Ecles FR
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COURS/AUBERGE SUR
L’ECCLÉSIOLOGIE
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DOCUMENTS CONSULTES POUR LA PREPARATION DE CE COURS
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SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE.......................................................... 4
3
COURS/AUBERGE D’ECCLÉSIOLOGIE
INTRODUCTION GENERALE
“Le visible de l’Eglise vit dans l’invisible ; il est marqué, formé, dominé
par l’invisible. L’Eglise est donc, par essence, plus que ce qu’elle parait :
ce n’est pas seulement un peuple ou une population, mais un peuple élu ;
non seulement un corps, mais un corps mystérieux ; non un quelconque
édifice, mais un édifice spirituel”.1
Cette expérience de ne pas nous sentir isolés et d’être dans une relation intime
avec Dieu nous fait nous tourner vers Lui et apprendre que l’expérience de l’Eglise,
dans laquelle certains sont pêcheurs – mais aussi dans laquelle beaucoup souffrent
d’une manière ou d’une autre, ou ne comprennent pas ce qui arrive -, a besoin d’être
approfondie, mieux connue et plus aimée.
Nous sommes un peuple qui chemine dans l’histoire en prétendant connaitre la
mission de Jésus. Et, en réalité, une grande part de ceux qui prétendent être chrétiens,
mais sans tenir compte de l’Eglise, font cela en se basant sur des expériences sans
discernement ou sans réflexion, qui, dans la mesure où ces expériences sont abordées
et analysées, les invitent à redécouvrir l’identité de l’Eglise véritable et l’importance de
lui appartenir.
1
KÜNG, Hans. A igreja (L’Eglise). Lisboa: Moraes Editores, 1970, p. 59; KÜNG, Hans. O que deve
permanecer na Igreja (Ce qui doit demeurer dans l’Eglise). Petrópolis: Edit. Vozes. 1976.
4
Avec le Pape François nous avons conscience d’une nouvelle ferveur pour
l’évangélisation et pour le rôle qui revient à l’Eglise. Un nouvelle période historique
s’ouvre, avec des défis et des exigences qui se caractérisent par le désarroi généralisé
qui se propage, par de nouvelles turbulences sociales et politiques ; par la diffusion
d’une culture distante et hostile à la tradition chrétienne ; par l’émergence d’offres
religieuses variées, qui ont pour objet de répondre, à leur manière, à la soif de Dieu
manifestée par les peuples.
L’Eglise – que nous sommes tous – est appelée à repenser profondément et à
relancer sa mission avec fidélité et audace dans les circonstances nouvelles affrontées
par l’humanité d’aujourd’hui.
Nous savons que ce cours est une opportunité de réflexion pour le couple sur
notre Eglise, qui s’insère dans un long chemin qu’elle a emprunté depuis son origine,
en cherchant toujours à discerner sur le mode et l’intensité de l’annonce
évangélisatrice à toute personne humaine.
Ce chemin ou processus, qui n’a pas été sans ombres et tensions dues aux
interprétations différentes sur la manière de faire Eglise, a influencé la formation de la
conscience ecclésiale de nombreux chrétiens. Et certainement dans la formation de la
conscience de chacun de nous en particulier.
Il doit être clair que le contenu de ce cours est très large et, donc, exige que les
éléments les plus fondamentaux soient choisis. Pour autant, nous trouvons intéressant
d’établir les principes de sélection de ces éléments, qui pourront également être utiles
aux couples souhaitant discerner et participer toujours plus à la mission de notre
Eglise.
Nous partons de l’hypothèse que nous ne savons pas ce qu’est l’Ecclésiologie,
nous mettant ainsi dans la position d’apprenant. Puis, nous remonterons aux origines
de la biblique de l’Eglise afin de mieux la comprendre, et comment, à travers les
différents conciles, elle a été comprise et mise en œuvre. Enfin, nous reviendrons au
moment actuel pour découvrir son rôle et son importance pour la construction du
Règne de Dieu.
Ce cours est à destination des couples pour qu’ils évoluent dans la Foi,
l’Espérance et la Charité dans l’Eglise une, Sainte, Catholique, Apostolique. L’Eglise est
décrite dans Lumen Gentium (LG, 8) comme signe et sacrement du salut, c’est à dire
5
qu’elle rend visible dans l’histoire une réalité invisible : l’union intime avec Dieu et
l’unité de tout le genre humain.
Le concept classique d’Eglise –“congrégation de tous les baptisés, unis dans la
même foi véritable, dans le même sacrifice et dans les mêmes sacrements, sous
l’autorité du Souverain Pontife et de ses évêques en communion avec lui” – est une
considération d’un point de vue externe, juridique et qui, ainsi, fragilise sa réalité.
Tout comme l’homme est plus que son corps physique, l’Eglise est infiniment
plus que la seule organisation extérieure et visible. Ce qui fait de l’homme un être
humain c’est l’âme, et c’est l’âme de l’Eglise qui en fait un organisme vivant, un
mystère.
Tout comme la grâce sanctifiante confère à l’âme la vie surnaturelle, l’Esprit
Saint donne à l’Eglise sa vitalité éternelle – “ce que notre esprit, notre âme, est vis à vis
de nos membres, de même est l’Esprit Saint vis à vis des membres du Christ, du corps
du Christ qu’est l’Eglise”.
L’étude de l’Eglise nous appelle aussi à une évangélisation plus profonde, à une
activité pastorale plus efficace, c’est à dire à OSER L’EVANGILE. Enfin, nous sommes
appelés à “croire avec les mains”.
Cependant, dans ce travail pastoral nous rencontrons beaucoup de difficultés,
principalement sur le sujet de l’acceptation de l’église, de sa hiérarchie et de ses lois.
Parmi les divers obstacles rencontrés, nous pouvons souligner :
Certains affirment que l’Eglise ne réussit pas à accompagner l’évolution du
monde moderne, parce que son message est dépassé ; ils l’accusent de
moralisme, légalisme, etc.
D’autres confondent “l’Eglise” avec le “personnel de l’Eglise” et la critiquent
en se basant sur les attitudes personnelles et individuelles de prêtres ou
même de laïcs, membres des diverses pastorales.
Nous vivons à l’époque de la communication et, dans ce contexte, l’Eglise
ne réussit pas à transmettre ses valeurs, alors que les moyens de
communication diffusent leurs “contre valeurs” avec beaucoup de facilité et
d’agilité, et atteignent des résultats surprenants.
A vouloir diffuser et/ou actualiser son message, le “personnel de l’Eglise” a
souvent fragilisé ou dénaturé le contenu évangélique de l’Eglise du Christ.
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L’action des laïcs dans l’Eglise, bien que largement soulignée et valorisée
dans le Concile Vatican II, est encore ambigüe. Tantôt les laïcs sont
valorisés comme aidants du clergé, et leur formation est favorisée, tantôt il
est dit qu’ils cherchent à approfondir leur rôle pour “prendre la place du
prêtre”.
A la vue de ces divers problèmes qui apparaissent de tous côtés, nous sommes
appelés à mieux comprendre cette réalité appelée Eglise du Christ :
L’Eglise, réalisation du plan éternel de Dieu Père, fondée dans le temps par
Dieu Fils et continuellement sanctifiée par Dieu Esprit Saint.
L’Eglise, Peuple de Dieu, Corps du Christ, Temple de l’Esprit Saint.
L’Eglise, divine et humaine, céleste et terrestre, visible et invisible, actuelle
et future.
La sainte Eglise, composée de pêcheurs sur terre.
L’Eglise visible, noyau et fondement du Règne de Dieu, qui atteindra la
plénitude à la “fin des temps”.
L’Eglise en continuité de la mission du Verbe Incarné.
L’Eglise sacrement universel pour le salut des hommes.
L’Eglise, société hiérarchiquement présidée par le Pontife Romain (le Pape)
et ses évêques ; constituée du clergé et des laïcs, le “Nouveau Peuple de
Dieu”.
L’Eglise “Peuple saint et pécheur” …
Tous ces aspects constituent l’Eglise de Jésus-Christ, mystère de la communion
des hommes entre eux et avec Dieu, qui dans son infinie bonté a voulu nous offrir
gratuitement cet instrument de salut.
Tout ceci est l’Eglise : le Christ présent parmi nous ; Dieu qui vient jusqu’à
l’humanité pour la sauver, en l’appelant à travers sa révélation, la sanctifiant à travers
sa grâce, la rafraichissant avec son aide constante, tant dans les petits comme les
grands combats de la vie quotidienne.
Comme nous l’avons vu, étudié, l’Eglise contient beaucoup de thèmes, et
certains ont nécessairement besoin d’être approfondis, parce qu’ils exigent de
l’information, de la connaissance, et en particulier de la méditation / réflexion. Ce n’est
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pas une étude de l’histoire de l’Eglise, de sa hiérarchie, de son pouvoir temporel. C’est
fondamentalement un mystère qui doit être exploré à la lumière de la foi.
C’est pourquoi nous organisons ce cours autour de huit axes thématiques :
1. Ecclésiologie: son évolution
2. Le peuple de Dieu dans l’Ancien Testament
3. Le Peuple de Dieu dans le Nouveau Testament
4. L’Eglise et les conciles
5. Lumen Gentium
6. Les représentations de l‘Eglise
7. Marie, Mère de l’Eglise
8. Etre Eglise, aujourd’hui et l’ecclésiologie du Pape François
8
TABLE 1 – ECCLÉSIOLOGIE : SON ÉVOLUTION
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Le Nouveau Testament reprend cette double signification et donne au terme
son sens définitif qui identifie la nouvelle communauté des saints, comme nouveau
peuple de Dieu racheté par le Christ, comme l’assemblée constituée par ceux qui
répondent à l’appel de Dieu pour son Règne et sa Gloire (1Th 2,12). Quand la première
communauté chrétienne se désigne du nom de “ekklesía”, elle se reconnait, d’une
certaine façon, comme héritière de cette assemblée de l’Ancien Testament.
Les premiers chrétiens ont aussi utilisé le mot “église” pour désigner les
différentes communautés locales (Jérusalem, Corinthe, Éphèse, etc.), en plus de
désigner l’ensemble de tous les chrétiens disséminés à travers le monde. “L’Eglise est
le peuple que Dieu réunit dans le monde entier. Elle existe dans les communautés
locales et se réalise comme assemblée liturgique, et surtout eucharistique”.
L’étude de l’Eglise de manière spécifique est récente dans l’Histoire de l’Eglise.
Cette discipline n’existait pas dans les matières théologiques. On ne trouve chez aucun
des grands théologiens de l’antiquité et du moyen-âge d’étude spécifique sur l’Eglise.
Aujourd’hui, nous pouvons définir l’Ecclésiologie (du grec ekklesía et logos)
comme la branche de la théologie chrétienne qui traite de la doctrine de l’Eglise : son
rôle dans le salut, son origine, sa discipline, sa manière d’être en relation avec le
monde, son rôle social, les changements qui ont eu lieu, les crises affrontées, ses
doctrines, la relation avec les autres dénominations et sa forme de gouvernance.
Est considéré comme inauguration de l’Ecclésiologie le traité “De regimine
christiano”, de Jacques Viterbo (1301-1302). Toutefois, c’est à partir du XVIème siècle,
en raison des questions soulevées par la Réforme Luthérienne, que surgissent divers
travaux écrits pour défendre le fait que l’Eglise Catholique est l’Eglise véritable. En
général, ces études se basent sur trois types d’arguments :2
a) Historique : l’Eglise Catholique est la seule à apparaitre dans l’histoire en
continu comme une société une, visible, hiérarchique et son chef est le seul
successeur de Pierre.
b) Caractéristique : seule l’Eglise Catholique possède quatre critères donnés
par le Christ : unité, catholicité, sainteté et apostolat.
2
PIÉ-NINOT, Salvador. Introdução à Eclesiologia (Introduction à l’Ecclésiologie). São Paulo: Loyola, 4ª
ed., 2008.
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c) Empirique : l’existence même de l’Eglise est un miracle, car, malgré tous ses
errements, elle a survécu dans l’histoire, ce qui prouve son fondement
divin.
En attendant, c’est après le concile Vatican I, en 1870, que se renforce
définitivement l’Ecclésiologie comme discipline spécifique de la Théologie. Ce Concile
fut celui qui définit comme dogme le primat et l’infaillibilité du Pape, ce qui souleva
une série de questions (dont les ruptures) dans l’Eglise et qui, peut-être justement
pour cela, força les théologiens à repenser l’Eglise.
Il est à constater que domina une conception de l’Eglise centralisée dans la
hiérarchie, qui se comprend jusqu’à aujourd’hui quand on entend parler, par exemple
de : “l’Eglise défend telle position...”. “Eglise”, dans ce sens, veut dire la hiérarchie - le
Pape, les évêques, les vicaires. Cette idée est très ancienne et nous la trouvons, en
1601, chez Roberto Belarmino:3
“C’est la communauté des hommes réunis par la profession de la foi
véritable, la communion des mêmes sacrements, sous la gouvernance
des pasteurs légitimes et, essentiellement, du seul vicaire du Christ sur la
terre, le pontife romain (...)”
Pour que quelqu’un puisse être déclaré membre de cette Eglise véritable, dont
parlent les Ecritures, il n’est pas nécessaire de demander une quelconque vertu
intérieure. Il suffit de la profession de foi publique et de la communion des
sacrements, choses qui sont faciles à comprendre. Ainsi, l’Eglise est une communauté
(coetus) d’hommes aussi visible et palpable que la communauté du peuple romain, ou
le royaume de France, ou la république de Venise.
Un autre exemple est cette phrase fameuse de Pie X, de 1906:
“Ce n’est que dans la hiérarchie que résident le droit et l’autorité
nécessaires pour encourager et diriger tous les membres avec comme
finalité la société. Quant à la multitude, elle ne possède d’autre droit que
celui de se laisser conduire et, docilement, suivre ses pasteurs”.
3
BELLARMINO, R. De controversis Christianae fidei adversus nostri temporis haereticos, tII: Prima
controvérsia generalis. Livro III: De Ecclesia militante, caput II: De Definicione de Ecclesia, p. 137-138.
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1.2- La justification biblique
Le dessein du Père de sauver tous les hommes par l’Eglise (par le Christ, dans
l’Esprit Saint) suit les étapes historiques suivantes :
a) Au commencement du monde : la préfiguration ;
b) Dans l’histoire d’Israël : la préparation ;
c) Au temps du Christ : l’inauguration ou la naissance ;
d) A la fin des temps : la consommation.
Les faits marquants préparatoires de l’Eglise les plus importants sont les deux
alliances réalisées par Dieu avec Abraham et Moïse. Dans la première, établie autour
de 1850 A.C., le Seigneur promet à Abraham de le faire père d’un grand peuple, qui
sera béni entre les nations (Gn 12,1-3; 17,1-8) ; à travers la seconde, il réalise avec
Moïse au Sinaï, environ 600 ans plus tard, Israël devient le “peuple de Dieu” (Ex 19,3-
8).
Dans ces deux épisodes nous voyons clairement la préfiguration du mystère de
l’Eglise. La vraie descendance d’Abraham, dit Saint Paul, est celle de ceux qui imitent le
patriarche par la foi, devenant les héritiers des bénédictions promises et qui
constituent l’Eglise qui a pour tête Jésus-Christ (Rm 9,6-8). Au XIIIème siècle A.C., le
peuple d’Abraham, captif en Egypte, est libéré par Dieu à travers Moïse. Cet
évènement préfigure le grand exode qui sera réalisé dans la plénitude des temps par
Jésus Christ, qui libère le peuple de Dieu captif du péché et de la mort pour le règne de
Dieu, Règne d’amour et de vie.
Dans le Nouveau Testament, Jésus-Christ lance les fondements pour une
inauguration de l’Eglise, qui a lieu dans les “temps ultimes”, à travers une série d’actes
qui, vus dans leur ensemble, permettent d’entrevoir l’intention claire du Christ de
fonder son Eglise. A travers ces actes nous pouvons souligner principalement : la
vocation des douze apôtres, la concession du primat de Pierre et l’institution de
l’Eucharistie. Cependant, nous ne pouvons oublier que l’Eglise ne commence à exister
véritablement qu’à la Pentecôte.
Nous pouvons identifier les étapes suivantes de Jésus pour la structuration et
l’inauguration de son Eglise :
Au début, parmi tous ses disciples, Jésus a appelé “ceux qu’il voulait” (Mc
3,13-15), leur a donné son pouvoir et les a envoyé (Lc 9,1-6) pour qu’ils
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agissent au nom de Jésus (Mc 6,35-44). Jésus établit une hiérarchie entre
les apôtres, en instituant Pierre comme le “chef” (Mt 16,13-20), en lui
accordant une onction et un pouvoir particulier (Jn 20,19-23) pour qu’ils
puissent continuer sa mission jusqu’à la fin des siècles (Mt 28,18-20), en
coopérant avec eux pour la réalisation de la mission (Mc 16,15-20).
A l’Ascension il promet l’aide de l’Esprit Saint (Ac 1,1-8) qui est envoyé à la
Pentecôte (Ac 2,1-4) et les disciples se mettent à prier au nom de Jésus :
l’Eglise est née (Ac 2,40s) et les Apôtres réalisent les mêmes actes que Jésus
(Ac 3).
Dès lors, est indiscutable la volonté de Jésus de fonder son Eglise comme
continuatrice de sa mission à travers les temps.
13
Et il continue en affirmant que ses successeurs doivent perpétuer cette œuvre,
pour que la Parole de Dieu se répande rapidement et soit glorifiée, et que le Règne de
Dieu soit annoncé et établi sur toute la terre.
“La mission de l’Eglise, donc, s’accomplit quand, obéissant au mandat du Christ et mue
par la grâce et par l’amour de l’Esprit Saint, elle est présente aux hommes et aux
peuples pour les porter avec l’exemple de sa vie et la prédication de l’Evangile, avec les
Sacrements et les autres moyens de salut, à la foi, à la liberté et à la paix du Christ, en
la faisant pleinement participer au Mystère du Christ” (AG, 5).
14
1.4.1- Unité
Il faut distinguer deux concepts : l’unité et l’unicité. L’unité signifie cohésion,
“absence de division interne”. L’unicité est la qualité de qui n’a pas de pair ou d’égal à
lui-même.
La véritable Eglise est une et unique parce que Dieu est lui-même unique. La foi
est le principe de l’union entre les personnes dans l’Eglise parce que toutes croient
dans la même chose, elle est le principe d’unité. Les sacrements expriment cette unité,
surtout dans l’Eucharistie et le Baptême qui signifient et réalisent l’Eglise. Donc, selon
les Pères, l’”Eucharistie fait l’Eglise”, le corps eucharistique fait le corps ecclésial. Tout
cela enraciné dans le service aux frères et sœurs, dans la diaconie.
L’unité de l’Eglise est aussi exprimée par le mot “communion” (“koinonia”), qui
signifie l’échange, le flux de vie des fidèles entre eux (1Jn 1,3.6s). Cette unité ne se
consumera que “quand Dieu sera tout en tous” (1Cor 15,28), consommation que le
peuple de Dieu prépare et commence quand il est encore pèlerin sur terre : Dieu
possédé et qui nous possèdera parfaitement sera le commencement, intérieur à
chacun et à tous, de notre communion.
Cette condition terrestre se caractérise par un “déjà” et un “pas encore”,
simultanément vrais, car l’Eglise “déjà” est ce qu’elle est appelée à être et par
conséquent ses enfants sont déjà enfants de Dieu (1Jn 3,1; Rm 8,14-17), mais qui ne
profitent “pas encore” de la liberté glorieuse qui caractérise ces enfants de Dieu (Rm
8,21ss). Nous possédons les premiers fruits de l’Esprit Saint (Rm 8,23; 2Cor 1,22; 5,5;
Ep 1,14), mais ce n’est que le début d’une réalité qui n’est pas complètement réalisée.
Cette unité ne peut être confondue avec “uniformité”, car le Christ a voulu pour
son Eglise cet entrelacement complexe “d’unité” et de “diversité” appelé
“communion”, très bien illustrée par Saint Paul dans l’image du Corps avec ses
différents organes et fonctions. Il appartient, donc, dans l’Eglise un large spectre de
personnes, rites et cultures, “appliqués à conserver l’unité de l’Esprit par ce lien qu’est
la paix” (Ep 4,3-5; LG, 8).
1.4.2- Sainteté
Le mot “sainte” signifie à l’origine “ce qui est séparé, réservé” ; dans la
théologie, saint est ce qui est “séparé ou réservé par Dieu”. De cela découle qu’une
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église consacrée à Dieu doit avoir une vie compatible, une vie moralement sainte (1P
1,15 s; Rm 12,1).
La dénomination “sainte” pour l’Eglise est apparue au siècle II avec Saint Ignace
d’Antioche. L’importance de qualifier l’Eglise comme sainte se montre aussi dans la
formule de la communion des saints ; c’est la communion des saints sanctifiés, autant
ceux qui sont déjà glorifiés, que ceux qui sont encore pèlerins. C’est pourquoi, l’Eglise
est, déjà sur terre, marquée comme vraie sainteté, quoiqu’imparfaite (LG, 48).
Le Concile Vatican II, dans cette même ligne, ne cesse d’exposer que l’Eglise est
sainte, mais toujours avec la nécessité de se purifier ; le caractère de pèlerin de
l’Eglise.
La qualification de saint ne pourra être attribuée à une réalité que dans la
mesure où elle est en relation avec Dieu (le Saint des saints), elle procède de lui, elle
Lui appartient ou lui est consacrée. De fait, le Peuple de Dieu est saint, il constitue
“une nation sainte” (Ex 19,6) parce qu’il est de Dieu et pour Dieu. En général, est aussi
saint tout ce qui est en relation avec le culte ; ainsi, le peuple consacré est encore plus
saint quand il est convoqué et réuni pour le culte de Dieu Saint dans une sainte
assemblée (ecclesiae).
L’Eglise est le lieu où se prête à Dieu le culte qu’Il souhaite, “en esprit et vérité”.
La sanctification des hommes est la finalité de l’Eglise et qui pourrait difficilement se
réaliser si elle-même n’était pas sainte et ne possédait pas les moyens de la
sanctification.
Bien qu’étant composée de pêcheurs sur terre, l’Eglise est originellement
sainte, c’est à dire sans aucune tache ni imperfection en vertu de la présence de Dieu
en son être le plus intime. L’Eglise démontre sa sainteté à travers les fruits abondants
de sanctification qu’elle produit depuis son origine – les saints et spécialement la
Sainte Vierge.
L’Eglise n’est pas seulement sainte sous la forme, personnifiée, d’Epouse du
Christ (Ep 5,26s) ; c’est aussi l’Eglise des saints, c’est à dire des hommes qui s’efforcent
de vivre leur consécration baptismale et leur condition de membres du Corps du
Christ.
16
1.4.3- La catholicité
Le terme “katholikós” est utilisé par les philosophes pour les “propositions
universelles”, il signifie “général” et est appliqué à l’Eglise pour la première fois par
Saint Ignace d’Antioche.
L’Eglise est catholique. Elle assume un double sens : universalité et authenticité.
Elle s’impose (dans le sens positif du terme) à tous par sa véracité et est diffusée de
toutes parts par son universalité.
Il a existé, au cours du temps, deux manières de vivre la catholicité : au premier
siècle a prévalu le régime de communion des Eglises locales, qui se maintient dans
l’ecclésiologie orientale ; au deuxième siècle, un régime d’organisation unitaire d’une
Eglise qui constitue un seul corps avec une structure visible, de peuple unique, lequel a
penché progressivement vers la papauté. En vérité, il existe entre les Eglises locales et
l’Eglise universelle une intériorité réciproque, une “sorte d’osmose”.
L’Eglise est catholique (universelle) depuis sa manifestation publique à la
Pentecôte. Au sens fondamental et intérieur, l’Eglise est catholique parce que “en elle
demeure la plénitude du Corps du Christ uni à sa Tête, ce qui implique qu’elle reçoit de
Lui la plénitude des moyens du salut”. Dans sa face extérieure, l’Eglise est catholique
parce que la rédemption du Christ est universelle (Mt 16,15; At 1,8).
Depuis le IIème siècle le sens d’universalité devient courant, sans, toutefois,
exclure celui de l’authenticité, c’est à dire, porteuse de la plénitude des moyens du
salut institués par le Christ.
A partir du IIIème siècle, ce terme désigne l’Eglise véritable à travers le monde
ou une communauté locale qui est en communion avec cette Eglise.
A partir du IVème siècle, il est incorporé dans divers symboles jusqu’à devenir
définitif dans celui de Nicée-Constantinople.
Le Concile Vatican II, dans Lumen Gentium (LG, 13 et 17) unit l’affirmation de
catholicité de l’Eglise avec sa mission :
“Tous les hommes sont appelés à cette unité catholique du Peuple de Dieu, qui
préfigure et fait la promotion de la paix universelle. Les fidèles catholiques lui
appartiennent et ils sont ordonnés de diverses manières, mais aussi les autres croyants
en Christ, et enfin tous les hommes en général, appelés au salut par la grâce de Dieu”.
“Ainsi, l’Eglise prie et travaille en même temps, pour que la plénitude du monde entre
dans le corps du Peuple de Dieu, Corps du Seigneur et Temple de l’Esprit Saint. Et en
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Christ, Tête de tous, que soit donné tout honneur et toute gloire au Créateur et Père
de toutes choses”.
1.4.4 –Apostolicité
L’idée d’apostolicité a été élaborée en premier par Saint Irénée, qui revendique
la tradition qui provient des apôtres et qui se conserve dans les Eglises par la
succession des prêtres. C’est une dimension essentielle de l’Eglise et, en même temps,
c’est un critère de vérité. La succession apostolique aspire précisément à perpétuer les
vicaires du Christ, que ce soit dans la participation aux pouvoirs que le Christ a confié
aux siens, ou dans la continuité du vicariat dans le temps.
L’apostolicité correspond, donc, avec authenticité et prend diverses formes :
doctrinale, existentielle, missionnaire et ministérielle, qui sont des caractéristiques
propres à l’Eglise depuis son origine.
L’identification de l’Eglise actuelle avec l’Eglise des Apôtres, manifestée par un
fait vérifiable : elle découle d’eux par une succession historique ininterrompue (Mt
28,18-20; Ac 2,42). Il s’agit de la volonté du Christ, qui a laissé le sacrement de l’Ordre
comme instrument pour perpétuer l’Eglise édifiée sur les fondements des Apôtres, en
préservant, au cours des siècles, les éléments essentiels que le Christ lui a confiés : les
moyens de la sanctification, la gouvernance et la mission.
Le mot “apôtre” est grec et signifie “envoyé”. Jésus a choisi douze apôtres pour
qu’ils vivent encore plus unis à Lui et qu’ils soient ses messagers (Mc 3,14; Mt 10,40;
Ap 21,14; Ac 1,21s). Par conséquent, l’Apôtre est quelqu’un qui a accompagné Jésus et
qui est principalement le témoin de sa résurrection, point culminant de son œuvre ;
quant à Paul, qui n’a pas vécu avec Jésus durant sa vie terrestre, il a eu une vision
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particulière de Jésus ressuscité sur la route de Damas et a été envoyé directement par
Lui (Ac 9,3-6. 15).
Le véritable magistère apostolique est lié à la parole du Seigneur. Rien dans
l’Eglise n’échappe à la médiation apostolique. Cela parce que les apôtres ont bien
réalisé une double mission : celle d’être des témoins spéciaux de la résurrection, et
comme tels, fondateurs d’Eglises, mission unique et incessible, et celle d’être maitres
et pasteurs des Eglises fondées par eux, mission pour laquelle les évêques sont leurs
successeurs. En ce sens, tant l’apostolat que l’épiscopat ont une mission commune :
réaliser la présence active du Seigneur absent.
Quand on parle de l’apostolicité de l’Eglise, vient à l’esprit la question du
primat. Le texte de Mt 16, 16-19, d’origine probable post-pascale, est d’une grande
importance. Il rappelle le primat de Pierre. Ce texte nous révèle le mystère de l’Eglise
dans sa nature, son fondement et sa condition terrestre. Quant à sa nature, l’Eglise de
Jésus-Christ est construite par Lui. En ce qui concerne son fondement, il est édifié sur
Pierre, confesseur de la Foi. Dans sa condition terrestre, l’Eglise est exposée aux
attaques de l’enfer, mais Jésus garantit que les forces de l’enfer ne prévaudront pas.
Saint Léon le Grand aide à comprendre la question du primat de Pierre en
disant que Pierre perpétue l’exercice de son autorité dans l’Eglise. “[...] de là du ciel,
Pierre continue à prier pour l’Eglise et la gouverne par l’intermédiaire de son vicaire,
l’évêque de Rome”.
Au XVIème siècle les réformateurs ont aussi soulevé la question du primat. Un
cardinal du nom de Caetano, dans l’un de ses écrits, De divina institutione pontificatus
romani pontificis, présente trois questions qui deviennent l’axe central de la discussion
théologique qui suivra : la primauté pétrinienne (dans le collège apostolique), la
succession pétrinienne (successeur du ministère pétrinien) et le ministère pétrinien
romain (l’évêque de Rome comme successeur légitime de Pierre).
Ces quatre dimensions – une, sainte, catholique et apostolique -, en tant que
traits essentiels de l’Eglise, doivent se produire ensemble ; il n’est pas suffisant que
l’une ou l’autre se produise, étant donné qu’il est nécessaire que l’Eglise véritable les
possède de manière simultanée et inséparablement unies entre elles.
Ainsi, seul dans l’Eglise Catholique se réalisent, simultanément et en plénitude,
les quatre dimensions : unité, sainteté, catholicité et apostolicité. Il faut réaffirmer
19
que ce ne sont pas des conditions fixées par intérêt, mais bien les propriétés
essentielles de l’Eglise véritable, confessées depuis toujours dans le Credo, présentes
et visibles en elle jusqu’à aujourd’hui.
Par ailleurs, sans dédaigner le fait que dans les autres églises chrétiennes nous
trouvons “beaucoup d’éléments de sainteté et de vérité”, il faut dire que certaines ont
préservé leur unité particulière avec une perte de catholicité missionnaire, en
réduisant leur action à des groupes nationaux ou ethniques, à une ambiguïté
doctrinale progressive ; ou bien se sont montrées en carence de fondements solides,
ont cassé la chaine de succession apostolique ou ont abandonné une bonne partie des
moyens de sanctification.
Pour réfléchir :
1) Comment comprendre l’origine trinitaire de l’Eglise ?
2) Sous quelle forme le Christ a-t-il ordonné à son Eglise d’accomplir sa mission ?
3) Comment comprenez-vous les quatre dimensions de l’Eglise : unité, sainteté,
catholicité et apostolicité ?
4) Pensez-vous faire Eglise, c’est à dire, être part active de ce Corps Mystique du
Christ ? Utilisez-vous pleinement ses dons au service de cette Eglise ?
5) Vous considérez-vous un disciple missionnaire du Christ, principalement dans la
fortification du Mariage et de la famille chrétienne ?
20
TABLE 2 – LE PEUPLE DE DIEU DANS L’ANCIEN TESTAMENT
21
nombreuses fois dans les deux Testaments (360 fois dans l’AT et 104 fois dans le NT),
avec des équivalences, comme : “mon peuple”, quand Dieu parle avec Israël ; ou,
“nous sommes un peuple”, quand Israël repousse son élection et son appartenance à
Dieu.4
Dans l’AT, l’expression Peuple de Dieu se trouve en : Nb 11,29; 17,6; Jg 5,11; 1S
1,12; 6,21; 14,13; 2R 9,6; Sg 2,10.
Dans le NT, une telle expression se trouve une seule fois, appliquée à toute
l’Eglise, dans le texte de 1P 2,10. L’expression “peuple de Dieu”, dans le NT, non pas
appliquée à l’Eglise chrétienne, apparait 140 fois.
Ainsi, peut-on voir que la réalité de l’Eglise Peuple de Dieu n’apparait pas
comme telle dans l’Ancien Testament, mais que s’en trouvent seulement diverses
manifestations, indicatives de l’Eglise telle que connue dans le Nouveau Testament.
Le Peuple de Dieu est une de ces manifestations, laquelle permet de découvrir
un sens profond : “l’Eglise est mise sous le signe de la vocation et de l’appel divins”.
Il appartient à Dieu l’initiative de constituer un peuple, de le sanctifier et de le
sauver, de manière à ce qu’il puisse Le connaitre et Le servir saintement.
Dieu “ a choisi, pour cela, Israël comme Son peuple. Il a établi avec lui une
alliance. Et il l’a instruit pas à pas” (LG, 9). Au-delà de choisir, établir l’alliance et
instruire, Dieu S’est manifesté à Lui-même et aux desseins de Sa Volonté, sanctifiant ce
peuple pour Lui.
Ainsi donc, Jahvé est le Dieu d’Israël et Israël est le peuple de Jahvé ? Israël, en
tant que peuple de Dieu, appartient à Dieu et seulement à Dieu (cf. Ex 19,5; Dt 26,18).
C’est un peuple saint pour le Seigneur son Dieu (cf. Dt 7,6), dans le sens spécifique de
l’élection divine (cf. Dt 7,7-8).
Par conséquent, l’élément formel d’Israël, en tant que peuple de Dieu, est
l’alliance (berit), dans laquelle Dieu s’engage lui-même, comme dans la création, lue
maintenant à la lumière de la libération et dans le contexte de la Parole (cf. Gn 1).
Dieu, dans l’alliance, devient le principe unificateur du peuple.
4
HACKMANN, Geraldo. A amada Igreja de Jesus Cristo: manual de eclesiologia como comunhão
orgânica (L’Eglise aimée de Jesus Christ: manuel d’eclesiologie comme communion organique). Porto
Alegre: EDIPUCRS, 2003, p. 156.
22
Il s’agit d’une alliance exprimée dans la fidélité de l’amour divin. Désormais, le
peuple d’Israël est invité à répondre à cet amour et à cette fidélité, en vivant
uniquement pour Dieu.
Toutefois, cette vocation de peuple élu n’est pas un motif de glorification, car
elle n’est pas exclusive, mais fait d’Israël un signe pour tous les peuples.
Cette alliance de Dieu avec son peuple “peut être décrite en terme de hesed,
qui exprime la fidélité de l’amour divin. C’est pourquoi, Dieu est le Père d’Israël (cf. Dt
32,6; Os 11,1-3), qui est son fils (Os 11,1), son premier né (cf. Ex 4,22), promesses de sa
récolte (cf. Dt 1,31; Jr 2,3)”.
Appelé à être fidèle à l’alliance, le peuple d’Israël est marqué par des infidélités
constantes. Devant celles-ci, Dieu promet une alliance nouvelle, définitive et
universelle (cf. Jr 31,31; Ez 37,26; Is 53,10ss).
Le Concile Vatican I déclare que le Christ a décidé d’édifier la sainte Eglise, en
affirmant que l’Eglise a été instituée directement par le Christ lui-même, véritable et
historique, pendant qu’il vivait parmi nous.
Commencent alors à apparaitre des expressions pour désigner la relation entre
le Christ et l’Eglise : instituer, fonder, édifier.
Et nombreux sont les principaux actes fondateurs de Jésus : la vocation et la
mission des douze, le primat de Pierre, la transmission du triple pouvoir du Christ aux
apôtres et à l’Eucharistie.
Aux numéros 2-5 de Lumen Gentium sont employés pour la première et unique
fois les termes “fondation” et “fondateur”.
En ce sens, le Concile Vatican II proclame, dans Lumen Gentium (nº 9), que
“Tout cela, donc, est arrivé pour préparer et préfigurer cette alliance nouvelle et
parfaite qui s’établirait en Christ, et pour transmettre une révélation plus complète à
travers le propre Verbe de Dieu fait chair”.
23
Alors, la relation du Christ avec le Peuple de Dieu est essentielle pour la
constitution du nouveau Peuple de Dieu, car si en Christ se réalisent la Loi et les
prophéties, l’Israël de Dieu est constitué par tous ceux qui sont en lui une nouvelle
création (cf. Ga 6,6; 1Cor 10,18; Rm 9,6) ; être descendance d’Abraham est à présent
soumis à l’appartenance au Christ (cf. Ga 3,29) ; l’Eglise chrétienne est vue comme le
peuple au sein duquel Dieu habite (cf. 2Cor 6,16 & Ez 37,27).
Pour réfléchir :
1) Comment comprendre le Peuple de Dieu dans l’Ancien Testament ?
2) Quelles prémices de l’Eglise sont contenues dans l’Ancien Testament ?
3) Comment comprenons-nous le rôle d’Abraham et de Moïse vis à vis du peuple
d’Israël ?
4) Voyez au nº 6, dans Lumen Gentium, les différentes images de l’Eglise à partir
de l’Ancien Testament.
24
TABLE 3 — LE PEUPLE DE DIEU DANS LE NOUVEAU TESTAMENT
Tous les aspects de l’Ancien Testament ne proposent pas une égale validité
pour le chrétien. L’Ancien Testament doit être interprété à la lumière de sa plus grande
instance, Jésus Christ. La projection historique et prophétique du peuple d’Israël dans
l’Ancien Testament est une étape annonciatrice du chemin qui conduit à la pleine
révélation divine en Christ.
D’un autre côté, le Nouveau Testament est le témoignage de foi que les
promesses faites par Dieu à Israël sont accomplies avec la venue du Messie (cf., p. ex.,
Mt 1,23 Lc 3.4-6; Ac 2,16-21; Rm 15,9-12).
C’est pourquoi, certaines instructions absolument valides pour le peuple juif
cessent d’être en vigueur pour le nouveau peuple de Dieu, qu’est l’Eglise (cf. Ac 15; Ga
3,23-29; Col 2,16-17; Hb 7,11; Hb 10,18), et certains aspects de la loi de Moïse, du
culte de l’Ancien Testament et de la doctrine sur le destin de l’homme – considéré
d’un point de vue personnel et communautaire – doivent être interprétés à la lumière
de l’évangile de Jésus-Christ, le Fils de Dieu.
La nouvelle alliance, instituée par Jésus Christ, dont nait le nouveau peuple de
Dieu, contient trois éléments essentiels et indissociables :
L’enracinement de l’Eglise dans l’Ancien Testament ;
Sa nouveauté radicale en Jésus Christ ; et
Son ouverture à toutes les personnes, aussi bien juives que païennes.
Ainsi, le Peuple de Dieu ne se résume pas uniquement à Israël, mais est ouvert
à tous les peuples (Ep 2,14), puisque Jésus est mort “non seulement pour la nation,
mais pour rassembler dans l’unité tous les fils de Dieu dispersés” (Jn 11,52).
Donc, Le peuple saint “l’Israël de Dieu” (Ga 6,16), est à présent constitué de
personnes de “toutes les tribus, peuples, nations et langues” (Ap 5,9), dont Israël,
puisque “Dieu n’a pas renvoyé son peuple, qu’il a choisi depuis le début” (Rm 11,2).
A la fin des temps, un seul peuple servira Dieu (Ap 21,3). Le nouveau Peuple de
Dieu ne fait plus référence à une race (l’ethnie juive), mais à une option pour le Christ
par la foi, qui conduit à recevoir le baptême, ce qui correspond au contenu de la réalité
nommée “Eglise”.
25
En effet, “l’Eglise se réalise maintenant, dans une optique spirituelle, en ne
s’affirmant pas face aux autres peuples, mais uniquement à ces individus ou
collectivités qui ne veulent, expressément, aucune relation de salut avec Jésus-Christ”.
L’Eglise primitive se met à indiquer avec les expressions ekklesía (langue
grecque) et ecclesia (langue latine), le nouveau Peuple de Dieu, c’est à dire, l’”Eglise”,
qui est la mémoire de cette assemblée de l’ancien Israël. Paul parle de “ekklesía de
Dieu” pour nommer la communauté convoquée par Dieu (cf. 1Th 2,14; 2Th 1,4; 1Cor
1,1; 10,32).
En général, dans le Nouveau Testament, ce terme est assez fréquent : dans les
Evangiles, il n’apparait qu’en Matthieu (16,18; 18,17), mais dans les Actes des Apôtres
il apparait 23 fois, et en Paul 61 fois.
Les textes du Nouveau Testament révèlent des traits fondamentaux et
constants, mais aussi une multiplicité de situations de relecture et d’interprétation de
l’Ancien Testament. L’Eglise est née de la Pâque : ce Dieu qui a ressuscité Jésus réunit,
à travers l’Esprit-Saint, les dispersés, les vaincus et les perdants.
L’approche canonique de la fondation de l’Eglise se trouve dans le concept “jus
divinum”, qui signifie que l’Eglise est liée en permanence à l’Evangile qui lui a été
confié de manière inaliénable.
Bien que le thème de la fondation de l’Eglise ait causé, hier et aujourd’hui, de
nombreuses controverses, la recherche actuelle dit que l’on ne peut parler d’Eglise
qu’après la glorification de Jésus et de la Pentecôte. Cependant, il est à souligner que
la manifestation de l’Eglise après Pâques est en continuité avec Jésus et ses œuvres et
ses paroles.
On parle aussi d’une ecclésiologie implicite, dans laquelle Dieu porte plus moins
le Règne initié par Jésus et qui demeure fidèle à ce commencement quand il le confie,
après Pâques, à une Eglise, liée de même à ce commencement. Christ serait compris
comme sauveur d’Israël, non comme le fondateur, qui a réuni le véritable Israël :
l’Eglise.
Le Concile Vatican II évoque le peuple réuni dans l’unité du Père, du Fils et du
Saint-Esprit (LG, 2-5). Et le mystère de sa fondation est lié aux actes fondateurs, c’est à
dire, une fondation durant l’activité de Jésus ; des vestiges, donc, avant Pâques.
26
Ainsi, la fondation de l’Eglise doit être comprise comme un processus
historique, comme le devenir de l’Eglise à l’intérieur de l’histoire de la Révélation. Il
faut affirmer, donc, que Jésus a voulu fonder l’Eglise à partir de l’ecclésiologie
implicite.
Par conséquent, la relation de Jésus avec l’Eglise peut être ainsi éclairée :
a) Son institution par Jésus : liée aux questions sur la personne et la
conscience de Jésus, ecclésiologie implicite et procédurale ;
b) Le signe extérieur : analogie au Verbe Incarné ;
c) L’effet intérieur de la grâce : Jésus-Christ comme fondement de l’Eglise.
Dans les Evangiles apparaissent deux fois une mention à l’Eglise : Mt 18, 17 et
Mt 16, 18. La première fait référence à l’Eglise locale, au sujet de la correction
fraternelle. La seconde se rappelle de ce que dit Jésus sur l’Eglise au sens large : sur
cette pierre j’édifierai mon Eglise. En Ep 5, 25 apparait aussi la mention à l’Eglise à
partir de l’amour du Christ pour elle.
L’Eglise e été définie au cours de son histoire par divers termes : les disciples,
les saints, les chrétiens et, enfin, l’Eglise. Le modèle de cette communauté qui naissait
est en Ac 2, 42: prière, fraction du pain, enseignement des apôtres et communion des
biens.
Les communautés chrétiennes, dans la mesure où elles ont compris Jésus, ont
proclamé sa Parole, annoncé son Règne et établi Jésus comme médiateur du projet de
salut. Ces communautés sont devenues aussi toujours plus missionnaires et se sont
ouvertes aux peuples voisins, appelés païens. Saint Paul, par exemple, insistait sur le
triptyque : Peuple de Dieu ; Corps du Christ ; et Temple de l’Esprit Saint.
Le côté important de l’ecclésiologie qui apparait dans le Nouveau Testament
est la capacité de rassemblement pour la communion, autrement dit, une ecclésiologie
de la communion, avec la mission de réaliser le Règne de Dieu dans le monde. Ces
groupes d’Eglises domiciliaires se sont senties appelées à la mission de semer des
graines, ou des signes de ce Règne de Dieu.
Comme chaque communauté accentuait des aspects qui lui paraissaient plus
importants, il y avait, depuis le début, quelques risques de déviance. Par exemple,
l’isolement des services pastoraux pouvait conduire à un conservatisme très rigide ; les
faits marquants des Actes et des Lettres aux Colossiens et aux Ephésiens permettaient
27
d’exalter le triomphalisme de l’Eglise ; l’évangile de Jean, l’individualisme gnostique ;
Matthieu, une préoccupation très juridique ; et les communautés de Corinthe, des
abus charismatiques.
Cependant, l’ensemble des textes du Nouveau Testament a permis que se
développe une image unitaire de l’Eglise, spécialement autour de quelques points de
base :5
La foi fut la conséquence de la vie communautaire ; c’est dans la vie
communautaire que les personnes ont senti l’interpellation du Dieu
Trinitaire ;
La compréhension de l’unité de l’Eglise, comme étant Peuple de Dieu, a
dépendu du baptême et non du statut ou d’autres grandeurs, secrets ou
accès spéciaux ;
Il y avait une distribution de fonctions et de services, selon les charismes
pour le succès de la communauté : elles n’étaient contrôlées ni par des
groupes hiérarchiques ni par des anarchies charismatiques ;
Les communautés se sont incarnées dans les environnements locaux et
dans les différentes cultures, où elles se sont établies et interprétées
comme pèlerins, car elles se sentaient responsables des actions pour que le
Règne puisse se développer dans ces environnements ;
L’Eglise était pensée autour de Jésus, vu comme la tête de la communauté ;
La perception que les communautés avaient d’elles même était que, à la
suite du Christ, elles devaient être pauvres, humbles et assumer la croix de
la vie, et que l’Esprit de Dieu les ferait grandir ;
L’Eglise ne se pensait pas comme étant le Règne, mais elle se sentait obligée
de le rendre possible ;
Il était porté une grande attention aux pauvres, aux oubliés et aux
opprimés, afin qu’ils puisent recevoir un bon accueil et se sentent membres
de l’Eglise.
Pour les premières communautés, l’Eglise se voyait comme le “Peuple de Dieu
dans la nouvelle alliance”.
5
Voir sur http://padrejoaoinacio.blogspot.com.br/2013/10/eclesiologia.html. Recherché en mars 2015.
28
Ayant comme condition la relation de Jésus avec l’Eglise de tous, il sera possible
de voir l’Eglise apostolique comme norme et fondement de l’Eglise de tous les temps
en raison du caractère définitif de la révélation de Jésus-Christ.
Le lieu du développement de l’Eglise est l’évènement de la Pentecôte, tout
comme la fonction des apôtres, Pierre et Paul (porteurs du développement et de la
formation de l’Eglise). Mais ce ne sera que dans la patristique que le thème de la
fondation de l’Eglise ouvrira des questionnements théologiques.
Nous appelons “Pères de l’Eglise” (Patristique) ces grands hommes d’Eglise,
autour des siècles II à VII, qui furent en Orient et en Occident comme des “Pères” de
l’Eglise, dans le sens où ils forgèrent les concepts de notre foi, ils affrontèrent
beaucoup d’hérésies et, d’une certaine manière, furent responsables de ce que nous
appelons aujourd’hui la Tradition de l’Eglise ; sans aucun doute, ils sont sa source la
plus riche. Le Cardinal Henri de Lubac dit une fois :
“Toutes les fois qu’en Occident a éclot quelque rénovation, aussi bien dans le domaine
de la pensée que dans le domaine de la vie – toutes deux sont toujours liées l’une à
l’autre -, une telle rénovation est apparue sous le signe des Pères”.
29
A mesure qu’il conquiert de nouveaux membres, le christianisme apparait
comme une nouvelle religion et ses membres sont expulsés des synagogues. La
mission est un marqueur. Et l’Eglise prend forme, surtout avec les lettres pauliniennes
qui manifestent le début d’une certaine institutionnalisation qui construit la
communauté, stabilise et protège définitivement la communauté.
On passe, petit à petit, d’un apostolat missionnaire à un épiscopat local. Le
dernier écrit du Nouveau Testament (2P) clôt l’époque apostolique de l’Eglise
primitive.
Jusqu’au IVème siècle, le terme “peuple” est employé pour l’Eglise par les Pères
apostoliques, bien que cela ne constitue pas une thématique proprement dite, étant
donné que l’orientation de l’ecclésiologie, à cette époque, est la dimension
christologique. C’est pourquoi la notion de peuple ne nourrissait pas sa réflexion. On
passe du concept historique de peuple vers une conception théologico-salvifique ;
ainsi, les justes de l’Ancien Testament sont vus comme des préchrétiens, qui se
sauvèrent grâce à leur foi et non par Israël, selon Origène, Athanase et Augustin.
À partir d’Augustin, le concept juridico-romain de populus se substitue au
concept historico-salvifique de Peuple de Dieu : l’Eglise est l’Eglise de tous les peuples
appartenant à l’Empire Romain. Ainsi, dès le IVème siècle, le concept de Peuple de
Dieu représente toujours plus les laïcs face aux évêques.
Au Vème siècle il n’y a plus le souci de lier la communauté chrétienne avec le
peuple élu de l’Ancien Testament. Sa place est occupée, progressivement, par le
concept augustinien de congregatio fidelium.
C’est seulement au XIXème siècle, avec l’idée du Corps Mystique du Christ,
développée par les écoles théologiques de Tubinga et de Rome, que commence à
réapparaitre l’idée de l’Eglise comme Peuple de Dieu. Il faut ajouter à cela l’idée du
sacerdoce universel des baptisés, lequel a mené à la résolution de l’image d’une Eglise
cléricale.
Les théologiens mettent de nouveau en relief le lien entre le Peuple de Dieu du
Nouveau Testament et de l’Ancien Testament.
Petit à petit s’affirme une nouvelle compréhension de la dimension historique
du Peuple de Dieu et se développent les bases pour un concept historico-salvifique de
30
Peuple de Dieu, qui sera décisif pour Lumen Gentium, dans lequel apparaitra une
dimension ecclésiale historico-salvifique.
31
Place méritée dans Lumen Gentium il y a les religieux. Ils sont pour certains
appelés fidèles de Dieu, comme le dit la Constitution (LG, 43), afin de jouir de ce don
particulier dans la vie de l’Eglise, en cherchant chacun à sa manière à être utile à sa
mission salvifique.
Le Concile Vatican I, à son tour, va définir le pouvoir et la nature du primat
romain comme pouvoir plein et suprême de juridiction sur l’Eglise universelle et son
magistère infaillible quand il parle comme pasteur universel “ex cátedra”, en se
référant à la foi et aux meurs.
Le Concile Vatican II répète les affirmations du Concile précédent en lien avec le
ministère de Pierre, en maintenant l’importance de la relation significative entre le
collège épiscopal et son chef.
Pour réfléchir
1) Comment comprendre le Peuple de Dieu dans le Nouveau Testament ?
2) Quelle est l’importance de la patristique pour l’ecclésiologie ?
3) Comment valorisons-nous les sacrements du Baptême et de l’Eucharistie dans
notre cheminement dans l’Eglise pour la construction du Règne de Dieu ?
4) Ce qui signifie “l’Eglise simultanément visible et spirituelle ” ? (voir nº 8 dans
Lumen Gentium)
5) Croyez-vous que tous les hommes sont appelés au salut, ou bien uniquement
les fidèles catholiques ; pourquoi cet appel au salut est-il le fruit de la grâce de
Dieu ?
32
TABLE 4 – L’EGLISE ET LES CONCILES
6
TRENTIN, G. Struttura e funzioni della coscienza nella teologia morale. Sito WEB: Credere oggi. Ano
2004, p. 64.
7
TRENTIN, G., op cit., p.72.
8
SANTOS, M.A. (org). Concílio Vaticano II – 40 anos de Lumen Gentium. Porto Alegre, Edipucrs, 2005, p.
13.
33
Tout cela constitue un terrain fertile pour l’exploration de contradictions, de
controverses, malentendus, disputes.
Notre Eglise n’est pas sortie intacte de cette réalité bien humaine. Les premiers
chrétiens ne savaient pas ce qui se produisait, ils ne savaient pas comment se
comporter, et encore moins que faire.
A l’époque des premiers évangélistes existaient déjà des compréhensions
différentes du christianisme. A l’époque des Actes des Apôtres apparait déjà la
nécessité d’apprendre à atténuer et à coexister avec les controverses, qui prenaient
corps chaque fois un peu plus. De telles controverses font apparaitre la nécessité d’un
premier concile.
Le Concile de Jérusalem (Ac 15,1-35) couronne le récit de Luc, inscrit dans le
livre des Actes des Apôtres. Il décrit le moment où Paul et Barnabé auraient officialisé
leur mission parmi les païens. Pour autant, il créé une narration autour de divers
voyages missionnaires de Paul.
Le conflit que de telles missions auraient suscité dans l’Eglise naissante a
provoqué la nécessité de concilier les deux courants alors identifiés comme paulinien
et pétrinien.
34
Un tel problème fit que Paul et Barnabé consultent l’Eglise-mère de Jérusalem,
où vivaient encore des apôtres, avec des anciens ou des prêtres, parmi eux Jacques,
qui semble avoir eu une fonction importante dans cette Eglise (Ac 15, 2.6.13).
De ce conflit surgit la nécessité d’organiser la conférence de Jérusalem pour
trancher les problèmes apparus lors de la mission parmi les païens. Cette conférence
devait déterminer un accord entre Antioche et Jérusalem en ce qui concerne les
mœurs, les traditions et les lois qui créaient le conflit entre les juifs et les païens
hellénistes.
Ce qui paraissait être clair pour Paul était que Dieu les accueillerait tous : juifs
et païens. Mais, comme un tel fait créait des conflits et des discordes, Paul revint à
Jérusalem pour, en assemblée, prendre une position unique quant à l’Eglise.
Par la force avec laquelle surgit le conflit, on peut imaginer que le travail de
Paul et Barnabé fut couronné de succès. Ils devaient être nombreux les païens qui se
convertissaient. L’évènement devait être bien visible. C’est pourquoi était justifiées
l’union et la réaction des judéo-chrétiens qui n’était prêts à abandonner pas même
une virgule de la Loi et de la tradition sacrée d’Israël (Ac 15,1-2).
Il est connu de celui qui étudie un peu l’histoire biblique que le peuple d’Israël a
un long, douloureux et victorieux cheminement de fidélité à la Loi. Ce qui ne doit pas
nous étonner dans cette situation de réaction à la rupture que la nouvelle mission
provoquait.
Paul et Barnabé acceptaient la conversion sans que les païens ne passent par la
loi juive, qui nécessitait obligatoirement la circoncision. Pour les juifs n’existait aucun
rite qui puisse se substituer à la circoncision. Dès lors, les païens, pour embrasser
l’Evangile, devaient passer par la circoncision. “En mentionnant la circoncision,
l’observance de la loi est supposée être une conséquence indissociable”. Autrement
dit, pour suivre l’Evangile, il fallait d’abord devenir juif.
Paul, libre des contraintes légalistes, insistait sur le fait que la Loi avait été
dépassée par la grâce de Dieu et par la Foi. Selon Paul, sans mépriser l’Ancien
Testament, le Christ aurait apporté une nouvelle logique du salut (Ep 2,15).
D’où l’importance du chemin de retour de Paul et Barnabé d’Antioche à
Jérusalem. Ainsi ils apportaient la preuve qu’ils reconnaissaient l’Eglise d’Antioche et
étaient disposés à dialoguer.
35
Une autre question qui affleurait était de manger ensemble, de participer à la
même eucharistie. A Antioche apparurent les communautés mixtes constituées de juifs
et de païens. Cette initiative, bien acceptée à Antioche, sonnait tellement absurde
pour les chrétiens de Jérusalem, au point de ne pouvoir résister à la création de
disputes (Ac 15,1-2).
De ce que l’on en comprend, si ce n’était l’intervention et la fermeté de Paul, la
communauté d’Antioche serait restée divisée entre ceux qui acceptaient la Loi et s’y
adaptaient, et ceux qui seraient considérés hors de la Loi par les mœurs et la tradition
qui régnaient à Jérusalem. L’approbation de ce que juifs et païens puissent participer
de la même communauté de table (Ac 15,27) fut de grande importance pour le
processus d’acceptation et d’inclusion des païens dans les communautés chrétiennes.
36
a) La déclaration de Pierre (15,7-11)
Comme nous l’avons vu, l’Eglise eut besoin de se réunir pour formuler une
solution officielle au problème entre ceux proches des juifs et ceux qui se
convertissaient au paganisme.
Selon Luc, Pierre est celui qui montre le chemin pour une solution qui satisfasse
les opposants des deux thèses. Pierre attribue à Dieu l’ordre d’accueillir les païens dans
l’Eglise.
b) L’avis de Jacques (15,13-21)
L’auteur des Actes des Apôtres ne transcrit pas les mots de Paul et Barnabé,
mais il dit qu’ils expliquent à l’assemblée réunie le résultat de la mission que Dieu
menait à travers eux (Ac 15,4). L’auteur continue en soulignant que c’est Dieu qui fait
les miracles à travers eux.
Jacques était encore assez attaché au régime juif. Cela, sans aucun doute, lui
conférait une place privilégiée parmi les judéo-chrétiens les plus conservateurs. C’est
sans doute pour cette raison que Luc mentionne l’avis de Jacques pour inscrire que
même les plus légalistes approuvaient la mission parmi les païens et leur inclusion.
Jacques, le défenseur de la doctrine de l’Eglise de Jérusalem, accepte les arguments de
Pierre et ajoute qu’il ne faut pas “importuner les païens qui se convertissent à Dieu”
(Ac 15,19).
c) La délibération de l’Assemblée
L’Eglise de Jérusalem s’adresse aux communautés d’Antioche, de Syrie et de
Cilicie (15,23). Les pro-juifs présents dans l’assemblée n’ont apparemment pas eu
beaucoup de succès. On ne sait même pas s’ils ont réussi à voter, parce que le texte dit
que la décision s’est faite d’un commun accord.
Dans le récit de Lucas, Barnabé et Paul sont les gagnants. L’assemblée
l’emporte sur les lois juives. Avec eux partent en mission deux compagnons de plus de
l’Eglise de Jérusalem.
La décision du “concile” se veut une décision juridique. Elle est d’abord
attribuée à l’inspiration de l’Esprit Saint. En plaçant la puissance de la décision sous le
pouvoir de l’Esprit Saint, elle acquiert un sens et une importance surnaturels.
37
d) La remise du Décret à Antioche (Ac 15,22-33)
Cette rencontre semble avoir été un des marqueurs de la fin des tensions entre
les deux centres de l’Eglise primitive. La lecture et la remise de la lettre par Judas et
Silas, les représentants de Jérusalem, est le sceau de la communion entre les deux
Eglise pour n’en être plus qu’une. La lettre scelle et donne toute liberté à la mission de
Paul et Barnabé, qui n’était jusque-là pas approuvée.
Il est évident que les pro-juifs les plus radicaux ont dû importuner encore un
temps Paul et Barnabé, mais ils ont à présent un soutien ecclésiastique et légal.
38
Les saints du XVIème siècle avaient pour programme :
“...ne pas critiquer ou outrager, s’en arranger soi-même ; ne pas changer les structures
de l’Eglise établies par le Christ, mais réformer les hommes détenteurs des charges et
des fonctions ; comme le mal était déjà dans la mondanisation du clergé, on parlait,
avant tout, de la réforme du clergé”.
Selon le théologien Egídio de Viterbo, “ce sont les hommes qui doivent être
transformés par la religion, et non la religion par les hommes”.
Ainsi, notons un parallèle entre le XVIème et les XI-XIIIème siècles : au Moyen
Age les forces rénovatrices de l’Eglise ne sont pas parties directement de la Papauté,
mais de cercles n’appartenant pas à la hiérarchie (Cluny, Cisterciens, les ordres
Mendiants) ; au XVIème siècle aussi, l’impulsion rénovatrice est partie, avant tout, des
communautés consacrées à l’ascèse et à la mystique (Carmélites, Jésuites, Théatins,
Capucins, Barnabites, Angéliques, Ursulines, Somasques...), qui avec humilité ont
adhéré de manière inconditionnelle à la hiérarchie et à la Papauté. Ce n’est que
progressivement qu’ils rentrèrent dans la rénovation active du XVIème siècle, touchés
comme ils l’étaient par l’esprit rénovateur et mondain.
Jusqu’en 1530, environ, Rome vivait dans une quasi ignorance des maux qui
affectaient l’Eglise. Léon X, par exemple, considérait la tempête luthérienne comme
une querelle entre moines, desquelles querelles de moines, il était habitué d’en voir
des morceaux dans son théâtre de Rome.
C’est seulement à partir de Paul V (1555-1559), le plus sévère des sévères, que
la Papauté devint le siège de la rénovation de l’Eglise. Celle-ci avait pour Magna Carta
(Grande Charte) les documents du Concile de Trente et comme force d’action la
Compagnie de Jésus.
39
Pour autant, il s’est montré plus conscient de la nécessité de la Réforme que
ses prédécesseurs. Ainsi, il favorisa les ordres religieux nouveaux des Théatins,
Capucins, Barnabites, des Somasques, des Ursulines, et en 1540 il approuva la
Compagnie de Jésus. Il appela au collège des cardinaux des hommes doctes et dignes,
et nomma une commission de neuf membres, qui élabora pour le Pape un rapport sur
les maux de l’Eglise et des propositions pour y remédier.
La conscience de Rome était aussi éveillée sur un autre sujet. Les idées
révolutionnaires “transalpines” s’introduisaient en Italie, particulièrement à Naples ;
les œuvres de Luther, Zvínglio, Calvin et Erasme se diffusaient parmi le clergé et le
peuple, aboutissant à l’apostasie du Père Général Ochino, des Capucins, en 1542 ; il se
développait des personnes ambiguës qui, sans rompre avec l’Eglise, se complaisaient
dans les œuvres des Réformateurs protestants.
Pour contenir de telles évolutions, le pape Paul III réorganisa l’Inquisition,
inspiré par le Cardinal Carafa (futur Paul IV) et par Saint Ignace de Loyola : une
commission de six Cardinaux reçut le pouvoir de nommer des prêtres “inquisiteurs” là
où ils le jugeraient nécessaire. C’est ainsi que fut créée la Congrégation du Saint Office,
qui, après le Concile Vatican II, reçut le nom de Congrégation pour le Doctrine de le
Foi, étant donné qu’elle n’a rien de commun avec l’Inquisition. Celle-ci s’opposa
énergiquement aux innovateurs, réussissant à faire disparaitre d’Italie les nouvelles
idées.
On parlait beaucoup (comme d’ailleurs auparavant) de la nécessité de
convoquer un Concile Œcuménique. Il y avait, malgré tout, des obstacles à la
réalisation de cet objectif. En effet, demeurait chez beaucoup d’hommes de l’époque
(dont le Pape Clément VII, 1522-1534) la crainte du Conciliarisme. De plus, l’Empereur
Charles V voulait que le Concile se tienne en territoire allemand, pour faciliter la
participation des luthériens, que Charles voulait ramener dans l’unité de l’Eglise. Le
Pape, malgré tout, préférait une ville d’Italie. En somme, l’Empereur, la Papauté, les
protestants, l’Espagne et la France avaient quelque chose à dire sur la convocation du
Concile, mais en termes divergents.
A la suite de ces convocations avortées, et après dix ans de tentatives, Paul III
fixa l’ouverture du Concile à Trente (territoire allemand) en mars 1545 ; mais ce n’est
qu’en décembre de cette année que s’ouvrit la grande assemblée dans la cathédrale
40
de Trente. Le Concile dura dix-huit ans, s’interrompant longuement par deux fois ;
durant celui-ci moururent quatre papes.
Les trois phases du Concile sont : 1545-1547; 1551-1552; 1562-1563. Le groupe
prépondérant fut celui des espagnols, dotés d’un profond sens ecclésiastique, sans
lesquels les décrets dogmatiques du Concile n’auraient pu être élaborés.
41
Bien que la doctrine ecclésiologique du Concile de Trente soit peu étudiée, elle
influença quatre siècles d’Ecclésiologie.
Nous devons nous rappeler que sa motivation fut d’apporter une réponse à la
Théologie des réformateurs, et ainsi stopper l’influence de la Réforme. De cette
manière, elle cherche à éclaircir les points doctrinaux qui étaient les plus attaqués,
sans prétendre à une proposition doctrinale systématique et large.
La Réforme mit en cause tout ce que l’Eglise médiévale avait construit et tenta
revenir à l’Eglise ancienne, en ce qui concerne la doctrine et la discipline. Cette
tentative fut influencée par la pensée de l’époque, où dominaient l’individualisme, le
subjectivisme, la critique et l’opposition à l’Eglise à cause de sa vie interne, la
décadence de la papauté, le conciliarisme et l’anti-romanisme germanique. Y
contribuèrent aussi la décadence de la Théologie scolastique et autres tendances
intellectualisantes
La Réforme proposée par Luther touchait de manière importante à certains
éléments de l’Eglise existante. Luther portait un concept ecclésiologique
caractéristique :
a) Sola Scriptura: autosuffisance de le Bible dans la connaissance théologique.
L’origine et la nature de l’Eglise sont attribuées à la Parole.
b) Sola Fides: l’Eglise est la communion des saints, dans laquelle est soulignée
son incorporation en elle par la foi.
c) Sola Gratia: “ma grâce te suffit” (2Cor 12,9). Il n’est pas nécessité de
médiateurs entre les hommes et la grâce de Dieu.
Il en résulte que le catéchisme tridentin possède une ecclésiologie implicite,
dans laquelle des thèmes sont traités comme : Ecriture et Tradition, structures
hiérarchiques de l’Eglise, Sacrements.
Pour autant, les conséquences de la Réforme ont touché l’Eglise :
Rupture de l’unité monolithique du Moyen Age, dans le champ religieux,
culturel et de la connaissance ;
Diminution du prestige religieux du Pape ;
Désir de réforme de l’Eglise, avec un retour aux sources du christianisme
contre le formalisme et le légalisme.
42
Dans ce cadre il est intéressant de connaitre certains des éléments de
l’Ecclésiologie qui ressortent du Concile de Trente :
a) L’Ecriture et la Tradition sont les principes et les critères de la connaissance
théologique dans l’Eglise. Il y a un entrelacs entre Evangile et Eglise, et le
rôle de celle-ci est d’en garantir la conservation.
b) L’existence de la hiérarchie dans l’Eglise et l’affirmation que tous les fidèles
ne sont pas des prêtres ministériaux (ordonnés).
c) Il y eut un éclaircissement sur l’origine et le pouvoir des évêques devant la
diversité des positions arrivées à Trente.
d) Le primat du Pape est juridique et non pas honorifique.
Pour résumer, le Concile de Trente dura plus que tous les autres et fut celui qui
rencontra le plus de difficultés pour se réaliser. Mais aucun n’exerça d’influence aussi
profonde et durable sur la foi et la discipline de l’Eglise.
Il est vrai que l’unité de le foi ne fut pas établie, mais la doctrine catholique fut
éclaircie et consolidée sur tous les points menacés. Le programme de réforme
tridentine fut la base de la rénovation du clergé et du peuple catholique, bien que
l’exécution de ces décrets ait été, parfois, lent et controversée. Le Concile
communiqua une nouvelle union aux catholiques ébranlés par les évènements portés
par la Réforme Protestante.
Le Concile de Trente fut aussi le plus papal de tous les Conciles avant Vatican I
(1870) ; il prépara ainsi la voie pour la définition du primat du Pontife Romain,
définition qui sera prématuré au XVIème siècle, puisque les tendances à former des
Eglises nationales étaient encore fortes. En outre, Le Concile a confié au Pape le
souhait qu’il promeuve la publication d’un nouveau catéchisme, d’un nouveau Missel
et d’un nouveau livre de Liturgie des Heures (ce qui, de fait, fut mis à exécution par les
successeurs de Pie IV).
En un mot, on peut dire que le Concile de Trente fut l’auto affirmation de
l’Eglise comme société universelle de salut contre les diverses formes d’individualisme
et de subjectivisme qui se faisaient fortement sentir au seuil de l’Age Moderne.
Il est vrai que, de nos jours, le Concile de Trente n’est pas toujours applaudi. On
lui oppose le Concile Vatican II, comme s’il y avait antithèse entre l’un et l’autre. Or,
Vatican II fait fréquemment référence au Tridentin et s’appuie sur lui, portant à notre
43
temps les vérités que le Concile de Trente a défini selon le langage et les exigences du
XVIème siècle.
44
doctrine : ils craignaient les réactions des Gouvernements et les scissions entre les
catholiques eux-mêmes.
En vérité, la définition de ce dogme pouvait paraitre osée à une époque où se
respirait le libéralisme.
45
la qualité de Maitre de toute l’Eglise, sur les questions de Foi et de Morale, bénéficie
de l’assistance spéciale de l’Esprit Saint ; elles sont, donc, infaillibles et irréformables
en elles-mêmes, sans avoir besoin de l’approbation de l’Eglise.
A l’issue de cette session mémorable, le Concile était encore au début de ses
activités. Pour autant, le Concile dut être interrompu subitement, car la guerre franco-
allemande éclata, qui obligea beaucoup de prélats à rejoindre leur patrie. Par
conséquent, le Pape suspendit le Concile, qui devait se réunir en des temps plus
appropriés, mais qui en fait ne fut jamais réouvert.
L’importance du Concile Vatican I est énorme pour l’Eglise. La définition de
l’infaillibilité papale était la conclusion logique des prémisses contenues dans l’Ecriture
elle-même (Mt 16,16-19; Lc 22,31; Jn 21, 15-17) et développées à travers les temps ;
principalement à l’occasion des litiges qui affectaient l’Eglise, émergeait dans la
conscience des chrétiens la prééminence du magistère des successeurs de Pierre.
Dans une époque de décroissance, la foi s’affirmait de manière courageuse.
L’Eglise elle-même apparaissait comme quelque chose de transcendant ou comme un
Sacrement, que l’homme reçoit de Dieu, à la différence d’autres sociétés et
institutions.
La centralisation, expliquée par le Concile Vatican I eut des expressions toujours
plus perceptibles durant les pontificats suivants. Il fallait qu’advienne le Concile
Vatican II (1962-65) pour finir l’œuvre que le précédent avait laissée inachevée.
Vatican I n’a pu aborder que la fonction du Pontife Romain, dans l’espace étroit
de sa durée ; Vatican II a aussi abordé le rôle des évêques et des prêtres dans l’Eglise,
mettant en exergue le concept de collégialité qui, sans éteindre le primat de Pierre,
enrichit la structure de l’Eglise.
46
4.4.1- De Ecclesia
En ce qui concerne la conception de l’Eglise les écoles théologiques se
confrontaient : avec le projet préparatoire, d’inspiration romaine, circulaient aussi le
projet belge, élaboré par des théologiens de l’ancienne université catholique de
Louvain, le français, l’allemand (caractérisé par une intense inspiration biblique et avec
l’appui de son épiscopat), et le chilien, qui révéla au concile la fraicheur et
l’engagement d’une Eglise latino-américaine.
Dans les réécritures du texte, les diverses visions de l’Eglise surgissent et sont
mises en discussion et systématisées dans la Constitution Dogmatique Lumen Gentium,
qui devient le centre du Concile Vatican II.
Il est important d’affirmer la valeur fondamentale de Lumen Gentium, en tant
qu’elle suppose une prise de conscience de l’Eglise sur elle-même. En elle se lient les
nombreux textes du Concile, et elle se positionne comme la clé herméneutique pour
interpréter correctement les autres documents.
Lumen Gentium expose la doctrine sur le mystère de l’Eglise, Peuple de Dieu, à
laquelle sont incorporés tous les fidèles par la Baptême. Delà découle l’unité radicale
de tous les fidèles qui intègrent l’Eglise et le caractère universel de l’appel à la sainteté.
Elle déclare aussi que les évêques sont les successeurs des Apôtres et que, au-
delà de présider leurs Eglises particulières, ils forment un “collège” ou un “corps”
épiscopal dont chaque Evêque est membre. Ce collège est présidé par le Pape et ne
peut agir en marge de celui-ci.
Ce fut à ce moment-là, pendant que le document sur l’Eglise était révisé, qu’il y
eut une première pause conciliaire, période pendant laquelle le pape Jean XXIII meure
et que le pape Paul VI est élu.
Dans la deuxième période conciliaire la Constitution Lumen Gentium attire,
encore une fois, une attention particulière. Ce document était le fil conducteur et le
centre des décisions conciliaires. Il aura officialisé la nature et l’identité de l’Eglise qui
nécessitait de tels éclaircissements depuis le XIIIème siècle.
Ce fut en décembre 1963, à la fin de cette deuxième période du Concile, que
furent adoptés les documents sur le Liturgie (Sacrosanctum Concilium) et le document
sur les Moyens de Communication Sociale (Inter Mirifica).
47
Après encore un temps de pause, en septembre 1964, Paul VI inaugure une
nouvelle période de travaux du Concile avec une concélébration dans laquelle étaient
exprimées les nouvelles formes liturgiques.
Alors, fut reprise l’étude sur l’Eglise, à présent à partir d’un texte reformulé, qui
au-delà des quatre chapitres originaux qui s’occupaient du mystère de l’Eglise, Peuple
de Dieu, structure hiérarchique et laïcs, portait à la discussion la vocation universelle à
la sainteté, les religieux, l’horizon eschatologique de l’Eglise et la vierge Marie.
Le 21 novembre 1964, après de nombreuses discussions sur l’Eglise et ses
organisations et relations, la Constitution Dogmatique sur l’Eglise Lumem Gentium fut
adoptée. L’adoption de cette Constitution sera la preuve de la bonne acceptation et de
l’adhésion des prêtres à la rénovation ecclésiologique. Ce document sera présenté
dans le prochain chapitre.
Dans ce dossier il faut souligner l’importance de la Constitution Dogmatique Dei
Verbum, document sous forme de bulle pontificale qui est l’un des principaux
documents du Concile Vatican II.
Il est appelé "constitution dogmatique" afin d’inclure et de s’occuper de la
“matière de foi”. De fait, son contenu aborde la question délicate et complexe de la
relation entre les Saintes Ecritures et la Tradition. La sainte Tradition, donc, et la Sainte
Ecriture sont intimement unies et étroitement liées entre elles. Avec pour effet, se
déclinant de la même source divine, ne font plus qu’un et tendent à la même fin.
La Sainte Ecriture est la parole de Dieu puisqu’elle fut écrite par l’inspiration de
l’Esprit Saint ; la Tradition sacrée, à son tour, transmet intégralement aux successeurs
des Apôtres la parole de Dieu confiée par le Christ Seigneur et par l’Esprit de vérité, ils
la conservent, l’exposent et la diffusent fidèlement dans leur prédication ; il en résulte
que l’Eglise ne tire pas seulement de la Sainte Ecriture sa certitude au sujet de toutes
choses révélées. C’est pourquoi les deux doivent être reçues et vénérées avec un
même esprit de piété et de respect. En ce sens, elle explique et fonde la nouvelle
approche sur comment interpréter l’herméneutique.
Ainsi, sans laisser de côté la dimension juridique et institutionnelle, l’Eglise fait
un pas vers la libération de la rigidité monarchique de celui qui détient le pouvoir. Elle
commence à reconnaitre la fonction et l’importance de ses membres et non seulement
48
de son magistère. “Elle commence à apprendre à reconnaitre les signaux des temps
comme lieux théologiques”.
Le 14 septembre 1965 commença la quatrième et dernière étape du Concile
Vatican II. Cette étape s’étend jusqu’au 8 décembre de la même année. Dans cette
période, divers autres documents, postérieurs à Lumen Gentium, furent discutés,
reformulés et adoptés.
La nouvelle conception de l’Eglise officialisée par cette Constitution s’ouvrait à
un nouveau modèle d’unité et d’intégration avec d’autres traditions chrétiennes.
L’Eglise qui commençait à de dévêtir de son habit triomphaliste, fait un pas vers une
nouvelle conception ecclésiastique, grâce aussi au dépassement de sa conception
d’être l’unique, l’incomparable et celle qui serait au-dessus de toutes les églises.
Ce fut dans cette période que le pape et le patriarcat œcuménique révoquèrent
l’excommunication réciproque de 1054.
Le 07 décembre 1965 sont conclus les travaux du Concile Vatican II avec le vote
et l’approbation de la Constitution Pastorale sur l’Eglise dans le monde d’aujourd’hui
(Gaudium et Spes). Cette Constitution attirait l’attention sur les contradictions delà
modernité. Une note éclairait le sens à attribuer au qualificatif “pastoral”, en affirmant
que : “prenant pour base les principes doctrinaux, la constitution prétend exposer
l’attitude de l’Eglise avec le monde et les hommes d’aujourd’hui”.
Le Concile Vatican II a mis en adéquation le message chrétien traditionnel avec
les temps nouveaux. “Ce fut le concile de la conscience de soi, de la clarification, de la
compréhension et du dialogue”. “Ce fut le plus grand par le nombre de prêtres du
monde entier ; le plus riche par les thèmes abordés et celui qui a répondu aux
nécessités de toute la famille humaine”. “Le magistère est descendu pour dialoguer, de
manière accessible et caritative”.
L’ecclésiologie qui jusque-là servait de mécanisme de défense et de
justification, fait à présent un pas vers la mission et le dialogue. L’ecclésiologie
classique serait née juridique, pour défendre le pouvoir ecclésiastique. Ce serait le
“péché Originel” de la théologie. Puis, la théologie s’est développée dans la période
post-tridentine comme apologétique antiprotestante et antimoderne, pour défendre
la vera ecclesia. Pour dépasser cette fois cet aspect juridique, le Concile, dans Lumen
Gentium, remet l’Eglise à sa juste “place”.
49
En résumé, les pères conciliaires furent convoqués pour ce Concile avec la
mission de réaliser une réforme de l’Eglise (aggiornamento). Il leur fallait définir une
nouvelle identité pour l’Eglise, en la situant historiquement. Il fallait que l’Eglise se
définisse elle-même.
Les buts principaux étaient : le développement de la foi catholique, la
rénovation de la vie chrétienne des fidèles, l’adaptation de la discipline ecclésiastique
aux exigences de l’époque présente.
L’élément phare de Vatican II serait son orientation pastorale, qui visait à
accorder la vie ecclésiastique aux nécessités contemporaines.
Le Concile Vatican II est une sorte de reconnaissance et d’officialisation de
toutes les attentes de rénovation qui étaient déjà mures au sein du Peuple de Dieu.
Les pères conciliaires reprirent des paroles fondamentales du Nouveau
Testament et de la Patristique pour redéfinir de manière adéquate l’essence de l’Eglise
dans les temps nouveaux.
Dans ce sens, la grande Constitution Dogmatique sur le Révélation Divine a
posé les bases théologiques : l’Eglise est le peuple de Dieu et celui-ci est constitué par
l’accueil de la Parole de Dieu, Parole créatrice, qui détermine l’Histoire du Salut, Parole
qui s’incarne en Jésus Christ. A partir de la Parole de Dieu, le Concile définit l’Eglise
comme Peuple de Dieu.
En considérant l’Eglise comme Peuple de Dieu, nous chercherions une Eglise de
fondement biblique. Une Eglise qui suivrait les pas pauliniens vus dans les Actes des
Apôtres. Une Eglise qui s’ouvrirait à tous, accueillante à tous et se faisant peuple.
L’Eglise Peuple de Dieu acquière des contours universels et humains. Elle gagne
en vie et chaleur humaine qui dépassent les murs et la rigidité d’une
institutionnalisation paralysée et froide. A présent tous les hommes sont appelés au
salut par le grâce de Dieu (LG, 13).
Pour réfléchir :
1) Comment comprendre l’importance des Conciles pour le développement de
l’ecclésiologie ?
2) Savez-vous ce que signifie Concile ? Savez-vous pourquoi chacun des Conciles
fut convoqué ?
50
3) Comment comprendre l’importance du comportement de Paul, Pierre et
Jacques pour l’origine de l’Eglise lors de la Conférence de Jérusalem ?
4) Comprenons-nous et participons-nous à l’Eglise qui est Peuple de Dieu ?
5) Connaissons-nous suffisamment sur l’importance et les résultats du Concile
Vatican II pour notre Eglise ?
6) Cherchez dans quelques documents au sujet du Concile Vatican II 50 ans après.
De cette manière, voyez tout ce qui a été légué par ce Concile à l’Eglise.
51
TABLE 5 - LUMEN GENTIUM
52
plutôt en accord avec la posture juridiciste. Cette Constitution représentait un pas net
en avant, en contradiction avec les décisions du Concile Vatican I ou avec certaines
évolutions des décennies suivantes.
Lumen Gentium actualise la conscience de l’Eglise en ce qui concerne son
identité et sa nature de mystère. Elle ne voulut rien condamner ni définir de dogme. Sa
valeur réside dans la vision organique du mystère du salut et du mystère de l’histoire
humaine, en cherchant à mettre au centre ce qui lui est essentiel et immuable, en
montrant clairement les dimensions intérieures du mystère de l’Eglise.
En vérité, elle accueille et systématise beaucoup d’aspects de l’itinéraire
rénovateur déjà en vigueur. Elle accepte le christocentrisme qui depuis Vatican I se
diffusait. Le Christ, le seul médiateur, constitue et soutient sans faiblir ici sur terre Sa
sainte Eglise, communauté de foi, espérance et charité, comme organisme visible par
lequel il diffuse à tous la vérité et la grâce.
Mais, la société pourvue d’organes hiérarchiques, et le corps mystique du
Christ, l’assemblée visible et la communauté spirituelle, l’Eglise terrestre et l’Eglise
enrichie de biens célestes, ne doivent pas être considérés comme deux choses, mais
forment une seule réalité complexe dans laquelle de fond l’élément humain et divin. Et
ainsi, grâce à une analogie, elle est comparée au mystère du Verbe incarné (LG 8).
9
HACKMANN, Geraldo Luiz Borges. A Igreja, mistério de comunhão e as exigências da evangelização no
mundo (L’Eglise, mystère de communion et les exigences d’ évangélisation du monde). In
Teocomunicação 147, v. 35, 2005, p. 90.
53
La réforme rachète la fidélité à Jésus Christ qui a toujours renvoyé vers une
ouverture vers l’humanité. Ouverture qui implique communion. La communion
humanise la relation Eglise Peuple de Dieu. C’est le dépassement de l’ecclésiologie
juridique en vigueur jusque-là. La conception même de l’animation de l’Esprit Saint est
une conception de communion. L’Esprit Saint est ce qui unifie la communauté
trinitaire. Celui qui anime la première communauté dont il est un composant.
Le Nouveau Testament affirme que c’est l’Esprit Saint qui constitue la
communauté ecclésiale du salut (Lc 24,44-53; Ac 2,1-13). En effet l’Esprit et l’Epouse
disent au Seigneur Jésus : “Viens” (Ap 22,17). De cette façon l’Eglise apparait comme
“le peuple réuni dans l’unité du Père et du Fils et de l’Esprit Saint” (LG, 4).
L’Eglise, constituée par l’Esprit Saint, unifie les croyants pour former un seul
corps. Elle sanctifie et agit en permanence au profit de l’Eglise. Cela signifie que les
structures comme les lois juridiques doivent être animées par l’Esprit Saint. L’Esprit
Saint n’est pas seulement un assistant. Il est cofondateur de l’Eglise. “En effet, l’Eglise
est l’œuvre de l’Esprit Saint”. L’Eglise s’ouvre au monde, au dialogue. L’Eglise est le lieu
où le Christ Rédempteur agit dans l’Esprit Saint.
Le christocentrisme sacramentalise l’Eglise. Etant le cadre où se réalise te
devient efficace l’œuvre du Christ dans l’Esprit Saint, l’Eglise est le sacrement
primordial de la grâce de Dieu pour les hommes. Sa dimension sacramentelle est une
conséquence de sa dimension christocentrique.
Les Sacrements et l’Eglise de fusionnent. L’un compose l’autre et avec l’autre.
“Où il y a des sacrements, il y a l’Eglise, et où il n’y a pas d’Eglise, il n’y a pas de
sacrement. L’Eglise est le sacrement universel du salut : l’Eglise est en Christ tout
comme le Sacrement” (LG, 1). “Le Christ a envoyé à ses disciples son Esprit vivifiant et
par Lui il constitue son corps, qu’est l’Eglise” (LG, 48).
Le sacrement serait le mystère salvifique de Dieu présent dans l’Eglise. A
travers les sacrements Dieu se manifeste en sanctifiant et en sauvant l’être humain. Il
serait la forme par laquelle Dieu s’approche des personnes. Le rapprochement des
personnes crée une ambiance d’union. L’esprit d’union renvoie à la projection et à
l’ouverture vers le futur. Pour ce que la communion nous renvoie. Le chrétien qui est
réellement dans l’Eglise et se sent Eglise est appelé à construire avec sa vie l’Eglise
dans l’histoire. L’Eglise construite dans l’histoire chemine vers le futur.
54
5.2- Le Peuple de Dieu
Le Concile Vatican II a ouvert les portes pour un avènement créatif de nouvelles
ecclésiologies. Une diversité de conceptions et de compréhensions de l’Eglise
émergeaient.
En Amérique Latine nait un modèle d’Eglise beaucoup plus libératrice. Les
pauvres deviennent le véritable lieu théologique. Au lieu d’une Eglise pour les pauvres,
est encouragée l’idée de la nécessité d’une Eglise des pauvres. La conception du péché
moraliste et de la répression individuelle s’élargit vers la compréhension du péché qui
engendre des carences sociales et économiques.
Au lieu que chacun sauve son âme, commence un chemin vers le salut et la
libération des carences vitales, comme la libération de la misère, de la faim et de tant
d’injustices. Une pratique qui a comme but de transformer la société et atteindre la
libération personnelle, communautaire et structurelle.
Dans la période pré-Vatican, la conception de l’Eglise comme corps mystique du
Christ était très forte. Comme nous l’avons déjà vu, Vatican II change l’objet principal à
partir de la valorisation de l’image biblique de l’Eglise Peuple de Dieu. Ainsi, la
conception de Peuple de Dieu entre dans le contexte ecclésiologique, comme un
élément nouveau qui entre en concurrence avec la conception jusqu’ici unique et forte
de Corps Mystique du Christ.
L’Eglise, qui est née pour être missionnaire et serviteur, à partir de la
conception de Peuple de Dieu, se défait du caractère hiérarchique et apparait comme
Eglise pèlerin qui fait et se fait dans l’histoire du peuple. “C’est ainsi qu’ils
redécouvrirent la continuité de l’Eglise d’Israël”. Eglise qui continue l’histoire du
peuple d’Abraham. Peuple qui était depuis toujours celui de Dieu.
La Constitution rappelle avec clarté que l’Eglise n’est pas le but de la foi. Elle est
pèlerine dans la recherche du Règne de Dieu. Elle est la communauté de ceux qui
croient en Jésus Christ. Tous les hommes sont appelés à cette union avec le Christ, qui
est la lumière du monde, duquel nous procédons, pour Qui nous vivons et vers Qui
nous tendons (LG, 3).
La foi doit être fondée en Christ lumière du monde, et non dans l’Eglise, qui
comme la lune, ne fait rien d’autre que réfléchir la lumière qu’est le Christ. Jésus lui-
55
même commença l’Eglise en priant la bonne nouvelle, le Règne de Dieu et non pas lui-
même ni l’institution (LG, 5).
C’est pourquoi l’Eglise est un moyen de servir le Christ. Un chemin pour suivre
ses pas. C’est elle qui doit être au service du monde et non le monde à son service. Le
Christ a consumé l’œuvre de rédemption dans la pauvreté et dans la persécution ;
ainsi, l’Eglise est appelée à suivre le même chemin, afin de communiquer aux hommes
les fruits du salut (LG, 8).
La fonction de l’Eglise est d’annoncer et de témoigner de la divinité et de
l’humanité du Christ, de son courage et de son détachement de la gloire terrestre.
C’est un ferment pour la libération en agissant auprès de ceux qui le plus manquent de
vie et de dignité. C’est être cette mère qui aime plus le fils malade en recherche se
soin, l’affamé en recherche d’aliment, le nu en recherche de vêtement. C’est le vrai
signe ou sacrement du Christ qui alimente et illumine le chemin de ceux qui ont le plus
besoin de grandir en dignité.
Que peut-on dire de ce qu’est l’Eglise Peuple de Dieu ? La conception de
Peuple de Dieu porte avec elle toute possibilité de contradictions propres à chaque
peuple. Cela, dès les premiers temps, entraine au dénuement de ce vêtement sournois
qui donnait l’image d’une Eglise parfaite, qui en réaction à la réalité de la réforme
protestante en expansion et au monde moderne en développement avait besoin de
maintenir, par la force, le dépôt et la diffusion de la perfection. C’est là que
l’apologétique devint nécessaire. Une apologétique qui défendait une Eglise parfaite et
supérieure à toutes les autres organisations sociales.
Pour faire ce pas de dépassement et de rapprochement de ces distances en
cours, le Concile commence par un changement de conception du monde. Ce monde
jusqu’ici unique, lieu de perdition, devient maintenant un lieu de communication de
soi avec Dieu. Maintenant Dieu parle à l’humanité, au monde. L’Eglise a alors aussi
besoin de relation avec le monde pour entendre les desseins de Dieu.
Sa relation au monde fait à présent partie de la définition réalisation et mission
de l’Eglise.
On peut faire une distinction entre l’ecclésiologie juridique pré Concile Vatican
II et l’ecclésiologie communion post Vatican II. Cette ecclésiologie donne l’importance
à la dimension communautaire de l’Eglise. L’ecclésiologie Peuple de Dieu met en
56
évidence l’image biblique de Peuple de Dieu (1P 1,13-25). Elle montre de nouvelles
relations dans l’Eglise ; des relations d’égalité. Elle présente un caractère historique
d’un Dieu en pèlerinage dans le monde. Elle met en évidence les ministères. Le Peuple
de Dieu est un peuple ministériel. La mission devient aussi un caractère de promotion
humaine, en plus de l’évangélisation. Le modèle ecclésiologique postconciliaire se
propose de suivre l’exemple des premières communautés. Elle cherche à être une
Eglise serviteur.
Cet exemple d’ecclésiologie suit l’exemple des premières communautés, où
règne un fort esprit communautaire. Elle se caractérise par le fait d’annoncer le Règne
de Dieu par le travail dans le monde, spécialement vers les plus pauvres, où il y a un
fort sentiment de fraternité mutuelle, qui jaillit entre ceux qui s’engagent dans ce
service, afin de maintenir vivante l’espérance du Règne de Dieu.
La foi ne peut oublier la dimension pratique en faveur des plus nécessiteux. Elle
réussit à faire une lecture plus établie des carences qui affectent l’être humain et se
laisse toucher par l’appel miséricordieux et caritatif qui a marqué les prières décades
du christianisme. Elle encourage une conscience sur la nécessité de contribuer à la
transformation sociale. Une transformation qui conduit à l’engagement bien connu en
Amérique Latine avec la Théologie de la Libération, les Communautés Ecclésiales de
Base (CEB) et tant d’autres mouvements qui sont apparus. Tout cela s’est concrétisé
grâce à la stimulation, au soutien théorique, au soutien méthodologique et à la
protection de l’Eglise.
L’Eglise doit, ainsi, se caractériser plus par le service aux frères. Dans cette
posture de service tout le baptême est appelé à participer du sacerdoce commun du
Christ, qui est un sacerdoce ministériel. Les ministères sont divisés en hiérarques et
non-hiérarques. La plus grande partie de l’Eglise fait partie des ministères non-
hiérarques. Ce qui n’empêche pas la nécessité de ministres hiérarques.
57
Si l’Eglise comme un tout est constituée par l’appel de Dieu à travers le Christ,
en elle, par l’action de l’Esprit Saint, Dieu appelle les personnes à différents ministères
au service de son peuple. L’Eglise est un ministère d’action de Dieu dans le monde. Sa
mission est celle de servir le monde et non de chercher un monde à son service.
Le Concile Vatican II affirme que le Baptême fait du baptisé un participant du
sacerdoce saint. L’Esprit Saint est le grand animateur de l’Eglise. A travers le baptême
est reçu l’Esprit Saint.
La hiérarchie de l’Eglise ne détient ni ne domestique l’Esprit Saint, qui agit chez
tout fidèle. Ce n’est pas seulement à travers les sacrements et les ministères que
l’Esprit Saint sanctifie et conduit le Peuple de Dieu et l’orne de vertus, mais, en
répartissant ses dons “à chacun comme il lui plait” (1Cor 12,11).
L’Esprit Saint distribue aux fidèles de toute classe des grâces spéciales. Par elles,
il les rend aptes et prêts à prendre sur soi les divers travaux et offices, qui contribuent
à la rénovation et à la plus grande croissance de l’Eglise, selon ces paroles : “A chacun
est donnée la manifestation de l’Esprit Saint pour le bien commun” (1Cor 12,7).
Cependant, les pères conciliaires se réservent l’autorité ecclésiastique, le
pouvoir d’affirmer ou de confirmer l’authenticité de l’action de l’Esprit Saint pour les
charges ordonnées. Dans l’équilibre entre la structure hiérarchique et le structure
charismatique, la parole décisive est celle de la hiérarchie, qui garde la liberté et le
pouvoir d’interpréter et purifier l’action de l’Esprit Saint. “Le sagesse sur son
authenticité et son exercice ordonné revient à ceux qui gouvernent l’Eglise” (LG, 12).
Le sacerdoce commun des fidèles et le sacerdoce ministériel ou hiérarchique
s’ordonnent l’un l’autre, bien qu’ils se différencient dans l’essence et non seulement
dans le degré. En effet les deux participent, chacun à sa manière, de l’unique
sacerdoce du Christ. Le sacerdoce ministériel, par le pouvoir sacré qu’il détient, forme
et régit le peuple sacerdotal, réalise le sacrifice eucharistique en la personne du Christ
et l’offre à Dieu au nom de tout le peuple (LG, 10).
Le document dit clairement que tout baptisé est appelé à la sainteté. Que le
critère est celui de la charité. On comprend que les laïcs sont appelés toujours plus à
une participation active. “Les laïcs agissant saintement de toutes parts consacrent à
Dieu le monde lui-même” (LG, 34). Le document fait un pas important dans la
promotion des laïcs, en élevant chaque mortel au grade de Peuple de Dieu.
58
Mais, selon le document, est souligné le fait que tout être humain reçoit la
vocation de se réaliser dans la vie. Nous sommes appelés à être chrétiens dans la vie.
Il y a une variété de fonctions et de ministères spécifiques dans la vocation chrétienne.
Des conditions déterminées sont exigées pour chaque vocation. Ces conditions
doivent être “accompagnées d’une inclination surnaturelle”. Pour vivre et s’épanouir,
l’Eglise a besoin de ministères. Cette nécessité fait que celle-ci réponde à partir d’une
constitution hiérarchique.
Pour paître et développer toujours le peuple de Dieu, le Christ Seigneur a
institué dans son Eglise une variété de ministères qui tendent au bien de tout le Corps.
En effet les ministres qui sont revêtus du pouvoir sacré servent leurs frères pour que
tous ceux qui forment le Peuple de Dieu et, donc, jouissent de la véritable dignité
chrétienne, en aspirant libre et de manière ordonnée à la même fin, atteignent le salut
(LG, 18).
En se référant aux ministères, Lumen Gentium définit les évêques comme “les
successeurs des apôtres, lesquels auraient reçu de Jésus des pouvoirs pour gouverner
l’Eglise”. La consécration épiscopale confère aux évêques “la plénitude du sacrement
de l’Ordre et le munus (charge ; ndlt) de sanctifier, enseigner et régir” (LG, 21).
L’évêque est le point d’unité dans son diocèse, mais il a besoin de la collaboration des
autres ministères.
Les prêtres sont les auxiliaires les plus directs de l’évêque. Lumen Gentium
définit le sacerdoce ministériel comme : “consacrés pour prêcher l’Evangile, nourrir les
fidèles et célébrer le culte divin” (LG, 28).
L’autre ministère ordonné est le diaconat. Un ordre qui accompagne l’Eglise
depuis les premières communautés (Ac 6,1-6; 8,5-13). Selon Lumen Gentium, les
diacres font partie de la hiérarchie à un degré inférieur : “les mains leur sont imposées
non pour le sacerdoce, mais pour le ministère” (LG, 29).
Avec cette nouvelle conscience, dans le discours final du Concile, le pape Paul
VI a exprimé la nouvelle relation de l’Eglise avec le monde en tant que relation de
service. L’Eglise est “servante de l’humanité”.
L’Eglise, à travers sa hiérarchie, comprend la nécessité de retrouver, dans un
monde chaque fois plus exigeant et complexe, la dimension prophétique de défense
de la vie humaine. C’est pourquoi, la nouvelle Eglise Peuple de Dieu essaie aussi, même
59
timidement, de remodeler la hiérarchie de l’Eglise. Le concile essaie de choisir et de
rendre visible dans la structure de Lumen Gentium l’ordre du pouvoir ecclésiastique. Il
s’occupe d’abord des baptisés, des frères, du Peuple de Dieu, pour ensuite s’occuper
de la hiérarchie. La catégorie Peuple de Dieu devient la clé de lecture du concile.
60
recouvre le particulier, mais bien comme une construction qui part du particulier, du
Peuple de Dieu, pour la communion universelle.
Comme toute l’expérience spirituelle, celle de Jean XXIII était germe vigoureux
de rénovation, de Aggiornamento de l’Eglsie, comme il le répétait toujours, mais qui
aurait besoin de temps pour exprimer toute sa fraicheur, comme le prouve et
l’enseigne l’histoire de ces cinquante dernières années.
La Constitution Dogmatique Lumen Gentium, sur l’église, traitant du Peuple de
Dieu, entérine ce qui fut appelé l’ecclésiologie de communion, dans laquelle on cesse
de considérer le ministère comme constitutif de la communauté, pour le comprendre
comme une mission de service, en continuité avec l’Esprit de Jésus, qui est venu pour
servir, et non pour être servi.
Pour réfléchir :
1) Pourquoi la Constitution Dogmatique Lumen Gentium est-elle comprise
comme séparatrice des eaux quand on étudie et médite sur l’Ecclésiologie ?
2) Sommes-nous conscients qu’être baptisé rend chacun membre du Peuple
de Dieu, et de l’exigence de participer de l’évangélisation ?
3) Comment comprenez-vous la relation entre les Eglises locale et universelle?
Qu’est-il attendu de chaque évêque pour créer et maintenir cette relation ?
4) Que pouvons-nous faire pour que notre participation à la vie de l’Eglise soit
active, consciente et fructueuse, comme nous le demande Lumen Gentium?
5) Pourquoi la catégorie de laïc est-elle tellement soulignée dans
l’ecclésiologie Peuple de Dieu ?
6) Que comprenez-vous par ecclésiologie de communion ?
7) Le chapitre V de Lumen Gentium, traite de la vocation universelle à la
sainteté dans l’Eglise. Comprenez pourquoi le Père Caffarel insistait sur la
vocation à la sainteté des couples des Equipes Notre Dame. Il ne voulait “ni
plus ni moins”. Juste des couples saints.
61
TABLE 6 – LES IMAGES DE L’EGLISE
Dire que l’Eglise participe du mystère de ce qui est divin et que par conséquent
l’homme est incapable de le comprendre totalement montre juste la limitation de
notre intelligence et non l’impossibilité de connaitre la réalité Eglise. Tous les éléments
terrestres de l’Eglise nous sont accessibles, mais sa relation parfaite avec les éléments
célestes, comme son dynamisme salvifique nous est donnée par la foi. Là réside
précisément son “mystère”.
Parmi les nombreuses images utilisées – bergerie, troupeau, vigne, champ,
édification, épouse, etc. –, les plus élaborées sont celles en lien avec chacune des
Personnes de la Trinité : Peuple de Dieu, Corps Mystique du Christ et Temple de
l’Esprit Saint.
62
nouveau, d’aimer comme le Christ lui-même nous a aimé (Jn 13,34). Son but est le
Règne de Dieu sur terre, à être étendu de plus en plus jusqu’à ce qu’à la fin des temps
il soit accompli par Lui-même, quand apparait le Christ dans notre vie (Col 3,4) et la
créature elle-même sera libérée de la captivité de la corruption pour la glorieuse
liberté des enfants de Dieu” (Rm 8,21). (LG, 9)
63
6.2- Autres images de l’Eglise
Au-delà de ces trois manières de présenter l’Eglise, il en existe d’autres qui sont
caractéristiques de l’Eglise, sacrement et communion, complétées par les concepts
d’Eglise comme tradition vivante, société et institution.
64
En deuxième lieu, cette définition apparait dans un contexte eschatologique.
En effet, le Règne de Dieu se manifeste dans les mots, les œuvres, et surtout, dans la
présence personnelle du Christ. C’est pour cela que l’Eglise, étant “le Règne du Christ
déjà présent en mystère” (LG, 3), représente “le germe et le début de ce Règne sur la
terre” (LG, 5), et est “ce peuple messianique qui, bien qu’il n’embrasse pas tous les
hommes et qui parfois apparait comme des petits troupeaux, est pour tout le genre
humain un germe solide d’unité, d’espérance et de salut “ (LG, 9).
Ce caractère eschatologique est bien mis en exergue dans la Constitution sur
l’Eglise et le monde (cf. GS, 42-45) et, encore, clairement supposé dans une des
affirmations les plus emblématiques du Concile : “l’Eglise qui abrite en son sein les
pécheurs, sainte et en même temps en besoin de purification, s’applique en
permanence à la pénitence et à sa rénovation”.
Cette double perspective, christologique et eschatologique10, montre combien
le concept d’Eglise-sacrement ne survient pas de la théologie des sacrements, élaborée
au XIIème siècle et consacrée lors du Concile de Trente, avec la définition des sept
sacrements. La source de ce concept, utilisé ici par analogie, doit se chercher dans la
théologie patristique, pour laquelle le terme latin sacramentum traduisait le concept
biblique de mysterium qui, en accord avec ce qui est expliqué dans le Concile Vatican II
lui-même, n’est pas quelque chose d’inconnu et obscur, mais est dans la bible
équivalent à une réalité divine porteuse du salut, qui se révèle de manière visible.
Le Concile, en employant ce concept de sacrement, veut exprimer la double
dimension de l’Eglise, humaine et divine, visible et invisible, qui fait qu’elle soit, déjà en
10
Eschatologie (du grec ancien εσχατος, "dernier", plus le suffixe -logia) est une partie de la théologie qui
s’occupe des derniers évènements dans l’histoire du monde ou du destin final du genre humain,
communément appelé fin du monde. Il est interressant de comprendre que le catéchisme de l’Eglise
Catholique confère à l’Eglise un caractère eschatologique. L’Eglise apparait comme partie de ce
processus eschatologique qui chemine vers la maison du Père : “l’Eglise visible symbolise la maison
paternelle pour laquelle le peuple de Dieu est en chemin et dans laquelle le Père ‘sêchera toutes les
larmes de ses yeux’ (Apocalipse 21, 4). C’est pourquoi, l’Eglise est aussi la maison de tous les enfants de
Dieu, grandement ouverte et accueillante” (nº 1186). De cette manière, nous pouvons comprendre que
l’”eschatologie” n’est pas une doctrine théologique sur les choses ultimes, mais bien, une rflexion sur
l’éspérance chrétienne. Ainsi le contenu de base de toute l’eschatologie est l’éspérance. Nous avons
l’espérance que notre situation actuelle va s’améliorer, que les structures d’oppression n’existeront
plus, que le bien prévaudra tpoujours sur le mal. L’eschatologie nous anime pour rester solide dans
notre foi. Même devant tout le mal que nous voyons dans le monde, il reste l’invitation à toujours rester
solide dans l’éspérance de ce que le projet historique de Dieu triomphera de tout et de tous.
65
elle-même, et en vertu de la loi de l’incarnation par laquelle le visible est médiation de
l’invisible, “une réalité complexe”” (LG, 8).
66
6.2.3- L’Eglise comme TRADITION VIVANTE
Bien que dans les ecclésiologies récentes il ne soit pas commun de qualifier
l’Eglise avec ce concept, il ne serait sans doute pas osé de le faire, s’il l’on prend en
compte la perspective présente dans Dei Verbum, où se situe au début le
commandement du Christ à l’Eglise apostolique dans l’annonce de l’Evangile, étant
donné que “le Christ Seigneur, en qui se consume toute la révélation du Dieu
Souverain (cf. 2Cor 1,20; 3,16-4-6), ordonna aux Apôtres que l’Evangile, promis
auparavant par les Prophètes, complété par Lui et promulgué de Sa propre bouche,
qu’il soit prêché par eux à tous les hommes comme source de toute vérité salvifique et
de toute discipline de vie, en leur communicant des dons divins” (DV, 7).
C’est pourquoi, tout ce qui fut transmis par les Apôtres comprend toutes ces
choses qui contribuent à conduire saintement la vie et à faire croitre la foi du Peuple
de Dieu, et ainsi l’Eglise, dans sa doctrine, vie et culte, perpétue et transmet à toutes
les générations tout ce qu’elle est, tout ce qu’elle croit (DV, 8).
De cette manière s’exprime ce que nous pouvons appeler le principe
catholique de tradition, qui s’identifie à l’Eglise : il s’agit, en effet, de toute une
dynamique de doctrine, culte et vie, expression de la foi que l’Eglise elle-même croit.
La nature propre de la tradition vivante de l’Eglise consiste précisément dans sa
connaturalité avec la révélation, réalisée à travers des paroles et des gestes
intrinsèquement unis (cf. DV, 2).
La tradition vivante a en commun avec l’Ecriture de construire le principe de
continuité et d’identité entre l’Eglise apostolique et les générations postérieures
jusqu’à la fin des temps. Et non seulement sur le plan de la connaissance, mais aussi
sur le plan de l’expérience enracinée dans les apôtres, étant donné que, au-delà de la
doctrine, est également transmis le culte et la vie. “La tradition est l’expression de
l’Esprit Saint qui anime les communautés de fidèles ; elle court à travers les temps, vit
à chaque instant et prend corps continuellement. Cette force vitale, spirituelle, que
nous héritons de nos parents et qui se perpétue dans l’Eglise, est la tradition
vivante”.11
11
PIÉ-NINOT, Salvador. Introdução à Eclesiologia (Introduction à l’Eclesiologie). São Paulo: Loyola, 4ª
ed., 2008, p. 35.
67
6.2.4- L’Eglise comme SOCIETE
Souvent est rappelée la description de l’Eglise comme, surtout en LG 8,
“structure visible et sociale” (LG, 14), “groupe visible”, “société dotée d’organismes
hiérarchiques” (cf. LG, 14; 20; 23), “Eglise terrestre”, “établie et structurée dans ce
monde comme une société”.
Il s’agit de l’expression qui, à partir de Saint Robert Bellarmino, sera la plus
adaptée pour définir, à l’encontre des réformateurs, qu’il existe une seule Eglise et non
deux ; que celle-ci est “une unique société visible de croyants unis par une même foi,
par les mêmes sacrements et par la soumission à une même hiérarchie” (De Ecclesia,
III, 2).
Le Concile Vatican II unit toute cette conception comme la vision du Corps
Mystique, comme on peut voir dans les notes qui illustrent le LG 8, et aussi avec le
sacrement. Pour autant, Lumen Gentium ajoute que l’incorporation “pleine dans la
société de l’Eglise” “comme corps” ne suffit pas ; il faut qu’elle se donne aussi “avec le
cœur” (LG, 14b). C’est cette indication précieuse, reçue de Saint Augustin, qui révèle le
caractère analogique de l’expression “société” et, à son tour, met en cause une
apologétique ecclésiale classique basée sur une seule vision extérieure et sociétale.
68
l’Eglise à s’identifier au message originel de l’Evangile et, par conséquent, à
trouver sa véritable identité de communauté de Jésus Christ. A cette fin, Il
utilise les structures institutionnelles de l’Eglise.
Le deuxième aspect qui justifie l’institution Eglise est le fait d’être un signe de
la force intégratrice de l’Esprit. En effet, cet aspect d’intégration souligne que
l’Esprit incorpore chaque croyant et les différentes Eglises dans l’unité
originelle de l’Eglise universelle et le fait par l’intermédiaire des structures
institutionnalisées de l’Eglise elle-même. Il ne s’agit pas d’une intégration
uniformisée, mais diversifiée, à partir des divers charismes et ministères de
chaque croyant, qui rend possible un “système ouvert” à l’Esprit, raison ultime
d’unité de l’Eglise, à travers les multiples dons qu’il transmet.
Le troisième et dernier aspect souligne que l’institution est le signe de la force
libératrice de l’Esprit. En effet, elle est libératrice parce qu’elle dispense les
croyants de la nécessité et du devoir de chercher seuls leur propre salut. Ainsi,
la “large définition” que représente la tradition religieuse ecclésiale
institutionnalisée relativise le présent de la foi, dans la mesure où elle l’insère
dans la communauté historique de cette même foi et, donc, empêche que lui
soit attribuée une valeur absolue. C’est pourquoi, étant un sujet en elle, tout
croyant témoignera de son propre charisme en fonction de l’Eglise dans le
monde.
69
doit être vue comme un service (ministère) qui doit concourir au bien du Peuple de
Dieu (Rm 13,1-4; 1P 5,2-4).
La structure hiérarchique de l’Eglise est, de nos jours, plus complexe qu’à ses
origines ; cela est dû au fait que tout le peuple, à mesure qu’il se développe, doit
disposer de nouvelles structures et de nouveaux organismes qui répondent à ses
besoins. Il faut bien comprendre que la structure hiérarchique de l’Eglise n’est pas le
fruit d’une délégation démocratique, mais bien la continuité de la structure
apostolique déterminée par Jésus Christ. Nous ne pourrons la connaitre qu’en
convoquant les Saintes Ecritures et la Tradition.
En Eglise, le principe fondamental est d’être membre en elle par l’incorporation
au Christ, en étant part du Corps Mystique et en étant membre du Peuple de Dieu. Ce
n’est qu’après que nous pouvons parler de hiérarchie comme autorité posée par le
Christ face et au service de son Peuple.
Le Concile Vatican II a justement dédié le chapitre III de la Constitution Lumen
Gentium à la hiérarchie de l’Eglise : le Christ Seigneur, “pour paître et améliorer
toujours plus le Peuple de Dieu a institué en son Eglise une variété de ministères, qui
tendent au bien de tout le corps. En effet, les ministres qui sont revêtus du pouvoir
sacré, sont au service de leurs frères, afin que tous ceux qui appartiennent au Peuple
de Dieu et, donc, jouissent de la dignité chrétienne authentique, aspirent tous
ensemble, libres et de manière ordonnée, au même objectif et atteignent le salut” (LG,
18a).
Ce Sacrosaint Synode enseigne et déclare que “Jésus Christ, Pasteur éternel,
édifia la sainte Eglise, en envoyant les Apôtres de a même manière qu’il avait été
envoyé par le Père ( Jn 20,21). Et il voulut que les successeurs des Apôtres, que sont les
Evêques, soient pasteurs de leur Eglise jusqu’à la fin des temps. Et pour que l’épiscopat
soit un et indivisible, il mit Saint Pierre à la tête des Apôtres et établit en lui le
fondement et le principe perpétuellement visible de l’unité de la foi et de la
communion” (LG, 18b).
Ainsi, les évêques, par une succession qui se fait depuis le début, conservent la
succession de a première graine apostolique.
La hiérarchie, donc, est un pouvoir sacré, un pouvoir qui vient directement du
Christ ; ce n’est pas une délégation de la communauté. La communauté ne peut
70
l’augmenter ou la diminuer, comme il arrive dans les sociétés civiles démocratiques.
De plus, cette constitution hiérarchique ne s’oppose en rien à la responsabilité
commune de tous les baptisés. Tous sont responsables dans l’Eglise, si bien que cette
responsabilité varie selon la fonction que chacun assure au sein de celle-ci.
La responsabilité suprême au sein de l’Eglise est exercée par le Pape et par le
collège épiscopal, présidé par le Souverain Pontife. Cette responsabilité suprême fut
initialement concédée à Pierre, choisi par le Christ devant son Eglise comme pierre
angulaire, lui donnant les clés du Règne des cieux (Mt 16,18s) et en l’instituant pasteur
de tout le troupeau (Jn 21,15s). Par ailleurs, le Christ lui-même donna ce pouvoir à
tout le collège apostolique uni à sa tête (Mt 18,18; 28,16-20). Le collège ne peut jamais
fonctionner sans le Papa, mais bien en union avec lui, car la charge de fortifier la foi de
ses frères lui a été concédée (Lc 22,32).
L’autorité de la hiérarchie de l’Eglise est une autorité de service, à la
ressemblance du Christ qui “n’est pas venu pour être servi, mais pour servir et donner
la vie en rémission des péchés” (Mc 10,45; Jn 13,20; Mt 23,8-11).
C’est, donc, une autorité qui ne se régit pas par le style d’autorité de ce monde.
C’est une autorité qui procède de la mission de Jésus-Christ et de l’action permanente
de l’Esprit. C’est une autorité qui s’exerce dans la fraternité et au service des hommes.
C’est une autorité marquée de l’aspect transitoire de la condition de pèlerin de l’Eglise
et qui ne devra être exercée à son propre bénéfice ou en cherchant la gloire humaine,
ni même céder aux caprices du pouvoir, mais bien transmettre fidèlement la parole de
Dieu, réaliser la sanctification, prendre soin de l’unité, en corrigeant, exhortant et
gouvernant le peuple de Dieu.
Comme citoyens du Peuple de Dieu, les fidèles chrétiens sont enfants de Dieu
et ont une dignité toute spéciale ; en cela réside le “principe d’égalité essentielle” de
tous les membres de l’Eglise ce qui garantit la coopération et la coresponsabilité de
tous, chacun dans sa fonction et position avec en vue l’édification du Corps du Christ.
En même temps, ce principe d’égalité essentielle est immédiatement influencé
par le “principe de diversité fonctionnelle” ; également par l’institution divine, dans la
double typologie existant dans l’Eglise : les ministres consacrés ou les prêtres, qui
sont ceux qui ont reçu le sacrement de l’Ordre, et les laïcs.
71
Le sacerdoce commun est sacerdoce ministériel – comme il est observé, le
Sacrement de l’ordre est le séparateur des eaux de la dignité radicale commune aux
fidèles chrétiens. Ainsi, par la détermination de Jésus Christ, le Peuple de Dieu, peuple
éminemment sacerdotal (1P 2,9s), dédié au culte de leur Seigneur, est formé de deux
types de sacerdoces : commun et ministériel.
Le sacerdoce commun est la participation au sacerdoce du Christ transmis par
le Baptême, renforcé par la Confirmation, ayant son centre te racine dans l’Eucharistie.
Donc, ce sacerdoce est exercé “dans la réception des sacrements, dans la prière et
l’action de grâces, à travers le témoignage d’une vie sainte et dans une charité
opérante”. Par ailleurs, elle nous permet d’offrir des sacrifices spirituels pour
remercier Dieu, à travers Jésus Christ (1P 2,5), tout comme contribuer à la mission
salvatrice de l’Eglise.
Parallèlement, par le sacrement de l’Ordre, certains membres du Peuple de
Dieu, sur la base du sacerdoce commun, reçoivent le sacerdoce ministériel ou
hiérarchique, c’est à dire, une participation spéciale au sacerdoce du Christ, qui leur
confère le pouvoir sacré de l’ordre, pour offrir le Sacrifice, pardonner les péchés et
exercer officiellement l’office sacerdotal au nom de Jésus Christ en faveur des
hommes.
Nous pouvons conclure que le sacerdoce commun et ministériel “sont
essentiellement différents et non seulement en degré”, car qui reçoit le Sacrement de
l’Ordre, par le “caractère” affirmé, est mis en capacité d’agir au nom et avec l’autorité
du Christ, c’est à dire, “dans la personne du Christ” (“in persona Christi”), en pleine
identification sacramentelle avec Lui.
Le pouvoir sacré des ministres ordonnés se conforment à ces caractéristiques.
Ce pouvoir sacré transmis par le sacrement de l’Ordre ne touche par tout le monde de
la même manière, car il s’agit d’un sacrement qui se confère selon trois degrés
échelonnés et subordonnés : épiscopat (les évêques), le presbytère (les prêtres), et le
diaconat.
Ainsi, le Peuple de Dieu constitue une société hiérarchiquement structurée
spécialement pour le service – “les ministres qui possèdent le pouvoir sacré sont au
service de leurs frères, pour que tous ceux qui appartiennent au Peuple de Dieu
72
accèdent au salut”. C’est la raison pour laquelle la hiérarchie est appelée “ministère
ecclésial”, et ceux qui l’intègrent “ministres”, c’est à dire serviteurs.
Ce service rendu par la hiérarchie consiste essentiellement à paître – enseigner,
sanctifier et gouverner – les membres du Peuple de Dieu. Chacun des ministres
effectue son ministère ecclésial selon son degré dans l’Ordre.
Cette structure hiérarchique de l’Eglise fut établie et organisée sur terre par la
volonté de Jésus Christ. Parmi les passages de la Sainte Ecriture, déjà bien connus,
soulignons celle où Jésus confère la plénitude des pouvoirs au Collège des Apôtres (Mt
18,18; 28,18-20; Jn 20,21ss.). De plus, Jésus promit à Pierre les pouvoirs majeurs dans
l’Eglise (Mt 16,18-19) et, plus tard le fit pasteur de tout le troupeau (Jn 21,15-17) ;
ainsi, Pierre est la tête des Douze, celui qui assume le primat afin de prendre soin de
tous ses frères (Lc 22,32).
La conscience que les Apôtres avaient de ce qu’ils étaient participants au plein
pouvoir du Christ et de ce qu’ils agissaient conformément à sa volonté, relève d’une
importance particulière dans le fait qu’il y eut la préoccupation de transmission de ces
pouvoirs à leurs successeurs, et ainsi fut fait : les Apôtres s’occupèrent d’établir des
successeurs dans cette société constituée. Ainsi, ils n’eurent pas seulement des
auxiliaires du ministère, mais, pour que la mission qui leur avait été confiée continue
après leur mort, ils confièrent à leurs collaborateurs directs, comme un testament, la
charge de compléter et confirmer l’œuvre commencée par eux, en leur recommandant
qu’ils encadrent le troupeau sur lequel l’Esprit Saint les affectera pour paître l’Eglise de
Dieu.
73
par l’esprit évangélique, ils concourent à la sanctification du monde depuis l’intérieur,
comme ferment, et que de cette manière ils manifestent le Christ aux autres (ver LG,
30-38).
Comme on peut le voir, le Concile Vatican II décrit le laïc avec un langage
positif: le laïc est le croyant qui, parle Baptême, fut incorporé au Christ et fait partie du
Peuple de Dieu.
Il n’a pas reçu le Sacrement de l’Ordre ni n’appartient à l’état religieux, mais
pour autant, il participe de la fonction sacerdotale, prophétique et réelle du Christ à
leur manière et a comme particularité de l’exercer dans le monde, en cherchant le
Règne de Dieu ; il appartient donc au laïc d’illuminer et ordonner les sujets temporels
selon l’Esprit du Christ.
Dans ce contexte, nous pouvons conclure que les laïcs :
Sont appelés par Dieu à vivre dans le monde : le lieu que la providence
divine leur a destiné est le monde. Donc, être laïc n’est pas quelque chose
de générique, indéfini ou fortuit, mais être placé dans le monde comme
ferment, c’est à dire que le sort du monde ne lui est pas étranger ; sa
présence dans le monde n’est pas une simple présence physique, mais
vitale, d’engagement et d’insertion dans l’ordre temporel. Ils reçoivent dans
le monde la grâce de Dieu nécessaire pour donner un témoignage lucide du
Christ, sanctifier eux-mêmes, leurs frères et les occupations qu’ils exercent.
Ils doivent sanctifier le monde depuis l’intérieur : la recherche de la
sainteté personnelle oblige tout fidèle chrétien depuis le Baptême et, donc,
préalablement à la diversité des fonctions (être laïc, prêtre ou religieux). Le
monde est le lieu des laïcs, qu’ils doivent ordonner, structurer et conduire
jusqu’à Dieu et selon Dieu toute la création. Par conséquent, la mission des
laïcs peut se résumer à faire que le Règne de Dieu s’implante toujours plus
dans les réalités dites “profanes” ou “séculières”.
Pour gérer les sujets temporels : ceci est le large horizon que constitue le
moyen adéquat que doivent travailler les laïcs pour arriver à sanctifier le
monde depuis l’intérieur. Le champ propre de l’activité évangélisatrice est
le monde complexe de la politique, de la réalité sociale ; et également
d’autres réalités particulièrement ouvertes à l’évangélisation, comme
74
l’amour, la famille, l’éducation, le monde professionnel, la souffrance.
D’autant plus de laïcs il y aura, pénétrés de l’esprit évangélique,
responsables de ces réalités et en elles investies, d’autant plus ces réalités
se trouveront au service du Règne de Dieu, sans perdre ni rien sacrifier de
leur compétence humaine, mais en manifestant, malgré tout une dimension
transcendante.
Finalement, la gestion des sujets temporels implique que les laïcs aient en
plus haute considération la compétence professionnelle, le sens familial et
civique de leur conduite et toutes les vertus qui ont à voir avec les relations
sociales, comme l’honorabilité, l’esprit de justice, la sincérité, les bons
sentiments, la force d’âme, sans lesquelles il ne peut uy avoir de vie
chrétienne authentique.
12
Voir Cours d’Eclesiologie. Ecole “Mater Ecclesiae”. Dirigée par Père Estevão Bettencourt O. S. B. Rio de
Janeiro, decembre 1996. Voir aussi : Catechisme de l’Eglise Catholique, 946-959.
75
Cette communion avec les choses saintes font la communion des personnes
saintes, c’est à dire que es chrétiens pèlerins dans ce monde et ceux qui sont déjà
partis, qu’ils soient glorifiés dans le ciel, ou qu’ils soient encore dans l’attente appelée
“purgatoire”. Jusqu’à la Parousie du Christ, certains pélerinent sur la terre, d’autres,
passée cette vie, sont purifiés, d’autres, finalement, sont glorifiés et contemplent Dieu
Un et Trinitaire, tel qu’Il est.
Il arrive avec l’Eglise du Christ la même chose qu’à un “iceberg” ; qui ne regarde
que sa partie visible ne pourra certainement pas évaluer sa dimension réelle, son
ministère divin ni même sa réalité humaine.
Dans le Credo nous confessons qu’il existe dans l’Eglise une union intime entre
tous ses membres, où qu’ils soient : sur terre, au purgatoire ou dans le ciel.
Cette communion peut être décrite comme une espèce de courant intérieur de
grâce et de vie divine qui circule entre tous les membres de l’Eglise et qui les réunit
tous comme nous l’avons déjà vu.
Cette communion (grâce), ayant son origine dans Dieu le Père, nait des mérites
du Christ et est canalisée continuellement par l’Esprit Saint. Par conséquent, cette
vérité de foi constitue un rappel et aperçu du ministère de l’Eglise : “Qu’est l’Eglise si
ce n’est l’assemblée de tous les saints ? La communion des saint est précisément
l’Eglise”.
76
Plus que de triomphe des hommes, l’Eglise triomphante constitue la victoire de
Dieu, qui remplit d’amour infini, de sainteté aboutie et de béatitude éternelle ses
fidèles, parmi lesquels brille, avec une beauté singulière Marie la très Sainte.
77
du Père, du Fils et de l’Esprit Saint. Apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai
ordonné. Sachez que je suis avec vous chaque jour, jusqu’à la fin des temps” (Mt
28,19-20).
L’Eglise existe pour annoncer et enseigner, pour être témoin de la grâce,
réconcilier l’humanité avec le Père miséricordieux et perpétuer le sacrifice du Christ
dans la Sainte Messe, mémorial de sa mort et de sa glorieuse résurrection. L’origine de
la mission de l’Eglise est dans la mission du Fils et de l’Esprit Saint, envoyés au monde
par le Père.
A la Pentecôte commença la mission qui se poursuit jusqu’à aujourd’hui. Après
vingt siècles, il existe encore des peuples qui n’ont pas entendu l’appel de Jésus Christ.
Même dans nos villes il y a des personnes, des milieux et des cultures qui ne
connaissent pas la Bonne Nouvelle.
A travers l’action de l’Eglise, la Parole de Dieu se diffuse au monde. Le livre des
Actes des Apôtres raconte l’histoire des premières communautés et l’action des
Apôtres, essentiellement des apôtres Pierre et Paul. On y lit que la Parole croissait et
se multipliait. Il fallait noter, ainsi que croissaient et se multipliaient ceux qui
entendaient la Parole, l’accueillant et devenant disciples de Jésus, chrétiens.
Jésus est le missionnaire du Père. La mission qu’il confie à ses disciples est sa
même mission. C’est en lui, donc, que le disciple missionnaire trouve la source
permanente de son ardeur missionnaire et de son savoir prophétique pour annoncer
l’Evangile de la vie. La rencontre avec le Christ Vivant, missionnaire du Père, en tant
qu’expérience personnelle dans la communauté de foi, alimente le missionnaire et
ravive en permanence son ardeur.
C’est ce qui arriva avec la Samaritaine (cf. Jn 4,1-26) et avec les disciples (cf. Jn
1,19-51). L’Expérience de la rencontre avec le Christ change radicalement la vie,
comme ce qui arriva avec Zachée (cf. Lc 19,1-10) et Paul (cf. Ac 9,1-22). C’est une
expérience unique, très belle, qui doit être communiquée, partagée.
Dans l’Eucharistie, nous nous trouvons avec le Christ d’une manière très
spéciale. Si la mission n’est pas alimentée par l’Eucharistie, elle perd son identité. Elle
devient prosélytisme, propagande, quelque chose de mercantile. L’Eucharistie est
aussi l’objectif profond de la mission : faire que tous deviennent disciples de Jésus, en
réalisant la rencontre personnelle avec lui et en vivant unis avec lui.
78
La mission est, pour l’Eglise, la cause des causes, le premier service et le plus
important qu’elle rend à l’être humain. Aucun membre de l’Eglise n’est dispensé de la
mission. Les parents, les familles, les jeunes, professeurs et travailleurs, tous sont
missionnaires.
Surtout, les diocèses et les paroisses doivent développer une action organisée
et préparer avec soin leurs disciples missionnaires. Pour les atteindre tous, il faut créer
des communautés d’envoi, d’accueil et d’engagement avec la défense de la dignité
humaine, la préservation de la vie et le salut de tous.
Pour réfléchir :
1) Parmi les nombreuses images utilisées pour définir ou représenter l’Eglise, les
plus élaborées sont celles qui sont en lien avec chacune des Personnes de la
Trinité : Peuple de Dieu, Corps Mystique du Christ et Temple de l’Esprit Saint.
Comment comprendre l'importance de ces images pour la vie du chrétien dans
le monde actuel ?
2) Quel sont le rôle et la responsabilité de l’Eglise hiérarchique ?
3) Sommes-nous conscients, en tant que laïcs, de notre rôle dans la construction
du Règne de Dieu ?
4) Comment comprendre l’Eglise comme Communion des Saints si nous sommes
pécheurs ?
79
TABLE 7 – MARIE, MÈRE DE L’EGLISE
C’est en Marie que l’Eglise et le Règne trouvent leur réalisation la plus élevée :
“l’Eglise a déjà atteint dans la Bienheureuse Vierge la perfection qui la rend sans tâche
et sans ride (Ep 5,27)”. Marie est la Mère de l’Eglise car elle est Mère du Christ, Tête de
l’Eglise, qui est son Corps Mystique.
Durant le Concile Vatican II, le pape Paul VI déclara solennellement que :
“Marie est Mère de l’Eglise, c’est à dire Mère de tout le peuple chrétien, des fidèles
comme des pasteurs” (21/11/1964). Le 30/06/1968, dans le Credo du Peuple de Dieu,
il a répété cette vérité de manière encore plus forte : “Nous croyons que la très Sainte
Mère de Dieu, nouvelle Eve, Mère de l’Eglise, continue au ciel sa mission maternelle en
lien avec les membres du Christ, en coopérant à la naissance et au développement de
la vie divine dans les âmes des rachetés”.
La présence de la Vierge Marie est si forte et indissociable du ministère du
Christ et de l’Eglise, que Paul VI, dans le discours du 21/11/1964, affirma que : “la
connaissance de la vérité doctrinale catholique sur la Bienheureuse Vierge Marie
constituera toujours une clé pour la compréhension exacte des mystères du Christ et
de l’Eglise”.
Connaitre Marie “selon la doctrine catholique” c’est connaitre Jésus et l’Eglise,
puisque Marie fut la pièce maitresse, indispensable, dans le plan de Dieu pour la
Rédemption de l’humanité ; et ainsi “dans la plénitude des temps, Dieu envoya son
Fils, né d’une femme, pour nous permettre ainsi de devenir enfants de Dieu.” (Ga 4,4).
Ou comme le dit le symbole de Nicéno Constantinopolitain, en parlant de Jésus
: “Lequel, par amour pour nous les hommes et pour notre salut est descendu du ciel et
s’est incarné par le pouvoir de l’Esprit Saint dans le sein de la Vierge Marie”.
Depuis les premiers siècles du Christianisme, Marie est reconnue et appelée par
les chrétiens comme Mère de Dieu (Theotokos). Depuis la fin du deuxième siècle, les
chrétiens d’Egypte et du Nord de l’Afrique, où il y avait plus de 400 communautés
chrétiennes, l’invoquaient déjà comme Mère de Dieu, dans la prière qui est sans doute
la plus ancienne que l’Eglise connaisse : “Nous nous réfugions sous Votre protection
Sainte Mère de Dieu, ne repoussez pas nos suppliques pour nos besoins, mais délivrez
nous toujours de tous les dangers, Vierge glorieuse et bénie”.
80
Pour accomplir la mission extraordinaire de Mère de Dieu, Marie fut comblée
de toutes les grâces par Dieu, et de manière spéciale de la grâce de ne jamais
connaitre le péché : ni l’originel ni le personnel. Elle fut conçue dans le sein de la Mère,
Sainte Anne, sans la faute originelle.
Le dogme de l’Immaculée Conception de Marie, reconnu par l’Eglise depuis les
premiers siècles, fut proclamé solennellement par le Pape Pie IX le 8/12/1854, avec la
Bulle “Ineffabilis Deus”: Nous déclarons, décrétons et définissons que, en vertu des
mérites des Jésus-Christ, la bienheureuse Vierge Marie fut préservée de toute tâche du
péché originel au premier instant de sa conception. Dans les apparitions à Sainte
Catherine Labouré, à Paris en 1830, Marie lui apprit la prière connue qui fut frappée
sur la Médaille Miraculeuse : “Ó Marie, conçue sans péché, priez pour nous qui nous
tournons vers Vous”.
En 1858, quatre ans après la déclaration solennelle du Pape Pie IX, Elle-même
révéla son nom à Sainte Bernadette, à Lourdes : Je suis l’Immaculée Conception.
C’est pourquoi, le Concile l’appela : Mère de Dieu Fils et, ainsi, fille préférée du
Père et tabernacle de l’Esprit Saint (LG, 53).
Vatican II inscrit aussi que ; avec ce don de grâce sans égal, elle surpasse de loin
toutes les autres créatures célestes et terrestres. Et il répète les paroles de Saint
Augustin : Vraie mère des membres du Christ, parce qu’avec son amour elle a participé
à ce que dans l’Eglise naissent les fidèles, qui sont membres de cette Tête. De plus :
C’est pourquoi, elle est aussi saluée comme membre éminente et absolument
singulière de l’Eglise, prototype et modèle achevé de celle-ci, dans la foi et la charité ;
et l’Eglise catholique, guidée par l’Esprit Saint, l’honore comme Mère très aimante, en
lui dédiant une affection de piété filiale (LG,53). Le Concile Vatican II reconnait que
Marie, dans la Sainte Eglise, occupe la place la plus haute après le Christ et le plus
proche de nous (LG, 54).
Marie est cette Femme qui traverse toute l’histoire du salut de la Genèse à
l’Apocalypse. Elle est la Femme qui vainc le Serpent, qui avait vaincu la femme : “Je
mettrai la haine entre toi et la femme, entre ta descendance et la sienne. Elle te
blessera la tête, et tu lui blesseras le talon” (Gen 3,15).
Quand Jésus appelle sa Mère Femme, c’est pour nous signifier qui est la grande
Femme préférée de Dieu : “Femme, cela nous revient-il ? Mon heure n’est pas encore
81
arrivée” (Jn 2,4 – Noces de Cana). “Femme, voici ton fils” (Jn 19,26 – Jésus et sa mère
au pied de la croix).
Marie est la Vierge que le prophète a annoncé qui devait concevoir et donner le
jour à un Fils, dont le nom est Emmanuel (cf Is 7,14; Mq 5,23; Mt 1,22-23). Par la
première vierge le péché est entré dans l’histoire des hommes, et avec lui la mort (Rm
6,2) ; par la nouvelle Vierge est venu le salut et la vie éternelle.
C’est elle qui donna chair au Fils de Dieu, pour que par les mystères de la chair il
libère l’homme du péché (LG, 55). Sans cela le Christ pourrait être le grand Prêtre de la
Nouvelle Alliance.
Voici là le rôle indispensable de Marie. Comme disaient les Saints Pères : Marie
n’a pas seulement été passive aux mains de Dieu, mais elle a coopéré au salut des
hommes d’une foi libre et d’une obéissance totale (LG, 56). Cependant, le Père des
miséricordes voulut que l’Incarnation fût précédée de l’acceptation de la part de la
Mère prédestinée, afin que, comme une femme avait contribué à la mort, une autre
femme contribuât à la vie.
Les saints Pères dirent :
“Le nœud de la désobéissance d’Eve a été défait par l’obéissance de Marie ;
ce que la vierge Eve attacha par son incrédulité, la Vierge Marie le détacha
par la foi” (Saint Irénée).
S. Jérôme dit aussi :
“La mort est venue par Eve ; la vie par Marie”.
L’union de Marie avec Jésus, dans l’œuvre de Rédemption, s’accomplit depuis
l’incarnation jusqu’au calvaire. Ainsi en fut-il dans la visite à Elisabeth (Lc 1, 41-45), la
naissance dans la grotte de Bethléem, dans la présentation au Temple devant Siméon
(Lc 2, 34-35), dans la rencontre entre les docteurs de la loi (Lc 2, 41-51).
Dans la vie publique de Jésus, Marie se manifeste dès les Noces de Cana,
anticipant l’heure des miracles (Jn 2,11), se révélant la mère de miséricorde et notre
intercesseuse.
Durant la prédication de Jésus, elle recueillait ses paroles et gardait tout dans
son cœur (Lc 2,19 et 51). Et ainsi elle avançait sur le chemin de la foi et elle maintenait
son union avec le Fils jusqu’à la croix, au pied de laquelle elle était, par la volonté de
Dieu (Jn 19,25), en L’offrant au Père pour chaque fils. Avec Jésus, elle a profondément
82
souffert. Comme le dit quelqu’un, Jésus a souffert la Passion, Elle la compassion.
L’épée prédite par Siméon lui a traversé l’âme entièrement.
Ainsi s’est exprimé le Concile Vatican II : elle a profondément souffert avec le
fils unique et s’est associée de cœur maternel à son sacrifice, en consentant
amoureusement à l’immolation de la victime qu’elle avait engendré ; finalement, elle
entendit ces mots de Jésus-Christ lui-même, en mourant sur la croix, la donnant
comme mère au disciple : “Femme, voici ton fils” (Jn 19,26 et 27) (LG, 62).
Après l’Ascension au ciel du Seigneur, nous avons vu Marie avec ses disciples,
attendant la venue du Promis du Père, implorant de ses prières la venue de l’Esprit
Saint : “Tous persévéraient unanimement dans la prière ; avec les femmes, parmi
lesquelles Marie, mère de Jésus, et ses frères” (Ac 1,14).
Et, finalement, finissant sa vie terrestre, elle qui fut préservée de toute tâche
du péché, fut portée à la gloire céleste en corps et en âme, et exaltée par le Seigneur
comme Reine de l’Univers, pour qu’elle ressemble plus à son Fils, Seigneur des
Seigneurs (cf. Ap 19, 16) vainqueur du péché et de la mort (LG 59).
Marie ne remplace pas la Médiation unique du Christ face au Père. Saint Paul le
dit clairement :
Parce qu’il n’y a qu’un seul Dieu, il n’y a aussi qu’un seul médiateur entre
Dieu et les hommes, le Christ Jésus, vrai homme qui s’est offert en rançon
pour tous (1 Tm 2,56).
La fonction maternelle de Marie s’accomplit par le libre choix de Dieu et
non par nécessité intrinsèque ; elle se réalise par les mérites du Christ et de
sa médiation unique, et elle dépend d’elle dans toute sa réalisation ; c’est à
dire que sans le sacrifice rédempteur du Christ, la fonction médiatrice de
Marie ne serait pas possible.
C’est pourquoi, loin d’empêcher le contact de ses enfants avec le Fils, elle le
facilite encore plus. Alors, Marie ne remplace jamais l’unique et
indispensable médiation de Jésus face au Père, mais elle coopère avec elle
pour le bien de ses enfants.
L’Eglise certifie qu’au ciel Marie continue sa mission d’intercesseuse pour que
nous obtenions les dons du salut éternel. Avec son amour de Mère, elle prend soin des
83
frères de son Fils, qui pélerinent encore et se débattent entre les dangers et les
angoisses, jusqu’à ce qu’ils soient conduits jusqu’à la Patrie bienheureuse (LG, 62).
Sans rien diminuer ou augmenter à l’exclusivité du Christ, Médiateur unique,
Marie est invoquée par ses enfants avec les titres d’Avocate, Médiatrice, Auxiliaire des
chrétiens, Refuge, Consolatrice, Porte du Ciel, et de beaucoup d’autres. Pour toutes
ces raisons l’Eglise porte, et a toujours porté un culte spécial à Marie, Mère de Dieu.
Non pas un culte d’adoration (latria), qui n’est dû qu’à Dieu (Père, Fils et Esprit
Saint), mais un culte de très grande vénération (hiperdulia).
Le Concile Vatican II enseigne sciemment cette doctrine catholique et exhorte
en même temps tous les enfants de l’Eglise qui pratiquent dignement le culte de la très
Sainte Vierge, au culte catholique de manière spéciale ; et qu’ils aient en grande
estime les pratiques et les exercices de piété qu’en son honneur le Magistère de
l’Eglise a recommandé au cours des siècles (LG, 67).
Le Concile Vatican II avertit : que les fidèles se rappellent que la dévotion
authentique ne consiste pas en sentimentalisme stérile et passager ou en vaine
crédulité, mais qu’elle procède de la foi véritable qui nous porte à reconnaitre
l’excellence de la Mère de Dieu et nous incite à un amour filial pour notre Mère, et à
l’imitation de ses vertus (LG, 67).
La Vierge Marie a toujours donné des preuves évidentes de son amour
maternel pour l’Eglise, spécialement, dans les moments où elle était menacée.
Quand, par exemple, en 1571, la civilisation chrétienne était en danger en
Europe, en raison de l’avancée menaçante des musulmans, le pape S. Pio implora la
protection de Marie en faveur du peuple chrétien, en demandant que la Vierge
éloigne, d’une fois pour toute, les dangers de l’islamisme.
Le 07/10/1571, dans la grande et décisive bataille de Lepanto, en Grèce, les
troupes des princes chrétiens vainquirent définitivement les turcs ottomans. Pour
remercier la Mère de l’Eglise de cette insigne victoire, le Pape ordonna d’inclure dans
la Litanie de Lorette l’invocation, Auxiliaire des Chrétiens, Priez pour nous, en
remerciement et en hommage à la protection accordée à l’Eglise.
Marie est considérée liée au ministère trinitaire dans sa dimension
christologique, pneumatologique (Esprit Saint) et ecclésiologique.
84
Dès le début du chapitre VIII de Lumen Gentium, intitulé “La Bienheureuse
Vierge Marie Mère de Dieu dans le ministère du Christ et de l’Eglise”, est posée la ligne
doctrinale :
“La Vierge Marie, qui reçut dans l’Annonciation de l’Ange le Verbe de Dieu dans son
cœur et dans son corps et apporta la Vie au monde, est reconnue et honorée comme
véritable Mère de Dieu et du Rédempteur. En vue des mérites de son Fils, elle fut
rachetée d’une manière plus majestueuse et unie à Lui par un lien étroit et
indissoluble, elle est investie de la mission sublime et de la dignité d’être Mère du Fils
de Dieu, et par conséquent fille préférée du Père et tabernacle de l’Esprit Saint. Par ce
don de grâce particulier elle dépasse de beaucoup toutes les créatures célestes et
terrestres. Mais, en même temps, elle est unie, dans la lignée d’Adam, avec tous les
hommes à être sauvés. Plus encore : elle est vraiment la mère des membres (du
Christ), parce qu’elle a participé par la charité à ce que, dans l’Eglise, naissent les
fidèles qui sont membres de cette Tête. A cause de cela, elle est aussi saluée comme
membre éminente et singulière de l’Eglise, comme modèle de perfection dans la foi et
la charité. Et l’Eglise Catholique éduquée par l’Esprit Saint, l’honore avec un sentiment
de piété filiale comme mère très aimante” (LG 53).
Le pape Paul VI, qui donnera à Marie le titre officiel de “Mère de l’Eglise”,
développa le thème dans l’Exhortation Apostolique sur le Culte à la Vierge Marie, un
des documents les plus beaux de son pontificat. Le Pape présente, à travers les fêtes
mariales du calendrier liturgique, Marie comme modèle de l’Eglise, et demande que
ses considérations d’ordre biblique, liturgique, œcuménique et anthropologique soient
prises en compte dans l’orientation de la piété populaire et dans l’élaboration de
nouvelles prières mariales (CM, 29).
Le Pape parle de Marie comme le modèle de qui sait écouter et accueillir la
Parole de Dieu avec foi. C’est une mission spécifique de l’Eglise : écouter, accueillir,
proclamer, vénérer et distribuer la Parole de Dieu comme pain de Vie (MC, 17). Il parle
de Marie comme modèle de personne priante et intercesseuse. Or, l’Eglise présente
chaque jour au Père les besoins de ses enfants, loue sans cesse le Seigneur et
intercède pour le salut du monde (MC, 18). Il parle de Marie Vierge et Mère, modèle
de la fécondité de l’Eglise-mère, qui devient mère, parce que, par le baptême, elle
engendre des enfants conçus par l’action de l’Esprit Saint (MC, 19). Il parle de Marie,
qui offre au Père le Verbe incarné, surtout au pied de la Croix, où elle s’associa comme
85
mère au sacrifice rédempteur de son fils. Chaque jour l’Eglise offre le sacrifice
eucharistique, mémoire de la mort et de la résurrection de Jésus (MC, 20).
En vérité, Marie est une part essentielle de l’Eglise. Nous pouvons dire que
l’Eglise est dans Marie et Marie est dans l’Eglise.
Cette vérité fut renforcée, surtout, par le Pape Jean Paul II dans l’Encyclique
Redemptoris Mater, qui porte le titre évocateur : la bienheureuse Vierge Marie dans la
vie de l’Eglise qui est en chemin :
“Il existe une correspondance singulière entre le moment de l’Incarnation du Verbe et
le moment de la naissance de l’Eglise. Et la personne qui unit ces deux moments est
Marie : Marie de Nazareth et Marie au cénacle de Jérusalem” (RM, 24).
Après avoir insisté sur Marie au centre de la vie de l’Eglise, le Pape conclut :
“La Vierge Marie est constamment présente sur le chemin de foi du Peuple de Dieu”
(RM, 35). “L’Eglise maintient tout au long de sa vie un lien avec la Mère de Dieu qui
embrasse, dans le ministère salvifique, le passé, le présent et le futur ; et elle la vénère
comme Mère de l’humanité” (RM, 47).
Marie n’unit pas que les chrétiens agissants, mais aussi le simple peuple et
même ceux qui sont éloignés. Pour ceux-là, souvent, Marie est l’unique lien avec la vie
de l’Eglise.
Marie nous apprend à vivre dans la foi dans toutes les situations de la vie, avec
un courage et une persévérance constantes. Sa présence dans l’Eglise apprend aux
chrétiens à se mettre chaque jour à l’écoute de la Parole du Seigneur. L’exemple de
Marie fait que l’Eglise apprend la valeur du silence. Le silence de Marie est, surtout,
sagesse et accueil de la Parole.
Marie apprend à l’Eglise la valeur d’une existence humble et cachée à Nazareth.
L’Eglise apprend à l’imiter sur son chemin quotidien. Et ainsi, unie à la Mère, elle se
conforme chaque fois un peu plus à son Epoux. L’Eglise vit de la foi, et a appris cette foi
“de celle qui a cru que seraient accomplies les choses dites par le Seigneur” (Lc 1, 45).
En Marie, l’Eglise tient le modèle de sa charité. Grâce à la charité de Marie, il
fut possible de conserver de tous temps à l’intérieur de l’Eglise l’entente et l’amour
fraternel. Dans sa mission apostolique aussi, l’Eglise regarde Marie, comme l’enseigna
le Concile Vatican II :
“Dans son action apostolique, l’Eglise regarde avec raison tout ce que fit le Christ,
lequel fut conçu par l’action de l’Esprit Saint et est né de la Vierge précisément pour
86
naitre et grandir aussi dans le cœur des fidèles, à travers l’Eglise. Et, dans sa vie, elle
donna la Vierge comme exemple de ce sentiment maternel dont ils doivent être tous
animés en coopérant à la mission apostolique de l’Eglise, qui doit régénérer les
hommes” (LG, 65).
Pour réfléchir :
87
TABLE 8 – ETRE EGLISE AUJOURD’HUI, ET L’ECCLÉSIOLOGIE DU PAPE FRANCOIS
88
L’échange des idées augmente ; mais les propres mots avec lesquels
s’expriment les concepts de la plus haute importance portent des sens très différents
selon les diverses idéologies.
Finalement, un ordre temporel plus parfait est recherché de toute volonté,
mais sans qu’un progrès spirituel proportionnel ne l’accompagne.
Marqués par des situations si complexes, beaucoup de nos contemporains sont
incapables de discerner les valeurs vraiment permanentes et de les harmoniser avec
les valeurs nouvellement découvertes. De là, tiraillés entre espérance et angoisse, ils se
sentent opprimés par l’inquiétude, quand ils s’interrogent sur l’évolution actuelle des
évènements. Mais celle-ci met l’homme au défi, le force à une réponse.
89
nouvelle et immense problématique, laquelle exige de nouvelles analyses et de
nouvelles synthèses.
90
8.3- Transformations psychologiques, morales et religieuses
La transformation des mentalités et des structures pose souvent la question
des valeurs admises, surtout dans le cas des jeunes. Ils deviennent souvent impatients
et même, avec l’inquiétude, rebelles ; conscients de l’importance même de la vie
sociale, ils aspirent à y participer le plus vite possible. Pour cette raison, les parents et
éducateurs rencontrent des difficultés pas si rares dans l’exercice de leur mission.
A leur tour, les institutions, les lois et la manière de penser et de ressentir les
héritages du passé ne paraissent pas toujours adaptés à la situation actuelle ; et de là
provient une grande perturbation du comportement et jusqu’aux propres normes
d’action.
Enfin, les nouvelles circonstances affectent la vie religieuse elle-même. D’un
côté, un sens critique plus acéré la purifie d’une conception magique du monde et de
certaines survivances superstitieuses, et exige chaque jour un peu plus l’adhésion à
une foi personnelle et agissante ; de cette manière, beaucoup atteignent un sens de
Dieu plus vif.
Mais, d’un autre côté, de grandes foules s’éloignent en pratique de la religion.
Au contraire de ce qui se passait dans le passé, nier Dieu ou la religion, ou se passer
d’eux n’est plus un fait individuel et insolite : aujourd’hui, en effet, cela est souvent
présenté comme une exigence du progrès scientifique ou d’un nouveau type
d’humanisme.
Dans de nombreuses régions, tout cela n’est même pas affirmé sur le plan
philosophique, mais envahit à grande échelle la littérature, l’art, l’interprétation des
sciences de l’homme et de l’histoire et jusqu’aux propres lois civiles ; ce qui provoque
la désorientation de beaucoup.
91
Il apparait aussi un déséquilibre entre la préoccupation d’efficacité pratique et
les exigences de la conscience morale ; d’autres fois, entre les conditions collectives de
l’existence et les exigences de la pensée personnelle et de la contemplation.
Il s’agit, finalement, du déséquilibre entre la spécialisation de l’activité humaine
et la vision globale de la réalité.
Au sein de la famille naissent des tensions, soit par la pression des conditions
démographiques, économiques et sociales, soit par les difficultés qui surviennent entre
les différentes générations, soit par le nouveau type de relations sociales entre
hommes et femmes.
De grandes divergences apparaissent entre les races et les divers groupes
sociaux ; entre les nations riches, les moins prospères et les pauvres ; finalement, entre
les institutions internationales, nées du désir de paix qu’ont les peuples, et l’ambition
de propager la propre idéologie ou les égoïsmes collectifs existant dans les nations et
dans d’autres groupes.
De là naissent les méfiances et inimitiés mutuelles, les conflits et malheurs,
dont l’homme est simultanément cause et victime.
92
; de plus, ils veulent participer à l’organisation de la vie économique, sociale, politique
et culturelle.
Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, tous les peuples ont la
conviction que les biens culturels peuvent et doivent s’étendre à tous.
De manière sous-jacente à ces exigences, se cache, ainsi, une aspiration plus
profonde et universelle : les personnes et les groupes rêvent d’une vie pleine et libre,
digne de l’homme, en mettant à leur service tout ce que le monde d’aujourd’hui peut
leur proposer en abondance. Et les nations font de plus en plus d’efforts pour
atteindre une certaine communauté universelle.
Le monde actuel se présente, ainsi, simultanément puissant et faible, capable
du meilleur et du pire, démontrant ainsi le chemin de la liberté ou de la servitude, du
progrès ou de la régression, de la fraternité ou de la haine. Et l’homme prend
conscience qu’il lui revient de diriger les forces qu’il a libérées, et qu’elles peuvent
aussi bien l’écraser que le servir. C’est pourquoi il s’interroge.
93
convaincus que l’impérialisme futur de l’homme sur la terre satisfera toutes les
aspirations de son cœur.
Nombreux sont ceux qui, désespérés de pouvoir trouver un sens à la vie,
saluent le courage de ceux qui, croyant l’existence humaine vide de tout sens,
s’efforcent de lui conférer par eux-mêmes toute sa valeur.
Cependant, devant l’évolution actuelle du monde, ils sont chaque jour plus
nombreux ceux qui posent et sentent avec une nouvelle acuité les questions
fondamentales : Qu’est-ce que l’homme ? Quel est le sens de la douleur, du mal et de
la mort, qui, malgré les énormes progrès réalisés, continuent à exister ? A quoi
servent ces victoires, gagnées chèrement ? Que peut donner l’homme à la société, et
que peut-il en recevoir ? Qu’y a-t-il après cette vie terrestre ?
L’Eglise, de son côté, croit que Jésus-Christ, mort et ressuscité pour tous, offre
aux hommes, par son Esprit, la lumière et la force pour pouvoir correspondre à sa très
haute vocation ; il n’a été donné aux hommes sous le ciel d’autre nom, par lequel être
sauvés.
Elle croit aussi que la clé, le centre et la fin de toute l’histoire humaine, se
trouve dans son Seigneur et Maitre. Et elle affirme, de plus, que, malgré toutes les
transformations, beaucoup de choses ne changent pas, parmi lesquelles le Christ, le
même hier, aujourd’hui et pour toujours.
Ainsi, le Concile Vatican II veut, à la lumière du Christ, image de Dieu invisible et
source de toute la création, se destiner à tous, pour illuminer le mystère de l’homme
et coopérer à la solution des principales questions de notre temps.
94
Les documents furent nombreux, donc, qui présentent l’Eglise comme
missionnaire dans son essence et la nécessité de la mission. Dans le Concile Vatican II il
y a la Constitution Pastorale Gaudium et Spes qui ouvre à un dialogue et une présence
de l’Eglise dans la société moderne.
A cette occasion, le décret Ad Gentes qui définit l’Eglise pèlerine de nature
missionnaire (AG, 2).
Ensuite, l’exhortation apostolique de Paul VI, Evangelii Nuntiandi, qui présente
un nouveau concept d’évangélisation, la relation entre évangélisation et promotion ou
libération humaine, le thème de l’Eglise locale/particulière, l’union entre Esprit et
évangélisation. Elle montre une vision intégrale de l’évangélisation, un processus
global; bien plus que de voir l’évangélisation et mission comme synonymes. Pour Paul
VI il n’existe pas de véritable évangélisation si le nom, l’enseignement la vie, le règne,
le mystère de Jésus de Nazareth n’est pas proclamé. Cela parce que le message porté
par l’évangélisation englobe toute la vie.
Le Pape Jean Paul II s’est aussi investi dans la mission quand il écrit
l’encyclique Redemptoris Missio, occasion de relancer le décret Ad gentes, une
incitation encore plus grande pour que la mission se réalise.
13
Voir CAVACA, Osmar. “Uma eclesiologia chamada Francisco: Estudo da eclesiologia do Papa Francisco
a partir da Evangelii Gaudium” (Une eclesiologie appelée François: Etude de l’eclesiologie du Pape
François à partir de Evangelii Gaudium). Dans: Revista de Cultura Teológica, nº 83, 2014, pp. 15-34.
95
Pendant des siècles, dans la tradition de l’Eglise, les groupes religieux ont opté
pour le changement de nom, signifiant ainsi soit un acte de dépouillement, soit la
manifestation du désir d’assumer une nouvelle forme de vie ou de mission.
Dans l’histoire de la papauté, de manière spéciale, le choix du nom a été
révélatrice, non au sens de juste rendre hommage ou de se rappeler des vertus de
quelqu’un, mais de signifier, selon le cœur du nouveau pape, les éléments
caractéristiques de sa mission.
Ainsi, le nom de François a une raison profonde dans la vie et la mission du
Pape Bergoglio. Le Pape lui-même a expliqué le choix, en se référant à l’épisode de son
dialogue rapide avec le Cardinal Hummes, au moment précis de son choix comme
pape. “N’oublie pas les pauvres !”, fut le conseil d’ami. “(...) j’ai pensé à François
d’Assise (...). Ah ! Comme je voulais une Eglise pauvre et pour les pauvres”!
Bergoglio a su unir, en un seul nom, deux grandes intuitions évangéliques : la
simplicité, la tendresse et l’amour de la paix et des pauvres de François d’Assise, avec
l’audace, comme il l’affirme lui-même, et l’ardeur missionnaire de François-Xavier, qui
caractérise le ministère du nouveau pape.
La pratique ministérielle du “pape qui vient du bout du monde” a, en tous cas,
montré que, plus qu’un nom, François est un mode de vie ; ou, comme le dit Leonardo
Boff : “François n’est pas un nom. (…) C’est un projet d’Eglise, pauvre, simple,
évangélique et destituée de tout pouvoir (…). C’est une Eglise écologique qui appelle
tous les êtres avec la douce parole de “frères et sœurs”.
Cavaca rappelle encore les paroles du Crucifié de Saint-Damien aux jeunes
d’Assise dans les moments déterminant de son changement de vie : “François, va et
répare ma maison”. Ainsi, d’un petit et simple mot s’esquisse une toute nouvelle
mission : reconstruire l’Eglise du Christ selon le projet de l’Evangile.
96
développée sur son continent, surtout de celle expliquée par la Vème Conférence du
CELAM,14 à Aparecida (São Paulo), à laquelle il a activement participé.
C’est pourquoi nous comprenons que l’ecclésiologie du Pape François ne peut
être lue qu’en considérant ces deux dimensions qui émanent de Vatican II et de la
Conférence d’ Aparecida et, par conséquent, aussi de ses inspirations.
Le pape François, dans sa première Exhortation Apostolique, Evangelii
Gaudium, parle de l’annonce de l’Evangile dans le monde actuel. Dans cet ouvrage le
Pape fait grandement référence à la joie, surtout la joie qui vient de la rencontre avec
le Seigneur à travers la transformation missionnaire de l’Eglise, en acceptant
l’engagement communautaire et la dimension sociale de l’évangélisation, ce qui
nécessite des évangélisateurs courageux. Il reprend les dimensions de participation et
de collégialité proposées par Vatican II, soulignant la nécessité d’une décentralisation
de l’Eglise.
Nous pouvons résumer avec les propres mots du Pape la thématique abordée
dans Exhortation (EG, 17): "J’ai choisi de proposer certaines directives qui puissent
encourager et orienter, dans toute l’Eglise, une nouvelle étape évangélisatrice, pleine
d’ardeur et de dynamisme. [...] j’ai décidé, entre autres thèmes, de m’arrêter
largement sur les questions suivantes :
a) La réforme de l’Eglise en sortie missionnaire ;
b) Les tentations des agents pastoraux ;
c) L’Eglise vue comme la totalité du Peuple de Dieu qui évangélise ;
d) L’homélie et sa préparation ;
e) L’inclusion sociale des pauvres ;
f) La paix et le dialogue social ;
g) Les motivations spirituelles pour l’engagement missionnaire ".
Bien que nous nous limitions aux lignes ecclésiologiques présentes dans
l’Exhortation Apostolique Evangelii Gaudium (les numéros entre parenthèses qui s’y
réfèrent), nous observons que ce texte post-synodal sur la Nouvelle Evangélisation est
présenté par le Pape François comme un texte qui “possède un sens programmatique
14
La Conférence générale des évêques d'Amérique Latine et des Caraïbes, qui s'est tenue en 2007 à
Aparecida (São Paulo), a eu le cardinal Bergoglio comme président de la commission chargée de
préparer le document final de la Conférence.
97
et qui a des conséquences importantes” (EG, 24). De fait, dès le début il déclare que
l’Exhortation veut “montrer les chemins pour l’Eglise dans les prochaines années” (EG,
1).
Même en reconnaissant à l’avance que nous ne pourrons aborder tous les
points de son programme, nous allons nous pencher sur ceux qui nous paraissent les
plus pertinents.
98
pape actuel. Les mots comme participation, décentralisation, dialogue, esprit de
service, sensibilité humaine, proximité avec les pauvres et les marginaux, jaillissent de
sa préoccupation centrale sur le Règne de Dieu.
Le Pape François considère l’Eglise comme “en sortie”, laquelle dans sa
structure et dans son activité devient “un canal destiné plus à l’évangélisation du
monde actuel qu’à sa préservation” (EG, 27), en sachant “sortir de son propre confort
et avoir le courage d’atteindre toutes les périphéries qui ont besoin de la lumière de
l’Evangile” (EG, 20).
Les évangélisateurs doivent contracter “l’odeur des brebis” (EG, 24). De là
l’appel à la rénovation de toute sa pastorale (EG, 11), qui présuppose “une conversion
pastorale et missionnaire” dans la ligne du Document de Aparecida (EG, 25). Etant
donné qu’il n’est pas facile de rompre avec le status quo bien connu et familier, le
Pape invite “tous à être audacieux et créatifs” (EG, 33) dans cette tâche de repenser
l’action pastorale de l’Eglise.
Pourtant, restent quelques questions : sommes-nous tous, clercs et laïcs,
réellement convaincus de cette vérité ? Existe-t-il en Eglise les conditions suffisantes
pour que tous les catholiques assument activement leur responsabilité missionnaire ?
Ne donnons-nous pas l’impression de nous préoccuper de l’énoncé doctrinal et de la
norme canonique, en soi nécessaires, plus que de l’annonce de la personne de Jésus-
Christ ? Le poids statique de l’institution ecclésiale ne cache-t-elle pas la vérité d’une
communauté vivante et missionnaire ? Le zèle pastoral ne se trouve-t-il pas en partie
diminué par l’impact de la société actuelle (EG, 80)?
99
comme il était dit antérieurement, et ne peuvent être considérés “vicaires du
Souverain Pontife” (LG, 27), bien qu’un tel don ne puisse être exercé qu’en
communion avec la Tête et avec les nombreux membres du collège épiscopal. Ce
collège, avec le Pape, constitue l’instance d’autorité suprême dans l’Eglise, bien que le
Pape conserve son pouvoir premier (LG, 22). Par conséquent, les Eglises Locales
peuvent être elle-même sujets de plein droit, tout comme responsables de bien des
choses, surtout de leur région, ce qui dans la lignée des anciennes Eglises patriarcales
va constituer les Conférences Episcopales (LG, 23).
Le rôle du siège romain comme signe d’unité de l’Eglise est de fortifier la
communion entre les Eglises Locales, sans assumer leurs fonctions et compétences.
Dans le premier millénaire de l’Eglise cette “ecclésiologie de communion” était vivante
et agissante, la structure patriarcale maintenant la diversité et l’unité de l’Eglise. Le
patriarche, dans un régime synodal, c’est-à-dire avec les autres évêques, résolvait les
questions de nature liturgique ou de droit canonique. L’uniformité du droit
ecclésiastique, de la liturgie et le contrôle des sièges épiscopaux par Rome ne prouvent
pas nécessairement le primat comme tel.
Le Pape François est partisan, dans la lignée d’ Aparecida, d’une réforme des
structures, lesquelles doivent être “plus missionnaires” (EG, 27), car “il y a des
structures ecclésiales qui peuvent aller jusqu’à limiter un dynamisme évangélisateur”
(EG, 26).
Et il affirme avec netteté : “Une centralisation excessive, au lieu d’aider,
complique la vie de l’Eglise et son dynamisme missionnaire” (EG, 32). En ce qui
concerne les Conférences Episcopales, sa pensée est claire : “Le Concile Vatican II a
affirmé que, à la ressemblance des anciennes Eglises Episcopales, les Conférences
Episcopales peuvent apporter une contribution multiple et féconde, pour que le
sentiment de collégialité mène à des applications concrètes” (LG, 23). Et il ajoute : “Il
ne convient pas que le Pape se substitue aux épiscopats locaux dans le discernement
de toutes les problématiques qui apparaissent sur leurs territoires” (EG, 16).
100
par l’humain dans la foi. Nous n’avons réellement la révélation ou la Parole de Dieu
que dans une réponse intérieure de foi, elle-même fruit de l’action de Dieu en nous.
C’est pourquoi l’accueil dans la foi est une part constitutive de la révélation ;
sans elle les événements salvifiques ne seraient que des faits historiques, la Parole de
Dieu serait parole humaine et la personne de Jésus-Christ nous serait inconnue,
comme elle le fut pour les pharisiens en leur temps.
Donc, l’être humain qui professe sa foi vit nécessairement dans un contexte
socioculturel qui lui fournit un langage, des valeurs, des normes de comportement, de
vie sociale et la capacité de développer de se développer comme être humain. Donc,
l’être humain écoutera et accueillera la Parole de Dieu nécessairement dans sa propre
culture. Ainsi nous ne pouvons trouver la Parole de Dieu et l’Evangile que déjà
inculturés.
La foi étant le fondement de la communauté ecclésiale, comme nous l’enseigne
Saint Thomas d’Aquin, l’Eglise se trouve être une communauté de fidèles
inévitablement insérés dans une culture qui va déterminer comment ses membres se
comprennent et vivent la foi chrétienne. De cette façon l’Eglise Locale nécessite
toujours une Eglise inculturée.
Donc, si elle veut être comprise comme signe du salut, elle doit assumer le
langage, les catégories mentales, les gestes, les coutumes, le savoir et les arts de la
culture dans laquelle elle se trouve insérée, comme le disait avec tant d’insistance le
pape Jean Paul II.
Cependant, la culture n’est pas une réalité figée, mais réellement un processus,
dû aux nouveaux défis intérieurs et extérieurs qui la touchent. C’est pourquoi la
communauté ecclésiale doit savoir accueillir en son sein les transformations
nécessaires pour pouvoir porter à son terme la mission. Le Concile Vatican II expose
cet enseignement dans le Décret Ad Gentes au sujet de l’activité missionnaire de
l’Eglise (AG, 15; 22).
Le Pape François accueille sans plus l’anthropologie culturelle sous-jacente au
texte conciliaire et conclut catégoriquement : “La grâce suppose la culture, et le don de
Dieu s’incarne dans la culture de qui le reçoit” (EG, 115). De cette façon “le
christianisme ne dispose pas d’un unique modèle culturel, mais demeurant ce qu’il est,
101
(...) il portera aussi le visage des diverses cultures et des peuples variés par lesquels il a
été accueilli et dans lesquels il s’enracinera” (EG, 116).
Et faisant siennes les précédentes déclarations de Jean-Paul II sur cette
thématique, il assure que “chaque culture offre des formes et des valeurs positives qui
peuvent enrichir la manière selon laquelle l’Evangile est prêché, compris et vécu” et
ainsi l’Eglise manifeste sa catholicité (EG, 116). Le pape reconnait que le processus
d’inculturation est lent et exige des Eglises Locales créativité et audace (EG, 129).
102
recommandant que les évêques “leur ouvrent des espaces de participation et leur
confient des ministères et des responsabilités” (DAp, 211).
Dotés d’une formation adéquate (DAp, 212), les fidèles/laïcs doivent “être part
active et créative dans l’élaboration et l’exécution de projets pastoraux en faveur de la
communauté” (DAp, 213), en participant “du discernement, de la prise de décision, de
la planification et de l’exécution” (DAp, 371).
Naturellement, ce même document souligne la nécessité d’un changement de
mentalité de tous dans l’Eglise, spécialement de la hiérarchie (DAp, 213).
Le Pape François, dans son Exhortation Apostolique, dit clairement qu’il
insistera sur cette conquête du Concile Vatican II et souligne lors de l’Assemblée
Episcopale à Aparecida : “Chaque baptisé, indépendamment de de sa propre fonction
dans l’Eglise et du niveau d’instruction de sa foi, est un sujet actif d’évangélisation”
(EG, 120).
La mission n’est pas juste un ornement ou un accessoire sur la personne du
chrétien ; c’est quelque chose qui ne peut s’arracher de soi sans se détruire (EG, 273).
Tout en mentionnant la nécessité d’une meilleure formation (EG, 121), le pape
insiste sur l’évangélisation par le contact personnel (EG, 127), étant donné qu’il s’agit
de communiquer aux autres la propre expérience salvifique de la rencontre avec Jésus-
Christ, à la ressemblance des premiers disciples de la samaritaine et de Paul (EG, 120).
Mais il reconnait aussi la difficulté des laïcs/laïques à ne pas trouver leur place dans les
Eglises Locales, en partie à cause d’un cléricalisme excessif (EG, 102).
103
par les doctrines, normes, règlements, traditions qui se sont accumulés au cours de
l’histoire, certainement pour expliquer et sauvegarder ce noyau évangélique, mais qui
n’ont cessé de l’assombrir, en occupant une place centrale qui n’est pas la leur. Ce fait
n’est pas passé inaperçu pour le Pape François, comme nous allons le voir.
En premier, il souligne l’importance décisive de l’Esprit-Saint dans la vie de
l’Eglise. En effet, si l’Eglise est une communauté de ceux qui croient en Jésus-Christ,
alors elle trouve totalement son fondement dans l’action de l’Esprit Saint. Car nous ne
pouvons confesser Jésus-Christ comme Seigneur que par l’action de l’Esprit-Saint (1Cor
12,3). C’est la participation de tous au même Esprit qui créé la communion (2Cor
13,13). L’Esprit qui fut présent et agissant dans l’existence de Jésus continue à agir
aujourd’hui chez les chrétiens (LG, 7).
Le Pape François distingue une évangélisation vue comme “un ensemble de
tâches vécues comme de lourdes obligations” de “l’évangélisation avec l’Esprit”, c’est à
dire, “avec l’Esprit-Saint, puisqu’il est l’âme de l’Eglise évangélisatrice” (EG, 261). Et il
complète ; “Pour maintenir vivante l’ardeur missionnaire, est nécessaire une confiance
assurée dans l’Esprit-Saint”, car “il n’y a pas de plus grande liberté que de se laisser
conduire par l’Esprit”, “en permettant qu’Il nous éclaire, nous guide, nous dirige et
nous pousse vers où Il veut” (EG, 280).
Dans une époque marquée par l’inflation de paroles au travers de divers
moyens de communication sociale et aussi d’un certain scepticisme au sujet des
idéologies et des visions du monde, l’expérience personnelle prend un poids énorme
pour asseoir les convictions personnelles.
Cette réalité touche aussi la foi des chrétiens. Elle résulte d’une initiative de
Dieu de venir à notre rencontre, en Se donnant lui-même en Jésus Christ et dans
l’Esprit Saint, une initiative qui se réalise pleinement en étant accueillie par le chrétien
dans la foi.
Ainsi, la foi est un événement salvifique dans la vie de la personne qui est,
d’une certaine façon, expérimentée par elle. Cette expérience atteint le cœur de
chacun, non seulement en donnant du sens à l’existence humaine, mais aussi en
consolant, fortifiant et illuminant ceux qui la font. C’est l’expérience de l’amour, de la
bonté et de la miséricorde de Dieu, réalité prioritaire et fondamentale dans notre vie.
104
Le Pape souligne l’importance de l’expérience personnelle avec Jésus Christ, de
l’amour de Dieu qu’Il nous révèle. Par ses mots : “Le véritable missionnaire (...) sait que
Jésus chemine avec lui, parle avec lui, respire avec lui, travaille avec lui” (EG, 266).
Au début de sa vie publique, Jésus proclame : “Le moment fixé est arrivé, car le
royaume de Dieu est proche. Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle” (Mc
1,15). C’est une conversion intimement reliée au Règne de Dieu, car il signifie accueillir
dans la foi le salut définitif de Dieu dans la personne de Jésus-Christ comme cœur de
l’existence elle-même.
Cette conversion doit être présente dans la vie du chrétien comme une attitude
de fond qui toujours l’accompagne. Et également dans la vie de l’Eglise, que ce soit
dans sa conscience, ou dans ses institutions.
Cette exigence apparait clairement dans le document de Aparecida, tant dans
son aspect personnel (DAp, 366), qui implique un changement de mentalité de la part
de tous, spécialement du clergé (DAp, 213), quant à sa dimension institutionnelle
(DAp, 365), actionnée par ce que le texte appelle la conversion pastorale.
Le pape François démontre une conscience claire du défi de la rénovation
ecclésiale et nous enjoint tous à une “conversion pastorale et missionnaire” dans la
ligne de Aparecida (EG, 25). Ce faisant le pape innove en pointant bien concrètement
ce qui a besoin de conversion : le mondanisme spirituel de ceux qui se cherchent eux-
mêmes, la gloire humaine et le bien-être personnel sous des apparences de religiosité
(EG, 93), une foi prisonnière d’un rationalisme subjectif ou d’une “supposée assurance
doctrinaire ou disciplinaire qui donne lieu à un élitisme narcissique et autoritaire, où,
au lieu d’évangéliser, on analyse et on classe les autres” (EG, 94).
Il cite aussi l’exhibitionnisme dans la liturgie, dans la doctrine et dans le prestige
de l’Eglise, la fascination des conquêtes personnelles et les auto-référentiels, tout
comme les statistiques et les évaluations. Il finit ainsi : “Celui qui est tombé dans ce
mondanisme regarde de haut et de loin, rejette l’opinion des frères, disqualifie celui
qui le questionne, fait sans cesse ressortir les erreurs des autres et vit obsédé par
l’apparence” (EG, 97). Et il conclut : "Dieu nous préserve d’une Eglise mondaine sous
des apparences spirituelles et pastorales !” (EG, 97).
105
8.9.6- Une Eglise des pauvres
Nous connaissons la tentative d’un groupe d’évêques, à l’occasion du Concile
Vatican II, pour promouvoir une plus grande simplicité et austérité dans l’Eglise. Ils
étaient bien conscients que beaucoup de symboles de pouvoir et de richesse
s’accumulaient au fil des siècles dans l’institution ecclésiale. Malgré tout, tous ces
efforts n’aboutirent qu’à une petite mention, à moitié perdue à l’intérieur du texte
conciliaire : “...tout comme le Christ a réalisé l’œuvre de rédemption dans la pauvreté
et dans la persécution, l’Eglise est appelée à suivre le même chemin, pour
communiquer aux hommes les fruits de la rédemption” (LG, 8).
En s’occupant de la dimension sociale de l’évangélisation dans le chapitre IV de
l’Exhortation Apostolique, le Pape François commence avec une affirmation qui dit
tout : “Evangéliser c’est rendre le Règne de Dieu présent dans le monde” (EG, 176). En
effet ce n’est pas juste une réalité spirituelle, mais il atteint l’être humain dans toutes
ses dimensions, de telle façon qu’il affirme plus loin : “Dieu, en Christ, ne rachète pas
seulement la personne individuelle, mais aussi les relations sociales entre les hommes”
(EG, 178) ; d’où que "dans la mesure où Il arrive à régner entre nous, la vie sociale sera
un espace de fraternité, de justice, de paix, de dignité pour tous” (EG, 180).
De fait, dans le Nouveau Testament s’exprime l’absolue priorité de la “sortie de
soi-même pour aller vers le frère” comme un des fondements de toute norme morale
et critère de croissance spirituelle (EG, 179).
C’est ainsi que le pape peut affirmer : “Une foi authentique, qui n’est jamais
commode ni individualiste, contient toujours un profond désir de changer le monde,
de transmettre des valeurs, de laisser la terre un peu meilleure après notre passage”
(EG, 183).
Le Pape rappelle que “chaque chrétien et chaque communauté sont appelés à
être instruments de Dieu au service de la libération et de la promotion des pauvres”
(EG, 187) et il insiste sur le mot “solidarité”, quand il exprime “une nouvelle mentalité
qui pense en terme de communauté, de priorité de la vie de tous sur l’appropriation
des biens par quelques-uns” (EG, 188), surtout aujourd’hui quand nous faisons
l’expérience dans la société d’un “nouveau paganisme individualiste” (EG, 195).
Ainsi, nous ne nous étonnons pas que le pape François ait reçu de fortes
critiques de certains secteurs de la société. Il reprend avec force l’option pour les
106
pauvres en affirmant sans ambages : “Je souhaite une Eglise pauvre pour les pauvres”
et il réaffirme l’expérience de l’Eglise latino-américaine de ce que les pauvres nous
évangélisent (EG, 198).
Pour lui, l’annonce du Règne aujourd’hui ne devient significative et digne de foi
que si elle est accompagnée d’une proximité réelle avec les pauvres (EG, 199). Il finit
en regrettant que ces derniers souffrent par manque de soin spirituel (EG, 200).
En conclusion, la mission de l’Eglise ne se réalise que fondée sur la personne de
Jésus, sur la rencontre avec Lui et, à partir de Lui, sur le fait de se jeter dans le monde
pour proclamer la bonne nouvelle.
C’est pourquoi, la théologie missionnaire propose certains axes d’action :
a) L’Axe christologique : il s’agit de la théologie de la croix et du mystère
pascal;
b) L’Axe anthropologique : l’attention portée à l’homme, à son histoire, à sa
culture dans son activité d’actualisation constante et une nécessité
d’inculturation qui prennent en compte les valeurs réellement humaines, en
ayant en tête une évangélisation de la culture elle-même, ou plus
exactement, des diverses cultures, à partir de la Bonne Nouvelle ;
c) L’Axe dialogal: avec les religions non chrétiennes et avec les croyants. La
nécessité de rendre présent que la Divine Providence ne nie pas les aides
nécessaires au salut à ceux qui, sans faute, n’ont pas encore atteint la
connaissance expresse de Dieu et s’efforcent, non sans grâce divine, à vivre
une vie droite (LG, 16);
d) L’Axe diaconal : conscience et action en vue de l’option préférentielle pour
les pauvres, les opprimés, les marginalisés. Dans cette option préférentielle
resplendit le véritable esprit de l’Evangile.
Pour réfléchir :
1- Quels sont les traits principaux de l’ecclésiologie du Concile Vatican II ?
2- Quels sont les traits principaux de l’ecclésiologie du Pape Jean Paul II ?
3- Quels sont les traits principaux de l’ecclésiologie du Pape Benoit XVI ?
4- Quels sont les traits principaux de l’ecclésiologie du Pape François ?
107
ANNEXE :
“JE CROIS DANS LA SAINTE EGLISE CATHOLIQUE”
OU
COMMENT LE CATECHISME DE L’EGLISE CATHOLIQUE REPOND AU THEME
108
d’autant plus la croissance intérieure de l’Eglise, sa cohérence au dessein de Dieu qui
dépend de la catéchèse elle-même (CEC, 7).
Face à cela, il n’est pas étonnant que, dans le dynamisme qui a suivi le Concile
Vatican II (que le pape Paul VI considérait comme un grand catéchisme des temps
modernes), la catéchèse de l’Eglise ait de nouveau attiré l’attention.
Ainsi le Catéchisme actuel de l’Eglise s’inspire de la grande tradition des
catéchismes qui articulent la catéchèse autour de quatre “piliers” :
La profession de la foi baptismale (le Symbole) ;
Les sacrements de la foi ;
La vie de foi (les Commandements) ;
La prière du croyant (le “Notre-Père”).
Dans le Catéchisme de l’Eglise Catholique nous trouvons ce qu’est l’Eglise dans
le dessein de Dieu.
A suivre, nous présentons les principaux points que nous trouvons importants
et qui nous aident à avancer dans l’évangélisation, qui révèlent les thèmes déjà étudiés
dans les précédents chapitres sur l’Eglise catholique, apostolique, romaine avec les
correspondances nombreuses dans le Catéchisme lui-même :
109
03. Quelles sont l’origine et la fin de l’Eglise ?
L’Eglise se trouve origine et finalité du dessein éternel de Dieu. Elle fut préparée dans
l’Ancienne Alliance avec l’élection d’Israël, signe de la future réunion de toutes les
nations. Fondée par les paroles et les actes de Jésus-Christ, elle fut réalisée surtout à
travers sa mort rédemptrice et sa résurrection. Elle fut depuis manifestée comme
mystère du salut à travers l’effusion de l’Esprit Saint le jour de Pentecôte. Elle aura sa
résolution à la fin des temps comme assemblée céleste de tous les rachetés. (CEC, 758-
766; 778)
110
de Dieu, pour loi le nouveau commandement de l’amour, pour mission être le sel de la
terre et la lumière du monde, pour but le Règne de Dieu, déjà commencé sur cette
terre. (CEC, 782)
09. En quel sens le peuple de Dieu participe-t-il des trois fonctions du Christ : Prêtre,
Prophète et Roi ?
Le peuple de Dieu participe de son office sacerdotal parce que les baptisés sont
consacrés par l’Esprit-Saint pour offrir des sacrifices spirituels ; il participe de son office
prophétique, parce qu’avec le sentiment surnaturel de la foi il y adhère de manière
indéfectible, il l’approfondit et en témoigne ; il participe de son office de roi comme
service, en imitant Jésus-Christ qui, roi de l’univers, s’est fait serviteur de tous, surtout
des pauvres et de ceux qui souffrent. (CEC, 783-786)
111
13. Pourquoi l’Eglise est-elle appelée temple de l’Esprit Saint ?
Parce que l’Esprit-Saint réside dans le corps qu’est l’Eglise : dans sa Tête et dans ses
membres ; de plus, Il édifie l’Eglise dans la charité avec la Parole de Dieu, les
sacrements, les vertus et les charismes. “Ce que notre esprit, c’est à dire notre âme est
pour nos membres, c’est ce qu’est l’Esprit Saint pour les membres du Christ, pour le
Corps du Christ, qu’est l’Eglise” (S. Augustin). (CEC, 797-798; 809-810)
112
membres de ces Eglises et communautés sont incorporés au Christ dans le Baptême :
c’est pourquoi nous les reconnaissons comme frères. (CEC, 817-819)
113
22. Qui appartient à l’Eglise catholique ?
Tous les hommes appartiennent ou sont ordonnés de manières diverses à l’unité
catholique du Peuple de Dieu. Est pleinement incorporé à l’Eglise catholique celui qui,
ayant l’Esprit du Christ, est uni à lui par les liens de la profession de foi, des
sacrements, du gouvernement ecclésiastique et de la communion. Les baptisés qui ne
réalisent pas pleinement cette unité catholique sont dans une certaine communion,
certes imparfaite, avec l’Eglise catholique. (CEC, 836-838)
24. Quel lien y a-t-il entre l’Eglise catholique et les religions non chrétiennes ?
Il y a un lien qui provient, en premier lieu, de l’origine et de la fin commune de tout le
genre humain. L’Eglise catholique reconnait que tout ce qui est bon et de vérité qui se
trouve dans les autres religions vient de Dieu, est rayonnement de sa vérité, peut
préparer à l’accueil de l’Evangile et stimuler l’unité de l’humanité dans l’Eglise du
Christ. (CEC, 841-845)
114
26. Pourquoi l’Eglise doit-elle annoncer l’Evangile au monde entier ?
Parce que le Christ l’a ordonné : “Allez, donc, faire des disciples parmi toutes les
nations, en les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit” (Mt 28,19). Cet
ordre missionnaire du Seigneur prend sa source dans l’amour éternel de Dieu, qui a
envoyé son Fils, parce qu’il “veut que tous soient sauvés et atteignent la connaissance
de la vérité” (1Tm 2,4). (CEC, 849-851)
115
en menant à travers les siècles son apostolat pour la diffusion du Règne du Christ.
(CEC, 861-865)
116
35. Pourquoi le ministère ecclésial a-t-il aussi un caractère personnel ?
Le ministère ecclésial a aussi un caractère personnel car, en vertu du sacrement de
l’Ordre, chacun est responsable devant le Christ, qui l’a personnellement appelé, lui
confiant la mission. (CEC, 878-879)
117
40. Comment les évêques exercent-ils le ministère de sanctification ?
Les évêques sanctifient l’Eglise en dispensant la grâce du Christ avec le ministère de la
parole et des sacrements, en particulier de l’Eucharistie, mais aussi avec leur prière,
leur exemple et leur travail. (CEC, 893)
118
45. Comment participent-ils de leur office de roi ?
Les laïcs participent de la fonction régalienne du Christ en ayant reçu de lui le pouvoir
de vaincre, en eux-mêmes et dans le monde, le péché, avec l’abnégation de soi et la
sainteté de leur vie. Ils exercent divers ministères au service de la communauté et
imprègnent de valeur morale les activités temporelles de l’homme et les institutions
de la société. (CEC, 908-913; 943)
119
50. En quel sens la bienheureuse Vierge Marie est-elle Mère de l’Eglise ?
La bienheureuse Vierge Marie est Mère de l’Eglise dans l’ordre de la grâce parce
qu’elle a donné le jour à Jésus, le Fils de Dieu, Tête du corps qu’est l’Eglise. Jésus
mourant sur la croix, la désignée comme mère du disciple avec ces mots : “Voici ta
mère !” (Jn 19,27). (CEC, 963-966; 973)
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55. Pourquoi l’Eglise a-t-elle le pouvoir de pardonner les péchés ?
L’Eglise a la mission et le pouvoir de pardonner les péchés parce que le Christ lui-
même le lui a conféré : “Recevez l’Esprit Saint. A qui tu pardonneras les péchés, ils lui
seront pardonnés ; à qui tu les retiendras, ils seront retenus” (Jn 20,22-23). (CEC, 981-
983; 986-987)
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BIBLIOGRAPHIE UTILISEE ET CITEE
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2- DOCUMENTS CONSULTES
- Compêndio do Concílio Vaticano II. Editora Vozes, 1987.
- Catecismo da Igreja Católica. Editora Vozes, 1998.
- Curso de Eclesiologia. Escola “Mater Ecclesiae”, 1996.
- Coleção PUBLICAÇÕES DA CNBB. Sou Católico: Vivo a minha fé – Subsídio 2. Edições
CNBB, 2007.
- CNBB, Secretariado Regional Leste-1. O Concílio em resumo. Rio de Janeiro: Edições
Lumen Christi, 1970.
- CNBB. Compêndio do Catecismo da Igreja Católica. São Paulo: Loyola, 2005.
3- AUTEURS CONSULTES
- ARQUILLIÈRE, H. X. Le plus ancien traité de l’église: Jacques de Viterbe, De regimine
Christiano. 1301-1302, Paris, G. Beauchesne editeur, 1926.
- BARROS, Paulo César. A eclesiologia do Concílio vaticano II. In: Convergência, Ano XL,
nº 384, julho/agosto.
- BELARMINO, R. De controversis Christianae fidei adversus nostri temporis
haereticos, tII: Prima controvérsia generalis. Livro III: De Ecclesia militante, caput II:
De definicione Ecclesia, p. 137-138.
- BRIGUENTI, Agenor. A eclesiologia do Concílio Vaticano II a partir das quatro notas
da Igreja. In Convergência, Ano XLI, nº. 389, janeiro/fevereiro.
- CAETANO, Tomás de Vio in Neuausgg. De divina institutione Pontificatus Romani
Pontificis (1521), neu hrsg. v. Friedrich Lauchert, in: CCath X, 1925.
- DALLAGNOL, Wilson. A eclesiologia do Vaticano II. In Cadernos da ESTEF 37 (2006).
- DYSON, R.W., James of Viterbo. De regimine Christiano. Boston, Brill, 2009.
- GARRONE, Gabriel Marie. A Igreja. 1965 – 1972. Porto: Salesianas, 1973.
- GONÇALVES, Paulo Sérgio Lopes e BOMBANATTO, Vera Ivanise (Orgs.). Concílio
Vaticano II – análise e prospectivas. São Paulo: Paulinas, 2004.
- HACKMANN, Geraldo Luiz Borges. A Igreja, mistério de comunhão e as exigências da
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- LAMBERT, Bernard. A nova imagem da Igreja. Trad. Nestor Dockhorn. São Paulo:
Herder, 1969.
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compreensão. São Paulo; Loyola, 2005.
- PIÉ-NINOT, Salvador. Introdução à Eclesiologia. São Paulo: Loyola, 4ª ed., 2008.
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- SANTOS, M.A. (org). Concílio Vaticano II – 40 anos de Lumen Gentium. Porto Alegre,
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- SCHREINER. J. Palavra e Mensagem. Introdução Teológica e Crítica aos Problemas
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- TRENTIN, G. Struttura e funzioni della coscienza nella teologia morale. Credere oggi.
ano 2004.
- VANZELLA, José Adalberto. Protagonismo do leigo na Igreja. São Paulo: Paulinas,
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- VAZ, J.C.L. O louvor a Maria. Ed. Loyola, 2005.
4- SITES CONSULTES
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- http://www.ultimato.com.br/revista/artigos/255/o-Concílio-de-trento.
- http://www.universocatolico.com.br/index.php?/Artigos/.
- http://ufrb.edu.br/historia.com/index.php/edicao-atual/2-uncategorised/23-
Concílio-vaticano-i-1869-1870-centralizacao-do-catolicismo.
5- TEXTES RECOMMANDES
- LOHFINK, Gerhard. A Igreja que Jesus Queria. Editora Academia Cristã, 2011.
- BAUER, Johannes B. História da Igreja Católica. Ed. Loyola, 2006.
- PIERRARD, Pierre. História da Igreja. (Desclèe & Cie, Paris, 1978) tradução de Álvaro
Cunha; revisão de Luiz João Gaio - São Paulo: Paulus, 1982.
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