Problèmes: L'ouest
Problèmes: L'ouest
Problèmes: L'ouest
SAVONNET
I - LA NOTION DE SECHERESSE
Dans la zone sahélo-soudanienne, qu! connaît une saison de
pluie estivale régulière, mais qui diminue en quantité et en
durée au fur et à mesure que l’on s’éloigne en latitude, la séche-
resse est-elle seulement un déficit global de la pluviométrie
annuelle par rapport à une moyenne calculée sur un certain
nombre d’années d’observations ? La séchkresse se manifeste
avant tout par le fait que la végétation, cultivée ou spontanée,
n’a pu arriver normalement à maturité. Or un total annuel de
précipitations déficitaires ne suffit souvent pas à expliquer de
mauvaises récoltes ou l’absence de pâturages. Il faut alors faire
intervenir la notion de a pluies utiles I), c’est-à-dire la part de
pluies qui a eu un effet sur le développement de la végétation.
En zone soudanienne, les pluies précoces, trop espacées obligent
souvent les paysans à procéder à plusieurs semis successifs. Pour
la végétation sahélienne, il en est de même, la végétation démar-
re et arrive mal à maturité. Si lea pluies arrivent trop tard,
après une longue interruption, elles ne jouent que peu de rôle
dans le développement végétal
Les a pluies utiles B peuvent être définies comme les premiè-
(5) J. GaIlais, << Le delta intérieur du Niger I), in Mémoire. IFAN no 79,
Dakar, t. 1, cit. p. 220.
(6) R. Capot-Rey, Le Sahara frunpzis, Paris, PUF, 1953, cit. p. 100.
(7) H.. Hubert, cc Le desséchement progressif en Afrique Occidentale s,
in Bulletin $Etudes Historiques et Scientifiques d’A.O.E., 1920, p. 401-467.
(8) R. Capot-Rey, Le Sahara français, op. cit.
116 PdSENCE AFRICAINE
Moyenne
normale 64.5 1.58.7 238.3 385.2
sur (20 ans) (50 ans) (10 ans) (33 ans)
Si l’on cherche à tracer au Niger les isohv6tes pour les années
1969-1970-1971, on s’aperçoit que, comme en Mauritanie pour les
années 19411-194,2. elles se situent trhs au sud de celles qui, pour
un même total, font référence à la movenne des observations
connues. L’isohyète 100 mm, gui dans l’Air passe entre Iférouane
et Agadez, est renortée polir les trois dernières années au sud
d’Aeadez. soit à 150 km. Celle de 350 mm qui constitue la limite
nord de l’agriculture pluviale et qui se situe pour l’ensemble
des observations sur #le 15” parallèle, est renortée au sud de
Tahoua, et même de Filingué, soit à une centaine de kilomètres.
En conséquence, la zone de nomadisme pastoral est amputée
de sa f r a y e septentrionale et la zone d’agriculture pluviale
recule également vers le sud : c’est dire que le Niger utile est
provisoirement privé d’une vaste zone indispensable à son éleva-
ge et que son domaine agricole est également réduit. En somme,
la partie méridionale du pays doit s’efforcer de nourrir les habi-
tants qui vivent au nord, soit que ces derniers aient amorcé
un exode vers le sud, soit qu’il faille prévoir de réserver une
partie des récoltes pour les régions pastorales sinistrées.
L’alternance de cycle humide et de cycle sec qui périodi-
quement perturbe la vie des pasteurs et des paysans vivant
LES PROBLBMES DE LA SlkHERESSB.. . 119
J
e -
Figure l
Les types de temps en janvìer A et en juillet. B
Figure 2
Naissance des lignes de grains SUY le Front intertropical
LES PROBL&MES DE LA Sl%XJXJXSE... 123
Figure 3
Les 4 types de temps en Afrtqtle de Z'ouest pendatit I'tiivemage
(juillet-ao&)
124 PIUhBNCB AFRICAINß
le. Dans son avancée rapide, la masse d’air sec emprisonne bru-
talment des masses d’air humide qui s’élèvent rapidement vers
les couches supérieures froides ; au cours de cette ascension, des
frottements se produisent entre les deux masses d’air, ils déclea-
chent alors des phénomènes orageux qui ont pour effet d’accen-
tuer encore la dépression atmosphérique amorcée précédem-
ment. Rapidement, vem 16 ou 17 heures, il se crée le long du
F.I.T., sur plusieurs dizaines de km (voire plusieurs centaines de
km), une sorte de couloir dépressionnaire dans lequel s’mgouffre
l’air chaud et humide qui, dans les hautes altitudes (2 O00 à
3 O00 m) se transforme en un brouillard dense : les cumulus, aux
formes arrondies caractéristiques. Les phénomènes orageux qui se
développent le long du F.I.T. entraînent parfois des chutes de
pluies et même de grêIe ; mais bien souvent ces précipitations fu-
gaces n’atteipmt pas le sol, elles sont évaporées au cours de leur
chute (zone B, fig. 2).
Les cumulus ainsi formés le long du front, en s’élevant dans
la masse d’air froid et sec, sont placés dans la dépendance des
courants anticycloniques qui les poussent vers le S.-W. Au cours
de leur trajet, ils se refroidissent progressivement et donnent à
quelque 150 ou 200 km à l’arrière du front des pluies abon-
dantes et régulières dans la zone C, de largeur très variable
(entre 200 et 500 km).
Au-delà de la zone C, bien arrosée, les nuages s’étant vidés *
en cours de route, les précipitations se raréfient et disparaissent.
Les quelques particules d’eau restante atteignent les couches
de la haute atmosphère (8 000 à 10 000 m) et se transforment en
paillettes de glace très allongées qui voilent le ciel : les cirrus.
L’examen du mécanisme climatique intertropical (19) fait
pour étiter que les chefs les plus prestigieux et les plus riches
n’accaparént à leur profit l’usage des forages aux dépens des
pauvres ou des étrangers.
Que faire pour qu’une telle situation ne se renouvelle pas ?
La seule réponse rationnelle serait de limiter l’accroissement
des troupeaux, de gérer la zone pastorale comme un ranch, en
réservant des pâturages pour la saison sèche de soudure, en
créant des réserves de pâture. Mais les éleveurs sont-ils prêts
à accepter une telle politique de contrainte et d’atteinte à leur
liberté de mouvements ? Les Etats africains ont-ils les moyens
pratiques d’appliquer une telle politique : délimiter chaque
année les zones de parcours, assurer les activités d’une (( police r
des pâturages D ?
Le nomadisme pastoral, souvent considéré comme un mode
de vie anachronique, est en fait la réponse des éleveurs pour
l’exploitation d’une zone marginale où la végétation est iné-
galement répartie : c’est une exploitation rationnelle lorsqu’el-
le se base sur un équilibre entre les troupeaux et le couvert
végétal : il se règle de lui-même et se corrige en fonction des
années sèches et des années humides. Lorsque de nouvelles
techniques permettent une multiplication des animaux, sans
pour autant leur assurer des ressources nouvelles, le déséqui-
libre devient permanent, masqué, en période humide, dramati-
quement visible en période de sécheresse.
Le problème est donc de contrôler le développement des
troupeaux, ce qui va toujours à contre-courant de la stratégie
des éleveurs qui consiste à accroître au maximum le nombre de
leurs animaux. On en revient en définitive à un problème de
surpopulation dans une zone qui ne peut porter qu’une charge
limitée de troupeaux et, partant, de groupes humains qui en
vivent. Dans le contexte gctuel, on ne voit guère de solution-
miracle : la sécheresse provoque le recul provisoire de la végé-
tation, mais elle crée une dégradation beaucoup plus grave du
couvert végétal, lorsqu’elle s’accompagne d’un surpâturage per-
manent qui modifie les espèces végétales et crée souvent des
zones dénudées, où les effets du ruissellement en nappe et de
l’érosion éolienne se combinent (23).
23) G. Boudet, 1972, op. cit.
kous .pensons tout specialement à l’Office du Niger, créé pour assurer
les besoms de l’industrie française en coton, transformé dès avant la
guerre en une exploitation rizicole non rentable, B la C.G.O.T., au péri-
mètre expérimental de Kaffrine, au Sénégal, voués tous deux B Ja culture
arachidière, .aux aménagements récents de Richard-Toll, destinés à la
...
culture du riz, très coûteux et peu productifs
Econoniiquement parlant, le cultivateur avait intérêt, dans les zones
les plus favorables, à cultiv.er en arachide toutes se: teqes et à acheter
ses produits de consommation; à l’issue de l’opération, i1 lui restait un
* petit bénéfice.
LES PROBLhMES DE LA SIkHERESSE ... 133
0 -
(24) En revenant dans son pays d’origine, l’agent encadreur, miéux que
quiconque, sera à même de découvrir des solutions susceptibles d’em-
porter l’adhésion du cultivateur pour améliorer ses cultures.
i(25) En Haute-Volta, le salaire d‘un moniteur de l’agriculture insta116
dans un village était, en 1972, de l’ordre de 100 F/mois. $
E. BERNUS et G. SAVONNET
0.R:S.T.O.N.
Paris
NOUVELLE SERIE BILINGUE N3 88 - 4" TRIMESTRE 1973
PRÉSENCE AFRICAINE
TIRE A PART