Duplication du cube
En mathématiques, la duplication du cube, ou problème de Délos, est un problème géométrique classique faisant partie des trois grands problèmes de l'Antiquité, avec la quadrature du cercle et la trisection de l'angle[1]. Il consiste à construire à la règle et au compas un cube de volume double de celui d'un cube donné.
Il a été démontré que cette construction est impossible (théorème de Wantzel), en montrant que le nombre "racine cubique de 2", appelé constante de Délos, est non constructible.
Origine
[modifier | modifier le code]Le problème de Délos a son origine dans une légende rapportée entre autres par Ératosthène dans Le Platonicien et par Théon de Smyrne dans son ouvrage Exposition des connaissances mathématiques utiles pour la lecture de Platon[2],[3],[4]. Les Déliens, victimes d'une épidémie de peste, demandèrent à l'oracle de Delphes comment faire cesser cette épidémie. La réponse de l'oracle fut qu'il fallait doubler l'autel consacré à Apollon, autel dont la forme était un cube parfait. Les architectes allèrent trouver Platon pour savoir comment faire[1]. Ce dernier leur répondit que le dieu n'avait certainement pas besoin d'un autel double, mais qu'il leur faisait reproche, par l'intermédiaire de l'oracle, de négliger la géométrie.
Un développement significatif dans la recherche d'une solution au problème a été la découverte par Hippocrate de Chios qu'il équivaut à trouver deux moyennes proportionnelles entre un segment de droite et un segment de longueur double. En notation moderne, cela signifie que, étant donné des segments de longueurs a et b = 2a, la duplication du cube équivaut à trouver des segments de longueurs x et y tels que .
Ceci équivaut en effet à
- .
Postérité scientifique
[modifier | modifier le code]La question intéressa nombre de mathématiciens, par exemple Hippias d'Élis, Archytas de Tarente, Ménechme, Eudoxe de Cnide, Hélicon de Cyzique et Eutocius d'Ascalon. Plusieurs solutions furent proposées par intersection de coniques ou par intersection de figures de l'espace. Archytas, par exemple, proposa d'utiliser l'intersection entre un cylindre, un tore et un cône[5],[6].
En 1760, D'Alembert écrit qu'aucune solution plane n'a été trouvée avec la seule utilisation de la règle et du compas[7].
En 1837, Pierre-Laurent Wantzel établit un théorème donnant la forme des équations des problèmes solubles à la règle et au compas. Il démontre que 3√2 n'est pas constructible : la duplication du cube est donc impossible à réaliser à la règle et au compas. Elle est cependant possible par d'autres méthodes, telles que l'utilisation de la règle graduée et du compas, ou par pliage de papier.
Notes et références
[modifier | modifier le code]Notes
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Références
[modifier | modifier le code]- Cf. Robert Baccou, Histoire de la science grecque, de Thalès à Socrate, Paris, Aubier, , 256 p.
- Théon de Smyrne, « De l'utilité des mathématiques », Cahiers d'Histoire des Mathématiques et d'Epistémologie, IREM de Poitiers, fascicule 1, déc. 1997, p. 9.
- González Urbaneja et Mangin 2018, p. 20-21.
- Theon de Smyrne (trad. J. Dupuis), Exposition des connaissances mathématiques utiles pour la lecture de Platon, Hachette, (lire en ligne), p. 5
- IREM, Histoires de problèmes, histoire des mathématiques, ellipses, (ISBN 2-7298-9368-7), p. 99-100
- « Courbe d'Archytas », sur mathcurve.com
- D'Alembert écrit en 1760 dans son Encyclopédie à l'article Proportionnel : « Les Géomètres cherchent depuis deux mille ans une méthode pour trouver géométriquement deux moyennes proportionnelles entre deux lignes données, c'est-à-dire, en n'employant que la ligne droite et le cercle ; car du reste ce problème est abondamment résolu ; et particulièrement la résolution que l'on en donne par les sections coniques, en faisant, par exemple, qu'un cercle et une parabole s'entrecoupent suivant une certaine loi, est une solution très géométrique de ce problème. En le réduisant à une équation algébrique, il paraît impossible qu'on le résolve jamais avec le seul secours de la ligne droite et du cercle ; car on arrive toujours à une équation du troisième degré, qu'il n'est pas possible de construire avec la ligne droite et le cercle. Les anciens résolvoient ce problème méchaniquement par le moyen du mésolabe décrit par Eutocius : et plusieurs d'entr'eux ont tâché d'en donner la démonstration : d'autres, comme Ménechme, résolvoient ce problème par les lieux solides : d'autres, par des mouvements composés, comme Platon, Archytas, Pappus et Sporus : d'autres enfin, en tâtonnant, comme Héron et Apollonius de Perga. »
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
- Henri Lebesgue, Leçons sur les constructions géométriques, Paris, Gauthier-Villars, (réimpr. 2003), 318 p., chap. 1 (« La solution des problèmes fondamentaux : trisection de l'angle, duplication du cube »).
- (en) Eli Maor et Eugen Jost, Beautiful Geometry, Princeton, Princeton University Press, , 187 p. (ISBN 978-0-691-15099-4, lire en ligne), p. 81-83
- Abel Rey, L’Apogée de la science technique grecque, vol. 5 : L’essor de la mathématique, Albin Michel, coll. « L’Évolution de l'Humanité ». .
- Pedro Miguel González Urbaneja et Magali Mangin (Trad.), Le royaume des coniques : Apollonios, Barcelone, RBA Coleccionables, , 163 p. (ISBN 978-84-473-9619-1).
Articles connexes
[modifier | modifier le code]- La relation entre la construction géométrique et la théorie algébrique est développée dans « Nombre constructible ». Les démonstrations algébriques se trouvent dans « Tour d'extensions quadratiques ».
- Mésolabe
- Droite de Philon
- Histoire de la géométrie
Lien externe
[modifier | modifier le code](en) Eric W. Weisstein, « Delian Constant », sur MathWorld