Parlons Europe en 30 questions ( PDFDrive )
Parlons Europe en 30 questions ( PDFDrive )
Parlons Europe en 30 questions ( PDFDrive )
en 30 questions
(nouvelle édition)
David Siritzky
administrateur à l’Assemblée nationale,
ancien référendaire au Tribunal de l’Union européenne
La documentation Française
Responsable de la collection
Isabelle Flahault
Titre dirigé par
Christine Fabre
Secrétariat de rédaction
Martine Paradis
Conception graphique
Sandra Lumbroso
Bernard Vaneville
Mise en page
Dominique Sauvage
Édition
Dagmar Rolf
Promotion
Stéphane Wolff
Avertissement au lecteur
Les opinions exprimées n’engagent que les auteurs.
Ces textes ne peuvent être reproduits sans autorisation.
Photo : © Ocean/Corbis
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Panorama
Élections européennes de mai 2014, crise
de la zone euro, réforme de l’espace
Schengen, divisions européennes face à
la crise ukrainienne, mécanisme européen
de stabilité, traité transatlantique de libre-
échange, adhésion de la Turquie… L’Europe
fait souvent la une de l’actualité, parfois de
manière inquiétante. Comment se repérer
dans ce flux d’informations et se forger une
opinion indépendante ?
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8
Panorama
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voisines – le Conseil européen, le Conseil de l’Union
européenne et le Conseil de l’Europe – désignent des
institutions ou des organisations différentes ! Ensuite,
les médias, qui devraient servir d’intermédiaires pour
« décoder » l’Europe, ne jouent pas toujours leur rôle :
l’Union européenne n’y est plus le « parent pauvre »
qu’elle a pu être, mais la pédagogie est rarement
au rendez-vous, faute d’espace ou de temps. Enfin,
dans le discours de nombreux dirigeants nationaux,
l’Europe est un bouc émissaire commode (« C’est la
faute à Bruxelles »), surtout lorsque des sacrifices sont
demandés à la Nation : dans ces conditions, mieux
vaut ne pas insister sur le fait que telle directive ou
tel traité impopulaire a été négocié et approuvé par
le gouvernement concerné.
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Panorama
Un malentendu croissant
entre les Français et l’Union européenne
Déjà en 2005, la campagne menée à l’occasion du
référendum sur le traité établissant une Constitution
pour l’Europe, qui s’est soldée en France par un
rejet sans appel – 54,6 % de « non » –, avait illus-
tré l’ampleur du fossé qui s’est creusé entre une
majorité de Français et l’Europe. Au lieu d’être
considérée comme protectrice, à l’égard de la mon-
dialisation notamment, l’UE est perçue par beau-
coup comme une menace pour le modèle social
français. Accusée d’avoir érigé la « concurrence libre
et non faussée » en dogme, elle serait devenue le
« cheval de Troie » du libéralisme et ouvrirait nos
frontières à une invasion de « plombiers polonais »
qui viendraient menacer nos emplois. Les taux crois-
sants de l’abstention aux élections européennes (de
39,29 % en 1979 à 57,57 % en 2014, en léger recul
par rapport au taux record de 59,37 % de 2009)
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Les Français et l’Union européenne :
« Je t’aime, moi non plus »
Selon le dernier Eurobaromètre disponible (juillet 2014),
seuls 34 % des Français font confiance aux institutions
européennes, la défiance l’emportant largement (56 %).
Une majorité de Français (56 %) affirment ne pas com-
prendre le fonctionnement de l’UE et 42 % considèrent
que leur voix n’y compte pas. 38 % d’entre eux ont
cependant une image positive de l’Union européenne,
contre 27 % qui en ont une représentation négative.
Lorsqu’on leur demande ce que l’UE représente pour
eux, les trois citations les plus fréquentes sont l’euro,
la liberté de voyager, d’étudier et de travailler partout
dans l’UE et la paix. 90 % des Français estiment qu’on
a besoin d’une Europe unie dans le monde et 52 %
souhaitent que plus de décisions soient prises au niveau
européen. Seule une minorité (25 %) pense que la
France pourrait mieux affronter l’avenir si elle était
en dehors de l’UE.
12
Panorama
13
discuter d’égal à égal avec des puissances émergentes
comme la Russie ou la Chine, ou imposer leurs déci-
sions à de puissantes entreprises américaines comme
Microsoft. Le rêve européen existe, et il est étudié
et imité ailleurs dans le monde, en Amérique latine,
avec le Mercosur, ou en Asie.
L’importance des enjeux exige de chacun d’entre nous
qu’il prenne le temps de s’informer sur le fonction-
nement de l’Union européenne, sur ses institutions
comme sur ses politiques, afin de se forger sa propre
opinion – qu’elle soit positive ou négative, seul importe
qu’elle soit éclairée. En effet, l’Europe est aujourd’hui
à la croisée des chemins. Plongée dans la tourmente
par les affres de la zone euro, l’atonie de la croissance,
la montée des populismes et des euroscepticismes,
elle semble atteinte dans ses fondements mêmes.
Pour sortir de l’ornière, il lui faut relever un triple défi.
14
Panorama
15
plutôt que par les contribuables et les déposants,
dont la protection a été accrue.
Il reste à trouver le bon dosage et le bon rythme pour
que le redressement des finances publiques des États
membres, indispensable, n’empêche pas la zone euro
de retrouver le chemin de la croissance et de l’emploi.
Le « pacte pour la croissance et l’emploi », adopté en
juin 2012, essaie ainsi de réconcilier les partisans d’une
relance européenne de l’économie et les tenants de
l’orthodoxie budgétaire, pour lesquels la priorité doit
être accordée à la réduction de la dette.
16
Panorama
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celle de la Turquie, la question des frontières géogra-
phiques de l’Europe. Jusqu’où l’Union européenne
peut-elle s’étendre ? Ni la géographie, ni l’histoire ne
fournissent de réponse évidente pour ces différents
pays. Il s’agit avant tout d’un choix politique, qui
dépend largement de la vision du projet européen
que l’on adopte.
18
Panorama
19
La construction européenne en quelques dates
– 9 mai 1950 : Déclaration de Robert Schuman, ministre
français des Affaires étrangères, proposant de placer
les productions française et allemande de charbon et
d’acier sous une Haute Autorité commune.
– 18 avril 1951 : Signature du traité de Paris, créant
la Communauté européenne du charbon et de l’acier
(CECA), par la Belgique, la France, l’Italie, le Luxembourg,
les Pays-Bas et la RFA (les « Six »).
– 25 mars 1957 : Signature des traités de Rome (CEE
et Euratom) par les Six.
– 1er janvier 1973 : Adhésion du Danemark, de l’Irlande
et du Royaume-Uni.
– Juin 1979 : Premières élections européennes au
suffrage universel direct.
– 1er janvier 1981 : Adhésion de la Grèce.
– 1er janvier 1986 : Adhésion de l’Espagne et du Portugal.
– 17 février 1986 : Signature de l’Acte unique européen.
– 7 février 1992 : Signature du traité de Maastricht
créant l’Union européenne et l’euro (entré en vigueur
le 1er novembre 1993).
– 1er janvier 1995 : Adhésion de l’Autriche, de la Finlande
et de la Suède.
– 2 octobre 1997 : Signature du traité d’Amsterdam
(entré en vigueur le 1er mai 1999).
– 26 février 2001 : Signature du traité de Nice (entré
en vigueur le 1er février 2003).
– 1er mai 2004 : Adhésion de dix nouveaux États :
Chypre, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte,
Pologne, République tchèque, Slovaquie et Slovénie.
– 1er janvier 2007 : Adhésion de la Bulgarie et de la
Roumanie.
– 13 décembre 2007 : Signature du traité de Lisbonne
(entré en vigueur le 1er décembre 2009).
– 1er juillet 2013 : Adhésion de la Croatie.
20
Questions-réponses
››››››››
Pourquoi construire une
Europe unie ?
Bâtir la paix
La première ambition de la construction européenne a
été de mettre fin à l’opposition séculaire entre la France
et l’Allemagne et de rendre impossible la guerre entre
elles. Cinq ans après la fin de la Seconde Guerre mon-
diale, cette réconciliation n’allait pas de soi. Avoir rendu
la guerre impensable entre les États membres de l’Union
européenne est l’acquis majeur de l’intégration euro-
péenne, trop souvent oublié.
Rendre l’Europe plus prospère,
plus juste et plus démocratique
Depuis le traité de Lisbonne de 2007 qui l’a modifié,
le traité sur l’Union européenne énonce clairement les
objectifs de l’intégration européenne. Celle-ci vise à
concilier la construction d’un espace sans frontières
intérieures, fondé sur la libre circulation des personnes,
des biens, des marchandises et des services, avec des
objectifs sociaux tels que le plein emploi et la lutte contre
l’exclusion et les discriminations.
S’unir pour continuer de peser dans le monde
Sur la scène internationale, l’Union doit protéger ses
citoyens et promouvoir les valeurs de liberté, de démo-
cratie et de respect des droits de l’homme. Par ailleurs,
à l’heure de la mondialisation et de l’affirmation des pays
émergents, aucun pays européen ne peut prétendre
seul défendre sa prospérité et compter au nombre des
grands acteurs internationaux.
22
›››››››› Questions-réponses
23
››››››››
L’Europe s’est-elle faite
en un jour ?
La méthode des « petits pas »
L’acte fondateur de la construction européenne, la décla-
ration Schuman du 9 mai 1950, énonce une méthode
– la « méthode Monnet » – progressive et pragmatique :
« L’Europe ne se fera pas d’un seul coup, ni dans une
construction d’ensemble, elle se fera par des réalisations
concrètes créant d’abord une solidarité de fait ».
Une lente maturation : des Communautés à Six…
La construction européenne est d’abord économique.
Les six États fondateurs (Allemagne, Belgique, Italie,
France, Luxembourg, Pays-Bas) créent la Communauté
européenne du charbon et de l’acier (CECA) par le traité
de Paris (1951), puis la Communauté économique euro-
péenne (CEE) et la Communauté européenne de l’énergie
atomique (CEEA, dite Euratom) par les traités de Rome
(1957). L’approfondissement et l’élargissement vont de
pair lors des décennies suivantes : le passage à l’Europe
des 9 en 1973, puis des 12 en 1986 est suivi par l’Acte
unique européen qui entend achever le marché unique
au 1er janvier 1993.
… à l’Union à 28
Le traité de Maastricht signé en 1992 accentue la dimen-
sion politique du projet, en créant l’Union européenne et
l’euro. L’Union atteint 28 États membres en 2013, tout
en s’efforçant d’approfondir son intégration avec l’entrée
en vigueur du traité de Lisbonne, le 1er décembre 2009.
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›››››››› Questions-réponses
25
››››››››
L’Union européenne
est‑elle un « super État » ?
Plus qu’une organisation internationale…
L’Union a dépassé le stade de la simple association d’États
(confédération). En effet, elle est dotée d’institutions
puissantes, dont une élue au suffrage universel direct
(le Parlement européen). Ses compétences couvrent
des domaines régaliens (monnaie, justice, immigration,
etc.). Son droit est supérieur à toute disposition de droit
national, même constitutionnelle : en cas de contradiction,
le droit national doit être écarté. Elle est financée par des
ressources propres. Enfin, une citoyenneté européenne
a été créée en 1992.
… mais pas pour autant un « super État »
Les États restent les « maîtres des traités », puisque
ceux-ci ne peuvent être révisés qu’à l’unanimité des pays
membres. Il n’y a ni armée, ni police européennes. Bien
qu’elle existe, la citoyenneté européenne s’ajoute à la
citoyenneté nationale mais ne la remplace pas. Chaque
État dispose d’un droit de retrait, c’est-à-dire d’un droit
de sortir de l’Union, qui n’existe pas dans un État fédéral.
Enfin, ses frontières sont définies en commun par les
États membres.
Une fédération d’États et de citoyens
« Objet politique non identifié » (Jacques Delors), l’Union
est une fédération d’États et de citoyens, reposant sur
un partage de la souveraineté entre les États membres.
26
›››››››› Questions-réponses
Souverainistes et fédéralistes
› › › Les fédéralistes souhaitent plus d’intégration tandis que
les souverainistes s’opposent aux transferts de souveraineté.
Ce clivage traverse l’histoire de la construction européenne
de ses origines jusqu’à aujourd’hui. Il dépasse les partis :
lors de la campagne référendaire sur le traité de Maastricht
(1992), le RPR se divisa, tout comme le PS sur le projet de
Constitution européenne.
Le saviez-vous ?
› › › En 2005, le projet de Constitution européenne prévoyait
de doter l’Union d’éléments qui accréditaient l’idée qu’elle
se transformait en « super-État ». Elle instaurait un ministre
européen des Affaires étrangères, rebaptisait les directives
en « lois cadres » et les règlements européens en « lois ».
Tous ces éléments ont été gommés du traité de Lisbonne, à
la demande du Royaume-Uni notamment. Déjà, en 1992, le
Premier ministre britannique, J. Major, avait obtenu que le
mot fédéral (surnommé « F-word » par référence à un autre
mot anglais qui ne doit pas être prononcé dans la bonne
société !) ne soit pas inscrit dans le traité de Maastricht.
27
››››››››
Quelles sont
les compétences de l’Union ?
Uniquement celles attribuées par les traités
Toute compétence non attribuée à l’Union par les traités
continue d’appartenir exclusivement aux États membres
(principe d’attribution). Les traités ne pouvant être révisés
qu’à l’unanimité des États, ces derniers restent maîtres
de leurs propres compétences. Enfin, l’Union doit exercer
ses compétences avec mesure. Son action ne doit pas
excéder ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs
des traités. C’est le principe de proportionnalité.
Trois catégories de compétences :
exclusives, partagées et d’appui
Dans certains domaines, l’Union dispose d’une com-
pétence exclusive. Les matières concernées ont été
entièrement transférées au niveau européen et les États
ne peuvent agir que s’ils y sont habilités par l’Union
ou pour mettre en œuvre ses actes. Dans d’autres,
et ils couvrent l’essentiel des domaines d’intervention
de l’Union, les compétences sont partagées. Les États
membres peuvent encore exercer leurs compétences,
mais uniquement dans la mesure où l’Union n’a pas
exercé la sienne. Les compétences d’appui sont celles
où l’Union n’intervient qu’en complément de l’action des
États, pour apporter une valeur ajoutée.
28
›››››››› Questions-réponses
29
››››››››
Citoyen européen,
plus de droits et de devoirs ?
Une citoyenneté qui s’ajoute à la citoyenneté nationale
Introduite par le traité de Maastricht en 1992, la citoyen-
neté européenne ne remplace pas la citoyenneté natio-
nale, mais la complète. Est citoyen européen toute
personne ayant la nationalité d’un État membre : ce
n’est donc pas l’Union qui détermine qui est citoyen
européen, mais chaque État, en fonction de son droit
de la nationalité.
Davantage de droits que de devoirs
Plusieurs droits sont attachés à la citoyenneté euro-
péenne. Certains sont réservés aux citoyens européens :
droit de circulation et de séjour dans les autres États
membres, droit de vote et d’éligibilité (être élu) aux
élections européennes et municipales dans l’État de
résidence, droit à la protection diplomatique, droit de
s’adresser aux institutions et organes de l’Union dans
sa langue et droit de présenter une initiative citoyenne
(invitation d’un million de citoyens d’au moins 7 États
de l’UE à la Commission de proposer un texte dans un
domaine de sa compétence). D’autres bénéficient à
toute personne résidant dans un État membre : droit
de saisir le Médiateur européen et droit de pétition au
Parlement européen. En l’absence d’armée de conscrip-
tion, d’impôt ou de vote obligatoire européens, il est en
revanche difficile d’identifier des devoirs découlant de
la citoyenneté européenne.
30
›››››››› Questions-réponses
24 langues officielles
› › › Les 24 langues officielles de l’UE sont : l’allemand,
l’anglais, le bulgare, le croate, le danois, l’espagnol, l’esto-
nien, le finnois, le français, le grec, le hongrois, l’irlandais (ou
langue gaélique), l’italien, le letton, le lituanien, le maltais, le
néerlandais, le polonais, le portugais, le roumain, le slovaque,
le slovène, le suédois et le tchèque. Toute personne peut
s’adresser aux institutions et se voir répondre dans l’une
d’entre elles. Les textes de portée générale sont rédigés
dans chaque langue. En pratique, les institutions utilisent
l’anglais, le français et l’allemand comme langues de travail.
Le saviez-vous ?
› › › La protection diplomatique et consulaire permet à tout
citoyen européen en difficulté dans un pays non membre
de l’UE, où son pays d’origine ne dispose pas de repré-
sentation, de faire appel à celles des autres États de l’UE.
31
››››››››
Comment
une « loi européenne »
est‑elle adoptée ?
Le rôle clé du « triangle institutionnel »
Il est formé par la Commission, le Conseil de l’Union
européenne (réunion des ministres) et le Parlement
européen. Dans la plupart des cas, la Commission a le
monopole de l’initiative des textes, le Conseil décide à
la majorité qualifiée et le Parlement européen participe
à la prise de décision à égalité avec le Conseil. C’est
ce qu’on appelle la procédure législative ordinaire. Elle
s’applique dans des domaines comme le marché inté-
rieur, l’agriculture ou la politique de cohésion. Certaines
matières relèvent de procédures législatives spéciales.
Soit le Parlement européen n’y est que consulté, soit son
approbation est requise, ce qui lui donne un droit de
veto, mais sans pouvoir modifier le texte en discussion.
L’extension de la majorité qualifiée au Conseil de l’UE
Le Conseil prend ses décisions, selon les domaines, à la
majorité simple (15 États membres), à la majorité qualifiée
ou à l’unanimité, qui confère à chaque État un véritable
droit de veto. Le champ d’application de la majorité qua-
lifiée a été considérablement étendu au fil des traités.
Elle est devenue la procédure la plus fréquente, l’una-
nimité restant réservée à des sujets sensibles, comme
la fiscalité, et la majorité simple s’appliquant aux seules
questions de procédure.
32
›››››››› Questions-réponses
33
››››››››
L’Europe est-elle
démocratique ?
Un « déficit démocratique » souvent dénoncé
La construction européenne repose sur la « méthode
Monnet ». Celle-ci accorde une place importante à
des institutions ayant une légitimité technocratique
(fondée sur la compétence de leurs membres) comme
la Commission européenne, plutôt que démocratique
(fondée sur le suffrage universel), comme le Parlement.
Les citoyens s’estiment mal informés sur le fonctionne-
ment des institutions de l’Union, qu’ils jugent lointaines
et opaques.
Une démocratisation incontestable…
Le Parlement européen est élu au suffrage universel direct
depuis 1979. Ses pouvoirs ont été considérablement
accrus, dans les domaines législatif et budgétaire comme
à l’égard de la Commission. La protection des droits a
été renforcée par la Charte des droits fondamentaux en
2000, à laquelle le traité de Lisbonne a donné la même
valeur juridique qu’un traité en 2009. Enfin, un nouveau
droit d’initiative citoyenne a été créé.
… mais inachevée
Paradoxalement, plus les pouvoirs du Parlement euro-
péen s’accroissent, moins les élections européennes
mobilisent les électeurs. Cette abstention élevée, le
poids croissant des partis eurosceptiques au Parlement
européen et les résultats négatifs des référendums sur
la Constitution européenne (France, Pays-Bas) ou sur le
traité de Lisbonne (Irlande) démontrent la faiblesse du
soutien populaire à la construction européenne.
34
›››››››› Questions-réponses
35
››››››››
Conseil européen et Conseil
de l’Union européenne,
quelles différences ?
Le Conseil européen est l’instance suprême de l’Union
Créé en 1974, le Conseil européen est la réunion pério-
dique (au moins quatre fois par an) des chefs d’État
ou de gouvernement des États membres, du président
de la Commission européenne et, depuis l’entrée en
vigueur du traité de Lisbonne le 1er décembre 2009, de
son président. Il est chargé de donner les impulsions
politiques à la construction européenne et d’en définir
les priorités, mais n’exerce pas de fonction législative.
Le traité de Lisbonne en a fait une institution de l’Union.
Le Conseil de l’Union européenne
représente les intérêts des États membres
Aussi appelé « Conseil des ministres » ou « Conseil »,
il partage le pouvoir législatif et budgétaire avec le
Parlement européen et conclut les accords interna-
tionaux au nom de l’Union. Il siège en dix formations
spécialisées, selon les sujets inscrits à son ordre du jour,
auxquelles participent les ministres des États membres
chargés de ces domaines. Il est présidé à tour de rôle
par les 28 États membres, pour une durée de six mois,
à l’exception du Conseil des affaires étrangères, présidé
par le haut représentant de l’Union pour les affaires
étrangères et la politique de sécurité.
36
›››››››› Questions-réponses
37
››››››››
À quoi sert
la Commission européenne ?
La « gardienne des traités »
La Commission est chargée de promouvoir l’intérêt
général européen. Organe indépendant et collégial,
elle veille à l’application du droit de l’Union, sous le
contrôle de la Cour de justice de l’Union européenne.
Elle peut saisir cette dernière en cas de manquement
d’un État membre à ses obligations. Elle dispose aussi de
pouvoirs de décision importants pour assurer le respect
des règles de concurrence.
La détentrice de l’initiative législative
Elle détient un quasi-monopole de l’initiative des textes
législatifs. Une directive ou un règlement ne peut être
adopté par le Parlement et le Conseil de l’Union que
sur sa proposition, sauf exceptions (politique étrangère
et de sécurité commune – PESC, espace de liberté, de
sécurité et de justice et union économique et monétaire).
L’organe exécutif de l’Union
La Commission met en œuvre les actes législatifs (règle-
ments, directives) adoptés par le Conseil de l’Union et le
Parlement européen. Elle exécute le budget de l’Union et
gère ses grands programmes, comme le Fonds européen
de développement régional.
Une fonction de représentation
À l’exception de la PESC, la Commission assure la repré-
sentation de l’Union à l’extérieur (pour la politique com-
merciale, par exemple) et dans les États membres.
38
›››››››› Questions-réponses
39
››››››››
De quels pouvoirs
le Parlement européen
dispose-t-il ?
Avec le Conseil, il adopte les « lois européennes »…
Depuis le traité de Maastricht, le Parlement européen
participe à l’adoption des textes législatifs européens
(directive et règlement) sur un pied d’égalité avec le
Conseil. C’est la procédure de « codécision », rebaptisée
« procédure législative ordinaire » par le traité de Lisbonne.
Ses attributions se sont étendues car, à l’origine, il n’avait
qu’un rôle consultatif.
… et détermine le budget
Depuis le traité de Lisbonne, le Parlement européen
dispose des mêmes pouvoirs budgétaires que le Conseil.
En effet, la distinction entre dépenses obligatoires, sur
lesquelles le Conseil avait le dernier mot, et dépenses
non obligatoires, sur lesquelles c’était le Parlement, a été
supprimée. Il peut rejeter l’ensemble du budget depuis
1975. Il l’a fait à trois occasions (1979, 1988, 2010).
Il contrôle la Commission et le Conseil
Le Parlement élit le président de la Commission sur
proposition du Conseil européen, lequel tient compte
du résultat des élections européennes. Il doit égale-
ment approuver la composition de l’ensemble de la
Commission. Il peut la renverser par le vote d’une motion
de censure. Il peut créer des commissions temporaires
d’enquête et adresser des questions écrites et orales à la
Commission et au Conseil. Enfin, les citoyens européens
peuvent lui adresser des pétitions.
40
›››››››› Questions-réponses
Le saviez-vous ?
› › › Le Parlement n’a jamais adopté aucune motion de
censure, mais c’est sous sa pression que la Commission
Santer a démissionné en 1999, à la suite d’accusations de
mauvaise gestion visant certains de ses membres.
41
››››››››
Quel est le rôle
de la Cour de justice
de l’Union européenne ?
C’est l’instance juridictionnelle de l’Union
La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a trois
missions fondamentales. Elle interprète le droit de l’UE
pour en assurer une application uniforme. Elle statue
sur les différends entre États membres et institutions
européennes. Elle fait respecter les droits des particuliers
si une institution de l’UE y a porté atteinte. La CJUE est
composée de 28 juges (un par État) et de 9 avocats
généraux (11 à compter d’octobre 2015) chargés de
présenter leur avis – « conclusions » – sur les affaires.
Ils sont nommés par les États, après avis d’un comité
consultatif, pour six ans renouvelables. Leur indépen-
dance est garantie.
C’est la juridiction suprême de l’Union
La CJUE siège à Luxembourg. Elle regroupe la Cour de
justice proprement dite, le Tribunal et le Tribunal de la
fonction publique. Les juridictions des États membres
sont les juges de droit commun du droit de l’UE : c’est
à elles qu’il appartient au premier chef d’en assurer le
respect. Toutefois, seule la CJUE peut statuer sur la
validité d’une norme européenne. La jurisprudence de la
Cour a contribué à approfondir l’intégration européenne.
Elle a ainsi consacré des principes comme ceux de pri-
mauté du droit de l’Union (ce droit l’emporte sur le droit
national) ou d’effet direct (le droit de l’Union peut être
invoqué directement par les particuliers devant le juge).
42
›››››››› Questions-réponses
43
››››››››
Quel budget
pour l’Union européenne ?
La PAC et la politique régionale
absorbent les trois quarts du budget européen
Le budget de l’Union européenne pour 2014 représente
135,5 milliards d’euros, en crédits de paiement, soit un
peu moins de 1 % du revenu national brut (RNB) euro-
péen. La part consacrée à la politique agricole commune
(PAC) reste la plus importante (40 % environ). Elle a
toutefois fortement diminué (elle était de 70 % en 1985)
au profit des dépenses destinées aux régions et aux États
membres les plus pauvres – via la politique régionale –
qui constituent plus du tiers (37 % environ) du budget.
Les dépenses relatives à la compétitivité pour la crois-
sance et l’emploi, finançant principalement la recherche,
absorbent près de 10 % du budget. Contrairement à
une idée répandue, la part allouée à l’administration
européenne est limitée (6 %).
Un budget alimenté par des ressources propres
L’Union européenne ne prélève elle-même aucun impôt,
hormis celui versé par les fonctionnaires européens. Ce
sont les États membres qui sont tenus de mettre des
ressources à sa disposition. Plafonnées à 1,23 % du
RNB européen, ces ressources propres sont les droits
de douane, les prélèvements agricoles et les cotisations
sur le sucre, la ressource TVA et, depuis 1988, une res-
source fondée sur la richesse (RNB) des États membres.
Cette dernière est aujourd’hui la plus importante (plus
de 70 %).
44
›››››››› Questions-réponses
Le saviez-vous ?
› › › Parmi les principes que doit respecter le budget euro-
péen figure celui d’équilibre. L’Union ne peut pas recourir
à l’emprunt pour financer ses dépenses et elle n’a donc
ni déficit, ni dette.
45
››››››››
L’UE pèse-t-elle
sur la scène internationale ?
Des atouts économiques importants
Première puissance commerciale, devant les États-Unis,
la Chine et le Japon, l’UE pèse pour environ 1/5e du
commerce mondial. Son influence au sein de l’Organi-
sation mondiale du commerce (OMC) est d’autant plus
grande que la politique commerciale est une compétence
exclusive de l’Union. Elle est la première contributrice
à l’aide publique au développement (APD) : en 2013,
avec ses États membres, elle a accordé 56,2 milliards
d’euros à ce titre, soit plus de la moitié du total mondial
de cette aide.
Une faible influence politique
La coopération entre les États membres en matière de
politique étrangère a débuté dans les années 1970.
Mais au début des années 1990, le conflit en ex-
Yougoslavie les divise. Le traité de Maastricht de 1992
crée la politique étrangère et de sécurité commune
(PESC). Intergouvernementale, elle reste régie par le
vote à l’unanimité des États, les actes adoptés ne sont
pas contraignants, les compétences de la Commission
sont réduites et celles de la Cour de justice de l’Union
européenne inexistantes. La guerre du Kosovo confirme
cette impuissance : c’est l’OTAN, en 1999, qui mène
l’offensive aérienne contre la Serbie. En 2003, la guerre
en Irak divise à nouveau profondément les Européens.
Ceux-ci divergent également sur l’attitude à adopter
face à la Russie lors de la crise ukrainienne, en 2014.
46
›››››››› Questions-réponses
Le saviez-vous ?
› › › L’aide humanitaire est gérée par l’Office européen pour
l’aide humanitaire d’urgence. Avec un budget d’environ un
milliard d’euros, il a aidé 122 millions de personnes dans
plus de 90 pays, en 2012.
47
››››››››
Vers une défense
européenne ?
Une difficile gestation
Après l’échec du projet de Communauté européenne
de défense (CED), en 1954, la défense est longtemps
restée un « tabou » de la construction européenne. Rédigé
en plein conflit en ex-Yougoslavie, au cours duquel les
Européens se sont révélés incapables d’empêcher que
des massacres soient commis sur leur propre continent,
le traité de Maastricht de 1992 évoque, timidement, la
perspective d’une défense commune. Les progrès restent
lents : plusieurs États membres sont neutres (Autriche,
Finlande, Irlande et Suède), d’autres insistent sur la
nécessité de concilier la construction d’une Europe de
la défense avec la solidarité transatlantique et l’OTAN.
De réelles avancées depuis le tournant de Saint‑Malo
La déclaration franco-britannique de Saint-Malo (1998)
marque le ralliement du Royaume-Uni à l’objectif d’une
défense commune, dotée d’une « capacité autonome
d’action » et de « forces militaires crédibles ». Depuis,
l’UE s’est dotée de structures politico-militaires, comme
le Comité politique et de sécurité (COPS), le Comité
militaire et l’état-major européen. Des « groupements
tactiques » de 1 500 hommes, capables de fournir une
réaction rapide, sont opérationnels depuis 2007. Sur le
terrain, plusieurs opérations militaires ont été menées
avec succès.
48
›››››››› Questions-réponses
Le saviez-vous ?
› › › Les dépenses militaires des pays de l’UE ne repré-
sentent que 40 % des dépenses américaines et seuls 4 États
membres y consacrent plus de 2 % de leur PIB. Elles ne
sont pas à la hauteur des ambitions affichées.
49
››››››››
L’euro est-il un échec ?
La fragilité de la zone euro…
La crise des dettes publiques fait douter de la solidité de
l’euro. Elle a débuté fin 2009 en Grèce pour s’étendre
aux dettes souveraines irlandaise, italienne, portugaise
et espagnole… La sortie d’un ou plusieurs États est
évoquée, alors que ses conséquences économiques sont
mal évaluées. Cette crise résulte du surendettement des
États. Elle révèle aussi que la zone euro, hétérogène, n’est
pas une « zone monétaire optimale » (où il est avantageux
d’avoir une seule monnaie, grâce à la convergence des
fondamentaux économiques – taux de chômage et de
croissance, inflation, etc. – et l’absence de chocs asymé-
triques, frappant ses membres de manière différenciée).
L’euro a permis à des États non vertueux de s’endetter
à des taux d’intérêt bas, et son appréciation face aux
autres monnaies a handicapé les exportations.
… ne doit pas masquer ses avantages
L’euro a supprimé les coûts de conversion et de cou-
verture contre les risques de change, diminué les coûts
de transaction, et renforcé l’intégration et les échanges
commerciaux. Il a acquis un statut international : c’est
la deuxième devise la plus échangée, une monnaie de
réserve et celle privilégiée avec le dollar pour les émissions
de dette. L’inflation a été maîtrisée (2,1 % en moyenne
entre 1999 et 2007 contre 7,6 % entre 1980 et 1989),
même si l’inflation perçue est supérieure.
50
›››››››› Questions-réponses
51
››››››››
Faut-il un gouvernement
économique européen ?
Une coordination insuffisante
L’euro pâtit d’un déséquilibre entre une politique moné-
taire unique, gérée par la Banque centrale européenne
(BCE), et des politiques budgétaires menées par chaque
État, ce qui la rend « boiteuse » (J. Delors). La coordina-
tion des politiques économiques se limite au Pacte de
stabilité et de croissance (PSC), imposant aux États de
respecter deux seuils pour leur déficit (3 % du PIB, sauf
récession) et leur dette (60 % du PIB). Une procédure
pour déficits excessifs peut conduire à des amendes allant
de 0,2 à 0,5 % du PIB. Le PSC a été souvent contourné,
notamment par l’Allemagne et la France en 2003.
L’indispensable émergence
d’un gouvernement économique européen
L’Eurogroupe, réunion des ministres des Finances de
la zone euro, du président de la BCE et d’un commis-
saire, a été consacré par le traité de Lisbonne. Doté
d’un président élu pour deux ans et demi, il renforce la
coopération, sans être une instance décisionnelle. La
crise de la zone euro depuis 2010 a entraîné l’adoption
du « semestre européen » et du « pacte euro plus » pour
mieux coordonner les politiques économiques. Le PSC,
déjà modifié en 2005, a été réformé en 2011 et en 2013,
avec l’introduction de sanctions semi-automatiques et
d’une nouvelle procédure de surveillance des déséqui-
libres macro-économiques. La création d’euro-obligations
reste discutée.
52
›››››››› Questions-réponses
53
››››››››
Qu’est-ce que
l’Union bancaire ?
Tirer les leçons du passé
La crise financière de 2007-2008, déclenchée par les
prêts immobiliers douteux (les « subprimes ») contractés
par des ménages américains surendettés, s’est mondia-
lisée avec la faillite de la banque américaine Lehman
Brothers en septembre 2008. Les pouvoirs publics ont
dû aider les banques, voire en nationaliser certaines,
pour protéger leurs déposants, dégradant leurs propres
finances. C’est pour éviter la répétition de cet engrenage
que le Conseil européen a décidé, en juin 2012, de créer
une Union bancaire.
Prévenir les crises
Le premier pilier de cette Union repose sur le mécanisme
de surveillance bancaire unique (MSU), qui confie la
supervision des 6 000 banques de la zone euro à la Banque
centrale européenne à compter de novembre 2014.
Résoudre les crises
Le deuxième pilier repose sur le mécanisme de réso-
lution unique (MRU), chargé de gérer la défaillance
d’une banque à partir de 2015. Un conseil de résolution
unique pourra engager une procédure de sauvetage
ou de liquidation en moins de 48h s’il le faut. La prio-
rité sera accordée au « renflouement interne », par les
actionnaires et les créanciers de la banque, afin de
protéger les contribuables et les déposants. Un fonds de
résolution unique alimenté par les banques sera mis en
place à partir de 2016. Sa capitalisation devrait atteindre
55 milliards d’euros en 2024.
54
›››››››› Questions-réponses
Le saviez-vous ?
› › › Entre octobre 2008 et décembre 2012, les États membres
ont accordé 592 milliards d’euros d’aides (soit 4,6 % du
PIB de l’UE en 2012) pour sauver les banques de la faillite.
Si l’on y ajoute les garanties accordées, le montant atteint
1 600 milliards d’euros, soit 13 % du PIB, sur la période
2008-2010 (source : Commission européenne).
55
››››››››
La politique agricole
commune (PAC)
est-elle efficace ?
Des succès indéniables
La PAC est la politique la plus intégrée de l’UE. Mise en
place en 1962, elle représente aujourd’hui 40 % environ
du budget européen (contre 70 % en 1985). Elle a rempli
son premier objectif, qui était de mettre fin à la pénurie
alimentaire d’après-guerre et de rendre l’Europe, devenue
une puissance agricole, autosuffisante. Elle a permis de
garantir le revenu des agriculteurs, stabiliser les marchés,
assurer des prix raisonnables pour les consommateurs
et moderniser les exploitations.
Une politique contestée, en perpétuelle réforme
Victime de son succès, la PAC est critiquée pour son pro-
ductivisme et ses excédents, une protection insuffisante
de l’environnement (pollution des sols, etc.), son poids
budgétaire excessif et les effets négatifs des subventions
à l’exportation (dites « restitutions ») pour les producteurs
des pays en voie de développement. Face à ces critiques
et au défi de l’élargissement en 2004 (hausse de 24 %
des surfaces agricoles et de 50 % du nombre d’agri
culteurs), les réformes se succèdent depuis le début des
années 1990 : 1992, 1999, 2003, « bilan de santé » de
2008, 2013. Elles ont limité la surproduction et le coût
de la PAC, et renforcé son « 2e pilier », le développement
rural (agriculture bio, formation des agriculteurs, etc.).
56
›››››››› Questions-réponses
57
››››››››
Qu’est-ce que
le marché intérieur ?
507 millions de consommateurs,
le plus grand marché au monde
Le marché intérieur (ex-« marché commun ») est un
espace sans frontières intérieures, où les quatre libertés
de circulation – marchandises, personnes, services et
capitaux – sont assurées. C’est l’un des principaux apports
de la construction européenne. La première étape a vu
la suppression des quotas et droits de douane entre les
pays de la CEE (1968), ce qui a multiplié les échanges
par 9 entre 1958 et 1972. Ensuite, les autres obstacles
aux échanges ont été supprimés : réglementations tech-
niques, contrôles vétérinaires, entraves fiscales…
L’Acte unique : une avancée capitale
Jacques Delors, président de la Commission en 1985,
fixe pour objectif l’achèvement du marché unique avant
le 1er janvier 1993. L’Acte unique européen étend le
champ de la majorité qualifiée. Il permet de progresser
en matière de marchandises et de capitaux, sans être
obligé d’harmoniser toutes les normes, grâce au prin-
cipe de reconnaissance mutuelle. Selon ce dernier, tout
produit légalement fabriqué et commercialisé dans un
État membre doit pouvoir être vendu dans un autre État
membre. La libéralisation des services est plus lente,
et la libre circulation des personnes n’est devenue une
réalité qu’en 1995, avec l’entrée en vigueur des accords
de Schengen.
58
›››››››› Questions-réponses
Le saviez-vous ?
› › › La Cour de justice a joué un rôle décisif dans la réalisation
du marché intérieur. Le principe de reconnaissance mutuelle
a été affirmé dans un arrêt de 1969, dit « Cassis de Dijon ».
L’Allemagne ne pouvait s’opposer à la commercialisation de
cette boisson… au motif qu’elle comportait moins d’alcool
que les liqueurs allemandes !
59
››››››››
L’Europe menace-t-elle
les services publics ?
Une place longtemps réduite
L’Europe ne remet pas en cause l’organisation des ser-
vices publics (SP) régaliens, tels que la justice ou la
police. En revanche, les SP industriels et commerciaux
(transport, énergie, communication, service postal, etc.)
sont, en principe, soumis aux règles de concurrence
européennes. À l’origine, le traité de Rome de 1957
se contente d’affirmer que les entreprises chargées
d’un service d’intérêt économique général (SIEG) sont
soumises aux règles du traité, notamment de concur-
rence, dans la limite où elles ne font pas obstacle à leur
mission. Cette dérogation a longtemps été interprétée
strictement, d’où l’impression que l’Europe s’opposait
à la conception française du SP.
La reconnaissance de leur rôle dans l’UE
Leur statut s’est progressivement renforcé. Le traité
d’Amsterdam de 1997 a reconnu la place des SIEG
parmi les « valeurs communes » de l’UE, leur rôle et la
nécessité de veiller à ce qu’ils fonctionnent dans des
conditions leur permettant d’accomplir leur mission. La
Charte des droits fondamentaux de 2000 consacre le
droit d’accès aux SIEG. Un protocole annexé au traité
de Lisbonne rappelle les principes les régissant : égalité
de traitement, niveau élevé de qualité et de sécurité, etc.
La jurisprudence de la Cour s’est également assouplie.
60
›››››››› Questions-réponses
61
››››››››
Pourquoi une politique
de la concurrence
européenne ?
Pour combattre les pratiques anticoncurrentielles
La politique de concurrence interdit les ententes entre
entreprises pour fixer les prix, répartir les marchés ou
limiter les productions. Des exemptions existent si cela
améliore les produits ou la distribution, ou favorise le
progrès technique. L’exploitation abusive d’une posi-
tion dominante par une entreprise (imposer des prix
inéquitables, subordonner l’achat d’un produit à celui
d’un autre…) est aussi prohibée. Les concentrations
d’entreprises, par fusion ou acquisition, de dimension
européenne font l’objet d’un contrôle préalable afin
d’éviter qu’elles ne créent ou ne renforcent une position
dominante. En l’absence d’affectation du commerce
intra-européen, les règles nationales sont appliquées
et les autorités nationales de concurrence (en France,
l’Autorité de la concurrence) veillent à leur respect.
Pour encadrer les aides publiques
Les aides publiques versées à des entreprises sont enca-
drées lorsqu’elles dépassent un seuil (dit de minimis)
de 200 000 euros sur trois ans. Elles doivent alors être
préalablement notifiées à la Commission qui s’assure
que la concurrence ne sera pas faussée. Certaines aides
(développement de régions en difficulté, protection du
patrimoine ou de l’environnement, etc.) sont compatibles
avec le marché intérieur.
62
›››››››› Questions-réponses
63
››››››››
À quoi sert
la politique régionale ?
Renforcer la cohésion économique,
sociale et territoriale
La politique régionale (dite « politique de cohésion »)
vise à favoriser un développement harmonieux de
l’Union, en réduisant les écarts de richesse entre ses
régions. Elle représente 325 milliards d’euros sur la
période 2014-2020, soit plus du tiers du budget euro-
péen. Elle se décline principalement en deux objectifs.
« L’investissement pour la croissance et l’emploi » mobilise
96 % des fonds, répartis entre toutes les régions de l’UE
selon leur niveau de développement. Plus de la moitié
(52 %) va aux régions dont le PIB par habitant est infé-
rieur à 75 % de la moyenne de l’UE. La « coopération
territoriale européenne » ne représente que 2,7 % du
total, employés à faciliter la coopération transfrontalière,
transnationale et interrégionale.
Des résultats significatifs
Selon la Commission, entre 2000 et 2010, ces investis-
sements ont créé 600 000 emplois nets, dont 160 000
dans les nouveaux États membres. Entre 1995 et 2005,
le PIB/habitant en Grèce est passé de 74 % à 88 % de
la moyenne UE. 44 000 km de route ont été construits
ou reconstruits de 2000 à 2006. L’effet de levier est
important : chaque euro investi a conduit à un inves-
tissement public ou privé supplémentaire de 0,9 euro
en moyenne, pouvant aller jusqu’à trois fois le montant
investi dans certaines régions.
64
›››››››› Questions-réponses
Le saviez-vous ?
› › › Les disparités de développement au sein de l’UE restent
considérables : en 2012, le PIB/habitant du Luxembourg
représentait plus de deux fois et demi (2,63) le PIB moyen
européen et celui de la Bulgarie moins de la moitié (0,47),
soit presque 6 fois moins.
65
››››››››
Faut-il avoir peur
du traité de libre-échange
transatlantique ?
Les relations commerciales les plus importantes au monde
L’UE et les États-Unis échangent, chaque jour, 2 milliards
d’euros de biens et services. Ils représentent près de 50 %
du PIB mondial, 30 % des échanges mondiaux et sont,
l’un pour l’autre, les premiers destinataires d’investisse-
ments directs à l’étranger. Le partenariat transatlantique
de commerce et d’investissement (TTIP en anglais),
dont la négociation est en cours depuis juin 2013, vise
à renforcer ces relations.
Éliminer les obstacles au commerce
Son objectif est d’éliminer les droits de douane (en
moyenne de 4 %), les barrières non tarifaires et régle-
mentaires et les restrictions aux investissements, dans de
très nombreux secteurs. Les biens agricoles et industriels,
les services, les marchés publics et les indications géogra-
phiques sont, par exemple, concernés. Le secteur audio-
visuel est exclu, afin de préserver la diversité culturelle.
Les dossiers qui fâchent
Le but est de parvenir à une conclusion à la fin 2015, mais
des sujets suscitent des inquiétudes et les négociations
avancent lentement. Ces préoccupations concernent
notamment le respect des règles sanitaires et envi-
ronnementales, les marchés publics de défense et de
sécurité et les indications géographiques. L’inclusion d’un
mécanisme de règlement des différends entre États et
investisseurs a aussi été critiquée.
66
›››››››› Questions-réponses
67
››››››››
Vers une Europe
de la justice ?
Une politique relativement récente
L’idée de bâtir un espace judiciaire européen avait été
évoquée dès 1977 par Valéry Giscard d’Estaing. Mais
il faut attendre le traité de Maastricht en 1992 pour
qu’elle prenne corps, avec la coopération en matière de
justice et d’affaires intérieures (JAI). Le traité de Lisbonne
marque un saut qualitatif : il a supprimé la plupart des
faiblesses institutionnelles (vote à l’unanimité, compé-
tences réduites de la Commission, du Parlement et de
la CJUE, etc.) qui l’entravaient.
Construire un espace pénal européen
L’Europe s’est dotée de définitions communes du terro-
risme, de la traite des êtres humains, de la corruption et
du trafic de drogue, par exemple. Cette harmonisation
législative facilite la mise en œuvre de la reconnaissance
mutuelle, qui signifie qu’un État membre doit exécuter
une décision judiciaire rendue dans un autre État, comme
si l’une de ses juridictions l’avait prononcée. Le mandat
d’arrêt européen, la confiscation des avoirs criminels, les
sanctions pécuniaires sont ainsi exécutés dans toute l’UE.
Bâtir une Europe judiciaire civile
Les directives et règlements adoptés simplifient la vie des
citoyens européens en matière de divorce, de succes-
sions, d’injonctions de payer, d’accès à la justice, etc. Le
droit de la famille reste cependant régi par l’unanimité.
68
›››››››› Questions-réponses
Le saviez-vous ?
› › › Le mandat d’arrêt européen a remplacé les procédures
d’extradition dans l’UE. Le principe de double incrimination
(les faits doivent être réprimés dans l’État d’exécution et dans
l’État d’émission) a été supprimé pour 32 infractions graves.
Tous les États doivent consentir à remettre leurs nationaux.
69
››››››››
Quelle politique
d’immigration pour l’Europe ?
Des résultats significatifs dans la lutte
contre l’immigration clandestine
Une définition commune de l’aide à l’entrée et au séjour
irréguliers et une harmonisation de sanctions applicables
ont été adoptées. Les sanctions pécuniaires applicables
aux transporteurs acheminant des étrangers en situa-
tion irrégulière et les sanctions contre les employeurs
de travailleurs clandestins ont aussi été harmonisées.
En matière d’éloignement, une directive de 2008 (dite
« retour ») fixe des normes et procédures communes, et
des vols groupés européens sont régulièrement organi-
sés. La coopération avec les pays d’origine et de transit
a été renforcée, via des accords de réadmission et des
partenariats.
Des progrès plus lents concernant l’immigration légale
Une directive de 2003 harmonise les conditions d’exer-
cice du droit au regroupement familial. Un statut uniforme
existe pour les ressortissants de pays tiers résidant depuis
plus de 5 ans dans un État membre, leur reconnaissant
notamment un droit de séjour dans un autre État. Pour
l’immigration professionnelle, un nouveau titre de séjour,
la « carte bleue européenne », doit faciliter, depuis une
directive de 2009, l’admission et le séjour des travail-
leurs très qualifiés. L’entrée et le séjour des chercheurs
étrangers sont encouragés. Un pacte européen sur
l’immigration et l’asile (2008) fixe les orientations de
ces politiques.
70
›››››››› Questions-réponses
L’Agence Frontex
› › › Créée en 2004 et située à Varsovie, elle coordonne la
coopération entre les États membres pour la gestion des
frontières extérieures. Elle peut les assister pour la formation
des gardes-frontières, l’organisation d’opérations de retour
conjointes et de patrouilles communes, ou pour faire face
à un afflux massif d’immigrants clandestins (comme lors
du « Printemps arabe » en 2011) en déployant des équipes
d’intervention rapide comprenant des gardes-frontières
d’autres États. C’est un embryon de « gardes-frontières
européens », dotés de leurs propres équipements (voitures,
navires, hélicoptères…) depuis 2011.
Le saviez-vous ?
› › › Selon Eurostat, en 2013, 20,38 millions de ressortis-
sants de pays tiers résidaient dans l’UE. La même année,
435 000 demandes d’asile ont été déposées dans les États
de l’UE.
71
››››››››
Qu’est-ce que
l’espace Schengen ?
Un espace sans frontières intérieures…
L’espace Schengen est un territoire où les personnes
peuvent circuler librement, sans contrôles aux frontières
intérieures. Créé – hors du cadre communautaire – par
les accords de Schengen (Luxembourg) du 14 juin 1985,
complétés par une convention de 1990 entrée en vigueur
en 1995, il a réuni d’abord cinq pionniers : Allemagne,
Belgique, France, Luxembourg et Pays-Bas. Il regroupe
aujourd’hui 22 États membres de l’UE et 4 États associés :
l’Islande, la Norvège, la Suisse et le Liechtenstein. La
Bulgarie, Chypre, la Croatie et la Roumanie ont vocation
à le rejoindre. L’Irlande et le Royaume-Uni ne participent
qu’à une partie des dispositions Schengen.
… mais un renforcement des frontières extérieures
La suppression des contrôles aux frontières intérieures
exige d’harmoniser les contrôles aux frontières extérieures
et de renforcer la coopération policière, judiciaire et
douanière. Des droits d’observation transfrontalière et
de poursuite ont été créés pour les policiers, ainsi qu’un
fichier européen signalant les personnes recherchées
ou disparues et les objets perdus ou volés, le système
d’information Schengen (SIS). Des règles communes
en matière de visas et de droit d’asile ont été adoptées.
L’ensemble de ces règles, appelé « acquis de Schengen »,
a été intégré dans le droit de l’UE par un protocole annexé
au traité d’Amsterdam, en 1999.
72
›››››››› Questions-réponses
73
››››››››
Peut-on sortir
ou être exclu de l’Union ?
Tout État peut sortir volontairement de l’UE
Le traité de Lisbonne a consacré ce droit de retrait uni-
latéral et volontaire. La procédure est peu contraignante.
L’État concerné doit négocier un accord avec l’Union,
conclu par le Conseil européen à la majorité qualifiée,
après approbation du Parlement européen. En l’absence
d’accord, il peut quitter l’Union deux ans après le dépôt
de sa demande. Un État qui refuserait, de manière isolée,
une révision des traités, ou au sein duquel une majorité
hostile à la construction européenne arriverait au pouvoir,
peut ainsi quitter l’Union. Il négocierait sans doute un
statut d’État associé et entrerait probablement au sein
de l’Association européenne de libre-échange (AELE).
Le seul précédent est le retrait du Groenland, province
autonome danoise, en 1985.
Aucun État ne peut en être exclu
En effet, il n’existe aucune procédure d’exclusion d’un
État membre, contrairement à certaines organisations
internationales, comme le Conseil de l’Europe ou l’ONU.
Seule est prévue la suspension éventuelle des droits
(le vote au Conseil de l’UE, par exemple) découlant de
l’appartenance à l’Union d’un pays, en cas de violation
grave et persistante des droits fondamentaux. Cette sus-
pension temporaire est décidée par le Conseil européen, à
l’unanimité (l’État concerné ne prenant pas part au vote).
74
›››››››› Questions-réponses
75
››››››››
Les traités européens
sont‑ils « gravés
dans le marbre » ?
Trois procédures pour modifier les traités
La procédure de révision ordinaire concerne les modifi-
cations les plus importantes, comme les compétences de
l’UE. La Commission, un État membre ou le Parlement
européen peuvent en prendre l’initiative. Avec l’accord du
Conseil européen, une Convention (réunissant parlemen-
taires nationaux et européens, représentants des États
et de la Commission) élabore un projet, soumis au vote
des États, lors d’une Conférence intergouvernementale
(CIG). L’entrée en vigueur de la révision dépend de sa
ratification par chaque État par la voie parlementaire
ou par référendum. Il existe deux procédures de révi-
sion simplifiées. L’une permet au Conseil européen de
réviser les politiques et actions internes de l’UE, sans
convoquer une Convention et une CIG. L’autre, dite
« clause passerelle », permet au Conseil européen, à
l’unanimité, d’étendre le champ de la majorité qualifiée
ou de la procédure législative ordinaire, sans qu’une
ratification soit exigée.
L’unanimité n’est pas un obstacle insurmontable
Dans les trois procédures, l’unanimité des États membres
est requise. Contrairement aux idées reçues, la fréquence
des révisions des traités n’a cessé d’augmenter avec le
nombre d’États : aucune véritable révision à 6, ni à 9,
une seule révision à 12, deux à 15, une (plus une autre
mineure en 2013) à 27.
76
›››››››› Questions-réponses
Le saviez-vous ?
› › › Le TUE et le TFUE sont complétés par 37 protocoles et par
65 déclarations. Les protocoles ont la même valeur juridique
que les traités. Ils portent sur des sujets aussi divers que le
statut de la Cour de justice, le droit d’asile ou l’Eurogroupe.
Les déclarations, en revanche, ne sont pas juridiquement
contraignantes et n’ont qu’une portée interprétative.
77
››››››››
Peut-on élargir l’Europe
et la faire avancer ?
La crainte d’une dilution du projet européen
L’UE a connu 7 élargissements (de 1973 à 2013), qui
ont transformé les Communautés des 6 en une Union à
28. L’hétérogénéité croissante des niveaux de vie et des
visions de l’UE fait craindre que l’élan de l’intégration se
brise. L’élargissement de 2004, inédit par son ampleur
(10 nouveaux membres), est accusé de tous les maux :
paralysie institutionnelle, délocalisations et dumping
social (mythe du « plombier polonais »), fin de l’ambition
d’une Europe politique indépendante des États-Unis…
La « révolution du nombre » oblige à des aménagements
institutionnels plus ou moins satisfaisants : le fonction-
nement de la Commission souffre, par exemple, de
l’augmentation du nombre des commissaires.
Élargissement et approfondissement
peuvent être conciliés
Les élargissements successifs n’ont pas empêché l’appro-
fondissement de l’intégration. Ceux des années 1980
coïncident avec l’Acte unique, celui de 1995 a suivi
le traité de Maastricht. La politique de cohésion est la
conséquence de l’élargissement aux pays du Sud. Mais
élargissement et approfondissement ne pourront aller de
pair qu’à condition que soient clarifiées la question des
frontières de l’Europe et les finalités du projet européen.
La perspective d’une intégration différenciée (« Europe
à plusieurs vitesses ») se renforce.
78
›››››››› Questions-réponses
79
››››››››
Vers une Europe
« à la carte » ?
La nécessité d’une intégration différenciée
La construction européenne a longtemps reposé sur
l’uniformité du droit applicable aux États membres et sur
l’identité de leurs droits et obligations. Au fil des élargis-
sements, l’idée d’une Europe « à plusieurs vitesses » ou
« à géométrie variable » a progressé. Cette flexibilité peut
revêtir diverses formes : s’inscrire dans ou en dehors des
traités, permettre à une « avant-garde » de se constituer
ou, à l’inverse, à une « arrière-garde » de s’organiser.
Certains États sont bénéficiaires de dérogations
Le Danemark et le Royaume-Uni bénéficient, depuis
1992, de dérogations (opting out) concernant l’euro.
Le Danemark a un statut dérogatoire en matière de
défense et d’espace de liberté, de sécurité et de justice.
L’Irlande et le Royaume-Uni ne font pas partie de l’espace
Schengen. La Charte des droits fondamentaux ne lie pas
les juridictions britanniques et polonaises.
D’autres sont constitués en « avant-gardes »
La signature des accords de Schengen, en 1985, marque
la création d’une « avant-garde », d’abord en dehors du
cadre des traités, puis intégrée dans ces derniers en
1999. Depuis le traité d’Amsterdam, des coopérations
renforcées peuvent être mises en place entre les États
qui le souhaitent, pour aller plus vite et plus loin, en
restant dans le cadre de l’UE.
80
›››››››› Questions-réponses
81
››››››››
Le couple franco-allemand
est-il le moteur de l’Europe ?
Longtemps moteur de la construction européenne…
La réconciliation franco-allemande est au cœur de la
déclaration Schuman du 9 mai 1950, visant à rendre la
guerre impossible entre les deux pays. Le traité de l’Élysée
de 1963 marque la naissance du « couple franco-alle-
mand ». Dans les années 1970, l’entente exceptionnelle
entre le président V. Giscard d’Estaing et le chancelier
H. Schmidt permet des avancées comme la création du
Conseil européen et du système monétaire européen.
L’amitié entre F. Mitterrand et H. Kohl se concrétise
par les accords de Schengen, le traité de Maastricht,
la création de l’Eurocorps ou encore de la chaîne Arte.
… il ne suffit plus à faire avancer l’Europe
La réunification allemande, en 1990, inquiète la France,
qui craint que l’Allemagne réunifiée, plus puissante et
forte de 80 millions d’habitants, n’ait plus le même enga-
gement européen. Des tensions opposent J. Chirac et
G. Schröder sur la PAC, dont l’Allemagne souhaite réduire
les dépenses. Le traité de Nice marque la rupture de
la parité institutionnelle entre les deux pays, au Conseil
comme au Parlement. La crise de la zone euro à partir
de 2010 a suscité aussi des divergences entre les deux
pays. Dans l’UE à 28, leur entente est indispensable
pour avancer, mais n’est plus suffisante ; leur relation
est devenue moins exclusive.
82
›››››››› Questions-réponses
Le traité de l’Élysée,
aux origines du couple franco-allemand
››› Signé par le chancelier K. Adenauer et le général de
Gaulle le 22 janvier 1963, il prévoit une étroite coopération
en matière de politique étrangère, de défense, d’éducation
et de jeunesse, grâce à des rencontres régulières entre les
chefs d’État et de gouvernement et les ministres responsables
dans ces domaines. Lors de sa ratification par le Bundestag,
l’ajout d’un préambule interprétatif, insistant sur la solidarité
transatlantique et la nécessité d’admettre le Royaume-
Uni dans la Communauté européenne, déçoit cependant
de Gaulle. Le 22 janvier 1988 (25e anniversaire), deux
protocoles additionnels créent un conseil franco-allemand
économique et financier et un conseil franco-allemand de
défense et de sécurité. Un conseil de l’environnement a
également été établi en 1989. Des secrétaires généraux
pour la coopération franco-allemande ont été nommés en
2003, lors du 40e anniversaire du traité.
83
››››››››
Quelle influence française
en Europe ?
Un rôle décisif dans la construction européenne…
La déclaration de Robert Schuman, ministre français des
Affaires étrangères, le 9 mai 1950, en constitue l’acte
fondateur. La position géographique, le poids politique
et économique de la France la rendent incontournable :
l’Europe ne peut se faire sans elle. Les présidents de
la ve République ont, avec les chanceliers allemands,
joué un rôle majeur dans l’approfondissement du projet
européen. Ainsi, Valéry Giscard d’Estaing est à l’origine de
la création du Conseil européen, et François Mitterrand
a beaucoup contribué à celle de la monnaie unique.
… non sans ambivalence
Mais la France a plusieurs fois freiné l’intégration. Elle
s’est opposée à la création d’une armée européenne
commune (Communauté européenne de défense) en
1954 et au projet de Constitution européenne en 2005.
Sous le général de Gaulle, elle s’est opposée à l’extension
du vote à la majorité qualifiée.
Un déclin à relativiser
Au début de la construction européenne, la France
occupait une position privilégiée. Mais au fil des élargis-
sements, le centre de gravité de l’Europe s’est déplacé
et l’influence française s’est érodée et diluée. La France
pèse moins dans une Europe à 28 qu’à 6, mais son
influence reste équivalente à celle des autres grands
États membres.
84
›››››››› Questions-réponses
85
@ vous la parole
› › › Quelle est la procédure d’adhésion
à l’Union européenne (UE) ?
‹ ‹ ‹ ‹ ‹ Tout État européen qui respecte les valeurs de l’Union
– liberté, démocratie, respect des droits de l’homme, des
libertés fondamentales et de l’État de droit – et qui s’engage
à les promouvoir peut demander à devenir membre de l’UE.
Il doit cependant franchir de nombreuses étapes, qui s’étalent
généralement sur plusieurs années, avant de l’intégrer. Le
processus d’adhésion s’ouvre par une déclaration de candida-
ture, adressée au Conseil de l’Union européenne (ou Conseil).
Première étape : se voir reconnaître le statut d’État candidat.
C’est le Conseil qui tranche, à l’unanimité, après avis de la
Commission européenne et avec l’approbation du Parlement
européen. S’il accorde le statut d’État candidat, une stratégie
de pré-adhésion est mise en œuvre à l’égard de l’État concerné.
Celui-ci bénéficie d’une aide financière afin de se préparer à
l’adhésion, en menant les réformes institutionnelles et éco-
nomiques nécessaires.
Deuxième étape : l’ouverture des négociations. L’État candidat
doit remplir les conditions, appelées « critères de Copenhague »,
définies par le Conseil européen en 1993 (cf. encadré « Les
critères de Copenhague »). C’est le Conseil européen (réunion
des chefs d’États ou de gouvernement) qui prend la décision
d’ouvrir les négociations, sur la base d’un avis de la Commission.
Troisième étape : les négociations. Elles visent à s’assurer que
l’État candidat a bien repris dans sa législation l’acquis de
l’Union, c’est-à-dire l’ensemble du droit de l’Union en vigueur.
Elles sont menées par « chapitres » thématiques (libre circulation
des marchandises, agriculture, fiscalité, etc.), correspondant
chacun à une partie de cet acquis.
Quatrième étape : l’adoption d’un traité d’adhésion, signé
entre les États membres et l’État candidat, qui devient alors
« État adhérent ».
Cinquième et dernière étape de ce « parcours du combattant » :
la ratification par tous les États membres et l’État adhérent de
ce traité d’adhésion. C’est le jour de l’entrée en vigueur de ce
traité que l’État devient membre de l’UE.
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› › › Quels sont les arguments en faveur et contre
l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne ?
‹ ‹ ‹ ‹ ‹ Le 12 septembre 1963, la Turquie s’est vu offrir une pers-
pective d’adhésion lors de la signature à Ankara de l’accord
d’association avec la Communauté économique européenne.
Cette perspective a été confirmée lors du Conseil européen
d’Helsinki, en 1999. Les négociations ont été officiellement
ouvertes en octobre 2005.
Les partisans de son entrée dans l’Union européenne insistent
sur ses liens historiques avec l’Europe. Ils font valoir les avan-
tages que son adhésion représenterait. Le premier est l’intérêt
politique, pour l’Europe, d’intégrer un grand pays comme la
Turquie, laïque depuis 1924, stable, moderne, démocratique
et acceptant de partager les valeurs européennes. Le second
est que, sur le plan géopolitique, le poids de l’Europe dans
le monde serait plus important avec la Turquie que sans elle.
À l’inverse, rejeter pour des raisons ethniques ou religieuses
la candidature de ce pays, après des efforts considérables
consentis en vue de son adhésion, ne manquerait pas de faire
le jeu de tous ceux qui prônent le « choc des civilisations » ou
qui cherchent à opposer l’Occident à l’Islam.
Les opposants à l’adhésion de la Turquie invoquent des argu-
ments variés. Beaucoup estiment que la Turquie n’appartient,
ni géographiquement, ni culturellement, à l’Europe. La Turquie
serait, si elle adhérait, l’État le plus peuplé de l’Union, donc le
mieux représenté au Conseil et au Parlement européen. Cela
créerait un déséquilibre institutionnel. S’y ajouterait un désé-
quilibre économique, l’économie turque, bien que dynamique,
étant moins développée que celle des États membres. D’autres
craignent la dilution du projet européen qui résulterait de
cette adhésion. Certains insistent sur les remises en cause de
la laïcité opérées par le parti au pouvoir, la place qu’y occupe
encore l’armée dans les institutions, la protection insuffisante
de la minorité kurde, ou encore sur l’absence d’égalité entre
les sexes. L’impossibilité pour un État d’adhérer à l’Union
alors qu’il ne reconnaît pas l’un de ses membres, Chypre, est
également soulignée.
90
@ vous la parole
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de 5 euros représentent le style classique ; ceux de 10 euros
le style roman ; les billets de 20 euros le style gothique ; les
billets de 50 euros le style renaissance ; les billets de 100 euros
le style baroque et rococo ; les billets de 200 euros le style
industriel du xixe siècle et les billets de 500 euros l’architecture
moderne du xxe siècle.
Les huit pièces ont une face commune et une face nationale,
constituée d’un symbole du pays participant. La face commune
des pièces représente trois cartes différentes de l’Europe. Les
pièces de 1, 2 et 5 cents présentent sur un globe la position
de l’Europe par rapport à l’Afrique et à l’Asie. S’agissant de
la face nationale, pour la France, un arbre, évoquant la vie,
la croissance et la pérennité, apparaît sur les pièces de 1 euro
et 2 euros. Il est entouré par la devise républicaine « Liberté,
Égalité, Fraternité ». Le thème traditionnel de la Semeuse figure
sur les pièces de 10, 20 et 50 cents. L’effigie d’une Marianne
jeune et féminine, symbole de la République française, orne
les pièces de 1, 2 et 5 cents. Pour l’Allemagne, par exemple,
c’est l’aigle fédéral, symbole traditionnel de la souveraineté
allemande, entouré par les douze étoiles de l’UE, qui figure
sur les pièces de 1 et 2 euros.
92
@ vous la parole
93
pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. L’Union
a été acceptée comme membre à part entière, doté du droit
de vote, au sein de l’Organisation des Nations unies pour
l’alimentation et l’agriculture (FAO).
Le statut de l’Union au sein des organes des Nations unies
s’est renforcé ces dernières années. Depuis le 3 mai 2011, elle
dispose ainsi du statut d’observateur à l’Assemblée générale
des Nations unies. Ses représentants peuvent être inscrits sur
la liste des orateurs pour faire des interventions, ils peuvent
prendre part au débat général de l’Assemblée générale et
exercer un droit de réponse. L’UE n’a en revanche ni droit de
vote, ni celui de présenter des candidats ou de parrainer des
résolutions. Depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne le
1er décembre 2009, les États membres qui siègent au Conseil
de sécurité de l’ONU doivent demander, lorsque l’UE a adopté
une position commune sur un thème inscrit à son ordre du
jour, que le haut représentant soit invité à présenter la position
de l’Union. Cette disposition ne modifie cependant en rien le
statut des États membres qui siègent au Conseil de sécurité,
en particulier celui de la France et du Royaume-Uni qui en sont
membres permanents. La perspective, évoquée par certains et
rejetée par d’autres, d’accorder un siège de membre permanent
à l’Union européenne au sein du Conseil de sécurité, reste une
perspective lointaine.
94
@ vous la parole
95
La politique de l’environnement repose sur les principes de
précaution et d’action préventive, sur le principe de la cor-
rection des atteintes à l’environnement et sur le principe du
pollueur-payeur.
Les principaux axes de la politique environnementale de l’UE
sont :
– la lutte contre les pollutions de l’air et de l’eau ;
– la prévention des risques majeurs (ex : accident d’usines
chimiques comme à Seveso en Italie en 1976) : les États doivent
prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir un acci-
dent majeur (directives Seveso de 1982 et Seveso II de 1996) ;
– la protection de la nature et de la biodiversité (ex : directive
relative à la protection des oiseaux sauvages de 1979, les direc-
tives « habitats » de 1992 et 1997 visant à établir un réseau
européen d’espaces protégés « Natura 2000 »).
L’UE, dans le cadre du protocole de Kyoto, s’est fixé pour
objectif une réduction des émissions de gaz à effet de serre
de 20 % en 2020 – voire 30 % si d’autres grandes économies
prennent des mesures comparables – par rapport à 1990.
Elle a réussi à diminuer ses émissions de 18 % entre 1990
et 2012. En janvier 2014, la Commission a proposé de fixer
l’objectif de réduction de ces émissions d’ici 2030 à 40 % par
rapport à 1990.
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@ vous la parole
97
Bibliographie et sitothèque
◗◗ Marie-Thérèse Bitsch,
Histoire de la construction européenne de 1945 à nos
jours, Éditions Complexe, 2008.
◗◗ Renaud Dehousse (dir.),
L’Union européenne, La Documentation française, col-
lection Les Notices, 2014 (à paraître).
◗◗ Philippe Delivet,
Les politiques de l’Union européenne, La Documentation
française, collection Réflexe Europe-Institutions & poli-
tiques, 2013.
◗◗ Yves Doutriaux et Christian Lequesne,
Les institutions de l’Union européenne après la crise de
l’euro, La Documentation française, collection Réflexe
Europe-Institutions & politiques, 9e édition, 2013.
◗◗ Pascal Fontaine,
L’Union européenne. Histoire, institutions, politiques, Le
Seuil, collection Points-Essais, 2012.
◗◗ Marion Gaillard,
L’Union européenne. Institutions et politiques, La
Documentation française, collection Découverte de la
vie publique, 4e édition, 2013.
◗◗ Sylvie Goulard,
Le coq et la perle. Cinquante ans d’Europe, Le Seuil, 2007.
◗◗ Sylvie Goulard, Mario Monti,
De la démocratie en Europe, Flammarion, 2012.
◗◗ Jean-Paul Jacqué,
Droit institutionnel de l’Union européenne, Dalloz,
7e édition, 2012.
99
◗◗ Bino Olivi et Alessandro Giacone,
L’Europe difficile. La construction européenne, Gallimard,
collection Folio, 2007.
◗◗ François-Xavier Priollaud et David Siritzky,
Le traité de Lisbonne. Texte et commentaire article par
article des nouveaux traités européens (TUE-TFUE), La
Documentation française, 3e édition, 2013.
◗◗ Coulisses de Bruxelles : le blog de Jean Quatremer,
correspondant de Libération à Bruxelles
◗ Europa : le site officiel de l’Union européenne
◗ Le site du Parlement européen
100
Collection Doc’ en poche
SÉRIE « ENTREZ DANS L’ACTU »
1. Parlons nucléaire en 30 questions
de Paul Reuss
2. Parlons impôts en 30 questions (2e édition mars 2013)
de Jean-Marie Monnier
3. Parlons immigration en 30 questions
de François Héran
4. France 2012, les données clés du débat présidentiel
des rédacteurs de la Documentation française
5. Le président de la République en 30 questions
d’Isabelle Flahault et Philippe Tronquoy
6. Parlons sécurité en 30 questions
d’Éric Heilmann
7. Parlons mondialisation en 30 questions
d’Eddy Fougier
8. Parlons école en 30 questions
de Georges Felouzis
9. L’Assemblée nationale en 30 questions
de Bernard Accoyer
10. Parlons Europe en 30 questions (2e édition octobre 2014)
de David Siritzky
13. Parlons dette en 30 questions
de Jean-Marie Monnier
14. Parlons jeunesse en 30 questions
d’Olivier Galland
21. Parlons justice en 30 questions
d’Agnès Martinel et Romain Victor
22. France 2014, les données clés
des rédacteurs de la Documentation française
25. Parlons gaz de schiste en 30 questions
de Pierre-René Bauquis
26. Parlons banque en 30 questions
de Jézabel Couppey-Soubeyran et Christophe Nijdam
30. France 2015
des rédacteurs de la Documentation française
SÉRIE « PLACE AU DÉBAT »
11. Retraites : quelle nouvelle réforme ?
d’Antoine Rémond
12. La France, bonne élève du développement durable ?
de Robin Degron
15. L’industrie française décroche-t-elle ?
de Pierre-Noël Giraud et Thierry Weil
16. Tous en classes moyennes ?
de Serge Bosc
23. Crise ou changement de modèle ?
d’Élie Cohen
24. Réinventer la famille ?
de Stéphanie Gargoullaud et Bénédicte Vassallo