Espaces Euclidiens
Espaces Euclidiens
Espaces Euclidiens
Dans tout ce chapitre, n désigne un entier naturel non nul. Tous les espaces vectoriels considérés sont des
R-espaces vectoriels.
I. PRODUIT SCALAIRE
1. Définition
Un R-espace vectoriel muni d’un produit scalaire est appelé un espace préhilbertien réel.
Un espace préhilbertien réel de dimension finie est appelé un espace euclidien.
Remarques :
• Pour démontrer la bilinéarité d’un produit scalaire potentiel, la linéarité par rapport à une variable
seulement est suffisante si on a pris la peine de démontrer la symétrie avant.
• Si h·, ·i est un produit scalaire, alors par bilinéarité, pour tout x ∈ E, hx, 0E i = h0E , xi = 0.
2. Posons E = Mn (R). L’application h·, ·i définie par : ∀(A, B) ∈ E 2 , hA, Bi = Tr(t AB)
est un produit scalaire sur E. Muni de ce produit scalaire, Mn (R) est donc un espace euclidien.
n P
P n
Remarque : si A = ((ai,j ))1≤i,j≤n et B = ((bi,j ))1≤i,j≤n , alors hA, Bi = aik bik : il s’agit du
i=1 k=1
2
même produit scalaire que pour Rn .
Remarque : Il peut exister plusieurs produits scalaires sur un même espace vectoriel.
Par exemple sur C 0 ([a, b], R), en fonction
du choix
de la fonction θ > 0 ci-dessus.
2 t 2 1
Ou sur R , l’application (X, Y ) 7→ X Y est un produit scalaire distinct du produit scalaire
1 2
canonique.
2. Norme euclidienne
est appelée la norme euclidienne sur E, associée au produit scalaire h·, ·i.
Remarque :
Il peut exister plusieurs produits scalaires, donc plusieursnormes.
2 1 √
Par exemple, avec le produit scalaire de R2 hX, Y i = t X Y , on aura k(1, 0)k = 2.
1 2
Proposition : Propriétés de la norme euclidienne
Soit (E, h·, ·i) un espace préhilbertien réel. Soit k · k la norme euclidienne associée. Soit (x, y) ∈ E 2 .
Alors :
• kx + yk2 = kxk2 + kyk2 + 2 hx, yi.
• hx − y, x + yi = kxk2 − kyk2 .
1 1
kx + yk2 − kxk2 − kyk2 = kx + yk2 − kx − yk2 .
• Identité de polarisation : hx, yi =
2 4
Remarque :
La notion de norme est plus générale que la notion de norme euclidienne. La définition d’une norme
correspond exactement aux propriétés de la dernière proposition (avec juste l’inégalité principale de
l’inégalité triangulaire).
Il existe des normes qui ne sont pas attachées à des produits scalaires. Par exemple :
Posons E = C([a, b], R). On définit, pour tout f ∈ E, kf k∞ = sup |f (x)|.
x∈[a,b]
k · k∞ est une norme sur E.
n
! n
!
X X 1
Exemple : Soit (a1 , . . . , an ) ∈ (R∗+ )n . Montrer que ak ≥ n2 .
ak
k=1 k=1
Exemple :
n
!2 n
X X
Montrer que ∀(x1 , . . . , xn ) ∈ Rn , xk ≤n x2k , et étudier le cas d’égalité.
k=1 k=1
Exemple :
Soit (a, b) ∈ R2 tel que a < b. s s
Z b Z b
1 2 2
Montrer que pour tout f ∈ C ([a, b], R), f (b) − f (a) ≤ 2 f (t)2 dt f 0 (t)2 dt.
a a
Exemple :
Soit (Ω, P(Ω), P ) un espace probabilisé fini.
1. Montrer que l’application (X, Y ) 7→ E(XY ) est une forme bilinéaire symétrique positive sur le R-
espace vectoriel RΩ des variables aléatoires réelles sur Ω.
Mais ce n’est pas forcément un produit scalaire !
C’en est un si et seulement si : ∀ω ∈ Ω, P ({ω}) > 0.
2. Montrer l’inégalité de Cauchy-Schwarz pour les variables aléatoires : soient X et Y deux variables
aléatoires sur Ω. Alors :
p
E(XY ) ≤ E(X 2 )E(Y 2 ) En particulier : Cov(X, Y ) ≤ σ(X)σ(Y )
p
3. En déduire que pour toute variable aléatoire centrée X : E(|X|) ≤ V (X).
II. ORTHOGONALITÉ
Remarque :
La base canonique de Rn est orthonormale pour le produit scalaire canonique.
Exemple :
Dans R3 muni du produit scalaire usuel, posons :
F = Vect((1, 1, 1)) ; G = Vect((1, −1, 0)) ; H = Vect((1, −1, 0); (1, 0, −1)) ; J = {(−1, 2, −1)}
Théorème :
Dans un espace préhilbertien réel E, le seul vecteur orthogonal à tout vecteur est 0E .
Exemple :
Montrer que la famille (t 7→ sin(nt))n∈N∗ est orthonormale dans C([0, 2π], R) pour le produit scalaire
1 2π
Z
(f, g) 7→ f (t)g(t) dt.
π 0
Exemple :
Montrer que dans E = C([−1; 1], R), l’ensemble des fonctions paires de E et l’ensemble des fonctions
impaires Zde E sont deux sous-espaces vectoriels orthogonaux pour le produit scalaire :
1
(f, g) 7→ f (t)g(t) dt.
−1
Théorème de Pythagore :
• Soit (x, y) ∈ E 2 . Alors :
n 2 n
X X
• Soit (x1 , . . . , xn ) une famille orthogonale de E. Alors xi = kxi k2 .
i=1 i=1
Remarque : Attention, c’est faux en général dans une base non orthonormale...
Remarques :
⊥
• Comme X ⊥ = (Vect(X)) , dans la pratique, pour connaı̂tre l’orthogonal d’un sous-espace vectoriel
engendré par une partie / une famille, il suffit d’exiger l’orthogonalité à ces vecteurs.
• Attention ! Si F est un sous-espace vectoriel de E, F et F ⊥ sont en somme directe, mais pas
nécessairement supplémentaires dans E !
⊥
De même, F ⊂ F ⊥ , mais l’inclusion réciproque n’est pas nécessairement vérifiée.
Nous verrons ensuite que si F est de dimension finie, c’est le cas (donc en particulier si E est euclidien).
Exemple :
On se place dans E = R4 . Posons F = Vect((1, 1, 1, 1), (1, 2, 3, 4)). Déterminer F ⊥ .
Exemple :
Pour tout espace préhilbertien réel E : {0E }⊥ = E et E ⊥ = {0E }.
Exemple :
On se place dans E = R2 [X] et on pose, pour tout (P, Q) ∈ E 2 :
hP, Qi = P (−1)Q(−1) + P (0)Q(0) + P (1)Q(1)
a. Vérifier que h·, ·i est un produit scalaire sur E.
b. Déterminer (R1 [X])⊥ .
Remarques :
• Attention, il est essentiel que F soit de dimension finie !
• Il existe un unique supplémentaire orthogonal, mais il existe plusieurs supplémentaires...
Exemple :
+∞
X +∞
X +∞
X
Dans E = R[X], on pose pour tous P = ak X k ∈ E, Q = bk X k ∈ E, hP, Qi = ak bk
k=0 k=0 k=0
(toutes ces sommes sont en réalité finies).
a. Vérifier que h·, ·i est un produit scalaire sur E.
b. On considère le sous-espace vectoriel F = {P ∈ R[X] / P (1) = 0} de E. Montrer que F ⊥ = {0E }.
⊥
En déduire que F 6= F ⊥ et que F et F ⊥ ne sont pas supplémentaires dans E.
Remarque :
Dans le plan, l’orthogonal d’une droite est une droite.
Dans l’espace, l’orthogonal d’une droite est un plan, et l’orthogonal d’un plan est une droite.
1. Projection orthogonale
Théorème :
Soient E un espace préhilbertien réel et p un endomorphisme de E. Alors on a l’équivalence :
Remarque : De même :
• On appelle symétrie orthogonale par rapport à F , la symétrie par rapport à F parallèlement à F ⊥ .
• Soit s ∈ L(E) : (s est une symétrie orthogonale) ⇐⇒ (s◦s = idE et ∀(x, y) ∈ E 2 , hs(x), yi = hx, s(y)i).
• Si E est euclidien, de dimension n : soit s ∈ L(E) : posons M sa matrice dans une b.o.n. :
(s est une symétrie orthogonale) ⇐⇒ (M est symétrique et M 2 = In ).
n
X hx, fk i
Remarque : Si (f1 , . . . , fn ) est une base orthogonale de F , alors pour tout x ∈ E, pF (x) = fk .
kfk k2
k=1
Remarque : Connaissant une base (pas forcément orthonormée) (f1 , . . . , fn ) de F , deux stratégies sont
possibles pour calculer pF (x) :
• Orthonormaliser cette base en une base (g1 , . . . , gn ), puis utiliser la formule ci-dessus :
Xn
pF (x) = hx, gk i gk .
k=1
n
X
• Ou alors : pF (x) ∈ F donc il existe (λ1 , . . . , λn ) ∈ Rn tel que pF (x) = λk fk .
k=1
Or x − pF (x) ∈ F ⊥ , donc ∀j ∈ [[1, n]], hx − pF (x), fj i = 0.
On obtient un système de n équations à n inconnues qu’il suffit de résoudre.
Z 2π
Exemple : On considère l’espace vectoriel C([0; 2π], R) muni du produit scalaire (f, g) 7→ f (t)g(t) dt,
0
et F = Vect(sin, cos).
Déterminer le projeté orthogonal de id[0,2π] sur F .
Proposition :
Soient E un espace euclidien et F un sous-espace vectoriel de E.
Soit pF la projection orthogonale sur F et pF ⊥ la projection orthogonale sur F ⊥ .
Alors pF + pF ⊥ = idE , donc pour tout x ∈ E, x = pF (x) + pF ⊥ (x).
Remarque : Il est parfois plus simple de calculer pF ⊥ (x) pour en déduire pF (x) = x − pF ⊥ (x).
Exemple :
Soient E un espace euclidien tel que E 6= {0E }, et H un hyperplan de E. Alors H ⊥ est de dimension 1.
Soit a un vecteur non nul de H ⊥ . On dit que a est un vecteur normal à H, et on a alors H ⊥ = Vect(a).
hx, ai hx, ai
Pour tout x ∈ E, on aura pH ⊥ (x) = a, donc pH (x) = x − a.
kak2 kak2
• On appelle distance de x à A, et l’on note d(x, A), le réel : d(x, A) = inf kx − ak = inf d(x, a).
a∈A a∈A