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Par ailleurs, il incombe de s’interroger sur les contraintes et les choix de vie qui mènent à s’ins-
taller en périphérie des centres urbains. La périurbanisation est parfois guidée par des considé-
rations financières (gentrification des centres villes), parfois par des désirs d’espace, de calme, de
nature. Ainsi, 65% des français préféreraient vivre à la campagne, versus 35% pour la ville, selon
l’étude menée par CSA pour l’Observatoire du Bonheur “ Pour vivre heureux, vivons… en ville ou à la
campagne ? ” (juin 2015). Dès lors, il semble pertinent de faire évoluer l’approche de la lutte contre
l’étalement urbain en privilégiant une réflexion sur les causes (la montée des prix de l’immobilier, la
répulsion ou le désintérêt à l’égard des centres villes, le développement de l’automobile individuelle,
l’aspiration à la propriété…), mais également un accompagnement cohérent de l’expansion urbaine
et une limitation de ses impacts négatifs sur le cadre de vie.
En marche pour une nouvelle approche de la mobilité
L a problématique de l’étalement urbain est intrinsèquement liée à celle de la mobilité. En
Aquitaine, les transports sont les principaux émetteurs de CO2 et la voiture restait le mode de
transport le plus utilisé en Aquitaine en 2013 selon l’INSEE72
. En 2009, deux actifs aquitains sur trois
quittaient leur commune de résidence pour aller travailler. La diminution des distances de dépla-
cement et le développement des modes alternatifs à la voiture individuelle constituent des pistes
d’amélioration. L’essor de l’auto-partage et du covoiturage s’inscrit dans cette logique. On assiste
ainsi à la multiplication des plateformes et des utilisateurs de ces services de mise en relation.
Ce mouvement sociétal émergent doit être soutenu et favorisé par l’intermédiaire de dispositifs
incitatifs tels que les voies dédiées ou les péages réduits.
Certaines innovations technologiques peuvent également être mobilisées. La géolocalisation
permet aujourd’hui de faciliter la localisation des véhicules de transport en commun. Les avancées
de la recherche sur la réduction des nuisances sonores liées aux transports permettraient de favo-
" Les moteurs de voiture,
les bruits de la ville, les
embouteillages, les barres
d’immeubles, la pollution,
les gaz d’échappement,
la saturation de l’air,
le monde... "
" Le son des oiseaux qu’on
entend chanter le matin,
le vent dans la forêt qui
m’entoure, le silence... "
72
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riser le regroupement d’habitations autour de stations de transports collectifs73
. Plus largement, la
mobilité adaptée à tous les publics (personnes âgées, enfants, femmes seules) constitue un enjeu
majeur de la réflexion sur les évolutions de la mobilité, en termes de transports en commun mais
également de modes doux (marche, vélo). Ceci implique de travailler sur l’éclairage des espaces
publics, la taille des trottoirs, l’ergonomie du matériel… mais également les modalités de valorisa-
tion du tempspassé dans les transports.
L’innovation, incontestable en terme de mobilité, ne peut toutefois pas justifier une urbanisation
sans frein dans les zones dépourvues de transports collectifs (c’est par exemple le cas de la zone
de l’Entre-deux mers dont les habitants ne peuvent accéder aux transports collectifs qu’aux limites
de la métropole.) Il est essentiel de travailler à la construction d’un système global de mobilités
associant l’ensemble des modes alternatifs, articulés autour de transports collectifs (bouquets
de services de mobilité)74
. L’automobile conserve une zone de pertinence, mais elle doit être au
maximum utilisée de manière mutualisée et en complémentarité avec d’autres modes. Au-delà des
impacts négatifs de l’automobile individuelle sur l’environnement (et sur le budget des ménages), le
questionnaire sensoriel a confirmé la récurrence de la référence aux embouteillages en association
aux perceptions négatives (en termes de vue, d’ouïe, d’odeurs).
Une évolution des modes d’organisation peut avoir un impact non négligeable sur les usages : par
exemple, les parkings en horaires de nuit favorisent les embouteillages en horaires de pointe. Il est
nécessaire de repenser les rythmes pour mieux les adapter aux situations personnelles, dans un
contexte de désynchronisation des modes de vie75
. Le développement du télétravail constitue une
réponse (parmi d’autres) à la problématique de la mobilité.
73
Proposition du Groupement autorités responsables de transport, commentaire sur le document « Vers la feuille de route de la conférence envi-
ronnementale»du 12sept2014.
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Proposition du Groupement autorités responsables de transport, commentaire sur le document « Vers la feuille de route de la conférence envi-
ronnementale»du 12sept2014.
75
écolesansvoiture, dialogue avec lessalariés…
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La Région Auvergne a ainsi développé des contrats de travail incluant un jour de télé-travail de
manière à recruter des salariés dans un rayon plus large (100 km). Ce mouvement se développe en
France où de nombreuses expérimentations émergent. Systèmes d’identification, de visioconfé-
rence, de rédaction interactive… Le recours à la technologie est indispensable mais il n’est cepen-
dant pas suffisant pour ancrer une véritable innovation sociétale. S’il répond à la problématique des
transports, le télétravail peut conduire à un isolement et une atomisation des salariés. La création de
“ tiers lieux ” constitue une voie intéressante vers la mutualisation des espaces et des services, mais
aussi vers la collaboration et les échanges entre disciplines.
Créer de nouveaux lieux de vie pour dynamiser les
zones intermédiaires
L e développement des tiers lieux s’impose comme une priorité interrégionale pour revita-
liser les périphéries urbaines et les zones rurales de la future région ALPC76
. De nombreux
territoires de la future région (nord des Landes, sud des Pyrénées-Atlantiques, de la Gironde et de la
Vienne, Creuse, Corrèze) présentent un niveau d’équipement de la gamme intermédiaire relative-
ment modeste, voire très faible pour certaines zones (Annexe 6). Au-delà de la densification en tant
que telle, il s’agit donc avant tout de repenseret réinvestir les zones intermédiaires (développement
en réseau / grappes) en dynamisant les centres bourgs.
La dynamisation ne passe pas seulement par l’implantation de commerces (qui peut être difficile
dans des zones de faible activité), mais aussi par la création de lieux de vie et de rencontres. Pour
cela, il convient de repenser les services indispensables pour stimuler le lien social : concier-
gerie, bibliothèque, piano bar, atelier de réparation, échanges de cours, espaces de travail mutua-
lisés, points d’accès au numérique (permettant par ailleurs de conserver des “ zones blanches ”,
de ressourcement, sur le territoire)... Ces services pourraient être centralisés au sein de maisons
communes d’activités, (favorisant par ailleurs les échanges entre générations !). Le manifeste des
“ smart villages ” promeut la création de maisons de services publics ou conciergeries, s’appuyant sur
le numérique pour développer des pratiques nouvelles en matière d’entrepreneuriat, de santé, d’édu-
cation ou d’accès à la culture77
.
Les pouvoirs publics ont tout intérêt à favoriser la réhabilitation d’espaces délaissés (anciens bassins
miniers, bâtiments désaffectés…) et leur investissement par les habitants. Il existe également un
enjeu important en matière de maintien de la sécurité et de la propreté des espaces publics dans les
centres bourgs en déshérence. La réhabilitation des centres anciens mérite la mise en place d’in-
citations dédiées ou d’aides conditionnées. L’émergence de projets de domiciles regroupés pour le
rural et périurbain, l’essor de la création d’éco-quartiers et de zones mixtes (bureaux, usines, loge-
ments…), répondent à la volonté de générer une dynamiqueautour d’activités et de lieux de vie. Les
pouvoirs publics doivent accompagner ce mouvement de décloisonnement des espaces. La fusion
des composantes économiques, sociales, culturelles dans un même lieu induit de nouvelles formes
d’échanges et un nouveau vivre-ensemble. Elle peut également avoir un impact sur la mobilité, en
transformant la mobilité pendulaire en mobilité d’opportunité.
" Les bâtiments vides,
les friches, les zones
pavillonnaires moches
et anarchiques, les zones
d’activité abandonnées,
au paysage triste et
hostiles aux déplacements
à pied ou à vélo... "
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Repenser la mobilite en aquitaine rapport ceser aq dec.2015

  • 1. 39 Par ailleurs, il incombe de s’interroger sur les contraintes et les choix de vie qui mènent à s’ins- taller en périphérie des centres urbains. La périurbanisation est parfois guidée par des considé- rations financières (gentrification des centres villes), parfois par des désirs d’espace, de calme, de nature. Ainsi, 65% des français préféreraient vivre à la campagne, versus 35% pour la ville, selon l’étude menée par CSA pour l’Observatoire du Bonheur “ Pour vivre heureux, vivons… en ville ou à la campagne ? ” (juin 2015). Dès lors, il semble pertinent de faire évoluer l’approche de la lutte contre l’étalement urbain en privilégiant une réflexion sur les causes (la montée des prix de l’immobilier, la répulsion ou le désintérêt à l’égard des centres villes, le développement de l’automobile individuelle, l’aspiration à la propriété…), mais également un accompagnement cohérent de l’expansion urbaine et une limitation de ses impacts négatifs sur le cadre de vie. En marche pour une nouvelle approche de la mobilité L a problématique de l’étalement urbain est intrinsèquement liée à celle de la mobilité. En Aquitaine, les transports sont les principaux émetteurs de CO2 et la voiture restait le mode de transport le plus utilisé en Aquitaine en 2013 selon l’INSEE72 . En 2009, deux actifs aquitains sur trois quittaient leur commune de résidence pour aller travailler. La diminution des distances de dépla- cement et le développement des modes alternatifs à la voiture individuelle constituent des pistes d’amélioration. L’essor de l’auto-partage et du covoiturage s’inscrit dans cette logique. On assiste ainsi à la multiplication des plateformes et des utilisateurs de ces services de mise en relation. Ce mouvement sociétal émergent doit être soutenu et favorisé par l’intermédiaire de dispositifs incitatifs tels que les voies dédiées ou les péages réduits. Certaines innovations technologiques peuvent également être mobilisées. La géolocalisation permet aujourd’hui de faciliter la localisation des véhicules de transport en commun. Les avancées de la recherche sur la réduction des nuisances sonores liées aux transports permettraient de favo- " Les moteurs de voiture, les bruits de la ville, les embouteillages, les barres d’immeubles, la pollution, les gaz d’échappement, la saturation de l’air, le monde... " " Le son des oiseaux qu’on entend chanter le matin, le vent dans la forêt qui m’entoure, le silence... " 72
  • 2. 40 riser le regroupement d’habitations autour de stations de transports collectifs73 . Plus largement, la mobilité adaptée à tous les publics (personnes âgées, enfants, femmes seules) constitue un enjeu majeur de la réflexion sur les évolutions de la mobilité, en termes de transports en commun mais également de modes doux (marche, vélo). Ceci implique de travailler sur l’éclairage des espaces publics, la taille des trottoirs, l’ergonomie du matériel… mais également les modalités de valorisa- tion du tempspassé dans les transports. L’innovation, incontestable en terme de mobilité, ne peut toutefois pas justifier une urbanisation sans frein dans les zones dépourvues de transports collectifs (c’est par exemple le cas de la zone de l’Entre-deux mers dont les habitants ne peuvent accéder aux transports collectifs qu’aux limites de la métropole.) Il est essentiel de travailler à la construction d’un système global de mobilités associant l’ensemble des modes alternatifs, articulés autour de transports collectifs (bouquets de services de mobilité)74 . L’automobile conserve une zone de pertinence, mais elle doit être au maximum utilisée de manière mutualisée et en complémentarité avec d’autres modes. Au-delà des impacts négatifs de l’automobile individuelle sur l’environnement (et sur le budget des ménages), le questionnaire sensoriel a confirmé la récurrence de la référence aux embouteillages en association aux perceptions négatives (en termes de vue, d’ouïe, d’odeurs). Une évolution des modes d’organisation peut avoir un impact non négligeable sur les usages : par exemple, les parkings en horaires de nuit favorisent les embouteillages en horaires de pointe. Il est nécessaire de repenser les rythmes pour mieux les adapter aux situations personnelles, dans un contexte de désynchronisation des modes de vie75 . Le développement du télétravail constitue une réponse (parmi d’autres) à la problématique de la mobilité. 73 Proposition du Groupement autorités responsables de transport, commentaire sur le document « Vers la feuille de route de la conférence envi- ronnementale»du 12sept2014. 74 Proposition du Groupement autorités responsables de transport, commentaire sur le document « Vers la feuille de route de la conférence envi- ronnementale»du 12sept2014. 75 écolesansvoiture, dialogue avec lessalariés…
  • 3. 41 La Région Auvergne a ainsi développé des contrats de travail incluant un jour de télé-travail de manière à recruter des salariés dans un rayon plus large (100 km). Ce mouvement se développe en France où de nombreuses expérimentations émergent. Systèmes d’identification, de visioconfé- rence, de rédaction interactive… Le recours à la technologie est indispensable mais il n’est cepen- dant pas suffisant pour ancrer une véritable innovation sociétale. S’il répond à la problématique des transports, le télétravail peut conduire à un isolement et une atomisation des salariés. La création de “ tiers lieux ” constitue une voie intéressante vers la mutualisation des espaces et des services, mais aussi vers la collaboration et les échanges entre disciplines. Créer de nouveaux lieux de vie pour dynamiser les zones intermédiaires L e développement des tiers lieux s’impose comme une priorité interrégionale pour revita- liser les périphéries urbaines et les zones rurales de la future région ALPC76 . De nombreux territoires de la future région (nord des Landes, sud des Pyrénées-Atlantiques, de la Gironde et de la Vienne, Creuse, Corrèze) présentent un niveau d’équipement de la gamme intermédiaire relative- ment modeste, voire très faible pour certaines zones (Annexe 6). Au-delà de la densification en tant que telle, il s’agit donc avant tout de repenseret réinvestir les zones intermédiaires (développement en réseau / grappes) en dynamisant les centres bourgs. La dynamisation ne passe pas seulement par l’implantation de commerces (qui peut être difficile dans des zones de faible activité), mais aussi par la création de lieux de vie et de rencontres. Pour cela, il convient de repenser les services indispensables pour stimuler le lien social : concier- gerie, bibliothèque, piano bar, atelier de réparation, échanges de cours, espaces de travail mutua- lisés, points d’accès au numérique (permettant par ailleurs de conserver des “ zones blanches ”, de ressourcement, sur le territoire)... Ces services pourraient être centralisés au sein de maisons communes d’activités, (favorisant par ailleurs les échanges entre générations !). Le manifeste des “ smart villages ” promeut la création de maisons de services publics ou conciergeries, s’appuyant sur le numérique pour développer des pratiques nouvelles en matière d’entrepreneuriat, de santé, d’édu- cation ou d’accès à la culture77 . Les pouvoirs publics ont tout intérêt à favoriser la réhabilitation d’espaces délaissés (anciens bassins miniers, bâtiments désaffectés…) et leur investissement par les habitants. Il existe également un enjeu important en matière de maintien de la sécurité et de la propreté des espaces publics dans les centres bourgs en déshérence. La réhabilitation des centres anciens mérite la mise en place d’in- citations dédiées ou d’aides conditionnées. L’émergence de projets de domiciles regroupés pour le rural et périurbain, l’essor de la création d’éco-quartiers et de zones mixtes (bureaux, usines, loge- ments…), répondent à la volonté de générer une dynamiqueautour d’activités et de lieux de vie. Les pouvoirs publics doivent accompagner ce mouvement de décloisonnement des espaces. La fusion des composantes économiques, sociales, culturelles dans un même lieu induit de nouvelles formes d’échanges et un nouveau vivre-ensemble. Elle peut également avoir un impact sur la mobilité, en transformant la mobilité pendulaire en mobilité d’opportunité. " Les bâtiments vides, les friches, les zones pavillonnaires moches et anarchiques, les zones d’activité abandonnées, au paysage triste et hostiles aux déplacements à pied ou à vélo... " 76 77