Déclaration d'indépendance des Philippines
La déclaration d’indépendance des Philippines a été proclamée le par Emilio Aguinaldo à Cavite El Viejo (de nos jours Kawit) dans la province de Cavite. L’acte d’indépendance écrit en espagnol a été ratifié le par le congrès de Malolos (en). Elle ouvre la voie à l’instauration de la Première République des Philippines après près de trois siècles de colonisation espagnole. Toutefois, cette première période d’indépendance ne dure que peu de temps, les États-Unis conquérant et colonisant l’archipel à partir de 1901.
Le 12 juin est de nos jours la fête nationale des Philippines.
Contexte
[modifier | modifier le code]La révolution philippine, qui a éclaté en à l’initiative du Katipunan, prend un tour définitivement favorable pour les insurgés après l’entrée en guerre des États-Unis contre l’Espagne en avril 1898. Les révolutionnaires, dont Emilio Aguinaldo est alors le meneur, conquièrent en mai toute la province de Cavite et la révolte s’étend ailleurs à Luzon[1],[2].
Déclaration d’indépendance
[modifier | modifier le code]Aguinaldo forme dès le 24 mai les prémices d’un gouvernement révolutionnaire et décide le 5 juin de déclarer l’indépendance. Son conseiller et ami, Apolinario Mabini, y est opposé, préférant prendre le temps de constituer un gouvernement et un État effectif afin d’obtenir la plus large reconnaissance possible de la part des autres États[3]. Aguinaldo cependant souhaite souder et mobiliser le peuple philippin, d’où cette déclaration rapide[3]. Il possède déjà un drapeau pour le pays, confectionné selon ses directives par Marcela Agoncillo, et fait composer à Julián Felipe (en) un hymne national dans les jours précédant le 12 juin[4].
Le 12 juin à 16 heures, Aguinaldo proclame l’indépendance depuis le balcon de sa maison de Cavite El Viejo devant une large foule[4],[5]. Le drapeau et l’hymne national sont présentés aux personnes présentes[3]. Puis Ambrosio Rianzares Bautista lit l’acte d’indépendance qu’il a rédigé[6].
Acte d’indépendance
[modifier | modifier le code]L’Acta de la proclamacion de independencia del pueblo Filipino, écrit par Bautista en s’inspirant notamment de la déclaration américaine[3], est signé par 98 personnes[6]. Le document original est de nos jours entreposé à la Bibliothèque nationale des Philippines (en)[7].
Conséquences
[modifier | modifier le code]Avec la déclaration d’indépendance, la période de colonisation espagnole est sur le point de prendre fin. Organisé en assemblée constituante, le congrès de Malolos ratifie la déclaration le 29 septembre et proclame la Première République le 22 janvier 1899[8]. Toutefois, l’acte d’indépendance stipule initialement la mise en place d’une dictature et confère de forts pouvoirs à Aguinaldo, sur les conseils de Bautista[3]. Aguinaldo met dès le 23 juin 1898 fin au gouvernement dictatorial en instaurant un gouvernement révolutionnaire conçu par Mabini qui est composé de plusieurs ministères et d’un congrès[9]. Il convoque de plus une assemblée constituante (le congrès de Malolos) en septembre 1898 afin de doter le pays d’institutions républicaines et démocratiques[8]. Cette éphémère « dictature » servit néanmoins le camp pro-colonisation aux États-Unis pour attaquer Aguinaldo et son gouvernement[10]
Sur un plan personnel, en mettant les autres groupes d’insurgés devant le fait accompli, Aguinaldo s’impose comme le chef incontestable de la révolution[3].
Aucun État ne reconnaît l’indépendance et la Première République. Au contraire, l’Espagne cède sa colonie aux États-Unis par le traité de Paris. Les Américains s’assurent le contrôle de l’archipel par une guerre brutale où ils engagent plus de cent mille soldats. Ainsi, cette première période d’indépendance ne dure que de 1898 à 1901[11].
Deux jours de l’indépendance
[modifier | modifier le code]La déclaration du 12 juin 1898 ne doit pas être confondu avec l’indépendance du qui marque la fin de la colonisation américaine. L’existence de ces deux jours de l’indépendance a créé des débats pour le choix de la fête nationale ; en vertu de l’acte républicain 4166 signée en 1964, c’est finalement la commémoration du 12 juin 1898, la première des deux indépendances, qui a été retenue comme Jour de l’indépendance[12],[13].
Références
[modifier | modifier le code]- (en) Ronald E. Dolan, « Spanish-American War », dans Philippines: A Country Study, GPO for the Library of Congress, (lire en ligne).
- (en) David J. Silbey, A War of Frontier and Empire : The Philippine-American War, 1899-1902, New-York, Hill and Wang, , 1re éd., 254 p. (ISBN 978-0-8090-7187-6), p. 40-43.
- (en) Renato Constantino et Letizia R. Constantino, A History of the Philippines, NYU Press, , 459 p. (ISBN 978-0-85345-394-9, lire en ligne), p. 205-207.
- Marc Mangin, Les Philippines, Karthala Editions, , 218 p. (ISBN 978-2-86537-350-5, lire en ligne), p. 85-86.
- (en) Sonia M. Zaide, The Philippines : A Unique Nation, All-Nations Publishing, , 463 p. (ISBN 978-971-642-071-5), p. 256-260.
- (en) Teodoro A. Agoncillo et Oscar M. Alfonso, History of the Filipino People, Malaya Books, , 459 p. (ISBN 978-0-85345-394-9, lire en ligne), p. 245.
- (en) « Court set to decide on National Library pilferage of historical documents », ABS-CBN News, 26 mai 2008.
- (en) Jose Veloso Abueva, « Filipino Democracy and the American Legacy », The Annals of the American Academy of Political and Social Science, vol. 428, , p. 114-133 (lire en ligne).
- (en) Maximo M. Kalaw, The Development of Philippine Politics, Oriental Commercial, (lire en ligne), p. 115-117.
- (en) Michael Patrick Cullinane et David Ryan, U.S. Foreign Policy and the Other, Berghahn Books, , 250 p. (ISBN 978-1-78238-440-3, lire en ligne), p. 108.
- (en) Spencer C. Tucker (dir.), The Encyclopedia of the Spanish-American and Philippine-American Wars : A Political, Social, and Military History, vol. 1, ABC-CLIO, , 993 p. (ISBN 978-1-85109-951-1, lire en ligne), p. 332-335.
- « Today in Philippine history, August 4, 1964, June 12 was designated the Independence Day », kahimyang.com, 4 août 2011.
- (en) Sharon Delmendo, The Star-entangled Banner : One Hundred Years of America in the Philippines, UP Press, , 229 p. (ISBN 978-971-542-484-4, lire en ligne), p. 117-119.