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Amédée Despans-Cubières

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Amédée Louis de Cubières
Amédée Despans-Cubières
Portrait par François-Joseph Kinson

Surnom Despans-Cubières
Naissance
Paris
Décès (à 67 ans)
Ancien 2e arrondissement de Paris
Origine Drapeau de la France France
Grade 1813 : Colonel
1837 : Lieutenant-général
1853 : Général de division
Conflits Guerres napoléoniennes
Expédition d’Espagne
Expédition de Morée
Faits d'armes Bataille d'Eylau
Distinctions 1807 : Légion d'honneur
1820 : Chevalier de l’ordre de Saint-Louis
1832: Commandeur de la Légion d’honneur
1839 : Pair de France
1840 : Grand officier de la Légion d’honneur
Chevalier de l’ordre du Sauveur de Grèce
Autres fonctions Ministre de la Guerre
(1839 puis 1840)

Le général Amédée Louis de Cubières, dit Despans-Cubières né le à Paris où il est mort le , est un militaire et homme politique français. Il est deux fois nommé ministre de la Guerre. Il est connu pour son implication dans le scandale Teste-Cubières qui éclate en 1847.

Fils naturel de Madame Guesnon de Bonneuil, née Michelle Sentuary, et du marquis Louis Pierre de Cubières, qui fut page de Louis XV et écuyer de Louis XVI puis, en 1815, de Louis XVIII, Amédée Despans-Cubières, alors âgé de six ans, fut brièvement incarcéré avec sa famille à la prison des Récollets de Versailles après la journée du 10 août 1792, puis il fut mis au nombre des « enfants de la liberté » élevés par l’État dans l’ancienne abbaye de Saint-Martin, avant d’être recueilli par la famille Jordan. En 1803, sur les sollicitations de Madame de Bonneuil, sa mère, il fut adopté par le marquis de Cubières dont il porta le nom sans la particule.

États de service sous l’Empire

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Le Sergent A. Fraser du 2d Battalion des Scots Guards engage le Colonel de Cubières, ferme d'Hougoumont, bataille de Waterloo.

Placé au « prytanée de Saint-Cyr » (École militaire de Fontainebleau), il entra au service comme simple soldat au 1er Régiment de Cuirassiers (1er complémentaire an XI), et entra peu après (1er vendémiaire an XII - ) à l’École militaire de Fontainebleau le , d’où il sortit en qualité de sous-lieutenant au 15e Régiment de Ligne dans lequel il fit les campagnes d’Austerlitz, de Prusse et de Pologne. Il se fit remarquer à Austerlitz et fut blessé à Iéna (). Promu lieutenant le , il reçut la croix de la Légion d'honneur à Eylau (1807).

Aide-de-camp du général Morand (), il suivit son général dans les campagnes d’Autriche en 1809, de Russie en 1812 et d’Allemagne en 1813. Il se distingua à Eckmühl et passa capitaine à Essling (). Il assista à la bataille de Wagram () et eut trois chevaux tués sous lui à la bataille de la Moskowa. Napoléon Ier le fit officier de la Légion d’honneur en récompense de sa belle conduite durant la campagne de 1813, qu’il avait faite comme chef de bataillon (nommé le ). Le , il fut nommé colonel du 18e Régiment d’Infanterie Légère. En 1813, il épousa Aglaé Buffaut, romancière, qui était la fille de sa demi-sœur Marie-Michelle Guesnon de Bonneuil, d’abord vicomtesse du Bouzet de Marin puis Madame Philippe Buffaut.

Lors du retour de Napoléon de l’île d'Elbe en 1815, le colonel de Cubières était colonel à la suite au 1er Régiment d’Infanterie Légère, dont le colonel en titre était Beurnonville. D’après Jolyet, Napoléon, passant ce régiment en revue au lendemain de son retour à Paris, le 21 mars, demanda qui le commandait. Cubières répondit : « Sire, c’est le colonel de Beurnonville ; mais il est malade. » L’Empereur répondit : « Beurnonville n’est pas des nôtres ; c’est vous, colonel Cubières, qui prendrez désormais le commandement du 1er Léger. » Cubières voulut décliner, mais Napoléon ne lui en laissa pas le temps. Bien que dévoué à l’Empereur, Cubières demanda à ses soldats de se prononcer contre l’Acte additionnel aux constitutions de l’Empire, pour marquer la nécessité d’un gouvernement libéral et réformateur. Le 1er Léger fut le seul régiment à émettre un vote négatif, mais on omit d’en tenir compte. En 1815, Despans-Cubières combattit à Waterloo avec son régiment et fut blessé aux Quatre-Bras et à Mont-Saint-Jean.

La Restauration

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Selon Jolyet, Cubières était « le plus vaillant soldat et le meilleur homme de guerre que j’ai connu. Avec cela une beauté remarquable, un esprit brillant, une âme généreuse et indépendante. » Un état nominatif des officiers dressé au moment du licenciement de l’armée le décrit comme étant « de physique agréable, très instruit, excellent colonel, sert avec zèle et fermeté, conduite excellente », et précisait : « a de l’aisance » (de la fortune). L’avis de l’officier général était : « à conserver ». En dépit de cette appréciation, il fut licencié par la Seconde Restauration, mais l’influence de son père à la Cour lui permit d’obtenir la recette générale de la Meuse et la croix de chevalier de Saint-Louis (1820).

Il reprit du service et lors de l’expédition d’Espagne (1823), il fut mis à la tête du 27e Régiment d’Infanterie de Ligne. Il fit la campagne de Morée avec son régiment et reçut le brevet de maréchal de camp ().

Carrière politique sous la monarchie de Juillet

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Promu commandeur de la Légion d’honneur (), il reçut le commandement en chef les troupes qui débarquèrent à Ancône (), dans les États pontificaux, et occupèrent la ville en représailles à l’intervention autrichienne à Bologne. Il rentra en France en 1837 avec le grade de lieutenant-général. Il fut ministre de la Guerre, d’abord dans le gouvernement de transition de 1839, du 31 mars au , puis dans le second ministère Thiers du 1er mars au . Il a attaché son nom aux travaux des fortifications de Paris, à la décision ordonnant d’écrire l’histoire de tous les régiments français depuis François Ier et à l’organisation des chasseurs de Vincennes. Nommé pair de France le , il prit part aux discussions de la Chambre des pairs sur les douanes et sur les chemins de fer.

Il fut élevé à la dignité de grand officier de la Légion d’honneur le et en 1844, Despans-Cubières prononça l'éloge funèbre du général Pajol [1].

Le scandale Teste-Cubières

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Les salines de Gouhenans.

Après qu’il avait quitté l’armée, le général Despans-Cubières fut compromis dans l’affaire Teste-Cubières, l’un des scandales les plus retentissants de la monarchie de Juillet[2].

Despans-Cubières avait acheté 159 000 parts (7 % du capital) d’une société qui, sous l’intitulé « concession de Gouhenans », avait obtenu l’autorisation d’exploiter des gisements de houille à Gouhenans et dans les communes voisines. En fouillant les terrains houillers, la société découvrit un gisement de sel gemme dont elle demanda la concession, qui lui fut refusée. Malgré cela, la société avait entrepris l’extraction et la commercialisation du sel. L’un des associés, Parmentier, fut poursuivi en correctionnelle et condamné à 500 francs d’amende tandis que la saline était fermée le [2],[3].

Le , la société présenta une nouvelle demande de concession. Le général Despans-Cubières se proposa alors pour obtenir, à prix d’argent, l’autorisation demandée du ministre des Travaux publics, Jean-Baptiste Teste. Dans une lettre à l’un de ses associés, écrite en 1842, il indiquait : « Il n’y a pas à hésiter sur les moyens de nous créer un appui intéressé dans le sein même du conseil [des ministres]. J’ai le moyen d’arriver jusqu’à cet appui, c’est à vous d’aviser aux moyens de l’intéresser [...] N’oubliez pas que le gouvernement est dans des mains avides et corrompues. » Teste accepta de la société un pot-de-vin de 94 000 francs[2].

L’affaire fut révélée en mai 1847 à l’occasion d’un procès entre les associés de la compagnie minière devant le tribunal civil de la Seine. Le directeur de la compagnie des mines de sel de Gouhenans, Parmentier, produisit pour sa défense les diverses pièces de correspondance émanant du général Despans-Cubières qui évoquaient le pot-de-vin[2].

L’affaire eut une énorme publicité et le scandale fut retentissant. Le roi décida d’évoquer le procès devant la Chambre des pairs. Le , Teste, Despans-Cubières, Parmentier et un certain Pellapra, ancien receveur général qui avait servi d’intermédiaire comparurent devant la haute juridiction sous l’inculpation de corruption. Le 17 juillet, le général Despans-Cubières fut condamné à la dégradation civique et à 10 000 francs d’amende[2].

Le , il obtint toutefois de la cour d’appel de Rouen un arrêt de réhabilitation. Admis à la retraite comme général de division le , il mourut quelques mois plus tard.

Références

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  • Procès du général Despans-Cubières, lieutenant-general, pair de France, ancien ministre de la guerre, devant la cour des pairs, Paris, Pagnerre, 1847.
  • Le Comte de Monte-Cristo : Selon Librairie Générale Française (1995), le personnage de Fernand, alias le comte de Morcerf, aurait été inspiré par le général Despans-Cubières.

Notes et références

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  1. Les amis de la liberté, qui sont aussi les vrais amis du trône, ce qui reste de la vieille armée, nos jeunes soldats aussi, enfin les citoyens qui nous entourent se sentent profondément émus à l'aspect de ce cercueil. Déjà, vous saviez tous qu'il renferme les restes d'un soldat de la république, aide-de-camp de Kléber, général d'avant-garde de Napoléon, commandant de corps d'armée qui sut avec une rare habileté diriger l'impétuosité de la cavalerie française.
    Il y a là-dedans un corps glacé tout meurtri par la guerre ; c'est celui d'un combattant de , que, pendant douze années, la sagesse du Gouvernement, d'accord avec la reconnaissance royale et la confiance publique, préposa au maintien de l'ordre et à la sûreté de la capitale.
    Ce cercueil dérobe à nos regards la dépouille mortelle du brave général Pajol, enlevé à l'illustre famille parmi laquelle il avait trouvé la compagne la plus dévouée, à ses deux fils qui sont dignes du nom qu'il leur laisse, enlevé à la France entière qui aime les hommes tels que lui, à ses nombreux amis qui le pleurent sincèrement, après un cruel accident, à la suite d'une douloureuse maladie dont il n'espéra point la guérison, et dont il vit approcher le terme avec la résignation d'un chrétien, la fermeté d'un soldat, et le calme d'un honnête homme.
    « Ah ! du moins, disait-il sur son lit de douleur, si c'était un boulet qui m'eût brisé les os, j'aurais été favorisé jusqu'à la fin de ma vie, elle se serait éteinte pour le service de la France, il ne me resterait à demander à Dieu que sa clémence, et ma vieillesse n'eût rien envié à mes jeunes ans. »
    Messieurs, l'âme du général Pajol se révèle, se peint tout entière dans ce peu de mots qu'il m'adressa quelques heures avant de mourir, et qui reflètent les nobles impressions, les sentiments vrais du guerrier intrépide et du citoyen dévoué à son pays. Ah ! combien ces paroles de Pajol expirant et presque les dernières qu'il ait prononcées, nous ont pénétré d'amertume et de regrets, nous qui avions compté les cicatrices dont son corps était couvert, nous qui connaissions l'histoire de ses hauts faits par celle de ses mutilations. En effet, il n'est presque point de champs de bataille, en Russie, en Allemagne, en Italie, où son sang n'ait coulé. L'asile des Invalides s'est ouvert souvent pour de moins graves blessures que celles dont son grand cœur lui donnait la force de ne se point souvenir. Ainsi l'a voulu la Providence : ce fut la seule blessure que le fer ennemi n'eût pas faite qui devait être incurable pour Pajol comblé d'années de gloire, de fatigue, et cependant toujours désireux d'être utile, toujours prêt à se dévouer, toujours ardent à braver le danger, parce que Pajol, jusqu'à son dernier soupir, a été bon, généreux, intrépide.
    Des voix plus exercées que la mienne à fixer l'attention publique, rendront à la mémoire du général Pajol des hommages que le talent saura exprimer en termes dignes de sa haute renommée. Moi, je ne suis qu'un soldat ; l'affection et la reconnaissance m'ont conduit vers cette tombe ; avant qu'elle se ferme je vous dirai ce que je sais des services que Pajol a rendus à la France, de l'estime dont il jouissait, des nobles qualités de son cœur. Je peux vous en parler, car j'ai combattu sous ses ordres, et l'amitié dont il m'honora date de plus de trente années.
    Claude-Pierre Pajol, lieutenant-général, comte et pair de France, grand'croix de la Légion d'Honneur, grenadier et sergent-major en 1791, au 1er bataillon du Doubs, naquit à Besançon, le . Son père, avocat au parlement de cette ville, le destinait à la même profession ; mais le jeune Pajol partageait au plus haut degré l'élan patriotique qui donna tant de défenseurs à l'indépendance nationale, et qui attira de la Franche-Comté tant d'héroïques soldats sous le drapeau tricolore. Devenu sous-lieutenant au régiment de Saintonge, il n'y fut pas moins remarqué par son extrême bravoure que par ses avantages physiques. Deux blessures et plusieurs actions d'éclat furent ses titres à la confiance de Kléber, qui le chargea de porter à Paris trente-six drapeaux pris sur l'ennemi. Blessé de nouveau au passage de la Lahn, il n'en prit pas une part moindre aux opérations de la campagne de 1796, et, plus tard, à celle de 1799, sous les ordres du général Hoche, comme chef d'escadron au 4e régiment de hussards. Dans la campagne de Suisse, sous les ordres de Masséna, il conduisit fréquemment ce régiment à la victoire, et sut le tirer des positions périlleuses où le plaçait parfois l'ardeur de la poursuite.
    Nommé colonel le et placé à la tête du 6e régiment de hussards, il rendit à l'armée d'Italie un service signalé, en soutenant la retraite depuis Novi. En 1801, le 6e hussards formait l'avant-garde du général Lecourbe ; la belle conduite de son chef à la bataille de Neubourg et à celle de Hohenlinden, fut récompensée par un sabre d'honneur. Devenu général de brigade après la campagne d'Austerlitz, il se distingua sur la Passarge, à l'affaire de Gudstadt et au combat d'Heilsberg, où il sut, avec sa brigade, résister à des forces triples. En 1809, le général Pajol commandait les avant-postes sur la frontière de Bohême ; il y fut attaqué deux heures après avoir reçu la déclaration de guerre de l'Autriche. Par sa ténacité, par l'habileté de ses manœuvres, il ralentit la marche de l'ennemi, et donna le temps au maréchal Davout de réunir son corps d'armée. Les services qu'il rendit dans cette circonstance très critique et la part qu'il prit au succès de la bataille d'Eckmühl, lui valurent la décoration de commandeur de la Légion d'Honneur et la réputation d'un des plus habiles généraux d'avant-garde. Il ne fit que l'affermir et l'accroître par sa poursuite des Autrichiens après Ratisbonne, et par sa conduite à Wagram, où il se trouva aux prises, à l'extrême droite, avec toute la cavalerie de l'archiduc Jean. C'est là qu'au milieu d'une mêlée devenue générale, n'ayant plus à sa disposition que le 11e régiment de chasseurs pour dernier échelon de réserve, le général Pajol, à la tête de ce régiment, s'avança au pas, au-devant des masses de la cavalerie ennemie, les refoula par la fermeté de sa contenance, et osa se précipiter au milieu d'elles pour donner le temps au général Montbrun de reformer sa division.
    En 1812, le général Pajol eut le commandement de l'avant-garde du 1er corps d'armée aux ordres du maréchal Davout. Le , il passa le premier le Niémen. Constamment aux prises avec l'arrière-garde ennemie, il traversa Wilna, poussa sur Minsk, battit l'une des divisions du prince Bagration à Oshmania, et, par une marche de nuit, parvint à s'emparer de son parc d'artillerie près de Kaloui ; expédition aussi glorieuse que rapide, qui valut à Pajol le grade de général de division, dont le brevet porte la date du . À la bataille de la Moskowa, la cavalerie du général Pajol était placée au centre, non loin des redoutes de l'ennemi ; elle y fit des pertes immenses, et contribua cependant à décider la victoire, en reprenant au galop, à la voix de son chef, plusieurs pièces d'artillerie dont l'ennemi venait de s'emparer. Le surlendemain, le général Pajol eut le bras droit cassé d'un coup de feu en chargeant sur un bataillon russe, ce qui ne l'empêcha pas de suivre l'ennemi jusqu'à Moscou. Dans la retraite, ses conseils furent mis à profil pour le passage de la Bérésina, dont il avait reconnu les rives avec soin dans la marche en avant.
    En 1813, Pajol, à peine guéri de ses blessures, combattait à Lutzen et à Bautzen ; pendant l'armistice, il se trouva, comme en 1809 sur la frontière de Bohême, exposé aux premières attaques de l'armée autrichienne, rentrant alors dans la coalition. Quoique débordé de toutes parts, il ne fut point entamé et parvint à se retirer sur Dresde, où tenant la droite du corps commandé par le maréchal Saint-Cyr, il soutint pendant deux jours les efforts des Austro-Russes, et débouchant plus tard avec impétuosité sur Pirna, vint donner la main aux débris du corps d'armée de Vandamme. A Leipsick, dans le cercle de feu où 80 000 Français faisaient face à 250 000 assaillants, pendant trois jours le général Pajol mena successivement à la charge tous les corps de cavalerie qui furent mis sous ses ordres, disputant le terrain pied à pied, reprenant rapidement celui qu'il avait été forcé d'abandonner. Grièvement blessé d'un obus qui éclata dans le ventre de son cheval, il fui laissé parmi les morts ; le dévouement de ses officiers leur inspira l'idée de rechercher son corps. Au milieu de tant de débris, Pajol fut retrouvé, respirant encore, et fut rapporté à l'ambulance. Quelques mois plus tard, il était à cheval, le bras en écharpe, défendant le sol sacré de la patrie, à la tête de l'armée d'observation de la Seine et de l'Yonne. Du 17 au , il manœuvra sur montereau ; l'appui que devaient lui prêter les corps irréguliers se faisait attendre, les forces de l'ennemi s'accroissaient ; il allait céder au nombre et se reployer, quand, sur un avis de l'Empereur, le général Pajol tente un dernier effort : une charge audacieuse le rend maître de Montereau ; le pont est franchi ; l'ennemi, dont le général Gérard renversait les masses, poursuivi sur les deux rives de l'Yonne, abandonne toute son artillerie et 5 000 prisonniers. La décoration de grand officier de la Légion d'honneur fut la récompense de celle glorieuse action, la dernière de cette guerre, à laquelle ses forces épuisées permirent à Pajol de prendre part.
    Le , le général Pajol se soumit au gouvernement impérial, restauré par les fautes de ceux qui froissaient toutes les susceptibilités nationales. Le prix de cette adhésion était dans les nouveaux dangers que le peuple français allait affronter ; Pajol devait en prendre sa bonne part, comme toujours et comme partout. Le , il passait la Sambre, s'emparait de Charleroy, le 16 il luttait contre des forces supérieures devant Fleurus, le 17 il atteignait l'arrière-garde des Prussiens et lui enlevait dix pièces de canon, les seules qui furent prises dans cette campagne, et que Napoléon paya du grand-cordon de la Légion-d'Honneur. Le 18, Pajol, entendant le canon de Waterloo, se rapprocha de la Dyle ; le 19, la nouvelle d'un grand malheur n'abattit point son courage, il parlait de tomber sur le flanc des vainqueurs ; sous Paris encore, il refusait énergiquement d'adhérer à la capitulation.
    Mais que pouvaient les efforts des valeureux défenseurs de la France contre toute l'Europe ? Les destinées devaient s'accomplir ; l'armée se retira derrière la Loire ; Pajol l'y suivit, et quand elle fut licenciée, il demanda sa retraite qui lui fut aussitôt accordée.
    J'ai faiblement tracé l'esquisse d'une vie militaire pleine de grandes actions ; que vous dirais-je maintenant du citoyen, sinon, ce que vous savez tous, ce qui ne peut être ignoré de personne dans Paris, j'ai presque dit dans la France entière ?
    Général illustre, soldat glorieux, grand dignitaire de l'Empire, membre de la pairie française ; dans les camps comme dans le palais des rois, Pajol a toujours conserve au fond de son cœur les sentiments patriotiques de 1789, de cette grande époque de la régénération sociale de la France. L'indépendance nationale, l'honneur de nos armes, la liberté du citoyen, réglée par les lois, formaient sa religion politique ; il lui resta fidèle jusqu'à la fin de ses jours. Cet ardent patriote respecta toujours les convictions de ses adversaires politiques, souvent il leur tendit la main ; sa modération, sa droiture, furent payées de l'affection de tous les honnêtes gens et du respect de tous les partis.
    Quand l'énergique population de Paris, bientôt imitée par celle du reste de la France, luttait en 1830 contre les attentats du pouvoir, le générât Pajol affrontait tous les périls, il se montrait au peuple, qui n'avait pris pour conseillers et pour chefs que ses propres inspirations : la présence de Pajol au milieu des barricades était un encouragement, sa personne un drapeau. Vers le milieu des trois grandes journées, alors que la victoire restait indécise entre la tyrannie et la liberté, on lui offrait les moyens d'échapper aux périls d'une défaite imminente, on le pressait de quitter Paris ; Pajol, en montrant les Parisiens armés: «Abandonner ceux qui combattent pour notre liberté serait une lâcheté, mon parti est pris depuis longtemps ; je mourrai avec eux. »
    Peu de mois s'étaient écoulés, que le général Pajol, investi du commandement de la 1re division militaire, avait à lutter contre des entreprises insensées, fruits de l'exaltation qui peut troubler les plus nobles âmes quand les esprits se laissent égarer, quand les lois sont méconnues, quand les factieux parviennent à tromper le peuple.
    Pajol avait mis au service du Gouvernement de Juillet son immense popularité : sincèrement dévoué à la famille d'Orléans, il défendit les lois et la nouvelle dynastie avec vigueur, au péril de sa vie, par les armes qui lui étaient confiées ; mais il n'était pas de ceux qui refusent de faire un pas vers l'ennemi désarmé ; aussi plus d'une conversion sincère, plus d'un retour aux principes de la raison, à ceux d'une sage liberté, a été le prix de la bienveillance qu'il savait témoigner à la jeunesse de Paris.
    Il me sera permis de le dire, moi qui fus son chef d'état-major dans les temps les plus critiques, la modération du général Pajol a été aussi utile après le combat, que sa fermeté fut constante et efficace pendant l'émeute.
    Heureux de la prospérité publique, de l'affermissement du trône et des lois qui lui servent de base, Pajol jouissait d'une vieillesse honorée dans un poste élevé, conquis par ses services, garanti par sa loyauté ; il n'attendait pas encore son successeur, il l'accepta sans murmurer, ainsi que la décision qui lui imposait la non-activité.
    Tel fut l'homme modeste et simple, tel fut le guerrier héroïque, tel fut le citoyen irréprochable que nos regrets et notre estime accompagnent à son dernier asile. Que sa cendre y repose en paix, que sa glorieuse vie serve d'exemple !
    Source
    Jean Maximilien Lamarque et baron François Nicolas Fririon, Le Spectateur militaire : Recueil de science, d'art et d'histoire militaires, vol. 1868, Bureau de Spectateur militaire, (lire en ligne)

    passage

  2. a b c d et e « L’affaire Teste-Cubières, ou la chute retentissante du ministre bagnolais corrompu », sur objectifgard.com, .
  3. La Haute-Saône Nouveau dictionnaire des communes Tome II, Société d'agriculture, lettres, sciences et arts de la Haute-Saône, .
  4. Notice Archives nationales

Liens externes

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