Doctoat Bentellis
Doctoat Bentellis
Doctoat Bentellis
N° d’ordre :…………………
Série :……………………….
THESE
Présentée pour l’obtention du diplôme de Doctorat en Science
Le thème de ce travail nous a été proposé par Madame O. Rached, alors Professeur à
l’Université de Constantine 1 et Directrice du Laboratoire de Biologie et Environnement,
avant de rejoindre l’école nationale supérieure de Biotechnologie. Ses judicieux conseils et
encouragement nous ont particulièrement aidées tout au long de nos recherches. Grâce à elle
la phytoécologie est devenue moins obscure et les déterminations des plantes beaucoup plus
aisées. Ses compétences en Pédologie, Ecologie Végétale et méthodes d’échantillonnage nous
ont été d’une grande assistance. Nous ne saurons la remercier assez pour toute l’aide qu’elle
nous a apportée, la confiance qu’elle nous a accordée et surtout pour la liberté de choix et
d’opinions qu’elle nous a permis. Qu’elle trouve ici l’expression de notre plus profonde
gratitude.
Nous remercions très sincèrement notre amie et condisciple Mademoiselle Lilia Nouri,
Maitre de conférences à l’Université El Hadj Lakhdar de Batna, dont les conseils judicieux et
les suggestions en matière de culture des plantes nous ont été très précieuses.
A toutes les personnes qui ont participé de près ou de loin à l’élaboration de cette
thèse, nous exprimons ici notre reconnaissance, plus particulièrement : le Professeur F.
Mesbah, S. Ghanem, M. Bentellis, H. Bentellis, Madame M. Nouri, H. Khomri et M. EL-
Hadef El-Okki.
LISTE DES ABREVIATIONS
A : Argile
ACP : Analyse en composantes principales
Al : Aluminium
Ag : Argent
As : Arsenic
β : Coefficient ou paramètre de régression
Ca : Calcium
Cd: Cadmium
CE: Conductivité électrique
CEC: Capacité d’échange cationique
Co: Cobalt
Cr: Chrome
Cu: Cuivre
E: Echangeable
ETM: Eléments traces métalliques
K: Potassium
Mg: Magnésium
Mn: Manganèse
MO: Matière organique
MS: Matière sèche
N: Azote
Na: Sodium
P: Phosphore
p: probabilité
Pa: Partie aérienne
Pb: Plomb
Pe: Plante entière
Ps: Partie souterraine.
PS: Poids sec
r: corrélation entre de variables
R: coefficient de corrélation du modèle
R2: coefficient de détermination
RA: Rapport d’accumulation
RT: Rapport de translocation
Sb: Antimoine
T: Total
Ti: Indice de tolérance
Zn: Zinc
SOMMAIRE
Avant propos
Liste des abréviations
Sommaire
Liste des tableaux
Liste des figures
Liste des photos
Introduction générale……..………………………………………………………………….1
1.1. Introduction…………………………………………………………………………… 4
1.2. Historique……………………………………………………………………………... 4
1.3. Sources et usages ……………………………………………………………………… 5
1.3.1. Sources naturelles…………………………………………………………………. 5
1.3.2. Sources anthropiques…………………………………………………………….... 6
1.3.3. Usages…………………………………………………………………………….. 8
1.4. Toxicité de l’antimoine……………………………………………………………….. 8
1.4.1. Effets sur la santé humaine……………………………………………………….. 8
1.4.1.1. Toxicité aiguë……………………………………………………………….... 8
1.4.1.2. Toxicité chronique……………………………………………………………. 9
1.4.2. Effets sur l’animal………………………………………………........................... 10
1.4.2.1. Toxicité aiguë………………………………………………………………... 10
1.4.2.2. Toxicité chronique…………………………………………………………… 10
1.4.3. Effets sur les plantes et les organismes du sol……………………………………. 11
1.5. Occurrence lithogène et géochimie………………………………………………….. 12
1.6. Spéciation dans les systèmes naturels………………………………………………… 12
1.6.1. Spéciation inorganique en fonction du pH et du potentiel redox…………… 12
1.6.2. Espèces organiques…………………………………………………………. 14
1.7. Mécanismes de rétention de l'antimoine dans les sols……………………………. 15
1.7.1. Adsorption…………………………………………………………………… 16
1.7.1.1. Adsorption sur les phases minérales pures………………………….. …... 16
1. Minéraux argileux…….…………………………………………………….. 16
2. Les oxydes et les hydroxydes……………………………..………………… 17
3. La sorption de la matière organique du sol……………………..…………… 19
1.7.1.2. Adsorption sur les sols entiers………………………………………... 20
1.7.2. Effets de co-oxidants/co-réducteurs……………………………………...….. 20
1.7.3. Effets de la force ionique et de la concurrence………………………………. 21
1.7.4. Précipitation, co-précipitation et dissolution………………………………… 22
1.8. Absorption par les plantes………………………………………………………… 24
1.8.1. Concentration dans les plantes………………………………………………. 24
1.8.2. Relation entre les concentrations de Sb dans les plantes et celles
dans les sols……………………………………………………………………….. 26
1.8.3. Mécanismes d'absorption et de translocation de Sb dans la plante………… 27
1.8.4. Influence de facteurs autres que la concentration du Sb du sol sur
l'assimilation des plantes……………………………………………...………… 29
1.9. Risques de toxicité posés par la consommation de plantes cultivées sur un sol
contaminé par le Sb…………………………………………….…………….... 31
1.10. Le traitement des sols contaminés par du Sb………………………………..…… 33
Chapitre 3 Etude de la pollution des sols des bordures de l’oued Dahimine par
les éléments traces métalliques
3.1. Introduction…………………………………………………………………..…… 45
3.2. Matériel et méthodes……………………………………………………………… 45
3.2.1. L'échantillonnage……………………...……………………………………… 45
3.2.2. Méthodes d’analyses physico-chimiques des sols…………………………… 45
3.2.2.1. Analyse granulométrique…………………………………………………. 46
3.2.2.2. pH du sol………………………………………………...………………. 46
3.2.2.3. Conductivité électrique (CE)……………………………………………… 46
3.2.2.4. Dosage de la matière organique…………………………………………... 46
3.2.2.5. Dosage du calcaire total…………………………………………………… 47
3.2.2.6. Détermination du phosphore Total……………………………………...… 47
3.2.2.7. Dosage de l’azote total…………………………………...………………. 47
3.2.2.8. Capacité d'échange cationique (C.E.C)…..……………………………….. 48
3.2.2.9. Détermination des cations échangeables..………………………………. 48
3.2.2.10. Détermination des éléments métalliques dans le sol….………………. 48
1. Précaution spécifique à l’analyse des éléments métalliques…………..…... 48
2.Technique d’extraction des éléments métalliques………………………….. 48
3.Dosage des éléments métalliques……………………………………………… 49
3.3. Statistiques…………………………………………………………………… ….. 50
3.3.1. Corrélations………………………………………………………………..….. 50
3.3.2. Régression multiple……………………………………………………..…….. 50
3.3.2.1. Objectif…………………………………………………………………… 50
3.3.2.2. Principe…………………………………………………………………… 51
3.3.2.3. Calcule des différents paramètres du modèle mathématique ………….. 51
3.3.2.4. Significativité de la liaison globale et de l’apport marginal……………… 52
3.3.2. Calcule des valeurs cibles et d’intervention………………………………….. 53
3.4. Résultats et discussions…………………………………………………………… 53
3.4.1. Les principales propriétés du sol……………………………………………. 53
3.4.2. Les teneurs en éléments traces……………………………………………….. 54
3.4.3. Distribution des éléments traces métalliques le long des berges
de l’oued par rapport aux valeurs de référence néerlandaises……………………. 56
3.4.4. Facteurs affectant les concentrations d'antimoine dans les sols de la vallée de
l’oued Dahimine……………………………………………………………………. 56
3.5.Conclusion…………………………………………………………………………... 65
4.1. Introduction…………………………………………………………………………. 66
4.2. Matériel et méthodes………………………………………………………………... 67
4.2.1. Méthode d’échantillonnage des plantes………………………………………... 67
4.2.2. Traitement des données………………………………………………………... 67
4.3.Résultats et discussion…………………………………………………………......... 68
4.3.1.Résultat de l’ACP : recherche des groupes phytoécologiques…………………. 68
4.3.2. Facteurs du sol affectant la distribution des espèces végétales…………….….. 71
4.3.2.1. Groupe I: association négative avec les ETM…………………………… 72
4.3.2.2. Groupe II: association positive avec les ETM…………………………… 74
4.3.2.3. Groupe III: association positive avec certain ETM et négative
avec d'autre……………………………………………………………………. 77
4.3.2.4. Groupe IV: aucune association aux ETM…...……………………………… 78
4.4.Conclusion…………………………………………………………………………. 78
Tableau 3.4 : Description des statistiques élémentaires des éléments traces métalliques,
des principales propriétés des sols et des facteurs environnementaux
(n=30), et résultats de l’analyse de la régression pas à pas ascendante………55
Tableau 5.1: Statistiques élémentaires des éléments traces métalliques (µg g-1)
dans les sols de L. spartum et H. pallidum……………………………………85
Tableau 5.2: Statistiques élémentaires des teneurs en antimoine (µg g-1) des plantes
entières et de leurs différentes parties chez L. spartum et H. pallidum………87
Tableau 5.3 : Statistiques élémentaires des teneurs en As (µg g-1) des plantes
entières et de leurs différentes parties chez L. spartum et H. pallidum…………89
Tableau 5.6 : Indices de tolérance de L. spartum et d’H. pallidum pour les différentes
concentrations en antimoine du milieu……………………………………… 101
Figure 4.1 : Carte factorielle des deux premiers axes de l’analyse en composante
principales (caractéristiques physico-chimiques des sols et espèces
végétales)………………………………………………………………………70
Figure 5.4 : Rapport d’accumulation (RA) de l’As dans les plantes en fonction
des stations d’échantillonnage………………………………………………….93
Figure 5.8: Croissance des parties aériennes en fonction du temps et des concentrations
en Sb du milieu (a : L. spartum, b : H. pallidum)…………………………….102
Figure 5.9: Comparaison des longueurs des parties aériennes (Pa) et souterraines (Ra)
au dernier jour de mise en culture en fonction des concentrations en Sb
du milieu (a : L. spartum, b : H. pallidum)……………………………………..104
Figure 5.11: Croissance des parties aériennes en fonction du temps et des concentrations
en As du milieu (a : Lygeum spartum L., b : Hedysarum pallidum Desf.)……109
Figure 5.12: Comparaison des longueurs des parties aériennes (Pa) et souterraines (Ra)
au dernier jour de mise en culture en fonction des concentrations en As
du milieu (a : Lygeum spartum L., b : Hedysarum pallidum Desf.)…………110
LISTE DES PHOTOS
Photo 5.4 : Les graines d’Hedysarum pallidum Desf. avant et après scarification………….98
La pollution des sols par les métaux lourds et les métalloïdes potentiellement toxiques
représente un des dangers environnementaux parmi les plus imminents et les plus importants
de notre époque. En Algérie, ils sont principalement issus des mines abandonnées, présentes
dans de nombreuses régions ayant un historique d’exploitation minière. L’impact direct des
opérations minières à ciel ouvert est l’altération profonde et durable des sols, sur des
superficies souvent considérables (Thornton, 1996). Cette dégradation, qui survient durant
l’activité minière, peut continuer et porter préjudice à l’environnement longtemps après son
arrêt (Fernández-Caliani et al., 2009) .
Selon Kabata-Pendias et Pendias (2001), les plantes peuvent être très sensibles aux teneurs
élevées d’éléments traces métalliques dans les sols. Certaines espèces sensibles présentent
déjà des signes de toxicité à des concentrations faibles de ces éléments telluriques. Les
impacts potentiels de la contamination des sols par les éléments traces métalliques sur les
communautés de plante dans la vallée de l’oued Dahimine seraient donc probables.
L’oued Dahimine prend sa source dans la région minière localisée dans une montagne, le
Djebel Hamimat, et continue son cheminement sur plusieurs kilomètres, plus bas dans la
vallée. En choisissant une partie de cet oued, en bas de la montagne où le facteur
géomorphologique n’est pas vraiment variable, en utilisant des méthodes quantitatives et
statistiques floristiques et en faisant des analyses physico-chimiques des sols, l'objectif de ce
travail est de répondre aux questions suivantes:
- Les sols de cette partie de l'oued, bien qu’ils ne soient pas à proximité des puits et
des déblais miniers et au même niveau que le lit de l’oued, sont ils susceptibles d'être
contaminés, non seulement par le Sb, mais aussi par d’autres éléments traces métalliques tels
que As, Co, Cr, Cu, Pb et Zn ?
- Y a-t-il un risque que la pollution par le Sb ou par d’autres éléments toxiques
s'étende jusqu’au fond de la vallée?
- Quels sont les facteurs physico-chimiques des sols qui participent à la dispersion ou à
la rétention du Sb ?
- Le Sb a-t-il une action sur les communautés végétales? Est-ce que les autres éléments
traces et les facteurs physico-chimiques du sol sont impliqués dans un tel effet et dans quelle
mesure?
- Y a-t-il des espèces liées à la présence du Sb dans les sols et/ou aux autres éléments
traces métalliques ?
- Existe-t-il parmi les végétaux se développant sur les sols les plus contaminés, des
espèces en mesure de tolérer des concentrations élevées de Sb et/ou As ?
- Ces espèces sont-elles résistantes à ces éléments traces métalliques en conditions
expérimentales ? Seront-elles exploitables pour la phytoremédiation des sols miniers ?
Trois approches sont envisagées. La première a trait à l’étude, dans le milieu naturel,
des sols et de la végétation des berges de l’oued Dahimine. Elle comprend des inventaires
floristiques répartis sur 30 points et des prélèvements de sol analysés au laboratoire pour la
détermination de leurs caractéristiques physico-chimiques et de leurs teneurs en éléments
traces métalliques. La deuxième approche concerne l’étude en milieu naturel du mode de
tolérance de deux espèces métallophytes, Hedysarum pallidum Desf. et Lygeum spartum L. à
l’antimoine et à l’arsenic. Elle est effectuée par un prélèvement (avec répétition) de ces deux
espèces et de leurs sols sur 10 parcelles, elle est suivie de leurs analyses au laboratoire. La
dernière approche consiste en des tests expérimentaux de résistance, au laboratoire de ces
deux espèces à l’antimoine et à l’arsenic.
CHAPITRE 1 : COMPORTEMENT DE L’ANTIMOINE DANS
L’ENVIRONNEMENT : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
1.1. Introduction
L’antimoine est un métalloïde appartenant au groupe 15 du tableau périodique des
éléments. Il est de symbole atomique "Sb", de numéro atomique Z = 51 et de poids atomique
121,75. Il est considéré comme très dangereux pour l’homme (Alloway, 1995) ainsi que pour
sa santé voir cancérogène (Hammel et al., 2000). L’antimoine est, également, considéré
comme un polluant classé prioritaire par l’agence de protection de l’environnement des Etats-
Unis (USEPA, 1979) et l’union européenne (Filella et al., 2002a). Plusieurs aspects de ses
comportements environnementaux ont été, récemment, examinés (Filella, 2010; Filella, 2011 ;
Shtangeeva et al., 2011; He et al., 2012).
1.2. Historique
. Historiquement l’antimoine a été utilisé dans des temps très anciens. Ainsi un
fragment de vase en antimoine pur, datant de quatre milles ans avant notre ère, a été découvert
en Chaldée dans la cité sumérienne de Tello (Mascherpa, 1982). L'antimoine était déjà connu
chez les Babyloniens et chez les Chinois 4000 ans avant Jésus-Christ (non seulement comme métal
mais aussi comme ustensile). Les anciens formaient les sourcils en arcs parfaits et les teignaient en
noir (Stibnite). Ils ajoutaient aux paupières la même teinture pour donner aux yeux plus de
brillance. Cet artifice était en usage chez les Hébreux, en Egypte ancienne et au Moyen- Orient.
Il faut remarquer que le pouvoir vomitif de l’antimoine était connu chez les romains
fortunés qui terminaient leur repas en buvant du vin gardé dans un récipient en étain dopé à
l’antimoine et qu’ils dénommaient « le calice vomitif » (Bencze, 1994).
La grande réputation thérapeutique que connut, durant plus de 300 ans, l’antimoine
fut souvent terni par de nombreux accidents mortels observés lors de son usage immodéré
(Mascherpa, 1982 et Bourzat, 2006). Cependant, en France, en 1566, le Parlement de Paris
finit par interdire l’usage de l’antimoine en médecine. Pendant 100 ans, l’Ecole de médecine
de Montpellier, profondément marquée par les théories des alchimistes musulmans (en
particulier Rhazès qui vécut au Xe siècle), refusa cette interdiction. Ce n’est qu’en 1666, que
Louis XIV, ayant été apparemment sauvé à l’âge de 20 ans d’un typhus exanthématique grâce
à l’émétique (le vin émétique était préparé par contact, durant 24 heures, de trioxyde
d’antimoine, dénommé « foie d’antimoine », avec du vin blanc), autorisa de nouveau l’usage
thérapeutique de l’antimoine. C’est Mazarin, qui conseilla au roi, l’utilisation de ce remède,
alors qu’il était interdit par l’Ecole de Médecine parisienne (Mascherpa, 1982 et Bourzat,
2006).
1.7.1. Adsorption
En termes d'adsorption, Sb se comporte, à bien des égards, contrairement aux cations.
Alors que la solubilité des cations augmente généralement avec la diminution du pH, un pH
bas favorise la sorption d'anions (McBride, 1994). Ainsi Sb(OH)6- et Sb(OH)3 sont les seules
principales espèces de Sb présentes dans l'environnement dans des conditions respectivement
oxydantes et réductrices. L'influence du pH sur l’adsorption du Sb devrait suivre le modèle
de la dépendance du pH de la charge électrique de la surface de sorption de la phase solide.
Très peu d'études ont porté sur la sorption de Sb par les minéraux argileux.
Blay (1999) a constaté que la sorption de Sb (III) et Sb (V) par les minéraux argileux comme
la montmorillonite et la kaolinite à des valeurs de pH autour de 7.5 est un à deux ordres de
grandeur plus faible que la sorption des (hydr)oxydes de Fe et de Mn dans la même gamme de
pH. La sorption de Sb (V) à la montmorillonite et la kaolinite diminue linéairement avec
l’augmentation du pH de 2 à 9. Aussi, Xi et al. (2010) ont observé une forte dépendance de
la sorption de Sb (V) par la kaolinite au pH. En outre, ils ont constaté que l’adsorption de Sb
(V) par la kaolinite est nettement réduite lorsque la force ionique augmente de 0.01 à 0.05 M,
mais est moins touchée lorsque la force ionique était plus élevée 0.1 M. Les deux études
indiquent que la complexation de l’extérieure-sphère, probablement en combinaison avec
certains complexes du centre-sphère, joue un rôle beaucoup plus important pour la sorption de
Sb par les minéraux argileux que dans celle par les (hydr)oxydes de Fe, Mn, et Al.
Par ailleurs, bien que moins bien étudiée, il semble que l'association entre le Sb et les
minéraux Al-silicatés peut être importante selon l’origine du Sb. Par exemple, une plus grande
partie est lié à la fraction de silicate lorsque le Sb a une origine minérale primaire (Gal et al.,
2006). Il existe certaines preuves d'un minimum de solubilité générale dans le sol autour d'un
pH de 4 (Ashley et al., 2003), mais l’importance des minéraux argileux silicatés dans la
détermination de ce minimum ne peut pas être séparée de l'effet des oxydes et des
hydroxydes, ou autres phases du sol.
2. Les oxydes et les hydroxydes.
Les oxydes et les hydroxydes sont connus pour être importants pour l’adsorption du
Sb dans le sol (Mitsunobu et al., 2006).
L’antimoine a été mis en corrélation positive avec les composants d’oxyde de fer du
sol (Denys et al., 2008) et de nombreuses études ont montré une forte affinité du Sb (V) et Sb
(III) aux (hydr)oxydes de Fe ( Leuz et al., 2006a; Martinez-Llado et al., 2008; Mitsunobu
et al., 2006; Scheinost et al., 2006; Watkins et al., 2006). L’adsorption du Sb spécifique (V)
sur les hydroxydes de Fe dans les formations complexes du centre-sphère mixte a été
confirmée dans les sols contaminés et sur la goethite (Leuz et al, 2006b; Scheinost et al.,
2006). Le Sb (III) et le Sb (V) de la sphère interne bidentée complexent en surface avec les
(hydr)oxydes de Fe (Belzile et al., 2001 et Leuz et al., 2006b). Le Sb (III) est fortement
absorbé par la goethite en une large gamme de pH (3-12), tandis qu’une forte adsorption de
Sb (V) par la goethite est limitée à des valeurs de pH inférieures à 7 (Leuz et al., 2006b). Le
Sb peut être mobilisé dans des conditions alcalines par la catalysation de l’oxydation des
(hydr)oxydes de Fe par l’adsorption de Sb (III) et une libération par la suite du produit
d'oxydation d’antimoniate (Leuz et al., 2006a).
Tighe et al. (2005b) ont étudié la sorption de Sb (V) aux (hydr)oxydes de fer amorphe
synthétique et ont constaté que la sorption augmentait linéairement avec la diminution du pH
et elle est de 100% à pH <3.5. Tighe et Lockwood (2007) ont rapporté que 95% de sorption
de Sb (V) par l’hydroxyde de Fe non cristallin se faisait dans une gamme de pH de 2.5 à 7
avec un maximum de sorption à un pH d'environ 4. La sorption du Sb (V) sur l'hématite est
également forte, avec une absorption maximale similaire (pH 4) impliquant une combinaison
de sites de liaison de surface (Pierce et Moore, 1982; Ambe, 1987). Takahashi et al. (2010)
ont effectué des expériences de sorption (à pH inconnu) avec l’allophane synthétique et ont
trouvé une forte corrélation entre le Fe et la quantité de Sb(V) adsorbé, mettant en évidence la
forte affinité de Sb (V) aux groupes fonctionnels liés au Fe. Les (hydr)oxydes de Fe amorphe
sont susceptibles d'être des sorbants plus forts que les minéraux cristallins de Fe, grâce à
leurs surfaces plus grandes (Cornelis et al., 2008).
L'association d'espèces de Sb avec les (hydr)oxydes de Mn n’a été abordée que dans
quelques expériences d'adsorption à l'aide de minéraux synthétiques. Dans les expériences de
traitement par lots réalisée par Blay (1999) l’oxyde de manganèse (MnO2) avait une capacité
d'adsorption élevée à pH 7 sous forme de goethite et hématite (Fe2O3). Des observations
similaires ont été faites par Thanabalasingam et Pickering (1990) pour la sorption de Sb qui a
été ajouté sous forme de Sb (III) à l'hydroxyde de manganèse (MnOOH) sur toute la plage de
pH de 3 à 9.
Les interactions de Sb (III) et Sb (V) avec les (hydr)oxydes d’Al sont encore moins
étudiées, mais il semble aussi y avoir une affinité élevée des deux espèces à la surface de la
gibbsite, Al(OH)3 (Rakshit et al., 2011). La sorption de Sb (V) par la gibbsite est plus forte
dans l'intervalle de pH de 2 à 4, et négligeable à un pH de 10, tandis que la force ionique n’a
que peu d'influence à cause de la faible surface de couverture. Ces résultats suggèrent un
mécanisme de liaison de la sphère interne avec la formation d'un complexe binucléaire de
surface monodentée (Rakshit et al., 2011). Les capacités de sorption maximale, calculées pour
un pH de 6.1, sont beaucoup plus inférieures pour la gibbsite que pour les (hydr)oxydes de
fer, en raison de la faible surface de la gibbsite. Etant donné que Al(OH)3 se dissout à un pH
faible, ce mécanisme de liaison peut-être plus important dans les sols légèrement à
modérément acides avec la gibbsite que dans ceux avec prédominance des (hydr)oxydes.
L’antimoine est adsorbé sur les oxydes de Mn préférentiellement aux oxydes de Fe
dans les sédiments lacustres (Muller et al., 2002). L’antimoine (III) est fortement absorbé par
les (hydro)oxydes de Mn et la sorption diminue dans l'ordre MnOOH> Al(OH)3> FeOOH.
Cette diminution du taux de sorption est progressive avec l'augmentation du pH à partir de 6.
Malgré la forte sorption sur les (hydr)oxydes de Mn, la haute abondance des (hydr)oxydes de
Fe et d’Al indique que ces minéraux pourraient agir sur la solubilité du Sb (III) dans les
systèmes naturels (Casiot et al., 2007).
1.8.2. Relation entre les concentrations de Sb dans les plantes et celles dans les sols
Les coefficients de transfert ou de bioaccumulation ont été signalés par
Dominguez et al. (2008) dans la vallée du Guadiamar du sud de l’Espagne, où les sols ont été
couverts par des boues de résidus miniers après une rupture du barrage à Aznalcóllar. Les
concentrations d'antimoine des feuilles des plantes ligneuses varient entre 0.03 et
0.07 µg g-1 sur le sol qui contient entre 4.5 et 37.7 µg g-1 de Sb, ce qui correspond à des
coefficients de bioaccumulation de moins de 0,03. Des taux de bioaccumuation similaires ont
également été obtenus par Leduc et Gardou (1992), qui ont analysé les plantes qui poussent
sur des gisements de minerai riche en Sb près de Brouzils (en Vendée, France). Ils ont trouvé
que la concentration des sols en Sb était en moyenne de 38 µg g-1 alors que la concentration
maximale des sols en Sb était de 105 µg g-1, les branches de chêne accumulaient 0.23 µg g-1
de Sb et les branches d'aubépine accumulaient 0.19 µg g-1 de Sb.
Plusieurs études (Rached-Mosbah et al., 1992 ; Baroni et al., 2000; Hammel
et al., 2000; De Gregori et al., 2004 ; Pratas et al., 2005; Dominguez et al., 2008; Murciego
Murciego, 2007) ont montré que le facteur de proportionnalité (ou le coefficient de
bioaccumulation , rapport entre la concentration de la plante et celle du sol) était en moyenne
de 0.02 (kg de sol/ kg de matière sèche de plante) pour le Sb total du sol et 2.57 pour le Sb
soluble du sol.
Des résultats similaires ont également été trouvé dans d’autres études (Leduc et
Gardou, 1992 ; He et Yang, 1999; Tschan et al., 2008) indiquant que la proportionnalité entre
le Sb dans la plante et le Sb soluble du sol représente en effet un modèle commun. Selon
Tschan et al. 2009, ceci fait que cette proportionnalité peut s'étendre sur au moins cinq ordres
de grandeur des concentrations de Sb et suggère un mécanisme très générale et assez simple.
Un mécanisme facilement expliqué par le transport passif par convection avec le courant
d'eau de transpiration des plantes. Cependant, cette hypothèse doit être conciliée avec
l'existence dans les racines des plantes de barrières sélectives qui contrôlent le transfert d'eau
et de solutés de la racine vers les parties aériennes.
D'autre part, des rapports de faible absorption de Sb à partir de plantes qui poussent
sur des sols contaminés en Sb (Pratas et al. 2005; Dominguez et al., 2008) sont aussi
constatés. La démonstration que la concentration totale de Sb du sol est généralement un
mauvais indicateur de la biodisponibilité de Sb pour les plantes a été faite.
Tschan et al. (2009) ont examiné la littérature sur l’absorption de Sb par les plantes
terrestres et ont trouvé que l'accumulation de Sb dans les plantes était proportionnelle aux
concentrations de Sb soluble qui sont supérieures de cinq ordres de grandeur. La moyenne
des coefficients de bioaccumulation (à savoir le rapport entre les concentrations totales de Sb
dans la plante et dans le sol) n'était que de 0.0022. Ainsi, en général, l'accumulation par les
plantes n'est pas susceptible de jouer un rôle majeur dans la rétention de Sb dans les sols. Les
plantes peuvent cependant avoir des effets importants sur la mobilité de Sb dans le sol par
d'autres moyens, tels que l'exsudation des ligands de mobilisation, ou la création de canaux
d'écoulement préférentiels à travers la croissance des racines et la décomposition subséquente
(Tschan et al., 2009).
1.9. Risques de toxicité posés par la consommation de plantes cultivées sur un sol
contaminé par le Sb
Si le Sb est repris par les plantes, il peut entrer dans la chaîne alimentaire et présenter
un risque sanitaire pour les animaux et les humains, même si les plantes eux-mêmes ne sont
pas affectées. Li et Thornton (1993) ont enquêté sur le sol et l’herbe des pâturages
contaminés par As, Sb et Bi. Ils sont venus à la conclusion que très peu de ces éléments sont
absorbés par les animaux et que les problèmes de santé du bétail dans les pâturages sont donc
rares. Selon Tschan et al. (2009), les formes chimiques de ces éléments et d'autres métaux
connexes dans le sol et l’herbe, et les effets cliniques possibles après une exposition à long
terme et à faible niveau exigent une étude plus approfondie. Un danger possible est la faible
toxicité de Sb pour les plantes. Comme, il a été mentionné plus haut, les plantes peuvent
absorber de grandes quantités de Sb tout en étant toujours et d'apparence saine. Les humains
et les animaux qui consomment ces plantes sur de plus longues périodes de temps peuvent
donc s'empoisonner.
Gebel et al. (1998) ont étudié l'exposition de Sb en prenant l'urine, le sang et
échantillon de cheveu et du cuir chevelu à partir d'une population vivant dans une zone
contaminée dans le nord du Palatinat, en Allemagne. Aucune différence significative dans les
concentrations en Sb par rapport au groupe témoin n’a été trouvée. Aussi, les facteurs de
risque tels que la consommation de fruits de mer ou de produits cultivés n'a apparemment pas
d'incidence sur les concentrations de Sb dans l'urine, le sang, les cheveux et le cuir chevelu.
En raison de la connaissance limitée de la toxicité de Sb, il est difficile d'évaluer les
risques, pour la santé, d'une exposition à des concentrations élevées de Sb. L’intoxication
aiguë des humains ou des animaux par ingestion ou consommation de plantes cultivées sur un
sol contaminé par le Sb est extrêmement peu probable. Aussi, les effets chroniques sont à
prévoir seulement dans de rares circonstances. En supposant une concentration de Sb
moyenne dans les légumes cultivés dans un jardin contaminé de 100 µg g-1 PS (une valeur
rarement dépassée dans les conditions de terrain), une personne aurait, hypothétiquement, à
consommer par jour en moyenne 1 kg de matière sèche de ces plantes afin de parvenir à une
dose de 100 mg / jour de Sb, considérée comme seuil critique de l'apport de Sb
(Bowen, 1979).
1.11. Conclusion
L’antimoine est un élément toxique, dégradant et dangereux. Il est encore très utilisé
de nos jours dans des domaines très variés. Il peut donc être à l’origine de différents types de
pollution et entrainer par sa présence des perturbations au sein des écosystèmes. Il est, ainsi,
susceptible de provoquer des dommages à la santé des êtres vivants et de mettre en cause le
concept d’une utilisation légitime de l’environnement.
CHAPITRE 2 : PRESENTATION DE LA ZONE D’ETUDE
2.1. Localisation de la zone d’étude
Notre zone d’étude (Fig. 2.1) a une superficie d’environ 3000 ha. Elle est localisée à 3
Km au nord d’Ain Babouche et possède les coordonnées géographiques suivantes de
35°58’37,64’’ Nord à 36°01’09,78’’Nord et de 7°11’22,80’’Est à 7°14’38,38’’Est. Ain
Babouche est une ville de la wilaya d’Oum El Bouaghi. Cette dernière est située dans la zone
des hauts plateaux constantinois au centre des wilayas de l’Est Algérien et s'étend sur une
superficie 7638,13𝐾𝑚2 .
Le village d’Ain Babouche est localisé à 90 Km au Sud-Est de Constantine, 11 Km au
Nord d’Oum El Bouaghi et 40 Km au Sud-Est de Sedrata.
La figure 2.1 montre que notre zone d’étude est traversée par la route RN 32.
2.2. Géologie
La géologie de la région a été étudiée et établie par Boisson et Neybergh (1977).
Notre terrain d’étude est dominé par Djebel Hamimat. Cette montagne se présente en une
demi-boutonnière anticlinale (fig.2.2) avec un axe Sud-Ouest-Nord-Est formant, un axe à
convexité Sud-est. Le côté Nord est tranché et écaillé. L’anticlinale comprend sur les côtés,
des grès et des marnes gréseuses passant, vers le centre, à des marno-calcaires et des calcaires
fins. La série est datée du crétacé inférieur. Les concentrations métallifères de l’antimoine
apparaissent sur les flancs, dans différents niveaux calcaires fissurés et bréchifiés, et sont liées
à la tectonique. Les plaines ondulées formées de terrains sédimentaires du quaternaire ancien
occupent le reste de la région. Le sommet est caractérisé par la présence d’une croûte calcaire.
Le long des oueds on a des alluvions actuelles et récentes.
2.3. Minéralogie
L’étude faite par la société SONATRACH (1977) sur la géologie de Djebel Hamimat
a servi de document principal pour l’étude de la minéralogique de cette région.
Légende
Oued
Route
Zone d’étude
N
Figure 2.2 : Carte géologique de la zone d’étude (Voute, 1956)
Les corps minéralisés sont composés de petits filons, filonnets, stock-werks et
d'imprégnations. La figuration des corps est très diversifiée selon les secteurs, par exemple,
dans le secteur I et le sous- secteur III2 on rencontre le plus souvent des lentilles et des filons,
dans le secteur II des amas et dans le sous- secteur III1 des lentilles allongées.
La dimension des corps minéralisés est différente dans les divers secteurs. Dans le
secteur I les corps minéralisés affleurent sur une épaisseur de quelques dizaines de
centimètres jusqu’à deux mètres, se poursuivant sur une longueur de 100 à 200 m jusqu’à 300
ou 400 m. Pour le secteur II, l’épaisseur du corps est en général de 40 à 80 cm, pouvant
atteindre tout de même 1,4 m dans certaine galeries, mais elle s’amincit rapidement aux
extrémités. Le corps principal du sous-secteur III1 a plus de 200 m de long avec une épaisseur
relativement constante étant de 80 cm. La dimension du corps de minerai dans le sous-secteur
III2 est relativement réduite. L’allure des corps minéralisés correspond quasiment à celle des
zones minéralisées où ils gîtent.
Sous l’influence de divers facteurs géologiques et géographiques produites après la
minéralisation, les corps minéralisés ont subi une forte oxydation prés de la surface.
L’apparition de l’antimoine en différentes valences dans divers minéraux oxydés de ce métal
montre que le gisement étudié a subi une oxydation compliquée et prolongée. Le
développement de la zone oxydée a accentué la complexité de la composition minéralogique
des minerais.
Mercuro-arsenical Orpiment, réalgar, Calcite et baryte Structure colloïdale et Dans la carrière C45
arsenopyrite, microcristallogrenue et à la surface
scorodite et cinabre et texture massive
2.5. Pédologie
La pédologie de la région d’étude à été, également, étudiée par Rached-Mosbah (1983)
et elle a fait apparaître que les principaux sols rencontrés sur le terrain d’étude sont des
xérochrepts. Cependant, du fait de l’érosion très prononcée dans la région, des sols peu
évolués d’érosion (entisols) recouvrent les pentes moyennes et des lithosols apparaissent sur
les pentes fortes et les crêtes. Les alluvions récentes des oueds sont formées de xérofluvents et
leur lit est constitué de graviers et de cailloux marno-calcaires.
D’une manière générale, d’après cette étude, les sols de la région d’étude varient de
sols minéraux bruts sur surface érodée à des sols avec horizon B structural sur alluvions
anciennes. Peu de matière organique (de l’ordre de 1%) se retrouve dans l’horizon de surface
et le calcaire est présent dans le profil entier. Ces sols sont légèrement alcalins ; le pH variant
de 8 en surface à 9 en Profondeur.
2.6. Climat
Afin de caractériser le climat de notre région d’étude, nous avons utilisé les données
climatiques (Tableau 2.2) de la station d’Oum El-Bouaghi, sur une période de 30 ans allant de
1982 à 2012. Cette station est à 14 km de notre zone d’étude. L’inexistence d’une station
climatique dans notre terrain d’étude nous oblige, en principe, à faire une extrapolation par
la méthode de Seltzerb (1946) (cité par Lehouerou, 1975). Or, étant donné que la différence
altitudinale entre cette station météorologique (889 m) et notre station d’étude (une moyenne
de 863,43 m) n’est que de l’ordre des dizaines, selon ce même auteur cette extrapolation est
inutile.
Les valeurs moyennes des températures moyennes mensuelles pendant la période
allant de 1982 à 2012 montrent que le mois le plus froid est celui de Janvier avec une
moyenne des minimas de 1.3°C, et le mois le plus chaud est celui de Juillet avec une moyenne
des maximas de 34.7°C.
Tableau 2.2 : Températures et précipitation moyennes mensuelles de la région d’Oum El-
Bouaghi sur une période de 30 ans (1982-2012)
Mois Jan Fév Mar Avr Mai Jui Jui Aoû Sep Oct Nov Déc Moy
M (°C) 11.5 13.0 16.0 19.7 25.1 30.8 34.7 33.9 28.4 23.6 16.7 14.2 22.1
m(°C) 1.3 1.6 3.8 6.3 10.7 15.0 17.6 17.8 14.7 10.7 5.5 2.7 9.0
t° moy (°C) 6.4 7.3 9.9 13.0 17.9 22.9 26.2 25.9 21.6 17.2 11.1 8.5 15.6
37.2 26.7 33.8 37.5 45.3 19.2 9.7 19.8 46.9 20.2 31.2 41.2 Total
P (mm)
368,7
M : moyennes des maximas Source : station météorologique d’Oum El-Bouaghi (2013).
m : moyennes des minimas
P : précipitations
t° : moyenne des températures
L’écart important entre les minimas et les maximas, fait ressortir le caractère
continental de la station.
La pluviométrie moyenne annuelle est de 368.7 mm. Les précipitations sont très
variables, d’une part, suivant les saisons avec des pluies abondantes au printemps et en
automne et, d’autre part, suivant les mois avec Septembre le mois le plus pluvieux (46.9 mm)
et Juillet le mois le plus sec (9.7 mm).
En comparent ces données avec celles présentées par Rached- Mosbah (1983) pour la
même région et une période de même durée, une augmentation de la température de 1.3°C et
une diminution de précipitation de 96.3 mm après une période de trente ans peut être
constatées.
La période sèche, déterminée par le diagramme ombrothermique (Bagnouls et
Gaussen, 1957) de la période de 1982 à 2012 (fig.2.3), s’étale du mois de Mai au mois
d’Octobre alors que la période humide débute au mois de Novembre et se termine au mois de
Mai.
Période sèche
P= précipitation, T=température
2.7. Végétation
Une étude syntaxonomique dans cette région, essentiellement aux alentours de la mine
d’antimoine, a été réalisée par Rached-Mosbah (1983) et elle a permis d’identifier trois
groupes de relevés :
Q2
90
80
70
60 SEMI-ARIDE
50
40
ARIDE
30
20
SAHARIEN
10
-5 -4 -3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12°C
Très
Froid Frais Tempéré Chaud Très chaud
Froid
Zone d’étude
Le 1er groupe, peut être rattaché à la classe des Cisto-Romarinetea Rivas-Goday 1964,
ordre des Rosmarinetalia Br.-Bl. 1931 et au groupement de l’Hedysaro-Helianthemetum
rubelli. La présence d’espèces telles que Onobrychis pallasii et Hedysarum pallidum permet
de penser qu’il s’agit d’un groupement proche de celui décrit par Guinochet (1980) sous le
nom de fimano ericoidis-Bupleuretum balansae, dans lequel un certain nombre d’espèces
caractéristiques auraient disparu.
Le 2ème groupe est floristiquement bien individualisé et nettement opposable aux deux
autres. Du point de vue floristique, il possède encore quelques espèces des Cisto-
Rosmarinetea Rivas-Goday 1964, mais il comporte surtout de nombreuses espèces
thérophytes appartenant à la classe des Thero-Brachypodietea Br.-Bl. 1947. L’association à
laquelle ce groupe de relevés peut être rattaché est l’Asterico maritimi-Convolvuletum lineati
décrite par Guinochet en 1977.
Le dernier groupe se rattache lui aussi à la classe des Thero- brachypodietea Br.-Bl. Et
à l’association Asterico maritimi-Convolvuletum lineati Guinochet 1977. Ce groupement est
enrichi en espèce thérophytes dérivant de jachères et de groupement cultigènes permettant de
le rattacher également à la classe des Stellaretea mediae.
CHAPITRE 3 :ETUDE DE LA POLLUTION DES SOLS DES
BORDURES DE L’OUED DAHIMINE PAR LES ELEMENTS
TRACES METALLIQUES
3.1. Introduction
Dans la région minière d’antimoine du Djebel Hamimat dont l’exploitation a cessé en
1952, Rached-Mosbah et Gardou (1988) ont identifié des teneurs élevées en Sb dans les sols
entourant la mine. Cependant, l’extension de cette pollution vers la vallée de l’oued
Dahimine, la dispersion de l’antimoine dans les sols calcaires et sa relation avec les autres
facteurs édaphiques n’a pas été encore examinée. En outre, l’évaluation de la contamination
par d’autres éléments traces tels que As, sachant qu’ils accompagnent les minerais de Sb, n’a
pas été également encore envisagée dans l’étude de cette région.
L’objectif de cette étude est d’évaluer la pollution ou la contamination dans les sols de
la vallée de l’oued Dahimine, non seulement par le Sb mais également par d’autres éléments
traces métalliques. Notre but est aussi de contribuer à la connaissance du devenir du Sb dans
l’environnement par la détermination de variables physico-chimiques susceptible d’avoir un
effet sur la dispersion de cet élément.
3.2.2.2. pH du sol
Le pH du sol est mesuré dans une suspension sol/eau de rapport 1/2.5 (W/V) après
agitation d’une heure et un repos de 30 mn. Cette mesure a été faite grâce à un pH-mètre à
électrodes de verre, étalonné avec trois solutions tampon (pH 4; 7 et 11). Elle est basée sur la
méthode électrométrique qui est une application de la loi de Nernst.
Tout le matériel utilisé devant être au contact avec les échantillons de sol et les
minéralisats a été préalablement lavé avec une solution d’HNO3 à 10% puis à l’eau
déminéralisée. Tous les produits utilisés étaient de qualité très pure. En plus de ces
précautions nous avons veillé à ce que la minéralisation et la mise en solution soient conduites
avec un maximum d’efficacité tout en réduisant les risques de perte et de contamination.
Les éléments métalliques (teneurs pseudo-totales) ont été extraits avec de l’eau régale,
dont le grand pouvoir de dissolution est dû à l’effet combiné d’un acide oxydant, HNO3, et
des ions Cl- complexants de l’HCl. Ainsi, 7,5 ml de HCl et 2,5 ml de HNO3 ont été ajoutés à
0,5 g de sol dans des récipients en téflon et digérés grâce à une grande pression dans un four
à micro-ondes (Berghof-speedwave MWS-2) suivant le programme porté dans le tableau 3.1 .
Cette méthode d’extraction ne permet pas d’extraire la totalité des teneurs métalliques
mais seulement 90% de celles-ci. Cependant, elle est peu coûteuse et moins dangereuse
(explosion) comparée à la méthode à l’acide fluorhydrique (HF) qui est plus efficace.
Tableau 3.1 : Programme de minéralisation
Etapes 1 2
Température [0C] 180 100
Puissance(%) 99 99
Temps (mn) 25 10
Avant la minéralisation des ETM, une décontamination des récipients en téflon est
effectuée avec 5 ml de HNO3 (Suprapur 63%) selon les conditions décrites dans le tableau
3.2. Les récipients sont ensuite soigneusement rincés à l’eau pure.
3.3. Statistiques
La distribution univariée de toutes les variables, incluses dans l’analyse, a été
soigneusement examinée et les tests de normalité de Shapiro-Wilk ont été réalisés. Dans le cas
où un grand écart à la normalité est identifié, une transformation à la normalité est considérée.
Le logiciel SAS (SAS® 9.3, SAS Institute Inc., North Carolina) a été utilisé pour les analyses
statistiques.
3.3.1. Corrélations
Le but de l’analyse est d’expliquer la concentration de l’antimoine dans le sol par la
concentration des métaux et des autres variables de l’environnement. Ainsi, des associations
univariées ont été mesurées à travers les corrélations marginales de Pearson entre l'antimoine
et chacune des autres variables incluses dans l'analyse.
3.3.2.1. Objectif
L’objet d’une régression multiple d’après Falissard (1998) est d’éclairer les relations liant une
variable quantitative Y (variable à expliquer qui correspond dans notre cas à la concentration
de l’antimoine) à une série de variables X1, X2,…….XP (dénommés des variables explicatives
dans notre cas les autres métaux et les variables édaphiques). La principale vertu de cette
méthode est de permettre, par l’intermédiaire d’un modèle
mathématique, d’évaluer la force de l’association entre Y et chacun des Xi. Une
régression multiple apparaît avant tous comme un outil pour prédire une variable Y à partir de
d’autres variables X1, X2,…….XP.
Le Modèle mathématique est : Y = 0 + 1X1 + … + jXj + … + pXp +
avec N (0, )
3.3.2.2. Principe
Selon Michel Tenenhaus (2009), avec la régression linéaire simple, on part d’une
équation Y= a + b X. On recherche deux inconnues qui minimisent la différence entre les
valeurs attendues de Y. Pour la régression multiple il s’agit de faire de même Y = (b0 + b1X1
+ b2X2 + .... + bp Xp) b0 est l’ordonnée à l’origine, c’est la constante, on l’appelle aussi
intercept. b1, b2, b3, bn, sont les coefficients de régression des prédicteurs X1, X2, Xp.
Comme pour la régression linéaire on cherche les valeurs prédites de Y qui se rapprochent le
plus des valeurs observées de Y. Rappelons que l’on obtient Y en faisant la somme des
différences entre les valeurs théoriques et celles observées de Y et on élève cette somme au
carré. Un coefficient exprime pour une variable indépendante le poids explicatif qu’elle
exerce sur la variable dépendante. Plus ce coefficient est important plus le poids de la variable
est important. La significativité du poids de chaque variable est donnée. Cela se lit comme
une corrélation mais c’est davantage qu’une corrélation. Cela veut dire que la variable Y (à
expliquer, VD) est dépendante de la variable X (explicative, VI). Cette significativité
exprime l’effet « net », ou un effet principal de la VI sur la VD, sachant que les effets des
autres VI sur la VD ont été contrôlés ou maintenus constants (c’est-à-dire que les valeurs des
VI ne changent pas).
1
SPE [i 1 xi * yi (i 1 xi )(i 1 yi )]
n n n
n
1
SCE [i 1 xi2 (i 1 xi ) ]
n n 2
3.4.4. Facteurs affectant les concentrations d'antimoine dans les sols de la vallée de
l’oued Dahimine
Les corrélations de Pearson entre l'antimoine et tous les paramètres du sol étudiés sont
présentées dans le tableau 3.4. Ce dernier montre des corrélations positives, particulièrement
élevées et très significatives (p < 10-3) de l'antimoine avec (dans l'ordre d’importance du
coefficient de corrélation) l'arsenic, le plomb, le zinc, le sable, le cadmium, le fer et le cobalt.
Figure 3.1 : Localisation des points d’échantillonnage et distribution de l’antimoine et des
autres éléments traces le long des berges de l’oued Dahimine.
Les très fortes corrélations entre Sb et As, Pb, Zn, Cd, Co, et à un degré moindre avec
le Cu, indiquent que ces éléments sont associés à l'antimoine et qu'ils proviennent de la même
source, à savoir l'ancienne exploitation minière. Ceci est également confirmé par l'existence
de très fortes inter corrélations (p < 10-3) entre l'As et Zn, Pb, Cd, Co et Cu (respectivement r
= 0.970, r = 0.968, r = 0.878, r = 0.727 et r = 0.643), entre Zn et Pb, Co, Cd un Cu
(respectivement r = 0.931, r = 0.772, r = 0.809 et r = 0.702), entre Pb et Cd, Co et Cu
(respectivement r = 0.932, r = 0.687 et r = 0.644) et entre Co et Cd et Cu (r = 0.647 et r =
0.851) (Annexe 3.5). Ce résultat était prévisible car selon Hackspill et al. (1964) le minerai
d'antimoine se trouve combiné à plusieurs oligo-éléments. En outre, Rafiei et al. (2010) ont
aussi déterminé des corrélations significatives entre Sb et As, Pb et Cd.
La forte corrélation entre l'antimoine et le fer peut être expliquée par le fait que
l'antimoine est étroitement lié au fer (Gal et al., 2006; Denys et al., 2008; Ritchie et al., 2013).
En effet, cet élément est considéré parmi les facteurs les plus importants qui contrôlent le
contenu et le comportement des éléments traces métalliques dans les sols (Kabata-Pendias et
Krakowiak, 1995). En outre, Mitsunobu et al. (2010) ont constaté qu'une quantité importante
de Sb lié à des particules de quartz recouvertes par les (hydr) oxydes de Fe était présente en
tant que Sb (III) dans la zone minière d'antimoine. Selon Hockmann et Schulin (2013), en
raison de leur omniprésence et leur forte capacité d'absorption pour le Sb, les (hydr) oxydes
de Fe peuvent en particulier limiter efficacement le déplacement de Sb dans les sols. Le fer
peut également limiter la solubilité de Sb par la formation des minéraux ferrifères de Sb à
faible solubilité.
Le tableau 3.4 montre une corrélation négative hautement significative (p < 10-3) de
l’antimoine avec les limons et le sodium échangeable et des corrélations négatives
significatives (10-3 < p <0.05) avec l'argile, la CEC, le calcium échangeable et la distance de
la route. L'azote a une corrélation peu significative et négative (p = 0.0671) avec l'antimoine.
La relation négative de l'antimoine avec la CEC signifie que plus la CEC du sol
augmente moins l’antimoine est retenu dans le sol. Ceci est contraire à ce qui est
habituellement rapporté pour la plupart des métaux lourds (Du Laing et al., 2009; Kabata-
Pendias et Pendias, 2001). Selon Wilson et Webster-Brown (2009), on en sait peu sur les
effets de l'adsorption compétitive de Sb et encore moins dans un milieu alcalin. Toutefois,
cela peut s'expliquer par le fait que l'antimoine est fortement et positivement corrélé au sable,
il est d'autant plus présent que le sol est sablonneux et donc avec une faible CEC. En effet, il
est bien connu que la CEC augmente à mesure que la fraction fine du sol augmente
(McDonald et al., 2005). En outre, dans le cas de nos sols, la CEC présente une corrélation
négative et significative avec le sable (r = -0.481, p = 0.007) et une corrélation positive et
significative avec l'argile (r = 0.491, p = 0.006). Dans la même veine, la forte corrélation
négative entre Sb et Na échangeables pourrait résulter de la combinaison de la corrélation
négative et significative entre le Sb et le CEC d'une part, et la corrélation positive significative
(r = 0.901, p <0.0001) entre le Na échangeable et la CEC, d'autre part.
Contrairement à ce qui est souvent rapporté par de nombreux auteurs pour la plupart
des métaux lourds (Du Laing et al., 2009; Kabata-Pendias et Pendias, 2001; Young, 2013),
l’argile et les limons présentent des relations négatives significatives avec les concentrations
d'antimoine dans la zone d'étude. Cela peut s'expliquer par le fait que l'antimoine étant
fortement liée au sable ne peut pas être liée à l'argile, parce que si le sol est riche en sable, il
ne peut pas être riche en argile ou en limon, en même temps.
La corrélation négative significative entre les concentrations de Sb et de la distance à
la route signifie que plus la route est proche et plus sont les concentrations élevées de Sb. Le
trafic semble contribuer à la pollution de Sb de la zone étudiée. D'autres auteurs ont mis en
évidence l'impact du trafic routier sur la contamination des sols par le Sb (Dietl et al., 1997;
Cal-Prieto et al., 2001). Cependant, dans notre cas, ce résultat peut aussi être dû au fait que les
endroits qui contiennent les plus fortes concentrations (Fig.3.1) sont situés principalement le
long de la rivière principale qui est le long de la route et très proche d’elle. Par conséquent,
cette rivière qui démarre étroitement des déblais de mines est le principal responsable de la
propagation de cette pollution toxique.
L’étude du tableau 3.4 présentant également les résultats de la régression linéaire pas
à pas, montre que la première variable entrée dans le modèle est la plus associé à l'antimoine,
tandis que la variable qui n'est pas dans le modèle n'est pas associée à l'antimoine.
Ainsi les résultats de la régression linéaire pas à pas montrent que parmi les variables
corrélées avec Sb, mentionnées ci-dessus, le plomb, le zinc, l'arsenic, le cobalt, le cadmium, la
capacité d'échange cationique, le sable, le sodium échangeable, le phosphore total, l'azote et la
distance de la route interviennent dans l'explication des concentrations d'antimoine dans le
sol. Les variables, comme le chrome, la matière organique, le potassium échangeable, le
magnésium échangeable, et la distance de la mine, bien que n’étant pas corrélées avec
l'antimoine, sont également impliqués dans l'explication du Sb (la figure 3.2).
S
S (%)
MO
3.5. Conclusion
Les sols des berges de la partie étudiée de l’oued Dahimine, bien que situées loin de la
mine et des gisements de minerai, sont gravement polluées par Sb et As dépassant le seuil
d'assainissement dans presque toutes les parcelles échantillonnées. Ils sont contaminés par le
Zn et le Pb dans la majorité des parcelles et modérément contaminés par Co, Cr et Cu dans
certaines parcelles. Il s'avère que la pollution et la contamination par les oligo-éléments
étudiés sont la conséquence des anciens vestiges miniers. La propagation de la pollution est
favorisée par l’oued Dahimine et ses nombreuses branches dont les eaux, grâce aux fortes
pluies qui se produisent souvent dans le climat semi-aride, portent les éléments toxiques vers
le fond de la vallée et les déposent, lors des inondations, sur les bords des oueds où ils se
concentrent.
CHAPITRE 4 : EFFET DE LA POLLUTION PAR LA MINE
D’ANTIMOINE DU DJEBEL HAMIMAT SUR LA
VEGETATION DES BORDURES DE L’OUED DAHIMINE
4.1. Introduction
Selon Ernst (1990), la présence de teneurs élevées d’éléments traces métalliques dans les sols
des zones minières peut être à l’origine d’importantes perturbations au sein de la végétation
en place. Ceci donne à penser que la contamination des bordures de l’oued Dahimine par les
éléments traces métalliques pourrait avoir un sérieux impact sur ses communautés de plantes.
Cependant, les effets potentiels des substances toxiques sur les organismes sont
souvent difficiles à vérifier sur le terrain (Chapman et al., 2002 ; Klok et Kraak, 2008). En
effet, dans les conditions réelles, une grande variété de facteurs physico-chimique du sol et
des processus biotiques détermine conjointement la présence et l’abondance des espèces
(Ter Braak, 1987). Par conséquent, l’absence d’espèces de sites contaminés ne reflète pas
nécessairement l’exclusion en raison d’une toxicité due aux métaux (Chapman et al., 2002).
Ceci implique qu’une analyse simultanée de tous les facteurs environnementaux pertinents est
nécessaire à la fois pour distinguer les effets potentiels de la contamination du sol de ceux
d’autres facteurs de l’environnement et pour placer les effets de contamination dans une
perspective réaliste (Van Straalen, 2003 ; Van Gestel, 2008 ; Loos et al., 2010).
Ainsi, nous voulons, par cette étude, répondre aux questions suivantes :
Parmi toutes les variables prises en considération, quelles sont celles qui expliquent le
mieux le nombre d’individus de ces espèces ?
Parmi toutes les espèces végétales répertoriées, quelles sont celles qui résistent le plus
aux éléments traces métalliques ?
4.2. Matériel et méthodes
Trente relevés floristiques ont été réalisés au printemps sur les mêmes points
d’échantillonnage que ceux des sols déjà analysés (chapitre 3), c’est-à-dire le long des berges
de la partie amont de l’Oued Dahimine (fig.3.1).
Le relevé floristique consiste à noter toutes les espèces rencontrées sur une surface
floristiquement homogène représentative de la végétation de l’ensemble de la station
d’échantillonnage. Pour déterminer cette surface, comme le propose Guinochet (1973), on
explore le terrain dans plusieurs directions jusqu’à l’observation d’une nouvelle liste
d’espèces. Les limites de la végétation floristiquement homogène sont alors atteintes. Pour la
région étudiée, cette surface, appelée aire minima, ne dépasse pas en moyenne 4 m2.
Les relevés ont été effectués suivant la méthode décrite par Guinochet (1973), C’est-à-dire en
se plaçant au centre de la surface floristiquement homogène et en notant toutes les espèces
perçues dans un rayon de quelques mètres autour de soi, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de
nouveaux noms d’espèces enregistrées.
Les espèces non identifiées sur le terrain ont été déterminées au laboratoire en s’aidant
des ouvrages de Quezel et Santa (1962-1963), Schönfelder et Schönfelder (1988), de Bonnier
(1990) et de Fitter et al. (1991).
Une analyse en composantes principales (ACP) a été réalisée, dans un premier temps,
afin de distinguer les groupes d’espèces les plus corrélées aux métaux et métalloïdes du sol.
Dans un deuxième temps, les espèces ainsi sélectionnée ont été soumises, séparément, à des
régressions multiples pas à pas pour déterminer de quelle(s) variable(s) physico-chimique(s)
du sol (ETM inclus) dépend exactement la distribution de chacune d’elle.
Une première ACP (analyse préliminaire) a été réalisée en introduisant les numéros
des relevés comme observations et toutes les caractéristiques physico-chimiques des sols
analysés : Sb, As, Co, Cu, Pb, Zn, Cr ,Cd, TC, MO, TCa, TNa, TP, TMg, TN, TK, ENa, ECa,
EMg, EK, CEC, EC, pH, Fe, A, L, S (Tableau 3.4,chapitre 3), ainsi que toutes les espèces
végétales (en nombre d’individus) répertoriées (Annexe 4.1) comme variables. Les espèces
rares (présentes dans un ou deux relevés seulement) n’ont pas été incluses dans l’analyse,
comme le suggère Gounot (1969), à l’exception de Crepis bulbosa (L.)Tausch. quiest très
abondante, bien que présente dans deux relevés uniquement.Cette analyse (Annexe 4.2 ) a
montré qu’un ensemble de variables se trouve condensé au centre en un nuage de points. Pour
éclater celui-ci nous avons réalisé une deuxième ACP en enlevant les variables qui le forment
(Cd, At,Aha, Ab, Bd, Bs,Cb Cp,Cn, Ci, Cli, Ef, Hm, Hmu, Hr, Ht, Iv, Kh, Lc, Lcr, Mb, Md,
Mh, Mm, Pl, Pm, Sh, Smu,Sp,St, Ta).
La régression multiple pas à pas a été réalisée en introduisant les espèces végétales
comme variables dépendantes et les paramètres physico-chimiques du sol (ETM inclus)
comme variables indépendantes.
Les résultats de l’analyse en composantes principales (Fig. 4.1) montre que les taux
d’inerties des axes obtenus dans notre analyse témoignent d’une relative bonne structuration
du nuage. En effet, selon Maryse Raffestin (2005), lorsque le taux d’inertie total (= somme
des taux d’inertie de l’ensemble des axes = 100%) est divisé par le nombre de variables,
l’obtention d’une inertie nettement inférieure à celle obtenue dans l’analyse signifie que le
nuage de points présente une direction privilégiée d’allongement et donc qu’il correspond à
des taux d’inertie élevés.
Les deux premiers axes ont respectivement des taux d’inertie de 26.16% et 11.50%. Ils
témoignent d’une relative bonne structuration du nuage le long des deux premiers axes. Ce
nuage restitue 37.66% de l’information totale. Celle-ci est assez importante vu le grand
nombre de variables introduites (62). En effet, un pourcentage d’inertie de 26.16% expliqué
par le premier axe montre que le nuage a un axe d’allongement remarquable car 26.16%,
comparé à 1.6% (= 100% /62) dans le cas où le nuage n’aurait pas eu une direction
privilégiée, est très élevé. Ainsi, dans cette analyse, seuls les deux premiers axes seront pris en
considération.
L’examen de la carte factorielle (Fig.4.1) et des contributions relatives des variables aux
axes (Annexe 4.3) permet de constater l’existence de quatre ensembles de variables à fortes
contributions relatives (I, II, III, IV) :
1,0
1*
Hu
Sp
Ah Car TP
0,5 BmPl
III Pb
As
Sb
TN
MOOM T Ca
TC Jm Zn
Pl Ac Jm
EK
ECa Dg Lra
CEC
Aa
Aa
Ae
CET Mg
S I
Fact. 2 : 11,50%
ENa II A
Sa Ls
Fe
TFe
Co
Hc 2*
0,0 T K Tn EMg Sl Cr
Hp Cc Cu
L Lri Ud
Ei Cd T Na pH
Sm Sm Cl Sr Lt
Et Sv
Et Am Lc
-0,5 IV
-1,0
Fact. 1 : 26,16%
L’analyse du tableau 4.1 montre que le groupe I est formé par les deux espèces
Eryngium triquetrum et Sanguisorba minor .
L’examen des équations de régression du groupe I (Tableau 4.1) montre que le Cu est
le seul élément trace métallique qui intervient dans l’explication du nombre d’individus des
espèces de ce groupe. Il a un béta négatif et donc une influence négative sur le nombre
d’individus de ces espèces.
La sensibilité d’E. triquetrum vis-à-vis du Mg, malgré les teneurs tout à fait normales
de cet élément dans les sols, pourrait s’expliquer par le fait que chez cette espèce il y aurait un
antagonisme entre le Mg et d’autres éléments majeurs ou oligoéléments qui empêcherait leur
absorption par cette espèce. En effet, selon Kabata-Pendias et Pendias (2001) le Mg est
susceptible d’être antagoniste avec plusieurs oligoéléments, dont le Fe, le Co, le Cu et le Mn,
empêchant ainsi leur absorption par les plantes.
Tableau 4.1 : Résultats de la régression linéaire pas à pas ascendante (forward) du nombre
d’individu (NI) des espèces végétales(en italique) en fonction des variables édaphiques (Sb,
As, Pb, Co, Zn, Cu, Cd, Cr, Na, Fe, K, N, P, Ca, MO, pH, CE, CEC, A (argile), L(Limon),
S(Sable), CT(CaCO3)). R représente le coefficient de corrélation et Sig F la significativité du
modèle général, tandis que les valeurs de p entre parenthèses dans la dernière colonne
représentent la significativité des coefficients de régression standardisés (=Sig.t).
Groupe II
Ah =Asperula
R=0.90 p<0.005 7) Ah (NI) = 33.53(p = 0.13) + 1.57 (p<0.0012) N (%)
hirsuta Desf. + 1.26 (p<0.0032) Sb (µg g-1MS) – 1.15 (p<0.004) MO
(%) – 0.66 (p<0.038) P (µg g-1MS) + 0.55(0.023) S (%)
Car =Calendula R=0.83 p<0.00078 8) Car (NI) = 0.35 (p = 0.91) +1.27 (p<0.002) N(%) -
arvensis L. 1,05 (p<0.006) MO (%) + 0.85 (p<0,04) Pb (µg g-1MS).
Ae= Agropyron
elongatum. R=0.71 p<0.007 9) Ae (NI) = - 1899.65 (p=0.007) + 0.93 (p<0.022) Pb
(Host.) P.B. (µg g-1MS) + 0.73 (p<0.008) pH – 0.65 (p<0.024) MO
(%) + 0.53 (p<0.03) K (µg g-1MS).
Lra= Limonium
R=0.91 p<0.00000 10) Lra (NI) = 4.91 (p=0,57) + 2.40 (p<0.000014) Pb
ramosissimum (µg g-1MS) – 0.38 (p<0.0089) TC (%) + 0.34 (p<0.0053)
(Poiret.) M. CE (mS cm-1) - 0.26 (p<0.024) MO (%).
Groupe III
Ls =Lygeum R=0.86 p<0.00507 11) Ls (NI) =180.49 (p = 0.0011) – 2.72 (p<0.016) As (µg
spartum L. g-1MS) + 2.61 (p<0.003) Zn (µg g-1MS) +1.74 (p<0.009)
Sb (µg g-1MS) -1.04 (p<0.0009) pH -0.63 (p<0.022) CEC
(meq/100g).
Dg=Dactylis
R=0.80 p<0.0014 12) Dg (NI) =105.77 (p = 0.00011) + 0.96 (p<0.011)
glomerata L.
Sb (µg g-1MS) – 0.62 (p<0.02) Cu (µg g-1MS) – 0.49
(p<0.025) Fe (µg g-1MS) – 0.39 (p<0.0 37) CT (%).
Hu= Hippocrepis R=0,92 p<0,00055 13) Hu (NI) =13.64 (p = 0.04) + 2.95 (p<0.0066)
unisiliquosa L. As (µg g-1MS) – 1.64 (p<0.025) Zn (µg g-1MS) – 0.44
(p<0.021) CT (%) – 0.43 (p<0.009) CE (mS cm-1).
Groupe IV
Ac =Anacyclus
clavatus Desf. R=0.66 p<0.010 14) Ac (NI) = -2.74 (p = 0.016) +1.13 (p<0.0019) Ca
(µg g-1MS) +1.07 (p<0.004) CT (%).
Aa =Anagallis
R=0,61 p<0,017 15) Aa (NI) = -70.57 (p = 0.003) -0.83 (p<0.0025) pH
arvensis L. + 0.69 (p<0.006) N (%).
Le tableau 4.1 montre que le groupe III réunit les espèces L. spartum, D. glomerata et H.
unisiliquosa qui présentent un nombre d’individus influencé positivement par certains
éléments traces métalliques et négativement par d’autres.
L‘équation 13 (Tableau 4.1) fait ressortir une influence négative (Bêta négatif) du Zn sur
le nombre d’individus d’H. unisiliquosa, contrairement à l’As et au Cr qui agissent
positivement sur ceux-ci. Mais, bien que son poids (= -1.64) dans l’explication du nombre
d’individus de cette espèce est supérieur aux poids du Cr (= 0.45), du calcaire total
(= - 0.44) et de la CE (= - 0.43), il reste inférieur au poids de l’As (= 2.95). Ce dernier
présente, en plus, le bêta le plus significatif (p<0.0066) par rapport à ceux du Zn (p<0.025),
du Cr (p<0.008), du calcaire total (p<0.021) et de la CE (p<0.009)).
Ces résultats rejoignent ceux de l’ACP pour ce qui est de L. spartum et de H. unisiliquosa
mais, uniquement par rapport à l’influence négative du Cu en ce qui concerne D. glomerata.
Ceci peut trouver son explication dans celle qui a été donnée auparavant.
mentionnées par d’autres auteurs (Garcia-Sanchez et al., 1996 ; Ottenhof et al., 2007 ;
Conesa et al., 2007a ; Conesa et al., 2007b ; Garcia-Sanchez et al., 2009 ; Conesa et al.,
2011). Selon Garcia-Sanchez et al. (1996), D. glomerata parvient à accumuler d’importantes
quantités d’As dans ses tissus (jusqu’à 40 µg g -1) ce qui atteste de son adaptation à la toxicité
du milieu. L. spartum présente une assez importante facilité à coloniser les déblais de mine
(Conesa et al., 2007a) et à enrichir le sol en matière organique (Ottenhof et al., 2007), ce qui
est une caractéristique favorable pour la stabilisation des déblais de mine.
Les espèces A. clavatus et A. arvensis (équations 14 et 15, Tableau 4.1) ont une
variance du nombre d’individus expliquée à 43% et 37% respectivement par l’ensemble des
variables introduites dans le modèle (R2 = 0.43 ; R2 = 0.37 respectivement). Ces espèces sont
donc indifférentes vis-à-vis des éléments traces métalliques.
Le nombre d’individus d’A. clavatus est expliqué par le calcium et le calcaire total. Le
calcium intervient dans cette explication avec plus de poids (=1.13) et plus significativement
(p<0.0019) que le calcaire total (p<0.004). Cependant, pour A. arvensis, le pH est le
meilleur prédicteur (= +0.83) du nombre d’individus et le plus significatif (p<0.0025) par
rapport à l’azote (= +0.69 ; p<0.006).
4.4. Conclusion
La végétation en place semble s’être réellement adaptée aux fortes concentrations des
éléments traces métalliques dans les sols puisque plusieurs espèces semblent rechercher leurs
présences ou y être indifférentes. A l’inverse, aucune espèce ne semble les fuir ou y être
sensible. Le Sb, l’As et le Pb sont les éléments traces qui agissent le plus sur les espèces en
favorisant l’augmentation de leurs nombres d’individus. Parmi ces espèces, J. maritimus, A.
elongatum et L. spartum seraient les mieux indiquées pour la phytostabilisation des déblais
miniers.
5.1. Introduction
Lygeum spartum L. et Hedysarum pallidum Desf. sont deux espèces révélées par une
première étude (chapitre 4) comme étant indifférentes ou résistante à l’effet de la pollution
générée par la mine d’antimoine. Sur terrain ces deux plantes arrivent parfaitement à croître et
à se reproduire sur les déblais de la mine d’antimoine. Ce sont des espèces
pseudométallophytes car présentes aussi sur sols non métallifères. Elles appartiennent à la
flore métallicole et représentent ainsi, comme le suggèrent Faucon et al. (2010) et Mahy et al.
(2011), une ressource biologique remarquable à la fois scientifiquement intéressante et
précieuse pour de nombreuses applications biotechnologiques. Whiting et al. (2004) parlent
même « d’un El dorado » de matériel génétique qui pourrait être utilisé dans la
décontamination et la restauration écologique de sites contaminés par les ETM.
Par ailleurs, des analyses chimiques réalisés lors d’une précédente étude sur quelques
espèces végétales au niveau de la mine (Rached-Mosbah et al., 1992) avaient révélé que H.
pallidum accumulait le Sb alors que L. spartum l’excluait.
Ainsi, dans la perspective de la phytoremédiation des sols miniers, le travail consistera
à vérifier l’aptitude de ces espèces à accumuler non seulement l’antimoine mais aussi
l’arsenic et de comparer leurs modes de prélèvement en milieu naturel. Il s’agira également de
déterminer le degré de résistance de ces deux espèces vis-à-vis des deux éléments traces
métalliques par des tests de croissance en milieux contrôlés.
5.2.1. Caractérisation
Le L. spartum est l'une des espèces caractéristiques de la steppe algérienne. Elle est appelée
communément sparte en français. En arabe, elle est nommée «Sennagh» ou« Sengha» (Kilian, 1948
et Ozenda, 1958). En Espagnol, on l’appelle « Espartobasto» ou« Albardine » (Mario de Lopez,
1976). Elle est l'unique espèce de la tribu des Lygées qui fait partie de la famille des Poacées
(Guignard, 1998). C’est une plante vivace, caractérisée par un ensemble de talles semblables qui lui
donnent un aspect touffu. Elle est souvent confondue avec l'Alfa à l'état végétatif (Quezel et Santa,
1962). C’est une endémique du Nord d’Afrique (Algérie, Maroc et Tunisie). En Algérie, elle se
rencontre à deux niveaux de ploïdie (Benmiloud, 2003). Elle est représentée par des formes
annuelles (diploïdes, 2n = 16) et des formes pérennes (tétraploïdes 2n = 4 X=32)
(Abdelguerfi-Berrekia et al., 1988).
H. pallidum est une espèce pérenne qui appartient au genre Hedysarum (sulla ou
sainfoin d’Espagne), à la famille des Légumineuses, qui compte environ 10.000 à 30.000
espèces (Ozenda, 1958), et à la sous-famille des Papilionacées, tribu des Hedysarées. Le genre
Hedysarum se subdivise en deux groupes d’espèces se distinguant par la morphologie, le
cycle biologique, le caryotype et les origines géographiques. Le premier groupe comprend les
espèces alpines, arctiques et asiatiques (2n=2X=14) et le second, les espèces
méditerranéennes (2n=2X=16) (Baatout et al., 1991).
5.2.2. Localisation
Le sparte est une plante vivace (Photo 5.1). Selon Pouget (1980), il présente des racines
verticales qui se faufilent dans les plus petits espaces. La biomasse de la partie souterraine est
supérieure à celle de la partie aérienne (Gaddes, 1978 et Pouget, 1980). Il a des ramifications
orientées en générale dans le même sens que l'axe principal (Walter, 1973 in Benmiloud, 2003). Les
feuilles sont glauques, coriaces et cylindriques par suite de l'enroulement de leurs bords. D'après
Quezel et Santa (1962), les feuilles ne se présentent pas comme l'alfa et sont marquées par des
ligules. La floraison se situe entre mars et avril selon les années (Maire, 1953). Les fleurs, sont les
plus grandes que l'on connaisse dans la famille des Poacées. Elles naissent enveloppés d'une
spathe. Celle- ci remplace la glume à l'intérieur de laquelle se situent 2 à 3 épillets connectés à la
base pour former un tube (Quezel et Santa, 1962).
Photo 5.1: Photographie des touffes de L. spartum L.
Selon Quezel et Santa (1962), H. pallidum est une plante vivace (Photo 5.2), cespiteuse, à longues
tiges plus ou moins prostrées. Elle présente des inflorescences en grappes plus ou moins allongées,
atteignant 10 à 15 cm à la fructification, de grandes fleurs rosées ou blanches lavées de pourpre,
parfois blanches et des calices entièrement hispides.
5.3.1.1. L'échantillonnage
L’échantillonnage a été réalisé selon un plan dit mixte qui consiste en une
combinaison entre l’échantillonnage aléatoire et l’échantillonnage systématique (Gounot,
1969). Les stations d’échantillonnage (dix au total) ont été choisies aléatoirement, sur et
autour des déblais minier, grâce à la table des nombres au hasard. Dans chaque station et dans
la perspective d’une comparaison, les prélèvements des spécimens de L. spartum et H.
pallidum et de leurs sols (avec répétition) ont été effectués systématiquement (en 2007) à
chaque fois que L. spartum se retrouvait côte à côte avec H. pallidum.
Les échantillons de plantes et de sols ont été prélevés à la main en s’aidant d’une
pioche et en prenant le soin de prélever tout le sol entourant les racines (rhizosphère). Un total
de 120 prélèvements entre les parties aériennes et souterraines des plantes et les sols a été fait.
Les plantes sont lavées plusieurs fois, d’abord à l’eau du robinet, puis à l’eau distillée.
Elles sont ensuite séchées à l'étuve à 105°C pendant 48h. Après dessiccation, les échantillons
sont homogénéisés dans un broyeur à billes d'agates, ensuite, conservés dans des sachets
étiquetés et numérotés.
Tout le matériel utilisé pour les échantillons de sol et de plantes destinés au dosage des
éléments traces métalliques est préalablement traité. Il est trempé et laissé séjourner pendant
24 heures dans un bain d'acide nitrique (HNO3, 1/5N). Il est ensuite rincé à l'eau pure (Rodier,
1984). Cette précaution est nécessaire pour éviter toute contamination éventuelle des
échantillons.
b) Extraction des éléments traces métalliques
Comme pour les sols, nous avons opté pour la digestion humide dans l'extraction des éléments
traces métalliques à partir de la matrice végétale. La technique consiste à ajouter 25 ml d'eau
régale à 200 mg de feuilles séchées et broyées. On procède ensuite à une digestion à chaud
dans un four micro-onde Les résidus issus de la digestion sont filtrés sur papier filtre sans
cendres dans des fioles de 20 ml.
a) Dosage des éléments traces métalliques dans les sols et dans les plantes
Les dosages de l’antimoine et de l’arsenic dans les extraits des sols et des plantes ont
été faits à l’université de Gand en Belgique par spectromètre de masse de plasma à couplage
inductif (ICP- MS Perkin Elmer DRC-e) pour le dosage de Sb et As dans les plantes et
spectromètre d’émission optique de plasma à couplage inductif (ICP-OES Vista MPX CCD
de Varian) pour le dosage de Sb et As dans les sols .
L'ICP-MS offre la possibilité d'atteindre une plus grande productivité et d’obtenir des limites
de détection plus basses. Elle propose des limites de détection égales ou meilleures que celles
réalisables à l'aide de l’absorption atomique en four graphite (GFAA) avec une productivité
beaucoup plus élevée. Elle peut gérer des matrices d'échantillons complexes avec moins de
perturbations que la flamme et la chaudière de spectroscopie d'absorption atomique (AAS).
L’ICP-MS a, également, des capacités de limites de détection qui sont de loin supérieurs à
ceux obtenus en ICP-OES.
La précision des méthodes a été vérifiée par l’analyse d’un sol de référence standard,
avec six répétitions, CRM052-050 (Trace Metals - limoneux Clay 1) (RTC, USA). La valeur
certifiée pour le Sb est de 37.9 ± 7 µg g-1, la valeur observée est de 37 ± 3.2 µg g-1 et la
récupération est donc de 97.6%. Pour l’As la valeur certifiée est de 33. 4 ± 1.2 µg g-1, la
valeur observée est de 32.2 ± 2.34 µg g-1et donc la récupération est de 96.4 . Cette vérification
a été également effectuée pour les plantes par l’analyse d’un échantillon de référence de
plante INCT-OBTL-5 (oriental basma tobacco leaves) (ICT J, Pologne). Ainsi, pour une
valeur de Sb certifiée de 75.5 ± 12.5 ng g-1 et une valeur observée de 73 ± 2.3 ng g-1, la
récupération est de 96.68. Alors que pour une valeur d’As certifiée de 668 ± 86 ng g-1 et une
valeur observée de 640 ± 52 la récupération est de 95.8 %.
Pour le traitement statistique des données obtenues, d’une part, des statistiques
élémentaires ont été effectuées (calcul de la moyenne et de l’écart type) et des histogrammes
ont été construits pour mieux apprécier les variations des teneurs en Sb et As des sols et des
plantes. D’autre part, une analyse de la variance (ANOVA) a été réalisée pour déterminer la
différence entre l’accumulation du Sb et de l’As par les différentes parties de ces deux espèces
grâce au logiciel Statistica (version 6.0). Enfin, afin de comparer le transfert sol-plante et la
translocation des deux toxiques par les deux espèces, les rapports suivants ont été calculés :
Tableau 5.1: Statistiques élémentaires des éléments traces métalliques (µg g-1) dans les sols
de L. spartum et H. pallidum.
1. L’antimoine
Le tableau 5.1 montre que les teneurs totales en antimoine des sols varient entre un
minimum de 3884 et un maximum de 81446 µg g-1avec une moyenne de 18672.25 µg g-1et un
écart type de 20198.74 pour les sols de L. spartum. Pour les sols de H. pallidum, les teneurs
en antimoine sont pratiquement dans le même ordre de grandeur. Ces dernières oscillent entre
2643 et 67382 µg g-1avec une moyenne de 23481.3 µg g-1 et un écart type de 20498.97.
Il apparaît donc que les sols de ces deux plantes présentent des teneurs moyennes
minimales et maximales en antimoine dépassant de très loin les teneurs normales dans les sols
.données par Li et Thornton (1993) (0.2 à 10 µg g-1) et par Wedepohl (1995) (0.3 µg g-1). Les
concentrations minimales sont inférieures à celles données par Filella et al. (2002b) (1 µg g-1).
Les teneurs totales en antimoine dépassent de loin les teneurs trouvées habituellement
au voisinage des sites miniers (700 µg g-1) (Flynn et al., 2003). En moyenne, elles dépassent
mêmes celles des sites fortement contaminés (500 à 15000 µg g-1) données par Jonhson et al.
(2005).
2. L’arsenic
L’analyse du tableau 5.1 montre que les teneurs en arsenic des sols du L. spartum
varient entre 210 et 3080 µg g-1, avec une moyenne de 846.25 µg g-1et un écart type de
723.05. De même, les teneurs en arsenic des sols de H. pallidum présentent un minimum de
249 µg g-1, un maximum de 2842 µg g-1, une moyenne de 23481.3 µg g-1 et un écart type de
777.43.
Ainsi, les sols de ces deux plantes présentent des teneurs en arsenic très élevées
dépassant les teneurs normales. En effet, selon Mandal et Suzuki (2002), l’arsenic est
naturellement présent dans l’environnement et ses teneurs dans la croûte terrestre sont de
l’ordre de 1 à 3 µg g-1. La concentration moyenne d’arsenic évaluée dans les sols normaux se
situe entre 5 et 6 µg g-1 (Mandal et Suzuki, 2002; Wang et Mulligan, 2006).
1. Concentrations de l’antimoine
Les teneurs en Sb (Tableau 5.2) dans les plantes entières, leurs parties aériennes et
leurs parties souterraines varient d’un minimum de 4.98, 0.76 et 3.51 µgg-1, respectivement, à
un maximum de 117.01, 11.43 et 108.27 µg g-1, respectivement, pour L. spartum. Pour H.
pallidum, elles passent d’un minimum de 43.01, 1.53 et 16.13 µg g-1, respectivement, à un
maximum de 346.10, 263.04 et 186.27 µg g-1, respectivement.
Tableau 5.2: Statistiques élémentaires des teneurs en antimoine (µg g-1) des plantes entières
et de leurs différentes parties chez L. spartum et H. pallidum
Les teneurs en Sb des parties souterraines des deux plantes varient en fonction des
stations d’échantillonnages. Elles sont plus élevées chez H. pallidum que chez L. spartum.
Cette différence entre les deux espèces apparaît très nettement dans la figure 5.1. L’analyse
de la variance (Annexe 5.5) fait apparaitre une différence plus ou moins significative (p =
0.087794) entre les teneurs en Sb des parties souterraines des deux espèces et un effet station
également plus ou moins significatif (p=0.07081).
Sb [µg. g-1] PRPS PA
350,00
L. spartum 256,02 H. pallidum
300,00
250,00
200,00
150,00
100,00 35,25
23,21
50,00 83,49 76,42
-00,23 35,05
00,00 09,99
P 1 P 2 P 3 P 4 P 5 P 6 P 7 P 8 P 9 P10 P 1 P 2 P 3 P 4 P 5 P 6 P 7 P 8 P 9 P 10
S1 S2 S3 S4 S5 S6 S7 S8 S9 S10 S1 S2 S3 S4 S5 S6 S7 S8 S9 S10
-50,00
Stations d'échantillonnage
Figure 5.1 : Teneurs en Sb des parties aériennes et souterraines de L. spartum et d’H. pallidum en
fonction des différentes stations de prélèvements.
De même que pour les parties souterraines, une différence très nette apparait (Fig.5.1)
entre les teneurs en Sb des parties aériennes des deux espèces. Ces teneurs varient également
en fonction des stations d’échantillonnage. L’analyse de la variance (Annexe 5.5) montre une
différence significative (p = 0.009) entre les teneurs en Sb des parties aériennes des deux
espèces et un effet station significatif (p = 0.007).
Par ailleurs, L. spartum (Fig. 5.2 présente des teneurs en As des parties souterraines plus
élevées que celles d’H. pallidum. Ces teneurs varient en fonction des stations
d’échantillonnage pour les deux plantes.
Une différence significative entre les teneurs en As des parties souterraines de L. spartum et
H. pallidum a été révélée par l’analyse de la variance (p = 0.034) (Annexe 5.6). Celle-ci a,
également, mis en évidence un effet station très significatif (p = 0.0009).
As[µg. g-1]
PA
120,00 L. spartum PS H. pallidum
08,75 44,29
100,00
80,00
60,00
97,84
40,00
62,81
20,00
01,44 03,36
07,70 05,66
00,00
P 1 P 2 P 3 P 4 P 5 P 6 P 7 P 8 P 9 P10 P 1 P 2 P 3 P 4 P 5 P 6 P 7 P 8 P 9 P 10
S1 S2 S3 S4 S5 S6 S7 S8 S9 S10 S1 S2 S3 S4 S5 S6 S7 S8 S9 S10
Stations d'échantillonnage
La concentration de l’As dans les parties aériennes (Fig.5.2) d’H. pallidum est plus
élevée que dans celles de L. spartum. En effet, le maximum atteint pour la première espèce
est de 44.29 µg g-1 alors qu’il n’est que de 11.27 µg g-1 pour la deuxième espèce. Cette
différence de concentration en As entre les parties aériennes des deux espèces est significative
(p = 0.015). Elle a été mise en évidence par l’analyse de la variance présentée en annexe 5.7.
Les concentrations en As des parties aériennes des deux plantes varient également en
fonction des stations d’échantillonnage. Cet effet station a été mis en évidence par l’analyse
de la variance (Annexe 5.6).
Les minimums, les maximums, les moyennes et les écarts types des rapports
d’accumulation du Sb et As par L. spartum et H. pallidum sont portés dans le tableau 5.4.
Les rapports d’accumulation du Sb sont plus élevés pour H. pallidum que pour L.
spartum (Fig.5.3). Ils varient, pour la première plante de 0.003 à 0.044 avec une moyenne de
0.011 et un écart type de 0.009 (Tableau.5.4). Pour la deuxième plante, ils passent d’un
minimum de 0.001 à un maximum de 0.013, une moyenne de 0.003 et un écart type de 0.003.
Ainsi, H. pallidum accumule beaucoup plus le Sb que L. spartum.
Plusieurs études ont montré que le rapport d’accumulation des plantes était en
moyenne de 0.02 pour le Sb (Rached-Mosbah et al., 1992; Baroni et al., 2000; Hammel et al.,
2000; De Gregori et al.,2004; Pratas et al., 2005; Murciego Murciego,2007; Dominguez et al.,
2008).
RA
0,03500
H. pallidum
0,03000
0,030
0,02500
0,02000
0,01500
0,01000 0,008
0,004
0,00500
0,001
0,00000
P1 P2 P3 P4 P5 P6 P7 P8 P9 P10 P1 P2 P3 P4 P5 P6 P7 P8 P9 P 10
Stations d'échantillonnage
Figure 5.3 : Rapports d’accumulation (RA) du Sb dans les plantes en fonction des stations
d’échantillonnage.
Contrairement au Sb, les rapports d’accumulation de l’As sont plus élevés pour L.
spartum que pour H. pallidum (Fig.5.4). Ils varient, pour la première plante de 0.009 à 0.195
avec une moyenne de 0.056 et un écart type de 0.042 (Tableau 5.4). Pour la deuxième plante,
ils passent d’un minimum de 0.006 à un maximum de 0.115, une moyenne de 0.036 et un
écart type de 0.03. Ainsi, H. pallidum accumule beaucoup moins l’As, par rapport à ses
teneurs dans les sols, que L. spartum.
RA
0,140 L. spartum H. pallidum
0,116
0,120
0,100
0,078
0,080
0,060
0,040 0,029
0,020 0,009
0,000
P 1 P 2 P 3 P 4 P 5 P 6 P 7 P 8 P 9 P10 P 1 P 2 P 3 P 4 P 5 P 6 P 7 P 8 P 9 P 10
Figure 5.4 : Rapport d’accumulation (RA) de l’As dans les plantes en fonction des stations
d’échantillonnage.
L’étude de la figure 5.4 et du tableau 5.4 montre que les rapports d’accumulation de l’As
dans les deux plantes sont plus importants que ceux du Sb.
Les figures 5.3 et 5.4 montrent que les rapports d’accumulation du Sb et de l’As des deux
plantes varient d’une station d’échantillonnage à une autre.
Les différences de prélèvement métallique entre les espèces ont déjà été rapportées
auparavant par de nombreux auteurs. Selon Kabata-Pendias et Pendias (2001), les espèces
végétales présentent des spécificités quant à la quantité et au type d’ETM prélevés. Comme
l’expliquent ces auteurs, de telles spécificités sont dues au fait que les espèces végétales
peuvent présenter soit une absorption passive des ETM, soit un contrôle de l’absorption ou du
rejet de ceux-ci par des réactions physiologiques appropriées. Elles peuvent également avoir
développé des stratégies de défense cellulaire contre la toxicité des ETM leur permettant de
tolérer ceux-ci dans leurs tissus à de grandes concentrations. De telles aptitudes ont d’ailleurs
été rapportées par Benhamdi et al. (2014) qui ont mis en évidence des différences
significatives entre H. pallidum et L. spartum du point de vue des activités antioxydantes
qu’elles ont développé et qui sont liées significativement à la présence de concentrations
élevées des deux métalloïdes étudiés dans les sols.
La faculté des espèces végétales à prélever ou non de grandes quantités d’ETM peut
également être la conséquence de leurs associations à des microorganismes spécifiques de
leurs rhizosphères. En effet, selon Cuypers et al. (2013), les racines des plantes peuvent
interagir avec les microorganismes de la rhizosphère pour augmenter la biodisponibilité des
minéraux et les transformer en une forme appropriée pour l'absorption par les transporteurs.
Ceci est probablement le cas de H. pallidum et de L. spartum de la zone minière d’Ain
Babouche, puisque Meghnous et Meghraoui (2011) ont mis en évidence des souches
fongiques spécifiques à la rhizosphère de chacune des deux espèces en question. Ainsi,
Aspergillus sp2, Gliomastix, Humicola et Trichothecium sont spécifiques à la rhizosphère de
H. pallidum, alors que Aspergillus fumigatus, Penicillium et Trichoderma le sont à celle de L.
spartum. Les variations observées dans les teneurs en Sb et en As des deux plantes et dans
leurs rapports d’accumulations, en fonction des stations d’échantillonnage, peuvent
s’expliquer non seulement par la variation des concentrations de ces métalloïdes dans les sols
mais aussi par celle des autres paramètres physico-chimiques et biologiques qui peuvent agir
sur le prélèvement métallique des deux espèces.
Les rapports de translocation du Sb sont plus élevés pour H. pallidum que pour L.
spartum (Fig.5.5). Ils passent, pour la première plante de 0.021 à 4.57 avec une moyenne de
1.209 et un écart type de 1.38 (Tableau 5.5). Pour la deuxième plante, les rapports de
translocations passent de 0.017 à 0.839 avec une moyenne de 0.1736 et un écart type de
0.1955. Ainsi, H. pallidum transfert beaucoup plus le Sb de ses parties souterraines vers ses
parties aériennes que L. spartum.
RT
3,000 H. pallidum 2,660
2,500
2,000
1,500
1,000
0,580
0,500
0,196
0,026
0,000
P 1 P 2 P 3 P 4 P 5 P 6 P 7 P 8 P 9 P10 P 1 P 2 P 3 P 4 P 5 P 6 P 7 P 8 P 9 P 10
Stations d'échantillonnage
Les rapports de translocation d’As sont plus élevés pour H. pallidum que pour L.
spartum (Fig.5.6). Ils varient, pour la première plante de 0.195 à 4.409 avec une moyenne de
1.021 et un écart type de 1.233 (Tableau 5.5). Pour la deuxième plante, ils passent d’un
minimum de 0.017 à un maximum de 0.839, avec une moyenne de 0.168 et un écart type de
0.195. Ainsi, H. pallidum transfert également beaucoup plus l’As de ses racines vers
ses parties aériennes que L. spartum.
Les figures 5.5 et 5.6 montrent également que les rapports de translocation du Sb et de
l’As des deux plantes varient en fonction des stations d’échantillonnage.
Ainsi, L. spartum semble être adaptée à la toxicité en limitant la translocation des deux
métalloïdes vers ses parties supérieures, tandis que H. pallidum serait adaptée en tolérant ces
derniers à des concentrations plus élevées dans ses parties aériennes.
Selon Conesa et al. (2011) les espèces dont les rapports de translocation sont
supérieurs à 1 sont considérées comme hyperaccumulatrices. Ceci est justement le cas de H.
pallidum dont les RT dépassent cette valeur dans plusieurs stations. Selon Ghosh et Singh
(2005 a, b), une telle aptitude est considérée comme avantageuse pour la phytoextraction car
elle permet de réduire la concentration des métaux dans le milieu tout en réduisant leur
toxicité dans les racines. D’après ces mêmes auteurs la translocation des métaux des parties
souterraines vers les parties aériennes serait l’un des mécanismes de résistance des plantes aux
concentrations métalliques élevées des sols.
Les plantes qui présentent des rapports de translocation inférieurs à 1, telles que L.
spartum, sont dites « plantes d’exclusion » (Conesa et al., 2011). Selon ces auteurs, de telles
plantes, lorsqu’elles présentent en même temps un rapport d’accumulation faible et des
systèmes racinaires bien développés, ce qui est le cas de L. spartum, sont idéales pour le
« phytomanagement » des sols pollués par les métaux lourds en diminuant leur lessivage.
Les graines des deux espèces ont été d’abord désinfectées à l’eau de javel pendant 30
minutes et lavées ensuite plusieurs fois, d’abord à l’eau du robinet, puis à l’eau distillée.
Une fois désinfectées, les graines ont été mises à germer dans des boites de Pétri (à raison
de 10 graines par boite), sur du coton imbibé avec de l’eau distillée. Un choc thermique a été
nécessaire pour lever la dormance. Pour ceci, les boites ont été mises au réfrigérateur pendant
3 jours (vernalisation).
Tous d’abord, un milieu de base contenant les macroéléments essentiels (0.076 g L-1
de N, 0.083 g L-1 de K et 0.028 g L-1 de P) a été préparé. Dans un premier temps, sept milieux
de culture ont été préparés en ajoutant, au milieu de base, des quantités croissantes d'antimoine
(0, 5, 10, 20, 40, 50 et 70 µg ml-1) sous forme de tartrate d'antimoine (K(SbO) C4H406), utilisé
en raison de sa grande solubilité.
Dans un second temps, des concentrations croissantes d’arsenic (0, 10, 50, 100, 300 et
500 µg ml-1), obtenues à partir d’une solution mère à 1000 µg ml-1 d’As, ont été ajoutées au
milieu de base pour préparer six milieux de culture. Le pH de tous les milieux a été réajusté
entre 7 et 7.55 avec NaOH (2N) goutte à goutte. Les milieux ainsi préparés sont répartis sur
des tubes à essai, à raison de 5 tubes par milieu de culture.
5.4.1.5. La mise en culture
Après germination, une seule graine est ensemencée par tube à essai. Les tubes sont
placés ensuite dans une chambre de culture à 22 °C constants, dont le flux lumineux est assuré
par des lampes halogènes de 100 W, avec une photopériode de 12 heures.
Le traitement statistique des données obtenues a consisté d’une part à faire des
statistiques élémentaires (calcul de la moyenne et de l’écart type) et à réaliser des courbes de
croissance pour mieux faire ressortir l’effet de l’antimoine et de l’arsenic sur la croissance du
L. spartum et d’H. pallidum.
Ti =------------------------------------------------------------------------------------- X 100
Les moyennes et les écarts types des longueurs des parties souterraines et des parties
aériennes de L. spartum et de H. pallidum sont portés dans l’annexe 5.7. Les résultats de
l’ANOVA se trouvent dans l’annexe 5.8.
7 (a) 8 (b)
6 7
6
longueurs moyenne (cm)
longueurs moyenne (cm)
5
5
4
4
3
3
2
2
1 1
0 0
t0 t1 t2 t3 t4 t0 t1 t2 t3 t4
temps (semaines) temps (semaines)
Ainsi, la vitesse de croissance des racines du L. spartum est rapide dès la première
semaine de la mise en culture (temps t1) et continue jusqu’à la fin de l’expérimentation pour
les milieux à faibles concentrations en Sb. Par contre, pour H. pallidum cette vitesse n’est
importante qu’à la deuxième semaine de mise en culture (temps t2). Pour les milieux de
cultures à fortes concentrations (40, 50 et 70 µg ml-1) elle est freinée à partir de la troisième
semaine de mise en culture (temps t3) pour les deux espèces.
2. Indice de tolérance
L’indice de tolérance, présenté dans le tableau 5.6, permet de mieux rendre compte de
l’action du toxique sur la croissance des racines de L. spartum et sur celles d’H. pallidum pour
les différentes concentrations d’antimoine.
Tableau 5.6 : Indices de tolérance de L. spartum et d’H. pallidum pour les différentes
concentrations en antimoine du milieu
5 75.93% 82.51%
10 65.76% 67.05%
20 26.61% 25.08%
40 11.18% 11.11%
50 9.66% 10.78%
70 9.49% 10.62%
Ainsi, comme on le constate sur le tableau 5.6, les indices de tolérance des individus
de L. spartum et de H. pallidum, se développant sur les milieux contenant 5 et 10 µg ml-1 de
Sb, atteignent des valeurs moyennes élevées, supérieures à 50% (respectivement : 75.93% et
82.51% pour 5 µg ml-1 ; 65.76 et 67.05 % pour 10 µg ml-1). Mais, ils diminuent fortement
pour les concentrations supérieures à 10 µg ml-1 de Sb.
D’une manière globale, il apparaît que l’indice de tolérance du L. spartum est inférieur
à celui d’H. pallidum dont la tolérance, en particulier aux fortes teneurs en antimoine (50 et
70 µg g-1), lui est un peu supérieure. H. pallidum semble donc plus tolérante à la présence
d’antimoine dans le milieu que L. spartum.
Les longueurs moyennes des parties aériennes du L. spartum se développant sur les
milieux à 5 et 10 µg g-1 de Sb sont plus importantes que celle du milieu témoin dès la
deuxième semaine de mise en culture (temps t2). Par contre, celles d’H. pallidum se
développant sur les mêmes milieux sont importantes mais restent inférieures à celles du
témoin.
8 1,8
(a) (
(b)
7 1,6
1,4
Longueurs moyennes (cm)
6
5 1,2
4
1
0,8
3
0,6
2
0,4
1 0,2
0 0
t0 t1 t2 t3 t4
t0 t1 t2 t3 t4
temps (semaines)
temps (semaines)
Figure 5.8: Croissance des parties aériennes en fonction du temps et des concentrations en
Sb du milieu (a : L. spartum, b : H. pallidum).
Par ailleurs, pour les deux espèces, les plantes croissant sur les milieux à 20, 40, 50 et
70 µg g-1 de Sb ont une très faible croissance des parties aériennes. Mais cette diminution de
la croissance par rapport à celle observée en milieux à faibles concentrations, n’apparaît qu’à
partir de la deuxième semaine de mise en culture (temps t2) pour L. spartum et à partir de la
troisième semaine de mise en culture (temps t3) pour H. pallidum.
La croissance des parties aériennes augmente avec le temps, pour toutes les
concentrations en Sb. La vitesse de croissance est élevée (croissance rapide) dès le premier
jour de mise en culture (temps t0) pour H. pallidum alors que pour le L. spartum elle ne
devient élevée qu’à partir de la première semaine de mise en culture (temps t1). Un freinage
de cette croissance est aperçu à la deuxième semaine de mise en culture (temps t2) pour L.
spartum, alors que pour H. pallidum ce n’est que vers la troisième semaine de mise en culture
(temps t3) que la vitesse de croissance est ralentie.
L’analyse de la variance montre, qu’à l’inverse de ce qui a été obtenu pour la partie
souterraine, le Sb n’a aucun effet inhibiteur significatif (p<0.72) sur la croissance de la partie
aérienne de L. spartum. Cependant, pour H. pallidum, un effet inhibiteur plus ou moins
significatif (p<0.07) du Sb sur la croissance de sa partie aérienne est mis en évidence (Annexe
5.9).
3. Comparaison des croissances des racines et des parties aériennes en fonction des
concentrations en Sb du milieu
La figure 5.14 montre qu’après un mois de mise en culture la croissance des plantes
entières des deux espèces diminue en fonction de la concentration du milieu en Sb. La toxicité
du Sb apparaît plus élevée sur les racines que sur les parties aériennes de ces deux espèces. En
effet, pour L. spartum, le Sb provoque, en moyenne, une diminution de la longueur de la
racine plus élevée que celle de la partie aérienne (avec des pourcentages respectifs de l’ordre
de 59.15% et 12.63%). Ceci pourrait être expliqué par le fait que cette espèce accumule
l’antimoine dans ses parties souterraines beaucoup plus que dans ses parties aériennes ce qui,
en y provoquant un stress oxydatif, entrainerait la diminution de leur croissance.
Pour H. pallidum, l’antimoine provoque également, en moyenne, une diminution plus
importante de la longueur de la racine que de la partie aérienne (avec des taux respectifs de
l’ordre de 60.8% et 27.08%). L’effet toxique du Sb ne peut expliquer à lui seul un tel résultat
puisque cette espèce a tendance à accumuler beaucoup plus de Sb dans ses parties aériennes
que souterraines. Elle supporterait des concentrations élevées de ce toxique, tout en parvenant
à croître normalement, du fait qu’elle serait, probablement, comme le suggèrent Paul-Henri
et al. (1998), capable d’éliminer les éléments toxiques de ses tissus par leur volatilisation, ou
par leur excrétion par voie aérienne. Une telle aptitude peut être également, comme
l’expliquent Baker et Walter (1989), la conséquence d’un processus de résistance selon
lequel la plante développe un mécanisme de tolérance biochimique rendant les éléments non
toxiques par chélation.
En comparant les résultats des tests de croissance (en milieux contrôlés) obtenus pour
H. pallidum avec ceux obtenus par Rached-Mosbah (1993) pour la population des déblais de
mine, il apparaît qu’au bout de deux semaines de culture et pour les concentrations 5, 10, 20
et 40 µg g-1 de Sb, la diminution moyenne de croissance des racines et des parties aériennes
(5.1% et 11.21% respectivement) est bien plus faible que celle observée par Rached-Mosbah
en 1993 (20.45% et 12.77% respectivement). Ceci serait dû probablement au fait qu’au bout
de vingt ans la population des déblais de mine de cette espèce soit devenue plus résistante à
l’antimoine.
14
(a) (b)(a)
9
12 +11,9% +26,4% 8
-13,3%
7
10
--16,7% -17,3%
moyenne (cm)
6
longueurs moyennes (cm)
8 5 -32,8%
-25,6 Pa Pa
longueurs moyennes
-20,6% -30,8
6 -26,9% 4
-32,8% Ra -34,% -34,5% Ra
-16,6% -41% 3 -65,4% -32,1%
4 -78,6%-81% 90,4%
-65,3% 2
2 -79,1%
-80,1% -81% 1
0 0
temps 0 5 10 20 40 50 70 Sb
0 5 10 20 40 50 70 -1
µg ml Sb µg ml Sb
-1
Figure 5.9: Comparaison des longueurs des parties aériennes (Pa) et souterraines (Ra)
au dernier jour de mise en culture en fonction des concentrations en Sb du milieu
(a : L. spartum, b : H. pallidum).
Au dernier jour de la mise en culture, H. pallidum devient totalement brunâtre dans les
milieux à fortes concentrations d’antimoine (Photo 5.5). Ceci n’est pas le cas de L. spartum
(Photo 5.6) bien qu’une diminution de la croissance de ses racines dans les milieux les plus
contaminés soit évidente.
0 µg ml-1 10 µg ml-1 50 µg ml-1 70 µg ml-1
Photo 5.5 : H. pallidum après un mois de mise en culture en milieux à faibles et fortes
concentrations de Sb.
Photo 5.6 : L. spartum après un mois de mise en culture en milieux à faibles et fortes
concentrations de Sb.
5.4.2.2. Effets de l’Arsenic sur la croissance des deux plantes
Les moyennes et les écarts types des moyennes des longueurs des parties
souterraines et aériennes du L. spartum et H. pallidum en fonction des concentrations en
arsenic du milieu sont portés en annexe 5.9. Les résultats de l’ANOVA sont portés en
annexe 5.10.
(a) (b)
8
7
7
6
6
5
5
4
4
3
3
2
2
1 1
0 0
t0 t1 t2 t3 t4 t0 t1 t2 t3 t4
Les concentrations de 100, 300 et 500 µg ml-1 d’As semblent être très élevées car
empêchant complètement la croissance des racines d’H. pallidum. L’arsenic, aurait donc un
effet négatif sur la croissance de la partie souterraine d’H. pallidum. D’ailleurs, l’analyse de la
variance montre un effet très significatif (p<0.00) des différentes concentrations d’As sur les
longueurs des parties souterraines (Annexe 5.10).
La figure 5.10 montre que, pour L. spartum, la croissance des parties souterraines, sur
milieu témoin, augmente en fonction du temps et elle devient très rapide à partir de la
deuxième semaine de mise en culture (temps t1). Sur les autres milieux enrichis de toxique,
aucun allongement n’a été observé et ceci durant toute la période de culture. L. spartum
semble ne pas résister à la présence d’arsenic dans le milieu, même aux plus faibles
concentrations.
1. Indice de tolérance
L’allongement des racines en milieu toxique par rapport à celui des racines en milieu
normal illustre mieux l’action du toxique sur les deux espèces (Tableau 5.7). Il permet de
remarquer que les racines des individus d’H. pallidum croissant sur des milieux enrichis par le
toxique (10, 50, 100, 300 et 500 µg ml-1) n’atteignent en moyenne que 52.17% ; 3.13% ;
1.74% ; 1.74% et 1.21% respectivement de la longueur moyenne des racines des individus
témoins. D’une façon générale, il apparaît que l’indice de tolérance de cette espèce diminue
avec les concentrations du milieu en toxique et qu’elle n’est tolérante qu’à la concentration
de 10 µg g-1 d’As. Par contre, L. spartum ne tolère pas du tout la présence d’As dans le
milieu. En effet, cette espèce présente un indice de tolérance de 0% pour toutes les
concentrations du milieu en arsenic. Il semblerait qu’H. pallidum soit plus tolérante à la
présence d’arsenic dans le milieu que L. spartum. Ceci pourrait être probablement expliqué
par le fait que cette espèce accumule beaucoup plus l’As qu’H. pallidum dans ses racines
(cf. chap. 5.3.). Ceci est probablement accentué en milieu expérimentale, ce qui provoque une
plus grande intoxication des cellules racinaires et donc l’arrêt de leur croissance. En effet,
selon Conesa et al. (2007b), les plants de L. spartum croissant en chambre de culture
présentent des concentrations métalliques, dont l’As, beaucoup plus élevées que ceux prélevés
au champ.
Tableau 5.7 : Indices de tolérance du Lygeum spartum L. et d’Hedysarum pallidum Desf.,
pour les différentes concentrations en arsenic du milieu
10 0.00% 52.17%
50 0.00% 3.13%
L’analyse de la figure 5.11 montre, que les élongations des parties aériennes
d’H. pallidum, au même titre que celles des parties souterraines, augmentent clairement en
fonction du temps et diffèrent selon les concentrations du milieu en As. . Cette constatation se
vérifie dès la première semaine (temps t1) de mise en culture et persiste durant toute
l’expérimentation. Cependant, la croissance des parties aériennes des individus se
développant sur le milieu témoin est moins importante que celle de ceux se développant sur
milieux à 10 µg ml-1 d’As. Ceci peut être dû soit au fait que l’arsenic, à cette dose, stimulerait
la croissance des parties aériennes d’H. pallidum, soit au fait que l’arsenic n’aurait aucun effet
néfaste sur celles-ci et que cette augmentation, par rapport au témoin, serait due à un
polymorphisme génétique et donc à une importante variation intraspécifique (Rached –
Mosbah, 1993).
(a) (b)
8 2
7 1,8
1,6
6 1,4
5 1,2
4 1
3 0,8
2 0,6
0,4
1 0,2
0 0
t0 t1 t2 t3 t4 t0 t1 t2 t3 t4
temps (semaines) temps (semaines)
Figure 5.11: Croissance des parties aériennes en fonction du temps et des concentrations en
As du milieu (a : Lygeum spartum L., b : Hedysarum pallidum Desf.).
Les plantes d’H. pallidum croissant sur les milieux à 50 et 100 µg ml-1 d’As ont une
croissance très faible des parties aériennes. Cette dernière s’arrête complètement à partir de la
deuxième semaine de mise en culture. Pour cette espèce, de même que pour la partie
racinaire, les plantes se développant sur les milieux de culture contenant 300 et 500 µg g-1
d’arsenic ne présentent aucune croissance des parties aériennes et ceci durant toute
l’expérimentation.
L’effet des différentes concentrations de l’arsenic sur les parties aériennes d’H.
pallidum et de L. spartum est également mis en évidence par l’analyse de la variance (Annexe
5.6). Cette dernière montre un effet très Significatif des différentes concentrations d’As sur la
longueur des parties aériennes de ces deux plantes (respectivement p<0.0000 et p<0.0027).
La figure 5.12 fait apparaître, qu’après un mois de mise en culture, la croissance des plantes
entières des deux espèces diminue en fonction de la concentration du milieu en
arsenic, l’arsenic provoque une diminution moyenne des longueurs des racines de L. spartum
et de H. pallidum plus importante que celle de leurs parties aériennes (89.72% et 74.77%
respectivement pour L. spartum et 90% et 78.61% respectivement pour H. pallidum). Ainsi, la
toxicité de l’arsenic apparaît plus élevée sur les racines des deux espèces que sur leurs parties
aériennes.
(a) (b)
16 9
14 8
12
7
6 +8,5%
10
5
8 Pa Pa
4 -44,4%
6 3
Ra Ra
4 -73,8% 2 -65,7% -71,4% -73,7%
-75,2% -74,6%-74,4%-75,6% -87,6% -73,7%
2 1 -88,8% -88,7% -90%
-88,7% -90,2% -89,6%-89,4% -90,6%
0
0
Figure 5.12: Comparaison des longueurs des parties aériennes (Pa) et souterraines (Ra) au
dernier jour de mise en culture en fonction des concentrations en As du milieu
En outre, l’arsenic provoque une diminution plus importante de la croissance de ces deux
espèces que celle produite par l’antimoine. De plus, le brunissement des plantes à la fin de la
mise en culture apparait, dès les plus faibles concentrations, avec l’As mais pas avec le Sb
(Photo 6.5 et 6.6).
5.5. Conclusion
Les deux espèces étudiées, H. pallidum (une Fabacée) et L. spartum (une Poacée),
présentent des stratégies d’adaptation différentes vis-à-vis des éléments toxiques en présence.
Alors que la première espèce tolère de grandes quantités de Sb aussi bien dans ses parties
aériennes que souterraines, la deuxième espèce en supporte de plus faibles et beaucoup plus
dans ses racines. Les deux espèces ne supportent que de faibles concentrations de l’As dans
leurs tissus, mais, H. pallidum en tolère beaucoup plus dans ses parties aériennes que L.
spartum qui l’accumule en très grandes quantités dans ses racines. H. pallidum permet le
transfert des deux métalloïdes en quantités importantes vers ses parties aériennes, alors que L.
spartum restreint une telle translocation en accumulant les deux éléments, particulièrement
l’As, beaucoup plus dans ses parties souterraines que aériennes.
Les tests de croissance montrent, qu’en milieux contrôlés, les deux espèces montrent
une très grande sensibilité à des teneurs en Sb et As extrêmement faibles alors que dans les
conditions naturelles elles parviennent à se développer sur des sols présentant des
concentrations extraordinairement élevées en ces deux éléments. Un tel fait s’explique par la
plus grande solubilité, et donc la plus grande toxicité, des formes chimiques utilisées pour les
deux métalloïdes. Cependant, il apparaît que les deux espèces sont beaucoup plus tolérantes à
la présence du Sb dans le milieu qu’à celle de l’As qui a une plus importante action toxique
sur L. spartum que sur H. pallidum.
De tels résultats montrent que H. pallidum, de par son aptitude à transloquer de plus
grandes quantités de Sb et d’As vers ses parties aériennes et d’être plus résistante aux deux
éléments en milieux contrôlés, serait beaucoup plus indiquée pour la phytoextraction des sols
métallifères présentant les deux métalloïdes en même temps. Par contre, L. spartum
conviendrait beaucoup plus pour la phytostabilisation des sols en question.
CONCLUSION GENERALE
L’ancienne exploitation du minerai d’antimoine du Djebel Hamimat, en générant
d’importants déblais, est à l’origine d’une pollution majeure des sols des bordures de l’oued
Dahimine qui prend naissance dans cette montagne. Cette situation, qui concerne également
l’arsenic, le plomb et le zinc, atteint en contrebas de la mine des niveaux alarmants qui
attestent d’un risque certain de son extension en aval, vers le bas de la vallée et vers le barrage
de déversement de l’oued Dahimine. Une intervention de dépollution du site et/ou de
stabilisation de ces éléments métalliques s’avère donc nécessaire.
La présence d’antimoine dans les sols étudiés, caractérisés par des taux très élevés de
calcaire, s’accompagne significativement de celle de l’arsenic, du plomb, du cadmium et du
cobalt, ce qui atteste probablement d’une origine minéralogique commune. Cette situation est
favorisée dans le site par l’augmentation des teneurs en sodium échangeable, en sable et en
matière organique et par la diminution parallèle de celles du potassium échangeable, du zinc,
du phosphore total et de l’azote total. Il apparait donc que l’antimoine est d’autant plus retenu
dans les sols que ceux-ci sont riches en matière organique, en sable et en sodium échangeable
et pauvres en potassium échangeable, en zinc, en phosphore total et en azote total. A l’inverse,
l’antimoine se concentre d’autant moins dans les sols que ceux-ci contiennent de faibles
teneurs en sodium échangeable, en sable et en matière organique et des concentrations élevées
en potassium échangeable, en zinc, en phosphore total et en azote total. Ni le pH, ni la CEC,
ni la salinité et ni les éléments fins du sol ne semblent avoir d’impact sur la rétention négative
ou positive de ce métalloïde.
Ainsi, Il découle des résultats obtenus que les espèces végétales et/ou microbiennes
favorisant l’augmentation des concentrations de sodium échangeable, de matière organique et
de sable, parallèlement à la diminution des teneurs en potassium échangeable, en zinc, en
phosphore total et en azote total, seraient plus intéressantes à utiliser dans la stabilisation des
sols pollués par l’antimoine que celles qui entrainent une diminution des premiers paramètres
et/ou un accroissement des derniers. Cependant, cette dernière catégorie de végétaux, en
permettant probablement une mobilité accrue de l’antimoine, serait plus indiquée que les
premières dans la phytoextraction du métalloïde à partir des déblais de mines et des sols qui
en sont pollués.
L’analyse des relations végétation-milieu des bordures de l’oued Dahimine, par le
biais des régressions multiples pas à pas, a mis en évidence l’existence d’espèces fortement
liées à l’augmentation des concentrations en antimoine et en azote total dans les sols et à la
diminution de leurs teneurs en matière organique. Il s’agit de B. madritensis, M. laciniata, E.
caput-medusae et A. hirsuta. Ces espèces s’installent donc d’autant mieux que les sols sont
riches en antimoine et en azote total et pauvres en matière organique. Ainsi, tout en préférant
les sols les plus antimonieux, elles semblent probablement capables de contribuer à leur
enrichissement en azote total et à la diminution de leurs taux de matière organique, en raison
d’une décomposition rapide de leurs tissus. Elles ne seraient donc pas indiquées pour la
phytostabilisation des sols pollués par l’antimoine. Mais, en étant fortement résistantes à la
présence de quantités très élevées de ce métalloïde dans les sols et en favorisant
l’augmentation des taux d’azote dans les sols et la diminution de ceux de la matière
organique, elles permettraient une plus grande mobilité de l’antimoine et donc son
prélèvement par leurs racines, ce qui les rendrait plus aptes à la phytoextraction de
l’antimoine. Il en serait de même de C. arvensis, A. elongatum et L. ramosissimum qui,
préférantes des sols les plus riches en plomb et en azote total et les plus pauvres en matière
organique, sont indifférentes à l’antimoine. Elles sont pseudométallophytes et donc tolérantes
aussi bien de ses fortes que de ses faibles concentrations dans le milieu. Ceci pourrait être
également le cas d’A. arvensis qui, du fait qu’elle soit très liée aux taux élevés d’azote total
tout en étant indifférente à l’antimoine et aux taux de matière organique du milieu, pourrait,
sans avoir d’impact sur ce dernier paramètre, favoriser la mobilité et donc le prélèvement du
métalloïde du métalloïde.
La régression multiple pas à pas a également fait apparaître des espèces fortement
liées à la présence de concentrations élevées d’antimoine sans l’être aux paramètres qui en
favorisent ou défavorisent la rétention dans les sols. Il s’agit de L. spartum et D. glomerata.
La première espèce est d’autant plus présente que les sols contiennent des teneurs élevées en
antimoine et faibles en arsenic.
La grande majorité des espèces végétales rencontrées dans la zone étudiée ne semble
être affectée, ni positivement ni négativement, par les fortes concentrations d’antimoine ou
par les paramètres du sol qui en favorisent la rétention. Elles seraient pseudométallophytes et
indifférentes aux teneurs des sols en matière organique, en azote total, en sodium
échangeable, en potassium échangeable, en phosphore total et en zinc. Elles seraient aussi
capables de favoriser leur augmentation ou leur diminution suivant leur localisation. Ces
espèces, ainsi que les précédentes, pourraient se révéler intéressantes aussi bien pour la
phytoextraction de l’antimoine à partir des sols qui en sont pollués que pour leur
phytostabilisation.
L’utilisation des espèces pour la phytoextraction de l’antimoine ne serait possible que
dans le cas où elles s’avèreraient en être accumulatrices, la situation est inverse pour celles
qui seraient intéressantes pour la phytostabilisation.
Lygeum spartum, adaptée aux sols les plus riches en antimoine mais contenant les plus
faibles concentrations en arsenic et Hedysarum pallidum, indifférente à la présence des deux
métalloïdes, toutes deux proliférant sur les déblais de mines, montrent des stratégies de
tolérance différentes vis-à-vis des sols pollués en antimoine et en arsenic. Alors que L.
spartum ne concentre que de faibles quantités des deux métalloïdes dans ses parties aériennes
en les bloquant dans ses racines, H. pallidum en accumule dans ses parties aériennes jusqu’à
quatre fois plus que dans ses parties souterraines. En conditions expérimentales contrôlées,
cette dernière espèce montre une plus grande résistance vis-à-vis des deux métalloïdes que L.
spartum dont la croissance racinaire est même totalement inhibée par la présence d’arsenic
dans le milieu.
La faculté de H. pallidum à se développer indépendamment de la teneur des sols en
antimoine et en arsenic, son aptitude à transloquer de grandes quantités de ces métaux vers ses
parties aériennes et à résister expérimentalement à leur présence en concentrations élevées
dans le milieu, en font une bonne candidate pour la remédiation par phytoextraction des sols
pollués par l’antimoine et l’arsenic. Malgré son adaptation aux sols riches en antimoine, il en
va autrement pour L. spartum pour plusieurs raisons : elle ne tolère pas les sols qui
contiennent en même temps des teneurs élevées en arsenic, elle ne résiste pas à ce métalloïde
en conditions expérimentales et elle n’en permet, en même temps que l’antimoine, très peu la
translocation vers ses parties aériennes. Elle ne conviendrait donc pas pour un tel objectif.
Cependant, cette espèce pourrait répondre à un programme de remédiation, par
phytostabillisation des sols contenant de fortes teneurs d’antimoine associées à de faibles
teneurs en arsenic, dans la mesure où seuls les végétaux les moins accumulateurs des deux
métalloïdes sont sélectionnés pour leur utilisation dans ce but.
Ainsi, la connaissance des facteurs du sol intervenant dans la rétention des
métalloïdes, particulièrement en milieu calcaire qui restent encore peu étudiés par cet aspect,
s’avère être d’un grand intérêt pour le choix des techniques de bioremédiation et des espèces
végétales ou microbiennes pouvant être utilisées dans cette voie. Il en est de même de l’étude
des relations et des interactions entre les espèces végétales et les paramètres physico-
chimiques du sol qui permettent de mieux sélectionner les espèces au meilleur potentiel
d’application dans les programmes de bioremediation.
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