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Riso 004 0025

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Évaluation prospective de la performance et enjeu de

développement : cas du Balanced Scorecard appliqué à la


filière textile-habillement au Maroc
Boualem Aliouat, Rafia Frij, Abdeslam Chraibi
Dans Revue internationale des sciences de l'organisation 2017/2 (N° 4), pages 25 à 61
Éditions Management Prospective Editions
DOI 10.3917/riso.004.0025
© Management Prospective Editions | Téléchargé le 10/11/2023 sur www.cairn.info (IP: 81.192.7.201)

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Article disponible en ligne à l’adresse


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précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.
Évaluation prospective de la performance et enjeu
de développement : cas du Balanced Scorecard
appliqué à la filière textile-habillement au Maroc

Boualem Aliouat

Université Côte d’Azur, Groupe de Recherche en Management (GRM)


– Boualem.Aliouat@unice.fr

Rafia Frij

ENCG Tanger, Laboratoire « Stratégie, Management et Gouvernance »


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– Rafiafrij@gmail.com

Abdeslam Chraibi

ENCG Tanger, Laboratoire « Stratégie, Management et Gouvernance »


– Chraibiabdeslam@gmail.com

Résumé
Dans le champ controversé des travaux universalistes qui militent
pour un recours à l’utilisation du tableau de bord prospectif comme
outil de performance des organisations émergentes, l’objectif de
cet article est de mesurer le degré d’intégration des indicateurs
prospectifs et équilibrés du Balanced Scorecard (BSC) dans le contrôle
de la performance d’entreprises confrontées à des environnements
émergents, notamment dans le cas du secteur du textile-habillement
au Maroc. À cette fin, nous avons mené une étude quantitative sur
les pratiques de mesure de la performance par questionnaire auprès
d’un échantillon de 15 entreprises dans la région de Tanger. Nos
résultats nous ont permis de valider en partie le modèle théorique
qui augure d’une conformité de mesure de la performance aux in-

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RISO N°4 - Décembre 2017

dicateurs prospectifs et équilibrés du BSC. Cette recherche met en


exergue quatre éléments qui permettent de réorienter les politiques
publiques en faveur des entreprises marocaines du textile-habil-
lement, notamment des TPE/PME : (1) le BSC sert surtout d’outil
de réalisation des arbitrages budgétaires ; (2) l’adoption des indi-
cateurs du BSC concerne essentiellement les grandes entreprises ;
(3) il existe encore un déficit important d’apprentissage et d’inno-
vation en raison du niveau de compétence et de qualification des
ressources humaines dans ces entreprises ; et enfin (4) le BSC est
en grande partie lié à la sensibilité des managers à la conjoncture
en hyper-concurrence.

Abstract
In the controversial field of universalist work advocating the use
of the Balanced Scorecard as a performance tool for emerging or-
ganizations, the objective of this article is to measure the degree
of integration of forward-looking Balanced Balanced Indicators.
Scorecard (BSC) in the control of the performance of companies
facing emerging environments, particularly in the case of the tex-
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tile-clothing sector in Morocco. To this end, we carried out a quan-
titative study on the practices of measurement of the performance
by questionnaire with a sample of 15 companies in the region of
Tangier. Our results allowed us to partially validate the theoretical
model that augurs a performance measurement conformity with
the BSC’s forward-looking and balanced indicators. This research
highlights four elements that make it possible to reorientate public
policies in favor of Moroccan textile-clothing companies, especial-
ly SMEs : (1) the BSC serves mainly as a tool of realization of the
budgetary trade-offs; (2) the adoption of the indicators of the BSC
concerns mainly large firms; (3) there is still a significant learning
and innovation deficit due to the level of skill and qualification of
human resources in these firms; and finally (4) the BSC is largely
related to managers’ sensitivity to hyper-competitive conditions.

Introduction
Le paysage industriel marocain a connu des changements radi-
caux qui remettent sans cesse en cause les formes de pilotage de
ses entreprises. Certes, il se caractérise par la prédominance de

26
Évaluation prospective de la performance et enjeu de développement :
cas du Balanced Scorecard appliqué à la filière textile-habillement

secteurs à faible intensité technologique, intensifs en travail non


qualifié, flexible et bon marché, les firmes y sont généralement
spécialisées et de faible taille et la concurrence s’exerce par les prix,
essentiellement sur les coûts du travail, plutôt que par la qualité
des produits, mais les choses évoluent vite et déjà des stratégies de
différenciation s’observent notamment dans la logistique comme
la « fast fashion » dans le secteur textile-habillement (TH). Le Maroc
a donc fait le choix depuis quelques années d’un rattrapage de ses
régions en les orientant vers des activités de moyenne technologie,
alors qu’il suscitait autrefois des industries de basse technologie
dans l’automobile, l’aéronautique et le TH (Catin et al., 2007).
L’objectif de notre recherche est de mesurer l’intérêt pour les en-
treprises d’un secteur industriel, le TH au Maroc1, de rééquilibrer
leurs outils de pilotage stratégique et opérationnel pour faire face
à la crise du secteur et améliorer sensiblement leur compétitivité
dans un environnement mondialisé et hyper-compétitif ; ceci par
des capacités ambidextres de pilotage (O’Reilly et Tushman, 2004),
de nouvelles formes de gestion (Ilinitch et al.,1996) et un mana-
gement oscillant entre stratégie de différenciation et domination
par les coûts au sens de Porter (1980, 1982). L’hyper-compétitivité
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(ou hyper-concurrence), au sens de Ilinitch et al. (1996), accélère et
intensifie les forces du changement liées à la mondialisation, aux
changements démographiques, aux progrès technologiques, à la
numérisation de l’information et au démantèlement des frontières
par le libre-échange. Les entreprises de la plupart des industries
subissent non seulement des changements rapides et radicaux, mais
connaissent également un changement profond dans les règles de
la concurrence et la façon dont le jeu concurrentiel est désormais
pratiqué. Les « insiders » doivent se restructurer très rapidement
face à des concurrents émergents plus agiles (source de fortes in-
certitudes), à des acteurs mondiaux de plus en plus diversifiés y
compris sur toute la chaîne de valeur de certaines filières, à des
changements technologiques rapides, à des guerres de prix féroces
et globales, et à l’indispensable et constante réorganisation de ses
modèles de management. Ce phénomène caractérise pleinement
le secteur du TH. C’est dans un tel contexte que nous tentons de
mesurer l’impact du recours au tableau de bord prospectif sur la
formulation de la stratégie managériale adaptée à ce type de secteur
hyper-concurrentiel.

1 Ces entreprises sont essentiellement situées en zone semi-périphé-


rique du Grand Casablanca fortement industrialisé.

27
RISO N°4 - Décembre 2017

De nombreux chercheurs ont tenté de mettre en évidence une re-


lation positive entre l’utilisation du tableau de bord et la perfor-
mance des organisations (Maisel,1992 ; Kaplan et Reynolds, 2002 ;
Walker et Dunn, 2006 ; Kollberg et Elg, 2011), notamment en ce
qui concerne le tableau de bord prospectif (Balanced Scorecard), en
observant son impact sur la performance organisationnelle. Les
objectifs poursuivis par cet outil prospectif concernent essentiel-
lement les rapports entre les personnes, les services, les postes,
les maillons créateurs de valeur… dont on voudrait qu’ils soient
optimisés dans un système de pilotage à la fois efficace et efficient.
Le contrôle de gestion étant souvent mal défini dans l’entreprise,
Kaplan et Norton (2007a) proposent un rééquilibrage des systèmes
d’évaluation de la performance en développant des indicateurs
sur quatre axes : l’axe financier, l’axe des clients, l’axe des proces-
sus internes et l’axe d’apprentissage et de l’innovation, pour aller
au-delà des seuls indicateurs financiers par trop réducteurs des
perspectives de performance d’une entreprise, et donc d’un secteur
d’activités. Par opposition au contrôle de gestion traditionnel sou-
vent structuré autour des centres de coûts, le BSC de l’organisation
intègre la dimension de l’apprentissage organisationnel, l’approche
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client ou l’efficience interne comme caractéristiques essentielles de
la performance construite collectivement et à travers des modes de
coordination de l’action collective. Certains travaux (Marin, 2012 ;
Philbin, 2011 ; Kollberg et Elg, 2011 ; Inamdar, Kaplan et Reynolds,
2002 ; Walker et Dunn, 2006) ont démontré que lorsque toutes les
parties prenantes s’approprient le processus de suivi et d’améliora-
tion des indicateurs de performance prospectifs, les organisations
gagnaient en capacité, en compétitivité et en performance.
Notre problématique peut être formulée ainsi : le BSC joue-t-il un rôle
déterminant dans la construction de capacités stratégiques nouvelles des
entreprises marocaines du TH confrontées à une hyper-concurrence inter-
nationale, en tant que lien entre l’approche financière et opérationnelle de
la performance, et en tant qu’orientation organisationnelle et managériale
du pilotage de l’entreprise sur une base plus prospective et équilibrée ?
Au Maroc, une seule étude lourde et longitudinale sur la contingence
des systèmes de contrôle de gestion a été réalisée (Ahsina, 2012a,
2012b). D’où l’intérêt de cette recherche qui pourrait avoir une por-
tée universelle pour toute l’Afrique et les marchés émergents en
situation concurrentielle incertaine.

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Évaluation prospective de la performance et enjeu de développement :
cas du Balanced Scorecard appliqué à la filière textile-habillement

1. Cadre théorique : caractéristiques sectorielles et


mesure de performance
Nous abordons dans un premier temps les spécificités du secteur
du TH au Maroc avant d’examiner la question du rééquilibrage
des outils de pilotage stratégique et opérationnel rendu nécessaire
pour les entreprises du secteur.
1.1. Définition de l’industrie TH
L’industrie TH peut être définie comme étant un ensemble de pro-
cédures techniques permettant de transformer des matières pre-
mières en produit finis prêts à la consommation. Il existe plusieurs
manières de saisir le concept de la filière :
• la première concerne la dimension technique (une suite d’opéra-
tions permettant le passage de la matière première au produit fini) ;
• la deuxième s’intéresse aux stratégies des agents économiques :
la filière serait un espace stratégique pour les firmes ;
• la troisième laisse apparaître les objectifs des politiques indus-
trielles comme étant la raison d’être de la filière ;
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• enfin, la filière prête attention à l’étude des relations commer-
ciales et financières interstade de production.
Les activités TH se caractérisent par l’interdépendance des dif-
férentes industries formant la filière, notamment avec l’industrie
chimique en raison de l’importance croissante des fibres chimiques.
Les débouchés du TH concernent l’habillement (50 % de la produc-
tion en matière de fibres textiles), les usages domestiques (l’ameu-
blement et les tapis qui avec les usages industriels partagent la
seconde moitié de la production textile) et les usages industriels
qui connaissent un grand succès grâce à l’émergence de nouveaux
produits issus des nouvelles technologies.
Le secteur TH recouvre, aujourd’hui, différentes options stratégiques
(délocalisation/colocalisation, investissement à l’étranger, transferts
de technologies, stratégies de rationalisation des coûts…). Notre
analyse tient compte des objectifs principaux du secteur TH et des
parties prenantes : exportations et expansion internationale, emplois
et optimisation de la chaîne de valeur. Quant à la gestion et au
contrôle de la production, ils se définissent comme un ensemble de
services qui forment à la fois une fonction et un système qui cherche
à assurer l’équilibre entre le taux d’emploi et de satisfaction du per-
sonnel, le niveau des stocks et en cours et les délais. La fonction de

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RISO N°4 - Décembre 2017

production est cependant liée à d’autres fonctions de l’entreprise


qui peuvent être présentées : production-études, production-mé-
thodes, production-achat, production-ordonnancement. La gestion
assistée par ordinateur est sans doute la révolution technologique
majeure du secteur (conception, fabrication, production, qualité,
maintenance assistées par ordinateur) et représente actuellement
une forte opportunité pour les petites entreprises (systèmes infor-
matiques moins chers, mise en œuvre simplifiée, systèmes souples,
augmentation du nombre de références de produits).
Si le secteur TH occupe une position importante dans l’activité indus-
trielle nationale, l’amélioration de sa compétitivité nécessite encore
une identification de ses facteurs clés de succès pour améliorer le
pilotage opérationnel et stratégique des entreprises du secteur. En
prenant comme modèle de base l’approche du BSC, nous tentons
de construire une première identification des critères prospectifs
adoptés par les entreprises de TH en matière de mesure de per-
formance. Cela permet de comprendre comment et pourquoi il est
utile, dans ce secteur fortement concurrencé au plan international,
de passer d’outils classiques comme le budget traditionnel ou la
performance à base budgétaire, à des outils plus intégrateurs et
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plus modernes tel que le BSC. Les choix techniques appropriés de
contrôle pourraient dépendre des circonstances environnementales
spécifiques d’une organisation (Otley, 1999) et nous supposons que
les circonstances du secteur TH au Maroc l’exigent.
1.2. Caractéristiques sectorielles de la filière TH marocaine
Dans les années 1960, la production marocaine du textile se li-
mitait à une dizaine d’unités appartenant à de grands groupes
étrangers. L’industrie textile est donc récente au Maroc et ce n’est
qu’en 1978, après un accord dit « arrangement Textile » (signé à
Bruxelles), que la libre circulation des produits textiles en franchise
de droits de douane sera mise en place. Des mesures locales vont
accompagner cette émergence (Code des investissements indus-
triels marocain, Code des exportations…). Déjà, cette répartition des
maillons de la chaîne de valeur du textile obéissait à des exigences
de péréquation de coûts européens et des coûts de sous-traitance
délocalisée, mais l’Italie (pour Bayer) ou l’Indonésie (pour Hoecht)
bénéficiaient de mesures de délocalisation équivalentes, ce qui im-
pliquait des exigences fortes de compétitivité pour le Maroc. Avec
plus de 250 000 emplois (70 % de la main-d’œuvre est féminine),
ce secteur demeure désormais une priorité pour le développement
économique national au Maroc.

30
Évaluation prospective de la performance et enjeu de développement :
cas du Balanced Scorecard appliqué à la filière textile-habillement

Si le textile est une industrie capitalistique, l’habillement en re-


vanche est essentiellement une industrie de main-d’œuvre (avec
un coût quasiment deux fois inférieur aux investissements requis
par l’industrie textile). La taille moyenne des entreprises du TH au
Maroc est de 124 personnes. Les différentes phases de croissance
dans le cycle de vie des entreprises dénotent l’existence d’économies
d’échelle internes. Ainsi, les entreprises de plus petite taille sont à
même de s’élargir plus rapidement, mais le degré de concurrence sur
les coûts ou les prix a un effet négatif sur la croissance économique
locale (Combes, 2000 ; Bun et Makhoufi, 2002 ; Catin, Hanchane
et Kamal, 2007). Néanmoins, de 1980 à 1990, les exportations ont
été multipliées par 5, selon la Direction de la Statistique au Ma-
roc. Il est à noter aussi que Tanger occupe une place particulière
de croissance dans le secteur TH. En effet, si parmi les régions
périphériques cibles du secteur, les trois régions initialement très
spécialisées dans le TH (avec un coefficient de spécialisation supé-
rieur à 1 en 1985) connaissent pour deux d’entre elles (Kenitra et
Tetouan) un repli relatif du secteur dans leur tissu industriel du fait
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du développement d’autres industries de basse technologie ; toutes
les autres provinces semi-périphériques (Rabat-Salé, Fès, El Jadida,
Marrakech, Settat, Sefrou, Skhirat-Temara et Tanger) connaissent
une forte montée en spécialisation, dépassant la région du Grand
Casablanca qui reste leader dans l’industrie de haute technologie
(Catin, Hanchane et Kamal, 2007). La situation stratégique de la
ville de Tanger offre plusieurs caractéristiques : une ouverture sur
le pourtour méditerranéen et une proximité forte (spatiale et lo-
gistique) qui procure à la région un rôle de pôle d’attraction pour
l’investisseur local exportateur. L’économie de la région de Tan-
ger-Tétouan est largement tournée vers l’extérieur.
1.3. Compétitivité de la filière marocaine
Comment se maintiennent les entreprises marocaines du TH en
pleine période de crise internationale ? C’est une question qui mé-
rite non seulement des analyses d’évolution sectorielle, mais aussi
des analyses plus précises des stratégies et des actions de mesure
de performance de ces entreprises tout à fait singulières qui re-
présentent un secteur stratégique du développement du Maroc en
Afrique et dans la rive sud de la Méditerranée.

31
RISO N°4 - Décembre 2017

Plus de 130 pays membres de l’OMC échangent des produits TH


(TH)2, mais 20 pays seulement représentent 85 % des échanges3.
L’industrie européenne reste le 2e exportateur mondial TH, juste
derrière la Chine, premier fournisseur des USA et de l’UE en TH. Le
Maroc et la Tunisie ont toujours fortement souffert de la concurrence
chinoise (-7 % en moyenne dans les années 2000), contrairement
à la Turquie qui enregistrait encore des chiffres en croissance4. Au
Maroc, le secteur du textile et du cuir contribue encore pour 20 %,
en moyenne, à la valeur ajoutée des industries de transformation
et occupe près de 42 % de l’emploi industriel.
Au cours des deux dernières décennies, le secteur du TH comme
le secteur du cuir et de la chaussure au Maroc ont connu des chan-
gements très importants. En 1999, la filière du TH contribuait pour
plus de 3 % dans le PIB avec une valeur ajoutée de 9,4 milliards
de dirhams, occupant la 4e position derrière les transferts de MRE
(marocains résidant à l’étranger), le tourisme et les phosphates.
Cette filière constituait, et constitue encore, le premier employeur
au Maroc (une constante de plus de 42 % depuis 1999, mais avec
une perte 47 761 postes en 2008 selon l’Association marocaine de
l’industrie du TH (Amith) et de 32 000 postes entre 2013 et 2014 selon
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le Haut-Commissariat au Plan, dues essentiellement au départ de
grands donneurs d’ordre comme Nike, Puma, H&M, Kindy, Marks
& Spencer, Bacou ou Pinky). Entre 20 000 et 50 000 emplois étaient
encore menacés, mais fin 2016, ce secteur TH affichait une croissance
annuelle de 5 % selon l’Amith, alors que les professionnels du sec-
teur affichaient un pessimisme quant à la production et les ventes
de la branche textile, habillement et cuir5, notamment en raison des
coûts de main-d’œuvre difficilement absorbables avec des plan de
charge réduits. Ce pessimisme est récurrent depuis 2005 (première

2 Les produits TH représentent 10 % des échanges mondiaux de pro-


duits industriels, soit 8 % du commerce des marchandises. Ils se classent au
3e rang des produits échangés après l’électronique et l’automobile.
3 Le Bangladesh, le Canada, la Chine, la Corée, Hong-Kong, l’Inde, l’In-
donésie, le Japon, la Malaisie, le Maroc, le Mexique, le Pakistan, les Philippines,
le Sri-Lanka, Taipei (Chine), la Thaïlande, la Tunisie, la Turquie, l’Union euro-
péenne et les USA (Rapport OMC, 2016).
4 http://www.infoguerre.fr/fichiers/Les_quotas_textiles.pdf et http://
www.industrie.gouv.fr/enjeux/textilquota.html
5 Enquête mensuelle de conjoncture de Bank Al Maghrib, avril 2016.

32
Évaluation prospective de la performance et enjeu de développement :
cas du Balanced Scorecard appliqué à la filière textile-habillement

expérience européenne de levée des quotas chinois)6, et surtout 2008,


date de la levée définitive des quotas et contingentements temporaires
d’importations européens (1er janvier 2008) et des quotas américains
(1er janvier 2009) sur le textile chinois. Les grands donneurs d’ordre
rencontrent eux-mêmes de graves difficultés financières en Europe
pendant cette même période. Les relations de l’UE avec l’Euromed
(Maghreb et Turquie) dans le cadre de la politique de stabilisation
des pays géographiques proches n’a pas pu protéger les entreprises
marocaines et le processus d’intégration régionale d’une vaste zone de
libre échange « Euromed » rassemblant tous les pays producteurs et
consommateurs de textile et vêtements (alternative à la toute puissance
chinoise) a été fragilisé par les conséquences négatives sur l’indus-
trie marocaine et tunisienne du démantèlement des quotas. À cela,
s’est ajoutée la crise financière mondiale qui a eu des conséquences
négatives sur le secteur TH au plan international, avec la fermeture
de plusieurs entreprises et perte d’emplois au Maroc. Cela a entraîné
une hausse de 20 % du textile chinois en Europe, qui atteignait déjà
26 % en France (dont le Maroc est le troisième fournisseur derrière
la Chine et l’Italie). Toutefois, ce domaine d’activités au Maroc n’a
pourtant pas succombé aux difficultés apparues. Ce secteur a pu,
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grâce à ses performances et à une politique de soutien de l’État,
s’adapter et garder son positionnement parmi les leaders mondiaux.
Des raisons exogènes autant qu’endogènes expliquent cette résur-
gence. Parmi les raisons exogènes, on doit distinguer deux mesures
différentes : une mesure régionale et un dispositif national maro-
cain. D’abord, sur le plan régional, les échanges mondiaux se sont
réorganisés. Le Maghreb, essentiellement le Maroc et la Tunisie, de
même que la Turquie, premières zones touchées par la concurrence
massive des produits chinois, se sont réorientés sur le créneau de
la « fast fashion ». Toujours au plan international, un système de
licences drastiques a été mis en place pour ne laisser l’opportunité
qu’à quelques 5 000 entreprises chinoises d’accéder aux marchés
européens. Cette nouvelle forme de chaîne de valeur a consisté à
mettre en place des dispositifs de réactualisation permanente des
produits en fonction des dernières tendances avec une capacité de
livraison en huit à dix jours en magasins, contre plusieurs semaines
pour l’Asie. Entre temps, les salaires ont augmenté en Chine et ont
permis aux entreprises marocaines, turques, et dans une certaine

6 La réintroduction de quotas à l’encontre de la Chine n’a pas empêché


une évolution identique sur les deux semestres 2005 de + 47 % ; même si cela a
évité une accélération de la croissance des importations chinoises.

33
RISO N°4 - Décembre 2017

mesure les entreprises tunisiennes (jusqu’en 2011, date du printemps


arabe), de maintenir une certaine forme de compétitivité. Les Chinois
ne réservent plus à l’Europe que leurs produits les plus qualitatifs,
le second choix allant aux USA et le bas de gamme dans le reste du
monde. Ensuite, sur le plan national marocain, la mise en place d’une
structure d’animation des « écosystèmes textiles » décidée en février
2015 et un programme de soutien aux investissements industriels ont
joué un rôle majeur dans le développement actuel des entreprises du
secteur TH au Maroc7 avec une forte croissance de l’emploi (12 % d’ici
2020) et un chiffre d’affaires additionnel de 2,3 milliards de dirhams
et un chiffre d’affaires à l’export de 1,3 milliard de dirhams (26 % de
l’objectif à réaliser par les écosystèmes du textile d’ici 2020)8.
Au Maroc, dans le secteur TH, des mesures drastiques ont permis
une modernisation et une restructuration de l’outil de production
(rationalisation des capacités), une politique d’emplois ambitieuse,
une augmentation de la rentabilité économique, une refonte tech-
nique et une optimisation de la structure des produits en fonction
des attentes nouvelles du marché européen et mondial, une amé-
lioration du financement (prêts bonifiés, subventions, incitations à
l’exportation) et une aide à l’exportation. L’industrie marocaine s’est
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engagée dans une réforme technique accélérée et une restructura-
tion stratégique des entreprises qu’il est utile d’approcher par une
analyse diagnostique et métrique de ses critères de performance
pouvant amener les entreprises à une double domination réussie.
Ces indicateurs ne relèvent plus seulement de la croissance du
chiffre d’affaires, mais nécessitent des analyses plus fines de l’ali-
gnement stratégique de plusieurs facteurs (Paturel et Aliouat, 2017).
Ce diagnostic des entreprises repose sur une analyse de plusieurs
facteurs et nécessite même des efforts de mise en cohérence en
vue d’un alignement stratégique pour une entreprise cohérente
dans l’ensemble de ses dimensions. Le modèle du tableau de bord
prospectif en est une illustration (Kaplan et Norton, 2007b).
Ainsi, il est aussi envisageable, parmi les raisons endogènes, de
mesurer l’impact de l’amélioration des méthodes de gestion adop-

7 Le 29 mars 2016, 28 entreprises ont signé avec le ministère de l’Indus-


trie et du Commerce des conventions relatives à des projets d’investissement
pour un total de 713 millions de dirhams et la création prévue de 11 951 emplois
d’ici 2020. https://www.usinenouvelle.com/article/textile-au-maroc-les-pers-
pectives-redeviennent-bonnes-selon-les-industriels.N394397
8 Communique du ministère de l’Industrie et du Commerce marocain
(3 juin 2016).

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Évaluation prospective de la performance et enjeu de développement :
cas du Balanced Scorecard appliqué à la filière textile-habillement

tées par les entreprises de ce secteur, au premier rang desquelles


les instruments de contrôle de gestion et de pilotage des opérations
au sens large. Les plans d’investissement sont portés par 6 grandes
entreprises et 22 PME, dans les branches bénéficiant d’une structu-
ration en écosystèmes, à savoir le denim, la fast fashion, la distribu-
tion industrielle de marques, la maille, le textile maison et le textile
à usage technique. Ces options stratégiques relèvent largement
d’un double positionnement rendu nécessaire entre stratégie de
différenciation et domination par les coûts au sens de Porter (1980)
dans un secteur laissant apparaître toutes les caractéristiques de
l’hyper-compétitivité au sens de Ilinitch et al. (1996), avec le risque
encouru d’une position médiane de type « stuck in the middle »
entre une différenciation insuffisante ou inappropriée et un jeu low-
cost mal maîtrisé (Porter, 1982). Ces risques nécessitent un pilotage
prospectif et équilibré des opérations que propose précisément le
Balanced Scorecard.
1.4. Mesure de performance par l’approche Balanced Scorecard
Au Maroc, le Haut-Commissariat au Plan affirme en février 2015,
dans une fiche sur la baisse de l’emploi dans le secteur textile, que
la part des unités qui emploient moins de six personnes dépasse
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51 %, alors que celles disposant d’une comptabilité organisée et
occupant plus de 50 personnes n’excède pas 15,7 % », laissant ainsi
entendre que la taille avait un impact sur le taux d’emploi dans le
secteur TH, des phénomènes comparables étant observés en ma-
tière d’exportation en raison d’une baisse de régime des grandes
entreprises en 2015. Ces observations méritent d’être analysées en
profondeur par une étude empirique autour, notamment, de la
conformité des entreprises marocaines du TH aux exigences des
tableaux de bord prospectifs.
La majorité des entreprises de TH utilisent deux types de contrôles :
un contrôle semestriel systématique, qui est né du résultat obtenu
par les rapports de production et/ou un contrôle de performance
industrielle basé sur le contrôle de la qualité. Mais d’autres systèmes
peuvent aussi être utilisés, c’est le cas du tableau de bord.
Le tableau de bord prospectif doit fournir des choix stratégiques
qui facilitent le processus d’adaptation aux changements (Van Reedt
Dortland et al., 2014 ; Van der Heijden, 2005), sans jamais perdre de
vue l’intérêt des parties prenantes et celui d’offrir plusieurs options
stratégiques (Amer et al., 2013 ; Mackay et McKiernan, 2010). Le
diagnostic de la situation actuelle de l’entreprise porte en germe
les signes avant-coureurs du changement basé sur une analyse de

35
RISO N°4 - Décembre 2017

l’évolution des variables retenues et que l’on peut formaliser dans


la construction d’un tableau « stratégie des acteurs » (Godet, 2007).
Le futur est, alors, déterminé à partir de la confrontation des pro-
jets des acteurs et l’évolution des rapports de force (Bouhalleb,
2017). Ce tableau de bord prospectif permet aux entreprises de
clarifier et traduire leurs visions et stratégies, de communiquer et
de lier leurs actions, de planifier et définir les objectifs et de fournir
un feed-back, sans compter l’apprentissage qu’il apporte (Kloot et
Martin, 2000). C’est un outil orienté résultat qui tient moins compte
des processus internes, mais qui se focalise sur la satisfaction des
clients et améliore l’efficacité et l’efficience des produits et services
(Edwards et Thomas Clayton, 2005).
Le tableau de bord permet à un responsable d’avoir connaissance,
à intervalles rapprochés, des caractéristiques de sa gestion et de ses
décisions. Il indique si les résultats des opérations d’une période
donnée ont été performants par rapport aux objectifs qui avaient été
retenus durant le mois ou une période donnée : sont-ils meilleurs,
équivalents ou moins bons que ceux obtenus à la fin de la période
précédente ? En somme, c’est un support d’information utilisé de
façon régulière pour accompagner une action ou une décision. C’est
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aussi un outil de synthèse et un instrument d’information à court
terme, conçu pour chaque centre de responsabilité et centré sur les
variables d’action de manière à permettre aux responsables d’en-
gager rapidement des actions correctives. L’utilisation du tableau
de bord est entendue au sens large, renvoyant à des documents
comprenant une information dynamique, c’est-à-dire mettant en
perspective des résultats obtenus par rapport à des références, en
termes d’objectifs prévus ou de résultats obtenus par le centre de
responsabilité ou par d’autres entités comparables.
La formulation d’un tableau de bord prospectif dans l’industrie du
TH permet d’identifier les points forts sur lesquels il est possible de
s’appuyer pour développer un avantage concurrentiel, et les faiblesses
que l’entreprise doit s’efforcer de limiter pour ne pas se faire devan-
cer sur ses propres marchés (Bisbe et Otley, 2004 ; Chenhall, 2005 ;
Ahrens et Chapman, 2005 ; Naro et Travaille, 2010). La démarche de
planification stratégique doit être structurée de façon, d’une part, à
déterminer les moyens à utiliser pour mettre en œuvre la stratégie,
et d’autre part, à déterminer les ressources nécessaires ainsi que les
structures devant être utilisées pour assurer le bon fonctionnement
des programmes d’action par fonctions et sur plusieurs années (des
dépenses pluriannuelles assorties d’un plan budgétaire annuel).
La planification permet aussi de mettre en place des indicateurs de

36
Évaluation prospective de la performance et enjeu de développement :
cas du Balanced Scorecard appliqué à la filière textile-habillement

suivi et de pilotage des actions, des outils de mesure et de contrôler


des résultats dans des processus itératifs (Paturel et Aliouat, 2017).
Toutefois, la mise en œuvre de la démarche stratégique varie selon
la taille, le type d’entreprise, le métier, le secteur, la clientèle, la mul-
tiplicité des interlocuteurs ou des parties prenantes, la complexité
des environnements et leur degré de stabilité. Le tableau de bord
équilibré traite l’ensemble des dimensions d’une entité sans se limiter
aux aspects financiers. Son objectif est de transformer une vision
stratégique en actions concrètes. Son principal atout est de prendre en
compte des indicateurs à la fois financiers et non financiers (mesure
des impacts possibles sur les clients, les employés et les processus
internes…), dans son élaboration des prévisions de performances.
Le principe du Balanced Scorecard est en fait assez simple : il repose
sur un tableau de pointage qui comprend entre 16 et 28 mesures
regroupées en quatre grandes catégories (cf. Figure 1) – performance
financière, relations avec la clientèle, processus internes et activités
d’apprentissage et de croissance. Une mesure est une corrélation de
deux indicateurs : le « réel », par exemple les ventes effectivement
réalisées (données opérationnelles) et les objectifs que l’entreprise
s’est fixés (indicateurs saisis par l’entreprise). Certaines mesures
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peuvent même intégrer des indicateurs de marché, permettant ainsi
à l’entreprise de se situer par rapport à la concurrence. Le Balanced
Scorecard propose de :
• déterminer les capacités et buts d’un projet ou d’une division
au regard des processus internes ;
• comparer le coût du projet avec les bénéfices et les impacts orga-
nisationnels (sur l’ensemble de l’entreprise) qu’il va engendrer ;
• considérer la réaction des clients/employés à propos de l’in-
fluence du projet sur la performance de la division ;
• déterminer si le projet s’inscrit dans une volonté de formation
des employés dans le sens du développement opérationnel.
Le tableau de bord prospectif est à la fois comparatif, projectif,
complexe et multniveau. Une méthode de scénarios peut aisément
succéder à ce processus de diagnostic externe en apportant une défi-
nition pertinente et cohérente du problème ou du projet d’entreprise,
en balayant le champ des possibles et enfin en développant des
scénarios qui conduisent à des choix stratégiques possibles (Godet,
2007). Concilier contrôle de gestion et pilotage stratégique apparaît
comme une démarche impérative pour réaligner dans l’industrie
marocaine des TH les pressions concurrentielles exogènes et les

37
RISO N°4 - Décembre 2017

contraintes endogènes d’optimisation du suivi des indicateurs de


performance. Les variables permettant de mesurer les perspectives
de croissance du secteur TH au Maroc, et à travers le monde, ont
changé. Il ne s’agit plus de ne tenir compte que du chiffre d’affaires,
mais aussi des perspectives offertes par le management stratégique
des entreprises marocaines concernées. Or, précisément, le BSC
vise la concrétisation des visions stratégiques, en tant qu’outil de
pilotage traitant la totalité des dimensions d’une entreprise. Le
BSC permet d’équilibrer les résultats financiers et les indicateurs
opérationnels, assurant par là-même à l’entreprise un pilotage tout
à la fois basé sur ses données passées et sur les projections qu’elle
construit quant à ses futurs possibles. Tenter d’identifier des liens
entre les pratiques de contrôle de gestion proche du BSC et la perfor-
mance des entreprises marocaines du TH, c’est précisément l’objet
de notre travail de recherche.
Figure 1 – Le modèle du Balanced Scorecard
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Source : Adapté de Kaplan et Norton, 2007b.


Néanmoins, la mise en place du BSC au Maroc n’étant pas encore
généralisée, notre étude se focalise sur des études comparatives
d’avec les outils de contrôle de gestion observés empiriquement
auprès d’une quinzaine d’entreprises de la région de Tanger (Ma-
roc). Des avatars de Balanced Scorecard apparaissent de la diffusion
d’indicateurs non financiers et du renforcement entre stratégie et

38
Évaluation prospective de la performance et enjeu de développement :
cas du Balanced Scorecard appliqué à la filière textile-habillement

contrôle de gestion. On pose alors la question principale de notre


recherche de la manière suivante : Quels sont les degrés de confor-
mité du contenu des systèmes de mesure de la performance des
industries de TH de la région de Tanger, à la structure équilibrée
définie par le BSC ?
Nous retenons les dimensions de la performance suivantes : la per-
formance économique qui correspond aux résultats présentés par
la comptabilité, essentiellement les soldes intermédiaires de gestion
(production et marge commerciale, valeur ajoutée, excédent brut
d’exploitation, résultat brut d’exploitation et résultat net) ; la perfor-
mance sociale qui est, pour une organisation, le rapport entre son
effort social et l’attitude de ses salariés ; la performance managériale,
c’est-à-dire l’habilité du manager et de l’équipe dirigeante à réaliser
des objectifs fixés ; la performance organisationnelle (mesures se rat-
tachant directement à la structure organisationnelle) ; la performance
technologique (l’utilisation efficace des ressources de l’entreprise,
l’innovation dans un système de gestion, le processus de production
et les biens et services produits par l’entreprise) ; la performance
commerciale (capacité de l’entreprise à satisfaire sa clientèle) ; la
performance sociétale (le fait d’accommoder les réponses fournies
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par l’entreprise aux pressions sociétales (concept de l’entreprise
citoyenne) ; et enfin la performance stratégique (sauvegarder ou
consolider la distance séparant l’entreprise de ses concurrents).
Notre analyse empirique tient compte notamment des déterminants
de la performance de type stratégie d’entreprise, structure de l’en-
treprise, culture de l’entreprise et environnement de l’entreprise. En
ce sens, nous considérons le BSC comme un outil de pilotage ou une
chaîne de causalités permettant de remédier aux défaillances des
informations financières incapables d’évaluer la performance globale
de l’organisation, même si les indicateurs financiers conduisent aux
autres axes du BSC. L’axe client permet l’identification des segments
constituants la clientèle cible et informe l’entreprise sur les réactions
et les propositions concernant ses produits et services. L’axe processus
internes anime l’innovation, la production, le service après-vente.
L’axe apprentissage organisationnel se définit comme étant la capacité
de l’organisation à innover, à améliorer et à apprendre.

2. Cadre méthodologique et profil du terrain de


recherche
Le questionnaire est adopté comme méthode d’observation des pra-
tiques de mesure de la performance, de ses variables explicatives, de

39
RISO N°4 - Décembre 2017

l’incertitude de la conjoncture et de la compétitivité des entreprises


(Simons, 1987 ; Touchais, 2001). Concernant les analyses et les tests
statistiques, nous avons opté pour l’analyse de corrélation (coefficient
r de Pearson). Les données tirées des questionnaires sont analysées
par le logiciel d’analyse statistique (SPSS). Afin d’apporter des ré-
ponses aux questions de recherche, nous avons mené une étude
quantitative (hypothético-déductive) par questionnaire auprès d’un
échantillon de 15 entreprises dans la région de Tanger. Les résultats
de cette recherche nous ont permis de valider en partie notre modèle
théorique. Le questionnaire a été administré par un contact direct et
accompagné d’un préambule dans lequel l’optique de la recherche
était précisée. La répartition des entreprises, et leurs pratiques et
profil, au sein de l’échantillon se présentent ainsi :
• L’âge des entreprises révèle une majorité d’entreprises de plus
de 10 ans (86,66 %), et même de plus de 20 ans (67 %). Seules
13,33% des entreprises ont moins de 10 ans. L’ancienneté rela-
tive des entreprises de notre échantillon permet d’anticiper sur
de plus fortes possibilités de survie de ces entreprises qui ont
dépassé la phase critique du démarrage et/ou du lancement.
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• Le chiffre d’affaires est l’une des variables retenues pour mesurer
la taille des entreprises. Dans notre enquête, le chiffre d’affaires a
été obtenu par une question numérique. Cette question a soulevé
quelques sensibilités chez certains répondants, donc les chiffres
d’affaires avancés par certains doivent être considérés comme
indicatifs. Ainsi, pour mieux analyser cette variable, nous avons
opté pour un regroupement en intervalles. Nous observons que
66,66 % des entreprises réalisent un chiffre d’affaires de moins
de 100 millions de dirhams (près de 10 millions d’euros), alors
que celles que nous considérons comme de grandes entreprises
réalisent un chiffre d’affaires annuel supérieur à 100 millions de
dirhams et représentent 33,33 % de l’ensemble des entreprises.
• La taille des effectifs est incontestablement l’indicateur le plus
utilisé sur le plan économique et académique pour évaluer la
taille d’une entreprise. Ainsi, pour distinguer une PME d’une
grande entreprise, on utilise au Maroc, parmi d’autres critères,
le critère de l’effectif. La charte de la PME précise qu’une PME
doit « avoir un effectif permanent ne dépassant pas deux cents per-
sonnes »9. Il nous semble intéressant d’apprécier l’effectif des

9 Loi n°53-00, formant charte de la petite et moyenne entreprise, Bulletin


Officiel N°5036 du 05-09 2002, p. 921.

40
Évaluation prospective de la performance et enjeu de développement :
cas du Balanced Scorecard appliqué à la filière textile-habillement

entreprises de l’échantillon à partir du moment où l’une de nos


hypothèses de cette recherche stipule que la taille de l’entreprise,
mesurée par l’effectif, influence la configuration du système de
mesure de la performance mis en place. De ce fait, il est néces-
saire de vérifier si les entreprises de l’échantillon représentent
bien les différents intervalles de taille, afin de faire fluctuer la
variable « Taille » et avoir par conséquent de meilleurs résultats.
La distribution des entreprises enquêtées laisse apparaître la
configuration suivante : 13,33 % des entreprises ont moins de
50 salariés, 13 % ont de 50 à 100 salariés, 40 % ont entre 100 et
200 salariés, et 33 % ont plus de 200 salariés. Nous avons dès
lors 13,33 % de TPE/PME (-de 50 salariés), 53 % de PME (+ de
50 salariés) et 33 % de grandes entreprises.
Nous pouvons conclure, en croisant les critères du chiffre d’affaires
et des effectifs, que notre échantillon est principalement composé
d’entreprises ayant un chiffre d´affaires entre 50 MD et 200 MD et
des effectifs de 100 à 200 salariés. Cette configuration de la taille
des entreprises de l’échantillon correspond bien à la distribution
des entreprises présente dans le secteur du TH dans la zone de
Tanger (en majorité des moyennes et grandes entreprises dans le
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domaine de textile-habillement).
Concernant l’utilisation d’outils du contrôle de gestion dans les en-
treprises enquêtées, nous examinons premièrement, l´ancienneté de
la fonction de contrôle de gestion, deuxièmement, le rattachement
hiérarchique de ces services, et troisièmement, le degré d’utilisation
effective des principaux outils de contrôle de gestion, à savoir : la
comptabilité analytique, les budgets, et les tableaux de bord.
Concernant l’ancienneté des services contrôle de gestion, nous rete-
nons l’âge de la première mise en application des services contrôle
de gestion de l’échantillon par intervalles : 20 % a plus de 10 ans
d’installation, 47 % a entre 5 et 10 ans, 27 % de 1 à 5 ans et seule-
ment 6 % a moins de 1 an. La grande majorité des entreprises ont
un service contrôle de gestion dont l’âge est d’au moins 5 ans, ce
qui témoigne de la maturité relative des services contrôle de gestion
de l’échantillon.
Concernant le rattachement hiérarchique des services contrôle de
gestion, il est à souligner que ces services constituent dans notre
échantillon, un véritable relais d’information entre les directions
opérationnelles et les directions financières auxquels le contrôle de
gestion est rattaché dans 100 % des cas d’entreprise étudiés.

41
RISO N°4 - Décembre 2017

Concernant les fréquences d’utilisation du contrôle de gestion :


• seuls 20 % de notre échantillon n’utilise jamais l’outil de comp-
tabilité analytique, 33 % l’utilise occasionnellement contre 47 %
pour qui cet outil très usuel ;
• les méthodes modernes de calcul de coûts sont en revanche moins
utilisées : la méthode d’imputation rationnelle des charges fixes
n’est jamais utilisée pour 67 % des entreprises de notre échan-
tillon, le Direct Costing pour 47 % d’entre elles et la méthode
ABC (Activity Based Costing) pour 60 % d’entre elles.
Concernant l’utilisation du tableau de bord, deux types d’outils sont
examinés dans notre analyse, il s’agit du tableau de bord classique et
le Balanced Scorecard. 67 % de nos entreprises utilisent le tableau de
bord classique, tandis que 47 % utilisent le Balanced Scorecard. Dans
ce dernier cas, le degré d’intégration « élevé » de l’axe financier est
de 60 % (fréquence moyenne de 4,4 avec un écart-type de 0,82), le
degré d’intégration « élevé » de l’axe client est de 100 % (fréquence
moyenne de 4,2 avec un écart-type de 0,45), le degré d’intégration
« élevé » de l’axe processus interne est de 40% (fréquence moyenne
de 3,4 avec un écart-type de 1,35), le degré d’intégration « élevé »
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de l’axe apprentissage organisationnel (et innovation inhérente)
est 14 % (fréquence moyenne de 2,53 avec un écart-type de 0,91) ;
de fait, les indicateurs mesurant la satisfaction des employés, la
formation du personnel ou le taux d´absentéisme, n´occupent pas
une place importante dans notre analyse.
Sur la base de ces premières observations, nous pouvons attester
que le système de mesure de la performance des entreprises de
la filière TH de la région de Tanger est globalement conforme à
l´équilibre défini par le Balanced Scorecard, l´axe financier et l´axe
client ayant un rôle prépondérant dans le contenu des systèmes de
mesure de la performance desdites entreprises. Cette différenciation
dans les taux d´intégration est influencée par des facteurs internes
et externes propres à chaque entreprise.
Sur la base de notre modèle théorique, nous formulons l’hypothèse
générale (ou principale HP) selon laquelle il y a bien conformité
du système de mesure de la performance des entreprises à celle
du Balanced Scorecard, en tant que mode d’adaptation influencé par
certains facteurs incitatifs d’ordre stratégique et/ou managérial.
Nous posons ensuite 4 hypothèses dérivées, à observer dans le
secteur du TH de la région de Tanger :

42
Évaluation prospective de la performance et enjeu de développement :
cas du Balanced Scorecard appliqué à la filière textile-habillement

• H1 : Les entreprises de grande taille tendent à équilibrer leur


système de mesure de la performance en intégrant celle du
Balanced Scorecard. Cette hypothèse se base sur les résultats de
certaines études empiriques qui considèrent la taille comme
déterminante dans le pilotage de l’entreprise (Lorino, 2001 ;
Cobbold et Lawrie, 2002 ; Kaplan et Norton, 2007a).
• H2 : Plus l’entreprise adopte une stratégie de différenciation,
plus les indicateurs utilisés sont plus variés pour mesurer les
quatre dimensions de la performance préconisée par le Balanced
Scorecard. Cette hypothèse se base sur les résultats de certaines
études empiriques au point de rencontre de la stratégie et du
contrôle de gestion, voire du BSC (Simons, 1995 ; Malina et Selto,
2001 ; Marginson, 2002 ; Bisbe et Otley, 2004 ; Chenhall, 2005 ;
Ahrens et Chapman, 2005 ; Naro et Travaille, 2010).
• H3 : Plus l’entreprise adopte un style de management moderne
et une structure sociale développée, qui s’oriente vers le chan-
gement et le personnel, plus elle utilise des indicateurs variés
mesurant les quatre axes du la performance identifiées par le
Balanced Scorecard. En ce sens, certaines études observent un
tel constat (Hansen et Mouritsen, 2005 ; Voelpel et al., 2006 ;
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Widener, 2007).
• H4 : L’incertitude de la conjoncture et de la compétitivité du sec-
teur obligent les entreprises de la filière TH à détenir une grande
variété d’indicateurs de performance et à respecter la structure
proposée par le Balanced Scorecard. En ce sens, nous rejoignons
ici certains travaux qui articulent planification, incertitude et
contrôle (Longeaux, 1977 ; Simons, 1987 ; Touchais, 2001).

3. Résultats et discussion
Après avoir effectué les traitements statistiques appropriés, nous
concluons à la validation partielle de l’hypothèse principale qui
affirme que le système de mesure des performances des entreprises
de TH de la région de Tanger est adéquat au BSC, l’adaptation se
faisant au moyen de facteurs d’ordre stratégique et managérial. On
peut aussi constater la présence d’autres facteurs liés à l’environ-
nement de l’entreprise tels que la taille, le style de management, et
enfin l’incertitude de la conjoncture (Simons, 1987 ; Touchais, 2001).
Les entreprises du TH s’avèrent de plus en plus soucieuses de la
mesure de leur performance multiple ainsi que du pilotage straté-
gique. Les résultats de notre analyse par rapport au BSC valident
une majorité d’hypothèses qui confirment l’intérêt pour ce secteur

43
RISO N°4 - Décembre 2017

très concurrencé au plan régional d’un réel souci de compétitivité


par une meilleure gestion des opérations et un pilotage prospectif
comme réponse à l’hyper-compétitivité internationale du secteur
TH (Ilinitch et al.,1996).
3.1. Étude de corrélations
L´étude de la corrélation a pour objectif de mesurer le sens et la
force de la relation qui existe entre les variables retenues (variables
endogènes : taille, stratégie, style de management ; et variables
exogènes : incertitude de la conjoncture) et les quatre dimensions
du BSC. Le coefficient de corrélation r de Pearson est l´indice de
relation linéaire utilisé. Il indique en effet la force de la relation qui
existe entre deux variables, ainsi que le sens de cette relation. Les
combinaisons de corrélations ne sont pas dues au hasard, mais se
basent sur un barème généralement accepté par les chercheurs.
Nous présentons d’abord les résultats de l´étude de corrélations
en essayant d´apporter des explications aux corrélations trouvées.
L´étude de corrélations est proposée en deux temps : premièrement,
nous formulons les corrélations entre chaque variable (endogène
ou exogène) de nos hypothèses et chaque axe du BSC ; deuxiè-
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mement, nous exposons les corrélations entre chaque variable de
nos hypothèses et l´intégration des quatre axes de mesure de la
performance du BSC.
3.1.1. Combinaison n° 1 : degré de corrélation entre la taille de l’entreprise
et l’intégration des 4 axes du BSC
Sur la base du logiciel « SPSS », nos résultats montrent l´existence
d´une forte corrélation entre la taille des entreprises et la façon
dont les entreprises évaluent leur performance. Le coefficient r de
Pearson indique qu’il y a une corrélation positive (+ 0,642) entre
la taille et l´intégration des quatre axes du BSC, donc d’avec la di-
versité du contenu du système de mesure de la performance. Une
autre corrélation mérite d´être mentionnée, celle qui existe entre
(1) la taille et l’intégration d’indicateurs de l’axe client (+ 0,866), (2)
l’intégration d’indicateurs de l’axe processus internes (+ 0,843), et
(3) l’intégration d’indicateurs de l’axe innovation et apprentissage
organisationnel (+ 0,878). À l’inverse, le coefficient de corrélation
entre la taille et l´intégration de l´axe financier montre qu’il n’existe
aucune relation significative (+ 0,177) entre ces deux variables.
Ce résultat démontre l´importance de la présence des informations
de nature non financière (les indicateurs sur les clients, les proces-
sus, la capacité d’innovation et l’apprentissage organisationnel)

44
Évaluation prospective de la performance et enjeu de développement :
cas du Balanced Scorecard appliqué à la filière textile-habillement

dans le système de mesure de performance des entreprises dont


la taille est importante.
3.1.2. Combinaison n° 2 : degré de corrélation entre la stratégie de
l’entreprise et l’intégration des 4 axes du BSC
L´étude de cette corrélation montre qu´il n’existe qu’une seule re-
lation positive, celle entre la stratégie de différentiation (+ 0,433 ;
Sig bilatérale : 0,050) et l´axe client du BSC. Il n’y a aucune corréla-
tion significative entre ladite stratégie et les autres axes (processus
internes : ₋ 0,331 ; innovation et apprentissage organisationnel :
₋ 0,105). De même, il n’y a aucune relation significative (₋ 0,059) entre
le type de stratégie adoptée et la variété de contenu du système
d’évaluation de la performance des entreprises de textile-habillement
interrogées. Autrement dit, une entreprise poursuivant une stratégie
de différenciation n’utilise pas forcément plus d’indicateurs variés
(financiers et non financiers) que les autres entreprises.
3.1.3. Combinaison n° 3 : degré de corrélation entre le style de management
de l’entreprise et l’intégration des 4 axes du BSC
D´une manière générale, la première lecture des résultats obtenus
révèle l’existence d’une forte corrélation positive (+ 0,722) entre le
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style de management dans les entreprises et l´intégration des 4 axes
du Balanced Scorecard.
En précisant l’analyse, nous constatons l’existence de corrélations
positives entre le degré de décentralisation avec chacune des quatre
dimensions de la performance identifiée par le BSC. Les résultats
indiquent en fait une forte corrélation entre le style de manage-
ment et l’utilisation d’un grand nombre d’indicateurs mesurant la
dimension client (+ 0,959), la dimension apprentissage organisa-
tionnel (+ 0,745) et la dimension financière (+ 0,834). Ces résultats
montrent cependant qu’il n’y a qu’une relation modérée entre le
style de management et l´axe processus interne.
3.1.4. Combinaison n° 4 : degré de corrélation entre l´incertitude de la
conjoncture et la compétitivité de l’environnement, et la structure proposée
par le BSC
Le choix de cette combinaison repose sur le postulat de l´influence
de l´environnement sur l´attention de l´investisseurs en TH ; c´est
donc sur cette variable que se construit une des premières évalua-
tions perceptives sur l’opportunité d´investissement dans ce secteur.
Les résultats montrent une forte corrélation (+ 0,727) entre l´incer-
titude de la conjoncture et la diversité du contenu du système de
mesure de la performance des entreprises de TH interrogées. Dans

45
RISO N°4 - Décembre 2017

le même sens, on observe une forte corrélation entre l´incertitude


de la conjoncture et les trois axes du BSC, (+ 0,737) pour la dimen-
sion financière (+ 0,786) pour la dimension client ; et (+ 0,745) pour
la dimension apprentissage organisationnel. En effet, l’incertitude
de l’environnement est significativement corrélée à la variété du
contenu du système de mesure de la performance, à l’exception
de l´axe processus interne. D’ailleurs, le coefficient de corrélation
indique une influence négligeable (voire nulle) de l’incertitude de
la conjoncture sur l’utilisation de cet axe (+ 0,000). Ce sont donc les
entreprises dont l’incertitude de conjoncture est la plus élevée qui
tendent à équilibrer le plus leur système d’évaluation de la perfor-
mance en intégrant des informations de nature endogène (taille,
situation financière, capacité d’innovation et apprentissage organi-
sationnel). Touchais (2001) observe d’ailleurs que les entreprises en
situation de conjoncture incertaine ont tendance non plus à mettre
en programmation la stratégie devenue instable, mais davantage à
contribuer à la formulation d’une stratégie émergente. Il ajoute que
face à un même niveau d’incertitude les entreprises font un usage
assez différent de leur contrôle de gestion selon précisément la façon
dont elles appréhendent l’incertitude d’un point de vue stratégique.
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3.2. Vérification des hypothèses de recherche
Aux fins de validation des hypothèses, nous les confrontons ici aux
résultats obtenus. Une discussion des résultats de cette confronta-
tion est ensuite proposée. Il s´agit dans un premier temps de vali-
der les hypothèses dérivées pour vérifier, dans un second temps,
si l´hypothèse principale peut être validée. La démarche adoptée
pour valider les hypothèses consiste à interpréter d’une part les
coefficients de corrélation linéaire de Pearson obtenus, et d’autre
part les relations observées dans la partie précédente entre les va-
riables endogènes/exogènes et les axes du BSC.
3.2.1. Vérification de la première hypothèse dérivée (H1)
Rappelons que la première hypothèse dérivée s´intéresse à l´in-
fluence de la taille de l´entreprises sur les pratiques de mesure
de la performance proposées par Kaplan et Norton (2007a) dans
l´approche du BSC.
Nos résultats (cf. Tableau 1) laissent entrevoir l´importance de la
taille de l´entreprises dans l´intégration des 4 axes du BSC dans le
système de mesure de la performance des entreprises de TH de la
région de Tanger. Une forte corrélation explique cette importance,

46
Évaluation prospective de la performance et enjeu de développement :
cas du Balanced Scorecard appliqué à la filière textile-habillement

le coefficient r de Pearson indique qu’il y a une corrélation positive


(+ 0,642) entre la taille et l´intégration des 4 axes du BSC.
Tableau 1 – Le résultat des tests de corrélation entre la
taille de l’entreprise et les 4 axes du Balanced Scorecard
Le coefficient de corrélation r de
Éléments étudiés Pearson
Taille de l’entreprise et axe r = 0,177
Financier
r = 0,866 (corrélation significative
Taille de l’entreprise et axe Client au niveau 0,01)
Taille de l’entreprise et axe r = 0,843 (corrélation significative
Processus Interne au niveau 0,01)
Taille de l’entreprise et axe r = 0,878 (corrélation significative
Apprentissage organisationnel au niveau 0,01)
Taille de l’entreprise et intégra- r = 0,642 (corrélation significative
tion des 4 axes du BSC au niveau 0,01)
Concluons que plus la taille de l´entreprise est grande, plus le sys-
tème de mesure de la performance utilisé est conforme à la structure
équilibrée proposée par le BSC. Ce résultat nous permet de valider
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notre première hypothèse dérivée (H1) : Les entreprises de grande
taille tendent à équilibrer leur système de mesure de la performance,
en intégrant celle du BSC. La taille de l’entreprise incite donc à des
mesures équilibrées et prospectives de la performance.
3.2.2. Vérification de la deuxième hypothèse dérivée (H2)
Cette hypothèse augure que l’engagement d’une entreprise dans
une stratégie de différenciation incite cette entité à utiliser des indi-
cateurs plus variés pour mesurer ses performances, conformément
aux quatre dimensions de la performance, préconisées par le BSC.
Plus largement, cette deuxième hypothèse dérivée (H2) s´intéresse
aux types de stratégie adoptée par les entreprises de TH et à leur
impact sur le degré d´utilisation des indicateurs mesurant les quatre
dimensions de la performance du BSC.
Nos résultats (cf. Tableau 2) montrent cependant qu´il n’y a aucune
relation significative ( – 0,059) entre le type de stratégie adoptée par
les entreprises du secteur TH de la région de Tanger interrogées et
la variété du contenu du système d´évaluation de la performance.
Autrement dit, ni la stratégie de différenciation ni celle de la do-
mination par les coûts ne semblent contraindre les entreprises de
TH interrogées d´utiliser une grande variété d´indicateurs dans le

47
RISO N°4 - Décembre 2017

but d´équilibrer leurs systèmes de mesure de la performance selon


le modèle défini par Kaplan et Norton (2007a) dans l´approche du
BSC. En conclusion, la deuxième hypothèse dérivée (H2) n’est pas
validée.
Tableau 2 – Le résultat des tests de corrélation entre la
stratégie de l’entreprise et les 4 axes du Balanced Scorecard
Le coefficient de corrélation r de
Éléments étudiés Pearson
La stratégie de l’entreprise et axe r = 0,120
Financier
La stratégie de l’entreprise et axe r = 0,866 (corrélation significative
Client au niveau 0,05 (bilatéral))
La stratégie de l’entreprise et axe r = 0,331
Processus Interne
La stratégie de l’entreprise et axe r = 0,105
Apprentissage organisationnel
La stratégie de l’entreprise et inté- r = 0,059
gration des 4 axes du BSC
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3.2.3. Vérification de la troisième hypothèse dérivée (H3)
Cette hypothèse envisage l´influence du style de management sur
la diversité des indicateurs de mesure de la performance confor-
mément au BSC.
Dans un contexte de fort changement organisationnel, les entre-
prises de TH interrogées accordent une importance forte au style
de management. Les résultats obtenus montrent une corrélation
positive importante (+ 0,722) entre le style de management et l´in-
tégration des quatre axes du BSC.
Tableau 3 – Le résultat des tests de corrélation entre le
style de management de l’entreprise et les 4 axes
du Balanced Scorecard
Le coefficient de corrélation r de
Éléments étudiés Pearson
Le style de management de r = 0,834 (corrélation significative
l’entreprise et axe Financier au niveau 0,01)
Le style de management de r = 0,959 (corrélation significative
l’entreprise et axe Client au niveau 0,01)

48
Évaluation prospective de la performance et enjeu de développement :
cas du Balanced Scorecard appliqué à la filière textile-habillement

Le coefficient de corrélation r de
Éléments étudiés Pearson
Le style de management de r = 0,488 (corrélation significative
l’entreprise et axe Processus au niveau 0,05)
Interne
Le style de management de r = 0,745 (corrélation significative
l’entreprise et axe Apprentissage au niveau 0,01)
organisationnel
Le style de management de
r = 0,722 (corrélation significative
l’entreprise et intégration des 4 au niveau 0,01)
axes du BSC
Les résultats présentés nous permettent d’envisager que plus le style
de management de l´entreprise est moderne plus elle a tendance à
utiliser une grande variété d’indicateurs permettant d´équilibrer
son système de mesure de la performance. Nous validons notre
troisième hypothèse dérivée (H3) qui considère que plus l’entreprise
adopte un style de management moderne et une structure sociale
développée, qui s’oriente vers le changement et le personnel, plus
elle utilise des indicateurs variés mesurant les quatre axes du la
performance identifiées par le BSC.
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3.2.4. Vérification de la quatrième hypothèse dérivée (H4)
Cette hypothèse concerne des facteurs exogènes. Elle considère
que l´incertitude de la conjoncture et de la compétitivité du secteur
incitent les entreprises de TH à utiliser une grande variété d´indica-
teurs de performance au sens de la structure proposée par le BSC.
Rappelons que les effets de la crise financière et les effets de
conjoncture liées aux évolutions des réglementations en matière
de libre-échange ont été très lourds pour l´ensemble de l´industrie
marocaine. Ceci est particulièrement vrai pour le secteur du TH qui
a connu une chute substantielle de ses exportations et des pertes de
poste de travail qui ont atteint des niveaux sans précédents dans
ce secteur. Aujourd´hui, l´évolution de la production semble se
stabiliser. L´objectif de cette hypothèse est donc de vérifier jusqu´à
quel point, l´incertitude de la conjoncture, les conditions du mar-
ché, l’hyper-compétitivité du secteur, incitent les entreprises de ce
secteur dans la région de Tanger à intégrer plus d’indicateurs et à
équilibrer leur dispositif de mesure de la performance.
Les résultats de l´analyse (cf. Tableau 4) montre une prise de
conscience significative des entreprises interrogées quant à l´im-
portance de la variété des indicateurs de performance à utiliser,
et donc de l´intégration des quatre axes du BSC à leur système de

49
RISO N°4 - Décembre 2017

mesure de la performance. Une forte corrélation explique cette im-


portance. En effet, le coefficient r de Pearson indique qu´il y a une
corrélation positive (+0,607) entre l´incertitude de la conjoncture et
l´intégration des quatre axes du BSC.
Tableau 4 – Le résultat des tests de corrélation entre
l’incertitude de la conjoncture et les 4 axes
du Balanced Scorecard
Le coefficient de corrélation r de
Éléments étudiés Pearson
L’incertitude de la conjoncture et r = 0,747 (corrélation significative
axe Financier au niveau 0,01)
L’incertitude de la conjoncture et r = 0,786 (corrélation significative
axe Client au niveau 0,01)
L’incertitude de la conjoncture et r = 0,000 (corrélation négligeable)
axe Processus Interne
L’incertitude de la conjoncture et r = 0,745 (corrélation significative
axe Apprentissage organisationnel au niveau 0,01)
L’incertitude de la conjoncture et r = 0,727 (corrélation significative
intégration des 4 axes du BSC au niveau 0,01)
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Ces résultats nous permettent alors de valider notre quatrième hy-
pothèse dérivée (H4) : Le système de mesure de la performance des
entreprises du TH de la région de Tanger est conforme à la structure
équilibrée proposée par le BSC, cette adaptation étant influencée par
certains facteurs d´ordre stratégique et managérial ; l’incertitude
de la conjoncture et de la compétitivité du secteur obligeant les
entreprises de la filière à détenir une grande variété d’indicateurs
de performance et à respecter la structure proposée par le BSC.
3.2.5. Vérification de l´hypothèse principale de la recherche (HP)
La validation de l´hypothèse principale (HP) résulte de la conjonction
des quatre hypothèses dérivées portant sur le degré de conformité
du système de mesure de la performance des entreprises du TH
de la région de Tanger, à la structure équilibrée proposée par le
BSC. Il convient de préciser que la validation de notre hypothèse
principale s´articule autour de deux volets : le premier est celui du
degré d´intégration des quatre dimensions du modèle BSC proposés
par Kaplan et Norton (2007a) ; le deuxième concerne l´influence
des éléments constituant nos hypothèses dérivées sur cet équilibre.
Concernant le volet du degré d´intégration, ce dernier a été corro-
boré dans le cadre de l´analyse des activités des services contrôle de

50
Évaluation prospective de la performance et enjeu de développement :
cas du Balanced Scorecard appliqué à la filière textile-habillement

gestion des entreprises interrogées, précisément pour l´utilisation


du BSC, et les résultats montrent même que 47 % des entreprises
de notre échantillon pratique la mesure de la performance par
l´approche effective du BSC de Kaplan et Norton (2007a). Il reste
néanmoins à s´assurer de la validation des hypothèses dérivées.
Le Tableau 5 nous permet de valider ou non le deuxième volet de
HP qui augure de l´influence des facteurs d´ordre stratégique et
managérial sur l´adaptation de la mesure de la performance équi-
librée à l´approche du modèle de Kaplan et Norton (2007a).
Tableau 5 – Résultat du test des 4 hypothèses et degré de
validation de HP

Hypothèses Énoncé de l’hypothèse Résultats

Les entreprises de taille importante


tendent à équilibrer leurs systèmes de
Hypothèse 1 mesure de performance, en intégrant Validée
la structure équilibrée proposée par le
Balanced Scorecard
Plus l’entreprise adopte une stratégie
de différenciation, plus les indicateurs
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utilisés sont variés, et plus elle adopte Non validée
Hypothèse 2 les métriques proposés par les quatre
dimensions de la performance du Ba-
lanced Scorecard
Plus l’entreprise modernise son style
de management, notamment avec une
configuration développée, orientée vers
le changement et la valorisation des per-
sonnels, plus elle utilise des indicateurs
Hypothèse 3 variés (les indicateurs des qualifications Validée
et des compétences, les indicateurs des
conditions de travail et des relations
professionnelles…) mesurant les quatre
axes de la performance identifiées par
le Balanced Scorrecard
L’incertitude de la conjoncture et de
la compétitivité du secteur oblige les
entreprises du secteur du TH à détenir
Hypothèse 4
une plus grande variété d’indicateurs de Validée
performance et à respecter la structure
proposée par le Balanced Scorecard

La majorité de nos hypothèses a été validée, appuyant ainsi la


conclusion selon laquelle notre hypothèse principale est corrobo-

51
RISO N°4 - Décembre 2017

rée, à savoir que la croissance des entreprises et leur mise à niveau


améliore les métriques de son contrôle de gestion et de ses modes
de pilotage en général.
3.3. Discussion et interprétation des résultats
Nos résultats relèvent l´existence des relations de cause à effet entre
certains facteurs liés au contexte interne et externe de l’entreprise.
Plusieurs conclusions peuvent être émises par rapport aux caracté-
ristiques des systèmes d’évaluation de la performance appliquées
dans les entreprises du TH de la région de Tanger.
De manière générale, les résultats obtenus ont des points de conver-
gence et de divergence avec le principe de mesure de la performance
suggérée par le BSC. Concernant le point de convergence, on peut
citer la forte attention des managers des entreprises du TH à l´axe
Client. En effet, ils accordent un niveau d´importance très élevé à
la performance relative aux clients, avec une moyenne d´intégra-
tion de 4,267 et un score de 73 % accordé à la notion de « grande
importance ». Ils accordent aussi une importance aux segments
de marché constituant la clientèle et les produits et services que
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ces entreprises proposent. Les entreprises de TH sont donc très
attentives à la satisfaction du client compte tenu des conséquences
de la crise financière auxquelles l´industrie de TH doit faire face.
Elles utilisent en ce sens des indicateurs d´information directs ou
indirects : réclamations, étude de la concurrence, taux de satisfaction
des clients, délais de livraison…
En ce qui concerne les points de divergences, on peut noter les ob-
servations suivantes : d´abord, les entreprises du TH de la région
de Tanger accordent certes une grande importance à l´axe financier,
mais cette intégration ne se traduit pas en conformité exacte au
principe suggéré par Kaplan et Norton (2007a) qui formulent que
cet axe s´intéresse à l´amélioration des résultats financiers et à la
satisfaction des actionnaires. La réalité observée est que la majorité
des entreprises de TH interrogées s´intéressent à l´analyse de la
contrainte budgétaire, des charges de production ou des charges
de personnel… ainsi qu’aux produits (chiffre d´affaires, les rem-
boursements…). Ces entreprises n’adoptent donc pas une structure
équilibrée entre les objectifs financiers et la stratégie financière pour
chacune des trois phases simplifiées par Kaplan et Norton (2007a) :
croissance, maintien et récolte. Cependant, le BSC aidera à réaliser les
arbitrages budgétaires comme le prévoient Kaplan et Norton (1992).

52
Évaluation prospective de la performance et enjeu de développement :
cas du Balanced Scorecard appliqué à la filière textile-habillement

Au demeurant, l’axe Processus interne enregistre un point de conver-


gence appréciable entre la théorie et le résultat obtenu. Cet axe a
connu une montée en puissance dans la préoccupation des managers
des entreprises de TH, mais il faut préciser que les efforts enregis-
trés restent non conformes au modèle de Kaplan et Norton (2007a).
En effet, les auteurs dans ce modèle insistent sur trois processus :
l´innovation, la production et le service après-vente, alors que pour
les managers des TH de la région de Tanger, la production reste
le point prépondérant de leur préoccupation du simple fait que le
système de production est l´outil qui permet la transformation des
matières premières ou des composants en produits semi-finis, en
sous-ensembles et en produits finis. Cette fonction de production
est évidemment liée aux autres fonctions de l´entreprise, telles que
les relations Production/Étude, Production/Méthode, Production/
Achat et Production/Ordonnancement. Ces relations sont communé-
ment censées inciter les entreprises à intégrer des activités de veille
technologique et d´innovation, mais nos résultats ne constatent
pas cette relation chez un grand nombre d’entreprises interrogées.
C’est sans doute ce qui explique un certain ralentissement dans le
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développement et les processus d´innovation chez ces entreprises.
On observe en conclusion un certain déséquilibre d´intégration du
processus interne.
Enfin, l´axe Apprentissage organisationnel enregistre un point de di-
vergence entre l´équilibre du BSC et la réalité observée. Notre étude
montre que l´axe Apprentissage organisationnel est peu développé
dans le système de mesure de la performance des entreprises de TH
interrogées. Ce point de divergence, la défaillance dans l´intégration
de cet axe, s´explique par le fait que la majorité de l´emploi dans le
secteur revêt un caractère d´emploi saisonnier ; ainsi l´industrie de
la confection utilise rarement une main-d´œuvre temporaire. En
outre, ce secteur reste, malgré les efforts consacrés par l’Office de
Formation Professionnelle et de Promotion du Travail (OFPPT), un
milieu peu qualifié, peu motivant, et où la formation demeure insuf-
fisante. Ce secteur se caractérise en effet par un niveau d´instruction
faible des ouvriers (très forte proportion d´analphabétisme), par
une insuffisance de techniciens supérieurs, et retard sérieux accusé
par la filière en matière d´amélioration des conditions de travail et
des relations professionnelles, en particulier dans les domaines de
la régularité effective du travail, de la durée du temps de travail,
des types de contrat et de la protection sociale.

53
RISO N°4 - Décembre 2017

Pour toutes ces raisons, on peut conclure que l´axe Apprentissage


organisationnel reste l´axe le plus difficilement compréhensible (ou
assimilable) par les entreprises de TH au Maroc.
Figure 2 – Validation du modèle – Niveau d’intégration
des outils de pilotage stratégique et opérationnel pour
faire face à la crise du secteur TH au Maroc et améliorer
la compétitivité des entreprises dans un environnement
mondialisé et hyper-compétitif
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54
Évaluation prospective de la performance et enjeu de développement :
cas du Balanced Scorecard appliqué à la filière textile-habillement

Ces points de convergence et de divergence, nous ont permis de


conclure que l´application du BSC par les entreprises du secteur
du TH est marquée par un certain déséquilibre ou inachèvement
(cf. Figure 2). Cela s’explique, d´une part, par le niveau de connais-
sance insuffisant du modèle du BSC par les gestionnaires de ces
entreprises, et d´autre part, par d’autres facteurs composant nos
hypothèses dérivées :
• La taille : nos résultats confirment les études empiriques (Lorino,
2001 ; Cobbold et Lawrie, 2002 ; Kaplan et Norton, 2007a), qui
montrent que les entreprises dont la taille est la plus grande
tendent à équilibrer leurs systèmes de mesure de la perfor-
mance, en intégrant des indicateurs non financiers, autrement
dit, ce sont les grandes entreprises qui ont tendance à varier le
contenu du système de mesure de la performance de façon à ce
qu´il soit conforme à la structure équilibrée proposé par Kaplan
et Norton (2007a).
• La stratégie : les modèles de la concurrence de l’économie in-
dustrielle considèrent que le fondement des stratégies est le
développement d’un avantage concurrentiel soutenable dans un
domaine d’activité donné (Porter, 1980). Porter (1980) considère
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qu’il y a deux sources principales d’avantage concurrentiel :
– La domination par les coûts : une industrie est en situation
de concurrence par les coûts lorsqu’une réduction relative
des coûts de production permet aux entreprises du secteur
d’augmenter leurs exportations, de gagner des parts de
marchés et d’améliorer leurs revenus par des effets de vo-
lume. Sur cette base les entreprises utilisent des indicateurs
comme le coût de production, la productivité globale des
facteurs, la compétitivité-coût ou compétitivité-prix.
– La différenciation : la littérature (Gabszewicz, 2006) a opéré
une distinction entre deux types principaux de différencia-
tion : horizontale (variété) et verticale (qualité). On distingue
aussi deux voies principales de différenciation par lesquelles
les firmes s’engagent dans une concurrence par la qualité.
Les firmes peuvent engager des dépenses intensives en R&D
pour réaliser des innovations de produits. Elles peuvent aussi
améliorer les perceptions de la qualité de leurs produits
par la publicité. Cette stratégie n’est pas observée pour les
entreprises de TH de la région étudiée. En effet, les résultats
de notre recherche empirique ne coïncident pas avec cette
prédiction théorique, ce qui doit avoir une incidence sur la

55
RISO N°4 - Décembre 2017

non-validation de l´hypothèse qui veut que plus l´entreprise


adopte une stratégie de différenciation plus les indicateurs
utilisés sont plus variés pour mesurer les quatre dimensions
de la performance préconisé par le BSC. Cette observation
confirme cependant l’approche contingente de Lawrence
et Lorsch (1967) qui considèrent que les entreprises perfor-
mantes doivent adapter leur niveau de différenciation et
d’intégration au niveau d’incertitude de l’environnement
dans lequel elles se situent.
• Le style de management : la relation positive entre la variable re-
présentative de style de management et la variété du contenu
de la mesure de la performance, indique que les entreprises qui
adoptent un style de management orienté vers le changement
et le personnel, ont tendance à utiliser plus des indicateurs per-
mettant d´équilibrer leur système de mesure de la performance.
Cela s´explique par le fait que les déterminants de l´emploi, des
revenus du personnel, de la motivation, se retrouvent dans la
valeur ajoutée économique créée par l´entreprise. Autrement
dit, les dépenses engagées par l´entreprises pour améliorer les
conditions de travail, le climat social, la compétence et la quali-
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fication influencent bien la perception que se font les managers
de la performance prospective de leur entreprise. Cette vision
théorique (Hansen et Mouritsen, 2005 ; Voelpel et al., 2006 ;
Widener, 2007) s’observe empiriquement par la préoccupation
des contrôleurs de gestion des entreprises de TH étudiées, d´u-
tiliser des indicateurs variés (les indicateurs des qualifications
et des compétences, les indicateurs des conditions de travail et
des relations professionnelles.) conformément aux quatre axes
de la performance, proposés par le BSC.
• L´incertitude de la conjoncture : l´étude empirique montre l´exis-
tence d´une forte corrélation entre le facteur « incertitude de la
conjoncture » et l´intégration des quatre axes du BSC. Ce résultat
est interprété par le fait qu’en plus de la performance financière,
les entreprises ressentent le besoin et même l´exigence d´intro-
duire d´autres indicateurs pour faire face à un environnement
complexe et incertain qui reflète l´état actuel de la conjoncture
mondiale. En cela, cette observation rejoint les travaux de Lon-
geaux (1977), Simons (1987) et Touchais (2001). Les managers
portent une attention particulière aux indicateurs ayant une rela-
tion avec la conjoncture tels que l´investissement, le financement,
les taux de change, les taux d´intérêt et les taux d´inflation.

56
Évaluation prospective de la performance et enjeu de développement :
cas du Balanced Scorecard appliqué à la filière textile-habillement

Conclusion
Nos résultats ne permettent pas d’affirmer que le Balanced Scorecard
correspond à une innovation managériale forte dans le secteur TH
au Maroc, constatant certes un avantage déterminant, mais n’obser-
vant aucune rupture significative ou systématicité dans la pratique
du BSC, éléments marqueurs d’une innovation managériale (Méric,
2003). Certes, notre échantillon mériterait d’être élargi à davantage
d’entreprises au Maroc et même contenir un échantillon de contrôle
soit dans d’autres régions périphériques du Grand Casablanca indus-
triel, soit dans d’autres secteurs d’activité ; de même aurions-nous
pu aborder certains éléments de contingence culturelle qui relativise
le caractère universaliste du modèle BSC, mais globalement cette
recherche, qui élude le courant culturaliste, présente l’originalité
d’apporter des réponses nouvelles aux enjeux de développement
d’une industrie en hyper-compétitivité en Afrique. Nos résultats
laissent apparaître d’abord une relation assez forte des indicateurs
de performance des entreprises interrogées avec l’axe financier, no-
tamment pris dans le sens de réalisation des arbitrages budgétaires ;
nous observons aussi une forte implication des grandes entreprises
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dans le processus de BSC en tant qu’outil de contrôle prospectif de
leur performance multiple ; ainsi qu’une sensibilité significative à
la conjoncture du secteur en hyper-concurrence, notamment en ce
qu’elle présente de fortes incertitudes ; enfin, nous constatons que
les failles de l’enjeu de développement de ce secteur réside encore
dans le déficit d’apprentissage et d’innovation en raison du niveau
des RH dans les entreprises étudiées. C’est essentiellement là que
le bât blesse dans les entreprises du TH au Maroc.
Dans l’ensemble, un certain nombre d’ajustements sont encore
nécessaires pour que les entreprises marocaines du TH puissent
augmenter leur compétitivité internationale, augmenter leurs re-
venus, monter en qualité et innover. La formation et la montée
en compétence du personnel, la mesure de la création de valeur
dans son ensemble (au-delà des simples arbitrages budgétaires),
l’implication des PME et TPE dans les outils modernes du mana-
gement et du contrôle, d’autant que dans ce secteur à forte intensité
de main-d’œuvre leur nombre est important (près de 77 %), et
enfin, l’adaptation aux contextes incertains par une contribution
du contrôle à la formulation de stratégies émergentes, sont encore
nécessaires à l’enjeu de développement du secteur TH au Maroc
(PIB, emplois, qualité, exportations…).

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