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Chapitre

2
Microbiotes humains
V. Cattoir

PLAN DU CHAPITRE
Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
Techniques d'étude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

Généralités siques. Par exemple, environ 80 % des bactéries du micro-


biote intestinal ne sont pas cultivables dans les conditions
Chez un homme sain, les tissus internes sont normalement standard de laboratoire. Cependant, l'utilisation optimisée
stériles tandis que les tissus de surface (peau et muqueuses) d'un panel pertinent de nombreuses conditions de culture
sont colonisés par divers micro-organismes, constituant peut permettre la détection de nombreuses bactéries a priori
de véritables écosystèmes. Cet ensemble de communautés non cultivables. Cette approche, dénommée culturomique,
microbiennes (bactéries, archées, virus, champignons et correspond à cette diversification de conditions de culture
protozoaires) présent au niveau d'un environnement défini combinée avec une identification par spectrométrie de
(par exemple site anatomique donné ou organisme entier) masse MALDI-TOF de chaque colonie isolée. Les méthodes
constitue le microbiote, anciennement appelé (micro)flore. moléculaires (voir ci-dessous) et la culturomique sont com-
Ce terme récent n'est pas à confondre avec le microbiome plémentaires (en effet, seulement 15 % des espèces sont
qui correspond à l'habitat entier comprenant les micro-­ retrouvées par les deux approches) alors qu'elles présentent
organismes, leurs génomes et les interactions environne- des performances similaires en termes de nombre d'espèces
mentales. Le nombre de micro-organismes est environ identifiées.
10 fois plus élevé que celui des cellules humaines d'un orga- Les méthodes moléculaires ont récemment supplanté
nisme et le rapport du nombre total de gènes bactériens sur la culture pour l'étude des microbiotes, notamment avec
celui du génome humain est de 100:1 à 1000:1. Ces com- l'avènement des techniques de séquençage à haut débit. Il
munautés microbiennes co-évoluent au contact de nos cel- est donc possible actuellement de déterminer l'ensemble
lules et de nos tissus depuis des milliers d'années sous forme des génomes et des gènes d'un microbiote donné (appelé
d'interactions mutualistes et sont donc essentielles à notre métagénome) par séquençage de l'ADN total extrait à partir
survie. Elles constituent notamment la première ligne de d'un échantillon suivi d'une comparaison à une banque de
défense contre les infections en empêchant la colonisation données et d'une annotation (c'est la technique de métagé-
de l'hôte par des micro-organismes potentiellement patho- nomique). Une autre approche pour l'analyse de la diversité
gènes et jouent un rôle majeur dans le développement du bactérienne d'un microbiote est la métataxonomique, qui a
système immunitaire. pour principe l'amplification, le séquençage et l'analyse du
Alors qu'il existe quelques études sur la partie fongique gène codant pour l'ARNr 16S, marqueur bactérien univer-
(mycobiome) ou virale (virome) du microbiome, la majorité sel. Un biais important de ces méthodes est leur sensibilité.
des études faites sur le sujet portent sur les communautés Par exemple, pour le microbiote intestinal (environ 1012 bac-
bactériennes. Même si ces deux volets ont certainement un téries par gramme de selles), l'analyse métagénomique
rôle important dans l'écologie microbienne, seul le micro- n'est pas capable de détecter des bactéries présentes à une
biome bactérien sera traité en détail dans ce chapitre. concentration < 105 par gramme. Une autre limite est l'im-
possibilité de distinguer les bactéries viables et non viables.
L'analyse dynamique des profils d'expression des gènes au
Techniques d'étude sein d'un microbiome est appelée métatranscriptomique
La culture a longtemps été la méthode de référence tandis qu'au niveau protéique cela correspond à la méthode
pour l'identification et la caractérisation des micro-­ de métaprotéomique. Enfin, l'étude des profils métaboliques
organismes présents au sein de communautés bactériennes. (métabolomique) au niveau de systèmes complexes tels
Actuellement, il apparaît que la majorité des bactéries ne qu'un microbiome est appelé métabonomique.
sont pas cultivables in vitro et qu'il y a donc un biais évident La compréhension des relations symbiotiques entre le
dans l'étude du microbiote par les méthodes de culture clas- microbiote et son hôte repose sur la caractérisation du

Bactériologie médicale
© 2016, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 5
6   Partie I. Technologies générales

microbiote normal et de ses variations potentiellement asso- Enfin, pour déterminer le rôle joué par les micro-­
ciées à des pathologies. De vastes projets de métagénomique organismes potentiellement associés à un phénotype, les
ont été lancés afin de décrypter les différents microbiotes chercheurs utilisent comme modèles expérimentaux soit
humains au niveau européen (MetaHIT pour Metagenomics des animaux dont le microbiote est connu (ils sont dits gno-
of the Human Intestinal Tract) et américain (HMP pour tobiotiques), soit d'autres qui en sont totalement dépourvus
Human microbiome project). Grâce à ces travaux, il a été (ils sont dits axéniques).
possible d'apprécier la diversité bactérienne à différents
niveaux : phyla, famille, genre et espèce (Tableau 2.1).

Tableau 2.1 Classification hiérarchique des principales bactéries retrouvées chez l'homme.
Phyla Familles Genres
Actinobacteria
Actinomycetaceae Actinobaculum, Actinomyces, Arcanobacterium, Mobiluncus,
Trueperella
Corynebacteriaceae Corynebacterium, Turicella
Mycobacteriaceae Mycobacterium
Cellulomonadaceae Tropheryma
Micrococcaceae Micrococcus, Rothia, Stomatococcus
Propionibacteriaceae Propionibacterium
Bifidobacteriaceae Bifidobacterium, Gardnerella, Scardovia
Coriobacteriaceae Atopobium, Collinsella, Eggerthella
Bacteroidetes
Bacteroidaceae Bacteroides
Porphyromonadaceae Porphyromonas, Proteiniphilum, Tannerella
Prevotellaceae Prevotella, Xylanibacter
Flavobacteriaceae Capnocytophaga
Firmicutes
Bacillaceae Bacillus
Listeriaceae Listeria
Staphylococcaceae Staphylococcus
Aerococcaceae Abiotrophia, Aerococcus
Carnobacteriaceae Dolosigranulum, Granulicatella
Enterococcaceae Enterococcus
Lactobacillaceae Lactobacillus
Streptococcaceae Lactococcus, Streptococcus
Clostridiaceae Clostridium, Saccharofermentans
Eubacteriaceae Eubacterium
Lachnospiraceae Butyrivibrio, Coprococcus, Roseburia
Peptostreptococcaceae Peptostreptococcus
Ruminococcaceae Anaerotruncus, Faecalibacterium, Ruminococcus
Veillonellaceae Dialister, Megasphaera, Veillonella
Fusobacteria
Fusobacteriaceae Fusobacterium
Leptotrichiaceae Leptotrichia, Sneathia
Proteobacteria
α-Proteobacteria Rhizobiaceae Rhizobium
Rhodospirillaceae Inquilinus
Chapitre 2. Microbiotes humains   7

β-Proteobacteria Alcaligenaceae Achromobacter, Alcaligenes, Bordetella, Oligella


Burkholderiaceae Burkholderia, Pandoraea, Ralstonia
Oxalobacteraceae Oxalobacter
Neisseriaceae Eikenella, Kingella, Neisseria
δ-Proteobacteria Desulfovibrionaceae Bilophila, Desulfovibrio, Lawsonia
ε-Proteobacteria Campylobacteraceae Arcobacter, Campylobacter
Helicobacteraceae Helicobacter, Wollinella
γ-Proteobacteria Aeromonadaceae Aeromonas
Enterobacteriaceae Citrobacter, Enterobacter, Escherichia, Hafnia, Klebsiella, Morganella,
Pantoea, Proteus, Providencia, Raoultella, Salmonella, Serratia, Shigella
Legionellaceae Legionella
Pasteurellaceae Aggregatibacter, Haemophilus
Moraxellaceae Acinetobacter, Moraxella
Pseudomonadaceae Pseudomonas
Vibrionaceae Vibrio
Xanthomonadaceae Lysobacter, Stenotrophomonas
Spirochaetes
Brachyspiraceae Brachyspira
Leptospiraceae Leptospira
Spirochaetaceae Treponema
Synergistetes
Synergistaceae Jonquetella
Tenericutes
Mycoplasmataceae Mycoplasma, Ureaplasma
Verrumicrobia
Akkermansiaceae Akkermansia

Microbiote oral gènes impliqués dans des pathologies locales (par exemple
La cavité orale comprend des niches écologiques très diverses caries dentaires, parodontopathies) et systémiques (par
(salive, gencives, dents, langue, joues, palais, amygdales, exemple endocardites, pneumopathies d'inhalation). Les
etc.), toutes très riches en diversité microbienne, notamment caries dentaires sont classiquement décrites à Streptococcus
la plaque dentaire. L'environnement de la cavité orale serait mutans et Streptococcus sobrinus, mais des nouvelles espèces
aussi hétérogène que celui de l'intestin, avec environ 50 % de ont été récemment identifiées comme les bacilles à Gram
bactéries non cultivables. Entre 500 et 10 000 espèces rési- positif anaérobies Scardovia wiggsiae et Bifidobacterium
deraient dans la cavité orale humaine, appartenant à plus de dentium. La parodontite est associée à un déséquilibre du
200 genres bactériens différents dont (Fig. 2.1) : Actinomyces, microbiote, et un groupe de pathogènes, appelé « complexe
Prevotella, Porphyromonas, Streptococcus, Gemella, rouge » (comprenant Porphyromonas gingivalis, Tannerella
Granulicatella, Abiotrophia, Haemophilus, Fusobacterium, forsythia et Treponema denticola), est fortement associé à
Leptotrichia, Neisseria, Corynebacterium, Veillonella, Rothia, cette pathologie. D'autres espèces ont également été asso-
Capnocytophaga, Selenomonas, Treponema et Derxia. ciées à la parodontite comme Eubacterium saphenum et de
Comme la cavité orale est la porte d'entrée principale de multiples phylotypes de Treponema spp. tandis qu'Aggrega-
l'organisme, il est aussi possible de détecter la présence tibacter actinomycetemcomitans est classiquement associé à
de micro-organismes retrouvés dans les aliments ou dans sa forme agressive. Les endocardites sont majoritairement
l'air (par exemple Rhizobium, Legionella). Les espèces dues aux streptocoques de la cavité orale, dont elles sont les
prédominantes retrouvées dans la majorité des sites sont principaux colonisateurs (> 25 espèces différentes, > 25 %
Streptococcus mitis, Streptococcus oralis, Gemella haemoly- des espèces de la salive) grâce à leurs propriétés adhérentes
sans, Granulicatella adiacens et Veillonella parvula. À noter et métaboliques.
que le microbiote oral n'est pas différent entre l'homme et la
femme mais qu'il varie significativement avec l'âge. Microbiote intestinal
Tandis que les communautés microbiennes ont un rôle L'appareil digestif présente des caractéristiques impres-
protecteur, la cavité orale contient également des patho- sionnantes : c'est le premier organe immunitaire (avec
8   Partie I. Technologies générales

Actinobacteria
Firmicutes
Proteobacteria
Peau Cavité orale
Bacteroidetes
(zones grasses)
Cyanobacteria
Fusobacteria

Cavité Œsophage

Poumons Estomac

H. pylori (–) H. pylori (+)

Peau
(zones sèches) Côlon

Urines
Peau
(zones sèches)

Vagin

Fig. 2.1 Diversité bactérienne du microbiote humain selon le site anatomique. Chaque part de camembert représente l'abondance relative
de chacun des six phyla principaux (données obtenues par métataxonomique).

60 à 70 % des cellules immunitaires du corps), c'est un Alors que la composition du microbiote intestinal est très
deuxième cerveau (avec 100 à 200 millions de neurones) divergente d'un individu à un autre, les profils fonctionnels
et sa surface (estimée à 400 m2) est énorme. Le nombre des gènes sont assez similaires. Il existerait trois groupes
de bactéries au sein du microbiote intestinal est d'envi- d'individus définis selon la composition et la fonction de leur
ron 1014 avec 500 à 1000 espèces bactériennes différentes, microbiote intestinal, appelés « entérotypes ». L'entérotype 1
la plupart étant présentes au niveau du côlon. Une très est dominé par le genre Bacteroides tandis que l'entérotype 2
large majorité d'entre elles ont un métabolisme anaéro- est dominé par le genre Prevotella. Enfin, l'entérotype 3 est
bie (environ 75 %) et 95 % du microbiote est représenté plus complexe et plus diversifié avec une prédominance de
par 5 phyla bactériens : Firmicutes et Bacteroidetes sont Ruminococcus.
dominants tandis que Actinobacteria, Proteobacteria La composition du microbiote chez l'adulte sain reste
et Verrumicrobia sont sous-dominants (Tableau 2.2, relativement stable au cours du temps. En revanche,
Fig. 2.1). le microbiote intestinal des bébés change très rapide-
La structure et la biodiversité du microbiote intestinal ment au cours des trois premières années de vie avant
varient significativement selon l'étage anatomique du tube de devenir mature et fonctionnellement stable. Le
digestif (Fig. 2.2). Il y a notamment une différence marquée fœtus étant normalement stérile, la colonisation ini-
en nombre de bactéries qui va de 101 à 1012 par gramme de tiale a lieu au moment de la naissance et elle dépend
contenu de l'œsophage au côlon (ce dernier contenant envi- du mode d'accouchement. Les bébés nés par voie basse
ron 70 % des micro-organismes du microbiote humain). acquièrent un microbiote proche de celui du vagin de
Ce gradient de densité bactérienne est aussi proportionnel la mère (Lactobacillus et Prevotella), tandis que ceux
à l'augmentation du pH, la baisse de la tension en O2 et la nés par césarienne acquièrent un microbiote dérivé de
diminution de la vitesse du transit. Il y a également une dif- celui de la peau (Staphylococcus, Corynebacterium et
férence axiale entre le microbiote de la lumière intestinale et Propionibacterium). Il y a aussi des différences significa-
celui associé à la muqueuse. tives selon que l'enfant est nourri par allaitement mater-
Chapitre 2. Microbiotes humains   9

nel ou non. Même s'il existe des facteurs génétiques de ■ fonction de protection : les bactéries jouent un rôle de
l'hôte, le régime alimentaire est le déterminant le plus barrière protectrice contre la colonisation et la pullula-
important impliqué dans la composition, la diversité et tion d'espèces pathogènes. Certaines d'entre elles peuvent
la richesse du microbiote intestinal, même au cours de aussi stimuler les défenses innées en induisant la sécré-
l'âge adulte. Les antibiotiques ont évidemment aussi un tion de peptides antimicrobiens (par exemple défensines)
grand rôle dans l'écologie du microbiote intestinal avec et d'immunoglobulines (par exemple IgA) ;
des effets potentiels à court ou à long terme. ■ fonction métabolique : les bactéries exercent de nom-
Le microbiote intestinal constitue un véritable « organe breux rôles essentiels de dégradation, de transformation
métabolique » avec quatre grandes fonctions : et de synthèse, comme la fermentation des polysaccha-
rides complexes (par exemple fibres) avec synthèse des
acides gras à courtes chaînes (par exemple butyrate)
Tableau 2.2 Phyla et genres bactériens qui sont une source d'énergie majeure, le métabolisme
du microbiote intestinal humain.
des protéines, la synthèse des vitamines (par exemple
Phyla Genres (espèces principales) vitamines K et B12, biotine, acide folique, acide panto-
Firmicutes Ruminococcus (R. albus, R. flavefaciens, R.
thénique) et la transformation des acides biliaires et de
gnavus, R. torque) certains xénobiotiques ;
Coprococcus (C. eutactus) ■ fonction de structure et de trophicité : de nombreuses
Anaerotruncus (A. colihominis) fonctions physiologies sont co-régulées par le microbiote
Clostridium (C. coccoides, C. hylemonae, C. intestinal, comme la maturation de l'épithélium intesti-
methylpentosum) nal, la vascularisation des villosités et le renforcement des
Eubacterium (E. rectale)
Lactobacillus
jonctions cellulaires ;
Butyrivibrio (B. crossotus) ■ fonction immunitaire : le microbiote intestinal est indis-
Faecalibacterium (F. prausnitzii) pensable au développement et au bon fonctionnement
Roseburia (R. intestinalis) du système immunitaire, notamment au niveau du tissu
Veillonella lymphoïde associé au tube digestif (gut associated lym-
Streptococcus phoid tissue [GALT]).
Enterococcus
D'autres rôles potentiels ont également été décrits dans
Bacteroidetes Bacteroides (B. uniformis, B. thetaiotaomicron) la neuromodulation (relation microbiote–intestin–cerveau)
Prevotella (P. copri) et dans la régulation du stockage des graisses. En effet, le
Xylanibacter
microbiote intestinal des individus obèses est plus efficace
Actinobacteria Collinsella pour extraire l'énergie à partir d'un régime nutritionnel
Atopobium donné que celui d'individus minces.
Bifidobacterium
Des perturbations de l'équilibre entre microbiote intes-
Proteobacteria Escherichia (E. coli) tinal et hôte (appelées dysbioses) peuvent être associées à
Desulfovibrio différentes pathologies infectieuses ou non. C'est le cas des
Helicobacter (H. pylori)
infections intestinales par ingestion de micro-organismes
Verrumicrobia Akkermansia pathogènes et des diarrhées post-antibiotiques à Clostridium

Œsophage (pH < 4) 101–102 bactéries/g


Streptococcus, Prevotella, Veillonella

Estomac (pH = 2–5) 102–103 bactéries/g


Flore ingérée en transit
Helicobacter pylori +++
Streptococcus, Lactobacillus, Prevotella, Enterococcus
Côlon (pH = 5–7) 108–1012 bactéries/g
Transit très lent, anaérobiose +++ Jéjunum (pH = 7–9) 104–105 bactéries/g
500–1000 espèces différentes Flore ingérée en transit, transit rapide
5 phyla principaux (voir Tableau 2.2) : Streptococcus, Lactobacillus, Prevotella, Enterococcus
– Firmicutes
– Bacteroidetes Iléon (pH = 7–8) 106–108 bactéries/g
– Actinobacteria Flore ingérée en transit, transit plus lent
– Proteobacteria Bacteroides, Clostridium, Streptococcus, Lactobacillus,
– Verrumicrobia Enterococcus, Enterobactericeae

Fig. 2.2 Caractéristiques physiologiques et microbiotes associés des différentes niches écologiques du tube digestif.
10   Partie I. Technologies générales

difficile. Les maladies inflammatoires chroniques de l'intes- comme Streptococcus pneumoniae, S. aureus, Haemophilus
tin (MICI ; par exemple maladie de Crohn et rectocolite influenzae, Moraxella catarrhalis mais aussi Neisseria
hémorragique) semblent dues à une réaction inflammatoire meningitidis. La capacité de colonisation et la densité de
inadaptée vis-à-vis du microbiote intestinal qui montre une pathogènes potentiels peuvent être modulées par les bacté-
réduction significative du nombre et de la biodiversité des ries commensales. Cela a été vérifié dans le cas de la rhino-
Firmicutes (rapport Firmicutes/Bacteroidetes de 1–3/1 au sinusite chronique où il existe des changements significatifs
lieu de 6/1 chez le sujet sain). Il y a notamment une diminu- du microbiote des sinus, notamment avec l'augmentation de
tion de Faecalibacterium prausnitzii qui aurait des proprié- l'abondance de Corynebacterium tuberculostearicum et une
tés anti-inflammatoires. Des associations avec le syndrome diminution des bactéries résidentes.
de l'intestin irritable et certains cancers du tractus digestif Les poumons ont longtemps été considérés comme sté-
(colorectal et gastrique) ont aussi été rapportées. Ces dys- riles et le microbiote pulmonaire n'a donc pas initialement
bioses peuvent aussi être associées à des maladies extradi- été inclus dans le projet HMP (il l'est depuis dans le Lung
gestives, comme l'obésité (rapport Firmicutes/Bacteroidetes HIV Microbiome Project). Cependant, les méthodes molécu-
de l'ordre de 100/1 avec un fort déficit en Bacteroidetes), laires ont récemment montré que les poumons d'individus
les maladies cardiovasculaires, les syndromes métabo- sains non fumeurs étaient peuplés par des communautés
liques (diabète de type 2 notamment), certaines allergies et bactériennes, certes peu nombreuses mais riches en diver-
l'autisme. sité. À noter que l'étude du microbiote pulmonaire présente
Des modulations thérapeutiques peuvent être employées des difficultés au niveau méthodologique du fait du risque
pour rétablir un microbiote intestinal sain (ou l'eubiose), accru de contamination des prélèvements par les bactéries
comme une approche nutritionnelle (modification des du microbiote des voies aériennes supérieures. Ainsi, les
apports en fibres fermentescibles) ou l'utilisation de pro- échantillons ont pour la plupart été obtenus par procédures
biotiques, de prébiotiques, voire d'antibiotiques. Un pro- invasives (lavage bronchoalvéolaire [LBA], prélèvement dis-
biotique est défini par l'Organisation mondiale de la santé tal protégé [PDP]), sauf dans le cas de la mucoviscidose où
(OMS) comme « un micro-organisme vivant qui, ingéré en l'expectoration est souvent étudiée.
quantité suffisante, produit des effets bénéfiques sur la santé Les poumons du fœtus sont stériles et leur colonisa-
de celui qui le consomme ». Les principales espèces utilisées tion débute dès la naissance. Comme au niveau intestinal,
comme probiotiques appartiennent aux genres Lactobacillus le microbiote pulmonaire dépend du mode d'accouche-
(L. casei, L. plantarum, L. bulgaricus, L. acidophilus, L. reu- ment (voir ci-dessus). Les principaux phyla du microbiote
teri), Bifidobacterium (B. longum, B. infantis) et Streptococcus pulmonaire sont similaires à ceux retrouvés au niveau des
(S. thermophilus). Un prébiotique est un ingrédient non voies aériennes supérieures : Bacteroidetes, Firmicutes et
digestible (par exemple fructane, inuline, lactulose) qui a Proteobacteria (Fig. 2.1). Les genres qui prédominent sont
des effets bénéfiques sur la santé en stimulant sélectivement Pseudomonas, Streptococcus, Prevotella et Veillonella. Ces
la croissance et/ou l'activité d'une bactérie ou population micro-organismes proviennent très majoritairement des
bactérienne spécifique. Enfin, le microbiote intestinal d'un voies aériennes supérieures au cours des phénomènes de
individu sain (alors appelé donneur de selles) peut être uti- micro-aspiration. À noter que des facteurs externes peuvent
lisé pour le rétablissement du microbiote d'un patient atteint jouer sur la composition du microbiote pulmonaire comme
de dysbiose. Ce traitement, appelé transplantation ou greffe l'environnement (habitation en campagne, animaux de
de microbiote fécal, est actuellement envisagé pour les infec- compagnie, etc.), le tabagisme, l'utilisation de xénobiotiques
tions récurrentes à C. difficile. (antibiotiques, anti-inflammatoires, bronchodilatateurs) et
le régime alimentaire. Le rôle du microbiote pulmonaire
est principalement lié à la formation et à la maturation du
Microbiote respiratoire système immunitaire au niveau de la muqueuse respiratoire.
La cavité nasale et le nasopharynx contiennent Firmicutes, Au cours de la mucoviscidose, les infections respiratoires
Actinobacteria, Bacteroidetes, Proteobacteria et récurrentes sont traditionnellement dues à Pseudomonas
Fusobacteria (Fig. 2.1). Au niveau des narines, il y a une pré- aeruginosa, S. aureus et H. influenzae, tandis que d'autres
dominance des genres Corynebacterium, Propionibacterium pathogènes sont plus rarement retrouvés comme
et Staphylococcus, ce qui est similaire au microbiote Stenotrophomonas maltophilia et Burkholderia du complexe
cutané (voir ci-dessous). À noter que Streptococcus et cepacia. Cependant, l'écologie microbienne des poumons de
Moraxella sont plus abondants chez l'enfant. Concernant ces patients est beaucoup plus complexe, que ce soit pen-
Staphylococcus aureus, il y a trois modèles de portage dant ou entre les périodes d'exacerbations. Il y a notamment
nasal chez l'adulte sain : les porteurs permanents (envi- un rapport Firmicutes/Bacteroidetes augmenté et une plus
ron 20 %) souvent colonisés par une seule souche sur une faible biodiversité. Ces études ont également mis en évidence
longue période ; les porteurs intermittents (environ 30 %) d'autres bactéries pathogènes, soit sous-diagnostiquées
colonisés par différentes souches au cours du temps ; et comme les anaérobies (dont Prevotella spp.), soit nouvelles
les non-porteurs (environ 50 %). Les espèces du nasopha- comme Lysobacter spp., Inquilinus limosus, Dialister pneu-
rynx sont pour la plupart celles retrouvées au niveau des mosintes, Dolosigranulum pigrum et certaines Rickettsiales.
narines (par exemple Staphylococcus, Corynebacterium, Il a aussi été démontré que la diversité bactérienne dimi-
Propionibacterium, Dolosigranulum) et de l'oropharynx nue avec l'âge, la sévérité de l'obstruction bronchique et
(par exemple Streptococcus). Les pathogènes bien connus un moins bon pronostic. Enfin, les patients homozygotes
peuvent également coloniser les voies aériennes supérieures, ΔF508 présentent une plus faible diversité que les hétéro-
Chapitre 2. Microbiotes humains   11

zygotes ΔF508 et les individus non ΔF508. Une plus faible importante qu'initialement envisagée et quatre princi-
biodiversité microbienne précède aussi un épisode d'exacer- paux phyla, composés de milliers d'espèces différentes,
bation. Les antibiotiques systémiques ou inhalés ont aussi sont retrouvés : Actinobacteria (52 %), Firmicutes (24 %),
une influence négative sur la diversité microbienne. Il existe Proteobacteria (16 %) et Bacteroidetes (6 %). Il existe de
une association entre un nombre d'infections limitées dans grandes variations du microbiote cutané selon la localisa-
l'enfance et un risque plus élevé d'asthme ou d'allergies. Cela tion anatomique (Fig. 2.1). Les sites « gras » avec une forte
correspond à « l'hypothèse de l'hygiène » dans laquelle une densité de glandes sébacées (par exemple visage [front, pli
diminution d'exposition aux agents infectieux tôt dans la vie rétro-auriculaire, aile du nez], poitrine, dos) sont à prédo-
résulte en une modification de l'immunotolérance au niveau minance de micro-organismes lipophiles comme les espèces
des muqueuses. Par exemple, chez l'asthmatique, il y a une du genre Propionibacterium (notamment Propionibacterium
augmentation de fréquence des Proteobacteria (notamment acnes), principaux résidents de l'unité pilosébacée. Les
Haemophilus, Moraxella et Neisseria) et une diminution de sites « humides » (par exemple ombilic, plis inguinaux,
fréquence des Bacteroidetes. Les patients atteints de bron- plis du genou et du coude, aisselles, plantes des pieds)
chopneumopathie chronique obstructive (BPCO), liée dans contiennent principalement Staphylococcus spp. (notam-
80 à 90 % des cas au tabagisme, présentent une modification ment Staphylococcus epidermidis) et Corynebacterium spp.
de leur microbiote pulmonaire. Comme dans l'asthme, il y a (par exemple Corynebacterium jeikeium), tandis que les
une augmentation relative des Proteobacteria (notamment Pseudomonas spp. sont aussi bien représentés. Les sites « secs »
Haemophilus spp.) et une diminution des Bacteroidetes. (par exemple fesses, avant-bras, jambes, mains) montrent
Comme dans la mucoviscidose, il y a une réduction signi- une diversité plus importante avec une abondance (40 %)
ficative de la biodiversité dans les cas sévères de BPCO, de bactéries à Gram négatif (par exemple Acinetobacter
avec une prédominance de Pseudomonas, Streptococcus, spp.) suivies des genres Propionibacterium, Micrococcus,
Prevotella et Haemophilus. Chez les patients transplantés, il Corynebacterium, Streptococcus et Staphylococcus. La diver-
y a une charge bactérienne plus élevée avec un enrichisse- sité bactérienne est généralement moins importante dans
ment en Proteobacteria (notamment B. cepacia complex) et les zones « grasses » tandis qu'elle est la plus élevée dans les
la présence de champignons. Enfin, chez les patients atteints zones sèches exposées. La grande majorité (50 à 80 %) des
du virus de l'immunodéficience humaine (VIH), le micro- champignons sur la peau appartiennent au genre Malassezia
biote pulmonaire est enrichi en Tropheryma whipplei dont (M. globosa, M. restricta, M. sympodialis), tandis que des
l'abondance relative diminue avec le traitement antirétrovi- acariens du genre Demodex (D. folliculorum, D. brevis) sont
ral. Cela suggère que le poumon pourrait constituer la vraie retrouvés au niveau des zones sébacées.
niche écologique de cette espèce. Certaines maladies de la peau sont associées à des modi-
fications du microbiote cutané ; c'est le cas de l'acné vulgaire
(P. acnes), de la dermatite atopique (S. aureus, virus), du pso-
Microbiote cutané riasis (Firmicutes-Actinobacteria), de la rosacée (Demodex)
La peau est un écosystème étendu (d'environ 1,8 m2) typi- et de la dermatite séborrhéique (Malassezia spp.). Enfin, les
quement froid, acide et sec. Elle est constituée d'habitats bactéries commensales de la peau peuvent aussi devenir des
divers selon son épaisseur, la présence ou non de plis et la pathogènes opportunistes, comme S. epidermidis qui peut
densité en structures annexes (c'est-à-dire follicules pileux, être responsable d'infections chez l'immunodéprimé ou sur
glandes sudoripares et glandes sébacées). La partie supé- matériel, notamment grâce à sa capacité de production de
rieure de la peau, c'est-à-dire l'épiderme (notamment le biofilms.
stratum corneum, composé de kératinocytes) est la première
ligne de défense par un effet de barrière physique contre les
organismes extérieurs et les substances toxiques. Par l'inter- Microbiote vaginal
médiaire de son microbiote (environ 106 bactéries/cm2), la Le microbiote vaginal a un rôle important de protection
peau joue également un rôle important dans l'immunomo- contre les infections génito-urinaires. Sa composition
dulation, notamment via la stimulation permanente du sys- varie en fonction de l'âge, du pH, du taux d'imprégna-
tème immunitaire. tion hormonale, de l'activité sexuelle et de l'hygiène cor-
La peau du fœtus est stérile mais la colonisation a lieu porelle. Des changements ont aussi lieu durant le cycle
immédiatement après la naissance. Alors que le microbiote menstruel et la grossesse. Le microbiote vaginal chez la
est très différent d'un individu à l'autre, il est relativement femme préménopausée est généralement limité en termes
stable au cours du temps chez un même individu. Malgré de diversité microbienne, étant essentiellement constitué
tout, il évolue au cours du temps selon l'âge, le sexe et l'eth- de lactobacilles (notamment Lactobacillus crispatus, L. gas-
nie d'appartenance. À noter qu'au moment de la puberté, seri, L. jensenii et L. iners), historiquement désignés sous
il y a des changements significatifs dans la production de le nom de bacilles de Döderlein (Fig. 2.1). Il a récemment
sébum (riche en triglycérides) qui est corrélée à des varia- été démontré que L. iners, très difficile à cultiver, était
tions en quantités de bactéries lipophiles. Les facteurs l'espèce prédominante chez environ 50 % des femmes (et
environnementaux sont aussi importants, comme les condi- non L. crispatus). Ces bactéries lactiques protègent l'hôte
tions extérieures (température, humidité, ensoleillement), de la colonisation par des pathogènes potentiels par dif-
l'hygiène corporelle, la profession, le choix des vêtements férents mécanismes : effet de barrière par forte adhérence
et l'utilisation d'antibiotiques ou de cosmétiques. Comme à la muqueuse, production d'acide lactique et réduction
dans l'intestin, la diversité microbienne est beaucoup plus du pH vaginal (entre 3,5 et 4,5), sécrétion de substances
12   Partie I. Technologies générales

a­ ntimicrobiennes (bactériocines, H2O 2). En dehors des Actinobaculum, Bifidobacterium et Enterococcus. Même s'il
lactobacilles, les autres bactéries isolées par culture sont y a une prédominance de Firmicutes dans les deux sexes,
Mobiluncus spp., Gardnerella vaginalis, Bacteroides spp., il y a une différence significative entre hommes et femmes,
Prevotella spp. et Mycoplasma hominis. Par approche ces dernières présentant une diversité souvent plus impor-
métagénomique, cinq types de microbiotes vaginaux ont tante avec la présence d'Actinobacteria et de Bacteroidetes
pu être distingués (avec des différences selon le groupe (phyla généralement absents chez les hommes) (Fig. 2.1).
ethnique), dont quatre avec une prédominance de lactoba- À noter que certaines bactéries anaérobies strictes ont
cilles (environ 75 %) et un cinquième plus diversifié sans été exclusivement retrouvées chez les individus de plus
prédominance mais contenant des quantités importantes de 70 ans : Jonquetella, Parvimonas, Proteiniphilum et
d'anaérobies et avec un pH plus élevé (environ 25 %). Saccharofermentans. Le rôle du microbiote urinaire pour-
En cas de vaginose bactérienne, il y a une modification rait être multiple : protection contre les pathogènes (effet
du microbiote vaginal avec disparition des lactobacilles (ce de barrière, compétition, production de composés antimi-
qui induit une augmentation du pH > 4,5) et prolifération crobiens), développement du tractus urinaire (par exemple
de bactéries anaérobies de 100 à 1000 fois au-dessus de la jonctions épithéliales) et production de neurotransmet-
normale. Le diagnostic est classiquement fondé sur l'exa- teurs, immunomodulation, dégradation de composés
men direct du frottis vaginal et le score de Nugent, pre- toxiques, etc.
nant en compte de façon semi-quantitative les différents Différents facteurs peuvent influencer le microbiote uri-
morphotypes bactériens (Lactobacillus spp., G. vaginalis naire, comme le régime alimentaire (par exemple apports
et Mobiluncus spp.). Les scores de 0 à 3 correspondent à hydriques importants, consommation de jus de canne-
une flore normale (prédominance de lactobacilles), ceux berge), la prise d'antibiotiques, le statut hormonal et l'activité
de 4 à 6 sont étiquetés intermédiaires (mélange de mor- sexuelle. Des altérations du microbiote urinaire ont aussi été
photypes) et les scores de 7 à 10 indiquent une vaginose associées à différentes pathologies urinaires comme la vessie
bactérienne (absence de lactobacilles et prédominance de neurogène, la cystite interstitielle et l'incontinence urinaire
G. vaginalis et Mobiluncus spp.). Cependant, au moins la impérieuse. Des interactions entre le microbiote intestinal et
moitié des cas intermédiaires correspondraient à des réelles la formation de lithiases rénales ont été mises en évidence.
vaginoses bactériennes. Traditionnellement, la culture a En effet, il existe une corrélation inverse entre la présence
mis en évidence plusieurs bactéries associées à la vaginose de l'espèce Oxalobacter formigenes et le développement de
bactérienne : G. vaginalis, Bacteroides spp., Prevotella spp., calculs rénaux d'oxalate de calcium, cette bactérie paraissant
Porphyromonas spp., Bacteroides spp., Peptostreptococcus essentielle à la dégradation de l'oxalate au niveau du tube
spp., Mobiluncus spp. et M. hominis. Les approches digestif en diminuant son absorption. Enfin, le microbiote
récentes de biologie moléculaire ont montré l'implication urinaire pourrait être impliqué dans la réponse à l'immuno-
d'autres bactéries anaérobies, comme Atopobium vaginae, thérapie par BCG dans le traitement préventif des rechutes
Prevotella bivia, Sneathia sanguinegens, Leptotrichia amnio- du cancer de la vessie.
nii, Peptostreptococcus anaerobius, Megasphaera type 1
et BVAB-2 (bacterial vaginosis-associated bacteria 2). À
noter que l'altération du microbiote vaginal au cours de Conclusion
la vaginose bactérienne est associée à un risque plus élevé
de co-infection virale. Enfin, il a été montré que le micro- La détermination de la composition des différents
biote vaginal est très stable au cours de la grossesse et que microbiotes humains et surtout l'élucidation de leurs
son altération (faible abondance de Lactobacillus et prédo- dynamiques sont capitales dans la compréhension de nom-
minance de Gardnerella et Ureaplasma) est associée à un breuses pathologies, qu'elles soient d'origine infectieuse
accouchement prématuré. L'issue de la grossesse pourrait ou non. Cela va notamment à l'encontre des postulats de
ainsi être prédite par les caractéristiques du microbiote Koch dont les quatre principes doivent permettre d'établir
vaginal en début de gestation. un lien de causalité entre un agent pathogène et la mala-
die qu'il provoque. En effet, les microbiotes ont un rôle
majeur dans le maintien de la santé (homéostasie) et/ou
Microbiote urinaire le développement des maladies. Ces dernières sont liées
Comme les poumons, l'urine (et donc la vessie) a long- à des modifications qualitatives et/ou quantitatives des
temps été considérée comme stérile du fait des techniques microbiotes (c'est-à-dire dysbioses), restant à déterminer
d'approche uniquement fondées sur la culture standard. maintenant si elles en sont la cause ou la conséquence.
Cependant, les outils moléculaires ont prouvé que l'urine De nombreux facteurs peuvent induire des variations au
des individus sains contenait un microbiote unique, com- sein des microbiotes (par exemple âge, sexe, style de vie,
posé d'environ 102 à 104 bactéries par millilitre. En utili- régime alimentaire, comorbidités, médications, etc.) et
sant des méthodes de culture sophistiquées, jusqu'à 80 % sont à prendre en compte, de même que les interactions
des échantillons urinaires (obtenus par cathétérisme tran- des différents micro-organismes (par exemple bactéries et
surétral) ont une culture bactérienne positive. Les prin- bactériophages) au sein d'une niche écologique donnée.
cipales espèces appartiennent aux genres Lactobacillus Afin de prévenir certaines pathologies, l'utilisation de thé-
(15 %), Corynebacterium (14 %), Streptococcus (12 %), rapeutiques pourra être instaurée, comme la substitution
Actinomyces (7 %) et Staphylococcus (7 %), tandis que de microbiote, l'utilisation de probiotiques ou prébiotiques
sont aussi retrouvés Aerococcus, Gardnerella, Micrococcus, ou la phagothérapie.
Chapitre 2. Microbiotes humains   13

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