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Module 2 Droit Commercial Resumé

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Module 2 : Le Domaine du droit commercial

Le droit commercial en France est caractérisé par sa nature mixte, définie à la fois par la
notion de commerçant et celle d'acte de commerce. Selon l'article L. 121-1 du code de
commerce, sont considérés comme commerçants ceux qui exercent des actes de
commerce de manière habituelle.

Cette particularité distingue le droit commercial français d'autres législations où le droit


commercial est défini uniquement par la notion de commerçant, comme en Allemagne,
ou comme le droit des actes de commerce, comme en Espagne.

En France, le droit commercial englobe à la fois le droit des commerçants de celui des
actes de commerce.

MODULE 2-1.1 LA TYPOLOGIE DES ACTES DE COMMERCE

Cette typologie, élaborée par la doctrine à partir des articles L. 110-1 et L. 110-2 du
Code de commerce ainsi que de la jurisprudence, distingue les actes de commerce par
nature, par la forme et par accessoire.

Section 1 : Les actes de commerce par nature


Les actes de commerce par nature sont des opérations habituellement exercées par les
commerçants, subdivisées en actes isolés et actes accomplis dans le cadre d'une
entreprise.

Paragraphe 1 : Les actes de commerce isolés


L’achat pour revendre :

Tout achat de biens meubles pour les revendre, en nature ou après les avoir travaillés et
mis en œuvre, est considéré comme un acte de commerce. Les activités de production
et d’extraction sont exclues de la commercialité.

• L'intention d'achat en vue de la revente est primordiale pour qualifier


l'acte comme commercial, indépendamment de la réussite de la
revente elle-même. La marchandise peut être un meuble ou un
immeuble.
• Le terme "meuble" inclut les biens corporels et incorporels tels que les
brevets d'invention, les licences d'exploitation ou le fonds de
commerce.

• Pour les biens immeubles, l'achat en vue de la revente est considéré


comme commercial sauf s'il est destiné à édifier des constructions en
bloc ou par locaux, ce qui le rend civil.

Autres actes isolés :

Les opérations de change, les opérations bancaires, définies par l'article L. 311-1 du
Code monétaire et financier. Les opérations de courtage, incluant toutes les opérations
d’intermédiaire pour l’achat, la souscription ou la vente d’immeubles, de fonds de
commerce, d’actions ou de parts de sociétés immobilières, les opérations d'assurance
en matière maritime, étendues par la jurisprudence aux assurances terrestres, sauf les
assurances mutuelles à but non lucratif.

Dans tous ces cas, c’est la cause commerciale de l’acte qui explique ces solutions
jurisprudentielles.

Paragraphe 2 : Les actes accomplis dans le cadre d’une entreprise

Dans cette situation, l'acte de commerce doit être accompli dans le cadre d'une
entreprise, ce qui implique la réunion de moyens humains et matériels et une répétition
d'actes réalisés à titre professionnel. Cette répétition des opérations au sein de
l'entreprise leur confère un caractère commercial.

• Entreprises de location de meubles (article L. 110-1 4°) : Les locations de biens


de consommation courante comme les voitures ou les téléviseurs sont
considérés comme commerciales. En revanche, la location d'immeubles reste
de nature civile, même si l'immeuble est utilisé à des fins commerciales.

• Entreprises de manufactures (article L. 110-1 5°) : Il s'agit des industries de


transformation telles que la métallurgie, la chimie et le textile. Cependant, les
entreprises de taille modeste sont exclues de la commercialité et sont
considérées comme artisanales.

• Entreprises de commission (article L. 110-1 5°) : Les commissionnaires, qui


concluent des opérations pour le compte d'autrui en leur nom propre, sont
considérés comme des entreprises commerciales.
• Entreprises de transport (article L. 110-1 5° et L. 110-2 2°) : Les entreprises de
transport par mer, voies fluviales, air, terre (y compris les entreprises de
déménagement) sont commerciales

• Entreprises de fournitures (article L. 110-1 6°) : Cela inclut les entreprises


fournissant des biens ou des services pour une certaine période selon un tarif
préétabli, comme les services d'eau, de gaz, de chauffage, de journaux, ainsi que
l'hôtellerie.

• Entreprises de vente aux enchères publiques (article L. 110-1 6°) : Les ventes
qui ont lieu dans les magasins généraux sont considérées comme
commerciales.

• Entreprises de spectacles publics (article L. 110-1 6°) : Cela concerne les


activités de loisirs telles que le théâtre, le cinéma, les jeux forains et les
spectacles sportifs. Les clubs sportifs avec des recettes importantes doivent
adopter la forme de sociétés commerciales.

• Agences et bureaux d’affaires (article L. 110-1 6°) : Les agents d’affaires qui
gèrent les affaires d'autrui, comme les agents immobiliers, les agences de
voyages ou les cabinets de recouvrement de créances.

• Entreprises d’exploitation des œuvres de l’esprit d’autrui : L'édition, la presse


font partie du secteur commercial, mais si l'auteur lui-même publie son œuvre,
l'activité est civile.

Section 2 - Les actes de commerce par la forme


Certains actes sont considérés comme commerciaux en raison de leur forme même.
Contrairement aux actes de commerce par nature où la présomption peut être réfutée,
ici, la présomption est irréfragable, c'est-à-dire qu'on ne peut apporter de preuve
contraire. Deux principaux actes entrent dans cette catégorie : la lettre de change et les
sociétés commerciales par la forme.

Paragraphe 1 : La lettre de change

La lettre de change : également appelée traite, est un titre représentant une créance
pouvant être facilement cédée. Il s'agit d'un titre négociable par lequel le tireur donne
l'ordre à l'un de ses débiteurs, le tiré, de payer à une date déterminée une somme
d'argent à une troisième personne, le bénéficiaire ou porteur.
La commercialité par la forme de la lettre de change : Conformément à l'article 110-1
10° du Code de commerce, les lettres de change sont réputées actes de commerce
"entre toutes personnes". Ainsi, tous les engagements découlant de la lettre de change
(émission, acceptation, etc.) sont régis ²par le droit commercial, quel que soit le statut
du signataire (commerçant ou civil)

Paragraphe 2 : Les sociétés commerciales par la forme


En principe, une société a ou n'a pas la qualité de commerçant en fonction de la nature
de son activité. Cependant, il existe une exception pour des sociétés qui sont
considérées comme commerciales par leur forme, indépendamment de leur objet. Il
s'agit des sociétés en nom collectif, en commandite simple, à responsabilité limitée et
des sociétés par actions.

Section 3 - Les actes de commerce par accessoire


La règle selon laquelle "l'accessoire suit le principal" s'applique également en matière
d'actes de commerce. Cette règle permet de regrouper les différents actes et faits
juridiques autour de l'activité principale d'une entreprise, ce qui permet d'appliquer à
l'ensemble un régime juridique identique. Cette section examine la portée de cette règle
ainsi que son domaine d'application .

Paragraphe 1 : La portée de la règle


La règle de l'accessoire comporte deux aspects : elle est une règle de fond et une règle
de preuve.

Règle de fond : Le législateur considère comme des actes de commerce tous les actes
accomplis par un commerçant pour les besoins de son commerce.

1. L'acte doit avoir été accompli par une personne physique ou morale ayant la
qualité de commerçant. Cette qualité est généralement conférée par l'inscription
au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS)

2. L'acte doit être lié à l'activité du commerçant. Les actes passés pour des besoins
personnels ou domestiques restent civils, seuls ceux servant l'activité
professionnelle sont considérés comme des actes de commerce.

Règle de preuve : La présomption de commercialité par accessoire est simple, ce qui


signifie que le commerçant ou les tiers peuvent démontrer que l'acte en question n'est
pas commercial.
Par exemple, la destination des fonds empruntés peut être utilisée pour des besoins
personnels du commerçant, et non pour son activité professionnelle.

Paragraphe 2 : Le domaine de la règle


La règle de l'accessoire s'applique tant en matière contractuelle qu'en matière
extracontractuelle.

En matière contractuelle : Tous les contrats conclus par un commerçant sont réputés
commerciaux, mais cette présomption peut être réfutée.

Par exemple, les contrats gratuits ne peuvent pas être considérés comme commerciaux,
car la gratuité est incompatible avec le commerce.

En matière extracontractuelle : La règle de l'accessoire s'applique également aux


quasi-contrats, aux délits et aux quasi-délits. Cependant, il existe des limites à la
commercialité :

• Certains types de dommages causés par des véhicules relèvent de la


compétence du tribunal civil.

• Les accidents du travail et les actions en contrefaçon sont de la compétence des


juridictions civiles et pénales respectivement.

• Les dettes fiscales relèvent de la compétence du tribunal judiciaire ou du


tribunal administratif, selon les matières.

2.1.1 – Les Actes de commerce

Dans le droit commercial français, les actes de commerce ne sont pas définis
clairement dans le Code de commerce. Une liste partielle est fournie, mais elle est
souvent insuffisante pour couvrir toutes les situations commerciales. La jurisprudence
et la doctrine ont donc dû préciser ces actes et établir des critères pour les identifier.

2.1.2- Les critères de l’acte de commerce


La détermination de la commercialité d'un acte est complexe car le Code de commerce
français ne définit pas la notion d'acte de commerce.
• Critère de l'entremise : (critère de la circulation des richesses), stipule que tout
acte qui s'intercale entre le producteur et le consommateur est un acte de
commerce. Il exclut ainsi les opérations de production (telles que les activités
agricoles et industrielles extractives) ainsi que l'acte final de consommation.
Cependant, ce critère présente des limites, car certains intermédiaires ne sont
pas considérés comme des commerçants, et certains producteurs sont
juridiquement des commerçants.

• Critère de la spéculation : Ce critère repose sur l'idée de recherche de profit,


notamment à travers l'achat en vue de la revente. Les actes qui n'ont pas cette
finalité, tels que les activités gratuites, culturelles ou bénévoles, sont exclus du
domaine commercial. Il existe aussi de nombreuses professions non
commerciales qui poursuivent également un but lucratif, rendant ce critère
insuffisant pour déterminer la commercialité.

• Critère de l'entreprise : Ce critère se fonde sur le fait que la plupart des actes de
commerce sont réalisés dans le cadre d'une entreprise. Il trouve appui dans les
termes du Code de commerce qui énumère une liste d'actes de commerce par
l'entreprise. Néanmoins, la notion d'entreprise n'est pas clairement définie sur le
plan juridique, et certaines entreprises, notamment celles relevant des secteurs
artisanal, agricole et libéral, relèvent du domaine civil plutôt que commercial.

En conclusion, aucun de ces critères n'est suffisant en lui-même pour déterminer la


commercialité d'un acte. Il est nécessaire de combiner plusieurs critères pour
appréhender la nature commerciale d'un acte, et la jurisprudence a souvent recours à
cette approche plurielle pour trancher les litiges relatifs à la qualification d'un acte.

MODULE 2-1.3 LE REGIME JURIDIQUE DES ACTES DE COMMERCE

Section 1 - La preuve des actes de commerce

L’exigence de rapidité dans la conclusion des actes de commerce l’emporte sur


l’exigence de sécurité juridique et conduit à un régime spécial différent du droit civil.
Paragraphe 1 - Le principe de la liberté de la preuve

En droit civil, la preuve d’un acte portant sur une somme d’un montant supérieur à
1500 euros se fait, en principe, par écrit (article 1341 Code civil) : c’est le système dit de
la preuve préconstituée.

En droit commercial, c’est le principe de la liberté de la preuve qui prédomine.


L’article L. 110-3 du Code de commerce dispose en effet qu’« à l’égard des
commerçants, les actes de commerce peuvent se prouver par tous moyens à moins
qu’il n’en soit autrement disposé par la loi ». Les actes de commerce échappent, par
conséquent, aux formalités des articles 1325 (double original), 1326 (mention
manuscrite de la somme) et 1328 (relatif à la date certaine) du Code civil.

Paragraphe 2 - Les exceptions à la liberté de la preuve

Le principe de la liberté de la preuve peut se révéler dangereux. C’est pourquoi, dans


certains cas, se manifeste une certaine renaissance du formalisme. L’accent est alors
placé sur l’idée de sécurité plutôt que sur celle de rapidité. On distingue deux types
d’exceptions :

- les exceptions portant sur certains actes : certains actes commerciaux doivent
nécessairement être écrits : contrats de vente du fonds de commerce, de location-
gérance du fonds de commerce et de nantissement du fonds de commerce (renvoi
ultérieur au cours) ; le contrat de société (article 1835 CC) ; les effets de commerce.

- les exceptions concernant certaines personnes : c’est l’article L. 110-3 qui contient
une telle exception : la liberté de la preuve ne s’applique qu’à l’égard des
commerçants. Par conséquent, si l’acte est mixte, le non-commerçant peut faire la
preuve par tous moyens contre le commerçant puisque l’acte est commercial pour
celui-ci.

Section 2 - L’exécution des actes de commerce


Au stade de l’exécution, plusieurs mécanismes demeurent spécifiques au droit
commercial et notamment :

La solidarité : elle ne se présume pas en droit civil. Il faut, qu’elle soit « expressément
stipulée ». Cela signifie qu’à défaut d’accord exprimé dans l’acte, les codébiteurs ne
peuvent pas être tenus solidairement de la dette. C’est précisément la règle inverse que
l’on retient en droit commercial. Le créancier commerçant peut donc exiger de l’un
quelconque de ses codébiteurs commerçants (tenus d’une même dette) le paiement de
la totalité de la créance. Celui qui a payé bénéficie alors d’un recours contre les autres
codébiteurs pour leur part et portion.

Ce principe va à l’encontre du droit civil : il s’agit donc d’une coutume contra legem. La
Cour de cassation en a reconnu la validité et affirme depuis son arrêt de principe du 20
octobre 1920 que « selon un usage antérieur à la rédaction du Code de commerce et
maintenu depuis, les tribunaux de commerce sont conduits à considérer que la
solidarité entre débiteurs se justifie par l’intérêt commun du créancier, qu’il incite à
contracter et des débiteurs, dont il augmente le crédit ». Il ne s’agit que d’une
présomption simple de solidarité, qui peut être écartée dans l’acte par la volonté des
parties.

La réfaction du contrat : alors que la réfaction du contrat (diminution du prix en


fonction de l’étendue de l’inexécution) n’est pas, en principe, admise en droit civil, le
juge dispose en droit commercial du pouvoir de refaire le contrat en cas d’inexécution
partielle ou de mauvaise exécution (Cass. com., 23 mars 1971). Le juge peut ainsi
diminuer le prix en fonction de l’étendue de l’inexécution. Ce mécanisme est
traditionnel dans la vente commerciale et concerne aujourd’hui les contrats de
prestation de service.

La faculté de remplacement : le droit autorise l’acheteur à se fournir auprès d’un autre


vendeur, et aux frais du vendeur initial, lorsque ce dernier n’a pas respecté les délais de
livraison convenus (Cass. com., 1er juin 1959). Et contrairement à ce qu’exige l’article
1144 du Code civil, l’intervention du juge n’est pas nécessaire en matière commerciale.

L’ouverture d’une procédure collective : la cessation des paiements par le


commerçant entraîne l’ouverture d’une procédure spéciale : le redressement ou la
liquidation judiciaires. Mais des réformes successives ont étendu, aux autres
professionnels de la vie des affaires, l’application de cette procédure.
Section 3 - L’extinction des actes de commerce

Le juge ne dispose pas du pouvoir d’octroyer des délais de paiement au débiteur lorsque
celui-ci a souscrit un engagement cambiaire

La prescription extinctive des obligations (contractuelles, quasi-contractuelles,


délictuelles, quasi-délictuelles) nées à l’occasion de leur commerce entre
commerçants est de 5 ans (article L. 110-4 I).

Il existe parfois des délais de prescription plus courts : 3 ans, un an ou 6 mois en matière
d’effets de commerce (article L. 511-78).

MODULE 2-1.4 LES ACTES MIXTES

Section 1 - L’application distributive des règles

Dans les actes mixtes, où un commerçant et un non-commerçant sont impliqués, le


principe de distributivité s'applique. Cela signifie que les règles du droit civil sont suivies
à l'égard du non-commerçant, tandis que les règles du droit commercial s'appliquent au
commerçant.

Paragraphe 1 : La preuve
En droit commercial, la preuve est libre, tandis qu'en droit civil, elle doit généralement
être apportée par écrit pour les sommes dépassant 1500 euros. Dans les actes mixtes,
le commerçant doit respecter les règles de preuve du droit civil, tandis que le non-
commerçant bénéficie des règles plus souples du droit commercial pour prouver
l'existence et le contenu de leur accord.

Paragraphe 2 - La compétence judiciaire


Concernant la compétence judiciaire, si le défendeur est le non-commerçant, le
demandeur (le commerçant) doit le poursuivre devant une juridiction civile. Si le
défendeur est le commerçant, le demandeur (le non-commerçant) a le choix entre la
juridiction civile ou commerciale. Cette option vise à protéger le non-commerçant en lui
offrant une marge de manœuvre plus large.
Cette clause est valide lorsque le demandeur est non-commerçant, mais elle n'est pas
opposable au défendeur non-commerçant. Les clauses attributives de compétence
territoriale sont également nulles dans les actes mixtes, sauf entre parties ayant toutes
contracté en qualité de commerçant.

Section 2 - L’application d’un régime unique


Parfois, dans certains cas exceptionnels, un seul régime juridique s'applique à la fois au
commerçant et au non-commerçant dans les actes mixtes, que ce soit le droit
commercial ou le droit de la consommation.

Paragraphe 1 - L’application exclusive du droit commercial


Dans certaines situations, l'application exclusive du droit commercial reste pertinente,
bien que moins fréquente de nos jours. Par exemple :

• Avant la loi du 17/06/2008, le délai de prescription de 10 ans du droit commercial


s'appliquait aux actes mixtes pour les deux parties. Depuis cette loi, le délai de
prescription est uniformisé à 5 ans dans le droit civil et le droit commercial.

• Dans le domaine du droit bancaire, le silence du client sur ses relevés de compte
est présumé être une acceptation, ce qui est une règle exclusive du droit
commercial.

Paragraphe 2 - L’application exclusive du droit de la consommation


Le droit de la consommation, plus récent, vise à protéger les consommateurs en
écartant les règles du droit civil et du droit commercial. Dans un acte mixte où le non-
commerçant est un consommateur, défini comme toute personne physique n'agissant
pas dans le cadre de son activité professionnelle, les règles du droit de la
consommation prévalent sur celles du droit civil ou commercial.

MODULE 2-2. LE COMMERCANT


Identifier un commerçant implique d'abord de définir les conditions nécessaires pour
qu'une personne puisse être qualifiée de commerçant (Section 1). Ensuite, il est
essentiel de le distinguer des autres professionnels de la vie des affaires (Section 2).

Section 1 : La qualification de commerçant


Selon l'article L. 121-1 du Code de commerce, un commerçant est défini comme une
personne qui exerce des actes de commerce et en fait sa profession habituelle. Deux
conditions doivent être remplies pour qualifier une personne de commerçant :
1. L'accomplissement d'actes de commerce pour son propre compte : Les
actes doivent être des actes de commerce par nature. Ne sont pas pris en
compte :

• Les actes de commerce par accessoire, car ils supposent déjà la qualité
de commerçant.

• Les actes de commerce par la forme, car leur répétition ne constitue pas
une profession.

Par exemple, signer plusieurs lettres de change habituellement ne constitue pas une
activité professionnelle. Seuls les actes de commerce par nature, réalisés
personnellement par le commerçant pour son propre compte, sont considérés. Les
mandataires agissant pour le compte d'autrui ou les VRP ne sont pas des commerçants.

2. L'exercice habituel d'actes de commerce par nature : Il faut que l'exercice des
actes de commerce soit habituel et professionnel. Cela implique :

• La répétition des actes : Au moins deux actes de commerce doivent être


réalisés pour établir une habitude.

• L'exercice professionnel : Le commerçant doit tirer principalement ses


ressources de cette activité. Il peut cumuler une activité commerciale
avec d'autres professions comme une profession libérale ou artisanale.

Section 2 : La distinction des autres professionnels


Il est essentiel de distinguer le commerçant d'autres professionnels de la vie des
affaires :

• Certaines sociétés commerciales sont identifiées comme telles par leur forme
juridique, et leur objet peut être civil sans remettre en question leur caractère
commercial.

• D'autres formes de sociétés sont qualifiées en fonction de leur objet.

• Un commerçant peut exercer d'autres activités en parallèle sans perdre sa


qualité de commerçant, tant que ces activités ont une certaine importance.

• Même si une activité commerciale est illicite, la personne qui l'exerce peut être
qualifiée de commerçante, mais elle ne peut pas revendiquer certains droits.
Section 2 : Les autres professionnels de la vie des affaires
Dans cette section, nous abordons les artisans, les agriculteurs et les professionnels
libéraux.

Paragraphe 1 : L’artisan

Les artisans exercent un métier manuel et bénéficient de certains droits réservés aux
commerçants tout en ayant des privilèges fiscaux.

A : Les définitions de l’artisan

Définition professionnelle : Selon la loi du 5 juillet 1996, un artisan doit être


immatriculé au répertoire des métiers tenu par les chambres de métiers et de
l’artisanat. Deux critères cumulatifs doivent être remplis : l'activité doit être pratiquée de
manière indépendante et à titre professionnel, et l'entrepreneur ne doit pas employer
plus de dix salariés.

Définition fiscale : Plusieurs critères sont pris en compte, tels que l'exercice d'une
profession manuelle, le travail personnel de l'artisan, et la vente principale des produits
du travail.

Définition de droit privé : La jurisprudence retient deux critères : l'exercice d'un travail
manuel et personnel, ainsi que l'absence de spéculation. Les artisans doivent tirer la
majeure partie de leurs revenus de leur propre travail.

B : Les statuts de l’artisan

Statut professionnel : L’artisan doit s'inscrire au répertoire des métiers, mais cette
inscription n'est que d'ordre administratif.

Statut fiscal : Les artisans sont soumis à la contribution économique territoriale et


bénéficient de certains régimes fiscaux et avantages, notamment en matière de TVA et
de taxe d'apprentissage.

Relations juridiques de droit privé : Les artisans relèvent principalement du droit civil,
mais certaines règles du droit commercial peuvent s'appliquer, comme celles
concernant les baux commerciaux ou les procédures collectives en cas de difficultés
financières.

Paragraphe 2 : L’agriculteur
L’agriculture est traditionnellement considérée comme une activité civile.
Aujourd'hui, de nombreux agriculteurs ne se contentent pas de produire à partir de zéro,
mais achètent des intrants tels que des semences, des plants ou des animaux, souvent
produits par d'autres acteurs de l'industrie agroalimentaire. Face à cette complexité, il
est important de comprendre les conditions de qualification d'un agriculteur.

A : Définition

La jurisprudence a longtemps défini l'activité agricole comme reposant sur une


production endogène, c'est-à-dire produite à l'intérieur du système agricole.

Selon l'article L. 311-1 du Code rural, sont considérées comme agricoles toutes les
activités correspondant à la maîtrise et à l’exploitation d’un cycle biologique de
caractère végétal ou animal, ainsi que les activités exercées par un exploitant agricole
dans le prolongement de l’acte de production.

B : Statut

Les agriculteurs ont des obligations spécifiques et certains aspects de leur activité
relèvent du droit commercial. Par exemple :

• Ils doivent s'inscrire aux chambres d'agriculture, tout comme les commerçants
s'inscrivent aux Chambres de Commerce et d'Industrie

• Les agriculteurs peuvent désormais être soumis aux procédures collectives en


cas de difficultés financières, avec compétence de la juridiction civile.

• La loi reconnaît l'existence d'un fonds agricole, similaire au fonds de commerce


des commerçants, qui peut être l'objet d'un nantissement.

En conclusion, la qualification d'agriculteur et les règles qui s'y appliquent prennent en


compte la diversité des pratiques agricoles contemporaines, de l'agriculture
traditionnelle à l'agriculture industrielle.

MODULE 2-2.2 L’ACCES A LA PROFESSION DE COMMERCANT

Toute personne est libre d’exercer la profession de commerçant, comme le proclame le


principe de la liberté d’entreprendre établi par le décret d’Allarde des 2 et 17 mars 1791.
Cependant, il existe des exceptions légales à ce principe.

Section 1 : La liberté d’entreprendre


La liberté d’entreprendre, également appelée liberté du commerce et de l’industrie, est
un principe fondamental ayant une valeur constitutionnelle. Elle comporte un contenu
et une portée.
Paragraphe 1 : Le contenu du principe
La liberté d’entreprendre implique le droit de choisir d’exercer ou non le commerce. Elle
a été proclamée par le décret d’Allarde, qui stipule que toute personne est libre de faire
le commerce ou d’exercer un métier de son choix, sous réserve de se munir d’une
patente et de respecter les règlements en vigueur.

Ce principe a été reconnu par le Conseil constitutionnel comme une liberté


fondamentale depuis une décision de janvier 1982. Il découle de la Déclaration des
droits de l’homme et du citoyen de 1789.

La liberté d’entreprendre inclut également le droit de ne pas commercer, c’est-à-dire de


choisir de limiter volontairement son activité commerciale.

Par exemple, une clause d’exclusivité dans un contrat commercial limite la liberté du
commerçant en l'obligeant à s’approvisionner exclusivement chez un fournisseur
pendant une durée limitée (maximum 10 ans selon l’article L. 330-1 du Code de
commerce).

De même, une clause de non-concurrence, souvent incluse dans la cession d’un fonds
de commerce, doit respecter certaines conditions pour être valide, notamment être
limitée dans le temps et dans l’espace, être spécifique et légitime.

Paragraphe 2 : La portée du principe


Le principe de la liberté d’entreprendre, en raison de sa valeur constitutionnelle, doit
être respecté par le législateur, qui ne peut y porter atteinte. Ce principe oriente
également la politique juridique du commerce.

Le respect du principe par le législateur : Le Conseil constitutionnel a élevé la liberté


du commerce et de l’industrie au rang de principe constitutionnel. Par conséquent, ni le
législateur ni le pouvoir règlementaire ne peuvent le violer. Cependant, des restrictions
peuvent être justifiées pour des motifs d'ordre public ou d'intérêt général, tels que la
sécurité ou l’hygiène.

L’orientation de la politique juridique du commerce : La liberté d’entreprendre


implique normalement qu'aucun diplôme ne soit requis pour devenir commerçant et
que le commerçant puisse librement s’établir et exploiter son activité. Cependant, il
existe de nombreuses exceptions à ce principe. Par exemple, certaines activités exigent
un diplôme spécifique (comme la pharmacie), tandis que d'autres nécessitent des
licences ou des agréments (comme les débits de boissons ou les grandes surfaces).

Ce principe soutient la politique juridique du commerce en exprimant un attachement


au libéralisme économique. Il se manifeste par des incitations financières ou
administratives, telles que des aides à la création d'entreprise et des structures
spécialisées comme l’Agence nationale pour la création et le développement de
nouvelles entreprises.

Paragraphe 1 : Les restrictions liées à la personne


Les restrictions à la liberté d’entreprendre concernant la personne peuvent être
classées en quatre catégories : la nationalité, les incapacités, les incompatibilités avec
certaines professions et les interdictions pour les délinquants et criminels d’exercer la
profession.

A : La nationalité

L’exercice de l'activité commerciale n’est pas exclusivement réservé aux Français, mais
il est strictement encadré pour les étrangers, qui ne bénéficient pas des mêmes droits
que les commerçants français.

1. Les citoyens européens et ceux de l'EEE : Ils ont le droit de s’établir dans
n’importe quel pays de l’Union européenne. Cette liberté d’établissement est
garantie par le Traité de Rome et étendue aux ressortissants de l'EEE par l'article
L. 122-3 du Code de commerce.

2. Les ressortissants hors de l'Union européenne : Pour eux, l'exercice du


commerce en France est soumis à des conditions strictes, notamment :

• La réciprocité : Les étrangers peuvent devenir commerçants si leur pays


d'origine accorde aux Français les mêmes droits.

• Activités autorisées : Certains métiers sont réservés aux nationaux et ne


peuvent être exercés par des étrangers.

• Autorisation préfectorale : Un étranger désirant exercer le commerce doit


obtenir une autorisation préfectorale et une carte de séjour temporaire.

B : Les incapacités

La capacité commerciale est essentielle pour exercer la profession de commerçant. Il


est donc important de savoir si un mineur ou un majeur incapable peut être reconnu
comme ayant cette capacité et exercer le commerce.

Le mineur :

Selon l'article L. 121-2 du Code de commerce, un mineur, même émancipé, était


auparavant interdit de devenir commerçant. Cependant, la loi du 15 juin 2010 a assoupli
cette règle en autorisant les mineurs émancipés âgés de plus de 16 ans à devenir
commerçants, à condition d'être autorisés soit par le juge des tutelles lors de
l'émancipation, soit par le Président du Tribunal judiciaire après l'émancipation.

L'interdiction pour les mineurs non émancipés ou les mineurs émancipés de moins de
16 ans de devenir commerçants est justifiée par les risques liés à l'activité
commerciale, qui nécessite une certaine maturité et une connaissance du monde des
affaires.

Les incapables majeurs :

Le Code de commerce ne traite pas spécifiquement des incapables majeurs. Les


majeurs en tutelle sont soumis aux mêmes règles que les mineurs non émancipés, et
donc ne peuvent pas exercer le commerce.

Les majeurs sous curatelle ne peuvent généralement pas devenir commerçants car il
n'est pas réaliste qu'un curateur soit présent pour chaque acte commercial effectué par
l'incapable.

En revanche, un majeur sous sauvegarde de justice, conservant l'exercice de ses droits,


peut exercer une profession commerciale. Cependant, les actes qu'il passe et les
engagements qu'il prend peuvent être annulés pour lésion ou réduits en cas d'excès.

C : Les incompatibilités

Normalement, une personne peut exercer plusieurs professions. Cependant, il existe


des interdictions de cumul, appelées incompatibilités.

L'incompatibilité consiste en l'interdiction pour une personne d'exercer simultanément


une autre activité (en l'occurrence, le commerce) qui nuirait au bon exercice de sa
profession. Ces incompatibilités sont mises en place pour protéger certaines
professions de l'esprit de profit caractéristique du commerce.

Les cas d'incompatibilité : Ne peuvent être commerçants :

• Les fonctionnaires de l'État et des collectivités territoriales.

• Les officiers publics ou ministériels, comme les notaires et les huissiers.

• Les membres de certaines autres professions libérales telles que les avocats, les
experts-comptables, les commissaires aux comptes, les architectes, les
médecins, etc.

La sanction du cumul : Le cumul interdit des professions peut entraîner des sanctions
disciplinaires, telles que l'interdiction d'exercer la profession libérale ou la radiation,
voire des sanctions pénales en cas de prise illégale d'intérêts.
Cependant, du point de vue du droit commercial, les actes de commerce accomplis en
violation de l'incompatibilité restent valables. En effet, contrairement à l'incapacité,
l'incompatibilité n'est pas une mesure de protection pour la personne concernée. Ainsi,
malgré l'incompatibilité, celui qui exerce des actes de commerce peut être qualifié de
"commerçant de fait" et sera donc soumis aux règles du droit commercial. Cependant, il
ne pourra pas se prévaloir de la qualité de commerçant pour bénéficier des droits
attachés à cette qualité.

D : Les interdictions

Contrairement aux incompatibilités qui visent à protéger certaines professions


indépendantes contre la concurrence du commerce, les interdictions et déchéances
ont pour objectif de protéger le commerce en général et les consommateurs contre les
personnes ne présentant pas les garanties de moralité requises.

Les interdictions découlant d'une condamnation pénale : Avant la loi LME de 2008, la
loi régissait les incapacités générales d'exercer le commerce pour les personnes
condamnées pour certains délits ou crimes. Ces incapacités étaient automatiques,
sans décision expresse du juge. L'interdiction nouvellement instaurée par la loi LME est
large et empêche le condamné d'exercer toute profession commerciale ou industrielle,
de diriger une entreprise, ou d'administrer une société, pour une durée pouvant aller
jusqu'à 10 ans.

Les interdictions liées à la faillite personnelle : Les commerçants déclarés en faillite


personnelle, suite à des fautes graves de gestion comme la poursuite abusive d'une
activité déficitaire, peuvent se voir interdire d'exercer toute entreprise commerciale ou
artisanale, pour une durée maximale de 15 ans.

Les interdictions liées à une condamnation fiscale : Auparavant, l'administration


pouvait temporairement interdire aux contribuables poursuivis pour certains délits
fiscaux d'exercer toute profession commerciale, artisanale ou industrielle. Désormais,
cette interdiction ne peut être prononcée que par le tribunal, pour une durée maximale
de 3 ans, pouvant être doublée en cas de récidive.

Paragraphe 2 : Les restrictions liées à l’activité


Les restrictions liées à l'activité commerciale peuvent se diviser en deux catégories :

• Certaines activités commerciales sont réservées à l'État ou aux collectivités


territoriales. Malgré le principe de liberté du commerce et de l'industrie, il existe
des monopoles d'État pour diverses raisons : certaines activités sont
considérées comme des services publics nationaux (comme la Banque de
France, la Poste, EDF, GDF), d'autres sont liées à des impératifs de sécurité
(matériels de guerre), de moralité publique (jeux de hasard comme le PMU) ou de
fiscalité (vente du tabac).

• D'autres restrictions sont liées au fait que certaines activités commerciales


nécessitent une autorisation administrative pour être exercées. C'est le cas des
salles de spectacle, des agences de voyage, des transports routiers, des
pharmacies, des débits de boissons, etc. Ces autorisations peuvent
normalement être cédées en même temps que le fonds de commerce, comme
les licences pour les débits de boissons.

MODULE 2-2.3 L’EXERCICE DE LA PROFESION COMMERCIALE

Section 1 : Les structures d'exercice de la profession commerciale


Le commerce peut être exercé de manière individuelle ou sous forme sociétaire.

Paragraphe 1 : L'exercice du commerce à titre individuel


L'exercice individuel reste la forme d'exploitation la plus courante. On peut définir
l'entreprise individuelle et observer la responsabilité de l'entrepreneur.

A : Définition de l'entreprise individuelle

L'entreprise est une unité économique rassemblant les facteurs humains et matériels
de l'activité économique. Cependant, pour les juristes, l'entreprise est envisagée à
travers le sujet de droit, personne physique ou morale, c'est-à-dire l'entrepreneur
individuel. L'entrepreneur individuel est à la fois financier, propriétaire des moyens
d'exploitation et employeur. Dans ce type d'entreprise, le commerçant a un contrôle
absolu sur l'organisation et la gestion et peut décider de mettre fin à son activité à tout
moment.

B : La responsabilité de l'entrepreneur individuel

Le commerçant, en exerçant en son nom propre.Il est donc personnellement


responsable de toutes les dettes professionnelles et personnelles. (entreprise
unipersonnelle à responsabilité limitée) en 1985. Plus récemment, la loi de 2003 permet
à une personne physique exerçant une activité professionnelle de déclarer
insaisissables certains biens immobiliers, et la loi de 2010 a introduit le concept
d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL). Ce régime permet à
l'entrepreneur d'affecter un patrimoine séparé pour son activité professionnelle sans
créer de personne morale distincte. Ce patrimoine peut être composé de biens, droits et
obligations nécessaires à l'exercice de l'activité professionnelle.
Paragraphe 2 : L’exercice du commerce sous forme sociétaire
Lorsque l'entrepreneur est une personne morale, il y a dissociation entre l'entreprise, la
société et la personne du dirigeant. Le dirigeant agit au nom et pour le compte de la
personne morale, dont il est le mandataire.

A: Les sociétés à risque limité et illimité

Dans les sociétés à risque limité (SARL, SA, par exemple), les associés ne sont pas
considérés comme des commerçants et ne sont responsables des dettes sociales .Ils
ne peuvent donc pas perdre plus que ce qu'ils ont investi si la société fait faillite.

Pour ces sociétés, un capital minimum est exigé pour garantir les créanciers (37 000
euros pour la SA).

En revanche, dans les sociétés à risque illimité (Société en Nom Collectif, par exemple),
les associés sont considérés comme des commerçants et sont responsables
indéfiniment et solidairement des dettes sociales sur leur patrimoine personnel. Aucun
capital minimum n'est exigé dans ces sociétés.

B: Les sociétés de personnes et les sociétés de capitaux

Dans les sociétés de personnes (SNC, société en commandite simple), la personne des
associés prime sur les capitaux investis.Les associés ont la qualité de commerçant.

Dans les sociétés de capitaux (SA, SAS, société en commandite par actions), c'est
l'inverse : les parts sociales sont librement cessibles et les décisions importantes
n'exigent pas l'unanimité. Les associés n'ont pas la qualité de commerçant, sauf dans la
société en commandite par actions.

La SARL est une forme hybride. Les parts sociales ne sont pas facilement
transmissibles, mais les décisions importantes ne nécessitent pas l'unanimité et les
associés ne sont pas considérés comme des commerçants.

Section 2: Les incidences de la situation matrimoniale sur l’exercice de la


profession commerciale

Paragraphe 1 : L’époux commerçant


La loi du 13 juillet 1965, qui permet à la femme mariée d'exercer librement le
commerce. Désormais, la situation matrimoniale produit des effets sur les droits et
pouvoirs patrimoniaux des époux, notamment sur l'exercice du commerce.

A: L’obligation de publier le régime matrimonial


Le commerçant marié doit publier au registre du commerce et des sociétés la date et le
lieu de son mariage, ainsi que le régime matrimonial adopté. Les modifications
ultérieures de la situation matrimoniale, telles que le divorce ou les modifications du
régime matrimonial, doivent également être publiées.

B: Les pouvoirs de gestion de l’époux commerçant

Les pouvoirs de gestion de l'époux commerçant dépendent du régime matrimonial:

• Sous le régime de la communauté légale : L'époux commerçant dispose de


pouvoirs étendus sur le fonds de commerce s'il est un bien commun. S'il est un
bien propre à l'un des époux, l'époux propriétaire a tous les pouvoirs
d'administration et de disposition sans restriction.

• Sous le régime de la séparation de biens : L'époux commerçant propriétaire du


fonds a tous les pouvoirs d'administration et de disposition sans limitation.

C : Le sort des dettes contractées par l’époux commerçant

Le sort des dettes dépend également du régime matrimonial :

• Sous le régime de la communauté légale : Les dettes contractées par l'époux


commerçant peuvent être recouvrées sur ses biens propres et sur les biens
communs, sauf en cas de fraude ou de mauvaise foi du tiers. Pour les
cautionnements et emprunts, les biens communs ne sont engagés que s'il y a eu
accord exprès du conjoint.

• Sous le régime de la séparation de biens : L'époux commerçant est tenu des


dettes sur ses biens propres et n'engage pas les biens propres de son conjoint.

Paragraphe 2: Le statut du conjoint de l’époux commerçant


Le conjoint de l'époux commerçant peut avoir le statut de commerçant (A) s'il exerce
une activité commerciale distincte de celle de son époux. Dans le cas contraire, il peut
bénéficier d'autres statuts (B).

A : La qualité de commerçant du conjoint

Selon l'article L. 121-3 du Code de commerce, le conjoint du commerçant est réputé


commerçant s'il exerce une activité commerciale distincte de celle de son époux. Pour
prouver qu'ils ne sont pas tous deux commerçants, les époux peuvent démontrer que le
conjoint ne participe pas à des actes de commerce habituels

B : Les statuts autres que celui de commerçant


Avant la loi du 10 juillet 1982, le conjoint du commerçant n'ayant pas le statut de
commerçant ne bénéficiait d'aucun autre statut. Depuis cette loi, trois possibilités
s'offrent au conjoint ou partenaire pacsé:

1. Le conjoint ou partenaire pacsé salarié: Le conjoint doit participer


effectivement à l'entreprise et percevoir une rémunération équivalente au SMIC
pour bénéficier des droits sociaux du salarié.

2. Le conjoint ou partenaire pacsé associé: Les époux ou partenaires pacsés


peuvent s'associer quelle que soit la forme de la société.

3. Le conjoint ou partenaire pacsé collaborateur: Ce statut permet au conjoint de


participer régulièrement à l'entreprise sans être associé ni recevoir de
rémunération. Ce collaborateur bénéficie de certains droits sociaux

En l'absence de choix de l'un de ces statuts, le conjoint est sans statut.

Section 3 : Les obligations du commerçant

Paragraphe 1: L’immatriculation au RCS

L'immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS) est une obligation


pour tout commerçant et certaines autres entités.

Le registre local : Tenu par chaque tribunal de commerce ou Tribunal judiciaire, il


comprend un fichier alphabétique des personnes immatriculées, les dossiers
individuels et les dossiers annexes pour les personnes morales. Le greffier a un pouvoir
de contrôle formel et peut refuser l'immatriculation si la demande n'est pas conforme.

Le registre national : Depuis 2023, le RNE, également tenu par l'INPI, qui centralise les
informations des entreprises, remplaçant le RNCS, le répertoire des métiers (RM), et le
registre des actifs agricoles (RAA).

A : Les personnes soumises à immatriculation

Sont concernés les commerçants personnes physiques (sauf ceux ayant le statut
d'auto-entrepreneur), les artisans exerçant une activité commerciale, les sociétés
commerciales ou civiles, les GIE, et les établissements publics à caractère industriel et
commercial.

B : La procédure d’immatriculation

1. Avant le 1er janvier 2023 : Les déclarations étaient effectuées auprès des Centres
de Formalité des Entreprises (CFE) qui centralisaient les démarches
administratives. Chaque CFE transmettait ensuite la demande au greffe.
2. Depuis le 1er janvier 2023 : Les CFE ont été supprimés. Les formalités doivent
être réalisées en ligne sur le guichet des formalités des entreprises. Ce guichet
unique dématérialisé transmet la déclaration aux organismes compétents, tels
que les organismes sociaux et le greffe du tribunal de commerce.

C : Les modifications du RCS

L'obligation de communiquer les changements qui affectent son statut ou son activité
incombe d'abord au commerçant lui-même.

La cessation de l'activité du commerçant doit être formalisée par une radiation du RCS.
Les personnes physiques disposent d'un délai d'un mois avant et après la cessation
pour effectuer la radiation. Pour les personnes morales, la radiation intervient après la
clôture de la liquidation.

D : La sanction du défaut d’immatriculation

Les sanctions du défaut d'immatriculation sont à la fois pénales et civiles. Civilement, le


commerçant non immatriculé ne peut opposer sa qualité aux administrations et aux
tiers. Le juge peut également enjoindre, sous astreinte, à toute personne immatriculée
de faire des mentions complémentaires ou rectificatives, ou même ordonner la
radiation du RCS.

E : Les effets de l’immatriculation

Pour les personnes physiques, l'immatriculation emporte présomption de la qualité de


commerçant, mais cette présomption n'est pas opposable aux tiers qui peuvent
apporter la preuve contraire. De même, la personne non immatriculée ne peut se
prévaloir de la qualité de commerçant.

Pour les personnes morales, l'immatriculation est une condition essentielle pour
acquérir la personnalité juridique. Elle conditionne l'existence même de la personne
morale en droit.

Paragraphe 2: Les obligations comptables


L'article L. 123-12 du Code de commerce impose à tout commerçant la tenue d'une
comptabilité. Avant d'explorer cette obligation, il est nécessaire de présenter les
documents comptables.

A : Les documents comptables

Les documents comptables obligatoires sont au nombre de trois :


• Le livre-journal : il enregistre quotidiennement les mouvements du patrimoine de
l'entreprise, c'est-à-dire toutes les opérations réalisées.

• Le grand livre : il regroupe les opérations du livre-journal ventilées entre différents


comptes (stocks, capitaux propres, immobilisations...).

• Le livre d'inventaire : il regroupe les données de l'inventaire annuel ainsi qu'un


descriptif de l'état du passif et de l'actif de l'entreprise.

Les documents comptables doivent être conservés pendant 10 ans.

B : La comptabilité

Le droit comptable est autonome par rapport au droit commercial et considère


l'entreprise comme une entité. Les principes fondamentaux de la comptabilité exigent
que les comptes annuels soient réguliers, sincères et donnent une image fidèle du
patrimoine, de la situation financière et du résultat de l'entreprise.

• Le principe de régularité : les comptes doivent être établis en conformité avec les
règles et procédures en vigueur.

• Le principe de sincérité : les règles comptables doivent être appliquées de bonne


foi, sans dissimulation.

• Le principe de fidélité : les comptes doivent donner une image conforme à la


réalité objective de l'entreprise.

Les comptes annuels comprennent le bilan, le compte de résultat et une annexe. Le


bilan décrit séparément les éléments d'actif et de passif de l'entreprise, tandis que le
compte de résultat récapitule les produits et les charges de l'exercice.

Paragraphe 3: Les obligations fiscales


A : L’impôt sur le bénéfice commercial

Les commerçants et les artisans sont soumis à l'impôt sur le revenu au titre des
bénéfices industriels et commerciaux (BIC). Ce sont les revenus provenant de l'exercice
d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale. Il existe des aménagements
pour exonérer ou réduire l'impôt pour les petits entrepreneurs.

B : La contribution économique territoriale

La contribution économique territoriale, qui a remplacé la taxe professionnelle en 2010,


est due par les commerçants, artisans et professionnels libéraux, qu'ils soient
propriétaires ou locataires. Elle est composée d'une cotisation foncière des entreprises
et d'une cotisation sur la valeur ajoutée, et bénéficie aux collectivités territoriales.
C : La TVA

La TVA est un impôt indirect sur la consommation. Elle concerne les livraisons de biens
meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti.

Paragraphe 4 : Les obligations bancaires


Selon l'article L. 123-24 du Code de commerce, tout commerçant doit avoir un compte
dans un établissement de crédit ou dans un bureau de chèques postaux. Les opérations
importantes doivent être effectuées via ce compte, notamment les paiements d'un
montant supérieur à 750 euros entre commerçants et ceux d'un montant supérieur à
1000 euros pour les paiements de non-commerçants.

Section 4: Les partenaires professionnels du commerçant

Paragraphe 1 : Les partenaires non-commerçants


A : Le personnel de l’entreprise

Les salariés sont définis par leur contrat de travail, qui les engage à mettre leur force de
travail à la disposition de l'employeur sous sa subordination juridique et moyennant une
rémunération. Leur statut relève du droit du travail, avec des obligations telles que le
respect du salaire minimum et la représentation du personnel

B : Les gérants succursalistes

Dans les entreprises de commerce de détail organisées en maison mère et succursales,


chaque succursale est dirigée par un gérant succursaliste. Ce gérant peut être salarié ou
mandataire du commerçant, selon son degré d'autonomie et de subordination juridique.

C : L’agent commercial

L'agent commercial, défini par le Code de commerce, exerce à titre indépendant et agit
au nom et pour le compte du mandant. Il n'est pas commerçant, sauf s'il exerce sous
forme de société. Son activité est considérée comme civile, bien qu'il doive être
immatriculé sur un registre spécial

Paragraphe 2: Les partenaires commerçants


A : Les concessionnaires

Un concessionnaire est un commerçant indépendant lié à un fournisseur (le concédant)


par un contrat de concession. Ce contrat accorde au concessionnaire une exclusivité de
fourniture des produits dans une zone définie. Les obligations du concessionnaire
incluent souvent des critères de formation, de service après-vente, de paiement des
marchandises, et parfois des quotas d'achat ou des objectifs de chiffre d'affaires. En
cas de rupture du contrat, le concessionnaire n'a généralement pas droit à une
indemnité de fin de contrat, mais le concédant ne peut pas rompre le contrat de
manière brutale ou abusive.

B : Les franchisés

La franchise implique la transmission d'un savoir-faire par le franchiseur. Les franchisés


sont des commerçants indépendants qui ont le droit d'utiliser la marque, l'enseigne ou
le nom commercial du franchiseur. Ils disposent d'une clientèle propre, peuvent
posséder leur propre fonds de commerce et bail commercial, mais ne bénéficient pas
toujours d'une exclusivité territoriale ou d'approvisionnement. Ils doivent également
payer des droits d'entrée et des redevances au franchiseur.

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