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LSMA421

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Aspects différentiels

—–
LSMA421

Christophe Chalons et Yvan Martel

Année 2023-2024
UVSQ
Préface

Ce document a été rédigé en 2023 par Y. Martel à partir de notes de cours de


C. Chalons, elles-mêmes inspirées de notes personnelles et de cours précédents de
— Ph. Cieutat, pour la partie systèmes différentiels,
— G. Lavau (cours en ligne),
— J.-P. Truc.
Les ouvrages suivants ont également été utilisés :
— Algèbre bilinéaire et géométrie, Tome 4 du cours de mathématiques de J.M.
Arnaudiès et H. Fraysse (Dunod Université, 1990)
— Mathématiques, DEUG A, E. Azoulay et J. Avignant (Ediscience, 1990).
— Analyse 2, F. Cottet-Emard (de boeck, 2006).
— Systèmes dynamiques, cours de l’École polytechnique de C. Viterbo.
— Mathématiques, Tome 2, Analyse, P. Thuillier et J.-C. Belloc (Masson, 1977).
Les exercices proviennent en grande partie d’un travail collectif des enseignants de
travaux dirigés de l’UVSQ depuis la création du cours.

i
Table des matières

1 Systèmes différentiels linéaires 1


1.1 Équations différentielles linéaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
1.2 Équations différentielles linéaires, du second ordre et à coefficients
constants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
1.3 Systèmes différentiels linéaires d’ordre 1 . . . . . . . . . . . . . . . 6
1.4 Systèmes autonomes de dimension 2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
1.5 Systèmes non homogènes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
1.6 Exponentielle de matrice . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
1.7 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

2 Équations et systèmes différentiels non linéaires 23


2.1 Équations différentielles non linéaires . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
2.2 Systèmes différentiels non linéaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
2.3 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

3 Étude métrique des courbes 33


3.1 Longueur d’un arc paramétré . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
3.2 Abscisse curviligne et courbure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
3.3 Courbes planes. Repère de Frenet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
3.4 Rappels sur le produit vectoriel dans R3 . . . . . . . . . . . . . . . 41
3.5 Cas des courbes gauches . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42
3.6 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45

4 Intégrales multiples 48
4.1 Intégrables doubles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48
4.2 Intégrales triples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
4.3 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53

5 Surfaces 55
5.1 Définitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
5.2 Point régulier, plan tangent et normale à une surface . . . . . . . . 56

ii
5.3 Aire d’une surface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
5.4 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60

6 Analyse vectorielle 61
6.1 Champs de vecteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61
6.2 Champ de gradients . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
6.3 Champ de rotationnels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
6.4 Intégrale de surface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68
6.5 Théorèmes de Stokes et d’Ostrogradski . . . . . . . . . . . . . . . . 68
6.6 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69

iii
Chapitre 1

Systèmes différentiels linéaires

1.1 Équations différentielles linéaires


Définition 1.1. Une équation différentielle, linéaire, du premier ordre, est une
équation de la forme
y ′ = a(t)y + g(t)
où a : I → R et g : I → R sont des applications continues sur un intervalle I ⊂ R.
Une fonction y : J → R est une solution de l’équation différentielle si y est
dérivable sur un intervalle J ⊂ I et si pour tout t ∈ J, on a
y ′ (t) = a(t)y(t) + g(t).
Exemples 1.2. (a) L’équation différentielle y ′ = ay + g, où a, g ∈ R, a ̸= 0,
sont des constantes, est une équation différentielle linéaire du premier ordre à
coefficients constants. Pour toute constante c ∈ R, la fonction f : R → R définie
par f (t) = ceat − g/a est une solution de cette équation.
(b) L’équation y ′ = 2ty est une équation différentielle linéaire d’ordre 1. Pour
2
c ∈ R, la fonction f : R → R définie par f (t) = cet est une solution de cette
équation différentielle.
Proposition 1.3. Si y : J → R est une solution de l’équation différentielle y ′ =
a(t)y + g(t), alors y est de classe C 1 sur J.
Plus généralement, si les fonctions a et g sont de classe C k sur I, avec k ⩾ 1,
alors toute solution y : J → R est de classe C k+1 sur J.
Démonstration. Par définition d’une solution, on sait que y est dérivable sur J.
Elle est donc continue sur J. La fonction ay + b est continue sur J, comme somme
et produit de fonctions continues sur J. La fonction y ′ = ay + b est donc continue
et y est de classe C 1 .
La deuxième affirmation se démontre par récurrence sur k ⩾ 1.

1
Définition 1.4. Une solution y : J → R d’une équation différentielle est une
solution maximale si elle n’est pas la restriction à l’intervalle J d’une solution
définie sur un intervalle J˜ ̸= J qui contient l’intervalle J.

Le résultat de la proposition 1.3 et la terminologie de la définition 1.4 sont


généraux et ne sont pas limités au cas des équations linéaires du premier ordre.
Nous étudions d’abord l’équation homogène.

Définition 1.5. L’équation homogène associée à l’équation différentielle y ′ =


a(t)y + g(t) est l’équation différentielle y ′ = a(t)y.

Proposition 1.6. Soit t0 ∈ I. Pour tout y0 ∈ R, la fonction y : I → R définie par

y(t) = eα(t) y0 ,


α:I→R
(1.1)
Z t
t 7→ a(s)ds
t0

est solution de l’équation différentielle y ′ = a(t)y.

Démonstration. La fonction α est dérivable sur I comme primitive d’une fonction


continue et α′ = a. La fonction y définie par y(t) = eα(t) y0 est dérivable comme
composée de fonctions dérivables et

y ′ (t) = α′ (t)eα(t) y0 = a(t)y(t),

d’où le résultat.

Théorème 1.7. Soit t0 ∈ I.


(a) Toute solution maximale de l’équation homogène y ′ = a(t)y est définie sur I
et est de la forme
y(t) = y0 eα(t)
où y0 ∈ R.
(b) L’ensemble des solutions de l’équation différentielle y ′ = a(t)y est une droite
vectorielle.

Démonstration. Soit y une solution de l’équation différentielle y ′ = a(t)y sur un


intervalle J ⊂ I. On définit
x(t) = e−α(t) y(t).

2
Le terme e−α(t) est appelé facteur intégrant. La fonction x est dérivable sur J et

x′ (t) = −α′ (t)e−α(t) y(t) + e−α(t) y ′ (t)


= −a(t)e−α(t) y(t) + e−α(t) a(t)y(t) = 0.

La fonction x vérifie x′ = 0 sur J et elle est donc constante. Ainsi,

y(t) = eα(t) x(t) = eα(t) y0 .

En remplaçant t par t0 , on voit que y0 = y(t0 ).

Théorème 1.8. Soit t0 ∈ I.


(a) Toute solution maximale de l’équation différentielle y ′ = a(t)y + g(t) est de la
forme

y:I→R
Å Z t ã
t 7→ eα(t)
y0 + e −α(s)
g(s)ds
t0

où α est définie par (1.1) et y0 ∈ R.


(b) Si y1 est une solution particulière de l’équation différentielle sur l’intervalle I,
alors les solutions maximales de l’équation sont les fonctions y de la forme

y = yhomogène + y1 ,

où yhomogène : I → R est solution maximale de l’équation homogène.


(c) L’ensemble des solutions maximales est donc une droite affine.

Démonstration. Voir l’exercice 1.1

Exemples 1.9. (a) Résoudre y ′ = y + e2t .


(b) Résoudre y ′ = y + et .
(c) Comparer.

1.2 Équations différentielles linéaires, du second


ordre et à coefficients constants
On s’intéresse au cas particulier d’une équation différentielle, linéaire, d’ordre
2, à coefficients constants
ay ′′ + by ′ + cy = d(t)

3
avec a, b, c, ∈ R, a ̸= 0 et d : I → R continue. Une fonction y : J → R est
solution de cette équation sur un intervalle J ⊂ I si y est deux fois dérivable et si
ay ′′ (t) + by ′ (t) + cy(t) = d(t) pour tout t ∈ J. On appelle équation caractéristique
de l’équation différentielle homogène ay ′′ + by ′ + cy = 0 l’équation du second degré
suivante
aλ2 + bλ + c = 0
dont l’inconnue est λ.
Le guide de résolution de l’équation homogène associée est donnée dans la
proposition suivante.
Proposition 1.10. (a) Si l’équation caractéristique admet deux racines réelles
distinctes λ et µ, les solutions de l’équation sont de la forme

y(t) = Ceλt + Deµt ,

avec C, D ∈ R.
(b) Si l’équation caractéristique admet une racine double λ, les solutions sont de
la forme
y(t) = eλt (C + Dt) ,
avec C, D ∈ R.
(c) Si l’équation caractéristique admet deux racines complexes conjuguées u + iv
et u − iv, où u, v ∈ R, les solutions sont de la forme

y(t) = eut (C cos(vt) + D sin(vt)) ,

avec C, D ∈ R.
On décrit maintenant la méthode de variation des constantes dans le cas des
équations différentielles, linéaires, d’ordre 2, à coefficients constants. Soient y1 et
y2 deux solutions indépendantes de l’équation homogène associée. Cela signifie que
si les fonctions y1 et y2 vérifient κ1 y1 + κ2 y2 = 0 sur R alors κ1 = κ2 = 0.
On cherche une solution de l’équation non homogène (avec un second membre)
sous la forme générale suivante

y = κ1 y1 + κ2 y2

où κ1 : I → R et κ2 : I → R sont dérivables. De plus, on impose

y ′ = κ1 y1′ + κ2 y2′ ,

ce qui revient à la condition


κ′1 y1 + κ′2 y2 = 0.

4
On a alors
y ′′ = κ1 y1′′ + κ2 y2′′ + κ′1 y1′ + κ′2 y2′ .
On vérifie que le fait que y soit solution de l’équation ay ′′ + by ′ + cy = d(t) est
alors équivalent à
d(t)
κ′1 y1′ + κ′2 y2′ = .
a
On obtient ainsi pour tout t ∈ I, un système linéaire de deux équations à deux
inconnues, κ′1 (t) et κ′2 (t) qui s’ecrit
®
κ′1 y1 + κ′2 y2 = 0
κ′1 y1′ + κ′2 y2′ = d(t)
a

Pour tout t ∈ I, ce système admet une unique solution (κ′1 , κ′2 ) par la propriété
d’indépendance des solutions y1 et y2 . En prenant des primitives quelconques de
κ′1 et κ′2 on trouve une solution particulière de l’équation avec second membre.
On conclut la résolution de l’équation différentielle grâce au résultat général
suivant.

Théorème 1.11. On considère l’équation différentielle ay ′′ + by ′ + cy = d(t) sous


les hypothèses qui précèdent.
(a) Toute solution maximale est définie sur I.
(b) Si ynonhomogène : I → R est une solution particulière de l’équation, alors toute
solution maximale de l’équation est de la forme

y = yhomogène + ynonhomogène

où yhomogène est solution de l’équation homogène ay ′′ + by ′ + cy = 0.

Remarque 1.12. La méthode de la variation des constantes est générale, mais


elle n’est pas toujours la méthode la plus simple. Il est parfois plus élémentaire
de trouver la forme générale d’une solution particulière et de la déterminer par
identification. Voir les exemples ci-dessous.

Exemples 1.13. (a) Résoudre l’équation y ′′ + y ′ + y = t. On pourra chercher une


solution particulière de la forme yp (t) = αt + β.
(b) Résoudre de deux façons différentes l’équation y ′′ − y = e2t . On pourra appli-
quer la méthode de la variation des constantes ou trouver une solution particulière
de la forme yp (t) = δe2t .

5
1.3 Systèmes différentiels linéaires d’ordre 1
Pour un entier N strictement positif, la notation MN (R) désigne l’ensemble
des matrices carrées de taille N dont les coefficients sont réels. Soit I un intervalle
de R, A : t ∈ I 7→ A(t) ∈ MN (R) une fonction matricielle dont les coefficients sont
des fonctions continues sur I, et G : t ∈ I 7→ G(t) ∈ RN une fonction vectorielle
dont les composantes sont des fonctions continues sur I. Soit t0 ∈ I.
On considère le système différentiel

X ′ = A(t)X + G(t) (1.2)

parfois complété d’une condition initiale de la forme

X(t0 ) = X0 . (1.3)

La recherche d’une solution du système avec une condition initiale s’appelle le


problème de Cauchy. En notant
Ö è Ö è
a1,1 (t) a1,2 (t) . . . a1,N (t) g1 (t)
.. .. .. ..
A(t) = . . . , G(t) = .
aN,1 (t) aN,2 (t) . . . aN,N (t) gN (t)

et Ö è
x1 (t)
..
X(t) = . ,
xN (t)
ce système revient à écrire pour tout k = 1, . . . , N :
N
X
x′k = ak,j (t)xj + gk (t).
j=1

Comme précédemment, on commence par l’étude du système

X ′ = A(t)X (1.4)

appelé système homogène associé à (1.2). Le résultat ci-dessous est admis.


Théorème 1.14 (Théorème de Cauchy-Lipschitz linéaire). Le problème (1.2)–
(1.3) admet une unique solution (maximale) sur I.
Remarque 1.15. (a) L’existence provient des hypothèses de continuité sur A(t),
g(t) et de la linéarité. L’unicité vient du fait que l’on a prescrit la condition ini-
tiale (1.3).

6
(b) Le théorème de Cauchy-Lipschitz assure notamment que deux solutions (maxi-
males) distinctes X1 , X2 ne peuvent être égales en aucun temps t ∈ I.

De même que pour les équations différentielles linéaires, on vérifie facilement


que la solution générale de l’équation non homogène (1.2) peut s’écrire comme
la somme d’une solution particulière de l’équation non homogène (1.2) et de la
solution générale de l’équation homogène associée (1.4). En effet, soit Xnonhomogène
une solution particulière de (1.2) et X une autre solution de (1.2), en posant
Y = X − Xnonhomogène , par linéarité, Y vérifie

Y ′ = X ′ − Xnonhomogène

= AX − AXnonhomogène = AY

ce qui signifie que Y est solution de (1.4).

1.4 Systèmes autonomes de dimension 2


Dans cette section, on considère les systèmes de la forme

X ′ = AX (1.5)

où Å ã Å ã
x(t) a b
X(t) = , A=
y(t) c d
où a, b, c, d ∈ R sont donnés. En particulier, ici I = R. Le système s’écrit aussi
®
x′ = ax + by
y ′ = cx + dy

Exemple 1.16. L’objectif est de résoudre à titre d’exemple le système X ′ = AX


avec Å ã
−2 3
A= .
0 1
(a) Déterminer les valeurs propres de A, puis diagonaliser A, c’est-à-dire l’écrire
sous la forme A = P DP −1 où P est une matrice inversible et D est une matrice
diagonale.
(b) Poser W = P −1 X et montrer que W satisfait le système différentiel W ′ = DW .
(c) Résoudre le système W ′ = DW et en déduire la forme générale des solutions
de X ′ = AX.

7
Définition 1.17. Deux solutions X1 et X2 de (1.5) définies sur R sont linéairement
indépendantes si
∀t ∈ R, κ1 X1 (t) + κ2 X2 (t) = 0 =⇒ κ1 = κ2 = 0.
Autrement dit, s’il n’existe pas de constante κ ∈ R telle que
X1 = κX2 sur R, ou X2 = κX2 sur R.
Théorème 1.18. L’ensemble des solutions de (1.5) est un espace vectoriel de
dimension 2. Il existe donc une base {Φ1 , Φ2 } de cet espace composée de deux solu-
tions linéairement indépendantes de (1.5) telle que toute solution de (1.5) s’écrive
sous la forme X = κ1 Φ1 + κ2 Φ2 .
Démonstration. Soit S0 l’ensemble des solutions de (1.5) sur R. Soit t0 ∈ R.
On considère Φ1 (respectivement, Φ2 ) l’unique solution du système vérifiant la
condition de Cauchy Φ1 (t0 ) = 10 (respectivement, Φ2 (t0 ) = 01 ). Montrons que


{Φ1 , Φ2 } est une base de S0 . D’abord, cette famille est libre car si
∀t ∈ R, κ1 X1 (t) + κ2 X2 (t) = 0
alors en t = t0 , on trouve
Å ã Å ã
κ1 0
κ1 X1 (t0 ) + κ2 X2 (t0 ) = =
κ2 0
ce qui entraîne κ1 = κ2 = 0. Cette famille est également génératrice de S0 car si on
choisit X = xy ∈ S0 , alors la fonction X̃ définie par X̃(t) = x(t0 )Φ1 (t)+y(t0 )Φ2 (t)
est solution de (1.5) par linéarité. De plus, on a
Å ã
x(t0 )
X̃(t0 ) = x(t0 )Φ1 (t0 ) + y(t0 )Φ2 (t0 ) = = X(t0 ).
y(t0 )

Par unicité, on a bien X = X̃ sur R.


On peut vérifier l’indépendance de deux solutions X1 , X2 de (1.5) en introdui-
sant la notion de Wronskien
W(t) = det[X1 (t), X2 (t)].
En effet, on obtient facilement le résultat suivant.
Proposition 1.19. Soient X1 et X2 deux solutions de (1.5). Alors les trois affir-
mations suivantes sont équivalentes.
(a) Les solutions X1 et X2 sont linéairement indépendantes.
(b) Pour tout t ∈ R, W(t) ̸= 0.
(c) Il existe t1 ∈ R tel que W(t1 ) ̸= 0.

8
1.4.1 Portrait de phase
Å ã
x
On appelle trajectoire d’une solution X = l’ensemble
y
{(x(t), y(t)) : t ∈ R}
des points du plan. Le portrait de phase représente les différents types de trajec-
toires dans le plan (x, y). Sur chaque trajectoire, les flèches représentent le sens du
temps
Définition 1.20. (a) Un point d’équilibre Xe d’un système différentiel est une
solution indépendante du temps.
(b) Un point d’équilibre Xe est dit stable pour t ⩾ t0 , si toute solution proche en
t = t0 de Xe reste proche de Xe pour tout temps t ⩾ t0 . Sinon, il est dit instable.
(c) Un point d’équilibre Xe est dit asymptotiquement stable s’il est stable pour
t ⩾ t0 et si toute solution proche en t = t0 de Xe converge vers Xe lorsque
t → +∞.
Remarque 1.21. Dans le cas des systèmes différentiels linéaires à coefficients
constants de la forme (1.5), les points d’équilibre sont les éléments du noyau de la
matrice A. En particulier, le origine (0, 0) est toujours un point d’équilibre dont il
est intéressant d’étudier la stabilité et la stabilité asymptotique.
L’étude fait intervenir les valeurs propres de A. Pour étudier l’allure des tra-
jectoires et la stabilité de (0, 0), on va considérer les quatre cas suivants :
— Cas 1 : A a deux valeurs propres réelles distinctes, notées λ et µ.
— Cas 2 : A a deux valeurs propres non réelles, conjuguées notées λ et µ.
— Cas 3 : A a une valeur propre réelle double notée λ et A est diagonalisable
dans M2 (R)
— Cas 4 : A a une valeur propre réelle double notée λ et A n’est pas diagona-
lisable dans M2 (R).
Le cas où une valeur propre est nulle est laissé en exercice.
Dans les portraits de phase qui suivent, les axes représentent les directions
propres. Ceux-ci ne sont pas représentés orthogonaux car les vecteurs propres cor-
respondant à des valeurs propres différentes ne sont pas nécessairement orthogo-
naux.
On notera que deux trajectoires différentes n’ont pas de point d’intersection.
En effet, si X1 (t1 ) = X2 (t2 ) pour deux solutions X1 , X2 et deux temps t1 , t2 , alors
Y (t) = X1 (t1 + t) − X2 (t2 + t) est également solution, avec Y (0) = 0. Ainsi, par
unicité, Y (t) = 0 pour tout t, ce que signifie que les trajectoires correspondant à
X1 et X2 sont confondues. En fait, on a obtenu X2 (t) = X1 (t1 − t2 + t) pour tout
t. Les solutions X1 et X2 ne diffèrent que d’une translation en temps.

9
1.4.2 Cas 1
Dans le cas où A a deux valeurs propres réelles distinctes, notées λ et µ , on
sait que A est diagonalisable dans M2 (R). Deux vecteurs propres associés respecti-
vement à λ et µ forment une base de R2 . Il existe P ∈ GL2 (R), matrice de passage
de la base canonique à cette base de vecteurs propres. On a
Å ã
λ 0
−1
P AP = = D de façon équivalente A = P DP −1 .
0 µ

On pose alors Å ã
w
W = = P −1 X.
z
Le système X ′ = AX est alors équivalent à

W ′ = DW

ce qui revient à écrire ®


w′ = λw
z ′ = µz
Le système est maintenant découplé et la solution générale est

w(t) = w0 eλt , z(t) = z0 eµt .


λ
On a donc |w(t)| = c|z(t)| µ , pour une constante c ∈ R.
On représente graphiquement dans les variables originales (x, y) des trajectoires
1. Équations linéaires à coefficients constants 69
typiques dans le cas 0 < µ < λ, avec une forme “parabolique” des trajectoires non
rectilignes.

Le point d’équilibre (0, 0) est alors appelé nœud instable.


Si on change le sens du temps, ce qui revient à considérer le cas λ < µ < 0, on
obtient le même portrait de phase avec les flèches représentant le temps inversées.
Le point d’équilibre (0, 0) est alors asymptotiquement stable ; c’est un puit ou
nœud stable.

10
Centre:
2 valeurs propres imaginaires conjuguées

Fig. 3.1 – Portraits de phase de systèmes à coefficients constants dans le plan


−| µλ
| , d’où la forme « hyperbolique
Pour le cas λ < 0 < µ,1.on a |w(t)|
Équations linéaires= C|z(t)|
à coefficients constants 69 »
des trajectoires non rectilignes. Le point d’équilibre (0, 0) est instable et s’appelle
un point selle ou un col.

Exemple 1.22. Reprendre l’étude système X ′ = AX (exemple 1.16) avec


Å ã
−2 3
A=
0 1
et tracer quelques trajectoires typiques sur le portrait de phase.

1.4.3 Cas 2
Centre:
On considère maintenant le cas où λ et µ2 valeurs
sontpropres
complexes. On sait que µ = λ̄
imaginaires conjuguées
et on note λ = u + iv et µ = u − iv avec u, v ∈ R et v ̸= 0. On sait que la matrice
A est diagonalisable dans M2 (C) : il existe une matrice P ∈ GL2 (C) telle que
Å ã
λ 0
−1
P AP = = D de façon équivalente A = P DP −1 .
0 µ
Cependant, cette décomposition de A n’est pas la plus adaptée pour representer
les trajectoires réelles du Fig.
système.
3.1 – Portraits de phase de systèmes à coefficients constants dans le plan
Les valeurs propres étant complexes conjuguées, on remarque que l’on peut
choisir une matrice de passage P (dont les vecteurs colonnes sont des vecteurs
propres) avec la structure suivante
Å ã
α ᾱ
P =
β β̄
où α, β ∈ C, et on pose
Å ã Å ã
1 i −1 1 1 1
Q= , Q =
1 −i 2 −i i
Par un calcul simple, on voit que la matrice R = P Q est réelle. De plus, on calcule
Å ã
−1 −1 u −v
R AR = Q DQ = .
v u

11
1. Équations linéaires à coefficients constants 69

En posant Å ã Å ã
w −1 −1 x
W = =R X=R ,
z y
on se ramène ainsi au système couplé
1. Équations linéaires à coefficients constants 69
Å ′ã Å ãÅ ã
w u −v w
= .
z′ v u z

Écrit sous cette forme, ce système n’est pas découplé en w et z mais il se résout
facilement en utilisant les coordonnées polaires. On pose w = r cos θ, z = r sin θ.
On obtient après calcul
r′ = ur, θ′ = v.
Les solutions sont
r(t) = r0 eut , θ(t) = θ0 + vt.
Les portraits de phase sont différents selon les valeurs de u et v. Lorsque u > 0 et
v > 0, on obtient un foyer instable avec des trajectoires de la forme suivante

Pour u < 0 et v < 0, il suffit d’inverser le sens des flèches sur les trajectoires,
on obtient un Centre:
foyer stable, c’est-à-dire que l’origine est asymptotiquement stable.
2 valeurs propres imaginaires conjuguées
Pour u = 0, on obtient un centre,
Centre:
représenté schématiquement ci-dessous (dans
le cas v < 0) 2 valeurs propres imaginaires conjuguées

Fig. 3.1 – Portraits de phase


Fig. de systèmes
3.1 – Portraits à coefficients
de phase de systèmes constants dans
à coefficients le plan
constants dans le plan
Dans ce cas, l’origine est stable mais n’est pas asymptotiquement stable. Le
sens de rotation dépend du signe de v.

12
1.4.4 Cas 3
On considère maintenant le cas où λ ̸= 0 est la seule valeur propre réelle de la
matrice A et où A est diagonalisable. Il est facile de voir que A = λI2 , où I2 est la
matrice identité de M2 (R). Ce cas est semblable au cas 1, mais comme λ = µ, les
trajectoires sont toutes rectilignes. Il s’agit d’un nœud, stable ou instable selon le
signe de λ.

1.4.5 Cas 4
S’il n’existe qu’une valeur propre non nulle λ et que la matrice A n’est pas
diagonalisable, on sait qu’il existe une matrice P ∈ GL2 (R) telle que
Å ã
−1 λ 1
A = PTP T =
0 λ
Remarque 1.23. On dit que la matrice est trigonalisable, l’apparition du coeffi-
cient 1 à la position ligne 1, colonne 2 correspond à un choix particulier pour le
deuxième vecteur colonne de la matrice P .
Pour justifier cette affirmation, on peut d’abord choisir un vecteur propre p ∈
R comme premier vecteur colonne de la matrice P . On prend ensuite un vecteur
2

quelconque q ∈ R2 , tel que p et q sont linéairement indépendants. Comme {p, q}


est une base de R2 , on peut écrire Aq = αp + βq. On a α ̸= 0 car sinon q est un
vecteur propre et la matrice A est diagonalisable. On peut substituer αq à q pour
avoir Aq = p + βq, ce qui justifie l’apparition du coefficient 1 dans la matrice T .
Finalement, on voit que β = λ car sinon β est une autre valeur propre de A associé
à un vecteur propre de la forme q + cp, pour un certain c. Comme Ap = λp et
Aq = p + λq, la forme de la matrice T est bien justifiée.
Par changement de variable
Å ã
w
W = = P −1 X,
z
on se ramène au système W ′ = T W , c’est-à-dire
Å ã Å ãÅ ã
ẇ λ 1 w
= ,
ż 0 λ z
qui se réécrit
w′ = λw + z, z ′ = λz.
En résolvant d’abord l’équation de z (qui est indépendante de w) et ensuite l’équa-
tion de w (équation linéaire non homogène), on obtient la solution générale
z(t) = z0 eλt , w(t) = w0 eλt + z0 teλt .

13
(Voir l’exercice 1.2.) On trouve donc la relation suivante entre z et w (pour λ ̸= 0)
z z z
1. Équations linéaires à coefficients constants 69
w = w0 + ln .
z0 λ z0
Pour avoir une idée de la forme des solutions, on étudie la fonction

f (s) = c1 s + c2 s ln s,

définie sur ]0, +∞[, où c1 et c2 sont des constantes positives. On a lim0+ f = 0,


lim+∞ f = +∞ et
f ′ (s) = c1 + c2 + c2 ln s,
c1 +c2

ce qui donne un point de minimum pour la fonction f à s0 = e c2 . Ceci conduit
au portrait de phase du nœud dégénéré instable pour le cas λ > 0

Centre:
2 valeurs propres imaginaires conjuguées
Lorsque λ < 0, il suffit de changer le sens du temps et on obtient un nœud
dégénéré stable.

1.4.6 Stabilité de l’origine


Théorème 1.24. L’origine (0, 0) est asymptotiquement stable si et seulement si
les parties réelles des valeurs propres de A sont strictement négatives.
Fig. 3.1 – Portraits de phase de systèmes à coefficients constants dans le plan
Démonstration. Il suffit de combiner les conclusions des quatre cas précédents,
ainsi que les cas où une valeur propre est nulle.

Remarque 1.25. On peut généraliser l’étude précédente au cas des systèmes 3∧3
et même N ∧ N . Cependant, la situation est alors plus riche. Dans les exercices,
nous ne considèrerons des exemples de systèmes 3 ∧ 3 que dans des cas simples.

14
1.5 Systèmes non homogènes
On considère le système différentiel

X ′ = AX + G(t) (1.6)

où A ∈ M2 (R) est indépendante du temps. Nous allons décrire la méthode de


variation des constantes (similaires à celle utilisée en §1.2).
On note {Φ1 , Φ2 } une base de solutions du système homogène X ′ = AX. La
méthode consiste à chercher une solution du système (1.6) sous la forme

X = κ1 (t)Φ1 + κ2 (t)Φ2 ,

où κ1 et κ2 sont des fonctions dérivables à déterminer. En dérivant, on a

X ′ = κ′1 Φ1 + κ′2 Φ2 + κ1 Φ′1 + κ2 Φ′2 .

En utilisant Φ′1 = AΦ1 et Φ′2 = AΦ2 , le système X ′ = AX + G, revient donc à

X ′ + AX = κ′1 Φ1 + κ′2 Φ2 = G.

Comme {Φ1 , Φ2 } est une famille libre pour tout t, on trouve de manière unique κ′1
et κ′2 . Par intégration, on trouve κ1 et κ2 à une constante près.

1.6 Exponentielle de matrice


L’objectif de cette section est donner un aperçu de la notion d’exponentielle de
matrice et de son utilité dans la résolution de systèmes différentiels linéaires. De
façon formelle, l’exponentielle d’une matrice A de MN (R) (N ⩾ 2) est définie par
+∞
X Ak
eA = .
k=0
k!

On notera l’analogie avec la formule de l’exponentielle d’un nombre réel a ∈ R,


+∞ k
X a
e =
a
.
k=0
k!

(Voir les cours sur les séries numériques.)


Remarque 1.26 (Notions hors programme). Pour tout N ⩾ 2, l’espace vectoriel
réel MN (R) est de dimension finie et il est donc un espace vectoriel normé complet
(espace de Banach) quelque soit la norme ∥ · ∥ adoptée. On munit MN (R) d’une

15
norme de matrice sous-multiplicative, de telle sorte que ∥AB∥ ⩽ ∥A∥∥B∥, pour
k ⩾ 2. On définit alors la suite de matrices {Un }n par les sommes partielles
n
X Ak
Un =
k=0
k!

On adopte les notation A0 = I et 0! = 1 de sorte que


A2 An
Un = I + A + + ··· + .
2! n!
Pour tout 0 ⩽ p < n, en utilisant l’inégalité triangulaire et la propriété de la norme
∥Ak ∥ ⩽ ∥A∥k ,
n n +∞
X Ak X ∥A∥k X ∥A∥k
∥Un − Up ∥ = ⩽ ⩽ .
k=p+1
k! k=p+1
k! k=p+1
k!

∥A∥k
On remarque le majorant +∞k=p+1 k! ci-dessus est le reste d’ordre p de la série
P
∥A∥k
numérique convergente ∞k=0 k! = e
∥A∥
. On a donc
P

+∞
X ∥A∥k
lim = 0.
p→+∞
k=p+1
k!

Ainsi, on a démontré que la suite {Un }n est de Cauchy. Elle est donc convergente
dans Mn (R). On peut donc définir pour toute matrice A
+∞
X Ak
e = lim Un =
A
.
n→+∞
k=0
k!

Nous admettrons les propriétés suivantes de l’exponentielle de matrice. Ces


propriétés sont à retenir.
Proposition 1.27. Soit A, B ∈ Mn (R).
(a) Si 0 est la matrice nulle alors e0 = I.
(b) Si AB = BA alors eA+B = eA eB .
(c) La matrice eA est inversible et (eA )−1 = e−A .
(d) Pour tout t, s ∈ R, e(t+s)A = etA esA .
(e) Pour tout t ∈ R, dtd etA = AetA .
e 0
Å ã Å λ ã
λ 0
(f) Si D = alors e =D
.
0 µ 0 eµ

16
(g) Si A = P BP −1 , où P ∈ GLn (R), alors eA = P eB P −1 .
Remarque 1.28. On va voir selon les cas distingués dans §1.4.1 comment déter-
miner etA pour une matrice A réelle 2 ∧ 2.
— En utilisant (f) et (g), il est facile de déterminer l’exponentielle
Å ã d’une matrice
λ 0
diagonalisable. En effet, si A = P DP −1 où D = alors
0 µ

e 0
Å λ ã
e = Pe P = P
tA tD −1
P −1 .
0 eµ

— Lorsque la matrice est diagonalisable dans M2 (C),


Å ã Å ã
u + iv 0 −1 α ᾱ
A=P P , P =
0 u − iv β β̄
on a
e e e
Å ut ivt ã Å ivt ã
0 0
e =P
tA
P =e P
−1 ut
P −1 .
0 eut e−ivt 0 e−ivt
Å ã
λ 0
— Dans le cas où A = P T P −1
avec T = D + N , où D = et N =
0 λ
Å ã
0 1
, on observe que N 2 = 0. Ainsi, pour tout k ⩾ 2, N k = 0. Ceci
0 0
(tN )k
implique que etN = +∞ k=0 k! = I + tN . Ainsi, e
tA
= eλt (I + tN ) par (d).
P

Exemples 1.29. Déterminer explicitement etA dans les deux cas suivants :
Å ã Å ã
1 −1 2 3
A= , A= .
1 1 0 2

Le lien entre l’exponentielle de matrice et les systèmes différentiels est donné


dans le théorème suivant.
Théorème 1.30. (a) Les solutions de l’équation X ′ = AX s’écrivent sous la
forme
X(t) = etA X0 ,
où X0 ∈ R2 .
(b) Les solutions de l’équation X ′ = AX + G(t) s’écrivent sous la forme
Z t
X(t) = e X0 +
tA
e(t−s)A G(s)ds
0

où X0 ∈ R2 .

17
Remarque 1.31. Pour retenir les formules du théorème 1.30 (a)-(b), on notera
l’analogie avec les formules du théorème 1.7 (a) et du théorème 1.8 (a).
Remarque 1.32. Dans le point (b) du théorème 1.30, on remarque que X, solution
de l’équation non homogène, est la somme d’une solution quelconque etA X0 de
l’équation
R t (t−s)A homogène et de la solution particulière de l’équation non homogène
0
e G(s)ds qui s’annule en t = 0.
Exemple 1.33. Dans le prolongement de l’exemple 1.29, résoudre le système dif-
férentiel suivant
X ′ = AX + G,
où Å ã Å ã
2 3 0
A= , G = 2t
0 2 e
avec la condition initiale Å ã
1
X(0) =
1
Remarque 1.34. Lorsque la fonction vectorielle G(t) est indépendante du temps,
un point d’équilibre Xe du système différentiel est par définition une solution de
l’équation
AXe + G = 0.
Il s’agit d’une solution particulière du système non homogène. La solution générale
est donc de la forme
X(t) = etA X0 + Xe .
La stabilité de l’équilibre Xe pour le système non homogène est donc équivalente
à la stabilité de (0, 0) pour le système homogène.

1.7 Exercices
Exercice 1.1 (Démonstration du Théorème 1.8). On se place dans le contexte
du Théorème 1.8 et on considère y : J → R une solution maximale de l’équation
y ′ = a(t)y + g(t).
(a) On définit x(t) = e−α(t) y(t). Calculer x′ .
(b) En déduire que pour tout t ∈ J,
Å Z t ã
y(t) = e α(t)
y(t0 ) + e−α(s)
g(s)ds .
t0

(c) Conclure

18
Exercice 1.2. Résoudre l’équation différentielle

y ′ = ay + geλt

où a, g et λ sont des réels. On discutera selon les valeurs de a et λ.


Exercice 1.3. Résoudre les équations différentielles suivantes
(a) y ′ − 3y = 2
(b) 2y ′ + 7y = 7t − 12
Exercice 1.4. Résoudre
(a) y ′ + y + et = 0 avec y(0) = −1.
(b) y ′ + 3y = 6t + 11 avec y(0) = −1.
Exercice 1.5. Résoudre l’équation différentielle y ′ + ty = 0 et en déduire les
solutions de y ′ + ty = t.
Exercice 1.6. (a) Résoudre y ′ + y
t2
= 0 sur ]0, +∞[.
(b) Vérifier que la fonction yp définie sur ]0, +∞[ par yp (t) = 5t2 + 2 est solution
sur ]0, +∞[ de y ′ + ty2 = 10t + 5 + t22 .
(c) En déduire les solutions sur ]0, +∞[ de y ′ + y
t2
= 10t + 5 + 2
t2
.
Exercice 1.7. Résoudre ty ′ + (1 + t2 )y = (t2 + t + 1)et sur ]0, +∞[.
Exercice 1.8 (Une équation différentielle non linéaire). On cherche à résoudre
l’équation différentielle y ′ = 3y + ty 2 .
(a) Poser z = 1
y
et écrire l’équation différentielle vérifiée par z.
(b) Résoudre l’équation différentielle vérifiée par z et en déduire l’expression de y.
Exercice 1.9. On considère l’équation différentielle y ′ = −y + cos t.
(a) Résoudre cette équation différentielle.
(b) Montrer qu’il n’y a qu’une seule solution périodique.
Exercice 1.10 (Equations différentielles du second ordre). Résoudre les équations
différentielles suivantes :
(a) y ′′ + 4y ′ + 3y = 0
(b) y ′′ − 6y ′ + 9y = 0
(c) y ′′ − 2y ′ + 2y = 0
(d) y ′′ + y = cos3 t
(e) y ′′ − 4y ′ + 3y = 6t + 4et + 7e−t avec y(0) = y ′ (0) = 0.

19
Exercice 1.11. Soit y une fonction de classe C 1 sur R et α > 0. On suppose que

lim (y + αy ′ ) = 0.
+∞

Montrer que lim+∞ y = 0.


Exercice 1.12. On considère le système linéaire
® ′
x = y,
y ′ = −x,

avec une donnée initiale xy00 ∈ R2 en t = 0.




(a) Montrer qu’une solution xy satisfait x′′ + x = 0 et y ′′ + y = 0 sur R et en




déduire qu’elle admet une formule explicite.


(b) Montrer que (0, 0) est l’unique équilibre du système et qu’il est stable. Est-il
asymptotiquement stable ?
Exercice 1.13. On considère le système différentiel linéaire

X ′ = AX

avec Å ã
2 2
A=
1 3
(a) Déterminer toutes les solutions du système.
(b) Calculer la solution vérifiant X(0) = 10 .


(c) Tracer le portrait de phase et préciser la nature du point d’équilibre (0, 0).
(d) Même questions pour les matrices suivantes :
Å ã Å ã Å ã Å ã Å ã
1 −1 −3 2 −3 −2 −3 1 1 −2
, , , , .
1 3 1 −2 2 2 −1 −3 2 1

Exercice 1.14. (a) Résoudre le système différentiel suivant :

X ′ = AX + B(t)

avec
e
Å ã Å tã
2 2
A= et B(t) = t .
1 3 e
(b) Même question avec

e2t
Å ã Å ã
1 −1
A= et B(t) = .
1 3 −te2t

20
Exercice 1.15. On considère le système différentiel linéaire suivant :
®
x′ = − 12 x − y + 1
(S)
y ′ = x − 21 y − 2.

(a) Déterminer le point d’équilibre Ye du système (S).


(b) Déterminer toutes les solutions du système (S).
(c) Le point d’équilibre Ye est-il asymptotiquement stable ?
Å ã
1
(d) Calculer la solution Y du système (S) vérifiant Y (0) = .
0
(e) Tracer le diagramme des phases du système différentiel (S). On précisera l’al-
lure et le sens de la trajectoire correspondant à la solution telle que Y (0) = 10 .


Exercice 1.16. (a) Calculer etA dans chacun des exemples de l’exercice 1.13.
(b) En déduire, Ådans
ã chaque cas, la solution du système différentiel X = AX

1
vérifiant X(0) = .
1
Exercice 1.17. On considère le système d’équations différentielles du premier
ordre 

x1 = x1 − 2x2 + 2x3

x′2 = −2x1 + x2 − 2x3 (1.7)

 ′
x3 = 2x1 − 2x2 + x3
(a) Écrire ce système sous la forme

X ′ = AX,

où A est une matrice 3 ∧ 3 et Ñ é


x1
X = x2
x3
On donnera explicitement la matrice A.
(b) Justifier sans calcul que la matrice A est diagonalisable.
(c) Montrer que −1 est valeur propre de A.
(d) Trouver toutes les valeurs propres de A en précisant leur multiplicité.
(e) Diagonaliser A.
(f) Calculer etA (on donnera tous les coefficients de la matrice en fonction de t).
(g) En déduire l’expression de la solution générale de (1.7).

21
(h) Trouver la solution de (1.7) vérifiant

x1 (0) = 0, x2 (0) = 2, x3 (0) = −1.

Exercice 1.18. On considère l’équation différentielle du troisième ordre

(E) y ′′′ − y ′′ − 4y ′ + 4y = 0.

(a) Montrer que cette équation peut s’écrire sous forme d’un système différentiel
linéaire autonome de la forme X ′ = AX où A est une matrice 3 ∧ 3. On posera
pour cela Ñ é
y
X= y′
y ′′
(b) Montrer que les valeurs propres de A sont les racines d’une équation du 3-ème
degré qu’on écrira explicitement.
(c) Résoudre le système différentiel X ′ = AX et l’équation (E).

22
Chapitre 2

Équations et systèmes différentiels


non linéaires

2.1 Équations différentielles non linéaires


On considère dans cette section l’équation différentielle

x′ = f (t, x) (2.1)

où f : R ∧ R → R est une fonction continue, complétée par la condition de Cauchy

x(t0 ) = x0 , (2.2)

où t0 ∈ R et x0 ∈ R.
Contrairement au cas linéaire f (t, x) = a(t)x + g(t) où la solution existe sur
l’intervalle I où les fonctions a et g sont définies et continues, une solution du
problème de Cauchy (2.1)-(2.2) peut cesser d’exister même si f est définie et
continue sur R ∧ R. Voir l’exemple 2.2 plus bas. Cette remarque nous conduit à
introduire la définition suivante.

Définition 2.1. — Une solution de l’équation (2.1) est un couple (I, y) où I


est un intervalle de R non vide et non réduit à un point, et y est une fonction
de classe C 1 sur I telle que la relation (2.1) soit vérifiée par y sur I.
— On dit qu’une solution (J, z) prolonge la solution (I, y) si I ⊊ J et y = z sur
I.
— On dit que (I, y) est une solution maximale de (2.1) s’il n’existe pas de
solution de (2.1) qui la prolonge.
— On dit que (I, y) est une solution globale si I = R.

23
Exemple 2.2. L’équation différentielle

x′ = x2

admet pour solution (]−∞, T [ , yT ) où T ∈ R et


1
yT (t) = , t ∈ ]−∞, T [ .
T −t
Ces solutions sont maximales mais non globales. De plus, limt↑T y(t) = +∞.
On admet le théorème de Cauchy-Lipschitz local relatif à l’équation (2.1).
Théorème 2.3. Soit f : R ∧ R → R de classe C 1 , t0 , x0 ∈ R. Alors,
— Le problème (2.1)-(2.2) admet au moins une solution : il existe τ > 0 et
une fonction y : ]t0 − τ, t0 + τ [ → R de classe C 1 , tels que y ′ = f (t, y) sur
]t0 − τ, t0 + τ [ et y(t0 ) = x0 .
— Si (I1 , y1 ) et (I2 , y2 ) sont deux solutions de (2.1)-(2.2) (I1 ∋ t0 , I2 ∋ t0 ) alors
y1 = y2 sur I1 ∩ I2 .
— Le problème (2.1)-(2.2) admet une unique solution maximale (I, y), avec I ∋
t0 .
Remarque 2.4. L’hypothèse f : R∧R → R de classe C 1 signifie que f est dérivable
par rapport à chacune de ses variables et que ses dérivées partielles sont continues
sur R ∧ R.
Remarque 2.5. De la partie unicité du théorème, on déduit que les graphes de
deux solutions distinctes n’ont pas d’intersection.
Le résultat suivant est une alternative entre l’existence globale et “l’explosion”
de la solution.
Théorème 2.6. Dans le contexte du théorème 2.3, l’intervalle d’existence I de la
solution maximale (I, y) de (2.1)-(2.2) s’écrit

I = ]T− , T+ [ ∋ t0 , où T− ∈ [−∞, t0 [ , T+ ∈ ]t0 , +∞] .

De plus, on a l’alternative suivante.


— Soit T+ = ∞ ;
— Soit T+ ∈ ]t0 , +∞[ et limt↑T+ y(t) = ±∞. On dit alors que la solution explose
en temps fini T+ .
De même,
— Soit T− = ∞ ;

24
— Soit T− ∈ ]−∞, t0 [ et limt↓T− y(t) = ±∞. On dit alors que la solution explose
en temps fini T− .

Remarque 2.7. Selon l’équation et la condition initiale, on peut donc rencontrer


les quatre cas suivants :
— I = R et la solution est globale.
— I = ]−∞, T+ [ avec T+ ∈ ]t0 , +∞[.
— I = ]T− , +∞[ avec T− ∈ ]−∞, t0 [.
— I = ]T− , T+ [ avec T− ∈ ]−∞, t0 [ et T+ ∈ ]t0 , +∞[.

Par contraposition, on obtient le résultat suivant.

Corollaire 2.8. Dans le contexte du théorème 2.3, si la solution maximale (I, y)


est telle que y est bornée sur I, alors I = R.

En pratique, pour utiliser ce résultat, il suffit de montrer une borne, souvent


obtenue grâce au lemme de Gronwall ci-desssous.

Lemme 2.9. Soient t0 , t1 ∈ R avec t0 < t1 . Soit C > 0 et g : [t0 , t1 ] → [0, +∞[
une fonction continue positive. Si une fonction x : [t0 , t1 ] → R vérifie, pour tout
t ∈ [t0 , t1 ], Z t
x(t) ⩽ C + g(s)x(s)ds
t0

alors, pour tout t ∈ [t0 , t1 ],


ÅZ t ã
x(t) ⩽ C exp g(s)ds .
t0

Démonstration. On pose
Z t
y(t) = C + g(s)x(s)ds,
t0

de sorte que y ′ = gx ⩽ gy, par l’hypothèse x ⩽ y et g ⩾ 0. Ainsi,


ï Å Z t ãò Å Z t ã
d ′
y exp − g = (y − gy) exp − g ⩽ 0.
dt t0 t0

On en déduit que pour tout t ∈ [t0 , t1 ],


Å Z t ã
y(t) exp − g ⩽ y(t0 ) = C.
t0

25
Ceci implique l’inégalité suivante
ÅZ t ã
x(t) ⩽ y(t) ⩽ C exp g ,
t0

et conclut la démonstration du lemme de Gronwall.


Donnons une application du résultat précédent à la question de l’existence
globale de solutions.

Théorème 2.10. Dans le contexte du théorème 2.3, on suppose de plus qu’il existe
une fonction continue a : R → [0, +∞[ telle que |f (t, x)| ⩽ a(t)(1 + |x|) pour tous
t, x ∈ R. Alors, la solution maximale de (2.1)-(2.2) est globale.

Démonstration. On note (I, y) la solution maximale de (2.1)-(2.2), où I = ]T− , T+ [.


La formulation intégrale de l’équation s’écrit
Z t
y(t) = y(t0 ) + f (s, y(s))ds,
t0

pour tout t ∈ I. En utilisant l’hypothèse sur f , on obtient la majoration suivante,


pour tout t ∈ I, Z t
|y(t)| ⩽ |y(t0 )| + a(s)(1 + |y(s)|)ds
t0

On utilise le lemme de Gronwall avec la fonction x(t) = 1 + |y(t)| qui vérifie


Z t
x(t) ⩽ 1 + |y(t0 )| + a(s)x(s)ds.
t0

On obtient pour tout t ∈ [t0 , T+ [,


Z t 
x(t) = 1 + |y(t)| ⩽ (1 + |y(t0 )|) exp a(s)ds .
t0

D’après l’alternative d’explosion du théorème 2.6, ceci implique que T+ = +∞. En


effet, si T+ ∈ ]t0 , +∞[, alors
Z T+ 
y(t) ⩽ (1 + |y(t0 )|) exp a(s)ds = C,
t0

où C est une constante indépendante de t, ce qui contredirait limt↑T+ |y(t)| = +∞.


De la même façon, on montre que T− = −∞, ce qui signifie que I = R et la
solution maximale y est globale.

26
2.2 Systèmes différentiels non linéaires
On considère dans cette section un système non linéaire de dimension 2 de la
forme suivante
X ′ = F (X) (2.3)
avec Å ã Å ã
x f (x, y)
X= , F (X) = ,
y g(x, y)
complété par la donnée de Cauchy en t0 ∈ R,

X(t0 ) = X0 . (2.4)

On suppose que les fonctions f : R2 → R et g : R2 → R sont de classe C 1


(c’est-à-dire dérivables et telles que les dérivées partielles sont continues sur R2 ).
Le système (2.3) est dit autonome car la fonction vectorielle F ne dépend pas
directement de la variable t.
La définition 2.1 et le théorème 1.7 s’étendent au cas des systèmes de la façon
suivante.
Définition 2.11. — Une solution du système (2.3) est un couple (I, Y ) où I
est un intervalle de R non vide et non réduit à un point, et Y : I → R2 est
une fonction de classe C 1 sur I telle que la relation (2.3) soit vérifiée par Y
sur I.
— On dit qu’une solution (J, Z) prolonge la solution (I, Z) si I ⊊ J et Y = Z
sur I.
— On dit que (I, Y ) est une solution maximale de (2.3) s’il n’existe pas de
solution de (2.3) qui la prolonge.
— On dit que (I, Y ) est une solution globale si I = R.
On note par la suite p
∥X∥ = x2 + y 2
la norme euclidienne du vecteur X. On admet le théorème de Cauchy-Lipschitz
local relatif au système (2.3).
Théorème 2.12. Soit f : R ∧ R → R de classe C 1 et t0 , x0 ∈ R. Alors,
— Le problème (2.3)-(2.4) admet une unique solution maximale (I, Y ), avec
I ∋ t0 .
— Chaque solution maximale de (2.3)-(2.4) est définie sur un intervalle du type
]T− , T+ [ avec l’alternative suivante
— Soit T+ = +∞.

27
— Soit T+ ∈ ]t0 , +∞[ et limt↑T+ ∥X(t)∥ = +∞.
De même,
— Soit T− = +∞.
— Soit T− ∈ ]−∞, t0 [ et limt↓T− ∥X(t)∥ = +∞.

Définition 2.13. (a) Un point d’équilibre Xe de (2.3) estune solution indépen-


dante du temps, c’est-à-dire Xe ∈ R2 vérifiant F (Xe ) = 00 .
(b) Un point d’équilibre Xe est dit stable pour t ⩾ t0 , si toute solution initialement
proche de Xe est définie et reste proche de Xe pour tout temps t ⩾ t0 . Sinon, il
est dit instable.
(c) Un point d’équilibre Xe est dit asymptotiquement stable s’il est stable pour
t ⩾ t0 et si toute solution initialement proche de Xe converge vers Xe lorsque
t → +∞.

Remarque 2.14. Si X est une solution de (2.3) vérifiant limt→+∞ X(t) = L ∈ R2 ,


alors L est nécessairement un point d’équilibre. Voir l’exercice 2.6 (exercice traité
en cours).

L’étude de la stabilité et de la stabilité asymptotique d’un point d’équilibre


Xe passe par l’étude du système linéarisé autour de Xe , que nous introduisons
ci-dessous. Comme F (Xe ) = 0, le système (2.3) est équivalent à

(X − Xe )′ = F (X) − F (Xe ).

On note Ç ∂f ∂f
å
∂x ∂y
∇F = ∂g ∂g
∂x ∂y

Au premier ordre lorsque X est proche de Xe , on a la formule de Taylor

F (X) − F (Xe ) = ∇F (Xe )(X − Xe ) + o(X − Xe ),

où o(Y ) désigne une fonction vectorielle telle que lim∥Y ∥→0 o(Y )
∥Y ∥
= 0. Ainsi, au
voisinage du point d’équilibre Xe , il est intéressant d’étudier le système linéaire

Y ′ = ∇F (Xe )Y.

Nous admettrons le résultat suivant.

Théorème 2.15. Dans le contexte précédent, si les parties réelles des valeurs
propres de ∇F (Xe ) sont strictement négatives alors le point Xe est asymptotique-
ment stable.

28
Exemple 2.16. On s’intéresse au système de Lokta-Volterra (modèle simplifié
pertinent en dynamique des populations)
®
x′ = x(1 − y)
y ′ = y(x − 1)

Les points d’équilibre sont O(0; 0) et A(1; 1).


On observe que le système linéarisé autour de l’équilibre O est
Å ã
′ 1 0
Y = Y.
0 −1

La matrice est diagonale avec deux valeurs propres distinctes 1 et −1. Le point
O(0; 0) est un point selle, à la fois pour le système linéarisé et pour le système non
linéaire.
Autour de l’équilibre A, le système linéarisé s’écrit
Å ã
′ 0 −1
Z = Z.
1 0

Les valeurs propres sont complexes conjuguées. Le point d’équilibre est un centre
pour le système linéaire, avec des trajectoires circulaires. Pour le système non
linéaire, autour du point d’équilibre A, les trajectoires sont également des courbes
fermées, proches de cercle, mais la justification de cette observation demanderait
d’autres outils qui ne seront pas abordés dans ce cours introductif.

2.3 Exercices
Exercice 2.1. Résoudre les équations suivantes :

y ′ = t(y 2 − y), 1 + t2 y ′ = y, y ′ = et−y , 1 + t2 y ′ = 1 + y 2 .


Exercice 2.2. On considère l’équation différentielle :

y′ = y + y2 (F)

(a) Déterminer les solutions constantes de (F). Soit (t0 , y0 ) ∈ R2 . On note z la


solution maximale de (F) vérifiant la condition initiale z(t0 ) = y0 .
(b) Étudier les variations de z en fonction des valeurs y0 .
(c) On suppose que y0 ∈ ]−1, 0[. Montrer que z est définie sur R et calculer les
limites de z(t) quand t → −∞ et t → +∞.

29
(d) On suppose que y0 > 0. Montrer que z est définie sur un intervalle de la forme
]−∞, a[ avec a ∈ R et calculer les limites de z(t) aux bornes de son domaine de
définition. (On pourra utiliser l’inégalité y ′ ⩾ z 2 ).
(e) On suppose que y0 < −1. Montrer que z est définie sur un intervalle de la
forme ]a, +∞[ avec a ∈ R.
(f) Résoudre (F) explicitement et retrouver les résultats précédents.
Exercice 2.3. Les équations de Bernoulli sont des équations de la forme :

y ′ + a(t)y + b(t)y α = 0, avec α ̸= 1.

Pour les résoudre, on divise par y α , puis on pose z = y 1−α . On est alors ramené à
une équation différentielle linéaire en z.
Résoudre les équations différentielles suivantes :
(a) y ′ + ty = t3 y 3 ,
(b) ty ′ + 3y = t2 y 2 ,
(c) y ′ + y = ty 3 .
Exercice 2.4. Les équations de Riccati sont des équations de la forme :

y ′ + a(t)y + b(t)y 2 = c(t).

On peut les résoudre si on connaît une solution particulière y0 . En posant y = y0 +v,


on se ramène à résoudre une équation de Bernoulli en v.
(a) Résoudre : t3 y ′ + y 2 − 5t2 y + 2t4 = 0. On pourra vérifier que la fonction t 7→ t2
est solution.
(b) Résoudre : (1+t3 )y ′ = y 2 +t2 y+2t. On pourra chercher une solution particulière
de la forme y0 (t) = tα .
Exercice 2.5. Pour un réel α > 0, on considère l’équation différentielle à variables
séparées
x′ = xα + 1, x(0) = x0 > 0.
(a) Exprimer la solution générale de l’équation en introduisant la fonction
Z y

G(y) = α
.
0 σ +1

(b) Dans les deux cas α = 1 et α = 2, résoudre explicitement les équations.


(c) Discuter le comportement de G sur [0, ∞[ en fonction de α. Déterminer quand
les solutions maximales positives de l’équation sont globales ou explosent en temps
fini en fonction de α.

30
Exercice 2.6. Soit z : [0, ∞[ → R une fonction de classe C 1 .
(a) On suppose que

lim z(t) = z0 et lim z ′ (t) = ℓ


t→+∞ t→+∞

pour z0 , ℓ ∈ R. Montrer que ℓ = 0.


(b) Soit F : R2 → R2 une fonction de classe C 1 . Soit X une solution du système
X ′ = F (X) qui existe sur [0, +∞[. Montrer que si X satisfait limt→+∞ X(t) = X∞
où X∞ ∈ R2 , alors X∞ est un point d’équilibre du système.
Exercice 2.7. On considère les trois systèmes non linéaires :
® ′ ® ′ ® ′
x = y2 x = −1 x = y2 − 1
(E1 ) : (E2 ) : (E3 ) :
y′ = 1 y ′ = −x2 y ′ = 1 − x2

(a) Montrer que toutes les solutions maximales de (E1 ) et (E2 ) sont globales.
(b) Montrer que certaines solutions de (E3 ) explosent en temps fini.
Exercice 2.8. On considère le système différentiel non linéaire suivant :
®
x′ = x(1 − x − y)
(S)
y ′ = y( 43 − y − x2 )

(a) Tracer les isoclines {x′ = 0} et {y ′ = 0} et déterminer les points d’équilibre.


(b) Indiquer dans chaque région du plan le sens du champ de vecteurs.
(c) Calculer, pour chaque équilibre, la matrice jacobienne, les valeurs propres as-
sociées et déterminer le portrait de phase du linéarisé.
Exercice 2.9. On considère le système différentiel non linéaire suivant :
®
x′ = −x + y + xy
(S)
y ′ = −3y − x2

(a) Montrer que (0, 0) est le seul équilibre du système.


(b) Calculer, pour cet équilibre, la matrice jacobienne, les valeurs propres associées
et déterminer le portrait de phase du linéarisé. Que peut-on en déduire ?
(c) Tracer les isoclines {x′ = 0} et {y ′ = 0} et indiquer dans chaque région du
plan le sens du champ de vecteurs.
(d) Soient t0 ∈ R et (x0 , y0 ) ∈ R2 . On note (x, y) la solution maximale de (S)
définie sur l’intervalle J et vérifiant la condition initiale x(t0 ) = x0 et y(t0 ) = y0 .
On pose pour tout t ∈ J, V (t) = x2 (t) + y 2 (t). Montrer que pour tout t ∈ J,
−7V (t) ⩽ V ′ (t) ⩽ −V (t).

31
(e) En déduire que J = R.
(f) Montrer que lim

x(t), y(t) = (0, 0).
t→+∞

(g) On suppose y0 > 0. Montrer que lim y(t) = +∞.


t→−∞

32
Chapitre 3

Étude métrique des courbes

3.1 Longueur d’un arc paramétré


Définition 3.1. Soit N = 2 ou 3. Une courbe paramétrée Γ est la donnée
— d’un intervalle I de R ;
— d’une fonction F⃗ : I → RN de classe C 1 sur I.
De plus,
— Si la courbe est incluse dans un plan (par exemple, si N = 2), on l’appelle
courbe plane ;
— Sinon, on l’appelle courbe gauche.

Remarque 3.2. (a) Une courbe paramétrée peut se représenter comme un lieu
−−→
géométrique : ensemble des points M (t) (du plan ou de l’espace) tels que OM (t) =
F⃗ (t) lorsque t parcourt I.
(b) Par exemple dans le plan, la représentation paramétrique d’une courbe (la
donnée de la fonction F⃗ : I → R2 ) est souvent plus pertinente en géométrie que la
représentation cartésienne y = f (x) ;
(c) On notera F = F⃗ par simplicité, et
Ñ é
Å ã f
f
F = si N = 2, F = g si N = 3.
g
h

Définition 3.3. Une courbe paramétrée F : I → RN est dite régulière si pour


tout t ∈ I, F ′ (t) ̸= 0.

33
Définition 3.4. Soit I = [t0 , t1 ] où t0 < t1 . On appelle longueur de l’arc Γ défini
par F pour t ∈ I, la quantité
Z t1
L(Γ) = ∥F ′ (t)∥ dt. (3.1)
t0

Remarque 3.5. On rappelle que dans ce cours ∥ · ∥ est la norme euclidienne de


RN , p p
∥X∥ = x2 + y 2 si N = 2, ∥X∥ = x2 + y 2 + z 2 si N = 3.

Remarque 3.6. Justifions la définition précédente. Subdivisons l’intervalle I =


[t0 , t1 ] en un grand nombre K d’intervalles [sk , sk + 1] de la façon suivante :

t0 = s0 < s1 < · · · < sK−1 < sK = t1 , (3.2)

avec sk − sk−1 = (t1 − t0 )/K (cette quantité est appelée le pas de la subdivision).
Pour K grand, sk − sk−1 est petit et la formule de Taylor à l’ordre 1 appliquée à
la fonction vectorielle F permet d’écrire pour k ∈ {1, . . . K},

F (sk ) − F (sk−1 ) ≈ F ′ (sk )(sk − sk−1 ),

et ainsi
∥F (sk ) − F (sk−1 )∥ ≈ ∥F ′ (sk )∥(sk − sk−1 ).
Cela signifie que le petit arc partiel Γk , défini par les paramètres t ∈ [tk−1 , tk ],
a pour longueur approchée ∥F ′ (sk )∥(sk − sk−1 ). L’intégrale définissant L(Γ) dans
(3.1) est la limite lorsque K → ∞ de la somme suivante
K
X K
X
∥F (sk − F (sk−1 )∥ ≈ ∥F ′ (sk )∥(sk − sk−1 ).
k=1 k=1

En effet, avec les notations précédentes pour la subdivision en K intervalles de


longueur égale, on sait d’aprèsR t le cours d’intégration que pour une fonction continue
u : [t0 , t1 ] → R, l’intégrale t01 u(t)dt est la limite commune quand K → +∞ des
sommes de Darboux inférieure et supérieure définies respectivement par
K K
t1 − t0 X t1 − t0 X
σ(K) = mk , Σ(K) = Mk
K k=1 K k=1


mk = min u, Mk = max u.
[sk−1 ,sk ] [sk−1 ,sk ]

34
Remarque 3.7. (a) Le vecteur F ′ (t) représente le vecteur vitesse du point M (t) à
l’instant t et ∥F ′ (t)∥ est la longueur du vecteur vitesse, ou vitesse scalaire. Intégrer
la vitesse scalaire sur I = [t0 , t1 ] donne bien la distance parcourue entre les deux
instants t0 et t1 .
(b) Dans le cas particulier F (t) = At + B, où A ∈ RN et B ∈ RN , la courbe
est une ligne droite. La longueur de l’arc sur I est donc la longueur du vecteur
F (t1 ) − F (t0 ), L = ∥F (t1 ) − F (t0 )∥ = (t1 − t0 )∥A∥. Comme F ′ (t) = A, on retrouve
bien cette formule par (3.1)
Z t1 Z t1

L= ∥F (t)∥ dt = ∥A∥ dt = (t1 − t0 )∥A∥
t0 t0

(c) Pour un cercle de rayon r, paramétré par


Å ã
cos θ
F (θ) = r ,
sin θ
Å ã
− sin θ
où θ ∈ [0, 2π], on a F (θ) = r

, d’où ∥F ′ (θ)∥ = r et par la formule (3.1),
cos θ
Z 2π
L= r dt = 2πr,
0

ce qui est la formule bien connue pour le périmètre d’un cercle de rayon r.
(d) Pour une courbe paramétrée donnée en coordonnées polaires :
Å ã
r(θ) cos θ
F (θ) =
r(θ) sin θ
la longueur de la courbe entre θ1 et θ2 est
Z θ2 »
L(θ1 , θ2 ) = (r′ (θ))2 + (r(θ))2 dθ.
θ1

(Voir exercice 3.7.)


Définition 3.8. On dit que

[t0 , t1 ] → [s0 , s1 ]
t 7→ φ(t)

est un changement de paramétrage admissible si la fonction φ est de classe C 1 ,


strictement croissante et telle que

φ(t0 ) = s0 , φ(t1 ) = s1 .

35
Proposition 3.9. La longueur d’un arc paramétré est invariante par changement
de paramétrage admissible.

Démonstration. Rappelons d’abord la formule du changement de variable sur un


intervalle : si f est une fonction continue et ψ est une fonction de classe C 1 sur
un intervalle [s0 , s1 ] dont l’image est contenue dans le domaine de définition de f ,
alors par le changement de variable t = ψ(s),
Z ψ(s1 ) Z s1
f (t)dt = f (ψ(s))ψ ′ (s)ds (3.3)
ψ(s0 ) s0

Comme φ : [t0 , t1 ] → [s0 , s1 ] est bijective (car strictement monotone), on peut


définir ψ : [s0 , s1 ], la fonction réciproque de φ, c’est-à-dire vérifiant

ψ(s) = t ⇐⇒ s = φ(t).

Pour la quantité L définie en (3.1), on a


Z t1 Z ψ(s1 ) Z s1
′ ′
L= ∥F (t)∥dt = ∥F (t)∥dt = ∥F ′ (ψ(s))∥ψ ′ (s)ds.
t0 ψ(s0 ) s0

Comme φ′ ⩾ 0 sur [t0 , t1 ], on a aussi ψ ′ (s) = 1


φ′ (ψ(s))
> 0 et donc
Z s1
L= ∥ψ ′ (s)F ′ (ψ(s))∥ds.
s0

En posant G(s) = F (ψ(s)), par la formule de dérivation d’une fonction composée,


on a bien
G′ (s) = ψ ′ (s)F ′ (ψ(s))
et donc Z s1
L= ∥G(s)∥ds.
s0

La nouvelle représentation paramétrique G : [s0 , s1 ] → RN de la courbe Γ donne


bien la même valeur pour la longueur L.

Remarque 3.10. Cela signifie que la longueur est une quantité géométrique in-
trinsèque, qui ne dépend pas d’un choix particulier de représentation paramétrique
de l’arc. Il peut être intéressant de privilégier une représentation paramétrique par-
ticulière, par exemple, l’abscisse curviligne définie ci-dessous.

36
3.2 Abscisse curviligne et courbure
Définition 3.11. Une courbe paramétrée F : I → RN de classe C 1 est dite normale
si pour tout s ∈ I, ∥F ′ (s)∥ = 1.

Définition 3.12. Soit t0 ∈ I fixé. On choisit le point F0 = F (t0 ) comme origine.


On appelle abscisse curviligne du point F (t) la quantité
Z t
φ(t) = ∥F ′ (τ )∥ dτ. (3.4)
t0


Å ã
t
Exemples 3.13. (a) Pour F (t) = 2 , on a ∥F ′ (t)∥ = 1 + (2t)2 = 1 + 4t2
p
t
et donc Z t√
φ(t) = 1 + 4τ 2 dτ.
t0
Å ã
r cos θ
(b) Pour F (θ) = , on a ∥F ′ (θ)∥ = r et donc φ(t) = r(θ − θ0 ).
r sin θ

Remarque 3.14. (a) L’abscisse curviligne est définie à une origine près et son
signe diffère selon que t < t0 ou t > t0 . Si t > t0 , elle coïncide avec la longueur de
l’arc entre t0 et t, sinon, elle coïncide avec l’opposé de cette longueur. L’abscisse
curviligne joue donc le même rôle que l’abscisse d’un point sur un axe orienté muni
d’un repère.
(b) L’application t ∈ I 7→ φ(t) ∈ RN réalise une bijection de I sur son image
J = φ(I). On considère ψ la fonction réciproque de φ, c’est-à-dire vérifiant

ψ(s) = t ⇐⇒ s = φ(t).

Comme, pour tout t ∈ I, ψ(φ(t)) = t on a


1
φ′ (t)ψ ′ (φ(t)) = 1 et de façon équivalente ψ ′ (s) = . (3.5)
∥F ′ (ψ(s))∥

Le résultat suivant montre que l’on peut toujours se ramener à une courbe
paramétrée normale par le changement de paramétrage de l’abscisse curviligne.

Proposition 3.15. Soit F : I → RN une courbe paramétrée de classe C 2 régulière.


Soit t0 ∈ I.
(a) L’abscisse curviligne (3.4) définit un changement de paramètrage admissible
au sens de la définition 3.8.

37
(b) En utilisant l’abscisse curviligne φ comme paramétrage, c’est-à-dire en défi-
nissant
G(φ(t)) = F (t), de façon équivalente G(s) = F (ψ(s)),
on a ∥G′ (s)∥ = 1, ce qui signifie que la courbe paramétrée G : J → RN est normale.
Démonstration. Pour tout t ∈ I, φ′ (t) = ∥F ′ (t)∥ > 0. De plus, par (3.5), pour
tout s ∈ J,
F ′ (ψ(s))
G′ (s) = ψ ′ (s)F ′ (ψ(s)) = ,
∥F ′ (ψ(s)∥
ce qui implique ∥G′ (s)∥ = 1.
Définition 3.16. Soit G : I → RN une courbe paramétrée de classe C 1 normale.
— La fonction T⃗ : I → RN , s 7→ T⃗ (s) = G′ (s) est appelée vecteur unitaire
tangent à G.
— Si de plus, la courbe paramétrée est de classe C 2 , la fonction γ : I → [0, +∞[,
s 7→ ∥G′′ (s)∥ est appelée courbure associée à G.
Remarque 3.17. — Lorsqu’une courbe paramétrée est normale, l’expression
du vecteur unitaire tangent est donnée par la définition 3.11. Lorsque la
courbe paramétrée F : I → RN est quelconque, on considère la courbe
paramétrée G : J → RN définie par le paramétrage de l’abscisse curvi-
ligne φ(t), c’est-à-dire F (t) = G(φ(t)). On a alors F ′ (t) = φ′ (t)G′ (φ(t)) =
∥F ′ (t)∥G′ (φ(t)) et donc

F ′ (t)
G′ (φ(t)) = .
∥F ′ (t)∥
Ceci justifie l’expression suivante pour le vecteur unitaire tangent exprimé
dans le paramétrage initial
F ′ (t)
T⃗ (t) = .
∥F ′ (t)∥

— Une façon habituelle de faire les calculs consiste à écrire G(s) = F (t) avec
s = φ(t) de sorte que ds
dt
= φ′ = ∥F ′ ∥ et donc ds
dt
= ∥F1′ ∥ . Ainsi,

dG dF dt F′
T⃗ = = = .
ds dt ds ∥F ′ ∥

— En utilisant la formule de dérivation F ′′ = φ′′ G′ (φ) + (φ′ )2 G′′ (φ), on peut


également trouver une expression générale de la courbure en fonction du
paramétrage initial. Voir §3.3, §3.5.

38
3.3 Courbes planes. Repère de Frenet
Dans cette partie, on considère le cas des courbes planes, N = 2, et on considère
une courbe paramétrée F : I → R2 régulière et de classe C 2 . Comme dans la
proposition 3.15, on définit à partir de F et de l’abscisse curviligne une courbe
paramétrée G : J → R2 normale. On a G(s) = F (ψ(s)) et ∥G′ (s)∥ = 1. On
rappelle que le vecteur tangent unitaire est alors défini par
T⃗ = G′ .
Le vecteur T⃗ (s) de R2 ayant pour norme 1, il existe une fonction α : J → R de
classe C 2 telle que Å ã
cos α(s)
T⃗ (s) = .
sin α(s)
Remarque 3.18. La preuve de l’existence d’une telle fonction α, appelée relève-
ment n’est pas évidente. Elle est admise dans ce cours.
Définition 3.19. Le vecteur unitaire normal N ⃗ (s) est défini par
Å ã
⃗ − sin α(s)
N (s) = .
cos α(s)

Le repère orthonormal direct (G(s); T⃗ (s), N


⃗ (s)) est appelé repère de Frenet associé
à G.
Remarque 3.20. Le vecteur N ⃗ est obtenu à partir de T⃗ par une rotation d’angle
π
2
; il s’agit du vecteur directement normal à T⃗ en le paramètre s.
Proposition 3.21. (a) La courbure γ, définie par γ(s) = ∥G′′ (s)∥, vérifie
γ(s) = |α′ (s)|.

(b) Les vecteurs T⃗ et N


⃗ vérifient

⃗ ⃗
⃗ = dT ,
N T⃗ = −
dN
.
dα dα
(c) Les vecteurs T⃗ , N
⃗ et la fonction α vérifient

dT⃗ ⃗,

dN
= α′ N = −α′ T⃗ ,
ds ds
ce qui se représente matriciellement par
Ç å Å ãÇ⃗å
d T⃗ 0 α′ T
⃗ = ′ ⃗ .
ds N −α 0 N

39
(d) En particulier,
dT⃗ ⃗
dN
γ(s) = = .
ds ds
Démonstration. La relation (a) se déduit directement de G′ = T⃗ , G′′ = α′ N ⃗ , et
⃗ ∥ = 1 qui donnent : γ = ∥G′′ ∥ = |α′ |. Les relations (b) et (c) s’obtiennent par
∥N
dérivation.
Définition 3.22. — La fonction γ1 (s) = α′ (s) est appelée courbure algébrique
de la courbe paramétrée G en le paramètre s et vérifie γ = |γ1 |.
— En un paramètre s ∈ J tel que γ1 (s) ̸= 0, on définit le rayon de courbure
algébrique R(s) par
1
R(s) = .
γ1 (s)
— On définit le centre de courbure Ω(s) par
⃗ (s).
Ω(s) = G(s) + R(s)N

— Le cercle de centre Ω(s) et de rayon |R(s)| s’appelle le cercle osculateur à la


courbe paramétrée G en le paramètre s.
On peut obtenir une formule pour la courbure algébrique γ1 directement à
partir de la courbe paramétrée F , sans passer par la courbe paramétrée normale
G.
Proposition 3.23. Pour tout s ∈ J,
det(F ′ (t), F ′′ (t))
γ1 (s) = où s = φ(t).
∥F ′ (t)∥3
Démonstration. On a

F ′ = φ′ T⃗ ,
F ′′ = φ′′ G′ (φ) + (φ′ )2 G′′ (φ) = φ′′ T⃗ + (φ′ )2 α′ N
⃗.

Comme det(T⃗ , T⃗ ) = 0 et det(T⃗ , N


⃗ ) = 1, on obtient

det(F ′ , F ′′ ) = (φ′ )3 α′ = ∥F ′ ∥3 α′ .

Ainsi,
′ det(F ′ , F ′′ )
α = .
∥F ′ ∥3

40
Exemples 3.24. (a) La courbure d’un cercle de rayon R est constante égale à
1/R, et son rayon de courbure est bien R. Voir l’exercice 3.3.
(b) En revanche, la courbure d’une ellipse n’est constante que si l’ellipse est un
cercle. Voir l’exercice 3.4.
(c) La Åcourbure
ã d’une courbe paramétrée donnée en coordonnées cartésiennes
x(t)
F (t) = a pour expression
y(t)

dT⃗ |x′′ (t)y ′ (t) − y ′′ (t)x′ (t)|


γ= = 3 .
ds (x′ (t))2 + (y ′ (t))2 ) 2

(Voir exercice 3.6.)


La courbure d’une courbe paramétrée donnée en coordonnées polaires
Å ã
r(θ) cos θ
F (θ) =
r(θ) sin θ

a pour expression
|2(r′ (θ))2 − (r′′ (θ) − r(θ))r(θ)|
γ= 3 .
((r′ (θ))2 + (r(θ))2 ) 2
(Voir exercice 3.7.)

3.4 Rappels sur le produit vectoriel dans R3


Ici, R3 est muni dans sa base orthonormée directe usuelle. On rappelle que le
produit mixte de trois vecteurs ⃗u, ⃗v , w
⃗ de R3 , noté [⃗u, ⃗v , w]
⃗ est

[⃗u, ⃗v , w]
⃗ = det(⃗u, ⃗v , w),

déterminant des trois vecteurs ⃗u, ⃗v , w.⃗


Par définition, le produit vectoriel de deux vecteurs ⃗u et ⃗v colinéaire de R3 est
le vecteur nul. Le produit vectoriel de deux vecteurs ⃗u et ⃗v non colinéaires de R3
est l’unique vecteur, noté ⃗u ∧ ⃗v , tel que pour tout vecteur w,

⃗ = (⃗u ∧ ⃗v ) · w
[⃗u, ⃗v , w] ⃗,

De façon équivalente, on peut définir le produit vectoriel ⃗u ∧ ⃗v de deux vecteurs ⃗u


et ⃗v non colinéaires de R3 comme l’unique vecteur de R3 tel que
— ⃗u ∧ ⃗v est orthogonal à ⃗u et à ⃗v ;
— ∥⃗u ∧ ⃗v ∥ = ∥⃗u∥∥⃗v ∥| sin θ| où θ est l’angle entre les deux vecteurs ⃗u et ⃗v ;

41
— {⃗u, ⃗v , ⃗u ∧ ⃗v } forme une base directe de R3 .
Enfin, on peut définir le produit vectoriel par ses coordonnées. Si les vecteurs ⃗u et
⃗v ont pour coordonnées
Ñ é Ñ é
u1 v1
⃗u = u2 , ⃗v = v2 ,
u3 v3
alors Ñ é
u2 v3 − u3 v2
⃗u ∧ ⃗v = u3 v1 − u1 v3
u1 v2 − u2 v1
On rappelle quelques autres propriétés du produit vectoriel.
(a) ⃗u ∧ ⃗v = −⃗v ∧ ⃗u.
(b) ⃗u ∧ (⃗v ∧ w)
⃗ = (⃗u · w)⃗ ⃗ (voir exercice 3.9).
⃗ v − (⃗u · ⃗v )w
(c) ⃗u ∧ ⃗v = 0 si et seulement si ⃗u et ⃗v sont colinéaires.

3.5 Cas des courbes gauches


Dans cette partie, on considère le cas des courbes gauches, N = 3, et on
considère une courbe paramétrée F : I → R3 régulière et de classe C 3 . Comme
précédemment, on définit à partir de F et de l’abscisse curviligne une courbe
paramétrée G : J → R3 qui est normale. On a G(s) = F (ψ(s)) et ∥G′ (s)∥ = 1. Le
vecteur tangent unitaire est alors défini par

T⃗ (s) = G′ (s).

On rappelle aussi que la fonction courbure γ est définie par

dT⃗
γ = ∥G′′ (s)∥ = .
ds
⃗.
On définit maintenant le vecteur normal N
⃗ est défini
Définition 3.25. On suppose que γ > 0. Le vecteur unitaire normal N
par la relation
′′ dT⃗
⃗ = G (s)
N = ds⃗
∥G′′ (s)∥ dT
ds
En particulier,
dT⃗ ⃗.
= γN
ds
42
Remarque 3.26. Comme ∥T⃗ ∥2 = T⃗ · T⃗ = ⃗0, on a

dT⃗ ⃗
2 · T = 0,
ds
ce qui justifie que T⃗ et N⃗ sont orthogonaux.
La définition du vecteur N ⃗ diffère de celle de la dimension 2 donnée dans la
proposition 3.21. En effet, en dimension 2, le sens du vecteur N ⃗ est imposée pour
avoir un repère (T⃗ , N
⃗ ) direct. Ici, on donne au vecteur N⃗ le sens du vecteur dT⃗ .
ds

On utilise maintenant le produit vectoriel pour compléter une base locale à


partir de T⃗ et N
⃗ , appelée trièdre de Frenet.

Définition 3.27. Le repère orthonormé direct (G(s); T⃗ (s), N


⃗ (s), B(s))
⃗ où
⃗ = T⃗ ∧ N
B ⃗,

est appelé trièdre de Frenet de l’arc en le paramètre s.


Le plan (G(s), T⃗ (s), N
⃗ (s)) est appelé plan osculateur à la courbe en G(s).

Remarque 3.28. (a) Le trièdre de Frenet est bien un repère orthonormé par les
propriétés du produit vectoriel et

∥T⃗ ∧ N
⃗ ∥ = ∥T⃗ ∥ · ∥N
⃗ ∥ = 1.

(b) Le plan osculateur est également défini par les deux vecteurs F ′ (t) (vecteur
vitesse) et F ′′ (t) (vecteur accélération) car
F′
T⃗ = ,
∥F ′ ∥
(3.6)
dT⃗ dt 1 dT⃗
Å ã
⃗ 1 d 1
γN = = = ′′
F + T⃗ .
dt ds ∥F ′ ∥ dt ∥F ′ ∥2 dt ∥F ′ ∥
Définition 3.29. On appelle torsion de la courbe gauche la fonction définie par

dN
θ=− · (T⃗ ∧ N
⃗)
ds
Définition 3.30. Lorsqu’elles sont définies, les fonctions γ1 et 1θ s’appellent res-
pectivement rayon de courbure et rayon de torsion de la courbe.
Proposition 3.31. Les relations suivantes sont vérifiées :
(a) Expression alternative de la torsion :

dN ⃗
θ=− ⃗ = dB · N
·B ⃗.
ds ds
43

(b) Expression de dN
ds
:

dN
= −γ T⃗ − θB.

ds

(c) Expression de dB
ds
:
dB⃗
⃗.
= θN
ds
(d) Les deux dernières relations s’expriment sous la forme matricielle suivante :
Ñ⃗é Ñ éÑ⃗é
T 0 γ 0 T
d ⃗ ⃗ .
N = −γ 0 −θ N
ds ⃗ ⃗
B 0 θ 0 B

Démonstration. Comme précédemment pour T⃗ , comme ∥N


⃗ ∥2 = 1, on a


dN
2 ⃗ = 0.
·N
ds
Comme {T⃗ , N
⃗ , B}
⃗ forment une base de R3 , il existe a, b ∈ R tels que


dN
= aT⃗ + bB.

ds
De plus, comme ∥T⃗ ∥ = ∥B∥
⃗ = 1,


dN ⃗
dN
a= · T⃗ et b = ⃗ = −θ.
·B
ds ds
⃗ · T⃗ = 0, ce qui donne (avec ∥N
Pour calculer a, on dérive la relation N ⃗ ∥ = 1),


dN ⃗
⃗ · dT = −γ.
· T⃗ = −N
ds ds
On a bien obtenu
dN⃗
= −γ T⃗ − θB.

ds
⃗ ·B
En dérivant la relation N ⃗ = 0, on trouve

⃗ ⃗
⃗ · dB = − dN · B
N ⃗ = θ.
ds ds
⃗ ·B
Finalement, puisque B ⃗ = 1, on a


dB ⃗ = 0,
·B
ds
44
et donc

dB
= ãT⃗ + b̃N
⃗,
ds
avec

dB dT⃗ ⃗
ã = · T⃗ = − ·B =0
ds ds
dT⃗ ⃗ ), et
(car ds
= γN
dB⃗
b̃ = ⃗ = θ.
·N
ds
Ceci donne bien la relation recherchée

dB ⃗
= θN
ds
⃗ ⃗.
entre dB
ds
et N
Comme dans la proposition 3.23, on peut également obtenir les formules sui-
vantes.

Proposition 3.32. Pour tout s ∈ J,

∥F ′ (t) ∧ F ′′ (t)∥
γ(s) = ,
∥F ′ (t)∥3
det(F ′ (t), F ′′ (t), F ′′′ (t))
θ(s) = −
∥F ′ (t) ∧ F ′′ (t)∥2

où s = φ(t).

Voir l’exercice 3.11.

3.6 Exercices
Exercice 3.1. On rappelle que la fonction cosinus hyperbolique est définie sur R
par cosh x = 12 (ex + e−x ). Quelle est la longueur de l’arc de chaînette, d’équation
y = a cosh xa , compris entre les droites d’équation x = 0 et x = b pour b > 0 fixé ?

Exercice 3.2. La cycloïde est la courbe décrite par un point fixe M d’un cercle
de rayon R qui roule sans glisser sur l’axe Ox.
(a) Donner un paramétrage de la cycloïde. On supposera que le point M coïncide
avec le point O initialement.
(b) Calculer la longueur de l’arc de cycloïde décrit après un tour complet du cercle.

45
Exercice 3.3. Vérifier que la courbure d’un cercle de rayon R > 0 vaut 1/R.

Exercice 3.4. On considère l’ellipse d’équation

x2 y 2
+ 2 =1 avec 0 < b < a.
a2 b
(a) Donner une représentation paramétrique de l’ellipse.
(b) Donner une expression de la longueur de l’ellipse.
(c) Calculer la courbure de l’ellipse en tout point.
(d) Quels sont les points où la courbure est maximale ?

Exercice 3.5. Donner une représentation paramétrique de la courbe définie par


chacune des équations suivantes, calculer la longueur de la courbe ; ensuite, déter-
miner le repère de Frenet, le rayon de courbure et le centre du cercle osculateur en
chaque point.
(a) y 2 = x3 pour 1 ⩽ y ⩽ a3 (a > 1).
(b) r(θ) = e−θ pour θ ⩾ 0.

Exercice 3.6. Déterminer explicitement, en fonction de x(t) et y(t) et de leurs


dérivées successives, la courbure
Å ã d’une courbe plane représentée en coordonnées
x(t)
cartésiennes par F (t) = .
y(t)
Exercice 3.7. Une courbe plane peut être représentée en coordonnées polaires
grâce à la donnée d’une fonction r(θ). La représentation paramétrique de la courbe
est alors de la forme :
γ(θ) = (r(θ) cos θ, r(θ) sin θ)
où θ appartient à un intervalle I de R.
(a) Donner la formule de la longueur de l’arc en coordonnées polaires.
(b) Donner l’expression de la courbure en coordonnées polaires.

Exercice 3.8. Quelle est la longueur totale de la cardioïde, courbe plane fermée,
paramétrée en coordonnées polaires par

r(θ) = a(1 + cos θ),

pour a > 0 fixé.

Exercice 3.9. (a) Montrer la relation : ⃗u ∧ (⃗v ∧ w)


⃗ = (⃗u · w)
⃗ ⃗v − (⃗u · ⃗v ) w.

(b) Le produit vectoriel est-il associatif ?

46
(c) Déterminer la condition que doivent vérifier les trois vecteurs ⃗u, ⃗v et w
⃗ de R3
pour que
⃗u ∧ (⃗v ∧ w)
⃗ = (⃗u ∧ ⃗v ) ∧ w.

Exercice 3.10. Montrer l’identité

(⃗u ∧ ⃗v ) · (w
⃗ ∧ ⃗z) = (⃗u · w)(⃗
⃗ v · ⃗z) − (⃗u · ⃗z)(⃗v · w).

Exercice 3.11. Justifier les formules


∥F ′ (t) ∧ F ′′ (t)∥
γ(s) = ,
∥F ′ (t)∥3
det(F ′ (t), F ′′ (t), F ′′′ (t))
θ(s) = −
∥F ′ (t) ∧ F ′′ (t)∥2

données dans la proposition 3.32 du cours.

Exercice 3.12. Soit la courbe gauche F définie par

x(t) = a et cos t, y(t) = a et sin t, z(t) = b et , pour t ∈ R.

où a et b sont deux réels strictement positifs fixés.


(a) En prenant l’origine en t = 0, calculer l’abscisse curviligne notée s.
(b) Déterminer le trièdre de Frenet, la courbure et la torsion en tout point de la
courbe.

Exercice 3.13. Soit la courbe gauche F définie par

x(t) = cos t, y(t) = sin t, z(t) = cosh t, pour t ∈ R.

(Voir l’exercice 3.1 pour la définition de cosh). Déterminer


(a) L’équation cartésienne du plan osculateur.
(b) L’abscisse curviligne (en prenant pour origine t = 0).
(c) Le vecteur unitaire tangent et le vecteur unitaire normal.
(d) Le rayon de courbure.
(e) Le rayon de torsion.

47
Chapitre 4

Intégrales multiples

4.1 Intégrables doubles


4.1.1 Intégrale double d’une fonction sur un rectangle
On s’intéresse ici à la définition de l’intégrale d’une fonction continue f : R →
R, où R est le rectangle

R = [a, b] × [c, d] = {(x, y) ∈ R2 : a ⩽ x ⩽ b, c ⩽ y ⩽ d}.

On s’inspire de la définition de l’intégrale sur un intervalle rappelée brièvement


dans la remarque 3.6. Soit K ⩾ 1 grand et les subdivisions régulières de [a, b] et
[c, d] suivantes :

a = t0 < t1 < . . . < tK = b, c = s0 < s1 < . . . < sK = d,

avec
b−a d−c
tj − tj−1 = , sk − sk−1 = .
K K
De même qu’une surface (calculée par une intégrale simple) peut être approchée par
l’aire d’une famille de rectangles (sommes de Darboux inférieure et supérieure dans
la remarque 3.6, on va approcher un volume par une famille de parallélépipèdes
verticaux, dont les bases sont des petits rectangles du plan. On définit les sommes
de Darboux inférieures et supérieures
(b − a)(d − c) X
σ(K) = mj,k ,
K2 1⩽j⩽K
1⩽k⩽K

(b − a)(d − c) X
Σ(K) = Mj,k ,
K2 1⩽j⩽K
1⩽k⩽K

48

mj,k = min f (x, y), Mj,k = max f (x, y),
(x,y)∈Rj,k (x,y)∈Rj,k

et
Rj,k = [tj−1 , tj ] × [sk−1 , sk ].

Définition 4.1. Soit f : R → R une fonction continue. Lorsque K → +∞, les


sommes de Darboux inférieures et supérieures convergent vers un réel, noté
ZZ
f (x, y)dxdy,
R

et appelé intégrable double de f sur R.

Remarque 4.2. Cette définition contient en fait un résultat mathématique (les


sommes de Darboux inférieures et supérieures ont une limite commune) qui est
admis. Sa démonstration est relativement élémentaire, mais nécessite la notion de
continuité uniforme.

4.1.2 Théorème de Fubini sur un rectangle


Pour le calcul effectif de l’intégrable sur un rectangle, on n’utilise pas en général
la définition de l’intégrale mais plutôt le résultat suivant que l’on admettra.

Théorème 4.3. Soit f : R → R une fonction continue. On a


ZZ Z b ñZ d ô Z d ñZ b ô
f (x, y)dxdy = f (x, y)dx dy = f (x, y)dy dx.
R a c c a

Exemple 4.4. Calcul de deux manières différentes de l’intégrale :


ZZ
(x2 + xy + 1)dxdy.
[0,1]×[0,1]

4.1.3 Intégrale double sur un domaine borné


On considère une fonction continue f : D → R où D est une partie de R2 . Pour
définir l’intégrale double ZZ
f (x, y)dxdy,
D
le point de départ est le même que pour un rectangle : le domaine étant borné, on
peut l’inclure dans un rectangle R au sens précédent et ne regarder les valeurs de
la fonction que sur les rectangles où la fonction f est définie. En réalité, certaines

49
propriétés sur le domaine D sont requises pour que la procédure fonctionne. Dans
la suite, nous allons nous intéresser au calcul explicite d’intégrales doubles sur des
domaines simples plutôt qu’à approfondir
RR la théorie.
On admet dans la suite que f 7→ D f (x, y)dxdy est une forme linéaire, c’est-
à-dire pour f, g : D → R, λ, µ ∈ R, on a
ZZ ZZ ZZ
(λf + µg)(x, y)dxdy = λ f (x, y)dxdy + µ g(x, y)dxdy.
D D D

On considère maintenant le cas où le domaine D est délimité par deux droites


verticales et les graphes de deux fonctions continues.
Théorème 4.5. Soient u : [a, b] → R et v : [a, b] → R deux fonctions continues
telles que u(x) ⩽ v(x) pour tout x ∈ [a, b]. Si
D = {(x, y) ∈ R2 : a ⩽ x ⩽ b, u(x) ⩽ y ⩽ v(x)},
et f : D → R est une fonction continue, alors
ZZ Z b ñZ v(x) ô
f (x, y)dxdy = f (x, y)dy dx.
D a u(x)

Exemple 4.6. Calculer l’intégrale suivante


ZZ
(3x + y 2 )dxdy
D

sur le triangle D = {(x, y) ∈ R2 : x ⩾ 0, y ⩾ 0, 2x + y ⩽ 1}.


On peut bien sûr inverser les rôles de x et de y dans le théorème 4.5.
Lorsque que le domaine D n’est pas de la forme requise par le théorème 4.5,
mais que l’on peut le décomposer en un nombre fini N de domaines disjoints
D1 , . . . , DN de la forme requise, alors on a
ZZ XN ZZ
f (x, y)dxdy = f (x, y)dxdy.
D n=1 Dn

4.1.4 Formule du changement de variable


Donnons maintenant pour les intégrales doubles un analogue de la formule (3.3)
pour les intégrales simples.
Théorème 4.7. Soit (s, t) ∈ Ω 7→ (x, y) = ψ(s, t) ∈ D une bijection de classe C 1
du domaine Ω vers le domaine D. (Ainsi, ψ(Ω) = D.) On note |Jψ (t, s)| la valeur
absolue du déterminant de la matrice jacobienne de ψ en (t, s). Alors
ZZ Z
f (x, y)dxdy = f (ψ(s, t))|Jψ (s, t)|dsdt (4.1)
D Ω

50
Exemple 4.8. Un changement de variable très classique est la conversion des
coordonnées cartésiennes en coordonnées polaires dans le plan

x = r cos θ, y = r sin θ.

Ce changement de variable ramène le disque de centre 0 et de rayon R > 0 vers le


rectangle [0, R] × [0, 2π]. Le Jacobien est la matrice
Å ã
cos θ −r sin θ
J(r, θ) = ,
sin θ r cos θ

de déterminant |J(r, θ)| = r > 0.


Par exemple, on calcule
ZZ
(3 + 2x + 3y)dxdy,
D

où D est le disque de centre 0 et de rayon 1, par l’égalité


ZZ Z
(3 + 2x + 3y)dxdy = (3 + 2r cos θ + 3r sin θ)rdrdθ
D [0,1]×[0,2π]
Z 2 Z 2π
= (3 + 2r cos θ + 3r sin θ)dθdr
0 0
Z 1
= [3rθ + 2r2 sin θ − 3r2 cos θ]2π
0 dr
0
Z 1
= 6π rdr = 3π.
0

4.2 Intégrales triples


La notion d’intégrale vue pour les intégrables doubles s’étend au cas des inté-
grales triples. On va se concentrer sur les aspects calculatoires.

4.2.1 Calcul d’une intégrale triple sur un parallélépipède


Théorème 4.9. Soit f : [a1 , b1 ] × [a2 , b2 ] × [a3 , b3 ] → R une fonction continue. On
a
ZZZ Z b3 ñZ Z ô
f (x, y, z)dxdydz = f (x, y, z)dxdy dz
[a1 ,b1 ]×[a2 ,b2 ]×[a3 ,b3 ] a3 [a1 ,b1 ]×[a2 ,b2 ]
Z b ®Z 3
ñZ ô ´
= f (x, y, z)dx dy dz
a3 [a2 ,b2 ] [a1 ,b1 ]

51
Remarque 4.10. On peut aussi permuter les variables x, y et z dans ces formules.
Exemple 4.11. Calculer
ZZZ
(x + y + xz)dxdydz.
[0,1]×[0,2]×[1,3]

4.2.2 Formule du changement de variable


Théorème 4.12. Soit (s, t, u) ∈ Ω 7→ (s, t, u) = ψ(s, t, u) ∈ D une bijection de
classe C 1 du domaine Ω vers le domaine D. Soit |Jψ (t, s, u)| la valeur absolue du
déterminant de la matrice jacobienne de ψ en (s, t, u). Alors
ZZ Z
f (x, y, z)dxdydz = f (ψ(s, t, u))|Jψ (s, t, u)|dsdtdu (4.2)
D Ω
Exemple 4.13. On considère le changement de variable en coordonnées sphériques

x = ρ cos θ sin φ,

y = ρ sin θ sin φ,

z = ρ cos φ.

avec ρ > 0, φ ∈ [0, π] et θ ∈ [0, 2π]. On calcule le déterminant de la matrice


jacobienne (en développant par rapport à la dernière ligne)
cos θ sin φ ρ cos θ cos φ −ρ sin θ cos φ
ρ cos θ cos φ −ρ sin θ cos φ
sin θ sin φ ρ sin θ cos θ ρ cos θ sin φ = cos φ
ρ sin θ cos φ ρ cos θ sin φ
cos φ −ρ sin φ 0
cos θ sin φ −ρ sin θ cos φ
+ ρ sin φ
sin θ sin φ ρ cos θ sin φ
= ρ2 sin φ
Cela nous permet, par exemple, de calculer le volume d’une sphère de rayon r > 0 :
S = {(x, y, z) ∈ R3 : x2 + y 2 + z 2 < r},
par la formule de changement de variables :
ZZZ ZZZ
dxdydz = ρ2 sin φ dρdθdφ
S R
où R est le parallélépipède défini par
R = [0, r] × [0, 2π] × [0, π].
En effet, la sphère S est l’image du rectangle R par le changement de variable en
coordonnées sphériques. On trouve
ZZZ ÅZ r ã ÇZ 2π å ÅZ π ã
2 4
dxdydz = ρ dρ dθ sin φdφ = πr3 .
S 0 0 0 3

52
4.3 Exercices
Exercice 4.1. Calculer les intégrales doubles suivantes :
ZZ
(a) sin(x + y) dxdy où R = [0, π2 ] × [0, π2 ].
Z ZR
y
(b) p dxdy où R = [−2, 2] × [3, 7].
R 1 + xy + y 2
ZZ
(c) (x + y)ex+y dxdy où R = [0, 2] × [1, 2]}.
Z ZR
(d) (3x + y) dxdy où D = {(x, y) ∈ R2 : x2 + 2y 2 ⩽ 1, x ⩾ 0}.
D
ZZ
Exercice 4.2. Calculer l’intégrale double xy dxdy où D est la partie bornée
D
du plan délimitée par les paraboles d’équation y = x2 et x = y 2 .

Exercice 4.3. Montrer l’identité


Z +∞
2
e−πx dx = 1.
−∞

On utilisera une intégrale double et les coordonnées polaires.

Exercice 4.4. Pour a, b > 0, calculer l’aire intérieure à l’ellipse d’équation

x2 y 2
+ 2 = 1.
a2 b
Exercice 4.5. Soit V le volume de R3 défini par les conditions suivantes

0 ⩽ x ⩽ 1, 0 ⩽ y ⩽ 1, 0 ⩽ z ⩽ xy.

(a) Calculer le volume de V .


ZZZ
(b) Calculer l’intégrale triple (x + y) dxdydz.
V

Exercice 4.6. Calculer le volume de R3 délimité par les conditions suivantes

0 ⩽ z ⩽ 1 − y2, x2 + y 2 ⩽ 1.

Exercice 4.7. Calculer le volume délimité par le cône d’équation

z 2 = x2 + y 2 ,

53
le paraboloïde d’équation
z = x2 + y 2
et les deux plans d’équations respectives

z = 0, z = 1.

On utilisera les coordonnées cylindriques données par



x = r cos θ

y = r sin θ

z = z.

Exercice 4.8. Calculer le volume d’un anneau de rayon a dont la section est un
cercle de rayon 0 < b < a.

54
Chapitre 5

Surfaces

5.1 Définitions
Définition 5.1. On appelle surface de R3 (ou nappe paramétrée) une application
S : D ⊂ R2 → R3
(u, v) 7→ M (u, v) = (x, y, z)(u, v),
où D est un domaine de R2 et où les fonctions x, y et z sont de classe C 1 .
Définition 5.2. On appelle arc tracé sur la surface S une courbe paramétrée de
la forme
Γ : I ⊂ R → R3
t 7→ (x, y, z)(u(t), v(t)),
où I est un intervalle de R, et u, v sont deux fonctions I → R, de classe C 1 telles
que pour tout t ∈ I, le couple (u(t), v(t)) appartient à D.
Remarque 5.3. (a) Les surfaces définies comme des graphes, c’est-à-dire de la
forme z = f (x, y) où f : D ⊂ R2 → R, sont des cas particuliers de surfaces de R3
puisqu’elles peuvent être décrites par le paramétrage

x(u, v) = u

y(u, v) = v

z(u, v) = f (u, v),

les deux premières coordonnées servant de paramètres.


(b) (Hors programme.) Les équations du type f (x, y, z) = 0 peuvent également
définir des surfaces de R3 . Par exemple, si l’on suppose qu’en un point M0 (x0 , y0 , z0 )
de la surface, on a ∂f∂z
(x0 , y0 , z0 ) ̸= 0, alors le théorème des fonctions implicites
montre que autour de M0 l’équation f (x, y, z) = 0 admet une représentation de la
forme z = g(x, y).

55
5.2 Point régulier, plan tangent et normale à une
surface
Définition 5.4. On dit qu’un point M (u, v) de la surface S est un point régulier
si, en ce point, on a
∂M ∂M ⃗
∧ ̸= 0,
∂u ∂v
ou, de manière équivalente, si la Jacobienne de S en ce point est de rang 2.

Définition 5.5. En un point régulier M (u, v) de la surface S, on appelle plan


tangent, le plan Π passant par ce point et de vecteurs directeurs ∂M
∂u
et ∂M
∂v
ß ™
∂M ∂M
Π = M (u, v) + Vect (u, v); (u, v) .
∂u ∂v

Exemple 5.6. Pour une surface d’équation z = f (x, y) paramétrée par



x(u, v) = u

y(u, v) = v

z(u, v) = f (u, v),

on a Ñ é Ñ é
1 0
∂M ∂M
= 0 , = 1 .
∂u ∂f ∂v ∂f
∂u ∂v
Ces deux vecteurs sont linéairement indépendants et donc tous les points sont
réguliers. Une équation du plan tangent à la surface en un point (x0 , y0 , z0 ) =
(u0 , v0 , f (u0 , v0 )) est donnée par

∂f ∂f
z − z0 = (x − x0 ) (u0 , v0 ) + (y − y0 ) (u0 , v0 ).
∂u ∂v
En effet, un point (x, y, z) appartient au plan tangent si, et seulement si,

1 0 x − x0
0 1 y − y0 = 0,
∂f ∂f
∂u
(u0 , v0 ) ∂v
(u0 , v0 ) z − z0

ce qui donne l’équation ci-dessus en développant le déterminant suivant la dernière


colonne.

Nous admettrons le résultat suivant.

56
Proposition 5.7. — La notion de point régulier ne dépend pas du paramétrage.
— Le plan tangent en un point régulier ne dépend pas du paramétrage.
Proposition 5.8. La tangente en un point M à tout arc tracé sur S est contenue
dans le plan tangent Π en M .
Démonstration. Soit
Γ : I ⊂ R → R3
t 7→ (x, y, z)(u(t), v(t)),
un arc tracé sur la surface S. On notera (abus de notation)
x(t) = x(u(t), v(t)), y(t) = y(u(t), v(t)), z(t) = z(u(t), v(t)).
La tangente en M (t) à l’arc Γ a pour vecteur directeur (pas nécessairement uni-
taire)
Ö è Ö è
Ñ ′ é ∂x ∂x
x (t) ∂u ∂v
y ′ (t) = u′ (t) ∂u
∂y
+ v ′ (t) ∂y
∂v
z ′ (t) ∂z ∂z
∂u ∂v
∂M ∂M
(u(t), v(t)) + v ′ (t)
= u′ (t) (u(t), v(t)),
∂u ∂v
ce qui prouve bien que la tangente est contenue dans le plan tangent à S en
M (u(t), v(t)).
Définition 5.9. En un point régulier M (u, v) de la surface S, on appelle normale
à la surface S, le vecteur perpendiculaire au plan tangent défini par
∂M ∂M
⃗n = (u, v) ∧ (u, v).
∂u ∂u
⃗ =
Le vecteur N ⃗
n
est le vecteur unitaire normal à la surface S.
∥⃗
n∥

5.3 Aire d’une surface


Définition 5.10. Dans le contexte de la définition 5.1, l’aire de la surface Σ définie
par
Σ = {S(u, v) ∈ R3 , (u, v) ∈ D}
est donnée par la quantité
ZZ ZZ Å ã
∂M ∂M
A(Σ) = ∥⃗n(u, v)∥dudv = ∧ (u, v) dudv.
(u,v)∈D (u,v)∈D ∂u ∂v
Cette quantité est indépendante de la paramétrisation choisie.

57
Remarque 5.11. On justifie cette définition par le raisonnement infinitésimal
suivant. Pour de petites variations du et dv (supposées positives pour simplifier)
des paramètres u et v, on a
∂M ∂M
M (u + du, v + dv) = M (u, v) + (u, v)du + (u, v)dv.
∂u ∂v
Les points M (u, v) et M (u + du, v + dv) définissent donc un parallélogramme
ABCD avec
−→ ∂M −−→ ∂M
A = M (u, v), AB = (u, v)du, AD = (u, v)dv.
∂u ∂v
L’aire de ce parallélogramme est donnée par

−→ −−→ ∂M ∂M
∥AB ∧ AD∥ = (u, v) ∧ (u, v) dudv.
∂u ∂v

L’aire totale de la surface s’obtient donc en intégrant cette quantité pour tous les
points de D.
Nous admettons que l’aire ne dépend pas de la paramétrisation choisie.

Exemples 5.12. (a) On reprend l’exemple 5.6. On calcule


Ö ∂f è
− ∂v
∂M ∂M
∧ = − ∂f ∂v
,
∂u ∂v
1

ce qui donne s
Å ã2 Å ã2
∂M ∂M ∂f ∂f
∧ = 1+ + .
∂u ∂v ∂u ∂v
Ainsi, l’aire de la surface

Σ = {(x, y, z) ∈ R3 , z = f (x, y) ∈ D}

est donnée par s


ZZ Å ã2 Å ã2
∂f ∂f
A(S) = 1+ + dudv.
D ∂u ∂v
(b) Application au cas de la demi-sphère de rayon R > 0 :

S = {(x, y, z) ∈ R3 : x2 + y 2 + z 2 = R2 , z ⩾ 0}.

58
La surface est paramétrée par

x(u, v) = u

y(u, v) = v
 √
z(u, v) = R2 − u2 − v 2 ,


ce qui correspond au cadre général précédent avec f (u, v) = R2 − u2 − v 2 . On
calcule
∂f u ∂f v
= −√ , = −√ ,
∂u R2 − u2 − v 2 ∂v R2 − u2 − v 2
et
s
Å ã2 Å ã2
∂f ∂f u2 v2
1+ + = 1+ 2 +
∂u ∂v R − u2 − v 2 R 2 − u2 − v 2
R
=√ .
R − u2 − v 2
2

Le calcul de l’aire se ramène donc au calcul de l’intégrale double suivante


ZZ
R
A(S) = √ dudv,
D R − u2 − v 2
2


D = {(u, v), u2 + v 2 ⩽ r2 }.
On utilise les coordonnées polaires pour calculer cette intégrale
u = r cos θ
v = r sin θ.
Le jacobien est donné par
cos θ −r sin θ
= r.
sin θ r cos θ
Ainsi, l’aire vaut
Z R Z 2π
R
A(S) = √ rdrdθ
0 0 R2 − r 2
Z R
r
= 2πR √ dr
0 R − r2
2
î √ óR
= 2πR − R2 − r2 = 2πR2 .
0

La surface de la demi-sphère étant 2πR , la surface de la sphère est 4πR2 .


2

Le calcul de l’aire de la sphère peut se faire directement en coordonnées sphé-


riques (exercice).

59
5.4 Exercices
Exercice 5.1. Calculer l’aire de la portion du paraboloïde d’équation z = xy
délimitée par l’intérieur du cylindre d’équation x2 + y 2 = 1.

Exercice 5.2. Calculer l’aire de la surface définie par



2 2
x + y = 1

x⩾0

ax ⩽ z ⩽ bx

où 0 < a < b.

Exercice 5.3. Calculer l’aire de la surface définie par



2 2 2 2
x + y + z = a

z⩾0

 2
x + y 2 − ax ⩽ 0

pour a > 0.

Exercice 5.4 (Aire d’une surface de révolution). (a) Formule générale.


Pour 0 < a < b, on considère une fonction f : [a, b] →]0, +∞[ de classe C 1 .
Cette fonction définit un arc de courbe Γ d’équation y = f (x) situé dans le plan
(Ox, Oy). Dans sa rotation autour de l’axe Ox, cet arc engendre une surface S,
appelée surface de révolution engendrée par Γ. Montrer que l’aire de cette surface
est donnée par la formule
Z b »
A(S) = 2π f (x) 1 + (f ′ (x))2 dx.
a

(b) Application. Soit 0 < a < b et c > 0, d > 0. Calculer l’aire du tronc de cône
engendré par la rotation autour de l’axe Ox de la portion de droite définie par

y = cx + d, x ∈ [a, b].

(c) Calculer l’aire engendrée par une arche de cycloïde d’équation


®
x = a(t − sin t)
y = a(1 − cos t)

dans sa rotation autour de l’axe Ox.

60
Chapitre 6

Analyse vectorielle

Dans ce chapitre, l’espace R3 est muni d’un repère orthonormé (O,⃗ı, ⃗ȷ, ⃗k). On
désigne par D un sous-ensemble de R3 .

6.1 Champs de vecteurs


6.1.1 Définition
Définition 6.1. On appelle champ de vecteurs défini dans D une application

V⃗ : D → R3 .

On notera
Ñ é
P (x, y, z)
V⃗ (x, y, z) = Q(x, y, z) = P (x, y, z)⃗ı + Q(x, y, z)⃗ȷ + R(x, y, z)⃗k.
R(x, y, z)

Si M est le point de R3 de coordonnées (x, y, z), on notera aussi V⃗ (x, y, z) = V⃗ (M ).

Dans la suite, on considère des champs de vecteurs de classe C 1 ou plus.

Exemples 6.2. (a) Un champ constant s’écrit V⃗ (M ) = C,


⃗ où C
⃗ est un vecteur
fixe.
(b) Le champ de l’attraction newtonienne s’écrit
m
V⃗ (M ) = −k ⃗ ,
OM

∥OM ∥ 3

où k > 0 est une constante universelle et m > 0 est la masse au point M ̸= 0.

61
6.1.2 Opérateurs
Définition 6.3. On appelle divergence de V⃗ au point M , le scalaire noté div V⃗
défini par
∂P ∂Q ∂R
div V⃗ (M ) = (x, y, z) + (x, y, z) + (x, y, z).
∂x ∂y ∂z
On admettra que la divergence d’un vecteur ne dépend pas du repère choisi.
−−→
Exemple 6.4. On considère le vecteur unitaire ⃗u = OM
OM
. Alors, en notant
p
r= x2 + y 2 + z 2 ,

on a
x y z
⃗u = ⃗ı + ⃗ȷ + ⃗k,
r r r
2 2
y +z x2 + z 2 x2 + y 2 2
div ⃗u = 3
+ 3
+ 3
= .
r r r r
Remarque 6.5. On remarque que la divergence est un opérateur linéaire, c’est-
à-dire
div(λ1 V⃗1 + λ2 V⃗2 ) = λ1 div V⃗1 + λ2 div V⃗2
pour deux champs de vecteurs V1 , V2 et deux réels λ1 , λ2 quelconques.

Définition 6.6. On appelle rotationnel du champ V⃗ au point M , le vecteur noté


⃗ V⃗ (M ) et défini par
rot
Ö∂è Ö è Ö∂ ∂
è
∂x
P ∂y
R − ∂z
Q
⃗ V⃗ (M ) =
rot ∂
∧ Q = ∂
∂z
P − ∂
∂x
R
∂y
∂ ∂ ∂
∂z
R ∂x
Q − ∂y P

On remarque que le rotationnel est un opérateur linéaire.

Remarque 6.7. Pour tout champ de vecteur V⃗ , on a

⃗ V⃗ ) = ⃗0.
div(rot

Voir exercices.

62
6.1.3 Circulation d’un champ de vecteurs
On considère une courbe paramétrée dans R3

Γ : {x(t), y(t), z(t)), a ⩽ t ⩽ b}

qui définit un arc orienté Γ que l’on suppose inclus dans D.

Définition 6.8. La circulation du champ V⃗ : D → R3 le long de Γ est l’intégrale


suivante
Z Ç −−→ å Z
⃗ dOM
V · dt = P dx + Qdy + Rdz
Γ dt Γ
Z b Z b

= P (x(t), y(t), z(t))x (t)dt + Q(x(t), y(t), z(t))y ′ (t)dt
a a
Z b
+ R(x(t), y(t), z(t))z ′ (t)dt,
a

notée CΓ (V⃗ ). Cette définition ne dépend pas du paramétrage choisi.

Remarque 6.9. Lorsque le champ V⃗ (M ) représente une force appliquée au point


M , la circulation représente le travail de cette force au cours du déplacement de
Γ(a) à Γ(b) que l’on pourra alors noter W .

Exemple 6.10. La circulation du champ de vecteur V⃗ = −y⃗ı + x⃗ȷ + 0⃗k le long de


l’arc d’ellipse Γ défini par 
x = a cos t

y = b sin t

z=0

où t ∈ [0, π], est


Z Z π
−ydx + xdy + 0dz = ab (cos2 t + sin2 t)dt = πab.
Γ 0

Exemple 6.11. On considère le travail d’une force



P (x, y, z) = y

V⃗ : Q(x, y, z) = −x

R(x, y, z) = 0

63
pour aller du point A(1, 0) au point B(0, 1) par deux chemins différents. Le premier
chemin Γ1 est défini par

x(t) = 1 − t

y(t) = t pour t ∈ [0, 1].

z(t) = 0

Le deuxième chemin Γ2 est défini par


 
x(t) = 1 − t
 x(t) = 0

y(t) = 0 pour t ∈ [0, 1], y(t) = t − 1 pour t ∈ [1, 2].
 
z(t) = 0 z(t) = 0
 

Pour le premier chemin, le travail est


Z 1 Z 1 Z 1
′ ′
C1 = y(t)x (t)dt + (−x(t))y (t)dt = (−t − (1 − t)) dt = −1.
0 0 0

Pour le second chemin, le travail est

C2 = 0

On remarque sur cet exemple que le travail dépend du chemin suivi, et non pas
seulement des points initial et final.

6.2 Champ de gradients


Définition 6.12. On appelle champ de scalaires une application U : D → R.
Définition 6.13. On définit le vecteur gradient en M ∈ D du champ de scalaires
⃗ U (M ) le vecteur donné en coordonnées cartésiennes par
U , noté grad
Ö ∂U è
∂x
⃗ U (M ) = ∇U
⃗ (M ) = ∂U ∂U ∂U ⃗
grad ∂U
∂y
= ⃗ı + ⃗ȷ + k.
∂U
∂x ∂y ∂z
∂z

Remarque 6.14. (a) Le gradient est un opérateur linéaire.


(b) La formule suivante sur le gradient d’un produit est facile à vérifier
⃗ (U1 U2 ) = U1 grad
grad ⃗ U2 + U2 grad
⃗ U1 .

(c) Un champ scalaire est constant si, et seulement si, son gradient est nul.

64
Définition 6.15. Une surface de niveau du champ de scalaires U : D → R est
l’ensemble des points M de D tels que U (M ) est égale à une constante.
Proposition 6.16. Le vecteur gradient est normal aux surfaces de niveau et dirigé
vers la région des champs croissants.
Démonstration. En effet, on observe d’abord que si U (M ) est une constante sur
une surface S (surface de niveau), alors pour une variation sur la surface
⃗ U (M ) · dM
dU = grad ⃗ = 0,

comme dM ⃗ appartient au plan tangent à la surface, le vecteur grad⃗ U (M ) est


normal à la surface de niveau passant par M .
Plus précisément, si S et S ′ sont deux surfaces de niveau proches, d’après la
formule des accroissements finis
−−−→ î ó
⃗ U (M ) + ⃗o(1) .
U (M ′ ) − U (M ) = M ′ M · grad
−−−→ ⃗ U (M ) > 0, et donc les
Cela signifie que si U (M ′ ) > U (M ), alors M ′ M · grad
−−− → ⃗ U (M ) sont de même sens.
vecteurs M ′ M et grad

Définition 6.17. On dit qu’un champ de vecteur V⃗ est un champ de gradients


s’il existe un champ scalaire U : D → R tel que pour tout M ∈ D,
⃗ U (M ).
V⃗ (M ) = grad

On dit aussi que V⃗ dérive d’un potentiel scalaire.


Théorème 6.18. Un champ de vecteur V⃗ de classe C 1 dérive d’un potential sca-
laire sur D si, et seulement si, son rotationnel est nul sur D.
Démonstration. La condition est nécessaire : par le théorème de Schwarz, si U est
de classe C 2 , alors
∂ 2U ∂ 2U
= ,
∂a∂b ∂b∂a
où a, b représentent x, y ou z. Si V⃗ dérive un potentiel alors cela implique
∂ ∂
R− Q=0
∂y ∂z
∂ ∂
P− R=0
∂z ∂x
∂ ∂
Q− P =0
∂x ∂y

65
ce qui entraîne bien que le rotationnel est nul. Une autre façon d’exprimer ce calcul
est d’écrire
rot ⃗ U = ⃗0.
⃗ grad
La réciproque est admise.

Définition 6.19. On appelle énergie potentielle,notée


 Ep , l’opposé du potentiel
P
dont dérive un champ de force irrotationnel V⃗ = Q :
R

V⃗ = −∇E ⃗ Ep .
⃗ p = −grad

Exemple 6.20. On reprend l’exemple 6.11, mais en modifiant le champ de vec-


teurs (la force) pour qu’il dérive d’un potentiel scalaire.

P (x, y, z) = y

V⃗ : Q(x, y, z) = x

R(x, y, z) = 0

⃗ U où U (x, y, z) = xy. Dans ce cas,


⃗ V⃗ = ⃗0 et V⃗ = grad
Ici, on voit bien que rot
pour le chemin Γ1 défini par

x(t) = 1 − t

y(t) = t pour t ∈ [0, 1],

z(t) = 0

on a
Z 1 Z 1 Z 1
′ ′
C1 = y(t)x (t)dt + (x(t))y (t)dt = (−t + (1 − t)) dt = 0.
0 0 0

En fait, quelque soit le chemin suivi pour relier le point A au point B, le travail
est nul. Ceci est dû au fait que le champ dérive d’un potentiel scalaire, comme le
montre le résultat suivant, formulé en terme d’énergie.

Théorème 6.21. Le travail d’une force dérivant d’un potentiel scalaire ne dépend
que des valeurs de ce potentiel aux points initial A et final B. Plus précisément, si
V = −∇Ep alors le travail W est

W = Ep (A) − Ep (B).

En particulier, si la courbe est fermée (A = B), alors le travail est nul.

66
Démonstration. Le champ de vecteurs s’écrit sous la forme
Ö ∂Ep è
− ∂x
V = − ∂E
∂y
p
= −∇Ep
− ∂E
∂z
p

et donc la circulation de ce champ de vecteurs le long d’un chemin paramétré par


t ∈ [a, b] 7→ (x(t), y(t), z(t)) s’écrit
Z b Z b
∂Ep ∂Ep
w=− (x(t), y(t)z(t))x′ (t)dt − (x(t), y(t)z(t))y ′ (t)dt
a ∂x a ∂y
Z b
∂Ep
− (x(t), y(t)z(t))z ′ (t)dt
a ∂z
Z b
d
=− [Ep (x(t), y(t)z(t))]dt
a dt
= Ep (a) − Ep (b),

ce qui démontre le résultat voulu.

Remarque 6.22. Réciproquement, si tout travail W d’un champ de force V s’ex-


prime sous la forme
W = E(A) − E(B)
pour une certaine fonction E à valeurs réelles, alors le champ de vecteurs V dérive
du potentiel −E.

6.3 Champ de rotationnels


Définition 6.23. Un champ de vecteurs V⃗ est un champ de rotationnels s’il existe
un champ de vecteurs Ñ é
w1

W = w2
w3
tel que Ö∂è Ñ é Ö∂w − ∂w è
∂x w1 ∂y 3 ∂z 2
V⃗ = rot
⃗ W⃗ = ∂
∂y
∧ w2 = ∂ ∂
w − ∂x
∂z 1
w3 .
∂ w3 ∂ ∂
w2 − w1
∂z ∂x ∂y

On dit aussi que V⃗ dérive d’un potentiel vecteur.

67
Théorème 6.24. La condition nécessaire et suffisante pour que le champ de vec-
teurs V⃗ soit un champ de rotationnels sur D est que pour tout M ∈ D,

div V⃗ (M ) = 0.

Remarque 6.25. Comme rot ⃗ U = 0, il existe une infinité de potentiels vec-


⃗ grad
teurs pour un champ de vecteurs dérivant d’un potentiel vecteur.

Démonstration. La condition est nécessaire car div rot


⃗ U = 0. Le reste est admis.

6.4 Intégrale de surface


Dans cette section, Ω est un sous-ensemble de R2 et on considère une surface
paramétrée de classe C 1 régulière

S : Ω ⊂ R2 → R3
(u, v) 7→ (x, y, z)(u, v),

On note
∂M ∂M
⃗n(u, v) = (u, v) ∧ (u, v).
∂u ∂v
Définition 6.26. Soit V⃗ : D → R3 un champ de vecteurs de classe C 1 sur un
sous-ensemble D de R3 dont on suppose qu’il contient S(Ω). On appelle intégrale
de V⃗ sur S, ou flux du champ de vecteurs V⃗ à travers la surface S, l’intégrale
ZZ ZZ
⃗ =
V⃗ · dσ V⃗ (M (u, v)) · ⃗n(u, v) dudv
S Ω

notée ΦS (V⃗ ).

Remarque 6.27. Le sens du vecteur normal ⃗n définit une orientation de la surface


et attribue un signe au flux. (Il suffit par exemple d’échanger les variables u et v
pour changer le signe du flux.)

6.5 Théorèmes de Stokes et d’Ostrogradski


On énonce d’abord le théorème de Stokes.

68
Théorème 6.28. Soit S une surface de classe C 1

S : Ω ⊂ R2 → R3
(u, v) 7→ (x(u, v), y(u, v), z(u, v))

 Γ, appelé le bord de S. Alors, la circulation du


limitée par une courbe fermée
P
champ de vecteurs V⃗ = Q le long de la courbe Γ est égale au flux du rotationnel
R

de V à travers S :
Z ZZ
P dx + Qdy + Rdz = rot ⃗
⃗ V⃗ · dσ.
Γ S

Remarque 6.29. On a vu que le sens du vecteur normal attribuait un signe au


flux. Dans la formule de Stokes, les orientations de Γ et de S sont couplées : le
vecteur normal à S doit être tel que le sens de parcours de Γ autour de ce vecteur
est direct.
On donne maintenant le théorème d’Ostrogradski.
Théorème 6.30. Soit D un domaine de R3 limitée par une une surface fermée
S. Alors, le flux d’un champ de vecteur V⃗ de classe C 1 à travers la surface S est
égal à l’intégrale sur le volume D de la divergence de V⃗
ZZ ZZZ
⃗ =
V⃗ · dσ div V⃗ dxdydz.
S D

Remarque 6.31. Dans ce résultat, il y a aussi une question d’orientation : la


normale à la surface doit pointer vers l’extérieur du volume.

6.6 Exercices
Exercice 6.1. Montrer que pour tout champ de vecteur V⃗ : R3 → R3 , on a
⃗ V⃗ ) = 0.
div(rot

Montrer que pour toute fonction scalaire U : R3 → R, on a

rot ⃗ U = ⃗0.
⃗ grad

Exercice 6.2. Soit V⃗ : R3 → R3 un champ de vecteurs et U : R3 → R une


fonction scalaire. Montrer les relations

rot(U
⃗ V⃗ ) = U rot
⃗ V⃗ + (∇U
⃗ ) ∧ V⃗ ,
div(U V⃗ ) = U div V⃗ + ∇U
⃗ · V⃗ .

69
Pour deux fonctions scalaires U1 , U2 : R3 → R montrer

rot(U
⃗ ⃗ ⃗
1 ∇U2 ) + rot(U2 ∇U1 ) = 0,

⃗ 1 ∧ ∇U
div(∇U ⃗ 2 ) = 0.

Pour deux champs de vecteurs V⃗1 , V⃗2 : R3 → R3 , montrer

div(V⃗1 ∧ V⃗2 ) = (rot


⃗ V⃗1 ) · V2 − V⃗1 · rot
⃗ V⃗2 .

Exercice 6.3. Montrer que le champ vectoriel

V⃗ = (y + z)⃗ı + (z + x)⃗ȷ + (x + y)⃗k

dérive d’un potentiel scalaire. Déterminer un tel potentiel.

Exercice 6.4. Soit le champ vectoriel

V⃗ (M ) = xy⃗ı − y 2⃗ȷ + z 2⃗k.

(a) Calculer div V⃗ et rot


⃗ V⃗ .
(b) Calculer la circulation de V⃗ le long de l’arc Γ défini par

x = a cos t

y = a sin t

z = ht,

t ∈ [0, 2π], où a > 0 et h > 0 sont des constantes.

Exercice 6.5. Calculer les flux des deux champs de vecteurs


Ö è Ö1è
x x

V1 = y , V2 = ⃗ 1
y
1
z z

à travers la sphère unité.

⃗ = a⃗ı+b⃗ȷ+c⃗k un vecteur fixe. On définit le champ de vecteurs


Exercice 6.6. Soit ω
V⃗ sur R par
3
−−→
V⃗ (M ) = ω
⃗ ∧ OM .
(a) Calculer div V⃗ et rot
⃗ V⃗ .

70
(b) Calculer le flux de V⃗ à travers le demi disque défini par

2 2
x + y ⩽ 1,

y ⩾ 0,

z = 0.

Exercice 6.7. On définit le champ de vecteurs

V⃗ = yz⃗ı + zx ⃗ȷ + xy ⃗k.

(a) Montrer que V⃗ dérive d’un potentiel scalaire.


(b) Calculer la circulation de V⃗ le long de l’arc d’hélice Γ défini par

x = cos t

y = sin t

z=t

pour t ∈ [0, π4 ].
(c) Calculer le flux de V⃗ à travers la sphère unité.
P 
Exercice 6.8. Montrer que le champ de vecteurs défini par V⃗ = Q où
R

xz yz 1 z2
P =− , Q=− , R= −
r3 r3 r r3
est un champ de gradient, dont on donnera le potentiel.

Exercice 6.9. Utiliser la formule de Stokes pour calculer l’intégrale


Z
I = (x + y)dx + (y + z)dy + (z + x)dz
C

où C est le cercle section de la sphère unité par le plan d’équation x + y + z = 1.

Exercice 6.10. Soit S la surface de R3 définie par z = 4 − x2 − y 2 , z ⩾ 0.


(a) Calculer l’aire de la surface S.
(b) Calculer de deux façons différentes la circulation du champ de vecteurs V⃗ le
long du cercle délimitant la surface S.

V⃗ (x, y, z) = z⃗ı + x ⃗ȷ + y ⃗k.

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Exercice 6.11. Calculer de deux façons différentes le flux du champ de vecteurs

V⃗ (x, y, z) = 2x⃗ı + y 2⃗ȷ + z 2⃗k

à travers la sphère de rayon 1 centrée à l’origine.

Exercice 6.12. On considère le domaine D de R3 défini par


®
x2 + y 2 ⩽ (2 − z)2
0 ⩽ z ⩽ 1.

On définit le champ de vecteur

V⃗ (x, y, z) = −5x⃗ı + x2 y ⃗ȷ

Calculer de deux façons différentes le flux du champ de vecteurs V⃗ à travers la


surface délimitant le domaine D.

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