement d'entretien à
vie par l'itraconazole contre les formes méningées et disséminées. Le posaconazole
peut être utile.

Résumé-Conclusion
Sporothrix schenckii, un organisme thermodimorphe qui, depuis plus d'un siècle, a été
reconnu comme le seul agent causal de la sporotrichose, une mycose le plus souvent
cutanée ou rarement disséminée avec une distribution mondiale. Actuellement, il a été

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

proposé, sur la base d'aspects physiologiques et moléculaires, que S. schenckii est un


complexe d'espèces distinctes composé de Sporothrix brasiliensis, Sporothrix
mexicana, Sporothrix globosa, S. schenckii sensu strictu, Sporothrix luriei et Sporothrix
albicans. Ces champignons ubiquitaires sont transmis par effraction cutanée à la faveur
d’une piqûre (épine, bois) ou morsure (chat, chien, rongeur).

Le diagnostic mycologique repose sur l’examen direct après coloration de Gram ou au


MGG permettant d’observer la forme levure appelée « corps en cigare » (cigar-bodies),
la culture sur milieu de Sabouraud à 27°C ou sur gélose u sang à 37°C. Outre l’examen
mycologique, un examen histologique est nécessaire après coloration à HES, au PAS ou
au Gomori Grocott montrant des corps astéroïdes. Le diagnostic moléculaire dispose
d’un panel de marqueurs novateurs, pour l’identification à grande échelle.

Le traitement de premier choix est médicamenteux à base d’itraconazole ou de la


terbinafine si l'itraconazole est contre-indiqué et ; le fluconazole est réservé aux
patients ne tolérant pas les deux premiers traitements pour les formes cutanées. Les
effets secondaires de l’iodure de potassium limitent son utilisation actuellement. En cas
d’atteinte pulmonaire sévère ou forme disséminée, l’amphotéricine B liposomiale est
administrée en première intention, itraconazole en relais, pendant un an au minimum.

Somme toute, l’aspect clinique fruste fait que la prévalence de cette pathologie est
certainement sous-estimée en Afrique. La collaboration clinicien-biologiste est
nécessaire pour la mise en évidence de ce champignon qui nécessite une mise en
culture dans des milieux spéciaux.

268
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Sporotrichose

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271
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Coccidioidomycose

14 COCCIDIOIDOMYCOSE
Rédigé par Pr Dieng Yemou (Sénégal), Relu par Pr Ndiaye Daouda (Sénégal) et
Pr Ndiaye Mouhamadou (Sénégal)

272
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Coccidioidomycose

Introduction
La coccidioïdomycose, appelée aussi maladie de Posadas et Wernicke, fièvre de la
vallée de Joaquin, rhumatisme du désert, granulome coccidioïdien, est une mycose
profonde causée par un champignon dimorphique, Coccidioïdes immitis actuellement
reconnu comme deux espèces distinctes, C. immitis et C. posadasii.
C’est une infection respiratoire généralement bénigne qui peut devenir fatale dans de
rares cas après une évolution aiguë ou chronique. Elle est une infection opportuniste
du Sida.
Elle sévit dans les régions désertiques de l’Ouest des Etats-Unis d’Amérique, de
l’Amérique Centrale et du Sud.
Elle représente un réel problème de santé publique dans ces pays d’endémie où
150 000 à 300 000 nouveaux cas de primo-infection sont dénombrés par an aux Etats-
Unis.
Elle ne doit pas être ignorée des cliniciens du fait des cas importés à la suite d’un
séjour en zone d’endémie.

I. Epidémiologie

A. Agents pathogènes

1. Taxonomie
 Phylum : Ascomycotina
 Classe : Euascomycetes
 Ordre : Onygenales
 Famille : Onygenaceae
 Genre : Coccidioïdes
 Espèces : C. immitis. C. posadasii

2. Morphologie
C’est un champignon dimorphique qui se présente sous forme :
 Sphérule ou sporange, forme parasitaire, dans les tissus et en culture à 37°C,
sous atmosphère enrichie en CO2, elle mesure 10 à 80µm de diamètre avec une
forme sphérique. Elle possède une double paroi réfringente d’environ 2µm
d’épaisseur et contient des endospores mesurant 2 à 5µm de diamètre (Figure
14. 1).

273
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Coccidioidomycose

Figure 14. 1 : Forme levure de Coccidioïdes sp


(https://botit.botany.wisc.edu/)

 Filamenteuse, forme saprophytique, dans l’environnement et en culture sur


milieu de Sabouraud glucosé à 25°C. Ce sont des filaments septés se
transformant en arthrospores qui prennent la forme de petits barils de 2,5 à 4µm
d’épaisseur sur 3 à 6µm de longueur et sont séparées les unes des autres par des
segments vidés de leur substance appelés disjoncteurs ou cellules disjonctrices
(Figure 14. 2).

Figure 14. 2 : Forme filamenteuse de Coccidioïdes sp


(https://path.upmc.edu/)

3. Biologie
Coccidioïdes sp vit en saprophyte sur et dans les sols. Il sporule dès que la sécheresse
se manifeste et peut être dispersé par le vent. Sa résistance dans le milieu extérieur
est relativement importante ; ainsi il survit à 38°C et à 3°C. Il a aussi une grande
résistance à divers sels à de fortes concentrations (sulfate de calcium, borate de
sodium).

274
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Coccidioidomycose

4. Pathogénie
L’arthrospore inhalée se transforme en sphérule dans le poumon. Celle-ci à maturité
libère les endospores qui assurent la dissémination du processus infectieux par
formation de nouvelles sphérules dans les tissus environnants. Ce processus est dû à
l’action d’une chitinase contenue dans la paroi de ces éléments.

B. Habitat
 La forme saprophytique est retrouvée sur et dans les sols des zones désertiques
ainsi que dans les milieux de culture notamment Sabouraud glucosé.
 La forme parasitaire est retrouvée chez l’homme, les animaux domestiques
(chiens, bovins, porcs), les rongeurs, les renards, les coyotes, les hiboux et les
milieux de culture enrichis notamment la gélose au sang.

C. Mode de contamination
La contamination se fait essentiellement par voie aérienne en inhalant des poussières
et aérosols naturels porteurs d’arthrospores.
Accidentellement, la contamination est possible par voie cutanéo-muqueuse soit par
des sphérules mûres lors des manipulations de cadavres, soit par des arthrospores en
cas d’inoculation par des végétaux épineux souillés.

D. Facteurs favorisants

1. D’ordre général
 Climat : sec et chaud avec végétation xérophile, vent
 Faune : rongeurs, coyotes, renards
 Exposition environnementale aux poussières et au sol : tremblements de terre,
travaux de terrassement, démolitions.

2. D’ordre individuel
 Race : les sujets noirs et latino-américains seraient plus exposés
 Sexe : l’homme adulte a un risque de dissémination de l’infection plus grand que
la femme adulte.
 Troubles nutritionnels : diabète
 Immunodéficience

275
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Coccidioidomycose

 Grossesse.
 Transplantation d’organe

E. Répartition géographique
C. immitis est retrouvé au sud-ouest des USA en Californie alors que C. posadasii est
retrouvé aussi au Nord du Mexique et en Amérique du Sud.

II. Diagnostic biologique

A. Circonstances
Eléments épidémiologiques et cliniques : Un agriculteur afro-américain de 35 ans
résidant dans l’Arizona ou un adulte qui y a séjourné et qui présenterait :
 Soit un syndrome pseudo grippal avec érythème multiforme ;
 Soit une atteinte pulmonaire chronique caractérisée par des nodules isolés à la
radio pulmonaire ;
 Soit une méningite avec atteinte de la peau à type de lésions granulomateuses
d’aspect verruqueux.

B. Modifications biologiques non spécifiques


L’hémogramme montre une hyperéosinophilie sanguine.

C. Diagnostic mycologique

1. Prélèvements
 Crachats, LBA, lavages gastriques, exsudats des lésions cutanées, pus d’ostéite,
moelle, LCR, liquide pleural, sang, urines, biopsies pulmonaires et ganglionnaires

2. Techniques
 Examen direct des spécimens dans la potasse à 10%.
 Frottis et appositions sont colorés au MGG.
 Culture réalisée sur milieu de Sabouraud glucosé additionné d’antibiotique avec
ou sans cycloheximide à 25°C ou sur gélose au sang à 37°C sous CO2, elle est

276
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Coccidioidomycose

déconseillée car particulièrement dangereuse à manipuler. Elle doit être faite


sous hotte de sécurité.

3. Résultats
 L’examen direct permet de voir la sphérule, forme parasitaire du champignon
 La culture à 25°C en milieu de Sabouraud glucosé permet d’obtenir en 3 à 5
jours, une colonie duveteuse, blanc-grisâtre, devenant brune. L’examen
microscopique permet de voir la forme saprophytique du champignon.
L’identification de cette phase filamenteuse peut se faire soit par la technique
des exo-antigènes, soit la conversion de la phase filamenteuse en sphérule.
 La culture à 37°C en milieu gélosé au sang permet d’obtenir la forme parasitaire
à partir de la forme saprophytique. Les sphérules peuvent être obtenues « in
vitro » à 40 °C sur BHI.

D. Diagnostic immunologique spécifique

1. Détection d’antigène
 Mise en évidence des exo-antigènes dans les cultures par immunodiffusion.
 Recherche de l’antigène urinaire par ELISA avec possibilité de réactions croisées
surtout avec l’histoplasmose.

2. Détection d’anticorps par


 Immunodiffusion en gélose
 Réaction de fixation du Complément
 ELISA
Il existe des faux négatifs en cas d’infection aiguë ou de déficit immunitaire.

3. IDR à la coccidioïdine ou à la sphéruline


Elle est positive 10 à 21 jours suivant l’infection aiguë chez l’immunocompétent mais
est habituellement négative en cas de maladie évolutive. Ce test est plutôt utilisé pour
les études épidémiologiques que dans un but diagnostique.

277
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Coccidioidomycose

E. Diagnostic moléculaire
Il permet le diagnostic de l’espèce. Il s’agit d’une amplification génomique utilisant
des amorces spécifiques de chacune des 2 espèces. Il utilise une sonde à ADN
spécifique sur une culture de moins d’1 cm de diamètre avant sporulation.

F. Diagnostic histologique
Le champignon est visible dans les coupes de tissus colorés à l’hématoxyline éosine. Il
se présente :
 Soit sous forme d’arthrospore ou endospore dans une réaction de nécrose à
polynucléaires qui survient lors de l’envahissement du poumon par les
arthrospores infestantes et lors de la rupture des sphérules qui s’accompagne de
libération d’endospores ;
 Soit sous forme de sphérule dans une réaction granulomateuse avec cellules
géantes de Langhans, lors du développement et la maturation des sphérules
dans les tissus. Les sphérules jeunes ont un centre clair avec un cytoplasme
périphérique.
Le champignon est bien coloré par le PAS et le Gomori-Grocott.

III. Principes thérapeutiques

A. But
Guérir la personne malade et éliminer l’agent pathogène de l’organisme.

B. Moyens
 Dérivés Azolés : fluconazole, itraconazole, voriconazole, posaconazole.
 Amphotéricine B.

C. Indications/Posologie
 Dans la majorité des cas (60%), l’infection est asymptomatique et dans sa
localisation primaire pulmonaire aiguë la guérison peut se faire sans traitement.
 Les formes légères ou modérées sont traitées par fluconazole ou itraconazole.
 En cas de maladie sévère : amphotéricine B.
 En cas d’atteinte extra-pulmonaire non méningée de gravité faible ou modérée :
fluconazole 400mg /j PO ou itraconazole 200mg x2/j PO. Le voriconazole 200mg
x 2 / j PO ou IV ou le posaconazole 400mg x 2/j PO sont des alternatives.

278
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Coccidioidomycose

 En cas de maladie grave : amphotéricine B 0,5 à 1,0mg/kg/j IV en 2 à 6 h,


pendant 4 à 12 semaines jusqu’à une dose totale de 1 à 3g, selon la sévérité de
l’infection. Les formulations lipidiques de l'amphotéricine B sont préférées à
l'amphotéricine B standard.
 Lors d’une coccidioïdomycose liée au SIDA : fluconazole 200mg /j PO ou
l’itraconazole 200 mgx2 PO jusqu'à ce que le taux de cellules CD4 soit >250/μL
 En cas de coccidioïdomycose méningée : fluconazole : 800 à 1200mg /j.
 Le traitement de la coccidioïdomycose méningée doit être administré.
 Pour le traitement de l'ostéomyélite, l'exérèse chirurgicale de l'os atteint peut
s’avérer nécessaire.

D. Suivi biologique
Il est assuré par la sérologie. Sous traitement, l’absence de décroissance du titre des
anticorps est de mauvais pronostic.

IV. Prophylaxie

A. But
Empêcher la survenue de la maladie.

B. Moyens
 Prophylaxie primaire : en zone d’endémie, éviter l’exposition aux poussières et
au sol.
 Prophylaxie secondaire : en zone d’endémie, un sujet VIH positif ayant une
coccidioïdomycose doit être maintenu sous fluconazole jusqu’à la reconstitution
immunitaire avec un taux de CD4> 250 /mm3 pendant 6 mois.

Conclusion
La coccidioïdomycose est une affection qui doit être évoquée chez un individu
présentant une infection pulmonaire sévère et vivant ou ayant séjourné en zone
d’endémie.
Le diagnostic biologique est assuré par la mycologie et la sérologie.
Le traitement à base d’amphotéricine B et de dérivés azolés devant être maintenu à
vie dans sa localisation méningée, explique l’importance de la prophylaxie primaire
chez les sujets à risque vivant dans les zones d’endémie. Celle-ci consiste à éviter
l’exposition aux poussières et sol qui véhiculent les formes infectantes du champignon.

279
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Coccidioidomycose

Bibliographie

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Paracoccidioidomycose

15 PARACOCCIDIOIDOMYCOSE
Rédigé par Pr Dieng Yemou (Sénégal), Relu par Pr Ndiaye Daouda (Sénégal) et
Pr Ndiaye Mouhamadou (Sénégal)

282
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Paracoccidioidomycose

Introduction
La paracoccidioidomycose, appelée aussi maladie de Lutz-Splendore-Almeida, ou la
blastomycose sud-américaine, est une mycose profonde caractérisée par des lésions
granulomateuses cutanéo-muqueuses, viscérales et ganglionnaires. Elle est causée par
un champignon dimorphique, Paracoccidioïdes brasiliensis récemment reconnu
comme deux espèces, P. brasiliensis et P lutzii. Elle est une infection opportuniste au
cours du Sida.
Elle est la mycose la plus répandue d’Amérique latine et peut représenter une
pathologie d’importation avec les voyages intercontinentaux des personnes.

I. Epidémiologie

A. Agent pathogène

1. Taxonomie
 Phylum : Ascomycotina
 Classe : Eurotiomycetes
 Ordre : Onygenales
 Famille : Ajellomycetaceae
 Genre : Paracoccidioïdes
 Espèce : complexe P. brasiliensis, P. lutzii

2. Morphologie
C’est un champignon dimorphique qui se présente sous forme :
 Levure dans les tissus infectés et dans les cultures en milieux enrichis à 37°C.
C’est une levure arrondie, à paroi mince, dont le diamètre varie de 5 à 15µm et
qui présente des bourgeons (blastospores) multiples en plusieurs points de sa
surface. Ces bourgeons sont rattachés à la cellule-mère par d’étroits ponts
cytoplasmiques, conférant à la levure un aspect semblable à une « roue de
gouvernail » (Figure 15. 1) ;

283
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Paracoccidioidomycose

Figure 15. 1 : Levure de Paracoccidioïdes sp


(https://upload.wikimedia.org/)

 Filamenteuse retrouvée dans le sol mais aussi dans les cultures en milieux de
Sabouraud glucosé à 25°C. Ce sont des filaments septés de 2 à 4µm avec des
spores piriformes, terminales, mesurant 2 à 5µm et des arthrospores. Parfois, il
existe de très grosses chlamydospores intercalaires de 20µm de diamètre (Figure
15. 2).

Figure 15. 2 : Forme filamenteuse de Paracoccidioïdes sp


(https://s3.amazonaws.com/)

3. Pathogénie
La spore inhalée se transforme en levure à l’intérieur des macrophages alvéolaires.
Cette transformation est à l’origine d’une réaction inflammatoire non spécifique. La
dissémination peut se faire par voie sanguine ou lymphatique causant des lésions
granulomateuses dans de nombreux tissus.

B. Habitat
Ce champignon vit à l’état filamenteux dans le sol où il produit des spores. C’est sous
cette forme saprophytique qu’il est aussi retrouvé dans les milieux de culture à 25°C.
Par contre, dans les tissus infectés et dans les milieux de culture à 37°C, il se présente
sous la forme levure.
En dehors de l’homme, certains animaux (chien, tatou) peuvent être infectés.

284
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Paracoccidioidomycose

C. Mode de contamination
La contamination se fait essentiellement par voie aérienne par inhalation de spores et
rarement à travers la peau ou les muqueuses à la suite d’un traumatisme.
Il y a des possibilités d’atteintes buccales secondaires au nettoyage des dents avec des
végétaux infestés.

D. Facteurs favorisants

1. D’ordre général
Climat : nature du sol (acidité), température (12 à 30°C), altitude (150 à 2000 m),
pluviométrie (1000 à 4000 mm /an).

2. D’ordre individuel
- Profession : agriculteurs
- Sexe : masculin
- Immunodéficience

E. Répartition géographique
La paracoccidioïdomycose est une affection qui sévit à l’état endémique en Amérique
Centrale et du Sud (Mexique à l’Argentine).

II. Diagnostic biologique

A. Circonstances

1. Eléments épidémiologiques et cliniques


 Soit un agriculteur brésilien âgé de 20 ans ou un sujet de 20 ans ayant séjourné
dans ce pays et qui présenterait :
- un amaigrissement, une fièvre ;
- des adénopathies, une hépatosplénomégalie et des abcès sous cutanés.

285
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Paracoccidioidomycose

 Soit un agriculteur brésilien âgé de 40 ans ou un sujet de 40 ans ayant séjourné


dans ce pays et qui présenterait :
- une asthénie, un amaigrissement, une fébricule, une toux sèche parfois
hémoptoïque, une dyspnée ;
- des lésions de la muqueuse orale à type d’érosion des gencives, ulcération
végétante avec présence de fines granulations hémorragiques au niveau
des lèvres, de la langue, du palais, du pharynx et du larynx ;
- Des adénopathies cervicales.

B. Modifications biologiques non spécifiques


L’hémogramme peut montrer une anémie et une hyperéosinophilie.

C. Diagnostic mycologique

1. Prélèvements
- Crachats et secrétions provenant de l’arbre respiratoire.
- Pus, matériel aspiré ou issu de biopsies de lésions cutanées ou muqueuses.

2. Techniques
- Examen direct des spécimens dans la potasse à 10%.
- Frottis et appositions sont colorés au MGG ou Gomori Grocott.
- Culture réalisée sur milieu de Sabouraud glucosé additionné d’antibiotiques à
25°C ou sur gélose au sang à 37°C.
- Inoculation à l’animal de laboratoire. C’est l’examen de choix par voie
intrapéritonéal ou intra testiculaire chez le cobaye, la souris.

3. Résultats
- L’examen direct permet de voir la levure avec les bourgeonnements multiples,
forme parasitaire du champignon.
- La culture à 25°C en milieu de Sabouraud glucosé permet d’obtenir en 15 à 25
jours, une colonie qui peut être glabre, cireuse ou, au contraire, blanche et
floconneuse. L’examen microscopique permet de voir la forme saprophytique du
champignon. L’identification de Paracoccidioïdes sp nécessite la conversion de la
phase filamenteuse en phase levure.
- La culture à 37°C en milieu gélosé au sang permet d’obtenir la forme parasitaire.

286
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Paracoccidioidomycose

- L’inoculation à l’animal de laboratoire permet d’amplifier et de révéler la forme


parasitaire caractéristique.

D. Diagnostic immunologique spécifique

1. Détection d’antigène
- Mise en évidence des exo-antigènes dans les cultures par immunodiffusion.
- Mise en évidence de la glycoprotéine gp 43 par anticorps monoclonal.

2. Détection d’anticorps par


- Immunodiffusion en gélose
- Immunoélectrophorèse indirecte
- ELISA
- Western Blot

3. IDR à la paracoccidioïdine
Elle est lue 24 à 48 h, mais est habituellement négative chez les sujets gravement
atteints qui sont anergiques. Par ailleurs, il peut y avoir des réactions croisées avec la
coccidioidomycose, l’histoplasmose et la blastomycose. Ce test est plutôt utilisé pour
les études épidémiologiques que dans un but diagnostique.

E. Diagnostic moléculaire
La PCR est utilisée pour faire le diagnostic d’espèce avec des amorces spécifiques.
Cependant, elle a des limites dans le sérum ou le plasma.

F. Diagnostic histologique
L’histologie met en évidence une hyperplasie pseudo-épithéliomateuse, associée à une
inflammation génératrice de granulomes et à une infiltration plasmocytaire et
lymphocytaire, avec parfois une suppuration. Dans ces lésions, et,
essentiellement, au sein des granulomes, le champignon apparait sous sa forme de
levure. Celle-ci peut être colorée par l’hématoxyline – éosine, le PAS ou les techniques
d’imprégnation argentique Gomori-Grocott.

287
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Paracoccidioidomycose

Diagnostic différentiel histologique, dans les zones d’endémie qui se chevauchent avec

• Sphérule de C. immitis
• Levure de Blastomyces dermatidis
• Base d’implantation unique et large possibilité d’utilisation d’Ac fluorescents in
situ

III. Principes thérapeutiques

A. But
Guérir la personne malade et éliminer le champignon de l’organisme.

E. Moyens
- Les sulfamides : Sulfaméthoxazole-Triméthoprime (Cotrimoxazole)
- Amphotéricine B
- Dérivés azolés : Kétoconazole, fluconazole, itraconazole

C. Indications / Posologie
- Sulfaméthoxazole-Triméthoprime : 1600mg/j X 1à 2 ans
- Amphotéricine B dans les cas graves : 0,2 à 1 mg/kg/j
- Kétoconazole : 200 à 400mg /j X 1 à 2 mois puis 200mg/j X 12 mois
- Itraconazole : 100mg/j X 8 mois ; dans les cas graves : 200mg/j X 2mois puis
100mg/j X 6 à 8 mois
- Fluconazole : 400mg/j X 6 mois

D. Suivi biologique / post thérapeutique


Une diminution du titre des anticorps témoigne d’une bonne réponse au traitement.
Par contre, une augmentation peut refléter une rechute.
Intérêt IDR chez les malades au stade terminal :
- Négativation du test ;
- Traduction : gravité du pronostic ;
- Alors que les Ac précipitant détectés en ID sont encore présents.
A l’inverse, chez les malades traités efficacement :
- L’IDR peut se positiver ;
- Ce qui est la traduction d’un bon pronostic.

288
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Paracoccidioidomycose

IV. Prophylaxie

A. But
Empêcher la survenue de la maladie.

B. Moyens
Prophylaxie primaire : en zone d’endémie, chez les sujets à risque de développer des
formes sévères de la maladie en cas d’immunodéficience, l’association
sulfaméthoxazole-triméthoprime peut être prescrite en prophylaxie des infections
opportunistes. Des études sur le vaccin sont en cours, notamment avec le gène de la
glycoprotéine gp 43 qu’on ne retrouve que chez P. brasiliensis.

Conclusion
La paracoccidioïdomycose est une affection qui doit être évoquée chez un individu
présentant une pneumopathie associée à des lésions cutanéo-muqueuses et vivant ou
ayant séjourné en Amérique latine.
Le diagnostic biologique est assuré par la mycologie et la sérologie.
La molécule de choix pour le traitement est l’itraconazole, mais l’amphotéricine B est
aussi utilisée dans les cas sévères.
Devant la difficulté d’éradiquer le champignon, une prophylaxie primaire à base de
cotrimoxazole devrait être instaurée chez les sujets immunodéficients des zones
d’endémie dans l’attente d’un vaccin efficace.

289
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Paracoccidioidomycose

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290
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Zygomycoses

16 ZYGOMYCOSES
Rédigé par Pr Nzenze Solange (Gabon), Relu par Pr Gaye Oumar (Sénégal) et
Pr Dorkenoo Ameyo Monique (Togo)

291
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Zygomycoses

Introduction
Définition

Les zygomycoses sont des affections fongiques causées par des micromycètes de la
classe des zygomycètes caractérisés par un mycélium coenocytique fait de filaments
irréguliers, non cloisonnés et par des spores asexuées qui se forment à l’intérieur de
sacs appelés sporocystes. Trois ordres appartiennent aux zygomycètes : il s’agit des
Mucorales, des Entomophthorales et des Mortierellales. Dans ce chapitre, nous
n’étudierons pas les Mortierellales qui sont très rarement impliqués en parthologie
humaine.

Intérêt
Les mucormycoses
Ce sont des affections aiguës et secondaires, graves, de pronostic souvent péjoratif,
cliniquement hétérogènes, allant de l’infection sinusienne à l’infection disséminée
avec une sévérité croissante, directement liée au statut immunitaire du patient [1].
L’angiotropisme des agents incriminés expliquent leur potentiel de dissémination.
L’incidence de ces affections augmente dans les pays développés notamment en
France [2]

Les Entomophthoromycoses
Ce sont des affections chroniques, primaires et superficielles (sinusiennes ou sous-
cutanées). Elles intéressent les patients immunocompétents vivant en zone tropicale
et subtropicales
En zone d’endémie, les déformations qu’elles engendrent surtout au niveau de la face
posent des problèmes sociaux [3]

Historique

Concernant les mucormycoses, la première description clinique de zygomycose date


de 1948, sous la forme de mucormycose cérébrale survenue chez un patient atteint
d’hémochromatose [4]. Les premières épidémies de mucormycoses rapportées, datent
de 1977 [5].
Les Entomophthoromycoses sont de découverte plus récente, puisque le premier cas
humain a été décrit en Indonésie en 1956 [6].

292
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Zygomycoses

I. Épidémiologie

A. Agents Pathogènes

1. Taxinomie
Les agents responsables des zygomycoses sont des micromycètes de la division des
Zygomycotina, de la classe des zygomycètes. Leur reproduction sexuée donne lieu à
des spores appelées zygospores. Trois ordres existent, deux ont un intérêt en
pathologie humaine : ordre des Mucorales et celui des Entomophthorales. Chez les
mucorales, les spores asexuées sont produites à l’intérieur d’un sac appelé sporocyste
(sporange), tandis que chez les entomophthorales, les spores asexuées sont produites
à l’extrémité des filaments et sont habituellement projetées à distance, elles portent le
nom de ballistospores (Figure 16. 1). L’ordre des mucorales comprend les genres
Mucor, Rhizopus, Lichtheimia (Absidia), Rhizomucor, et plus rarement
Syncephalastrum, Cunninghamella, Cokeromyces et Saksenaea. Parmi les
Entomophthorales, les principaux genres sont Conidiobolus et Basidiobolus [7].

Figure 16. 1 : Mode de production des spores chez les Mucorales


et les Entomophthorales
Source : Mycologie médicale (D. Chabasse, Cl. Guiguen, N. Contet-Audonneau)

A-Mucorales : 1. sporocyste (sporange); 2. Sporocystophore (sporangiophore);


3. Rhizoïde ; 4. Rupture d’un sporocyste ; 5. Collerette ; B- Entomophthorales :
1. Ballistospores ; 2. Conidiophore

293
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Zygomycoses

2. Morphologie
- Caractères macroscopiques
Les Zygomycètes ont en général une croissance rapide, toutefois les mucorales sont
caractérisées par des colonies à développement aérien le plus souvent (genre Mucor),
floconneuses, extensives envahissant le tube ou la boîte (genres Lichtheimia, Rhizopus,
Cunninghamella…). Dans le cas des Entomophthorales, les colonies sont plutôt planes
et glabres
- Caractères microscopiques
Le thalle est coenocytique, constitué de filaments peu ou pas cloisonnés, de diamètre
large (5 à 20µm de diamètre) et irrégulier. Dans les cultures âgées, des
chlamydospores peuvent se former. Les filaments adhèrent au substrat par des
rhizoïdes, plus ou moins développés, qui évoquent des racines.

B. Habitat
Les mucorales sont des mycètes microscopiques saprophytes du sol, ils se développent
sur les matières organiques en décomposition tels que le pain, les fruits, les graines de
céréales (orge, blé, riz, etc.), les excréments d’animaux et sont rarement retrouvés
dans l’eau [8, 9].
Tout comme les Mucorales, les Entomophthorales sont retrouvés sur le sol, les
matières végétales et les fruits en décomposition ; ils peuvent également être
pathogènes pour les animaux (chevaux, brebis, chiens, chimpanzés, lama) ; ils sont
classiquement retrouvés chez les amphibiens et dans les fèces des animaux des forêts
de la zone intertropicale.

Plus récemment, ces agents ont été décrits comme colonisateurs des débris végétaux,
mais également comme saprophytes des arthropodes [9-14]. Les insectes, termites et
araignées sont également intéressés dans le cas de Conidiobolus coronatus. Par
ailleurs, Basidiobolus ranarum est décrit comme commensal du tractus digestif des
batraciens et lézards [15].

C. Mode de contamination
Les espèces responsables de zygomycoses produisent des spores en abondance dans
l’environnement. Elles sont véhiculées par le vent et inhalées par l’Homme. Le
fonctionnement physiologique de l’appareil muco-ciliaire permet de débarrasser
l’arbre pulmonaire de ces spores. Toutefois, en cas d’altération du dispositif muco-
ciliaire ou lorsque les défenses immunitaires des patients sont amoindries, l’inhalation
de spores peut conduire à une infection de la sphère pulmonaire, voire à une atteinte
disséminée.
Pour les Mucorales :
294
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Zygomycoses

- la contamination se fait donc essentiellement par voie aérienne (sinus, arbre


aérien).
D’autres voies de contamination sont possibles, il s’agit de:
- La contamination par voie cutanée (inoculation ou par contact), possible, à
l’origine de formes cutanées notamment chez les patients présentant des
brûlures étendues ;
- La contamination par voie digestive, par ingestion de mucorales, peut conduire à
des formes digestives particulièrement sévères chez l’enfant prématuré.
Concernant les Entomophthoromycoses les modes de contamination sont :
- La voie respiratoire (par inhalation) à l’origine des formes sinusiennes ;
- La voie cutanée (par inoculation) à l’origine des formes cutanées.

D. Facteurs favorisants
C’est dans le cadre des mucormycoses que le rôle des facteurs favorisants est
déterminant. Il s’agit par ordre d’importance décroissante [15] :
- du diabète acidocétosique ;
- de l’insuffisance rénale avancée avec acidose ;
- des hémopathies malignes (leucémies aiguës, lymphomes, etc.) avec aplasie ;
- des greffes de moelle ou d’organes ;
- de la corticothérapie prolongée ;
- du traitement avec la déféroxamine, agent chélateur du fer ;
- de la malnutrition protidocalorique (kwashiorkor) ;
- des brûlures étendues et de divers traumatismes avec délabrement cutané.

E. Répartition géographique
Les mucorales sont des mycètes cosmopolites, présents dans l’environnement ; par
contre, la distribution géographique des entomophthorales est tropicale : il s’agit des
régions tropicales humides d’Asie, d’Afrique et d’Amérique où on retrouve l’espèce
Conidiobolus coronatus. C’est surtout en Afrique centrale (République Démocratique
du Congo, Nigeria et Cameroun), à Madagascar, mais aussi en Inde et au Brésil que
l’affection est la plus décrite. Les entomophthoromycoses sous-cutanées
(Basidiobolomycose) sont décrites dans les zones tropicales et subtropicales d’Afrique
noire (Nigeria, Kenya, Ouganda, Burkina-Faso, Mali, etc.), d’Asie (Inde, Indonésie et
Myanmar). La maladie serait absente de Madagascar, et les cas américains sont
exceptionnels [16].

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Zygomycoses

II. Diagnostic biologique

A. Circonstances du diagnostic biologique

1. Eléments épidémiologiques
- Les mucormycoses surviennent essentiellement chez des patients aux défenses
immunitaires amoindries ; en effet, chez le diabétique mal équilibré,
l’hyperglycémie associée à l’acidocétose favorisent la germination des mucorales et
leur progression dans les tissus [17] ;
- Les entomophthoromycoses vont intéresser les sujets originaires des zones
tropicales concernées, et particulièrement les adultes de sexe masculin pour la
Conidiobolomycose (ou Rhinoentomophthoromycose), de préférence les enfants de
2 à 15 ans de sexe masculin pour la basidiobolomycose ou Entomophthoromycose
sous-cutanée [16].

2. Signes cliniques

a. Mucormycoses
On distingue les formes cliniques fréquentes, moins fréquentes et les formes rares
 Forme rhino-orbito-cérébrale
Elle survient préférentiellement sur terrain de diabète déséquilibré. Cette forme
clinique commence par le palais [18] ou le sinus paranasal, atteint progressivement le
niveau orbital et, si le diagnostic est tardif, elle s’étend au cerveau, déterminant ainsi la
forme rhino-orbito-cérébrale.
Le patient présente un certain nombre de symptômes : fièvre, obstruction nasale,
sinusite, léthargie parfois céphalées, douleur orbitale, perte soudaine de la vision,
proptosis voire une cellulite périorbitale.
Des thromboses du sinus caverneux ou de l’artère carotide interne sont des
complications possibles de la forme sinusienne ou rhinocérébrale.
L’espèce Lichtheimia (Absidia) corymbifera est fréquemment mise en cause lors
d’atteinte rhinofaciale [19] ou cutanée.
 Forme pulmonaire
Forme plus fréquente chez les patients neutropéniques.
- Dans la mucormycose pulmonaire : le patient présente une toux, une fièvre, des
hémoptysies et/ou des douleurs thoraciques. Le diagnostic clinique différentiel

296
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Zygomycoses

est difficile à établir avec d’autres affections fongiques à champignons


filamenteux du genre Aspergillus ou Fusarium.
 Forme cutanée
La forme cutanée est notamment observée chez le patient présentant des brûlures
étendues, les lésions sont des pustules, des nodules, des ulcérations nécrotiques, ou
des cellulites nécrosantes.
 Mucormycose disséminée
Elle est définie lorsque deux organes non contigus sont atteints. Elle fait souvent suite
à la mucormycose pulmonaire. Les localisations les plus fréquentes sont cérébrales,
spléniques, rénales, cardiaques, hépatiques et digestives.
 Formes digestives
Elles sont rares mais particulièrement sévères chez l’enfant prématuré. Elles font suite
à une contamination de l’alimentation parentérale. Les signes cliniques de
mucormycose digestive ne sont pas spécifiques et comprennent des douleurs
abdominales, des hématémèses et des mélénas [20].

b. Entomophthoromycoses
Elles se présentent sous 2 formes essentielles :

 Rhinoentomophthoromycose,

La maladie se présente comme un granulome endonasal au niveau du cornet inférieur


entrainant une sensation de gêne respiratoire, de nez bouché et parfois une épistaxis,
signes pour lesquels le malade consulte.
- Début : on observe une tuméfaction de la partie médiane de la face. Les
lésions vont ensuite s’étendre au nasopharynx, à l’oropharynx, au palais et au
sinus maxillaire puis ensuite aux os du nez, de la région frontale, aux joues,
aux paupières et à la lèvre supérieure. Les symptômes communément
associés à cet envahissement sont l’obstruction nasale, l’écoulement nasal et
la sinusite chronique [21] ;
- Au stade avancé : le nez, les joues et les lèvres sont complètement infiltrés et
déformés donnant des aspects véritablement monstrueux en tête
d’hippopotame [16] (photo 1a).

 Basidiobolomycose

- Début : Elle se caractérise cliniquement par une paniculite du tronc et de la


racine des membres, se présentant d’abord comme un nodule sous-cutané,
d’allure phlegmoneux.
- Phase d’état : Les lésions ressemblent ensuite à un placard ferme, cartonné,
ligneux, à bords nets avec quelquefois des nodules en périphérie.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Zygomycoses

La tumeur est mobile sur les plans profonds ; elle adhère à la peau qui est
hyperpigmentée mais rarement ulcérée.
D’autres localisations sont aussi fréquentes chez le jeune enfant : les fesses, les
cuisses, le périnée. Dans tous les cas, l’atteinte ganglionnaire loco-régionale est
possible mais inconstante.
- Evolution : elle est lente et se fait par poussées. La guérison spontanée est
possible, mais il peut aussi exister des formes viscérales profondes après
dissémination hématogène ou lymphatique.

Figure 16. 2 : Hinoentomophthoromycose


Plus de 33 mois d’évolution
Figure 16. 3 : Patient photo 1a
source : Blumentrah et al. [3] avant la maladie

Figure 16. 4. Rhinoentomopthoromycose


Plus de 24 mois d’évolution Figure 16. 5. Patient photo 16.
Source : Pr. Nzenze Afène 2 avant la maladie

La rhinoentomophthoromycose ne doit pas être confondue avec le rhinosclérome ou


granulome nasal à cellules de Mickeiliez dont l’agent étiologique est Klebsiella
rhinoscleromatis.
La basidiobolomycose doit faire discuter :
- une cellulite (surtout au niveau des fesses) ;
- un phelgmon ligneux au moment des poussées ;
- un sarcome des parties molles ;
- et un éléphantiasis (complication d’une filariose lymphatique).

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Zygomycoses

B. Diagnostic mycologique

1. Prélèvements
 Pour le diagnostic des Mucormycoses, en fonction de la localisation, les
prélèvements sont :
- prélèvements sinusiens, pulmonaires (liquide de lavage broncho-alvéolaire,
aspiration bronchique, crachats) ;
- prélèvements cutanés (écouvillons, biopsie) ;
- prélèvements de selles plus rarement.
 Pour le diagnostic des Entomophthoromycoses, il s’agit des prélèvements
sinusiens ou cutanés.

2. Examen direct
L’examen direct est fondamental, car permet la mise en évidence dans les produits
pathologiques de la forme parasitaire des zygomycètes.
Il peut être fait, selon le type de prélèvement, avec ou sans éclaircissant, entre lame et
lamelle, ou être réalisé après utilisation de réactifs fluorescents (Mycetfluo®,
Mykoval®) ou encore après imprégnation argentique (Gomöri-Grocott).
A l’observation microscopique, au grossissement 10x ou 20X puis 40X, on met en
évidence la présence de filaments larges, irréguliers, non ou peu cloisonnés et ramifiés
à angles droits. Ces filaments sont caractéristiques des zygomycètes (photo 3)

Figure 16. 6 : Examen direct du prélèvement cutané du patient


photo 16. 1: Présence de filament large non septé, et
ramifications à angle droit

(source: Pr.Nzenze- Afène )

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Zygomycoses

3. Cultures et interprétations
La mise en culture permet le diagnostic du micromycète en cause, et confirme son rôle
pathogène dès lors que l’examen direct est positif.
Les zygomycètes sont des champignons peu exigeants en culture ; ils se développent
sur des milieux de Sabouraud chloramphénicol sans cycloheximide pour les mucorales,
sans chloramphénicol et sans cycloheximide pour les Entomophthorales, à des
températures d’incubation de 37°C (voire plus) pour les mucorales et de 30°C pour les
Entomophthorales excepté Conidiobolus incongruus dont la température optimale est
de 37°C.
Etant donné le caractère envahissant des cultures, l’utilisation des tubes est préférée
pour éviter la contamination des autres prélèvements de l’étuve.

Dans le cas de la mise en culture d’un fragment de biopsie, il est recommandé de le


découper en plusieurs morceaux, sans dilacérer la biopsie de manière excessive, car le
mycélium non septé du zygomycète est fragile. Les morceaux seront déposés en
plusieurs points de la gélose. Ainsi, lorsque le zygomycète se développe en culture au
niveau de chacun des points d’ensemencement, le diagnostic de zygomycose est
conforté, car la contamination de tous les points d’ensemencement par un zygomycète
de l’environnement est peu probable.
Les micromycètes de l’ordre des mucorales poussent rapidement (en 24-48h) et
envahissent complètement le tube ou la boîte de culture ; ils ont un aspect de coton
grisâtre (photo 4). Les entomopththorales se développent lentement et donnent des
colonies moins envahissantes en culture (photo 5.1 et 5.2).

Figure 16. 7 : Culture de Basidiobolus sp.


a. aspect macroscopique sur Sabouraud ; b. aspect microscopique (zygospore)

Source : MC. Seck, Laboratoire parasitologie-mycologie, Hôpital militaire de Ouakam-Dakar

300
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Zygomycoses

Figure 16. 8 : Colonie glabres,


plissées de Basidiobolus Figure 16. 9 : Colonies de Coniobolus coronatus
ranarum

Le diagnostic de genre est établi à l’examen microscopique des champignons obtenus


en culture. Ce diagnostic repose sur un certain nombre de caractéristiques
microscopiques, notamment la présence de rhizoïdes, le mode de ramification des
sporangiophores et la présence d’une apophyse (Tableau 16. 1).

Tableau 16. 1 : Caractéristiques microscopiques permettant le diagnostic de genre des


principales mucorales [20]

Genre Apophyse Rhizoïdes

Rhizopus Peu marquée Présentes


Ramifications à la base des rhizoïdes

Lichtheimia Très marquée Souvent absentes

Mucor Absente Absentes

Rhizomucor Peu marquée Présentes


Ramifications au-delà de la base des
rhizoïdes

C. Diagnostic histologique
L’étude histo-pathologique met en évidence des éléments fongiques isolés ronds à
ovalaires (coupe transversale), entourés d’un dépôt éosinophile « phénomène de

301
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Zygomycoses

Splendore –Hoëppli », au sein d’une réaction scléro-inflammatoire hypodermique


(coloration H.E.S) (photo 16.10).

Figure 16. 10 : Réaction scléro inflammatoire Figure 16. 61 : Hyphe fongique, Coloration
autour d’éléments fongiques Coloration H.E.S Gomorit- Grocott

(source: Blumentrah C. et al [3])

D. Diagnostic moléculaire
Dans le cadre du diagnostic des Zygomycètes, la biologie moléculaire peut être une
aide au diagnostic microscopique [22]. Les séquences les plus souvent utilisées sont
des cibles ribosomales, 18S, 28S et l’Internal Transcribed Spacer (ITS). Des cibles au
niveau de l’ADN, la perméase FTR1 ou le cytochrome B, ont été également décrits pour
ce diagnostic de genre. Toutefois les ITS seraient les cibles les plus fiables pour les
identifications de genre des zygomycètes.

III. Principes thérapeutiques

A. Buts
Les buts de la prise en charge thérapeutique des zygomycoses est d’éliminer l’agent
pathogène et de guérir le patient.

B. Moyens thérapeutiques
Ils font appel à la chimiothérapie et au traite ment chirurgical :
- Amphotéricine B, forme injectable IV,
- Posaconazole comprimés,
- Itraconazole,
- Iodure de potassium.

302
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Zygomycoses

C. Indications
 Pour les mucormycoses :
Le traitement médicamenteux est fondé sur l’utilisation de l’amphotéricine B par voie
intraveineuse [23]. Ce traitement doit être le plus précoce possible afin de réduire la
mortalité, dont le taux serait deux fois plus important en cas de délai de traitement de
6 jours [24].
Le posaconazole peut être proposé par voie orale en relais du traitement par
Amphotéricine B [25]. Son activité serait fonction des espèces en cause [26].
Le voriconazole et les échinocandines sont inefficaces pour le traitement des
mucormycoses et participeraient à la sélection de ces agents fongiques [27].
Les associations d’antifongiques dans le cadre du traitement des zygomycoses ne sont
pas recommandées, compte tenu de l’absence de données permettant de démontrer
leur meilleure efficacité comparativement à la monothérapie.
Au cours de la prise en charge thérapeutique des patients atteints de mucormycoses,
les traitements visant à renforcer le système immunitaire des patients, seront
entrepris.
L’efficacité du traitement sera objectivée par la disparition des signes cliniques et
paracliniques et par la négativation des examens mycologiques.
 Pour les Entomophthoromycoses
Le traitement repose sur l’iodure de potassium, à la dose de 40mg/kg/jour [20].
L’itraconazole peut également être utilisée [28].
Tout comme pour le traitement des mucormycoses les associations médicamenteuses
peuvent être préconisées, elles montrent une efficacité relative comme le témoigne le
cas rapporté par Blumentrah C.G et al. [3] et qui, par ailleurs, relève la difficulté
majeure pour les patients vivant en zone d’endémie de pouvoir entreprendre un
traitement sans l’interrompre à cause du coût élevé des antifongiques.
L’abandon du traitement et les récidives sont donc souvent observés (photo 7).

Figure 16. 72 : Après 18 mois de traitement Figure 16. 13 : Patient avant traitement
(fluconazole et terbinafine) chez patient photo
16. 13

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Zygomycoses

Résumé

Les zygomycoses sont des mycoses causées par des micromycètes de la classe des
zygomycètes caractérisés par un mycélium coenocytique fait de filaments irréguliers,
non cloisonnés et par des spores asexuées qui se forment à l’intérieur de sacs appelés
sporocystes. Deux ordres parmi les trois décrits, sont impliqués en pathologie
humaine : il s’agit des Mucorales et des Entomophthorales.
Les mucormycoses sont des affections cosmopolites, aiguës, graves, de pronostic
souvent péjoratif, cliniquement hétérogènes, allant de l’infection sinusienne à
l’infection disséminée avec une sévérité croissante, directement liée au statut
immunitaire du patient, d’où le rôle central des facteurs favorisants. Les
Entomophthoromycoses sont, quant à elles, des affections des régions tropicales et
subtropicales, chroniques et superficielles (sinusiennes ou sous cutanées). Elles
affectent les patients immunocompétents et occasionnent des déformations
handicapantes surtout au niveau de la face.
Le diagnostic mycologique ou histologique met en évidence dans les prélèvements, des
filaments caractéristiques : larges (10µm en moyenne), irréguliers, non ou peu septés
avec des ramifications à angle droit. Les mucorales développent en culture un
mycélium aérien envahissant le milieu de culture. Par contre, les entomophthorales
donnent des colonies glabres et planes.
Le traitement fait appel à la chimiothérapie et à la chirurgie. Le médicament de
référence dans le cas des mucormycoses est l’Amphotéricine B par voie intraveineuse,
et l’itraconazole dans le cas des Entomophthoromycoses.
L’évolution sous traitement antifongique dans les mucormycoses est améliorée par la
restauration ou le contrôle de l’état immunitaire du patient.
Par ailleurs, les traitements longs et onéreux des lésions d’entomophthoromycoses,
vont rendre compte de la mauvaise observance de la prescription médicamenteuse et
souvent de son abandon.
La prévention de ces affections est en soi illusoire. Néanmoins, un diagnostic rapide et
une sensibilisation des populations et du personnel soignant, sur les facteurs de risque
des mucormycoses, de même que sur les circonstances de la contamination par les
entomophthorales pourrait aider à réduire d’une part, la mortalité liée aux
mucormycoses et d’autre part, la morbidité associée aux entomopththoromycoses.

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Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
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306
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

17 MOISISSURES ET LEVURES EMERGENTES


Rédigé par Pr Ndiaye Daouda (Sénégal), Relu par Pr Nzenze Solange (Gabon) et
Pr Sissinto Savi de Tové Yolande (Bénin)

307
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

I. Généralités

A. Définition
Il n’existe pas de définition univoque des maladies infectieuses émergentes. Ce terme
est en effet utilisé de manière très large pour qualifier une maladie « dont on parle »
ou bien souvent « dont on souhaiterait que l’on parle ». Selon le dictionnaire
Larousse®, « l’émergence » est l’état de ce qui émerge à savoir « dépasse le niveau
moyen, retient l’attention ou sort du lot ». En termes épidémiologiques, il s’agit d’une
maladie qui apparaît ou dont l’incidence augmente en un lieu donné. Dans une
perspective d’anticipation, on se doit aussi d’inclure dans cette définition les maladies
infectieuses dont l’incidence pourrait augmenter du fait de conditions propices à leur
transmission. Quand il s’agit d’une maladie connue, ayant disparu ou diminué en
importance, la réapparition ou la recrudescence de cette dernière amène alors à parler
de « résurgence »

Trois phases évolutives ont été décrites dans les émergences d’agents infectieux
nouveaux ou préexistants, nouvellement introduits dans une population :
l’introduction de l’agent dans la population humaine, sa diffusion ou dissémination et
sa pérennisation [1].

En résumé, dans cette partie le terme de « champignons émergents » sera consacré à


des champignons pathogènes classiques ou non, dont la fréquence d’isolement est en
augmentation, ou à des champignons qui sont de plus en plus isolés (responsables de
mycoses) au niveau de sites où habituellement ils ne sont pas retrouvés.

B. Intérêt
La fréquence d’isolement des champignons est en augmentation au laboratoire. On
observe en effet l’émergence d’espèces auparavant inconnues du milieu médical, ainsi
que la réémergence d’espèces au pouvoir pathogène établi, mais qui sont
responsables de nouvelles formes cliniques, survenant sur des terrains particuliers. Ces
infections sont associées à des taux de mortalité élevés, souvent liés à un retard au
diagnostic. La liste des « nouveaux champignons » isolés en pathologie humaine
s’allonge ainsi chaque jour 2, et les raisons en sont multiples. Le nombre de patients
à risque (prématurés, patients greffés) est de plus en plus important ; l’utilisation de
procédures thérapeutiques générant de nouveaux risques infectieux (anti-TNF, anti-
CD52) est de plus en plus fréquente (notamment au cours des allogreffes de cellules
souches hématopoïétiques dans les services d’onco-hématologie ; ces procédures ont
certes permis de prolonger la survie des patients atteints de maladies autrefois
incurables, mais cela au prix d’une immunodépression profonde et prolongée) ; les

308
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

voyages de la population générale – et notamment des immunodéprimés – dans des


zones d’endémies de certains champignons sont de plus en plus observés ; enfin les
améliorations diagnostiques expliquent également l’émergence de certains
champignons. Les nouveaux outils moléculaires ont permis l’identification précise d’un
certain nombre de souches isolées en culture [2, 3].

Au Sénégal, une étude rétrospective portant sur la pathogénicité de champignons non


dermatophytes et non Candida isolés au laboratoire de parasitologie et mycologie du
CHU Aristide Le Dantec de Dakar, durant la période de novembre 2013 à décembre
2014, a colligé 22 cas d’infections impliquant dix Fusarium, cinq Trichosporon, deux
Chrysosporium, deux Geotrichum, un Rhodotorula, un Neoscytalidium dimidiatum et
un Histoplasma capsulatum var. duboisii 4. Pourtant, si nous reculons d’une décennie
ou même au-delà, ces mêmes champignons étaient quasi exclusivement considérés
comme des contaminants de culture au laboratoire, associés le plus souvent à un
pathogène classique, dans les prélèvements à visée diagnostique ; le premier cas
diagnostiqué d’infection à moisissure à Dakar date de 2013 5. En 2016, les
moisissures représentaient 5,3% des agents de mycoses superficielles isolés au CHU
Aristide Le Dantec de Dakar 6.

Les champignons émergents concernent donc les champignons filamenteux autres


qu’Aspergillus spp. comme Fusarium spp., Scedosporium spp. et d’autres, mais
également les levures comme celles du genre Trichosporon 3, 7 et des dimorphiques
comme Talaromyces marneffei [38].

II. Fusarium et Scedosporium


Les Fusarium et les Scedosporium sont des hyalohyphomycètes, c’est-à-dire, des
champignons filamenteux, hyalins, caractérisés par une faible pigmentation (à l’opposé
des phaéohyphomycètes caractérisés par un mycélium mélanisé). Ils possèdent un
mycélium septé qui, microscopiquement, peut difficilement se distinguer de celui des
Aspergillus.

En dehors des Fusarium et des Scedosporium, on incrimine plus rarement d’autres


hyalohyphomycètes comme Paecilomyces spp., Acremonium spp., Schizophyllum spp.
et Rasamsonia, dont certains sont par ailleurs associés à des pathologies ou à certains
états, en particulier chez les sujets à risque etc., en particulier chez des patients
souffrant de leucémies aiguës (90 % des cas), de myélome, chez les cancéreux, les
greffés de moelle ou d’organes solides ou encore chez les brûlés [7].

309
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

A. Fusarium
Actuellement, le genre Fusarium comprend au moins 300 espèces
phylogénétiquement distinctes, 20 complexes d’espèces et neuf lignées
monotypiques. La plupart des Fusarium identifiés comme pathogènes opportunistes
appartiennent au complexe F. solani, au complexe F. oxysporum et au complexe F.
fujikuroi. Moins fréquemment rencontrés sont les membres des complexes F.
incarnatum-equiseti, F. dimerum et F. chlamydosporum, ou des espèces comme F.
sporotrichoides [8].

Morphologie de Fusarium spp.

Les colonies sont généralement de croissance rapide, d’aspect duveteux, velouteux,


cotonneux à floconneux. La couleur du thalle varie du blanchâtre au jaune, au rose, au
rouge ou violet. Les espèces de Fusarium produisent généralement des macroconidies
et des microconidies à partir de conidiophores (phialophores) élancés ou courts et
trapus [9]. Les macroconidies sont hyalines, constituées de deux à plusieurs logettes ;
elles sont fusiformes et plus ou moins incurvées. Les microconidies sont uni- ou
bicellulaires, hyalines, plus petites que les macroconidies, fusiformes à ovoïdes, droites
ou courbées. Les chlamydospores peuvent être présentes ou absentes [8] (Figure 17.
1).

310
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

Figure 17. 1 : Aspects macroscopique et microscopique (x40) de Fusarium solani (A et


B), Fusarium oxysporum (C et D) et Fusarium lichenicola (E et F)

Photo Dr K. Diongue (CHU Le Dantec, Dakar)

L'identification des espèces de Fusarium est souvent difficile en raison de la variabilité


de certains caractères macroscopiques en fonction des isolats (par exemple, la couleur
de la colonie, la forme et la taille des conidies) et parce que toutes les caractéristiques
requises ne sont pas toujours bien développées (par exemple, l'absence de
macroconidies dans certains isolats après la subculture), d’où la nécessité d’induire la
sporulation à partir de milieux appropriés ou de procéder à une culture sur lame.

311
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

Les caractères importants utilisés dans l'identification des espèces de Fusarium sont les
suivants :

 Taille de la colonie après croissance sur pomme de terre dextrose agar (PDA)
et/ou sur pomme de terre saccharose agar après incubation dans l'obscurité
pendant quatre jours à 25°C ;

 Pigmentation de la culture sur la gélose pomme de terre dextrose agar (PDA)


et/ou sur pomme de terre saccharose agar après incubation pendant 10 à 14
jours avec exposition quotidienne à la lumière ;

 Caractères microscopiques, incluant la forme des macroconidies, la présence ou


l’absence de microconidies, le mode de formation (conidiogénèse) des
microconidies et leur forme ; la présence ou l’absence de chlamydospores [8].

Biotope de Fusarium spp.

Le genre Fusarium regroupe des espèces telluriques saprophytes et des pathogènes de


plantes. Très cosmopolites, on trouve les Fusarium dans les zones tropicales, les
régions tempérées, les zones désertiques, montagneuses et même arctiques [10].

Mode de contamination

Les atteintes superficielles sont généralement secondaires à un traumatisme. Les


kératites font souvent suite à des blessures oculaires d’origine tellurique ou végétale,
mais elles existent aussi sans traumatisme préalable chez les porteurs de lentilles. Les
onychomycoses sont favorisées à la marche pieds-nus et affectent préférentiellement
le gros orteil. Les atteintes cutanées sont toujours des surinfections de plaies, d’ulcères
ou de brûlures.

La porte d’entrée concernant les fusarioses disséminées est habituellement


respiratoire (aérocontamination) ou cutanée, post-traumatique, ou à point de départ
d’une onychomycose. En effet, les onychomycoses à Fusarium peuvent constituer,
chez l’immunodéprimé, une porte d’entrée pour des infections disséminées [10, 11].

Facteurs de risque

La rupture des tissus par traumatisme direct ou par la présence d'un corps étranger
chez un patient sont les facteurs de risque habituels pour les infections localisées, à
l’exemple : des kératites (après traumatisme ou chez les porteurs de lentilles de
contact); de l'onychomycose (chez les personnes qui marchent pieds nus) ; et plus
rarement de la péritonite (chez des patients subissant une dialyse péritonéale
ambulatoire continue), mais également d’une cellulite (après une blessure et autres).
Parmi les facteurs de risque de la fusariose disséminée, on distingue : une

312
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

immunosuppression sévère, portant particulièrement sur les neutrophiles et les


lymphocytes (principalement chez des patients atteints d’hémopathies malignes); la
corticothérapie ou tout autre traitement immunosuppresseur ; les receveurs de greffe
de cellules souches, et les sujets atteints de myélome multiple [12].

Clinique

 Fusarioses localisées

Atteintes oculaires. - Très fréquemment rencontrés, Fusarium spp. représentent le


principal agent fongique de kératite aux États-Unis. Ces kératites font souvent suite à
des blessures oculaires d’origines tellurique ou végétale, mais elles existent aussi sans
traumatisme préalable chez les porteurs de lentilles. L’application d’antibiotiques ou
de corticoïdes locaux peut aggraver ces lésions cornéennes. Les signes, au début, sont
peu spécifiques, mais devant une ulcération douloureuse qui s’accompagne de
céphalée et parfois de fièvre, il faut évoquer la possibilité d’une kératite fongique.
D’autres atteintes oculaires comme des endophtalmies ou des dacryocanaliculites
peuvent éventuellement faire suite aux kératites [10, 12].

Onychomycoses. - Assez fréquentes, les onychomycoses à Fusarium sont favorisées


par la marche pieds-nus et infectent préférentiellement le gros orteil. Elle se présente
comme une tache blanche (leuconychie superficielle) de la partie proximale de l’ongle,
qui va s’étendre sur son bord libre (partie distale de l’ongle). Un périonyxis
(paronychie) est souvent associé à l’atteinte de l’ongle (car le micromycète pénètre
d’abord le tissu périunguéal et secondairement la tablette unguéale). L’ongle parasité
va ensuite s’épaissir et devenir friable. Il évoluera vers une onychomycodystrophie
totale [10, 12].

Atteintes cutanées. - Les atteintes cutanées sont le plus souvent des surinfections de
plaies, d’ulcères ou de brûlures. Elles se présentent sous la forme de granulomes,
d’ulcères, de nodules, de mycétomes, de nécroses, de panniculites ou d’intertrigo.
Toutefois, les lésions cutanées peuvent faire suite à une infection disséminée et
donner lieu à des lésions de type nodules sous-cutanés, ou ecthymas. Les nodules sont
érythémateux, douloureux à centre nécrosique [13].

Autres. - Avec une vingtaine de cas rapportés, les péritonites à Fusarium sont rares et
font toujours suite à une dialyse péritonéale [14] la porte d’entrée étant le cathéter.
Plus rarement, les Fusarium peuvent être les agents d’ostéomyélites, d’arthrites,
d’otites, de sinusites et d’abcès cérébraux [10, 12].

313
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

 Fusarioses disséminées

Les infections disséminées à Fusarium apparaissent le plus souvent chez des


immunodéprimés ou chez des patients atteints de pathologies sanguines
(leucémiques, Hodgkiniens) avec un taux de mortalité variant de 50 à 80 %, mais elles
peuvent survenir chez l’immunocompétent ayant subi de sévères brûlures. Voisines
des aspergilloses, le tableau des fusarioses disséminées est celui d’une fièvre
persistante sous antibiothérapie avec souvent une symptomatologie cutanée ou
pulmonaire (douleurs, toux, hémoptysie) associée. Les myalgies fréquentes de même
que les lésions ou métastases cutanées sont évocatrices, les hémocultures sont
habituellement positives [10, 12].

 Intoxications à Fusarium

Les Fusarium spp. produisent également des mycotoxines, qui, une fois ingérées, sont
à l’origine d’intoxications alimentaires et de manifestations allergiques et peuvent
devenir carcinogènes après une longue exposition. Les fumonisines sont les toxines
produites par F. moniliforme dans les maïs et peuvent provoquer un cancer de
l’œsophage [10, 12].

Traitement

 Objectif

Le but du traitement des fusarioses est d’éliminer totalement le champignon de


l’organisme. Un traitement rapide des infections localisées est nécessaire pour
prévenir la progression vers les infections disséminées [12].

 Moyens

Ils font appel à des antifongiques systémiques. Les Fusarium sont parmi les
champignons les plus résistants. La terbinafine a été utilisée avec succès dans des cas
d’infections superficielles à Dakar notamment sur l’intertrigo inter-orteils et
l’onychomycose [15]. Bien que le traitement optimal ne soit pas codifié, le
voriconazole, l’itraconazole et l’amphotéricine B, surtout dans ses formulations
lipidiques, ont été associés à des succès thérapeutiques. Le voriconazole est
notamment reconnu à la fois par l’US Food and Drug Administration aux États-Unis et
par la European Medicines Agency en Europe pour le traitement des infections sévères
à Fusarium [10].

314
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

 Indications

La terbinafine est utilisée à la dose de 250mg deux fois par jour avec ou sans
adjonction d’un traitement local pendant 1 à 3 mois ; parfois la guérison clinique est
obtenue avant la stérilisation complète du foyer fongique [16].

L’amphotéricine B, sous forme lipidique, est utilisé à fortes doses mais il n’y a pas de
codification du traitement des fusarioses disséminées. Il sera fonction des résultats de
l’antifongigramme et de la gestion de la maladie sous-jacente [11].

B. Scedosporium
Scedosporium prolificans, récemment proposé pour adopter le nom générique de
Lomentospora prolificans, et les membres du complexe d'espèces de S. apiospermum
(forme sexuée de Pseudallescheria boydii) sont les agents pathogènes les plus courants
dans ce genre. Dans le complexe d'espèces S. apiospermum, les espèces les plus
fréquentes sont : S. apiospermum et S. boydii, S. aurantiacum et S. dehoogii qui ont été
récemment décrites comme des pathogènes humains. Parce qu'il existe des
différences propres à l'espèce dans la virulence et la susceptibilité antifongique, ainsi
l'identification du genre et de l’espèce de l'agent causal est essentielle [7].

Morphologie des Scedosporium

L'identification morphologique des espèces de Scedosporium manque de plus en plus de


fiabilité et les méthodes d’identification moléculaire sont maintenant recommandées.
Les conidiogénèses de S. apiospermum et de S. boydii sont morphologiquement
indiscernables ; bien que ce dernier soit homothallique et produise des ascocarpes. S.
aurantiacum présente également une morphologie similaire, mais la plupart des souches
produisent un pigment diffusible jaune pâle à jaune vif sur PDA [8].

Par exemple, pour S. apiospermum, les colonies sont en croissance rapide, blanc-
grisâtre, duveteuses à l'avers avec un revers noir-grisâtre. La température optimale
pour la croissance est de 30 à 37°C. De nombreuses conidies, unicellulaires, marron-
pâles, largement claviformes à ovoïdes, de 4-9 x 6-10μm, avec des bases tronquées
sont observées. Les conidies sont isolées ou en petits groupes, portées par un
conidiophore allongé, simple ou ramifié, ou latéralement par les hyphes. Le
développement des conidies est de type annelidique, bien que les annulations
(cicatrices semblables à des anneaux laissés au sommet d'un annelide après sécession
conidienne) soient extrêmement difficiles à voir. Des corémies (stade Graphium)
donnant naissance à des conidies hyalines, plus fines, allongées, de 5 à 7μm x 2 à 3 de
large, peuvent être présentes dans certains isolats (Figure 17. 2) [8, 9].

315
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Moisissures et levures émergentes

Figure 17. 2 : Scedosporium apiospermum (a) conidiophores et conidies, (b) culture et


(c) corémies (stade Graphium)
Source : K. Diongue, Laboratoire Parasitologie-Mycologie, CHU Aristide Le Dantec - Dakar

Biotope de Scedosporium

Ce sont des champignons telluriques, présents dans les sols enrichis de débris
organiques (litières animales, fumiers) et dans les eaux boueuses et polluées [9].

Mode de contamination

La contamination de l’Homme par les champignons du genre Scedosporium se fait soit


par l’inhalation de spores, soit par voie cutanée ou transcutanée à la suite d’un
traumatisme ou d’une blessure tellurique, soit par l’ingestion accidentelle d’eaux
polluées [17].

Facteurs de risque

Dans une étude australienne sur l'épidémiologie des infections par les moisissures
non-Aspergillus, Scedosporium était au deuxième rang des moisissures incriminées,
après les mucormycètes [19]. Chez l’immunocompétent, un certain nombre de
scedosporioses ont été observées, survenant la plupart du temps dans un contexte
particulier. S. apiospermum a ainsi été associé à d’authentiques infections disséminées
survenant après accident de noyade en eau stagnante (pneumopathies associées à des
abcès cérébraux) [19]. Par ailleurs, le traumatisme favorise l’inoculation du
champignon, c’est le cas dans les kératites, ostéo-arthrites et les mycétomes à grains

316
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

blancs, il en est de même de la mucoviscidose, au décours de laquelle de rares formes


allergiques de type ABPA (aspergillose broncho-pulmonaire allergique) ont été
décrites. Ce champignon colonise, en effet, fréquemment les bronches des patients
atteints de mucoviscidose, le plus souvent en association avec A. fumigatus. La grande
majorité des infections disséminées à S. apiospermum s’observe cependant chez le
patient immunodéprimé, notamment chez les transplantés d’organes [2].

Clinique

Connu pour être un agent de mycétome à grains blancs en Amérique, en Afrique du


Nord et en Europe Centrale, S. apiospermum est aussi à l’origine d’atteintes broncho-
pulmonaires sur des terrains particuliers (mucoviscidose et autres pneumopathies
chroniques). Les infections chez les immunodéprimés sont plus fréquentes ; elles sont
principalement disséminées et concernent les poumons, les sinus et le système
nerveux central. Les manifestations pulmonaires vont de la balle fongique
asymptomatique à l’infection pulmonaire invasive, disséminée, qu’on ne peut
cliniquement distinguer d’une aspergillose pulmonaire sévère. Les atteintes du
système nerveux sont caractérisées par la présence de plusieurs abcès cérébraux chez
un immunodéprimé et ce, dans un contexte d’infection disséminée. Chez les
immunocompétents, S. apiospermum est l’agent d’infections localisées des tissus
mous, des os et des articulations. Outre les mycétomes, on retrouve des kératites, des
endophtalmies, des arthrites septiques, des otites, des ostéomyélites, des
rhinosinusites et des endocardites [10].

Scedosporium prolificans (ex S. inflatum) est une espèce moins fréquemment


rencontrée, mais dont le spectre clinique est très proche de celui de S. apiospermum
[2]. Il serait même actuellement transféré dans le genre Lomentospora (L.
proliferatum) [8].

Traitement
 Objectifs
Le but du traitement des scedosporioses est d’éliminer l’agent pathogène totalement
de l’organisme, notamment des poumons qui sont fréquemment colonisés chez les
patients atteints de mucoviscidose.

 Moyens
S. apiospermum est résistant in vitro au fluconazole, à l’amphotéricine B et à la
flucytosine. De sensibilité variable à l’itraconazole, cette espèce est sensible au
voriconazole et à la caspofungine.
Au vu des excellents résultats obtenus par le voriconazole sur différentes pathologies
causées par S. apiospermum, cet antifongique pourrait être considéré comme le
traitement de première intention [10].
 Indications

317
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

Aucun traitement n’est codifié, mais de manière générale, il faut pratiquer, chaque fois
que cela est possible, une exérèse des tissus lésés [10].

C. Trichosporon
Les espèces émergentes sont également décrites dans le groupe de champignons
levuriformes. En effet, parmi les levures où les genres Candida et Cryptococcus sont les
principaux pathogènes, on note une incidence croissante du genre Trichosporon,
variable en fonction des sites infectés [11].

Avant la révision taxinomique du genre en 1992 par Guého, les différentes espèces de
Trichosporon étaient difficilement identifiées du fait de l’imprécision des critères
d’identification. Presque toutes les souches isolées étaient décrites comme T. beigelii
ou T. cutaneum [20], les caractéristiques physiologiques étant souvent décrites comme
« variables ». Ainsi, cette révision taxinomique du genre Trichosporon a été réalisée en
1992 par Guého [20] utilisant la morphologie, l’ultrastructure, la physiologie, le
système ubiquinone, le pourcentage en guanine et cytosine (GC), les réassociations
acide désoxyribonucléique (ADN) et le séquençage de l’acide ribonucléique ribosomal
(ARNr). Aujourd’hui, le genre Trichosporon est constitué de nombreuses espèces dont
certaines appartiennent à des biotopes très particuliers. Six espèces ont été décrites
en pathologie humaine : T. ovoides, T. inkin, T. ashaii, T. asteroides, T. cutaneum et T.
mucoides [21, 24, 25].

Morphologie des Trichosporon

Les espèces de Trichosporon sont des levures qui se présentent sous forme de colonies
habituellement en relief et ont une apparence cireuse en fonction des espèces des
fissures radiales, des plis irréguliers, voire un aspect cérébriforme caractérisant la
surface des colonies. Ce sont des basidiomycètes, non encapsulées et uréase positive,
caractérisées par le développement d'hyphes hyalines et septées qui se fragmentent
en arthroconidies rectangulaires ou ovales. Certaines blastoconidies sont également
observées (Figure 17. 3) [8].

318
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

Figure 17. 3 : Trichosporon sp. (a) culture sur gélose de Sabouraud et (b)
examen microscopique montrant des blastoconidies, des arthroconidies et
éléments en « club de golf » (bout de la flèche) [4]

Biotope de Trichosporon
Trichosporon spp. sont des levures de distribution cosmopolite. Elles sont isolées du
sol, des plantes et de l’eau et font également partie de la flore cutanée normale de
l’Homme, et parfois des muqueuses. Ces levures sont essentiellement présentes au
niveau des plis inguino-cruraux et périanaux [24].
Mode de contamination
Ce sont des levures commensales qui, en présence de facteurs favorisants, conduisent
à des trichosporonoses. La porte d’entrée de l’infection disséminée serait
probablement le tractus digestif ou la voie broncho-pulmonaire ou encore la présence
de matériel étranger intravasculaire [24].
Facteurs favorisants
Les formes cliniques les plus sévères, sont observées dans les populations-cibles :
immunodépressions sévères, neutropénies prolongées, hémopathie ou cancer, greffés
de moelle et transplantés d’organes solides, prématurés, brûlés. Une incidence accrue
de trichosporonose a été associée à l’hémochromatose ; l’excès de fer pourrait faciliter
la croissance de ce champignon [25]. Des trichosporonoses profondes, mais localisées,
sont possibles dans des populations moins débilitées (diabétiques, corticothérapie
prolongée, dialyse péritonéale ou polypathologies de réanimation) sans les facteurs
favorisants classiques. Leur pronostic est différent.

Clinique

Ces espèces sont responsables d’infections superficielles comme la «piedra blanche»,


et d’infections profondes survenant essentiellement chez le sujet immunodéprimé. La
piedra blanche est une infection bénigne des cheveux et des poils.

319
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

Cette infection est le plus souvent rencontrée dans les pays tempérés ou tropicaux
(Amérique du Sud, Afrique, Europe), mais quelques cas ont été décrits en Scandinavie.
La piedra blanche des cheveux habituellement due à T. ovoïdes est devenue rare dans
les pays dont les conditions d’hygiène sont correctes. Cependant, la piedra blanche des
poils pubiens, qui est essentiellement due à T. inkin, a été décrite au Gabon [26].

Les lésions cutanées à type d’intertrigo inguino-cruraux et périanaux ont également


été décrits mais la responsabilité des Trichosporon spp., dans ces infections, est encore
très mal documentée. Toutefois, le rôle de T. asahii et de T. inkin a été envisagé dans
les lésions dermatologiques hors Piedra blanche au Gabon [27]. Par ailleurs, une étude
plus récente estime à 31,4% la prévalence de Trichosporon spp. parmi les étiologies
des affections inguino-pubiennes au Gabon. De même, leur responsabilité dans la
survenue d’onychomycose a été rapportée. En effet, ces levures ont été isolées dans
12,7% des prélèvements provenant des ongles des pieds au Gabon [28].

Concernant les trichosporonoses profondes, ce sont des infections opportunistes qui


surviennent essentiellement chez le patient atteint de leucémie aiguë et
profondément neutropénique. A propos de la trichosporonose disséminée, il est
rapporté dans la littérature que la leucémie aiguë représente la pathologie sous-
jacente dans 70% des cas. Les autres cas ont été décrits chez des transplantés
d’organes et chez des patients atteints de syndrome de l’immunodéficience acquis
(sida) [24]. La symptomatologie clinique est peu spécifique, proche de celle de la
candidose disséminée à savoir persistance de la fièvre sous antibiothérapie bien
conduite ou traitement antifongique inadapté, accompagnée de signes cutanés
fugaces et peu spécifiques, en comparaison à ceux des fusarioses [11].

Figure 17. 4 : Piedra blanche des poils pubiens


Source : Dr C. Kalter, Walter Reed Army Medical Centre, Etats-Unis.

320
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

Traitement

 Objectifs

Le but du traitement des trichosporonoses est d’éliminer les levures des sites
infectieux primaires afin d’éviter leur passage dans le sang (fongémie) et leur
dissémination à tout l’organisme, proche de 60 à 80% contre 10 à 20% dans les
candidémies [11].

 Moyens

L’amphotéricine B n’est pas active sur toutes les espèces de Trichosporon, et si seules
des posologies élevées sont parfois utilisées, il faut noter que 47% des souches de T.
asahii décrites par Ruan et al., ont une CMI à l’amphotéricine supérieure à 2µg/ml
[29]. Parmi ces souches, 85% ont des CMI élevées à la 5-flucytosine. La caspofungine et
les autres échinocandines sont inactives sur l’ensemble de Trichosporon spp. [30, 31].
La variabilité des CMI fait recommander l’identification précise des souches, pour la
réalisation rapide de l’antifongigramme. Le voriconazole peut être recommandé en
première intention compte tenu de son activité régulière in vitro, de sa disponibilité en
forme injectable et sous réserve du contrôle des taux sériques. Le posaconazole est
moins pratique d’utilisation en cas de sepsis grave. Par ailleurs, un cas d’infection
émergente à T. asahii sous posaconazole a été rapporté et soulève des questions, à ce
jour sans réponse, sur l’antifongigramme et le dosage sérique du posaconazole [32].

 Indications

Le traitement de la piedra blanche fait appel à un rasage des poils qui pourra être
accompagné de l’application d’un antifongique local tel qu’un antifongique de la
famille des imidazolés [28].

La prise en charge thérapeutique des trichosporonoses disséminées se caractérise par


l’absence de traitement de référence. Un traitement de quatre à six semaines paraît
raisonnable, mais peut être poursuivi tant que dure la neutropénie [33].

III. Diagnostic
Dans le laboratoire de mycologie, la question la plus fréquemment posée au biologiste
est la suivante : l’espèce isolée est-elle impliquée dans un processus pathologique ?

Tout champignon isolé en culture pure d’un prélèvement profond (LBA, LCR,
biopsies...) ou superficiel (expectorations, urines, sérosités, peau, …) doit être
considéré comme un pathogène, surtout lorsqu’il est isolé à plusieurs reprises.

321
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

La notion de contaminant ou de commensal ne sera ainsi retenue qu’après avoir


écarté l’hypothèse d’une mycose opportuniste. Le contexte d’isolement (infection
nosocomiale, notion de voyages, …) est, par ailleurs, très important à connaître pour
l’interprétation des résultats.

L’interprétation des résultats au laboratoire ne pourra donc se faire sans une


collaboration clinico-biologique.

A. Démarche diagnostique au laboratoire


À partir d’un prélèvement réalisé dans de bonnes conditions, l’examen direct permet
de visualiser les structures fongiques (éléments levuriformes et/ou filaments
mycéliens) au sein des produits pathologiques (Figure 17. 5). L’aspect des éléments
fongiques observés est souvent évocateur d’un type de mycose particulier : les
filaments de type Aspergillus, mesurant de 2 à 4µm de diamètre, apparaissent hyalins,
cloisonnés, et parfois ramifiés (dichotomie avec angles aigus à 45°), la présence de
blastospores et d’arthroconidies évoquent un Trichosporon. Les données de l’examen
histopathologique peuvent être contributives. Ce dernier permet en effet d’affirmer le
diagnostic de mycose, par la mise en évidence du champignon en situation parasitaire,
mais également d’apprécier la réponse cellulaire de l’hôte.

Figure 17. 5 : Examen direct montrant des filaments irréguliers et des


microconidies (flèches noires) de Fusarium dans des squames (a), et un filament
arthrosporé au sein de leucocytes d’un pus (b) [4]

La deuxième étape de la démarche diagnostique consiste en la mise en culture des


produits biologiques sur des milieux standards ou spécifiques. Les colonies fongiques
isolées seront dénombrées, puis identifiées.

322
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

Pour les Trichosporon, qui poussent sur milieu de Sabouraud sans et avec Actidione®
(toutefois, certaines espèces y sont sensibles), le test à l’uréase est positif (hydrolyse
rapide de l’urée). L’identification d’espèce est possible par spectrométrie de masse
MALDI-TOF, mais la référence est la biologie moléculaire (séquençage de la région IGS1
de l’ADN ribosomal) [34]. En revanche, pour les champignons filamenteux,
l’identification repose presque uniquement sur l’étude des caractères morphologiques
(macroscopiques et microscopiques). Les techniques de biologie moléculaire sont plus
performantes que les cultures mycologiques, en termes de sensibilité et de rapidité de
rendu du résultat. Ainsi, la PCR en temps réel permet un diagnostic dans la journée,
tandis que le séquençage des produits de PCR assure une identification précise des
espèces isolées.

Cependant, faute de standardisation et du faible nombre de kits commercialisés, elles


ne sont actuellement utilisées que dans les laboratoires universitaires ou de référence,
auxquels sont souvent adressés les isolats posant des problèmes d’identification.

Lorsque les prélèvements sont difficilement réalisables et que l’isolement du


champignon ne peut être envisagé, les examens sérologiques, ainsi que les recherches
d’antigènes circulants (actuellement limitées au diagnostic d’aspergillose, de
candidose et de cryptococcose) s’avèrent un complément utile au diagnostic. Ces
dernières techniques sont ainsi largement utilisées dans le cadre du suivi des patients à
risque dans les services d’onco-hématologie. Dans le cas de Trichosporon,
l’hémoculture est de loin l’examen le plus important car elle est positive dans 50 à 80%
des trichosporonémies. Pour certains auteurs, Trichosporon spp. occupent la seconde
place dans les levures isolées sur hémocultures. Cependant, il peut positiver le dosage
de 1,3--D-glucane, de l’antigène cryptococcique sérique, de l’antigène
galactomannane aspergillaire et conduire ainsi à des erreurs diagnostiques [35].

B. Antifongigramme
La détermination de la sensibilité aux antifongiques ne doit pas être systématique,
mais réservée aux souches isolées d’un site profond ou pour lesquelles on redoute une
résistance (patients sous azolés). Pour la détermination des CMI (qui sont également
intéressantes pour la surveillance épidémiologique), les techniques de référence
suivent les recommandations du CLSI (Clinical and Laboratory Standards Institute) aux
États-Unis, ou de l’EUCAST (European Committee on Antimicrobial Susceptibillity
Testing) en Europe. En pratique, la technique E-Test® (AB Biodisk) est la plus utilisée au
laboratoire. Pour plus de détails, des références d’ouvrages de mycologie sont
proposées au lecteur [2].

323
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

IV. Prophylaxie
Selon Dignani et Anaissie [12], en raison de la morbidité et de la mortalité élevées des
infections fongiques disséminées, tous les efforts devraient être consentis afin de
prévenir ces infections et d'améliorer l'état immunitaire du patient, peut-être en
atténuant ou en supprimant si possible les agents immunosuppresseurs. Il est aussi
recommandé chez les patients susceptibles de recevoir une thérapie sévèrement
immunosuppressive de procéder à un examen clinique minutieux de la peau afin
d’identifier les zones présentant des lésions évocatrices de mycose, qui devront
bénéficier d’un traitement antifongique si des champignons sont isolés et identifiés. En
outre, les patients sévèrement immunodéprimés présentant des lésions cutanées
devraient éviter l'exposition aux sources de champignons de l'environnement telles
que l’eau de robinet. En effet, il a été démontré que l'eau de l'hôpital pouvait être
contaminé par les champignons et conduire à une aérosolisation (surtout après la
douche) exposant les patients aux mycoses [36]. L'exposition à l'eau de robinet peut
ainsi être évitée par l'utilisation d’éponge de bain stérile au lieu de douche (pour
minimiser l'aérosol) et par la consommation d'eau stérile pendant les périodes
d’immunosuppression sévère. Le nettoyage des surfaces environnementales (sols de
salle de bains) à l’eau et antiseptiques a entraîné une diminution significative de la
concentration de l'air en moisissures pathogènes dans les salles de bains d’une unité
de transplantation de moelle osseuse [37]. Ainsi, un nettoyage adéquat de la salle de
bain par des désinfectants est recommandé avant la douche (pour les patients qui
insistent sur la douche pendant la période d'immunosuppression sévère).

En raison du risque de rechutes chez les personnes immunodéprimées atteintes


d'infections fongiques antérieures, la prophylaxie secondaire devrait être envisagée.

324
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Moisissures et levures émergentes

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Moisissures et levures émergentes

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327
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Table des matières

Table des matières

1 GENERALITES SUR LA MYCOLOGIE............................................................................................................... 13


INTRODUCTION .............................................................................................................................................. 14

I. Place des champignons dans la systématique du vivant .................................................14


II. Caractères généraux des champignons .........................................................................15
A. Thalle végétatif .................................................................................................................................. 15
B. Thalle reproducteur............................................................................................................................ 16
1. Reproduction par bouturage .......................................................................................................................... 17
2. Reproduction par formation de spores de reproduction ................................................................................. 17
a. Reproduction asexuée (stade anamorphe) ................................................................................................ 17
b. Reproduction sexuée (stade téléomorphe) ................................................................................................ 17
III. Classification des champignons ....................................................................................18
IV. Physiologie des champignons ......................................................................................19
V. Notions de mycologie médicale ....................................................................................19
A. Définition des mycoses....................................................................................................................... 20
B. Classification des champignons d’intérêt médical ............................................................................... 20
1. Levures.......................................................................................................................................................... 20
2. Champignons filamenteux.............................................................................................................................. 20
3. Les Dimorphiques .......................................................................................................................................... 20
C. Habitat des champignons et mode de contamination ......................................................................... 21
2 CANDIDOSES ............................................................................................................................................... 22
INTRODUCTION .............................................................................................................................................. 23

I. Epidémiologie ...............................................................................................................24
A. Agent pathogène .............................................................................................................................. 24
B. Habitat .............................................................................................................................................. 26
C. Mode de contamination .................................................................................................................... 26
D. Facteurs favorisants .......................................................................................................................... 27
E. Répartition géographique ................................................................................................................. 28
II. Diagnostic biologique ...................................................................................................29
A. Circonstances du diagnostic .............................................................................................................. 29
B. Les modifications biologiques non spécifiques .................................................................................. 31
C. Diagnostic mycologique .................................................................................................................... 31
III. Diagnostic Immunologique .........................................................................................42
IV. Principes thérapeutiques ............................................................................................43
A. But ............................................................................................................................................... 43
B. Moyens : ce sont des moyens essentiellement médicamenteux ........................................................ 43
C. Indications......................................................................................................................................... 45
V. Prévention ...................................................................................................................48
A. But : réduire la colonisation et empêcher l’infection ......................................................................... 48
B. Les moyens........................................................................................................................................ 48

328
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Table des matières

C. Indications......................................................................................................................................... 48
CONCLUSION .................................................................................................................................................. 49
BIBLIOGRAPHIE .............................................................................................................................................. 50

3 CRYPTOCOCCOSE......................................................................................................................................... 51
INTRODUCTION .............................................................................................................................................. 52

I. Épidémiologie ................................................................................................................55
A. Agent pathogène ............................................................................................................................... 55
1. Taxonomie .................................................................................................................................................... 55
2. Morphologie.................................................................................................................................................. 56
3. Biologie ......................................................................................................................................................... 57
4. Pathogénie .................................................................................................................................................... 59
B. Habitat .............................................................................................................................................. 59
C. Mode de contamination ..................................................................................................................... 59
D. Facteurs favorisants........................................................................................................................... 60
E. Répartition géographique................................................................................................................... 60
II. Diagnostic biologique ....................................................................................................63
A. Circonstances du diagnostic biologique/éléments d’orientation .......................................................... 63
B. Modifications biologiques non spécifiques .......................................................................................... 63
C. Diagnostic mycologique ..................................................................................................................... 64
D. Diagnostic immunologique spécifique ................................................................................................ 67
E. Diagnostic anatomopathologique....................................................................................................... 69
F. Diagnostic moléculaire ....................................................................................................................... 69
III. Principes thérapeutiques .............................................................................................70
A. But .................................................................................................................................................... 70
B. Moyens.............................................................................................................................................. 70
C. Indications/posologies ....................................................................................................................... 71
E. Suivi biologique/ post-thérapeutique .................................................................................................. 72
IV. Prévention/prophylaxie ...............................................................................................72
A. But/objectifs ...................................................................................................................................... 72
B. Moyens/stratégies ............................................................................................................................. 73

CONCLUSION .................................................................................................................................................. 73
BIBLIOGRAPHIE .............................................................................................................................................. 73

4 DERMATOPHYTOSES ................................................................................................................................... 77

I. Généralités ....................................................................................................................78
A. Définition........................................................................................................................................... 78
B. Intérêt ............................................................................................................................................... 78
II. Épidémiologie ...............................................................................................................79
A. Agents pathogènes ............................................................................................................................ 79
B. Réservoir de micromycètes parasites .................................................................................................. 81
C. Mode de contamination ..................................................................................................................... 81
D. Facteurs favorisants........................................................................................................................... 82
E. Répartition géographique................................................................................................................... 82
III. Diagnostic biologique ...................................................................................................83

329
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Table des matières

A. Circonstances du diagnostic biologique. ............................................................................................. 83


B. Diagnostic différentiel ........................................................................................................................ 93
C. Diagnostic mycologique ..................................................................................................................... 93
IV. Principes thérapeutiques ...........................................................................................100
A. But .................................................................................................................................................. 100
B. Moyens............................................................................................................................................ 100
C. Indications ....................................................................................................................................... 101
E. Résultats/Evolution/Surveillance ...................................................................................................... 102
V. Prévention ..................................................................................................................102
A. Mesures individuelles ....................................................................................................................... 102
B. Mesures collectives .......................................................................................................................... 102

CONCLUSION ................................................................................................................................................ 103


BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................................ 109

5 MALASSEZIOSES ........................................................................................................................................ 110


INTRODUCTION ............................................................................................................................................ 111

I. Epidémiologie ..............................................................................................................112
A. Agent pathogène ............................................................................................................................. 112
B. Habitat ............................................................................................................................................ 113
C. Facteurs favorisants ......................................................................................................................... 113
D. Répartition géographique ................................................................................................................ 114
II. Diagnostic biologique ..................................................................................................114
A. Circonstances du diagnostic biologique/éléments d’orientation ........................................................ 114
B. Diagnostic mycologique ................................................................................................................... 118
C. Diagnostic histologique .................................................................................................................... 121
III. Principes thérapeutiques ...........................................................................................122
A. But .................................................................................................................................................. 122
B. Moyens............................................................................................................................................ 122
C. Indications - posologie ..................................................................................................................... 122
D. Suivi biologique/ post-thérapeutique................................................................................................ 123
IV. Prévention /Prophylaxie ............................................................................................123
A. But .................................................................................................................................................. 123
B. Moyens/Stratégies ........................................................................................................................... 123
6 PNEUMOCYSTOSE ..................................................................................................................................... 126
INTRODUCTION ............................................................................................................................................ 127

I. Epidémiologie ..............................................................................................................128
A. Agent pathogène ............................................................................................................................. 128
B. Habitat ............................................................................................................................................ 131
C. Hôte définitif / Réservoir de parasites ............................................................................................... 131
D. Mode de contamination................................................................................................................... 131
E. Voie de sortie ................................................................................................................................... 131
F. Cycle biologique ............................................................................................................................... 131
G. Facteurs favorisants......................................................................................................................... 132
H. Répartition géographique ................................................................................................................ 133

330
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Table des matières

II. Diagnostic biologique ..................................................................................................133


A. Circonstances du diagnostic biologique ............................................................................................ 134
B. Diagnostic mycologique ................................................................................................................... 134
C. Diagnostic immunologique ............................................................................................................... 139
D. Diagnostic histologique.................................................................................................................... 139
E. Diagnostic moléculaire ..................................................................................................................... 140
III. Principes thérapeutiques ...........................................................................................140
A. Buts ................................................................................................................................................. 140
B. Moyens............................................................................................................................................ 140
C. Indications/posologie ....................................................................................................................... 141
IV. Prophylaxie ................................................................................................................142
A. Buts ................................................................................................................................................. 142
B. Moyens............................................................................................................................................ 142
CONCLUSION ................................................................................................................................................ 142

BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................................ 142


7 MICROSPORIDIOSES .................................................................................................................................. 144
INTRODUCTION ............................................................................................................................................ 145

I. Épidémiologie ..............................................................................................................146
A. Agent pathogène ............................................................................................................................. 146
1. Taxonomie .................................................................................................................................................. 146
2. Morphologie................................................................................................................................................ 146
3. Biologie ....................................................................................................................................................... 147
4. Pathogénie .................................................................................................................................................. 147
B. Hôtes et Réservoir de parasites ........................................................................................................ 147
C. Habitat ............................................................................................................................................ 148
D. Mode de contamination................................................................................................................... 148
E. Cycle biologique ............................................................................................................................... 148
F. Facteurs favorisants ......................................................................................................................... 149
G. Répartition géographique ................................................................................................................ 149
II. Diagnostic biologique ..................................................................................................150
A. Circonstances du diagnostic biologique ............................................................................................ 150
B. Diagnostic mycologique ................................................................................................................... 150
C. Diagnostic immunologique spécifique............................................................................................... 151
D. Diagnostic moléculaire..................................................................................................................... 151
E. Diagnostic histologique .................................................................................................................... 151
F. Microscopie électronique.................................................................................................................. 151
III. Principes thérapeutiques ...........................................................................................152
A. But .................................................................................................................................................. 152
B. Moyens............................................................................................................................................ 152
C. Indications/posologies ..................................................................................................................... 152
D. Suivi biologique/post-thérapeutique ................................................................................................ 152
IV. Prévention .................................................................................................................153
A. But .................................................................................................................................................. 153
B. Moyens/stratégies ........................................................................................................................... 153

331
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Table des matières

RESUME ....................................................................................................................................................... 153


CONCLUSION ................................................................................................................................................ 153
BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................................ 154

8 MYCETOMES ............................................................................................................................................. 155


INTRODUCTION ............................................................................................................................................ 156

I. Épidémiologie ..............................................................................................................157
A. Agent pathogène ............................................................................................................................. 157
B. Habitat ............................................................................................................................................ 161
C. Mode de contamination ................................................................................................................... 162
D. Facteurs favorisants......................................................................................................................... 162
E. Répartition géographique................................................................................................................. 163
II. Diagnostic biologique ..................................................................................................164
A. Circonstances du diagnostic biologique/éléments d’orientation ........................................................ 164
B. Diagnostic mycologique ................................................................................................................... 166
C. Diagnostic histologique .................................................................................................................... 172
D. Diagnostic moléculaire..................................................................................................................... 175
E. Diagnostic immunologique ............................................................................................................... 175
F. Diagnostic radiologique .................................................................................................................... 176
III. PRINCIPES THÉRAPEUTIQUES .....................................................................................177
A. But .................................................................................................................................................. 177
B. Moyens............................................................................................................................................ 177
C. Indications ....................................................................................................................................... 177
IV. Prévention/prophylaxie .............................................................................................179
CONCLUSION ................................................................................................................................................ 180
BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................................ 181
9 ASPERGILLOSES ......................................................................................................................................... 184
INTRODUCTION ............................................................................................................................................ 185

I. Epidémiologie ..............................................................................................................186
A. Agent pathogène ............................................................................................................................. 186
1. Taxonomie .................................................................................................................................................. 186
2. Morphologie................................................................................................................................................ 187
3. Biologie ....................................................................................................................................................... 188
4. Pathogénie .................................................................................................................................................. 188
B. Habitat ............................................................................................................................................ 188
C. Mode de contamination ................................................................................................................... 189
D. Facteurs favorisants......................................................................................................................... 189
E. Répartition géographique................................................................................................................. 189
II. Diagnostic biologique ..................................................................................................190
A. Circonstances du diagnostic biologique ............................................................................................ 190
B. Modifications biologiques non spécifiques ........................................................................................ 192
C. Diagnostic mycologique ................................................................................................................... 192
1. Prélèvements :............................................................................................................................................. 192
2. Examen microscopique ................................................................................................................................ 193
3. Culture ........................................................................................................................................................ 194

332
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Table des matières

4. Identification des cultures: Elle est basée sur les caractères morphologiques de la culture: ........................... 195
5. Identification par la spectrométrie de masse: ............................................................................................... 197
6. Interprétation des résultats:......................................................................................................................... 198
7. Antifongigramme......................................................................................................................................... 198
D. Diagnostic immunologique .............................................................................................................. 198
E. Biologie moléculaire ......................................................................................................................... 200
F. Examen anatomopathologique......................................................................................................... 200
III. Principes thérapeutiques ...........................................................................................201
A. Buts ................................................................................................................................................. 201
B. Moyens............................................................................................................................................ 201
C. Indications / posologies : .................................................................................................................. 202
D. Suivi biologique / post thérapeutique ............................................................................................... 202
IV. Prévention .................................................................................................................203
A. But .................................................................................................................................................. 203
B. Moyens............................................................................................................................................ 203
CONCLUSION ................................................................................................................................................ 203

10 HISTOPLASMOSES ................................................................................................................................... 205


INTRODUCTION ............................................................................................................................................ 206

I. Épidémiologie .............................................................................................................206
A. Agents pathogènes .......................................................................................................................... 206
1. Taxonomie .................................................................................................................................................. 206
2. Morphologie................................................................................................................................................ 207
3. Biologie ....................................................................................................................................................... 207
4. Pathogénie .................................................................................................................................................. 207
B. Habitat ............................................................................................................................................ 207
C. Modes de contamination ................................................................................................................. 208
D. Facteurs favorisants......................................................................................................................... 208
1. D’ordre individuel ........................................................................................................................................ 208
2. D’ordre général ........................................................................................................................................... 208
3. Liés au champignon ..................................................................................................................................... 208
E. Répartition géographique................................................................................................................. 209
II. Diagnostic biologique ..................................................................................................209
A. Circonstances du diagnostic biologique ....................................................................................... 209
1 Epidémiologiques ......................................................................................................................................... 209
2 Cliniques ...................................................................................................................................................... 209
B. Diagnostic mycologique ................................................................................................................... 211
1. Prélèvement ................................................................................................................................................ 211
2. Techniques .................................................................................................................................................. 211
a. Examen direct et frottis........................................................................................................................... 211
b. La culture ............................................................................................................................................... 212
c. L’inoculation à l’animal............................................................................................................................ 213
C. Diagnostic histologique .................................................................................................................... 213
D. Diagnostic immunologique .............................................................................................................. 214
1. L’IDR à l’histoplasmine ................................................................................................................................. 214
2. Les réactions sérologiques ........................................................................................................................... 214
E. Diagnostic moléculaire ..................................................................................................................... 215
III. Principes thérapeutiques ...........................................................................................215

333
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Table des matières

A. But .................................................................................................................................................. 215


B. Moyens............................................................................................................................................ 215
C. Indications / posologies.................................................................................................................... 215
1. Forme américaine (variété capsulatum) ....................................................................................................... 215
2. Forme africaine (variété duboisii) ................................................................................................................. 216
D. Suivi post-thérapeutique .................................................................................................................. 216
IV. Prévention .................................................................................................................216
CONCLUSION ................................................................................................................................................ 216
11 BLASTOMYCOSE ...................................................................................................................................... 219

INTRODUCTION ............................................................................................................................................ 220

I. Epidémiologie ..............................................................................................................221
A. Agent pathogène ............................................................................................................................. 221
B. Habitat ............................................................................................................................................ 224
C. Hôtes ............................................................................................................................................... 224
D. Mode de contamination................................................................................................................... 224
E. Facteurs favorisants ......................................................................................................................... 224
F. Répartition géographique................................................................................................................. 225
II. Diagnostic biologique ..................................................................................................226
A. Circonstances du diagnostic biologique ............................................................................................ 226
B. Diagnostic mycologique ................................................................................................................... 227
1. Prélèvements .............................................................................................................................................. 227
2. Examen direct.............................................................................................................................................. 228
3. Culture ........................................................................................................................................................ 229
a. Isolement ............................................................................................................................................... 229
b. Identification .......................................................................................................................................... 229
C. Diagnostic immunologique spécifique............................................................................................... 230
D. Diagnostic histologique.................................................................................................................... 231
III. Principes thérapeutiques ...........................................................................................232
A. But .................................................................................................................................................. 232
B. Moyens............................................................................................................................................ 232
C. Indications/posologie ....................................................................................................................... 232
IV. Prévention/ Prophylaxie ............................................................................................233
A. But .................................................................................................................................................. 233
B. Moyens/ stratégies .......................................................................................................................... 233
12 CHROMOMYCOSE.................................................................................................................................... 235

I. Epidémiologie .............................................................................................................237
A. Agents pathogènes ......................................................................................................................... 237
B. Habitat des champignons................................................................................................................ 237
C. Mode de contamination .................................................................................................................. 238
D. Facteurs favorisants ........................................................................................................................ 238
E. Répartition géographique ............................................................................................................... 238
II. Diagnostic biologique .................................................................................................239
A. Circonstances du diagnostic biologique........................................................................................... 239
B. Diagnostic mycologique .................................................................................................................. 242
C. Diagnostic histologique ................................................................................................................... 244

334
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Table des matières

D. Diagnostic Immunologique spécifique ............................................................................................ 245


E. Diagnostic moléculaire .................................................................................................................... 245
III. Principes thérapeutiques ..........................................................................................245
A. But .................................................................................................................................................. 245
B. Moyens thérapeutiques .................................................................................................................. 245
C. Indications/posologies .................................................................................................................... 246
D. Suivi thérapeutique......................................................................................................................... 247
IV. Prévention ................................................................................................................247
A. Buts................................................................................................................................................. 247
B. Stratégies ........................................................................................................................................ 247
CONCLUSION ................................................................................................................................................ 248

BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................................ 249


13 SPOROTRICHOSE ..................................................................................................................................... 251

INTRODUCTION ............................................................................................................................................ 252

I. Epidémiologie ..............................................................................................................254
A. Agent pathogène ............................................................................................................................. 254
1. Taxonomie / Classification ........................................................................................................................... 254
2. Morphologie ............................................................................................................................................... 254
3. Biologie ...................................................................................................................................................... 255
4. Pathogénie ................................................................................................................................................. 255
B. Habitat /Ecologie ............................................................................................................................. 255
C. Mode de contamination ................................................................................................................... 256
D. Facteurs favorisants......................................................................................................................... 256
II. Diagnostic biologique ..................................................................................................258
A. Circonstances du diagnostic biologique/Eléments d’orientation ................................................... 258
B. Modifications biologiques non spécifiques ........................................................................................ 259
C. Diagnostic mycologique ................................................................................................................... 259
1. Prélèvements .............................................................................................................................................. 259
2. Techniques .................................................................................................................................................. 260
3. Résultats et interprétation : Identification de la culture ................................................................................ 260
D. Diagnostic immunologique spécifique .............................................................................................. 263
E. Diagnostic moléculaire (PCR) ............................................................................................................ 263
F. Diagnostic histologique .................................................................................................................... 264
III. Principes thérapeutiques ...........................................................................................265
A. But .................................................................................................................................................. 265
B. Moyens............................................................................................................................................ 265
1- Moyens médicamenteux.............................................................................................................................. 265
2- Autres thérapies ......................................................................................................................................... 265
C. Indications/posologie ....................................................................................................................... 266
1- Moyens médicamenteux.............................................................................................................................. 266
2- Autres thérapies ......................................................................................................................................... 267
D. Suivi biologique/ post-thérapeutique................................................................................................ 267
IV. Prévention/Prophylaxie .............................................................................................267
A. But/objectifs .................................................................................................................................... 267
B. Moyens/stratégies ........................................................................................................................... 267

335
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Table des matières

RESUME-CONCLUSION ................................................................................................................................. 267


BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................................ 269
14 COCCIDIOIDOMYCOSE ............................................................................................................................. 272

INTRODUCTION ............................................................................................................................................ 273

I. Epidémiologie ..............................................................................................................273
A. Agents pathogènes .......................................................................................................................... 273
1. Taxonomie .................................................................................................................................................. 273
2. Morphologie................................................................................................................................................ 273
3. Biologie ....................................................................................................................................................... 274
4. Pathogénie .................................................................................................................................................. 275
B. Habitat ............................................................................................................................................ 275
C. Mode de contamination ................................................................................................................... 275
D. Facteurs favorisants......................................................................................................................... 275
1. D’ordre général ........................................................................................................................................... 275
2. D’ordre individuel ........................................................................................................................................ 275
E. Répartition géographique................................................................................................................. 276
II. Diagnostic biologique ..................................................................................................276
A. Circonstances................................................................................................................................... 276
B. Modifications biologiques non spécifiques ........................................................................................ 276
C. Diagnostic mycologique ................................................................................................................... 276
1. Prélèvements .............................................................................................................................................. 276
2. Techniques .................................................................................................................................................. 276
3. Résultats ..................................................................................................................................................... 277
D. Diagnostic immunologique spécifique .............................................................................................. 277
1. Détection d’antigène ................................................................................................................................... 277
2. Détection d’anticorps par............................................................................................................................. 277
3. IDR à la coccidioïdine ou à la sphéruline ....................................................................................................... 277
E. Diagnostic moléculaire ..................................................................................................................... 278
F. Diagnostic histologique .................................................................................................................... 278
III. Principes thérapeutiques ...........................................................................................278
A. But .................................................................................................................................................. 278
B. Moyens............................................................................................................................................ 278
C. Indications/Posologie ....................................................................................................................... 278
D. Suivi biologique ............................................................................................................................... 279
IV. Prophylaxie ................................................................................................................279
A. But .................................................................................................................................................. 279
B. Moyens............................................................................................................................................ 279

CONCLUSION ................................................................................................................................................ 279


15 PARACOCCIDIOIDOMYCOSE .................................................................................................................... 282

INTRODUCTION ............................................................................................................................................ 283

I. Epidémiologie ..............................................................................................................283
A. Agent pathogène ............................................................................................................................. 283
1. Taxonomie .................................................................................................................................................. 283
2. Morphologie................................................................................................................................................ 283
3. Pathogénie .................................................................................................................................................. 284

336
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Table des matières

B. Habitat ............................................................................................................................................ 284


C. Mode de contamination ................................................................................................................... 285
D. Facteurs favorisants......................................................................................................................... 285
1. D’ordre général ........................................................................................................................................... 285
2. D’ordre individuel ........................................................................................................................................ 285
E. Répartition géographique................................................................................................................. 285
II. Diagnostic biologique ..................................................................................................285
A. Circonstances................................................................................................................................... 285
1. Eléments épidémiologiques et cliniques ....................................................................................................... 285
B. Modifications biologiques non spécifiques ........................................................................................ 286
C. Diagnostic mycologique ................................................................................................................... 286
1. Prélèvements .............................................................................................................................................. 286
2. Techniques .................................................................................................................................................. 286
3. Résultats ..................................................................................................................................................... 286
D. Diagnostic immunologique spécifique .............................................................................................. 287
1. Détection d’antigène ................................................................................................................................... 287
2. Détection d’anticorps par............................................................................................................................. 287
3. IDR à la paracoccidioïdine ............................................................................................................................ 287
E. Diagnostic moléculaire ..................................................................................................................... 287
F. Diagnostic histologique .................................................................................................................... 287
III. Principes thérapeutiques ...........................................................................................288
A. But .................................................................................................................................................. 288
E. Moyens ............................................................................................................................................ 288
C. Indications / Posologie ..................................................................................................................... 288
D. Suivi biologique / post thérapeutique ............................................................................................... 288
IV. Prophylaxie ................................................................................................................289
A. But .................................................................................................................................................. 289
B. Moyens............................................................................................................................................ 289
CONCLUSION ................................................................................................................................................ 289
BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................................ 290
16 ZYGOMYCOSES ........................................................................................................................................ 291

INTRODUCTION ............................................................................................................................................ 292

I. Épidémiologie ..............................................................................................................293
A. Agents Pathogènes .......................................................................................................................... 293
1. Taxinomie.................................................................................................................................................... 293
2. Morphologie................................................................................................................................................ 294
B. Habitat ............................................................................................................................................ 294
C. Mode de contamination ................................................................................................................... 294
D. Facteurs favorisants......................................................................................................................... 295
E. Répartition géographique................................................................................................................. 295
II. Diagnostic biologique ..................................................................................................296
A. Circonstances du diagnostic biologique ............................................................................................ 296
1. Eléments épidémiologiques ......................................................................................................................... 296
2. Signes cliniques ........................................................................................................................................... 296
a. Mucormycoses ....................................................................................................................................... 296
b. Entomophthoromycoses ......................................................................................................................... 297
B. Diagnostic mycologique ................................................................................................................... 299

337
Manuel de la Société Africaine de Parasitologie (SoAP) – Tome 2 – Affections mycosiques
Table des matières

1. Prélèvements .............................................................................................................................................. 299


2. Examen direct.............................................................................................................................................. 299
3. Cultures et interprétations ........................................................................................................................... 300
C. Diagnostic histologique .................................................................................................................... 301
D. Diagnostic moléculaire..................................................................................................................... 302
III. Principes thérapeutiques ...........................................................................................302
A. Buts ................................................................................................................................................. 302
B. Moyens thérapeutiques.................................................................................................................... 302
C. Indications ....................................................................................................................................... 303

BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................................ 305


17 MOISISSURES ET LEVURES EMERGENTES ................................................................................................. 307

I. Généralités ..................................................................................................................308
A. Définition......................................................................................................................................... 308
B. Intérêt ............................................................................................................................................. 308
II. Fusarium et Scedosporium ..........................................................................................309
A. Fusarium ......................................................................................................................................... 310
B. Scedosporium .................................................................................................................................. 315
C. Trichosporon .................................................................................................................................... 318
III. Diagnostic ..................................................................................................................321
A. Démarche diagnostique au laboratoire ............................................................................................ 322
B. Antifongigramme............................................................................................................................. 323
IV. Prophylaxie ................................................................................................................324
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ................................................................................................................. 325

Les Éditions d’AVENIR, Abidjan, Côte d’Ivoire

Tome2 – Affections mycosiques


ISBN 978-2-38003-028-0
Dépôt légal N° 17103 du 08 janvier 2021 (Première édition)

338
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