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86 Lycee Guy Chauvet Loudun

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Initiation à la démarche philosophique en 1ère L

Académie de Poitiers
Nom et adresse complète de l’établissement : Lycée Guy Chauvet – rue de l’Eperon – BP
69 – 86206 LOUDUN CEDEX
ZEP : non
Téléphone : 05 49 98 17 51
Fax : 05 49 98 79 09
Mél de l’école ou de l’établissement : ce.0860021f@ac-poitiers.fr
Adresse du site de l’école ou de l’établissement : http://hebergement.ac-poitiers.fr/l-gc-
loudun/
Coordonnées d’une personne contact : Mme Grué-Coutaud Florence
Classe(s) concernée(s) :1ère L
Discipline(s) concernée(s) : Philosophie
Date de l’écrit : mai 2005
Lien(s) web de l’écrit : http://www.ac-poitiers.fr/meip
Axe académique :1 Le sens de l’école au travers des initiatives pédagogiques

En 1ère littéraire, un professeur propose une initiation à la démarche philosophique pour


répondre à deux causes majeures de difficulté : la précision en matière de maîtrise de la
langue et les bases de la construction d’une argumentation conceptuelle. Il s’agit donc
d’anticiper les fondements de la démarche philosophique pour mieux assurer la réussite
des élèves en terminale.

Mots clés :
initiation, raisonnement philosophique

Structures Modalités - Thèmes Champs disciplinaires


dispositifs
Lycée Diversification Arts et culture
d’enseignement pédagogique Citoyenneté, civisme Philosophie
général Difficulté scolaire
Maîtrise des
langages
Initiation à la démarche philosophique en 1ère L

I. Descriptif technique de l’action ............................................................. 1

II . Anticiper, pourquoi, ou pour quelles raisons et dans quels


buts anticiper ? ....................................................................................................... 1

III . La méthode proprement dite ou comment constituer ce cours


d’initiation à la démarche philosophique................................................................. 2
III . 1 . Le travail sur la maîtrise de la langue ........................................ 2
III . 2 . Le travail sur la construction d’un raisonnement........................ 2

IV . L’application de cette méthode, ou des exemples de questions


abordées pour initier à la démarche philosophique : .............................................. 3
IV . 1 . Quelques principes méthodologiques pour expliquer un texte... 5
IV . 2 . Se donner les moyens de l’expliquer ......................................... 6
IV . 3 . Aller au-delà du texte lui-même ................................................. 6
IV . 4 . Poser les questions : le plus difficile pour les élèves ! ............... 6

V. Évaluation : ce que les élèves ont retenu de la démarche


philosophique ......................................................................................................... 7
V . 1 . Un exercice, 4 indicateurs.......................................................... 7
V . 2 . Des acquis partiels, logiques pour une initiation, mais des
manques culturels............................................................................................... 7

VI . CONCLUSION .................................................................................. 8
Initiation à la démarche philosophique en 1ère L

I. Descriptif technique de l’action

L’action « Initiation à la démarche philosophique » consiste à proposer aux


élèves de Première littéraire deux heures hebdomadaires de Philosophie. Ces
deux heures sont dispensées par un professeur de Philosophie tout au long de
l’année scolaire.
Loin de constituer un cours de Philosophie analogue à celui que l’on peut
proposer en Terminale et qui repose sur un programme, cette « initiation à la
démarche philosophique » consiste à sensibiliser les élèves aux exigences
propres à cette discipline et dont les difficultés lui sont spécifiques. En d’autres
termes, il s’agit d’anticiper, c’est-à-dire de faire comprendre, dès l’année de
Première, ce qu’il faut entendre dans l’expression « démarche philosophique » et
ce qu’il faut faire pour adopter cette dernière.

II . Anticiper, pourquoi, ou pour quelles raisons et dans quels


buts anticiper ?
Le projet est né à la suite de constats faits en Terminale par un professeur
de philosophie depuis plusieurs années. Ces derniers portent principalement sur
les difficultés qu’ont les élèves, à l’écrit comme à l’oral, dans cette discipline :

• difficultés d’expression au sens interdisciplinaire lors d’un débat par exemple,


ou simplement pour élaborer une réponse claire et structurée à une question
posée ;
• difficultés quant au choix rigoureux de leur vocabulaire ;
• difficultés pour donner un sens exact à un concept que l’on cherche à définir ;
• enfin difficultés quant à l’élaboration d’un raisonnement argumenté, qui,
comme tel, ne soit pas la reprise de formules toutes prêtes ou de préjugés.

De telles difficultés ont deux causes majeures. La première est relative au


cursus des élèves précédant l’année de terminale : de fait, la maîtrise de la
langue, la précision verbale ne sont pas encore acquises, et suffisamment, et pour
tous. La seconde est relative à l’ignorance des élèves quant aux exigences
propres à cette discipline qu’est la philosophie : ils sont souvent étonnés de voir
que la philosophie repose sur une démarche rigoureuse et sur un travail
conceptuel exigeant, soit sur ce que l’on ne possède pas naturellement mais qu’il
faut acquérir grâce à une méthode et à l’expérience. Bref, la philosophie n’est pas
seulement un ensemble de doctrines, elle est aussi et d’abord une démarche qui
s’apprend. En un mot, elle est une forme d’art.

Ces difficultés ne sont pas sans conséquences. En effet, outre le


découragement de certains élèves de terminale, il faut noter ce qui fait parfois et
logiquement suite à ce dernier, à savoir l’échec. D’où l’hypothèse de travail d’une
anticipation en Première pour prévenir cet échec.

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Le but de cette initiation à la démarche philosophique est donc de
prévenir l’échec. Pour le réaliser, il s’agit d’abord de se poser les questions
suivantes : quels pré-requis, quelles bases rigoureuses faut-il introduire ou
réintroduire dans l’usage de la langue ? Quels manques, quelles caricatures
demeurent les plus criantes et dans quels domaines ? Quelles modalités de travail
adopter pour préparer ces élèves de première à la démarche philosophique ? Il
s’agit ensuite d’adopter une démarche, et celle la plus à même de prendre les
élèves là où ils sont, avec leurs compétences, de les aider à identifier leurs
difficultés et à les résoudre, enfin de les sensibiliser à l’acte de philosopher.

III . La méthode proprement dite ou comment constituer ce cours


d’initiation à la démarche philosophique
Dans sa définition la plus large, la méthode adoptée consiste à lancer un
problème, une question, en vue d’engager un travail d’interrogation de la part des
élèves, travail porté sur les termes mêmes de la question comme sur la
problématique la plus adéquate pour résoudre le problème ou répondre à la
question. Sur ce point, un tel procédé ne se distingue pas vraiment de celui
adopté en terminale. Ce qui change, c’est que les sujets proposés ne supposent
pas de connaissances particulières et par trop techniques mais demandent aux
élèves d’utiliser leur propre expérience, leur propre culture. Ce qui change aussi,
c’est que quand bien même le traitement de ces sujets amène à évoquer des
philosophes et des doctrines philosophiques, ces philosophes sont des plus
abordables et l’étude de leurs doctrines n’est pas approfondie comme elle peut
l’être en terminale (il est à noter que, curieux d’en savoir davantage sur certains
philosophes, des élèves ont demandé au professeur de développer, déplier,
approfondir plus encore une pensée doctrinale que ce que ce dernier ne pensait
faire !).

Dans sa définition plus précise et plus technique, cette méthode consiste à


produire ensemble, professeur et élèves, un double travail, d’une part un travail
sur une certaine maîtrise de la langue, d’autre part un travail sur la construction
d’un raisonnement :

III . 1 . Le travail sur la maîtrise de la langue


Il s’agit de choisir le plus rigoureusement le vocabulaire à employer, de
construire la phrase qui donne très précisément le sens. De fait, face à une
question, définir le plus adéquatement les termes qu’elle contient ne va pas de soi.
Identifier des synonymes, des antonymes, donner du sens à ces termes en
évoquant exemples et expériences, situations vécues des élèves, constituent des
procédés heuristiques, c’est-à-dire permettant de passer de l’obscurité à la clarté,
du silence à l’obtention d’une définition non pas abstraite mais qui parle.

III . 2 . Le travail sur la construction d’un raisonnement


Ce raisonnement se veut fondé sur des arguments, non sur des faits. Pour
engager ces arguments, « déplier » les termes contenus dans une question posée

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demeure nécessaire. Autrement dit, élaborer une argumentation conceptuelle est
requis. Qu’est-ce à dire ? Concrètement, au tableau, les mots de la question sont
dépliés, mis en relation et en opposition. Peu à peu, ce travail met à jour d’une
part les différents points de vue possibles sur la question, d’autre part les
arguments essentiels qui constitueront le corps du raisonnement.

Enfin, des textes philosophiques sont utilisés comme support à ce double


travail. Ils permettent soit d’approfondir des arguments d’ores et déjà identifiés par
les élèves eux-mêmes (ce qui, d’ailleurs, n’est pas sans provoquer chez eux une
forme d’étonnement ou même de fierté), soit d’en découvrir de nouveaux, moins
aisés à identifier.

IV . L’application de cette méthode, ou des exemples de


questions abordées pour initier à la démarche philosophique :
Le premier problème abordé en classe prend la forme d’une question,
à savoir « La violence est-elle naturelle ou culturelle ?»
Il s’agit d’abord, non de donner aux élèves la procédure adéquate pour
traiter un tel problème, mais d’identifier celle-ci avec eux, autrement dit de les
apprendre à chercher :

Tout d’abord, laissant parler les élèves sur cette question, le professeur
saisit vite une difficulté quant à leur démarche : en effet, avant même de
comprendre exactement le sens de cette question par l’analyse préalable de
ses termes, tous cherchent de suite à y répondre. Or, outre le fait que certains
propos sont quelque peu décalés par rapport à la question, une telle démarche
révèle vite ses limites. De fait, si les élèves engagent bien des arguments
valables, ils ne voient pas qu’ils sont parfois de même nature et ils ne parviennent
pas à identifier d’autres arguments, de ceux qui, moins aisés à trouver, exigent
une analyse préalable des termes de la question. Ainsi, par exemple, les élèves
identifient « naturel » et « normal » ou ils ne cernent pas vraiment ce que le terme
de culture signifie ni ce qui dans la réalité quotidienne relève de la culture.

Après avoir donc noté la nécessité d’analyser les termes que la question
comporte, élèves et professeur cherchent les moyens de les analyser (à
savoir s’aider d’un dictionnaire, chercher les synonymes et les antonymes, trouver
des exemples pour illustrer les définitions). Peu à peu, les termes de violence, de
nature et de culture trouvent un sens précis. Ainsi, par exemple, on cerne la
différence entre la force et la violence ; on reconnaît dans ce qui est naturel une
forme de spontanéité, d’instinct, d’hérédité biologique mais aussi d’universalité ;
on voit que les actions culturelles relèvent de l’artifice, se soumettent à des règles
et s’apprennent, on voit aussi que ce qui relève de la culture demeure variable
dans l’espace et le temps ; on identifie aussi dans la vie quotidienne ce qui relève
de la culture, par exemple la langue, les coutumes, les pratiques sociales.

L’analyse des termes étant faite, il devient possible de mieux cerner le


sens de la question posée. Et, de fait, on voit que la question est comprise parce
que l’on parvient à la reformuler en d’autres termes. Cette reformulation est une
tâche plus difficile que la première parce qu’elle oblige à réinvestir l’analyse des
termes faite préalablement. C’est peut-être là aussi que l’exigence d’une maîtrise

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de la langue se révèle le mieux. En effet, tous donnent un sens aux termes
employés pour définir les mots contenus dans la question initiale, mais recréer en
quelque sorte la question à l’aide d’autres termes est un acte plus ardu.

Cette reformulation de la question étant faite, et possédant désormais des


définitions précises des termes de la question, il demeure alors possible d’une part
de cerner les différents points de vue sur la question, d’autre part d’identifier
des arguments, arguments de nature conceptuelle dans la mesure où ils
reposent bien sur l’analyse des termes de la question. Qu’il faille différents points
de vue sur la question, les élèves le reconnaissent très vite : en effet, une telle
question oblige, et par sa forme, et par le thème qu’elle aborde, à engager un
débat. Quant à la recherche des arguments, elle constitue une des étapes les plus
intéressantes à plusieurs égards : tout d’abord, elle oblige les élèves à aller au-
delà des exemples ; ensuite, elle les incite à poser la question « pourquoi » pour
justifier leurs propos, autrement dit à dépasser les opinions toutes faites ; enfin,
elle les amène à découvrir par eux-mêmes combien le temps et le sérieux
accordés à l’analyse préalable des termes de la question détermine la richesse de
l’argumentation. Ainsi, par exemple, comment justifier l’idée selon laquelle la
violence est naturelle en l’homme si l’on ne saisit pas le fait que ce dernier est un
vivant soumis, tels les animaux, à l’instinct de survie, instinct qui appartient à la
nature ? Comment montrer que la violence ne peut pas être culturelle sans tenir
compte du fait que la culture est un ensemble de règles qui, comme telles,
socialisent l’individu et soumettent son comportement à la mesure et à des
valeurs? Comment justifier l’idée selon laquelle la violence est culturelle si l’on n’a
pas préalablement identifié la culture comme un ensemble d’artifices qui, comme
tels, viennent contrarier la spontanéité de l’homme, et si l’on n’a pas remarqué que
les cultures, de par leur multiplicité, sont sources de violence entre diverses
communautés ?

Face à cette question posée, une autre étape du travail reste à produire et
peut se formuler en ces termes : comment ordonner les différents points de
vue sur la question et comment passer d’un point de vue à un autre ? Si les
élèves comprennent vite qu’il faut terminer sur le point de vue qui leur semble le
plus légitime, ils ont néanmoins quelque peine à identifier la manière la plus
adéquate pour passer d’une réponse possible à la question à une autre. En effet, il
s’agit là encore d’une question de méthode, qui, loin d’être naturelle et spontanée,
s’apprend. Cette méthode, il s’agit de la faire découvrir par les élèves eux-mêmes,
notamment en faisant appel à leur expérience du dialogue (qu’ils produisent eux-
mêmes entre eux ou qu’ils peuvent entendre dans un débat télévisé par exemple)
et en les amenant à dire qu’on ne saurait engager un nouveau point de vue sur
une question sans avoir préalablement élaboré des objections au point de vue
précédent. Ce travail d’objection demeure essentiel puisqu’il permet de former
l’esprit critique. Pourtant, identifier ces objections, les formuler de manière claire et
distincte ne constituent pas là encore une tâche facile dans la mesure où cette
dernière oblige à revenir sur la définition même des termes de la question initiale.
Ainsi, comment par exemple remettre en cause cette idée selon laquelle la
violence est naturelle si l’on ne distingue pas violence et instinct, c’est-à-dire
volonté délibérée de nuire à autrui et nécessité inconsciente de survivre ? Ainsi, le
naturel en l’homme produit plus des attitudes instinctives que des comportements
violents. Comment critiquer l’idée d’un homme originairement violent, agressif,
sans revenir sur ce que renferme la culture, à savoir des règles mais aussi des

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interdits, de ces interdits véhiculés par l’éducation et qui répriment les désirs, font
violence à ces derniers ?

Tout au long de ce travail d’argumentation, il demeure possible d’évoquer


des doctrines philosophiques qui permettent d’une part d’approfondir des
arguments élaborés par les élèves eux-mêmes, d’autre part d’en découvrir
d’autres. Ainsi, les thèses freudiennes, présentes dans Malaise dans la civilisation,
permettent de parler des pulsions agressives et naturelles contenues en tout
homme comme du caractère violent de l’éducation, éducation requise pour rendre
possible la vie sociale comme le maintien et les progrès de la civilisation ; un texte
de Levi-Strauss, tiré de Race et histoire, est étudié en classe et permet de
réfléchir sur le caractère culturel de la violence en évoquant l’ethnocentrisme, en
définissant précisément ce terme et en décrivant le mécanisme qui amène une
communauté d’individus à considérer leur culture comme la plus digne et à mettre
hors de l’humanité l’individu qui ne la possède pas ; c’est aussi l’occasion de
rendre compte des différentes causes du racisme.

IV . 1 . Quelques principes méthodologiques pour expliquer un texte


L’analyse de ce second texte, tiré de Race et histoire de Levi-Strauss, et
portant sur l’ethnocentrisme, fait l’objet d’une étude plus approfondie et est
l’occasion d’établir quelques principes méthodologiques pour expliquer un texte.
Laissant d’abord les élèves découvrir le texte, puis les interrogeant sur ce dernier,
ils identifient bien certains concepts clés mais mêlent aussi l’essentiel et le
secondaire ; ils ont aussi quelque peine à donner clairement la thèse de l’auteur et
à identifier la structure du texte. Il s’agit alors de rendre compte de la manière la
plus appropriée d’aborder un texte, de le lire, de le comprendre, et aussi de
l’interroger pour l’expliquer vraiment, c’est-à-dire pour aller au-delà de la
paraphrase. Car là est une difficulté majeure rencontrée par les élèves : s’ils
comprennent, « en gros » disent-ils, ce dont il s’agit dans l’extrait, ils ont quelque
difficulté d’une part à présenter dans un langage clair et distinct la thèse de son
auteur, d’autre part à expliquer le texte, c’est-à-dire à le déplier de telle sorte qu’on
puisse saisir vraiment ce qui est implicitement contenu dans ce dernier. Bref, il
faut interroger le texte, se demander sans cesse pourquoi son auteur engage tel
ou tel propos, s’interroger sans cesse sur le choix de tel ou tel mot contenu dans
le texte. Là encore, il y va d’un texte comme d’une question : la précipitation et
l’absence de méthode sont mauvaises conseillères, quand bien même la bonne
volonté et le désir de bien faire sont présents !
Ce texte est donc l’occasion de donner quelques principes pour aborder un
texte et le comprendre : identifier les différentes parties du texte (à cet égard être
attentif aux mots de transition), souligner les mots importants, dégager l’idée
principale de l’extrait sans se contenter de reprendre simplement une phrase de
celui-ci, identifier le problème dont il est question dans le texte et que ce dernier
cherche à résoudre (tâche au demeurant plus difficile dans la mesure où ce
problème n’est pas explicitement donné par le texte…qui tente plutôt de le
résoudre ; en d’autres termes, le texte donne une réponse à une question qui n’est
pas donnée et qu’il faut découvrir.

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IV . 2 . Se donner les moyens de l’expliquer
Outre ces principes pour aborder le texte, il faut, dans un second temps, se
donner les moyens de l’expliquer : insister sur la valeur d’un questionnement porté
sur le texte demeure ici essentiel. Prenons un exemple. Le texte étudié contient la
phrase suivante : « L’humanité cesse aux frontières de la tribu, du groupe
linguistique, parfois même du village ». Si le contexte permet de comprendre que
Levi-Strauss décrit ici l’attitude ethnocentrique propre à l’homme, il ne permet pas
de dire « pourquoi » ce dernier refuse le statut d’homme à tout humain étranger à
la tribu. Il demeure alors nécessaire de faire appel à sa culture pour pouvoir
répondre à cette question : les élèves évoquent alors les différences
vestimentaires, culinaires, linguistiques, facteurs de rejet de l’altérité, ou encore
l’isolement géographique du village. Le texte évoque aussi le fait suivant : les
populations dites primitives refusent d’utiliser le mot « homme » pour désigner
ceux qui appartiennent à une autre communauté et les appellent des « singes de
terre » ou encore des « fantômes », des « apparitions ».

IV . 3 . Aller au-delà du texte lui-même


Pourquoi le choix de ces termes pour les désigner et pourquoi l’usage du
langage est-il si essentiel dans cette attitude ethnocentriste, telles sont les
questions qu’il faut se poser pour aller au-delà de la simple description de cette
attitude et pour comprendre ses mécanismes. Là encore, les réponses ne sont
pas dans le texte lui-même et il faut même engager une réflexion sur les fonctions
du langage pour pouvoir les donner. Peu à peu, les élèves s’aperçoivent que le
langage permet de qualifier, définir, identifier, et ce de manière précise et
définitive, une chose ou un être ; en un mot, il permet d’attribuer des étiquettes à
toute réalité et, mieux encore, de transmettre cette qualification verbale à ses
proches comme aux générations successives, dans la mesure où le langage est
une construction culturelle, comme telle acquise et transmissible. C’est alors
l’occasion d’aller au-delà du texte lui-même et d’identifier une vérité qui déborde
largement le contexte du texte de Levi-Strauss : dans toute communauté humaine,
et notamment la communauté française, le langage commun est plein de ces
substantifs ou adjectifs, de ces étiquettes, lourdes de sens, et très souvent
péjoratives, que l’opinion utilise pour désigner l’arabe, le juif, la fille ; et si ces
étiquettes ont l’avantage de qualifier une fois pour toutes un individu, si donc elles
simplifient considérablement notre manière de juger autrui, elles sont déjà
l’expression d’une attitude ethnocentriste ou encore hostile à l’égard de l’autre.

IV . 4 . Poser les questions : le plus difficile pour les élèves !


Ce travail, collectif, sur ce texte de Levi-Strauss, élaboré oralement et à
l’aide du tableau, permet de se rendre compte que c’est moins le fait de répondre
aux questions que suscite le texte qui demeure difficile pour les élèves, que de
poser ces questions elles-mêmes ! Et, de fait, si cette démarche intellectuelle n’est
pas, en soi, ardue à adopter, elle n’est pas pour autant naturelle, spontanée. Les
explications de texte produites par les élèves de terminale en témoignent : bien
trop souvent, le correcteur lit de simples paraphrases, qui, acceptables dans leur
forme et révélant une compréhension globale du texte, ne constituent pas
vraiment une explication digne de ce nom. Ainsi, il semble qu’il faille, le plus

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souvent possible, répéter ce genre d’exercice sur les textes philosophiques en
cours d’année scolaire.

V . Évaluation : ce que les élèves ont retenu de la démarche


philosophique

V.1. Un exercice, 4 indicateurs


Au terme de ce double travail porté sur les notions de nature et culture (le
travail sur une question puis celui sur un texte), reste à évaluer, à partir d’un
exercice assez simple, ce que les élèves ont retenu de la démarche
philosophique. Ce dernier consiste en une série de questions portées sur un texte
de Freud, tiré de Malaise dans la civilisation. Parce qu’il s’agit d’un premier
exercice, autonome et solitaire, l’extrait porte sur le thème d’ores et déjà abordé
en classe (il met en évidence le caractère naturel de la violence, analogue à
l’agressivité propre à tout vivant qui, sans culture et sans valeurs, laisse libre
cours à ses pulsions et ignore tout rapport moral à l’autre ; dès lors, la civilisation a
pour but de réprimer cette agressivité native mais elle est toujours menacée de
ruine dans la mesure où le naturel violent propre à tout homme ne disparaît pas
pour autant ; il est seulement canalisé par des normes, des lois, l’éducation, en un
mot des artifices. Bref, il s’agit là de thèmes déjà abordés en classe.). Pour
simplifier la tâche, les questions sont données et elles ont pour finalité de
reproduire en quelque sorte la démarche adoptée lors de l’explication du texte
de Levi-Strauss : ainsi, les premières questions visent à identifier la thèse de
l’auteur, le problème dont il est question dans le texte, enfin sa structure ; les
suivantes obligent à une attention à des passages particuliers de l’extrait en
vue d’aller au-delà de la paraphrase, c’est-à-dire en vue de l’expliquer
vraiment).
Il ne s’agit pas de noter cette première production, mais de la commenter et
de voir dans quelle mesure la démarche philosophique sur un texte a été comprise
et acquise, mais aussi dans quelle mesure les élèves sont capables d’utiliser les
connaissances engrangées les semaines précédentes, comme celles qui
leur sont propres.

V.2. Des acquis partiels, logiques pour une initiation, mais des
manques culturels
Force est de reconnaître que le bilan de cette première évaluation est
mitigé : tout d’abord, la présentation de la thèse de l’auteur n’est certes pas
fausse, mais elle demeure approximative et partielle. En effet, si les élèves
identifient bien les concepts importants du texte, ils ont quelque peine à identifier
toute la thèse et à la formuler clairement et distinctement. En fait, nombre d’entre
eux se satisfont trop souvent d’une reprise d’un passage du texte, omettant de se
rappeler que la thèse court dans tout le texte. De même, si le problème du texte
est aperçu, il l’est aussi de manière partielle : ainsi, beaucoup d’élèves voient que
le problème est de savoir si la violence est naturelle ou culturelle, mais peu se
rendent compte que le problème est aussi de savoir pourquoi et comment la
civilisation peut réprimer cette violence naturelle en l’homme. Quant aux questions
relatives à certains passages de l’extrait, et qui invitaient à faire appel tant à sa

7/9
culture qu’aux connaissances acquises les semaines précédentes, d’une part elles
reçoivent des réponses d’une inégale valeur (certains cherchent bien à être
exhaustifs dans leurs réponses, tandis que d’autres restent beaucoup trop
sommaires, voire énigmatiques), d’autre part, elles révèlent que cette initiation à la
philosophie ne saurait, sinon dans la durée, à tout le moins rapidement, améliorer
la forme comme le contenu des productions écrites d’élèves qui se retrouvent
parfois en Première littéraire avec des difficultés. Celles-ci sont certes liées à la
forme et à la difficulté d’élaborer un discours rigoureux et structuré ; mais elles
sont aussi liées, il faut l’avouer, à un manque de culture quelque peu étranger au
système scolaire. Plus précisément, alors même que l’exercice proposé pouvait
amener les élèves à évoquer leur point de vue comme la connaissance de
l’histoire et de l’actualité, il n’a pas produit tous les effets attendus.

VI . CONCLUSION
Que dégager de cette expérience d’une initiation à la Philosophie en
Première littéraire?

Il est tout d’abord clair que les élèves ont pris ce projet de manière très
positive et ont témoigné de beaucoup de bonne volonté. Plus simplement, ils ont
joué le jeu : pas d’absentéisme, des interventions multiples et spontanées. Deux
raisons majeures peuvent être évoquées pour rendre compte de leur
attitude positive: d’une part l’opportunité de découvrir une discipline qui, inconnue,
suscite déjà chez eux une certaine crainte avant même leur année de Terminale;
d’autre part le caractère nouveau de cette discipline qui leur paraît certes difficile
de par ses exigences, mais aussi intéressante.

Cette initiation à la Philosophie permet seulement de sensibiliser les élèves


à la démarche philosophique comme à ses exigences. On ne peut pas, et,
certainement qu’on ne doit pas, attendre de cette initiation autre chose. Elle a, du
coup, un double effet . Le premier effet, identifiant les exigences propres à la
Philosophie, les élèves, à tout le moins quelques-uns, craignent de ne pas pouvoir
satisfaire à ces exigences mêmes durant leur année de Terminale. Dès lors, ils
appréhendent quelque peu l’échec et tout particulièrement les premières
productions écrites qu’ils devront fournir. Reste que cette crainte n’est pas
systématique et dépend avant tout de la personnalité propre à chaque élève.

S’il est certes difficile de mesurer le bénéfice, pour les élèves de Terminale
littéraire qui, l’année scolaire précédente, ont connu cette initiation à la
Philosophie, ils ont néanmoins eux-mêmes avoué que les premiers cours de
Philosophie n’ont pas suscité chez eux une surprise déroutante, ils vont ainsi
adopter plus rapidement la démarche philosophique quand ils l’aborderont en
Terminale. C’est, de fait le deuxième effet, les élèves perçoivent ce que cette
discipline est et aussi ce qu’elle n’est pas : elle ne relève pas du débat d’opinions,
elle oblige à approfondir sa réflexion comme à s’interroger, notamment sur ses
propres préjugés.

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EFFETS DE L’INNOVATION : AUTO-EVALUATION (dans l’écrit de l’équipe)

Public concerné Élèves Enseignants Projet d’établissement

Etapes d’évaluation
- Difficultés disciplinaires en Constat de difficultés bloquant la
terminal dues à : un manque de réussite en terminale
HIER, LES CONSTATS précision maîtrise de la langue
(analyses, attentes, conception de - Absence d’argumentation
stratégies, de processus… ) conceptuelle
- Ignorance des exigences

- Les élèves ont joué le jeu Élaboration d’une démarche


- Acquis partiels de la démarche : d’anticipation pour prévenir l’échec
AUJOURD’HUI, LES logique pour une initiation des élèves, leur apprendre à se poser
EVOLUTIONS - Manques culturels les bonnes questions
(résultats en termes de connaissances, - Difficultés à l’écrit
capacités, compétences, attitudes ;
l’aspect qualitatif….)

Adaptation plus rapide en terminale Accélération, facilitations, en


conditions favorables à la réussite terminale pour faire vivre la
DEMAIN, LES IMPACTS démarche philosophique en 1 an
(réajustements prévus, effets dans la
durée, perspectives…)

Conditions de réussite

Outils d’évaluation utilisés

9/9

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