Georges Focus
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Georges Focus (ou Georges Faucus) est un graveur, peintre et dessinateur français né vers 1639-1641 (ou 1644[1]) à Châteaudun et mort le 26 (ou 27) à Paris.
Membre de l'Académie royale de peinture et de sculpture, proche de Gérard Audran, il est surtout célèbre pour les dessins qu'il a réalisés alors qu'il souffrait d'une maladie psychiatrique.
Biographie
[modifier | modifier le code]Famille
[modifier | modifier le code]La famille de Focus semble avoir été modérément riche; son père possédait une boutique de laine et de serge à Paris[2].
Formation
[modifier | modifier le code]Vers 15 ans, Focus devient apprenti chez Louis Elle[2]. Il est possible qu'il ait aussi reçu des leçons du graveur Israël Silvestre[2].
Séjour à Rome
[modifier | modifier le code]Jeune artiste, Georges Focus fait partie des premiers pensionnaires envoyés à Rome par Charles Errard : il y reste au moins de 1666 à 1669[3],[2]. Il habite d'abord dans la paroisse de San Lorenzo in Lucina, quartier où résidaient beaucoup d'artistes français, puis dans la paroisse de Santo Spirito in Sassia, à la même adresse que Gérard Audran, Thomas de Saint-Vincent, Étienne Aubry et Marc Nattier[2].
Académicien
[modifier | modifier le code]Le , il remet son morceau de réception puis prête serment comme membre de l'Académie[3]. La peinture, un paysage, est encore conservée sous la Révolution française, mais elle est considérée comme perdue en 1910 par A. Fontaine. Focus participe de manière active à la vie de l'Académie jusqu'en 1681, son nom figure encore sur les listes en 1683[3],[2].
En 1679, il peint seize petits tableaux de paysage pour les appartements des ducs de Chevreuse et de Beauvilliers au Palais de Versailles, et reçoit pour cela 480 livres[3]. Il s'agissait peut-être de dessus-de-porte; ils sont considérés comme perdus[4].
Le catalogue de son œuvre gravé a été établi par Robert-Dumesnil (1836) puis par Weigert dans le cadre de l'Inventaire du fonds français de la Bibliothèque nationale (1961). Il ne compte que huit pièces, dont une suite de six estampes représentant des paysages romains, dédiée à Charles Le Brun et publiée par Girard Audran, certainement en 1678.
Enfin, on connaît des dessins, préparatoires à ces estampes (École des beaux-arts, musée de Besançon) ou non (musée du Louvre), ainsi qu'un dessin de style beaucoup plus libre à Chicago (Art Institute)[3]. L'artiste est rapidement oublié.
Folie et internement
[modifier | modifier le code]Devenu fou, interné dans l'asile des Petites Maisons, il produit vers 1694 plusieurs dizaines de dessins (Edimbourg, University Library ; Paris, coll. part.) liés à ses délires, dans lesquels ses fantasmes (il se prend pour le roi ou le pape, pense être persécuté par l'Académie, a peur de la bête du Gâtinais, etc.) prennent vie. Ils comprennent des cartouches remplis de textes contenant de nombreuses anecdotes sur sa vie, ses fréquentations et ses contemporains[3]. Ces dessins ont sans doute été récupérés par des proches de Focus; ils ont été conservés jusqu'au 21e siècle grâce à leur qualité artistique[2].
Ses contemporains auraient sans doute caractérisé sa folie de "manie"[5]; Bernard Granger, professeur de psychiatrie à l’université René Descartes, propose, avec des réserves de prudence, le diagnostic rétrospectif de trouble schizo-affectif[6].
Mort et postérité
[modifier | modifier le code]Selon Mariette, qui écrit un demi siècle après sa mort, Focus meurt aux Petites Maisons le ( selon la liste des académiciens). Jal qui a eu accès à la liste des morts des Petites Maisons réfute toutefois les circonstances de ce décès (erreur de lieu ou de date - il n'en trouve pas trace dans les registres)[réf. nécessaire]. L’œuvre retombe dans l'oubli jusqu'à la fin du XXe siècle. En 2010, est retrouvée à Paris, dans des archives familiales, une boîte conservée depuis 1780 contenant un ensemble de feuilles signées Focus[7]. Une exposition au Palais des Beaux Arts de Paris permet, en 2018, de prendre la mesure des «écritures dessinées » d'un artiste fou du XVIIe siècle[7].
Style
[modifier | modifier le code]Gravures
[modifier | modifier le code]Ses estampes représentent souvent des paysages dans un style italien proche de celui de Gaspard Dughet, Francisque Millet ou Étienne Allegrain.
Dessins préparatoires pour les gravures
[modifier | modifier le code]- Paysage animé de deux personnages marchant sur la droite, plume, encre brune. H. 0,258 ; L. 0,349 m[8]. Paris, Beaux-Arts de Paris.
- Paysage animé de trois personnages discutant au premier plan droit, plume, encre brune. H. 0,255 ; L. 0,358 m[9]. Paris, Beaux-Arts de Paris. Ces deux dessins de paysage sont préparatoires à la troisième et quatrième planche de la suite gravée des Diverses Veuës d'Italie, éditée par Gérard Audran en 1678. Focus adopte une technique au trait qui permet de rendre compte du moindre détail dès l'étude où le feuillage de chaque arbre est précisé, l'attitude des figures arrêtée, l'ensemble fixé pour l'épreuve gravée[10].
Dessins d'internement
[modifier | modifier le code]Ses dessins d'internement évoquent les artistes de l’art brut, comme Wolfli ou Aloïse Corbaz[7].
Publication
[modifier | modifier le code]- Diverses Veuës d’Italie, 1678, éditeur : Gérard Audran.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Christian Michel, L'Académie royale de peinture et de sculpture. La naissance de l'école française, Genève, Droz, 2012. Il se fonde sans doute sur le fait que Focus dit être allé à Rome à 22 ans et que cet événement se passe en 1666
- C. Michel, "La vie de Georges Focus", in E. Brugerolles (éd.), Georges Focus. la folie d'un peintre de Louis XIV (Paris, 2018), p. 35-47.
- Emmanuelle Brugerolles et David Guillet, « Georges Focus (v. 1639/1640-1708), peintre de paysage de l'Académie royale, mort fou "renfermé aux petites maisons" », Revue du Louvre, 1993, vol. 1, p. 28-39
- E. Brugerolles, Focus paysagiste, in E. Brugerolle (éd.), Georges Focus. La folie d'un peintre de Louis XIV (Paris, 2018), p. 49-54.
- J. Coste, "Focus et les Petites Maisons", in E. Brugerolles (éd.), Georges Focus. la folie d'un peintre de Louis XIV (Paris, 2018), p. 91-95.
- B. Granger, "La folie de Georges Focus : tentative de diagnostic rétrospectif", in E. Brugerolles (éd.), Georges Focus. la folie d'un peintre de Louis XIV (Paris, 2018), p. 97-103.
- Sophie Cachon, « Georges Focus, un artiste fou du temps de Louis XIV », Telerama.fr, (lire en ligne, consulté le )
- « Paysage animé de deux personnages, Georges Focus », sur Cat'zArts
- « Paysage animé de trois personnages, Georges Focus », sur Cat'zArts
- Brugerolles, Emmanuelle, Le Dessin en France au XVIIe siècle dans les collections de l’Ecole des Beaux-Arts, Paris, Ecole nationale supérieure des beaux-arts éditions, 2001, p. 336-341, Cat. 89-90.
Annexes
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Auguste Jal, Dictionnaire critique de biographie et d'histoire. Errata et supplément pour tous les dictionnaires historiques d'après des documents authentiques inédits, Henri Plon imprimeur-éditeur, Paris, 1867, p. 585 (lire en ligne).
- Pierre-Jean Mariette, Abecedario de P. J. Mariette, J.-B. Dumoulin, Paris, 1853-1854, tome 2, COL-ISAC, p. 235, 251 (lire en ligne).
- Emmanuelle Brugerolles (sous la direction de), Georges Focus. La Folie d’un peintre de Louis XIV, Paris, Beaux-Arts de Paris éditions, , 400 p. (ISBN 978-2-8405-6544-4).
- A. D’Hautcourt, Microhistory and Craziness : Review of Georges Focus. La folie d’un peintre de Louis XIV ed. by E. BRUGEROLLE, Journal of Inquiry and Research 110 (Septembre 2019), p. 233-237 (doi).
- R. Wellington, [PDF] c.r. du catalogue éd. par Brugerolles, H-France Review 19, 206 (Octobre 2019).
Liens externes
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- Ressources relatives aux beaux-arts :
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :
- Les dessins de l’Université d’Édimbourg
- Le Monde : Exposition : les accès de folie de Georges Focus
- Bertrand Raison, Les écritures dessinées de Georges Focus, Revue des Deux Mondes ()