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REVUEn1 RAMREs 2018

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CONSEIL AFRICAIN ET MALGACHE POUR

L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
CONFERENCE DES RECTEURS DES UNIVERSITES D’AFRIQUE
FRANCOPHONE ET DE L’OCEAN INDIEN (CRUFAOCI)

REVUE RAMREs
Série Économie-Gestion
Spécial 2ème JEACC
ème
Editorial 2 JEACC
L’approche par composants du Syscohada 2017 : une étude exploratoire en Côte
d’Ivoire KOUAMÉ Yann David & OUATTARA Abdoulaye
Les motivations de la pratique de la compatibilité d’intention : le cas de la Côte
d’Ivoire VANGAH Yanne-Cédric Armel
La pertinence de l’information comptable en contexte OHADA : Etude exploratoire
du cas ivoirien ATSAIN Annick Alberte Félicie
La pertinence de l’information comptable pour la prise de décision au sein des
entreprises de petite taille KOUMAGNANOU Komivi
Les déterminants de la communication sociétale des entres de l’espace OHADA :
une étude en contexte camerounais DONGMO ROMÉO MARTIAL
L’indépendance du commissaire aux comptes preçue par lui-même. Analyse des
facteurs déterminants au Burkina Faso BAIDARI BOUBACAR, BATIONO ROBERT &
SOMDA LOUIS
Le rôle et l’importance du contrôle de gestion dans un établissement public :cas
d’une Université togolaie
BIGOU-LARE NADEDJO ET KOUNETSRON YAO MESSAH
Gestion des impayés dans les systèmes financiers décentralisés au Togo TANKPE
TANKO AWOKI

N° Spécial 1ère Journée d’Étude Africaine


Autres articles
Évaluation du personnel et implication organisationnelle des salariés dans les
petitesen Comptabilité
et moyennes et Contrôle
entreprises HAMADOU Boukar (JEACC)
Influence de la publication des notes financières sur le cours et les échanges
d’actions sur un marché financier en développement : Cas de la BRVM OUATTARA
Aboudou & HADAMA Constantin

REVUE RAMREs – N°1 Série Économie et Gestion – Année 2018 – ISSN


PRÉSENTATION DE LA SÉRIE ECONOMIE-GESTION
La Série Economie-Gestion de la Revue Africaine et Malgache de
Recherche Scientifique (RAMREs) est une revue en ligne qui fonctionne
grâce au soutien de la CRUFAOCI ainsi qu’à l’appui bénévole des
enseignants-chercheurs et chercheurs de l’espace CAMES et d’autres
espaces scientifiques, membres des comités scientifique et de rédaction. Elle
est née de la décision de l’Assemblée Générale de la CRUFAOCI tenue à
Thiès (Sénégal) du 20 au 21 avril 2017 de transférer la Revue CAMES à la
CRUFAOCI. Ce transfert a également entrainé un changement de
dénomination de la Revue qui désormais s’appelle « Revue Africaine et
Malgache de Recherche Scientifique » (RAMREs). Elle bénéficie ainsi du
soutien de l’ensemble des Institutions d’Enseignement Supérieur et de
Recherche de l’espace de la CRUFAOCI par l’encouragement qu’elles font
auprès de leurs enseignants-chercheurs et chercheurs des domaines de
l’économie et de la gestion, à y publier leurs travaux de recherches, dans un
contexte où la recherche africaine dans ces domaines cherche à accroître sa
visibilité. L’hébergement de son site est assuré par le CAMES.
Directeur de publication
Président de la CRUFAOCI
C/O Secrétaire Général du CAMES,
01 BP 134 Ouagadougou 01 – Burkina Faso
Tél (226) 50 36 81 41 ; Fax : (226) 50 36 85 73

Rédacteur en chef
Hervé NDOUME ESSINGONE
Institut National des Sciences de Gestion/
Université Omar Bongo
Libreville, Gabon
Email : ndoume.herve@yahoo.fr
Tél : (241) 06 24 46 78

Assistant de rédaction
Samba DEME
Université Gaston Berger
Saint Louis, Sénégal
Email : samba.deme@ugb.edu.sn

Mise en page (PAO)


Brigitte MEUYO
Comité scientifique
1- Sciences de gestion
MBENGUE Ababacar (France) ; AKANNI Alain (Sénégal) ;
BAIDARI Boubacar (Niger) ; BAYALA Balibié Serge Auguste
(Burkina Faso) ; TSAPI Victor (Cameroun) ; BIGOU-LARÉ Nadédjo
(Togo) ; BIWOLE FOUDA Jean (Cameroun) ; DANKOCO Ibrahima
(Sénégal) ; DIOP SALL Fatou (Sénégal) ; FEUDJO Jules Roger
(Cameroun) ; GANDAHO Roger (Côte d’Ivoire) ; GLIDJA Judith
(Bénin) ; GUEYE Birahim (Sénégal) ; HOUNKOU Emmanuel
(Bénin) ; KONO ABE Jean-Max (Cameroun) ; LENGA Serge Didier
(Congo) ; MAMBOUNDOU Jean-Paul (Gabon) ; NDOUME
ESSINGONE Hervé (Gabon) ; NGANTCHOU Alexis (Cameroun) ;
NKAKLEU Raphaël (Cameroun) ; SANE Seydou (Sénégal) ;
SOGBOSSI Bertrand (Bénin) ; TIDJANI Bassirou (Sénégal) ;
TIOUMAGNENG Tafam André (Cameroun) ; Henri WAMBA
(Cameroun) ; WADE Mohamed El Bachir (Sénégal) ; CASTA Jean
François (France) ; NGOBO Paul Valentin (France) ; SEDZRO
Komlan (Canada) ; Jean Michel PLANE (France) ; HIRIGOYEN
Gérard (France) ; DEFELIX Christian (France) ; SAIDANE Dhafer
(France) ; TSAPI Victor (Cameroun) ; Ouattara ABDOULAYE (Côte
d’Ivoire) ; Augustin ANASSE (Cote d’Ivoire), Konan Anderson Sény
Kan ( France) ; Henri KOULAYOM (Centrafrique) ; François
Meyssonnier (France) ; Eric PAGET BLANC ( France) ; Boniface
BAMPOKY (Sénégal)..

2- Sciences économiques
Ahmadou Aly MBAYE (Sénégal) ; Roger Nanfosso TSAFACK
(Cameroun) ; Eugène KOUASSI (Côte d’Ivoire) ; Jean Sylvain NDO
NDONG (Gabon) ; Désiré AVOM (Cameroun) ; Jean Jacques Tony
EKOMIE (Gabon) ; Adama DIAW (Sénégal) ; Georges KOBOU
(Cameroun) ; ZAHONOGO Pam (Burkina Faso) ; Secka Pierre Roche
(Cote d’Ivoire) ; Ruffin Willy Manstié (Congo), Hervé DIATA
(Université Marien Ngouabi) ; Damien Ega AGBODJI (Togo), Koffi-
Tessio M. EGNONTO (Togo), Kako NABUKPO (Togo) ;
Abderahmane SANOGO (Mali) ; Taladidia THIOMBIANO ( Burkina
Faso) ; Idrissa OUEDRAOGO (Burkina Faso) ; Malam NAFIOU
(Niger) ; Gervasio SEMEDO (France) ; Boniface MBIH (France) ;
Patrick PLANE (France) ; Felix ZOGNING (Canada) ; Stephen
GOLUB (USA) ; Dominique HAUGHTON (USA) ; Jonathan
HAUGHTON (USA) ; Charlemagne IGUE (Bénin) ; Alexandre
ASSEMIEN (Cote d’Ivoire) ; Mama OUATTARA (Cote d’Ivoire) ;
Mathias Marie Adrien NDINGA (Congo) ; Albert ONDO OSSA
(Gabon) ; Fulbert Gero AMOUSSOUGA (Bénin) ; Esso LOESSE
(Côte d’Ivoire), Yaya KEHO (Côte d’Ivoire) ; Wautabouna
OUATTARA (Côte d’Ivoire) ; Ary Tanimoune NASSER (Canada),
Alastaire ALINSANTO (Bénin) ; Joseph François Cabral ( Sénégal).

Comité de Rédaction
BIGOU-LARÉ Nadédjo (Togo) ; Birahim GUEYE (Sénégal) ;
Hervé NDOUME ESSINGONE (Gabon) ; Augustin ANASSE (Cote
d’Ivoire), Jean Jacques Tony EKOMIE (Gabon) ; Aly MBAYE
(Sénégal) ; Adama DIAW (Sénégal), Désiré AVOM (Cameroun).

Notes aux auteurs


La « Série Economie-Gestion » de la Revue RAMREs accepte
toutes les contributions ayant trait aux Sciences de Gestion
(management, stratégie, marketing, finance, comptabilité, gestion des
ressources humaines, production, entrepreneuriat…) et aux sciences
économiques (Politique économique, Economie et Finance
internationale, Macroéconomie, Microéconomie, Économétrie,
économie de développement, banque, micro-finance, assurance…).
Les propositions d’articles, en français ou en anglais, doivent
respecter les normes ci-après.
Les articles proposés ne doivent pas avoir fait l’objet d’une
publication antérieure dans une revue, dans un ouvrage collectif ou
ailleurs. Ils ne doivent pas non plus être simultanément soumis en vue
d’une contribution dans une autre publication.
Les articles sont rédigés en caractère Times new roman 12,
interligne simple. Ils ne doivent pas dépasser chacun 60 000
caractères (espaces compris) ou 30 pages de format lettre
(références comprises − tableaux, figures et annexes non compris)
saisis à double interligne, format lettre É.-U. (215,9 × 279,4 mm).
La première page doit comporter les indications suivantes ; (1) le
titre en français ou en anglais ; (2) le(s) nom(s), prénom(s) suivis de la
qualité, de l’adresse et de l’institution de rattachement (université ou
école) du (des) auteur(s) ; (3) les résumés en français et en anglais de
100 mots au maximum, suivis respectivement de trois à cinq mots
clés.
Les pages, tableaux, figures et graphiques seront numérotés. Les
tableaux, figures sont numérotés dans leur ordre d’apparition (Tableau
1…, Figure 1…). Leur origine (source, date de publication) doit être
mentionnée par une note située en dessous du tableau ou de la figure.
La hiérarchie d’intertitre sera constituée selon le système « à étage »
(1., 1.1., 1.1.1.) avec au plus trois niveaux. Les renvois
bibliographiques dans le corps du texte ne doivent pas faire ressortir
les abréviations des prénoms des auteurs, ceux-ci ne seront visibles
qu’à la bibliographie en fin d’article.
Les Titres et sous-titres : Ils doivent être courts et ne pas faire
l’objet d’une numérotation (I, II A, B, etc.).
Les références
Dans le texte : Auteur, date (Dupont, 1987) ou (Dupont, 1987;
Smith, 1990; Faucher, 1988) ou (Dupont, 1987, p. 10-13; Smith, 1990,
chap. 2).
Sous forme de notes : Elles sont numérotées et présentées en bas de
page. Ici aussi, on ne mentionnera que le nom, la date et, le cas échéant,
les pages appropriées.
Les références seront listées en fin d'article, sur une page séparée
intitulée « Références », selon le standard suivant :
1- Pour un article: Edwards, J. R. et M. E. Parry (1993), “On the Use
of Polynomial Regression Equations as an Alternative to
Difference Scores in Organizational Research”, Academy of
Management Journal, 36 : 6, 1577-1613.
2- Pour un chapitre dans un ouvrage : Masterman, M. (1970), The
Nature of a Paradigm, in I. Lakatos & A. Musgrave (dir.) Criticism
and the Growth of Knowledge, Cambridge: Cambridge University
Press, 59-89.
3- Pour un livre : March, J. G. et H. A. Simon (1958), Organizations,
New York : Wiley.
Les citations
Si elles dépassent cinq lignes dactylographiées, elles font l’objet
d’un paragraphe en retrait de cinq espaces et non guillemeté
Les articles doivent être envoyés à l’adresse suivante :
eco.gestion@lecames.org

NB : Les auteurs doivent payer 25 000 fcfa lors de la soumission de


leur article d’une part et, procéder au règlement des frais
d’insertion de 75 000 fcfa à l’acceptation d’autre part, le tout par
transfert rapide auprès de l’agence comptable du CAMES.
ÉDITORIAL 2ÈME JEACC

Ce premier numéro de la Revue Africaine et Malgache de


Recherche Scientifique (RAMReS), série sciences économiques et de
gestion, est consacré aux meilleures communications présentées lors
de la deuxième Journée d’Etudes Africaine de la Comptabilité et du
Contrôle (2ème JEACC) qui s’est tenue à Dakar en décembre 2017, à
l’initiative du professeur Boniface Bampoky de l’Ecole Supérieure
Polytechnique (ESP) de l’Université Cheick Anta Diop (UCAD),
d’une part, ainsi qu’à deux contributions externes à ces journées
d’autre part. S’agissant des 2èmes JEACC, huit articles ont été
sélectionnés.
*
Les deux premiers portent sur des sujets comptables originaux et
actuels.
Ainsi dans le premier, intitulé « La préparation à la mise en
œuvre par composants du Syscohada dans deux entreprises de Côte
d’Ivoire », Yann Kouamé (Doctorant à l’Université FHB d’Abidjan)
et Abdoulaye Ouattara (Professeur de l’Université FHB d’Abidjan)
nous font part du comportement des producteurs de comptes suite à
l’application du Syscohada révisé. Les résultats de l’étude nous
éclairent sur la connaissance et la compréhension de la nouvelle
mesure, ainsi que sur son application.
Dans le deuxième Yann Vangah (Doctorant à l’Université FHB
d’Abidjan) a pour objectif de nous révéler « Les motivations des
pratiques de la comptabilité d’intention en Côte d’Ivoire ». Les
interviews réalisés auprès de six catégories de professionnels choisis
de manière pertinente nous indiquent les raisons diverses évoquées,
selon les types de contexte.
*
Les deux articles suivants portent sur l’information comptable,
plus précisément sur sa pertinence.
Le premier, d’Annick Atsain (Doctorante à l’Université FHB
d’Abidjan), « La pertinence des chiffres comptables en contexte
Ohada : étude empirique du cas ivoirien », étudie l’utilité de
l’information comptable pour la prise de décisions des partenaires
financiers de l’entreprise. Les entretiens effectués auprès d’analystes
financiers ont permis de recueillir des conclusions intéressantes sur la
pertinence de l’information comptable publiée par les entreprises.
Komivi Koumagnanou (Enseignant-chercheur à l’Université de
Lomé), comme l’indique l’intitulé de son article, « La pertinence de
l’information comptable pour la prise de décision au sein des
entreprises de petite taille », s’est intéressé aux petites entreprises. Les
études effectuées, de nature qualitative et quantitative, sur un
échantillon de plus de cinquante entreprises, ont permis de recueillir
des données intéressantes à la fois sur les types de documents élaborés
et sur l’usage qui est fait de l’information produite.
*
Martial Dongmo (ATER à l’Université de Douala) et Louis
Ndjetcheu (Professeur de l’Université de Douala), poursuivent la
réflexion sur le système d’information comptable et financier. Leur
article « Les déterminants de la communication sociétale des
entreprises de l’espace Ohada : une étude en contexte camerounais »
vise à déceler les motivations de certaines entreprises. Une étude
empirique effectuée auprès de soixante entreprises leur a permis de
mettre en lumière les facteurs explicatifs de la mise en œuvre d’une
publication d’informations sociétales en contexte Ohada.
*
Si les travaux relatifs à la qualité de l’audit, notamment à
l’indépendance de l’auditeur, sont assez nombreux, mais ceux se
situant dans un pays de l’Ohada sont très rares, si ce n’est inexistants,
d’où l’intérêt de l’article : « L’indépendance perçue du commissaire
aux comptes : une analyse des facteurs détyerminants au Burkina-
Faso ». Les trois auteurs, Boubacar Baidari (Professeur à l’Université
de Niamey), Robert Bationo (Enseignant-chercheur à l’Université
Ouaga I) et Louis Somda (Etudiant à l’Université Ouaga I), reprenant
les facteurs influençant l’indépendance du commissaire aux comptes
(CAC) dans d’autres contextes, ont pu, grâce à une enquête auprès de
professionnels burkinabé, mettre en évidence les facteurs ayant une
influence positive sur l’indépendance du CAC, ainsi que ceux ayant
une influence négative.
*
Les deux articles suivants ont la particularité d’être des études
relatives à une organisation précise.
Nadédjo Bigou-Laré (Professeur à l’Université de Lomé) et de
Yao Messah Kounetsron (Professeur à l’Université de Lomé) dans
leur article « Le rôle et l’importance du contrôle de gestion dans un
établissement public : cas d’une université togolaise », montrent la
difficulté de mettre en place un système de contrôle de gestion
pertinent et efficace dans une organisation publique. Cependant, dans
le cas étudié, ils constatent la mise en place progressive d’outils de
contrôle de gestion.
L’article de Tanko Tankpé (Enseignant-Chercheur à l’Université
de Kara) : « Gestion des impayés et pérennité financière dans les SFD
au Togo » porte sur une organisation particulière (Système Financier
Décentralisé) et un domaine précis mais important, celui des impayés
dont dépend la pérennité de l’organisation. Grâce aux données
recueillies l’étude est riche d’enseignements.
*
Conformément à sa vocation, la revue RAMReS Gestion
souhaite apporter par ce numéro sa contribution au développement de
la recherche en comptabilité et contrôle et à la diffusion des meilleurs
travaux de recherche du continent auprès de tous les enseignants-
chercheurs, étudiants et professionnels.
Bonne lecture à tous !
Geneviève Causse
Professeur émérite de l’Université Paris-Est et de L’ESCP Europe
Présidente du Comité scientifique de la 2ème JEACC (Dakar, 2017)
Table des matières
PRÉSENTATION DE LA SÉRIE ECONOMIE-GESTION ................................................ 1
ÉDITORIAL 2ÈME JEACC .............................................................................................. 5
L’APPROCHE PAR COMPOSANTS DU SYSCOHADA 2017 : UNE ÉTUDE
EXPLORATOIRE EN CÔTE D’IVOIRE ....................................................................... 15
1. Introduction .................................................................................. 15
2. L’APC du Syscohada 2017 et les modalités de première
application ................................................................................... 17
L’APC : un emprunt aux IFRS ............................................. 17
Les modalités de passage à la nouvelle règle ....................... 19
3. La méthodologie de recherche : une démarche qualitative .......... 21
Échantillonnage et collecte de données ....................................... 21
Analyse des données ................................................................... 22
4. Les résultats de la recherche ........................................................ 23
La mise en œuvre de l’APC ........................................................ 23
La prise en compte de la contrainte d’équilibre avantage-coût ... 26
5. Conclusion ................................................................................... 28
Bibliographie .................................................................................... 30
LES MOTIVATIONS DE LA PRATIQUE DE LA COMPTABILITÉ D’INTENTION : LE CAS
DE LA CÔTE D’IVOIRE ............................................................................................. 33
1. Introduction .................................................................................. 33
2. Le concept de comptabilité d’intention : en quête d’une définition
..................................................................................................... 35
2.1. La comptabilité d’intention ou comptabilité créative :
quelques définitions ............................................................. 36
2.2.Les aspects fondamentaux de la comptabilité d’intention .... 36
3. Un cadre théorique relatif aux motivations de la comptabilité
d’intention ................................................................................... 37
3.1. L’apport de la théorie positive de la comptabilité ................ 38
3.2. Les motivations de la pratique de comptabilité d’intention . 38
4. les motivations de la pratique de comptabilité d’intention en
contexte ivoirien : validation empirique...................................... 40
4.1. L’approche qualitative : contexte et justification ................. 40
4.1.1 Caractéristiques des personnes interrogées ................. 42
4.1.2. Répartition des entreprises en fonction des secteurs
d’activité ................................................................................. 44
4.3. Discussion des résultats ........................................................ 48
5. Conclusion ................................................................................... 49
Bibliographie .................................................................................... 50
LA PERTINENCE DE L’INFORMATION COMPTABLE EN CONTEXTE OHADA : ÉTUDE
EXPLORATOIRE DU CAS IVOIRIEN .......................................................................... 55
1. Introduction .................................................................................. 55
2. La théorie de l’agence : Cadre d’analyse de la pertinence des
chiffres comptables ..................................................................... 57
3. La problématique des études de la pertinence de l’information
comptable .................................................................................... 58
3.1- La problématique des études de réaction ............................ 59
3.2. La problématique des études d’association ......................... 60
3.3. Les méthodes d’évaluation des études de la pertinence de
l’information comptable : des approches indirectes de l’utilité
de l’information comptable .................................................. 61
4. La méthodologie de l’étude.......................................................... 63
4.1. Le contexte Ohada : un système comptable à influence
gouvernementale et fiscal ..................................................... 64
4.2 Stratégie d’accès aux données primaires ............................... 65
4.3- Présentation des situations d’analyse de financement ........ 66
4.3.1. Situations d’utilisation effective de l’information
comptable ............................................................................... 66
3.3.2. Situation du processus qui préside à l’analyse d’un
financement ............................................................................ 69
4.3.3- Situation de l’importance de l’information comptable
dans la prise de décision ......................................................... 70
5.1- L’utilisation effective des chiffres comptables ................... 71
5.2- Schéma du processus de décision des analystes financiers. 73
5.3- L’importance de l’information comptable dans la prise de
décision ................................................................................ 76
6. Conclusion ................................................................................... 76
Bibliographie .................................................................................... 77
LA PERTINENCE DE L’INFORMATION COMPTABLE POUR LA PRISE DE DÉCISION AU
SEIN DES ENTREPRISES DE PETITE TAILLE ............................................................ 82
1. Introduction .................................................................................. 83
2. De la production de l’information comptable à son utilité pour la
prise de décisions : une analyse théorique .................................. 84
2.1. Les modèles comptables dominants ..................................... 85
2.2. Le système comptable des PE selon le Syscohada ............... 86
1.3. Les fondements théoriques de l’utilité de l’information
comptable pour les PE .......................................................... 89
3. La méthodologie appliquée sur le terrain ..................................... 90
3.1. L’étude quantitative.............................................................. 90
3.2. L’étude qualitative................................................................ 92
4. La présentation des résultats ........................................................ 92
4.1. Les caractéristiques des PE enquêtées.................................. 93
4.2. Les catégories d’informations comptables produites au sein
des PE ................................................................................... 95
4.3. L’utilité des informations comptables au sein des PE au Togo
.............................................................................................. 96
5. La discussion des résultats ......................................................... 100
6. Conclusion ................................................................................. 102
Bibliographie .................................................................................. 103
LES DÉTERMINANTS DE LA COMMUNICATION SOCIÉTALE DES ENTREPRISES DE
L’ESPACE OHADA : UNE ÉTUDE EN CONTEXTE CAMEROUNAIS.......................... 105
1. Introduction ................................................................................ 106
2. Le socle théorique explicatif de la communication sociétale des
entreprises.................................................................................. 109
2.1. Le reporting sociétal des entreprises à l’épreuve des théories
............................................................................................ 110
2.2. L’identification des déterminants de la communication RSE
dans la littérature ................................................................ 112
1.2.1- Les déterminants économiques de la diffusion des
informations sociétales ....................................................... 113
1.2.2- Les déterminants sociaux de la divulgation d’informations
RSE .................................................................................... 115
1.2.3- Les déterminants environnementaux de la diffusion des
informations extra-financières ........................................... 117
3. L’analyse empirico-contextuelle des déterminants de la
communication sociétale ........................................................... 118
3.1. La pertinence du choix de l’espace OHADA comme cadre
d’étude sur la communication sociétale ............................. 118
3.2 La présentation du protocole méthodologique de l’étude ... 120
3.3. La mesure des variables du modèle explicatif du reporting
Durabilité............................................................................ 121
3.3.1- L’opérationnalisation du reporting RSE .................. 121
3.3.2-L’opérationnalisation des variables explicatives et de
contrôle ................................................................................. 122
3.4.- La présentation et le test du modèle explicatif du reporting
RSE .................................................................................... 125
4. La présentation et l’analyse des résultats de la recherche .......... 126
4.1. La présentation des résultats de l’investigation .................. 126
4.1.1- L’effet des facteurs économiques sur le niveau de
reporting sociétal .................................................................. 126
4.1.2- L’incidence des facteurs sociaux sur le niveau de
communication sociétale ...................................................... 128
4.1.3- L’impact des facteurs environnementaux sur le niveau
de communication sociétale ................................................. 130
4.2. La discussion des résultats de l’enquête ............................. 132
4.2.1- Les facteurs économiques du reporting sociétal ...... 132
4.2.2. Les facteurs sociaux comme mobile dominant du
reporting sociétal .................................................................. 133
4.2.3. Les facteurs environnementaux du discours RSE : la
pression des parties prenantes .............................................. 136
5. Conclusion ................................................................................. 137
Bibliographie ............................................................................. 139
L’INDÉPENDANCE DU COMMISSAIRE AUX COMPTES PERÇUE PAR LUI-MÊME.
ANALYSE DES FACTEURS DÉTERMINANTS AU BURKINA FASO ......................... 149
1. Introduction ................................................................................ 150
2. Cadre conceptuel ........................................................................ 153
2.1. Cadre d’analyse de la mission de l’auditeur légal .............. 153
2.2. Discussions théoriques sur l’indépendance de l’auditeur légal
............................................................................................ 154
3. Méthodologie ............................................................................. 157
3.1. Quelle approche du contrôle de gestion dans les universités ?
............................................................................................ 157
3.2. Présentation et discussions des résultats ............................ 158
4. Conclusion ................................................................................. 168
Bibliographie .................................................................................. 169
Annexe 1 : Facteurs susceptibles d’influencer l’indépendance du
commissaire aux comptes .......................................................... 172
Annexe 2 : Variance totale expliquée issue de l’ACP sur les items
dépendant de l’auditeur ............................................................ 173
Annexe 3 : Variance totale expliquée issue de l’ACP sur les items
dépendant de l’audité ................................................................ 173
Annexe 4 : Variance totale expliquée issue de l’ACP sur les items
dépendant de l’auditeur et de l’audité ...................................... 174
Annexe 5 : Variance totale expliquée issue de l’ACP sur les items ne
dépendant ni de l’auditeur et ni de l’audité .............................. 174
LE RÔLE ET L’IMPORTANCE DU CONTRÔLE DE GESTION DANS UN ÉTABLISSEMENT
PUBLIC : CAS D’UNE UNIVERSITÉ TOGOLAISE .................................................... 175
1. Introduction ................................................................................ 175
2. De la gestion au contrôle de gestion dans les universités .......... 177
2.1. Les spécificités de la gestion des universités ..................... 177
2.2. Le contrôle de gestion dans les universités ........................ 179
3. Le cas de l’Université de Lomé au Togo (ULT) ........................ 181
3.1. L’approche méthodologique .............................................. 181
3.2. Le contexte de l’étude ........................................................ 181
3.3. Le contrôle de gestion au sein de l’ULT ............................ 182
3.3.1. La finalisation ........................................................... 182
3.3.2. Le suivi des réalisations ........................................... 183
3.3.3. Le contrôle................................................................ 184
4. Discussion et conclusion ............................................................ 185
Bibliographie .................................................................................. 187
GESTION DES IMPAYÉS DANS LES SYSTÈMES FINANCIERS DÉCENTRALISÉS AU
TOGO. ................................................................................................................... 189
1. Introduction ................................................................................ 189
2. Revue de la littérature ................................................................ 191
2.1 Les procédures de gestion des impayés dans les SFD ........ 191
2.2 Les déterminants d’impayés : le modèle de la recherche .... 193
2.2.1 Les facteurs liés à l’emprunteur ................................ 193
2.2.2. Les facteurs liés à l’institution ................................. 194
3. Démarche méthodologique de la recherche ............................... 196
3.1 Constitution de l’échantillon et collecte des données ......... 196
3.2 Construction du modèle empirique et opérationnalisation des
variables ............................................................................. 197
4. Résultats de l’étude et discussion............................................... 198
4.1. La statistique descriptive .................................................... 198
4.2. La corrélation entre les différentes variables étudiées ....... 199
4.3. Analyse de la régression ..................................................... 200
4.4. Discussion des résultats ...................................................... 202
5. Conclusion ................................................................................. 203
Bibliographie .................................................................................. 204
EVALUATION DU PERSONNEL ET IMPLICATION ORGANISATIONNELLE DES
SALARIÉS DANS LES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES ............................... 206
1. Introduction ................................................................................ 207
2. Les objets de l’évaluation du personnel et l’implication
organisationnelle des salariés .................................................... 211
2.1. Évaluation du savoir-faire et implication organisationnelle
des salariés ......................................................................... 212
2.2. Evaluation de la capacité d’adaptation et implication
organisationnelle des salariés ............................................. 214
2.3. Evaluation du degré d’atteinte des objectifs et implication
organisationnelle des salariés ............................................. 215
2.4. Evaluation de l’efficacité du travail et implication
organisationnelle des salariés ............................................. 216
3. Méthodologie de la recherche .................................................... 217
3.1. Echantillon de mesure et caractéristiques .......................... 218
3.2. Collecte des données .......................................................... 220
3.3. Présentation des variables .................................................. 221
3.4. Outils statistiques utilisés ................................................... 226
4. Résultats et discussion ............................................................... 227
5 Conclusion .................................................................................. 238
Références ...................................................................................... 239
INFLUENCE DE LA PUBLICATION DES NOTES FINANCIERES SUR LE COURS ET
LES ÉCHANGES D’ACTIONS SUR UN MARCHÉ FINANCIER EN DEVELOPPEMENT :
CAS DE LA BRVM ................................................................................................ 244
1. Introduction ................................................................................ 245
2. Influence de la notation financière sur le cours des actions et leurs
échanges, une revue de littérature ............................................. 248
2.1. Lien entre notation financière et cours en bourse des sociétés
............................................................................................ 248
2.2. Influence de la publication des notes financières sur la
liquidité des actions de la société cible .............................. 251
3. Méthodologie ............................................................................. 253
3.1. Hypothèses de recherche .................................................... 253
3.2. Les données ........................................................................ 255
3.3 Cadre d’analyse ................................................................... 256
4. Résultats ..................................................................................... 260
4.1. Diffusion et caractéristiques des notes financières à la BRVM
............................................................................................ 260
4.2. Ajustement des cours et du volume de transactions à la
diffusion de notes financières à la BRVM ......................... 263
4.3. Influence des caractéristiques des évènements sur la réaction
des cours des sociétés cotées à la BRVM .......................... 266
5 Conclusion .................................................................................. 270
Bibliographie .................................................................................. 272
L’APPROCHE PAR COMPOSANTS DU SYSCOHADA
2017 : UNE ÉTUDE EXPLORATOIRE EN CÔTE
D’IVOIRE

KOUAMÉ Yann
Doctorant en Sciences de Gestion
Université Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan
OUATTARA Abdoulaye, Maître de Conférences
Université Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan
Résumé
Notre étude a pour but de comprendre le comportement des entreprises
dans l’application de l’approche par composants (APC) du Syscohada
2017. Les entretiens menés dans deux entreprises de Côte d’ Ivoire sont
analysés par codage manuel. Les résultats montrent que les entreprises
étudiées n’ont pas une bonne connaissance de la nouvelle règle. La
modalité « ne rien faire » est celle qui sera privilégiée lors de la
première application de l’APC. Les modalités de première application
de l’APC n’incite pas à mettre en œuvre la modalité « réallouer les
valeurs nettes comptables ».
Mots-clefs : Syscohada 2017 - Approche par composants - Avantage-coût - Ohada.
Abstract
Our study aims to understand the behavior of companies in the
application of the component approach (CA) of Syscohada 2017.
Interviews conducted in two companies in Côte d'Ivoire are analyzed by
manual coding. The results show that the companies studied do not have
a good knowledge of the new rule. The "do nothing" modality is the one
that will be privileged during the first application of the PCA. The first
application modalities of the CA does not encourage the implementation
of the "reallocate net book values" modality.
Key words: Syscohada 2017; Component approach; Cost and benefit analysis; Ohada.

1. Introduction
En 2013, les états-membres de l’Organisation pour
l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (Ohada) débutent un
processus de révision du droit comptable et de son annexe, le système
comptable de l’Ohada (Syscohada) avec le concours financier de la
Banque Mondiale (Migan et Mabudu, 2016, p. 290). Cette révision fait
suite à celle du Système comptable des pays de l’Uémoa, le Syscoa

15
2013 (Kouamé et Assandé, 2017). Le processus de révision du
Syscohada aboutit en janvier 2017, à l’adoption de l’acte uniforme sur
le droit comptable et l’information financière (AUDCIF), qui fait de
nombreux emprunts aux normes internationales d’informations
financières (IFRS), édictée par le International Accounting Standards
Board (IASB). Les nouvelles dispositions de l’AUDCIF doivent être
mises en œuvre à partir de janvier 2018.
L’AUDCIF introduit en son article 38-1, l’approche par
composants (APC) pour l’amortissement de certaines immobilisations
corporelles. Cette nouvelle pratique inspirée des IFRS, notamment, la
norme IAS 16 immobilisation corporelle, a un impact significatif dans
les entreprises industrielles et de transport du fait de l’importance des
immobilisations corporelles dans le bilan de ces entreprises. Par ailleurs,
la norme IFRS 1 Première adoption des normes internationales
d'information financière, tout comme le cadre conceptuel du Syscohada,
exigent que les normes comptables « puissent être mises en place à un
coût qui ne dépasse pas les avantages qu'en retireront les utilisateurs. »
(IFRS 1 §1). En d’autres termes, « les informations contenues dans les
états financiers doivent procurer un intérêt supérieur au coût de leur
production. » (Cadre conceptuel du Syscohada, 2017, p. 89).
En nous appuyant sur des entretiens menés avec les responsables
des services de comptabilité de deux entreprises, une grande entreprise
industrielle cotée à la bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM)
d’Abidjan et une entreprise de transport, nous tentons de répondre aux
questions suivantes : Comment les entreprises se préparent-elles à
mettre en œuvre l’approche par composants pour l’amortissement des
immobilisations corporelles ? Dans quelle mesure cette préparation
prend-t-elle en compte la contrainte d’équilibre avantages-coûts ?
Notre étude a pour but de décrire les actions mises en œuvre par
ces entreprises, dans le cadre de la première application du Syscohada
2017 sur l’APC dans l’amortissement des immobilisations corporelles.
Aussi, elle tente d’expliquer les intentions et comportements des
entreprises étudiées dans la mise en œuvre de la première application de
cette pratique. Nous adoptons pour cette étude, une démarche
qualitative basée sur des entretiens.
Cette étude revêt un intérêt pour le normalisateur comptable de
l’Ohada dans la mesure où elle met en lumière le comportement de
producteurs de comptes, lors de changements de méthodes ou de
réglementation comptables. Aussi, elle permet de faire une évaluation

16
ex-ante du respect de la contrainte d’équilibre avantage-coût dans la
mise en œuvre du Syscohada 2017.
Notre article est organisé comme il suit. Dans une première
section, nous présentons l’APC en matière d’amortissement. La seconde
section décrit la méthodologie de recherche. La troisième section
présente les résultats de l’étude. Enfin, nous concluons.

2. L’APC du Syscohada 2017 et les modalités de première


application
Le Syscohada 2017 introduit l’APC, un transfert de pratique IFRS.
Deux modalités de première mise en œuvre de cette pratique comptable
sont préconisées par le cadre conceptuel du Syscohada 2017.

L’APC : un emprunt aux IFRS


Dans les normes IFRS, l’APC est instaurée par la norme IAS 16
immobilisations corporelles. Cette norme prescrit qu’« une entité
comptabilise dans la valeur comptable d'une immobilisation corporelle
le coût d'un remplacement partiel au moment où ce coût est encouru, si
les critères de comptabilisation sont satisfaits. La valeur comptable des
pièces remplacées est décomptabilisée selon les dispositions de
décomptabilisation énoncées dans la présente norme » (IAS 16 § 13).
Aussi, le paragraphe 43 IAS 16 ajoute que « chaque partie d'une
immobilisation corporelle ayant un coût significatif par rapport au coût
total de l'élément doit être amortie séparément ». Dans ces conditions,
l’« entité ventile le montant initialement comptabilisé pour une
immobilisation corporelle en ses parties significatives et amortit
séparément chacune de ces parties » (IAS 16 § 44).
La norme IAS 16 fait de la décomposition des immobilisations une
règle importante. En effet, même « les parties d'un élément dont le coût
n'est pas significatif » peuvent faire l’objet d’un amortissement séparé
(IAS 16 § 47).
Sur le modèle de IAS 16, dans le respect des principes de prudence
et de coût historique retenus par l’Ohada, le Syscohada 2017 transfert
cette pratique dans son référentiel comptable. L’article 38-1 est ainsi
libellé :
L’entité ventile le montant d’une immobilisation
corporelle en ses parties significatives dès lors que :
 les éléments d’actifs sont dissociables ;

17
 les éléments d’actifs ont une utilisation différente ;
 la durée d’utilité de chaque élément est différente ;
 le coût de chaque élément peut être évalué de façon
fiable et qu’il est significatif par rapport au coût
total de l’immobilisation.
Chaque élément de l’immobilisation visée à l’alinéa
précédent doit être comptabilisé dès son acquisition ou
son remplacement.
La décomposition des immobilisations n’est autorisée
que pour les bâtiments et autres ouvrages, les avions, les
bateaux, les camions, les autocars, les bus, les véhicules
blindés de transport de fonds, certains matériels et
outillages des entités industrielles, minières, agricoles,
hospitalières et pétrolières, dès lors que l’entité dispose
de statistiques et autres informations lui permettant de
bien appréhender la durée d’utilité de chaque élément.

Dans le Syscohada 2017, la décomposition n’est autorisée que


pour certaines immobilisations corporelles. Le cadre conceptuel du
Syscohada indique, à titre indicatif, que certaines immobilisations ne
peuvent pas faire l’objet de décomposition, du fait de la faible valeur de
leurs composants ou de leurs durées d’utilisation courtes. Il s’agit des
matériels informatiques, des véhicules de tourisme, des matériels et
mobiliers (Cadre conceptuel du Syscohada, 2017, p. 592).
À l’analyse, contrairement à IAS 16, la décomposition n’est
possible dans le Syscohada 2017, que si les composants ont une valeur
significative, en sus des autres critères. Les éléments dont le
remplacement intervient avant la période de douze mois doivent être
décomptabilisés de la valeur comptable de l’immobilisation et
comptabilisés en charge (cadre conceptuel du Syscohada, p. 592).
L’annexe 1 présente une synthèse des principales différences de l’APC
dans IAS 16 et le Syscohada 2017. L’annexe 1 montre les fortes
divergences qui existent dans la mise en œuvre de cette technique
comptable. Par ailleurs, deux modalités de premières applications sont
prévues par le Syscohada 2017 contrairement aux IFRS qui prévoient
trois.

18
Les modalités de passage à la nouvelle règle
Pour la mise en œuvre de la première application de l’APC pour
l’amortissement des immobilisations corporelles, les IFRS prévoient
trois méthodes : reconstituer le coût historique amorti, réallouer les
valeurs nettes comptables (VNC) et évaluer à la juste valeur (Schevin,
2005, p. 37).
Le Syscohada 2017 a retenu les principes de prudence et de
comptabilisation au coût historique. Le principe de comptabilisation en
juste valeur n’a pas été retenu dans le Syscohada 2017 contrairement au
Syscoa de 2013 (Kouamé et Assandé, 2017, p. 31).
Le Syscohada 2017, contrairement à IFRS 1 n’a pas fait le choix
de l’impact du changement de méthode comptable sur les capitaux
propres lors de la première application des nouvelles règles. Le
Syscohada 2017 admet, dans le cas de la première application de l’APC,
deux méthodes : soit le maintien en l’état des immobilisations, « ne rien
faire » ; soit la méthode de réallocation de la valeur nette comptable,
« réallouer les VNC ». Cette dernière méthode est une mise en œuvre du
principe d’application rétrospective lors de la première application d’un
changement de méthode comptable. Les immobilisations existantes sont
décomposées comme si la règle avait toujours existé. Le cadre
conceptuel du Syscohada 2017 (p. 966) prescrit, toutefois, une
application prospective de la mise en œuvre des durées probables
d’utilisation.
Dans le choix du maintien en l’état des immobilisations, « ne rien
faire », l’entreprise ne mettra en œuvre l’APC que pour le remplacement
des composants. Le choix de cette modalité n’entraîne pas, en principe,
des coûts supplémentaires ou de préparation particulière à la mise en
œuvre de l’APC.

La modalité « réallouer les VNC », a été retenue comme seconde


modalité parce qu’elle « est la solution la plus simple à mettre en œuvre
par les entités » [parmi les autres méthodes autorisées par IAS 161]. En
effet, « les immobilisations totalement amorties ne sont jamais

1
Ce texte est ajouté par l’auteur. Le cadre conceptuel (p. 970) ne dit pas à quoi il
compare cette modalité de mise en œuvre. La modalité « ne rien faire » n’est pas
prévue par IAS 16, l’auteur pense que la comparaison se fait avec les autres modalités
prévues par les IFRS.

19
retraitées dans cette méthode » (Cadre conceptuel du Syscohada 2017,
p. 970).
Dans son principe, la méthode consiste à ne pas modifier la VNC
globale mais à la repartir entre les différents composants et la structure ;
elle n’a pas d’impact sur les capitaux propres. Par ailleurs, l’application
prospective des durées d’utilité des composants limite la gestion des
résultats lors de la première application de cette règle. La répartition des
VNC peut être faite à partir des éléments d’information de la facture
initiale, des informations obtenues auprès des fournisseurs ou de
spécialistes, ou de la valeur des biens sur le marché des biens
d’occasion : c’est la détermination des VNC théoriques. Dans un second
temps, les clés de répartition des VNC sont appliquées aux
immobilisations brutes et aux amortissements pour leur répartition.
Dans le cadre du Syscohada 2017 et contrairement à IAS 16, les
composants sont amortis sur les durées comptables initialement définies
jusqu’à leur remplacement.

De ces deux modalités, seule la méthode de réallocation des VNC


nécessitent de prendre des dispositions pour la mise en œuvre de l’APC.
Ci-après, un tableau comparatif des modalités de première application
de l’APC.
Tableau 1: Comparaison des modalités de première
application de l’IAS 16)
Modalité IAS 16 Syscohada
Évaluer à la juste valeur Autorisé Non autorisé
Reconstituer le coût historique
Autorisé Non autorisé
amorti
Réallouer les VNC Autorisé Autorisé
Ne rien faire Non autorisé Autorisé
Source : l’auteur (inspiré de Schevin, 2005)

Le tableau 1 montre les différences majeures de traitements


comptables dans la mise en œuvre pour la première fois de l’APC entre
IAS 16 et Syscohada 2017. Seule la méthode de réallocations des VNC
est commune aux deux normes comptables. Toutefois, l’application
prospective des durées d’utilisation vient marquer la différence de
traitement comptable dans la réallocation des VNC.

20
Au moyen de la méthodologie exposée ci-dessous, nous tentons de
décrire les dispositions prises par les entreprises pour la première
application de l’APC dans le cadre du Syscohada 2017 et, de
comprendre dans quelle mesure, celles-ci, prennent en compte la
contrainte d’équilibre avantage-coût.

3. La méthodologie de recherche : une démarche


qualitative
La présentation des entreprises retenues dans cette étude
exploratoire sera suivie du mode de collecte des données, puis de la
méthode d’analyse des données recueillies.
Échantillonnage et collecte de données
Notre recherche vise, dans un premier temps, à décrire les
comportements de deux producteurs de comptes dans le cadre de la
préparation à la mise en œuvre, pour la première fois, de l’APC. Dans
un second temps, elle cherche à comprendre et expliquer la stratégie des
acteurs par rapport à la contrainte d’équilibre avantage-coût.
Les données sont collectées via des entretiens semi-directifs. Les
entretiens sont enregistrés à l’aide d’un dyctaphone. Un guide
d’entretien a servi de cadre pour la collecte des données. Les
discussions ont, toutefois, abordé des thèmes qui n’étaient pas couvert
par le guide d’entretien. Les entretiens se sont déroulés en face à face
avec les responsables de département « comptabilité » de ses
entreprises.
Les entreprises sont choisies pour tenter de mettre en évidence des
différences et des similitudes dans leurs comportements face à la
nouvelle règle. Le premier critère de sélection est le secteur d’activité,
entreprise industrielle ou de transport. Ce critère nous permet de choisir
des entreprises qui ont une proportion importante d’immobilisations
corporelles dans leur bilan. Le second, est un critère de taille et de mode
de gouvernance ; une grande entreprise cotée et une autre relativement
plus petite à actionnariat concentré. En effet, la théorie positive de la
comptabilité (Watts et Zimmerman, 1986), développé dans un
environnement nord-américain, montre l’influence de caractéristiques
de l’entreprise sur le comportement des acteurs en matière de choix
comptables. Le dernier critère est l’accessibilité du terrain. Vu les

21
contraintes de temps2, nous avons retenu les entreprises qui étaient les
plus différentes parmi celles que nous devions visiter.
Deux entreprises ont été retenues, une entreprise industrielle et une
entreprise de transport. L’entreprise industrielle cotée a fait un chiffre
d’affaires, en 2016, supérieur à cent-cinquante milliards de FCFA. Elle
a diverses immobilisations corporelles constituées de bâtiments (usines),
d’équipements industriels (chaînes de production, machines-outils), etc.
L’entreprise de transport, quant à elle, est détenue à 100% par une
holding. Elle a fait, en 2016, un chiffre d’affaires de plus de vingt
milliards de FCFA. Ces immobilisations sont principalement constituées
de matériels de transport (camions) et de bâtiment (garage). Nous avons
garanti l’anonymat des informations collectées aux interviewers.
Tableau 2: Présentation des entreprises interviewées
Expérience
Acteurs3 Type d’entreprise Durée
professionnelle
Entreprise industrielle
E1 20 ans 25 min
cotée
E2 9 ans Entreprise de transport 21 min
Source : l’auteur
Analyse des données
Les entretiens enregistrés ont été écoutés plusieurs fois (trois à
quatre fois), sans prise de note (attention flottante) afin de se
familiariser avec le vocabulaire de l’interviewé et de dégager des
thèmes généraux. Ils sont ensuite retranscrits sur support informatique
(document Word). La retranscription des deux entretiens d’une
vingtaine de minute, s’est faite en 6 jours de 10h de travail environ.
Afin de garantir l’anonymat des données collectées, le nom de
l’entreprise a été remplacé, lors de la retranscription par « l’entreprise »,
le nom du groupe par « le groupe », et le nom des individus par leur
fonction. La retranscription des interviews a produit un document de
neuf pages4.

2
Les délais de réponses à nos demandes d’entretiens sont en moyenne de trois
semaines, l’analyse des entretiens nous a pris énormément de temps.
3
Dans la suite de l’article les codes E1 et E2 désignent indifféremment les chefs
comptables interrogés et leurs entreprises respectives.
4
Police times new roman, taille 11, interligne 1,08.

22
La méthode d’analyse a été, dans un premier temps, empruntée à la
méthodologie de théorisation ancrée. Tous les textes ont été découpés
en unité de sens. À chacune des unités de sens est attribuée une phrase
qui la décrit en restant très proche du vocabulaire de l’interviewer
(Gioia, Corley, et Hamilton, 2012). La question qui guide le premier
codage est : « qu’est-ce l’interviewé veut dire ? ». Une unité de sens
pouvait appartenir à plusieurs codes (codage multinominal).
Un second codage a ensuite été effectué à partir des termes de
l’enquêteur dans un objectif de retranscription des termes de l’enquêté
par les termes de l’enquêteur (Gioia, Corley, et Hamilton, 2012). La
question qui guide le codage dans cette seconde phase est : « à quoi
correspond ce comportement ou cette intention ? ». Ce dernier codage
sert de base à la présentation des résultats et de la discussion. Le codage
théorique n’a pas été retenu pour réduire le risque de circularité
(Dumez, 2016, p. 73).
Il faut noter que cette méthodologie est consommatrice de temps.
L’expérience du chercheur a une incidence importante sur la rapidité de
ce type de traitement des données qualitatives.
L’analyse des entretiens aboutit aux résultats que nous présentons
dans la section suivante.

4. Les résultats de la recherche


Nous présentons d’abord les résultats des entretiens5 de la
première application de l’APC, puis a prise en compte de la contrainte
d’équilibre avantage-coût.
La mise en œuvre de l’APC
Des actions mises en œuvre dans le cadre de l’application du
Syscoa 2013
Parmi les deux entreprises, seule E1 a mené des actions dans le
cadre de la mise en œuvre du Syscoa 2013. Cette entreprise astreinte à
la publication d’états financiers semestriels a dû se préparer à mettre en
œuvre l’APC du Syscoa 2013 en 2015. Il faut rappeler que le système
comptable des pays de l’Uémoa, devait entrer en vigueur en 2015 mais
n’a pas été appliqué (Kouamé et Assandé, 2017). E1, a dans ce cadre,

5
Les entretiens ont été réalisés en français (Côte d’Ivoire) et repris tels quels dans les
verbatim.

23
effectué l’inventaire des immobilisations décomposables mais n’a pas
procédé à la décomposition de ces immobilisations. Les actions à mettre
en œuvre dans le cadre de la première application de l’APC peuvent être
résumées comme suit :
 inventaire des immobilisations ;
 détermination des immobilisations décomposables ;
 identification des composants ;
 détermination des durées d’utilité restantes des composants
identifiés
 détermination des valeurs des composants ;
 répartition des VNC.
E1 rappelle que l’opération effectuée dans le cadre de la mise en
œuvre de l’APC du Syscoa 2013 est consommatrice de temps, et ne sera
pas reprise dans le cadre de l’application du Syscohada 2017 :
« Nous n’allons pas refaire le travail qui a été fait en 2015, le
fichier est là ». (E1)
La méconnaissance de la nouvelle règle et la référence au Syscoa
2013
Le Syscoa 2013 ne prévoyait pas la modalité « ne rien faire » pour
la première application de l’APC. E1, à tort, anticipe un risque fiscal et
une réaction des actionnaires dus à l’impact que la modification des
durées d’amortissement pourrait avoir sur le résultat de l’entreprise ;
alors que le Syscohada ne prévoit pas une modification des durées
comptables d’amortissement :
« Forcément, chaque société aura son approche. De
toutes les façons quand vous allez le faire [la mise en
œuvre de l’APC], l’objectif c’est de ne pas léser l’État.
[…] Les actionnaires aussi te regardent ». (E1)
Ce comportement serait le signe d’une méconnaissance de la
nouvelle règle. En effet, référence est faite au Syscoa 2013 en lieu et
place du Syscohada 2017. Le même constat (méconnaissance de la
nouvelle règle) est fait dans l’entreprise E2.
« À vrai dire, on sait qu’il y a une réforme qui
arrive, mais on n’a pas vraiment anticipé sur cette
réforme. Comme nous, étant comptable, on est conscient
de ce fait là, […] on essaie de réfléchir à un moyen qui

24
va nous permettre de faire ça [mettre en œuvre la
décomposition] ». (E2)
Il ressort donc que 6 mois6 avant la mise en application du
Syscohada 2017, les producteurs de comptes n’ont pas une bonne
connaissance de la nouvelle réglementation comptable.

La décomposition est une activité extracomptable, complexe.


La décomposition est une activité extracomptable et l’entreprise
E1 ne compte pas faire appel à une expertise extérieure.
« Ça c’est le boulot des techniciens mais pas des
comptables. […] Nous avons assez de personnes
compétentes pour faire ce travail, nous ne comptons pas
faire recours aux experts extérieurs ». (E1)
E1 envisage toutefois, le recours aux commissaires aux comptes et
au conseiller fiscal afin de limiter les risques (fiscal et réaction des
actionnaires, selon lui) liés à l’application de la nouvelle règle, ce qui
montre sa complexité.
« Ces choses-là [la mise en œuvre de l’APC] ne se
font pas seul ». (E1)
Pour E2, le recours à l’expert-comptable n’est pas une solution
satisfaisante.
« … si moi je pense à expert-comptable, je me dis
qu’est-ce qu’un expert peut connaître dans une
immobilisation, ce n’est pas évident ». (E2)
Toutefois, le recours à l’expertise extérieur (un technicien qui
connaît les immobilisations) se fera pour E2 si l’information reflète
mieux la réalité de l’entreprise.
« Si l’information qu’il [un expert extérieur] nous
apporte est de meilleure qualité et que cette information
nous permet d’avoir des chiffres beaucoup plus fiables,
ça vaut le coût ! Si je devais conseiller le patron de
l’entreprise, je lui dirais que c’est mieux d’avoir un
expert, de faire des choses justes que de penser qu’on

6
Les entretiens se sont déroulés à la fin du mois de juin et au début du mois de juillet
2017. Le Syscohada 2017 est applicable dès janvier 2018.

25
économise alors qu’on fonce dans le mur ; parce que ce
qu’on présente comme chiffres, n’est pas réel ». (E2)
La date d’acquisition lointaine des immobilisations est aussi un
facteur qui complique la décomposition.
« On a acheté les machines, elles sont vieilles de
plus de dix ans, de quinze ans, même si elles ne sont pas
encore amorties ; mais est ce qu’aujourd’hui, on a la
capacité, dans ce qui reste à amortir, de sortir la partie
de chaque machine ? » (E1)
Les entretiens nous permettent aussi de mettre en évidence
d’autres résultats qu’il nous paraît important de relever.
L’APC comme solution à un problème technique
L’APC, comme traitement des immobilisations corporelles, est une
solution à un problème technique et permet une meilleure traduction de
la réalité économique de l’entreprise
E1, pour illustrer ce constat, raconte :
« … la décomposition est essentielle. Une machine,
elle fonctionne mais ce n’est pas un bloc en tout. […] La
décomposition est meilleure parce que, imaginez que
vous avez une machine que vous achetez ; et qu’un
module tombe en panne. La machine est rentrée à vingt
millions dans votre logiciel [comptable], quand ce
module-là tombe en panne ; alors que sans lui, la
machine ne marche pas, comment vous allez sortir ce
module de votre comptabilité ? Vous allez changer un
module, donc ajouter un module à une immobilisation
qui sera existante et faire deux amortissements. Parce
qu’en réalité, quand le module sort, la machine qui est
là, son coût d’amortissement que vous êtes en train de
faire, c’est faux ». (E1)
Cependant, l’application prospective des durées d’utilité des
éléments décomposés limite cet avantage ; aspect non pris en compte
par les interviewers du fait d’une mauvaise connaissance de la nouvelle
règle.
La prise en compte de la contrainte d’équilibre avantage-coût
Des entretiens, il ressort que la première mise en œuvre de l’APC
est une activité extracomptable, complexe et consommatrice de temps.

26
Ce constat est amplifié par une méconnaissance des modalités de la
nouvelle règle du Syscohada.
La méconnaissance de la nouvelle règle, permet d’expliquer dans
ces cas, les intentions de décomposer les immobilisations pour la
première application de l’APC. Les arguments pour lesquels les
entreprises comptent mettre en œuvre la décomposition ne sont pas
fondés. Nous pouvons supposer que les entreprises qui s’en rendront
compte, choisiront la modalité « ne rien faire ». En effet, la recherche
d’une meilleure traduction de la réalité économique de l’entreprise ne
peut pas être réalisée avec les modalités de première mise en œuvre
prévues par le Syscohada 2017.
Les deux modalités de mise en œuvre de la nouvelle règle, parce
qu’elles limitent la gestion des résultats (pas d’impact sur les capitaux
propres, mise en œuvre des durées d’utilité de façon prospective) ne
donnent pas les arguments nécessaires pour justifier les coûts que la
modalité « réallouer les VNC » entraînent. En effet, le recours à des
techniciens ou experts viendraient alourdir les charges de l’entreprise
sans que la nouvelle présentation des comptes ne reflète mieux la réalité
économique de l’entreprise. Lorsque l’entreprise ne compte pas faire
appel à des compétences extérieures pour mettre en œuvre la
décomposition, le temps nécessaire et la charge de travail qui augmente,
se présentent aussi comme des freins.
Les acteurs, en ne mettant pas en œuvre l’APC, lors de la première
application, restent conformes aux prédictions de l’analyse avantage-
coût. Dans le cadre du Syscohada 2017, la première application de
l’APC est génératrice de coûts qui restent supérieurs à des avantages
très limités. La modalité « ne rien faire » jusqu’au remplacement des
composants permet d’éviter ces coûts. C’est la modalité qui prend en
compte le respect de la contrainte d’équilibre avantage-coût.
Le tableau ci-après récapitule les principaux avantages et coûts de
la première mise en œuvre de l’APC (réallocation des VNC) mise en
évidence par les entretiens.

27
Tableau 3: Avantage et coûts de la mise en œuvre de la
modalité « réallouer les VNC »
Avantage Coût
 Augmentation de la charge de
Meilleure traduction de travail des producteurs de
la réalité économique de
compte
l’entreprise (avantage limité
 Nécessité de recourir à des
par la non-application des
spécialistes (internes ou
durées d’utilité)
externes)

Source : l’auteur
En l’absence de mesure incitant à mettre en œuvre, la modalité
« réallouer les VNC », les entreprises ont intérêt à ne rien faire. Ce
comportement n’est pas influencé par les caractéristiques de l’entreprise
(taille, cotation sur un marché boursier) ou sa disponibilité en ressources
(ressources financières et humaines compétentes). Il est conforme à une
prise en compte de la contrainte d’équilibre avantage-coût.

5. Conclusion
Notre étude a eu pour but de décrire et d’expliquer les actions
mises en œuvre par deux entreprises - l’une industrielle, l’autre de
transport - de Côte d’Ivoire dans le cadre de la première application de
l’APC du Syscohada 2017. Le Syscohada 2017 prévoit deux modalités
de première mise en application. Ce sont « ne rien faire » et « réallouer
les VNC ». Seule la modalité « réallouer les VNC » nécessite que des
dispositions particulières soit prises par l’entreprise pour sa mise en
œuvre.
De l’analyse des entretiens avec les chefs comptables de ces
entreprises, nous montrons que les entreprises :
- n’ont pas une bonne connaissance de la nouvelle règle ;
- ne comptent recourir à une expertise extérieure pour procéder à la
décomposition des immobilisations que si la décomposition améliore la
traduction de la réalité économique de l’entreprise et en l’absence de
personnels internes compétents ;
- en l’absence d’incitation à la mise en œuvre de la modalité
« réallouer les VNC », la modalité « ne rien faire » se présente comme
celle qui permet de tenir compte de la contrainte d’équilibre avantage-
coût.

28
D’autres résultats sont mis en évidence par cette étude. L’APC
apparaît comme une solution technique, souhaitée par les entreprises,
elle permet de traduire, de meilleure manière, la réalité économique de
l’entreprise.
Dans un contexte de pays en développement comme celui des pays
de l’Ohada, la modalité « ne rien faire » se présente comme une
innovation qui permet la prise en compte la contrainte d’équilibre
avantage-coût. À l’analyse, l’on pourrait penser que la modalité
« réallouer les VNC » telle que prévue par le Syscohada 2017, ne tient
pas compte de cette contrainte, et est inappropriée. Causse et Ebondo
(2015, p. 5), le rappellent, dans les pays en développement, le « système
comptable doit non seulement être adapté et utile, il doit être applicable
et appliqué ». En effet la non-participation, sous quelque forme que ce
soit, des parties prenantes à la normalisation comptable aboutit parfois à
l’élaboration de normes inapplicables par les producteurs de comptes.
La référence aux IFRS pour la décomposition des immobilisations
dans le Syscohada 2017 parait abusive. Comme le rappelle Lemarchand
(2015, p. 155), l’APC est conseillé, déjà au XIXe siècle, pour
l’amortissement de certains biens. Sa mise en œuvre ne peut se justifier
uniquement par une référence aux IFRS. L’analyse comparative de la
norme IAS 16 et du Syscohada 2017 montre la forte différence dans les
traitements comptables pour la décomposition des immobilisations
corporelles ; faire référence aux IFRS pour l’application de l’APC du
Syscohada parait abusif.
Des recherches futures, adoptant une démarche compréhensive
(Dumez, 2016), pourraient analysées les raisons (volonté d’être un early
adopter, gestion des résultats7, conseils des commissaires aux comptes,
légitimation des actions de lobbying pour l’adoption de l’APC, etc.) de
certaines entreprises, de mettre en œuvre la réallocation des VNC lors
de la première application de l’APC. Ces recherches pourraient
s’appuyer sur le cadre de la théorie néo-institutionnelle (DiMaggio et
Powell, 1983) afin de mettre en évidence des comportements guidés par
une quête de légitimité. En effet, les théories économiques classiques

7
Le dirigeant de l’entreprise pourrait profiter de la nouvelle règle pour augmenter, sur
un exercice, les charges de rémunérations d’intermédiaires et de conseils ; chose qui
ne se répètera pas l’exercice suivant et permettra de montrer une croissance du résultat
sur les deux exercices, toutes choses égales par ailleurs.

29
qui mobilisent un cadre d’analyse avantage-coût auraient du mal à
expliquer ce comportement des entreprises.

Bibliographie
Causse, G., et Ebondo Wa Mandzilla, E., (2015), Les normes
comptables dans les pays de l’UEMOA : apport ou frein au
développement ? in Dynamique normative – Arbitrer et
négocier la place de la norme dans l’organisation, Cappelletti,
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31. doi:10.1177/1094428112452151.
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Cames – Série Économie et Gestion (N°3 - spécial 1ère
Journée d'Etude Africaine en Comptabilité Contrôle (JEACC)),
13-39.
Lemarchand, Y. (2016), Amortissement et dépérissement (XVIIIe s.-
XIXe s. ), in D. Bensadon, N. Praquin, et B. Touchelay (dir.)
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Française de Comptabilité, pp. 34-40.
Watts, R. L., et J. L. Zimmerman, (1986), Positive accounting theory,
Printice Hall.

30
Annexes
Annexe 1 : Comparaison de l’approche par composants IAS 16
vs Syscohada 2017
Critère IAS 16 Syscohada
Seuls les bâtiments et autres
ouvrages, les avions, les
Nature des
À priori, toutes les bateaux, les camions, les
immobilisat
immobilisations autocars, les bus, les véhicules
ions
corporelles peuvent blindés de transport de fonds,
corporelles
faire l’objet de certains matériels et outillages
décomposab
décomposition. des entités industrielles,
les
minières, agricoles,
hospitalières et pétrolières.
Identique aux
critères généraux de 4 critères énoncés :
comptabilisation des  Élément dissociable
Critères de immobilisations
 Utilisation différente
décompositi corporelles, pourvu
 Durée d’utilité différente
on que les éléments
 Coût significatif
soient dissociables,
et les durées
d’utilité différentes.

31
32
LES MOTIVATIONS DE LA PRATIQUE DE LA
COMPTABILITÉ D’INTENTION : LE CAS DE LA CÔTE
D’IVOIRE
VANGAH Yann-Cédric Armel
Doctorant, Université Félix Houphouët-Boigny
Abidjan - mail : vangahyann@gmail.com
Résumé
L’objectif de cet article est de comprendre les raisons qui poussent les
entreprises ivoiriennes à pratiquer la comptabilité d’intention. Par une
approche qualitative focalisée sur les interviews, il semble que la
principale raison soit la minimisation de l’impôt. De plus, les entreprises
sont amenées à pratiquer la comptabilité d’intention pour obtenir des
prêts bancaires, pour faire face à la concurrence et pour répondre aux
exigences de groupe.
Mots clés : Comptabilité intention - Entretien semi-directif – approche
qualitative
Abstract
The objective of This article is to understand the reasons which urge the
Ivory Coast companies to practice the creative accounting. By means of
a qualitative approach focused on the interviews, it seems that the main
reason is the minimization of the tax. Furthermore, companies are taken
to practice the creative accounting to obtain bank loans, to face the
competition and to meet the requirements of group.
Keywords: Intention Accounting - semi-directive Interview -
qualitative Approach.

1. Introduction
La comptabilité d’intention a été largement développée dans la
littérature au cours de ces quarante dernières années (Stolowy, 2009).
Cependant, bien qu’il n’y ait pas unanimité sur la définition de ce
concept, la comptabilité d’intention est considérée comme une forme de
gestion des données comptables (Breton et Stolowy, 2003). Gillet
(1998) affirme que : « La comptabilité créative, c’est l’ensemble des
techniques, des options et des espaces de liberté laissés par les textes
comptables qui, sans s’éloigner de la norme et des exigences de la

33
comptabilité, permettent aux dirigeants d’une entreprise de faire varier
le résultat ou de modifier l’aspect des documents comptables ». De cette
définition, il résulte que la pratique de comptabilité d’intention vise à
améliorer le résultat soit à la hausse, soit à la baisse.
Plusieurs recherches se sont intéressées à examiner les facteurs
explicatifs de la gestion des données comptables (Berland et al, 2016).
Pour identifier les motivations de la gestion des données comptables, les
auteurs ont le plus souvent recours à une approche quantitative à l’aide
de modèles d’estimation des accruals8. Selon Healy (1985), l’accrual se
définit comme étant « la somme des ajustements comptables aux cash-
flows de la firme permis par les organismes de normalisation ».
Aux États-Unis, Othman et Zéghal (2006) analysent l’impact des
déterminants de la gestion des résultats en prenant comme référence le
modèle comptable anglo-américain et le modèle comptable euro-
continental. Les auteurs aboutissent à la conclusion suivante : d’une part
que les entreprises françaises sont amenées à gérer leur résultat pour
réduire les coûts politico-contractuels, d’autre part que la pression du
marché financier est un facteur qui pousse également les entreprises
canadiennes à manipuler leur résultat. En ce qui concerne le contexte
francophone, Mard (2004) s’intéresse à la relation entre la gestion des
résultats et certaines caractéristiques de la firme. Au terme de ces
travaux de recherche, l’auteur aboutit à la conclusion que les
déterminants de la gestion des résultats sont fonction de la taille de
l’entreprise et du secteur d’activité. Quant à Vidal (2010), il s’intéresse
aux motivations qui conduisent les entreprises à publier des résultats
faiblement supérieurs. En utilisant une loi mathématique de distribution,
il parvient à souligner que les seuils comptables peuvent être considérés
comme l’un des facteurs de motivation de la gestion du résultat.
En Tunisie, des chercheurs se sont penchés sur ce débat tout en
adoptant une autre approche. Hamza (2012) utilise une démarche
qualitative compte tenu du fait que les raisons susceptibles d’expliquer

8
Les accruals sont les charges et produits calculés (dotations aux amortissements et
provisions, reprises sur provisions), ainsi que des éléments de la variation du besoin en
fonds de roulement. Ils servent à mesurer la « gestion du résultat » (Jeanjean, 2001).

34
la gestion du résultat peuvent différer d’un contexte à l’autre. Les
résultats de ces travaux montrent que les entreprises tunisiennes gèrent
leur résultat pour minimiser l’impôt, pour obtenir des crédits bancaires,
pour maintenir le cours boursier.
En Côte d’Ivoire, les travaux de recherche relatifs aux facteurs de
motivation de la pratique de comptabilité d’intention sont rares. En
conséquence, nous posons la question de savoir : qu'est-ce qui peut
pousser les entreprises ivoiriennes à pratiquer la comptabilité
d’intention ? Il est important de comprendre pour quelles fins les
entreprises ivoiriennes pratiquent la comptabilité d’intention.
L’objectif de cet article est donc de comprendre les raisons qui
poussent les entreprises ivoiriennes à gérer leur résultat. Pour ce faire,
nous avons recours à une démarche qualitative permettant d’explorer ce
courant de recherche. Nous procédons à des entretiens semi-directifs de
30 professionnels du chiffre à savoir les commissaires aux comptes, les
auditeurs, les analystes, les comptables et les responsables d’entreprise.
Au terme de ce travail de recherche, les résultats de l’analyse qualitative
devraient nous permettre de dresser un inventaire des facteurs
explicatifs de la pratique de comptabilité d’intention en contexte
ivoirien.
Cet article comporte quatre sections. La première a pour objectif
de définir la comptabilité d’intention, la deuxième de présenter le cadre
théorique relatif aux motivations, la troisième d’exposer la
méthodologie retenue et la dernière section est réservée à une discussion
des résultats et à une conclusion.

2. Le concept de comptabilité d’intention : en quête d’une


définition
La comptabilité créative ou comptabilité d’intention est un concept
d’origine anglo-saxonne qui a fait son apparition dans les années 70.
Dans cette partie, nous présentons une évolution des définitions données
par la presse économique jusqu'à celles énoncées par la communauté
scientifique.

35
2.1. La comptabilité d’intention ou comptabilité créative :
quelques définitions
Les journalistes de la presse économique ont été les premiers à
tenter de donner un sens au concept de comptabilité d’intention. Tout
d’abord, ils qualifient la comptabilité créative d’art. Bertolus (1988)
précise que c’est : « l’art de truquer un bilan ». Quant à Pourquery
(1991), il l’appréhende comme : « une comptabilité d’art plastique ».
Après l’avoir assimilé à de l’art, Tabuteau (1993) et Jacquin (1994)
stipulent que la comptabilité créative doit plutôt être considérée comme
une comptabilité stratégique. Ensuite, une seconde appellation est
donnée à la comptabilité créative à savoir une comptabilité imaginative
ou d’intention (Nasser, 1993 ; Smith, 1992). Enfin, d’une comptabilité
imaginative, on assiste à une transition vers une comptabilité créative
basée sur deux approches.
La comptabilité créative est d’abord présentée comme un
instrument d’amélioration des comptes dans la mesure où il est question
de pratiques imaginées qui permettent de donner une allure beaucoup
plus flatteuse aux comptes d’une entreprise (Audas, 1993). Puis, elle est
considérée comme une traduction de la créativité financière. Comme le
précise Pasqualini et Castel (1993) : « L’idée maîtresse de la
comptabilité créative est de faire preuve d’une imagination comparable
à celle dont les financiers ont fait preuve en créant les nouveaux
instruments financiers ». Les propos de ces auteurs nous font
comprendre que la comptabilité d’intention est perçue comme une
imagination de l’ingénierie financière dont l’objectif principal est de
créer de plus en plus de nouveaux montages qui sont mis à la
disposition des dirigeants de groupes (Barthes et Gilbert, 1992). Pour
Stolowy et Breton (2003), la comptabilité créative se définit plutôt à
partir des objectifs recherchés et des procédés mis en œuvre.
Au terme de ces définitions, nous définissons la comptabilité
d’intention comme un système grâce auquel le préparateur des états
financiers élabore la comptabilité financière tout en étant animé par des
intentions (objectifs).
2.2.Les aspects fondamentaux de la comptabilité d’intention
Le concept de comptabilité d’intention, ou de comptabilité
créative, tire son origine d’un courant positif (Dagorn et al., 2013). En
effet, cette notion est développée par les fondateurs de l’école de
Rochester. Selon Watts et Zimmerman (1986), la comptabilité

36
d’intention ou la comptabilité créative se définit comme étant: « un
ensemble de techniques de comptabilité utilisé par le gestionnaire pour
modifier ses comptes dans un sens favorable à ses attentes ».
Colasse (2000) ajoute que les pratiques liées à l’information
comptable semblent parfois à la limite de la légalité pour certaines
entreprises. Par conséquent, elles cherchent à présenter la situation
financière de l’entreprise sous un meilleur jour en se servant des brèches
laissées par la réglementation.
Ainsi, au terme de ces définitions, la comptabilité d’intention est
certes un champ large mais présente toujours la question de la légalité
des techniques utilisées par les dirigeants (Dagorn et al., 2013). Cela
amène Chalayer et al. (2005) à préciser que les différentes options de la
comptabilité d’intention ou de la comptabilité créative sont considérées
comme un processus à deux phases. La première phase vise à optimiser
la présentation des comptes et la seconde à tendance à aboutir à la
fraude. A cet effet, la comptabilité d’intention demeure un instrument
pertinent pour atteindre les objectifs du dirigeant (Casta et Ramond,
2010). En outre, Scheid (2008) énonce que la comptabilité d’intention
ou la comptabilité créative reflète une double traduction. D’une part,
elle émane d’une traduction comptable et d’autre part, d’une traduction
financière : il s’agit de créativité financière.
Autrement dit, face à une crise touchant le secteur dans lequel
l’entreprise exerce son activité, les dirigeants peuvent prendre la
décision d’opter pour des choix comptables (Dagorn et al., 2013). Cela
permet donc à l’entreprise d’enjoliver son image mais aussi de présenter
des informations attrayantes au marché à partir des indicateurs
comptables et financiers.

3. Un cadre théorique relatif aux motivations de la


comptabilité d’intention
La présentation de la théorie mobilisée pour expliquer la pratique
de comptabilité d’intention sera suivie des principaux travaux portant
sur les facteurs explicatifs.

37
3.1. L’apport de la théorie positive de la comptabilité
La théorie positive de la comptabilité (TPC) initiée par Watts et
Zimmerman (1986) a pour objectif d’expliquer les pratiques
comptables. Pour ce faire, elle est l’une des théories qui formulent les
principales incitations concernant la gestion du résultat (Jeanjean,
2001). Marmousez (2009) stipule que les motivations susceptibles
d’exercer une influence au niveau des choix comptables développés par
cette théorie sont essentiellement l’existence de contrats de
rémunération, de dette ou de coûts politiques. Toutefois, compte tenu du
fait que la nature de ces incitations formulées par la TPC ne semble pas
évidente, Healy et Wahlen (1999) donnent une répartition plus
spécifique des incitations à la gestion du résultat. Les auteurs
parviennent à présenter trois sortes d’incitations à savoir : les incitations
liées aux marchés, les incitations liées aux contrats et celles liées aux
règlementations.
S’agissant de la première incitation, les travaux empiriques
débouchent sur la conclusion que les résultats comptables peuvent faire
l’objet de manipulation dans les cas suivants : l’introduction en bourse
et l’atteinte des prévisions des analystes (Teoh et al, 1998 ; Degorge et
al., 1999). Pour ce qui est des incitations liées aux contrats, les
informations comptables sont destinées à réguler et à contrôler les
contrats existants entre l’entreprise et les parties prenantes
(Marmousez,2009). Puisque, les parties prenantes interviennent dans la
préparation de ces informations comptables, elles peuvent les manipuler
à leur propre avantage. La dernière incitation est relative aux
règlementations. Marmousez (2009) souligne que la gestion des
résultats peut s’expliquer par les règlementations sectorielles parce que
dans certains secteurs, il existe des contrôles règlementaires qui ont
pour socle les informations comptables produites par l’entreprise.
Après avoir exposé, l’apport de la théorie positive de la
comptabilité à l’explication de la gestion des résultats, il est important
de présenter une synthèse des travaux empiriques sur les motivations.
3.2. Les motivations de la pratique de comptabilité d’intention
Plusieurs travaux de recherche se sont intéressés aux raisons qui
poussent les entreprises à gérer leur résultat. D’abord, les premières
recherches relatives aux motivations de la gestion des résultats ont été
observées dans le contexte anglo-saxon par les travaux de Boynton et al.
(1992) et Guenther(1994). Dans leurs conclusions, les auteurs précisent

38
que les dirigeants des entreprises américaines arrivent à réduire le taux
d’imposition par un mécanisme de report dans le temps des résultats.
Puis, dans le contexte européen, Coppensa et Peek (2005) en cherchant
à valider l’hypothèse de la fiscalité par une analyse de 8 pays européens
précisent que « les entreprises privées opérant dans les pays où le
système fiscal influence considérablement la comptabilité n’essayent
pas d’éviter les pertes contrairement aux entreprises opérant dans les
autres pays ».
Au-delà de ces travaux, nous avons également ceux de Mard et
Marsat (2011) qui étudient l’impact de la structure de l’actionnariat sur
la gestion des résultats comptables dans les sociétés françaises cotées.
Ils parviennent à la conclusion que la concentration de l’actionnariat
semble nécessiter la gestion du résultat. En Tunisie d’autres chercheurs
ont également marqué un intérêt majeur à la question des facteurs
explicatifs de la gestion des résultats. Shabou et Boulila (2002) ont
effectué des travaux de recherche afin d’examiner les déterminants de la
comptabilité créative. Les résultats de leurs travaux montrent que
lorsque le contrôle est effectué par les institutions, les entreprises
semblent être incitées à vouloir pratiquer la comptabilité d’intention.
Bien que les études concernant les facteurs explicatifs de la
comptabilité d’intention soient révélatrices, McNicols (2003) et
Durtschi(2005) remettent en cause l’approche quantitative choisie pour
mesurer le phénomène compte tenu du degré de fiabilité. En effet,
Berland et al. (2016) s’inscrivent dans le même courant et affirment que
la plupart des travaux semblent adopter uniquement une démarche
quantitative qui pourrait renfermer certaines limites. Effectivement, les
auteurs comme Harvey et al. (2005) stipulent que bien que les dirigeants
portent un intérêt à manipuler les accruals, ils sont plus enclins à
manœuvrer la seconde composante du résultat qui est le flux de
trésorerie. L’objectif est d’augmenter les résultats réalisés, de réaliser
des cessions d’immobilisations afin de dégager des plus-values (Cohen
et al., 2008 ; Zang, 2007).
Les chercheurs ont donc commencé à recourir à une approche de
type qualitative. Notamment Hamza (2012) observe que les raisons qui
poussent les entreprises tunisiennes sont essentiellement : la
minimisation de l’impôt, l’obtention de crédits bancaires, le maintien du
cours boursier, l’intérêt personnel des dirigeants, la diffusion de la
bonne image vis-à-vis de l’environnement extérieur, l’atteinte des

39
objectifs de l’entreprise, la volonté d’écarter un associé et l’insertion sur
le marché boursier.

4. les motivations de la pratique de comptabilité


d’intention en contexte ivoirien : validation
empirique
Pour cerner les raisons qui poussent les entreprises ivoiriennes à
pratiquer la comptabilité d’intention, il nous semble pertinent d’adopter
une approche qualitative basée sur des entretiens. Dans cette partie nous
présenterons d’une part la démarche méthodologique et d’autre part les
résultats obtenus.
4.1. L’approche qualitative : contexte et justification
Selon Gavard–Perret et al. (2012), l’approche qualitative permet
d’obtenir une compréhension fine et profonde. Notre choix s’est porté
vers cette approche pour les raisons suivantes. La première est liée au
fait que les travaux de recherche relatifs à la comptabilité d’intention
dans le contexte ivoirien semblent être inexistants. Le recours à cette
approche est de nature à mieux explorer et développer des hypothèses
dans ce nouveau domaine (Miles et Huberman, 2003). La seconde
raison concerne la découverte de facteurs explicatifs de la pratique de la
comptabilité d’intention. Étant donné que les travaux antérieurs
existants ont été pour la plupart focalisés sur la mesure des accruals
discrétionnaires, adopter une démarche basée sur les entretiens serait
d’un apport complémentaire quant à l’identification des facteurs
explicatifs de la gestion des données comptables (Berland et al., 2016).
Pour cette recherche, nous adoptons une posture interprétativiste (Miles
et Huberman, 2003).
Pour mener à bien l’approche choisie il est important de
s’intéresser à l’échantillon de la recherche et à la méthode d’analyse
retenue. En matière d’approche qualitative, Miles et Huberman (2003)
précisent que « les chercheurs qualitatifs travaillent habituellement avec
de petits échantillons de personnes, nichés dans leur contexte et étudiés
en profondeur à la différence des chercheurs quantitatifs qui recherchent
de multiples cas décontextualisés et visent une représentativité
statistique ». La recherche qualitative ne met donc pas l’attention sur la
quantité, mais plutôt sur la qualité des personnes interrogées.
Pour ce faire, notre travail de recherche s’appuie sur 30 entretiens
réalisés auprès de six catégories d’interviewés. Selon Stolowy et Bréton

40
(2003) la personne capable de nous donner les explications liées à la
pratique de la comptabilité d’intention serait un responsable
d’entreprise, car c’est une activité qui lui est destinée. Nous avons donc
contacté les dirigeants des entreprises ivoiriennes. Cependant, nous
avons observé une certaine réticence de leur part lorsque nous les
sollicitions. Cela nous a donc conduit à faire intervenir d’autres
catégories de personnes comme les auditeurs, les contrôleurs de gestion,
les responsables comptables et financiers, les expert-comptables, les
analystes financiers.
La conduite de ces entretiens a suscité l’élaboration d’un guide
d’entretien. Notre guide d’entretien s’est construit en six étapes tout
comme celui de Colle (2006). La première étape concerne
l’identification du besoin en information. Il s’agit de comprendre les
raisons qui poussent les entreprises ivoiriennes à pratiquer la
comptabilité d’intention. Puis, après avoir identifié l’information que
nous recherchons, la deuxième étape est celle de la première version du
guide d’entretien. Pour celle-ci, nous posons des questions ouvertes
avec des relances à l’appui. Quant à la formulation des questions, étant
donné que la comptabilité d’intention peut paraître aux yeux des
professionnels comme une notion presque inexistante, nous avons
utilisé le vocabulaire « gestion du résultat » pour une bonne
compréhension des questions. La troisième étape est relative aux
interprétations ou commentaires de chercheurs. Nous avons bénéficié
des commentaires de deux enseignants-chercheurs par rapport à la
pertinence des questions. Ensuite, à l’issue des commentaires de ces
derniers, nous avons fait ressortir une deuxième version du guide
d’entretien. Un pré-test du guide d’entretien a ensuite été élaboré et testé
auprès de 3 expert-comptables. Le test nous a permis de donner à nos
énoncés une formulation beaucoup plus compréhensive. Enfin, la
dernière étape est celle liée à la version définitive du guide d'entretien9.
En définitive, nous avons conduit 7 entretiens auprès des expert-
comptables, 4 entretiens auprès des directeurs, 5 entretiens auprès des
contrôleurs de gestion, 4 entretiens auprès des comptables avec 2
comptables exerçant leur profession dans des filiales de groupe et 2
autres opérant dans le secteur des petites et moyennes entreprises, 7
entretiens auprès des auditeurs et 3 entretiens auprès des analystes

9
Le guide d’entretien est présenté en annexe.

41
financiers. Ces entretiens ont été réalisés sur les lieux de travail des
interviewés. La durée maximale de l’entretien a été de 1 h 49 minutes.
Ils ont été enregistrés et ont ensuite fait l’objet d’une retranscription
intégrale en format texte. Puis, pour analyser le contenu de ces
entretiens, nous avons eu recours à l’analyse de contenu. Nous
choisissons cette méthode d’analyse car, comme le précisent Weber
(1990), Berelson (1952) et Bardin (2003), l’analyse de contenu permet
de mettre en confrontation les propos des différents acteurs concernant
une thématique précise, afin de faire ressortir les traits de similitudes ou
de différences. Elle permet également de faire un recoupement par
centre d’intérêt des informations recueillies. L’analyse du contenu
donne la possibilité de faire une comparaison sur les avis donnés par les
répondants.
La démarche méthodologique étant précisée, nous présentons les
résultats, mais auparavant nous exposons les caractéristiques des
personnes interrogées ainsi que ceux des entreprises.
4.1.1 Caractéristiques des personnes interrogées
Les tableaux suivants présentent les caractéristiques des
interviewés selon leur niveau de formation, la catégorie professionnelle
et l’expérience professionnelle.
Tableau 1 : Répartition des personnes interrogées par fonction
Responsables et Dirigeants d’entreprises
Auditeur interne 3
Auditeur externe 4
Contrôleur de gestion 5
Gestionnaire 1
Directeur 4
Chef comptable 2
Comptable 1
Total (1) 20
Analystes
Analyste commercial 1
Chef du service rapprochement bancaire 1
Analyste financier 1
Total (2) 3
Professionnels de la comptabilité
Expert-Comptable 7
Total (3) 7

42
Total 30
Source : Nos résultats issus des interviews
Les professionnels de l’information comptable et financière que
nous avons interrogés exercent tous leur profession dans la ville
d’Abidjan et dans des secteurs d’activité différents. Notre échantillon
est constitué de 66,67 % de responsables ou dirigeants d’entreprise
(Auditeurs, Contrôleurs de gestion, Directeurs, Chefs comptables, et de
comptable). En plus des responsables, nous avons 10 % des analystes et
23,33 % d’Experts comptables.
Tableau 2 : Répartition des personnes interrogées
par niveau de formation
Niveau de formation Effectif
Bac + 7 7
Bac + 5 8
Bac + 4 15
Total 30
Source : Nos résultats issus des interviews
L’échantillon de notre recherche est composé de 23,33 % de
personnes ayant un niveau équivalent au Bac + 7. Les interviewés ayant
un niveau Bac + 5 représentent 26,67%. Enfin, ceux possédant un
niveau Bac+4 sont estimés à 50%, ils représentent près de la moitié de
l’effectif total.

Tableau 3 : Répartition des personnes interrogées


par expérience professionnelle
Classe d’année d’expérience Effectif
0 à 5 ans 12
5 à 10 ans 8
10 à 15 ans 6
15 ans et plus 4
Total 30
Source : Nos résultats issus des interviews
Nous observons que 60% des personnes interrogées ont un niveau
d’expérience professionnelle de plus de 5 ans.

43
Les entretiens menés avec les professionnels de l’information
comptable et financière se sont déroulés en face à face. L’interview le
plus court a duré 33 min. 18 s et le plus long a duré 1 h 49 minutes10.
4.1.2. Répartition des entreprises en fonction des secteurs d’activité
Les personnes interrogées exercent leurs fonctions respectives
dans divers secteurs d’activités, comme l’indique le tableau 4.

10
Voir annexe 2

44
Tableau 4 : Caractéristiques des entreprises par secteur d’activité

Secteur d’activité Nombre Pourcentage %


Banque 8 27 %
Agro-industrie 3 10 %
Agroalimentaire 2 7%
Agricole 1 3%
Industrie 3 10 %
Télécommunication 1 3%
Industrie & service 3 10 %
Service 9 30 %
TOTAL 30 100 %
Source : Répartition issue des interviews

3.2. Les résultats de l’approche qualitative

Les personnes que nous avons pu interroger nous ont donné des
informations sur les raisons qui semblent pousser les entreprises
ivoiriennes à la pratique de la comptabilité d’intention. Nous évoquons
les motivations données par chaque catégorie de répondants à partir de
l’analyse de contenu réalisée. Les tableaux suivants (5 et 6) donnent une
illustration des résultats.

Tableau 5 : Fréquence de mots liés aux raisons de la comptabilité


d’intention
Audi- Contrô- Compta-
Raisons évoquées Total %
teurs leurs bles
Payer moins d’impôts 6 3 6 15 50%
Diffuser une bonne image
0 1 1 2 6,66%
aux actionnaires
Favoriser la cotation en
1 0 0 1 3,33%
bourse
Exigence du groupe 4 1 0 5 16,67%
Le désir de lever des fonds 1 0 0 1 3,33%
Obtention de crédits
bancaires 0 1 1 2 6,66%
Pression des actionnaires 0 1 0 1 3,33%

45
La volonté d'avoir des
primes & gratifications 2 0 0 2 6,66%
Faire face à la concurrence 2 2 0 4 13,33%
La volonté de se maintenir 3 0 0 3 10 %
Source : Résultats issus de nos analyses

Selon le tableau 5 la plupart des interviewés estiment que l’impôt


est parfois la raison majeure qui les conduit à jouer sur leur résultat,
donc à pratiquer la comptabilité d’intention (15 interviewés). L’auditeur
interne n°1 affirme que : « il y a une sorte de pression fiscale, parce que
c'est sur la base du résultat comptable que se calcule le résultat fiscal.
Donc les entreprises ont tendance à minimiser leur résultat pour
pouvoir payer moins d'impôts ». D’autres comme le chef comptable n°1
précise que l’État amasse pratiquement le quart du résultat des
entreprises ivoiriennes, et cela constitue une véritable difficulté pour ces
entreprises. Il illustre cela à travers le propos suivant : « Quand vous
prenez, le résultat dans lequel vous devez verser 25 % de votre résultat
à l’impôt, c’est à dire le quart de votre résultat, vous vous rendez
compte de la marge que l’État se fait. Du coup, toutes les entreprises
n’ont pas forcément ce comportement civique pour dire ; écoutez c’est
normal que j’exerce sur un territoire ou on me demande de verser 25 %
de ce que je gagne, c’est légal. Donc déjà, première raison, c’est de
pouvoir réduire le résultat pour payer moins d’impôts ».
En dehors de cette raison, il y a également le cas où des filiales ont
des impératifs de résultat vis-à-vis de leur société mère. Compte tenu du
fait qu’elles n’arrivent parfois pas à atteindre les objectifs qui leur sont
assignés, elles peuvent avoir recours à la pratique de comptabilité
d’intention afin d’y arriver (5 interviewés).
Lorsqu’elles ambitionnent d’étendre leurs activités, les entreprises
sont également obligées de maquiller leurs états financiers pour obtenir
des prêts bancaires. En d’autres termes, l’expert-comptable
n°6 souligne « il y en a qui veulent avoir des crédits qui maquillent
leurs états financiers ».
On peut noter également le souci d’afficher un certain standing
vis-à-vis du marché, elles sont incitées à gérer leur résultat (4
interviewés). En effet, l’auditeur externe n°3 affirme que « pour les
entreprises qui n’ont pas pour objectif d’afficher un gros résultat. L’une

46
des raisons qui peut les pousser à agir sur le résultat, c’est qu’elles sont
confrontées à un souci de benchmarking, voilà le positionnement. Donc
ces entreprises auront tendance à avoir un bon chiffre d’affaires, un
résultat, pour être mieux positionnées. Car quand elles sont bien
placées, elles bénéficient de nombreux avantages de la part du
marché ».
En outre, il faut noter que les entreprises ivoiriennes sont gérées
par des directeurs généraux qui ne sont pas forcément propriétaires de
l’entreprise, ainsi les dirigeants qui ne détiennent pas une participation
dans le capital de l’entreprise. Pour ce faire, afin qu’ils maintiennent
leur poste, ils peuvent décider de fausser le résultat dans l’optique
d’avoir des bonus (3 interviewés). Le tableau suivant nous donne un
aperçu des raisons par les analystes, directeurs et experts comptables.
Tableau 6 : Fréquence des mots liés aux raisons de la comptabilité
d’intention
Analyst Directe Expert- Tot Pourcen
Raisons évoquées
es urs Comptables al tage
Payer moins d’impôts 3 2 8 13 43,33%
Bonne image aux
actionnaires 0 1 1 2 6,67%
Favoriser la cotation
en bourse 0 0 2 2 6,67%
Obtention de crédits
bancaires 2 2 2 6 20%
Source : Résultats issus de nos analyses

Selon le point de vue des acteurs de la gestion des données


comptables, la minimisation des impôts semble être la principale
motivation de la pratique de comptabilité d’intention (13 interviewés).
Ensuite, les dirigeants agissent sur leur résultat pour flatter les
actionnaires ou les partenaires. Nous illustrons cela par l’avis de
l’expert-comptable n°4 qui précise que « les dirigeants en faisant la
gestion du résultat le font pour les actionnaires afin que ceux-ci
puissent bien les apprécier » (2 experts comptables). De plus, certaines
entreprises ivoiriennes vont jusqu'à donner à leur résultat un certain
visage pour une cotation boursière (2 interviewés). En outre, un
directeur général affirme que « si tu cherches un emprunt bancaire, tu
n’as qu’à produit des chiffres qui soient à ton avantage ». En d’autres
termes, les entreprises ivoiriennes pour obtenir des prêts bancaires

47
manipulent leur résultat en fonction de ce qu’elles espèrent avoir auprès
des établissements financiers (5 interviewés).
4.3. Discussion des résultats
Parmi les motivations qui poussent les entreprises ivoiriennes à la
pratique de la comptabilité d’intention, il y en a certaines qui confirment
les résultats trouvés par des chercheurs. La pression fiscale exercée par
l’État est une réelle motivation de la gestion des données comptables en
contexte ivoirien. Ce facteur est également perçu dans plusieurs
contextes comme une raison qui déclenche la gestion du résultat,
notamment dans le contexte anglo-saxon comme l’indiquent les travaux
de Boynton et al. (1992). Contrairement à Shabou et Boulila (2002) et à
Mard et Marsat (2011) qui, dans leurs travaux, parviennent à conclure
que la concentration de l’actionnariat est une variable déterminante dans
l’explication de la gestion des résultats.
Quant à Hamza (2012), à l’aide d’une démarche qualitative, il
énonce que l’une des raisons pousser est l’impôt. Les entreprises
tunisiennes quelle que soit leur classification semblent réduire leurs
résultats parce qu’elles estiment que l’impôt n’est pas équitable ou que
le taux d’imposition paraît trop élevé.
Etant donné que la fiscalité apparaît comme la principale raison,
les entreprises ivoiriennes s’adonnent à la pratique de comptabilité
d’intention pour obtenir des prêts bancaires. Ce résultat s’inscrit dans la
même veine que celui trouvé par Hamza (2012) dans le contexte
tunisien, car près 35% des personnes interrogées le confirment.
Les raisons peuvent en réalité être de plusieurs ordres. D’abord, il
y a la volonté de diffuser une bonne image aux actionnaires, puis le
désir de vouloir bénéficier d’une cotation boursière. Cette dernière
raison rejoint l’une des raisons évoquées par Hamza (2012) dans le
contexte tunisien. Il indique que les entreprises tunisiennes sont incitées
à gérer leurs résultats pour s’introduire en bourse et maintenir leur cours
boursier. La raison qui concerne la cotation est aussi vérifiée par les
travaux de Shabou et Boulila (2002) selon lesquels la cotation exerce
une influence positive dans l’explication de la comptabilité d’intention
en contexte tunisien.
Il faut noter également le désir de lever des fonds ou d’en rapatrier.
Enfin pour les banques, elles gèrent leurs résultats, car cela leur permet
de créer des services bancaires, par exemple l’ouverture d’un compte
suivi d’une couverture d’assurance.

48
5. Conclusion
L’objectif de cet article est de comprendre les raisons qui poussent
les entreprises ivoiriennes à pratiquer la comptabilité d’intention. Pour
atteindre celui-ci, nous avons eu recours à une approche qualitative
focalisée sur l’analyse des discours tenus par les professionnels de
l’information comptable et financière. De cette approche qualitative,
nous avons pu comprendre que plusieurs raisons poussent les
entreprises ivoiriennes à pratiquer la comptabilité d’intention.
La motivation majeure évoquée est celle de la minimisation des
impôts. Ce souci a été relevé par la plupart des personnes que nous
avons interrogées. L’obtention des prêts bancaires demeure la seconde
source de motivation des entreprises ivoiriennes. En somme, la
minimisation des impôts, l’obtention de crédits bancaires semblent
exercer une influence positive sur les pratiques de la comptabilité
d’intention en Côte d’Ivoire. La raison liée à l’octroi de crédits
bancaires paraît pertinente, car contrairement au contexte tunisien, les
informations comptables sont l’une des conditions prépondérantes dans
un dossier d’octroi de crédit auprès des établissements financiers dans le
contexte ivoirien.
La contribution de cet article nous paraît être de deux ordres. Tout
d’abord les travaux sur la comptabilité d’intention en contexte ivoirien
semblent être rares. Celui-ci peut donc apparaître comme un apport
original important sur les travaux de comptabilité d’intention en
contexte ivoirien. Puis, adoptant une approche basée sur des entretiens,
il semblerait qu’en plus d’avoir justifié certaines motivations comme
celle de la fiscalité, nous sommes parvenus à apporter d’autres
explications aux motivations de la gestion des données comptables à
savoir : la volonté de se maintenir, le désir de lever des fonds, l’envie
d’avoir un meilleur positionnement sur le marché.
Comme perspectives de recherches futures, il serait intéressant
d’étudier les techniques de comptabilité d’intention par une approche
plutôt cognitive. Cependant, compte tenu de la taille de l’échantillon, il
serait intéressant pour des études futures de prendre l’avis de plusieurs
autres acteurs (agents des impôts) en adoptant une approche
quantitative.

49
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Annexe 1 : Le guide d’entretien (professionnels du chiffre)


1. Qu’est ce que pour vous gérer le résultat?
2. Quelles sont pour vous, les raisons qui poussent les entreprises à
modifier leur résultat ? Pourquoi ?
3. Quelle est pour vous la nature de ces raisons?

53
4. Est ce qu’elles ont un caractére opportuniste ou informative?
Pourquoi?

Annexe 2 : Récapitulatif des durées au niveau des entretiens menés


Auditeur interne 1 45 min
Auditeur interne 2 43 min
Auditeur interne 3 48 min
Auditeurs Auditeur externe 4 40 min
Auditeur externe 5 1 h 30 min
Auditeur externe 6 1 h 05 min
Auditeur externe 7 49 min
Contrôleur de gestion 1 1 h 40 min
Contrôleur de gestion 2 1 h 18 min
Contrôleurs de
Contrôleur de gestion 3 46 min
gestion
Contrôleur de gestion 4 44 min
Contrôleur de gestion 5 41 min
Directeur Général 1 1 h 25 min
Dirigeants
Directeur Général 2 1 h 49 min
Directeur Administratif et Financier 40 min
Directrice de la comptabilité 1 40 min
Responsables Directeur de la comptabilité 2 42 min
comptables et
financiers Chef Comptable 1 48 min
Chef comptable 2 39 min
Comptable 43 min
Analyste commercial 46 min
Analystes Chef du service rapprochement bancaire 53 min
Analyste financier 37 min
Expert-comptable 1 49 min
Expert-comptable 2 36 min
Expert-comptable 3 1 h 03 min
Experts-comptables Expert-Comptable 4 45 min
Expert-Comptable 5 40 min
Expert-comptable 6 46 min
Expert-comptable 7 33 min

54
LA PERTINENCE DE L’INFORMATION COMPTABLE
EN CONTEXTE OHADA : ÉTUDE EXPLORATOIRE DU
CAS IVOIRIEN

ATSAIN Annick Alberte Félicie


Doctorante en Sciences de Gestion
Université Félix Houphouet-Boigny, Abidjan.
Email : atsaina75@gmail.com

Résumé
Cet article a pour objectif d’étudier la pertinence de
l’information comptable, c’est-à-dire l’utilité de l’information
comptable pour la prise de décision des partenaires financiers de
l’entreprise. L’analyse est menée au moyen d’une approche qualitative
basée sur des entretiens semi-directifs. Le principal résultat est que,
l’information comptable est utilisée pour la prise de décision en
contexte Ohada, mais que son utilité est limitée.
Mots clés : Mots-clés : Pertinence, partenaires financier
Abstract
This article aims to study the relevance of accounting
information, that is to say the usefulness of accounting information for
the decision-making of the financial partners of the company. The
analysis is conducted using a qualitative approach based on semi-
structured interviews. The main result is that accounting information
is used for decision making in the Ohada context, but its usefulness is
limited
Keys words: relevance, financial partners

1. Introduction
La qualité de L’information comptable est un thème qui a suscité
beaucoup d’intérêt, suite aux scandales financiers qu’a connu
l’économie, du fait des affaires des groupes tels qu’Enron et Vivendi.
En effet, les chiffres comptables que publiaient ces entreprises sur le
marché ne présentaient pas leur image réelle. Aussi, des dispositions
plus rigoureuses ont-elles depuis lors été prises s’agissant de
l’information comptable.

55
L’information comptable est désormais produite dans des cadres
normatifs qui orientent les productions comptables, de manière à
garantir une certaine qualité à l’information qu’elles mettent à la
disposition de leurs utilisateurs. De la sorte, une attention particulière
est à ce jour accordée à l’information comptable, aussi bien de la part
des chercheurs que des praticiens.
La question de la pertinence de l’information comptable, au-delà
de l’aspect lié à la manipulation des données comptables, se pose
également dans les contextes financiers et économiques où
l’information comptable produite est destinée à des utilisateurs
nombreux et divers. C’est le cas de l’Ohada qui est notre contexte
d’étude où l’information comptable produite doit être pertinente pour
la prise de décision de tous ses utilisateurs sans n’en privilégier aucun.
Il serait donc nécessaire dans un tel contexte, d’étudier l’usage
que chaque utilisateur pourrait faire d’une telle information comptable
et déterminer son utilité décisionnelle pour lui. Particulièrement
l’usage que pourrait en faire les apporteurs de capitaux que le cadre
conceptuel du Syscohada désigne comme les partenaires financiers de
l’entreprise. En effet, une information est pertinente si elle correspond
au besoin de son utilisateur. Ainsi, il serait difficile qu’une
information destinée à de nombreux utilisateurs avec des besoins
hétérogènes puisse être considérée comme pertinente. D’où la
nécessité d’étudier la pertinence de l’information comptable dans ce
contexte.
Les études de la pertinence ont questionné la qualité des chiffres
comptables au moyen de deux approches : les études d’association et
les études d’évènements. Les études d’association sont relatives au
lien qu’il y a entre les données comptables et la valeur de marché des
entreprises. Les études d’évènement ont trait à la réaction des
investisseurs lors de la publication des chiffres comptables. A
l’intérieur de ces approches, les études de la pertinence sont
nombreuses, diverses et variées, empruntant différentes voies, à partir
de divers paramètres (Résultat Net, indicateur de création de valeur,
référentiel comptable, effet d’adoption des IFRS etc…. Ces études se
sont cependant peu intéressées à l’acteur (l’apporteur de capital) en
tant qu’utilisateur de l’information comptable, pris individuellement.

56
L’objectif de cet article est d’évaluer la qualité de l’information
comptable des entreprises de la zone Ohada à l’aide de sa principale
caractéristique, la pertinence. Il analyse donc l’utilité de l’information
comptable pour la prise de décision des apporteurs de capitaux
externes du système financier de la zone Ohada et propose une
approche d’analyse différente de celles des études d’association et des
études d’évènements. Sa spécificité réside dans son approche qui se
caractérise par l’étude du processus de décision de l’investisseur pris
individuellement. Il permettra d’évaluer la qualité de l’information
comptable produite selon le Syscohada. La première section présente
le cadre théorique de l’étude. La seconde, une revue de la littérature
relative à la pertinence informationnelle des chiffres comptables. La
méthodologie ainsi que les enseignements font ensuite l’objet
respectivement de la troisième et de la quatrième section.

2. La théorie de l’agence : Cadre d’analyse de la


pertinence des chiffres comptables
L’étude de la pertinence de l’information comptable met
implicitement en relation les dirigeants et les apporteurs de capitaux :
les dirigeants, par l’information comptable qu’ils produisent et par la
qualité de cette information, les apporteurs de capitaux, par l’usage
qu’ils font de l’information comptable pour leur prise de décision.
Pour (Charreaux, 2006), la théorie de l’agence permet la prise en
compte dans le raisonnement financier des conflits d’intérêts entre les
parties prenantes de l’entreprise que sont les dirigeants, les
actionnaires et les créanciers.
En raison de la relation contractuelle qui existe entre les
dirigeants et les apporteurs de capitaux externes, et tenant compte de
l’asymétrie d’information qui sous-tend leurs rapports, la théorie
positive de l’agence est un cadre d’analyse indiqué pour l’étude de la
pertinence de l’information comptable.
En effet, l’analyse informationnelle que propose la théorie
positive de l’agence tient compte de la qualité des chiffres comptables
appréhendés comme signal transmis. Ce signal pourrait influencer les
décisions prises par les apporteurs de capitaux, d’où leur utilité pour la
prise de décision de ces derniers. Cette utilité pose la question de la

57
qualité du signal transmis, qui peut être bon ou erroné. Le signal en
effet peut être sujet à caution, c’est-à-dire douteux.
En effet, l’asymétrie d’information induit un risque de sélection
adverse pour les apporteurs de capitaux. . Ce risque est consécutif à
l’impossibilité dans laquelle se trouvent les apporteurs de capitaux de
connaître avec précision la situation financière des entreprises. Ceux-
ci ne sont pas au même niveau d’information que les dirigeants. Dans
ces conditions, les dirigeants doivent signaler la situation financière de
leurs entreprises par l’information comptable. Ils se servent donc des
chiffres comptables pour transmettre l’information sur la situation de
leur entreprise aux apporteurs de capitaux. Ngantchou (2013) parle de
l’instrumentalisation des chiffres comptables. Toutefois, dans leur
utilisation de l’information comptable, les dirigeants ont la possibilité
de produire des chiffres fiables qui reflètent la situation réelle de leur
entreprise, ou de les manipuler. Cette possibilité pour les dirigeants de
manipuler les chiffres comptables trouve sa justification dans les
intérêts divergents des deux parties. Ce cadre d’analyse développé par
Watts and Zimmerman (1986), dans la théorie politico-contractuelle, a
guidé plusieurs travaux notamment, ceux de Ngantchou (2013). Celui-
ci a montré qu’en contexte PME, le profil éthique du dirigeant-
propriétaire influence beaucoup plus l’accès au financement bancaire
que l’information comptable. Une telle situation s’explique par la
possibilité qu’a le dirigeant de manipuler les chiffres comptables, ce
qui est en conformité avec l’hypothèse du comportement opportuniste
du dirigeant.
Dans l’étude de la pertinence de l’information comptable, cet
article analyse la relation entre les dirigeants et le processus
décisionnel des apporteurs de capitaux. Elle postule que l’information
comptable est mobilisée dans le processus décisionnel des apporteurs
de capitaux. Toutefois, elle se pose la question de savoir si la prise de
décisions financières des apporteurs de capitaux se fondent
prioritairement sur l’information comptable.

3. La problématique des études de la pertinence de


l’information comptable
Deux conceptions de l’information comptable coexistent
aujourd’hui selon l’utilisation que l’on veut en faire. Contractuelle,
elle sert principalement au contrôle des contrats externes et internes à
l’entreprise ; prédictive, elle doit permettre aux investisseurs de

58
formuler leurs anticipations sur l’avenir de la firme (Dumontier et
Raffournier, 1989, p. 1). Cette deuxième conception a suscité
beaucoup d’intérêt quant à la capacité des chiffres comptables à
fournir une information qui soit utile à la prise de décision des
utilisateurs. Cet intérêt s’est matérialisé par de nombreuses études qui
ont porté sur l’utilité de l’information comptable pour la prise de
décision des utilisateurs et en particulier des investisseurs. Ces études
ont surtout été développées suite aux critiques des adeptes de
l’approche normative qui remettent en question l’utilité de
l’information comptable pour la prise de décision.
Les études s’intéressant à l’utilité de l’information comptable ont
donné naissance à un important courant de recherche qui est la « value
relevance » ou la « pertinence informationnelle». L’approche a
consisté à étudier le contenu informationnel des chiffres comptables
en vue d’apprécier leur utilité pour la prise de décision des
investisseurs. Cette approche est qualifiée d’approche utilitaire de
l’information comptable par Sellami (2006). Ces études sont réalisées
sur la base de l’efficience du marché.
Les premières manifestations de ces études, au plan théorique,
sont apparues au cours des années 60, dans des réflexions menées par
des spécialistes des questions économiques et financières. Elles ont
permis de distinguer deux voies de recherches. L’une orientée vers
une étude de réaction et l’autre vers une étude d’association
(Dumontier et Raffournier, 1999). Toutefois, la pertinence des chiffres
comptables a fait l’objet de nombreuses critiques du fait de certaines
caractéristiques de l’information mises à la disposition des utilisateurs.
3.1- La problématique des études de réaction
Les études de réaction visent à mesurer la réaction des cours
boursiers à la publication de l’information comptable. La
problématique de ces études est de savoir si les chiffres comptables
ont un contenu informationnel susceptible d’entraîner une réaction des
investisseurs lors de leur publication. Elles postulent sur la base de
l’efficience du marché que, du fait de leur utilité pour la prise de
décision, les investisseurs utiliseront les chiffres comptables pour
réviser leurs anticipations si ceux-ci ont un contenu informatif. Ces
études empruntent leur méthodologie aux études d’évènements, dont
l’initiateur est Dolley (1933), d’où le qualificatif d’étude
d’évènements. Les premières études ayant mis en évidence le rôle des

59
publications de résultat dans la prise de décision des investisseurs sont
celles de Ball and Brown (1968) et Beaver (1968). Ces études ont
mesuré la réaction des investisseurs à la publication du résultat annuel
de diverses manières.
Ball and Brown (1968) ont étudié le contenu informatif du
bénéfice net en rapport avec la variation du cours boursier. Ils
mesurent la réaction des investisseurs par les rendements boursiers.
Leurs résultats indiquent que le marché réagit faiblement à la
publication du résultat annuel. Leur étude montre que le bénéfice
explique moins de 15% du rendement du titre. La faiblesse de ce
résultat peut s’expliquer par le fait que le marché à bien anticipé le
bénéfice attendu grâce à d’autres sources d’informations dont il
dispose. Cependant, d’autres études pensent qu’il est plus complet
d’analyser la réaction du marché aussi bien par les rendements
boursiers que par les volumes de transaction (Beaver, 1968 ; Kim et
Verrechia, 1991 ; Bamber et Cheon, 1995 ; Bouacha, 2010). Pour ces
études, les cours et les volumes de transactions ne réagissent pas de la
même manière à la publication de l’information comptable. En effet,
le volume des transactions comme le montre le modèle de Kim et
Verrechia (1991) est fonction de l’asymétrie d’information qui existe
entre les investisseurs. Avant la publication de l’information
comptable, chaque investisseur compose son portefeuille en fonction
de l’information dont il dispose. Ainsi la qualité de l’information que
détient chaque investisseur influence la composition de son
portefeuille. Une révision de leurs anticipations à la publication de
l’information comptable peut entraîner une modification dans le cours
de bourse sans influencer le volume de transaction si leurs attentes
vont dans le même sens. Ainsi donc l’analyse de la réaction du marché
est plus complète lorsqu’elle porte aussi bien sur les rendements
boursiers que sur les volumes de transactions.
Des chiffres comptables autres que le résultat annuel ont été
étudiés par certaines études. Il s’est agi pour ces études d’étudier la
réaction des investisseurs aux publications intermédiaires (Kiger, 1972
; Morse, 1981 ; Opong, 1995 ; Gajewaski et Quéré, 2002 ; Elleuch,
2001). Ces études tendent à montrer l’utilité des publications
intermédiaires pour la prise de décision des investisseurs.
3.2. La problématique des études d’association
Les études d’association visent à rapprocher la réalité financière
de l’entreprise, telle que traduite par les chiffres comptables, de

60
l’image perçue par les investisseurs. La problématique des études
d’association est de savoir si l’information comptable permet
d’expliquer la valeur de marché d’un titre à un moment donné. « Si
une information contenue dans les états financiers permet d’expliquer
le cours d’un titre à un moment donné, on peut alors conclure que les
investisseurs se servent de cette information dans l’évaluation du titre
» (Tremblay et al, 1993, p. 60). Les études d’association évaluent le
contenu informatif des chiffres comptables en s’appuyant sur les cours
boursiers. Ces études mesurent l’intensité de la relation entre les
chiffres comptables et le cours boursier, ou le rendement boursier, afin
d’apprécier la pertinence de l’information comptable. Les études ont
adopté différentes approches et portées sur plusieurs chiffres
comptables aux nombres desquels le plus étudié fut le résultat net. Les
études ont démontré la pertinence de cette variable malgré la faiblesse
des résultats obtenus dans la plupart d’entre elles. Martinez et
Agbodjo (2012) apprécient cette faiblesse des résultats par les R2 qui
sont relativement faibles, de 1% à 29% en Allemagne, de 7% à 17%
au Royaume-Uni, et de 1% à 49% en France. D’autres travaux
intègrent à l’étude de la pertinence des variables comptables autre que
le résultat, notamment les indicateurs de création de valeur dont le
pouvoir explicatif est comparé à celui des variables comptables
classiques (Janin, 2002 ; Olubgenga et Atanda, 2014 ; Martinez et
Agbodjo, 2012). D’autres analyses ont pris en compte dans leur étude
l’influence du référentiel comptable sur la pertinence des chiffres
comptables. Il s’est parfois agit d’apprécier l’apport d’un référentiel
comptable dans l’amélioration du contenu informationnel des chiffres
comptables (Janin, 2012 ; Chabaane et Othman, 2014). D’autres fois,
il a été question de comparer la pertinence de chiffres comptables
produits selon des normes différentes afin d’apprécier sous quelle
normes les chiffres comptables sont plus pertinents (Escaffre et Sefsaf,
2008 ; Salameh, 2013 ; Casta et Mbengue, 2016).
3.3. Les méthodes d’évaluation des études de la pertinence de
l’information comptable : des approches indirectes de
l’utilité de l’information comptable
La méthodologie des études d’évènements prend naissance dans
les travaux de Dolley (1933) qui en est l’initiateur. L’auteur, à partir
de cette méthodologie, analyse l’effet d’annonce de fractionnement
d’actions sur le cours boursier. A sa suite, plusieurs auteurs ont eu
recours à cette méthodologie aux fins d’études d’effets d’annonces de
divers évènements (Ball and Brown, 1968 ; Beaver, 1968 ; Fama et al,

61
1969 ; Kim et Verrechia, 1991 ; Mai et Tchemeni, 1997 ; Elleuch,
2001 ; Bouraoui, 2008 ; Bouacha, 2010). L’étude de Fama et al.
(1969) qui teste la vitesse d’ajustement des cours boursiers à des
informations spécifiques est une référence en la matière. Ces études
ont au fur et à mesure introduit des améliorations d’ordre
méthodologique aux études d’évènements tels les traitements
statistiques. A ce jour, la méthodologie des études d’évènements
permet d’analyser la réaction d’un marché à divers évènements, au
nombre desquels l’information comptable, autour de sa date de
publication.
Dans leur démarche, les études d’évènements respectent trois
étapes essentielles. La première étant l’identification de la date
d’annonce de l’évènement considéré. La seconde consiste au calcul de
rendements anormaux. Puis, la troisième, en une analyse statistique de
ces rendements anormaux. Les études d’évènements s’appuient sur
des modèles dont le plus utilisé est le modèle de marché.
Les études d’évènements étudient l’utilité de l’information
comptable pour la prise de décision, en analysant le comportement de
l’ensemble des investisseurs au moment de la publication de cette
information. Leurs méthodes d’évaluation quantifient la réaction du
marché pour apprécier la pertinence de l’information comptable. Une
telle approche de la pertinence de l’information comptable présente
des limites. En effet, ces études font des tests indirects sur l’utilité de
l’information comptable, comme l’affirme Bouacha (2010) en
s’appuyant sur la réaction des investisseurs, résultant de la publication
de l’information comptable. Cette approche justifie bien l’affirmation
de Cast (1977) relative à l’utilité présumée de l’information
comptable. L’une des limites que présente cette méthode d’évaluation
est que la réaction des investisseurs peut être due à une information
autre que l’information publiée. Se pose donc un problème
d’isolement de l’information comptable publiée qui pourrait entraîner
la coexistence d’une autre information, susceptible de provoquer la
réaction des investisseurs. De plus, la faiblesse des modèles
d’évaluation utilisés par ces études, notamment le modèle du marché
qui est le plus utilisé, avec l’hypothèse de stabilité de la volatilité au
cours du temps.
Les études d’associations consistent à régresser le prix ou la
rentabilité d’un titre sur les chiffres comptables dont on veut apprécier
la pertinence (Flah et Omri, 2007). Cette démarche a pour objectif
d’apprécier le pouvoir explicatif des chiffres comptables à partir du

62
coefficient de détermination de la régression (R²) (Escaffre et
Ramond, 2007) et du coefficient associé aux variables comptables
explicatives selon (Holthausen et Watts, 2001). Sous l’hypothèse de
l’efficience des marchés, le prix des actions représente la valeur des
entreprises.
Ce coefficient exprime l’intensité de la relation entre les
rendements boursiers et les variables comptables choisies. Il renseigne
sur le contenu informationnel des indicateurs comptables et exprime
leur capacité à refléter l’information véhiculée sur le marché financier
et contenu dans le cours boursier. Plus le R² est élevé, plus le contenu
informationnel des variables comptables est important. Le coefficient
associé à chacune des variables explicatives permet d’apprécier
l’incidence de chacune d’elles sur la valeur de marché.
Les études d’associations ont recours à divers modèles parmi
lesquels le plus récurrent est celui d’Ohlson (1995). Le modèle
modifié d’Ohlson, modèle du bénéfice net résiduel est l’un des
modèles les plus utilisés en comptabilité financière. Selon Evraert
(2006), pour certains, il constitue la seule formalisation théorique du
lien entre les chiffres comptables et les prix des titres. Ce modèle
explique mieux la valeur de marché des entreprises. Pour Ohlson
(1995) la valeur de l’entreprise est égale à la somme des fonds propres
comptables majorés de la valeur actuelle des rendements anormaux
futurs.
De même dans leurs méthodes d’évaluation, les études
d’associations adoptent une approche indirecte dans l’analyse de
l’utilité de l’information comptable pour la prise de décision. Dans les
tests effectués sur le pouvoir explicatif des chiffres comptables elles
mettent l’accent sur les variables et non sur l’acteur dans son
comportement. Pour cette étude, une approche qui porterait sur
l’investisseur en tant qu’individu fournirait des indications plus
précises sur l’utilité de l’information comptable pour lui. Une telle
approche, par la mise en évidence du processus de décision de
l’investisseur, permettrait d’étudier l’utilité de l’information
comptable pour lui.

4. La méthodologie de l’étude
Nous présenterons successivement le contexte de l’étude, la
stratégie d’accès aux données primaires et la présentation des cas. La
présentation du contexte répond au besoin de montrer les spécificités

63
de ce contexte par rapport aux contextes où sont en général menées les
études du contenu informatif des chiffres comptables. La stratégie
d’accès aux données primaires mettra en évidence les différences
entre les sources, les méthodes de recueil des données de cette étude et
celles des études antérieures sur la pertinence informationnelle des
chiffres comptables puis l’échantillon. Enfin, la présentation des cas
permettra de connaître la situation de chacun d’eux.
4.1. Le contexte Ohada : un système comptable à influence
gouvernementale et fiscal
Le contexte Ohada est constitué d’économies en développement.
Les économies des pays membres, en général de petite taille,
s’unissent au moyen de plans d’intégration régionale tels que ceux
élaborés dans le cadre de l’Uemoa et de la Cemac qui composent cet
espace. Le Syscohada, référentiel comptable en vigueur dans cet
espace jusqu’en janvier 2018, s’inscrit dans l’école continentale,
même si Colasse (2009) le situe, selon sa conception, comme un
modèle intermédiaire entre le modèle continental et le modèle anglo-
saxon. Ngantchou (2011) précise davantage son appartenance en
indiquant qu’il émane de manière plus spécifique de l’école Française.
En effet, certaines caractéristiques de l’Ohada, tant au niveau financier
que comptable le place dans les préceptes de l’école continentale.
Au plan financier, l’environnement est marqué par une tendance
générale au recours au financement bancaire. A ce propos Bigou-Laré
(2004) affirme que les entreprises de l’espace Ohada évoluent dans un
environnement d’économies d’endettement où le financement se fait
pour l’essentiel par des crédits bancaires.
Au plan comptable, la normalisation est aussi le fait de l’Etat. En
effet, la normalisation dans cet espace note l’intervention de l’Etat
dans la réglementation des pratiques comptables. Cette intervention se
matérialise par la participation d’organes gouvernementaux mis en
place dans le cadre des Unions créées à la faveur de la normalisation.
Ainsi donc, le système comptable est de type macro-économique à
influence gouvernementale et fiscale au regard de la distinction faite
par Nobes (1983) des deux systèmes comptables dominants.
Aussi, l’information comptable produite dans l’Ohada est
destinée à des utilisateurs multiples aussi bien les entreprises, les
créanciers, les investisseurs que l’Etat et bien d’autres encore selon le
principe de « pertinence partagée ». L’ambition de la comptabilité
dans l’Ohada est donc de produire une information qui soit utile à

64
toutes les parties prenantes de l’entreprise. Une information qui,
comme le dit Gouadain (2000) - parlant du Syscoa, référentiel qui a
inspiré le Syscohada - doit aider chaque utilisateur dans sa prise de
décisions importantes pour lui. Toutefois, bien que l’information
comptable dans l’Ohada ne soit destinée à aucune partie prenante en
particulier, le rôle actif de l’Etat dans l’orientation de l’économie et la
réglementation des pratiques comptables lui confère implicitement
une place privilégiée parmi les utilisateurs. Dans le contexte Ohada,
comme le dit Causse (2009) à propos des pays de l’Europe
continentale, la comptabilité sert notamment à la fourniture
d’informations permettant d’élaborer les statistiques macro-
économiques. Selon Ngantchou (2011) la volonté de la comptabilité
de satisfaire plusieurs utilisateurs est en réalité contredite par l’intérêt
supérieur accordé à l’Etat par rapport aux autres utilisateurs. Cet
intérêt particulier accordé à l’Etat trouve sa confirmation dans l’un des
principes comptables du Syscohada. L’évaluation au coût historique.
En effet, la comptabilité au coût historique est ce qui convient le
mieux à l’Etat pour ces besoins de collecte d’impôt.
4.2 Stratégie d’accès aux données primaires
Pour accéder aux données, nous avons procédé à des entretiens
semi-directifs, menés en face à face à partir d’un guide d’entretien
(voir annexe 1), avec différentes catégories d’analystes financiers
représentant des partenaires financiers des entreprises, notamment un
analyste financier employé dans une Société de Gestion Intermédiaire
(analyste sell-side), un analyste crédit employé dans une banque
commerciale et un analyste financier employé dans une société de
gestion de fonds d’investissement (analyste buy-side). L’échantillon
est donc constitué de trois analystes. Un analyste de chacune des trois
catégories définies. Le choix a été effectué de manière à mettre en
évidence les différences et les similitudes dans l’analyse du
financement. Le nombre d’années d’expérience moyen pour ces
analystes est de sept ans. Le choix de ces acteurs se justifie par le fait
qu’ils sont ceux qui, au sein de leur entreprise, analysent la situation
des entreprises candidates au financement. Après leurs analyses, ils
présentent les éléments sur lesquels doit s’appuyer la décision aux
décideurs de façon à les orienter. Nous présentons donc ci-dessous,
les situations d’analyse de financement selon la grille d’analyse (voir
annexe 2) définie.

65
4.3- Présentation des situations d’analyse de financement
Dans le cadre de cette étude, nous définissons trois types de
financement pour lesquels nous analysons le comportement des
analystes financiers dans chacune d’elles :
- un analyste crédit en situation d’analyse d’un financement de
bon de commande (financement bancaire),
- un analyste sell-side en situation d’analyse d’une entreprise qui
fait une levée de capital sur le marché boursier (financement par le
marché),
- un analyste buy-side qui analyse la situation d’une entreprise
dans laquelle il souhaite faire une prise de participation (financement
par les capitaux privés).
Les situations décrites ci-dessous, présentent ce que fait
l’analyste dans chacune des catégories analysant le financement selon
trois aspects : les sources d’informations qu’il utilise, le processus qui
guide son analyse, et l’importance qu’il donne à l’information
comptable.
4.3.1. Situations d’utilisation effective de l’information comptable
Situation n°1 : Analyste crédit, banque commerciale
L’analyste crédit est un analyste employé dans une banque
commerciale. Analyste crédit, il analyse les dossiers de financement
des entreprises en vue de l’octroi ou pas du financement. En effet, son
travail consiste au montage du dossier de crédits d’entreprises en
montrant les forces et faiblesses de l’entreprise demandeuse. Il
travaille sur la base de documents fournis par l’entreprise. Les
documents qu’il reçoit sont fonction du type de crédit. Il y a des
check-lists, qui présentent la liste des documents requis pour le
traitement des dossiers en fonction du type de demande de
financement. Ces documents permettent d’avoir le maximum
d’informations sur la demande du client à traiter.
Lorsque la banque reçoit une demande de financement pour un
bon de commande elle demande à l’entreprise demandeuse de fournir
une fiche de présentation, les états financiers des trois derniers
exercices, les engagements et dépôts de l’entreprise dans les autres
banques, les attestations de bonne exécution des bons de commande
déjà réalisés, un courrier de demande de financement, le compte
d’exploitation du bon de commande, l’engagement irrévocable de
domiciliation des règlements du bon de commande, les factures pro-

66
forma des fournisseurs et la liste des fournisseurs. L’analyste crédit
reçoit ces documents pour monter le dossier de crédit et cherche des
informations dans chacun d’eux.
Dans la fiche de présentation il cherche des informations sur le
client, ses fournisseurs, sa clientèle, son chiffre d’affaires, l’équipe
dirigeante, des informations de base sur le client. Dans les attestations
de bonne exécution il cherche à savoir si le client a eu auparavant à
exécuter un bon de commande pour avoir une idée de son expertise.
Dans le compte d’exploitation relatif à la commande, l’analyste crédit
cherche à connaître les dépenses liées au bon de commande et la
marge que l’entreprise va dégager. Ces documents lui donnent des
informations de base sur le marché à financer.
Dans les états financiers il regarde le bilan ou il dégage la
structure financière de l’entreprise, c’est-à-dire les fonds propres, le
BFR (besoin en fond de roulement), le FR (fond de roulement), la
trésorerie. A partir des fonds propres, il détermine son ratio de
solvabilité. Il regarde également les créances et l’actif immobilisé
surtout pour un client qui est dans le BTP (Bâtiment Travaux Publics).
Ensuite, il regarde le compte de résultat d’où il dégage les grandes
masses au niveau de l’activité afin de calculer les soldes
intermédiaires de gestion que sont la valeur ajoutée (VA), l’excédent
brut d’exploitation (EBE) et le résultat d’exploitation (RE), et ainsi de
procéder à l’analyse dans le temps et apprécier les différentes
variations de chaque élément.
Situation n°2 : Analyste sell-side, Société de Gestion Intermédiaire
L’analyste sell-side est employé dans une société de gestion
intermédiaire (SGI) qui travaille sur le marché financier. Son travail
consiste à analyser la situation d’une entreprise qui vient sur le marché
lever des fonds en vue de conseiller un titre à l’achat, à la vente ou à la
conservation. Son analyse s’appuie sur divers éléments au nombre
desquels figurent une note d’information, les états financiers des trois
dernières années, les procès-verbaux (PV) des assemblées générales
(AG) qui ont approuvé les comptes, les statuts de la société, les
rapports des commissaires aux comptes, les rapports de gestion de
l’entreprise, les rapports de notation. Il recueil des informations au
sein de chacun de ces documents.
L’analyste sell-side cherche dans la note d’information la
présentation de l’émetteur, la présentation de l’opération, la
présentation de la situation financière, la présentation des risques, la

67
présentation des commissaires aux comptes. Dans les PV des AG
approuvés il cherche à s’assurer que la société est gouvernée, et que
les états financiers sur lesquels il s’appuie sont des états approuvés par
l’AG. Il cherche également à savoir s’il y a des résolutions
particulières telles que des augmentations de capital, ou un
fractionnement en vue. Dans le rapport des commissaires aux comptes
(CAC), il cherche à savoir si ces derniers ont approuvé les comptes
sous réserve ou sans réserve et, en cas de réserves, de savoir si ces
réserves sont de nature à entacher l’opération? Il regarde également le
commentaire des CAC sur les créances douteuses, il cherche à
comprendre la situation. Dans les rapports de notation, l’analyste sell-
side cherche à connaître la probabilité de risque de défaut de
l’entreprise.
Dans les états financiers, il s’intéresse au bilan, au compte de
résultat et aux cash-flows à partir desquels il calcul des ratios. Dans le
bilan, il regarde les actifs, les dettes et les capitaux propres. Il étudie
les dettes et les capitaux propres pour comprendre la structure
financière de l’entreprise. Il calcule le ratio de solvabilité et le ratio de
liquidité. A partir du compte de résultat, il voit la profitabilité à partir
du résultat net (RN) et met l’accent sur la composition du résultat net.
Il étudie la variation des postes qui participent à sa formation et
apprécie leur évolution dans le temps. Il calcul le ratio de profitabilité
de l’entreprise. Ensuite, il regarde les cash-flows des opérations pour
détecter d’éventuels problèmes de fonds de roulement, les cash-flows
d’investissement pour voir si la société est en croissance, les cash-
flows de financement pour voir si la société est endettée et les « cash-
flow for firm » pour voir la capacité de paiement de dividendes de
l’entreprise.
Situation n°3 : Analyste buy-side, Analyste dans une société de
gestion de fonds d’investissement
L’analyste buy-side est employé dans une société de gestion de
fonds d’investissement qui travaille dans un cadre où les entreprises
peuvent éventuellement être cotées en bourse. Il agit en tant
qu’investisseur. Son travail consiste à analyser la situation d’une
entreprise dans laquelle sa société doit prendre des parts. Pour son
analyse, il utilise divers documents que lui fournit cette entreprise,
notamment une note de présentation de l’entreprise, les statuts de la
société, les états financiers sur trois ou cinq ans, les conventions que
l’entreprise a signé avec des tiers, les documents de constitution, les

68
PV des AG, les rapports de gestion, le rapport d’audit fait à l’initiative
de son entreprise.
A l’aide des documents de constitution et les statuts, il cherche
des informations sur l’ensemble des actionnaires. Qui sont-ils ? quelle
est leur part dans le capital. Dans la note de présentation, il cherche
des informations sur l’entreprise, l’équipe dirigeante, la concurrence.
Dans les conventions que l’entreprise a signé avec des tiers, il cherche
des informations relatives aux engagements que pourrait avoir
l’entreprise. Dans les PV des AG, il cherche à s’assurer que les états
financiers qui lui sont présentés, sur lesquels il s’appuie, sont des états
approuvés par l’AG. Dans le rapport de gestion, il cherche des
informations susceptibles de lui permettre de comprendre certains
chiffres que présentent les états financiers. Dans les états financiers, il
se sert du bilan, du compte de résultat, du compte de trésorerie pour se
faire une idée sur les performances de l’entreprise et construire un
modèle financier. Pour ce qui est du rapport d’audit demandé par sa
structure, il y cherche des informations relatives à la situation réelle de
l’entreprise.
3.3.2. Situation du processus qui préside à l’analyse d’un financement
Situation n°1 : Analyste crédit, banque commerciale
Pour ce qui est du processus de l’analyse du financement,
L’analyste crédit procède d’abord à l’analyse de la transaction. Il
structure la transaction en fonction des informations recueillies dans
chacun des documents fournis par l’entreprise puis les analyse. Il
consulte la fiche de présentation, les engagements et les dépôts de
l’entreprise dans les autres banques, les attestations de bonne
exécution des bons de commande déjà réalisés, le courrier de demande
de financement, le compte d’exploitation relatif à la commande,
l’engagement irrévocable de domiciliation des règlements du bon de
commande, les factures pro-forma des fournisseurs et la liste des
fournisseurs.
Ensuite, à partir des états financiers, il procède à une analyse
financière. L’analyste crédit fait un retraitement du bilan et du compte
de résultat à l’aide d’un logiciel qu’il appelle « le dépouillement ». En
effet, c’est un fichier Excel dans lequel il entre les informations du
compte de résultat et du bilan tels qu’ils lui sont donnés. Ce logiciel
sort les ratios dont il a besoin pour son analyse. En ce qui concerne le

69
compte de résultat, le dépouillement lui permet de pouvoir dégager les
grandes masses c’est-à-dire, au niveau de l’activité, de pouvoir
calculer les soldes intermédiaires de gestion (VA, EBE, RE) Ensuite,
il procède à une analyse dans le temps afin d’étudier les variations.
Pour ce qui est du Bilan, il dégage la structure de l’entreprise c’est-à-
dire les fonds propres (FP), le besoin en fonds de roulement (BFR), le
fonds de roulement (FR), la trésorerie. Ensuite il fait parfois une étude
du terrain pour corroborer ce que disent les états financiers.
Situation n°2 : Analyste sell-side, société de gestion intermédiaire
L’analyste sell-side analyse chacun des documents auxquels il a
recours pour son analyse (une note d’information, les états financiers
des trois dernières années, les PV des AG qui ont approuvé les
comptes, les statuts de la société, les rapports des commissaires aux
comptes, les rapports de gestion de l’entreprise, les rapports de
notation). Ensuite, il fait une analyse financière à partir des états
financiers. Dans les états financiers, il analyse différents postes du
bilan et du compte de résultat à la lumière du rapport de gestion. Puis,
il calcule, à l’aide d’un logiciel informatique, des ratios selon les
besoins de son analyse, exclusivement à partir des états financiers. Il
essaie parfois d’entrer en contact avec le management de l’entreprise
pour avoir un complément d’information. Eventuellement il
réorganise les états financiers en synthétisant le plus possible les
informations en ne présentant que ce qui est important.
Situation n°3 : Analyste buy-side, analyste dans une société de gestion
de fonds d’investissement
L’analyste buy-side, dans le cadre de son processus, analyse tous
les supports qu’il a reçu en vue de la structuration de la transaction.
Ensuite, il confronte les états financiers aux autres documents reçus
tels que le rapport de gestion et le rapport d’audit. Il conçoit un
modèle financier dans lequel il entre plusieurs données brutes issues
du bilan, du compte de résultats et des prévisions qu’il effectue. Il
effectue une visite de l’entreprise pour avoir un complément
d’information.
4.3.3- Situation de l’importance de l’information comptable dans la
prise de décision
Situation n°1 : Analyste crédit, banque commerciale
Pour l’analyste crédit, l’analyse financière n’est pas actuellement
le socle de la prise de décision d’octroi de crédit à un client.

70
L’information comptable n’est pas déterminante véritablement pour
pouvoir accorder du crédit dans tous les cas de crédit et notamment
pour le financement d’un bon de commande. Elle donne juste une
orientation. Ce qui est plus déterminant c’est l’analyse de la
transaction, la structuration de la transaction. Pour lui, il n’est pas au
même niveau d’information que le management de l’entreprise, aussi
il ne sait pas s’il a les bons chiffres comptables donc il ne peut pas
trop s’appuyer dessus.
Situation n°2 : Analyste sell-side, Société de Gestion Intermédiaire
Pour l’analyste sell-side, Les états financiers ne sont pas parlants.
Les chiffres, il faut les faire parler. Pour cela, il faut aller chercher
d’autres informations. Pour comprendre par exemple ce qui est dans
les immobilisations corporelles il faut aller ailleurs, dans les rapports
des commissaires aux comptes, les rapports de gestion. Ce sont des
documents qu’il peut regarder en complément. Pour lui, les
informations issues de ces documents viennent compléter
l’information comptable qui à elle seule n’apporte pas l’information
nécessaire à la prise de décision.
Situation n°3 : Analyste buy-side, analyste dans une société de gestion
de fonds d’investissement
Pour l’analyste buy-side, Le recours aux états financiers est
systématique. C’est la base de travail. La comptabilité apporte la
matière brute que le financier retraite pour une finalité donnée. Sans
les états financiers, il ne sait rien et ne peux rien faire.

5. Les enseignements de l’étude


Le degré d’utilisation de l’information comptable nous permettra
de schématiser le processus de décision des analystes financiers et de
porter un jugement sur l’importance des chiffres comptables.
5.1- L’utilisation effective des chiffres comptables
Il est généralement admis que les analystes financiers recourent à
diverses sources d’informations pour effectuer leur diagnostic. Les
situations présentées donnent différents enseignements. Elles
montrent, qu’en effet, les analystes financiers utilisent diverses
sources d’information pour fonder leur décision. Dans chacune de ces
sources, ils cherchent des informations qui leur permettent
d’appréhender l’entreprise sous différents aspects. Malgré la diversité

71
des sources utilisées, l’un des enseignements de ces situations est que
les analystes utilisent les chiffres comptables.
Le tableau ci-dessous a pour objet de faire apparaître les
informations utilisées lors du processus de décision.

72
5.2- Schéma du processus de décision des analystes financiers
Analyste crédit Analyste sell-side Analyste buy-side

Nature Financement bancaire Financement par le Financement par les


du financement marché capitaux privés
Supports -Une fiche de -Une note - Une note de
d’analyse présentation de l’entreprise d’information présentation de l’entreprise
-Les états financiers des -Les états financiers -Les statuts de
3 derniers exercices des 3 dernières années l’entreprise
-Les engagements de -Les PV des AG qui -Les documents de
dépôt dans les autres banques ont approuvé les comptes constitution de l’entreprise
-Les attestations de -Les statuts de la - Les états financiers
bonne exécution des bons de société sur les 3 ou 5 ans dernières
commande (BC) déjà réalisés - Les rapports des années
-Le compte commissaires aux comptes - Les conventions de
d’exploitation de bon de - Les rapports de l’entreprise avec des tiers
commande gestion de l’entreprise - Les PV des AG
-L’engagement - Les rapports de - Les rapports de
irrévocable de domiciliation notation gestion,
des règlements du (BC)
- Les rapports de la - Le rapport d’audit
-Les factures pro-forma commission bancaire si demandé par l’entreprise de
des fournisseurs c’est une banque. l’analyste

73
-La liste des
fournisseurs
Analyses 1. Analyse de la 1. Analyse 1. Analyse de la
effectuées transaction : structuration du documentaire transaction
prêt 2. Analyse financière 2. Modélisation
2. Analyse financière financière
Informati 1. Analyse de la 1. Analyse 1. Analyse de la
ons utilisées transaction documentaire transaction
aux différentes -La fiche de présentation -Une note - La note de
étapes d’information présentation de l’entreprise
-Les engagements et
dépôt de l’entreprise dans les -Les PV des AG qui -Les statuts de
autres banques ont approuvé les comptes l’entreprise
- Les attestations de -Les statuts de la - Les documents de
bonne exécution des bons de société constitution de l’entreprise
commande déjà réalisés -Les états financiers - Les états financiers
- Le courrier de des 3 dernières années sur les 3 ou 5 ans dernières
demande de financement - Les rapports des années
-Le compte commissaires aux comptes - Les conventions que
d’exploitation du bon de - Les rapports de l’entreprise a signé avec des
commande gestion de l’entreprise tiers
- L’engagement - Les rapports de - Les PV des AG
irrévocable de domiciliation notation - Les rapports de
des règlements du bon de gestion,
- Les rapports de la
commande
commission bancaire si - Le rapport d’audit
- Les factures pro-forma demandé par l’entreprise de

74
des fournisseurs c’est une banque. l’analyste Source : l’auteur de
-La liste des cet article
fournisseurs.
2. Analyse financière 2. Modélisation
-Le bilan 2. Analyse financière financière
-Le compte de résultat -le bilan -Le bilan
-le compte de résultat -Le compte de résultat
L’import L’analyse financière Les états financiers Le recours aux états
ance de n’est pas le socle aujourd’hui sont primordiaux pour financiers est systématique.
l’information d’une décision pour accorder comprendre la situation de C’est la base de travail. Sans
comptable dans du crédit à un client. Elle l’entreprise, mais ne sont les états financiers l’analyste
la prise de donne une indication, n’est pas pas suffisants, il faut ne peut prendre aucune
décision déterminante de l’octroi du compléter par le rapport de décision.
crédit. Ce qui est plus gestion, le rapport des
déterminant est l’analyse de la CAC, le rapport de
transaction, la structuration du notation.
prêt.

75
Il ressort du processus de décision des analystes qu’ils ont
chacun recours à différentes informations lors de l’analyse d’un
financement en vue d’une prise de décision. Malgré quelques
informations spécifiques à chaque catégorie d’analyste, tous se
rejoignent dans l’utilisation de certaines informations au nombre
desquelles les chiffres comptables. Les étapes de l’analyse du
financement ne divergent pas beaucoup d’un analyste à un autre. Deux
étapes essentielles ont pu être identifiées pour chaque analyste. La
première étape pour faire intervenir des informations spécifiques au
type de financement analysé par chacun des analystes. Cependant, la
deuxième étape de l’analyse fait intervenir pour tous, l’information
comptable.
5.3- L’importance de l’information comptable dans la prise
de décision
Les situations présentées montrent que l’information comptable
n’est pas déterminante dans la décision d’octroi d’un financement
bancaire. Cette situation se justifie par le fait que la banque anticipe
un comportement opportuniste des dirigeants. Les chiffres comptables
sont considérés comme manipulés par l’entreprise. L’analyste préfère
ainsi fonder sa décision sur l’analyse de la transaction. Pour ce qui est
du financement par le marché, les chiffres comptables sont clés pour
comprendre la situation de l’entreprise. L’information comptable est
même primordiale mais à elle seule ne fournit pas l’information
suffisante. Il faut la compléter par d’autres informations. Enfin, pour
ce qui est du financement par les capitaux privés, l’information
comptable est indispensable mais elle ne constitue pas l’essentiel de
l’information pour la prise de décision. Elle doit être complétée par
d’autres informations qui comptent autant. Dans ce type de
financement, l’apporteur de capital en vue d’anticiper un éventuel
comportement opportuniste des dirigeants fait un audit de la société
afin de se faire sa propre idée de la situation de l’entreprise.

6. Conclusion
Les travaux portant sur la pertinence de l’information comptable
ont porté sur son utilité pour la prise de décision des investisseurs de

76
diverses manières. Certains ont analysé la relation de causalité qui
pourrait exister entre les chiffres comptables et la valeur de
l’entreprise. D’autres, ont étudié la réaction des investisseurs à la
publication des chiffres comptables. Des différents résultats obtenus
par les études a été déduite l’utilité des chiffres comptables pour la
prise de décision. Ainsi Casta (1977) parle d’utilité présumé des
chiffres comptables. Ces approches dans leur démarche, étudient le
comportement de l’ensemble des investisseurs. Elles déduisent ce
comportement de la capacité des chiffres comptables à rendre compte
du cours à un moment donné ou de la variation observé de variables
boursières.
Nous estimons qu’une analyse prenant en compte l’investisseur
en tant qu’individu donne plus d’éclairage sur l’utilité des chiffres
comptables pour sa prise de décision. Une telle approche est une
approche plus directe de l’utilité de l’information comptable car
orientée vers l’acteur dans son comportement pris individuellement.
C’est dans cette optique que s’inscrit cette étude exploratoire qui a
retenu comme cadre d’analyse la théorie de l’agence.
Le premier enseignement est que malgré la diversité des
informations auxquelles ils ont recours, les analystes utilisent les
chiffres comptables. Les apporteurs de capitaux ont un intérêt réel
pour les chiffres comptables. Le second enseignement est que l’octroi
du financement bancaire, qui est le mode de financement le plus
utilisé dans le contexte d’étude, n’est pas fondé en priorité sur les
chiffres comptables. Pour les deux autres modes de financement
(marché et capitaux privés) l’information comptable est insuffisante et
doit être complétée par d’autres informations. Cet enseignement nous
emmène à nous interroger sur les moyens de garantir la qualité de
l’information comptable mise à la disposition des investisseurs.

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Communications à des congrès


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Chapitres dans un ouvrage collectif


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de Comptabilité, contrôle de gestion et audit, (Ed. Colasse
B.), Economica, 103 – 114.

79
Annexes
Annexe 1 : Guide d’entretien
I- Thème 1 : Identité du répondant
1- Quelle a été votre parcourt académique ?
2- Quelle est votre profession ?
3- Quel est l’âge avez-vous?
4- Parlez-moi de votre expérience professionnelle. Les postes que
vous avez occupé, le nombre d’années d’expérience.

II- Thème 2 : Les informations qu’utilise le répondant et leur


finalité
5- Parlez-moi de votre travail.
6- Pouvez-vous me parler des étapes qui président à l’analyse du
financement : les procédures, les supports.
7- A quoi vous sert chacun des supports cités?

III- Thème 3 : L’importance de l’information comptable


8- Que représente pour vous l’information comptable au nombre
de toutes les informations que vous utilisez pour vos analyses ?

Annexe 2 : Grille d’analyse

80
Grille d’analyse

1er Thème : L’utilisation de l’information comptable


Sous thème : Supports d’analyse utilisées

2ème Thème : Le processus de l’analyse du financement

1.1 Sous thème : Le type d’analyse effectué


1.2 Sous thème : Le type d’information utilisé pour chaque type
d’analyse

3ème Thème : L’importance des chiffres comptables pour la prise


de décision

81
LA PERTINENCE DE L’INFORMATION COMPTABLE
POUR LA PRISE DE DÉCISION AU SEIN DES
ENTREPRISES DE PETITE TAILLE

KOUMAGNANOU Komivi
Enseignant-chercheur
Université de Lomé
E-mail : kkomivi@gmail.comr

Résumé
Le présent article a pour objectif d’analyser la pertinence des
informations comptables pour la prise de décisions stratégiques au
sein de l’entreprise de petite taille. Les fondements théoriques de la
recherche reposent sur l’analyse des travaux portant sur l’utilité de
l’information comptable. Nous avons procédé à l’étude empirique à la
fois quantitative et qualitative, puis les données collectées ont été
analysées. Les résultats montrent que la plupart des PE produisent
l’information comptable à partir des divers documents élaborés
(Cahiers des recettes et dépenses, cahiers de tenue de compte caisse ou
banque, etc.) et les utilités de l’information comptable produite sont
multiples. Elle est utilisée pour la prise des décisions stratégiques.
Mots-clés : Prise de décision, Information comptable, PE.
Abstract
The purpose of this article is to analyze the relevance of
accounting information for strategic decision-making within the small
enterprise. The theoretical foundations of the research are based on the
analysis of work on the usefulness of accounting information. We
conducted the empirical study, both quantitative and qualitative, and
the data collected were analyzed. The results show that most small-
business produce accounting information from the various documents
developed (receipts and expenses books, bank or bank account books,
…) and the uses of the accounting information produced are multiple.
It is used for making strategic decisions.
Keywords: Decision making, Accounting Information, SE.

82
1. Introduction
La fin du vingtième siècle et le début du vingt-unième siècle ont
été marqués par une prise de conscience très forte de la nécessité
d’élaborer des normes comptables y compris pour les entreprises de
petite taille (Colasse, 2009). Cette prise de conscience est due
essentiellement à deux constats. D’abord l’environnement
économique des entreprises de petite taille est de nos jours marqué par
des mutations fréquentes dues aux phénomènes de mondialisation des
échanges et d’intégration économique (Bigou-Laré, 2004). Puis, pour
les entreprises de petite taille, il existe un besoin de maîtrise de
l’information et de prise de décisions stratégiques de plus en plus
fréquentes (Ngantchou, 2011). Ceci conduit à nous interroger sur
l’apport des modèles comptables et financiers traditionnels quant à
leur capacité à fournir des informations pertinentes pour la prise de
décisions stratégiques.
La littérature avance souvent l’existence dans les petites
entreprises (PE) d'une vision réductrice du système de données
comptables. Les dirigeants de PME s’appuieraient plutôt sur les
sources informelles que sur les sources formelles, sur les sources
externes que sur les sources internes, sur les informations non-
financières que sur les informations financières (Bescos et Mendoza,
1998 ; Beldi et Cheffi, 2005 ; Mintzberg, 2006 ; Vallerand et al.,
2008). Mais la faible utilisation de l’information comptable dans les
petites entreprises (PE) ne résulte pas systématiquement d'un choix
(Chapellier, 2003). Elle est en partie liée au fait que le dirigeant n’a
pas toutes les clés pour tirer profit de la valeur potentielle de cette
information, ou au fait que les informations comptables utiles ne sont
pas présentes dans son entreprise au bon moment.
Or on remarque que, quel que soit le type de décision à prendre,
le problème relatif à la prise de décisions stratégiques se pose
primordialement en terme de pertinence des informations mises à la
disposition des partenaires. Sur le plan financier, la comptabilité
générale, principale source d’information orientée vers l’extérieur
(Pigé, 2000), occupe une position centrale dans la mise en œuvre des
décisions stratégiques. Ainsi, dans les grandes entreprises, le système
comptable est très complexe afin d’assurer un niveau élevé de fiabilité

83
et de contrôle des informations. Par contre, il n’en est pas de même
dans les petites entreprises. Le système comptable y est très allégé et
offre moins de garantie de fiabilité. Cette situation est à la base des
relations difficiles entre les petites entreprises, les banques et les
administrations fiscales.
Le cadre d’analyse basé sur la pertinence des informations
comptables a très rarement abordé la question en matière de prise de
décisions stratégiques au sein des PME surtout dans un contexte
d’harmonisation et de changement comptables. Cet article a pour
objectif d’évaluer le comportement des PME en matière de production
de l’information comptable pour la prise de décision. En conséquence,
de répondre à la question : les données comptables produites au sein
des petites entreprises (PE) sont-elles pertinentes pour la prise de
décisions stratégiques ?
Cet article comporte quatre parties : une analyse théorique de la
production de l’information comptable à son utilité pour la prise de
décisions : une analyse théorique (1.), la méthodologie appliquée sur
le terrain (2.), la présentation des résultats (3.) et enfin la discussion
des résultats (4.).
.

2. De la production de l’information comptable à son utilité pour


la prise de décisions : une analyse théorique

Selon Bruns et McKinnon (1993), l’information comptable se


définit comme étant une donnée chiffrée relative à un phénomène
économique passé, présent ou futur, d’une entité, produite en
respectant la réglementation. De cette définition on peut en déduire
que les informations sont destinées à prendre les bonnes décisions
économiques puisqu’elles montrent si l’utilisation des ressources dans
le passé a été rationnelle et optimale. L’information prévisionnelle
vise à valoriser et améliorer les performances et les activités
économiques dans l’avenir. Elle met en exergue également
l’importance macroéconomique de l’information comptable et
l’influence gouvernementale et fiscale sur celle-ci.
Pour Walton (2008) l’information comptable est un produit qui a
pour objectif principal de fournir des informations utiles afin de

84
satisfaire les besoins des utilisateurs dans les meilleurs délais et au
moindre coût. Cet auteur souligne l’importance microéconomique, à
influence commerciale, des données comptables. Les états financiers
n’ont qu’un seul objectif, celui de fournir une information qui soit
utile pour que les utilisateurs prennent des décisions d’investissement,
de crédit et autres décisions similaires d’affectation de ressources
(Bigou-Laré, 2004).
Au vu de ces définitions, on constate que chaque pays a son
propre système comptable qui s’inscrit dans son environnement
politique, juridique, social, économique, culturel et historique.
Néanmoins, les différents systèmes comptables peuvent être inspirés
par deux grands modèles comptables : le modèle anglo-saxon et le
modèle continental.

2.1. Les modèles comptables dominants


Comme le souligne Gouadain (2000), l’exercice de
positionnement d’un référentiel comptable suppose de choisir entre
deux approches : le modèle anglo-saxon et le modèle continental.
Dans le modèle anglo-saxon basé sur le système libéral avec des
marchés de capitaux très actifs, les informations comptables sont
devenues des éléments essentiels pour les investisseurs. Les cadres
conceptuels comptables du modèle anglo-saxon stipulent que
l’objectif de la comptabilité est de fournir des informations intéressant
ses utilisateurs potentiels et plus particulièrement les investisseurs
(Nobes, 1998). Ainsi, les principes comptables fondamentaux
précisent que les états financiers des entreprises doivent fournir des
informations utiles aux personnes qui prennent des décisions
notamment aux investisseurs actuels et potentiels, aux créanciers et à
tout autre décideur économique semblable. De même, le cadre
conceptuel du modèle anglo-saxon indique que les états financiers ont
pour but de fournir une information sur le niveau et l’évolution de la
situation financière ainsi que sur la performance de l’entreprise. Les
systèmes comptables sont de type microéconomique à influence
commerciale (Colasse, 2009 ; Nobes, 1998). Ces informations doivent
être utiles pour des utilisateurs potentiels qui ont à prendre des
décisions économiques (Hoarau, 1995).

85
Quant au modèle continental adopté par les pays qui ont une
gestion dite centralisée, la comptabilité sert surtout les intérêts de
l’Etat, et vise notamment à diriger et à orienter la politique
économique du pays. En effet, la tenue d’une comptabilité financière
est obligatoire. Les systèmes comptables sont de type
macroéconomique à influence gouvernementale et fiscale (Colasse,
2009 ; Nobes, 1998). Dès lors chaque entreprise dispose
nécessairement de ce système d’information. Les informations
comptables dans ce modèle sont orientées vers plusieurs catégories
d’utilisateurs. L’information comptable permet de retracer l’activité de
l’entreprise et ses relations avec ses partenaires.
Au regard des deux modèles, on peut considérer que le
référentiel normatif n’est jamais neutre et qu’il est toujours fondé sur
une théorie de l’entreprise et une certaine conception de sa
gouvernance (Charreaux, 1997). Le référentiel du Système Comptable
de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des
Affaires (Syscohada) marque l’émergence d’une conception
actionnariale et une conception partenariale de la gouvernance. Dans
une vision partenariale, les données comptables permettent le
règlement des conflits potentiels entre les parties prenantes (Pigé,
2013). La structure des soldes intermédiaires de gestion du Syscohada
est fondée sur la volonté de représenter la répartition de la richesse
créée entre l’ensemble des parties prenantes. Dans une vision
actionnariale, l’information financière est produite par les dirigeants et
les données comptables doivent permettre un calcul rationnel de la
part des actionnaires (Charreaux, 1997).
C’est sans doute sous cette influence des modèles comptables
que les pays de l’Ohada ont adopté un traité instituant notamment un
cadre comptable harmonisé. Ce dernier est entré en vigueur dans la
plupart des pays signataires et prévoit un système comptable pour les
petites entreprises (Pérochon 2009 ; Gouadain et Wade 2009).

2.2. Le système comptable des PE selon le Syscohada


Le besoin d’un système de comptabilité simplifié, à partie
double, au profit des organisations informelles, se justifie en partie par
la diversification de plus en plus poussée des activités que ces

86
organisations exercent et qui implique la nécessité pour elles de
disposer d’informations financières et comptables plus différenciées
(Gouadain, 2000).
A ce besoin de différenciation des informations comptables et
financières s’ajoute la nécessité pour les organisations de petite taille
(généralement informelles) de remplir les obligations légales et
réglementaires, précise le même auteur. Il importe en effet de rappeler
l’une des dispositions du règlement relatif au droit comptable des
Etats membres de l’Ohada : « sont astreintes à la mise en place d’une
comptabilité, dite comptabilité financière, les entités soumises aux
dispositions de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial, de
l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du
groupement d’intérêt économique et de l’Acte uniforme relatif au
droit des sociétés coopératives, les entités publiques, parapubliques,
d’économie mixte et, plus généralement les entités produisant des
biens et des services marchands ou non marchands, dans la mesure où
elles exercent, dans un but lucratif ou non, des activités économiques
à titre principal ou accessoire qui se fondent sur des actes répétitifs, à
l’exception de celles soumises aux règles de la comptabilité
publique » (Syscohada 2017, p.13-14, art. 2). Le référentiel du
système comptable Ohada, mis en vigueur le 1er janvier 2018, prévoit
deux1 systèmes comptables auxquels les entités et les organisations
doivent se conformer, selon leur taille et l’envergure de leurs
activités : le système normal et le système minimal de trésorerie.
Le système minimal de trésorerie concerne les petites entités
dont le chiffre d’affaires hors taxes annuel est, selon le cas, inférieur
aux seuils suivants :
- soixante millions de F CFA (60 000 000 FCFA) ou
l’équivalent dans l’unité monétaire ayant cours légal dans
l’Etat partie, pour les entités de négoce ;

1
Le référentiel du système comptable antérieur prévoyait trois différents
systèmes auxquels les entreprises et les organisations doivent se conformer, selon
leur taille et le volume de leurs activités : le système normal, le système allégé et le
système minimal de trésorerie.

87
- quarante millions de F CFA (40 000 000 FCFA) ou
l’équivalent dans l’unité monétaire ayant cours légal dans
l’Etat partie, pour les entités artisanales et assimilées ;
- trente millions de F CFA (30 000 000 FCFA) ou l’équivalent
dans l’unité monétaire ayant cours légal dans l’Etat partie,
pour les entités de services.
Il importe de remarquer que pour les PE en général, caractérisées
par une très petite taille et un faible volume des transactions, le
système normal du Syscohada peut s’avérer très complexe et donc non
adapté. L’une des réformes du Syscohada révisé, applicable à partir du
1er janvier 2018, est de prévoir un cadre dérogatoire dans lequel
peuvent s’inscrire les petites entités réalisant des recettes maximales
qui ne sont pas supérieures aux seuils fixés.
Ce système repose sur l’enregistrement, au jour le jour, de toute
opération ayant pour conséquence une modification de la trésorerie. Il
s’agit en d’autres termes de toutes les dépenses et les recettes qui
affectent les avoirs de l’entreprise, qu’il s’agisse de la caisse, d’un
compte bancaire ou d’un compte postal. Ces enregistrements
conduisent nécessairement à l’établissement d’un état des recettes et
des dépenses dégageant le résultat de l’exercice. Ce résultat est pris en
compte dans l’établissement de la situation patrimoniale de
l’organisation.
Le système minimal de trésorerie repose sur la tenue correcte des
livres de recettes-dépenses et d’un grand livre comprenant très peu de
comptes. Comme tout système comptable, la mise en œuvre du
système minimal de trésorerie implique le respect scrupuleux de
quelques exigences minimales vis-à-vis de la comptabilité. Elles se
résument pour l’essentiel aux livres de recettes-dépenses (un ou
plusieurs), ainsi qu’aux comptes patrimoniaux et de gestion. Dans ce
cadre le système minimal de trésorerie exige que toutes les opérations
caractérisant les activités réelles de l’organisation (PE) soient
enregistrées dans les livres de recettes-dépenses (sous forme de
journal) et ce, dans l’ordre chronologique. En outre, un nombre
minimum de comptes doivent être opérationnels pour le bon
fonctionnement du système. Il s’agit notamment des comptes suivants
: caisse, capital, résultat, ventes, autres produits, achats, autres

88
charges. En cas de nécessité, il est possible de créer d’autres comptes
de trésorerie.
Notons que les comptes du système minimal de trésorerie tels
que décrits, sont favorables au respect du principe de la partie double
dans l’enregistrement des opérations comptables. Le respect de ce
principe permet au dispositif comptable de générer des états financiers
fiables, sincères, et de servir par conséquent d’instrument de preuve,
d’instrument d’information des tiers et d’instrument de gestion.

1.3. Les fondements théoriques de l’utilité de l’information


comptable pour les PE
Historiquement, la réflexion académique relative à l’utilité de
l’information financière a connu trois approches majeures.
L’approche normative s’intéresse aux caractéristiques de
l’information comptable (Obert, 2003 ; Colasse, 2006). Il s’agit de
voir, si du point de vue de la forme, le contenu des états financiers est
équivalent aux normes. Ensuite, cette approche consiste
essentiellement à analyser le contenu des dispositions des référentiels
dominants.
L’approche utilité ou pertinence de l’information comptable pour
le dirigeant analyse les besoins des managers en information
comptable (Ball et Brown, 1968 ; Bouattour, 2012). A ce niveau, le
bilan des recherches empiriques réalisées sur le thème aboutit en effet
à des conclusions assez nuancées. Les résultats souvent partiels,
parfois contradictoires, n'apportent pas de connaissances cumulatives
et généralisables (Chapellier, 2003). Peu d'études confirment
l'hypothèse de la non-utilisation absolue des données comptables dans
les PE (Gasse, 1989). Elles révèlent le plus souvent l'existence d'une
tendance certes limitée de la production des données comptables. La
vision des PE est orientée vers la production des documents
obligatoires, dans des délais longs et dans le seul but de satisfaire aux
obligations imposées par l'administration fiscale.
Enfin, l’approche comportementaliste des dirigeants en face de
l’information comptable se concentre sur la réaction du dirigeant en
face de l’information comptable (Degos, 1993). Ces travaux
soulignent que certains dirigeants de PE ont un comportement que l'on

89
pourrait qualifier de passif face aux données comptables. Les
recherches mettent en avant les difficultés du couplage des processus
décisionnels peu ou pas structurés et l'usage d'outils structurants des
PE (Chapellier, 2003). Donc la vocation initiale des données
comptables serait celle d'une utilisation par des décideurs situés dans
des environnements relativement stables et générateurs d'événements
plutôt répétitifs (Dupuy, 1987). En ce sens, la littérature démontre que
l'information comptable peut, sous certaines conditions, être utile au
dirigeant de PE (Chapellier, 2003).
C’est dans ce contexte que les pays de l’espace Ohada ont
élaboré le cadre comptable uniforme pour cette catégorie d’entreprise.
Il est à noter que le besoin d’harmonisation et de changement
comptables s’impose à toutes entreprises de petite taille qui ont été
amenées déjà par le passé, à subir d’harmonisation et de changement
comptables. Ainsi, il convient d’étudier l’incidence du cadre
comptable des PE sur les utilisations de l’information comptable.

3. La méthodologie appliquée sur le terrain


Afin d’apporter des réponses à la question de recherche, une
approche mixte prenant en compte l’approche quantitative et
qualitative a été utilisée. Il s’agit d’une collecte de données par
questionnaire et suivi après d’un entretien pour comprendre certains
résultats obtenus. L'analyse des données quantitatives est descriptive
et multi variée. L'analyse des données qualitatives a consisté à la
transcription et le codage des interviews suivi d'une analyse de
contenu.
3.1. L’étude quantitative
Elle a été effectuée sur un échantillon de 53 PME/PMI. Pour la
constitution de l'échantillon de l’étude quantitative, nous avons utilisé
le répertoire des entreprises nouvellement élaboré par le Groupement
Togolais de Petites et moyennes Entreprises / Petites et Moyennes
Industries (GTPME/PMI). Il contient les PME/PMI ayant adhéré au
groupement jusqu’en juin 2016. Il s’agit de cent vingt-sept (127)
PME/PMI réparties sur toute l’étendue du territoire togolais. Pour la
sélection des entreprises de l’échantillon, les entreprises ayant leur
siège social à Lomé au nombre de cent dix-huit (118) PME/PMI sont

90
considérées. Elles sont ensuite classées en deux catégories : celles qui
présentent leurs états financiers selon le système normal ou allégé
(soixante-cinq entreprises) et celles qui présentent leurs états
financiers selon le système minimal de trésorerie (cinquante-trois
entreprises). Etant donné que notre article porte sur les PE utilisant le
système minimal de trésorerie, nous avons retenu les cinquante-trois
(53) entreprises sur la base des données du Groupement Togolais de
Petites et moyennes Entreprises / Petites et Moyennes Industries.
Le questionnaire est un questionnaire psychométrique élaboré à
partir de la littérature et des documents du Syscohada relatifs au
système minimal de trésorerie. Il contient des questions pour
lesquelles les répondants ont indiqué leur degré d’accord sur une
échelle de Likert à trois (3) points. Il est administré de deux (2) façons
dépendamment de la disponibilité et du choix du répondant : soit en
face à face dans un lieu à convenance du dirigeant des PE, soit remis
aux dirigeants de la main à la main pour être retiré quelques jours plus
tard. La collecte a duré un (1) mois et demi pour limiter l’effet de
contamination. Au cours de cette période, sur les cinquante-trois (53)
questionnaires distribués, quarante-trois (43) questionnaires ont été
collectés et ont fait l’objet de l’analyse des données.
Les réponses régulières ont été saisies à partir du logiciel Epi
data dans un programme conçu à cet effet. Le traitement des données
a consisté à mettre sous forme exploitable les données recueillies au
cours de l’enquête afin de favoriser l’analyse des résultats. Plusieurs
étapes ont été nécessaires pour aboutir aux résultats exploitables.
Après avoir recueilli les quarante-trois (43) questionnaires
régulièrement remplis, des scores ont été attribués aux modalités de
l’échelle de Likert utilisé. Ainsi pas d’accord correspondait à la note
1, indifférent à 2, d’accord à 3. Et enfin les résultats ont été générés en
tableaux simples, en tableaux croisés avec le logiciel SPSS puis
analysés et interprétés. Les tests de Student ont été ont été effectués
pour tester la significativité des moyennes calculées par rapport à 2
représentant la situation d’indifférence.

91
3.2. L’étude qualitative
L'étude qualitative a porté sur les PE au Togo avec une collecte
circonscrite à Lomé. Elle a touché cinq (5) PE identifiées sur le
principe de saturation (Yin, 1990). Leur sélection a suivi la technique
de boule de neige à partir des membres du Groupement Togolais des
Petites Moyennes Entreprises et Petites et Moyennes Industries.
La collecte des données qualitatives s’est effectuée par des
entretiens individuels approfondis à l'aide d'un guide semi structuré.
Au cours des entretiens, des questions ouvertes ont été posées afin de
permettre aux dirigeants interrogés de s’exprimer librement. Ainsi, des
questions touchant les raisons de l’utilisation des informations
comptables par les dirigeants de PE ont été abordées. Ces questions
ont permis également d’échanger avec les dirigeants sur l’utilisation
des informations comptables qu’ils détiennent et la manière dont ils en
prennent soins ou les utilisent pour se maintenir dans leur activité de
façon pérenne.
L'analyse des données qualitatives a consisté à transcrire et coder
les interviews et analyser le contenu. En effet, l’analyse qualitative, en
soi, est une démarche de recherche de sens (Paillé et Mucchielli,
2003) qui peut se poursuivre à l’aide de différents outils informatisés
ou non, ou de différents processus par lesquels le chercheur tente de
dégager le sens d’un corpus, d’une entrevue ou d’un texte. Le
processus de codage consiste à découper le contenu d'un discours ou
d'un texte en unités de sens (mots, groupes de mot ou phrase), pour
ensuite les regrouper et les classer dans des thèmes ou catégories après
la catégorisation. Celle-ci permet après une lecture rapide de quelques
deux (2) ou trois (3) interviews de repérer les thèmes, les sous-thèmes,
les évocations, les mots clés qui apparaissent le plus souvent dans les
expressions des dirigeants interrogés. A la lecture des entretiens,
chaque mot ou groupe de mots (unité de sens) se rattachant à ce thème
était souligné, comptabilisé et synthétisé en un sous-thème.

4. La présentation des résultats


Les résultats proviennent de quarante-trois (43) entreprises, sur
les cinquante-trois (53) sollicitées pour l’enquête, soit un taux de
retour d’environ 81%. Ces résultats portent sur les caractéristiques des

92
PME/PMI, les sources d’information comptables et l’utilisation des
informations comptables dans le cadre des prises de décisions
stratégiques au sein de ces entreprises.

4.1. Les caractéristiques des PE enquêtées


Six (6) paramètres ont été utilisés pour décrire le profil des
entreprises ayant constitué notre échantillon d’étude : la forme
juridique de l’entreprise, son secteur d’activité, l’expérience du
dirigeant, son sexe, son niveau d’instruction, son âge. Le tableau 1 ci-
dessous présente le résumé des données sur les trois premiers
paramètres.
Tableau 1 : Répartition des PME selon l’expérience suivant les
secteurs d'activités et la forme juridique
Tot
al Experien
ce
% n
SARL 4 2 22,5
6,5 0
SNC 4 2 17
Forme juridique de ,6
l'entreprise EURL 2 1 14
,3
EI 4 2 16,8
6,5 0
4 19,4
Ensemble
3

Com 6 2
18,6
merce 0,5 6
Indust 2 1
Secteur d'activité 23,55
rie 5,6 1
Servic 1
6 15,18
es 3,9
4
Ensemble 19,4
3
Source : données de l’enquête

Quatre (4) formes de statut juridique constituent notre


échantillon. Il s’agit des SARL (Société A Responsabilité Limitée),
des SNC (Société en Noms Collectifs), des EURL (Entreprise
Unipersonnelle à Responsabilité Limitée) et des EI (Entreprises
Individuelles). Les entreprises individuelles et les sociétés à
responsabilité limitée dominent notre échantillon et représentent

93
chacun 46,5% de l’échantillon soit une proportion cumulées de 93%.
Les entreprises ayant participé à notre enquête sont formées de 13,9%
d’entreprises de services, 25,6% d’entreprises de commerce et 60,5%
d’entreprises industrielles. Ces trois (3) secteurs sont les secteurs de
prédilection de la PME au Togo au regard des données de l’économie
togolaise. Les dirigeants des petites entreprises interrogés ont plus de
quatorze (14) ans d’expériences en moyenne. Ces résultats globaux
cachent des diversités selon les secteurs d’activités et la forme
juridique des entreprises interrogées.

Tableau 2 : Répartition des PE selon la qualité du répondant suivant


les secteurs d'activités et la forme juridique
Forme juridique de Secteur d'activité Ens
l'entreprise emble
S S E EI Com Ind S
ARL NC URL merce ustrie ervices
8 1 1 80,0 80,8 90, 8 83,
Masculin 5,0 00 00 9 3,3 7
Sexe
1 0 0 20,0 19,2 9,1 1 16,
Féminin 5,0 ,0 ,0 6,7 3

Inférieur au 4 1 0 40,0 57,7 27, 1 44,


Bac 5,0 00 ,0 3 6,7 2
Nivea
4 0 1 50,0 42,3 54, 3 44,
u d'étude du
BAC 0,0 ,0 00 5 3,3 2
dirigeant
Supérieur 1 0 0 20,0 0,0 18, 5 11,
au Bac 5,0 ,0 ,0 2 0,0 6

4 5 4 54 53 49 4 51
Age moyen 8 3 1 6
Source : données de l’enquête

Les résultats montrent que les PE sont plus rarement dirigées par
les femmes. Ces dernières représentent seulement 16,3% des
dirigeants de PE interrogés. Les PE enquêtées dont les dirigeants sont
de sexe masculin représentent 83,7% des entreprises interrogées. Les
résultats confirment l’hypothèse généralement admise qu’en Afrique
les femmes dirigent très souvent des entreprises de très petite taille en
termes d’effectifs.
L’analyse selon les secteurs d’activités montre la même
tendance. Parmi les PE enquêtées, celles qui sont dirigées par les

94
hommes représentent de 80,8% dans le commerce, 90,9% dans
l’industrie et 83,3% dans le service contre respectivement 19,2%,
9,1% et 16,7% qui sont managées par des femmes. Selon le statut
juridique nous remarquons que la tendance reste inchangée. Dans les
SARL, SNC et EI plus de 80% des PE enquêtées sont dirigées par des
hommes. Cette absence importante des femmes est très remarquable
dans les SNC et EURL où elles sont presque inexistantes dans la
direction.
D’après les données de notre étude consignées dans le tableau ci-
dessus, la majeure partie des entreprises sont dirigées par des
personnes âgées de quarante et un (41) ans ou plus. Leurs dirigeants
ont fait de formation. Sur le plan instruction, la majorité des dirigeants
de ces entreprises interrogées ont des niveaux de formation ne
dépassant pas le Bac (76,2%). Par contre au niveau des services,
environ 50% de dirigeants ont un niveau d’éducation supérieur au
BAC.

4.2. Les catégories d’informations comptables produites au


sein des PE
Pour identifier les catégories d’informations comptables
produites au sein des PE, nous avons établi une liste de documents que
les PE doivent élaborer. Ces documents sont mis en évidence grâce au
système minimal de trésorerie et la littérature. Les résultats montrent
que la plupart des PE produisent ces documents (tableau 3).

Tableau 3 : Types de documents élaborés par les PE


Réponses (%)
Items
Oui Non Total
Cahiers des recettes et dépenses 95,3 4,7 100
Cahiers de tenue des comptes caisse et/ou banque 83,7 16,3 100
Documents de prévision des ventes, achats et autres
14,0 86,0 100
charges et produits
Documents d’états financiers (bilan, compte de
100 0,0 100
résultat)
Documents pour calculer les différents coûts des
7,0 93,0 100
produits ou services de l’entreprise
Documents de suivi de certains compartiments de
16,3 83,7 100
l’activité de votre entreprise
Source : données de l’enquête

95
L’existence de ces documents montre que les PE produisent des
informations comptables. Les documents d’états financiers sont
élaborés par toutes les PE de notre échantillon. Ensuite, les cahiers des
recettes et dépenses et les cahiers de tenue des comptes caisse et/ou
banque sont tenus par plus de 80% des PE interrogées. Les autres
documents sont moins produits par les PE : pas plus de 17% des cas
interrogés. Le tableau 4 ci-après présente l’utilité des autres
documents dans le cadre de l’élaboration des états financiers.

Tableau 4 : Utilité des documents comptables pour l’élaboration


des états financiers
Intitulés des items Moyenne Ecart type P
Les cahiers des recettes et dépenses servent de
2,8 0,53 0,00
référence pour l’élaboration des états financiers
Les cahiers de tenue des comptes caisse et/ou
banque servent de référence pour l’élaboration 2,9 0,43 0,00
des états financiers
Les documents de prévision des ventes, achats et
autres charges et produits servent de référence 2,4 0,72 0,01
pour l’élaboration des états financiers
Les documents de suivi de certains
compartiments de l’activité de votre entreprise
1,6 0,86 0,01
servent de référence pour l’élaboration des états
financiers
Les documents pour calculer les différents coûts
des produits ou services de l’entreprise servent de 1,34 0,78 0,00
référence pour l’élaboration des états financiers
Source : données de l’enquête

Les PE trouvent que les documents tels que les cahiers des
recettes et dépenses, les cahiers de tenue des comptes caisse et/ou
banque, et les documents de prévision des ventes, achats et autres
charges et produits sont nécessaires à l’élaboration du bilan et du
compte de résultat, c'est-à-dire des états financiers. Il revient
maintenant d’analyser si ces informations sont utilisées dans leur
processus de prise de décisions stratégiques.

4.3. L’utilité des informations comptables au sein des PE au


Togo
Afin de se prononcer sur l’utilité des informations comptables au
sein des PE, il a été question d’apprécier l’importance des différents
documents pour la prise des décisions. Ces décisions concernent

96
l’achat, le choix des produits, l’analyse de la concurrence, la
réalisation des investissements. Le tableau 5 suivant montre l’utilité
des informations comptables dans le processus de prise de décisions
d’achat au sein des PE.

Tableau 5 : Utilité des informations comptables dans le processus de


prise de décisions d’achat
Intitulés des items Moyenne Ecart type P
Les cahiers des recettes et dépenses servent de
2,6 0,53 0,00
référence avant tout achat pour l’entreprise
Les cahiers de tenue des comptes caisse et/ou
banque servent de référence avant tout achat 2,4 0,83 0,02
pour l’entreprise
Les documents de prévision des ventes, achats et
autres charges et produits servent de référence 1,8 0,92 0,01
avant tout achat pour l’entreprise
Les documents pour calculer les différents coûts
des produits ou services de l’entreprise servent 1,9 0,76 0,03
de référence avant tout achat pour l’entreprise
Les documents de suivi de certains
compartiments de l’activité de votre entreprise
1,34 0,58 0,01
servent de référence avant tout achat pour
l’entreprise
Les documents d’états financiers (bilan, compte
de résultat) servent de référence avant tout achat 1,7 0,91 0,03
pour l’entreprise
Source : données de l’enquête

Les résultats de notre enquête (Cf. le tableau 5) et les tests de


comparaison de moyenne indiquent que les cahiers des recettes et
dépenses et les cahiers de tenue des comptes caisse et/ou banque sont
utilisés lors des prises de décisions d’achat. Les moyennes de ces
items sont supérieures et significativement différentes de 2. Par
contre, Les moyennes des autres items sont inférieures et
significativement différentes de 2. Ce qui veut dire que les PE n’ont
pas recours à ces documents (documents de prévision des ventes,
achats et autres charges et produits, documents pour calculer les
différents coûts des produits ou services de l’entreprise, documents de
suivi de certains compartiments de l’activité de votre entreprise,
documents d’états financiers) au moment de prendre des décisions
d’achat.

97
Tableau 6 : Utilité des informations comptables pour la prise de
décisions relative au choix des produits à vendre
Ecart
Intitulés des items Moyenne P
type
Les cahiers des recettes et dépenses servent
2,8 0,81 0,01
de référence avant toute décision
Les cahiers de tenue des comptes caisse
et/ou banque servent de référence avant 2,7 0,93 0,00
toute décision
Les documents de prévision des ventes,
achats et autres charges et produits servent 1,6 0,92 0,01
de référence avant toute décision
Les documents pour calculer les différents
coûts des produits ou services de
1,8 0,96 0,00
l’entreprise servent de référence avant toute
décision
Les documents de suivi de certains
compartiments de l’activité de votre
1,44 0,63 0,02
entreprise servent de référence avant toute
décision
Les documents d’états financiers (bilan,
compte de résultat) servent de référence 1,24 0,83 0,01
avant toute décision
Source : données de l’enquête

Les résultats de notre enquête présentés dans le tableau 6 et les


tests de comparaison de moyenne indiquent que les cahiers des
recettes et dépenses et les cahiers de tenue des comptes caisse et/ou
banque sont utilisés lors des prises de décisions relatives au choix des
produits à vendre. Les moyennes de ces items sont supérieures et
significativement différentes de 2. Par contre, Les moyennes des
autres items sont inférieures et significativement différentes de 2. Ce
qui veut dire que les PE n’ont pas recourt à ces documents (documents
de prévision des ventes, achats et autres charges et produits,
documents pour calculer les différents coûts des produits ou services
de l’entreprise, documents de suivi de certains compartiments de
l’activité de votre entreprise, documents d’états financiers) au moment
de prendre des décisions relatives au choix des produits à vendre.

98
Tableau 7 : Utilité des informations comptables pour la prise de
décisions concernant la concurrence
Intitulés des items Moyenne Ecart type P
Les cahiers des recettes et dépenses servent de
1,56 0,68 0,01
référence avant toute décision
Les cahiers de tenue des comptes caisse et/ou
1,48 0,84 0,00
banque servent de référence avant toute décision
Les documents de prévision des ventes, achats et
autres charges et produits servent de référence 1,36 0,89 0,00
avant toute décision
Les documents pour calculer les différents coûts
des produits ou services de l’entreprise servent 1,8 0,54 0,00
de référence avant toute décision
Les documents de suivi de certains
compartiments de l’activité de votre entreprise 1,7 0,88 0,01
servent de référence avant toute décision
Les documents d’états financiers (bilan, compte
de résultat) servent de référence avant toute 1,33 0,83 0,01
décision
Source : données de l’enquête
Les résultats de notre enquête (Cf. le tableau 7) et les tests de
comparaison de moyenne indiquent qu’en cas de prise de décisions
relatives à la concurrence, les PE ne font pas recourt aux informations
comptables (cahiers des recettes et dépenses, cahiers de tenue des
comptes caisse et/ou banque, documents de prévision des ventes,
achats et autres charges et produits, documents pour calculer les
différents coûts des produits ou services de l’entreprise, documents de
suivi de certains compartiments de l’activité de votre entreprise,
documents d’états financiers). Les moyennes des items sont
inférieures et significativement différentes de 2.

Tableau 8 : Utilité des informations comptables avant toute


décision d’investissement
Intitulés des items Moyenne Ecart type P
Les cahiers des recettes et dépenses servent
2,76 0,94 0,00
de référence avant toute décision
Les cahiers de tenue des comptes caisse
et/ou banque servent de référence avant 2,8 0,42 0,00
toute décision
Les documents de prévision des ventes,
achats et autres charges et produits servent 1,9 0,36 0,01
de référence avant toute décision
Les documents pour calculer les différents
2,2 0,85 0,00
coûts des produits ou services de l’entreprise

99
servent de référence avant toute décision
Les documents de suivi de certains
compartiments de l’activité de votre
1,4 0,64 0,02
entreprise servent de référence avant toute
décision
Les documents d’états financiers (bilan,
compte de résultat) servent de référence 2,3 0,74 0,01
avant toute décision
Source : données de l’enquête
Les résultats de notre enquête présentés dans le tableau 8 et les
tests de comparaison de moyenne indiquent que les cahiers des
recettes et dépenses, les cahiers de tenue des comptes caisse et/ou
banque, les documents pour calculer les différents coûts des produits
ou services de l’entreprise et les documents d’états financiers sont
utilisés lors des prises de décisions relatives au choix des produits à
vendre. Les moyennes de ces items sont supérieures et
significativement différentes de 2. Par contre, Les moyennes des
autres items sont inférieures et significativement différentes de 2. Ce
qui veut dire que les PE n’ont pas recourt à ces documents (documents
de prévision des ventes, achats et autres charges et produits,
documents de suivi de certains compartiments de l’activité de votre
entreprise) au moment de prendre des décisions relatives au choix des
produits à vendre.

5. La discussion des résultats


Les résultats de nos travaux montrent que les informations
comptables apportent une valeur ajoutée, à des degrés divers aux
différents processus de prise de décisions stratégiques au sein des PE.
Ceci va dans le même sens que les travaux d’Alves (2004). Pour lui,
les informations comptables doit fournir une information fiable pour
la prise de décisions stratégiques. Il note également qu’une
information comptable ne permet pas en soi de garantir la validité des
décisions prises. Les liens entre l’utilisation des informations
comptables et les processus décisionnels sont assez peu connus. Les
recherches menées dans ce domaine sont rares et tendent à démontrer
que les informations comptables sont finalement peu utilisées par les
décideurs (Alves, 2004 ; Chapellier, 2003).

100
Mintzberg (1973) identifient quatre situations dans lesquelles
l’information comptable est utile pour le processus décisionnel. Il
s’agit de la situation d’allocation de ressources ; de la situation de
règlement de conflit ; de la situation d’entrepreneur et de la situation
de négociation. Contrairement, Kaplan et Norton (1992) pensent que
la prise de décisions stratégiques ne prend pas en compte des données
prospectives.
Ces résultats contradictoires s’expliquent par le fait que les
processus de prise de décisions sont identifiés comme des maillons
faibles du management dans les PE. La prise de décision étant
centralisée dans les mains du seul dirigeant bien qu’il se fait entouré
par quelques collaborateurs qui n’ont généralement pas assez de
pouvoir de décision. La prise de décision se fonde beaucoup plus sur
les expériences passées que sur l’évaluation formelle des situations.
Nos résultats permettent d’affirmer que les PE ont recours aux
informations comptables dans le processus de prise de décisions
d’achat, d’investissement, de choix des produits à vendre. L’utilité de
l’information comptable pour la prise de décisions d’achat peut d’être
justifiée. En effet, les PE bénéficient une forme de soutien de la part
ses fournisseurs. Il s’agit des crédits fournisseurs. Donc pour garder
les relations avec ses fournisseurs, elles utilisent les cahiers des
recettes, des dépenses et les documents de tenue du compte ou du
compte banque afin de connaître le niveau de ses disponibilités.
Comme en témoigne les propos d’un dirigeant suivant : je demande
des conditions de crédits auprès de ces fournisseurs, donc il faut que
je sache la somme dont je dispose avant d’aller le voir.
La pertinence de l’information comptable pour le processus de
prise de décisions d’investissement peut s’expliquer dans un contexte
où les PE sollicitent du financement bancaire. C’est dans ce sens que
Francis et Schipper (1999) soulignent la pertinence d’une information
comptable peut être définie comme sa capacité à estimer la vraie
rentabilité d’une entreprise dans le cadre d’un financement. Les
institutions financières sont des acteurs particulièrement importants
dans la vie des PE. Pour financer leur besoin en fond de roulement
d’exploitation, les PE doivent compléter leurs ressources propres par
des apports personnels du dirigeant ou solliciter des créanciers

101
externes. Or les banques sont réticentes pour financer les PME. Ce qui
les oblige à produire des informations comptables.
Nos résultats mettent en exergue que très peu de PE utilisent un
système de suivi et les documents de prévisions pour la prise de
décisions. Le suivi des activités est la dimension du contrôle de
gestion qui a trait à la notion de surveillance (Bergeron, 1996). Son
rôle dans un système de contrôle de gestion est de constater ce qui se
fait en vue fournir les bases d’information sur le déroulement des
activités. Les prévisions permettent l’évaluation et de savoir si ce qui
se passe est conforme à ce est désiré par les dirigeants. Elle est
l’élément déclencheur de la prise de décision (Bergeron, 2002 ; Bayad
et Garand, 1998). L’évaluation doit être faite par rapport à une
référence.

6. Conclusion
L’objectif du présent article était d’analyser la pertinence des
informations comptables pour la prise de décisions stratégiques au
sein de l’entreprise de petite taille. Dans une première étape, nous
avons posé les fondements théoriques de la recherche. Puis, nous
avons décrit la démarche méthodologique de notre travail et procédé à
l’étude empirique. La collecte des données a été réalisée à l’aide d’un
questionnaire administré aux entreprises de petite taille installées au
Togo. Les données recueillies ont ensuite été analysées. Les résultats
montrent que la plupart des PE produisent l’information comptable au
moyen de divers documents qu’elles élaborent et que les finalités de
l’information comptable sont multiples. Elle est utilisée pour la prise
de toutes les décisions stratégiques dans l’entreprise : décisions
d’achat, décisions d’investissement, décisions de choix des produits à
vendre. Les finalités de l’information comptable sont multiples. Une
des justifications étant le fait que la gestion de l’entreprise implique
pour le manager de nouer des contrats avec des partenaires différents
et qui sont dépendants de l’information comptable livrée par
l’entreprise (Levasseur, 1982).

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104
LES DÉTERMINANTS DE LA COMMUNICATION
SOCIÉTALE DES ENTREPRISES DE L’ESPACE
OHADA : UNE ÉTUDE EN CONTEXTE CAMEROUNAIS
DONGMO Roméo Martial
Docteur en Sciences de Gestion,
ATER à l’Université de Douala,
NDJETCHEU Louis,
Professeur de l’Université de Douala
Email : doromartial@yahoo.com ; ndjetcheu@yahoo.fr

Résumé
Le problème que soulève cet article est celui de la
compréhension des motivations de la communication sociétale par
certaines entreprises camerounaises en l’absence d’une réglementation
en la matière. Une étude empirique est menée auprès d’un échantillon
de 60 entreprises diffusant leurs informations sociétales. Les résultats
des tests de régression suggèrent que, pour les variables économiques,
la performance financière est le déterminant principal dans le choix
des entreprises de recourir à une publication de leurs informations
extra-financières. Concernant les facteurs sociaux, seule
l’appartenance de l’entreprise à un secteur sensible s’est révélée être
positivement corrélée au niveau de divulgation sociétale. Enfin, les
facteurs environnementaux sont apparus comme possédant un pouvoir
explicatif moyen sur la communication sociétale.
Mots clés: Communication sociétale, Ohada, RSE, Théorie des parties-
prenantes.
Abstract
The problem raised by this article is that of understanding the
motivations of this societal communication carried out by some
Cameroonian enterprises in the absence of regulation in this area. An
empirical study carried out on a sample of 60 enterprises propagating
societal communication. The analyses of the content highlight several
determinants of societal communication namely the quest for
legitimacy, belonging to a sensitive sector of activity, the informative
level of societal data, societal performance and sectarian mimesis. In
addition, the internet site and implication in the development of the
local community appear respectively as supports and the most used
themes of propagation in Cameroon.
Keywords: Societal communication, Ohada, Corporate social
Responsibility (CSR), Stakeholders theory.

105
1. Introduction
La montée en puissance des préoccupations sociétales s’est
accompagnée naturellement par un développement important du cadre
institutionnel puisque de très nombreux acteurs se sont saisis de cette
question (Bollecker et al, 2011). Parmi ces acteurs, figure au-devant
de la scène l’entreprise responsable1 qui doit aussi rendre public les
engagements pris pour réparer les dommages causés à
l’environnement naturel et social. Ces redditions de compte relèvent
de la communication sociétale (Rhouma et Cormier, 2007). En fait,
cette nouvelle forme de reddition que constitue le reporting RSE2
(Dongmo, 2017), a émergé dans un contexte où les entreprises devant
faire face à des changements sociaux et environnementaux, rendent
compte à diverses parties prenantes de leurs nouvelles responsabilités
(Ngantchou, 2015). Selon Perez (2003, 15), « la capacité à rendre
compte (accountability) est inhérente au principe même de
responsabilité : l’une ne va pas sans l’autre ; si on ne peut pas rendre
compte, on ne peut pas être responsable ». Désormais les entreprises
rendent des comptes au public concerné, au moyen de différents
supports de reddition, sur les aspects sociaux et environnementaux de
leurs activités. Il s’agit d’un dialogue entre les entreprises et diverses
parties prenantes (employés, clients, actionnaires, société en
général…), consistant à leur fournir des comptes (Gillet, 2010). La
reddition d’informations sociétales est donc un élément important
dans les mécanismes de gouvernance des entreprises et constitue un
instrument clé dans les relations entre l’entreprise et ses parties
prenantes (Capron et Quairel, 2004).
Dans la littérature spécialisée résumée par Capron et Quarel
(2009), la communication sociétale est désignée par les termes : «
reporting sociétal », « Reporting DD3 », « Reporting RSE », «
Communication extra-financière », « Reporting Durabilité4 » ou «

1
Être une entreprise responsable, c’est trouver le bon équilibre entre le besoin
de création de valeur et les divers objectifs du développement durable c’est-à-dire
être économiquement viable, avoir un impact positif sur la société mais aussi
mieux respecter l’environnement.
22
RSE signifie « Responsabilité Sociétale de l’Entreprise » dans les
développements qui vont suivre.
3
Développement Durable
4
Le concept de « durabilité » est utilisé pour faire allusion au fait que le DD
porte sur une préservation des ressources destinées aux générations futures.

106
divulgation sociétale ». Dans une synthèse de la thématique du 28ème
congrès de l’AFC «comptabilité et environnement », Capron et Petit
(2013) proposent aussi la notion de « reporting soutenabilité » pour
désigner ces nouveaux modes de reporting. Il fait ainsi référence au
développement « soutenable » (Sustainable Development). Dans la
suite de notre article, ces termes seront indifféremment utilisés et
renverront tous à la divulgation des informations sociétales. A cet
effet, même si l’information désigne un double processus de
transmission et de réception d’un message réduisant l’incertitude ou
augmentant les connaissances du récepteur (Martinet et Silem, 2008
,345), il en ressort que le point de démarcation entre une information
financière et une information sociétale est que la première vise le
bien-être de l’entreprise par la maximisation de la valeur ajoutée, alors
que la deuxième vise le bien-être de la société en général par la prise
en compte des attentes des parties prenantes, et la préservation de
l’environnement naturel (Dongmo, 2018).
Les premiers rapports sociétaux ont été publiés à la fin des
années 1980 aux Etats-Unis, principalement pour répondre aux
attentes des autorités. Vers la fin des années 1990, l’entreprise est
venue à un rapport plus large permettant de décrire ses performances
en matière économique, sociale et environnementale : c’est le
sustainable report (Mikol, 2001) ou rapport de développement
durable. Aujourd’hui, ce mode de communication a connu un essor
important puisque la plupart des grandes organisations dans les pays
développés publient des rapports sociaux et environnementaux et
communiquent ce type d’informations sur leur site internet (Rhouma,
2010). Différentes appellations sont octroyées à ces rapports :
durabilité, RSE, environnementale, etc.
A l’échelle internationale, les rapports « sociétaux » sont, à
l’instar de la comptabilité financière, des instruments de reddition, de
diagnostic, de dialogue et servent à la prise de décision (Capron,
2000) ; ils constituent la forme la plus visible de la « comptabilité
sociale » (Capron et Quairel, 2009) et doivent donc être jugés en
fonction des normes et des qualités attendus des documents
comptables (Gray, 2001). Afin de renforcer leur crédibilité et de
permettre leur comparabilité, l’idée d’une sorte de normalisation
internationale de cette forme de reddition est à mettre à l’actif de la
Global Reporting Initiative (GRI) qui a entrepris actuellement la
démarche la plus avancée (Dongmo, 2018).

107
Aujourd’hui la divulgation environnementale et sociale est
devenue une pratique courante des plus grandes entreprises du monde
(Rhouma et Scotto, 2012). En effet une récente enquête internationale
de KPMG (2008) révèle que quatre-vingts pour cent des entreprises
figurant sur la liste de Global Fortune 250 publient désormais des
données relatives à des critères sociaux et / ou environnementaux dans
le cadre de rapports autonomes ou au sein de leurs rapports financiers
annuels. Quelle est dans ce contexte la position des entreprises de
l’espace OHADA par rapport à cette effervescence de la
communication sociétale en Occident ?
A l’échelle africaine en général et particulièrement pour les
entreprises du Sud du Sahara régies par le droit Ohada, le reporting
sociétal reste embryonnaire malgré l’enjeu de la RSE pour les
entreprises de cet espace géographique (Ndjetcheu, 2013a et 2013b).
En effet, les travaux précédents (Etoundi, 2014 ; Ngok- Evina, 2013 ;
Biwolé, 2014) ont pu révéler qu’en Afrique noire en général et au
Cameroun en particulier, la RSE est pratiquée par les entreprises tant
sur le plan opérationnel que discursif (reporting) car elles sont sujettes
à la pression des normes et règles internationales en la matière.
Cependant ces recherches ne se sont pas intéressées à la publication de
ces pratiques sociétalement responsables notamment dans le champ de
l’Ohada où Ndjetcheu (2013a et 2016), Diawara et Lavallée (2014),
ont montré l’inexistence d’un cadre réglementaire coercitif pour les
pratiques sociétales. Ce qui contraste avec des études qui montrent
que la réforme du système Ohada s’inscrit dans un processus
d’isomorphisme coercitif (mondialisation des économies) et
mimétique (inspiration des modèles comptables dominants des pays
développés) (Causse, 2000 ; Gouadain, 2 000 et Péchoron, 2000). En
fait, on se serait attendu à une duplication du cadre réglementaire
occidental de la communication des entreprises s’appuyant sur des
aspects financiers et sociétaux5 (Ndjetcheu, 2013a). Ce qui n’est pas le
cas.
Fort de ces constats, et notamment de ce paradoxe entre
l’absence d’un cadre réglementaire coercitif des pratiques sociétales
dans le périmètre Ohada, et de la présence des activités volontaires de

5
Ce qui montre clairement que dans l’espace Ohada, il existe un déphasage
criard entre le cadre juridique nettement en avance et le droit comptable resté sourd
aux mutations de son environnement social et naturel.

108
communication RSE dans cet espace géographique, il y’a matière à
s’interroger sur les motivations réelles de la diffusion volontaire de
ces informations extra-financières. Afin d’éclairer cette zone d’ombre,
nous avons formulé la question de recherche suivante :
Quels sont les déterminants de la communication sociétale
volontaire des entreprises de l’espace Ohada ? Autrement dit, malgré
l’absence d’un cadre réglementaire coercitif, quels sont les facteurs
explicatifs de la diffusion volontaire des informations extra-
financières par les entreprises situées dans la zone Ohada ?
En effet, il s’agit d’une étude quantitative dont l’objectif est
d’analyser les facteurs économiques, sociaux et environnementaux de
la divulgation des informations sociétales par les entreprises de
l’espace Ohada.
Notre travail repose sur trois axes névralgiques. La première
section de cet article permet de présenter le cadre théorique explicatif
de la communication sociétale des entreprises. Ensuite, il est procédé à
une déclinaison du protocole méthodologique de l’investigation. Notre
terrain d’études sera constitué des entreprises de l’espace Ohada
divulguant leurs informations sociétales avec pour point focal le
Cameroun. La troisième section permet de présenter et d’analyser les
résultats obtenus ainsi que les enseignements subséquents.

2. Le socle théorique explicatif de la communication


sociétale des entreprises
L’objectif de cette première section est d’explorer le phénomène
de communication sociétale à l’aune de l’élaboration d’un cadre
théorique explicatif de la diffusion des informations extra-financières.
A cet effet, une typologie des modes de compréhension des relations
des entreprises avec leur environnement socio-économique et des
discours sociétaux susceptibles d’en découler, a été établie par
Antheaume et Teller (2001).

Tableau 1 : Relation entre l’approche théorique et la diffusion


d’information
Appr Grilles de lecture Stratégie de diffusion d’information
oche
Fina Théorie de Comptabilité financière ne communiquant que les

109
ncière l’agence et seules informations susceptibles d’affecter les
Théorie positive actionnaires
de la comptabilité
Cyni Théories Elle résulte d’un rapport de force entre
que économiques l’entreprise et son environnement socio-économique
et
politiques (appréciation du coût de la publication d’information et
de l’information du risque exposition de l’entreprise à la vindicte
publique)
Civi Théorie des Comptabilité(s) sociétale(s) sous forme de
que parties prenantes et documents chiffrés, détaillés et argumentés, vérifiés
Théorie de la par des tiers indépendants, donnant aussi bien les
légitimation bonnes que les mauvaises nouvelles
Source : Antheaume et Teller (2001).

Dans cette mouvance, ce premier volet de notre article repose sur


deux axes. Le premier consiste à mener une réflexion théorique sur le
construit de communication RSE. Le deuxième pan analyse les
facteurs explicatifs de la diffusion des informations sociétales.
2.1. Le reporting sociétal des entreprises à l’épreuve des théories
L’étude de Gray et al. (1996) a marqué la littérature théorique
dans le domaine de la communication sociétale. Ces auteurs classent
les études empiriques du reporting DD selon trois approches
théoriques : l’utilité décisionnelle de l’information, les approches
économiques et les théories sociopolitiques.

L’approche de l’utilité décisionnelle comme clé de voûte du


discours sociétal
Selon l’approche de l’utilité décisionnelle de l’information, les
entreprises divulguent certaines informations sur les impacts sociaux
et environnementaux de leurs activités parce qu’elles sont utiles pour
la prise de décision d’investissement. Milne et Chan (1999) identifient
trois types d’études adoptant cette approche : les études « d’enquêtes »
auprès des utilisateurs potentiels des informations divulguées (Epstein
& Feedman 1994; Deegan et Rankin, 1997) ; les études de la réaction
des marchés financiers à la communication sociétale (Belkaoui 1976;
Freedman et Jaggi, 1992) et enfin les études expérimentales évaluant
l’impact du reporting sociétal sur la prise de décision d’investissement
(Chan & Milne 1999; Milne & Chan 1999).

110
Les approches économiques comme fondement de reporting
soutenabilité

Pour les approches économiques du reporting sociétal, certaines


recherches (Abbott & Monsen 1979 ; Belkaoui 197, Oxibar, 2007et
2011) adoptent la théorie positive de la comptabilité de Watts &
Zimmerman (1978). Selon cette théorie politico-contractuelle, le
domaine économique ne peut pas être étudié indépendamment du
cadre politique, social et institutionnel de l’entité économique (Ernst
& Ernst 1978; Gray et al. 1996; Adams et al. 1998; Williams & Pei
1999). De nombreuses entreprises dépassent les obligations de
publication en divulguant des informations non requises par la loi ou
les normes en vigueur. Cet accroissement de la transparence peut
contribuer à diminuer les coûts d’agence et les coûts politiques. Des
recherches plus récentes analysent le reporting DD selon la
perspective économique des coûts et bénéfices de l’information
divulguée (Cormier & Magnan 1999 ; Cormier & Magnan 2003).

Les approches sociopolitiques comme élément d’arbitrage dans


la décision de diffusion volontaire des informations sociétales
Les théories sociopolitiques ou approches interprétatives du
reporting sociétal considèrent que l’entreprise est en relation avec
différents acteurs qui présentent des besoins différents en matière
d’information sociale et environnementale. L’entreprise influence et
elle est aussi influencée par l’ensemble de ces acteurs. Trois théories
peuvent être rattachées à cette approche interprétative.
Primo, la théorie de l’agence part du principe que par essence, il
y a incomplétude des contrats, on assistera dans un contexte
d’asymétrie informationnelle à l’opportunisme des parties (Coriat et
Weinstein, 1995). L’entreprise étant un nœud de contrats (Jensen et
Meckling, 1976 ; Fama et Jensen, 1983), diverses mesures d’incitation
vont être destinées à réduire les divergences entre agent et principal.
Cette théorie postule que la priorité de toute entreprise doit rester la
maximisation du profit actionnarial, objectif largement véhiculé par
l’école de Chicago (Friedman, 1970). Dans cette optique, le reporting
sociétal doit permettre aux acteurs financiers d’avoir une meilleure
connaissance des avantages concurrentiels éventuellement détenus,
ainsi que des risques encourus par l’entreprise à moyen et long terme,
risques naturels mais aussi – et surtout – juridiques.

111
Secundo, la théorie des parties prenantes qui fournit le cadre de
la théorie de l’agence élargie (Capron & Quairel 2004, Oxibar, 2007
et Guinchard, 2014) selon lequel les entreprises vont rendre compte de
leurs performances en matière environnementale et sociale à
l’ensemble de leurs parties prenantes. Le développement théorique du
reporting DD dans le cadre de la théorie des parties prenantes a été
initié par Ullmann (1985) et appliqué empiriquement par plusieurs
chercheurs (Roberts, 1992 ; Gray et al.1996; Adams, 2002).
Enfin, la théorie de la légitimité selon laquelle « les
organisations cherchent à exercer leur activité dans le cadre des
normes et règles acceptées par les sociétés dans lesquelles elles
exercent leur activité » (Teller et Antheaume, 2001, 93), est
aujourd’hui le cadre théorique le plus utilisé dans les études sur le
reporting sociétal. En effet, la concentration accrue sur les questions
du développement durable est en grande partie le résultat de pression
des groupes de parties prenantes pour plus de transparence et de
communication.
Toutes ces approches théoriques constituent le soubassement du
protocole méthodologique élaboré pour notre investigation dans la
mesure où Rhouma (2010, p.5) affirme: « Qu’un cadre multi-
théorique permet d’apporter un meilleur éclairage à la
compréhension des pratiques de diffusions sociales et
environnementales ».
2.2. L’identification des déterminants de la communication RSE
dans la littérature
La littérature comptable sur le reporting sociétal de ces deux
dernières décennies a été essentiellement orientée vers les
déterminants de la divulgation des informations sociétales (Dongmo,
2018). Ainsi Damak-Ayadi (2006), Oxibar (2007 et 2011), Bellini et
Delattre (2007), Cormier et Magnan (2003) ; Groening et Krishna
(2012) et Guinchard (2014) retiennent le mimétisme du secteur
d’activité, la taille et le degré d’internationalisation et la structure du
capital comme facteurs explicatifs de la diffusion d’informations
sociétale des entreprises européennes. Wiseman (1982) ; Zeghal et
Ahmed (1990) ; Al Tuwaijri et al (2004) ; Montabon et al. (2007) ;
Clarkson et al (2011) découvrent la performance societale et
financière, la pression des parties prenantes, la dilution du capital
comme déterminants du reporting extra-financier des entreprises en
contexte nord-américain. Yoshimori (1995) ; Li (1997), Clarke et

112
Yuxing (1998) ; Tsang (1998), Zhang et al (2007) établissent
l’endettement, le contexte culturel et la personnalité du dirigeant
comme inducteurs de communication RSE des entreprises asiatiques.
Parallèlement aux trois piliers de la RSE, Dongmo (2018) a pu
regrouper ces déterminants en trois ensembles : économique, social et
environnemental.

1.2.1- Les déterminants économiques de la diffusion des informations


sociétales

Il s’agit notamment de la performance économique, la dilution


du capital et enfin l’endettement.

La performance économique
Maintes études ont analysé la relation entre la performance
économique de l'entreprise et sa divulgation sociétale. Toutefois, les
résultats de la plupart de ces études divergent le plus souvent. En effet,
Cowen et al. (1987), Belkaoui et Karpick (1989), Patten (1991),
Hackston et Milne (1996) et Oxibar (2007,2011) ne parviennent pas à
établir de relation entre la divulgation sociétale et la performance
économique de l'entreprise. Alors que Freedman et Jaggi (1998), en
analysant, la relation entre la divulgation sociétale et la performance
économique pour différentes tailles d'entreprises œuvrant dans des
industries en relation avec l'environnement, trouvent une relation
positive et significative. Dans le même ordre d’idée, Roberts (1992) a
démontré que la divulgation sociétale effectuée par les entreprises
américaines est fortement influencée par la moyenne des changements
annuels des rentabilités des capitaux propres (ROE). D'où on suppose
que:
H11: Il existe une association positive entre la performance
économique de l'entreprise et ses pratiques de divulgation sociétale.

La dilution du capital

Certaines caractéristiques du capital telles que son niveau de


dispersion ou de concentration ont été mises en relation avec le niveau
de divulgation sociétale des entreprises. En effet, des conflits d'intérêt
apparaissent entre les actionnaires et les dirigeants à cause de la
séparation de fonctions de propriété et de fonctions de gestion de
l'entreprise. Roberts (1992) suppose l'existence d'une association

113
positive entre la dispersion de la propriété de l’entreprise entre
plusieurs actionnaires et ses pratiques de divulgation sociétale. Il
prévoit que plus la propriété du capital devient dispersée, plus la
pression des parties prenantes pour la divulgation sociétale augmente.
Cependant, aucun effet significatif n'a été détecté des résultats
obtenus. Oxibar (2007 et 2011) obtient une relation négative entre la
dispersion du capital et la divulgation d’information
environnementale à travers les rapports annuels.
Par conséquent, on anticipe que :
H12: Il existe une association positive entre la dispersion du
capital de l'entreprise et ses pratiques de divulgation sociétale.

L’endettement
En examinant la relation entre le ratio total dette/total actif et la
divulgation sociétale, Belkaoui et Karpik (1989) parviennent à
démontrer que plus l’entreprise est endettée moins elle divulgue des
informations sociétales. Les résultats qu’ils ont trouvés supportent
l'hypothèse qu'un ratio d'endettement élevé est associe négativement
avec la divulgation sociétale. Cormier et Magnan (1999) ont montré
que le ratio d'endettement a une influence négative et significative sur
la divulgation environnementale. Oxibar (2007 et 2011) a trouvé une
relation négative entre le niveau d’endettement de l’entreprise et la
divulgation environnementale dans les rapports annuels. D’un autre
côté, Roberts (1992) considère que l'endettement est de nature à
encourager l'entreprise à mener des activités sociétales et à être
positive en ce qui concerne l'information divulguée afin de satisfaire
les attentes de ses créanciers en terme de son rôle social. Il prévoit une
relation positive entre le niveau d'endettement de l'entreprise et son
niveau de divulgation sociétale.
Fort de ces contradictions, on pense que:
H13: Il existe une association de sens indéterminé entre
l'endettement de l'entreprise et ses pratiques de divulgation sociétale.
Fort de ces constats nous pouvons formuler la première
hypothèse principale suivante :

H1 : Les facteurs économiques influencent le niveau de


reporting sociétal

114
1.2.2- Les déterminants sociaux de la divulgation d’informations RSE

En termes de facteurs sociaux explicatifs de la communication


extra-financière des entreprises, Damak-Ayadi (2006) retient la taille,
le secteur d’activité et le degré d’internationalisation tandis qu’Oxibar
(2007) et Rhouma (2008) proposent en sus, la présence dans
l’entreprise d’une structure relative à la RSE ou au Développement
Durable.

La taille de l’entreprise
Les variables reliées à la taille de l’entreprise sont fréquemment
utilisées comme mesures de la visibilité politique (Oxibar, 2007 et
2011 ; Khémir, 2010). A cet effet, Cowen et al (1987) parviennent à
démontrer que la taille de l'entreprise influe significativement sa
divulgation au sujet de l'environnement et de l'énergie. Ils considèrent
que les grandes entreprises font le plus souvent l'objet d'une grande
attention de la part du public ce qui les exposent a une plus forte
pression en ce qui a trait à la divulgation d'information au sujet de leur
responsabilité sociale. De même, Hackston et Milne (1996) ont obtenu
une association positive et significative entre la taille de l'entreprise et
son niveau de divulgation sociétale dans le contexte néo-zélandais.
Aussi, Belkaoui et Karpick (1989) et Patten (1991) ont démontré que
la taille de l'entreprise a une influence positive et significative sur sa
divulgation sociétale. D’où on suppose que :

H21: Il existe une association positive entre la taille de


l'entreprise et ses pratiques de divulgation sociétale

Le secteur d’activité de l’entreprise


Parlant du secteur d’activité, Les études qui ont mis en relation
entre cette variable et les pratiques de diffusion sociétale ont effectué
une distinction entre les secteurs d’activité présentant une forte
visibilité et ceux présentant une faible visibilité (Rhouma, 2010). Les
secteurs peuvent présenter une faible ou forte visibilité d’un point de
vue environnemental et / ou éthique ou vis-à-vis du grand public. Les
études de Patten (1991) et de Roberts (1992) ont présenté un
classement entre secteurs fortement (faiblement) exposés d’un point
de vue environnemental ou éthique. Cormier et al (2006, 31) trouvent
que le niveau de la divulgation sociétale dans les rapports annuels
varie de 7.84 dans les secteurs des services à 77.68 pour les secteurs

115
industriels. Sur la base des études antérieures nous émettons
l’hypothèse suivante :

H22 : Plus le secteur d’activité est réputé être sensible aux


problèmes sociaux et environnementaux, plus les entreprises ont
tendance à publier des rapports sociétaux.

Le degré d’internationalisation de l’entreprise


S’agissant du degré d’internationalisation, Taleb (2013) révèle
que cette motivation a souvent été repérée dans les filiales des
entreprises multinationales qui œuvrent dans les pays en voie de
développement. Ainsi, Roy et Lagacé (2000) ont validé dans ce sens
que la décision de communication sociétale des entreprises
délocalisées résulte d’un comportement plus respectueux de
l‘environnement et de la société, afin de répondre aux pressions subies
par leurs sociétés-mères soucieuses de leurs notoriétés écologiques.
En effet, le discours sociétal varie selon les pays auxquels les
entreprises appartiennent. Ce résultat a été confirmé par les études de
Williams et Pei (1999), Pellé-Culpin (1998), Adams et al. (1998),
Belkaoui et Karpik (1989) et Cowen et al. (1987). Ces chercheurs
montrent notamment que le degré d’internationalisation de
l’entreprise, mesuré par la part du chiffre d’affaires réalisé à
l’étranger, a une influence positive sur la décision de publier des
rapports sociétaux. Pour cette raison, nous supposons par la sixième
sous-hypothèse que :
H23 : Le degré d’internationalisation a une influence positive sur
la publication des informations sociétales.
La présence dans l’entreprise d’une structure liée à la RSE ou
au DD

Enfin, le quatrième déterminant social est relatif à la présence


d’une structure liée à la RSE ou au DD. En effet, les arguments
militant en faveur d’une influence de la présence d’une structure
chargée de la RSE sur leur niveau de diffusion d’information sociétale
ont été avancés par Cowen et al (1987) qui estiment que les dirigeants
ayant choisi de mettre en place une telle entité au sein de l’entreprise,
souhaiteront faire état de ses travaux dans le cadre des diffusions de
l’entreprise. En allant dans le même sens, Oxibar (2007) a trouvé une
relation positive entre la présence dans l’entreprise d’une structure liée
à la RSE ou le DD et le volume de publication d’informations

116
sociétales. Les études qui ont retenu cette hypothèse ont proposé
différentes traductions de la notion de structure chargée de la RSE. Il
s’agit d’un comité de la RSE pour Cowen et al. (1987) et Cournac
(2013), du département des relations publiques pour Roberts (1992) et
Adams (2002), ou d’une fondation pour Decock (2000) et Yunus
(2007) ou enfin les départements et/ou services Qualité-Hygiène-
Sécurité-Environnement pour Riot (2014) et Rambaud (2016).
Nous testerons à cet effet la septième sous-hypothèse suivante :
H24 : Il existe une relation positive entre la présence d’une
structure liée à la RSE ou au DD et son niveau de communication
sociétale.

Tous ces développements nous confortent dans la formulation de


la deuxième hypothèse principale suivante :

H2 : Les facteurs sociaux ont une incidence sur le niveau de


divulgation sociétale

1.2.3- Les déterminants environnementaux de la diffusion des


informations extra-financières
Dans la littérature, plusieurs études récentes reconnaissent
l’influence des parties prenantes sur la prise de décision de divulgation
des informations sociétales (McGuire et al. 1998 ; Kolk et Perego,
2010). Oxibar (2007) montre que les thèmes abordés dans les
supports de discours sociétaux dépendent d’une hiérarchisation des
groupes de partenaires sociaux préalablement identifiés. Pesqueux et
Damak-Ayadi (2005) mobilisent la théorie des parties prenantes pour
montrer la prise en compte de ces dernières dans la décision de
communication RSE. Ces résultats sont soutenus par Gendron et De
La Porte (2009) qui vont jusqu’à prouver l’implication des parties
prenantes dans le processus de reporting sociétal en contexte
Européen. Knox et al (2006) parlent de « groupes de pression » pour
illustrer la capacité des parties prenantes à influencer le niveau de
divulgation des informations extra-financières.
Ceci justifie la formulation de la troisième hypothèse principale
suivante :
H3 : Les facteurs environnementaux impactent le niveau du
discours sociétal

117
Dans le sillage de Damak-Ayadi (2006), nous supposons alors
que la communication sociétale découle de l’intérêt porté aux
différents groupes de parties prenantes qui sont :
 Les parties prenantes contractuelles : elles concernent les acteurs
en relation directe et déterminée contractuellement avec l’entreprise
tels que les clients, les fournisseurs, le personnel, les actionnaires et
autres parties prenantes contractuelles.
 Les parties prenantes diffuses : elles concernent les acteurs
situés autour de l’entreprise qui peuvent affecter ou être affectés par
l’entreprise sans pour autant se trouver en lien contractuel telles que
les organismes publics, les collectivités locales, les associations et les
organismes non gouvernementaux, l’opinion publique, etc.
Nous formulons à cet effet les sous-hypothèses suivantes :
H3.1 : L’intérêt porté aux pressions des parties prenantes
contractuelles a une incidence positive sur la publication des rapports
sociétaux.
H3.2 : L’intérêt porté aux pressions des parties prenantes diffuses
a une influence positive sur la publication des rapports sociétaux.
Cependant, la validation de ces hypothèses nécessite qu’on
procède à la présentation du protocole méthodologique.

3. L’analyse empirico-contextuelle des déterminants de


la communication sociétale
Cette section empirique s’attèlera à présenter le protocole
expérimental utilisé. Il sera notamment question de procéder à une
justification du terrain d’étude. Suivra dans la foulée la présentation
des méthodes d’échantillonnage, de collecte et d’analyse des données
ainsi qu’une opérationnalisation des variables.

3.1. La pertinence du choix de l’espace OHADA comme cadre


d’étude sur la communication sociétale
L’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des
Affaires a suscité ces dernières années de grands débats depuis la
montée en puissance des scandales financiers et leur impact sur la
gouvernance des entreprises (Ndjetcheu, 2012 ; Bimémé, 2016). En
outre, certaines études ont révélé le retard accusé par le cadre
conceptuel comptable OHADA par rapport au cadre Juridique

118
(Ndjetcheu, 2013a et 2016). Comme le montre Moskolaï (2016),
certains pays de l’espace Ohada, à l’instar du Cameroun, ont adopté
des lois et décrets et ratifié des traités concernant la RSE, montrant
ipso facto une réelle pratique sociétale dans cette sous-région. En
effet, la pertinence de l’espace Ohada comme terrain d’étude sur le
reporting sociétal revêt une triple explication.
De prime abord, il faut relever notre appartenance à cet espace
géographique. Ensuite, l’absence actuelle des travaux dans la
littérature comptable en Afrique subsaharienne francophone ayant
abordé la problématique d’un modèle explicatif de la communication
sociétale volontaire montre l’intérêt de notre étude. Enfin, cette
volonté de mesurer le degré d’adaptation de la communication
financière de l’entreprise à la suite de la ratification par les pays-
membres de l’Ohada d’un ensemble de dispositions, tant sur le plan
national qu’international, rénovant les rapports des entreprises avec
leur environnement, est un enjeu supplémentaire de notre recherche.
En effet, comme le montre Ndjetcheu (2016), en adoptant ainsi cette
batterie de textes juridiques relatifs à la protection de l'environnement
et en s'engageant dans des conventions internationales visant les
mêmes objectifs, la plupart des Etats parties de l’Ohada, sont
convaincus que le droit de l'environnement constitue un outil efficace
de la protection de l'environnement.
D’autre part, les résultats de récentes études ont convergé sur la
capacité du droit Ohada de servir de réceptacle à une réglementation
de la communication RSE dans la sous-région (Diawara et Lavallée,
2014 ; Caillet, 2015), malgré le silence persistant et inquisiteur du
législateur Ohada.
Enfin, si on prend l’exemple de l’instauration de la GRI par la
Commission Européenne et des lois NRE et Grenelle 2 en France pour
encadrer juridiquement la communication sociétale, parallèlement le
législateur Ohada aurait pu encadrer la diffusion des informations
RSE puisqu’elles sont relatives à une autre forme de comptabilité dite
sociétale (Dongmo, 2018). Ces inadaptations du modèle comptable
face aux besoins des utilisateurs et aux mutations de l’environnement
seraient alors le reflet de la mal gouvernance de l’institution OHADA
(Ndjetcheu, 2016).
Dans cette confusion juridico-comptable, de nombreuses
entreprises de l’espace Ohada produisent et diffusent volontaires leurs
informations extra-financières. Ce constat nous a donc amené à nous

119
intéresser aux mobiles du reporting sociétal volontaire des entreprises
de l’espace Ohada.
3.2 La présentation du protocole méthodologique de l’étude
Sur la base du cadre théorique élaboré, des hypothèses seront
établies et serviront à vérifier si les déductions sont conformes aux
faits. En outre, nous procéderons à une opérationnalisation des
concepts.
Compte tenu du temps et de nos ressources limitées, nous nous
limiterons aux entreprises du Cameroun, pays francophone de
l’Afrique sub-saharienne et un des 17 pays membres de l’Ohada. En
fait, le Cameroun, en tant qu’Afrique en miniature et moteur de la
Cemac regorge un vivier important d’entreprises et reflète toutes les
caractéristiques des états-membres de l’espace Ohada (Dongmo,
2018).
Notre technique d’échantillonnage se référera aux méthodes non-
probabilistes notamment l’échantillonnage de convenance ou de
commodité qui sied le plus à une recherche quantitative sur les
pratiques sociétales au Cameroun (Njaya, 2015, Moskolaï, 2016,
Dongmo, 2018). Au final, pour maximiser la taille de l’échantillon et
obtenir un nombre suffisant d’entreprises camerounaises concernées,
nous retenons les entreprises pratiquant la RSE au Cameroun et
recensées au nombre de 54 à l’issue de la dernière enquête réalisée par
le magazine RSE ASCOMT en 2015. Cependant, sachant que
certaines entreprises à forte culture RSE ont été omises, si on s’en
tient à l’étude simultanée de Ndjetcheu et Dissake (2015)6, nous
validons pour notre étude, un échantillon de taille 60 entreprises.
A cet effet, le caractère significatif de notre échantillon est lié à
deux raisons majeures. D’une part tous les domaines, secteurs et
filières d’activités sont représentés. En fait, l’échantillon est constitué
essentiellement des entreprises de service (38%), d’agro-alimentaire
(22%), des biens industriels (24%) et d’énergie (16%). La forme
juridique qui prédomine est la SA (91%), ensuite la SARL (9%).

6
A travers une étude de cas sur la Société des Plantations de Haut Penja (PHP) à
Njombe, les auteurs montrent sa forte culture sociétale mise en évidence par certains
aspects notamment sa certification à la norme ISO 14.001 et aux autres normes, ses
actions envers l’éducation, la santé, l’hydraulique villageoise, les actes de soutien et
d’accompagnement des petits agriculteurs de sa zone d’implantation, etc.

120
D’autre part, la majorité des entreprises retenues est implantée dans
les autres états-parties de l’Ohada.
Notre technique de collecte de données est plurielle. En tant
qu’étude expérimentale, notre travail de recherche s’est inspiré des
sources de données non seulement primaires (documentaires), mais
également secondaires (enquêtes statistiques). De façon plus
spécifique, nous allons procéder par administration des questionnaires
(comportant les questions fermées et à échelle). S’agissant du
traitement des données, nous utiliserons simultanément le logiciel
SPSS 21 et STATA 13 afin d’obtenir une lisibilité plus accrue du
phénomène étudié. Les régressions logistiques seront utilisées comme
méthodes statistiques pour le test du modèle explicatif du discours
sociétal. Enfin, nous allons confronter les résultats obtenus au cadre
théorique préalablement mobilisé.
3.3. La mesure des variables du modèle explicatif du
reporting Durabilité
Il s’agit de l’opérationnalisation de la variable expliquée
(Communication sociétale) d’une part et des variables explicatives
d’autre part.
3.3.1- L’opérationnalisation du reporting RSE
A l’instar de Simnett et al. (2009) et de Kolk et Perego (2010), la
variable expliquée, c'est-à-dire la mise en place d’une publication des
informations sociétales, est déterminée à partir d’une variable
ordinale. Cette dernière est donc égale à l’unité si l’entreprise n’opte
pas pour la diffusion de ses informations RSE, à 2 si la divulgation est
faible, à 3 si la publication est moyenne, à 4 si elle est forte et à 5 si
elle est très forte. A cet effet, la communication sociétal est noté «
COM ». Les entreprises camerounaises peuvent mettre en place une
divulgation de leurs informations sociétales qui sont diffusées par le
biais des rapports de gestion, les rapports de développement durable,
les journaux d’entreprises, les pancartes d’annonce les sites web des
entreprises constituant l’échantillon. Ainsi, nous recensons les
entreprises faisant diffuser leurs informations sociétales à des
intensités différentes.

Tableau 2 : La mesure retenue de la variable


dépendante (Reporting RSE)
Variable Items Fréquence de Code
diffusion

121
Communication Communication Aucune
sociétale nulle COM
Communication Annuelle
faible
Communication Semestrielle
moyenne
Communication Trimestrielle
forte
Communication Mensuelle
très forte
Source : Par nos soins.

Après avoir défini la méthode de mesure de la variable à


expliquer (COM), nous présentons les mesures des différentes
variables explicatives et variables de contrôle.

3.3.2-L’opérationnalisation des variables explicatives et de contrôle


Dans le cadre de la mesure des variables endogènes de la
communication soutenabilité, il convient de signaler que le critérium
de sélection des mesures des variables de contrôle est double : leur
expérimentation dans des études récentes en contexte OHADA et leur
facilité de mise en œuvre dans les outils de collecte des données.
Une fois nos variables explicatives et de contrôle
opérationnalisées, nous avons procédé à une synthèse des mesures
retenues (Cf. annexe).

122
Tableau 3 : Synthèse des mesures des variables explicatives retenues
Variables Variable à
Mesures les plus mobilisées dans la littérature antérieure Mesures retenues
explicatives mesurer
▪ Rentabilité des capitaux propres (ROE) (Patten, 1991, Roberts, 1992,
Oxibar, 2007 et 2009), Damak-Ayadi, 2004 et 2006, Khémir, 2010);
▪ Rentabilité des actifs (ROA) (Patten, 1991, Damak- Ayadi, 2004, Branco ▪ROE
Performance
et Rodrigues, 2008, Reverte, 2009, Khémir, 2010); ▪RCA
financière
▪Variation du cours des actions et des dividendes (Abbott et Monsen, ▪RCP
1979, Cochran et Wood, 1984 ; Moskowitz 1972)
Facteurs économiques

▪ Ratio résultat/ chiffre d'affaires (RCA), (Damak-Ayadi, 2004 et 2006);


▪ 1 – pourcentage du capital détenu par les actionnaires (Oxibar,
2007,2009))
STRC = [1-a
ayant 5% ou plus du capital
(ACTINS,
Dilution du ▪ STRC = [1- a (pourcentage du capital détenu par les investisseurs
ACTETAT,
capital institutionnels (ACTINS), pourcentage du capital détenu par l'Etat
ACTSAL,
(ACTETAT), pourcentage du capital détenu par les salaries (ACTSAL),
ACTFAM)]
pourcentage du capital détenu par les actionnaires familiaux (ACTFAM)]
(Oxibar, 2007 et 2009) ; Khémir (2010))
▪ Ratio dettes financières/total actif (Oxibar (2003, 2009));
Ratio total dettes /
Endettement ▪ Ratio total dette / total actif (Belkaoui et Karpick (1989), Branco et
total actif
Rodrigues (2008), Khémir, (2010)).
▪ Total bilan (Hackston et Milne (1996), Branco et Rodrigues (2008)) ;
▪ Chiffre d'affaires (Belkaoui et Karpick (1989), Hackston et Milne -logarithme du chiffre
Facteurs
sociaux

(1996)) ; d’affaire (CA)


Taille
▪ capitalisation boursière (Hackston et Milne (1996)); -logarithme de l’actif
▪ Nombre d'employés, Logarithme du nombre d'employés (Damak-Ayadi, (A)
2006 ; Khémir, 2010 ; Baccouche et al, 2010).

123
- Indices proposés par des organismes privés (Gray et al, 1996, Haniffa et indice de réputation
Cooke, 2005) du secteur d’activité
- Classement des entreprises selon la sensibilité environnementale (indice de l’entreprise
Secteur d’activité de réputation) (Damak-Ayadi, 2006, Baccouche et al, 2010, Rhouma et
Cormier, 2007)
- % du chiffre d’affaires réalisé dans des activités présentant une forte
visibilité environnementale (Oxibar (2006, 2007 et 2009))
Degré ▪ Nombre de pays d'implantation (Khémir, 2010) ; Part du CA réalisé à
d’internationalisat ▪ Part du chiffre d'affaires réalisée à l'étranger (Decock-Good, l'étranger
ion 2001 ;Damak-Ayadi, 2004 et 2006, Branco et Rodrigues, 2008).
-Variable binaire présence (1) absence (0) d’un comité d’éthique (Oxibar, Variable binaire
Existence d’une 2007 2009 et 2011) présence (1) absence
structure en -Variable binaire présence (1) absence (0) d’une fondation (Oxibar, 2007 (0) comité d’éthique
charge de la RSE et 2011) ou fondation ou
ou du DD -Variable binaire présence (1) absence (0) d’un département QHSE (Riot, département QHSE
2014 et Rambaud, 2016).
-Analyse de contenu (Guthrie et Parker, 1989 ; Brown et Deegan, 1998 ;
environnementaux

Pression des
Parties prenantes Déjean et Oxibar, 2010)
Importance de chaque
- Taille de l’entreprise et le secteur d’activité (Patten, 1991).
Facteurs

(PP) type de PP grâce à


contractuelles - Mesure de l’importance de chaque type de parties prenantes (indice allant
l’analyse de contenu
de 0 à 5) (Damak-Ayadi, 2006).
(indice de 0 à 5)
Pression des PP - Couverture médiatique (Brown et Deegan, 1998 ; Deegan, et al, 2002 ;
diffuses Déjean et Oxibar, 2010).
Source : par nos soins.

124
3.4.- La présentation et le test du modèle explicatif du reporting
RSE

Le modèle explicatif de la mise en place d’un reporting RSE


intègre les variables explicatives précédemment développées : les
variables économiques, sociales et environnementales.
Ainsi le modèle explicatif final proposé est le suivant :
Y = C+ β1 RA + β2 RCP + β3 RCA + β4 DIL+ β5 END+β6 CA +
β7 A + β8 SECT + β9 ETR+ β10SRSE+ β11 PPC + β12 PPD + β12STR+
β12CLI + β12 EQU+ β12 REM+ β12 CON+€i
Y : Variable dépendante qualitative ordinale prenant les valeurs
1, 2, 3, 4 et 5 (1=nul ; 2=faible ; 3= moyen ; 4=fort ; 5= très fort).
C : Constante,
β i : Coefficients de la variable i dans le modèle.
RA : Performance économique mesurée par le ratio de rentabilité
de l’actif.
RCP : Performance économique mesurée par le ratio de
rentabilité des capitaux propres.
RCA : Performance économique mesurée par le ratio
résultat/chiffre d’affaires.
DIL : Dilution du capital mesuré par le complément au
pourcentage du capital détenu par l’Etat, les salariés, les actionnaires
familiaux et institutionnels
END : Niveau d’endettement mesuré par le Ratio total dettes /
total actif
CA : Taille de l’entreprise mesurée par le logarithme du chiffre
d’affaires.
A : Taille de l’entreprise mesurée par le logarithme de l’actif.
SECT : Indice de réputation du secteur d’activité de l’entreprise.
ETR : Degré d’internationalisation mesuré par le chiffre
d’affaires réalisé à l’étranger/chiffre d’affaires total.
SRSE : Existence d’une structure en charge de la RSE ou du DD
PPC : Intérêt porté aux pressions des parties prenantes
contractuelles mesuré par une analyse de contenu.
PPD : Intérêt porté aux pressions des parties prenantes diffuses
mesuré par une analyse de contenu.

125
STR : Structure de propriété, CLI : Climat social, EQU :
Equilibre régional, REM : Rémunérations justes et régulières, CON :
Confiance accordée à l’entreprise par le public,
€i : Terme d’erreur.
Par ailleurs, les régressions logistiques ordinales seront utilisées
pour le test du modèle explicatif de la communication sociétale. En
effet, le modèle logit ordinal consiste en une modification du modèle
logit classique pour des variables à expliquer ayant des modalités
ordonnées.

4. La présentation et l’analyse des résultats de la


recherche
Le test du modèle explicatif de la communication sociétale a
produit des résultats qui seront présentés avant de faire l’objet de
discussions sous le prisme de la littérature scientifique.
4.1. La présentation des résultats de l’investigation
Nous présenterons tour à tour les effets des facteurs
économiques, sociaux et environnementaux sur le niveau de
communication sociétale.

4.1.1- L’effet des facteurs économiques sur le niveau de reporting


sociétal
Les résultats de la régression logistique ordinale pour les facteurs
économiques sont présentés dans le tableau ci-après. Le résultat du
test de Khi-2 montre que le modèle est globalement significatif au
seuil de 1% car Prob-khi-2 = 0,0008. De même, la variable COM est
expliquée à hauteur de 52,96% par les variables indépendantes à
savoir les facteurs économiques et les variables de contrôle.

Tableau 4 : Résultats de l’effet des facteurs


économiques sur le niveau de discours RSE
Facteurs Variable dépendante : diffusion de l’information (COM)
économiques abréviations Coef. Zcal Probabilité Significativité
Performance RCP 0,5276 1,82 0,071 10%
économique RA 0,6378 2,15 0,028 5%
H1.1 RCA 0,2740 2,44 0,013 5%
Dilution du DIL1 - - 0,215 -
capital H1.2 0,4169 1,24
DIL2 - - 0,088 10%

126
0,4277 1,68
DIL3 0,1785 0,54 0,586 -
Niveau END1 0,6163 1,94 0,052 10%
d’endettement END2 - - 0,372 -
H1.3 0,2801 0,89
STRUCPRO 0,8104 1,19 0,235 -
Variables de CLIMAT 1,2620 2,07 0,039 5%
contrôle EQUIL - - 0,241 -
0,5211 1,17
REMUN 1,0711 1,65 0,096 10%
CONFIANC 0,6817 1,07 0,283 -
Nombre d’observations=53 ; Khi-2= 36,79 ; Prob-Khi-2= 0,0008 ;
Pseudo-R²=0,5296
Légende :
·Variable à expliquer : COM1si le niveau de communication est nul, COM2,
s’il est faible, COM3, s’il est moyen, COM4, s’il est fort et COM5 s’il est très
fort.
· Variables explicatives :
-Performance Economique : RCP : Rentabilité des Capitaux Propres ; RA :
Rentabilité des Actifs ; RCA: Ratio Résultat/Chiffres d’Affaires. ;
- Dilution du capital (DIL) : prend 3 items DIL1, DIL2 et DIL3.
- Endettement (END) : prend 2 items END1et END2.
Variables de contrôle : STRUCPRO : structure de propriété ; CLIMAT :
nature du climat social au sein de l’entreprise ; EQUIL : respect de l’équilibre
régional au sein de l’entreprise ; REMUN : Equité et régularité de la
rémunération ; CONFIANC : Entreprise digne de confiance vis-à-vis des
parties prenantes.

En ce qui concerne l’influence de la performance économique


sur la diffusion de l’information sociétale, il vient que les variables
RCP, RA et RCA influencent positivement et significativement la
variable COM respectivement au seuil de 1%, 5% et 5%. Ainsi, pour
toute chose restant égale par ailleurs une amélioration de la
performance économique contribue à l’augmentation du niveau de
diffusion des l’information sociétale. A partir de ce qui précède, nous
pouvons valider l’hypothèse selon laquelle la performance
économique permet aux entreprises d’améliorer leur niveau de
diffusion de l’information.
Pour ce qui est de la dilution du capital, on constate que DIL2
influence négativement et significativement COM au seuil de 10%.
Quant aux variables DIL1 et DIL3, elles influencent négativement et
positivement COM et ce de façon non significative. On en déduit fort
logiquement que l’hypothèse de l’influence de la dilution du capital

127
sur le niveau de divulgation sociétale est rejetée mais partiellement
validée.
En se référant à l’indicateur niveau d’endettement, seule la
variable END1 contribue de façon significative à la diffusion de
l’information. END2 quant à lui influence négativement et non
significativement COM. On constate alors que l’hypothèse H1.3
postulant une relation de sens indéterminé entre l’endettement de
l’entreprise et son niveau de divulgation des informations sociétales
est partiellement validée et doit par conséquent être rejetée.
Par ailleurs, parmi les variables de contrôle, les variables
CLIMAT et REMUN contribuent à améliorer le niveau de diffusion
des informations extra-financières respectivement au seuil de 5% et
10%. Les autres variables restent non significatives (STRUCTPRO,
EQUIL et CONFIANC).
Il en ressort de ces premiers résultats de la régression logistique
ordinale que les facteurs économiques influencent partiellement et
positivement le niveau de communication extra-financière par le
truchement de sa performance financière. Confirmant la sous-
hypothèse H1.1, nous pouvons conclure : « La performance
économique a une influence positive sur la publication des
informations sociétales ».
4.1.2- L’incidence des facteurs sociaux sur le niveau de
communication sociétale

L’ensemble des résultats relatifs à la régression logistique


ordinale pour les facteurs sociaux sont récapitulés dans le tableau 4 ci-
dessous. Il ressort des résultats de ce tableau que le modèle estimé est
globalement significatif au seuil de 1% car prob-khi2 est inférieur à
1%. De même, la variable niveau de diffusion d’informations
sociétales est expliqué à 59,95% par les variables indépendantes.
En ce qui concerne l’influence de la taille de l’entreprise sur le
niveau d’information, il vient que les TAIL1 et TAIL2 influencent
positivement et significativement respectivement au seuil de 5% et 1%
le niveau de diffusion de divulgation sociétale tandis que la TAIL2
influence négativement et non significativement ce niveau de
diffusion de l’information extra-financière. Ce qui montre une
validation partielle de cette sous-hypothèse.

128
Le secteur d’activité quant à lui influence significativement le
volume de diffusion de des informations sociétales. Cette influence est
respectivement négative et positive lorsqu’il s’agit du SECT1 et du
SECT2. Ce qui vient confirmer l’hypothèse selon laquelle plus le
secteur d’activité est réputé être sensible aux problèmes sociaux et
environnementaux, plus les entreprises ont tendance à reporter leurs
informations sociétales.
Pour l’indicateur degré d’internationalisation, on se rend compte
que seule ETR1 contribue significativement au seuil de 10% à
l’explication du niveau de reporting de l’information RSE tandis que
ETR2 et ETR3 sont non significatives. L’hypothèse est donc
partiellement validée.
Pour ce qui est de l’existence d’une structure, STRUCT 2 et
STRUCT 3 ont une influence significative négative et positive au seuil
de 10% alors que STRUCT1 est non significative.
On en conclut une fois de plus que cette sous-hypothèse est
partiellement validée.
Quant aux variables de contrôle, STRUCTPRO, CLIMAT et
REMUN ont une influence positive et significative tandis que EQUIL
et CONFIANC restent non significatifs. On en conclut que les
variables de contrôle contribuent partiellement à expliquer le reporting
RSE.
Tableau 5 : Résultats de l’effet des facteurs sociaux sur
le discours RSE
Facteurs Variable dépendante : diffusion de l’information (COM)
sociaux abréviations Coefficient Zcal Probabilité Sig
Taille de TAIL1 0,2893 2,38 0,012 5%
l’entreprise TAIL2 -0,1567 -0,42 0,673 -
H2.1 TAIL3 0,4617 2,63 0,000 1%
Secteur SECT1 -0,4417 -2,27 0,026 5%
d’activité H2.2 SECT2 0,2791 1,73 0,087 10%
Degré ETR1 0,5110 1,67 0,089 10%
d’international ETR2 -0,2586 -0,48 0,631 -
isation H2.3 ETR3 -0,2389 -0,62 0,538 -
STRUCT1 -0,1896 -0,45 0,656 -
Existence STRUCT2 -0,6897 -1,73 0,088 10%
Structure H2.4 STRUCT3 0,5536 1,70 0,087 10%
STRUCPRO 1,3676 1,66 0,097 10%
Variables de CLIMAT 0,9801 1,65 0,099 10%
contrôle EQUIL -0,4350 -0,94 0,347 -
REMUN 0,8586 1,34 0,180 10%

129
CONFIANC -0,0040 -0,00 0,996 -
Nombre d’observations=53 ; Khi-2= 39,47 ; Prob-Khi-2= 0,0002 ;
Pseudo-R²=0,5995
Légende :
·Variable à expliquer : COM1si le niveau de communication est nul, COM2,
s’il est faible, COM3, s’il est moyen, COM4, s’il est fort et COM5 s’il est
très fort.
· Variables explicatives :
-Taille de l’entreprise : (TAIL): prend 3 items TAIL1 TAIL2 et TAIL3
- secteur d’activité : prend 2 items : SECT1 et SECT2.
-Degré d’internationalisation (ETR) : prend 3 items ERT1, ETR2 et ETR3.
-Existence dans l’entreprise (STRUCT) : prend 3 items : STRUCT1,
STRUCT2 et STRUCT3.
Variables de contrôle : STRUCPRO : structure de propriété ; CLIMAT :
nature du climat social au sein de l’entreprise ; EQUIL : respect de l’équilibre
régional au sein de l’entreprise ; REMUN : Equité et régularité de la
rémunération ; CONFIANC : Entreprise digne de confiance vis-à-vis des
parties prenantes.

Finalement, on peut tirer deux enseignements :


a) Les facteurs sociaux contribuent partiellement à l’amélioration
du niveau de communication RSE,
b) La sensibilité du secteur d’activité est le principal déterminant
social du reporting extra-financier.

4.1.3- L’impact des facteurs environnementaux sur le niveau de


communication sociétale

Les résultats de la régression logistique ordinale visant à faire


ressortir l’influence des facteurs environnementaux sur le niveau du
discours sociétal sont affectés dans le tableau 5.

Tableau 6 : Résultats de l’effet des facteurs


environnementaux sur le niveau de publication des
informations sociétales
Facteurs Variable dépendante : diffusion de l’information (COM)
économiques abréviations Coefficient Zcal Probabilité Significativité
parties PPC1 -0,0089 - 0,966 -
prenantes 0,04
contractuelles PPC2 0,9059 2,08 0,016 5%
H3.1
Parties PPD1 0,8737 1,95 0,051 10%
prenantes PDD2 0,1356 0,39 0,696 -
diffuses H3.2

130
STRUCPRO 1,2994 1,90 0,058 10%
Variables de CLIMAT 0,8530 1,73 0,083 10%
contrôle EQUIL -0,4748 - 0,261 -
1,12
REMUN 0,6944 1,68 0,281 -
CONFIANC 0,2239 0,39 0,261 -
Nombre d’observations=53 ; Khi-2= 32,21; Prob-Khi-2= 0,0033 ; Pseudo-
R²=0,5045
Légende :
·Variable à expliquer : COM1si le niveau de communication est nul, COM2, s’il est
faible, COM3, s’il est moyen, COM4, s’il est fort et COM5 s’il est très fort.
· Variables explicatives :
-parties prenantes contractuelles : (PPC): prend 2 items s PPC1 et PPC2.
- parties prenantes diffuses (PPD) : prend 2 items PPD1et PPD2.
Variables de contrôle : STRUCPRO : structure de propriété ; CLIMAT : nature du
climat social au sein de l’entreprise ; EQUIL : respect de l’équilibre régional au sein
de l’entreprise ; REMUN : Equité et régularité de la rémunération ; CONFIANC :
Entreprise digne de confiance vis-à-vis des parties prenantes.

On constate à partir des résultats du tableau ci-dessus que le


modèle est globalement significatif au seuil de 1% car Prob-khi2=
0,0033 et la variable niveau de communication des informations
sociétales est expliquée à 50,45% par les variables indépendantes.
Pour les parties prenantes contractuelles, il vient que PPC2
contribue significativement à la diffusion de l’information extra-
financière au seuil de 5% alors que PPC3 influence négativement et
non significativement COM. On en déduit que l’hypothèse relative à
la pression des parties prenantes contractuelles est partiellement
validée.
Pour ce qui est des parties prenantes diffuses, PPD1 et PPD2
influencent positivement le niveau de diffusion de l’information.
Cependant, PPD1 a une influence significative au seuil de 10%. Ce
qui montre que l’hypothèse d’une influence positive entre la pression
des parties prenantes contractuelles et le niveau de divulgation
sociétale est partiellement validée.
Les variables de contrôle quant à elles restent dans la majorité
positive avec STRUCTPRO et CLIMAT significative, REMUN et
CONFIANC non significative sauf EQUIL qui est négative et non
significative. Il vient une fois de plus que les variables de contrôle
contribuent partiellement à la mise en œuvre du reporting sociétal.

131
Il résulte enfin de la régression logistique ordinale que les
facteurs environnementaux contribuent partiellement à un recours à la
publication des informations sociétales.
4.2. La discussion des résultats de l’enquête
A l’issue de cette étude, il convient de discuter les résultats
relatifs aux déterminants économiques, sociaux et environnementaux.
4.2.1- Les facteurs économiques du reporting sociétal
Les résultats des tests de régression suggèrent que les variables
économiques n’ont pas dans la majorité des cas, une influence
significative sur le recours à une diffusion des informations sociétales.
Les développements suivants rendent compte de la discussion des
résultats obtenus.
La performance économique comme moteur de la communication
sociétale
La performance financière émerge exceptionnellement parmi les
variables économiques comme un facteur explicatif du niveau de
divulgation sociétale car étant positivement corrélée à ce dernier. Ces
résultats sont conformes à ceux de certaines études antérieures
(Singhvi et Desai, 1971, Foster, 1986 ; McGuire, 1998, Clark et al,
2002, Simnett et al, 2009 et Bnouni, 2011), qui démontrent l’existence
d’une relation incontestable entre le recours à une communication
sociétale et la performance financière des entreprises.
Les résultats obtenus ne sont pas surprenants dans le contexte
camerounais. En effet, de nombreux hommes d’affaires prospères dont
les activités dégagent des superprofits investissent une partie dans des
projets sociaux (constructions de salles de classe, des puits de forages,
réalisation des dons, etc.), au nom de leurs entreprises. Ceci étant, ils
procèdent à un reporting médiatique afin d’accroitre ou asseoir leur
notoriété auprès des couches défavorisées et des autorités
traditionnelles et administratives, dans l’espoir d’une reconnaissance
future. Par conséquent, lorsque leurs affaires deviennent moins
rentables, leurs actions sociales se font moins ressentir.

Dilution du capital et discours sociétal : une relation mineure


L’hypothèse selon laquelle il existe une relation positive entre le
degré de dilution du capital de l’entreprise et son niveau de diffusion
d’informations sociétales est très faiblement vérifiée. Ce qui est
conforme aux résultats obtenus par Ullmann (1985), Roberts (1992),

132
Kateb et al (2010). Ces auteurs expliquent ce lien mineur par la
présence dans le capital des entreprises émettrices de plusieurs
catégories d’associés qui n’ont pas le même niveau d’attente en
matière de RSE. Il s’ensuit que, les entreprises dont le niveau de
dilution du capital est fort, offrent à certaines occasions, et de façon
volontaire, plus d’informations extra-financières que les autres et ce,
afin de réduire les coûts d’agence qui naissent suite à la séparation de
la propriété et du contrôle de la firme. Au Cameroun notamment, la
présence de l’Etat dans le capital de nombreuses entreprises dites
parapubliques incite ces dernières à rendre compte aux citoyens
camerounais de leur prise en compte des aspects sociétaux dans leurs
préoccupations managériales.
Niveau d’endettement et communication sociétale : une relation
mitigée
A l’issue de nos résultats, l’hypothèse postulant une relation de
sens indéterminé entre l’endettement de l’entreprise et son niveau de
divulgation des informations sociétales, est partiellement vérifiée en
mettant en évidence une corrélation positive mais partielle entre
l’endettement et le reporting extra-financier. Ce qui va dans la même
lignée que les travaux de Khemir (2010), Kateb et al (2010),
Baccouche et al (2011). Ce résultat mitigé s’explique selon Oxibar
(2011) par l’ambigüité, d’une part, de la relation diffusion
d’information RSE et performance sociétale, d’autre part, par la
relation performance sociétale et performance économique. Dans le
contexte camerounais, les entreprises présentant un niveau
d'endettement élevé procèdent à la divulgation sociétale pour se
montrer comme des entreprises citoyennes et attirer l'attention des
créanciers présents et potentiels. Ainsi, afin de donner une bonne
image auprès des pourvoyeurs de fonds nécessaires pour la poursuite
de leurs activités, les entreprises du Cameroun seront plus incitées à
divulguer des informations sur leurs actions sociales. Par conséquent,
plus les entreprises ont recours à l'endettement pour le financement de
leurs projets, plus les dirigeants sont amenés à divulguer des
informations portant sur leur responsabilité sociale et ce pour répondre
aux attentes des créanciers.
4.2.2. Les facteurs sociaux comme mobile dominant du reporting
sociétal
Les régressions logistiques ordinales ont également permis de
souligner le caractère significatif des variables sociales sur l’ensemble

133
des données de l’étude. Les résultats sont toutefois mitigés. En effet,
seule l’hypothèse relative au secteur d’activité a été entièrement
validée tandis que les autres l’ont été partiellement.
Taille de l’entreprise et communication sociétale : une relation
imparfaite
A l’issue de nos régressions, l’hypothèse postulant que la taille a
une influence positive sur la publication des informations extra-
financières a été partiellement validée. Ce résultat s’inscrit dans la
même lignée que ceux issus des travaux de Freeman et Jaggi (1986),
Rhouma et Cormier (2007), Boyer (2014). Ces auteurs expliquent
cette corrélation partielle par le caractère multi-sectoriel du terrain
d’études et recommande, pour remédier à ce biais que les études sur le
reporting sociétal soit menées dans un secteur d’activité unique.
L’argument sous-jacent à tous ces travaux met en avant le fait que la
taille étant une source de visibilité, plus une entreprise est grande, plus
elle sera observée et soumise à des pressions de la part du public.
Au Cameroun, les grandes entreprises sont exposées à une plus
grande attention de la part du public et par conséquent, soumises à une
plus grande pression en matière de divulgation d'informations
sociétales notamment par la Chambre Nationale des Consommateurs
du Cameroun (CNACOC). Elles sont donc incitées à divulguer plus
d'informations relatives à leur responsabilité sociale en vue de
détourner ces problèmes. En plus, cette divulgation parait moins
couteuse pour elles. Ainsi, les dirigeants rationalisent l'attribution
d'espace au sein des rapports annuels et leurs sites internet, aux
différentes catégories d'informations sociétales en fonction des
pressions concurrentes qui orientent leurs choix de divulgation.
Secteur d’activité et reporting RSE : un effet de levier
Notre hypothèse relative à une corrélation positive entre secteur
d’activité et diffusion des informations sociétales a été confirmée. Il
s’en suit donc que plus le secteur d’activité est réputé être sensible aux
problèmes sociaux et environnementaux, plus les entreprises ont
tendance à reporter leurs informations extra-financières. Ces résultats
se révèlent être identiques à ceux obtenus précédemment par Hackston
et Milne (1996), Gray (2001), Dejean et Martinez (2009), Khémir
(2010), Boyer (2014). L’idée conciliatrice de tous ces travaux est qu’il
s’agit d’un souci de visibilité de la part des entreprises appartenant à

134
des secteurs plus ou moins sensibles. Au Cameroun, Ce résultat
s’explique par l’arsenal juridique mis en œuvre par le MINEPDED1
pour contrôler les activités des entreprises « polluantes ». En effet,
l’Etat camerounais a récemment signé deux décrets relatifs aux audits
environnementaux d’une part et à l’évaluation des impacts
environnementaux d’autre part. Ceci incite indubitablement les
entreprises du secteur industriel à publier des informations
environnementales pour prouver le respect de ces nouvelles normes et
consolider ipso facto leur crédibilité aux yeux de l’Etat et du public.
Degré d’internationalisation et publication des informations extra-
financières : une relation controversée
L’hypothèse postulant l’influence positive du degré
d’internationalisation de l’entreprise sur le niveau de publication des
informations sociétales a été partiellement validée. Ainsi, on peut
admettre que le degré d’internationalisation contribue partiellement à
l’amélioration de la diffusion des informations sociétales des
entreprises implantées au Cameroun. Khémir (2010) et Baccouche et
al (2011) dans le contexte magrébin , attribuent ce pouvoir explicatif
partiel du degré d’internationalisation à la non-prise en compte des
facteurs culturels et politiques qui peuvent influencer le niveau de
divulgation sociétale des filiales ou des sociétés-mères.
Dans le contexte camerounais, ces résultats sont réalistes. En
effet, on y note un engagement des entreprises délocalisées dans la
communication RSE, afin de se conformer aux exigences imposées
par la société mère, notamment, pour les filiales des entreprises où le
siège est installé dans un pays occidental. Ce contexte étant marqué
par un cadre réglementaire coercitif pour le reporting sociétal, les
firmes multinationales occidentales ont tendance par un effet de
culture d’entreprise, à recommander la diffusion des informations
RSE à leurs filiales implantées au Cameroun. De façon symétrique, les
entreprises camerounaises délocalisées dans des pays où le reporting
sociétal est réglementé, ont tendance à s’y aligner par un effet de
mimétisme.

1
Ministère de l’Environnement et de la Protection de la Nature et du Développement
Durable

135
Présence d’une structure RSE et divulgation sociétale : une relation
bivalente
L’hypothèse relative à une influence positive de la présence dans
l’entreprise d’une structure en charge de la RSE sur la communication
sociétale a été réfutée. Ceci est dû au fait que le positionnement
organisationnel de l’entreprise en matière de RSE s’est montré à la
fois positivement et négativement corrélé au niveau de divulgation
sociétale. Ce qui rejoint les travaux de Roberts (1992) et Adams
(2002). Ces chercheurs attribuent cette liaison bivalente au fait que la
présence d’une structure en charge de la RSE dans l’entreprise peut se
revendiquer plus d’une pression extérieure (recherche de subventions,
attraction des investisseurs éthiques, etc.) que d’un altruisme sociétal.
Dans le contexte camerounais cette liaison bivalente n’est pas
ahurissante pour la simple raison que certaines entreprises
financièrement performantes et soucieuses de se démarquer dans un
contexte où la RSE et le reporting sociétal ne sont pas réglementés,
essaient d’externaliser leurs activités sociétales pour se concentrer sur
leur métier de base. Ce qui donne lieu à la création des fondations,
celles-ci sont par la suite obligées de produire un rapport sociétal
rendant compte de leurs activités extra-financières.
4.2.3. Les facteurs environnementaux du discours RSE : la pression
des parties prenantes
En effet, les hypothèses postulant que l’intérêt porté aux
pressions des parties prenantes contractuelles et diffuses a une
incidence positive sur le niveau de reporting sociétal, ont été
partiellement validées. Ces résultats vibrent sur la même longueur
d’ondes que ceux obtenus plutôt par Tilt (1994), Deegan et Gordon
(1996), Quazi et al. (2001). Tous ces chercheurs concordent à imputer
cette validation partielle aux difficultés d’opérationnalisation des
parties prenantes et le manque de consensus sur une mesure univoque
dans la littérature. Damak-Ayadi (2004) y ajoute la non-prise en
compte du contexte culturel et politique dans l’opérationnalisation de
la variable pressions des PP.
Au final, il convient de signaler qu’une bonne structure de
propriété, un système de rémunération équitable et un climat social
serein peuvent soutenir les facteurs économiques sociaux et
environnementaux dans l’amélioration de l’intensité du discours
sociétal.

136
5. Conclusion
L’objectif principal de cette étude était d’analyser
empiriquement les mobiles de la divulgation sociétale volontaire dans
un contexte règlementaire non coercitif comme l’espace OHADA. Les
résultats des tests de régression suggèrent que, pour les variables
économiques, la performance économique est le déterminant principal
dans le choix des entreprises de recourir à une publication de leurs
informations extra-financières. Toutefois, la dispersion du capital et
l’endettement sont apparus comme possédant un faible pouvoir
explicatif sur le discours sociétal. Concernant les facteurs sociaux,
seule l’appartenance de l’entreprise à un secteur sensible s’est révélée
être positivement corrélée au niveau de divulgation. Nonobstant, la
taille de l’entreprise, le degré d’internationalisation et la présence dans
l’entreprise d’une structure en charge de la RSE ou du DD sont
apparus comme partiellement susceptibles d’expliquer la publication
des informations RSE. Enfin, les facteurs environnementaux sont
apparus comme possédant un pouvoir explicatif moyen du reporting
sociétal.
Les résultats du présent article sont d’un apport
multidimensionnel. Sur le plan théorique, cet article contribue à
améliorer la compréhension des pratiques de communication extra-
financière. Si des recherches en Comptabilité-Audit-Contrôle se sont
intéressées à l’étude de la diffusion des informations financières et de
la nécessité d’une comptabilité sociétale dans le cadre conceptuel
comptable OHADA, cet article est le premier à s’être penché sur les
facteurs explicatifs de la mise en place d’une publication des
informations sociétales en contexte OHADA. Cette recherche a
permis de redéfinir le concept de communication sociétale, peu ou mal
défini dans la littérature antérieure, et d’apporter un éclairage nouveau
sur cet objet de recherche. D’autre part, alors que les études
antérieures sur les déterminants du reporting sociétal mobilisent des
méthodes économétriques de régression logistique bivariée afin de
tester les hypothèses de recherche, l’innovation méthodologique de cet
article a été d’employer la régression logistique ordinale pour rendre
compte de la multitude des niveaux de diffusion des informations
sociétales au Cameroun. Enfin, ce travail peut être utile aux
normalisateurs comptables notamment le législateur OHADA. Il peut
aider à la réflexion sur l’adaptation du cadre conceptuel comptable
OHADA au cadre juridique sur la RSE. Il devrait ainsi en découler

137
une normalisation du reporting sociétal et éventuellement la mise en
place d’un cadre réglementaire.
Par ailleurs, notre analyse quantitative comporte quelques
manquements. Une première limite est relative à l’absence des
mécanismes de communication sociétale qui auraient permis de
ressortir le caractère contextuel de ce phénomène à travers une étude
supplémentaire de nature qualitative. La deuxième renvoie aux
mesures des déterminants empruntées : elles sont certes pertinentes
telles qu’il ressort de la littérature, mais il est à signaler qu’elles ont
été conçues pour être administrées dans le contexte occidental et nous
sommes conscients des différences culturelles qui existent entre le
Cameroun et l’Occident. La dernière insuffisance se rapporte aux
proxys2 utilisés dans l’étude empirique pour mesurer les variables et
tester les hypothèses de recherche. Certains facteurs, comme les
pressions des parties prenantes contractuelles et diffuses, sont en effet
difficilement mesurables. Ces principales limites sont donc liées au
phénomène de réduction instrumentale inhérent à l’utilisation de
proxys indispensables au test des hypothèses.
Les limites mentionnées ci-dessus nous éclairent sur des
perspectives de recherches futures plus alléchantes. D’entrée de jeu,
au niveau des analyses quantitatives, les méthodologies
économétriques pourraient être étendues aux analyses en données de
panels. L’utilisation du logiciel Stata serait alors approprié pour
réaliser ce type d’analyse. En outre, les recherches futures pourront
envisager des méthodologies basées sur une démarche qualitative pour
mieux appréhender la communication sociétale et la libérer de sa
gangue occidentale. De même, une étude comparative entre plusieurs
pays de l’espace OHADA pourrait apporter des résultats intéressants
sur l’influence de facteurs contextuels. En dernier ressort, notre terrain
d’étude pourra être réduit à un seul secteur d’activité notamment
primaire, industriel, tertiaire ou quaternaire pour mieux appréhender
les motivations du discours RSE.

2
En statistique, un proxy ou une variable proxy est une variable qui n'est pas
significative en soi, mais qui sert en lieu et place d'une variable non observable ou
non mesurable. Pour qu'une variable soit un bon proxy, elle doit avoir une
corrélation, pas nécessairement linéaire, avec la variable à prendre en considération.
Cette corrélation peut être positive ou négative.

138
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L’INDÉPENDANCE DU COMMISSAIRE AUX
COMPTES PERÇUE PAR LUI-MÊME. ANALYSE DES
FACTEURS DÉTERMINANTS AU BURKINA FASO

BAIDARI Boubacar
Professeur de l’Université de Niamey
BATIONO Robert
Docteur en sciences de gestion, Université Ouaga I
E-mail : boubacarbaidari@gmail.com
bationorobert@yahoo.fr
louis_som@yahoo.fr

Résumé
Cet article vise à identifier et analyser les facteurs qui influencent
l’indépendance du commissaire aux comptes. Une enquête a été
réalisée auprès des experts comptables au Burkina Faso. Les résultats
ont révélé que deux groupes de facteurs sont mis en évidence ; les
facteurs ayant une influence positive sur l’indépendance du
commissaire aux comptes et ceux ayant une influence négative. Ces
facteurs sont rassemblés en quatre groupes : les facteurs dépendant de
l’auditeur, les facteurs dépendant de l’audité, les facteurs dépendant
de l’auditeur et de l’audité, les facteurs ne dépendant ni l’auditeur ni
de l’audité.
Mots clés : Indépendance - Commissaire aux comptes - Audit légal -
Burkina Faso.
Abstract
This article aims to identify and analyze the factors that influence
the independence of the external auditor. A survey was conducted
among chartered accountants in Burkina Faso. The results revealed
that two groups of factors are highlighted; factors that have a positive
influence on the independence of the auditor and those that have a
negative influence. These factors are grouped into four: the factors
depending on the auditor, the factors depending on the auditee, the
factors depending on the auditor and the auditee, the factors that
neither depend on the auditor nor on the auditee.
Keywords : Independence - External Auditor – Statutory audit -
Burkina Faso.

149
1. Introduction
La baisse de la confiance accordée aux commissaires aux
comptes (CAC), qui fut renforcée par les scandales financiers (Enron,
Xérox, Worlcom, etc.), a relancé à l'échelle mondiale le débat sur
l'indépendance de l'auditeur légal (Saad et Lesage, 2007). Ce dernier,
dont la mission ultime est de protéger les intérêts des actionnaires,
mais aussi de tous ceux qui ont intérêt à connaître la situation
financière de la société, est plutôt soupçonné de complicité avec les
dirigeants d’entreprises pour servir leurs intérêts.
Colasse (2007) affirmait que l’indépendance du commissaire aux
comptes n’était pas une affaire d’incompatibilité fixée par le droit
d’éthique et individuel, mais cette qualité pouvait être menacée tant
bien même que ces incompatibilités soient absentes et que les
auditeurs soient intègres, Wamba et Tagne, (2014).
Face à ce malaise, de nombreuses réglementations ont cherché à
renforcer l’indépendance de l’auditeur légal (Loi Sarbane Oxley aux
Etats-Unis d’Amérique et Loi de Sécurité Financière en France)
(Stolowy et Molinari, 2003).
Les pays de l’espace de l’Organisation pour l’Harmonisation en
Afrique du Droit des Affaires (Ohada) ne sont pas restés en marge de
cette mouvance. En effet, les articles 898 et 899 de l’Acte uniforme3
relatifs à la répression des infractions concernant le contrôle des
sociétés, prévoient des sanctions pénales pour tout acte de nature à
porter atteinte à l'indépendance et aux incompatibilités des auditeurs
légaux.
Au Cameroun, certains travaux (Ndjanyou, 2001, Djongoué,
2007, Ngantchou, 2008, Djoutsa Wamba et al., 2013) ont mis en
lumière le caractère peu fiable des états financiers issus de la
comptabilité des entreprises. En effet, la corruption et l’augmentation
du nombre d’entreprises présentant des états financiers trompeurs ont
conduit au lancement de l’opération épervier entrainant la
multiplication des révocations des dirigeants d’entreprises publiques
et des arrestations des commissaires aux comptes desdites entreprises
venant ainsi renforcer les conclusions des travaux de ces différents
chercheurs. A titre corroboratif, on peut citer les cas du Crédit Foncier
du Cameroun et de la Société Immobilière du Cameroun, dont les
3
OHADA, ActeUniforme-2014, page 205.

150
commissaires aux comptes respectifs ont été condamnés en 2007 pour
complicité de détournement de deniers publics et de tromperie envers
les utilisateurs d’informations comptables.
Au Burkina Faso, en dépit des mesures prises par le législateur
Ohada, facilitées par les textes réglementaires burkinabè, on constate
au sein de certaines entreprises contrôlées par des commissaires aux
comptes, des malversations financières ou encore des détournements
de derniers publics.
C’est le cas, par exemple, des sociétés d’Etat pour lesquelles
l’Autorité Supérieure de Contrôle d’Etat et de Lutte contre la
Corruption (ASCE-LC) relève dans son rapport 2014, que les
détournements de fonds et les manquants de caisse sont les éléments
les plus importants. D’année en année, le taux de détournements de
fonds augmente, passant de 2% en 2013 à 92% en 2014 d’après une
révélation du Contrôleur général de l’ASCE-LC4. Cependant, lors de
la 23ème Assemblée Générale des Sociétés d’Etat tenue le 29 juin
2015, il a été fait cas uniquement d’un résultat décevant pour
l’ensemble des entreprises à capitaux publics en 2014 en évoquant la
conjoncture internationale marquée par la baisse de l’activité
économique du pays. Ce qui suscite la curiosité, c’est le fait que les
états financiers issus de la comptabilité de ces entreprises étatiques
sont certifiés par des commissaires aux comptes. Cela pose le
problème de la valeur de l’opinion émise par certains experts aux
comptes, y compris des entreprises privées.
Ces constats nous amènent à nous poser la question sur
l’indépendance du commissaire aux comptes dans le contexte
burkinabé ainsi que les différents facteurs susceptibles d’influencer
son indépendance.
Tout laisse à penser que le commissaire aux comptes, au cours de
sa mission de certification, est soumis à différents facteurs endogènes
et/ou exogènes qui sont susceptibles d’infléchir son indépendance.
Ces facteurs feraient que le commissaire aux comptes n’arrive pas à
rapporter objectivement et de manière critique les défaillances, les
fraudes et les non-conformités décelées lors de sa mission d’audit. Or,
une remise en cause de la capacité de révélation de l’auditeur est
préjudiciable à son indépendance.

4
Rapport général annuel de l’ASCE-LC (2014), page 99.

151
Dans le contexte burkinabè, les textes qui visent à garantir
l’indépendance du commissaire aux comptes sont principalement
l’Acte uniforme de l’Ohada et la loi N°048-2005/AN/ portant création
d’un ordre national des experts comptables et comptables agréés et
réglementant les professions d’expert-comptable, de comptable agréé
et l’exercice du mandat de commissaire aux comptes.
Afin d’éviter les redondances, nous nous référons aux règles
d’indépendance de l’auditeur légal des sociétés anonymes prévues par
l’Acte uniforme de l’Ohada.
Ces dispositifs réglementaires dont le but principal est de
garantir la fiabilité de l’information comptable et financière soulignent
l’importance accordée à la qualité d’audit en général et à
l’indépendance des auditeurs en particulier.
L’indépendance prévue par l’Acte uniforme de l’Ohada est
assurée par diverses incompatibilités notamment les incompatibilités
générales, spéciales et temporaires respectivement relevées par les
articles 697, 698 et 700.
Malgré ces principales mesures qui visent à garantir
l’indépendance du commissaire aux comptes dans le contexte
burkinabè, nous constatons que l’Acte uniforme présente des
situations qui n’offrent pas une garantie d’indépendance suffisante.
Face à ces situations, il s’avère nécessaire de mettre en œuvre
des solutions mieux adaptées pour que le contrôle reste la pièce
angulaire de la transparence dans la gestion des sociétés
commerciales.
Cet article a donc deux objectifs :
- identifier les principaux facteurs susceptibles d’influencer
l’indépendance du commissaire aux comptes dans le contexte
burkinabé;
- analyser les facteurs perçus par les commissaires aux comptes
qui ont une influence positive ou négative sur leur
indépendance.
Les données de terrain ont été collectées à partir d’une enquête
réalisée auprès des cabinets d’audit inscrits au tableau de l’Ordre
National des Experts Comptables et Comptables Agréés du Burkina
Faso (Onecca-BF). Les données collectées ont été traitées et analysées
en utilisant une approche plutôt quantitative.

152
Dans les développements qui suivent sont présentés
successivement le cadre conceptuel, la méthodologie et la présentation
et les discussions des résultats.

2. Cadre conceptuel
Nous présenterons tout d’abord le cadre d’analyse de la mission
de l’auditeur légal en nous appuyant principalement sur la théorie de
l’agence. Nous discuterons ensuite quelques travaux portant sur
l’indépendance de l’auditeur légal en insistant sur les facteurs
explicatifs.
2.1. Cadre d’analyse de la mission de l’auditeur légal
La théorie de l'agence constitue le cadre d'analyse dominant de la
mission de l’auditeur légal. Pour Jensen et Meckling (1976), l’audit
est intrinsèquement lié à la relation d’agence existant entre les
actionnaires et le dirigeant de l’entreprise. Le problème d’agence
n’apparaît que dans la mesure où les intérêts des deux parties peuvent
diverger, et surtout où il y a information imparfaite et asymétrie
d'information entre les parties. L’asymétrie d’information entre ces
deux types d’acteurs est donc à l'origine de la relation contractuelle
(Gomez, 1996).
Les problèmes d'agence sont liés à la fois à l'incertitude, à
l'imparfaite observabilité des efforts des dirigeants ainsi qu'aux coûts
d'établissement et d'exécution des contrats. Pour réussir sa mission et
continuer à exister, l’entreprise doit arriver à harmoniser les intérêts
des intervenants. Ce qui exige un système de contrôle comptable dont
l’objectif est de réduire l’attitude opportuniste des agents. Ainsi, un
système de contrôle comptable reste un des principaux moyens
permettant d’observer les actions des dirigeants. Cet argumentaire
trouve son fondement dans les travaux de Jensen et Meckling (1976),
qui estiment que le principal devra donc mettre en place un système
d'incitation et des mécanismes de contrôle, s'il désire limiter les pertes
occasionnées par une divergence d'intérêts. La mise en place de
techniques de contrôle et de systèmes d'incitation pour assurer le bon
déroulement des contrats va engendrer des coûts d'agence. Selon
Watts et Zimmerman (1986), le rôle économique de l’audit étant de
réduire les coûts d’agence, cette théorie permet d’expliquer l’existence
de l’audit légal.
L’audit légal trouve donc une légitimité théorique dans la
réduction des coûts d’agence permettant de réduire les comportements

153
opportunistes des dirigeants et de donner plus de crédibilité quant aux
états financiers établis par ces derniers. Malheureusement, la qualité
des travaux de certains commissaires aux comptes et celui de la valeur
de l’opinion découlant de ces travaux est aujourd’hui mise en doute
quant à leur indépendance. Plusieurs débats tournent autour de
l’indépendance de l’auditeur légal
2.2. Discussions théoriques sur l’indépendance de l’auditeur
légal
Différents travaux ont porté sur l’indépendance de l’auditeur
légal en insistant sur l’impossibilité d’une indépendance complète.
Antle (1984) révèle que l’auditeur est supposé être un agent
économiquement intéressé, même si son engagement est d’agir de
manière indépendante de tout intérêt (y compris personnel). Selon lui,
l’auditeur peut agir de manière opportuniste, coopérer avec le
dirigeant et donner une représentation faussée des actes de gestion de
l’entreprise. Richard (2003), quant à lui, précise que le commissaire
aux comptes peut se retrouver en conflit avec le dirigeant quant à ce
qu’il estime être une mauvaise représentation de la gestion comptable
de l’entreprise. Dans ce cas précis, il peut estimer courir le risque de
perdre le groupe client (ou tout au moins d’être écarté peu à peu de
l’audit d’une grande partie de ses filiales) mais aussi des clients
potentiels (Watts et Zimmerman, 1986). Pour Richard (2003), en
insistant sur un changement comptable ou en émettant une
certification avec réserve, l’auditeur remplit son devoir de
commissariat mais hypothèque sa position économique d’associé.
Selon lui, l’auditeur peut être tenté, dans de telles circonstances, de
servir son propre intérêt au détriment de son devoir envers les
actionnaires. En compromettant ainsi son indépendance, l’auditeur
cherche à garder son client et à retirer un bénéfice économique à court
terme.
Francis (2006) souligne que la perception d’honoraires liés à la
mission de commissariat aux comptes remet en cause l’indépendance
de l’auditeur. L’auteur associe la relation auditeur-audité à une
relation de client-fournisseur. En conséquence, les honoraires créent
une dépendance économique. Basé sur le fait que les auditeurs sont
payés par la société auditée, Francis affirme que l'indépendance de
l’auditeur est impossible.
Pour Richard (2006), la relation entre l’entreprise auditée et le
cabinet d’audit ainsi que le lien financier qui résulte de la prestation de

154
service rendu par l’auditeur vont mettre en cause l’indépendance de
l’auditeur, et donc la qualité de l’audit. Il qualifie la relation auditeur-
audité de pairs qui se caractérise par un rôle d’égalité et un partage de
normes professionnelles et culturelles, et donc au cours du processus
de vérification, il devient impossible de maintenir l’indépendance.
C’est pourquoi, pour l’auteur, l’auditeur ne peut pas être compétent et
indépendant. Il s’agit de deux qualités alternatives. L’indépendance
réelle de l’auditeur est nécessaire, mais il doit également donner des
signes visibles, explicites et accessibles au public pour assurer son
indépendance perçue, en tenant compte de sa relation avec le client.
L’auditeur compétent a besoin de bien connaître le métier de son
client et d’instaurer une relation de confiance avec ce dernier. Ainsi, le
développement de cette confiance entre les parties va compromettre
l’indépendance de l’auditeur.
De Angelo (1981) précise que le premier compromis que le
commissaire aux comptes est acculé à faire est un compromis, entre
son indépendance et sa compétence, qui constitue les deux
caractéristiques de la qualité de l’audit. Pour pouvoir être compétent,
ce qui nécessite d’avoir une bonne connaissance de l’entreprise,
l’auditeur externe a besoin de se rapprocher du management pour
obtenir les informations qui lui sont nécessaires (Compernolle, 2009).
Ce faisant, en se rapprochant du management, l’auditeur externe peut
mettre en péril son indépendance. Selon l’auteur, il semble alors
difficile pour l’auditeur d’être à la fois totalement indépendant et
pleinement compétent. Allant dans le même sens, Richard et Reix
(2002), soulignent que l’auditeur devra faire un compromis entre son
indépendance et sa compétence pour définir le niveau de qualité
d’audit qu’il veut atteindre. Ainsi, l’indépendance de l’auditeur
semble difficilement tenable du fait de la nature intrinsèque de la
pratique d’audit. Elle semble également difficilement tenable du fait
des caractéristiques de l’auditeur en tant qu’être humain.
Bazerman, Morgan et Loewenstein (1997) montrent que
l’indépendance, en tant qu’état d’esprit, ne peut être totale puisque le
jugement de chaque personne est forcément empreint d’un biais, le «
self serving bias », c'est à- dire le biais à agir en fonction de son intérêt
propre plutôt qu’en fonction de l’intérêt général. Au-delà même du
biais à agir dans son propre intérêt, des caractéristiques
psychologiques du commissaire aux comptes peuvent influencer son
indépendance comme le montre Prat dit Hauret (2003).

155
Pour Bazerman et al. (1997), il est beaucoup plus probable que
les auditeurs soient affectés par des biais égoïstes qui les mènent,
comme nous tous, pour afficher les données dans une lumière qui
reflète ce qu'ils veulent voir. En raison du caractère souvent subjectif
de la comptabilité et les relations étroites qui existent entre le cabinet
d’audit et la société auditée, même les auditeurs les plus honnêtes
peuvent être biaisés par inadvertance de manière à masquer la
véritable situation financière de l’entreprise et tromper ainsi les
investisseurs, les régulateurs, et même la direction de l'entreprise. Pour
ces auteurs, il est psychologiquement impossible pour l’auditeur de
rester impartial et objectif. Ils utilisent la théorie de psychologie du
« biais de l’intérêt personnel » pour expliquer l’impossibilité d’une
indépendance totale de l’auditeur. Selon cette théorie, l’auditeur
interprète l’information systématiquement de manière à privilégier ses
propres intérêts ou ceux de son client. L’être humain a, par nature,
tendance à confondre ce qui est personnellement avantageux avec ce
qui est juste ou moral.
Cette théorie permet de montrer que l’objectivité de l’auditeur
peut être évincée à cause du biais psychologique lié à la relation
client-auditeur.
Moore et al. (2006), développent la théorie dit de « moral
seduction ». La séduction morale de la profession comptable, et
notamment des auditeurs, se crée à partir de l’association de la relation
économique entre l’audité et l’auditeur et le biais psychologique de
l’intérêt personnel de l’auditeur. C’est la direction de la société
auditée qui a le pouvoir d’engager et/ou de se séparer d’un auditeur, le
cas échéant. Donc, l’auditeur va ainsi employer des procédés lui
permettant d’être choisi par l’audité ou de renouveler son mandat
lorsqu’il est effectivement auditeur de la firme. Cette étude montre
que l’indépendance est irréaliste à partir du moment où le jugement de
l’auditeur peut être influencé par son intérêt dénué de tout sens juste
ou moral. Moore et al (2006) caractérisent finalement à partir des
théories de psychologie, qu’une personne aurait du mal à dissocier son
intérêt personnel de l’intérêt général, même lorsqu’elle essaie d’être
impartiale. Selon eux, l’être humain privilégie toujours
inconsciemment son intérêt, même dans une décision qu’il essaie de
rendre objective.
Pour conclure, on constate que les différents auteurs qui ont
travaillé sur l’indépendance de l’auditeur interne ont mis l’accent sur

156
certains facteurs susceptibles de mettre en cause cette indépendance.
Certains de ces facteurs sont synthétisés dans l’annexe 1.

3. Méthodologie
Après la présentation de l’échantillon, la méthode de collecte et
de traitement des données sera exposée.
3.1. Quelle approche du contrôle de gestion dans les
universités ?
Présentation de l’échantillon
Une enquête par sondage a été réalisée dans la ville de
Ouagadougou où 99% des sièges sociaux des sociétés de cabinets
d’expertise comptable du Burkina Faso sont localisés.
L’enquête s’est adressée à l’ensemble des cabinets d’audit
inscrits au tableau de l’Ordre National des Experts Comptables et
Comptables Agréés du Burkina Faso (ONECCA-BF). À l’instar des
autres pays de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine
(UEMOA), deux listes de professionnels cohabitent dans le tableau de
l’ONECCA-BF : les experts comptables et les comptables agréés ;
seule la première liste peut exercer les fonctions de commissaire aux
comptes. Il est à noter qu’au Burkina Faso, nul ne peut exercer la
profession comptable libérale s’il n’est pas préalablement inscrit au
tableau de l’ONECCA.
L’Ordre compte 56 experts comptables dont 28 sociétés
d’expertise comptable, 25 comptables agréés et 3 sociétés de
comptabilité.
Sur les 56 experts comptables sollicités, 45 (soit 80,36%) ont
effectivement répondu ; leurs principales caractéristiques sont
présentées dans le tableau 1.

Tableau 1 : Quelques caractéristiques des experts comptables


interrogés
Caractéristiques Effectif Pourcentage
Age entre 50-59 ans 23 51,11%
Expérience professionnelle
36 80%
supérieure à 10 ans
Effectif du personnel
30 66,66%
inférieur à 10

157
Collecte et traitement des données
A partir de la revue de littérature et de l’examen des textes
réglementaires burkinabè, il a été recensé les facteurs influençant la
perception de l’indépendance du commissaire aux comptes (CAC).
Sur cette base, un questionnaire a été élaboré et destiné aux experts
comptables.
Les principaux facteurs qui ont une influence sur l’indépendance
de l’auditeur légal ont été présentés sur une échelle de Likert à cinq
(5) points : influence négative forte ; influence négative faible ;
influence nulle ; influence positive faible ; influence positive forte.
La pertinence du questionnaire a été validée en le soumettant à
trois (3) experts comptables. Ce pré-test s’est réalisé par le biais
d’entretiens individuels durant lesquels il a été demandé aux
personnes interrogées de répondre aux questionnaires tout en discutant
de la pertinence et la compréhension de chaque question. L’analyse de
ces entretiens a conduit à apporter quelques modifications au
questionnaire pour avoir la version définitive.
Les experts comptables ont été sollicités par téléphone à prendre
part à l’enquête. La collecte des données s’est faite dans la période
d’avril à juin 2016, par entretien direct à partir du questionnaire ci-
dessous présenté.
Les données collectées ont été traitées avec le logiciel SPSS. Une
série de quatre (4) analyses en composantes principales (ACP) a été
réalisée. Ces ACP permettent d’obtenir des facteurs agrégés
indépendants entre eux. Le test de KMO et le test de spécificité de
Bartlett ont été utilisés pour mesurer la cohérence des items et la
qualité de la représentation.
3.2. Présentation et discussions des résultats
Les facteurs perçus par les experts comptables ont été structurés
en quatre (4) groupes à l’instar des travaux de Ben Saad et Lesage
(2008) : les facteurs dépendant de l’auditeur, les facteurs dépendant de
l’audité, les facteurs dépendant de l’auditeur et de l’audité et les
facteurs ne dépendant ni de l’auditeur ni de l’audité.
Résultats relatifs aux facteurs dépendant de l’auditeur
Quatorze (14) items liés aux facteurs dépendant de l’auditeur ont
été soumis aux experts comptables sur une échelle de Likert à cinq (5)
points. Une analyse en composantes principales (ACP) a été utilisée
pour identifier les facteurs agrégés indépendants entre eux ; le test de

158
KMO et le test de spécificité de Bartlett ont été utilisés pour mesurer
la cohérence des items et la qualité de la représentation.
Le test de KMO (0,804) est significatif avec un indice supérieur
à 0,5. Le test de Bartlett (0,000) prouve que l’étude est significative
avec un indice inférieur à 0,05.
Une première ACP a été réalisée sur les quatorze (14) items à la
suite de laquelle trois (3) items présentant des indices inférieurs à 0,5
ont été éliminés5. Après l’élimination des items de mauvaise qualité,
une deuxième ACP a été réalisée les onze (11) items identifiés comme
représentatifs avec un coefficient supérieur à 0,5 et variant entre 0,697
et 0,866.
Les résultats de cette ACP (annexe 2) permettent d’identifier
quatre (4) composantes principales dont les valeurs propres sont
supérieures à 1. Ces composantes expliquent 77,448% de la variance
totale.
Le tableau 2 suivant présente la matrice des corrélations entre les
quatre (4) composants et les onze (11) items retenus dans l’ACP.
Tableau 2 : Matrice des composantes issue de l’ACP sur les items
dépendant de l’auditeur
Composante
1 2 3 4
La mise en place d’une charte éthique interne
,840 -,293 -,046 ,061
au cabinet
L’auditeur n’a jamais fait l’objet de mise en
,830 ,133 ,447 ,095
cause en responsabilité
Le respect de l’auditeur de tous ses
,824 ,286 ,100 -,195
engagements envers les tiers
Le respect strict du secret professionnel ,804 ,093 ,033 -,271
L’auditeur a une réputation positive ,489 ,777 -,018 -,147
Le cabinet n’appartient pas au réseau
-,178 -,733 ,276 ,211
international BIG 4
L’auditeur est diplômé d’expertise comptable ,395 -,466 ,727 ,156
L’auditeur a une importante expérience
,476 -,417 ,721 -,047
professionnelle
L’auditeur a une bonne connaissance des
,415 ,323 ,713 -,488
normes comptables

5
Les items éliminés sont : « L’auditeur est un praticien exerçant seul » (0,442),
« L’auditeur ne commet pas de faute professionnelle en dehors de sa mission »
(0,476), et « L’auditeur respecte ses obligations fiscales personnelles ».

159
Le cabinet d’audit est un cabinet national de
,215 -,110 ,046 -,776
taille réduite
Le cabinet d’audit est un cabinet de grande
,166 -,259 -,106 ,709
taille
Source : Analyse en composantes principales réalisée à partir du
logiciel SPSS

L’analyse du tableau ci-dessus montre que quatre (4) facteurs ont


été extraits correspondants aux quatre (4) composantes.
Le facteur A1, dénommé « Ethique », est composé de quatre (4)
items fortement corrélés positivement à la composante 1 qui explique
25,369 % de la variance totale :
- la mise en place d’une charte éthique interne au cabinet
(0,840) ;
- l’auditeur n’a jamais fait l’objet de mise en cause en
responsabilité (0,830)
- le respect de l’auditeur de tous ses engagements envers les
tiers (0,824) ;
- le respect strict du secret professionnel (0,804).
Selon les différents experts comptables interrogés, l’éthique a
une influence positive forte sur l’indépendance du commissaire aux
comptes. Ce résultat signifie qu’un auditeur qui a une sensibilité
éthique forte est considéré comme un acteur indépendant et capable de
résister aux pressions des dirigeants sociaux. Prat dit Hauret (2003)
estime que plus la sensibilité éthique de l’auditeur est perçue comme
forte, plus les utilisateurs de l’information comptable et financière le
perçoivent comme un acteur indépendant et capable de résister aux
pressions dans le cadre de sa mission d’opinion sur les comptes
annuels.
Le facteur A2 est dénommé « Réputation de l’auditeur » ; il a une
variance expliquée égale à 20,121% et est composé de deux (2) items :
- l’auditeur a une réputation positive (0,777) ;
- le cabinet n’appartient pas au réseau international BIG 4 (-
0,733).
D’après ces résultats, les experts comptables considèrent que la
bonne réputation a une influence relativement forte sur l’indépendance
de l’auditeur légal. Cela signifie que plus l’auditeur a une bonne
réputation, plus son indépendance sera forte. La réputation de

160
l’auditeur apparaît donc comme un garde-fou contre les risques de
perte d’objectivité. Les travaux de Watts et Zimmerman (1986),
montrent que la réputation est la raison la plus importante dont
dispose l’auditeur pour résister aux pressions de l’équipe.
A contrario, le fait que le cabinet n’appartienne pas au réseau
international BIG 4 a une influence négative forte.
Le facteur A3 est dénommé « Compétence » ; il représente
17,77% de la variance expliquée et se compose de trois (3) items :
- l’auditeur est diplômé d’expertise comptable (0,727) ;
- l’auditeur a une importante expérience professionnelle
(0,721) ;
- l’auditeur a une bonne connaissance des normes comptables
(0,713).
La compétence a une influence positive sur l’indépendance de
l’auditeur. Ce résultat signifie qu’un auditeur peut difficilement être
indépendant s’il n’est pas compétent. La compétence permet à
l’auditeur de découvrir les fraudes ou irrégularités dans les états
financiers du client. Flint (1988) révèle que les auditeurs doivent
posséder des connaissances, une formation, une qualification et une
expérience suffisante pour mener à bien un audit financier.
Abdolmohammadi et Wright (1987) ont montré que lors d’une
situation complexe à résoudre par l’auditeur, le niveau d’expérience
acquise a une influence très positive sur la qualité de la réponse
apportée au problème posé. Prat dit Hauret (2003) souligne qu'un
auditeur peut difficilement être indépendant s’il n’est pas compétent,
la compétence de l’auditeur étant une condition nécessaire à son
indépendance. Pour Gandja (2013), plus l’auditeur est suffisamment
qualifié et expérimenté, plus il est capable d’apprécier la complexité
d’une situation.
Le facteur A4 est dénommé « Taille du cabinet » ; il explique
14,188% de la variance. Les items qui se rapportent à ce facteur sont :
- le cabinet d’audit est un cabinet national de taille réduite (-
0,776) ;
- le cabinet d’audit est un cabinet de grande taille (0,709).
Les experts comptables considèrent que la petite taille du cabinet
a une influence négative relativement forte sur l’indépendance. Par
contre, ils considèrent que le fait que le cabinet soit de grande taille a
une influence positive faible sur l’indépendance. Ces résultats

161
signifient que les grands cabinets d’audit seraient plus indépendants
que les petits car ils risqueraient de perdre leur réputation et
d’importants revenus potentiels en cas de comportement de
dépendance. De Angelo (1981) estime pour sa part que les grands
cabinets d’audit seraient plus indépendants que les petits en raison de
leur portefeuille clients important et diversifié. Prat dit Hauret (2003)
précise que les grands cabinets seraient alors perçus par les utilisateurs
de l’information financière comme plus indépendants que les plus
petits car leurs condamnations en dommages et intérêts seraient plus
lourdes en cas d’erreur.
Résultats relatifs aux facteurs dépendant de l’audité
L’analyse du deuxième groupe de facteurs a conduit à déterminer
le test de KMO et le test de spécificité de Bartlett. Le test de KMO est
significatif avec un indice supérieur à 0,5. Le test de Bartlett prouve
que notre étude est significative avec un indice inférieur à 0,05.
Après l’examen de la qualité de représentation des sept (7) items
qui forment de groupe de facteurs, deux (2) items jugés non
représentatifs qui sont l’existence d’un comité d’audit de grande taille
(0,305) et la bonne liquidité de l’entreprise auditée (0,456) ont été
éliminés.
La qualité de représentation des cinq (5) items varie entre 0,772
et 0,910. Deux grands facteurs (tableau 3) émergent de l’ACP
expliquant 84,076% de la variance (annexe 3).
Tableau 3 : Matrice des composantes issue de l’ACP sur les items
dépendant de l’audité
Composante
1 2
L’existence d’un comité d’audit composé
,939 ,147
d’administrateurs indépendants
L’existence d’un comité d’audit actif ,879 ,372
L’existence d’un comité d’audit composé de
,861 ,308
membres d’une grande expertise
La flexibilité des règles comptables ,453 -,761
La gestion de résultat ,596 -,645
Les facteurs retenus issus de cette extraction sont au nombre de
deux (2) comme le montre le tableau ci-dessus.
Le facteur B1, dénommé « Gouvernance d’entreprise », explique
59,092 % de la variance. Il regroupe trois (3) items sous-jacents qui se
rapportent au système de gouvernance de l’entreprise:

162
- l’existence d’un comité d’audit composé d’administrateurs
indépendants (0,939) ;
- l’existence d’un comité d’audit actif (0,879) ;
- l’existence d’un comité d’audit composé de membres d’une
grande expertise (0,861).
Ce facteur qui regroupe les trois (3) items susmentionnés a une
influence positive forte sur la perception des répondants de
l’indépendance du commissaire aux comptes. Ce résultat signifie que
la bonne gouvernance permet de renforcer l’indépendance du
commissaire aux comptes en garantissant le processus de désignation
et de révocation de l’auditeur. Hyeesoo et Kallapur (2004), relèvent
que l’indépendance des auditeurs est positivement corrélée à
l’efficacité de la gouvernance d’entreprise (direction générale, conseil
d’administration, comités d’audit). De même, Ben Saad et Lesage
(2007) précisent que le problème d’indépendance se pose lorsque la
direction intervient dans le processus de désignation/révocation de
l’auditeur. Voilà pourquoi Ledouble (1996) insistait sur l’instauration
de comités d’audit pour créer une interposition entre le contrôleur et le
contrôlé, afin d’alléger la pression que l’entreprise peut faire peser sur
l’auditeur.
Le facteur B2, dénommé « Propension à gérer le résultat », a
une variance expliquée de 24,984%. Les items qui se rapportent à ce
facteur sont :
- la flexibilité des règles comptables (-0,761) ;
- la gestion du résultat (-0,645).
Les différents experts comptables interrogés considèrent que ce
facteur a une influence négative relativement faible sur
l’indépendance de l’auditeur légal. Ce résultat signifie que la réaction
des auditeurs face aux manipulations discrétionnaires des dirigeants
pour modifier les états financiers peut nuire à leur indépendance. Les
travaux de Hartlay et Ross (1972) relèvent que la gestion du résultat a
été classée en haut de la liste des facteurs compromettant
l’indépendance de l’auditeur. Les travaux de Ben Saad et Lesage
(2007) soulignent que les dirigeants peuvent être amenés à faire des
choix comptables de nature à embellir la comptabilité, d'autant plus
que leurs compétences sont jugées en fonction des performances de
l'entreprise. Cette situation est encouragée par la flexibilité des règles
et méthodes comptables qui constituent des facteurs susceptibles
d’avoir une influence négative importante sur le niveau

163
d’indépendance perçue de l’auditeur (Hartlay et Ross, 1972 ; Prat dit
Hauret, 2003).
Résultats relatifs aux facteurs dépendant de l’auditeur et de l’audité
Le test de KMO est significatif avec un indice supérieur à 0,5. Le
test de Bartlett est significatif avec un indice inférieur à 0,05.
Le tableau de la qualité de représentation a révélé que la
prestation des services de sélection des cadres et de nomination
(0,489) est le seul item non représentatif sur les dix-sept (17) (Annexe
4). Après élimination de ce dernier, on obtient quatre (4) facteurs qui
expliquent 69,035% de la variance.
Le tableau 4 suivant présente la matrice des corrélations entre les
quatre (4) composants et les onze (16) items retenus dans l’ACP.
Tableau 4 : Matrice des composantes issue de l’ACP sur les items
dépendant de l’auditeur et de l’audité
Composante
1 2 3 4
L’établissement des états financiers -,812 ,432 -,035 ,327
L’existence d’un lien familial entre
-,792 -,392 ,407 -,034
l’auditeur et l’audité
L’auditeur perçoit des rémunérations
-,745 ,306 ,412 -,107
autres que celles prévues par la loi
Les honoraires provenant des services non
liés à l’audit sont supérieurs ou égaux à 50 -,740 ,202 ,161 -,214
% des honoraires d’audit
Les honoraires provenant des services non
liés à l’audit sont supérieurs ou égaux à 25 -,732 -,135 ,217 ,140
% des honoraires d’audit
L’auditeur perçoit des honoraires trop
élevés par rapport à la totalité de ses -,717 ,279 ,457 -,329
honoraires
Les honoraires provenant des services non
liés à l’audit sont supérieurs ou égaux à -,715 ,157 ,438 ,319
100% des honoraires d’audit
Les revenus de l’auditeur dépendent de la
,007 -,709 ,378 ,034
rétention d’un client particulier
L’importance d’un client particulier dans
,495 -,707 ,164 -,016
le portefeuille global du cabinet
L’auditeur perçoit un montant supérieur ou
égal à 10% du total des revenus d’un seul ,234 -,705 ,242 ,129
et même client
L’auditeur est un actionnaire de l’audité ,394 -,704 -,105 ,306

164
L’auditeur reçoit un prêt sans intérêt de
-,145 -,697 ,005 ,220
l’audité
La publication des honoraires d’audit -,250 ,155 ,663 ,388
Publication des honoraires provenant des
,047 -,248 ,658 ,375
services non liés à l’audit
La rotation du cabinet d’audit -,177 ,164 ,220 ,675
L’existence de conflits d’intérêts ,271 -,337 ,137 -,667

Le facteur C1 dénommé « Incompatibilités et honoraires », dont


la variance expliquée est de 27,641% regroupe sept (7) items :
- l’établissement des états financiers (-0,812) ;
- l’existence d’un lien familial entre l’auditeur et l’audité (-
0,792) ;
- l’auditeur perçoit des rémunérations autres que celles prévues
par la loi (-0,745) ;
- les honoraires provenant des services non liés à l’audit sont
supérieurs ou égaux à 50 % des honoraires d’audit (-0,740) ;
- les honoraires provenant des services non liés à l’audit sont
supérieurs ou égaux à 25 % des honoraires d’audit (-0,732) ;
- l’auditeur perçoit des honoraires trop élevés par rapport à la
totalité de ses honoraires (-0,717) ;
- les honoraires provenant des services non liés à l’audit sont
supérieurs ou égaux à 100% des honoraires d’audit (-0,715).
Les experts comptables interrogés considèrent que les deux (2)
premiers items de ce facteur ont une influence négative forte sur
l’indépendance du commissaire aux comptes et les cinq (5) autres
items ont une influence négative faible. Ces résultats signifient que
l’indépendance de l’auditeur est fortement remise en cause lorsque ce
dernier détient des intérêts personnels, professionnels, financiers ou
encore familiaux chez le client. Ben Saad et Lesage (2007), insistent
sur le fait que l’existence de conflits d’intérêts dans la relation
auditeur-audité est liée au fait que l’audité privilégie ses propres
intérêts à ceux de toutes les parties prenantes.
Les études de Gandja (2013) montrent que la publication du
montant des honoraires influence positivement l’indépendance perçue.
Le facteur C2, dénommé « Dépendance financière », explique
18,051% de variance et est composé de cinq (5) items :

165
- les revenus de l’auditeur dépendent de la rétention d’un client
particulier (-0,709) ;
- l’importance d’un client particulier dans le portefeuille global
du cabinet (-0,707) ;
- l’auditeur perçoit un montant supérieur ou égal à 10% du total
des revenus d’un seul et même client (-0,705) ;
- l’auditeur est un actionnaire de l’audité (-0,704) ;
- l’auditeur reçoit un prêt sans intérêt de l’audité (-0,697).
La dépendance financière a une influence négative sur
l’indépendance du commissaire aux comptes. Ce résultat signifie que
la liberté de jugement de l’auditeur diminue lorsque ses revenus
dépendent de la rétention d’un client particulier ou de l’importance
d’un client particulier dans le portefeuille global du cabinet (Richard,
2003).
Le facteur C3 est dénommé « Publication des honoraires » ; il
explique 12,169% de la variance expliquée et regroupe deux (2)
items :
- la publication des honoraires d’audit (0,663) ;
- la publication des honoraires provenant des services non liés à
l’audit (0,658).
La publication des honoraires a une influence positive faible sur
l’indépendance de l’auditeur. Ce résultat signifie que la publication
des honoraires d’audit intervient dans le renforcement de la
transparence financière. Elle est destinée à mettre en évidence
l’étendue des travaux d’audit réalisés (grâce au montant des
honoraires d’audit) et l’indépendance des auditeurs en permettant une
évaluation de la dépendance financière. Ce résultat va dans le même
sens que les travaux de Coulier (2009).
Le facteur C4 est dénommée « Rotation des auditeurs et
l’existence de conflits d’intérêts » ; il explique 11,174% de la variance
et est composé de deux (2) items :
- la rotation du cabinet d’audit (0,675) ;
- l’existence de conflits d’intérêts (-0,667).
Les experts comptables interrogés considèrent que la rotation du
cabinet d’audit a une influence positive faible sur l’indépendance du
CAC. Par contre, l’existence de conflits d’intérêts a une influence
négative faible. Ce résultat signifie que la rotation améliore la qualité

166
de l’audit et l’indépendance de l’auditeur. La rotation permet d’éviter
l’installation d’une trop grande familiarité entre auditeur et audité ; ce
résultat est confirmé par ceux de Chi et al. (2004). En revanche,
d’autres estiment qu’elle peut entrainer une perte de compétence et
influencer négativement la qualité de la vérification (Favere-Marchesi
et Emby, 2005 ; Siegel, 1999). Ce risque est attribuable à la
méconnaissance du système du client dans les premières années de la
rotation (Johnson et al., 2002). Siegel (1999), lui, s’oppose à la
rotation des associés sur un dossier comme solution à la
problématique de l’indépendance perçue de l’auditeur. Pour
l’existence de conflits d’intérêts, ce résultat signifie que la présence de
conflits d'intérêts peut conduire les auditeurs à prendre une décision de
manière à privilégier ses propres intérêts, ou ceux de son client. Ainsi,
ce comportement contraire à l'éthique empêche l’auditeur de rester
impartial et objectif.
Pour Gandja (2013), ces divergences d'opinions conduisent à
affirmer que la rotation a une influence positive sur l’indépendance
perçue alors que, paradoxalement, on observe le contraire pour ce qui
est de l’indépendance réelle.
Résultats relatifs aux facteurs ne dépendant ni de l’auditeur ni de
l’audité
Le test de KMO (0,779) et le test de spécificité de Bartlett
(0,000) prouvent que notre étude est significative.
Pour ce groupe de facteurs, le tableau de la qualité de
représentation a révélé que le contrôle interne (0,218) et les remises et
les rabais sur les travaux d’audit (0,096) sont les items non
représentatifs. Après l’élimination de ces deux (2) items, l’ACP
présentée (annexe 5) fait apparaitre un facteur principal et une variable
isolée qui explique 69,302% de la variance (tableau 5).

Tableau 5 : Matrice des composantes issue de l’ACP sur les items ne


dépendant ni de l’auditeur et ni de l’audité
Composante
1
Le renforcement de la responsabilité juridique de l’auditeur ,872
Le Co commissariat aux comptes ,851
Le contrôle externe ,829
La forte concurrence entre les cabinets d’audit -,775
Source : Analyse en composantes principales réalisée à partir du
logiciel SPSS

167
Le facteur D1 dénommé « Contrôle de la profession et
responsabilisé juridique » comprend quatre (4) items :
- le renforcement de la responsabilité juridique de l’auditeur
(0,872) ;
- le co-commissariat aux comptes (0,851) ;
- le contrôle externe (0,829) ;
- la forte concurrence entre les cabinets d’audit (-775).
Il existe une influence positive forte de ce facteur sur
l’indépendance de l’auditeur légal. La variable isolée qui découle de
l’ACP est la forte concurrence entre les cabinets d’audit (-0,775).
Cette variable a une influence négative relativement forte. Pour le
contrôle de la profession et responsabilisé juridique, ce résultat
signifie que les sanctions civiles, pénales ou disciplinaires prononcées
contre les auditeurs permettent de renforcer le niveau d’indépendance
perçue. Par contre, la concurrence entre les cabinets d’audit peut
inciter les auditeurs à compromettre leur indépendance par
l’acceptation des méthodes comptables non autorisées (Knapp, 1985
et Kunitake et White, 1986).
L’analyse de la recherche menée auprès des experts comptables
met clairement en évidence des facteurs permettant d’améliorer le
niveau d’indépendance et d’autres le diminuant.

4. Conclusion
Le présent article avait pour objectifs d’étudier, dans le contexte
burkinabè, la perception de l’indépendance des commissaires aux
comptes et les facteurs d’influence de cette indépendance. A partir de
la revue de la littérature et de la réglementation, 44 variables
susceptibles d’avoir une influence sur l’indépendance du commissaire
aux comptes ont été identifiées. Sur la base de ces variables, un
questionnaire a été élaboré et administré auprès des experts
comptables au Burkina Faso.
Une série de quatre (4) analyses en composantes principales
(ACP) réalisées a permis d’obtenir des facteurs agrégés indépendants
entre eux et structurés en quatre (4) groupes : les facteurs dépendant
de l’auditeur, les facteurs dépendant de l’audité, les facteurs
dépendant de l’auditeur et de l’audité et les facteurs ne dépendant ni
de l’auditeur ni de l’audité.

168
De cette analyse, deux (2) types de facteurs ont été mise en
évidence ; les facteurs ayant une influence positive sur l’indépendance
du commissaire aux comptes et ceux ayant une influence négative.
La mise en place d’une charte éthique interne au cabinet, le
niveau de sensibilité éthique, la bonne réputation de l’auditeur, le
niveau d’expérience et de compétence, la grande taille, la mise en
place des comités d’audit, la publication des honoraires, la rotation du
cabinet d’audit, le co-commissariat aux comptes, le contrôle de la
profession et les sanctions judiciaires sont perçus par les experts
comptables burkinabè comme ayant une influence positive sur
l’indépendance du commissaire aux comptes.
Par contre, la petite taille de l’entreprise, la flexibilité des règles
comptables, la gestion du résultat, les incompatibilités, la dépendance
financière, les conflits d’intérêts et la forte concurrence entre les
cabinets d’audit sont perçus comme ayant une influence négative sur
l’indépendance.
Les résultats obtenus à l’issue de cette étude peuvent aider les
organisations comptables professionnelles ainsi que l’Ohada à établir
des normes qui permettent de renforcer l’indépendance du
commissaire aux comptes.

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171
Annexes

Annexe 1 : Facteurs susceptibles d’influencer l’indépendance du


commissaire aux comptes

Influence Facteurs Auteurs


Compétence de l’auditeur Prat-Dit Hauret (2003)
Blokdijik &al. (2006)
Taille du cabinet
NurBarizah & Ahmad (2009)
Al-Sawalqa & Qtish (2012)
Chan et al. (1993)
Réputation
Al Ajmi & Saudagaran (2011)
Ethique Prat-Dit Hauret (2003)
Gouvernance de l’entreprise Salehi (2008)
Existence d’un comité Alleyne et al. (2006)
d’audit Al-Sawalqa & Qtish (2012)
Positive Ghosh & Moon (2005)
Rotation des auditeurs
Daniels et Booker (2011)
Beattie et al. (1999)
Publication des honoraires
Al-Ajmi & Saudagaran (2011)
Beattie &al. (1999)
Responsabilité juridique
Prat-Dit Hauret (2003)
Co-commissariat aux
Matsumura & Tucker (1995)
comptes
Revue du dossier par un co-
Prat-Dit Hauret (2003)
associé
Contrôle externe Beattie et al. (1999)
Gestion de Résultat Shockley (1981)
Flexibilité des règles Hartlay & Ross (1972)
comptables Salehi &al. (2009)
Bonne situation financière du Bell &al. (2001)
client Prat-Dit Hauret (2003)
Nur-Barizah et al. (2005)
Incompatibilités Salehieral. (2009)
Négative
Dart (2011)
Importance du montant des Adeyemi et Akinniyi (2001)
honoraires Nur-Barizah et al. (2005)
Conflits d’intérêts Koh & Mahathevan (1993)
Concentration du marché Jeong &al. (2005)
d’audit Nur-Barizah &al. (2009)
Salehi et al. (2009)
Source : Adapté de Ben Saad et Lesage (2008, p. 123)

172
Annexe 2 : Variance totale expliquée issue de l’ACP sur les items
dépendant de l’auditeur
Extraction Sommes des carrés
Valeurs propres initiales
des facteurs retenus
Composante
% de la % % de la %
Total Total
variance cumulés variance cumulés
1 2,241 25,369 25,369 2,241 25,369 25,369
2 1,663 20,121 45,490 1,663 20,121 45,490
3 1,405 17,770 63,260 1,405 17,770 63,260
4 1,231 14,188 77,448 1,231 14,188 77,448
5 ,990 6,003 83,451
6 ,923 5,393 88,844
7 ,767 3,972 92,816
8 ,526 1,785 94,601
9 ,501 1,553 96,154
10 ,433 1,939 98,093
11 ,320 1,907 100,000
Source : Analyse en composantes principales réalisée à partir du logiciel
SPSS

Annexe 3 : Variance totale expliquée issue de l’ACP sur les items


dépendant de l’audité

Extraction Sommes des carrés


Valeurs propres initiales
des facteurs retenus
Composante
% de la % de la %
Total % cumulés Total
variance variance cumulés
1 2,955 59,092 59,092 2,955 59,092 59,092
2 1,249 24,984 84,076 1,249 24,984 84,076
3 ,488 9,751 93,827
4 ,202 4,033 97,860
5 ,107 2,140 100,000
Source : Analyse en composantes principales réalisée à partir du
logiciel SPSS

173
Annexe 4 : Variance totale expliquée issue de l’ACP sur les items
dépendant de l’auditeur et de l’audité
Extraction Sommes des carrés
Valeurs propres initiales
des facteurs retenus
Composante
% de la % % de la %
Total Total
variance cumulés variance cumulés
1 2,864 27,641 27,641 2,864 27,641 27,641
2 1,805 18,051 45,692 1,805 18,051 45,692
3 1,217 12,169 57,861 1,217 12,169 57,861
4 1,117 11,174 69,035 1,117 11,174 69,035
5 0,993 5,84 74,875
6 0,886 5,215 80,09
7 0,711 4,18 84,27
8 0,597 3,514 87,784
9 0,473 2,785 90,569
10 0,405 2,383 92,952
11 0,369 2,172 95,124
12 0,292 1,717 96,841
13 0,226 1,33 98,171
14 0,193 1,135 99,306
15 0,089 0,526 99,832
16 0,067 0,168 100,000
Source : Analyse en composantes principales réalisée à partir du
logiciel SPSS

Annexe 5 : Variance totale expliquée issue de l’ACP sur les items ne


dépendant ni de l’auditeur et ni de l’audité
Composante

Extraction Sommes des carrés


Valeurs propres initiales
des facteurs retenus
% de la % % de la %
Total Total
variance cumulés variance cumulés
1 2,772 69,302 69,302 2,772 69,302 69,302
2 ,539 13,475 82,777
3 ,425 10,621 93,398
4 ,264 6,602 100,000
Source : Analyse en composantes principales réalisée à partir du
logiciel SPSS

174
LE RÔLE ET L’IMPORTANCE DU CONTRÔLE DE
GESTION DANS UN ÉTABLISSEMENT PUBLIC : CAS
D’UNE UNIVERSITÉ TOGOLAISE

BIGOU-LARE Nadédjo,
KOUNETSRON Yao Messah
Maître de Conférences à Université de Lomé
Emails : enbigou-lare@hotmail.com;
messahyao@gmail.com

Résumé
Les universités publiques ne sont pas épargnées par les défis de
la mondialisation notamment la concurrence des structures privées de
formation et la nécessité d’assurer une formation de qualité aux
étudiants pour améliorer leur chance sur un marché du travail de plus
en plus concurrentiel. Le contrôle de gestion, outil de management de
performance répandu dans les entreprises privées, mérite d’être
mobilisé par ces universités malgré leurs spécificités. A partir du cas
d’une université togolaise, on a constaté la présence de l’outil
budgétaire, la mise en place progressive d’un tableau de bord et
l’évaluation des coûts des programmes de formation.
Mots clés: Université, contrôle de gestion, importance, rôle.
Abstract
The public universities are not saved by the challenges of the
globalization in particular the competition of private structures and the
necessity of assuring training quality to improve student’s chance on a
competitive labor market. So the management control, as performance
management tool spread in private enterprises, deserves to be
mobilized by universities in spite of their specificities. From the case
of à Togolese public university, we noticed the presence of the
budgetary tool and the progressive implementation of a scorecard and
an evaluation of costs of training programs.
Keywords: Public university, management control, importance, role.

1. Introduction
Face aux limites de l’administration publique fondée
essentiellement sur une bureaucratie wébérienne rigide, coûteuse, non

175
innovante et trop centralisée, le nouveau management public s’inscrit
dans une logique d’Economie, Efficacité et Efficience (Amar et
Berthier, 2003). L’idée principale est que les méthodes de
management du secteur privé sont supérieures à celles du secteur
public, et peuvent lui être transposées. Le nouveau management
public inscrit les établissements publics dans une logique de gestion
par les résultats, de satisfaction des clients, de décentralisation… Cela
se traduit par de nombreuses réformes dans les structures publiques
telles que les hôpitaux et les universités. En France, la loi Bachelot en
2009, impulse une réforme dont l’objectif est l’optimisation de la
gestion et la réduction des déficits des hôpitaux (Bourret et al., 2013).
Dans le contexte universitaire, on assiste à la rénovation des outils
(Solle, 2001) et à l’adoption des pratiques de reporting (Chatelain-
Ponroy et Morin-Delerm, 2012), de la comptabilité de gestion et du
contrôle de gestion (Bollecker, 2013 ; 2016).
Ainsi, tous ces changements sont dictés par un environnement en
perpétuelle évolution (Mignot-Gérard, 2012). La loi relative aux
libertés et responsabilité des universités (LRU) justifie le besoin de
généraliser le contrôle de gestion dans les établissements publics
français. Küpper (2003) relève que l’enseignement supérieur doit
aussi faire face à la concurrence et qu’il convient d’analyser les
mécanismes de gestion de ces structures. Les universités publiques ont
l’obligation d’être performantes au même titre que les établissements
privés d’enseignement pour plusieurs raisons. Tout d’abord, il s’agit
d’assurer une bonne utilisation des ressources publiques qui
constituent la principale source de financement. Puis, les universités
publiques doivent assurer la qualité de leurs produits que sont les
diplômés en tenant compte de la compétition sur le marché du travail.
Au Togo, les universités publiques disposent d’une autonomie
financière selon la loi portant statut des universités du Togo.
Cependant, ces universités sont essentiellement financées par l’Etat au
moyen de subventions représentant environ 90% de leurs ressources.
Les dirigeants des universités publiques ont une marge de manœuvre
très limitée car la masse salariale imputée au budget autonome,
consomme 75% des ressources alors que les frais de scolarité qui
constituent les ressources propres essentielles sont fixés par l’Etat et
ne reflètent pas les coûts de fonctionnement de ces institutions. En
conséquence, les investissements sont limités et les dépenses de
fonctionnement doivent être maîtrisées. Au même moment, le nombre
des étudiants ne fait qu’augmenter. C’est dans ce contexte de

176
contrainte sur les ressources et de recherche de la maîtrise des coûts
qu’on s’interroge sur le rôle et l’importance du contrôle de gestion
dans une université publique. Quelle est alors la place du contrôle de
gestion dans une université publique ?
Cette recherche se justifie par le fait que la littérature sur le
contrôle de gestion dans le secteur public en général et dans les
universités en particulier reste l’apanage de quelques rares auteurs.
L’état de la connaissance sur la place du contrôle de gestion dans les
universités publiques est insuffisance pour définir de façon claire les
caractéristiques des pratiques de ce secteur. L’objectif principal de cet
article est de présenter les pratiques actuelles de contrôle de gestion à
l’Université de Lomé au Togo (ULT), afin d’analyser leurs limites
face aux enjeux actuels auxquels l’institution est confrontée. L’article
comporte trois parties, la première est consacrée à la synthèse de la
littérature relative au contrôle de gestion dans les universités, la
deuxième présente le cas de l’Université de Lomé et les pratiques de
contrôle de gestion qu’on y trouve, la troisième partie est réservée aux
discussions.

2. De la gestion au contrôle de gestion dans les


universités
La spécificité des établissements d’enseignement, ou de
formation, influence les outils et méthodes de gestion qui y sont
développés. Il importe d’examiner les particularités de ces institutions
sur le plan de la gestion.
2.1. Les spécificités de la gestion des universités
Les établissements d’enseignement sont caractérisés selon
Vulliez (1997) par les apprenants qui y sont formés, les enseignants
dont ils disposent, les méthodes et processus pédagogiques appliqués
et enfin, leur notoriété et leur image. La gestion consistera à combiner
ces caractéristiques pour atteindre les objectifs fixés. Selon cet auteur,
l’évaluation et le contrôle de l’entreprise éducative doivent prendre en
compte quatre aspects à savoir : les objectifs et missions, les
enseignants, les apprenants et le budget. Dans un sens plus large que
l’évaluation et le contrôle, la gestion de la formation ou d’une
organisation développant des activités de formation implique, selon
Cohen (1997), des responsabilités opératoires relevant des domaines
de : la pédagogie, l’administration et la logistique, la communication,

177
la gestion comptable et financière et la gestion des ressources
humaines. Le suivi des coûts de revient, l’incidence des projets sur les
charges et produits, la mesure des contributions aux résultats, le suivi
des équilibres financiers et la gestion budgétaire sont également des
aspects importants. Ce cadre général de la gestion des organismes de
formation montre l’importance de plusieurs outils traditionnels de
management de la performance.
Cependant, la spécificité des universités publiques est liée à
plusieurs facteurs. Contrairement aux entreprises qui poursuivent un
objectif de maximisation, l’université publique ne vise pas un résultat
financier comme cible à atteindre. Les missions et objectifs d’une
université publique sont d’abord qualitatifs et concernent le
développement du capital humain et la production des connaissances.
Vulliez (1997) estime que ces objectifs sont souvent mal formulés et
méritent d’être précisés. Ainsi la logique du management n’est plus la
même et l’usage des outils traditionnels doit tenir compte de ce
facteur. Selon Küpper (2003), la rentabilité fait partie des objectifs des
universités publiques mais seulement elle vient en second rang après
leurs finalités non marchandes. Pour gérer leurs nombreuses activités
économiques, les universités publiques doivent disposer néanmoins de
systèmes de comptabilité financière et analytique différents de ceux
du secteur marchand. La base du système de comptabilité devrait être,
selon Küpper, un tableau de trésorerie montrant le flux des capitaux
reçus et le bilan permettrait essentiellement de montrer les
changements de valeur des actifs dans le temps. Enfin, concernant le
résultat, l’auteur pense qu’il doit mettre en exergue les dépenses
monétaires et les coûts des moyens d’un côté, et de l’autre des
résultats non monétaires de l’enseignement, de la recherche et des
services. La prise en compte de la spécificité des universités publiques
se traduit alors par des états de résultat comportant à la fois des
résultats non monétaires et des résultats monétaires.
En outre, Fabre (2013) considère que les universités sont des
organisations politiques et cela est un handicap à la mise en œuvre des
outils modernes de gestion. Les universités constituent un exemple
extrême d’organisation où le pouvoir est largement réparti entre
différents groupes poursuivant des objectifs très divergents. Il faut
souligner que le caractère public de l’université a aussi des
implications sur sa gestion. D’abord les salariés de l’université sont
des fonctionnaires de l’Etat en majorité. Leurs traitements ne

178
dépendent pas de la performance financière de l’institution et les
politiques de ressources humaines ne sont pas entièrement sous
contrôle. Enfin, sur le plan financier la logique budgétaire domine et
réduit la performance au taux d’exécution du budget. Selon Küpper
(op.cit.), la prise en compte de la spécificité des universités publiques
doit se traduire par un système budgétaire basé sur les résultats à partir
des mesures telles que le nombre des étudiants et des diplômés. La
distribution des fonds doit se faire sur la base des cibles convenues
nécessitant des mesures de résultat et des chiffres clés.
Ainsi, la prise en compte des missions, objectifs et des acteurs,
montre que les universités ont des spécificités dont le management
doit tenir compte. Le contrôle de gestion doit aussi s’adapter à ce
contexte.
2.2. Le contrôle de gestion dans les universités
Selon Bouquin (1997), les objectifs du contrôle de gestion sont
d’assurer l’efficacité, l’efficience et l’économie. La dimension
efficacité consiste à identifier des objectifs pertinents et provoquer des
comportements cohérents avec ces objectifs, d’où le rôle d’assurance
qualité. Sur le plan de l’efficience, il s’agit d’utiliser les ressources
disponibles de la manière la plus productive en évitant le gaspillage.
La dimension d’économie fait allusion à la nécessité de se procurer les
ressources au moindre coût. En tenant compte de la spécificité des
services, le contrôle de gestion doit permettre une évaluation des
ressources consommées, une évaluation des réalisations et une
comparaison avec les meilleures pratiques (Gervais, 1997). Cela
revient à déterminer les coûts et identifier les causes des
consommations de ressources et les moyens mis en œuvre ou mettre
en place une démarche benchmarking permettant une amélioration
continue par comparaison aux meilleures pratiques. En somme le
contrôle de gestion est un processus articulé autour de deux phases
essentielles (Bouquin, 1997). La première concerne la planification de
court terme et débouche sur les budgets. La seconde concerne le suivi
des réalisations mettant en exergue des écarts entre prévisions et
réalisations. Il s’agit aussi de suivre les indicateurs liés aux facteurs
clés de succès.
En fonction des difficultés de mise en œuvre, les rôles du
contrôle de gestion doivent être relativisés dans les universités
publiques car leurs activités ne sont pas répétitives et les extrants sont
difficilement mesurables (Bollecker, 2013). En tenant compte des

179
différents acteurs, la représentation du rôle du contrôle de gestion
pour l’équipe présidentielle est différente de celle des autres acteurs
tels que les responsables de composantes. Bollecker (2013) révèle
dans le cas d’une université publique française, une émergence du
contrôle de gestion d’abord au niveau des composantes que sont les
unités ou les établissements. Il note ainsi un échec du contrôle de
gestion central qui devrait émerger au niveau de la présidence, et
explique cette situation par la gouvernance de l’université et la
légitimité de la présidence.
Les pratiques constatées au niveau local sont orientées vers
l’optimisation et se traduisent par les budgets, les outils de calcul des
coûts des formations et de suivi budgétaire. L’étude de Chatelain-
Ponroy et al. (2006) montrait déjà que le contrôle de gestion dans les
établissements d’enseignement supérieur est caractérisé par les outils
d’analyse des coûts et des tableaux de bord. Les coûts complets sont
dominants et concernent premièrement la recherche et dans une
moindre mesure la formation initiale et la formation continue. Alors
que les coûts sont calculés pour répondre aux injonctions extérieures,
les tableaux de bord sont utilisés dans 72 % des établissements étudiés
pour combler le besoin d’information interne. Ces tableaux de bord
sont des outils de pilotage relevant du niveau central et ne permettant
pas d’orienter les décisions à un niveau décentralisé.
Les premiers destinataires des états de contrôle de gestion sont :
le secrétaire général, le président, l’agent comptable, et le chef service
financier. En dehors de ces acteurs, Fabre (2013) montre que les
doyens ont un rôle très important à jouer dans la mise en place et
l’utilisation des outils comptables et de contrôle. La comptabilité
analytique est un outil de diagnostic qui peut être utilisé comme une
« machine à comprendre », une aide à la négociation ou une machine à
trancher lorsqu’il s’agit de s’assurer une répartition optimale des
ressources. Cependant, le développement des outils comptables et de
gestion adaptés résulte de la combinaison d’une contrainte externe
forte et des motivations propres des responsables des composantes.
Lorsque ces deux conditions ne sont pas réunies, les acteurs ne vont
pas s’approprier les outils ou le système d’information et de pilotage
imposé par l’autorité de tutelle (Gauche et al., 2014).
Ainsi les outils de contrôle de gestion sont encore très faiblement
développés dans les universités et restent essentiellement orientés vers
la maîtrise de coûts des recherches et formations. Même si la

180
représentation de leur rôle par les acteurs dépend des forces en
présence et des relations politiques (Fabre, 2013), la connaissance des
pratiques reste limitée. La majorité des travaux examinés concerne un
contexte de pression étatique avec des textes de loi qui obligent les
universités publiques à recourir aux outils de contrôle de gestion. En
plus, on note la faiblesse du contrôle de gestion développé au niveau
centrale par la présidence, en comparaison des outils développés
localement au niveau des différentes unités de formation et de
recherche. L’intérêt de cette étude est d’analyser les pratiques de
contrôle dans un contexte d’autonomie financière sans aucune
pression légale obligeant les acteurs à recourir aux outils de contrôle
de gestion pour le pilotage de l’université.

3. Le cas de l’Université de Lomé au Togo (ULT)


Au préalable nous présenterons la posture méthodologique
retenue ainsi que le contexte de l’étude.
3.1. L’approche méthodologique
L’objectif de cette étude est d’appréhender les pratiques de
contrôle de gestion au sein de l’université en vue d’analyser son
importance dans le pilotage de l’institution. Etant acteur dans cette
Université et participant au processus du contrôle de gestion d’abord
au niveau central dans la commission budget et finance, ensuite au
niveau local en tant que responsable d’un institut de formation au sein
de l’université, notre posture est celle de l’observation participante.
L’avantage est qu’elle facilite l’accès à l’information dans cette étude
de cas. Le risque est de manquer d’assez de recul pour apprécier et
discuter les pratiques.
3.2. Le contexte de l’étude
L’ULT a été créée en 1970 pour former fondamentalement les
cadres de l’administration publique capable de prendre en main la
destinée du pays après son indépendance en 1960. Elle dispose d’une
autonomie financière fondée sur la loi n°97-14 portant statuts des
Universités du Togo. Après plusieurs décennies de formation, il se
pose aujourd’hui un problème d’insertion des diplômés car
l’administration publique ne peut plus seule assurer l’emploi des
jeunes formés. Alors l’université forme de plus en plus en direction
des entreprises et organisations privées et se trouve obligée d’adapter
ses offres de formation aux exigences de l’heure. Au même moment,

181
l’université doit faire face à un phénomène de massification compte
tenu de l’explosion des effectifs qui ont plus que doublé en deux
décennies. Actuellement l’ULT accueille environ 50 000 étudiants
dans les infrastructures qui ont peu évolué.
Le budget de l’université (environ 10 milliards de francs CFA)
reste essentiellement alimenté par les subventions de l’Etat
représentant près de 90%. Ce budget prend en charge les salaires du
personnel (75% des subventions), les investissements et les dépenses
de fonctionnement. Les marges de manœuvre des dirigeants se
retrouvent très limitées car les ressources internes essentiellement
constituées par les droits de scolarité sont aussi fixés par l’autorité
politique, sans prise en compte réelle des charges de l’institution. A
ces difficultés viennent s’ajouter celles liées à la réforme LMD avec
ses exigences de refonte des curricula pour une professionnalisation
qui n’est pas sans coûts.
Ces contraintes obligent la présidence à instaurer une logique
d’optimisation des ressources de fonctionnement, offrant normalement
un cadre pour le développement des outils de contrôle de gestion. La
présidence actuelle met une pression sur les doyens et directeurs des
facultés, écoles et instituts, pour réduire les charges de vacation et des
heures supplémentaires en obligeant les enseignants à respecter les
charges horaires obligatoires. Aussi les dépenses de fonctionnement
sont-elles strictement contrôlées pour limiter le gaspillage et les
fraudes. Quelle est alors la place du contrôle de gestion dans un tel
contexte ?
3.3. Le contrôle de gestion au sein de l’ULT
L’analyse du contrôle de gestion au sein de l’ULT est focalisée
sur les phases telles qu’identifiées par Bouquin (1997) à savoir la
finalisation, le pilotage et le contrôle.
3.3.1. La finalisation
Une des conditions du contrôle de gestion est l’existence des
objectifs non ambigus (Burlaud, 1997). La planification permet de
définir les objectifs de l’organisation et de faire un lien entre les
objectifs de court terme et ceux de long terme. L’ULT dispose d’un
document de planification stratégique sur un horizon de six ans
(actuellement de 2015 à 2020). Ce plan est axé sur six programmes
que sont : pilotage et soutien, développement de l’enseignement et de
la formation, promotion et valorisation de la recherche,

182
développement des œuvres universitaires et sociales, et services à la
communauté.
A chaque programme correspond un objectif stratégique, un
indicateur d’impact, une norme à réaliser et la structure responsable de
l’atteinte de l’objectif. Chaque programme est décliné en des actions
ayant chacune un indicateur d’effet, un objectif chiffré annuel et les
structures responsables de sa réalisation. Le deuxième programme,
concernant le développement de l’enseignement et de la formation, est
par exemple décliné en trois actions à savoir : adapter les offres de
formation au besoin du marché, instaurer une culture de la réussite et
de l’excellence, et réduire le nombre d’étudiants par enseignant. Un
tableau de bord global déclinant les axes stratégiques en actions avec
des indicateurs précis a été élaboré pour la première fois en fin 2016.
Malgré le retard accusé dans l’exécution de ce plan, les
différentes facultés et écoles disposent désormais d’un plan
opérationnel sur trois ans avec des objectifs précis. A partir de l’année
2017, les budgets deviennent des budgets-programmes alignés sur les
plans opérationnels et stratégiques. Le budget est essentiellement
élaboré par le service financier de l’ordonnateur avec l’appui de
l’agence comptable et la commission Budget-Finance. Il tient compte
des taux d’exécution des budgets du dernier exercice et des
propositions faites par les différentes composantes de l’université pour
l’année suivantes.
3.3.2. Le suivi des réalisations
Une évaluation périodique des réalisations effectuées est
nécessaire. Elle suppose l’existence d’un système d’information
portant sur l’acquisition et l’utilisation des ressources afin de
déterminer des résultats ou contribution de chaque composante de
l’Université. Les constats sont de plusieurs ordres. L’Université
dispose d’un service de comptabilité dirigé par un comptable public
(art.83 de la loi n°97-14 portant statut des universités du Togo)
détaché par le Ministère de l’Economie et des Finances. Les
comptables de la présidence, des facultés, écoles, instituts et des
services centraux sont des salariés de l’université mais sous la
responsabilité de l’agent comptable. Cette même loi stipule en son
article 84 que les règles de la comptabilité publique sont applicables à
l’exécution du budget de l’université. En 2015, l’agent comptable a
produit le compte de résultat et le bilan des exercices 2013 et 2014.
Cependant, ces états financiers montrent plusieurs limites.

183
On peut constater que les immobilisations sont considérées pour
leur valeur historique sans prise en compte des amortissements, ce qui
fausse le résultat et la valeur de l’actif établis en comptabilité
générale. On note l’absence d’une comptabilité analytique permettant
d’évaluer les coûts de programmes de formation et d’évaluer la
performance des différents programmes mis en œuvre au sein de
l’institution. Enfin, les seuls éléments suivis sont les lignes
budgétaires, ou la trésorerie, permettant d’assurer le fonctionnement
continu de l’entité.
Les états financiers présentés sont annuels et concerne
l’ensemble de l’Université. Aucun état intermédiaire (trimestriel ou
semestriel) n’est présenté pour donner une situation à mi-parcours.
Les différentes composantes de l’Université ne présentent aucun état
financier ni annuel, ni à mi-parcours.
3.3.3. Le contrôle
Sur le plan financier, il n’existe aucun contrôle des résultats ni au
niveau global, ni au niveau des sous-entités car des objectifs de
résultat ne sont pas fixés aux différents responsables de l’Université. Il
existe néanmoins un contrôle financier interne à l’Université qui
assure la conformité des dépenses aux lignes budgétaires et aux
besoins réels de l’entité. Le contrôle externe effectué par le ministère
de l’économie, l’inspection générale d’Etat (placée sur la Présidence
de la République) et la cour des comptes est effectué afin de vérifier
l’utilisation correcte des ressources budgétaires obtenues.
En somme, le contrôle est essentiellement budgétaire donc
privilégiant l’aspect financier. Il s’agit d’un contrôle a priori par
limitation de l’enveloppe financière de l’institution et de ses
composantes, et d’un contrôle a posteriori vérifiant l’usage fait des
ressources allouées. On peut relever le fait que l’enveloppe budgétaire
n’est pas entièrement disponible en début d’année mais octroyée par
trimestre. En fin d’année civile, le service financier de l’ordonnateur
effectue le contrôle des comptabilités des facultés, écoles, instituts et
services centraux afin de déterminer le taux d’exécution du budget.
Un contrôle est également effectué sur les heures
supplémentaires et les heures de vacation avant payement. Mais le
contrôle était jusqu’à présent limité à une vérification de l’effectivité
des heures déclarées. Avec une nouvelle équipe présidentielle qui a
pris fonction en 2016, la logique du contrôle des heures
d’enseignement a changé. L’objectif est désormais de limiter les

184
charges de vacation qui pèsent lourdement dans les dépenses de
fonctionnement. Elles sont de l’ordre de 250 millions par an. Le
contrôle effectué consiste d’abord à vérifier si les enseignants
permanents réalisent leurs charges horaires obligatoires telles
qu’indiquées dans les textes de l’université. Les vacataires sont
dessaisis des cours au profit des enseignants permanents n’ayant pas
atteint le nombre d’heures obligatoires. Ainsi se dégage des
économies pour l’université.
Afin d’optimiser les ressources consacrées aux programmes de
formation une commission d’évaluation des programmes de master a
été mise en place. Pour cela, tous les masters sont provisoirement
suspendus. La réouverture des masters dépendra du résultat de
l’évaluation, même si cette évaluation risque d’être plus
administrative (le fonctionnement, la sélection des candidats,
l’organisation des cours, la qualification des intervenants) que
comptable (les coûts engendrés comparés aux apports en termes de
recettes).
Ainsi le constat est clair que le contrôle est essentiellement
effectué par la présidence aussi bien sur l’exécution du budget général
que sur celui des composantes. Les contrôles sur le plan pédagogiques
sont aussi impulsés par la présidence et compte tenu de l’incidence
financière des heures de vacation qui sont prises en charge
directement par le budget général et non par les budgets des facultés et
écoles.

4. Discussion et conclusion
Les résultats de cette étude montrent un contrôle de gestion
entièrement dans la main de la présidence de l’université, et encore
très limité. Ce contrôle de gestion a été pendant longtemps limité à la
gestion budgétaire, avec un contrôle financier orienté sur la
vérification de l’utilisation de ressources en conformité aux prévisions
de lignes budgétaires. On note un développement de la logique du
contrôle de gestion dans le but de maîtriser les ressources, compte
tenu des contraintes, et le besoin d’amélioration du management de
l’institution induit par les réformes en cours notamment la réforme
LMD et l’assurance qualité interne.
Les outils de calcul des coûts, limités à certains programmes, et
le tableau de bord apparaissent progressivement mais restent
centralisés au niveau de la présidence. Ces résultats montrent à

185
l’image de la littérature, la faible pénétration du contrôle de gestion
dans les universités (Bollecker, 2013 ; Chatelain-Ponroy et al., 2006).
Cependant, il faut souligner que l’évolution des pratiques de
contrôle de gestion à l’ULT ne peut être imputée à une pression
externe à l’image des lois, mais résulte d’une motivation propre des
dirigeants contrairement aux conditions définies par Gauche et al.
(2014). Il apparaît nécessaire pour l’ULT de poursuivre la logique
pour instituer le contrôle de gestion de façon formelle aussi bien au
niveau central qu’au niveau des composantes et rendre systématique
l’usage de certains outils pour améliorer le management de
l’institution. Une meilleure connaissance des coûts réels de formation
peut faciliter les discussions budgétaires définissant le montant des
subventions de l’Etat (Solle, 2002), mais aussi permettre aux
dirigeants de sélectionner les programmes qu’il faut fermer et ceux
qu’il faut encourager.
Le contrôle de gestion est un outil dont l’utilisation doit
permettre aux dirigeants de maîtriser les différentes dimensions de la
gestion d’un établissement d’enseignement. Les universités publiques
doivent maîtriser leurs coûts de formation. Le contrôle de gestion doit
permettre de connaître le coût de chaque formation et identifier les
déterminants de ce coût. Pour cela, il est nécessaire d’identifier les
processus et activités impliqués. Cette connaissance est fondamentale
pour la mise en place d’une assurance qualité.
Cependant l’existence d’un système d’information comptable
performant est indispensable. Il apparaît primordial de dépasser la
logique de la comptabilité budgétaire et de mettre sur pied une
comptabilité générale enregistrant toutes les opérations et présentant
les états financiers exactement comme dans le cas d’une entreprise
privée sans viser la maximisation du profit. La comptabilité analytique
permettra d’apprécier la performance de chaque programme de
formation ou de recherche. Le contrôle de gestion doit jouer un rôle
important dans la recherche de la maîtrise de la masse salariale et de
son évolution.
Le contrôle de gestion permet une gestion décentralisée et à ce
titre, les différentes composantes de l’université que sont les facultés,
écoles et instituts, peuvent être transformés en de véritables centres de
responsabilité. Ainsi ces sous-entités doivent tenir une comptabilité
permettant de rendre compte de leurs activités en présentant des états
financiers à mi-parcours. Des objectifs spécifiques à chaque centre de

186
responsabilité doivent être fixés touchant aussi bien les aspects
budgétaires ou financiers que les aspects pédagogiques, recherche,
logistique, de communication et de gestion des ressources humaines.

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188
GESTION DES IMPAYÉS DANS LES SYSTÈMES
FINANCIERS DÉCENTRALISÉS AU TOGO.
TANKPE Tanko Awoki,
Docteur en sciences de gestion,
Enseignant-Chercheur à l’Université de Kara
Email : hyacinthe2@yahoo.com

Résumé
Cet article a pour objectif d’identifier et d’analyser les facteurs
qui sont à l’origine des impayés au sein de la Faîtière des Unités
Coopératives d’Epargne et de Crédit au Togo (FUCEC-Togo). Deux
hypothèses - l’une relative aux caractéristiques des emprunteurs,
l’autre aux stratégies de l’institution - seront formulées et testées. Les
résultats montrent qu’il faut passer de la gestion des impayés à une
gestion proactive des crédits.
Mots clés : Systèmes financiers décentralisés, FUCEC, Gestion des
impayés, pérennité financière.
Abstract
The purpose of this article is to identify and analyze the factors
causing unpaid debts within the organization of cooperative savings
and credit units (FUCEC-Togo). Two hypotheses – one relating to the
characteristics of borrowers, the other strategies of the institution –
will be formulated and tested. The results show that we must move
from the management of unpaid debts to a proactive management of
credits.
Key words: Decentralized financial systems, FUCEC, Unpaid debts
management, financial sustainability.

1. Introduction
Les services du système financier décentralisé (SFD) fournissent
un ensemble de produits financiers à des populations pauvres ou à
faibles revenus, destinés à des activités génératrices de revenus. Parmi
les grands réseaux de SFD en Afrique de l’Ouest, figure la FUCEC-
Togo, qui compte 40 COOPEC organisées en 104 points de ventes, et
une mutuelle d’assurance. La FUCEC-Togo, depuis 45 ans offre des
services et produits variés destinés aussi bien aux particuliers qu’aux

189
micros, petites ou moyennes entreprises. Elle offre une large gamme
allant de la simple épargne, aux crédits, en passant par les virements
de salaires, de l’assurance, etc. Elle intervient sur toute l’étendue du
territoire togolais avec une forte concentration d’activités dans la
région maritime. En effet, 74% de la distribution de crédit et 72% de
l’épargne mobilisée fin 2016 sont dans la région maritime.
A cette date, la FUCEC-Togo, compte 602 641 membres dont
65 670 sont bénéficiaires de crédit. Dans le souci d’être plus
compétitif sur le marché depuis 2006, elle professionnalise ses
activités et développe de nouvelles stratégies axées sur une gestion
efficace du crédit. Malgré cette avancée de professionnalisation, au
cours des trois dernières années, le volume d’encours de crédit a
augmenté de 12% tandis que celui des impayés6 est passé de 5,477
milliards à 7,681 milliards, soit une croissance 40%. Le portefeuille à
risque (PAR) à 30 jours, c'est-à-dire comportant des retards de
paiement de 30 jours, a aussi connu une croissance passant de 6,1% en
2013 à 8,9% en 20167. La conséquence de cette situation est que le
résultat net de la FUCEC-Togo a baissé en trois (3) ans de 88%,
passant de 982,525 millions en 2013 à 120,591 millions en 2016.
Nous avons aussi noté qu’entre le quatrième trimestre 2014 et le
quatrième trimestre 2015, le taux d’impayés est passé de 8,45% à
11,50 %.
Cette croissance des impayés dans cette structure est devenue
une situation préoccupante. Le fort taux d’impayés menace la viabilité
des SFD et il met en cause sa pérennité. Il est évident que la viabilité
d’une institution financière de même que la sécurité des épargnants,
dépendent des techniques de gestion d’impayés. Compte tenu de tout
ce qui précède, la question principale de notre recherche peut être
formulée de la manière suivante : quels sont les facteurs qui portent
préjudice à la pérennité financière dans les SFD et plus
particulièrement au sein de la FUCEC-Togo ?

6
Les créances sont considérées comme impayées dès le retard d’un jour.
7
Notre analyse des données du rapport d’activités de la FUCEC-Togo, 2016, P.31

190
Avant de présenter les résultats de cette recherche, nous allons
d’abord effectuer une revue de littérature portant d’une part, sur les
procédures de gestion des impayés dans les SFD et d’autre part, sur la
gestion des impayés au sein de la FUCEC-Togo (§ 1). Puis, nous
allons présenter la méthodologie retenue (§ 2) et enfin mettre en
évidence les résultats de l’étude, leurs analyses et critiques (§ 3).

2. Revue de la littérature
La présentation des approches théoriques relatives aux
procédures de gestion des impayés dans les SFD sera suivie de
l’analyse la gestion des impayés au sein de la FUCEC-Togo.
2.1 Les procédures de gestion des impayés dans les SFD
Dans les études théoriques réalisées à propos des impayés au sein
des SFD, certains auteurs ont abordé partiellement ou totalement les
problèmes que nous évoquons dans le cadre de ce travail. Ils sont le
plus souvent le résultat d'une mauvaise conception des produits de prêt
et des procédures d'octroi de crédit. Il existe aussi des impayés
volontaires, ce sont les cas où l'individu disposant des sommes dues,
préfère prolonger unilatéralement la durée de leur usage car il est
conscient qu'un remboursement immédiat n'offre pas
automatiquement l'opportunité d'un renouvellement du crédit.
Contrairement à ce qu'on pourrait penser, les remboursements retardés
sont aussi dangereux que les créances irrécouvrables. Non seulement
les retards de remboursement entraînent des coûts de recouvrement
mais également ces derniers faussent la programmation financière et
peuvent entraîner la panique des déposants des SFD. En effet, les
SFD, contrairement aux banques classiques ne sont pas autorisés à
créer de la monnaie et ne sont généralement pas reliés à un prêteur de
dernier ressort qui pourrait les refinancer.
Honlonkou et al. (2001), dans une étude réalisée sur la
problématique de remboursement de crédits dans les SFD, aboutit à
des conclusions dont les plus illustratives révèlent que la performance
des IMF en matière de remboursement est liée aussi bien aux
caractéristiques des caisses (caractéristiques du gérant, supervision
adéquate après l'obtention du crédit), aux activités financières, ainsi
qu'aux caractéristiques des clients (sexe, proximité géographique de la
caisse, type de garantie, volume d'activité, expertise accumulée dans
l'activité à financer, la taille de l'emprunt….).

191
Elegbede (1999), Soglohoun et Lontchedji (2000), dans leurs
recherches sur les problèmes de remboursement dans le réseau
FECECAM (Faitière des Caisses d’Epargne et de Crédit Agricole
Mutuel) au Bénin, ont identifié plusieurs causes d'impayés parmi
lesquelles on peut citer la pression exercée par les membres élus sur
les techniciens (le gérant et son personnel) pour les obliger à octroyer
des prêts à des clients ne remplissant pas toutes les conditions de
solvabilité, ainsi que le manque de suivi des projets financés,
l'insuffisance des montants de crédit pour financer les projets, les
périodes de décaissements inappropriées, le détournement des crédits
pour la consommation, ou le remboursement d’usuriers, et la
perception que l’on a du financement (Financement public dit « argent
du blanc »).
Selon le Professeur Lanha (2002), le taux de recouvrement des
créances augmente chez les clients ayant une ancienneté de zéro à
quatre ans. Mais à partir de la cinquième année, on constate une baisse
du taux de remboursement. Cela est dû au manque d'exigence de la
part des gérants et à la saturation du marché au niveau de l'activité du
client. S'intéressant à l'importance du taux de recouvrement pour les
SFD, Gentil et Fournier (1993) affirment qu'il constitue un outil de
connaissance et de jugement qui permet de définir les orientations des
systèmes de financement et doit donc concerner l'ensemble des agents
impliqués. Ils apportent des informations sur des activités d'épargne et
de crédit et sur la gestion des caisses locales et de l'ensemble du
réseau qui peut être évaluée par l'analyse du compte d'exploitation et
de l'équilibre financier.
Selon (Mignon, 2009), « la pérennité des entreprises relèverait de
facteurs liés à la performance financière et commerciale sur une
longue période, mais aussi des choix organisationnels et stratégiques,
de la gouvernance et des options en termes d’apprentissage et
d’investissements ». Pour le CGAP (The Consultative Group to Assist
the Poor) dans « L’Analyse Financière des IMF » (2012) : « la
pérennité financière est la couverture des charges administratives, des
pertes sur créances, des coûts des ressources, des coûts liés à
l’inflation et à la capitalisation pour la croissance, à partir des produits
d’exploitation ».

192
2.2 Les déterminants d’impayés : le modèle de la recherche
L’examen de la littérature montre que, étant donné l’asymétrie
informationnelle constatée, les chercheurs ont recours à la théorie de
l’agence pour répondre à ce type d’interrogation (Akerlof, 1970 ;
Stiglitz et Weiss, 1981 ; Hugon, 1996 ; Conning, 1997 ; Morduch,
2008 ; Agenor, 2012). Ils attribuent le risque de non-remboursement
des microcrédits à l’asymétrie de l’information qui existe entre les
prêteurs et les emprunteurs. D’après ce cadre théorique, il serait
difficile d’évaluer la qualité du demandeur et de vérifier le respect des
termes du contrat. Ce risque de défaut de remboursement auquel sont
confrontés les SFD est d’autant plus préoccupant que le SFD a la
particularité de vouloir accomplir une mission sociale en restant
autosuffisante financièrement. Ceci suppose la mise en place de
mécanismes ayant pour objectif de réduire le risque de défaillance des
emprunteurs.
Actuellement, les SFD ont développé des stratégies qui
permettent de minimiser les coûts de transactions et les risques liés
aux microcrédits (Lanha, 2002 ; Montalieu, 2012 ; Mayoukou, 2013).
Pour octroyer ou non le crédit, certains facteurs sont généralement pris
en compte par les SFD afin de minimiser les risques de non
remboursement (Honlonkou, Acclassato et Quenum, 2006). Il s’agit
d’une part, des facteurs liés aux emprunteurs (l’âge, la situation
matrimoniale, le revenu complémentaire, la proximité résidentielle et
l’expérience dans l’affaire) et d’autre part, de ceux liés à l’institution
(objet du crédit, le montant et le rang du crédit, les garanties exigées,
le suivi du crédit, la durée du crédit, …).
2.2.1 Les facteurs liés à l’emprunteur
Des travaux de recherche (Lanha, 2002 ; Honlonkou et al., 2006)
ont contribué à la détermination des facteurs liés à l’emprunteur qui
peuvent avoir une influence sur les taux des impayés en microfinance.
D’après l’étude de Lanha (2012), il ressort que le genre du dirigeant et
l’âge de la micro entreprise expliquent le risque de défaillance en
micro finance au Bénin. Honlonkou et al. (2006), à partir de 3 000
emprunteurs dans certaines institutions de microfinance béninoises, ne
trouvent pas de relation significative entre le genre, l’âge et le niveau
d’instruction du dirigeant mais trouvent une influence positive et
significative sur la performance de remboursement.

193
Selon Hudon et Ouro-Koura (2008), l’approche de proximité est
une caractéristique essentielle des caisses d’épargne et de crédit qui
explique le fort taux de remboursement : les membres des mutuelles,
en usant de la pression sociale améliore les taux de remboursement.
Cette conception sociale est particulièrement adaptée en zone rurale
où les pratiques communautaires restent fortes. Cependant, en zone
urbaine, elle doit être complétée pour assurer des bons taux de
remboursement.
S’appuyant sur la méthodologie d’octroi de microcrédits à la
FUCEC, nous allons dans cette étude, examiner l’influence de cinq
facteurs liés à l’emprunteur susceptible d’avoir une influence sur le
taux d’impayés. Il s’agit de l’âge, de la situation matrimoniale, du
revenu complémentaire, de la proximité résidentielle et de
l’expérience de la personne emprunteuse dans son affaire. Les
capacités de supervision des agents de crédits chargés de récolter les
fonds sont supérieures lorsque les clients sont plus proches du SFD.
En nous replaçant dans le contexte de l’étude afin d’atteindre nos
objectifs, l’hypothèse générale 1 (Ha) peut dès lors être proposée : Les
caractéristiques des emprunteurs ont une influence sur le taux des
impayés.
Elle se décompose en trois (03) sous hypothèses à savoir :
- Ha1 : Un revenu complémentaire autre que celui de son
activité faisant l’objet du crédit, fait baisser le taux impayé ;
- Ha2 : La proximité de l’emprunteur favorise le
remboursement ;
- Ha3 : Les personnes plus expérimentées dans leur affaire
remboursent mieux leur crédit.
2.2.2. Les facteurs liés à l’institution
La littérature montre que les facteurs liés à l’emprunteur ne
suffisent pas pour expliquer le taux d’impayés dans les SFD car il
faudra intégrer les facteurs spécifiques à l’institution prêteuse. C’est
pourquoi certains chercheurs (Hudon et Ouro-Koura, 2012 ; Lanha,
2012 ; Honlonkou et al., 2006) ont dépassé les caractéristiques liées à
l’emprunteur et se sont intéressés aux caractéristiques liées aux SFD.
D’après l’étude de Lanha (2013), il ressort que le montant du prêt, le
type de garantie et le cycle de crédit expliquent le risque de

194
défaillance en microfinance. Honlonkou et al. (2006), montrent que la
nature de la garantie, le montant du dépôt initial et le nombre
d’expériences antérieures de l’emprunteur avec la caisse influence
significativement la performance de remboursement dans les SFD
béninoise. Les garanties exigées sont multiples et varient d’une
institution à une autre. On peut citer entre autres la confiance,
l’épargne préalable, la caution solidaire (Wamba, 2008), les titres de
propriété foncière et matérielle (Honlonkou et al., 2006). Cette
dernière variable est très souvent exigée dans les SFD et a
généralement une influence positive parce que les micro-entrepreneurs
n’ont pas toujours la possibilité d’offrir des garanties foncières et
matérielles (Kodjo, Abiassi et Allagbe, 2013). De même, la caution
solidaire, souvent utilisée pour garantir les crédits financés sur
d’autres fonds que ceux de l’épargne, doit être utilisée avec précaution
en milieu urbain, y compris dans des coopératives de petits
producteurs comme les artisans ; car la solidarité n’est pas toujours
comparable à celle que l’on observe en milieu rural.
Les SFD ont par ailleurs des schémas de remboursement qui leur
sont propres et qui sont caractérisés par une fréquence élevée de
remboursement. Elles ont aussi développé des substituts aux garanties
matérielles comme l’assurance-crédit. Lorsque les prêteurs sont
confrontés à une forte demande de crédit, ils vont parfois préférer
rationner les emprunteurs en vue de maximiser leur profit. Le taux
d’intérêt est alors utilisé comme un filtre qui permet de retenir les
bons emprunteurs. Il en est de même des garanties matérielles exigées
par les prêteurs (Bernanke et Gertler, 2009).
En nous appuyant sur la philosophie d’octroi des crédits à la
FUCEC nous avons pu relever huit variables liées à l’institution
susceptibles d’influencer le taux des impayés. Il s’agit du montant du
crédit, du rang du crédit, des mouvements dans le compte d’épargne,
de l’objet du crédit, de la rigidité de la garantie, du suivi du crédit et
de la durée moyenne du crédit. Ceci nous permet de déduire notre
hypothèse générale 2 (Hb) qui est la suivante : Les stratégies de
minimisation des risques mises en œuvre par les IMF influencent
significativement le taux de remboursement.
Cette hypothèse peut se subdiviser également en trois (03) sous
hypothèses :
- Hb1 : Le montant du crédit octroyé à un demandeur influence
le taux d’impayés ;

195
- Hb2 : Plus les garanties exigées sont rigides, plus le taux
d’impayés est faible ;
- Hb3 : Plus le crédit est suivi, plus le risque d’impayé lors des
remboursements est faible.
De ces deux (2) hypothèses générales de recherche, découle le
modèle d'analyse faisant l’objet de la figure 1.
Figure 1 : Modèle conceptuel de recherche

Source : Notre synthèse

3. Démarche méthodologique de la recherche


Après une description de l’échantillon, et de la manière dont les
données ont été collectées, nous présenterons les tests statistiques
utilisés et les variables analysées.
3.1 Constitution de l’échantillon et collecte des données
L’étude porte sur l’ensemble des emprunteurs de la FUCEC-
Togo qui sont constitués de personnes de toutes les couches sociales,
politiques, géographiques et économiques ou personnes morales
constituées en groupement ou association. Cependant, nous avons axé
notre étude sur les personnes physiques qui sont les bénéficiaires
(membres). Au 31/12/2016, la FUCEC-Togo dispose d’environ 399
800 membres dont près de 200 000 emprunteurs actifs ont pu financer
le développement de leurs activités. Ces membres sont répartis dans
les trente et une (31) agences, dans les cinq (05) régions du Togo. La
répartition géographique est la suivante : quinze (15) dans la région
maritime, cinq (05) dans la région des plateaux, trois (03) dans la
région centrale, quatre (04) dans la Kara et quatre (4) dans les savanes.

196
A partir des informations de la Direction Générale de la FUCEC-
Togo pour 2016, nous sommes entrés en possession du portefeuille de
crédit constitué que 3 000 membres8 ayant sollicité et reçu un crédit.
Au total 3 000 dossiers ont donc été exploités. L’exploitation des
informations fournies par cette base de données, nous a permis
d’obtenir des informations très détaillées sur : la situation personnelle
et familiale du bénéficiaire ainsi que son statut ; le type et la taille de
l’activité exercée ; les informations sur le crédit (la date de déblocage,
son objet, son montant, sa durée, le montant remboursé et le capital
restant) ; les indicateurs financiers (chiffre d’affaires, bénéfice net,
capacité de remboursement, bénéfice net familial, bilan, compte de
résultat, taux d’endettement, taux d’utilisation de la capacité de
remboursement etc.).
3.2 Construction du modèle empirique et opérationnalisation
des variables
Considérant que les conditions d’exercice de l’activité au sein de
la FUCEC ainsi que les caractéristiques de l’emprunteur peuvent avoir
une influence sur le taux des impayés lors des remboursements des
crédits octroyés, nous avons construit le modèle économétrique ci-
dessous en vue de mettre en évidence les facteurs déterminants ce taux
d’impayés. A cet effet, nous avons utilisé comme variable dépendante
ETAT_IMP. Ce modèle se présente donc comme suit :
(1) ETAT_IMP = ao + ∑aiXi + ei.
Dans cette équation, Xi représente les variables explicatives ; a0,
le terme constant ; ai, les coefficients de régression et e, le terme
d’erreur.
La forme empirique complète du modèle est :
(2) ETAT_IMP = ao + a1 REVCOMP + a2 PROXRESID + a3
EXP + a4 MONTCRED + a5 GARANT + a6 SUIVICRED + ei.

8
Il a été extrêmement difficile d’avoir les 200 000 dossiers des emprunteurs
au cours de notre période d’étude. L’approche « Personnes Ressources » nous a
permis de capitaliser que 3 000 dossiers compte tenu de la méfiance des personnes
chargées de mettre ces informations à notre disposition, et aussi, de la problématique
que constitue la gestion des impayés au sein de la FUCEC-Togo.

197
La variable dépendante est l’état d’impayés (ETAT_IMP). Dans
la base de données que nous avons à notre disposition, il est mesuré en
pourcentage et a des valeurs comprises entre 0 et 100%. Compte tenu
du fait qu’un taux de 0% peut recéler une diversité de situation allant
du remboursement nul à un remboursement intégral à 100% avec
retard (Honlonkou et al., 2006). Nous avons défini cette variable
dépendante en variable dummy. Elle prend la valeur 1 si les prêts ont
été remboursés à l’échéance (donc pas d’impayés) et 0 s’il y a eu au
moins une défaillance intervenue dans le remboursement du crédit
(impayés).
En ce qui concerne les variables explicatives, REV_COMP
désigne les revenus complémentaires autres que ceux obtenus sur
l’objet du prêt (professionnels, locatifs, autres, aucun). PROX_RESID
désigne la proximité résidentielle ou géographique de l’emprunteur
(éloignée, proche). EXP désigne le nombre d’années passées dans son
activité. MONT_CRED désigne le montant du crédit accordé.
GARANT désigne la rigidité de la garantie (moins rigide, rigide, plus
rigide). SUIVI_CRED détermine le suivi du crédit avant le déblocage
et pendant le remboursement (pas de visite, visite). Au regard de la
nature des variables, nous avons opté pour la régression du type
« logit » (Magnac T., 2008), car cette méthode permet en effet
d’expliquer une variable dépendante et de nature binaire (ETAT_IMP)
en fonction de plusieurs autres variables explicatives nominales et/ou
ordinales.

4. Résultats de l’étude et discussion


Nous allons d’abord présenter les statistiques descriptives, puis
l’analyse des corrélations entre des différentes variables du modèle, et
enfin les résultats de l’analyse de la régression.
4.1. La statistique descriptive
Les statistiques descriptives montrent qu’environ 60% ne
disposent d’aucun revenu complémentaire contre 26,7% qui ont des
revenus complémentaires issus de leur profession, 5% disposent des
revenus locatifs et 8,33% disposent d’autres revenus complémentaires
que ceux cités précédemment. 73,33% des emprunteurs sont éloignées

198
de l’institution de contre 26,67 qui sont proches. On note également
que l’expérience moyenne de chaque membre dans son affaire est de
7,5 ans. Concernant les conditions d’accès au crédit, il est à noter que
80% des bénéficiaires de prêts fournissent des garanties moins rigide
(aval, épargne journalière), 6,67% les garanties rigides (nantissement,
dépôt de chèque, certificat de vente) et 13,33% fournissent les
garanties plus rigides (titre foncier). Plus de 96,67% de l’échantillon
étudiée reçoit des visites de la part de la FUCEC avant l’octroi du
crédit et pendant les périodes de remboursement, seulement 46,67%
reçoivent des visites. Le montant moyen des crédits accordé est de
244 250 F Cfa et chaque membre qui sollicite un crédit en a déjà reçu
en moyenne 3,5 fois. Six mois avant l’accord du crédit, on remarque
que le nombre moyen d’opérations d’épargne effectué par chaque
membre est de 11 fois.
4.2. La corrélation entre les différentes variables étudiées
Le but de ce paragraphe est d’examiner les relations uni-variées
entre la variable dépendante et les variables indépendantes et de
déceler l’existence de problème de multi colinéarité entre les variables
indépendantes. Ainsi, le tableau n° 1présente les matrices de
corrélation entre les différentes variables.
Tableau 1 : Récapitulatif des résultats de la corrélation selon la
méthode de Pearson
PROX REV MONT VISIT VISIT TAUX
GARANT EXP
REDI COMPL CRED DEBUT PEND IMP
PROX REDI 1 0 ,55 -0,127 0,05 -0,184 -0,274 -0,219 -0,007
GARANT 1 -0,134 0,25 -0,262 -0,062 -0,55 0,107
REV COMPL 1 -0,4 0,368 0,023 0,484 0,146
EXP 1 -0,32 -0,098 -0,270 0,022
MONT CRED 1 -0,187 0,578 -0,35
VISIT DEBUT 1 -0,191 0,071
VISIT PEND 1 -0,1
TAUX IMP 1

A la lecture de ce tableau, on constate plusieurs relations


significatives9 entre les variables représentant les caractéristiques de

9
Signification aux seuils respectifs de 1% ; 5% et 10%.

199
l’emprunteur et de la gestion de l’institution et le taux de défaillance.
Nous remarquons en premier lieu que le revenu complémentaire a une
influence positive et significative sur le taux de défaillance soit un
coefficient de corrélation de 0,146 de même que la garantie du prêt.
En deuxième lieu, nous notons une relation négative et significative
entre le montant du crédit, la visite après l’octroi de crédit, la
proximité résidentielle et le taux de défaillance. Les autres variables
n’ont pas de relations significatives avec le taux de défaillance. En ce
qui concerne les corrélations entre les variables indépendantes, bien
que certaines corrélations soient significatives, aucun problème sévère
de multi colinéarité entre ces variables indépendantes n’est décelé
dans la mesure où les coefficients de corrélation sont relativement
faibles (généralement inférieurs à 0,5)
4.3. Analyse de la régression
Dans le but d’approfondir les résultats ci-dessus, il est nécessaire
de procéder à une analyse multi variée. L’avantage de cette analyse est
qu’elle prend en compte les interrelations pouvant exister entre les
variables explicatives. A cet effet, un modèle « logit » a été estimé. La
variable dépendante notée « ETAT_IMP » est binaire et prend la
valeur 1 s’il y a eu défaillance dans le remboursement du crédit et 0 si
non.
Tableau 2 : Récapitulatif des résultats de l’estimation
B S.E. WALD Df Sig Exp (B)
PROXRED -0,738 3,887 0,036 1 0,849 0,478
GARANT 3,991 2 0,136 0,000
GARANT Moins rigide 12,904 8,258 2,442 1 0,118 40,260
GARANT Rigide 4,093 4,441 0,850 1 0,357 59,943
REVCOMPL 4,217 3 0,239 0,000
REVCOMPL 11,52
-21,428 3,456 1 0,063 0,000
Professionnel 6
REV COMPL Locatif -1,115 2,967 0.141 1 0,707 0,328
Autres REV COMPL -5,440 4,570 1,417 1 0,234 0,004
MONT CREDI 3,781 3,000 0.286 0,000
Au Plus de 100 000 3,636 2,769 1,724 1 0,189 37,949
Au Plus 400 000 -7,304 5,093 2,057 1 0,152 0,001
de 400 000 et plus 9,695 5,558 3,043 1 0,081 162,61
Visite début 5,053 3,258 2,406 1 0,121 156,44
Visite Pend 5,985 3,066 3,811 1 0,050 397,38
Source : Résultat de l’enquête

200
Les résultats de l’estimation10 de ce modèle révèlent une valeur
positive pour la variable représentant les facteurs non spécifiés
(Constante). Bien plus, la statistique de Wald associée est significative
au seuil de 1% et le -2log de vraisemblance du modèle significatif
avec le R² de Cox & Snell = 0,574, le R² de Nagelkerke = 0,769 et on
note également deux variables significatives au seuil de 5% et trois au
seuil de 10%. On en conclut que la combinaison des caractéristiques
liées à l’emprunteur à celles de la FUCEC-Togo explique à près de
77% le taux de défaillance dans le remboursement des microcrédits
octroyés.

Nous allons vérifier si les caractéristiques liées à l’emprunteur,


c'est-à-dire, l’existence de revenus complémentaires dont il
bénéficierait, l’expérience dans son activité et la proximité de son lieu
de résidence par rapport au site de la FUCEC-Togo peuvent avoir un
impact sur la probabilité qu’il ait des impayés. A la lecture du tableau
ci-dessus, il ressort que l’existence de revenus complémentaires dont
il bénéficierait influence négativement et significativement le taux de
défaillance dans les remboursements à la FUCEC-Togo. L’étude
montre que les demandeurs de prêt disposant des revenus
professionnels autres que ceux obtenus sur l’activité faisant l’objet du
prêt ont une faible propension à avoir les impayés. D’autres variables
caractérisant les membres de la FUCEC-Togo n’ont pas produit des
relations statistiques significatives.
Il serait également intéressant de vérifier si les caractéristiques
liées à la FUCEC-Togo, prêteuse dans le cadre de l’octroi de crédit
peuvent être à l’origine des impayés. A la lecture toujours du tableau
ci-dessus présentant les résultats de l’estimation, on note que le
montant de crédit accordé et la visite pendant la période de
remboursement influence la performance de remboursement. Ce
résultat montre que plus la FUCEC-Togo octroie des crédits d’un
montant élevé aux demandeurs de prêt, plus elle court de risque de
non remboursement. Ce qui signifie que les crédits de gros montants
entrainent relativement plus d’échec dans le respect des échéances que
les autres. Ce résultat va dans le même sens que celui trouvé par
10
Chi-Square = 42,661 ; Df = 23 ; Sign. = 0,000 ; -2 Log Likelihood =
25,932 ; Goodness of Fit = 4,410 ; Cox & Snell – R² =0 ,574 ; Nagelkerke – R² =
0,769 ; Variable dépendante = ETAT_IMP N= 3 000

201
Lanha (2012) dans ses travaux. En ce qui concerne le suivi du crédit,
on constate qu’une absence de visite de l’emprunteur par l’agent de la
FUCEC-Togo pendant la périodicité de remboursement accroit la
propension d’avoir des impayés. Ces résultats confirment ceux trouvé
par Lanha (2012) et Honlonkou et al. (2006).
Tableau 3 : Synthèse des résultats de l’étude
Hypothèses
Caractéristiques de l’Emprunteur
Ha1 Un revenu complémentaire autre que celui de son activité Oui
faisant l’objet du crédit, fait baisser le taux impayé
Ha2 La proximité de l’emprunteur favorise le remboursement Non
Ha3 Les personnes plus expérimentées dans leur affaire remboursent Non
mieux leur crédit
Caractéristiques de l’institution
Hb1 Le montant du crédit octroyé à un demandeur influence le taux Oui
d’impayés
Hb2 Plus les garanties exigées sont rigides, plus le taux d’impayés Non
est faible
Hb3 Plus le crédit est suivi, plus le risque d’impayé lors des Oui
remboursements est faible
Source : Résultat de l’enquête

D’après le tableau de synthèse des résultats présentés ci-dessus,


on remarque que ces derniers nous permettent de valider les
hypothèses Ha1 liées aux caractéristiques de l’emprunteur et les
hypothèses Hb1 et Hb3 liées aux caractéristiques de la FUCEC-Togo.
Globalement, le taux d’impayés à la FUCEC-Togo est expliqué en
partie par les stratégies de minimisation des risques.
4.4. Discussion des résultats
Les résultats présentés ci-dessus permettent de dire que les
impayés constatés dans le portefeuille de crédit de la FUCEC-Togo
sont non seulement liés aux caractéristiques de l’emprunteur, mais
également aux facteurs liés à l’institution elle-même. Compte tenu de
l’objectif de l’épargne et de crédit qui est d’offrir des services au coût
le plus bas tout en assurant la rentabilité et la pérennité de la FUCEC-
Togo, les gestionnaires devront avoir à leur portée des outils de
prévision sur les crédits octroyés car il est plus facile et économique
d’éviter une crise que de la gérer. Afin de garantir la pérennité de la
FUCEC en général, les actions correctives méritent d’être mises en
œuvre.

202
Nos suggestions sont relatives tout d’abord à la FUCEC-Togo,
puis aux autorités monétaires en charge du bon fonctionnement du
système financier. Afin de garantir la pérennité et la viabilité de la
FUCEC-Togo, une attention particulière doit être accordée à l’examen
du dossier de demande de crédit. Les offres de crédit doivent être
davantage orientées vers les membres disposant des revenus
complémentaires provenant d’activités autres que celles pour
lesquelles ils ont reçu du crédit. Le montant des crédits accordés
doivent plutôt être de faibles valeurs et octroyés sur une période
relativement courte. Comme l’ont également montré nos analyses, une
visite inopinée d’un agent de la FUCEC-Togo à un emprunteur
diminue la propension de voir le crédit impayé. Un autre problème
majeur est le fait que les clients usent des mêmes garanties pour
obtenir plusieurs financements. Il existe dès lors un risque de
défaillance en chaîne dans le secteur. Il serait donc souhaitable que les
autorités évoquées mettent sur pied un cadre de réflexion sur le sujet.

5. Conclusion
L’objectif de cet article était d’identifier les facteurs qui
expliquent le taux d’impayés dans les IMF et plus particulièrement à
la FUCEC-Togo. Au moyen d’une analyse économétrique en
régression « logit » sur les données recueillies sur l’ensemble de
l’échantillon (les informations sur les emprunteuses, sur le crédit et
sur les indicateurs et états financiers), les résultats obtenus montrent
que la caractéristique liée à l’emprunteur (la disposition d’un revenu
complémentaire) et à l’institution (montant du crédit, le suivi du crédit
pendant la périodicité de remboursement) déterminent le taux
d’impayés à la FUCEC-Togo.
En vue de garantir la pérennité de l’institution un certain nombre
de suggestions ont été formulées à son endroit et aux autorités
monétaires en charge du bon fonctionnement du système financier.
Bien qu’ayant eu le mérite de recourir à une analyse multi variée,
qui permet de juger de l’effet des différentes variables prises dans leur
ensemble et d’évacuer les problèmes d’auto corrélation entre les
variables explicatives, cette étude présente quelques limites. Nous
pouvons noter en premier lieu que le nombre restreint des variables
liées à l’emprunteur et à l’institution elle-même retenues dans le
modèle de régression n’explique qu’à 77% le taux d’impayés.

203
L’opérationnalisation de certaines variables ne va pas non plus
sans mettre en cause les résultats. Des améliorations sont nécessaires.
C’est notamment le cas pour la mesure des variables de la garantie, et
du suivi du crédit. Le fait que l’étude ne porte que sur le cas de la
FUCEC-Togo nous conduit à être prudents sur la portée des
conclusions. Ces limites indiquent clairement que l’intégration
d’autres variables liées à l’emprunteur (les antécédents familiales, le
genre, l’âge,) et à l’institution (ancienneté de la relation entre le SFD
et son client, de la durée du crédit) pourront davantage expliquer le
taux d’impayés.
« Les impayés sont des monstres cachés »11 car dans la majorité
des cas, ils constituent le principal motif des faillites des institutions
de crédit. La gestion des impayés impose que le réseau doit prendre
des stratégies préventives et adéquates, qui permettront d’assurer les
résultats financiers confortables et par ricochet sa pérennité. Pour ce
faire nos recommandations faites pour répondre aux insuffisances
relevées dans la gestion des impayés à la FUCEC-Togo arrivent à
point nommé.

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BIT, Genève, Suisse.

205
EVALUATION DU PERSONNEL ET IMPLICATION
ORGANISATIONNELLE DES SALARIÉS DANS LES
PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES

Pr. HAMADOU BOUKAR, Maître de Conférences


Vice Doyen chargé de la Recherche et de la Coopération
Faculté des Sciences Économiques et de Gestion
Membre du Laboratoire de Recherche en
Economie et Gestion des Organisations
Université de Ngaoundéré
B.P. 454 Ngaoundéré – Cameroun
E-mail : hamadouboukar@gmail.com

HADAMA Constantin, Doctorant


Faculté des Sciences Économiques et de Gestion
Université de Ngaoundéré
B.P. 454 Ngaoundéré – Cameroun
E-mail : constantinhadama@yahoo.fr

Résumé
L’objectif principal de cet article est de montrer qu’il est possible
pour une entreprise de favoriser l’implication organisationnelle de ses
ressources humaines par la pratique de l’évaluation. L’implication
organisationnelle est un concept qui se révèle complexe et essentiel
dans la gestion stratégique des ressources humaines. C’est la raison
pour laquelle les entreprises travaillent à renforcer le sentiment
d’appartenance de leurs salariés envers l’organisation. Vu sous cet
angle, notre étude s’évertue donc à étudier l’influence de l’évaluation
du personnel à travers ses objets sur ce sentiment d’appartenance.
Pour cela, nous avons interrogé les dirigeants et responsables
ressources humaines des PME des villes de Douala, Yaoundé,
Ngaoundéré, Garoua et Maroua. En plus d’une étude quantitative
menée auprès de ces structures, nous avons également mené une étude
exploratoire pour mieux comprendre la relation entre ces deux
concepts en entreprise, directement auprès des praticiens. Il ressort de
nos résultats que, l’évaluation du savoir-faire, de la capacité
d’adaptation, du degré d’atteinte des objectifs et de l’efficacité du
travail ont une incidence positive sur l’implication organisationnelle
des salariés.
Mots clés : évaluation du personnel, implication organisationnelle,
PME.

206
Evaluation of the staff and organizational implication of the
employees in the small and medium-size companies
Abstract
The main aim of this article is to show that it is possible for a
company to support the organizational implication of its human
resources by the practice of the evaluation. The organizational
implication is a concept which appears complex and essential in the
strategic management of human resources. This is why the companies
work to reinforce the feeling of membership of their employees
towards the organization. Seen under this angle, our study thus strives
to study the influence of the evaluation of staff through his objects on
this feeling of membership. For that, we questioned the leaders and
responsible human resources of SME of the towns of Douala,
Yaoundé, Ngaoundéré, Garoua and Maroua. Besides a quantitative
study conducted near these structures, we also conducted an
exploratory study for better understanding the relation between these
two concepts in company, directly near the experts. It comes out from
our results that, the evaluation of know-how, the capacity of
adaptation, the degree of attack of the objectives and the effectiveness
of work have a positive incidence on the organizational implication of
the employees.
Keywords: evaluation of staff, organizational implication, SME.
Evaluation du personnel et implication organisationnelle des salariés
dans les petites et moyennes entreprises

1. Introduction
Les PME font l’objet de nombreuses recherches en contexte
africain. Ceci se justifie par le fait qu’elles constituent la majeure
partie des entreprises tant au niveau mondial et qu’au niveau national.
S’agissant de ce dernier, nous en voulons pour preuve, au Cameroun,
la création de tout un ministère en charge des PME. Cependant, nous
avons voulu nous intéresser sur l’évaluation du personnel dans ce type
d’entreprise. L’évaluation du personnel est présente dans une grande
partie des entreprises à l’heure actuelle. Il est un instrument de plus en
plus utilisé par les entreprises et les organisations. S’appuyant sur les
théories analysées chez les économistes, entre autres, la théorie
d’allocation (Coase, 1937) et la théorie des incitations (Holmstrom et
Milgrom, 1994). Ces deux théories permettent de mettre en évidence
les éléments sur lesquels les dirigeqnts des PME pourraient agir en

207
adoptant une certaine démarche. Cette dernière est particulièrement
importante dans le cadre d’un processus de gestion prévisionnelle des
emplois et des compétences (Trepo et al., 2002). Elle est par
conséquent un outil de gestion des ressources humaines, mais aussi un
acte fondamental du management (Oiry, 2001). Elle permet de réunir
les informations nécessaires, pour construire les différents
programmes de gestion des ressources humaines, et asseoir les
décisions concernant les carrières des salariés. De ces derniers,
l’organisation attend de meilleures performances et une forte
implication. Ceci dans un contexte de changement, et de grande
mobilité du facteur travail, concrétisé par la concurrence interfirme et
l’appât de gains plus élevés, favorisant la fuite de la main d’œuvre.
L’implication des salariés constitue dès lors un gage important,
permettant aux travailleurs, de résister aux alternatives à court terme,
au profit de gains à long terme, et à l’organisation de tirer le meilleur
partie de son personnel. L’évaluation du personnel représente donc un
sujet d’intérêt constant pour les services Ressources Humaines,
souvent principaux initiateurs et moteurs de ce processus dans les
organisations. Au Cameroun, les conventions collectives et les normes
de certification donnent une place croissante à diverses formes
d’évaluation du personnel. Dans la fonction publique, les récentes
évolutions législatives prévoient l’extension progressive mais
généralisée du principe d’entretien professionnel en lieu et place de la
notation. C’est le cas institué par le décret du premier ministre du 29
août 2012 fixant les modalités d’évaluation des performances
professionnelles des fonctionnaires ainsi que des fonctionnaires
stagiaires effectuant leur période probatoire à un poste de travail de
l’Administration, suite à la défaillance de l’engagement au travail du
personnel de la santé en particulier, et la dégénérescence de
l’implication du personnel de la fonction public en général.
Dans le contexte Camerounais des PME, l’évaluation du
personnel est encore un phénomène qui tarde à prendre de l’ampleur
comme pratique managériale et comme outil incontournable de la
gestion des ressources humaines (GRH). Pour celles qui la pratique,
elle est généralement effectuée dans le but de sanctionner, de
promouvoir les employés ou tout simplement un phénomène de mode
(Ministère des Petites et Moyennes Entreprises de l’Economie Sociale
et Artisanale, 2010). Pourtant cette pratique revêt bien d’atouts malgré
sa difficile mise en œuvre. Ainsi, évoluant dans un environnement qui
se transforme et devient de plus en plus complexe, l’entreprise doit

208
trouver les moyens de s’adapter. Une des réponses à la complexité
passe par l’autonomie des acteurs et par la micro-initiative, facteur
d’implication. Il existe en chacun un besoin puissant d’activité,
d’autonomie, de créativité et d’initiatives. C’est cette part spontanée
de l’action qui engendre l’implication, mais il faut qu’elle devienne
stratégiquement opportune pour le salarié. A la lumière de cette
évolution, un point clé du management sera l’évaluation, c’est-à-dire
les signes envoyés à l’individu par le système auquel il appartient.
L’évaluation sera alors non seulement l’examen de la conformité des
résultats envers des objectifs fixés, mais également la part des
initiatives prises dans le cadre d’orientations porteuses de
développements et de progrès (Lapra, 1997). Thévenet (1991), affirme
que l’évaluation du personnel est un des rares domaines de la gestion
du personnel qui donne lieu à de nombreux développements pratiques
et à une grande recherche théorique. Les définitions des manuels de
gestion du personnel ou celles des praticiens de la gestion des
ressources humaines en portent témoignage. Pour les manuels,
l’évaluation constitue l’appréciation systématique de la personne en
fonction de sa performance sur le poste et de son potentiel de
développement (Peretti, 1984 ; Siékou, 1986). Selon Dufetel (1985),
l’évaluation du personnel s’appréhende selon les nombreuses
pratiques à savoir : l’appréciation des performances, les entretiens
annuels, le bilan annuel d’activité et de carrière, la notation annuelle,
la fixation des objectifs et appréciation des résultats, la direction par
objectifs.
En intégrant les définitions théoriques et pratiques, l’évaluation
du personnel apparait comme un processus de jugement du personnel
systématisé dans une procédure qui en fixe les règles et les conditions
(Thévenet, 1991). En tant que processus de jugement, elle imposera
des choix et des questions sur l’évaluation proprement dite (critères
d’évaluation, protection contre les biais, privilège au passé ou au futur
de la personne, etc.). En tant que système, elle nécessite
l’établissement d’une procédure établie (qui évalue? Quand? Avec
quelles garanties et voies d’appel? etc.). Par ailleurs, l’évaluation doit
jouer un rôle clé, dans la fonction du management car, elle entraine
souvent la rigidité, le cloisonnement des structures, les excès de
procédures, l’exercice discrétionnaire du pouvoir, la promotion et
l’avancement par allégeance, ce qui a pour conséquence la fuite des
talents et des élites de l’entreprise (Lapra, 1997). En plus, quand
l’implication est forte, l’individu investit plus de ressources, fait plus

209
de sacrifices; s’il n’en reçoit pas les bénéfices attendus, justifié par
une évaluation bien menée, il aura tendance à moins s’impliquer, à
développer un sentiment d’exploitation et à être stressé (Lahmouz et
Duyck, 2008). L’implication est un concept difficile à appréhender.
En effet, les travaux fondateurs de Porter et al. (1974) puis Mowday
et al., (1982), et Morrow (1983) clarifient l’implication en proposant
une première synthèse. Ils préfigurent bien les différentes directions
dans lesquelles les recherches vont se développer. Toutefois,
l’implication au travail, parfois appelée engagement, souffre de
problèmes récurrents de redondance conceptuelle et de mesure
(Morrow, 1983 ; 1993). La tentative de Meyer et Herscovitch (2001)
d’apporter un certain nombre de réponses aux critiques formulées à
l’encontre du modèle en trois composantes de Allen et Meyer (1991),
en montrant la supériorité de l’implication affective sur les autres, n’a
pas empêché la remise en question progressive de ce modèle,
notamment par Cohen (2007) puis Solinger et al., (2008), et plus
récemment par Klein et al., (2012).
Il convient de noter que comme déjà adopté et ceci tout au long
de ce travail, nous avons utilisé indifféremment les termes implication
et engagement, pour appréhender la même réalité. En effet, des
recherches récentes publiées en français utilisent le terme «
d’engagement organisationnel » (Vandenberghe et al., 2009), pour
faire référence exactement aux mêmes travaux, en particulier ceux
d’Allen et Meyer (1990, 1991, 1996), ce qui contraint parfois à
préciser que le concept d’engagement « est davantage utilisé en
France sous le nom d’implication » (Roussel, 2009). De leur coté,
Biétry et Laroche (2011), étudient l’implication dans l’organisation, le
syndicat et/ou la carrière : ils mentionnent que la « traduction en
‘implication’ des termes anglo-saxons ‘d’involvement’ et de
‘commitment’ a donné lieu à divers glissements sémantiques » et que
« pour éviter ces confusions, les notions d’implication, d’attachement,
d’allégeance et d’engagement seront considérée comme synonymes ».
Ces problèmes de terminologie ne facilitent pas l’avancée des
recherches sur le concept et, pose des difficultés en termes de
définition. Conceptuellement, l’implication peut être décrite selon
trois facteurs : une forte croyance de l’acceptation des buts et valeurs
de l’organisation ; la volonté d’exercer des efforts considérables pour
l’organisation ; une très forte intention de continuer d’appartenir à
l’organisation (Mowday et al., 1982). Cette définition n'exclut pas le
fait que les individus soient impliqués dans d'autres aspects de leur

210
environnement notamment la famille, le syndicat… Les auteurs
abordent l’implication comme un processus. Ils insistent d’ailleurs, sur
le développement de l’implication au fil du temps, et sur la phase
cruciale des premiers mois de présence dans l’organisation.
Les enjeux individuels et organisationnels de l’évaluation du
personnel quand à eux sont importants et sensibles. Les réactions de
certaines instances syndicales dans les organisations qui le mettent en
place en témoignent largement. De ce fait, mettre en évidence
l’incidence de l’évaluation du personnel sur l’implication
organisationnelle de ces derniers dans les PME Camerounaises est la
principale préoccupation de cette recherche. Cet objet de recherche
suscite des questions subsidiaires. Mais avant de les énoncer, il est
important et nécessaire pour nous de préciser que notre travail ne
s’attachera qu’aux objets de l’évaluation du personnel quelque soit les
techniques, les procédures et méthodes utilisées. Ceci dit, nos
questions subsidiaires au problème de cette recherche sont les
suivantes : Quels sont les objets de l’évaluation du personnel dans les
PME ? Quelles sont les caractéristiques et éléments de mesure de
l’implication organisationnelle ? Quelle est l’incidence des objets de
l’évaluation du personnel sur l’implication organisationnelle des
salariés dans les PME Camerounaises ?
L’objectif principal de cette recherche est d’identifier les objets
d’évaluation sur lesquels les dirigeants des PME pourraient agir afin
de favoriser l’implication des salariés.
Dans la perspective de répondre à ces interrogations, nous
exposerons d’abord l’évaluation du personnel et l’implication
organisationnelle des salariés dans les petites et moyennes entreprises.
Ensuite, nous présenterons la méthodologie adoptée. Enfin, les
résultats et discussions de notre recherche.

2. Les objets de l’évaluation du personnel et


l’implication organisationnelle des salariés
Inhérente aux relations contractuelles qui lient un salarié et un
employeur, l’évaluation des salariés, s’est progressivement
constituée comme démarche explicite et outillé de la GRH. En effet, si
l’évaluation fait naturellement partie de la mission du manager, il doit
à l’aide de méthodes et techniques établies, porter un jugement sur le
travail accompli par un individu sur une période donnée
(généralement annuelle). Lors de l’évaluation, plusieurs points font

211
l’objet d’une attention particulière de la part des évaluateurs à l’égard
des évalués. Ces points sont nombreux à savoir : l’évaluation de la
performance ; l’évaluation du professionnalisme ; l’évaluation des
compétences ; l’évaluation du potentiel ; l’évaluation de l’implication
ou de la motivation au travail… Seulement en accord avec les travaux
de notre phase exploratoire (recoupement des objets énumérés par les
interviewés) et de la littérature nous ne retiendrons dans cette étude
que l’évaluation du savoir-faire, celle de la capacité d’adaptation, celle
du degré d’atteinte des objectifs et enfin celle de l’efficacité du travail
des salariés.
2.1. Évaluation du savoir-faire et implication
organisationnelle des salariés
La GRH est un ensemble de pratiques de gestion dont chacun
peut s’inspirer pour accroitre ou améliorer les relations entre les
membres de son organisation, leur efficacité, leur productivité et leur
rentabilité, tout en favorisant leur mobilisation, leur fidélisation et leur
implication. Parmi ces pratiques figure en bonne place l’évaluation du
personnel (Garand, 2004). Pour Zarifan (1999), le savoir-faire est la
prise d’initiative et de responsabilité de l’individu sur des situations
professionnelles auxquelles il est confronté…Le savoir-faire est une
intelligence pratique des situations qui s’appuie sur des connaissances
acquises et les transforment, avec d’autant plus de force que la
diversité des situations augmente…Le savoir-faire est la faculté à
mobiliser des réseaux d’acteurs autours des mêmes situations, à
partager des enjeux, à assumer des domaines de coresponsabilité.
Ainsi, évaluer les savoir-faire, gérer les savoir-faire revient à
recentrer les politiques de gestion des ressources humaines sur les
salariés. Mieux pris en compte, ces derniers devraient naturellement
davantage s’impliquer dans l’organisation (Jarnias, 2003). Or, en
pratique, mettre en place l’évaluation des savoir-faire n’est pas
forcément le gage d’une plus grande implication des salariés. En effet,
sur le terrain, il apparaît que, dans certains cas, la mise en place d’un
système de gestion des savoir-faire souvent concomitante à une
recherche de rentabilité plus élevée, induise des effet pervers non
prévu à priori et qui ont logiquement davantage tendance à inhiber
qu’à impliquer les salariés. Ulrich (1998), montre que la gestion des
savoir-faire, souvent initiée pour répondre à des exigences
économiques plus fortes, induit des pressions telles sur les salariés

212
que ces derniers au lieu de s’impliquer davantage peuvent adopter un
comportement appauvri car, très largement inhibé.
Par ailleurs, l’évaluation des savoir-faire se traduit par une
individualisation des pratiques de la gestion des Ressources
Humaines. Pichault et Nizet (2000), parlent de « modèle
individualisant ». Ce modèle est centré sur la notion de savoir-faire à
tous les niveaux : évaluation des savoir-faire et rémunération des
salariés, formation des salariés, gestion des savoir-faire axé sur le
développement de l’employabilité. Ce modèle sous-tend donc
l’implication des salariés. L’individualisation de l’évaluation des
savoir-faire, de la rémunération, contribuent à développer
l’implication des salariés qui deviennent de plus en plus acteur de leur
avenir professionnel (Jarnias, 2003). L’introduction d’une
rémunération par les savoir-faire est naturellement un catalyseur de
l’implication des salariés. En effet, alors que la rémunération d’un
poste ou d’une qualification concerne une place anonyme dans
l’organisation, la rémunération des savoir-faire est spécifique à chaque
salarié. Dans ce cadre-là, une attitude rationnelle pousse les salariés à
développer leur savoir-faire donc à s’impliquer d’avantage pour en
obtenir des retombées pécuniaires. Une étude de cas issue de la
littérature américaine montre qu’effectivement, l’introduction d’une
rémunération pour les savoir-faire permet une plus grande incitation à
apprendre et à les développer (Klarsfeld, 2003).
Il apparaît donc que toute démarche de mise en place d’une
évaluation des savoir-faire s’articule autour de chaque salarié. Ces
derniers ont donc tout intérêt à s’impliquer pour obtenir le
« portefeuille de compétences » le plus riche possible avec toutes les
conséquences que cela génère en termes d’employabilité, de
perspectives d’évolution dans l’organisation et de la mobilité externe.
Analyse cohérente avec les propos de l’interviewé n°4 (2014) qui
affirme que : « L’évaluation a toujours exercé une influence, ça a
toujours exercé une influence non seulement sur l’implication au sein
de la société, mais aussi a travers les... les... les différents
collaborateurs. Cette évaluation là, elle influence. Je prends peut-être
d’abord au niveau du savoir-faire, l’influence quelle a euh ! Au
niveau d’abord de la société parce que, elle permet c’est-à-dire de
gratifier comme j’ai dit les membres compétents de l’entreprise et
d’une part elle permet d’instaurer un climat de concurrence entre
les... les salariés (silence)...».De cette littérature et des propos de cet
interviewé, nous formulons l’hypothèse suivante :

213
H1 : L’évaluation du savoir-faire des salariés influence positivement
leur implication organisationnelle.
2.2. Evaluation de la capacité d’adaptation et implication
organisationnelle des salariés
L’adaptation à l’emploi renvoie aux ajustements des pratiques et
au développement des compétences dans l’exercice d’une activité
professionnelle en fonction du contexte de travail. L’adaptation au
sein d’une entreprise peut consister à un changement de machines,
d’outils, de logiciels, de processus… mais aussi modifier
l’organisation du travail affectant les missions, les tâches ou
l’organisation d’un poste de travail, intégrer de nouveaux salariés ou
faciliter le retour de salariés absents depuis un certain temps. Il est
aussi possible de mettre en place des actions d’adaptation au poste de
travail, c’est-à-dire des formations nécessaires à l’exécution par le
salarié des missions et tâches liées à son poste de travail. Ainsi, toute
action de formation destinée à assurer l’adaptation au poste de travail,
est réalisée pendant le temps de travail et constitue du temps de travail
effectif, donne lieu pendant sa réalisation au maintien de la
rémunération et de la protection sociale du salarié, et doit être suivie
par le salarié sans qu’il soit nécessaire de recueillir son consentement
(AGEFOS PME, 2006).
Dès lors, l’évaluation de la capacité d’adaptation d’un salarié,
que ce soit à son poste de travail, aux évolutions des activités
professionnelles, ou alors à son temps de travail constitue pour une
entreprise un gage de flexibilité aux fluctuations de l’environnement
tant interne qu’externe. Alors, pour rester compétitives dans un
environnement changeant, les entreprises peuvent être amenées à
modifier les conditions et la localisation du travail (Autès, 2000). Ce
dernier ajoute que l’employeur, tenu d’exécuter de bonne foi le contrat
de travail, a le devoir d’assurer l’adaptation de ses salariés à
l’évolution de leurs emplois. Ceux-ci par ces actions s’identifieraient à
l’entreprise et seront plus enclins à donner le meilleur d’eux mêmes
tout en restant fidèle à l’entreprise. Pour Peretti (1984), lorsque
l’intelligence, l’esprit d’initiative, l’aptitude à communiquer et à
négocier des salariés sont pris en compte (logiquement dans la
démarche de l’évaluation), ces derniers s’impliquent non seulement
dans leur travail mais également envers l’entreprise qui les emploie.
Selon l’interviewé n°2 (2014) : « l’évaluation est même un
élément important pour l’implication des salariés (...).

214
L’individualisation de la capacité n’est ce pas d’adaptation et de
l’évaluation (...), fait en sorte que, pousse n’est ce pas les salariés de
l’entreprise à être plus impliqué au travail et n’est ce pas, dans
l’entreprise souvent pour les primes qu’elle octroi ou encore n’est ce
pas les possibilité d’ascension promotionnelle qu’elle offre en
promouvant n’est ce pas, le travail bien et vite fait avec n’est ce pas
un minimum d’erreur pour le bien être n’est ce pas de l’entreprise. »
Par ces propos de cet interviewé et eu égard à la littérature, nous
comprenons que lorsque des actions sont entreprises par les
employeurs pour assurer l’adaptation de leurs salariés à leurs postes, à
l’évolution de leurs emplois, ceux-ci répondent en s’impliquant dans
et envers l’entreprise. Ce qui nous permet de formuler l’hypothèse
suivante :
H2 : L’évaluation de la capacité d’adaptation des salariés influence
positivement leur implication organisationnelle.
2.3. Evaluation du degré d’atteinte des objectifs et
implication organisationnelle des salariés
Longenecker et Gioia (1988), considèrent que
l’accompagnement des managers vers davantage d’efficacité dans leur
fonction d’appréciation de l’atteinte des objectifs individuels des
salariés devient un enjeu important pour le développement de
l’engagement de ces derniers envers l’organisation. Même s'il existe
une relative évidence que les pratiques de GRH peuvent influencer des
indicateurs comme l'engagement organisationnel et la capacité
d’atteindre les objectifs de l'individu au sein de l'organisation, nul n'est
vraiment certain de l'ampleur du phénomène. Le gestionnaire est
encore souvent partagé entre d'une part, sa compréhension et
acceptation des propos scientifiques sur la GRH et d'autre part, sa
connaissance de la réalité même du terrain (Sibaud, 2001).
Malgré l’énorme investissement pour assurer l’efficacité des
modes d’évaluation du degré d’atteinte des objectifs par les salariés, il
faut se rendre à l’évidence qu’ils sont critiqués de toutes parts.
Schneier et al., (1991) ont bien résumé les reproches qui leur sont
adressés : Dans la plupart des entreprises, les modes d’évaluation du
niveau d’atteinte des objectifs, avec leurs formulaires et procédures,
ne sont que des exercices bureaucratiques, sans plus. Ils sont un
fardeau pour les superviseurs et une source de démotivation pour les
employés. Devant ces critiques, L’Heureux (2008) va démontrer que
les employés considèrent la rétroaction comme essentielle et qu’elle

215
joue un rôle fondamental dans leur motivation et, conséquemment,
dans leur contribution affective à l’organisation. Ils vont même
jusqu’à solliciter cette rétroaction par divers moyens. Chaque humain
au travail a ce besoin intrinsèque de savoir ce qui est attendu de lui, et
jusqu’à quel point il a répondu à ces attentes, que ce soit pour
apprécier sa propre progression, se comparer, se fixer de nouveaux
objectifs ou progresser dans l’organisation. L’interviewé n°4 (2014)
précise: « Lorsque le salarié sait qu’une évaluation sera faite de ce
qu’il fait en termes (...), d’atteinte du quota de chiffre d’affaire, et
comme il cherche à avoir des promotions ou des primes, il va bien
réaliser les tâches qu’on lui assigne de peur non seulement de perdre
ces avantages mais aussi de voir engager contre lui des actions
correctives et ainsi donc être plus impliqué dans son travail et de
manière plus large dans son entreprise. Que ce soit dans le public ou
dans le privé, il y a toujours une évaluation, par ce que on ne peut
pas, il y a toujours des objectifs à atteindre et si c’est qu’on n’évalue
pas le personnel, on ne pourra jamais atteindre ces objectifs là. » De
cette littérature et des propos de l’interviewé, on remarque que
l’évaluation du niveau d’atteinte des objectifs par les salariés permet à
ces derniers de s’identifier et de constituer un lien d’attachement à
l’organisation qui les emploies. Ce qui nous conduit à formuler
l’hypothèse ci-dessous :
H3 : l’évaluation du degré d’atteinte des objectifs par les
salariés influence positivement leur implication organisationnelle.
2.4. Evaluation de l’efficacité du travail et implication
organisationnelle des salariés
Selon Therriault (2006), l’évaluation de l’efficacité au travail
serait un « acte qui consiste à porter un jugement sur la valeur de la
contribution particulière d’un individu à l’organisation qui l’emploie
». On prétend que le besoin de mesurer quelque chose se présente
uniquement lorsqu’il y a amélioration ou détérioration possible, ce qui
semble être le cas lorsqu’on parle de l’efficacité du travail d’un
employé (St-Onge et al., 2004). Depuis les années soixante-dix,
l’évaluation individuelle formalisée est devenue un outil central dans
la gestion des ressources humaines (Billet, 2005). Selon lui, les
gestionnaires évaluent individuellement leurs employés en prenant
pour acquis que les variations dans l’efficacité du travail qu’ils livrent
sont dues à des causes personnelles notamment à leur niveau
d’engagement. L’évaluation leur apparaît donc comme la façon de
remédier à ces causes.

216
Pourtant Gosselin et Murphy (1994), St-Onge (2000) et Leroux
(2007), affirment que l’évaluation de l’efficacité du travail des salariés
demeure une source de mésententes, compte tenu de tous les enjeux
pécuniaires et d’estime de soi qu’elle implique. Aborder alors le
thème de l’évaluation individualisée de l’efficacité au travail apparaît
tout aussi pertinent, étant donné les réticences persistantes qu’elle
engendre, tant chez les employés que chez les cadres.
D’un autre côté, L’entreprise est soumise à une obligation de
résultats et ceux-ci sont mesurés, entre autres, par l’intermédiaire du
travail de chacun (De Gaulejac, 2005). Comme le dit Waldman
(1994), il y a un postulat selon lequel l’amélioration de la
performance d’un employé engendre automatiquement une
amélioration de la performance organisationnelle tout entière. Ainsi, à
peu près tous les gestionnaires et spécialistes de la gestion des
ressources humaines sont d’accord sur la nécessité d’évaluer
l’efficacité du travail individuel, et ce, dans le but de mieux impliquer
les salariés dans la gestion et l’atteinte de la productivité
organisationnelle (Billet, 2005; Petit et Haines, 1994). L’interviewé
n°7 (2014) lui, affirme que: « Je trouve qu’évaluer notre personnel
contribue à les impliquer d’avantage dans l’entreprise. Oui là, ça les
motivent, ça encourage même les autres, les tocard si je peux les
appeler ainsi. Ça instaure aussi un climat de concurrence entre les
salariés si tu es par exemple commercial et que tu vois que les
résultats de l’évaluation de ton collègue sont excellents et que les
tiens sont médiocre, tu vas développer des techniques pour les
améliorer. » De ce qui précède, nous pouvons nous résumer en disant
que l’évaluation de l’efficacité du travail du personnel, loin d’être une
formalité constitue auprès d’un manager averti un outil indispensable
non seulement à l’accroissement de la productivité individuelle des
salariés mais aussi et surtout s’il est bien mené de l’accroissement de
la productivité globale de l’entreprise et, chez le personnel
l’attachement de ces derniers envers leur entreprise si elle leur est
reconnue. Ce qui nous permet de formuler l’hypothèse ci-après :
H4 :L’évaluation de l’efficacité du travail effectué par les
salariés influence positivement leur implication organisationnelle.

3. Méthodologie de la recherche
Pour mener à bien cette étude, nous adoptons une démarche
hypothético-déductive afin d’apporter des réponses aux questions de

217
recherche posées, et valider empiriquement nos hypothèses de
recherche. En effet, cette démarche consiste à construire à partir de la
littérature existante sur l’évaluation du personnel et sur l’implication
organisationnelle des salariés, des réponses théoriques au phénomène
étudié. Puis à les confronter à la réalité par des tests empiriques.
Toutefois avant la phase quantitative, nous avons réalisé une étude
exploratoire pour affiner la base de nos hypothèses de recherche. La
collecte de données sur le terrain s’est faite à l’aide d’un guide
d’entretien pour la partie exploratoire et d’un questionnaire sur
support papier pour la partie quantitative. Les informations recueillies
ont été traités à l’aide du logiciel SPSS (Statistical Package for Social
Sciences) pour tester les hypothèses. Les réponses aux questions ont
été analysées avec les outils statistiques suivants : l’analyse en
composante principale et l’analyse de régression linéaire. Notre
échantillon était constitué uniquement de PME dans lesquelles nous
avons interrogé les dirigeants ou Responsables des Ressources
Humaines en présageant que ces deux personnes étaient les plus à
même de décrire les pratiques d’évaluation dans leurs entreprises et,
en tant que manager, considéré par Dagorn et Roméo-Arena (2010),
comme étant le baromètre du social au sein de l’entreprise, d’estimer
du degré d’implication organisationnelle des salariés de l’entreprise et
de l’incidence de l’évaluation du personnel sur l’implication
organisationnelle de ces derniers.
3.1. Echantillon de mesure et caractéristiques
Au stade de l’étude qualitative (exploratoire) et sachant que
l’intérêt de l’étude qualitative ne réside pas dans la taille de
l’échantillon, mais plutôt dans la richesse des propos recueillis et dans
la pertinence des analyses de leurs discours, nous avons interviewé les
cadres (dirigeants ou responsable de ressources humaines) de sept (07)
PME (soit, un à Maroua, deux à Garoua, deux à Yaoundé et deux à
Douala). Il convenait pour nous, d’obtenir d’eux, des informations sur
l’évaluation du personnel, ses objets, l’utilisation de ses résultats,
l’implication organisationnelle des salariés et l’influence de
l’évaluation du personnel sur l’implication organisationnelle des
salariés dans leurs structures. L’évaluation du personnel étant une
pratique, dont les responsables (responsable ressources humaines ou
dirigeants des PME) disposent en grande partie.
Au stade de l’étude quantitative, partant du fait que l’intérêt d’un
échantillon étant sa représentativité et la possible généralisation des

218
résultats obtenus, nous avons effectué notre enquête dans cinq (05)
chefs lieux des dix régions du Cameroun (Maroua, Garoua,
Ngaoundéré, Yaoundé et Douala), par choix raisonné auprès des
dirigeants ou responsables ressources humaines des PME, compte
tenu de la concentration de ces entreprises dans ces villes (Douala,
capitale économique possède naturellement plus d’entreprises de ce
type). Le tableau ci-dessous présente la répartition de l’échantillon
suivant les cités enquêtées:

Tableau 1 : Répartition de l’échantillon par villes


Questionnaires
Villes Administrés Récupérés Exploitables
effectifs % effectifs % effectif %
Maroua 15 10 13 12,04 13 14,13
Garoua 20 13,33 17 15,74 14 15,22
Ngaoundéré 15 10 13 12,04 12 13,04
Yaoundé 40 26,67 28 25,93 23 25
Douala 50 33,33 37 34,26 30 32,61
Total 150 100 108 100 92 100
Source : nous mêmes.
A la fin du processus de dépouillement de nos questionnaires,
notre échantillon de mesure est composé de 92 PME (soit un dirigeant
ou Responsable des Ressources Humaines par PME) réparties dans
des régions et des branches d’activités différentes.
La lecture du tableau précédent nous renseigne sur le fait que les
entreprises de l’échantillon sont beaucoup plus concentrées dans la
ville de Douala. Ceci trouve son explication dans le fait que cette ville
est la capitale économique du pays donc, dans laquelle il existe un
grand nombre d’entreprises sur lesquelles se fonde notre étude. Le
nombre de questionnaires exploitables obtenu dans cette dernière
représente 32,61% du nombre total, suivie de la ville de Yaoundé avec
25%, puis de la ville de Garoua avec 15,22%. Maroua et Ngaoundéré
ferment la liste avec respectivement 14,13% et 13,04% de
questionnaires exploitables.
Par ailleurs, des questions d’identifications ont été posées dans
notre questionnaire d’enquête et concernent tant l’entreprise que le
répondant. Parmi les questions posées, nous ne décrirons ici que celles
relatives à l’entreprise : secteur d’activité et forme juridique ; et celles
relatives au répondant : âge, profil biologique et niveau d’étude.

219
Ainsi, ces PME exercent leurs activités pour la grande partie
dans le secteur commercial, représentant 65,2% de l’effectif total de
l’ensemble de l’échantillon de notre étude contre 30,4% qui exercent
dans le secteur des services et seulement 4,3% dans le secteur
industriel. Leurs forme juridique dominante est le type Société à
Responsabilité Limité culminant à 78,3% contre 19,6% pour le type
Société anonyme et 2,2% seulement pour Société en nom collectif.
L’analyse de notre échantillon en termes de tranche d’âge révèle
que les Responsables des PME retenus pour notre travail ont un âge
qui se situe en majorité dans la tranche de 30 à 40 ans (45,7%) contre
30,4% pour la tranche de 41 à 50 ans, 19,6% pour les moins de 30 ans
et seulement 4,3% pour les plus de 50ans. Nous en déduisons que les
responsables des PME Camerounaises (dirigeants et responsables des
ressources humaines) sont relativement jeunes et pour ce qui est de
notre échantillon, constitué en majorité des hommes car leurs
pourcentage est de 67,4% contre 32,6% de femmes.
La répartition des répondants selon leur niveau d’étude fait état
d’une concentration des répondants en master professionnel (23
répondants avec un pourcentage 25,0%) et en licence (20 répondants
pour un pourcentage 21,7%). Cette tendance peut-être expliquée par
le fait que les entreprises camerounaises sollicitent de plus en plus des
candidats aux recrutements ayant une formation professionnelle. Donc
ayant un bagage technique et mieux outillés que leurs confrères ayant
une formation académique plutôt générale. Les autres niveaux
d’études prévus dans nos modalités de réponse à cette question sont
représentés dans notre échantillon à raison de 19,6% pour la maitrise
(18 répondants) ; 12,0% pour le Bac (11 répondants) ; 7,6% pour le
DEA ou Master recherche (7 répondants) ; 6,5% pour le BTS ou DUT
(6 répondants) ; 4,3% pour le BEPC ou CAP (4 répondants) et enfin
3,3% pour les ingénieurs (3 répondants).
3.2. Collecte des données
La collecte des données sur le terrain s’est faite aussi bien
qualitativement que quantitativement.
Qualitativement, nous avons adopté la technique de l’entretien
individuel semi-directif dont la durée moyenne était de 63 minutes
environ en guise de phase exploratoire. Il permet de vérifier des
hypothèses (d’en affiner les bases dans notre cas) et d’illustrer des
théories en apportant un réservoir d’opinions et d’anecdotes. Il ne
s’agit pas de connaître les caractéristiques de la population, de

220
mesurer les opinions majoritaires ou d’étudier les déterminants socio-
démographiques des pratiques et des représentations mais de recueillir
des témoignages détaillés et individualisés afin de comprendre les
logiques qui sous-tendent les pratiques, en provoquant chez les
enquêtés la production de réponses à des questions précises.
L’entretien semi-directif permet d’entrer dans le champ des
représentations et des pratiques individuelles. Il permet de formaliser
et de systématiser la collecte des données et permet de constituer un
corpus de données homogènes rendant possible une étude comparative
des entretiens (Couvreur et Lehuede, 2002).
Quantitativement, nous avons utilisé un questionnaire d’enquête
que nous avons administré auprès des Responsables des Ressources
Humaines ou Dirigeants des structures cibles de notre étude. La
technique utilisée a été l’auto-administration du questionnaire.
3.3. Présentation des variables
Les variables que nous présenterons ici sont celles relatives à nos
objets de l’évaluation retenus dans la recherche et celles sur lesquelles
nous postulons, qu’ils exercent une influence. Il s’agit notamment des
variables (indépendantes) relatives à l’évaluation du savoir-faire des
salariés, celles relatives à l’évaluation de la capacité d’adaptation,
celles relatives à l’évaluation du degré d’atteinte des objectifs, celles
relatives à l’évaluation de l’efficacité du travail et enfin, celles
relatives à l’implication organisationnelle des salariés (variable
dépendante), sans oublier les variables d’identification. De même,
nous ne présenterons que les variables retenus par l’ACP.
Ainsi, pour les variables indépendantes, nous avons mesuré
l’évaluation du savoir-faire des salariés par les items adaptés de
Goldman et al., (1995) et de Shafer (1997) consignés dans le tableau
suivant :
Tableau 2 : items de mesure de l’évaluation du savoir-faire
Facteurs Items α de Cronbach
Les contributions individuelles au succès
organisationnel sont évaluées en vue de
l'amélioration du savoir-faire des salariés.
F1 : Evaluation Les compétences des salariés sont évaluées et
améliorant développées en prévision des futures évolutions 0,713
le savoir-faire de l'entreprise.
J’évalue les salariés pour agir en vue d'une
amélioration continue des produits, des processus
et/ou des méthodes de travail de l'entreprise.

221
Lors des évaluations, chaque salarié peut faire le
lien entre son activité propre et l'activité globale.
L'évaluation des savoir-faire me permet de
F2 : Evaluation prendre rapidement des décisions lorsque les 0,643
flexibilisant circonstances changent.
le savoir-faire Identification et évaluation des compétences
détenues par les salariés en vue d'une
amélioration constante.
Mise en place dans l'entreprise des moyens
F3 : Evaluation formels et/ou
harmonisant informels permettant de solliciter et d'évaluer les0,682
le savoir-faire bonnes idées des salariés.
L'entreprise organise l'évaluation la gestion et le
partage des connaissances et savoir-faire entre les
salariés.
Source : nos analyses.
La mesure de l’évaluation de la capacité d’adaptation s’est faite à
partir des items adaptés de Black et Stephens (1984) tels que présentés
dans le tableau suivant :
Tableau 3 : items de mesure de l’évaluation de la capacité d’adaptation
α de
Facteurs Items
Cronbach
J'évalue l'adaptation qu'ont les
salariés dans la réalisation des
F1 : Evaluation
tâches à eux assignées.
de
J’évalue la capacité qu'ont les
l’adaptation au 0,773
salariés à résister de façon active
poste
au stress.
de travail
J’évalue la capacité des salariés à
bien maitriser leur poste de travail.
Je juge l'adaptation des salariés
dans la réalisation d'une tâche
autre que celle de leur domaine.
L'évaluation de l'adaptation
permet aux salariés d'identifier et
F2 : Evaluation de saisir rapidement les meilleures
0,755
de l’adaptation opportunités qui se présentent
stratégique dans notre environnement.
Nos salariés ne posent pas de
questions, pour réaliser
correctement le travail du fait de
leur capacité accrue d'adaptation.
Nos salariés sont satisfaits de 0,818

222
l'évaluation faite de l'adaptation
de leurs compétences techniques.
J’évalue le niveau d'adaptation
intelligente des salariés aux
règles de conduite des activités de
F3 : Evaluation leur poste.
de l’adaptation J’évalue l'adaptation des salariés
au temps de dans la planification et la
travail gestion de leur temps de travail.
J’évalue la capacité des salariés à
la maitrise des prérequis
techniques relatifs au travail.
Source : nos analyses.
L’évaluation du degré d’atteinte des objectifs a été mesurée à
l’aide des items adaptés de Ndi Zambo (2001) relatés dans le tableau
suivant :
Tableau 4 : items de mesure de l’évaluation du degré d’atteinte des
objectifs
α de
Facteurs Items
Cronbach
J’ai une difficulté dans l'identification et
l'évaluation des
F1 :
objectifs réalistes des salariés.
Difficultés
L'évaluation que je fais n'est pas apte à
dans
produire une appréciation complète de 0,801
l’évaluation
la contribution des salariés.
des objectifs
Je ne prends pas en considération les
réalistes
facteurs qui ne sont pas directement
reliées aux réalisations accomplies.
L'évalué acquiert plus d'initiative et est
plus en mesure de contrôler ses progrès
par l'évaluation des objectifs.
F2 :
L'évaluation de la production des
Evaluation
résultats attendus des employés, est
des objectifs 0,696
importante dans le management
de
quotidien.
performance
Par l'évaluation de l'atteinte des
objectifs, je vérifie si les résultats ont
été atteints.
F3 : J’évalue la capacité des participants à
0,619
Evaluation définir des objectifs favorables à

223
des objectifs l'organisation et qui couvrirons
en adéquation l'ensemble des responsabilités du poste.
avec les J’évalue les objectifs, clarifie les
salariés responsabilités pour une adéquation des
salariés.
Source : nos analyses.
Concernant l’évaluation de l’efficacité du travail, nous nous
sommes servis des items de mesure adaptés de Sherer et al., (1982)
exposés dans le tableau suivant :
Tableau 5 : items de mesure de l’évaluation de l’efficacité du travail
α de
Facteurs Items
Cronbach
J'évite d'apprendre des choses nouvelles
quand elles me
paraissent difficiles.
F1 : Evaluation
Quand j'apprends quelque chose de
de l’efficacité
nouveau, j'abandonne 0,810
face aux
vite si je ne réussis pas dès le départ.
difficultés
Si quelque chose a l'air compliqué, je ne
vais même pas
m'embêter à essayer de le faire.
Quand je fixe des objectifs importants,
F2 : Evaluation
je les atteints rarement.
de l’efficacité 0,659
Je ne me sens pas certain d'avoir de
personnelle
bonnes aptitudes.
Si je n'arrive pas à faire un travail la
F3 : Evaluation
première fois, je persiste
de la ténacité 0,619
jusqu'à y arriver.
au travail
L'échec me fait persister encore plus.
Source : nos analyses.
La variable dépendante quand à elle a été mesurée à l’aide des
items adaptés de Meyer et Allen (1991), présentés dans le tableau
suivant :
Tableau 6 : items de mesure de l’implication organisationnelle.
α de
Facteurs Items
Cronbach
Je ne quitterais pas mon entreprise
F1 : maintenant parce que j'estime avoir des
Implication obligations envers certaines personnes qui 0,897
normative y travaillent.
J'estime que je serais coupable si je

224
quittais maintenant mon entreprise
actuelle.
Je trahirais la confiance que l'on me fait si
je quittais maintenant mon entreprise
actuelle.
Il ne serait pas correct de quitter
maintenant mon entreprise actuelle, même
si j'y trouvais avantage.
Je continue à travailler pour cette
entreprise parce que je ne pense pas
qu'une autre pourrait m'offrir les mêmes
avantages.
Si on m’offrait un poste dans une autre
entreprise, je ne
trouverais pas correct de quitter mon
entreprise actuelle.
Je n'ai pas d'autres choix que de rester
dans mon entreprise actuelle.
Pour moi personnellement, quitter mon
entreprise actuelle auraitbeaucoup plus
d'inconvénients que d'avantages.
Je ne voudrais pas quitter mon entreprise
F2 : actuelle parce que j'aurais beaucoup à y 0,779
Implication perdre.
calculée J'estime mes possibilités de choix trop
limitées pour envisager de quitter mon
entreprise actuelle.
Mon entreprise représente beaucoup pour
moi.
Je suis fier d'appartenir à cette entreprise.
Je ressens vraiment les problèmes de mon
entreprise comme si c'était les miens.
F3 :
J'éprouve vraiment un sentiment 0,777
Implication
d'appartenance à mon entreprise.
affective
Il ne serait pas moralement correct de
quitter mon entreprise actuelle
maintenant.
Source : nos analyses
Notons que les variables ci-dessus (Indépendantes et dépendante)
ont toutes été mesurées par des échelles de LIKERT à cinq points, "de
pas du tout d’accord" à "tout à fait d’accord" (codé de 1 à 5 et de 5 à 1
pour les items négativement formulés). Toutefois, Ouattara (1997) et

225
Sogbossi (2009), préconisent une échelle de type LIKERT à trois
points variant de 1 à 3 « pour les enquêtes dans les pays sous-
développés ». Ceci est justifié par les travaux sur les dirigeants
d’entreprise de petite taille en Afrique. Ces travaux ont en effet mis en
évidence le fait que, « le faible niveau général de ces entrepreneurs et
l’analphabétisme de la majorité des populations en Afrique ne leur
permet pas souvent de faire la différence entre les expressions comme
[…] "plutôt d’accord" et "d’accord" ». Ainsi donc, le choix malgré
tout de l’échelle à cinq point repose sur une observation du niveau
général d’étude des interviewés, lors de la phase exploratoire. Il se
situait au moins au niveau de la Licence. Cette observation sommaire
de début à été vérifié par les résultats de l’enquête quantitative. Cette
dernière nous révèle que 95,7% des répondants de notre cible d’étude
ont au moins le Baccalauréat. Ce résultat peut trouver son explication
dans le fait que, les entrepreneurs Camerounais ont une tendance à
faire faire des études (généralement en gestion) à un ou plusieurs de
leurs proches (fils, frères…) puis, à leurs passer le flambeau. Dans
ces conditions, nous estimons dans une moindre mesure que, ces
derniers ont une compréhension plus ou moins acceptable des
expressions dans l’échelle de LIKERT à cinq points.
Pour ce qui est des variables d’identifications, nous avions
demandé : la tranche du nombre des salariés ; le secteur d’activité et la
forme juridique (pour l’identification de l’entreprise) ; la tranche
d’âge ; le profil biologique ; le poste et le niveau d’étude (pour
l’identification du répondant).
3.4. Outils statistiques utilisés
Afin de mettre en évidence l’effet des objets de l’évaluation du
personnel sur l’implication organisationnelle de ces derniers, nous
avons réalisés des régressions linéaires simples. Ceci était possible
parce que nos variables indépendantes et notre variable dépendante
était toutes quantitatives. Les ACP successifs nous ont permis de
réduire la masse d’informations dont nous disposions en un nombre
limité de facteurs (trois dans tous les cas) que nous avions nommé ci-
dessus. Ainsi, les facteurs retenus de ces ACP nous ont permis de faire
des régressions à l’intérieur desquelles, nous apprécions la qualité de
la régression à l’aide de quatre indicateurs : le coefficient de
corrélation R, mesurant l’intensité de la relation entre deux variables
et dont la valeur est bonne lorsqu’elle supérieure ou égale à 0,5. Le
coefficient de détermination R² qui mesure la part de variance de la

226
variable dépendante expliquée par la variation de la variable
explicative. De même que le précédent, ce coefficient est également
intéressant lorsqu’il est supérieur ou égal à 0,5. Le F de Fisher,
mesurant la significativité du modèle, sa robustesse considérée comme
telle lorsque sa significativité tend vers 0,000 donc, très significatif. Et
enfin le t de Student, mesurant le pouvoir explicatif des coefficients de
régression (Béta Standardisés) devant être au moins égal à 2 et
significatif (sa significativité doit être inférieure à 0,05).

4. Résultats et discussion
Nous tenons à préciser avant l’entame de nos différents résultats
que pour chaque hypothèse, compte tenu du fait que l’ACP de la
variable expliquée (implication organisationnelle) a retenu trois
facteurs, nous avions croisé chacun de ces facteurs avec celles de
chaque variable indépendante impliquée dans chacune de nos
hypothèses et à la fin nous avions réalisé une régression générale de
chaque facteur de la variable à expliquer avec l’ensemble des facteurs
des variables explicatives. C’est pourquoi, pour chaque hypothèse,
nous avions trois régressions. Il en va de même pour la régression
générale. Ceci dit, Les résultats de nos régressions nous ont permis de
valider nos hypothèses : H1, H2, H3 et H4. Les principaux indicateurs
qui nous ont permis d’obtenir ces résultats se trouvent synthétisés dans
les tableaux ci-dessous :
Tableau 7 : Récapitulatif des régressions entre l’évaluation du
savoir-faire (évaluation améliorant le savoir-faire ; flexibilisant le
savoir-faire ; harmonisant le savoir-faire) et l’implication
organisationnelle (implication normative ; calculée et affective).
Indicateurs R R² F de Sign de Bêta t de Sign
Fisher F Student de t
Régression 0,466 5,143 0,000
H1.1 sur 0,518 0,269 16,336 0,000
0,226 2,495 0,014
implication
normative
Régression 0,007 0,065 0,945
H1.2 sur 0,149 0,022 0,663 0,577 0,070 0,668 0,506
implication 0,131 1,240 0,218
calculée
Régression
H1.3 sur 0,516 0,266 32,695 0,000 0,516 5,718 0,000
implication
affective
Source : nous-mêmes

227
L’analyse de ce premier modèle de régression certifie l’existence
de l’influence de l’évaluation du savoir-faire des salariés, sur leurs
implications organisationnelle. En effet, régression H1.1 indique que
le coefficient de détermination R² du modèle de régression linéaire
prend la valeur de 0,269 soit 26,9% ; inférieur à 50% ce qui signifie
que le modèle de régression explique 26,9% de la variation de
l’implication normative en fonction respectivement des variations de
l’évaluation améliorant le savoir-faire et de l’évaluation flexibilisant le
savoir-faire. Le coefficient de corrélation donné par R = 0,518 indique
une relation relativement bonne entre l’implication normative et les
deux variables indépendantes sus cité. Malgré la relative faiblesse du
pouvoir explicatif du modèle (R²), la régression H1.1 est bonne car,
son indicateur de significativité, le F de Fisher Snedecor est égal à
16,336 et très significatif au seuil de 0,05. De même, nous remarquons
que les coefficients t de Student ont tous des valeurs supérieures à 2,
et significatives.
La régression H1.2 nous fait état d’une absence de relation entre
les facteurs de l’évaluation du savoir-faire et l’implication calculée
car, son F de Fisher est non significatif, les (t) de Student des Bêtas
sont tous inférieurs à 2 et non significatifs.
Enfin, la régression H1.3 montre l’existence d’une droite de
régression, mettant en exergue l’influence de l’évaluation harmonisant
le savoir-faire sur l’implication affective des salariés. Avec un R² du
modèle égal à 0,266 ; inférieur à 0,5 ; le modèle de régression
explique 26,6% de la variation de l’implication affective en fonction
de la variation de l’évaluation harmonisant le savoir-faire. Le
coefficient de corrélation R = 0,516 nous indique que la relation entre
l’implication affective et l’évaluation harmonisant le savoir-faire est
relativement moyenne donc, acceptable. En dépit de l’insuffisance du
R², le F de Fisher lui, est de 32,695 et très significatif (Sign = 0,000).
Remarquons aussi que le t de Student du Bêta est supérieur à 2 et très
différent de 0.
Partant de là, nous disons que l’hypothèse H1 : L’évaluation du
savoir-faire des salariés influence positivement leur implication
organisationnelle est validée.
Ceci rejoint la réflexion de Jarnias (2003) qui estime que,
l’évaluation du savoir-faire des salariés, mieux pris en compte, devrait
naturellement davantage impliquer ces derniers dans l’organisation.
Avis renforcé par l’interviewé n°3 (2014) qui ne manque pas de

228
mentionner qu’ « Il y a chez nous ce qu’on appelle les plans de
carrière qui consiste à dresser le profil de chacun de nos salariés en
fonction de leur savoir-faire, ce qui donnent la possibilité aux salariés
ayant un bon profil de bénéficier des stages et des cessions de
formations leurs donnant ouverture à des postes plus élevés que ceux
qu’ils avaient. Cette façon de faire les choses conduit nos salariées à
être davantage impliqué dans l’entreprise en raison de ces avantages,
je dirais de cette aubaine qui leur est donné d’augmenter leurs gains
et leurs statuts au sein de l’entreprise. »
Tableau 8 : Récapitulatif des régressions entre l’évaluation de la
capacité d’adaptation (évaluation de l’adaptation au poste de travail,
stratégique et au temps de travail) et l’implication organisationnelle
(implication normative ; calculée et affective).
F de Sign de t de Sign
Indicateurs R R² Bêta
Fisher F Student de t
Régression 0,525 6,664 0,000
H2.1sur
0,668 0,447 35,934 0,000
implication 0,413 5,240 0,000
normative
Régression
H2.2 sur
0,295 0,087 08,591 0,004 0,295 2,931 0,004
implication
calculée
Régression 0,460 5,229 0,000
H2.3 sur
0,559 0,312 20,193 0,000
implication 0,317 3,611 0,001
affective
Source : nous-mêmes
La régression H2.1 témoigne de l’existence de l’incidence de
l’évaluation de la capacité d’adaptation des salariés (respectivement
évaluation de l’adaptation stratégique et de l’adaptation au poste de
travail), sur leur implication normative. En effet, les résultats
indiquent que le R² est égale à 0,447 ; sensiblement égal à 0,5. Alors,
le modèle explique sensiblement 50% de la variation de l’implication
normative en fonction des variations de l’évaluation de l’adaptation
stratégique et de l’évaluation de l’adaptation au poste de travail. Le R
= 0,668 montre qu’il existe une bonne relation entre l’évaluation de
l’adaptation stratégique, l’évaluation de l’adaptation au poste de
travail et l’implication normative (66,8%). Le F de Fisher égal à
35,934 est très significatif au seuil de 0,000. Aussi, les coefficients t
de Student ont tous des valeurs supérieures à 2, et donc différents de
zéro.

229
La régression H2.2 elle, nous révèle l’existence d’une droite de
régression, mettant en évidence l’influence de l’évaluation de
l’adaptation au temps de travail sur l’implication calculée des salariés.
Manifestement, les résultats dans le tableau 3 nous font voir un R²
égal à 0,087 ; très inférieur à 0,5. Le modèle n’explique que 08,7%
de la variation de l’implication calculée en fonction de la variation de
l’évaluation de l’adaptation au temps de travail. La qualité du modèle
n’est pas bonne. Le R = 0,295 montre que la relation entre
l’implication calculée et l’évaluation de l’adaptation au temps de
travail est relativement faible. Quoique le R² soit insuffisant, le F de
Fisher lui, est de 08,591 et significatif (Sign=0,004). Observons que le
t de Student est égal à 2,931 > 2.
Enfin, la régression H2.3 montre l’existence d’une droite de
régression, montrant l’influence respective de l’évaluation de
l’adaptation au poste de travail et de l’évaluation de l’adaptation au
temps de travail sur l’implication affective des salariés. Les résultats
indiquent un R² = 0,312. Le modèle explique 31,2% de la variation de
l’implication affective en fonction des variations de l’évaluation de
l’adaptation au poste de travail et de l’évaluation de l’adaptation au
temps de travail. Le R=0,559 signifie que la relation entre l’évaluation
de l’adaptation au poste de travail, l’évaluation de l’adaptation au
temps de travail et l’implication affective est bonne (55,9%). Le F de
Fisher quand à lui aussi est bon (20,193) et très significatif
(Sign=0,000). Aussi, les t de Student sont bien tous supérieur à 2.
Alors, nous pouvons dire que l’hypothèse H2 : L’évaluation de
la capacité d’adaptation des salariés influence positivement leur
implication organisationnelle est validée.
Ce qui rejoint la pensée d’Autès (2000), qui atteste que la
recherche de la compétitivité par les entreprises dans un
environnement changeant peut emmener ces dernières à modifier les
conditions et la localisation du travail. Dès lors, l’évaluation de la
capacité d’adaptation d’un salarié, que ce soit à son poste de travail,
ou aux évolutions des activités professionnelles constitue pour une
entreprise un gage de flexibilité aux fluctuations de l’environnement
tant interne qu’externe. Alors, dans ces conditions, les salariés
s’identifieraient à l’entreprise et seront plus enclins à donner le
meilleur d’eux même en étant fidèles à l’entreprise. La validation de
cette hypothèse est également corroborée par les propos de
l’interviewé n°3 (2014) qui déclare que « concernant la capacité
d’adaptation, prenons un exemple d’un chef hiérarchique et de son

230
adjoint s’il est vrai que l’adjoint peut remplacer le chef en cas
d’absence ou de vacance, cela nécessite de ce dernier une implication
dans l’apprentissage du contenu du travail du boss pour assumer ses
tâches dans les cas suscités. L’implication de l’adjoint vient du fait
qu’en évaluant sa capacité d’adaptation aux fonctions du chef, il peut
le remplacer éventuellement s’il fait mieux que lui ou alors il pourrait
occuper cette fonction dans une représentation ». On comprend que
l’implication organisationnelle par l’évaluation de la capacité
d’adaptation vient ici du fait des possibilités offertes par l’entreprise
aux salariés de faire leurs preuves et ensuite être récompensés.
Tableau 9 : Récapitulatifs des régressions entre l’évaluation du
degré d’atteinte des objectifs (évaluation des objectifs réalistes ;
évaluation des objectifs de performance ; évaluation des objectifs en
adéquation avec les salariés) et l’implication organisationnelle
(implication normative ; calculée et affective).
F de Sign de t de Sign
Indicateurs R R² Bêta
Fisher F Student de t
Régression -
-5,338 0,000
H3.1sur 0,478
0,555 0,308 13,081 0,000 0,217 2,453 0,016
implication
normative 0,182 2,050 0,043
Régression 0,405 4,592 0,000
H3.2 sur
0,309 19,874 0,000 -
implication 0,556 -4,320 0,000
0,381
calculée
Régression 0,366 3,563 0,001
H3.3 sur
0,457 0,209 11,777 0,000
implication 0,311 3,296 0,001
affective
Source : nous-mêmes
La première régression du tableau atteste de l’existence de
l’incidence des trois facteurs de l’évaluation du degré d’atteinte des
objectifs par les salariés (respectivement difficultés dans l’évaluation
des objectifs réalistes, évaluation des objectifs de performance, et
évaluation des objectifs en adéquation avec les salariés), sur leurs
implications normatives. En effet, le R² du modèle est égale à 0,308 <
0,5. Le modèle explique 30,8% de la variation de l’implication
normative en fonction des variations des difficultés dans l’évaluation
des objectifs réalistes ; de l’évaluation des objectifs de performance et
de l’évaluation des objectifs en adéquation avec les salariés. Le R =
0,555 > 0,5 ; atteste de l’existence d’une bonne relation entre les
difficultés de l’évaluation des objectifs réalistes ; l’évaluation des

231
objectifs de performance ; l’évaluation des objectifs en adéquation
avec les salariés et l’implication normative (55,5%). Remarquons que
les t de Student sont tous supérieurs à 2. Le F de Fisher lui est égal à
13,081 et très significatif au seuil de 0,000. Par ailleurs, les
coefficients négatifs traduisent une influence négative des « difficultés
dans l’évaluation des objectifs réalistes » sur l’implication normative
et (deuxième ligne du tableau) sur l’implication calculée.
La deuxième régression met au grand jour l’existence d’une
régression, ressortant l’influence respective de l’évaluation des
objectifs en adéquation avec les salariés et des difficultés dans
l’évaluation des objectifs réalistes sur l’implication calculée des
salariés. Nous avons un R² = 0,309 < 0,5. Le modèle explique 30,9%
de la variation de l’implication calculée en fonction de la variation de
l’évaluation des objectifs en adéquation avec les salariés et des
difficultés dans l’évaluation des objectifs réalistes. Le coefficient R =
0,556 signifie que la relation entre les variables indépendantes et la
variable dépendante est bonne. Bien que le R² soit insuffisant, le F de
Fisher lui, est de 19,874 et très significatif (Sign = 0,000). Soulignons
pour finir que, les t de Student sont tous supérieur à 2 et
significativement différent de 0.
Pour terminer avec cette hypothèse, la dernière régression du
tableau expose l’existence d’une régression, indiquant l’influence de
l’évaluation des objectifs de performance et de l’évaluation des
objectifs en adéquation avec les salariés sur l’implication affective de
ces derniers. Ces résultats mentionnent un R² = 0,209 < 0,5. Le
modèle explique 20,9% de la variation de l’implication affective en
fonction des variations de l’évaluation des objectifs de performance et
de l’évaluation des objectifs en adéquation avec les salariés. Par
contre, le coefficient de corrélation R = 0,457 sensiblement égal à 0,5
montre que la relation entre nos variables explicatives et notre variable
expliquée est sensiblement bonne (45,7%). Par ailleurs, le F de Fisher
est bon (11,777) et très significatif (Sign = 0,000). De même, les t de
Student sont bien supérieurs à 2 et très significativement différents de
0.
Ainsi, nous concluons que l’hypothèse H3 : L’évaluation du
degré d’atteinte des objectifs par les salariés influence positivement
leur implication organisationnelle est validée.
Ceci va à l’encontre de la réflexion Schneier et al., (1991) qui
ont exprimé des reproches à l’encontre des modes d’évaluation du

232
niveau d’atteinte des objectifs dans les entreprises, disant que les
formulaires et procédures, ne sont que des exercices bureaucratiques,
rien plus. Ils constituent ainsi donc un fardeau pour les superviseurs et
une source de désengagement pour les employés. Cet avis n’est pas du
tout partagé par l’interviewé n°2 (2014) qui affirme que « lorsque le
salarié sait qu’il est évalué sur un certain nombre de chose, n’est-ce
pas, ça peut l’emmener, implicitement (…) à être impliqué (…). Dans
notre entreprise, il y a des tâches qu’on nous donne et en fonction de
cela donc au bout d’un mois n’est ce pas, il y a une évaluation
mensuelle ou on essaye de voir n’est ce pas, par rapport à telle tâche
n’est-ce pas, est ce que les objectifs sont n’est ce pas atteints et on
vous attribut une note par rapport à cela, ça fait alors en sorte que
l’individualisation n’est ce pas des objectifs à atteindre (…) pousse
n’est-ce pas les salariés de l’entreprise à être plus impliqué au travail
et n’est-ce pas, dans l’entreprise. ». L’interviewé n°3 (2014, Annexe
2) de renchérir en déclarant que « Pour savoir si un gars est impliqué,
c’est dans la réalisation de ses tâches. (…).S’il faut classer par
exemple les salariés en fonction de leur degré d’implication, on va
voir le niveau d’atteinte des objectifs et le salarié qui aura le plus
atteint ses objectifs sera considérés comme celui là qui a été le plus
impliqué non seulement dans le travail mais aussi, envers l’entreprise
tout simplement. »
Tableau 10 : Récapitulatif des régressions entre l’évaluation de
l’efficacité du travail (Evaluation de l'efficacité face aux difficultés ;
Evaluation de l'efficacité personnelle ; évaluation de la ténacité au
travail) et l’implication organisationnelle (implication normative ;
calculée et affective).
F de Sign de t de Sign
Indicateurs R R² Bêta
Fisher F Student de t
Régression -
-4,253 0,000
H4.1sur 0,400
0,460 0,211 11,926 0,000
implication -
-2,402 0,018
normative 0,226
Régression
H4.2 sur -
0,288 0,083 08,132 0,005 -2,852 0,005
implication 0,288
calculée
Régression
H4.3 sur
0,327 0,107 10,746 0,001 0,327 3,278 0,001
implication
affective
Source : nous-mêmes

233
L’analyse de la première régression de notre tableau garantit
l’existence d’une relation entre l’évaluation de l’efficacité face aux
difficultés, l’évaluation de l’efficacité personnelle respectivement et
l’implication normative bien que cette relation soit négative. Ainsi, les
résultats présentent un R² de 0,211 ; inférieure à 0,5 ; ce qui signifie
que seulement 21,1% de la variation de l’implication normative est
expliquée par les variations de l’évaluation de l’efficacité face aux
difficultés et de l’évaluation de l’efficacité personnelle. Le R=0,406
indique une relation médiocre (40,6%) entre les variables
indépendantes (l’évaluation de l’efficacité face aux difficultés et
l’évaluation de l’efficacité personnelle) et la variable dépendante
(l’implication normative). Poursuivant notre analyse, notons que le F
de Fisher, indicateur de la significativité du modèle affiche une valeur
de 11,926 très significatif (Sign = 0,000). De même, tous les t de
Student ont des valeurs supérieures à 2 et significativement différents
de zéro.
La deuxième régression montre l’influence de l’évaluation de
l’efficacité face aux difficultés sur l’implication calculée (relation
négative). Le coefficient de détermination R² = 0,083 est très inférieur
à 0,5. Le modèle n’est donc pas de bonne qualité car, seulement
08,3% de la variation de l’implication calculée est expliquée par les
variations de l’évaluation de l’efficacité face aux difficultés. Le
coefficient de corrélation R = 0,288 < 0,5. Il nous indique que la
relation entre les variables en présence, n’est que de 28,8%. Aussi, le t
de Student pris en valeur absolue est supérieur à 2 et significativement
différent de zéro. Cependant, en dépit de la très faible valeur du R², le
F de Fisher égal à 08,132 est significatif (Sign = 0,005).
L’analyse de la dernière régression du tableau met en évidence
l’influence de l’évaluation de l’efficacité du travail des salariés sur
l’implication affective. Ainsi, le R² = 0,107 très inférieur à 0,5.
Seulement 10,7% des variations de l’implication affective est expliqué
par les variations de l’évaluation de la ténacité au travail. Le R quand
à lui, est égal à 0,327. Donc, il existe une faible relation entre
l’évaluation de la ténacité au travail et l’implication affective (32,7%).
Soulignons que le coefficient t de Student est supérieur à 2 et
significativement différent de zéro. Pour finir, quoique le R² soit très
faible ainsi que la corrélation entre les deux variables, le F de Fisher
lui, indique une valeur égal à 10,746 et une significativité de 0,001.

234
Ainsi, nous disons que l’hypothèse H4 : L’évaluation de
l’efficacité du travail effectué par les salariés influence positivement
leur implication organisationnelle est partiellement validée.
Ceci rejoint la réflexion de Billet (2005) ; Petit et Haines (1994),
qui ont remarqué que, à peu près tous les gestionnaires et spécialistes
de la gestion des ressources humaines sont d’accord sur la nécessité
d’évaluer l’efficacité du travail individuel, et ce, dans le but de mieux
impliquer les salariés dans la gestion et l’atteinte de la productivité
organisationnelle. La remarque de ces auteurs est corroborée par
l’interviewé n°4 (2014) qui mentionne que « lorsque le salarié sait
qu’une évaluation sera faite de ce qu’il fait en termes d’efficacité, (…)
et comme il cherche à avoir des promotions ou des primes, il va bien
réaliser les tâches qu’on lui assigne de peur non seulement de perdre
ces avantages mais aussi de voir engager contre lui des actions
correctives et ainsi donc être plus impliqué dans son travail et de
manière plus large dans son entreprise. ». Et l’interviewé n°2 dans
l’exercice de ses fonctions déclare que « moi en tant que manager(…),
sur la base des résultats d’évaluation je peux vous dire n’est-ce pas
que (…) les salariés sont quand même n’est-ce pas impliqué dans
notre entreprise et dans les tâches (…) parce que (…), nos salariés
fournissent les travaux escompté avec une grande efficacité. ».
Le point focal de cette partie était de montrer l’influence
empirique des objets de l’évaluation du personnel sur l’implication
organisationnelle des salariés. Pour en arriver là, les tests de
régression linéaire multiple nous ont permis de tester les hypothèses
formulées au départ dans ce travail. Ces hypothèses ont toutes été
validées dans le contexte des PME camerounaises. L’évaluation du
personnel influence donc leur implication organisationnelle dans les
PME Camerounaises. Mais quel enseignement pouvons-nous tirer de
la validation de toutes nos hypothèses de recherche ? Est-il possible
d’appliquer au sein de la même PME les quatre objets de l’évaluation
ci-dessus mentionné sans qu’il n’y ait interaction entre eux ? Ces
interrogations nous emmènent à effectuer des régressions générales,
ce qui nous permettra de voir clairement quels sont les objets les plus
importants. Le tableau suivant nous permet d’avoir des indicateurs de
réponses.

235
Tableau 11 : Récapitulatif des régressions générales
Indicateurs F de Sign de t de Sign
R R² Bêta
Fisher F Student de t
0,445 5,975 0,000
Régression 0,720 0,519 31,643 0,000
0,339 3,775 0,000
1sur
implication - -3,634 0,000
normative 0,328
0,824 8,487 0,000
- -7,021 0,000
Régression 2 0,737 0,543 20,475 0,000 0,559
sur - -6,396 0,000
implication 0,645
calculée 0,317 3,655 0,000
- -3,261 0,002
0,288
Régression 3 0,358 4,150 0,000
sur 0,345 3,795 0,000
0,639 0,409 20,288 0,000
implication 0,209 2,409 0,018
affective
Source : nous-mêmes
La première régression de notre tableau atteste de l’existence de
l’incidence de trois de nos douze facteurs de variables indépendantes
respectivement: l’évaluation de l’adaptation stratégique, l’évaluation
de l’adaptation au poste de travail (facteurs de l’évaluation de la
capacité d’adaptation) et les difficultés dans l’évaluation des objectifs
réalistes (facteur de l’évaluation du degré d’atteinte des objectifs), sur
l’implication normative. Le R² du modèle égale à 0,519 ; ce qui veut
dire que le modèle explique 51,9% de la variation de l’implication
normative en fonction des variations de l’évaluation de l’adaptation
stratégique, de l’évaluation de l’adaptation au poste de travail et des
difficultés dans l’évaluation des objectifs réalistes. Le coefficient de
corrélation R = 0,720 ; montre donc l’existence d’une bonne relation
entre l’évaluation de l’adaptation stratégique, l’évaluation de
l’adaptation au poste de travail, les difficultés dans l’évaluation des
objectifs réalistes et l’implication normative (72,00%). Aussi, on peut
remarquer que les coefficients t de Student de notre premier modèle
de régression pris en valeur absolue sont tous supérieures à 2 et
significativement différents de zéro. Pour cette première régression
générale, nous pouvons dire que l’objet de l’évaluation du personnel
le plus important, qui influence le plus l’implication normative dans
les PME Camerounaises est l’évaluation de la capacité d’adaptation
car deux de ses facteurs ont été retenus (parmi les trois au total) par la
régression et présentent une influence positive.

236
De même, la deuxième régression montre l’existence de
l’incidence de cinq des douze facteurs de nos variables indépendantes
à savoir respectivement : l’évaluation des objectifs en adéquation avec
les salariés, les difficultés dans l’évaluation des objectifs réalistes,
l’évaluation des objectifs de performance (facteurs de l’évaluation du
degré d’atteinte des objectifs), l’évaluation de la ténacité au travail
(facteur de l’évaluation de l’efficacité du travail), et l’évaluation
flexibilisant le savoir-faire (facteur de l’évaluation du savoir-faire) sur
l’implication calculée. Il ressort que le R² du modèle est égal à 0,543.
Soit, 54,3% des variations de l’implication calculée sont expliqués par
les variations de l’évaluation des objectifs en adéquation avec les
salariés, des difficultés dans l’évaluation des objectifs réalistes, de
l’évaluation des objectifs de performance, de l’évaluation de la
ténacité au travail, et de l’évaluation flexibilisant le savoir-faire. Le
coefficient de corrélation R=0,737 montre une bonne relation entre
l’implication calculée et les facteurs des variables indépendantes
retenues par le modèle (73,70%). Aussi, les coefficients t de Student
du deuxième modèle de régression pris en valeur absolue sont tous
supérieurs à 2 et significativement différents de zéro.
Cette deuxième régression générale montre que l’objet de
l’évaluation du personnel le plus important, celui qui influence le plus
l’implication calculée dans les PME Camerounaises est l’évaluation
du degré d’atteinte des objectifs. En effet, des cinq facteurs retenus,
trois font références à elle.
Enfin pour finir, la dernière régression de notre tableau met en
exergue l’existence de l’incidence de trois de nos douze facteurs de
variables indépendantes respectivement : l’évaluation harmonisant le
savoir-faire (facteur de l’évaluation du savoir-faire), l’évaluation de
l’adaptation au poste de travail et l’évaluation de l’adaptation au
temps de travail (facteurs de l’évaluation de la capacité d’adaptation),
sur l’implication affective. Le R² du modèle affiche 0,409. Ainsi, le
modèle explique 40,9% des variations de l’implication affective en
fonction des variations de l’évaluation harmonisant le savoir-faire, de
l’évaluation de l’adaptation au poste de travail et de l’évaluation de
l’adaptation au temps de travail. Le coefficient de corrélation R =
0,639 confirme une bonne relation entre l’évaluation harmonisant le
savoir-faire, l’évaluation de l’adaptation au poste de travail,
l’évaluation de l’adaptation au temps de travail et l’implication
affective (63,90%). Aussi, on peut remarquer que les coefficients t de

237
Student de notre dernier modèle de régression sont tous supérieures à
2 et significativement différents de zéro.
La dernière régression générale, nous montre que l’objet de
l’évaluation du personnel le plus important, qui influence le plus
l’implication affective dans les PME Camerounaises est l’évaluation
de la capacité d’adaptation.

5 Conclusion
Nous intéressant à l’influence de l’évaluation du personnel sur
l’implication organisationnelle des salariés dans les PME
Camerounaises, nous sommes parvenus, à l’issue de ce travail de
recherche à la conclusion que l’évaluation du savoir-faire, celle de la
capacité d’adaptation, celle du degré d’atteinte des objectifs et celle de
l’efficacité du travail des salariés influencent positivement,
l’implication normative, l’implication calculée et l’implication
affective des salariés. Néanmoins, tous appliqué au sein de la même
entreprise, l’évaluation de la capacité d’adaptation influence plus
l’implication normative et affective. Ceci peut s’expliquer par le fait
que, les différentes rotations aux postes, ainsi que les séminaires et
stages de formations ou de mise niveau créent des liens fort dans les
équipes de travail. Cet attachement au groupe ou aux individus qui la
composent se transpose très souvent à l’entreprise. Conduisant ainsi
les travailleurs à s’identifier à cette dernière. L’évaluation du degré
d’atteinte des objectifs lui, influence plus l’implication calculée. En
effet, l’évaluation du degré d’atteinte des objectifs s’accompagne
généralement des primes, avantages en natures… ce qui tend à
augmenter le revenu du travailleur et ainsi, diminue la possibilité
d’obtenir mieux ailleurs. Déjà que la situation de l’emploi au
Cameroun, surtout celui des jeunes ne leur est pas favorable.
Alors, les managers, praticiens du terrain, soucieux d’impliquer
d’avantage leurs salariés envers leurs organisations peuvent le faire
par la pratique de l’évaluation du personnel. Surtout, pour une
optimisation de cette implication, il faudra qu’ils associent à leurs
pratiques d’évaluation: des plans de carrière, de promotion, de
rémunération, de reconnaissance et de gratification car, il nous a été
confié par les managers interviewés que le fait que les salariés sachent
qu’ils sont ou seront évalués sur un certain nombre de critère les
amènent d’abord à s’impliquer à leur travail. Ensuite, cette pratique
fait naitre une certaine concurrence entre eux, concurrence dans

238
l’atteinte des objectifs par exemple, pour le bien fondé de l’entreprise.
Enfin, le fait d’associé une reconnaissance, une gratification
pécuniaire et/ou non pécuniaire mais aussi des sanctions aux résultats
d’une évaluation contribue fortement à impliquer les salariés non
seulement au travail mais aussi envers l’organisation qui, d’après ces
derniers, fait beaucoup pour eux ou alors pourrait les évincer.
Les principales limites de ce travail sont que, sur le plan
qualitatif, l’analyse a été essentiellement effectué manuellement car,
ne disposant pas encore de logiciel de traitement des données
qualitatives tel que le « Sphinx Quali ». Sur le plan quantitatif, notre
recherche ne s’est faite que dans cinq villes du Cameroun. Cela
pouvant limiter sa validité externe.
Pour terminer, comme axes futurs de recherche, les études
ultérieures pourraient porter sur l’influence des méthodes ou des
procédures de l’évaluation des salariés sur leur implication
organisationnelle. De même, une autre perspective de recherche
pourrait se baser sur l’influence de l’un ou de tous les objets de
l’évaluation mobilisée dans ce travail sur la performance des PME ou
des entreprises Camerounaises.

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243
INFLUENCE DE LA PUBLICATION DES NOTES
FINANCIERES SUR LE COURS ET LES ÉCHANGES
D’ACTIONS SUR UN MARCHÉ FINANCIER EN
DEVELOPPEMENT : CAS DE LA BRVM

Aboudou OUATTARA
Enseignant en finance de marché12
Centre Africain d’Etudes Supérieures en Gestion (CESAG)
Dakar

Résumé
La Bourse Régionale des Valeurs Mobilières de l’Afrique de
l’ouest (BRVM) est la place financière commune aux huit pays de
l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA). Elle a
démarré ses activités le 16 septembre 1998 et a connu des
changements importants sur les trois dernières années (passage à la
cotation en continu, introduction d’agences de notation financières
locales) qui ont certainement influencé sa dynamique, la perception et
le comportement des acteurs.
Dans la présente recherche, nous effectuons une étude de
l’impact de la publication des notations financières sur le cours et les
échanges d’actions cotées à la Bourse Régionale des Valeurs
Mobilières de l’Afrique de l’ouest (BRVM). En effet, depuis le
premier trimestre 2013, les notes financières font partie des
informations publiques diffusées à la BRVM pour orienter les
investisseurs dans leurs choix d’investissement. Cette nouvelle donne
est de nature à réduire l’asymétrie d’information entre les
investisseurs et les émetteurs de titres (action) et susceptible de réduire
le coût du capital. Ainsi, il est attendu un ajustement des cours de ces
12
Dr Aboudou OUATTARA est actuellement enseignant-chercheur au Centre Africain d’Etudes
Supérieures en Gestion (CESAG). Il occupe le poste de chef de département de la Recherche du CESAG.
Adresse email : aboudou.ouattara@cesag.edu.sn, Boulevard du Général De Gaulle x Avenue Malick Sy,
BP 3802 Dakar (Sénégal).
Remerciements
Nous remercions le CESAG pour les ressources mises à notre disposition pour la conduite de la présente
recherche. Nous tenons à exprimer notre grattitude à toutes les personnes qui ont contribué à la
conception et à la mise en œuvre de cette recherche et affiner les résultats de la présente recherche ;
particulièrement à KONATE N’Gouassé Hamed et KOUAME Ariane, Assistant au CESAG, pour leur
travail de relecture ; au discutant et aux participants du SERGE Days 2017 et à Alassane OUATTARA,
enseignant au CESAG, pour leurs observations et commentaires qui ont permis d’améliorer les premières
versions du document. Les opinions exprimées dans ce document relèvent de la responsabilité exclusive
de l’auteur.

244
titres ; notamment les titres de propriété avant, après ou à la diffusion
de la notation financière. La vitesse d’ajustement dépend du contenu
des informations diffusées, de la réactivité des acteurs et du niveau
d’efficience du marché. C’est pour apporter un éclaircissement sur les
leçons que l’on peut tirer que nous avons conduit une recherche sur
l’influence de la diffusion des notes financières sur les cours des
sociétés cotées. Elle apporte une contribution à trois niveaux. D’abord,
sur le plan théorique, elle questionne la validité des conclusions de la
théorie de l’asymétrie d’information sur l’influence de la diffusion
d’information sur l’évolution des cours en bourse et le coût du capital
dans un marché financier embryonnaire, à l’instar de la BRVM.
Ensuite, sur le plan managérial, elle propose des orientations sur les
modalités d’organisation et de développement d’un marché financier
régional compatible avec les enjeux de développement des pays
membres de la zone UEMOA et sur la prise en compte de cette
nouvelle donne dans les choix d’investissement. Enfin ; sur le plan
méthodologique, elle propose une démarche pour conduire une étude
d’évènement spécifique à un marché peu liquide.
Mots clés : Notations financières, Cours en bourse, volume de transaction, étude
d’événement, BRVM

1. Introduction
Au-delà des divergences de définition, la notation financière
d’une institution (Etat, collectivité locale, établissement de crédit,
entreprise industrielle ou commerciale, …) est une opinion
indépendante qui porte sur sa capacité à honorer ses engagements
financiers (Gaillard, 2010). Dans la plupart des places financières,
celles-ci font partie des informations mises à la disposition des
intervenants.
Dans le cas de la Bourse Régionale des Valeurs Mobilières, deux
institutions ont obtenu le 15 juin 2012 l’agrément du Conseil Régional
de l’Epargne Publique et des Marchés Financiers (CREPMF) en
qualité d’agence de notation. Il s’agit de la Bloomfield Investment
Corporation13 et de la Emerging Markets - West Africa Rating Agency

13
Le lecteur est invité à se référer au site internet de l’agence pour plus
d’information : http://www.bloomfield-investment.com/.

245
(ELR-WARA)14. Depuis la fin du premier trimestre 2013, la
publication de notes financières des entreprises fait partie des
informations mises à la disposition des intervenants. Au total, une
soixantaine d’informations relatives au rating des sociétés cotées à la
BRVM ont été publiées ; celles-ci concernent environ vingt d’entre
elles.
La publication de ces informations sur les sociétés cotées est
susceptible de modifier la perception des investisseurs en ce qui
concerne leur profil de risque. Ainsi, elle a vocation à influencer leur
demande ou leur offre de titres des sociétés cibles. Les prix d’équilibre
et les échanges de titre sur le marché pourraient être influencés ; du
moins si l’on s’en tient à la littérature financière sur l’influence de la
publication des notations sur les titres financiers.
Cette littérature s’est largement interrogée sur l’influence
attendue de la publication de notations financières sur un marché.
Dans le cas spécifique de la BRVM, il y a des raisons de croire que la
réaction des cours des sociétés aux notes financières publiées revêt des
spécificités qu’il serait important de comprendre. En effet, le caractère
jeune du marché, le degré de sophistication des acteurs, l’absence de
profondeur et de liquidité du marché sont autant de facteurs qu’il
convient de prendre en compte dans l’étude de la réaction des marchés
aux informations. La présente étude a été initiée dans le but d’apporter
un éclaircissement sur la situation spécifique de la BRVM. Elle vise à
répondre à la problématique suivante : Quelle est l’influence de la
publication des notes financières sur les cours et les échanges de titres
des sociétés cotées à la Bourse Régionale des Valeurs Mobilières de
l’Afrique de l’Ouest (BRVM) ?
La réponse à cette question apporte une triple contribution. Dans
un premier temps, elle permet d’interroger la validité des conclusions
de la théorie financière sur la relation entre notation financière et les
cours en bourse des sociétés dans le cas d’un marché en
développement avec des caractéristiques spécifiques (faible
profondeur, faible liquidité, peu efficient, acteurs guidés plus par des
comportements stratégiques que rationnels, …). Elle permet dans un
second temps, d’interroger l’efficience informationnelle de la BRVM.
Sur le plan stratégique, elle questionne dans le même temps, les

14
Le lecteur est invité à se référer au site internet de l’agence pour plus
d’information : http://www.emergingmarketsratings.com/.

246
modalités de prise en compte de cette information dans la stratégie de
trading et de gestion de portefeuille par les intervenants du marché
(Société de Gestion et d’Intermédiation – SGI et des gestionnaires
d’Organisme de Placement Collectif en Valeurs mobilières -
OPCVM). Notons enfin que cette recherche apporte une contribution
méthodologique sur les modalités de la mise en œuvre des études
d’événement dans le cadre spécifique d’un marché caractérisé par un
fort déséquilibre entre demandeurs et offreurs de titres et une faible
liquidité. En effet, comme le suggère Freitas and Minardi (2013), trois
facteurs rendent nécessaires l’étude de la spécificité de la réaction du
cours des sociétés cotées à la publication des notes financières dans un
espace économique donné. Les différences de règles de gouvernance
et de cadre règlementaire des entreprises sont susceptibles
d’influencer la conduite des activités des agences de notation qui
peuvent ne pas avoir accès aux mêmes sources d’information. Toutes
choses qui pourraient influencer la pertinence et/ou le crédit accordé
aux notes et donc leur capacité à structurer les décisions des
gestionnaires d’actifs. En outre, le caractère embryonnaire du marché
financier régional de la zone UEMOA est de nature à susciter un
questionnement naturel sur la réaction du marché à la publication des
notes financières en relation avec le faible niveau de liquidité du
marché.
Pour y parvenir, il a été nécessaire de recourir à la méthodologie
des études d’événements en l’adaptant aux spécificités du marché
financier régional. Celle-ci est appliquée aux données collectées à
travers les Bulletins Officiels de Cotation (BOC) diffusés par la
BRVM.sa15.
La suite du document est organisée comme suit. La première
section présente une revue de la littérature. La deuxième section est
consacrée à la présentation de la méthodologie. La troisième section,
quant à elle, présente et discute les résultats de la recherche.

15
La BRVM.sa est la société de droit privé chargée, entre autres, d’assurer la
cotation des titres disponibles sur le marché et la diffusion d’information aux
acteurs. Elle le fait à travers son site internet : www.brvm.org.

247
2. Influence de la notation financière sur le cours des
actions et leurs échanges, une revue de littérature
L’influence de la notation financière sur les cours des sociétés en
bourse et les échanges de titres sont deux thématiques qui ont enrichi
de nombreuses controverses en théorie financière. Celles-ci ont suscité
une littérature abondante. Cette section propose une revue succincte
des différentes contributions.
2.1. Lien entre notation financière et cours en bourse des
sociétés
La principale analyse de l’influence de la publication de la note
financière sur le cours en bourse des sociétés cotées est issue de la
théorie de l’agence. Selon celle-ci, la communication de la note
financière d’une société cotée en bourse réduit l’asymétrie
d’information entre les investisseurs et l’équipe dirigeante. Elle
contribue donc à établir un cours plus proche de sa valeur
fondamentale.
Il ressort de cette théorie que la réaction des cours en bourse des
sociétés cotées n’est pas uniforme. En effet, l’annonce de
l’amélioration de la qualité de signature d’une société conduit ses
créanciers à réviser la prime de risque exigée pour mettre à sa
disposition des ressources financières sollicitées pour son exploitation
et ses investissements. Cette révision entraine pour la société une
baisse du coût des ressources empruntées (Vassalou and Xing, 2005).
Cette réduction a pour conséquence une réduction du coût de capital
de l’entreprise. Ce dernier est défini comme la moyenne pondérée des
ressources utilisées par l’entreprise (Miller and Modigliani, 1961). La
réduction du coût du capital conduit les investisseurs à réviser à la
hausse la valeur fondamentale de l’entreprise ; cette dernière étant
obtenue comme la somme actualisée des flux futurs (Jorion and
Zhang, 2007) . A l’opposé, la détérioration de la qualité de signature
d’une société induit un mécanisme inverse qui conduit à
l’augmentation du coût de la dette de la société qui à son tour,
renchérit le coût du financement de la société et qui se traduit par une
réduction de son cours en bourse.
En outre, les recherches empiriques sur le sujet font ressortir une
asymétrie de la réaction des cours des actions des sociétés en bourse
selon que la note financière publiée fait référence à une amélioration
ou à une dégradation de la signature de la société concernée. En effet,

248
Dichev and Piotroski (2001), Goh and Ederington (1993), Jorion and
Zhang (2007) et Choy et al. (2006) établissent que les annonces de
dégradations de signature influencent plus largement les cours en
bourse des sociétés cotées que les annonces d’amélioration de
signature. Griffin and Sanvicente (1982) concluent à la suite de leurs
travaux que cette asymétrie dans la réaction vient du fait que les
dégradations de signature apportent plus d’informations aux
investisseurs. Jorion and Zhang (2007) expliquent cette asymétrie par
le fait que, dans le processus de publication de notes financières, les
entreprises ont tendance à retarder les mauvaises nouvelles
(dégradation de signature) et à publier systématiquement les bonnes
nouvelles (amélioration de la qualité de signature).
En outre, la littérature établit que l’ampleur de l’impact de
l’abaissement de la signature d’une entreprise sur son cours en bourse
dépend de la nouvelle classe de risque dans laquelle la notation
publiée classifie cette société. Ainsi, Jorion and Zhang (2007)
établissent que l’influence sur le cours est plus significative lorsque le
changement entraine la chute de la qualité de signature dans les notes
qualifiées de spéculatives (speculative grades).
Une autre direction de recherche qui a abondé dans la littérature
concerne l’homogénéité (ou non) de la réaction des cours en bourse en
fonction du secteur d’activité de la société objet de la note financière
publiée (Creighton et al., 2004). Dans ce sens, l’accent a été mis sur la
différence entre les institutions financières (Banques, établissement de
crédit, …) et les entreprises industrielles ou commerciales. En effet ;
les premières étant soumises à une règlementation spécifique, leurs
partenaires (Banque Centrale, homologues, clients, …) disposent
d’une plus grande quantité d’information, de sorte que la note
financière n’apporte qu’une information marginale. Les analyses de
Schweitzer et al. (1992)16 établissent une différence de
sensibilité entre les banques et les autres lorsqu’une annonce de la
dégradation de la signature est faite. Creighton et al. (2004) illustrent
cette asymétrie de la réaction des cours en bourse des sociétés à la
publication des notes financières sur le marché australien. En outre, ils
établissent une asymétrie de la réaction en fonction de la taille de la
société cible de la notation. L’ampleur de l’influence semble plus
élevée pour les entreprises de petites tailles.

16
Cité par Creighton et al. (2004)

249
Notons toutefois que cette conclusion n’est pas partagée par
Linciano (2004) qui établit sur le marché italien que la dégradation de
la signature n’a pas d’impact significatif sur le cours des sociétés mais
que l’amélioration de la qualité de signature augmente
significativement le cours en bourse. Vassalou and Xing (2005)
justifient l’absence de réaction des cours en bourse des sociétés par le
caractère totalement prévisible de l’information contenu dans la note
financière d’autant que cette information peut être extraite, entre
autres, de l’évolution historique des cours ou du Book to market value
(rapport entre la capitalisation boursière et le total bilan) de la société
dans un contexte d’efficience informationnelle du marché sur lequel le
titre est échangé. Il ressort de cette analyse que l’influence de la
publication de la notation financière dépend de son contenu
informationnel. En effet, selon que le classement fourni par la
structure chargée de la notation financière est conforme au classement
que l’on pourrait se faire des sociétés cotées en s’appuyant sur
d’autres critères ou indicateurs (Price Earning Ratio – PER, Beta,
Volatilité, …). Ces critères peuvent être, soit la crédibilité de la note
financière, soit le rôle des intervenants du marché dans la transmission
des informations contenues dans les publications de notes financières
sur les cours en bourse, entre autres.
Au-delà des divergences de résultats, la littérature sur l’impact de
la publication des notes financières sur le cours en bourse des sociétés
cotées ouvre un débat sur le rôle structurant des agences de notation
dans la mise à la disposition des acteurs des marchés financiers des
informations pertinentes et complémentaires pour prendre leurs
décisions de choix de portefeuille. Le contenu informationnel des
notes financières publiées est au cœur de cette analyse. La mission des
agences étant d’apporter des informations complémentaires aux
intervenants du marchés financiers (dont ils ne peuvent disposer
autrement) ; celle-ci est de nature à leur faire jouer un rôle important
dans la discipline de marché et l’amélioration de la gouvernance des
entreprises (Linciano, 2004).
Au total, cette revue succincte met l’accent sur les fondements
théoriques de l’influence de la publication des notes financières sur les
cours des sociétés cotées sur un marché.

250
2.2. Influence de la publication des notes financières sur la
liquidité des actions de la société cible
Le lien entre la diffusion des notations financières et la liquidité
est étudié dans la littérature selon une relation biunivoque. En effet,
Chae (2005) montre que la publication des notations financières
influence le volume de transactions et Odders-White and Ready
(2006) établissent l’influence de la liquidité des titres sur la révision
des notations financières des sociétés cotées. Dans cette revue, nous
nous intéressons seulement au premier sens de la relation : influence
de la publication des notes financières sur le volume de titres
échangés.
Chae (2005) met en avant le rôle de l’asymétrie d’information
entre les participants informés et les participants non informés et la
sélection adverse dans la transmission des informations contenues
dans les notes financières aux échanges sur les marchés financiers. En
effet, les échanges de titres sont la résultante des interactions entre les
participants informés et les participants non informés. Les premiers
transigent un titre pour tirer profit des informations privées dont ils
disposent tandis que les second, achètent ou vendent des titres pour
réajuster leurs portefeuilles (Easley et al., 2008 ; Brockman and
Chung, 2000). Chae (2005) étudie l’influence de quatre informations
(Annonce du résultat, annonce de fusion/acquisition, annonce
d’objectif et la publication/révision de notes financières) sur le volume
de transactions. Ces informations sont subdivisées en deux catégories :
celles qui sont planifiées et celles qui ne le sont pas. La publication de
notations financières fait partie de cette dernière catégorie. Les auteurs
établissent que le marché réagit de façon asymétrique à l’annonce
d’une information non planifiée.
L’auteur postule que le volume de transactions est influencé de
façon asymétrique par l’annonce des informations non planifiées telles
que les notes financières. Il s’assèche durant la période précédant
l’annonce et reprend aussitôt à la suite de la publication. En effet,
l’auteur explique cette asymétrie par le fait que lorsqu’une
information non planifiée est attendue par les acteurs, les investisseurs
informés souhaitent tirer profit de la connaissance privée qu’ils ont de
cette information. A l’opposé, les investisseurs non informés jouent la
carte de la prudence en suspendant leurs transactions, le temps de
disposer d’une information détaillée. Ce comportement entraine une
baisse du volume de titres échangé en amont et en aval de la diffusion.
Ainsi, le volume de transactions baisse avant l’annonce d’une note

251
financière et augmente après sa diffusion. Notons toutefois que
l’auteur rejette ce postulat à la suite des analyses sur les marchés
américains (NYSE et AMEX). Il conclut que le rejet de ce postulat est
dû à l’incapacité des investisseurs non informés à extraire des
évolutions de cours et de volume, des informations utiles pour prendre
leur décision d’investissement. Il avance aussi que cette situation
pourrait être due à leur excès de confiance. Celui-ci les conduit à
maintenir une activité d’échange habituelle en dépit de l’incertitude
que fait peser la nouvelle information véhiculée par l’évolution future
des titres.
Somme toute, l’influence de la diffusion des notations
financières sur la liquidité dépend de la réaction des acteurs en
présence (capacité à extraire des informations, niveau de confiance,
…) et de l’environnement (asymétrie d’information ou pas, …).
Dans une étude du marché espagnole, Abad et al. (2013) ont
examiné l’influence de la publication des notations financières sur la
liquidité des actions des sociétés cotées sur le marché espagnol. Les
auteurs tirent deux principales conclusions. La première est que
l’annonce de notations financières augmente la liquidité des titres quel
que soit l’évolution de celle-ci. La deuxième conclusion concerne les
facteurs déterminants l’ampleur de la réaction du niveau de liquidité.
Il ressort de leur analyse que la liquidité réagit moins à l’annonce de
notations financières pour la catégorie des grades spéculatifs que dans
les grades d’investissement (supérieure ou égale à BBB+). Ces
résultats confirment le rôle déterminant des agences de notations dans
la transmission d’information au marché qui a pour conséquence une
réduction de l’asymétrie d’information. Cette amélioration de la
transparence du marché induit des échanges plus importants suscités
par les participants non informés. Les auteurs expliquent la plus forte
réaction de l’annonce de notation dans la zone des grades
d’investissement par le fait qu’il y a plus d’intervenant sur cette plage
de note. En effet, plusieurs gestionnaires de fonds sont contraints de
n’intervenir que sur les titres ayant cette note.
Les deux premières sections de la revue de littérature mettent
l’accent sur le lien entre la publication des notes financières et le cours
des actions de la société cible, d’une part, et leur liquidité de l’autre.
La validation des conclusions de ces travaux s’est heurté à un
défi méthodologique auquel les études d’évènement apportent une
réponse jugée satisfaisante.

252
3. Méthodologie
A la suite de la revue de littérature, la présente section discute les
choix méthodologiques effectués pour assurer l’analyse de l’influence
de la diffusion des notations financières sur le cours et les échanges
des actions cotées à la BRVM. Il y est présenté successivement les
hypothèses de recherche, les données utilisées et le cadre de l’analyse
empirique.
3.1. Hypothèses de recherche
L’approche retenue pour analyser l’influence de la publication
des notes financières sur les cours et les échanges des actions est une
démarche hypothético-déductive. Cette approche ambitionne de
questionner la validité des conclusions des recherches antérieures dans
le contexte d’un marché embryonnaire comme celui de la zone
UEMOA.
Conformément aux conclusions de la théorie de l’agence, la
première hypothèse retient que la publication de notes financières
influence le cours en bourse des sociétés cotées (H1). Lorsque celle-ci
est portée à la connaissance des acteurs, ces derniers révisent leurs
portefeuilles d’actions. Cet ajustement est fait pour refléter les
nouveaux cours d’équilibre des actions.
En tenant compte des conclusions des travaux présentées dans la
revue de littérature, la deuxième hypothèse retient que le contenu de la
note d’information financière modifie la réaction des cours lorsqu’elle
est portée à l’attention du public. Celle-ci postule que le contenu de la
note financière publiée influence le sens et l’ampleur de la réaction du
cours des actions de la société cible (H2). Cette hypothèse se
décompose en deux sous hypothèses.
La première anticipe que l’annonce de la dégradation de la note
financière d’une société cotée en bourse entraine une réduction de son
cours (H2a). En effet, l’annonce de la dégradation de la note financière
précédemment attribuée, entraine une augmentation du coût de la dette
et des capitaux propres. En effet, comme l’ont établi les travaux de
Dichev et Piotroski (2001), Goh et Ederington (1993), Jorion et Zhang
(2007) et Choy et al. (2006) présentés dans la revue de littérature.
Toutes choses égales par ailleurs, les investisseurs ne sont prêts à
acquérir les titres de propriétés de la société notée que si son prix
baisse pour leur permettre d’obtenir le rendement exigé.

253
A l’opposé, l’annonce de l’amélioration de la signature d’une
société réduit le coût exigé sur sa dette et sur ses capitaux propres. Il
s’en suit une meilleure valorisation des actions de cette société dans
les livres des investisseurs qui ne sont disposés à le céder que si la
contrepartie est prête à leur verser le prix qui en résulte. Il est alors
retenu dans le cas de la BRVM que l’annonce de l’amélioration de la
signature entraine une hausse de son cours en bourse (H2b).
Le postulat concerne l’hétérogénéité de l’influence de la
publication de la note financière sur le cours d’une société à une autre.
En effet, les travaux menés sur les autres places financières ont fait
ressortir une différence de réaction du cours des sociétés en bourse en
fonction de la catégorie (bancaire vs non bancaire, grande vs petite,
etc.) (Schweitzer et al., 1992 ; Creighton et al., 2004). Il est retenu,
dans le cas de la BRVM, une différence de réaction du cours en
bourse des établissements de crédit par rapport aux entreprises
industrielles ou commerciales. Il est postulé que la nature de la
société cible influence la réaction du cours des actions de la société
cible à la publication de la note financière (H3).
Ce jeu d’hypothèses est complété par une autre en relation avec
l’influence de la publication des notes financières sur le volume de
titres échangés. En effet, les ajustements de portefeuille rendus
nécessaires par la diffusion de la note financière d’une société ont
vocation à entrainer plus de transactions sur le marché. Sans cette
transaction, les ajustements de cours n’auront pas lieu. L’hypothèse
suivante est posée : la publication de la note financière entraine une
augmentation de la probabilité d’avoir un échange et le volume de
titres échangés (H4).
Pour terminer, nous retenons que toutes choses égales par
ailleurs, l’identité de l’agence auteur de la note financière influence la
réaction du marché (H5). En effet, les agences de notation appliquent
des démarches de notation et de publication qui sont différentes. Il
nous apparait donc qu’en dehors du contenu de la note financière et de
la société cible, nous retenons que les investisseurs réagissent
différemment en fonction de l’agence qui assure la diffusion de la note
financière. Celle-ci s’inscrit à l’opposé des conclusions de Abad et al.
(2013) qui ont établi que la réaction du marché espagnol à la
publication de notations financières ne dépend pas de l’agence qui
l’émet.

254
Le jeu de cinq hypothèses structure les postulats retenus pour ce
qui concerne la réaction des cours et les échanges des actions à la
diffusion de notes financières. Leur validation devrait permettre de
conclure que la diffusion des notes financières influence (ou non) les
cours en bourse des sociétés cotées et augmente leur échange, avec
une ampleur asymétrique selon le contenu de la note financière et une
différence selon la nature de la société cible.
3.2. Les données
L’analyse empirique s’appuie sur les données collectées sur le
site internet de la Bourse Régionale des Valeurs Mobilières de
l’Afrique de l’ouest (BRVM). Celles-ci concernent, d’une part, les
cours en bourse et le volume de transactions et d’autre part, les
publications de notes financières. Les premières ont été constituées
par l’auteur en partant des Bulletins Officiel de Cotation (BOC) 17. Les
données sur les dates de diffusion et le contenu des notes financières
ont été obtenues à partir de la page ‘’avis et communication’’ du
même site internet. Les données sur les cours des sociétés cotées
couvrent la période allant 04 janvier 2011 au 31 décembre 2016. Le
choix de cette période nous assure que nous disposons des cours avant
la publication de la première note financière, indispensable pour
assurer la mise en œuvre des outils d’analyse. Les données sur les
notes financières, quant à elles, se situent sur la période 2013-2016.
Sur la période, il a été identifié 5818 évènements relatifs à la
diffusion de notes financières concernant les sociétés cotées à la
BRVM. Pour chacune de ces notes diffusées, il est enregistré la
société cible (Symbole), l’agence en charge de la notation (Agence), la
note attribuée (NoteRegLTAttr.), le sens de variation de la note
attribuée (SensEvol) et la date de diffusion (Date). Ces caractéristiques
seront utilisées pour expliquer les différences de réaction de marché à
la diffusion de la note financière.
A partir des données collectées, il est constitué six variables
d’intérêt :
 l’occurrence de rentabilité positive de l’action lors d’une
séance de bourse (RendProb) ;
17
http://www.brvm.org/Default.aspx?TabId=87&language=fr-FR, page consultée le
09 mai 2016
18
L’un des événements n’est pas exploitable parce qu’il est survenu un mois après
l’introduction en bourse de la société cible. L’analyse se fera sur 57 événements.

255
 l’amplitude de la rentabilité positive de l’action lors d’une
séance de bourse (RendP) ;
 l’occurrence de rentabilité négative de l’action lors d’une
séance de bourse (RendNProb) ;
 l’amplitude de la rentabilité négative de l’action lors d’une
séance de bourse (RendN) ;
 l’occurrence d’échange de titres lors d’une séance de bourse
(FreqEchang).
 le nombre de titres échangés lors d’une séance de bourse (en
logarithme) (Logvol) ;
Dans ces définitions, la rentabilité est mesurée par l’expression :
Pi ,t  Pi ,t 1
Ri ,t  (1)
Pi ,t 1
Avec Pi,t et Pi,t-1 les cours de l’action i aux dates t et t-1.
La variable RendN prend la valeur de cette expression lorsqu’elle
est négative et la valeur zero sinon. La variable RendP, quant à elle,
prend la valeur de cette expression lorsqu’elle est positive et la valeur
zero sinon. Elles mesurent respectivement la baisse et la hausse
relative des cours en bourse. Les quatre autres variables sont ajoutées
pour évaluer l’impact de la diffusion de notes financières sur les
probabilités d’observer une variation négative, une variation positive
et d’enregistrer une transaction sur le titre cible de l’information
publiée. Leurs prises en compte permet de compléter l’analyse de
l’amplitude par celle de l’occurrence de chacune des composantes.
Elles ont pour valeurs 1 et 0.
Ces variables servent de base pour étudier l’influence de la
publication des notes financières sur le cours et les échanges des
actions cotées à la BRVM. La mise en œuvre exige la présentation de
la méthodologie utilisée.
3.3 Cadre d’analyse
Le cadre utilisé pour la validation des hypothèses de recherche
s’inspire de la méthodologie des études d’évènement (Fama et al.,
1969 ; Binder 1985 ; 1998 ; Serra, 2002) et celle proposée par
Lesmond et al. (1999) et Sarr et Lybek (2002) pour étudier la
dynamique des échanges et des cours des actions cotées sur des
marchés en développement.

256
La dynamique des cours et du volume de transaction est traduite
par les équations suivantes :
R *i ,t si R *i ,t  0
Re ndNi ,t  
 0 si R *i ,t  0
(2)
R *i ,t si R *i ,t  0
Re ndPi ,t  
 0 si R *i ,t  0
(3)
R   i   i Rm,t   i ,k Dk ,i ,t   i1,t
*
i ,t

(4)
V * si V *i ,t  0
logVoli ,t    i ,t
 0 sin on
(5)
V *i ,t  vi   i ,k Dk ,i ,t   i2,t
(6)
Avec RendPi,t : rentabilité positive (ou nulle) de l’action i à la
date t.
RendNi,t : rentabilité négative (ou nulle) de l’action i à la date t.
Rm,t : rendement de marché à la date t.
αi : constante du modèle de marché.
βi : beta de la société i.
Dk,i,t : variable indicatrice valant 1 si l’évènement k est survenu
à la date t et 0 sinon.
Vi,t : nombre d’action i échangé à la date t.
ε1i,t, ε2i,t : terme d’erreur du modèle.

L’équation (4) traduit l’influence de la publication d’une note


financière sur les cours de la société coté. Il s’agit de la relation du
modèle de marché de Sharpe (1964) et Lintner (1965) à laquelle est
ajoutée une variable indicatrice représentant la période sur laquelle la
note financière est diffusée. Cette équation ne traduit toutefois que la
dynamique potentielle du cours des actions. En effet, la forte
prédominance de valeurs nulles dans les variations relatives des cours
des actions cotées à la BRVM a dictée le recours à un modèle non
linéaire pour l’étude de la dynamique des cours. Ainsi, la rentabilité
est décomposée en deux selon les équations (2) et (3). A une date

257
donnée, le cours de l’action peut rester constant, varier à la hausse ou
varier à la baisse. Il est construit deux variables RendP et RendN.
Leurs valeurs sont égales à la variation potentielle si celle-ci est
strictement positive pour la première et négative pour la seconde.
Chacune d’elle prend la valeur nulle si la condition n’est pas réalisée.
Cette formalisation est mieux adaptée à la faible liquidité de la
BRVM. La forme de ces équations correspond à celle d’un modèle
économétrique de type Tobit (Amemiya, 1979 ; Smith et Brame,
2003).
Les équations (5) et (6) ont des formes semblables. Elles
traduisent la dynamique du volume de transactions. Elles servent de
cadre pour mesurer l’impact de la publication des notations
financières sur les échanges sur le marché, appréciée ici par la
probabilité qu’il y ait échange et le volume de titre échangés.
Dans les équations (4) et (6), les paramètres γi,k et ρi,k mesurent
respectivement l’influence de la publication de notes financières sur le
cours et les échanges des actions des sociétés cotées. Ceux-ci sont
estimés par la méthodologie des études d’événement.
Pour y arriver, il est nécessaire de définir les fenêtres
d’évènement représentés par les variables indicatrices Di,k,t. Le choix
de cette fenêtre est un élément déterminant de la méthodologie des
études d’événement. La littérature fait référence à plusieurs
possibilités qui vont d’un jour avant et après la date d’événement (t =
0 ) à 3 ans avant et après l’événement (Freitas and Minardi, 2013). Le
choix de la fenêtre obéit à une double exigence : pas trop longue pour
éviter la contamination par l’influence d’autres événements survenus
dans l’intervalle, pas trop courte pour ne pas confondre l’impact de
l’événement à l’évolution idiosyncratique du cours de la société
(Simoes et al., 2012). Dans la présente étude, une fenêtre de longueur
10 jours avant et 10 jours après la date de diffusion de la note
financière est utilisée. Ce choix est fait pour permettre à la fenêtre de
couvrir une période d’environ un mois de bourse autour de la date
d’événement (t=0).
La démarche consiste à estimer les autres paramètres (exceptés
ceux qui mesurent l’influence) sur la fenêtre d’estimation. Ceux-ci
sont ensuite utilisés pour estimer les valeurs des variables d’intérêt
que l’on aurait observé si l’évènement n’était pas survenu. Les valeurs
attendues sont notées E(Xit) avec X la variable d’intérêt.

258
Formellement, en partant de la formalisation des modèles utilisés pour
l’estimation, nous pouvons établir que :
E Re ndP   ˆ  ˆ R
i ,t i si ˆ  ˆ R  0 et E Re ndP   0 sin on
i m ,t i i m ,t i ,t

E Re ndP Pr opi ,t  


1

 ˆ i  ˆi Rm , t
1 e
E Re ndNi ,t   ˆ i  ˆi Rm,t si ˆ i  ˆi Rm,t  0 et E Re ndNi ,t   0 sin on

E Re ndN Pr opi ,t  


1
ˆ  ˆ R 
1  e i i m ,t
E logVoli ,t   ˆ i  ˆi Rm,t si ˆi  0 et E logVoli ,t   0 sin on

E logVol Pr opi ,t  
1
ˆ
1  e i
(7)
Les paramètres surmontés de l’accent circonflexe représentent
les valeurs estimées sur la fenêtre d’estimation.
Pour chacune des variables d’intérêt ; il est, ensuite, calculé les
écarts de prévisions entre les valeurs observées sur la fenêtre
d’évènement et les valeurs prévues. Ces dernières grandeurs sont
appelées valeurs anormales :
AXi,t = Xi,t – E(Xit) pour T0-L ≤ t ≤ T0 + L (8)
avec T0 date d’évènement et L la longueur de la fenêtre
d’évènement
L’étude de l’influence de la publication des notes financières
s’appuie sur la nullité (ou non) des valeurs anormales. La décision
finale relative à la significativité (ou non) de l’influence de la
publication des notes financière s’appuie sur les tests classiques de
nullité d’une variable. Le test à utiliser dépend de l’influence de
l’évènement sur la variabilité de la composante anormale, mesurée par
son écart-type. Ainsi, la démarche consiste à effectuer un test de
constance de la variance sur la fenêtre d’évènement. Lorsque la
constance est acceptée, un test de student d’égalité à zéro de la
composante anormale est utilisé. Dans le cas contraire, le test est
appliqué sur la composante normée qui est obtenue par la division par
la variance sur la fenêtre d’évènement.
Une stratégie identique est appliquée pour le cumul de la
composante anormale. En effet, à partir des composantes anormales, il
est construit les composantes anormales cumulées définies par :

259
t
CAX i ,t   AX
k T0  L
i ,t pour T0-L ≤ t ≤ T0 + L (9)

avec T0 date d’évènement et L la longueur de la fenêtre


d’évènement
Ce dernier indicateur mesure l’effet cumulé de l’évènement
(annonce de la note financière) sur la variable d’intérêt.
Le détail des tests statistiques n’est pas présenté dans le
document. Le lecteur est invité à se référer à Serra (2002) pour une
présentation plus détaillée.
La dernière composante clôture la présentation de la
méthodologie et permet d’aborder celle des résultats.

4. Résultats
A la suite de la méthodologie, cette section s’intéresse aux
résultats de l’étude. Ceux-ci se déclinent en trois points. Il est,
d’abord, présenté les résultats de l’analyse des caractéristiques des
événements relatifs à la publication des notes financières. Ensuite,
ceux relatifs à l’analyse de l’influence de ces événements sur les cours
et le niveau des échanges de titres sont discutés. La présentation se
termine par l’étude de l’influence des caractéristiques des notes
financières sur la réaction (ou non) des investisseurs.
4.1. Diffusion et caractéristiques des notes financières à la
BRVM
Sur la période d’analyse, il a été identifié 58 événements associés
à des diffusions de notes financières. Ces événements sont
inégalement répartis sur les quatre années d’études. En effet, les
années 2016, 2015 et 2013 ont enregistré plus de diffusion de note
financière (Tableau 01 ci-après).
Ce constat permet de conclure qu’après une légère baisse en
2014, l’évolution du nombre de note financière s’est poursuivie à la
hausse. Assurément que cette tendance se poursuivra afin de permettre
au public de disposer des notations financières pour chacune des
sociétés cotées en application des dispositions règlementaires édictées
par les autorités du marché.
En ce qui concerne l’agence de notation, la Bloomfield
Investment Corporation a diffusé plus de notes financières par
rapport à sa concurrente WARA. La dernière a diffusé environ 37%

260
des notes disponibles. Une analyse détaillée montre que l’activité de
l’année 2016 a consacré une plus forte pénétration de la Bloomfield
Investment Corporation sur le marché de la notation financière des
sociétés cotées à la BRVM.
En outre, comme pour les sociétés cotées, la majeure partie des
notes financières diffusées concernent des entreprises industrielles ou
commerciales qui sont concernées par environ 3 notes sur 4 diffusées.
Cette prédominance résulte de leur poids parmi les sociétés cotées à la
BRVM.
Tableau 4 : Caractéristiques des notations financières publiées à la BRVM
Sens de l'évolution
Ensemble
Première* Amélioration Stabilité Dégradation
Notes attribuées
AA+ 0 1 1 0 2
AA 1 0 1 0 2
AA- 0 1 2 0 3
A+ 2 0 3 0 5
A 4 1 2 0 7
A- 6 2 9 0 17
BBB+ 9 0 7 0 16
BBB 0 0 1 1 2
BBB- 1 0 3 0 4
Types de société
Bancaire/
Financière 7 0 5 0 12
Non
Bancaire 16 2 23 5 46
Agences
WARA 10 1 9 1 21
Bloomfield 13 4 20 0 37
Année
2013 9 1 2 0 12
2014 3 3 3 0 9
2015 8 0 8 1 17
2016 3 1 16 0 20
Ensemble 23 5 29 1 58
* Dans cette catégorie, nous avons rangé les publications de notes financières
concernant les sociétés pour qui il n'y avait pas d'antécédent de notation

261
Le tableau présente la distribution des publications d’informations selon ces
caractéristiques individuelles. Nous avons retenu comme caractéristiques l’agence
qui publie la note financière, l’année de diffusion de l’information et le type de
société objet de la notation financière.
En ce qui concerne les notes attribuées, il convient de souligner
la prédominance des notes A- et BBB+ qui ont été attribuées aux
sociétés cibles respectivement dans environ 26% et 27% des
publications de notations. Ainsi, ces deux notes regroupent 53% des
notes attribuées. La distribution des notes attribuées donne une
structure concentrée autour de ces deux notes qui constituent
respectivement les seuils inférieurs et supérieurs des notes de qualité
moyenne supérieure et qualité moyenne inférieure.
La dernière caractéristique qui retient l’attention dans la
description des notes publiées est leur sens d’évolution annoncée par
rapport à la note précédente. Il apparait sans surprise qu’environ un
tiers des notes diffusées constituent la première note de la société cible
publiée sur le marché. 23 notes se rangent dans cette catégorie. En
effet, cette situation traduit la mise en place récente des agences de
notation locales dans la zone UEMOA. Un nombre plus élevé (29) de
notes financières annoncent la stabilité des notes de la société cible
par rapport à la précédente note attribuée. Il est aussi dénombré cinq
publications de notes annonçant l’amélioration de la note contre un
qui annoncent la dégradation. Les premières concernaient la
Compagnie Ivoirienne d’Electricité (CIE CI), NESTLE Côte d’Ivoire,
la société de Palmier à Huile de Côte d’Ivoire (PALM CI), la société
de distribution d’eau en Côte d’Ivoire (SODECI) et FILTISAC Côte
d’Ivoire. La dégradation, quant à elle, concerne la Société Africaine
de Plantations d’Hévéas (SAPH). Une analyse des caractéristiques,
par ailleurs, de ces deux dernières catégories de note permet de
constater que la majeure partie des améliorations ont été attribuées par
Bloomfield (pour environ 4 publication sur 5) et que la note de
dégradation, quant à elle, a été attribuée par WARA. En outre, les
deux catégories d’évolution ont ciblé des sociétés non
bancaires/financières.
Au total, la présente section a permis de présenter les principales
caractéristiques des diffusions de notes financières à la BRVM. Il est
possible de retenir que 58 publications de notes financières portant sur
20 sociétés cotées ont été faites. La pratique de la diffusion de notes
financières est toute récente dans la zone UEMOA et a donné lieu à la
diffusion de notes qui se distinguent par la nature de la société cible
(financière vs non financière), de l’année de diffusion et de la note

262
attribuée. L’ensemble de ces caractéristiques sont exploitées pour la
suite en vue d’étudier leur influence sur la réaction du marché à la
publication de ces notes.
4.2. Ajustement des cours et du volume de transactions à la
diffusion de notes financières à la BRVM
Cette section présente les résultats de l’analyse de l’influence de
la diffusion des notes financières sur les cours et le volume de
transactions des sociétés cotées. Elle analyse la validité des
hypothèses de recherche formulées.
Rappelons que l’approche méthodologique retenue est celle
d’une étude d’événement sur une fenêtre de 10 jours de cotation avant
et 10 jours de cotation après la date de publication de la notation
financière.
Pour chaque événement défini comme la diffusion d’une note
financière, il s’agit d’abord d’estimer les paramètres du modèle
d’analyse avant la publication sur la période d’estimation. Les
composantes anormales (rendements ou volumes anormaux) sur la
période d’estimation et la fenêtre d’événement sont calculés, par la
suite, comme l’écart entre les valeurs observées et les valeurs prédites.
Enfin, les tests de non nullité de ces composantes anormales (par date
et cumulés) sur la fenêtre d’évènement sont effectués. Cette
succession d’étapes aboutit à l’estimation de l’influence (ou non) de
chaque événement sur la rentabilité et le volume de titres échangés.
Dans le cadre de la présente recherche, une étape supplémentaire
a consisté à identifier les caractéristiques (notes attribuées, sens
d’évolution, société cible de la notation, etc.) des événements
(publication de notation financière) qui expliquent le mieux les
différences de réaction des cours des sociétés et de volumes de titres
échangés.
La section comporte deux sous composantes. La première
présente le profil des composantes anormales et la seconde le profil
des composantes anormales cumulées.

La figure 1 présente le profil des composantes anormales des


variables d’intérêt sur la fenêtre d’événement.
Figure 1 : Composantes anormales générées par la publication des notes
financières
La figure présente la valeur moyenne des composantes anormales des variables d’intérêt sur la
fenêtre d’évènement.

263
Les dates sont présentées en abscisses. En ordonnée, il est présenté successivement, les
composantes anormales de la rentabilité négative (a), l’occurrence des rentabilités négatives (d), la
rentabilité positive (b), l’occurrence des rentabilités positives (e), le volume de titre échangé (en log)
(c)et la fréquence des échanges (f).

(a) (d) (b)

-.002
.017

.25
.2

-.004
.016

Frequence rendement négatif


Rendement negatif

Rendement positif
.15

-.006
.015

.1

-.008
.014

.05

-.01
0
.013

-10 -5 0 5 10 -10 -5 0 5 10 -10 -5 0 5 10


T-T0 T-T0 T-T0

(e) (c) (f)


.3

.1
0

.05
.2
Frequence rendement positif

Volume échange (en log)

-.2

Fréquence échange
.1

0
-.4

-.05
0

-.6
-.1

-.8

-.1
-10 -5 0 5 10 -10 -5 0 5 10 -10 -5 0 5 10
T-T0 T-T0 T-T0

Il ressort de ce graphique que la diffusion des notes financières


génère des rentabilités et des fréquences de transactions de profils
relativement hétérogènes. En effet, les graphiques (a) et (d) font
ressortir des rentabilités et des fréquences de rentabilités négatives
relativement élevées avec un pic à 7 jours avant la date de diffusion
pour la rentabilité négative et 4 jours pour l’occurrence de rentabilité
négative pour les actions de la société cible.
A l’opposé, l’ampleur et la fréquence des rentabilités positives
baissent drastiquement sur la période de 6 jours avant et 10 jours après
la diffusion des notes financières. Ce résultat est établi par le profil
des graphiques (b) et (e).
En ce qui concerne les transactions, la publication des notes
financières, a une influence relativement erratique sur la fréquence des
échanges et le volume de titres échangés avec des pics à 8 jours avant
et 8 jours après la publication des notes financières.
L’analyse numérique de la significativité des composantes
anormales permet d’établir le tableau 2 ci-après. Le contenu confirme
les observations de la figure 01. En effet, respectivement 21 % et 17
% des composantes anormales des rentabilités négatives et de
l’occurrence des rentabilités négatives sont statistiquement non nulles
alors qu’il n’y a qu’entre 3 % et 4 % des composantes anormales de la

264
fréquence de rentabilités positives et l’occurrence des rentabilités
positives qui sont statistiquement non nuls. Les composantes
anormales des volumes des échanges montrent une faible réaction des
échanges avant, le jour et après l’annonce des notes financières.
Tableau 5 : Synthèse de l’influence de la publication des notes financières
sur les composantes anormales
Individuelle Cumulée
Variable
Obs Moyenne Ecart type Moyenne Ecart type
RendP 1197 3,43% 18,20% 0,92% 9,55%
RendPProb 1197 4,18% 20,01% 9,27% 29,02%
RendN 1197 20,97% 40,73% 60,99% 48,80%
RendNProb 1197 16,96% 37,54% 3,01% 17,09%
Lvol 1197 3,84% 19,23% 6,18% 24,09%
LvolProb 1197 4,43% 20,58% 6,52% 29,33%
RendP : Rendement positif : RendPProb : Occurence de rendement positif ; RendN : Rendement
négatif RendNProb : Occurence de rendement négatif ; Lvol : Volume de titre échangé (en log) ;
LvolProb : Occurence d’échange de titre

Il est possible de retenir que la diffusion des notes financières sur


la période 2013-2016 a eu une influence sur les rentabilités des titres
ciblés, notamment par la génération de moins-values pour les
détenteurs de ces titres.
La figure 2 complète l’analyse en présentant le profil des
composantes anormales cumulées.
Le profil du cumul des composantes anormales sur la fenêtre
d’évènement fait ressortir une influence plus perceptible sur la
rentabilité. La tendance à générer des rentabilités négatives est
illustrée par la croissance des composantes anormales cumulées de
l’ampleur et de la fréquence des rentabilités négatives. La baisse de
ces composantes pour l’occurrence des rentabilités négatives, d’un
côté, et celles des volumes d’échanges, quant à elles, traduisent
l’assèchement du marché sur les fenêtres d’évènement et le faible
nombre de rentabilités positives sur la période.
Figure 2 : Composantes anormales cumulées générées par la publication
des notes financières
La figure présente la valeur moyenne des composantes anormales cumulée des variables
d’intérêt sur la fenêtre d’évènement.
Les dates sont présentées en abscisses. En ordonnée, il est présenté successivement, les
composantes anormales cumulées de la rentabilité négative (a), l’occurrence des rentabilités
négatives (d), la rentabilité positive (b), l’occurrence des rentabilités positives (e), le volume
de titres échangés (en log) (c)et la fréquence des échanges (f).

265
(a) (d) (b)

0
.3

1.5
Frequence rendement négatif

-.05
Rendement negatif

Rendement positif
.2

-.1
.1

.5

-.15
0

0
-10 -5 0 5 10 -10 -5 0 5 10 -10 -5 0 5 10
T-T0 T-T0 T-T0

(e) (c) (f)


.8

.1
.05
.6

-2
Frequence rendement positif

Volume échange (en log)

Fréquence échange

0
.4

-4

-.05
.2

-6

-.1
-.15
0

-8

-10 -5 0 5 10 -10 -5 0 5 10 -10 -5 0 5 10


T-T0 T-T0 T-T0

Au total, il ressort de cette analyse que la diffusion des notes


financières a plus généré une baisse du cours des sociétés cibles de ces
notes et l’assèchement de l’offre ou la demande des actions cibles sur
la période de leur publication. Assurément que le contenu des notes
diffusées et les sens d’évolution de la qualité de signature ont un lien
avec cette évolution observée. Pour y répondre, il est nécessaire
d’étudier l’influence du contenu des notes diffusées sur la réaction du
marché.
4.3. Influence des caractéristiques des évènements sur la
réaction des cours des sociétés cotées à la BRVM
Cette section étudie l’influence des caractéristiques des notes
financières diffusées sur sa capacité à générer des rentabilités
(positives ou négatives) et des transactions sur les actions de la société
cible.
Il est retenu comme variable endogène les variables mesurant la
significativité (ou non) des composantes anormales des variables
d’intérêt : niveau de la rentabilité positive (RendP), occurrence de
rentabilité positive (RendPProb), niveau de la rentabilité négative
(RendN), occurrence de rentabilité négative (RendNProb), le volume
de transaction (LVol) et de la fréquence des échanges (LVolProb),
Le tableau 03 présente les résultats de l’estimation des six (6)
modèles logistiques correspondant. Il ressort de ce tableau que la
diffusion de note BBB- a tendance à causer la réduction de la

266
fréquence des rentabilités négatives (-3.612***) mais une
augmentation de l’ampleur des rentabilités négatives observées sur la
période d’évènement. Le même effet, mais à un degré moindre, est
produit par la diffusion de note BBB+ (-1.037**) et A+
(-1.070**) qui représentent 30 % des notes publiées. La diffusion de
ces mêmes notes, en plus de la note A+ (-1.775***), induit une baisse
du niveau des rentabilités négatives lorsque celles-ci surviennent.
L’abondance de rentabilité négative à la diffusion des notes
financières est plus liée à l’année. En effet, le tableau 03 établit que
par rapport à l’année 2014, les notes diffusées en 2015
(-1.254***) et 2016 (-0.799***) ont généré des rentabilités négatives
plus élevées.
En ce qui concerne les rentabilités positives, leur fréquence est le
plus générée par la diffusion de notes différentes de A- (-1.775***).
Nous pouvons donc conclure que l’hypothèse H1 est vérifiée
puisque la diffusion de notations financières influence le cours des
actions en bourse des sociétés cibles. La diffusion des notes
financières apporte donc aux acteurs des informations qui sont pris en
compte dans les transactions sur le marché. L’hypothèse H2 est par
contre rejetée parce que le coefficient de la variable dégradation n’est
pas statistiquement significatif dans l’ensemble des modèles (à
l’exception de l’occurrence de transaction). Notons toutefois que le
nombre d’annonces concernant la dégradation de notes financières
nous conduit à rester prudent sur ce résultat.

Tableau 6 : Résultat de l’estimation de l’influence des notes financières


sur les composantes anormales
(1) (2) (3) (4) (5) (6)
VARIABLES RendP RendPProb RendN RendNProb LVol LVolProb
Note financière attribuée (note AA+ utilisée comme modalité de référence)
AA 1,088 0,394 -1,379* -4,283***
(1,405) (1,293) (0,707) (1,183)
AA- -0,186 -0,318 -1,267
(1,432) (0,497) (1,254)
A+ 1,324 -0,792* 3,814*** -1,070** 0,465
(1,180) (0,479) (1,076) (0,530) (0,910)
A 1,257 -1,965 4,059*** -0,859* -0,478 -6,070***
(1,348) (1,401) (1,074) (0,494) (1,028) (1,152)
A- 0,916 -1,775*** 2,209** -0,610 0,0963 -3,400***
(1,092) (0,522) (1,044) (0,432) (0,829) (0,818)

267
BBB+ 0,134 2,198** -1,037** -0,338 -4,691***
(1,156) (1,061) (0,455) (0,881) (0,910)
BBB 0,0522 0,499 -0,616
(1,538) (1,475) (0,591)
BBB- 0,171 3,078*** -3,612*** 0,485
(1,300) (1,091) (1,108) (1,029)
Sens de l'évolution (Evolution’’Première’’ utilisée comme modalité de référence)
Stabilité 0,338 -0,310 -0,00782 -0,207 -0,534 -2,299***
(0,477) (0,432) (0,217) (0,239) (0,496) (0,569)
Dégradation -0,0106 0,0395 0,00933 0,0175 -0,145 -2,374***
(0,790) (0,920) (0,377) (0,366) (0,786) (0,885)
Type de société (Type ‘’Bancaire/Financière’’ utilisée comme modalité de référence)
Non bancaire -1,896* -1,016 -0.129 0.838** -0.934 -1.000*
(1,043) (1,099) (0.400) (0.330) (0.690) (0.574)
Agence de notation (Agence ‘’WARA’’ utilisée comme modalité de référence)
Bloomfield 0,309 -0,671* 0.175 0.469* -0.269 -3.528***
(0,491) (0,376) (0.241) (0.258) (0.519) (0.810)
Année de diffusion (Année 2013 utilisée comme modalité de référence)
2014 0,480 0,470 -0,00924 -0,511 0,575 0,704
(0,611) (0,474) (0,270) (0,331) (0,749) (0,636)
2015 0,0797 0,203 -1,254*** -0,414 1,718** -0,110
(0,606) (0,509) (0,283) (0,297) (0,673) (0,788)
2016 0,291 -1,562** -0,799*** -0,0857 1,650** 1,922**
(0,646) (0,747) (0,305) (0,328) (0,737) (0,746)
Constant -4,266*** -1,557*** -3,386*** -0,773 -3,821*** 2,366**
(1,196) (0,304) (1,069) (0,471) (0,981) (1,031)
Observations 1 134 924 1 197 1 197 1 113 945
Notes : Standard errors in parentheses *** p<0.01, ** p<0.05, * p<0.1
RendP : Rendement positif ; RendPProb : Occurence de rendement positif ; RendN : Rendement négatif ; RendNProb :
Occurence de rendement négatif ; Lvol : Volume de titre échangé (en log) ; LvolProb : Fréquence d’échange de titre.

Les résultats établissent qu’il existe une différence de réaction


selon le type de la société cible de la note publiée. En effet, toutes
choses égales par ailleurs, la diffusion de notes financières ciblant une
entreprise non financière induit une plus grande occurrence de
variation négative du cours en bourse. Ce résultat nous conduit à
accepter la validité de l’hypothèse H3 selon laquelle la nature de la
société cible influence la réaction du marché à la publication de notes
financières. Rappelons que la littérature (Schweitzer et al.,
1992 ; Creighton et al., 2004) stipule que les notes financières
ciblant des sociétés financières sont susceptibles de générer de faibles

268
réactions parce que les intervenants du marché disposent de plus
d’information sur cette catégorie de société. La notation financière
apporte peu d’information si l’on la compare aux informations
disponibles. Il s’en suit une faible réaction du marché.
L’analyse fait aussi ressortir que les notes annonçant la stabilité
de la note financière ou sa dégradation ont tendance à se traduire par
une absence de réaction du marché puisque ces deux modalités ont un
signe statistiquement significatif et négatif dans le modèle de
régression de la significativité de la composante anormale de
l’occurrence de transaction (modèle 6). Ce résultat conduit à la
validation de l’hypothèse H4.
Parallèlement, nous pouvons noter une réaction différente du
marché en fonction de l’agence chargée de l’émission de la note.
Ainsi, par rapport à sa concurrente, les notes diffusées par la WARA
reçoivent peu de réaction du marché dans la mesure où celles-ci ont un
coefficient positif dans la régression logistique de l’occurrence de
rentabilité négative et pour la fréquence d’échange. Ce résultat
entraine l’acceptation de l’hypothèse H5. Il conviendrait d’enrichir
l’analyse pour comprendre les causes de cette différence de réaction
des investisseurs.
En somme, l’analyse conclut que la diffusion des notes
financières a une influence statistiquement significative sur les cours
et les échanges d’action des sociétés cibles. Ce résultat est conforme à
la littérature qui stipule que par l’information supplémentaire qu’elle
apporte, la diffusion de notes financières influence le cours et les
échanges d’action des sociétés cibles (Vassalou et Xing, 2005; Jorion
et Zhang, 2007 ; Dichev et Piotroski, 2001 ; Goh et Ederington, 1993;
Choy et al., 2006 ; Griffin et Sanvicente, 1982 ; Creighton et al.,
2004 et Linciano, 2004).
Toutefois, la différence de réaction selon le contenu n’est pas
établie sur le marché financier régional de la zone UEMOA. Les
résultats significatifs dans ce sens concernent, la propension de
l’annonce de stabilité de la note financière sur la fréquence
d’occurrence des transactions. Par conséquent, la différenciation de la
réaction établit par Schweitzer et al. (1992) ne semble
s’appliquer aux sociétés cotées à la BRVM. De même, la différence de
réaction en fonction de la nature de la société cible ne semble pas
valable pour la BRVM. Enfin, les analyses font ressortir un
comportement spécifique de l’annonce des notes financières en

269
fonction de l’agence en charge de la notation et l’année de diffusion.
Ce dernier résultat mérite des investigations plus poussées pour
apporter un éclaircissement aux causes de cette spécificité.

5 Conclusion
Cette recherche s’est fixée comme objectif d’étudier la validité
de la théorie de l’agence sur l’influence de la publication des notes
financières sur le cours et les échanges des actions des sociétés cotées
à la BRVM afin d’apporter une triple contribution à la fois théorique,
managériale et méthodologique. L’intérêt de cette quête vient de la
jeunesse du marché financier régional de la BRVM et de la récence
mise en place des agences de notation dans la zone UEMOA. Dans
une telle configuration, la validité ou non des résultats établis sur
d’autres places financières dépend, entre autres, de la pertinence des
opinions émises par les agences en charge de la production des notes
financières et de la réactivité des acteurs avant, pendant et après la
diffusion des informations. Le questionnement des résultats dans ce
contexte particulier a motivé la présente recherche.
Elle s’est appuyée sur une étude d’événement sur une fenêtre de
10 jours avant et après la date de l’annonce. La spécificité de la
dynamique des marchés des pays les moins avancés a suscité le choix
de l’analyse de l’occurrence des échanges, de variation des cours par
un modèle de type Tobit (Modèle censuré). Ce dernier a été estimé à
partir des données constituées à partir des bulletins officiels de
cotation et les pages de diffusion d’information de la Bourse
Régionale des Valeurs Mobilières de l’Afrique de l’ouest (BRVM).
Il ressort des analyses que sur la période d’étude, 2013-2016, il a
été diffusé 58 notes financières. Celles-ci se différencient les unes aux
autres par la note attribuée, son sens d’évolution par rapport à la
précédente note attribuée, le type de société cible, l’agence de notation
et l’année de diffusion. En outre, il est montré que les cours des
actions réagissent à la diffusion des notes financières. Sur ce point,
l’hypothèse formulée est retenue confirmant ainsi la validité des
conclusions établies par Vassalou et Xing (2005), Jorion et Zhang
(2007), Dichev et Piotroski (2001) ; Goh et Ederington (1993); Choy
et al. (2006), Griffin and Sanvicente (1982) sur le marché américain ;
Creighton et al. (2004) sur le marché australien et
Linciano (2004) sur le marché italien. A l’opposé, les
hypothèses relatives à la différence de réaction selon le sens de

270
l’évolution de la note et la nature de la société objet de la note ne se
justifient pas dans le cas de la BRVM. En revanche, toutes choses
égales par ailleurs, il existe une différence de réaction selon l’agence
qui publie la note, de même que l’année de l’annonce. Ces deux
derniers résultats pourraient s’expliquer par les différences de support
ou de communication des agences de notation et l’évolution des
spécificités du marché d’une année à l’autre.
Deux implications managériales peuvent être tirées de ces
résultats. Premièrement, la réaction du marché à la diffusion des notes
financières pose la problématique de son efficience informationnelle.
Le profil des composantes anormales de la rentabilité et des volumes
de titres échangés renseigne sur la possibilité pour les gestionnaires de
fonds de développer des stratégies pour tirer profit de cette situation
d’inefficience. En effet, les résultats établissent qu’en moyenne la
diffusion de notes financières est précédée par une variation
anormalement baissière. Les gestionnaires d’actifs peuvent tirer profit
de cette situation en cédant les titres cibles de notation financière et en
les rachetant après. Il convient toutefois de tester l’efficacité et
justesse de cette stratégie. Cette dernière n’est pas l’objet de la
présente étude. Deuxièmement, cette situation interpelle les autorités
du marché sur les moyens à mobiliser pour améliorer l’efficience du
marché, condition de sa contribution efficace au financement et au
développement des économies de la zone UEMOA. En effet, en
établissant la réaction du marché à la diffusion des notes financières,
la présente étude montre que ces dernières apportent une information
supplémentaire aux intervenants du marché (Gestionnaires d’actifs,
traders, …). Elle contribue ainsi à améliorer l’efficience allocative du
marché dans la mesure où sur la base de cette information les
intervenants peuvent mieux opérer leurs arbitrages entre le rendement
attendu et le risque supporté dans leur choix de portefeuille.
Il s’agit toutefois d’une première ébauche qui mérite d’être
approfondie, notamment sur le plan méthodologique. Il serait
intéressant d’étudier la sensibilité des résultats à la modification des
fenêtres d’évènements. En outre, une collecte d’information auprès
des acteurs (Directeur financière de sociétés cotées, expert des
agences de notation, société de gestion de patrimoine, société de
gestion et d’intermédiation et gestion d’OPCVM) devrait permettre de
mieux comprendre les réactions des cours et des volumes de
transaction à la publication de notes financières.

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