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Jesus Vu Par Un Musulman

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Roger ARNALDEZ

J É S U S FILS DE MARIE
P R O P H È T E DE L'ISLAM

Ce livre est un excellent dossier, savant mais très didactique.


Son élément central et original est un ensemble de textes d'où
ressort nettement l'image que les Musulmans se font de Jésus.
Il s'agit de citations du Coran (avec la traduction de l'auteur) et
d'extraits de six Commentaires classiques de ce dernier jamais
traduits jusqu'ici. Imprimés en caractères gras, ces textes de
longueur variable sont a c c o m p a g n é s de larges notes de pré-
sentation et d'explication. Le tout est assorti d'une notice his-
torique, d'un Index des termes techniques et des noms de
personnes, et d'une bibliographie sélective.

L'ouvrage comprend dix chapitres qui suivent la chronologie


et le rythme de la vie de J é s u s : l'origine et l'enfance, la vie
publique, etc. ; les deux derniers ont pour titre : « Jésus et la fin
des temps » et « Jésus dans la mystique musulmane ».
D'une lecture sans difficulté, ce livre a sa place très adéquate
dans la Collection « Jésus et Jésus-Christ ». L'intérêt croissant
pour l'Islam lui donne une dimension supplémentaire d'actua-
lité.

Roger ARNALDEZ est professeur à la Sorbonne. Agrégé de


Philosophie, il est un éminent sémitisant et un islamologue
d'autorité et de renom (il fut l'élève de Massignon). Il est aussi
co-directeur des « Œuvres de Philon d'Alexandrie ».
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Roger ARNALDEZ
Professeur à la Sorbonne

J É S U S

Fils de Marie
prophète de l'Islam

Collection « Jésus et Jésus-Christ »


dirigée par Joseph DORÉ
n° 13

DESCLEE
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N° 18023
D 1980 - 0002 - 18
ISBN 2-7189 - 0186 - 1
© 1980 Desclée, Paris
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Présentation

1. Il ne fait pas de doute que l'esprit œcuménique le plus


large a bien progressé dans le christianisme à l'époque
contemporaine : volonté résolue de respecter les positions
de ceux qui ne partagent pas la foi chrétienne, et désir
sincère d'entrer véritablement en dialogue avec eux.
Il y a pourtant manifestement chez les chrétiens une
tendance naturelle à se réserver Jésus, à le confisquer.
Toute interprétation de sa figure et de son destin qui ne
rejoint pas en tous points celle que propose leur propre
tradition dogmatique paraît à nombre d'entre eux sinon
nécessairement récupératrice ou malveillante, du moins
souvent suspecte et, en tout cas, radicalement disqualifiée.
Faut-il dès lors en conclure que, en l'occurrence, des
bornes seraient a priori posées au débat? Et que «les
autres » ne seraient ici tenus pour partenaires habilités qu'à
la stricte condition de ne jamais empiéter sur le terrain de la
profession de foi chrétienne proprement dite, — ou du
moins sur ce qui en constitue le centre : Jésus-Christ ? Il est
clair que si tel était effectivement le cas, la crédibilité réelle
des propositions de dialogue faites par les Églises et leurs
adeptes s'en trouverait gravement compromise. Car si le dia-
logue ne présuppose évidemment pas l'accord complet des
partenaires qui tentent de l'instaurer entre eux, il exclut toute
délimitation préalable du champ dans lequel il pourrait se
déployer. Et s'il exige la reconnaissance effective de l'autre,
ses promoteurs ne sauraient méconnaître ce qu'est la véri-
table altérité. Celle-ci se vérifie non pas seulement lorsque
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l'on s'aperçoit que son partenaire pense ou fait autre chose


que soi, mais lorsque l'on en vient à réaliser qu'il pense ou
fait autrement que soi la même chose que soi. Sauf à se voir
irrémédiablement condamnés au soliloque, les chrétiens
doivent pouvoir reconnaître que même sur ce qui leur tient
le plus à cœur, d'autres aussi méritent d'être écoutés.
Or, s'agissant de Jésus, deux catégories d'hommes pa-
raissent particulièrement susceptibles de représenter pour
les chrétiens les partenaires d'un dialogue entendu comme
on vient de le dire : les juifs et les musulmans.
2. Les chrétiens se distinguent comme tels par le fait qu'ils
tiennent Jésus pour un et plus qu'un simple
prophète, pour un Envoyé de Dieu et plus qu'un envoyé de
Dieu parmi d'autres. On peut s'attendre à ce qu'ils aient
profit à recueillir à son sujet l'avis de croyants issus histori-
quement de la même tradition rigoureusemment mono-
théiste qui les a aussi engendrés. Professant en effet comme
les chrétiens un Dieu qui se révèle par des prophètes qu'il
inspire et qui sauve par des envoyés qu'il mandate, ne
rejoignant cependant pas les chrétiens dans leur foi en la
signification unique et universelle de Jésus à ce double
égard, juifs et musulmans sont, pour les croyants en Jésus-
Christ, ces autres privilégiés avec lesquels peut s'engager un
dialogue particulièrement exigeant et vrai.
S'il est déjà très éclairant de recueillir ce que peuvent dire
de Jésus des athées qui portent à l'homme de Nazareth un
intérêt « passioné et positif », s'il s'impose que l'on ac-
corde une attention toute particulière à ce que disent du plus
célèbre des fils d'Israël des voix autorisées du judaïsme ,

on ne saurait manquer de donner la parole aussi à l'Islam.

1 Voir, dans la même collection, le n° 5 : M. MACHOVEC, Jésus pour les


athées et, déjà, le n° 1 : M. LOCHMANN, Christ ou Prométhée ? et le n° 3 :
T. PRÖPPER, Jésus : raison et foi.
2 Voir également, dans la même collection toujours, le n° 2 : P. LAPIDE,
Fils de Joseph ? et le n° 4 : G. VERMES, Jésus le Juif.
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Troisième religion abrahamique mais notablement pos-


térieure aux deux autres ; professée par plusieurs centaines
de millions d'hommes répartis sur la plus grande partie de
l'Afrique et de l'Asie mais, pour des motifs à la fois géogra-
phiques et historiques, particulièrement proche aussi, sur le
plan socio-religieux, de l'univers culturel européen et spécia-
lement français 3; traversée à l'heure actuelle par des cou-
rants aussi divers que vigoureux qui lui confèrent l'impor-
tance économico-politique que l'on sait — la religion islami-
que représente l'un des courants spirituels les plus profonds
et les plus marquants de l'histoire de l'humanité. Or elle a
accordé à Jésus une place et une importance considérables,
contrairement à ce que pensent, et qu'ils soient chrétiens ou
non, la plupart des non-musulmans. C'est évidemment la
raison pour laquelle on a souhaité pour la collection « Jésus
et Jésus-Christ » le présent ouvrage, que l'on se félicite de
pouvoir maintenant offrir à ses lecteurs.
3. L'auteur, le Professeur Roger Arnaldez de Paris IV-
Sorbonne, est bien connu dans le monde musulman et, plus
précisément encore, dans le domaine des études arabes et
islamologiques. S'il présente ici le Jésus de la tradition
coranique, c'est, on se plaît à le souligner, avec la com-
pétence, la précision et la probité mêmes auxquelles il a
depuis toujours habitué ses nombreux lecteurs et auditeurs,
étudiants et collègues.
Indiquons-le cependant sans plus attendre pour parer à
tout risque d'équivoque : la recherche dont les résultats sont
livrés ici n'a pas pour but principal d'informer sur la con-
ception que l'Islam se fait du Jésus-Christ de la foi
chrétienne. Elle vise moins encore à dégager les sources
historiques d'une telle conception ou à opérer une confron-
tation avec la théologie chrétienne dans une perspective

3 Une évaluation récente faisait état de « environ 800 millions de fidèles


de toutes races et cultures », dont 13 millions en Europe Occidentale et
environ 2 millions en France.
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comparative. Publiés par ailleurs, de nombreux ouvrages


pratiquent de telles approches ; quelques-uns ont été indi-
qués par l'auteur en annexe bibliographique: le lecteur
pourra toujours s'y reporter s'il le désire.
L'originalité de l'étude qu'on va lire ici, c'est qu'elle a
cherché à restituer aussi exactement que possible la manière
dont les musulmans ont compris ce que dit de Jésus le Coran
lui-même, lu à la lumière de six grands commentaires que
R. Arnaldez nous garantit «suffisamment représentatifs ».
Ayant lui-même traduit ces commentaires de l'original, il les
cite à point nommé à propos des versets coraniques qu'ils
glosent et expliquent . Il met clairement à jour sinon leur
méthode car ils ne semblent pas en avoir une au sens précis
de ce terme, du moins leurs procédés. Il explicite le rôle que
jouent chez eux non seulement grammaire et lexicographie
mais critique des traditions, principes du droit et jurispru-
dence, ainsi que, bien sûr, théologie spéculative et mystique.
Tout au long de son enquête, il prend soin d'indiquer en
référence à quelles préoccupations précises, en fonction de
quels cadres de réflexion et de quelle mentalité générale le
texte coranique est interprété . A chaque fois que la chose
paraît indiquée, il replace ce qui est dit de Jésus « dans les
perspectives islamiques d'ensemble ».

4 Le lecteur en trouvera une présentation dans la Notice historique qui


figure en fin d'ouvrage.
On prévoit de publier dans la même collection une étude spécialement
consacrée à la figure de Jésus dans la mystique musulmane des soufis, que
se contente d'évoquer rapidement le dixième et dernier chapitre du
présent livre.
5 Dans le cours de l'ouvrage, le texte du Coran est imprimé en caractères
gras et celui des commentaires en italique.
6 Dans un certain nombre de cas, le terme arabe est donné à côté de la
traduction française ou de son équivalent. La chose n'est pas voulue
seulement à l'intention des arabisants. Elle vise en effet soit à indiquer
que le terme en question a un sens technique ; soit à signifier, là où un
passage n'est pas une citation littéraire, qu'il renvoie néanmoins à un
texte ; soit à faire comprendre une exégèse, quand elle s'appuie sur les
formes ou le style de la langue arabe.
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Tant et si bien qu'au bout du compte, centré sur « Jésus


prophète de l'Islam » au sens précis que l'auteur donne à ce
titre, cet ouvrage présente l'avantage complémentaire d'ou-
vrir le regard sur l'ensemble des croyances et attitudes
religieuses musulmanes en fonction desquelles Jésus se
trouve concrètement interprété, et qui s'investissent de fait
dans l'interprétation même qui est donnée de sa figure .
4. Quant à l'image de Jésus qui se dégagera au terme de
l'enquête, on se gardera bien d'en anticiper ici l'esquisse
détaillée. On se contentera de préciser deux choses : avec une
telle méthode, c'est évidemment à la reconstitution d'un
Jésus musulman et rien que musulman, donc non-chrétien,
que l'on aboutira... Mais, contrairement à ce qùe pensent
nombre de chrétiens, un tel Jésus est tellement peu méprisé
ou mésestimé par le Coran, qu'il y apparaît à certains points
de vue incontestablement supérieur à Mahomet lui-même !
Né virginalement de Marie, ayant proclamé un message
véritablement unique et accompli en grand nombre des
miracles proprement extra-ordinaires, finalement dispensé
de la mort, Jésus est exalté par la tradition musulmane
comme ne l'est aucun autre prophète. Il ne saurait pour
autant être question de lui faire franchir les limites impres-
criptibles de la condition humaine. Alors que les juifs ont
refusé le message prophétique de Jésus, alors que les
chrétiens ont vu en lui un Messie qui n'est autre que le
propre Fils de Dieu, les musulmans le reconnaissent
comme un authentique prophète de l'Islam, mais pro-
fessent qu'un autre prophète, venu après lui, finira par le
surclasser définitivement: Mahomet. Pour la seule et
unique raison que ce dernier aura été le seul et unique
dépositaire du Coran, seule et unique révélation définitive
du seul et unique Dieu.

personnes ont été adjoints au volume, en même temps qu'une bibliogra-


phie séleetionnée de langue française.

7 Un Index des termes techniques suivi d'un Index de noms propres de .


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5. Se risquera-t-on, pour finir, à évoquer à grands traits le


bénéfice que les chrétiens pourraient retirer d'un dialogue
vrai avec un Islam qui leur renvoie de leur fondateur une
image qui risque paradoxalement de leur paraître d'autant
plus insatisfaisante qu'elle sera plus positive qu'ils ne l'at-
tendaient ? On se permettra sur ce point quelques proposi-
tions simples, susceptibles d'ouvrir la voie à une réflexion à
poursuivre.
Il y a une chose au moins que les musulmans pourront
toujours apporter aux chrétiens : c'est que la foi va d'abord
à Dieu, et que Dieu n'est Dieu que là où sont respectées sa
transcendance et son unicité absolues. Et il y a une chose au
moins que le christianisme et l'Islam devront toujours rece-
voir l'un de l'autre : c'est qu'il faut soigneusement se garder
de jamais ramener la foi en Dieu à la foi en sa propre
religion, tradition ou communauté.
Au risque de simplifier beaucoup — du moins ne le fera-
t-on qu'en se concentrant sur l'essentiel ! — on osera finale-
ment dire ici que, pour des chrétiens, le premier et le princi-
pal fruit d'un dialogue avec l'Islam, ce devrait être de mieux
réaliser :
qu'ils n'ont pas à croire en leur propre voie avant/au lieu de
croire en Dieu,
mais qu'ils sont invités à reconnaître que, en Jésus-Christ,
Dieu même, l'unique Dieu vivant et vrai, s'est fait leur
voie.
J. DORÉ
Paris, le 6 août 1980
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Textes coraniques
concernant Jésus et Marie

Sourate 2 : La Génisse.

(Verset 87) Et Nous avons donné à Jésus fils de Marie les


éclaircissements, et Nous l'avons aidé par l'Esprit de sainteté.

(136) Dites: «Nous croyons en Dieu, à ce qui nous a été


révélé, à ce qui a été révélé à Abraham, à Ismaël, à Isaac, à Jacob
et aux Tribus, à ce qui a été donné à Moïse, et à Jésus... (Cf.
Sourate 3, 84).

(253) Ces Envoyés, Nous avons distingué certains d'entre eux


au-dessus des autres... Et Nous avons donné à Jésus fils de Marie
les éclaircissements, et Nous l'avons aidé par l'Esprit de sainteté.

Sourate 3 : La famille de Imrân.

(33-34) Oui, Dieu a élu Adam, Noé, la famille d'Abraham, la


famille de c en les mettant au-dessus des mondes dans leur
descendance les uns des autres.

(35) Quand la femme de c dit : « Seigneur, je Te voue ce


qui est en mon sein comme consacré à Ton service. Reçois-le
donc de moi. »
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(36) Et quand elle eut accouché d'un enfant de sexe féminin,


elle dit : « Seigneur, voici que j'ai mis au monde une fille ». Or
Dieu savait mieux que personne de quoi elle avait accouché. « Il
n'en est pas de l'enfant mâle comme de la fille. Et moi, je l'ai
appelée Marie ; je la place sous Ta protection, elle et sa descen-
dance, contre Satan le maudit (mot à mot : le lapidé). »

(37) Son Seigneur l'accueillit donc d'un bel accueil et Il la fit


croître d'une belle croissance. Et Il la confia à Zacharie. Or
chaque fois que Zacharie entrait dans le mihrâb pour aller la
voir, il trouvait auprès d'elle une ration de vivres. Il lui dit : « 0
Marie, d'où cela te vient-il ? » Elle dit : « Cela vient d'auprès de
Dieu ; vraiment Dieu pourvoit aux besoins de qui Il veut sans
compter. »

(38) Alors Zacharie invoqua son Seigneur en disant: «Sei-


gneur! Donne-moi, venant de Toi, une descendance bonne.
C'est bien Toi, celui qui entend la prière ».

(39) Et les anges l'appelèrent, alors qu'il priait debout dans le


sanctuaire : « Dieu t'annonce la bonne nouvelle de Jean qui
déclarera véridique une Parole venant de Dieu ; qui sera un chef,
un être chaste, un prophète au nombre des hommes de bien ».

(40) Zacharie dit: « Mon Seigneur ! Comment aurai-je un


garçon, alors que la vieillesse m'a atteint et que ma femme est
stérile ? » Il dit : « C'est ainsi. Dieu fait ce qu'Il veut ».

(41) Zacharie dit : « Mon Seigneur ! Crée pour moi un signe ».


Dieu dit : « Ton signe sera que tu ne pourras parler à personne
pendant trois jours, sinon par gestes. Aie souvent ton Seigneur
en mémoire et glorifie au crépuscule et au point du jour ».

(42) Et quand les anges dirent : « Oui, ô Marie, Dieu t'a élue
et purifiée ; Il t'a élue au-dessus des femmes des mondes ».

(43) « O Marie, fais oraison devant ton Seigneur; prosterne-


toi et incline-toi avec ceux qui s'inclinent. »

(44) Je te révèle là des nouvelles que tu n'as pas pu percevoir.


Tu n'étais pas près d'eux lorsqu'ils jetaient leurs calames pour
savoir lequel d'entre eux se chargerait de Marie. Tu n'étais pas
près d'eux lorsqu'ils se disputaient.

(45) Les anges dirent : « 0 Marie, voici que Dieu t'annonce la


bonne nouvelle d'une Parole venant de Lui. Son nom est le
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Messie, Jésus fils de Marie; illustre en ce monde et en la vie


dernière. Il est au nombre des Rapprochés.

(46) Il parlera aux hommes dès le berceau et en son âge mûr.


Il sera au nombre de ceux qui font le bien ».

(47) Elle dit : « Seigneur ! Comment aurai-je un fils ? alors


qu'aucun homme ne m'a touchée ? » Il dit : « C'est ainsi. Dieu
crée ce qu'Il veut. Quand Il a décrété une chose, Il n'a qu'à lui
dire: 'sois!' et elle est.

(48) Et Dieu lui enseignera le Livre et la Sagesse, la Thora et


l'Évangile.

(49) Comme Envoyé aux Enfants d'Israël. » — « Me voici ; je


suis venu vers vous avec des signes de votre Seigneur : je vais
faire pour vous avec de la glaise quelque chose qui aura comme
l'aspect extérieur d'un oiseau ; puis je soufflerai dessus, et cela
deviendra un oiseau avec la permission de Dieu. Je guérirai
l'aveugle et le lépreux ; je ressusciterai les morts avec la permis-
sion de Dieu ; je vous apprendrai ce que vous mangez et ce que
vous amassez dans vos maisons. Il y a là vraiment un signe pour
vous si vous êtes croyants.

(50) Me voici pour déclarer véridique ce qui existait avant moi


dans la Thora, et déclarer licite pour vous une partie de ce qui
vous était interdit. Et je vous ai apporté un signe de votre
Seigneur. Craignez donc Dieu et obéissez-moi.

(51) En vérité, Dieu est mon Seigneur et votre Seigneur.


Adorez-Le donc : c'est là un chemin droit. »

(52) Puis quand Jésus sentit l'infidélité qui était la leur, il dit :
« Quels seront mes auxiliaires sur la voie de Dieu ? » Les Apô-
tres répondirent : « Nous sommes les auxiliaires de Dieu ; nous
croyons en Dieu. Atteste que nous sommes musulmans (soumis).

(53) Seigneur ! Nous avons cru en ce que Tu as fait descendre


et nous avons suivi l'Envoyé. Inscris-nous donc avec les
Témoins. »

(54) Ils (ceux dont Jésus avait senti l'infidélité) eurent recours
à la ruse. Dieu aussi eut recours à la ruse : Il est le plus habile de
ceux qui rusent.

(55) Quand Dieu dit : « 0 Jésus, voici que Je vais te rappeler à


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Moi et t'élever vers Moi, et te purifier du contact des hommes


qui sont infidèles. Je vais placer ceux qui t'auront suivi au-dessus
de ceux qui auront été infidèles jusqu'au Jour de la Résurrection.
Puis vers Moi sera le lieu de votre retour. Alors Je jugerai entre
vous de ce sur quoi vous étiez en désaccord.

(59) Oui, aux yeux de Dieu, il en est de Jésus comme d'Adam


qu'Il a créé de poussière ; puis Il lui dit : « Sois ! », et il fut.

Sourate 4. Les femmes.

(156) Nous les avons punis (les juifs), pour leur infidélité et
pour les paroles qu'ils ont prononcées contre Marie, énorme
calomnie.

(157) Et pour avoir dit: «Nous, certes, nous avons tué le


Messie, Jésus fils de Marie, l'Envoyé de Dieu. » Or ils ne l'ont
pas tué et ils ne l'ont pas crucifié ; mais une ressemblance s'offrit
à leurs yeux. En vérité, ceux qui divergent à ce sujet sont réelle-
ment dans un doute en ce qui le concerne ; ils n'en ont aucune
espèce de science et il n'y a là qu'adhésion à la conjecture, car ils
ne l'ont pas tué en toute certitude.

(158) Mais Dieu l'a élevé vers Lui. Et Dieu est puissant et
sage.

(159) Il n'y aura personne en vérité, parmi les Gens du Livre,


qui ne vienne à croire en lui avant sa mort; et le Jour de la
Résurrection, Jésus sera témoin contre eux.

(171) 0 Gens du Livre ! Ne dépassez pas la mesure dans votre


religion ; ne dites sur Dieu que la vérité. Le Messie, Jésus fils de
Marie, n'est qu'un Envoyé de Dieu, Sa Parole qu'Il a lancée à
Marie, un esprit venant de Lui. Croyez donc en Dieu et en Ses
Envoyés. Ne dites pas « Trois ». Cessez : cela vaudra mieux pour
vous. Dieu est un Dieu unique. Gloire à Lui ! bien loin qu'Il ait
un enfant !

(172) Le Messie ne dédaigne pas d'être serviteur de Dieu, non


plus que les anges Rapprochés.

Sourate 5. L a Table garnie.

(46) Nous avons envoyé à leur suite Jésus fils de Marie, chargé
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de déclarer véridique ce qu'il avait devant lui de la Thora ; Nous


lui avons donné l'Évangile où il y a Direction et Lumière, pour
déclarer véridique ce qu'il avait devant lui de la Thora, Direction
et Exhortation pour ceux qui ont la crainte de Dieu.

(110) Et quand Dieu a dit : « O Jésus fils de Marie, rappelle-


toi mon bienfait pour toi et pour ta Mère, quand Je t'ai soutenu
par l'Esprit de sainteté et que tu as parlé comme enfant au
berceau et comme homme arrivé à l'âge mûr. Et quand Je t'ai
enseigné le Livre et la sagesse, la Thora et l'Évangile. Et quand
tu as fait de glaise quelque chose qui avait comme l'aspect
extérieur d'un oiseau, et que tu as soufflé dessus, et puis qu'avec
Ma permission cela est devenu oiseau. Et quand tu as guéri
l'aveugle-né et le lépreux avec Ma permission. Et quand tu as
ressuscité les morts avec Ma permission. Et quand j'ai éloigné de
toi les Fils d'Israël, au moment où Je leur ai apporté les éclaircis-
sements et qu'alors ceux d'entre eux qui sont infidèles ont dit :
« Assurément, ce n'est là que sorcellerie évidente. »

(78) Ceux des Fils d'Israël qui ont été infidèles ont été maudits
par la langue de David et de Jésus fils de Marie.

( 111 ) Et quand J'ai révélé aux Apôtres : « Croyez en Moi et en


Mon Envoyé », ils dirent : « Nous croyons. Sois témoin que nous
sommes musulmans (soumis).»

(112) Quand les Apôtres dirent : « O Jésus fils de Marie, est-


ce que ton Seigneur peut faire descendre du ciel sur nous une
table garnie ? » Il dit : « Craignez Dieu, si vous êtes croyants. »

(113) Ils reprirent: «Nous voulons en manger, et que nos


cœurs soient dans la paix ; et que nous sachions que tu nous as dit
le vrai ; et que nous en soyons les témoins. »

(114) Jésus fils de Marie dit : « O mon Dieu, notre Seigneur !


Fais descendre du ciel sur nous une table garnie qui soit pour
nous une fête, pour le premier et le dernier d'entre nous, et un
signe venu de Toi. Pourvois à nos besoins, car nul ne pourvoit
mieux que Toi. »

(115) Dieu dit : « Oui, Je vais la faire descendre sur vous. Et


quiconque sera infidèle après cela, Je la châtierai en vérité d'un
châtiment dont Je ne châtierai personne au monde. »

( 116) Et quand Dieu dit : « 0 Jésus fils de Marie, est-ce toi qui
as dit aux hommes : ' Prenez-nous, moi et ma Mère, comme deux
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dieux en dehors de Dieu ' ? » Il répondit : « Gloire à Toi ! Il ne


m'appartient pas de dire ce à quoi je n'ai aucun droit. Si je l'avais
dit, Tu le saurais certainement : Tu sais ce qui est en moi, et je ne
sais ce qui est en Toi.

(117) Je ne leur ai dit que ce que Tu m'as ordonné de dire :


'Adorez Dieu, mon Seigneur et le vôtre.' J'ai été un témoin
contre eux tant que je suis resté parmi eux, et quand Tu m'as
rappelé à Toi, c'est Toi qui les as surveillé, car tu es témoin de
toute chose. »

Sourate 19. Marie

(2) Récit de la miséricorde de ton Seigneur envers Son servi-


teur Zacharie.

(3) Quand il invoqua son Seigneur en une invocation secrète.

(4) Il dit : « Mon Seigneur, les os sont affaiblis en moi, et


l'éclat des cheveux blancs fait flamboyer ma tête. Et en t'invo-
quant, Seigneur, je n'ai jamais été malheureux.

(5) Or je crains les proches qui viendront après moi, alors que
ma femme est stérile. Aussi donne-moi de Ta part un continua-
teur.

(6) Qui hérite de moi, et qui hérite comme membre de la


famille de Jacob. Et fait de lui un objet de Ta complaisance.

(7) « 0 Zacharie ! Oui, Nous t'annonçons la bonne nouvelle


d'un garçon dont le nom sera Jean. Nous n'avons donné ce nom
à personne auparavant. »

(8) Il (Zacharie) dit: «Seigneur! Comment aurai-je un


garçon, alors que ma femme est stérile et que j'ai atteint en
vieillesse l'âge de la décrépitude ? »

(9) Dieu dit : « C'est ainsi. Ton Seigneur dit : Cela est pour
Moi facile; Je t'ai bien créé auparavant alors que tu n'étais
rien ».

(10) Il (Zacharie) dit: « Seigneur, fais un signe pour moi.»


Dieu dit : « Ton signe sera que pendant trois jours pleins, tu ne
pourras parler à personne. »
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(11) Il sortit donc du sanctuaire et se mit devant son peuple ;


alors il leur révéla ceci : « Glorifiez (Dieu) au point du jour et à la
tombée de la nuit ».

(12) 0 Jean ! prends le Livre avec force. Et Nous lui apportâ-


mes le hukm (la sagesse ?), alors qu'il était un tout jeune garçon,

(13) ainsi qu'une tendresse et une pureté venues de Nous. Et il


fut pieux (craignant Dieu).

(14) Rempli de piété filiale envers son père et sa mère. Et il ne


fut ni violent, ni désobéissant.

(15) Et paix sur lui, le jour où il naquit, le jour où il mourra, le


jour où il sera ressuscité !

(16) Et fais mention de Marie, dans le Livre. Elle se retira à


l'écart de sa famille en un lieu oriental.

(17) Elle jeta un voile entre elle et eux. Alors Nous lui en-
voyâmes Notre esprit qui prit pour elle la forme d'un mortel
accompli.

(18) Elle dit : « Je cherche refuge contre toi auprès du Miséri-


cordieux, si tu es pieux. »

( 19) Il dit : « Je ne suis, moi, que l'envoyé de ton Seigneur, afin


que je te donne un garçon pur. »

(20) Elle dit : « Comment aurai-je un garçon, alors qu'aucun


mortel ne m'a touchée et que je ne suis pas une prostituée ? »

(21) Il dit: « C'est ainsi. Ton Seigneur a dit: 'Cela m'est


facile. Et Nous ferons de lui un signe pour les hommes, une
miséricorde venue de Nous '. C'est une chose décrétée. »

(22) Elle fut donc enceinte de l'enfant et se retira avec lui en


un lieu éloigné.

(23) Puis les douleurs l'amenèrent à se diriger vers le stipe du


palmier. Elle dit : « 0 ! Plût à Dieu que je fusse morte avant cela,
et perdue dans l'oubli ! »

(24) Puis il (?) l'appela de dessous elle: « Ne t'afflige pas.


Voici que ton Seigneur a mis au-dessous de toi un ruisseau.
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(25) Secoue vers toi le stipe du palmier; tu feras tomber sur


toi des dattes mures et bonnes à cueillir.

(26) Mange donc et bois, et rafraîchis tes yeux. Lorsque tu


verras quelque mortel, dis alors : « Oui j'ai fait un vœu au Miséri-
cordieux; il consiste en un jeûne; aussi ne parlerai-je au-
jourd'hui à âme qui vive. »

(27) Puis Marie se rendit auprès des siens, portant l'enfant


dans ses bras. Ils lui dirent : « 0 Marie ! Tu en es venue à quelque
chose d'inconcevable!

(28) Sœur d'Aaron, ton père n'était pas un homme de mal, ni


ta mère une prostituée ».

(29) Elle fit alors un signe dans la direction de son fils. Ils
s'exclamèrent : « Comment parlerions-nous à un enfant au ber-
ceau ? »

(30) Il (Jésus) dit: « Je suis en vérité le serviteur de Dieu. Il


m'a apporté le Livre et a fait de moi un prophète.

(31) Il a fait de moi un être béni et Il m'a ordonné d'observer


la prière et l'aumône tant que je resterai en vie,

(32) et aussi de montrer de la piété envers ma Mère. Il n'a pas


fait de moi un tyran misérable.

(33) La paix soit sur moi le jour où je naquis, le jour où je


mourrai, le jour où je serai ressuscité vivant ! ».

(34) Celui-ci est Jésus fils de Marie, parole de vérité, à propos


de qui ils doutent.

Sourate 23. Les croyants.

(50) Et Nous avons fait du fils de Marie, comme aussi de sa


Mère, un signe. Et Nous lui avons donné asile sur un coteau, lieu
de fraîcheur et de sources jaillissantes.

Sourate 43. L'ornement.

(63) Et quand Jésus vint avec les éclaircissements, il dit : « Je


suis venu à vous avec la sagesse pour vous éclaircir une partie de
ce en quoi vous divergez. »
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Sourate 57. Le fer.

(27) Nous avons apporté à Jésus l'Évangile. Nous avons mis


dans le cœur de ceux qui le suivent, douceur et mansuétude.

Sourate 61. L e rang.

(6) Et quand Jésus fils de Marie dit : « 0 Enfants d'Israël ! Je


suis un Envoyé de Dieu vers vous. »

Sourate 66. L'interdiction.

(12) Et évoque Marie, fille de c qui avait gardé inviolé


l'organe de son sexe. Alors Nous lui avons insufflé de Notre
esprit. (Cf. Sourate 21, verset 91).
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Introduction

Le Jésus du Coran

Bien que, dans la croyance musulmane, Jésus ne soit


qu'un prophète, le Coran parle de lui en des termes très
particuliers qu'il n'emploie pas pour les autres messagers
de Dieu, fût-ce pour Mohammad qui pourtant clôt les
révélations et reçoit le nom de «Sceau des prophètes».
Par bien des côtés, Jésus apparaît comme un être unique
dans toute la création, ne serait-ce que par le fait qu'il est
venu au monde sans avoir de père. Néanmoins, et à coup
sûr contre la doctrine chrétienne de la divinité du Christ et
de l'Incarnation, de nombreux versets affirment avec
force qu'il n'est qu'un prophète et que les prophètes ne
sont que des hommes. C'est dire qu'il est une pure créa-
ture et que la façon de le créer, pour extraordinaire qu'elle
soit, ne lui confère aucun privilège de nature. Adam, qui a
été créé du limon de la terre, sans père ni mère, n'est rien
de plus qu'un homme. Ève, qui a été créée à partir du
corps d'Adam, sans mère, n'est qu'une femme comme les
autres femmes. Dieu est la cause première de toute créa-
tion, c'est-à-dire la cause réelle. Un être créé n'est pas
supérieur à un autre parce qu'il sort directement des
mains de Dieu ; il n'est pas inférieur, parce que des causes
secondes, un mâle et une femelle, un père et une mère,
interviennent, dans sa conception, entre Dieu et lui. La
présence et l'utilisation des causes secondes, n'introdui-
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sent aucune distance entre Dieu, le seul véritable agent, et


l'effet de son action.
Mais si aucun homme, donc aucun prophète, ne jouit
d'aucune sorte de supériorité de nature, Dieu peut, par
son libre choix, distinguer qui Il veut et lui donner un rang
qui le met au-dessus des autres. C'est ce qu'on appelle en
arabe le tafḍīl, qu'on pourrait traduire par « valorisation ».
La racine faḍl exprime l'idée d'un surplus, d'un excédent ;
le mot faḍila signifie la vertu ou la valeur au sens que
prend ce terme dans l'expression: un homme de valeur.
C'est ce par quoi il se distingue des autres en se plaçant
au-dessus d'eux. Mais, selon la conception coranique,
cette valeur n'est pas une qualité propre à l'individu,
fondée dans la nature ou l'essence de l'être qui la mani-
feste ; elle est le fait du pur vouloir divin et ne repose en
rien sur une particularité qui appartiendrait en propre à
celui qui est l'objet de cette distinction. Elle est, comme
disent les philosophes, une pure dénomination extrinsè-
que dont la réalité dépend entièrement de la libre volonté
de Dieu. De même que Dieu crée tout ce qu'Il veut créer
par sa parole : « Sois ! », de même on peut dire qu 'Il dis-
tingue un homme ou un prophète par la parole qu 'Il lui
adresse pour l'appeler et le charger de sa mission. Cet
homme devient alors, de par cette parole, l' Élu de Dieu:
Mustafa.
Que Jésus soit un Élu en ce sens, et qu 'il ait été l 'objet
de distinctions uniques, d'une « valorisation » sans précé-
dent et sans exemple postérieur, c'est certain. Mais en
lui-même, il n'est qu'un homme, comme Moïse avant lui,
comme Muhammad après lui. Demander pourquoi, après
avoir reçu des marques si merveilleuses de la faveur di-
vine, Jésus n'a pas été choisi pour être le sceau des pro-
phètes, c'est ne rien comprendre à la conception musul-
mane de l'absolue liberté du choix de Dieu. Ce n'est pas
parce que Jésus est cet être que Dieu a créé hors de toute
commune mesure, qu'il doit en conséquence surpasser
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tous les autres prophètes et apporter la révélation défini-


tive, la Loi ultime qui abroge toute loi précédemment
promulguée par la voix des prophètes antérieurs et qui,
elle, ne sera jamais abrogée. La seule chose justement qui
« distingue » Muhammad et fait de lui le plus grand des
prophètes, c'est qu'il a reçu la mission de prêcher le Co-
ran. Le Coran est le « miracle » (mu‘jiza) de Muhammad.
Il a été donné à Moïse le pouvoir de confondre les magi-
ciens de Pharaon ; il lui a été donné de faire jaillir l'eau du
rocher ; il a reçu la manne et les cailles dans le désert pour
nourrir son peuple ; quant à Jésus, avec la permission du
Seigneur, il a prouvé sa mission en guérissant les malades
et en ressuscitant les morts. Les miracles de Moïse éta-
blissent la vérité de son message par ce qui lui a été
accordé de puissance sur le monde de la nature ; ceux du
Christ justifient sa qualité de prophète, par ce que Dieu
lui a accordé de puissance sur le monde de la vie et de la
mort ; mais il n'y a qu'un seul miracle de Muhammad :
c'est d'avoir apporté aux hommes le Coran inimitable qui
prouve l'authenticité de sa mission par ce que Dieu lui a
donné de faveur en le chargeant de prêcher la Révélation
définitive qui doit transformer la pensée et les cœurs par
l'éloquence de la Parole que rien ni personne ne pourra
jamais altérer. La Thora et l'Evangile ont été déformés
par les juifs et les chrétiens. Le Coran est à l'abri d'une
telle détérioration, et c'est lui qui, en rappelant (dhikr) les
histoires d'Abraham, de Moïse et de Jésus, rétablira
l'exacte vérité de la révélation que chacun d'eux a appor-
tée dans le Livre que Dieu a fait descendre sur lui.

Différents points de vue

On a déjà beaucoup écrit sur 'Isa'bnu Maryam, Jésus


fils de Marie, qui est le nom que le Coran donne le plus
souvent au Messie. Les historiens et les exégètes non
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musulmans ont facilement montré que beaucoup d'élé-


ments coraniques, concernant la vie de Jésus, sont inspirés
de passages tirés des évangiles apocryphes, Protévangile
de Jacques, Evangile du pseudo-Matthieu, Evangile de
l'Enfance, etc. En revanche, les correspondances avec les
Evangiles que l'Eglise a retenus comme canoniques, sur-
tout avec l'Evangile de Luc, sont rares et presque toujours
lâches. C'est justement en cela que la tradition musul-
mane affirme que Dieu a, pour ainsi dire, corrigé l'ensei-
gnement chrétien altéré : les concordances avec les apo-
cryphes prouvent qu'ils avaient conservé la vérité, et que,
par suite, les chrétiens et l'Eglise ont eu tort de les rejeter.
Quant aux modifications que le Coran apporte, ici et là,
aux Evangiles canoniques, elles sont des rectifications de
ce qu'ils ont faussé. En effet, le Coran est la Parole éter-
nelle et incréée de Dieu ; elle transcende l'histoire et ne
saurait par conséquent être soumise à ce que nous appe-
lons critique historique. Elle dit la Vérité. Elle la dit
précisément parce qu'elle n'est pas exposée aux vicissitu-
des des choses temporelles. Quant au Coran, qui est in-
contestablement jeté dans la mêlée humaine, une fois
révélé et « descendu » d'auprès de Dieu, Dieu en garantit
l'incorruptibilité par la foi vivante et profonde qu'Il ins-
pire aux croyants et qui repose essentiellement sur la forte
croyance que ce Coran, prêché par le Prophète, l'Envoyé
du Dieu unique, est la Parole éternelle et incréée. Par
conséquent le véritable Jésus est pour le musulman celui
dont la figure se dégage des versets coraniques où il est
question de lui.
Sur ce Jésus, tel que les sourates le présentent, on a à
peu près tout dit. Les islamologues occidentaux, chrétiens
ou non, ont étudié ce qui en est rapporté dans le Livre,
soit du point de vue purement historique, soit du point de
vue théologique, de la théologie chrétienne bien entendu.
Sur le plan religieux, certains se plaisent à insister sur les
ressemblances qu'ils croient trouver avec le Christ des
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Evangiles ; d'autres, au contraire, accentuent les différen-


ces. Tout ce qui a été écrit de ces divers points de vue est
d'un grand intérêt, et nous y renvoyons.
Ce que nous nous proposons de faire est d'un autre
ordre. Quand un non-musulman veut savoir ce qu'est
l'Islam, il faut qu'il écoute parler les musulmans. Il n'a pas
à se placer lui-même devant les textes révélés ou inspirés
au Prophète, Coran et Hadith. Il n'a pas à les interroger au
nom de son propre questionnaire et en tirer ce qu'il croit
pouvoir être considéré comme une réponse à ses ques-
tions. Cette attitude n'exclut évidemment pas les autres
qui ont leur légitimité. Il est normal qu'un chrétien, sur-
tout s'il pense à un dialogue possible, étudie 'Isa en pen-
sant à Jésus. Il est normal qu'un savant, un historien ou un
sociologue des religions, n'acceptent pas toute faite
l'image que l'Islam donne de lui-même : c'est leur travail
de l'analyser afin de découvrir ce qui la constitue et com-
ment elle s'est constituée. Cela a été fait et bien fait,
encore qu'il soit toujours possible en théologie comme en
histoire d'apporter du nouveau.

Notre projet

Notre projet est tout autre. Les musulmans, dans leur


ensemble, ignorent le Jésus du christianisme, ou, s'ils le
connaissent, c'est à travers des polémiques dont le Coran
fournit d'ailleurs l'exemple fondamental. La doctrine
chrétienne leur est présentée comme aberrante et intena-
ble : l'idée que Jésus serait le Fils de Dieu est à leurs yeux
parfaitement absurde, voire blasphématoire. Il est pour
eux évident que Dieu ne saurait avoir d'enfant. On lit dans
le Coran (112, 3) : « Il (Dieu) n'a pas engendré et n'a pas
été engendré ». Il est également évident que Dieu ne peut
être identifié au Messie ; en effet il est écrit (5, 17 et 72) :
« En vérité, ils sont infidèles ceux qui disent que Dieu est
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le Messie, fils de Marie. » Les chrétiens répondent qu'ils


n'ont jamais soutenu que Dieu est le Christ ; mais pour
eux le Christ est Dieu. La différence est grande, néan-
moins elle ne s'explique qu'en fonction du dogme, voire
de la théologie de la Trinité et de l'Incarnation. On com-
prend que l'Islam n'ait pas à entrer dans ces considéra-
tions. Puisque Dieu est absolument un, le Messie, étant de
son côté un être défini en son unité individuelle, si on
déclare que le Messie est Dieu, il faut admettre que Dieu
est le Messie. Que devient alors la transcendance absolue
et nécessaire du Dieu unique ?
Toute la christologie chrétienne est donc, au jugement
des musulmans qui en connaissent quelque chose, un tissu
d'absurdités, d'invraisemblances et d'inconséquences. Le
Jésus du Christianisme n'a par conséquent pour eux aucune
consistance réelle. Quant à ceux qui ne connaissent le
Christ des Evangiles que de nom, parce que leur Livre leur
dit que les chrétiens se réclament de lui, ils se contentent
normalement de ce qu'ils lisent dans le Coran à son sujet.
Dans ces conditions, nous avons pensé qu'en étudiant la
figure du Christ telle qu'elle apparaît à travers les versets
coraniques, nous devions éviter de traiter un sujet voisin
et pourtant très différent, et qui serait : le Christ des
Evangiles dans sa représentation musulmane. Nous ou-
blierons au contraire tout ce que la révélation chrétienne
dit du Christ, le Jésus du sermon sur la montagne, le Jésus
qui vivait au milieu des pêcheurs de la mer de Galilée, le
Jésus qui aimait saint Jean, Marthe, Marie et Lazare, le
Jésus de la prière eucharistique et du Mont des Oliviers.
Tout cet ensemble de traits et bien d'autres sont absents
du Coran. Nous ferons comme si, sous un même nom,
celui de Jésus, ou en arabe de 'Isa, il s'agissait de deux
personnes différentes, n'ayant que ce nom en commun.
Nous laisserons se dessiner le portrait du Messie sur un
fond purement coranique et islamique et nous parlerons
de lui comme d'un prophète de l'Islam, exactement
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comme si le Coran avait été le premier et le seul Livre


révélé qui parle de Lui. Nous ne ferons allusion aux chré-
tiens que là où les versets les citent, exactement comme si
on ne connaissait les chrétiens que par ce qu'en dit le
Coran. Nous procéderons d'ailleurs en cela comme si nous
admettions avec les musulmans que les récits évangéliques
sont falsifiés ainsi que l'enseigne le Livre révélé à Mu-
hammad. Si, à vrai dire, l'accusation générale de taḥrīf,
déplacement du sens des textes sacrés, frappe surtout les
juifs, il est écrit des chrétiens (5, 14) : «Nous avons reçu
leur alliance et ils ont oublié une part de ce qui leur avait
été rappelé (c'est-à-dire de l'Evangile, au singulier). Nous
avons donc suscité entre eux l'hostilité et la haine... » Les
divisions des chrétiens sont donc le signe de leurs erreurs
(cf. 2, 253) et prouvent qu'ils n'ont pas gardé fidèlement
le message du Christ.
Les commentateurs du C o r a n

Pour étudier le Jésus musulman, le Jésus prophète de


l'Islam, nous consignerons tout ce que les commentateurs
du Coran ont écrit à propos des versets où il est question
de lui. Certes, un grand nombre de ces commentaires
s'appuient sur des récits qui ne sont pas explicitement
dans le texte révélé au Prophète, mais qui peuvent jeter
sur lui une certaine lumière : ce sont des récits tirés des
Evangiles apocryphes plus ou moins remaniés et adaptés
aux exigences d'une exégèse musulmane, ainsi que nous le
verrons. Certains de ces récits se contentent d'expliciter
les allusions souvent très ramassées du Coran. Certains
autres se greffent sur les versets coraniques et se dévelop-
pent pour eux-mêmes, un peu comme des plantes parasi-
tes. Quoi qu'il en soit, il ne s'agit plus ici de la Parole de
Dieu, mais de paroles d'hommes qui ne cachent d'ailleurs

* Nous avons utilisé les commentaires de Tabari, de Zamakhshari, de


Razi, de Qurtubi, des Jalalayn et de Haqqi - Cf. Index des noms propres.
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La réflexion chrétienne s'est trop cantonnée dans le champ


des spécialistes, théologiens, exégètes, etc. Il est urgent de la
restituer à son véritable terrain, celui où la foi elle-même est
appelée à faire ses preuves comme vécue et interrogée. Grâce
à cette ouverture, on écrira aussi ailleurs et dès lors autrement.
Telle est la préoccupation première de la présente collection.
La communication continuera avec les disciplines tradition-
nelles, historiques surtout. Mais de plus, elle s'établira résolu-
ment avec de nouveaux partenaires, qui se trouvent, dans les
pays socialistes et chez les marxistes; dans le judaïsme
contemporain, l'Islam et même l'Hindouisme; chez les psy-
chanalystes, les sociologues et les philosophes. On accordera
une particulière attention à la pratique pastorale et à la vie des
communautés chrétiennes, en-deçà et au-delà des frontières
de l'Europe. La parole sera donc donnée aussi à toute gentilité
où « Jésus » et « Jésus-Christ » sont énoncés et pris au sérieux.
Il ne s'agira pas de justifier ou de défendre des propositions
abstraites, mais avec les moyens adaptés, de dire et d'éclairer
les expériences.jusqu'aux plus profondes et aux plus lointai-
nes.

Ainsi, la théologie du Christ — Christologie — se fera-t-elle sur


la base, non pas d'un syncrétisme culturel ni d'une intransi-
geance dogmatique, mais sur celle, traditionnelle, d'un
échange serein et constructif entre les possibles mises en
forme de la foi et ses multiples mises en question.
Participant d’une démarche de transmission de fictions ou de savoirs rendus difficiles d’accès
par le temps, cette édition numérique redonne vie à une œuvre existant jusqu’alors uniquement
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