Vieille prière bouddhique
Prière quotidienne pour tout l'univers
Vieille prière bouddhique LB 35 Prière quotidienne pour tout l'univers | |
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Genre | Musique sacrée |
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Musique | Lili Boulanger |
Texte | Suzanne Karpelès |
Langue originale | français |
Sources littéraires | Visuddhimagga |
Effectif | ténor, chœur (SATB) et orchestre symphonique |
Durée approximative | 7 minutes |
Dates de composition | 1914-1917 |
Création | Paris, salle Pleyel |
Interprètes | Gabriel Paulet (ténor), chœur d'élèves des classes d'ensemble du Conservatoire, Nadia Boulanger (piano), Henri Büsser (dir.) |
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La Vieille prière bouddhique (Prière quotidienne pour tout l'univers) est une œuvre pour ténor, chœur mixte et piano ou orchestre composée par Lili Boulanger de 1914 à 1917.
Histoire
[modifier | modifier le code]La compositrice a écrit plusieurs partitions de musique religieuse chrétienne. Cette œuvre a la particularité de mettre en musique une prière bouddhique, connue sous le nom de « Metta sutta » et traduite du pali en français par Suzanne Karpelès[1].
« Vieille prière bouddhique. Prière quotidienne pour tout l’Univers
Que toute chose qui respire, sans ennemis, sans obstacles, surmontant la douleur et atteignant le bonheur, puisse se mouvoir librement, chacune dans la voie qui lui est destinée.
Que toutes les créatures et partout, tous les esprits et tous ceux qui sont nés, sans ennemis, sans obstacles, surmontant la douleur et atteignant le bonheur, puisse se mouvoir librement, chacun dans la voie qui lui est destinée.
Que toutes les femmes, que tous les hommes, les Aryens et les non Aryens, tous les dieux et tous les humains et ceux qui sont déchus, sans ennemis, sans obstacles, surmontant la douleur et atteignant le bonheur, puisse se mouvoir librement, chacun dans la voie qui lui est destinée. En Orient et en Occident, au Nord et au Sud, que tous les êtres qui existent, sans ennemis, sans obstacles, surmontant la douleur et atteignant le bonheur, puisse se mouvoir librement, chacun dans la voie qui lui est destinée. »
Le musicologue Harry Halbreich note à propos de cette prière :
« C'est un texte admirable en son message de paix et de tolérance largement œcuménique, englobant nommément la création entière[2]. »
Composition et création
[modifier | modifier le code]Commencée en 1914, la partition est terminée à Arcachon au printemps 1917. Cependant, Lili Boulanger n'a jamais entendu elle-même sa composition, qui n'est publiée qu'à titre posthume dans les années 1920. L'œuvre est écrite pour ténor, chœur mixte (SATB) et orchestre (ou piano). La première exécution (sous le titre de « Prière hindoue ») a lieu le , salle Pleyel, avec Henri Büsser à la tête d'un chœur d'élèves des classes d'ensemble du Conservatoire, Gabriel Paulet (ténor) et Nadia Boulanger (piano). La critique est enthousiaste[1],[3].
La Vieille prière bouddhique est ensuite reprise en concert le , salle du Conservatoire, lors d'une « Audition des envois de Rome des œuvres de Lili Boulanger », par la classe d'ensemble vocal du Conservatoire et l'orchestre de l'Opéra, sous la direction d'Henri Busser, avec le ténor David Devriès, puis le , à l'Opéra de Paris, lors d'une série « Grands concerts symphoniques », sous la direction de Serge Koussevitzky[3].
Instrumentation
[modifier | modifier le code]L'instrumentation requiert[3] :
Instrumentation de Vieille prière bouddhique |
Bois |
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2 flûtes, 2 hautbois, cor anglais, 2 clarinettes, clarinette basse, 2 bassons, sarrussophone |
Cuivres |
4 cors, 3 trompettes, 4 trombones, 1 tuba |
Percussions |
timbales, cymbales, grosse caisse |
Claviers / cordes pincées |
célesta, 2 harpes |
Cordes |
premiers violons, seconds violons, altos, violoncelles, contrebasses |
Analyse
[modifier | modifier le code]La Vieille prière bouddhique emploie un riche effectif : un orchestre et un chœur auxquels s'ajoute un ténor solo. Elle prend aussi la forme d'une incantation orientale :
« le ténor revient constamment au fa dièse, au lieu de la note do centrale de la musique d'ouverture, mettant à nouveau en lumière l'importance du triton. L'élément le plus clairement « exotique » de cette œuvre est peut-être le solo de flûte, qui développe la partition du chœur et évoque la musique d'Extrême-Orient dans son timbre et dans ses formes sinueuses d'arabesque[4]. »
La Vieille prière bouddhique est une « émouvante partition, construite sur un seul thème qui oscille autour d'une quarte augmentée, et qui sert de trame aux quatre strophes du poème[5] ».
Adélaïde de Place relève que « tout entière construite sur les discrètes touches exotiques d'un seul thème essentiellement lyrique, cette Prière, d'un contenu spirituel remarquable, est brièvement interrompue par un solo de flûte auquel se superpose le ténor soliste[6] ».
Pour Harry Halbreich, « Lili Boulanger a édifié son œuvre sur une mélodie unique [...] d'un galbe parfait, d'un profil inoubliable, en ut phrygien (toujours ce deuxième degré baissé), répété à la manière d'une psalmodie mais avec des éclairages harmoniques et orchestraux sans cesse renouvelés. Le milieu de cette libre forme ternaire, s'évadant d'abord vers la dominante, puis vers d'autres pôles tonaux, est essentiellement constituée par le ténor, précédant la reprise amplifiée du début[2] ». Le musicologue conclut sur ce jugement : « quelle insondable profondeur dans cette simplicité dépouillée, quintessence de l'âme exceptionnelle de cette toute jeune fille ![2] ».
La durée moyenne d'exécution de la pièce est de sept minutes environ[3].
Édition
[modifier | modifier le code]La partition est publiée par Durand[3].
La réduction pour ténor, chœur et piano (Paris, Durand, 1921-1922) porte le cotage D.&F. 10089 ; la partition d'orchestre (Paris, Durand, 1921-1925, avec une traduction anglaise de J. N. Scholefield) le cotage D.&F. 10090 ; le matériel d'orchestre le cotage D.&F. 10091 et la partition des chœurs seuls le cotage D.&F. 10092[3].
Discographie
[modifier | modifier le code]- Raymond Amade (ténor) avec le Chœur d'Élisabeth Brasseur et Orchestre de l'Association des Concerts Lamoureux, dir. Igor Markevitch (1958, EMI CDM 7 64281 2) (OCLC 496666374)
- Martial Defontaine (ténor) avec le Chœur symphonique de Namur et l'Orchestre philharmonique du Luxembourg dirigé par Mark Stringer, Timpani, 1998/2007.
- Julian Podger (ténor) avec le Monteverdi Choir et l'Orchestre symphonique de Londres dirigé par John Eliot Gardiner, Deutsche Grammophon, 2002.
Bibliographie
[modifier | modifier le code]- (fr + en) Harry Halbreich, « L'esprit souffle où il veut », p. 6-9, Timpani (1C1046), 1998 .
- Alexandra Laederich, « Catalogues de l'œuvre de Nadia Boulanger et de l'œuvre de Lili Boulanger », dans Alexandra Laederich (dir.), Nadia Boulanger et Lili Boulanger : témoignages et études, Symétrie, coll. « Perpetuum mobile », , 533 p. (ISBN 978-2-914373-29-6), p. 309-402.
- Adélaïde de Place, « Lili Boulanger », dans François-René Tranchefort (dir.), Guide de la musique sacrée et chorale profane : De 1750 à nos jours, Paris, Fayard, coll. « Les indispensables de la musique », , 1176 p. (ISBN 2-213-02254-2), p. 94-95.
Références
[modifier | modifier le code]- (de + en + fr) « Lili Boulanger, Vieille prière bouddhique », sur repertoire-explorer.musikmph.de (consulté le )
- Halbreich 1998, p. 9.
- Laederich 2007, p. 384.
- Caroline Potter, Nadia and Lili Boulanger, Londres, Routledge, 2016, p. 104.
- Paul Pittion, La musique et son histoire : tome II — de Beethoven à nos jours, Paris, Éditions Ouvrières, , 574 p., « En France : l'inspiration mystique. Lili Boulanger », p. 445.
- de Place 1993, p. 95.
Liens externes
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- Ressources relatives à la musique :
- (de)+(en) « Lili Boulanger - Vieille prière bouddhique » sur repertoire-explorer.musikmph.de (Outre le texte de la prière, ce site donne une analyse de l'œuvre)
- Une courte analyse de l'œuvre musicale sur (en) journalofmusic.com [lire en ligne (page consultée le 3 novembre 2024)]