Cinétique Chimique - Wikipédia
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La cinétique chimique est l'étude de la vitesse des réactions chimiques. Sur le plan disciplinaire,
elle fait partie de la chimie physique.
Certaines réactions sont totales et très rapides, voire instantanées, comme les explosions.
D'autres sont tellement lentes qu'elles durent plusieurs années (comme la formation de la
rouille), voire plusieurs siècles (comme la formation du charbon ou du pétrole). Certaines sont
même tellement lentes que les réactifs de départ sont considérés comme stables, par exemple
la transformation du diamant en carbone graphite. On parle alors d'états « métastables ».
Importance pratique
Connaître la vitesse des réactions chimiques et être capable de la calculer est de toute première
importance dans toutes les applications de la chimie.
Quelques exemples :
la vitesse de combustion des mélanges utilisés dans les moteurs à explosion, les réacteurs
d'avions, les moteurs fusées ;
la vitesse des réactions chimiques mises en œuvre dans les usines de production de produits
chimiques ;
etc.
La maîtrise de la vitesse de réaction est fondamentale pour un bon usage des substances
chimiques et éviter des catastrophes : emballement des réactions, explosions.
Intérêt théorique
La cinétique chimique permet d'établir des lois de vitesse (voir plus loin) qui servent à valider ou
infirmer des hypothèses sur les mécanismes réactionnels des réactions chimiques.
Vitesse de réaction
Lorsque la réaction progresse, les réactifs disparaissent et les produits se forment en respectant
la stœchiométrie de la réaction, c'est-à-dire les proportions indiquées par les coefficients de
l'équation chimique. Si pendant l'intervalle il a disparu la quantité de l'espèce :
Réaction
instant
instant
variation de quantité
Les variations de quantité de matière pendant la durée pour les espèces sont :
pour l'espèce : ;
pour l'espèce : ;
pour l'espèce : .
La vitesse molaire de réaction est définie par la dérivée de l'avancement de la réaction par
2
rapport au temps :
Elle s'exprime donc en mole par unité de temps. (Nota : on utilise souvent à la place de ).
La vitesse de réaction est une grandeur extensive, donc sa valeur dépend du volume du système.
Pour s'affranchir de ce problème, on définit une grandeur intensive, appelée vitesse volumique de
réaction. En effet dans le cas fréquent de réactions s'effectuant dans un système de volume
constant (c'est en particulier les cas des réactions en solution), la vitesse est définie par
rapport à la variation de la concentration. On l'appelle alors vitesse spécifique ou globale
volumique de réactionnote 2 :
, concentration de l'espèce ;
Dans cette relation (tout comme dans la définition de l'avancement de réaction) est affecté du
signe - pour les réactifs et du signe + pour les produits qui se forment. Dans les unités du SI, la
vitesse volumique s'exprime en mol m−3 s−1 ou en mol L−1 s−1.
Pour les réactions en phases gazeuse, on peut définir la vitesse par rapport à la dérivée de la
pression partielle :
note 3
étant la pression partielle du constituant . Dans les unités du SI, la vitesse s'exprime
alors en Pa s−1note 4.
Facteurs influençant la vitesse des réactions
La vitesse des réactions est sous la dépendance de plusieurs facteurs. On peut citer :
la température,
la quantité des réactifs présents (en solution c'est la concentration des réactifs qui intervient),
la présence d'un catalyseur qui peut accélérer la réaction ou d'un inhibiteur qui peut la ralentir,
Le facteur le plus important est la température, car l'énergie thermique permet en effet dans de
nombreux cas de franchir la barrière énergétique qui existe entre le système dans son état initial
(mélange de réactifs) et son état final (produits formés).
Un autre paramètre important est l'état de la matière. De ce point de vue, les réactions les plus
favorisées sont les réactions qui se déroulent au sein d'une seule phase (liquide : solution,
mélange de liquides miscibles ou gazeuse). En effet, dans ces cas, les molécules des réactifs
sont dans une même phase et peuvent donc facilement entrer en contact pour réagir.
En solution liquide, les vitesses des réactions rapides sont limitées par la diffusion des réactifs
les uns vers les autres.
un solide et un gaz,
un solide et un liquide,
un solide et un solide,
un liquide et un gaz,
La réaction ne peut avoir lieu qu'aux surfaces de séparation des phases (interfaces).
Lorsque les produits sont fractionnés, la réaction est plus rapide, c'est le cas notamment des :
émulsions (fines gouttelettes d'un liquide dans un autre liquide, dans le cas de liquides non
miscibles),
En effet, dans le cas de la matière fractionnée, la surface de contact entre les réactants est
importante, donc les possibilités de réaction nombreuses. Pour les solides, on quantifie ceci par
la surface spécifique, qui est la surface libre par unité de masse ; une poudre, un solide poreux
ou une mousse (filaments imbriqués) ont une grande surface spécifique. Lorsque les réactants
ne sont pas dans le même état (par exemple solide-gaz, solide-liquide, liquide-gaz), on parle de
réaction hétérogène.
La température est le facteur ayant la plus grande influence sur la vitesse des réactions
chimiques. Dans un très grand nombre de cas la vitesse de la réaction augmente d'un facteur 2 à
3 lorsque la température augmente de 10 degrés. La dépendance de la vitesse de réaction en
fonction de la température a fait l'objet d'études expérimentales intensives à la fin du xixe siècle.
Plusieurs équations empiriques ont été proposées, dont les lois d'Arrhenius et d'Eyring-Polanyi.
Ces deux lois indiquent que la vitesse de réaction augmente en fonction de la température. La loi
d'Arrhenius, qui a été vérifiée pour un très grand nombre de réactions, est formulée ainsi :
où est appelé l'énergie d'activation (dans sa version décrite ici, la loi d'Arrhenius suppose que
l'énergie d'activation est indépendante de la température), la constante des gaz parfaits, la
température en kelvin, la constante de vitesse de la réaction et un facteur pré-exponentiel
dépendant de la réaction. La loi d'Arrhenius est compatible avec la théorie des collisions qui
permet de jeter un pont entre la représentation microscopique (à l'échelle des molécules) de la
réaction chimique et l'observation macroscopique de sa vitesse.
Toutes les réactions ne suivent pas les lois d'Arrhenius et d'Eyring. C'est en particulier le cas des
réactions explosives, des réactions catalysées par les enzymes ou ayant d'autres modes
d'activation que l'activation purement thermique (activation par rayonnement, par électrochimie
ou par micro-ondes).
On appelle loi de vitesse ou équation de vitesse la relation qui existe entre la vitesse et tous les
facteurs qui ont une influence sur celle-ci. Dans le cas général, la loi de vitesse ne peut pas être
déduite directement de l'équation chimique de la réaction. Elle doit être établie
expérimentalement à partir de séries d'expériences judicieusement conçues, en faisant varier les
différents facteurs.
Parmi ces facteurs, on distingue d'une part les facteurs physiques (et en particulier la
température) et, d'autre part, les quantités (ou les concentrations) des substances présentes
dans le milieu réactionnel (et en particulier les réactifs).
La loi de vitesse peut se mettre sous la forme d'un produit de deux fonctions :
Le premier facteur est le coefficient de vitesse (ou constante de vitesse) qui dépend
notamment de la température, le second est une fonction des quantités (ou des concentrations)
des substances présentes dans le milieu réactionnel.
Dans de nombreux cas, la fonction peut se mettre sous la forme d'un monôme :
On dit alors que la réaction admet un ordre et l'on appelle ordre de réaction la somme des
exposants : . L'exposant est l'ordre partiel de la réaction par rapport à l'espèce .
Les ordres partiels ne sont pas nécessairement égaux aux coefficients stœchiométriques, ils ne
sont même pas nécessairement entiers ni positifs, ce peut être des nombres fractionnaires et
même des nombres réels. Si la loi de vitesse ne peut pas se mettre sous la forme d'une loi de
puissance avec les concentrations comme facteurs, on dit que la réaction n'admet pas d'ordre.
C'est la situation classique en cinétique enzymatique.
Une réaction est dite élémentaire si les réactifs réagissent simultanément en un même point
pour donner directement les produits sans former d'espèces intermédiaires3. La vitesse de
réaction dépend donc de la probabilité de rencontre des réactifs donc de la fréquence des chocs.
Cette fréquence est proportionnelle à leur concentration. Par ailleurs, plus la température est
élevée, plus les rencontres sont probables (agitation thermique) et plus l'énergie cinétique des
réactifs au moment du choc est élevée ce qui permet de franchir la barrière d'activation, donc la
température a également un rôle important.
Pour une réaction élémentaire, son ordre est égal à sa molécularité (loi de van 't Hoff).
A+B→C
d'ordre global 2 (ordre partiel 1 par rapport à chaque réactif). Évidemment, il est également
possible de définir la vitesse sur les constituants B ou C. Ici k est le coefficient de vitesse
dépendant notamment de la température et éventuellement d'autres facteurs physiques.
Les réactions composées
Au cours d'une transformation chimique, plusieurs réactions élémentaires peuvent avoir lieu
simultanément ou successivement. On appelle réactions composées (ou complexes) des
ensembles d'étapes élémentaires, combinées par exemple selon un des trois schémas simples
suivants: série, opposé ou parallèle. Les mécanismes en chaîne font une classe plus compliqué4.
Réactions en série
Le ou les produit(s) d'une réaction peuvent eux-mêmes être les réactifs d'une autre réaction. Cela
constitue un système de réactions dites en série ou par stades ou en séquence ouverte. Les
réactions se produisent dans un ordre donné, toujours le même, des réactifs aux produits.
Pour une réaction possédant plusieurs étapes, la vitesse globale de formation du produit final est
déterminée par la vitesse de l'étape la plus lente, dite l'étape cinétiquement déterminante.
Réactions opposées
Certaines réactions peuvent se produire dans les deux sens. On les appelle des réactions
opposées. Dans ce cas, le système évolue vers un état d'équilibre dynamique.
On appelle réactions parallèles des systèmes de réactions distinctes qui ont les mêmes réactifs
mais des produits différents. Par exemple la nitration du phénol forme simultanément les trois
isomères ortho, para et méta du mono-nitrophénol5. La vitesse de transformation des réactifs
est alors la somme des vitesses de chacune des réactions.
Cependant il peut arriver (mais cela est assez rare pour une réaction complexe) qu'on retrouve une
loi de vitesse qui admette un ordre :
comme cela a été précisé plus haut les ordres partiels ne sont pas nécessairement égaux aux
coefficients stœchiométriques, ils ne sont même pas nécessairement entiers ni positifs.
Mécanismes en chaîne
Aussi appelé séquence fermée. Ici, un intermédiaire réactionnel (ou centre actif) est régénéré au
bout d'un certain nombre d'étapes qui se reproduisent de manière cyclique. Ainsi le centre actif
pourra faire réagir un grand nombre de réactifs. Le centre actif met en jeu des intermédiaires
réactionnels dont les concentrations stationnaires pourront être calculables par le principe de
Bodenstein.
Il arrive que la chaîne de réaction soit ramifiée (i.e. plusieurs centres actifs, comme dans les
oxydations) et cela entraîne souvent des réactions explosives dues aux multiplications des
centres réactifs et à l'énergie dégagée lors des terminaisons.
La longueur de chaîne est définie comme le nombre de cycles que peut effectuer en moyenne
un radical à partir de sa formation avant d'être détruit :
La loi de vitesse n'a pas la forme simple d'un monôme et alors on dit qu'elle n'admet pas d'ordre.
Elle possède plutôt une forme plus complexe avec un dénominateur à deux termes6 :
Cette loi s'explique par un mécanisme qui fait intervenir deux intermédiaires radicalaires H. et Br.
dans une réaction en chaîne. Voir Réaction chimique en chaîne#Exemple.
Bibliographie
Références
1. « cinétique (http://unf3s.cerimes.fr/media/paces/Grenoble_1112/vanhaverbeke_cecile/van
haverbeke_cecile_p01/vanhaverbeke_cecile_p01.pdf) [archive] »
2. Union internationale de chimie pure et appliquée. Quantities, Units and Symbols in Physical
Chemistry [« Green Book »], Oxford, Blackwell Science, 1993, 2e éd. (ISBN 0-632-03583-8, lire en
ligne (http://old.iupac.org/publications/books/gbook/green_book_2ed.pdf) [archive]), p. 55.
Traduction française: Manuel des symboles et de terminologie des grandeurs et des unités
physicochimiques. Société Chimique de France. Supplément à L'actualité chimique,
1982,No 9.
6. P. Atkins et J. de Paula, Chimie physique (3e éd. française, de Boeck 2008) p. 831.
Notes
1. Dans l'équation chimique, les coefficients stœchiométriques sont positifs, tandis que dans
la définition de l'avancement de réaction, on affecte le signe - aux coefficients des réactifs
qui disparaissent, et le signe + aux coefficients des produits qui se forment.
3. La pression partielle d'un constituant d'un mélange gazeux est égale à la pression, qui serait
celle de ce constituant s'il était seul à occuper tout le volume du système considéré. Elle
peut se calculer directement en utilisant l'équation état du gaz ou en multipliant la fraction
molaire par la pression totale.
Voir aussi
Articles connexes
Catalyseur
Cinétique électrochimique
Énergie cinétique
Énergie d'activation
Loi d'Arrhenius
Mécanisme réactionnel
Ordre de réaction
Liens externes
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