L'Emigration Toucouleur Du Fleuve Senegal A Dakar: Office de La Recherche Scientifioue Et Technioue Outre-Mer
L'Emigration Toucouleur Du Fleuve Senegal A Dakar: Office de La Recherche Scientifioue Et Technioue Outre-Mer
L'Emigration Toucouleur Du Fleuve Senegal A Dakar: Office de La Recherche Scientifioue Et Technioue Outre-Mer
LERICOLLAIS
M. VERNIÈRE
L'EMIGRATION TOUCOULEUR
DU FLEUVE SENEGAL A DAKAR
1974
par
André LERICOLLAIS
Marc VERNIERE
ORSTOM
Centre de DAKAR
1974
-1-
INTRODUCTION
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Il Habitat permanent
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1.2 Les besoins nouveaux et l'émi&ration à l'échelle du village
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Ce sont des hommes jeunes célibétaires qui ont les premiers tenté
l'aventure. Ce n'est qu'après plusieurs séjours en ville et des retours au vil-
lage qu'ils sont parvenus à se fixer; la sécurité, c'est-à-dire la découverte
d'un emploi stable et d'un logement, n'intervient qu'à un age souvent avancé.
La fixation des premiers émigrés a contribué à réduire les difficultés
pour les suiva~ts; ainsi pour les émigrants les plus jeunes - nés depuis 1940 -
la fixation intervient plus vite; ils quittent le village le plus souvent avant
l'age de 20 ans et ila sout établis en ville avant d'avoir 30 ans.
Les femmes n'émigrent que pour rejoindre leur mari~ leur départ est
lié à la réussite des hommes. Les premières émigrées ne partaient que plusieurs
années après leur mariage avec un ou plusieurs enfants nés au village, mais
depuis une quinzaine d'années la venue des femmes en ville tend à co!ncider
avec le mariage: presque toujours l'année du mariage ou l'anné suivante.
-9-
C'est en mai 1939 que Djibi Pam se rend à Dakar pour la première
fois; il a 21 ans. Son père, qui est chef du village, l'a autorisé à partir
pour gagner de l'argent.
Djibi Paro quitte Guia après la récoltetrincipalc. celle du sorgho
de décrue. Il se joint aux bergers chargés d'acheminer du bétail du village
destiné à la vente, jusqu'au Cap-Vert. Ils partent en pleine saison sèche,
avec leurs sacs de couscous sec additionné de sel , parcourent les bordures
de la vallée jusqu'au lac de Guiers, puis se dirigent à traVQT8 le Cayor
vers Mbaké, qui est l'un des gros marchés du bétail. Ils continuent ensuite
d'acheminer le troupeau pour le compte du courtier, jusqu'à Thiaroye, tout
près de Dakar.
Au terme de ces longues semaines de marche, Djibi Pam perçoit une
rétribution et se rend à Dal<ar chez Harnatel Diak, son oncle maternel; un ancien
combattant originaire de Guia qui s'est établi à la rue 10 de la Médina à
son retour de France.
Le vieux l'emploie, ainsi que deux autres jeunes du village, comme
marchand ambulant ( Il bana-bana"). Ils parcourent les rues avec un présentoir
garni de parfums et de produits divers, l'épaule chargée d'étoffes. Chaque
soir ilspartagent leur recette avec le vieux qui les nourrit et les loge.
Djibi, bon vendeur, ne ~epartira qu'en novembre; avec son magot,
trois compagnons, une petite provision de pain et de sucre et la crainte de
se faire détrousser dans les villages où ils passent la nuit.
A l'arrivée, il remet son argent au chef de la maison qui achète
des v~tements pour tous. Les premières journées se passent en visites; on met
les habits neufs, on se rassemble pour prendre le thé. Puis après la f~te,
Deux ans après, en 1941 Djibi Paro retourne à Dakar pour un séjour
identique.
C'est en 1944 gu' il retourne ensuite, mais cette fois il ne rentre
\pas en novembre. Il continue de travailler pour son oncle dont il s'affranch!t
Ipeu à peu de la tutelle; dès 1945, avec six compagnons du village, il loue une
\chambre; puis il en louera une pour lui seul, en 1950, dans le quartier de
1 imzatt.
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-11-
En 1960, il obtient un emploi à la mairie de Dakar, au service
du nettoiement.
En 1966, il achète une parcelle dans le quartier de Nimzatt et y
construft une baraque.
Depuis sa fbtation à Dakar, i l retourne passer régulièrement quel-
ques semaines à Guia. Il envoie de l'argent - 1500 à 2000 F. CFA par an; il
acquiert m~e du bétail - des moutons et des chèvres - qui est gardé au
village.
Djibi Pam va constituer sa propre famille. Dès 1952 son père entre--
prend des démarches dans le village et rassemble la dot. C'est en 1957,
que Djibi Pam épouse Mariam Pam, une fille de Guia, conformément à la tradition.
Il lui envoie régulièrement de l'argent chez ses parents où elle continue
à vivre. En 1959 nait le premier enfant. C'est finalement en 1960 que Marimm
et l'enfant viennent vivre à Nirnzatt.
Djibi Paro devenu tout à fait dakarois envoie tous les ans sa famille
qui s'est agrandie - deux garçons et trois filles - passer qua1ques semaines
à Guia au début de l'hivernage, saison préférée des Toucouleur. Les enfants
profitent des laitages revenus après les pluies.
D.T. L'oiseleur.
C'est à l'âge de 42 ans que Tierno p.W. effectue son premier voyage
à Dakar.
·12·
Précédé d'une réputation d'homme religieux, il exercera pendant
8 mois les fonctions de marabout chez un douanier qui l'héberge.
De retour au village, il ne restera que 4 mois: il devra repartir
à Dakar appelé par ses fidèles et ses clients.
Imam de la mosquée des douaniers, il est logé par eux et reçoit
une attribution de 8.000 F. par mois.
Il séjourne à nouveau au village pour se marier; son épouse le
rejoint à Dakar . en 1960.
T.P.: te millionnaire.
D.F.D. Le Chauffeur'.
S.D vient à Dakar en 1951 à l'~ge de 21 ans. Son oncle lui obtient
un emploi aux Travaux Publics avec un salaire de 6.000 F. par mois; en 1954, il
devient chef d'équipe (12.000 F. par mois). En 1958, il revient au village,
fonde une boutique sur le marché. de Podor et devient "responsable politique"
de Guia. En 1961, il confie la boutique à son frère, pour faire campagne poli-
tique avec le député A.Kane dans le département de Podor. Il repart à Dakar, la
m~e année prendre un emploi de planton à l'Assemblée Nationale.
11 suit les cours du soir, obtient son certificat d'Etudes Primaires
en 1969 et devient ronéotypiste de l'Assemblée Nationale (27.000 F. de salaire
mensuel).
-14-
Il habite sa maison à Dieupeu1 puis, en 1971, achète un terrain à
Thiaroye pour construire une 2 ème maison. En 1972, il achète un autre terrain à
Grand-Yoff; il y fait b~tir une maison qu'il habite tandis qu'il loue celle
de Dieupeu1. A la fin de 1972, il vend la maison de Thiaroye pour racheter une
maison des SICAP louée à un européen.
LEGENDE
- (1) - Pour l'analyse détaillée de ces migrations, voir M.VERNIERE : "Campagne, ville
bidonville, banlieue: les migrations intra-urbaines vers PIKINE". In. ORSTOM.
Cahiers Sciences Humaines 1974.
-17-
Dans ce double contexte, quelle est la place des Toucouleur de
DAKAR, presque tous ~igrants d'origine rurale, donc particulièrement représen-
tés au sein de l'échantillon que nous avons étudié?
Leur originalité repose sur deux éléments
-Bien plus que les représentants d'autres ethnies sénégalaises, les
Toucouleur se regroupent entre eux. A.B.DIOP signalait ainsi de très fortes
concentrations de Toucouleur, vers 1960, dans les bidonvilles centraux de
DAKAR (BAYE LAYE, BAYE GAINDE, M'BOO, WAHINANE).
-Dans une période très récente (à partir de 1967), et, en partie'
du fait des déguerpissements des bidonvilles Toucouleur du Centre Ville, en
partie du fait de liens privilégiés (parenté "à plaisanterie l l )_ entre les Lebou
autochtones et les Toucouleur, les gens du Fleuve se trouvent occuper, actuel-
lement, une position très forte à la périphérie de DAKAR et non plus dans DAKAR.
Quelques chiffres témoignent de l'importance de ce phénomène Isui-
vant l'enqu~te de l'O.M.S. de 1969, DAKAR compte actuellement moins de 15%
de Toucouleur, alors que d'après les ro~roes sources complétées par nos enqu~tesJ
(1) Près de 4, en moyenne, pour l'ensemble des chefs de m~nage de notre échantillon.
-19-
res à Dakar-Centre), il faut noter que PIKINE EXTENSION a très rapidement fa!t
son plein d'habitants. L'autorité des chefs de quartiers, l'efficacité de
l'entr'aide collective ont permis, en z8ne Toucouleur, une n.)rmalisation assez
rapide des conditions de vie, malgré les traumatismes engendrés par la bruta-
lité des déguerpissements.
Ainsi peut-on dire que, du fait d'une politique urbaine volontaire,
DAKAR s'est en grande partie "vidé" de Sa population Toucouleur, et qu'à la
périphérie les gens du Fleuve occupent une situation de force.
(1) Soit. en moyenne, la m~e proportion que parmi les autres chefs de ménage de PIKINE:
face au problème de l'emploi, les Toucouleur n'ont pas d'attitude spécifique et
profitent, ni mieux ni plus mal, que les autres immigrants des sources d'activités
-modernes" de la capitale. Les revenus monétaires des ménages Toucouleur (20-300 F.
CFA/Ménage/mois) se situent également, d'après notre enqu~te, exactement dans la norme
pikinoise, tout cormne les "signes extérieurs de richesse 'l dont disposent les chefs de
ménage (62% d'entre eux possèdent une montre, 73% un "transistor".).
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PL Plateau
GD GZ'&Z1d Dakar
IR Biaonvilles
VL Villages tabou
FR F:Il:8nce
PK! Pikine Ancien
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